État partie

Date à laquelle le rapport était attendu

Rapports initiaux

Ouganda

25 juin 1988

Togo

17 décembre 1988

Guyana

17 juin 1989

Guinée

8 novembre 1990

Somalie

22 février 1991

Yémen

4 décembre 1992

Bosnie ‑Herzégovine

5 mars 1993

Lettonie

13 mai 1993

Seychelles

3 juin 1993

Cap ‑Vert

3 juillet 1993

Cambodge

13 novembre 1993

Burundi

19 mars 1994

Antigua ‑et ‑Barbuda

17 août 1994

Éthiopie

12 avril 1995

Albanie

9 juin 1995

Tchad

9 juillet 1995

Tadjikistan

9 février 1996

Côte d’Ivoire

16 janvier 1997

Lituanie

1 er mars 1997

République démocratique du Congo

16 avril 1997

Malawi

10 juillet 1997

Honduras

3 janvier 1998

Kenya

22 mars 1998

Bahreïn

4 avril 1999

Bangladesh

3 novembre 1999

Niger

3 novembre 1999

Afrique du Sud

8 janvier 2000

Burkina Faso

2 février 2000

Mali

27 mars 2000

Turkménistan

25 juillet 2000

Japon

29 juillet 2000

Mozambique

14 octobre 2000

Qatar

9 février 2001

Ghana

6 octobre 2001

Botswana

7 octobre 2001

Gabon

7 octobre 2001

Liban

3 novembre 2001

Deuxièmes rapports périodiques

Afghanistan

25 juin 1992

Belize

25 juin 1992

Philippines

25 juin 1992

Ouganda

25 juin 1992

Togo

17 décembre 1992

Guyana

17 juin 1993

Brésil

27 octobre 1994

Guinée

8 novembre 1994

Somalie

22 février 1995

Roumanie

16 janvier 1996

Népal

12 juin 1996

Yougoslavie

9 octobre 1996

Estonie

19 novembre 1996

Yémen

4 décembre 1996

Jordanie

12 décembre 1996

Monaco

4 janvier 1997

Bosnie ‑Herzégovine

5 mars 1997

Bénin

10 avril 1997

Lettonie

13 mai 1997

Seychelles

3 juin 1997

Cap ‑Vert

3 juillet 1997

Cambodge

13 novembre 1997

Burundi

19 mars 1998

Slovaquie

27 mai 1998

Antigua-et-Barbuda

17 août 1998

Costa Rica

10 décembre 1998

Sri Lanka

1 er février 1999

Éthiopie

12 avril 1999

Albanie

9 juin 1999

États-Unis d’Amérique

19 novembre 1999

ex ‑République yougoslave de Macédoine

11 décembre 1999

Namibie

27 décembre 1999

République de Corée

7 février 2000

Tadjikistan

9 février 2000

Cuba

15 juin 2000

Tchad

8 juillet 2000

République de Moldova

27 décembre 2000

Côte d’Ivoire

16 janvier 2001

République démocratique du Congo

16 avril 2001

El Salvador

16 juillet 2001

Lituanie

1 er  mars 2001

Koweït

6 avril 2001

Malawi

10 juillet 2001

Honduras

3 janvier 2002

Kenya

22 mars 2002

Troisièmes rapports périodiques

Afghanistan

25 juin 1996

Belize

25 juin 1996

Bulgarie

25 juin 1996

Cameroun

25 juin 1996

France

25 juin 1996

Philippines

25 juin 1996

Sénégal

25 juin 1996

Ouganda

25 juin 1996

Uruguay

25 juin 1996

Autriche

27 août 1996

Togo

17 décembre 1996

Équateur

28 avril 1997

Guyana

17 juin 1997

Turquie

31 août 1997

Tunisie

22 octobre 1997

Chili

29 octobre 1997

Jamahiriya arabe libyenne

14 juin 1998

Australie

6 septembre 1998 *

Algérie

11 octobre 1998

Brésil

27 octobre 1998

Guinée

8 novembre 1998

Somalie

22 février 1999

Malte

12 octobre 1999

Allemagne

30 octobre 1999

Liechtenstein

1 er décembre 1999

Roumanie

16 janvier 2000

Népal

12 juin 2000

Venezuela

27 août 2000

Yougoslavie

9 octobre 2000

Estonie

19 novembre 2000

Yémen

4 décembre 2000

Jordanie

12 décembre 2000

Monaco

4 janvier 2001

Bosnie ‑Herzégovine

5 mars 2001

Bénin

10 avril 2001

Lettonie

13 mai 2001

Seychelles

3 juin 2001

Cap-Vert

3 juillet 2001

Cambodge

13 novembre 2001

Maurice

7 janvier 2002

Burundi

19 mars 2002

Quatrièmes rapports périodiques

Afghanistan

25 juin 2000

Argentine

25 juin 2000

Bélarus

25 juin 2000

Belize

25 juin 2000

Bulgarie

25 juin 2000

Cameroun

25 juin 2000

France

25 juin 2000

Hongrie

25 juin 2000

Mexique

25 juin 2000

Philippines

25 juin 2000

Fédération de Russie

25 juin 2000

Sénégal

25 juin 2000

Suisse

25 juin 2000

Ouganda

25 juin 2000

Uruguay

25 juin 2000

Canada

23 juillet 2000

Autriche

27 août 2000

Panama

22 septembre 2000

Togo

17 décembre 2000

Colombie

6 janvier 2001

Équateur

28 avril 2001

Guyana

17 juin 2001

Pérou

5 août 2001

Turquie

31 août 2001

Tunisie

22 octobre 2001

Chili

29 octobre 2001

Chine

2 novembre 2001

Pays ‑Bas

19 janvier 2002

Royaume ‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

6 janvier 2002

Italie

10 février 2002

Portugal

10 mars 2002

22. Le Comité s’est déclaré préoccupé par le nombre d’États parties qui ne respectaient pas leur oblig a tion de présenter leur rapport. En ce qui concerne en particulier les États parties dont les rapports avaient plus de quatre ans de retard, le Comité a déploré qu’ils ne se soient toujours pas acquittés des obligations auxquelles ils avaient librement souscrit en vertu de la Convention. Il a souligné qu’il était de son devoir de surveiller l’application de la Convention et que l’inobservation par un État partie de l’obligation de prése n ter des rapports constituait une violation des dispositions de la Convention. Il a donc décidé de demander à deux de ses membres, M. Mariño et M. Rasmussen, de présenter, à sa vingt ‑neuvième session, des propos i tions sur les moyens d’obtenir que les États parties soumettent leurs rapports en retard.

23. On trouvera à l’annexe V du présent rapport l’exposé de la situation au 17 mai 2002 (date de la clôture de la vingt ‑huitième session du Comité) en ce qui concerne la présent a tion des rapports par les États parties en application de l’article 19 de la Convention.

III.  EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

24. À sa vingt ‑septième et à sa vingt ‑huitième session, le Comité a examiné les rapports soumis par 12 États parties, en vertu du paragraphe 1 de l’article 19 de la Convention. À sa vingt ‑septième session, il était saisi des rapports ci ‑après:

Bénin:

rapport initial

CAT/C/21/Add.3

Indonésie:

rapport initial

CAT/C/47/Add.3

Israël:

troisième rapport périodique

CAT/C/54/Add.1

Ukraine:

quatrième rapport périodique

CAT/C/55/Add.1

Zambie:

rapport initial

CAT/C/47/Add.2

25. À sa vingt ‑huitième session, le Comité était saisi des rapports ci ‑après:

Danemark:

quatrième rapport périodique

CAT/C/55/Add.2

Luxembourg:

troisième rapport périodique

CAT/C/34/Add.14

Norvège:

quatrième rapport périodique

CAT/C/55/Add.4

Fédération de Russie:

troisième rapport périodique

CAT/C/34/Add.15

Arabie saoudite:

rapport initial

CAT/C/42/Add.2

Suède:

quatrième rapport périodique

CAT/C/55/Add.3

Ouzbékistan:

deuxième rapport périodique

CAT/C/53/Add.1

26. Conformément à l’article 66 de son règlement intérieur, le Comité avait invité tous les États parties ayant soumis un rapport à se faire représenter aux séances consacrées à l’examen de leur rapport. Tous les États parties concernés ont envoyé une délégation. L’examen du rapport de l’Arabie saoudite, qui avait été initialement prévu pour la vingt ‑septième session, a été reporté à la demande de l’État partie, dans l’impossibilité d’envoyer une délégation à cette session. De même, l’examen du rapport du Venezuela, qui avait été prévu pour la vingt ‑huitième session, a été reporté à la vingt ‑neuvième session à la demande de l’État partie, dans l’impossibilité d’envoyer une délégation à la vingt ‑huitième session.

27. Conformément à la décision prise par le Comité à sa quatrième session * le Prés i dent, en consultation avec les membres du Comité et le secrétariat, a désigné un rapporteur et un corapporteur pour chacun des rapports des États parties examinés. On trouvera à l’annexe VI la liste de ces rapports et les noms des rapporteurs et corapporteurs.

28. Dans le cadre de l’examen des rapports, le Comité était aussi saisi des documents suivants:

a) Directives générales concernant la forme et le contenu des rapports initiaux que les États parties doivent présenter en application de l’article 19, paragraphe 1 de la Convention (CAT/C/4/Rev.2);

b) Directives générales concernant la forme et le contenu des rapports périodiques que les États parties doivent présenter en application de l’article 19 de la Convention (CAT/C/14/Rev.1).

29. Conformément à la décision prise par le Comité à sa onzième session ** , on trouvera dans les se c tions qui suivent, présentées selon l’ordre dans lequel le Comité a examiné les rapports des différents pays, des références aux rapports et aux comptes rendus analytiques des séances auxquelles ils ont été examinés ainsi que les conclusions et recommandations adoptées par le Comité à l’issue de l’examen des rapports à ses vingt ‑septième et vingt ‑huitième sessions.

BÉNIN

30. Le Comité a examiné le rapport initial du Bénin (CAT/C/21/Add.3) à ses 489 e et 492 e séances, les 15 et 16 novembre 2001 (CAT/C/SR.489 et 492) et a adopté les conclusions et recommandations suivantes.

A.   Introduction

31. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial du Bénin, tout en relevant que ce rapport, qui aurait dû être présenté le 10 avril 1993, est parvenu avec un retard de sept ans. Le rapport a été rédigé conformément aux directives concernant l’élaboration des rapports initiaux des États parties. Néanmoins, le Comité note que le rapport ne contient pas d’exemples concrets de mise en œuvre de la Convention. Il r e lève que toutefois, comme l’a expliqué le chef de la délégation, le rapport fait seulement référence à l’époque dite «révolutionnaire» et à une courte période après la promulgation de la Constitution de 1990, ce qui empêche le Comité d’apprécier la situation actuelle concernant la mise en œuvre de la Convention.

32. Le Comité se félicite des informations apportées par la délégation béninoise ainsi que du dialogue franc, honnête et constructif qui a eu lieu.

B.  Aspects positifs

33. Le Comité note avec satisfaction les éléments suivants:

a) Le rang accordé par la Constitution béninoise aux instruments internationaux ratifiés par le Bénin, qui ont une valeur supérieure à la loi interne;

b) L’interdiction formelle de pratiquer la torture stipulée à l’article 18 de la Constitution;

c) La ratification par l’État partie d’une série d’instruments internationaux relatifs à la protection des droits de l’homme. Le Comité note en particulier la signature le 24 septembre 1999 du St a tut de Rome portant création de la Cour pénale internationale;

d) La volonté de l’État partie de réparer les conséquences des violations massives des droits de l’homme commises pendant la période dite «révolutionnaire» et de leur accorder une meilleure prote c tion par l’adoption de normes législatives et réglementaires;

e) L’article 558 du Code de procédure pénale, qui paraît être conforme aux dispositions du p a ragraphe 2 de l’article 5 de la Convention sur la compétence universelle;

f) La mise en place de la Commission béninoise des droits de l’homme et la création d’une direction des droits de l’homme au sein du Ministère de la justice et de la législation, par le décret n o  97 ‑30 du 29 janvier 1997;

g) L’indemnisation de certaines personnes victimes de torture au cours de la période dite «r é volutionnaire», suite aux recommandations de la Commission interministérielle créée par le décret n o  91 ‑95 du 27 mai 1991;

h) Amélioration des conditions matérielles dans les prisons, notamment par la construction en cours d’un nouveau centre pénitentiaire d’une capacité de 1 000 places.

C.   Sujets de préoccupation

34. Le Comité est préoccupé par les faits suivants:

a) L’absence d’une définition de la torture strictement conforme à l’article premier de la Convention et l’inexistence de peines spécifiques pour le crime de torture, ce qui crée une lacune ne pe r mettant pas une application complète de la Convention;

b) La défiance apparente des citoyens vis ‑à ‑vis du fonctionnement de la police et de la justice, ainsi que la récurrence du phénomène de la vindicte populaire qui en découle;

c) La surpopulation et les mauvaises conditions matérielles dans les établiss e ments pénite n tiaires, en particulier l’absence d’hygiène, de nourriture adéquate et de soins médicaux appropriés, malgré les efforts de l’État partie et l’assistance des organisations non gouvernementales;

d) La place insuffisante faite aux droits de l’homme, en particulier la prohibition de la torture, dans les programmes de formation du personnel civil et militaire chargé de l’application de la loi et du pe r sonnel médical, malgré les initiatives positives de la Commission béninoise des droits de l’homme et de la Ligue pour la défense des droits de l’homme;

e) La possibilité de prolonger exceptionnellement la garde à vue jusqu’à huit jours en vertu de l’article 18 de la Constitution;

f) L’existence dans la législation béninoise de dispositions légales (art. 327 et 328 du Code pénal) exonérant de responsabilité tout coupable de délits ou de crimes lorsque les faits commis ont été ordonnés par la loi ou commandés par l’autorité légitime ou par la nécessité de la légitime défense; ce qui est contraire aux dispositions du paragraphe 2 de l’article 2 de la Convention en ce qui concerne la torture;

g) L’absence de mise en place de programmes de réadaptation médicale et psychologique pour les victimes de torture;

h) La possibilité de garder les détenus en isolement pendant trois mois;

i) Le fait que la loi d’amnistie, adoptée avant la ratification de la Convention contre la torture, risque d’aboutir à une situation d’impunité.

