Nations Unies

Rapport du Comité des droits des personnes handicapées

Dix-septième session (20 mars-12 avril 2017)

Dix-huitième session (14-31 août 2017)

Dix-neuvième session (14 février-9 mars 2018)

Vingtième session (27 août-21 septembre 2018)

Assemblée générale

Documents officiels

Soixante-quatorzième session

Supplément n o 55

A/74/55

Assemblée générale

Documents officiels

Soixante-quatorzième session

Supplément n o 55

Rapport du Comité des droits des personnes handicapées

Dix-septième session (20 mars-12 avril 2017)

Dix-huitième session (14-31 août 2017)

Dix-neuvième session (14 février-9 mars 2018)

Vingtième session (27 août-21 septembre 2018)

Nations Unies • New York, 2019

Note

Les cotes des documents de l’Organisation des Nations Unies se composent de lettres majuscules et de chiffres. La simple mention d’une cote dans un texte signifie qu’il s’agit d’un document de l’Organisation.

Table des matières

Page

I.Questions d’organisation et questions diverses1

A.États parties à la Convention1

B.Séances et sessions1

C.Composition du Comité et participation1

D.Élection du Bureau1

E.Élaboration d’observations générales1

F.Déclarations du Comité2

G.Accessibilité de l’information2

H.Adoption du rapport2

II.Méthodes de travail3

III.Examen des rapports soumis en application de l’article 35 de la Convention3

IV.Activités menées au titre du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées3

V.Coopération avec les organes compétents4

A.Coopération avec d’autres organismes des Nations Unies et départements de l’ONU4

B.Coopération avec les autres organes concernés4

VI.Conférence des États parties à la Convention4

Annexe

Bilan des dix premières années de travail du Comité des droits des personnes handicapées5

I.Questions d’organisation et questions diverses

A.États parties à la Convention

1.Au 21 septembre 2018, date de clôture de la vingtième session du Comité des droits des personnes handicapées, 177 États étaient parties à la Convention relative aux droits des personnes handicapées et 92 au Protocole facultatif s’y rapportant. La liste des États parties à ces instruments peut être consultée sur la site Web du Bureau des affaires juridiques du Secrétariat.

B.Séances et sessions

2.Le Comité a tenu sa dix-septième session du 20 mars au 12 avril 2017, sa dix‑huitième session du 14 au 31 août 2017, sa dix-neuvième session du 14 février au 9 mars 2018 et sa vingtième session du 27 août au 21 septembre 2018. La septième session de son groupe de travail de présession s’est tenue du 13 au 20 mars 2017, sa huitième session du 4 au 8septembre 2017, sa neuvième session du 12 au 16mars 2018 et sa dixième session du 24 au 27septembre 2018. Toutes les sessions du Comité ont eu lieu à Genève.

C.Composition du Comité et participation

3.Le Comité est composé de 18 experts indépendants. La liste de ses membres, avec mention de la durée de leur mandat, peut être consultée sur la page Web du Comité.

D.Élection du Bureau

4.Le 20 mars 2017, à la dix-septième session du Comité, les membres ci-après ont été élus pour un mandat de deux ans :

Présidente :Theresia Degener (Allemagne)

Vice-Présidents :Danlami Umaru Basharu (Nigéria)

Coomaravel Pyaneandee (Maurice)

Damjan Tatić (Serbie)

Rapporteur :Kim Hyung-Shik (République de Corée)

E.Élaboration d’observations générales

5.À sa dix-huitième session, le Comité a adopté son observation générale no5 (2017) sur l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société. À la même session, il a tenu une journée de débat général sur le droit des personnes handicapées à l’égalité et à la non-discrimination. À sa dix-neuvième session, il a adopté son observation générale no 6 (2018) sur l’égalité et la non-discrimination. À la même session, il a approuvé un projet d’observation générale sur le paragraphe 3 de l’article 4 et le paragraphe 3 de l’article 33 de la Convention. À la onzième session de la Conférence des États parties à la Convention, qui s’est déroulée à New York, il a tenu une journée de débat général sur le paragraphe 3 de l’article 4 et le paragraphe 3 de l’article 33. À sa vingtième session, il a adopté son observation générale no 7 (2018) sur la participation des personnes handicapées, y compris des enfants handicapés, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, à la mise en œuvre de la Convention et au suivi de son application.

F.Déclarations du Comité

6.À sa dix-septième session, le Comité a adopté une déclaration sur la question d’élire les membres du Comité en veillant à assurer une représentation égale des hommes et des femmes et une répartition géographique équitable, et une déclaration sur la situation des personnes handicapées touchées par les catastrophes survenues en Colombie, en Équateur et au Pérou. Il a également adopté une déclaration sur la question du handicap dans le contexte des déplacements de grande ampleur de réfugiés et de migrants, qui a été publiée conjointement avec le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. À sa dix-neuvième session, il a adopté une déclaration sur la promotion d’une urbanisation inclusive et une déclaration sur la Journée internationale de la langue des signes. Le Comité et l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme ont adopté une déclaration conjointe sur le suivi de l’application de l’article 19 de la Convention au niveau national. À sa vingtième session, le Comité a adopté une déclaration conjointe avec le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, sur les moyens de garantir la santé sexuelle et procréative et les droits de toutes les femmes, en particulier des femmes handicapées. Il a adopté une déclaration dans laquelle il appelle tous les États parties à la Convention qui sont aussi membres du Conseil de l’Europe à s’opposer à l’adoption du projet de protocole facultatif se rapportant à la Convention pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine. Il a approuvé la déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme, présentée par un groupe composé de présidents, de vice-présidents et de membres d’organes conventionnels, et le Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l’homme.

G.Accessibilité de l’information

7.Des services de transcription simultanée ont été mis à disposition pour toutes les séances publiques et pour certaines séances privées du Comité, parfois grâce au concours d’organisations de personnes handicapées. Les séances publiques ont été retransmises sur Internet et une interprétation en langue des signes internationale a été fournie. Une interprétation en langue des signes nationale a été assurée pendant les dialogues avec 14 États parties à la Convention. Une interprétation a également été assurée en langue des signes russe pour toutes les séances publiques et privées tenues au cours des dix-septième à dix-neuvième sessions. Des documents en braille ont été mis à la disposition des membres du Comité qui en avaient fait la demande. Grâce à un projet mené en collaboration avec l’Office des Nations Unies à Genève, 14 documents de base du Comité ont été établis en anglais simplifié et affichés sur le site Web du Comité, avant la tenue de sa vingtième session. À la même session, il a été décidé de faire établir la version en anglais simplifié de cinq documents de référence du Comité. Le Comité a eu des échanges avec l’Équipe spéciale du Conseil des droits de l’homme sur le service de secrétariat, l’accessibilité des personnes handicapées et l’utilisation des technologies de l’information, et avec l’Envoyée spéciale du Secrétaire général sur le handicap et l’accessibilité, en vue de promouvoir l’accessibilité à l’échelle du système des Nations Unies.

H.Adoption du rapport

8.À sa 473e séance, le Comité a adopté son cinquième rapport biennal à l’Assemblée générale et au Conseil économique et social, portant sur ses dix-septième à vingtième sessions.

II.Méthodes de travail

9.À sa dix-neuvième session, le Comité a décidé de modifier ses méthodes de travail de façon à préciser davantage la question de la confidentialité concernant les tiers invités à participer à ses séances privées. À sa vingtième session, il a adopté une nouvelle méthode visant à faire le meilleur usage possible du temps disponible pour ses dialogues avec les États parties et à rendre ces dialogues plus productifs, conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale sur le renforcement et l’amélioration du fonctionnement de l’ensemble des organes conventionnels des droits de l’homme.