D.   Recommandations

35. Le Comité fait les recommandations suivantes:

a) L’État partie, pour s’acquitter réellement de ses obligations conventionnelles, doit adopter une définition de la torture strictement conforme à l’article premier de la Convention et prévoir des peines appropriées;

b) Des mesures doivent être prises pour réglementer le droit des victimes de la torture à une indemnisation équitable et adéquate à la charge de l’État et mettre en place des programmes pour leur r é adaptation physique et psychologique;

c) L’État partie devrait adopter les mesures législatives nécessaires pour mettre les dispos i tions du Code pénal en conformité avec l’article 2 de la Convention;

d) L’État partie devrait renforcer les activités d’éducation et de promotion concernant les droits de l’homme, en particulier l’interdiction des actes de torture, pour les fonctionnaires chargés de l’application de la loi et le personnel médical;

e) L’État partie devrait prendre des mesures pour éradiquer la pratique de la vindicte pop u laire;

f) Le Comité rappelle à l’État partie son obligation de mener des enquêtes i m médiates et impartiales et de poursuivre en justice les auteurs présumés de violations des droits de l’homme, en particulier de to r ture;

g) L’État partie devrait continuer à prendre des mesures pour améliorer les conditions mat é rielles dans les prisons et réduire notablement la durée de la mise en isolement;

h) Le Comité encourage l’État partie à faire les déclarations prévues aux art i cles 21 et 22 de la Convention, pour concrétiser davantage ses bonnes dispositions à faire respecter les droits de l’homme en général et la prohibition de la torture en particulier;

i) L’État partie devrait assurer une large diffusion des conclusions et recommandations du Comité concernant le Bénin;

j) L’État partie devrait soumettre dans les meilleurs délais son deuxième rapport périodique qui aurait du être présenté en avril 1997, afin de se conformer à la périodicité prévue à l’article 19 de la Convention.

INDONÉSIE

36. Le Comité a examiné le rapport initial de l’Indonésie (CAT/C/47/Add.3) à ses 492 e et 495 e  séances, les 16 et 19 novembre 2001 (CAT/C/SR.492 et 495), et a adopté les conclusions et recommandations ci ‑après.

A. Introduction

37. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’Indonésie, tout en relevant que le ra p port, a été soumis avec plus d’un an de retard puisqu’il aurait dû être présenté en novembre 1999. Il note que le rapport traite principalement de dispositions juridiques et ne contient pas de renseignements détaillés sur l’application de la Convention contre la torture dans la pratique. Toutefois, le Comité tient à remercier l’État partie des efforts qu’il a déployés pour fournir des informations complémentaires lorsqu’il a engagé un dialogue constructif avec le Comité.

38. Le Comité se félicite que l’État partie ait précisé qu’il reconnaissait la compétence du Comité comme le prévoit l’article 20 de la Convention.

39. Le Comité note que l’Indonésie n’a pas fait les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention.

B. Aspects positifs

40. Le Comité prend note des aspects positifs suivants:

a) Les efforts que déploie actuellement l’État partie pour réformer son système juridique et réviser sa Constitution et sa législation aux fins de protéger les droits de l’homme universels, en particulier le droit de toute personne de ne pas être soumise à la torture et à d’autres peines ou traitements cruels, i n humains ou dégradants;

b) L’adoption de la loi n° 26/2000 portant création de tribunaux des droits de l’homme qui sont compétents pour connaître des violations flagrantes des droits de l’homme, y compris des actes de to r ture, et l’assurance donnée par l’État partie que les tribunaux des droits de l’homme commenceront à exe r cer leurs activités au début du mois de décembre 2001;

c) Les plans exposés par les représentants de l’État partie concernant l’achèvement imminent de nouvelles lois sur la protection des victimes et des témoins et sur la création d’une commission de la v é rité et de la réconciliation chargée de réexaminer les affaires concernant des violations de droits de l’homme commises dans le passé qui ont eu des conséquences importantes sur la nation.

d) La séparation officielle de la police et de l’armée en 1999, qui constitue un élément esse n tiel de l’effort visant à veiller à ce qu’une autorité civile indépendante soit chargée du maintien de l’ordre;

e) La reconnaissance par l’État partie du fait que pour éliminer la torture il faut mettre un terme à une culture de la violence au sein de l’armée et de la police et l’assurance que des efforts visant à atteindre cet objectif constituent une grande priorité du Gouvernement;

f) La reconnaissance de la nécessité de mettre d’urgence en place un registre centralisé des détenus portant sur l’ensemble du pays, et l’assurance que l’État partie étudie actuellement la possibilité d’établir un tel système;

g) L’intérêt exprimé par l’État partie concernant la possibilité pour le Gouvernement de co o pérer avec des organisations non gouvernementales nationales à la surveillance des prisons et des lieux de détention;

h) La déclaration faite par le représentant de l’État partie au sujet d’une visite éventuelle l’année prochaine du Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats.

C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

41. Le Comité est conscient de la difficulté à laquelle se heurte l’État partie en raison des conflits s é cessionnistes armés dans plusieurs parties de son territoire et du fait des caractéristiques géographiques de l’archipel. Il reconnaît de plus les difficultés que l’État partie rencontre dans sa transition politique en vue de mettre en place un système démocratique de gestion des affaires publiques.

D. Sujets de préoccupation

42. Le Comité est préoccupé par ce qui suit:

a) Le grand nombre d’allégations d’actes de torture et de mauvais traitements imputés aux membres des forces de police, en particulier les unités de police mobile («Brimob»), l’armée (TNI) et les groupes paramilitaires qui seraient liés aux autorités, en particulier dans les zones de conflit armé (Aceh, Papua, Maluku, etc.);

b) Les allégations de recours à une force excessive à l’encontre de manifestants ou dans le cadre d’enquêtes;

c) Les allégations selon lesquelles des groupes paramilitaires qui auraient pe r pétré des actes de torture et des mauvais traitements en Indonésie sont soutenus par ce r tains secteurs de l’armée et que du personnel militaire se joindrait parfois à eux;

d) Les informations faisant état de nombreuses agressions, parfois mortelles, à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme;

e) Les allégations selon lesquelles des violations des droits fondamentaux consacrés dans la Convention sont parfois commises par du personnel militaire employé par des sociétés commerciales en Indonésie pour protéger leurs installations et éviter des conflits du travail;

f) Les allégations concernant la protection insuffisante contre le viol et d’autres formes d’agression sexuelle, qui seraient souvent utilisés comme méthodes de torture et de mauvais traitements;

g) Le grand nombre de personnes qui souffriraient de séquelles de la torture et d’autres formes de mauvais traitements.

43. Le Comité est également préoccupé par ce qui suit:

a) Un climat d’impunité favorisé en partie par le fait qu’il n’y a guère eu d’initiatives en vue de traduire en justice les membres des forces armées, de la police ou d’autres corps de l’État, en particulier ceux qui occupent des postes élevés dans l’administration, qui auraient planifié, ordonné ou perpétré des actes de torture et de mauvais traitements;

b) Le fait que l’État partie n’ait pas ouvert dans chaque cas une enquête rapide, impartiale et complète concernant les nombreuses allégations de torture signalées aux autorités, ainsi qu’à engager des poursuites contre leurs auteurs présumés, comme le prévoient les articles 12 et 13 de la Convention;

c) L’insuffisance des garanties d’indépendance et d’impartialité de la Commi s sion nationale des droits de l’homme (Komnas ‑HAM) qui l’empêche d’accomplir plein e ment son mandat, et notamment de s’acquitter seule de la fonction qui lui a été confiée en application de la loi n° 2000/26 de mener des enquêtes préliminaires sur les violations fl a grantes des droits de l’homme, y compris de la torture, avant de transmettre les résultats au Procureur général pour qu’il engage des poursuites. Comme seul le Procureur général est habilité à décider d’engager des poursuites pénales, le Comité est également préoccupé par les informations selon lesquelles les rapports de Komnas ‑HAM sur les enquêtes prélim i naires ne sont pas p u bliés, et que Komnas ‑HAM n’a pas le droit de contester une décision du Procureur général de ne pas eng a ger des poursuites dans une affaire déterminée.

44. Le Comité exprime de plus sa préoccupation au sujet des éléments suivants:

a) Le fait que la législation pénale du pays ne contient pas de définition sati s faisante du délit de torture, dans des termes conformes à l’article premier de la convention; de ce fait, la torture n’est pas punissable par des peines appropriées dans le Code pénal de l’État partie, comme le prévoit le paragraphe 2 de l’article 4 de la Convention. Le Comité note à ce sujet que la définition de la torture donnée dans la loi n o 2000/26 n’est pas ple i nement conforme à l’article premier de la Convention;

b) Les restrictions géographiques et temporelles concernant le mandat du tribunal spécial des droits de l’homme sur le Timor oriental dont la création est prévue;

c) L’insuffisance des mesures prises pour faire en sorte que le deuxième amendement à la Constitution de 1945, qui concerne le droit de toute personne de ne pas être poursuivie en vertu d’une loi rétroactive, ne s’applique pas aux infractions telles que la torture et les crimes contre l’humanité qui sont déjà criminalisées en vertu du droit international;

d) L’absence de protection suffisante des témoins et des victimes de torture, qui peuvent faire l’objet d’actes d’intimidation et de brimades par des agents de l’État;

e) La durée et les conditions de la garde à vue, et l’absence de garanties suffisantes pour pr o téger les droits des personnes privées de liberté, notamment de la possibilité d’aviser un proche parent ou un tiers de leur détention, d’avoir accès à des soins médicaux et à un avocat de leur choix;

f) Le fait que, en dépit de la séparation officielle de la police et de l’armée, celle ‑ci continue d’être mise en cause dans des allégations de torture et de mauvais traitements. Le Comité est particulièr e ment préoccupé par l’absence de recours en habeas corpus pour les militaires;

g) L’insuffisance de la protection juridique pour garantir, comme le prévoit l’article 3 de la Convention, qu’aucune personne ne sera expulsée, refoulée ni extradée vers un autre État où elle risque d’être soumise à la torture;

h) Le fait qu’il n’ait pas été répondu aux communications envoyées par le Rapporteur spécial sur la question de la torture et que celui ‑ci n’ait pas été invité à se rendre dans le pays par l’État partie, en dépit des demandes qu’il a formulées depuis 1993;

i) La coopération insuffisante avec le Groupe d’enquête sur les crimes graves de l’Administration transitoire des Nations Unies au Timor oriental (ATNUTO);

j) L’absence de statistiques et d’autres informations concernant la torture et d’autres formes de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ventilées par sexe, groupe ethnique, région gé o graphique et type et lieu de détention.

E. Recommandations

45. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De modifier sa législation pénale pour que la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants constituent des infractions strictement interd i tes par le Code pénal, dans des termes totalement conformes à la définition énoncée à l’article premier de la Convention, et de prévoir des sanctions appropriées, traduisant la gravité de tels crimes;

b) D’instituer un système de plainte bien conçu, fiable et indépendant, propre à permettre de mener des enquêtes rapides, impartiales et efficaces sur les allégations de mauvais traitements et d’actes de torture imputés à la police et à d’autres agents de l’État et, lorsque les conclusions de ces enquêtes le just i fient, de poursuivre et de punir leurs auteurs, y compris les hauts responsables qui seraient mis en cause;

c) De veiller à ce que toutes les personnes, y compris les hauts responsables, qui ont appuyé, planifié, encouragé et financé des opérations paramilitaires où la torture a été utilisée ou qui y ont participé, soient dûment traduites en justice;

d) De prendre immédiatement des mesures pour renforcer l’indépendance, l’objectivité, l’efficacité et la responsabilité publique de la Commission nationale des droits de l’homme (Ko m nas ‑HAM), et de veiller à ce que ses rapports au Procureur général soient rendus publics en temps opportun;

e) De faire en sorte que le futur tribunal spécial des droits de l’homme au Timor oriental soit doté de la compétence nécessaire pour connaître des nombreuses violations des droits de l’homme qui auraient été commises sur ce territoire entre le 1 er  janvier et le 25 octobre 1999;

f) De veiller à ce que les auteurs d’actes qualifiés de crimes en droit international, comme la torture et les crimes contre l’humanité commis dans le passé, fassent l’objet d’enquêtes et que les respons a bles soient traduits devant les tribunaux indonésiens;

g) De continuer d’appliquer des mesures pour réformer la police en vue de renforcer son ind é pendance à l’égard de l’armée et d’en faire une institution civile indépendante chargée du maintien de l’ordre;

h) De réduire la durée de la détention provisoire, d’assurer une protection suffisante aux témoins et aux victimes de la torture et, conformément à l’article 15 de la Convention, d’assurer que toute déclaration obtenue par la torture ne puisse être invoquée dans une procédure sauf contre le tortio n naire;

i) De veiller à ce qu’aucune personne ne puisse être expulsée, refoulée ou e x tradée vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture, conformément à l’article 3;

j) De garantir la protection des défenseurs des droits de l’homme contre les brimades, les m e naces et autres agressions;

k) De renforcer l’éducation aux droits de l’homme pour donner des orientations et une form a tion concernant en particulier l’interdiction de la torture, aux responsables de l’application de la loi, aux juges et au personnel médical;

l) D’inviter le Rapporteur spécial sur la question de la torture à se rendre dans ses territoires;

m) De coopérer pleinement avec l’ATNUTO, en particulier en apportant son assistance aux enquêtes ou aux procédures judiciaires conformément au mémorandum d’accord signé en avril 2000, et n o tamment en permettant aux membres du Groupe d’enquête sur les crimes graves d’avoir sans réserve accès aux dossiers, en autorisant des visites en Indonésie et au Timor oriental et en transférant des suspects pour qu’ils soient jugés au Timor oriental;

n) De prendre immédiatement des mesures pour offrir les services de réadaptation dont les très nombreuses victimes de la torture et de mauvais traitements en Indonésie ont un besoin urgent;

o) De faire les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention;

p) De faire figurer dans son prochain rapport périodique des données statistiques concernant la torture et d’autres formes de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ventilées notamment par sexe, groupe ethnique, région géographique et type et lieu de détention. En outre, des informations d e vraient être données sur les plaintes et les affaires examinées par les juridictions internes, et notamment sur les résultats des enquêtes réalisées et leurs conséquences pour les victimes en ce qui concerne les répar a tions et des indemnisations;

q) De faire diffuser largement les conclusions et recommandations du Comité dans l’ensemble du pays, dans toutes les langues voulues.

Observations du Gouvernement indonésien

46. Le Comité a pris connaissance de la note verbale, de la Mission permanente de l’Indonésie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, datée du 7 décembre 2001, qui contenait des observations relatives aux conclusions et recommandations adoptées par le Comité et des renseignements complémentaires. Le Comité remercie le Gouvernement i n donésien de la note verbale et prend note avec satisfaction des nombreuses réformes lég i slatives et institutionnelles qui sont en cours. La teneur de la note verbale sera reproduite dans le document portant la cote CAT/C/GC/2001/1.

ISRAËL

47. Le Comité a examiné le troisième rapport périodique d’Israël (CAT/C/54/Add.1) à ses 496 e , 498 e et 499 e séances, les 20 et 21 novembre 2001 (CAT/C/SR.495 et 498), et a adopté les conclusions et reco m mandations ci ‑après.

A. Introduction

48. Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique d’Israël, qui était attendu pour le 1 er  novembre 2000 et qui a été reçu le 15 mars 2001. Le rapport est rédigé en totale conformité avec les directives du Comité concernant la forme et le contenu des rapports périodiques.

49. Le Comité salue la ponctualité avec laquelle l’État partie s’efforce toujours de faire parvenir ses rapports et se félicite de la poursuite d’un dialogue constructif avec Israël.

B. Aspects positifs

50. Le Comité accueille avec satisfaction les éléments suivants:

a) L’arrêt rendu en septembre 1999 par la Cour suprême d’Israël dans l’affaire Commission publique contre la torture en Israël c. l’État d’Israël, qui a statué que l’utilisation par le Service général de sécurité (SGS) de méthodes d’interrogatoire faisant appel à l’exercice de «pressions physiques modérées» était illégale car elle était incompatible avec la protection que la Constitution accorde au droit de l’individu à la dignité;

b) Le fait que les autorités du Service général de sécurité (SGS) aient adressé à l’ensemble du personnel une directive soulignant que les dispositions de l’arrêt de la Cour suprême devaient être strict e ment respectées dans toutes les enquêtes menées par le Service;

c) La décision du Gouvernement israélien de ne pas proposer de texte législatif qui autoris e rait l’emploi de pressions physiques dans les interrogatoires menés par la police ou par le SGS;

d) L’arrêt rendu par la Cour suprême israélienne en avril 2000 par lequel elle a statué que le maintien en détention de Libanais prisonniers en Israël qui ne représentaient pas une menace pour la sécur i té nationale ne pouvait pas être autorisé, décision qui a été suivie de la libération d’un grand nombre de d é tenus libanais;

e) La contribution régulière d’Israël au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture;

f) La possibilité d’obtenir très rapidement un examen judiciaire de leur situation pour les pe r sonnes en détention qui adressent une requête à la Cour suprême;

g) Le fait que depuis 1994 les enquêtes concernant les plaintes contre le SGS relèvent de la responsabilité du Ministère de la justice;

h) La création d’une Commission judiciaire d’enquête pour établir les faits dans les évén e ments d’octobre 2000 au cours desquels 14 personnes ont trouvé la mort.

C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

51. Le Comité a tout à fait conscience de la difficile situation de trouble que connaît Israël, en particulier dans les territoires occupés, et comprend son souci de sécurité. Tout en reconnaissant le droit d’Israël de protéger ses citoyens contre la violence, il réaffirme qu’aucune circonstance exceptionnelle ne peut être invoquée pour justifier la torture (par. 2 de l’article 2 de la Convention).

D. Sujets de préoccupation

52. Le Comité est préoccupé par les éléments suivants:

a) Tout en reconnaissant l’importance de l’arrêt rendu en septembre 1999 par la Cour s u prême, le Comité regrette certaines de ses conséquences:

i) L’arrêt ne contient pas d’interdiction formelle de la torture;

ii) La Cour suprême interdit le recours à la privation de sommeil pour briser le détenu, mais elle a précisé que si cette mesure était simplement un «effet secondaire» inhérent à l’interrogatoire, elle n’était pas illégale. Concrètement, dans les cas d’interrogatoires prolongés, il est impossible de faire la distinction entre les deux situations;

iii) La Cour suprême a indiqué que les agents du SGS chargés des interrogatoires qui font usage de pressions physiques dans des circonstances extrêmes (attentats imminents) peuvent ne pas être tenus pour pénalement responsables car ils peuvent invoquer l’«état de nécessité».

b) Bien que l’État partie fasse valoir que tous les actes de torture, tels qu’ils sont définis à l’article premier de la Convention, sont des infractions pénales en droit israélien, le Comité n’en est to u jours pas convaincu et se déclare de nouveau préoccupé par le fait que la torture, selon la définition de la Convention, ne fait toujours pas l’objet d’une disposition de la loi interne;

c) Des informations continuent d’être reçues dénonçant l’emploi contre des détenus palest i niens par des agents du SGS de méthodes d’interrogatoire qui ont été interdites par la Cour suprême dans son arrêt de septembre 1999;

d) Des tortures et des mauvais traitements seraient infligés à des mineurs pale s tiniens, en pa r ticulier ceux qui sont détenus au poste de police de Gush Etzion. La différence dans la définition de l’enfant selon qu’il s’agit d’Israël ou des territoires occupés est également préoccupante. Si en droit israélien la m a jorité est atteinte à l’âge de 18 ans, en vertu de l’ordonnance militaire n o  132 le mineur est une personne de moins de 16 ans. (En Israël, y compris dans les territoires occupés, aucun enfant mineur de 12 ans ne peut être tenu pour pénalement responsable);

e) Tout en relevant la nette diminution du nombre de personnes placées en i n ternement adm i nistratif depuis l’examen du rapport précédent de l’État partie, le Comité continue d’être préoccupé par la pratique de l’internement administratif qui n’est pas co m patible avec l’article 16 de la Convention;

f) La persistance du recours à la détention au secret, même dans le cas d’enfants, est un sujet de grave préoccupation;

g) Malgré les nombreuses plaintes faisant état de tortures et de mauvais traitements imputés à des responsables des forces de l’ordre que le Comité a reçues, très peu de responsables présumés ont fait l’objet de poursuites.

h) Tout en notant que, d’après la délégation, tous les cas où quelqu’un dénonce l’usage de violences physiques à l’encontre d’un détenu sont toujours traités comme une infraction pénale et font l’objet de l’enquête appropriée, le Comité s’inquiète de ce que le Département des enquêtes sur le personnel de police (DIPP) a la faculté de décider qu’un fonctionnaire de police ou un enquêteur du SGS peut être soumis à une action disciplinaire à la place de l’action pénale. Il peut y avoir là une violation du paragr a phe 1 de l’article 7 de la Convention;

i) Les politiques israéliennes de bouclage peuvent dans certains cas représenter une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant (art. 16 de la Convention);

j) Les politiques israéliennes de démolition de maisons peuvent dans certains cas représenter une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant (art. 16 de la Convention);

k) La pratique judiciaire consistant à déclarer recevables des éléments de preuve objectifs t i rés d’aveux irrecevables est préoccupante;

l) Le Comité s’inquiète également des cas d’exécution «extrajudiciaire» portés à son attention.

E. Recommandations

53. Le Comité recommande ce qui suit:

a) Les dispositions de la Convention devraient être incorporées au droit interne par un texte de loi; en particulier, il faudrait prévoir un délit de torture selon la définition de l’article premier de la Convention;

b) Les conditions de l’internement administratif dans les territoires occupés devraient être modifiées de façon à assurer le respect de l’article 16;

c) L’État partie devrait réexaminer sa législation et ses politiques afin de garantir que tous les détenus sans exception soient déférés rapidement devant un juge et qu’ils puissent sans délai communiquer avec un avocat;

d) L’État partie devrait veiller à ce que les méthodes d’interrogatoire interdites par la Convention ne soient jamais utilisées par la police ni par le SGS, en aucune circon s tance;

e) Étant donné le grand nombre d’allégations d’actes de tortures et de mauvais traitements imputés à des responsables de l’application de la loi, l’État partie devrait prendre toutes les mesures effic a ces nécessaires pour prévenir le crime de torture et les autres formes de traitement ou de peine cruels, inh u mains ou dégradants et devrait instituer des mécanismes efficaces de plainte, d’enquête et de poursuites dans ce cadre;

f) Toutes les victimes de tortures et de mauvais traitement devraient avoir la possibilité réelle de bénéficier de mesures de réadaptation et d’indemnisation;

g) L’État partie devrait renoncer à ses politiques de bouclage et de démolition de maisons quand elles entraînent une violation de l’article 16 de la Convention;

h) L’État partie devrait intensifier l’éducation aux droits de l’homme et les activités de form a tion, en particulier dans les domaines visés par la Convention, à l’intention des membres du SGS, des forces de défense israéliennes et de la police ainsi que des médecins;

i) Les dispositions prévoyant que l’état de nécessité peut représenter une justification du crime de torture devraient être abrogées;

j) L’État partie devrait faire adopter les mesures législatives nécessaires pour que soient e x clus non seulement les aveux obtenus sous la torture mais aussi tout élément de preuve obtenu comme suite à ces aveux;

k) Israël devrait envisager de retirer la réserve qu’il a émise à l’égard de l’article 20 de la Convention et faire la déclaration prévue aux articles 21 et 22.

UKRAINE

54. Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique de l’Ukraine (CAT/C/55/Add.1) à ses 488 e , 491 e et 499 e  séances (CAT/C/SR.488, 491 et 499), les 14, 15 et 21 novembre 2001, et a adopté les concl u sions et recommandations ci ‑après.

A. Introduction

55. Le Comité se félicite de la présentation en temps voulu du quatrième rapport périodique de l’Ukraine. Il note que ce rapport n’a pas été rédigé en parfaite conformité avec les directives du Comité pour l’établissement des rapports périodiques. Le Comité note aussi que ce rapport traite principalement de dispositions juridiques et manque de renseignements détaillés sur certains articles de la Convention ainsi que sur la suite donnée aux recommandations qu’il a faites à l’issue de l’examen du troisième rapport péri o dique. Cependant, le Comité tient à exprimer sa satisfaction des réponses approfondies et riches de rense i gnements données oralement par la délégation de l’État partie pendant l’examen du rapport.

B. Aspects positifs

56. Le Comité note avec satisfaction:

a) L’action menée par l’État partie pour réformer sa législation, notamment l’adoption d’un no u veau code pénal qui contient un article qualifiant la torture d’infraction pénale spécifique, l’institution d’une nouvelle cour constitutionnelle, la mise en vigueur d’une nouvelle législation relative à la protection des droits de l’homme et l’adoption d’une nouvelle loi sur l’immigration;

b) Le fait que l’Ukraine, bien qu’elle ne soit pas partie à la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés ni à son Protocole de 1967, a adopté en juin 2001 une nouvelle loi sur les r é fugiés qui reprend, notamment, la définition du «réfugié» que donne cette Convention. Le Comité se félicite aussi de l’adoption en janvier 2001 d’une nouvelle loi sur la nationalité qui a permis aux personnes qui avaient été exilées de revenir en Ukraine et d’obtenir la nationalité ukrainienne;

c) La suppression du champ d’application de la loi sur le secret d’État des infractions constituées par des violations des droits de l’homme;

d) L’abolition de la peine de mort;

e) Les renseignements figurant dans le rapport selon lesquels, par une loi en date du 5 novembre 1998, l’Ukraine a reconnu la compétence du Comité sur son territoire, comme le prévoient les articles 21 et 22 de la Convention;

f) La création du Bureau du Commissaire aux droits de l’homme (médiateur) chargé de la prote c tion des droits de l’homme en Ukraine et le pouvoir qu’a celui ‑ci de visiter sans restriction tous les lieux où se trouvent des personnes privées de liberté;

g) L’assurance donnée par le chef de la délégation que les rapports des trois visites effectuées par le Comité européen pour la prévention de la torture, qui ont eu lieu en 1998, 1999 et 2000, seront rendus publics.

C. Sujets de préoccupation

57. Le Comité est préoccupé par les éléments suivants:

a) Les nombreuses informations indiquant que la torture est toujours pratiquée couramment dans l’État partie et le fait que, selon le Commissaire aux droits de l’homme, 30 % des prisonniers subissent des tortures;

b) Le renvoi forcé de quatre nationaux ouzbeks, membres de l’opposition ouzbèke, qui risquaient fort d’être soumis à la torture et dont le cas avait fait l’objet d’un appel urgent du Rapporteur spécial de l’ONU sur la question de la torture;

c) Le fait que des juges siègent aux côtés des représentants du Ministère de l’intérieur dans les «comités de coordination de la lutte contre la criminalité» nouvell e ment institués, situation qui est contraire au principe de la séparation des pouvoirs et peut compromettre l’indépendance de la magistrature;

d) Les nombreuses condamnations reposant sur des aveux et l’un des critères retenus pour la promotion des enquêteurs, qui serait le nombre de crimes élucidés, ce qui peut conduire à torturer et ma l traiter des détenus ou des suspects pour leur extorquer des «aveux»;

e) Le fait que les autorités ne mènent pas d’enquêtes rapides, impartiales et approfondies sur les plaintes faisant état de tels actes et ne poursuivent ni ne punissent les responsables;

f) Les informations reçues par le Comité selon lesquelles les familles et les avocats ne sont info r més de la détention qu’après que la personne arrêtée a été transférée du lieu de garde à vue dans l’établissement de détention provisoire, procédure qui prend en général au moins deux semaines. Le Comité est également préoccupé par l’absence de dispositions juridiques claires sur le moment exact où une pe r sonne détenue peut exercer son droit de consulter un défenseur, de subir un examen médical et d’informer un membre de sa famille de sa détention;

g) La durée de la détention provisoire, qui peut atteindre 18 mois selon la loi mais qui en pratique peut être prolongée jusqu’à trois ans, la durée de l’internement administratif qui peut atteindre 15 jours et celle de la détention des «sans domicile fixe» qui peut atteindre 30 jours;

h) Les condamnations à de lourdes peines de prison pour diffusion non violente d’idées et d’informations;

i) Les menaces et les actes de harcèlement, et même les mauvais traitements, s u bis, d’après les informations reçues, par des journalistes indépendants et d’autres perso n nes qui ont dénoncé les exactions commises par des agents de l’État;

j) Le surpeuplement, l’absence de services d’hygiène de base et d’accès à des soins médicaux adéquats dans les prisons et centres de détention provisoire ainsi que la forte incidence de la tuberculose;

k) La formation insuffisante des policiers et du personnel pénitentiaire concernant leurs devoirs en vertu de la loi et les droits des détenus;

l) En dépit d’un certain progrès, la pratique des brimades et du bizutage (dedovchtchina) visant les jeunes conscrits est toujours largement en vigueur dans les forces armées.

D. Recommandations

58. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre des mesures efficaces pour empêcher les actes de torture et les ma u vais traitements sur son territoire, compte tenu des informations persistantes selon lesque l les la torture y est toujours rég u lièrement pratiquée;

b) De déposer auprès du Secrétaire général de l’ONU sa déclaration d’acceptation de la compétence du Comité en ce qui concerne les articles 21 et 22 de la Convention et retirer la réserve qu’il a faite à propos de l’article 20;

c) De faire en sorte que les autorités compétentes respectent strictement le principe consacré à l’article 3 de la Convention, qui interdit d’expulser, de renvoyer ou d’extrader un individu vers un État où il risque d’être soumis à la torture;

d) D’établir sa compétence aux fins de connaître des infractions de torture même si l’auteur est ressortissant d’un autre État mais se trouve sur un territoire placé sous sa juridiction, et, dans le cas où il n’exerce pas sa juridiction, d’extrader l’intéressé;

e) De préciser et d’harmoniser les dispositions parfois contradictoires relatives au moment où la personne en détention a droit aux services d’un défenseur et de veiller à ce que ce droit soit exercé dès le moment de l’arrestation;

f) De faire en sorte qu’il soit interdit par la loi de procéder à l’interrogatoire des détenus en l’absence d’un défenseur choisi par eux;

g) De prendre les mesures voulues pour garantir l’indépendance des juges et des avocats, ainsi que l’objectivité des procureurs, dans l’exercice de leurs fonctions, conformément aux normes internation a les;

h) De garantir dans la pratique le respect absolu du principe de l’irrecevabilité des éléments de preuve obtenus par la torture;

i) De prendre des mesures efficaces pour instituer un mécanisme totalement indépendant d’enquêtes sur les plaintes, afin que les allégations de torture fassent l’objet d’enquêtes rapides, indépe n dantes et complètes, notamment les allégations nombreuses et détaillées provenant de diverses organisations non gouvernementales nationales et internationales;

j) De prendre des mesures efficaces pour améliorer les conditions de vie dans les prisons et les centres de détention provisoire, notamment en ce qui concerne l’espace vital, les services et l’hygiène, et d’établir un système d’inspection des prisons et des centres de détention par des inspecteurs indépendants dont les conclusions seraient rendues publiques;

k) De raccourcir la durée actuelle de la détention provisoire (72 heures) au cours de laquelle les détenus peuvent être placés en cellule d’isolement avant d’être tr a duits devant un juge;

l) D’accélérer le processus de formation des responsables de l’application de la loi et du personnel médical en ce qui concerne leurs devoirs et leur obligation de respecter les droits et la dignité des personnes privées de liberté;

m) De prendre des mesures efficaces pour prévenir et réprimer la traite des femmes et les a u tres formes de violence à l’égard des femmes;

n) D’adopter un système plus efficace pour mettre fin à la pratique des brimades et du bizutage (dedovchtchina) dans les forces armées, grâce à la formation et à l’éducation, et de poursuivre et punir les auteurs de ces infractions;

o) D’instituer une procédure pour assurer une réparation aux victimes de la torture, nota m ment une indemnisation équitable et suffisante;

p) De poursuivre son programme de lutte contre la tuberculose dans les prisons et les centres de détention provisoire;

q) De diffuser largement dans le pays les conclusions et recommandations du Comité, dans toutes les langues voulues.