III.Examen des rapports soumis en application de l’article 35 de la Convention

10.Le Comité a adopté des observations finales concernant les rapports initiaux soumis par les États parties suivants : Afrique du Sud (CRPD/C/ZAF/CO/1), Algérie (CRPD/C/DZA/CO/1), Arménie (CRPD/C/ARM/CO/1), Bosnie-Herzégovine (CRPD/C/BIH/CO/1), Bulgarie (CRPD/C/BGR/CO/1), Canada (CRPD/C/CAN/CO/1), Chypre (CRPD/C/CYP/CO/1), ex-République yougoslave de Macédoine (CRPD/C/MKD/CO/1), Fédération de Russie (CRPD/C/RUS/CO/1), Haïti (CRPD/C/HTI/CO/1), Honduras (CRPD/C/HND/CO/1), Iran (République islamique d’) (CRPD/C/IRN/CO/1) Jordanie (CRPD/C/JOR/CO/1), Lettonie (CRPD/C/LVA/CO/1), Luxembourg (CRPD/C/LUX/CO/1), Malte (CRPD/C/MLT/CO/1), Maroc (CRPD/C/MAR/CO/1), Monténégro (CRPD/C/MNE/CO/1), Népal (CRPD/C/NPL/CO/1), Oman (CRPD/C/OMN/CO/1), Panama (CRPD/C/PAN/CO/1), Philippines (CRPD/C/PHL/CO/1), Pologne (CRPD/C/POL/CO/1), République de Moldova (CRPD/C/MDA/CO/1), Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (CRPD/C/GBR/CO/1), Seychelles (CRPD/C/SYC/CO/1), Slovénie (CRPD/C/SVN/CO/1) et Soudan (CRPD/C/SDN/CO/1).

IV.Activités menées au titre du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées

11.Au cours de la période considérée, le Comité a enregistré 18 communications. Il a conclu que des violations avaient été commises dans huit affaires : X. c. République-Unie de Tanzanie (CRPD/C/18/D/22/2014), Makarov c. Lituanie (CRPD/C/18/D/30/2015),Given c. Australie (CRPD/C/19/D/19/2014), Bacher c. Autriche (CRPD/C/19/D/26/2014), Y c. République-Unie de Tanzanie (CRPD/C/20/D/23/2014), J. H. c. Australie (CRPD/C/20/D/35/2016), Domina et Bendtsen c. Danemark (CRPD/C/20/D/39/2017) et Al Adam c. Arabie saoudite (CRPD/C/20/D/38/2016). Il a déclaré quatre communications irrecevables : D. R. c. Australie (CRPD/C/17/D/14/2013), L. M. L. c. Royaume-Uni de Grande-Bretagne et dIrlande du Nord (CRPD/C/17/D/27/2015), D. L. c. Suède (CRPD/C/17/D/31/2015) et E. O. J . et consorts c. Suède (CRPD/C/18/D/28/2015). Il a décidé de cesser l’examen de deux communications : Rodríguez Arias c. Espagne (CRPD/C/17/D/33/2015) et M. R. c. Australie (CRPD/C/18/D/16/2013).

12.À sa dix-septième session, le Comité a décidé de continuer d’appliquer la procédure de suivi concernant les communications Nyusti et Takács c. Hongrie (CRPD/C/9/D/1/2010), Budjosó et consorts c. Hongrie (CRPD/C/10/D/4/2011)et F. c. Autriche (CRPD/C/14/D/21/2014), et d’adresser à nouveau des lettres aux États parties concernés pour demander des renseignements complémentaires sur les mesures prises pour donner suite à ses recommandations. À sa dix-neuvième session, il a décidé de continuer d’appliquer la procédure de suivi à toutes les communications et d’envoyer des lettres de suivi aux États parties concernés pour leur donner des orientations sur ce qu’il attendait d’eux sur le plan de la mise en œuvre de ses recommandations.

13.Le Comité a mené des activités au titre des articles 6 et 7 du Protocole facultatif (procédure d’enquête) concernant deux États parties à la Convention. À sa dix-huitième session, il a adopté le rapport d’enquête portant sur un seul État partie et examiné les observations fournies par les deux États parties.

V.Coopération avec les organes compétents

A.Coopération avec d’autres organismes des Nations Unies et départements de l’ONU

14.Le Comité a continué d’interagir avec d’autres organes créés en vertu d’instruments relatifs aux droits de l’homme, et avec des institutions et programmes des Nations Unies, notamment en ce qui concerne l’adoption d’une approche du handicap fondée sur les droits dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il a régulièrement tenu des réunions avec la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées.

B.Coopération avec les autres organes concernés

15.Le Comité a poursuivi sa collaboration avec les institutions nationales des droits de l’homme, les cadres indépendants de suivi et les organisations régionales pendant la période couverte par le rapport. À sa dix-neuvième session, pour la première fois, il a organisé un débat annuel au cours duquel il a donné aux institutions nationales des droits de l’homme la possibilité d’échanger leurs pratiques concernant le suivi de la mise en œuvre de l’article 19 de la Convention et la participation des personne handicapées aux activités de suivi au niveau national. Il a continué d’accorder une grande importance à la participation des organisations de personnes handicapées et des organisations de la société civile à ses activités.

16.À sa vingtième session, en collaboration avec la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées et l’Envoyée spéciale sur le handicap et l’accessibilité, il a également organisé plusieurs activités pour célébrer sa dixième année de travaux, auxquelles il a participé.

VI.Conférence des États parties à la Convention

17.Le Comité a été officiellement représenté par sa Présidente aux dixième et onzième sessions de la Conférence des États parties à la Convention, tenues à New York en 2017 et 2018, respectivement.

Annexe

Bilan des dix premières années de travail du Comitédes droits des personnes handicapées

I.Introduction

1.La Convention relative aux droits des personnes handicapées est l’instrument international relatif aux droits de l’homme qui a été le plus rapidement ratifié puisqu’en septembre 2018, elle avait été signée par 161 États et ratifiée par 177 États. Le Comité des droits des personnes handicapées suit la mise en œuvre de la Convention et du Protocole facultatif s’y rapportant. Entre février 2009 et septembre 2018, il a tenu 20 sessions, à raison de deux par an. Il organise chaque année, à New York, la Conférence des États parties à la Convention, au cours de laquelle les États parties examinent des questions liées à la mise en œuvre. Les travaux du Comité sont complexes et variés. Le présent rapport donne un aperçu de ses dix premières années de travaux et rappelle l’interprétation idoine des dispositions de la Convention.

II.Travaux du Comité

A.Observations générales et directives

2.Le Comité formule des observations générales afin de guider les États parties dans la mise en œuvre de la Convention. Il en a adopté sept, à savoir : l’observation générale no 1 (2014) sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité, l’observation général no 2 (2014) sur l’accessibilité, l’observation générale no 3 (2016) sur les femmes et les filles handicapées, l’observation générale no 4 (2016) sur le droit à l’éducation inclusive, l’observation générale no 5 (2017) sur l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société, l’observation générale no 6 (2018) sur l’égalité et la non-discrimination, et l’observation générale no 7 (2018) sur la participation des personnes handicapées, y compris des enfants handicapés, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, à la mise en œuvre de la Convention et au suivi de son application.

3.Le Comité adopte également des « directives », qui sont un outil précieux pour interagir avec lui et pour comprendre la Convention. En septembre 2018, le Comité avait adopté des directives concernant l’établissement des rapports (CRPD/C/2/3 et A/66/55, annexe V) et des directives révisées sur l’établissement des rapports périodiques (CRPD/C/3), des directives sur la présentation des communications (CRPD/C/5/3/Rev.1), des directives pour la participation des organisations de personnes handicapées et des organisations de la société civile aux travaux du Comité (CRPD/C/11/2, annexe II), des directives sur la procédure de suivi de ses observations finales (CRPD/C/12/2, annexe II), des directives sur le droit à la liberté et à la sécurité des personnes handicapées (A/72/55, annexe) et des lignes directrices sur les cadres indépendants de surveillance (CRPD/C/1/Rev.1, annexe).

B.Examen des rapports présentés par les États parties

4.Le Comité examine les rapports soumis par les États parties, conformément à l’article 35 de la Convention, et adopte des observations finales et formule des recommandations pour une meilleure application de la Convention. Il a examiné 75 rapports, dont un soumis par une organisation d’intégration régionale, l’Union européenne. Il a établi des listes de points et des observations finales pour chacun des rapports examinés.

5.Le premier examen de tous les États parties par le Comité est en cours. L’examen périodique qui suivra ce premier examen pourra être fait selon la « procédure simplifiée de présentation des rapports » que le Comité a adoptée en 2013. Dans leurs rapports périodiques, les États parties font rapport de la suite donnée aux recommandations contenues dans les observations finales du Comité et des faits nouveaux.

C.Suivi des observations finales

6.Dans ses observations finales, le Comité répertorie les sujets de préoccupation sur lesquels il recommande aux États parties de se concentrer. Dans le cadre de la procédure de suivi décrite dans ses méthodes de travail (CRPD/C/5/4, par. 19 à 22) et dans ses directives sur la procédure de suivi des observations finales (CRPD/C/12/2, annexe II), il peut demander aux États parties de fournir, par écrit, des renseignements sur les mesures qui ont été prises pour donner suite aux recommandations formulées.