ZAMBIE

59. Le Comité a examiné le rapport initial de la Zambie (CAT/C/47/Add.2) à ses 494 e et 497 e  séances, les 19 et 20 novembre 2001 (CAT/C/SR.494 et 497) et a adopté les conclusions et recommandations ci ‑après.

A. Introduction

60. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de la Zambie dont il relève avec appréciation le caractère franc et approfondi. Il se félicite également des réponses directes et détaillées données par la délégation de haut niveau aux questions posées pendant le di a logue.

B. Aspects positifs

61. Le Comité note avec satisfaction les éléments suivants:

a) Le retrait de la réserve que l’État partie avait faite à l’égard de l’article 20 de la Convention;

b) La volonté de l’État partie qui s’est engagé à:

i) Prévoir le délit de torture, conformément à l’article 4 de la Convention;

ii) Faire adopter sans délai des textes législatifs appropriés et d’autres mesures pour assurer l’incorporation de la Convention à la législation interne;

iii) Veiller à ce que les aveux obtenus par la torture soient irrecevables et examiner la que s tion des preuves obtenues avec des aveux irrecevables;

iv) Faire la déclaration prévue aux articles 21 et 22 de la Convention;

v) Ôter à la police les fonctions de poursuites pour les transférer à l’Avocat général (Dire c tor of Public Prosecutions);

c) La promulgation de la loi portant modification de la loi sur la police (n o  14 de 1999) qui prévoit des mesures visant à protéger les personnes placées en garde à vue et à surveiller leur situation;

d) La mise en œuvre d’un plan de transformation de l’administration de la justice des mineurs visant à améliorer le traitement des mineurs dans le système de la justice pénale;

e) L’interdiction, par la loi, des châtiments corporels;

f) La création d’une commission des droits de l’homme.

C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

62. Le Comité reconnaît les difficultés que l’État partie a rencontrées dans le processus de transition politique vers un système démocratique de gouvernement. Il est également conscient des importantes contraintes d’ordre financier et technique que l’État partie connaît.

D. Sujets de préoccupation

63. Le Comité se déclare préoccupé par la persistance des allégations faisant état de l’usage généralisé de la torture joint à l’apparente impunité dont jouissent les responsables.

64. Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a pas incorporé la Convention dans sa lég i slation et n’a pas davantage introduit de dispositions correspondant à plusieurs articles, en particulier:

a) La définition de la torture (art. 1 er );

b) La criminalisation de la torture (art. 4);

c) L’interdiction des peines cruelles dans le système pénal (art. 16);

d) La reconnaissance que la torture constitue une infraction pour laquelle l’État partie peut procéder à l’extradition (art. 8);

e) La surveillance systématique des règles d’interrogatoire (art. 11);

f) L’établissement de sa compétence pour connaître des actes de torture, même quand ils sont commis à l’étranger (art. 5).

65. Le Comité est également préoccupé par les éléments suivants:

a) Le fait que les plaintes pour torture ne fassent pas l’objet d’enquêtes rapides et que les su s pects ne soient pas traduits en justice sans délai;

b) Les mauvaises conditions pénitentiaires qui portent atteinte à la santé des détenus comme des gardiens, en particulier le manque de personnel sanitaire et de médicaments ainsi que le surpeuplement grave;

c) L’incidence de la violence contre les femmes dans la société, illustrée par les cas signalés de violence dans les prisons et de violence familiale.

E. Recommandations

66. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’incorporer la Convention dans son droit interne;

b) D’adopter une définition de la torture totalement conforme à celle qui est donnée à l’article premier de la Convention et de prévoir des peines appropriées;

c) De prendre les mesures voulues pour établir sa compétence aux fins de connaître des délits de torture, où qu’ils puissent être commis;

d) De prendre toute mesure, d’ordre législatif et autre, afin de s’attaquer au problème de l’impunité et de garantir que les actes de torture fassent l’objet de poursuites en application complète de la loi et que les personnes qui se plaignent de mauvais traitements aient accès si nécessaire à l’assistance d’un conseil;

e) De prendre des mesures d’ordre législatif et autre pour assurer la surveillance systématique des règles, instructions, méthodes et pratiques d’interrogatoire;

f) De renforcer les programmes de formation et d’éducation sur l’interdiction de la torture à l’intention des responsables de l’application de la loi;

g) De créer des centres de réadaptation pour les victimes de la torture;

h) De mettre en place des programmes pour prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes, notamment la violence familiale;

i) De faire en sorte que l’Inspection générale des services de police (Police Public Complaints Auth o rity) entre en fonctions rapidement et puisse agir efficacement.

67. Tout en accueillant avec satisfaction la loi portant modification de la loi sur les pr i sons qui prévoit la création de prisons en plein air, le Comité invite instamment l’État pa r tie à trouver de nouveaux moyens de réduire le surpeuplement carcéral, d’accroître le r e cours à des peines non privatives de liberté et d’une façon générale à améliorer les installations de détention, en particulier à cause des effets délétères sur la santé des détenus et du personnel pénitentiaire.

DANEMARK

68. Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique du Danemark (CAT/C/55/Add.2) à ses 508 e , 510 e et 518 e  séances, les 2, 3 et 10 mai 2002 (CAT/C/SR.508, 510 et 518) et a adopté les conclusions et r e commandations ci ‑après.

A. Introduction

69. Le Comité accueille avec satisfaction le quatrième rapport périodique du Danemark, qui a été so u mis dans les délais et a été établi en totale conformité avec les directives du Comité concernant la forme et le contenu des rapports périodiques. Le Comité note en particulier avec satisfaction que l’État partie a consacré une partie distincte de son rapport aux recommandations qu’il lui avait adressées précédemment. Il se félicite également du dialogue franc et constructif qui a eu lieu avec les représentants de l’État partie.

B. Aspects positifs

70. Le Comité félicite l’État partie pour le respect des droits de l’homme en général et de ses obligations en vertu de la Convention en particulier dont il fait toujours preuve, ai n si que pour le rôle actif qu’il joue au plan international dans la lutte contre la torture.

71. Le Comité accueille avec satisfaction la recommandation faite par la Commission créée par le M i nistère de la justice visant à incorporer trois grands instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme dans la législation interne.

72. Le Comité prend également note avec satisfaction:

a) De l’adoption de la révision de la loi sur l’administration de la justice, qui a permis de re n forcer de façon notable le contrôle du bien ‑fondé du placement en régime cellulaire, en diminuant le recours à ce régime et en assurant un contrôle judiciaire de son application pendant la détention provisoire;

b) Des circulaires distribuées par le Commissaire national de la police, qui prévoient nota m ment la possibilité pour les familles de communiquer sans délai avec les détenus, un examen médical obl i gatoire de toute personne placée en détention et l’accès sans retard aux services d’un avocat et d’un inte r prète;

c) De l’adoption d’un texte législatif tendant à assurer aux demandeurs d’asile une plus grande protection;

d) Des efforts entrepris en ce qui concerne les programmes de formation des fonctionnaires de police;

e) Des services pluridisciplinaires destinés aux personnes vivant au Danemark, qui ont été victimes d’actes de torture;

f) De l’augmentation de la contribution de l’État partie au Fonds de contributions volontaires pour les victimes de la torture et du soutien qu’il continue à apporter aux centres nationaux de réadaptation des victimes de la torture.

C. Sujets de préoccupation

73. Le Comité est préoccupé par les éléments suivants:

a) Le fait qu’il n’y ait pas dans la législation pénale de l’État partie de définition de la torture telle qu’elle est donnée à l’article premier de la Convention et que la torture n’y soit pas qualifiée d’infraction spécifique, assortie de peines appropriées, conformément au paragraphe 2 de l’article 4 de la Convention;

b) L’absence de procédures appropriées de recours contre les décisions de placement en régime cellulaire des condamnés exécutant leur peine;

c) Le projet de modification de la loi sur les étrangers qui peut avoir pour r é sultat que les étrangers à qui le permis de séjour aura été refusé devront quitter le pays immédiatement après le rejet de leur demande, disposition qui, si elle est appliquée stri c tement, empêchera le recours à l’article 22 de la Convention.

D. Recommandations

74. Le Comité recommande ce qui suit:

a) L’État partie devrait faire en sorte que la recommandation de la Commission danoise concernant l’incorporation de la Convention dans la législation interne soit appliquée sans délai;

b) L’État partie devrait prévoir dans sa législation pénale des dispositions pour qualifier la torture, telle qu’elle est définie à l’article premier de la Convention, d’infraction punissable conformément au paragraphe 2 de l’article 4 de la Convention;

c) L’État partie devrait continuer à étudier les effets du régime cellulaire sur les détenus et à noter les incidences du nouveau projet de loi diminuant le nombre de motifs pouvant conduire au placement en régime cellulaire et réduisant sa durée;

d) La loi régissant le placement des condamnés en régime cellulaire devrait être modifiée de façon à mettre en place des mécanismes de contrôle de la justification de la mesure ainsi que de sa durée;

e) L’État partie devrait veiller à ce que la modification de la loi sur les étra n gers n’ait pas pour effet d’empêcher les étrangers dont la demande de permis de séjour a été rejetée de s’adresser au C o mité en vertu de l’article 22 de la Convention;

f) Les conclusions et recommandations du Comité devraient faire l’objet d’une large diffusion dans l’État partie, dans toutes les langues voulues.

LUXEMBOURG

75. Le Comité a examiné le document contenant les troisième et quatrième rapports périodiques du Luxembourg (CAT/C/34/Add.14) à ses 514 e , 517 e et 525 e séances, les 7, 8 et 15 mai 2002 (CAT/C/SR.514, 517 et 525), et a adopté les conclusions et recommandations ci ‑après.

A. Introduction

76. Le Comité accueille avec satisfaction les troisième et quatrième rapports périod i ques du Luxembourg, qui ont été soumis en un seul document comme le Comité l’avait recommandé. Le rapport a été soumis dans les délais et a été établi en totale conformité avec les directives du Comité concernant la forme et le contenu des rapports périodiques. Le Comité rend hommage à l’État partie pour l’excellente qualité de son rapport et se fél i cite du dialogue fructueux et constructif qu’il a eu avec la délégation de haut niveau de l’État partie.

B. Aspects positifs

77. Le Comité félicite l’État partie pour le respect des droits de l’homme en général et de ses obligations en vertu de la Convention en particulier dont il fait toujours preuve.

78. Le Comité prend note des éléments positifs suivants:

a) Tous les sujets de préoccupation relevés antérieurement par le Comité ainsi que les recommandations formulées ont été pris en considération concrètement et en détail;

b) Par la loi du 24 avril 2000, la torture a été incorporée dans le Code pénal en tant que crime distinct et en tant que circonstance aggravante d’un crime ou délit contre la personne. En outre, la définition de la torture s’inspire largement de la définition figurant à l’article premier de la Convention et englobe au s si bien la torture physique que psychologique;

c) La création de la Commission consultative des droits de l’homme, le 26 mai 2000;

d) La loi du 31 mai 1999 portant création d’un corps de police grand ‑ducale et d’une inspection générale de la police, dont le premier objectif est la fusion de la police et de la gendarmerie. La loi érige notamment en infraction pénale la traite des personnes;

e) La loi du 14 mai 2000 portant approbation du Statut de Rome de la Cour pénale internati o nale.

C. Sujets de préoccupation

79. Le Comité est préoccupé par:

a) Le fait que des mineurs qui doivent être placés en centre disciplinaire sont incarcérés dans des prisons pour adultes;

b) L’existence du régime cellulaire strict, en particulier à titre de mesure préventive durant la détention avant jugement.

D. Recommandations

80. Le Comité recommande ce qui suit:

a) L’État partie devrait veiller à ce que des mineurs ne soient pas placés dans des prisons pour adultes à des fins disciplinaires;

b) Le régime cellulaire devrait être expressément et rigoureusement réglementé par la loi et le contrôle judiciaire devrait être renforcé, afin que cette mesure punitive ne soit appliquée que dans des ci r constances graves, l’objectif étant à terme de la supprimer, en particulier pendant la détention avant jug e ment;

c) L’État partie devrait envisager de prévoir une indemnisation appropriée pour les victimes de la torture;

d) Les conclusions et recommandations du Comité devraient faire l’objet d’une large diffusion dans l’État partie, dans toutes les langues voulues.

NORVÈGE

81. Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique de la Norvège (CAT/C/55/Add.4) à ses 511 e , 514 e , et 519 e séances, les 6, 7 et 10 mai 2002 (CAT/C/SR.511, 514 et 519) et a adopté les conclusions et recommandations ci ‑après.

A. Introduction

82. Le Comité accueille avec satisfaction le quatrième rapport périodique de la Norvège qui a été so u mis dans les délais et a été établi en totale conformité avec les directives du Comité concernant l’établissement des rapports périodiques des États parties. Le Comité rend hommage à l’État partie pour la ponctualité avec laquelle il présente ses rapports et se félicite du dialogue fructueux et constructif qui s’est instauré avec ce dernier.

B. Aspects positifs

83. Le Comité félicite l’État partie pour le respect des droits de l’homme en général et les dispositions de la Convention en particulier dont il fait toujours preuve.

84. Le Comité prend note avec satisfaction:

a) De l’adoption, dans le cadre de la suite à donner à la Conférence mondiale sur les droits de l’homme de 1993, d’un plan d’action en faveur des droits de l’homme pour la période 2000 ‑2004, qui pr é voit notamment des mesures destinées à renforcer l’application de la Convention dans la législation nati o nale;

b) De la publication de directives concernant la notification de la famille et des avocats en cas d’arrestation, ainsi que le droit des personnes placées en garde à vue de bénéficier de services de santé;

c) De la proposition tendant à introduire dans le Code pénal une nouvelle disposition interd i sant la torture et en faisant une infraction pénale, conformément à l’article premier de la Convention;

d) Des propositions de modification de la loi sur la procédure pénale visant à restreindre la pratique du régime cellulaire et à renforcer le contrôle judiciaire en la m a tière en imposant des limites r é glementaires;

e) Des travaux entrepris en vue d’évaluer la qualité des enquêtes menées par les groupes sp é ciaux;

f) De la régularité et de la générosité des dons effectués par l’État partie au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture;

g) Du pourcentage élevé de femmes au sein de l’appareil judiciaire, des forces de police et du personnel pénitentiaire.

C. Sujets de préoccupation

85. Le Comité continue d’être préoccupé par le recours à l’emprisonnement cellulaire pendant la déte n tion avant jugement.

D. Recommandations

86. Le Comité recommande ce qui suit:

a) L’adoption, ainsi qu’il est proposé ci ‑dessus, d’une loi introduisant dans le droit pénal no r végien, le délit de torture selon la définition de l’article premier de la Convention. Le Comité demande que des informations à ce sujet figurent dans le prochain rapport périodique de la Norvège;

b) L’État partie devrait indiquer dans son prochain rapport périodique les mes u res qu’il aura prises pour répondre à l’inquiétude persistante du Comité concernant le pl a cement en régime cellulaire pe n dant la détention avant jugement;

c) L’État partie devrait inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur la suite donnée aux propositions d’amendement de la loi sur la procédure pénale tendant à limiter la pratique de l’emprisonnement cellulaire;

d) L’État partie devrait indiquer dans son prochain rapport périodique les modifications qu’il est proposé d’apporter à la loi sur les étrangers sur la base de la résolution 1373 (2001) du Conseil de séc u rité sur la coopération internationale face aux menaces à la paix et à la sécurité internationales que font p e ser les actes de terrorisme;

e) Les conclusions et recommandations du Comité devraient faire l’objet d’une large diffusion dans l’État partie, dans toutes les langues voulues.

FÉDÉRATION DE RUSSIE

87. Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de la Fédération de Russie (CAT/C/34/Add.15) à ses 520 e , 523 e et 526 e séances, les 13, 14 et 16 mai 2002 (CAT/C/SR.520, 523 et 526), et a adopté les conclusions et recommandations suivantes.

A. Introduction

88. Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique de la Fédération de Russie, qui a été soumis avec retard. Ce rapport répond directement à certaines des préoccupations exprimées et des recommandations formulées par le Comité dans les conclusions qu’il a adoptées en 1996. Le Comité r e grette de n’avoir pas reçu les renseignements supplémentaires qu’il avait demandés bien que l’État partie lui ait donné l’assurance qu’il les lui communiquerait rapidement. Le Comité apprécie les informations actual i sées et détaillées ainsi que les réponses complètes fournies oralement par les représentants de l’État partie. Il note toutefois, que, faute de temps, un grand nombre des questions posées par le Comité lors de l’examen du troisième rapport périodique sont restées sans réponse.

B Aspects positifs

89. Le Comité prend note des faits nouveaux positifs suivants:

a) La ratification de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou tra i tements inhumains ou dégradants;

b) L’introduction d’un nouveau Code pénal et d’un nouveau Code de procédure pénale ainsi que l’assurance donnée par l’État partie que ce dernier entrera en vigueur dans son intégralité le 1 er juillet 2002. Le Comité se félicite de l’inclusion dans le Code de pr o cédure pénale de nouvelles dispositions concernant, notamment, les procès devant jury, la limitation plus stricte de la durée de la détention et des interrogatoires, l’exclusion des éléments de preuve obtenus en dehors de la présence d’un avocat de la d é fense et le fait de conférer à un juge plutôt qu’à un procureur le pouvoir d’ordonner une arrestation;

c) La décision de placer le système pénitentiaire qui relevait jusqu’à présent du Ministère des affaires intérieures sous l’autorité du Ministère de la justice;

d) Les mesures prises pour améliorer les conditions de détention et pour réduire le surpeuplement dans les prisons;

e) Les assurances données par le représentant de l’État partie qu’un service de substitution et un «service militaire volontaire de type contractuel» remplaceraient la conscription obligatoire dans les fo r ces armées;

f) L’ordonnance nº 46 du Procureur général, qui rend obligatoire la présence de représentants du Bureau du Procureur durant les «opérations spéciales» menées en Tché t chénie, et l’ordonnance nº 80 du commandant des forces fédérales du Caucase-Nord selon laquelle les militaires doivent s’identifier, enregi s trer les détentions, aviser la famille des personnes détenues et prendre d’autres mesures pour protéger les civils contre tous actes de violence;

g) La mise en place au sein du Ministère des affaires intérieures d’un groupe de travail spécial ayant pour mandat de mettre la législation nationale en conformité avec le droit international des réfugiés.

C. Facteurs et difficultés

90. Le Comité prend note avec satisfaction des explications franches données par la délégation conce r nant les difficultés auxquelles l’État partie continue de se heurter pour se débarrasser de l’héritage d’un sy s tème caractérisé par «l’arbitraire et l’impunité» ainsi que pour instituer des institutions démocratiques et renforcer la primauté du droit. Il note que ces problèmes sont aggravés par des «actes de terrorisme» et des menaces à la sécurité. Néanmoins, le Comité réaffirme que, conformément à l’article 2 de la Convention, «aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, ...ne peut être invoquée pour justifier la torture».

D. Sujets de préoccupation

91. Le Comité est profondément préoccupé par:

a) Les allégations nombreuses et constantes selon lesquelles des tortures et d’autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants sont couramment infligés aux détenus par des membres des fo r ces de l’ordre, généralement en vue de leur extorquer des aveux;

b) Les informations régulières selon lesquelles, malgré les efforts considérables déployés par l’État partie pour engager le dialogue et la mise en place de mesures de pr é vention comme «une ligne téléphonique d’urgence» pour les victimes, le «bizutage» ( d e dovshchina ) parmi les militaires ainsi que la to r ture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sont des pratiques répandues qui sont appliquées sous la direction ou avec le consentement ou l’approbation d’officiers et occasionnent de graves souffrances physiques et mentales aux victimes;

c) L’impunité persistante dont bénéficient les responsables tant civils que militaires coupables de tortures et autres mauvais traitements, l’absence d’information sur les décisions rendues par des juges demandant un complément d’enquête sur une affaire en raison du recours à la torture pour obtenir des aveux, et le très petit nombre de personnes reconnues coupables de violations de la Convention.

92. Le Comité juge également préoccupants:

a) L’absence dans le droit interne d’une définition de la torture conforme à l’article premier de la Convention. Le fait de qualifier la torture de circonstance aggr a vante pour certaines des infractions én u mérées ne répond pas aux exigences des articles 1 er et 4 de la Convention;

b) Les nombreux cas de condamnation fondée sur des aveux et le système de promotion de l’application de la loi qui repose sur le pourcentage d’affaires pénales élucidées, facteurs qui, conjugués, créeraient les conditions favorisant le recours à la torture et aux mauvais traitements pour contraindre les détenus à «avouer»;

c) Les possibilités restreintes qu’ont les personnes privées de liberté de communiquer, imm é diatement après leur arrestation, avec un avocat, un médecin et des membres de leur famille, ce qui const i tue une garantie importante contre la torture;

d) Le refus de fait des juges de tenir compte des preuves de torture et de mauvais traitements fournies par l’accusé, qui entraîneraient normalement l’ouverture d’une enquête ou l’engagement de pou r suites;

e) L’explication de l’État partie selon laquelle, malgré les nombreuses allégations faisant état de violence contre les femmes en détention, aucune plainte officielle n’a été reçue à ce sujet. En dépit des efforts de l’État partie pour libérer des prisonniers et réduire en général la population carcérale, le nombre de femmes en détention a doublé au cours des 10 dernières années.

f) L’absence de formation pratique concernant leurs obligations en vertu de la Convention des médecins, des représentants de la loi, des juges et des membres des forces armées;

g) Les conditions pénibles dans lesquelles sont incarcérés les prévenus en a t tente de jugement, notamment la prévalence de la tuberculose et d’autres maladies, ainsi que les mauvaises conditions de d é tention, qui ne sont soumises à aucun contrôle, dans les centres de détention temporaire de la police (IVS) et les centres de détention provisoire (SIZO), y compris la pratique consistant à mettre des volets en métal aux fenêtres des ce l lules, bloquant ainsi la lumière naturelle et empêchant toute aération adéquate, ce qui s’expliquerait par le fait que la loi interdit aux détenus de communiquer entre eux;

h) Le manque d’indépendance et d’efficacité des services du Procureur, dû, comme le reconnaît l’État partie, aux problèmes que pose le double mandat du Procureur, qui est chargé à la fois d’engager les poursuites et de surveiller le bon déroulement des enquêtes;

i) Les informations faisant état de conditions de vie équivalant à un traitement inhumain ou dégradant des enfants placés dans des institutions ou incarcérés dans des centres de détention;

j) L’absence de garanties que des personnes ne seront pas renvoyées dans des pays où elles risquent réellement d’être soumises à la torture (non ‑refoulement).

93. À propos des événements en Tchétchénie, le Comité est particulièrement préoccupé par le fait:

a) Que de nombreuses informations font régulièrement état de graves violations des droits de l’homme et de la Convention, notamment: détentions arbitraires, torture et mauvais traitements, aveux fo r cés, exécutions extrajudiciaires et disparitions forcées, en particulier durant les «opérations spéciales» ou les «opérations de ratissage», et création de centres de détention temporaires illégaux, y compris de «camps de filtrage». Les allégations de violence sexuelle sont particulièrement courantes. De plus, les unités militaires qui, selon certaines informations, font preuve d’une très grande brutalité à l’égard des civils ont été re n voyées dans la zone de conflit;

b) Qu’un grand nombre d’unités et de forces armées relèvent de divers départements et serv i ces en Tchétchénie, ce qui empêche d’identifier les personnes responsables des exactions citées plus haut;

c) Que les ordonnances n os 46 et 80 mentionnées plus haut dans les paragraphes relatifs aux aspects positifs ne sont pas appliquées;

d) Que le double système de juridiction en place en Tchétchénie dans lequel interviennent des procureurs et des tribunaux tant militaires que civils, entraîne des retards excessifs et inacceptables dans l’enregistrement des affaires, de sorte que les plaignants se retrouvent dans un cercle vicieux de renvoi des dossiers et des décisions en matière d’ouverture d’enquêtes d’une autorité à l’autre et que des poursuites ne sont jamais engagées. Le Comité note avec préoccupation qu’il est impossible au Procureur civil d’interroger des membres du personnel militaire et de mener des enquêtes sur des sites militaires afin de recueillir les éléments de preuve nécessaires pour obliger le Procureur militaire à examiner une affaire. Le manque d’indépendance des tribunaux, des procureurs et des juges militaires, qui fait que peu d’affaires aboutissent à l’engagement de poursuites contre les présumés responsables des violations commises, est également une source de préoccupation.

E. Recommandations

94. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’incorporer rapidement dans le droit interne la définition de la torture telle qu’elle figure à l’article premier de la Convention et d’ériger la torture et autres traitements cruels, inhumains et dégr a dants en infractions pénales spécifiques passibles de peines appropriées en vertu du droit interne;

b) D’adopter des mesures permettant aux détenus de communiquer avec un avocat, un médecin et des membres de leur famille dès leur arrestation; d’informer les su s pects et les témoins de leurs droits au début de leur mise en détention; et de veiller à ce que les personnes détenues puissent bénéficier d’une assistance juridique et voir un méd e cin à leur demande et pas seulement selon le bon vouloir des autorités. Il faudrait songer de toute urgence à instaurer un examen médical obligatoire pour tous les prév e nus à leur arrivée dans des IVS et des SIZO, et à mettre en place un service médical indépendant des Mini s tères des affaires intérieures et de la justice pour procéder à ces examens;

c) De garantir dans la pratique le respect absolu du principe de l’inadmissibilité des preuves obtenues par la torture et de veiller à ce que soient réexaminées les condamnations fondées uniquement sur des aveux, en reconnaissant que bon nombre d’entre eux ont été obtenus par la torture ou des mauvais tra i tements et, le cas échéant, d’indemniser et de libérer les personnes qui apportent des preuves crédibles à l’appui de leurs allégations de torture ou de mauvais traitements;

d) D’améliorer les conditions dans les prisons et dans les centres de détention provisoire afin qu’elles soient conformes aux exigences de la Convention. L’État partie devrait veiller en particulier à ce que l’interdiction faite aux prévenus en détention provisoire de communiquer ne concerne pas tous les dét e nus sans distinction mais ne s’applique qu’à un nombre déterminé d’entre eux, et ne soit imposée que lor s que cela est nécessaire et sur la base d’une décision judiciaire fixant la durée maximale d’une telle mesure;

e) De mettre au point un programme d’inspections imprévues des centres de détention prov i soire et d’autres lieux d’internement par des enquêteurs impartiaux et dignes de confiance dont les concl u sions devraient être rendues publiques;

f) D’envisager la création d’un organe indépendant chargé d’inspecter les prisons, de surveiller toutes les formes de violence en détention, notamment les violences sexuelles contre les ho m mes aussi bien que les femmes, et toutes les formes de violence entre détenus, y compris celles qui sont commises par des détenus avec l’accord des autorités. La participation des avocats de l’aide judiciaire à la phase d’investigation qui fait suite à la mise en détention constituerait une garantie pour les détenus;

g) De dispenser une formation concernant les obligations qui leur incombent en vertu de la Convention i) aux médecins pour qu’ils détectent les traces de torture ou de mauvais traitements sur les pe r sonnes qui ont été ou sont détenues, ii) aux responsables de l’application des lois et aux juges pour qu’ils procèdent sans tarder à des enquêtes impa r tiales, et iii) aux membres du personnel militaire pour qu’ils sachent que la torture est i n terdite et que l’ordre d’un officier supérieur ne peut être invoqué pour justifier la torture;

h) De demander à la Cour suprême d’analyser les pratiques actuelles des tribunaux en matière d’admissibilité des preuves obtenues par la torture, compte tenu de la définition de la torture donnée à l’article premier de la Convention, et d’envisager d’établir des directives à ce sujet;

i) De veiller à ce que des enquêtes impartiales et exhaustives soient promptement menées sur les nombreuses allégations de torture signalées aux autorités, que les responsables soient poursuivis et p u nis, le cas échéant, et que les personnes qui portent plainte pour torture et les témoins des actes dont elles ont été victimes soient protégés contre d’éventuelles représailles;

j) De donner des instructions appropriées à tous les fonctionnaires compétents interdisant d’infliger des mauvais traitements ou des tortures aux enfants internés dans des institutions ou des prisons de l’État et de veiller à ce qu’elles soient dûment appliquées;

k) De veiller à ce qu’aucune personne ne soit expulsée, refoulée ou extradée vers un pays où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture.