7.Le Comité s’est penché sur les activités de suivi ayant trait aux observations finales à ses treizième et dix-neuvième sessions. Le temps alloué à l’examen de ces activités étant limité, les rapports de suivi seront examinés une fois par an ou une fois tous les deux ans.

III.Activités relevant du Protocole facultatif

A.Constatations relatives aux communications

8.Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention dispose que tout État partie à la Convention et au Protocole facultatif reconnaît que le Comité a compétence pour recevoir et examiner les communications présentées par des particuliers ou groupes de particuliers ou au nom de particuliers ou groupes de particuliers relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d’une violation par cet État partie des dispositions de la Convention. En juillet 2018, le Comité avait examiné 24 communications. Il avait décidé de cesser l’examen de deux d’entre elles qu’il avait jugées irrecevables. Il devait encore examiner 22 communications.

9.La majorité des communications portaient sur des questions liées à la discrimination, à l’accessibilité, à l’accès à la justice et à la participation à la vie politique et publique. Les autres violations signalées concernaient les articles 12, 14 à 17, 19, 21 et 25 à 27 de la Convention.

B.Procédure de suivi de la suite donnée aux constatations

10.Le Comité suit la mise en œuvre de ses constatations relatives aux communications individuelles et, en mars 2018, avait adopté neuf rapports intérimaires sur la suite donnée aux constatations, qui présentent les mesures que les États devraient prendre pour donner pleinement effet à ses constatations. Ces rapports décrivent les mesures prises par les États parties et contiennent des commentaires des auteurs ainsi que des recommandations du Rapporteur spécial chargé du suivi des constatations.

11.À sa seizième session, le Comité avait suivi la mise en œuvre de neuf constatations. Il avait décidé de cesser la procédure de suivi de deux cas : dans un cas, les mesures prises par l’État étaient satisfaisantes (X c. Argentine, CRPD/C/11/D/8/2012) et dans l’autre, elles étaient insuffisantes (H. M. c. Suède, CRPD/C/7/D/3/2011). Dans un autre cas encore, il avait cessé la procédure de suivi concernant une recommandation particulière mais pas celle concernant la mise en œuvre de ses recommandations générales (Gröninger et consorts c. Allemagne, CRPD/C/D/2/2010).

C.Procédure d’enquête

12.Le Comité a mené deux enquêtes en application de l’article 6 du Protocole facultatif. L’enquête visant le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (CRPD/C/15/4) portait sur des violations supposées des articles 19, 27 et 28 de la Convention et les effets néfastes de la réforme de l’aide sociale sur les droits des personnes handicapées. L’enquête visant l’Espagne (CRPD/C/ESP/IR/1) portait sur des violations supposées de l’article 24 de la Convention et l’allégation selon laquelle les personnes handicapées seraient, d’un point de vue structurel, exclues et mises au banc de l’enseignement ordinaire en raison de leur handicap. À l’issue de ces enquêtes, le Comité a conclu qu’il existait des informations fiables permettant de considérer que des violations graves ou systématiques de la Convention avaient été commises par les deux États parties.

IV.Aperçu de la jurisprudence du Comité

A.Comprendre les droits des personnes handicapées

1.Modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme

13.La Convention reflète un changement dans la manière de voir le handicap : d’un modèle médical et philanthropique qui était fondé sur les déficiences individuelles en tant que cause d’exclusion sociale et les personnes handicapées en tant que sujets à protéger, on est passé à un modèle fondé sur les droits de l’homme. Le préambule et l’article premier de la Convention traduisent une nouvelle définition du handicap en tant que construction sociale où ce sont les obstacles érigés par la société, et non les déficiences individuelles, qui sont à l’origine de l’exclusion des personnes handicapées.

14.Les États parties doivent délaisser ce modèle médical et adopter un modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme. La mauvaise compréhension et la mise en œuvre insuffisante de ce modèle sont la principale cause d’exclusion des personnes handicapées. Les États parties devraient adopter ce modèle et introduire ou appliquer une législation et organiser des formations sur ce sujet.

15.Les États parties devraient comprendre en quoi consiste le modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme et l’adopter. Ce modèle « n’autorise pas l’exclusion des personnes handicapées [de la société] pour quelque raison que ce soit, y compris s’agissant de la nature et de la quantité des services d’appui dont elles ont besoin ». Ceci a été rappelé dans les constatations du Comité concernant la communication S. C. c. Brésil (CRPD/C/12/D/10/2013) et dans l’observation générale no 6, dans lesquelles le Comité établit qu’un modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme doit tenir compte de la diversité des personnes handicapées, puisque le handicap [est] une composante parmi d’autres de l’identité (par. 9).

2.Mise en œuvre d’une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme

16.Le Comité applique une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme, qui est axée sur les personnes handicapées, qu’elle considère comme des titulaires de droits à part entière. Il n’est pas toujours facile de faire la distinction entre approche et modèle, deux concepts liés puisque sans modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme, les personnes handicapées ne sont pas reconnues en tant que titulaires de droits à part entière. Les États parties doivent adopter une approche fondée sur les droits de l’homme lorsqu’ils appliquent les dispositions de la Convention. Ils doivent promouvoir, protéger et réaliser les droits de l’homme des femmes et des filles handicapées dans l’esprit de cette approche, ce qui suppose d’encourager la participation des femmes handicapées aux processus publics de décision. Ils devraient définir des critères et des procédures d’admissibilité régissant l’accès aux services d’appui de façon non discriminatoire et selon une approche fondée sur les droits de l’homme.

17.Tant dans ses observations finales que dans les directives révisées sur l’établissement des rapports périodiques de 2016, le Comité évoque la nécessité de mettre en œuvre la Convention selon une approche fondée sur les droits de l’homme. Cette approche devrait également être adoptée dans le cadre des efforts faits pour réaliser les objectifs de développement durable.

B.Principales obligations des États parties

1.Obligations générales (art. 4)

18.Les obligations générales ont trait aux devoirs suivants : devoir de respecter les droits, y compris le devoir de modifier les lois existantes qui sont discriminatoires envers les personnes handicapées et de s’abstenir de toute décision ou pratique contraire à la Convention, devoir de protéger les droits, y compris le devoir de prendre les mesures appropriées pour éliminer la discrimination fondée sur le handicap pratiquée par toute personne, organisation ou entreprise privée, et devoir de réaliser les droits, y compris le devoir d’adopter toutes les mesures appropriées d’ordre législatif, administratif ou autre nécessaires pour mettre en œuvre les droits inscrits dans la Convention.

2.Réalisation progressive des droits économiques, sociaux et culturels (art. 4, par. 2)

19.Les États parties doivent s’engager à agir, au maximum des ressources dont ils disposent, en vue d’assurer progressivement le plein exercice des droits économiques, sociaux et culturels. Dans leur rapport initial, les États parties devraient préciser quels droits ils entendent réaliser progressivement et lesquels ils s’engagent à réaliser immédiatement. Ils devraient s’attacher à ne pas laisser les périodes d’instabilité économique et financière entraver le plein exercice des droits des personnes handicapées (A/66/55, annexe IX, par. 6).

20.La réalisation progressive signifie que les États parties ont l’obligation précise et constante d’œuvrer aussi rapidement et efficacement que possible pour parvenir au plein exercice des droits en question, conformément aux objectifs généraux de la Convention. Elle ne s’applique pas aux obligations dont les États parties doivent immédiatement s’acquitter, comme celles qui découlent de l’article 12, et au devoir d’aménagement raisonnable. Les États parties ont l’obligation fondamentale minimum de respecter, au moins, l’essentiel de chaque élément du droit en question.

21.La réalisation progressive suppose que ne soit prise aucune mesure régressive, c’est à dire aucune mesure qui priverait les personnes handicapées de droits existants. Lorsqu’ils prennent des mesures régressives, les États parties doivent démontrer qu’ils l’ont fait après avoir mûrement pesé toutes les autres solutions possibles et que ces mesures sont pleinement justifiées dans le contexte de l’utilisation au maximum des ressources dont ils disposent (CRPD/C/15/4, par. 46).