95. En ce qui concerne la situation en Tchétchénie, le Comité recommande également à l’État partie:

a) De préciser quelles sont les juridictions compétentes pour traiter les affaires en rapport avec les événements en Tchétchénie, car la situation est actuellement incertaine sur ce plan étant donné que l’état d’exception n’a pas été proclamé mais qu’un conflit armé non international est en cours. Les partic u liers pourraient ainsi disposer d’un moyen efficace de recours contre toute violation dont ils auraient été victimes et ne seraient ainsi pas pris dans le cercle vicieux des divers départements et organes militaires et civils ayant divers degrés de responsabilité;

b) Bien qu’un certain nombre de mécanismes de traitement des allégations de violations des droits de l’homme aient été mis en place en Tchétchénie, aucun d’eux ne possède les caractéristiques qui correspondent à celles d’un organe d’enquête impartial et indépendant. En conséquence, le Comité demande à nouveau au Gouvernement de l’État partie, comme il l’avait fait dans ses conclusions de 1996, d’instituer un comité impartial, crédible et indépendant «chargé d’enquêter sur les allégations de violations de la Convention mettant en cause des membres des forces militaires de la Fédération de Russie et des séparati s tes tchétchènes, en vue de traduire en justice ceux contre lesquels il existe des preuves relatives à leur i m plication ou complicité dans de tels actes» [(A/52/44, par.43 h)];

c) De veiller à ce que les ordonnances n os 46 et 80 soient effectivement appl i quées et d’établir des directives détaillées sur la conduite des opérations de ratissage;

d) De renforcer les pouvoirs du Représentant spécial du Président pour les droits de l’homme, les droits civils et les libertés en Tchétchénie pour qu’il effectue des enquêtes et fasse des recommandations au Procureur concernant les faits qui pourraient constituer des infractions pénales;

e) De prendre des mesures afin qu’un contrôle civil soit exercé sur l’armée et de veiller, dans la pratique, à ce que le bizutage, la torture et les mauvais traitements soient interdits dans l’armée, parmi les conscrits et les officiers;

f) D’envisager de créer un groupe mixte d’enquête composé de membres des services des procureurs tant civils que militaires jusqu’à ce que l’on puisse déterminer les responsabilités spécifiques et que l’on puisse établir quelle est la juridiction compétente.

96. Le Comité recommande en outre à l’État partie:

a) De fournir les renseignements demandés au Comité, y compris des données désagrégées, notamment selon l’âge, le sexe, l’appartenance ethnique et l’origine géographique, sur les centres de déte n tion civils et militaires et d’autres lieux de détention ainsi que les centres de détention pour mineurs et d’autres institutions pour mineurs; et de donner dans son prochain rapport périodique des informations sur le nombre et le type de cas dans lesquels des policiers et d’autres représentants de la loi ont été punis pour des actes de torture et des infractions connexes, y compris ceux dans lesquels le tribunal n’a pas donné suite à la plainte;

b) De diffuser largement les conclusions et recommandations du Comité ainsi que les comptes rendus des séances au cours desquelles le rapport a été examiné, dans les langues appropriées, dans tout le pays; et d’envisager de consulter des organisations indépendantes de défense des droits de l’homme et des libertés civiles, des organismes fournissant une assistance juridique ainsi que des associations d’avocats de l’aide judiciaire lors de l’établissement du prochain rapport.

ARABIE SAOUDITE

97. Le Comité a examiné le rapport initial de l’Arabie saoudite (CAT/C/42/Add.2) à ses 516 e , 519 e , 521 e et 524 e séances, les 8, 10, 13 et 15 mai 2002 (CAT/C/SR.516, 519, 521 et 524) et adopté les concl u sions et recommandations ci ‑après.

A. Introduction

98. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’Arabie saoudite, tout en regrettant qu’il ait été soumis avec retard et qu’il donne peu d’informations sur l’exercice dans la pratique des droits consacrés dans la Convention. Le rapport suit dans l’ensemble les directives du Comité. Le Comité se félicite aussi de l’occasion qui lui a été donnée d’engager avec une délégation nombreuse un dialogue portant sur un grand nombre de questions qui se posent au titre de la Convention, dialogue rehaussé par un exposé oral très détaillé.

B. Aspects positifs

99. Le Comité prend note avec satisfaction des éléments ci ‑après:

a) L’adhésion de l’État partie à la Convention contre la torture, le 23 septembre 1997, ainsi que de son adhésion à plusieurs autres instruments essentiels de défense des droits de l’homme et l’intention dont il a fait part de ratifier la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Prot o cole de 1967. Il se félicite en outre de ce que l’État partie a affirmé que son droit interne, y compris les éléments qui reposent sur la charia, était en mesure de reconnaître entièrement les droits et obligations énoncés dans la Convention;

b) Certains faits nouveaux positifs survenus au plan législatif tendant à re n forcer la prima u té du droit et une bonne administration de la justice, survenus depuis la rédaction du rapport, et nota m ment de certains aspects du Code de procédure civile, du Code de procédure pénale et du Code de conduite des avocats promulgués récemment. En particulier il note avec satisfaction que le Code de pr o cédure pénale garantit le droit de tout accusé de faire appel aux services d’un avocat à toutes les étapes de l’instruction et du procès;

c) La déclaration de l’État partie qui assure que le droit interne prévoit qu’aucune circon s tance exceptionnelle, y compris l’ordre d’un supérieur hiérarchique, ne peut être invoquée pour justifier un acte de torture; l’assurance donnée à nouveau que des aveux obtenus sous la torture ne sont pas rec e vables dans une action en justice et l’assurance donnée verbalement qu’un suspect peut, à tout moment de la procédure, revenir sur ses aveux. Le Comité a pris note de l’assurance donnée par l’État partie que les peines corporelles ne sont pas appliquées aux mineurs;

d) La compétence donnée au Conseil des doléances pour connaître des allégations de violations des droits de l’homme et le fait que certains services médicaux possèdent les compétences en médecine légale nécessaires pour examiner des personnes qui se disent victimes de tortures. Le Com i té se félicite de la création d’une commission permanente chargée d’enquêter sur les accusations de r e cours à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants lors de l’arrestation, de la détention et de l’interrogatoire des suspects;

e) L’invitation adressée par l’État partie au Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur l’indépendance des juges et des avocats à venir examiner sa législation, sa politique et ses pratiques en la matière.

C. Sujets de préoccupation

100. Le Comité est préoccupé par les aspects ci ‑après:

a) Tout en notant que, d’après l’État partie, la charia interdit expressément la torture et les autres traitements cruels et inhumains, le Comité est préoccupé par le fait que la législation de l’État pa r tie ne contient pas elle ‑même expressément cette interdiction et n’impose pas de sanctions pénales. Le Comité estime qu’il est nécessaire d’incorporer expressément dans la loi le délit de torture tel qu’il est défini à l’article premier de la Convention pour bien marquer l’importance capitale de cette interdiction;

b) La condamnation à des peines corporelles par les autorités judiciaires et administratives et l’application de ces peines, y compris en particulier la flagellation et l’amputation, ne sont pas comp a tibles avec la Convention;

c) Les différents régimes applicables, en droit et en pratique, aux nationaux et aux étrangers s’agissant du droit de ne pas être l’objet d’actes contraires à la Conve n tion et de pouvoir porter plainte. Le Comité rappelle que la Convention et les garanties qu’elle prévoit sont applicables à tous les actes contraires à la Convention qui se produ i sent sur le territoire de l’État partie, de sorte que toutes les personnes peuvent, sur un pied d’égalité et sans discrimination, jouir des droits qui y sont consacrés;

d) Les informations faisant état de la détention provisoire de certains individus prolongée au ‑delà des limites fixées par la loi, qui peut parfois constituer en soi un comportement contraire à la Convention ou en augmente le risque. Le Comité se déclare à ce sujet préoccupé par les cas où, parfois pendant de longues périodes, les autorités consulaires se voient refuser l’accès à des étrangers en déte n tion. De plus, il s’inquiète du peu de contrôle exercé par les autorités judiciaires sur la détention avant jugement;

e) Les informations faisant état de la détention au secret, parfois pendant de longues péri o des, en particulier pendant l’instruction préparatoire. Le fait de refuser aux détenus l’accès à un conseil juridique et à des soins médicaux extérieurs, ainsi qu’aux membres de leur famille, augmente la probab i lité que des actes contraires à la Convention ne seront ni poursuivis ni sanctionnés comme il se doit;

f) L’obligation faite à l’article 100 du Statut de la Direction de la sûreté publique à l’officier chargé de l’interrogatoire de tenter «par les différents moyens qu’il jugera judicieux» de déte r miner la cause du silence d’un suspect. Bien que l’article proscrive formellement le recours à la torture ou à la coercition, une telle obligation augmente de façon injustifiable le risque d’actes contraires à la Convention;

g) Des cas d’expulsion d’étrangers, portés à l’attention du Comité, semblent avoir été contraires aux obligations imposées par l’article 3 de la Convention;

h) La compétence qu’ont les membres de la police mutawe’en de s’attaquer notamment aux violations du code moral et d’interdire les comportements qu’ils considèrent comme attentant aux bonnes mœurs et à la sécurité. Le Comité note avec inquiétude que les pouvoirs de ces policiers ne sont pas déf i nis de façon précise par la loi et que leurs activités peuvent entraîner une violation de la Convention;

i) L’incapacité apparente de l’État partie d’offrir des mécanismes d’enquête efficaces sur les plaintes pour manquement à la Convention;

j) Tout en notant la mise en place de mécanismes conçus pour assurer une indemnisation aux victimes d’actes contraires à la Convention, le Comité relève que, dans la réalité, les intéressés o b tiennent rarement satisfaction et qu’en conséquence l’exercice des droits garantis par la Convention s’en trouve limité.

D. Recommandations

101. Le Comité recommande en particulier à l’État partie:

a) D’incorporer expressément dans sa législation le délit de torture, défini dans des termes correspondant à l’article premier de la Convention;

b) De reconsidérer la pratique des châtiments corporels, peines qui sont contraires à la Convention;

c) De veiller à ce que sa législation soit dans la pratique appliquée à tous, sans distinction de nationalité, de sexe, d’appartenance religieuse ou autre, pour ce qui concerne les questions relevant de la Convention;

d) De veiller à ce que tous les lieux de détention ou d’incarcération répondent à des normes suffisantes pour garantir que nul ne soit soumis à la torture ou à des peines ou traitements cruels, inh u mains ou dégradants;

e) De veiller à ce que sa législation et sa pratique reflètent les obligations imposées par l’article 3 de la Convention;

f) De veiller à ce que toutes les personnes qui ont été victimes d’une violation des droits qui leur sont reconnus par la Convention aient accès, en droit comme en pratique, aux moyens d’obtenir pleinement réparation, y compris une indemnisation, et que les personnes qui peuvent être responsables de ces violations fassent l’objet d’une enquête rapide et impartiale puis soient sanctionnées;

g) De veiller à ce que la police mutawe’en exerce des compétences claires et précises, dans le respect de la Convention et des autres règles applicables en matière de non ‑discrimination, selon des modalités régies par la loi et sujettes à l’examen des autorités judiciaires ordinaires;

h) De veiller, dans la pratique, à ce que les personnes placées en garde à vue puissent avoir rapidement accès aux conseils et aux médecins de leur choix, aux membres de leur famille et, dans le cas des ressortissants étrangers, au personnel consulaire;

i) De veiller à ce que la composition de l’appareil judiciaire soit entièrement conforme aux Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature;

j) De veiller à ce que la formation dispensée au personnel chargé de l’application de la loi comporte un enseignement et une information sur le dépistage des signes de torture physique comme ceux donnés à une partie de son personnel médical, conformément à l’article 10 de la Convention;

k) D’adopter des mesures adéquates pour permettre la création d’organisations non gouve r nementales indépendantes et le développement de leurs activités dans le domaine de la défense des droits de l’homme;

l) De donner dans le prochain rapport périodique des données ventilées n o tamment par âge, sexe, origine ethnique, nationalité, origine géographique et autres, sur les personnes privées de liberté, qui se trouvent en prison ou ailleurs, ou qui subissent une autre forme de sanction et qui peuvent être e x posées à des actes contraires à la Convention, ainsi que sur les cas éventuels où des membres de la police ou autres agents de l’État ont été poursuivis ou punis pour des actes contraires à la Convention, et sur l’issue de telles affaires;

m) D’envisager de faire la déclaration prévue à l’article 22 de la Convention;

n) De diffuser largement, dans le pays, les conclusions et recommandations du Comité, dans toutes les langues voulues.

SUÈDE

102. Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique de la Suède (CAT/C/55/Add.3) à ses 504 e et 507 e  séances, le 30 avril et le 1 er  mai 2002 (CAT/C/SR.504 et 507), et a adopté les conclusions et reco m mandations ci ‑après.

A. Introduction

103. Le Comité accueille avec satisfaction le quatrième rapport périodique de la Suède, qui a été soumis au Comité dans les délais et a été rédigé conformément aux directives du Comité en matière d’établissement des rapports.

104. Le Comité se félicite des renseignements supplémentaires apportés par la délégation suédoise, or a lement et par écrit, ce qui démontre la volonté de l’État partie de poursuivre un dialogue franc et ouvert avec le Comité. Celui ‑ci souligne aussi les efforts déployés par la délégation pour répondre de façon e x haustive à ses questions.

B. Aspects positifs

105. Le Comité souligne avec satisfaction l’engagement ferme et constant en faveur des droits de l’homme dont fait preuve la Suède et la suite positive qu’elle a donnée à ses recommandations précédentes. Il se félicite en particulier des éléments suivants:

a) L’adoption, dans le cadre du suivi de la Conférence mondiale pour les droits de l’homme de 1993, d’un Plan national d’action pour les droits de l’homme pour les a n nées 2002 ‑2004, comportant comme sujet prioritaire la question de la protection intern a tionale contre la persécution et la torture. Le C o mité accueille avec satisfaction le projet des autorités suédoises de traduire les conclusions et recommand a tions des six organes de l’ONU chargés de la surveillance de l’application des instruments internationaux, et de les distribuer dans les municipalités;

b) La création, en décembre 2000, d’une commission spéciale chargée d’étudier la façon dont a été conduite la procédure d’enquête criminelle relative au décès en détention, en 1995, d’Osmo Vallo. Le Comité relève tout particulièrement que la «Commission Osmo Vallo» a rendu publiques ses conclusions et recommandations en avril 2002, et que celles ‑ci ont été remises au Ministère de la justice;

c) La création, en décembre 2000, d’une commission parlementaire officielle chargée de d é terminer si le cadre existant pour traiter des plaintes dénonçant des actes criminels imputés à la police est satisfaisant;

d) La création d’un comité officiel ayant pour mandat d’enquêter sur les actions de la police lors des événements de Göteborg, et chargé de déterminer quelles mesures la police devrait mettre en œ u vre, pendant les manifestations publiques, pour préserver l’ordre public tout en garantissant le droit fond a mental de manifester;

e) La création d’une commission spéciale chargée de revoir la législation et la jurisprudence concernant l’exécution des décisions d’expulsion, en particulier en relation avec les allégations d’expulsion de personnes vers des pays avec lesquels elles n’ont aucune attache particulière;

f) Les nombreuses études et projets en cours visant à renforcer le système juridique national de façon à assurer une meilleure protection des droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne la co m pétence des tribunaux suédois pour les crimes internationaux commis à l’étranger, et l’amélioration de la procédure relative aux demandes d’asile;

g) L’assurance donnée par les autorités suédoises qu’elles ont suivi les recommandations du Comité concernant les plaintes de particuliers et ont respecté l’obligation de ne pas renvoyer certaines pe r sonnes dans un pays où elles risquaient d’être soumises à la torture. Le Comité se félicite aussi de ce que le projet de loi sur les étrangers contienne une disposition qui permettra aux autorités suédoises de l’immigration de fonder directement leur décision sur les observations rendues par les organes internati o naux.

C. Sujets de préoccupation

106. Si les modalités concrètes d’application de la Convention dans le système juridique national sont laissées à l’appréciation de chaque État partie, les moyens utilisés doivent être appropriés, c’est ‑à ‑dire qu’ils doivent donner des résultats attestant que l’État partie s’est acquitté intégralement de ses obligations. La Suède a opté pour le système dualiste en matière d’incorporation des traités internationaux en droit interne et devrait donc adopter une législation appropriée pour incorporer la Convention contre la torture. Le Com i té constate que le droit interne suédois ne comporte pas de définition de la torture conforme à l’article pr e mier de la Convention. Surtout, il constate que ni la torture ni les traitements cruels, inhumains et dégradants n’apparaissent en tant que crimes et délits distincts dans la législation pénale.

107. Le Comité se déclare en outre préoccupé par ce qui suit:

a) Il a appris que des étrangers auraient été expulsés ou renvoyés vers un pays avec lequel ils n’ont aucun lien véritable, sur la base notamment de critères linguistiques qui sont parfois aléatoires, peu fiables, ce qui pourrait entraîner une violation de l’article 3 de la Convention;

b) La loi spéciale sur la police des étrangers, dite loi antiterroriste, permet l’expulsion d’étrangers soupçonnés de terrorisme selon une procédure qui pourrait ne pas être conforme à la Convention, car il n’existe aucune possibilité d’appel;

c) Plusieurs cas de recours excessif à la force par des policiers et des gardiens de prison, ayant conduit à la mort des intéressés, ont eu lieu au cours des dernières années en Suède. En outre, l’année 2001 a été marquée par les émeutes de Göteborg, à la suite desquelles de nombreuses plaintes pour mauvais tra i tements ont été déposées;

d) D’après certaines informations, les membres des forces de police et les gardiens de prison reçoivent des instructions imprécises, souvent subjectives et inadéquates et ne reçoivent pas de formation concernant l’emploi de la force;

e) Bien qu’il soit affirmé dans le rapport périodique que les déclarations obtenues sous la contrainte ne peuvent être retenues comme élément de preuve dans une action en justice, aucune règle lég i slative énonçant clairement une telle interdiction ne semble exister.

D. Recommandations

108. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’incorporer dans son droit interne la définition de la torture énoncée à l’article premier de la Convention et d’ériger les actes de torture et les traitements cruels, inhumains et dégradants en crimes spécifiques en droit pénal interne, passibles de sanctions appropriées;

b) De s’assurer que les étrangers qui doivent être expulsés le soient vers le pays qu’ils cho i sissent ou vers un pays avec lequel ils ont de véritables liens et où il n’y a pas de motifs sérieux de croire qu’ils risquent d’être soumis à la torture;

c) De mettre la loi spéciale sur la police des étrangers en conformité avec la Convention;

d) De renforcer les mécanismes disponibles pour surveiller la bonne application des garanties de respect données par les États vers lesquels les étrangers sont expulsés;

e) De procéder à des enquêtes plus complètes et détaillées sur la situation des droits de l’homme dans le pays d’origine des demandeurs d’asile;

f) De veiller à ce que toutes les allégations de violations imputées à des policiers et les ga r diens de prison, et en particulier tout décès en détention, fassent l’objet d’enquêtes rapides et impartiales. Les conclusions et recommandations de la «Commission Osmo Vallo» devraient être dûment prises en considération;

g) De renforcer les programmes d’éducation dans le domaine des droits de l’homme à l’intention des policiers, gardiens de prison et autres responsables de l’application de la loi, de même que les programmes de formation relatifs à la mise en œuvre du Manuel sur les procédures de police et actions de légitime défense;

h) De s’assurer que l’interdiction d’invoquer des déclarations obtenues sous la contrainte comme élément de preuve dans une action en justice soit clairement énoncée dans la loi.

109. Le Comité recommande à l’État partie d’inclure dans son cinquième rapport périodique un résumé des conclusions et recommandations des commissions et comités nationaux précités, et d’indiquer quelle suite leur a été donnée.

110. Le Comité recommande aussi à l’État partie de diffuser largement ses conclusions et recommandations dans le pays, dans toutes les langues voulues.

OUZBÉKISTAN

111. Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique de l’Ouzbékistan (CAT/C/53/Add.1) à ses 506 e , 509 e et 518 e  séances, le 1 er , le 2 et le 8 mai 2002 (CAT/C/SR.506, 509 et 518), et a adopté les concl u sions et recommandations ci ‑après.

A. Introduction

112. Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport de l’Ouzbékistan, qui a été soumis dans les délais et conformément à la demande du Comité. Il se félicite des renseignements importants donnés sur les nombreuses réformes entreprises pour rendre la législation nationale conforme aux obligations contra c tées par l’État partie en vertu de la Convention. Tout en relevant que le rapport contient peu de renseign e ments sur la mise en œuvre de la Convention dans la pratique, le Comité tient à marquer qu’il a apprécié la mise à jour riche de renseignements faite oralement par les représentants de l’État partie pendant l’examen du rapport, ainsi que la volonté de l’État partie de donner par écrit de plus amples renseignements et les st a tistiques nécessaires.

B. Aspects positifs

113. Le Comité note les faits nouveaux positifs suivants:

a) La ratification de plusieurs instruments de défense des droits de l’homme importants et la promulgation de nombreuses lois visant à rendre la législation conforme aux obligations qui découlent de ces instruments;

b) L’action éducative menée par l’État partie pour faire connaître aux divers secteurs de la population les normes internationales en matière de droits de l’homme et les grands efforts faits pour coop é rer avec les organisations internationales en vue de promouvoir la compréhension des droits de l’homme, y compris en invitant le Haut ‑Commissariat aux droits de l’homme à apporter une coopération technique;

c) Les informations données par l’État partie sur les mesures qu’il prend pour élaborer une nouvelle définition de la torture conforme à celle qui en est donnée à l’article premier de la Convention, et la présentation au Parlement d’un projet de loi tendant à mettre en place un système de plaintes des citoyens en cas de torture;

d) L’assurance donnée par le représentant que l’État partie est résolu à établir un pouvoir jud i ciaire indépendant;

e) L’annonce par le représentant de l’État partie de la création d’un système de recours contre les décisions des tribunaux et l’introduction de peines de substitution à l’emprisonnement et de la libération sous caution;

f) L’annonce par le représentant que l’État partie avait entrepris de donner suite aux constat a tions de l’étude officielle sur les plaintes déposées auprès du Médiateur, qui avait révélé un certain nombre de condamnations judiciaires contestables, de cas de torture ou de mauvais traitements commis par des re s ponsables de l’application de la loi et d’un contrôle insuffisant de l’application des normes en matière de droits de l’homme par les organes responsables de l’application de la loi;

g) Le procès et la condamnation à des peines d’emprisonnement, en janvier 2002, de quatre fonctionnaires de police pour actes de torture, et la déclaration faite par le représentant de l’État partie qui a affirmé qu’il s’agissait là d’un tournant marquant la volonté de l’État partie de donner véritablement effet, dans la pratique, à l’interdiction de la torture.

C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

114. Le Comité reconnaît combien il est difficile de surmonter l’héritage d’un régime autoritaire pour arriver à une forme démocratique de gestion des affaires publiques et relève que cette difficulté est aggravée par l’instabilité qui règne dans la région. Cela étant, le Comité souligne que de telles circonstances ne pe u vent pas être invoquées pour justifier l’usage de la torture.

D. Sujets de préoccupation

115. Le Comité est préoccupé par les éléments ci ‑après:

a) Les allégations particulièrement nombreuses, persistantes et concordantes faisant état d’actes de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants particulièrement br u taux, perpétrés par les agents de l’État chargés de l’application de la loi;

b) Le fait que les personnes privées de liberté ne puissent pas communiquer, immédiatement après leur arrestation, avec un conseil indépendant, avec un médecin ou avec une personne habilitée à faire un examen médical ni avec leurs proches, ce qui est une garantie importante de protection contre la torture;

c) L’insuffisance de l’indépendance et de l’efficacité des services du procureur, en particulier compte tenu du fait que le procureur a compétence pour exercer un contrôle sur la fixation de la durée de la détention avant jugement, qui peut être prolongée jusqu’à 12 mois;

d) Le manque de formation pratique i) des médecins en ce qui concerne la d é tection des signes de torture ou de mauvais traitements sur les personnes qui sont ou ont été détenues et ii) des re s ponsables de l’application de la loi et des juges, pour engager sans délai des enquêtes impartiales;

e) L’insuffisance de l’indépendance du pouvoir judiciaire;

f) Le refus de facto des juges de tenir compte des éléments produits par les accusés pour mo n trer qu’ils ont subi des tortures et mauvais traitements, ce qui fait qu’il n’y a pas d’enquête ni de poursuites;

g) Le fait que la définition de la torture figurant dans le Code pénal de l’État partie n’est pas complète et n’est donc pas entièrement conforme à l’article premier de la Convention;

h) Les nombreuses condamnations prononcées sur la foi d’aveux et la persistance de l’application du critère des «affaires criminelles résolues» pour l’avancement des agents de l’État respons a bles de l’application de la loi, toutes choses qui, conjuguées, créent les conditions propices à l’utilisation de la torture et des mauvais traitements afin de convaincre les personnes arrêtées de «passer aux aveux»;

i) L’absence de transparence dans le système de justice pénale qui fait qu’il n’y a pas de statistiques à la disposition du public sur les détenus, les plaintes pour torture, le nombre d’enquêtes ouvertes sur les plaintes et les résultats de ces enquêtes; de plus, l’État partie n’a pas donné les renseignements qui avaient été demandés lors de l’examen du rapport initial, en novembre 1999, au sujet du nombre de personnes en détention et du nombre de condamnés à mort qui ont été exécutés;

j) L’extradition ou l’expulsion de personnes, y compris de demandeurs d’asile, vers des pays où ils peuvent être exposés au risque de torture.

E. Recommandations

116. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De réaliser rapidement les projets de révision des propositions tendant à modifier la loi p é nale nationale de façon à y inclure le délit de torture, en pleine conformité avec la définition qu’en donne l’article premier de la Convention, ainsi que de l’assortir d’une peine adéquate;

b) De prendre d’urgence des mesures efficaces i) pour instituer un mécanisme d’enquête sur les plaintes totalement indépendant, extérieur aux services du procureur, à l’intention des personnes placées en détention et ii) de faire en sorte que des enquêtes rapides, impartiales et approfondies soient menées sur les nombreuses allégations de torture portées à la connaissance des autorités, et de poursuivre et de punir, selon qu’il convient, les responsables;

c) De veiller à ce que les personnes qui dénoncent des actes de torture et leurs témoins soient protégés contre des représailles;

d) De garantir, dans la pratique, le respect absolu du principe de l’irrecevabilité des éléments de preuve obtenus sous la torture;

e) De prendre des mesures pour instaurer et garantir l’indépendance des autorités judiciaires dans l’exercice de leurs fonctions, conformément aux normes internationales, en particulier aux Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature;

f) D’adopter des mesures permettant à un avocat, un médecin et aux membres de la famille de co m muniquer avec la personne arrêtée dès le tout début de la période de détention et de veiller à ce que les pe r sonnes détenues puissent consulter un médecin quand elles le demandent, sans avoir à obtenir l’autorisation des responsables des prisons; de tenir un registre portant le nom de tous les détenus et le jour et l’heure où les notifications de l’avocat, du médecin et des membres de la famille ont eu lieu et les résultats des ex a mens médicaux; ce registre doit pouvoir être consulté par les avocats et toute personne qui en a besoin;

g) D’améliorer les conditions dans les prisons et dans les centres de détention provisoire et d’établir un système permettant l’inspection sans préavis des prisons et des centres de détention provisoire, par des contrôleurs impartiaux et fiables dont les constatations doivent être rendues publiques. L’État partie devrait aussi prendre des mesures pour abréger la période de détention avant jugement et assurer un contrôle judiciaire indépendant de la durée et des conditions de détention provisoire. De plus, seul un tribunal doit être habilité à décider une arrestation;

h) De veiller à ce que les responsables de l’application de la loi, les personnels jud i ciaires et médicaux et toute personne qui participe à la garde, à l’interrogatoire, au traitement des détenus ou qui est, à un autre titre, en contact avec les détenus reçoivent une formation conce r nant l’interdiction de la torture et de faire en sorte que les examens qu’ils doivent subir pour être confirmés dans leurs qualifications contiennent un élément portant sur la connaissance des pre s criptions de la Convention ainsi qu’une évaluation de leur comportement passé en ce qui concerne le traitement des prisonniers;

i) D’envisager de prendre de nouvelles mesures pour transférer la responsabilité du système pénite n tiaire du Ministère de l’intérieur au Ministère de la justice, contribuant ainsi à obtenir un progrès dans les conditions carcérales, conformément à la Convention;

j) De procéder à une analyse des cas de condamnation reposant uniquement sur des aveux depuis l’adhésion de l’Ouzbékistan à la Convention, en reconnaissant que les aveux peuvent très souvent avoir été obtenus par la torture ou les mauvais traitements et, le cas échéant, faire ouvrir sans délai une enquête i m partiale et enfin prendre des mesures correctrices appropriées;

k) De veiller à ce que ni dans la législation ni dans la pratique il ne soit poss i ble d’expulser, de renvoyer ou d’extrader un individu dans un État où il y a des motifs s é rieux de croire qu’il risque d’être soumis à la torture;

l) D’envisager de faire les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention;

m) De donner dans le prochain rapport périodique des données ventilées notamment par âge, sexe, origine ethnique et géographique, sur les lieux de détention civils et militaires ainsi que sur les centres de détention pour mineurs et autres institutions où des personnes peuvent être exposées à la torture ou aux mauvais traitements au sens de la Convention; de donner dans le prochain rapport périodique des rense i gnements sur le nombre, la nature et l’issue des affaires, disciplinaires et pénales, dans lesquelles des membres de la police et autres responsables de l’application de la loi ont été accusés de torture et d’infractions connexes;

n) De diffuser largement les conclusions et recommandations du Comité et les comptes rendus analytiques des séances consacrées à l’examen des rapports de l’État partie, notamment auprès des respo n sables de l’application de la loi, dans les organes d’information et par les moyens de diffusion et de vulgar i sation qu’offrent les organisations non gouvernementales;

o) D’envisager de consulter directement les organisations non gouvernementales indépenda n tes de défense des droits de l’homme pour l’élaboration du prochain rapport périodique.

IV. ACTIVITÉS MENÉES PAR LE COMITÉ EN APPLICATION DE L’ARTICLE 20 DE LA CONVENTION

A. Informations générales

117. En vertu du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention, s’il reçoit des renseignements crédibles qui lui semblent contenir des indications fondées attestant que la torture est pratiquée systématiquement sur le territoire d’un État partie, le Comité invite ledit État à coopérer à l’examen des renseignements et, à cette fin, à lui faire part de ses observations à ce sujet.