3.Application et suivi au niveau national (art. 33)

22.Le Comité a expliqué comment suivre l’application de certains articles de la Convention, comme les articles 9 (accessibilité), 19 (autonomie de vie et inclusion dans la société) et 24 (éducation inclusive), notamment dans ses lignes directrices sur les cadres indépendants de surveillance et leur participation aux travaux du Comité (CRPD/C/1/Rev.1, annexe). Les cadres de surveillance devant être indépendants, les institutions nationales des droits de l’homme jouent, de fait, un rôle essentiel dans la mise en œuvre de la Convention et dans le suivi de son application. Le Comité a tenu des réunions avec des institutions nationales des droits de l’homme et des mécanismes nationaux indépendants de suivi (voir, par exemple, CRPD/C/12/2, annexe V), et les a encouragés à participer à ses travaux à toutes les étapes de la procédure d’établissement de rapports, et dans le contexte des journées de débat général, des observations générales, des communications et des procédures d’enquête menées en application du Protocole facultatif et aux activités de renforcement des capacités.

4.Sensibilisation (art. 8)

23.La sensibilisation est une condition de l’application effective de la Convention. Il est nécessaire de faire mieux connaître leurs droits aux personnes handicapées et d’y sensibiliser les professionnels et le grand public afin de prévenir et d’éliminer la discrimination, et de lutter contre les stéréotypes, les préjugés et les pratiques néfastes, notamment les croyances traditionnelles profondément ancrées, les attitudes dangereuses, le harcèlement, le cyberharcèlement, les crimes de haine et les propos discriminatoires.

24.Dans toutes ses observations générales, le Comité aborde la question de la sensibilisation. Il a été établi qu’une prise de conscience insuffisante ou inexistante, est l’un des facteurs pouvant conduire à un manque d’accessibilité et à la discrimination structurelle ou systémique fondée sur des stéréotypes, des idées fausses, des préjugés et des pratiques néfastes à l’égard des personnes handicapées. Il est essentiel de former toutes les parties prenantes concernées aux droits des personnes handicapées et à la Convention, notamment les droits à l’accessibilité et à l’aménagement raisonnable. Les activités de sensibilisation devraient être menées en coopération avec les organisations de personnes handicapées. Les médias devraient présenter les personnes handicapées en ayant à cœur de respecter les objectifs de la Convention et de modifier les préjugés à l’égard de ces personnes.

5.Statistiques et collecte des données (art. 31)

25.Afin de mettre en œuvre et de suivre l’application des différents articles de la Convention, il est essentiel que les États parties collectent et analysent des données ventilées et des statistiques. Les États parties devraient collecter, au moyen d’enquêtes et d’autres formes d’analyse, des données multiples, y compris des statistiques, des témoignages et des indicateurs. Les données devraient être systématiquement ventilées par handicap et par catégories intersectorielles, y compris l’âge, le sexe et d’autres facteurs pertinents. Le Comité a estimé dans ses recommandations que, parmi ces facteurs pertinents, figuraient les données relatives à la race, à l’appartenance ethnique, à l’appartenance à une communauté autochtone, à la religion, au statut migratoire, à la situation géographique ou au lieu de résidence, au statut socioéconomique, à la situation professionnelle, aux revenus et à l’orientation sexuelle. Une distinction devrait être faite selon le handicap, le genre, le sexe, l’identité de genre, l’origine ethnique, la religion, l’âge ou d’autres éléments constitutifs de l’identité. Des organisations de personnes handicapées devraient participer à toutes les étapes de la collecte de données, y compris l’élaboration du modèle de collecte, l’analyse et la diffusion des données. Les États parties devraient utiliser le questionnaire et les outils élaborés par le Groupe de Washington sur les statistiques des incapacités afin de collecter des statistiques sur le handicap et de pouvoir les comparer.

6.Coopération internationale (art. 32)

26.La coopération internationale devrait servir à promouvoir les droits des personnes handicapées et la mise en œuvre de la Convention, ainsi que l’accessibilité et la conception universelle. Elle peut aussi servir à établir des normes d’accessibilité, en facilitant la collaboration entre les États parties, les organisations internationales et les organismes, et être un moyen d’échanger des informations, un savoir-faire et de bonnes pratiques. Tous les efforts de coopération internationale doivent être inclusifs et accessibles aux personnes handicapées et s’inspirer de la Convention.

27.Les mesures en faveur de la coopération internationale prises par les États parties doivent être conformes à la Convention. Les fonds publics ne sauraient être utilisés pour perpétuer les inégalités. Les investissements et les projets entrepris dans le cadre de la coopération internationale ne doivent pas contribuer à maintenir des pratiques néfastes pour les personnes handicapées. Les États parties doivent veiller à ce que les investissements faits après une catastrophe ne servent pas à reconstruire des structures qui entravent l’inclusion des personnes handicapées, comme des institutions spécialisées.

C.Rôle des personnes handicapées et des organisations qui les représentent

1.Participation des personnes handicapées à l’application et au suivi de la Convention au niveau national (art. 4, par. 3, et 33, par. 3)

28.Les personnes handicapées jouent un rôle fondamental dans l’application et le suivi de la Convention, ainsi que dans la promotion de leurs droits. Les États parties doivent consulter et faire participer les personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, à la conception, à la mise en œuvre et au suivi des mesures ayant une incidence sur leur vie, y compris à l’élaboration et à l’application des lois, des politiques et de tout autre processus décisionnel ayant trait à certains domaines portant sur des questions qui les concernent, et au suivi de la Convention. Les organisations de personnes handicapées sont considérées comme telles lorsqu’elles sont constituées majoritairement de personnes handicapées − au moins la moitié de leurs membres − et qu’elles sont régies, menées et dirigées par des personnes handicapées.

29.Les États parties doivent s’assurer que des personnes présentant des handicaps divers participent à la mise en œuvre et au suivi de l’application de la Convention (A/66/55, annexe IX, par. 4). Ils doivent encourager la participation des organisations de femmes handicapées au-delà des seuls organes et mécanismes consultatifs spécifiquement axés sur le handicap, car celles-ci sont généralement sous-représentées dans le mouvement de défense des intérêts des personnes handicapées et se heurtent à de nombreux obstacles à leur participation aux processus décisionnels publics.

30.Les responsables de l’élaboration des politiques à tous les niveaux doivent consulter et faire participer activement tout l’éventail des personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, y compris les organisations de femmes handicapées, de personnes âgées handicapées, d’enfants handicapés, de personnes présentant des handicaps psychosociaux ou intellectuels. Ces organisations représentent la grande diversité des personnes handicapées dans la société, y compris, outre les personnes susmentionnées, les personnes autistes, les personnes ayant une maladie génétique ou neurologique, les personnes ayant une maladie chronique et rare, les personnes atteintes d’albinisme, les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes, les peuples autochtones, les ruraux, les victimes des conflits armés et les personnes appartenant à une minorité ethnique ou issues de l’immigration.

31.Les organisations de personnes handicapées devraient participer à l’élaboration, à l’application et au suivi des normes d’accessibilité aux niveaux national et international, à l’élaboration d’une politique et stratégies relative à l’égalité à la mise en œuvre de mesures d’action positive particulières à la conception de stratégies de désinstitutionalisation, y compris des plans de transition, à la mise au point de services d’appui et à l’allocation de ressources à ces services d’appui dans la société, à la conception, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation des lois et des politiques relatives à toutes les phases des situations d’urgence, aux programmes et activités de sensibilisation, aux programmes de renforcement des capacités, à la collecte et à l’analyse de données, aux programmes de suivi de l’éducation inclusive et aux programmes de participation aux processus politiques aux niveaux national, régional et international.

32.Les États parties devrait garantir l’impartialité, l’autonomie et la viabilité financière des organisations de personnes handicapées. Leurs ressources financières devraient être suffisantes pour leur permettre d’assumer leur rôle, conformément aux dispositions du paragraphe 3 de l’article 4 et du paragraphe 3 de l’article 33 de la Convention, et ne devraient avoir aucune incidence sur leur indépendance. Les États parties devraient allouer aux activités, projets et programmes qui sont conçus et mis en œuvre par les organisations de personnes handicapées les ressources financières suffisantes pour que celles-ci puissent promouvoir leurs droits. Ils devraient appuyer le renforcement de leurs capacités, notamment en leur allouant des fonds.

2.Participation des personnes handicapées aux travaux du Comité

33.Les « directives sur la participation des organisations de personnes handicapées et des organisations de la société civile aux travaux du Comité » (CRPD/C/11/2, annexe II) contiennent des informations détaillées sur la manière dont ces organisations peuvent participer à la procédure d’établissement des rapports des États parties en vue d’un examen, à l’élaboration d’observations générales, aux journées de débat général et aux procédures relatives aux communications et aux enquêtes.

34.Le Comité a condamné tout acte d’intimidation et toute représailles à l’encontre de personnes et d’organisations au motif qu’elles contribuent aux travaux du Comité. Parmi ses membres, il a désigné un coordonnateur pour les questions relatives aux représailles, qui est chargé de suivre les cas signalés et de dispenser des conseils à ce sujet (ibid., par. 33). Afin de garantir la sécurité des défenseurs des droits de l’homme, les organisations peuvent demander à ce que leurs contributions écrites ou leur participation aux réunions restent confidentielles .

D.Principales questions transversales

1.Égalité, non-discrimination et aménagements raisonnables (art. 5)

Égalité inclusive et non-discrimination

35.L’égalité et la non-discrimination constituent le fondement de la Convention et font partie de ses principes fondamentaux. Ce sont des principes et des droits, pierre angulaire de la protection internationale garantie par la Convention, qui servent également d’outil d’interprétation de tous les autres principes et droits inscrits dans la Convention. Promouvoir l’égalité et lutter contre la discrimination sont des obligations d’application immédiate, tant dans le secteur public que dans le secteur privé. L’observation générale no 6 est le principal document d’interprétation de l’article 5 de la Convention. Elle préconise l’égalité inclusive (par. 11) en ces termes :

« L’égalité inclusive est un nouveau modèle d’égalité défini tout au long de la Convention. Fondée sur un modèle d’égalité réelle, l’égalité inclusive élargit la notion d’égalité et l’approfondit en introduisant : a) une composante redistribution équitable, pour remédier aux inégalités socioéconomiques ; b) une composante reconnaissance, pour lutter contre la stigmatisation, les stéréotypes, les préjugés et la violence, et pour consacrer la dignité des êtres humains et leurs points communs ; c) une composante participation, pour réaffirmer le caractère social des personnes en tant que membres de groupes sociaux et la pleine reconnaissance de l’humanité par l’inclusion dans la société ; d) une composante aménagement, pour faire une place à la différence en tant que question de dignité humaine. ».

Interdiction de toute forme de discrimination fondée sur le handicap

36.L’article 2 de la Convention précise que « la discrimination fondée sur le handicap » comprend toutes les formes de discrimination, y compris le refus d’aménagement raisonnable. Dans ses observations générales, le Comité a exposé en détail les diverses formes de discrimination fondées sur le handicap. La discrimination directe, la discrimination indirecte, la discrimination par association, le refus d’aménagement raisonnable, la discrimination structurelle ou systémique, le harcèlement ainsi que la discrimination multiple et croisée sont expressément interdits.

37.En juillet 2018, sur les 24 communications individuelles qui avaient été examinées par le Comité, sept faisaient état de discrimination fondée sur le handicap. Les violations de l’article 5 portaient sur des manquements à l’obligation de procéder à des aménagements raisonnables, le refus de donner accès aux technologies de l’information et de la communication ainsi qu’aux installations et services publics dans des conditions d’égalité, des cas de détention arbitraire fondée sur le handicap et des manquements à l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir les actes de violence, mener des enquêtes efficaces sur ces actes et les réprimer.

Aménagements raisonnables

38.Les aménagements raisonnables sont définis à l’article 2 de la Convention et mentionnés aux articles 5, 14, 24 et 27, ainsi que dans les observations finales du Comité relatives aux articles 6, 8, 9, 11, 12, 13, 15, 16, 18, 19, 21, 25, 28 et 29.

39.Le Comité a mis l’accent sur la distinction entre, d’une part, les aménagements raisonnables et, d’autre part, l’accessibilité, les aménagements procéduraux, les « mesures spécifiques » (y compris les « mesures d’action positive »), ainsi que les mesures d’appui, telles que les services d’assistants personnels ou l’accompagnement dans l’exercice de la capacité juridique. Contrairement aux mesures susmentionnées, l’obligation d’aménagement raisonnable est une obligation ex nunc d’application directe, qui doit être examinée en tenant compte du fait qu’une charge excessive ou injustifiable peut peser sur la partie qui apporte l’aménagement.

40.Le « caractère raisonnable » de l’aménagement est défini après examen du milieu, c’est-à-dire une analyse de la pertinence et de l’efficacité de cet aménagement et de l’objectif attendu de lutte contre la discrimination, le Comité ayant mis l’accent sur le fait que la définition de ce qui est proportionné dépend du contexte. Le Comité a donné des indications quant aux éléments essentiels à prendre en considération aux fins de l’application de l’obligation d’apporter un aménagement raisonnable.

2.Accessibilité (art. 9)

41.L’accessibilité est traitée dans plusieurs articles de la Convention ; elle est primordiale pour que les personnes handicapées puissent vivre de façon indépendante et participer pleinement à tous les aspects de la vie sur la base de l’égalité avec les autres. Si l’observation générale no 2 est le principal document dans lequel le Comité traite de l’accessibilité, cette question est néanmoins abordée dans l’ensemble des observations générales et observations finales, ainsi que dans six constatations.

Accessibilité, conception universelle et aménagements raisonnables

42.L’accessibilité englobe l’accès à l’environnement physique, aux moyens de transport, à l’information et à la communication ainsi qu’aux services. Le droit à l’accessibilité est compatible avec l’interdiction de la discrimination : les personnes handicapées devraient avoir un accès égal à tous les biens, produits et services qui sont offerts ou fournis au public. Qu’ils appartiennent au secteur public ou à une entreprise privée et/ou soient fournis par le secteur public ou une entreprise privée, les produits et les services offerts au public doivent être accessibles à tous. Le droit d’accès est garanti au moyen de l’application stricte de normes d’accessibilité. Les obstacles devraient être levés progressivement, de manière systématique et sous une supervision constante, pour parvenir à la pleine accessibilité.

43.La conception universelle, définie à l’article 2 de la Convention, est une composante de l’accessibilité qui vise à rendre la société accessible à tous. Son application à tous les nouveaux biens, produits, installations, technologies et services devrait assurer un accès total, égal et sans entraves à tous les consommateurs potentiels, et contribuer à la création d’une chaîne de déplacement permettant aux individus de passer d’un espace à un autre et d’évoluer à l’intérieur de ces espaces sans aucun obstacle. Contrairement aux aménagements raisonnables, l’accessibilité concerne les groupes, ce qui fait de l’obligation de garantir l’accessibilité une obligation ex ante inconditionnelle.

44.Pour garantir l’accessibilité, il est également nécessaire d’éliminer les obstacles restants, dans des délais définis et à l’aide de ressources suffisantes. Les États parties devraient adopter des dispositions juridiques relatives à l’accessibilité, revoir les dispositions existantes ainsi que leur législation relative aux marchés publics afin d’y intégrer des prescriptions concernant l’accessibilité, définir des normes minimales en la matière et élaborer un cadre de suivi efficace assorti d’organes de contrôle efficients dotés de moyens suffisants et d’un mandat approprié de manière à garantir que les plans, stratégies et mesures de normalisation soient appliqués et respectés.

45.Les lois sur le handicap excluent souvent les technologies de l’information et de la communication (TIC) (expression générique qui englobe tout appareil ou application d’information et de communication et son contenu). Une large gamme de technologies d’accès devrait y être intégrée. Depuis 2014, le Comité recommande aux États parties de se conformer aux Règles pour l’accessibilité des contenus Web (WCAG). L’information et les communications devraient être disponibles dans des formats accessibles, dont le braille, la langue des signes, le sous-titrage pour personnes sourdes, le langage facile à lire et à comprendre (FALC) et les modes de communication améliorée et alternative. En application de l’article 30, le Comité a recommandé aux États parties de ratifier et mettre en œuvre le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées.

Accessibilité des travaux du Comité

46.En 2012, il a été demandé à AbilityNet, à Microsoft et à l’Université du Middlesex d’élaborer un projet de rapport sur l’accessibilité des réunions du Comité. Le Comité a tenu compte de la question de l’accessibilité dans ses méthodes de travail adoptées en 2011 et a fait savoir que ses documents seraient diffusés dans tous les formats accessibles (voir CRPD/C/5/4). Des observations générales sont publiées sur son site Web en version FALC ou en langue simplifiée. En outre, durant les journées de débat général, le secrétariat assure la logistique en veillant à ce que les conditions d’accessibilité soient remplies et en prévoyant des aménagements et une assistance raisonnables, afin de faciliter la participation de toutes les personnes concernées (ibid., par. 62). Des services d’interprétation en langue des signes et de sous-titrage pour personnes sourdes sont assurés pendant les séances publiques du Comité.

3.Diversité des personnes handicapées

47.Les États parties devraient prendre en considération la diversité des personnes handicapées et s’attaquer aux nombreux obstacles auxquels se heurtent les divers groupes de personnes présentant différents types de handicaps.

Personnes présentant différents types de handicaps

48.Le modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme est axé sur une conception du handicap qui, contrairement au modèle médical, ne réduit pas les personnes handicapées à leur handicap. Cependant, cela n’empêche pas de reconnaître que, selon leur handicap, les personnes peuvent être confrontées à différents types d’obstacles au sein de la société. La classification du handicap à des fins spécifiques doit être fondée sur les droits de l’homme et n’exclure aucun groupe de personnes handicapées.

49.Le Comité a renvoyé aux cas des personnes présentant un handicap physique ou personnes à mobilité réduite, des personnes présentant un handicap intellectuel, psychosocial ou sensoriel, y compris celles qui ont une déficience auditive (sourdes ou malentendantes) ou visuelle (aveugles ou malvoyantes) et, d’une manière sporadique, des personnes sourdes et muettes ou sourdes et aveugles. Il a adopté des constatations portant sur divers cas, dont deux cas de handicap auditif (Beasley c. Australie et Lockrey c. Australie), trois cas de handicap visuel (Nyusti et Takács c. Hongrie, Jungelin c. Suède et F c. Autriche), trois cas de handicap intellectuel ou psychosocial (Bujdosó et consorts c. Hongrie, Noble c. Australie, concernant une personne autochtone présentant un handicap intellectuel, et Bacher c. Autriche, concernant la trisomie 21 et l’autisme), quatre cas de mobilité réduite (A. F. c. Italie (CRPD/C/13/D/9/2012), Makarov c. Lituanie, Given c. Australie et Bacher c. Autriche), un cas d’albinisme (X c. République-Unie de Tanzanie), un cas de plurihandicap (X c. Argentine, concernant des troubles cognitifs, une perte partielle de la vue et des problèmes de mobilité) et un cas de maladie dégénérative (H. M. c. Suède).

50.Dans ses observations générales et ses observations finales, le Comité a également renvoyé aux cas des personnes autistes et des personnes atteintes d’albinisme. Il a occasionnellement parlé de « handicaps physiques complexes », de déficiences cognitives, de handicaps moteurs, de plurihandicap, de troubles neurologiques et cognitifs, de personnes touchées par la lèpre et de personnes atteintes de pathologies neurodégénératives, y compris la maladie d’Alzheimer, la démence et la sclérose en plaques.

Intersectionnalité : divers groupes de personnes handicapées

51.Le handicap est une composante parmi d’autres de l’identité, et la prise en compte des divers groupes de personnes handicapées joue un rôle important dans la lutte contre les formes multiples et croisées de discrimination (voir observation générale no 6). Le Comité a réaffirmé les droits de nombreux groupes de personnes handicapées, dont les suivants : les femmes ; les filles et les garçons ; les enfants ; les jeunes ; les personnes âgées ; les groupes minoritaires, ethniques, religieux ou linguistiques (y compris les Roms) ; les populations autochtones ; les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile ; les non-ressortissants ; les personnes vivant dans des régions reculées ou rurales ; les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres, queers et intersexes (LGBTQI) ; les personnes d’ascendance africaine et d’autres groupes de personnes très précis, par exemple les aborigènes et insulaires du détroit de Torres en Australie et les personnes afro-équatoriennes et montubios en Équateur.

4.Genre

52.Le Comité considère que le genre est une composante de la diversité des personnes handicapées et un facteur de discrimination croisée ou multiple, qui touche en particulier les femmes handicapées. Il a appelé l’attention sur le fait que les femmes et les filles handicapées se heurtent à des obstacles dans la plupart des domaines de la vie, en particulier à la discrimination et la violence sexistes, y compris la stérilisation forcée, les violences sexuelles et physiques, et l’isolement.

53.Le Comité a adopté une définition plus poussée du « genre », dans laquelle « sexe » renvoie aux différences biologiques et « genre » aux caractéristiques qu’une société ou une culture considère comme masculines ou féminines ». Il a également parlé « d’identité de genre » et « d’expression du genre ». L’égalité des sexes et les questions touchant aux femmes handicapées doivent être interprétées d’une manière novatrice. De fait, les femmes handicapées ne constituent pas un groupe homogène, celui-ci pouvant être composé entre autres de femmes transgenres et de personnes intersexes.

54.Pour garantir l’égalité des sexes et les droits des femmes et des filles handicapées, les États parties devraient tenir compte des questions de genre lorsqu’ils élaborent des mesures concernant l’accessibilité, fournissent des soins de santé, en particulier des services de santé procréative, y compris les services gynécologiques et obstétriques, luttent contre la stigmatisation, les préjugés et la violence et veillent à la réalisation des droits à l’éducation, à l’autonomie de vie et à l’inclusion dans la société. Dans ce cadre, toutes les mesures prises et leur suivi doivent tenir compte des questions de genre. Le Comité a également souligné que les femmes et les filles handicapées devraient être associées à la conception, à l’exécution et au suivi de tous les programmes qui ont une incidence sur leur vie, et que les États parties doivent promouvoir la prise en compte des femmes handicapées dans le cadre des futures élections du Comité.

E.Sujets abordés par le Comité

1.Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

55.Qu’ils soient généraux ou destinés expressément aux personnes handicapées, les mesures et services de protection sociale doivent être offerts de manière accessible, et les programmes de logements sociaux devraient proposer des logements accessibles aux personnes handicapées. Les États parties doivent garantir l’accès à des services, dispositifs et autres formes d’assistance appropriés et disponibles à un coût abordable pour répondre aux besoins liés au handicap, ce tout particulièrement pour les personnes handicapées qui vivent dans le dénuement. Le Comité considère qu’il serait contraire à la Convention que les personnes handicapées assument elles-mêmes les dépenses liées à leur handicap.

56.Dans son rapport d’enquête concernant le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (CRPD/C/15/4), le Comité a fait observer que l’obligation d’assurer l’accès des personnes handicapées à des programmes de protection sociale de qualité, adéquats, acceptables et adaptables était une obligation à effet immédiat. Il a souligné que les mesures visant à faciliter l’insertion des bénéficiaires de prestations de sécurité sociale sur le marché du travail devaient prévoir des dispositifs transitoires en vue de protéger le revenu de ces derniers le temps qu’ils atteignaient un certain niveau de salaire, de manière durable, et leur permettre de bénéficier de nouveau des prestations, sans retard, s’ils perdaient leur emploi. La réforme du système de protection sociale et les mesures d’austérité ne doivent pas avoir des effets disproportionnés ou préjudiciables sur les droits des personnes handicapées. Les évaluations axées sur la famille qui font partie des critères d’attribution pris en compte lors de l’examen des demandes d’aide déposées auprès des services de protection sociale devraient être remplacées par des évaluations individuelles, et les critères discriminatoires fondés sur la cause du handicap (handicap lié ou non à la guerre) devraient être supprimés.

2.Accès à la justice et aménagements procéduraux (art. 13)

57.Les États parties ont l’obligation de faire en sorte que les personnes handicapées aient accès à la justice sur la base de l’égalité avec les autres. Il est essentiel d’assurer l’accessibilité, des aménagements raisonnables et le respect du droit à la capacité juridique afin de garantir l’accès à la justice. Outre la reconnaissance du droit à la capacité juridique, les États parties doivent veiller à ce que les personnes handicapées aient accès à une représentation juridique et à ce que les agents de police, les travailleurs sociaux et toutes les autres personnes en contact avec les personnes handicapées accordent le même poids à leurs plaintes et déclarations qu’à celles des autres personnes. Dans la communication Noble c. Australie, le Comité a considéré que la décision prise par l’État partie de déclarer l’auteur « inapte à se défendre » en raison de son handicap intellectuel et le fait que celui-ci n’ait bénéficié ni de l’accompagnement ni des aménagements nécessaires pour lui permettre d’exercer son droit à la capacité juridique constituaient une violation de l’article 13.

58.Les aménagements raisonnables se distinguent des aménagements procéduraux, également appelés aménagements de procédure. Contrairement aux aménagements raisonnables, les aménagements procéduraux et les aménagements adaptés à l’âge ne sont pas soumis au critère de proportionnalité. Les États parties doivent assurer l’accessibilité, procéder à des aménagements procéduraux et à des aménagements raisonnables et fournir d’autres formes d’accompagnement pour faire en sorte que les personnes handicapées aient pleinement accès au système judiciaire. Les aménagements procéduraux peuvent se traduire entre autres par la reconnaissance de diverses méthodes de communication, la mise à disposition, dans certaines situations, de moyens permettant de témoigner par vidéoconférence, ainsi que par la fourniture de services d’interprétation professionnels en langue des signes et d’autres modes d’assistance. Le Comité a considéré que le fait qu’un État partie n’ait pas assuré de services d’interprétation en langue des signes ni de transcription par sténotypiste en temps réel, à l’intention des personnes sourdes convoquées comme jurées, constituait une violation de la Convention.

3.Liberté et sécurité de la personne (art. 14), autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19) : sur la voie de l’abandon du placement en milieu fermé

59.Toutes les personnes handicapées, et plus particulièrement celles qui présentent un handicap intellectuel ou psychosocial, ont droit à la liberté et à la sécurité en vertu de l’article 14 de la Convention. Le droit à la liberté est l’un des droits les plus précieux auxquels chacun puisse prétendre. Le Comité a confirmé son importance dans sa déclaration sur l’article 14 (CRPD/C/12/2, annexe IV), adoptée en 2014, et dans ses directives relatives au droit à la liberté et à la sécurité des personnes handicapées (A/72/55, annexe). Il a affirmé que la détention de personnes sur la base de leur déficience réelle ou supposée, y compris au motif que la personne handicapée présenterait un danger pour elle−même ou pour autrui, est interdite. Sont visées la détention en institution de santé mentale ou dans d’autres types d’établissements, ainsi que la détention fondée sur des déclarations d’inaptitude à suivre un procès ou à assumer sa responsabilité pénale dans les systèmes de justice pénale. Lorsque des personnes handicapées sont placées en détention, les États parties doivent veiller à ce que les lieux de détention soient accessibles et à ce qu’ils offrent des conditions de vie humaines, et mettre en œuvre des mécanismes de suivi et d’examen des conditions de détention (ibid., par. 3, 6 à 9, 16, 17 et 19).

60.Le droit à la liberté est lié au droit à l’autonomie de vie et à l’inclusion dans la société. Le Comité s’est dit vivement préoccupé par le placement de personnes handicapées en milieu fermé et a demandé aux États parties d’adopter des stratégies et des programmes visant à mettre fin à ce type de placement. Il a défini le milieu fermé et souligné que les mesures d’abandon du placement dans un tel milieu devaient s’accompagner de la mise en place d’un ensemble complet de services et du déploiement de programmes de développement communautaire.

4.Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité et prise de décisions accompagnée (art. 12)

61.L’égalité devant la loi est indispensable à l’exercice d’autres droits de l’homme. L’article 12, dont les dispositions sont d’application immédiate, énonce les éléments qui doivent être pris en considération par les États parties. Le déni du droit à la capacité juridique pour des motifs liés au handicap, notamment dans le cadre de systèmes de tutelle ou de curatelle ou encore en vertu de lois sur la santé mentale, est discriminatoire et interdit. Dans tous les domaines du droit, le droit à la capacité juridique des personnes handicapées ne doit pas être limité par rapport à celui des autres. Toutes les personnes handicapées, y compris les personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial, ont la même capacité juridique d’exercer leurs droits que les autres, s’agissant en particulier du droit de vote, du droit de se marier et de fonder une famille, des droits en matière de procréation, des droits parentaux, du droit de consentir aux relations intimes et aux traitements médicaux et du droit à la liberté.

62.Dans le contexte du droit à une reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité, le modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme suppose le passage du régime de prise de décisions substitutive à un régime de prise de décisions accompagnée. Les États parties sont tenus d’assurer aux personnes handicapées l’accès à l’accompagnement nécessaire pour exercer leur capacité juridique, en respectant pleinement leurs droits, leur volonté et leurs préférences. Lorsque, en dépit d’efforts significatifs à cette fin, il n’est pas possible de déterminer la volonté et les préférences d’un individu, l’« interprétation optimale de la volonté et des préférences » doit remplacer la notion d’« intérêt supérieur ». Les États parties doivent créer des garanties appropriées et effectives pour l’exercice de la capacité juridique, y compris une protection contre tout abus d’influence.

5.Droit à la vie et à la protection contre les mauvais traitements, la violence et les pratiques néfastes en toutes circonstances (art. 10, 16 et 17)

63.Les États parties devraient prendre des mesures visant à éliminer les pratiques d’« euthanasie par compassion » et de « crime d’honneur », les crimes rituels commis contre des enfants et des adultes handicapés, ainsi que les crimes violents commis contre des personnes atteintes d’albinisme. Ils devraient prendre toutes les mesures possibles en vue de déterminer les causes de décès, y compris le suicide, et de garantir que les personnes handicapées ne fassent pas l’objet de privation arbitraire de la vie, et veiller à ce que toutes ces mesures soient appliquées et suivies, étant donné que les personnes présentant un handicap psychosocial ou intellectuel encourent plus souvent que les autres la peine de mort, en raison de l’absence d’aménagements procéduraux dans les procédures pénales.

64.Pour ce qui est de l’arrêt ou du retrait des traitements et des soins de maintien en vie, le Comité a souligné que l’application du régime de prise de décisions substitutive était incompatible avec le droit à la vie dont jouissent les personnes handicapées. Les États partie devraient s’assurer que les personnes qui cherchent à bénéficier d’une mort assistée aient accès à d’autres options et à une vie digne rendue possible par des soins palliatifs appropriés, une aide aux personnes handicapées, des soins à domicile et d’autres mesures d’aide sociale favorisant l’épanouissement de la personne. Les États devraient également prévenir et repérer les risques de suicide chez les personnes handicapées, et y remédier.

65.Le Comité a condamné toutes les formes de violence à l’égard des personnes handicapées et a recommandé aux États parties de prendre des mesures pour prévenir les actes de violence, mener des enquêtes sur ces actes et les sanctionner. Il s’agit entre autres d’actes tels que le harcèlement, y compris les brimades et le harcèlement en ligne, les châtiments corporels infligés aux adultes et aux enfants, la violence sexuelle, y compris le viol conjugal et l’inceste, et le recours à la violence en milieu fermé. Alors qu’il avait l’habitude de parler de violence familiale, le Comité emploie désormais fréquemment l’expression « violence à l’intérieur et à l’extérieur du cadre familial », tous les cas de violence perpétrée à l’intérieur de ce cadre ne relevant pas de la violence familiale. Comme cela est précisé dans l’affaire X. c. République-Unie de Tanzanie, les États parties doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir les actes de violence contre des personnes handicapées, mener des enquêtes sur ces actes et les réprimer. Ils devraient également faire en sorte que soient disponibles des services d’appui accessibles et inclusifs, y compris des mécanismes de plainte confidentiels, des foyers et d’autres mesures d’assistance. Le Comité a encouragé les États membres du Conseil de l’Europe à ratifier la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, plus communément appelée Convention d’Istanbul.

6.Santé (art. 25), adaptation et réadaptation (art. 26) et interdiction du placement et du traitement forcés (art. 12 et 14 à 17)

Accès à la santé, y compris à la santé et aux droits en matière de sexualité et de procréation, et à des services d’adaptation et de réadaptation

66.Les États parties ne doivent pas priver les personnes handicapées de l’accès aux soins de santé ou aux services d’adaptation et de réadaptation, y compris lorsqu’il s’agit de leur santé et de leurs droits en matière de sexualité et de procréation, ainsi que de leur santé mentale.

67.Les services de soins de santé doivent être accessibles aux personnes handicapées et tenir compte des questions de genre en matière d’accessibilité. Les établissements et services de santé polyvalents doivent non seulement être accessibles aux personnes handicapées, mais aussi être adaptés à elles et d’un coût abordable ; cela signifie notamment qu’ils doivent pouvoir offrir le soutien requis par certaines personnes handicapées dans le cadre d’une hospitalisation, de prestations chirurgicales ou de consultations médicales. L’offre de prestations ou services de personnel infirmier, de physiothérapeutes, de psychiatres et de psychologues, en milieu hospitalier et à domicile, fait partie des obligations relatives à la santé qui incombent aux États parties. Dans l’affaire H. M. c. Suède, le Comité a considéré que le fait qu’une municipalité locale refuse d’accorder à l’auteure de la communication, qui était atteinte d’une maladie dégénérative et ne pouvait pas quitter son domicile sans s’exposer à de grands risques, l’autorisation d’installer sur sa propriété une piscine d’hydrothérapie à des fins de réadaptation et de préservation de la santé, était contraire aux dispositions de la Convention.

68.Le Comité renvoie aux « droits en matière de procréation » dans sa première observation générale, puis à « la santé et aux droits en matière de sexualité et de procréation » dans ses observations finales et observations générales ultérieures. Il est particulièrement important de garantir ces droits, surtout aux femmes handicapées, qui sont souvent victimes de stéréotypes les présentant comme des personnes asexuées ou hypersexuelles, ou encore comme des personnes incapables de consentir aux rapports sexuels. Les États parties devraient garantir la santé sexuelle et procréative des personnes handicapées et le respect de leurs droits dans ce domaine. Ils devraient veiller à ce que des informations sur ces sujets, y compris sur le VIH/sida et les autres infections sexuellement transmissibles, soient fournies aux personnes handicapées, et à ce que les femmes handicapées aient accès aux services d’avortement médicalisé sur la base de l’égalité avec les autres.

Interdiction du traitement et du placement sans consentement

69.En vertu des articles 12, 14 et 15 de la Convention, toute forme de traitement sans consentement et de détention dans des établissements de santé, imposés au motif de la dangerosité présumée de la personne ou en raison d’autres éléments liés à son handicap, est interdite. Le Comité a souligné que le fait d’être traité contre son gré par des psychiatres et autres médecins et professionnels de la santé constitue une violation des articles 12, 17, 15 et 16. Il a également souligné que le placement forcé ou non consenti en institution psychiatrique ainsi que les traitements non consentis, dispensés dans le cadre de la privation de liberté, constituent des violations de la Convention. Il s’est opposé à l’adoption d’un projet de protocole additionnel à la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine, au motif qu’il était contraire tant à la lettre qu’à l’esprit de la Convention.

70.Les États parties devraient interdire toutes les formes de stérilisation forcée et d’interventions médicales ou traitements hormonaux, telles que la lobotomie ou le traitement d’Ashley, d’avortement forcé ou sous la contrainte, de contraception non consentie et d’administration de force de médicaments, y compris ceux qui sont utilisés pour « contrôler le comportement sexuel » de personnes handicapées, et d’électrochocs. Le Comité a également condamné les mutilations génitales féminines ainsi que les opérations chirurgicales réalisées sur des enfants intersexes ou les traitements qui leur sont administrés sans leur consentement éclairé, au motif qu’il considérait que de telles pratiques constituaient un acte de torture ou autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant.

7.Éducation inclusive (art. 24)

71.Le fait que le Comité n’ait pas dit explicitement dans ses observations finales les plus anciennes que toutes les formes d’éducation ségrégative étaient interdites, a créé une certaine confusion portant à croire que les écoles spécialisées pour enfants handicapés pouvaient être acceptables dans certaines situations. Depuis, le Comité a explicitement déclaré que l’exclusion et la ségrégation scolaires constituaient une forme de discrimination fondée sur le handicap, contraire aux dispositions de la Convention. Il a défini de manière détaillée ce qu’est l’éducation inclusive et fait observer que la réalisation de ce droit supposait une transformation en profondeur des lois et des politiques qui régissent les systèmes éducatifs ainsi que des mécanismes de financement, d’administration, de conception, de mise en œuvre et de suivi de l’éducation. Les États parties devraient abandonner l’éducation ségrégative au profit de l’éducation inclusive. Le Comité a souligné que s’ils peuvent s’acquitter de cette obligation de manière progressive, ils sont en revanche tenus de veiller immédiatement à ce que les enfants handicapés ne soient pas exclus des établissements scolaires ordinaires et à ce qu’ils bénéficient d’aménagements raisonnables.

72.Dans son rapport d’enquête concernant l’Espagne (CRPD/C/ESP/IR/1), publié en juillet 2018, le Comité a constaté que l’État partie entretenait un schéma structurel d’exclusion discriminatoire et de ségrégation scolaire fondées sur le handicap, qui s’appliquait de manière disproportionnée aux personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial et aux personnes plurihandicapées. Il a rappelé que la mise en place d’un système inclusif fondé sur le droit à la non-discrimination et à l’égalité des chances supposait l’abolition des systèmes d’éducation distincts pour les élèves handicapés (ibid., par. 74 et 81).

8.Situations de risque et situations d’urgence (art. 11)

73.Le Comité a adopté huit déclarations relatives à l’article 11, dont six concernant la situation particulière des personnes handicapées dans les pays touchés par des catastrophes ou par des conflits armés passés ou actuels. Il a plaidé, à l’échelle internationale, en faveur de la prise en compte du handicap, dans le contexte de la troisième Conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophe et du Sommet mondial sur l’action humanitaire.

74.Le Comité s’est particulièrement attardé sur l’article 11 dans ses observations générales nos 2, 5 et 6. Le principe de non-discrimination doit être garanti dans toutes les situations de risque et situations d’urgence humanitaire, s’agissant en particulier de l’accès, dans des conditions d’égalité, aux produits et services de première nécessité, comme l’eau, l’assainissement, la nourriture et le logement. Les services d’urgence doivent être accessibles aux personnes handicapées, et des services d’appui doivent être prévus dans toutes les activités de gestion des risques de catastrophe. L’accessibilité doit être considérée comme une priorité dans les efforts de reconstruction après les catastrophes. Depuis septembre 2015, le Comité recommande systématiquement aux États parties de mettre en œuvre le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030).

9.Travail et emploi (art. 27)

75.L’accessibilité, les aménagements raisonnables et les mesures de soutien nécessaires pour permettre aux personnes handicapées d’avoir pleinement accès au travail et à l’emploi sont examinés dans les observations générales nos 2 (par. 41), 3 (par. 58), 5 (par. 91) et 6 (par. 67). Les États parties devraient faciliter l’abandon des environnements de travail séparés et veiller à ce que les personnes handicapées perçoivent un salaire qui ne soit pas inférieur au salaire minimum et ne perdent pas le bénéfice des allocations d’invalidité lorsqu’elles commencent à travailler.

76.Les États parties doivent prendre des mesures d’action positive, y compris des mesures d’incitation, afin d’accroître le taux d’emploi des personnes handicapées dans les secteurs public et privé, y compris en mettant en place des systèmes de quotas assortis de mécanismes d’application efficaces et de sanctions en cas de manquement. Les mesures d’action positive, telles que les aides à l’insertion, ne devraient pas se transformer en moyen de discrimination indirecte, comme lorsque les difficultés auxquelles se heurtent les employeurs qui tentent d’accéder à l’aide à l’insertion placent les candidats handicapés dans une situation défavorable. Les personnes handicapées devraient être protégées, dans des conditions d’égalité avec les autres, contre le travail forcé ou obligatoire, l’exploitation et le harcèlement sur le lieu de travail.

F.Ne laisser personne pour compte : droits des personnes handicapées dans le programme de développement international

77.Dans le débat sur le programme de développement pour l’après-2015, le Comité a plaidé en faveur de la prise en compte des droits des personnes handicapées. Il a affirmé que pour être durables, les objectifs de développement devraient s’appuyer sur une approche fondée sur les droits de l’homme, et la communauté internationale devrait tenir compte des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels de toutes les personnes handicapées. En janvier 2014, le Comité a insisté sur des points similaires lorsqu’il s’est adressé aux États Membres participant à la huitième session du Groupe de travail ouvert de l’Assemblée générale sur les objectifs de développement durable.

78.Le Comité fait référence au Programme de développement durable à l’horizon 2030, depuis qu’il a été adopté, et mentionne également les objectifs de développement durable dans ses observations générales et ses observations finales. Les États parties devraient tenir compte des droits des personnes handicapées dans l’exécution et le suivi du Programme 2030 à tous les niveaux, et veiller à ce que des indicateurs de l’inclusion des personnes handicapées soient définis et utilisés selon les dispositions du Programme.