118. Conformément à l’article 69 du règlement intérieur du Comité, le Secrétaire général porte à l’attention du Comité les renseignements qui sont ou semblent être présentés pour examen par le Comité au titre du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention. Le Comité ne reçoit aucun renseignement concernant un État partie qui, conformément au paragraphe 1 de l’article 28 de la Convention, a déclaré, au moment où il a ratifié la Convention ou y a adhéré, qu’il ne reconnaissait pas la compétence accordée au Comité aux termes de l’article 20, à moins que cet État n’ait ultérieurement levé sa réserve conformément au paragr a phe 2 de l’article 28 de la Convention.

119. Le Comité a poursuivi ses travaux en application de l’article 20 de la Convention pendant la p é riode couverte par le présent rapport.

120. Conformément aux dispositions de l’article 20 de la Convention et des articles 72 et 73 du règl e ment intérieur, tous les documents et tous les travaux du Comité afférents aux fonctions qui lui sont confiées en vertu de l’article 20 de la Convention sont confidentiels et toutes les séances concernant ses travaux au titre de l’article 20 sont privées.

121. Toutefois, conformément au paragraphe 5 de l’article 20 de la Convention, le Comité peut, après consultations avec l’État partie intéressé, décider de faire figurer dans son rapport annuel aux États parties et à l’Assemblée générale un compte rendu succinct des résultats desdits travaux.

122. On trouvera ci ‑après un résumé des activités du Comité concernant Sri Lanka.

B. Résumé des résultats de l’enquête concernant Sri Lanka

1. Introduction

123. Sri Lanka a ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants le 3 janvier 1994. Au moment de la ratification, il n’a pas déclaré qu’il ne reconnaissait pas la compétence conférée au Comité en vertu de l’article 20 de la Convention. La possibilité de formuler une telle réserve est prévue au paragraphe 1 de l’article 28. La procédure prévue par l’article 20 est donc appl i cable à Sri Lanka.

124. L’application de la procédure confidentielle prévue aux paragraphes 1 à 4 de l’article 20 de la Convention a commencé en avril 1999 et a pris fin en mai 2002. Confo r mément au paragraphe 5 de l’article 20 de la Convention, le Comité, après consultations avec l’État partie intéressé, a décidé à sa vingt ‑huitième session de consigner dans le ra p port annuel qu’il présente à l’Assemblée générale en 2002 le résumé suivant des résultats de l’enquête concernant Sri Lanka.

2. Déroulement de la procédure

125. Le 21 juillet 1998, cinq organisations non gouvernementales ayant leur siège à Londres (le British Refugee Council, la Medical Foundation for the Care of Victims of Torture, le Refugee Legal Centre, l’Immigration Law Practitioners Association, le Refugee Legal Group) ont soumis des informations ind i quant que la torture serait systématiquement pratiquée à Sri Lanka.

126. À sa vingt et unième session, en novembre 1998, le Comité a examiné les inform a tions qui lui avaient été communiquées et a conclu qu’elles étaient fiables et contenaient des éléments bien fondés ind i quant que la torture était systématiquement pratiquée à Sri Lanka. En application du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention et de l’article 76 de son règlement intérieur, le Comité a décidé d’inviter Sri Lanka à coopérer à l’examen de ces informations et à présenter des observations à ce sujet avant le 1 er  février 1999. Le Gouvernement sri ‑lankais a fait parvenir ses observations à la date fixée par le Comité.

127. À sa vingt ‑deuxième session, qui s’est déroulée du 26 avril au 14 mai 1999, le Comité a réaffirmé, après avoir examiné les observations de l’État partie, que les informations qui lui avaient été communiquées contenaient des éléments bien fondés indiquant que la torture était systématiquement pratiquée à Sri Lanka. Le Comité a donc décidé d’ouvrir une enquête et a désigné à cet effet MM. Andreas Mavrommatis et Yu Mengjia. En faisant part de sa décision, le Comité a également prié le Gouvernement sri ‑lankais d’accepter que deux membres du Comité se rendent dans le pays au plus tard en janvier 2000.

128. Le Gouvernement a confirmé qu’il acceptait de recevoir la mission mais a demandé un report parce que les autorités politiques et militaires avaient un calendrier de travail très chargé du fait de l’aggravation du conflit interne opposant les forces armées aux membres des Tigres de libération de l’Eelam Tamoul (LTTE) dans le nord et l’est du pays.

129. La visite a finalement eu lieu du 19 août au 1 er  septembre 2000. Les deux membres du Comité ont concentré leur activité à Colombo mais se sont aussi rendus à Kandy, Matale, Dambulla, Panadura et Kal u tara pour visiter des lieux de détention. Pour des raisons de sécurité toutefois ils n’ont pas pu aller dans le nord et l’est de Sri Lanka où le conflit armé faisait rage et où, selon de nombreuses allégations, des actes de torture auraient été commis. Pendant la visite, M. Mavrommatis et M. Yu Mengjia ont eu 12 réunions avec des responsables de l’administration et ont visité 16 lieux de détention. Le Gouvernement a accordé toute l’assistance nécessaire aux membres du Comité et s’est montré constamment coopératif avec eux.

130. Les deux membres du Comité ont eu de très utiles réunions avec de hauts fonctio n naires du système des Nations Unies, ce qui les a aidés à comprendre le contexte et les ci r constances dans lesquels les allég a tions de torture pourraient être examinées. Ils ont eu de nombreuses réunions avec des organisations non gouvernementales, des avocats et des médecins qui s’occupent de cas de torture. Ils ont eu aussi des entr e tiens avec des victimes présumées de torture.

131. Les deux membres du Comité ont fait des observations et des recommandations préliminaires lors de la réunion de synthèse tenue avec les autorités sri ‑lankaises le 31 août 2000. Le 6 novembre 2000, l’État partie a fait parvenir une réponse concernant la mise en œuvre des recommandations préliminaires.

132. Les deux membres du Comité ont rendu compte de leur visite au Comité plénier à sa vingt ‑cinquième session (13 ‑24 novembre 2000). Le Comité a exprimé à l’unanimité sa satisfaction de la coopération manifestée jusqu’alors par le Gouvernement sri ‑lankais et a approuvé les deux membres cha r gés de l’enquête qui ont estimé: a) qu’il serait prématuré de dresser un bilan définitif et de transmettre les conclusions de l’enquête à ce stade et b) qu’il serait plus judicieux de poursuivre la coopération entre le Comité et le Gouvern e ment sri ‑lankais dans le cadre de l’enquête de façon à encourager le Gouvernement à pre n dre des mesures concrètes visant à lui permettre de respecter pleinement ses obligations en vertu de la Convention.

133. Dans ce contexte, par une lettre datée du 24 novembre 2000, le Comité a fait tenir au Gouvern e ment les recommandations préliminaires qu’il lui adressait en vue de l’aider à améliorer l’application de la Convention, en le priant de l’informer des initiatives qu’il prendrait comme suite aux recommandations. Le Gouvernement a donné des renseignements détaillés sur la mise en œuvre des recommandations prélimina i res dans des réponses datées du 28 mars, du 27 avril et du 8 novembre 2001.

134. Le 7 septembre 2001, des organisations non gouvernementales ont fait parvenir au Comité des re n seignements récents sur des cas de torture, de mauvais traitements, de harcèlement sexuel, de viols et de décès en détention survenus à Sri Lanka.

135. À sa vingt ‑septième session (12 ‑23 novembre 2001), le Comité a décidé de transmettre les résultats de l’enquête au Gouvernement et de l’inviter à l’informer, avant le mois de février 2002, des mesures qu’il aurait prises comme suite à ses constatations. Le 11 mars 2002, le Gouvernement sri ‑lankais a fait parvenir ses observations sur les constatations de la mission d’enquête.

3. Recommandations préliminaires du Comité

136. Le Comité a fait les recommandations préliminaires suivantes à l’État partie:

a) Donner des instructions précises aux agents de l’État pour assurer la mise en œuvre effe c tive des mesures judiciaires, administratives et autres prises pour lutter contre la torture;

b) Réduire progressivement jusqu’à éliminer les nombreux chevauchements entre les organismes ayant compétence pour enquêter sur les infractions à la loi sur la pr é vention du terrorisme et au décret d’exception, et définir nettement les domaines de co m pétence en vue de renforcer l’efficacité des mes u res de prévention de la torture sous toutes ses formes;

c) Incorporer, dans la loi sur la prévention du terrorisme et le décret d’exception, une dispos i tion rendant obligatoire le défèrement à bref délai des suspects devant un juge;

d) Mettre fin au pouvoir du Secrétaire à la défense d’ordonner la mise en détention provisoire pour une période allant jusqu’à un an sans contrôle judiciaire;

e) Constituer un fichier central des personnes détenues dans l’ensemble du pays;

f) Instituer un mécanisme efficace permettant de poursuivre au pénal les agents de l’État ayant commis des actes de torture;

g) Garantir aux détenus placés en garde à vue la possibilité de s’entretenir avec un avocat;

h) Instituer un mécanisme d’aide judiciaire gratuite;

i) Instituer un mécanisme de visites de contrôle régulières des lieux de détention par les m a gistrats;

j) Mettre un terme à la détention illégale de suspects pratiquée par les groupes paramilitaires qui assistent les forces armées sri ‑lankaises dans la guerre contre les LTTE, placer les groupes tels que le PLOTE ou le TELO sous le strict contrôle de l’État, ou les démanteler;

k) Procéder sans délai à des enquêtes indépendantes sur toute plainte pour torture;

l) Habiliter le Procureur général à ouvrir des enquêtes sur de telles plaintes;

m) Mettre en place une méthode garantissant l’application stricte des directives relatives à la prévention de la torture;

n) Établir une liste ou un registre des fonctionnaires aptes à assumer la direction d’un co m missariat de police ou d’un établissement pénitentiaire, et organiser régulièrement des cours de sensibilis a tion des fonctionnaires en poste;

o) Améliorer les conditions de détention de façon à les rendre conformes à l’Ensemble de r è gles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus et aux Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus;

p) Réaliser sans tarder les évaluations et les études mentionnées dans la note du Gouvern e ment en date du 6 novembre 2000 et informer le Comité contre la torture de leurs résultats.

4. Renseignements reçus du Gouvernement sri ‑lankais après la mission d’enquête

137. Comme il a été indiqué plus haut, par des notes datées du 8 novembre, du 27 avril et du 28 mars 2001, le Gouvernement sri ‑lankais a donné des renseignements détaillés au sujet des constatations et des recommandations du Comité.

138. Le Gouvernement a informé le Comité qu’un comité permanent interministériel sur les questions relatives aux droits de l’homme, créé le 20 novembre 2000, avait été chargé d’étudier les problèmes et les incidents relatifs aux droits fondamentaux, en particulier l’interdiction de la torture, et de décider des mes u res à prendre à ce sujet. Un groupe de travail interministériel sur les questions relatives aux droits de l’homme a ensuite été con s titué pour suivre l’application des décisions du Comité permanent interministériel et pre n dre des mesures pour faire face aux problèmes urgents. Le Groupe de travail a examiné les 16 recommandations préliminaires adressées le 24 novembre par le Comité contre la to r ture au Gouvern e ment sri ‑lankais. Les réponses reçues du Gouvernement montrent que de multiples initiatives positives ont été prises en vue d’interdire la pratique de la torture.

Recommandation a)

139. Le Gouvernement a indiqué qu’en janvier 2001 l’Inspecteur général de la police avait organisé une réunion spéciale de tous les inspecteurs généraux adjoints au cours de laquelle il avait appelé leur attention sur les allégations de torture, en faisant mention en particulier de la mission d’enquête du Comité et de ses observations initiales. Il avait souligné qu’en aucun cas la torture ne devait être tolérée dans leurs secteurs. Les intéressés devaient en outre agir rapidement et de façon impartiale dès réception d’une plainte ou d’une information faisant état d’actes de torture.

140. Le 14 janvier 2001, l’Inspecteur général a adressé une circulaire officielle à tous les responsables des divisions de police et des services spécialisés, rappelant que des actes de torture ne devaient être co m mis ou tolérés en aucune circonstance. Selon le Gouvernement, à la fin du mois de février 2001 tous les fonctionnaires relevant du Département de la police de Sri Lanka avaient reçu des ordres interdisant expre s sément tout acte de torture.

141. Le Gouvernement sri ‑lankais a aussi informé le Comité que le Ministère de la défense avait pour principe de ne permettre qu’aux membres de la police et des forces de sécurité habilités à le faire d’arrêter, de détenir et d’interroger des suspects. Aucune autre personne ni membre d’un groupe quelconque ne devait jamais être associé à ces activités de répression. Le Ministère de la défense suit de près l’application de la directive interdisant aux membres d’anciens groupes combattants de participer à des actions de facto de maintien de l’ordre. Il est désormais totalement interdit aux membres d’anciens groupes combattants de procéder à des arrestations ou des détentions.

Recommandation b)

142. Selon le Gouvernement, tous les fonctionnaires de police sont légalement habilités à procéder à des enquêtes criminelles sur les infractions visées par la loi sur la prévention du terrorisme et le décret d’exception. Compte tenu de la situation qui règne à Sri Lanka, il serait contraire aux intérêts du pays et à sa sécurité d’attribuer à un seul organe spécialisé de la police des pouvoirs prévus par la loi sur la prévention du terrorisme et le décret d’exception. Le Gouvernement a constaté et reconnu la possibilité de chevauch e ment de compétences.

143. Dans sa réponse, le Gouvernement apporte des précisions sur l’arrestation et la détention de su s pects en vertu de la loi sur la prévention du terrorisme et du décret d’exception.

144. Tout fonctionnaire de police dûment habilité peut, en application de la loi, procéder à l’arrestation d’un suspect en vertu des dispositions pertinentes de la loi sur la prévention du terrorisme et du décret d’exception. Le suspect est détenu dans les locaux du commiss a riat de police dont dépend le fonctionnaire de police en question. En cas d’arrestation dans le secteur de son domicile, il est détenu dans le commissariat de police de ce secteur. C e pendant, la Division des recherches antiterroristes ayant compétence pour ouvrir des e n quêtes dans tout le pays, un suspect arrêté par un fonctionnaire de cette division est détenu dans les locaux de la Division à Colombo.

145. Si après l’arrestation d’un suspect par un policier relevant d’un commissariat de police ordinaire, le responsable du commissariat estime qu’il y a lieu de procéder à une enquête et que le suspect doit être mai n tenu en détention, il en avise le fonctionnaire responsable de la division compétente; l’enquête et le suspect sont alors transférés soit à la Division des recherches antiterroristes, soit à l’Unité de lutte contre les actes de subversion. Sauf circonstances exceptionnelles, un suspect arrêté et détenu en vertu de la loi sur la prévention du terrorisme ou du décret d’exception ne doit pas être détenu dans un commissariat de police pendant plus de 72 heures.

146. Si l’arrestation est effectuée en vertu de la loi ou du décret sur la prévention du terrorisme par un policier attaché à l’Unité de lutte contre les actes de subversion, le suspect, à moins qu’il ne soit transféré à la Division des recherches antiterroristes, est détenu dans les locaux de l’Unité jusqu’à ce qu’il soit déféré devant un magistrat.

147. Si la police judiciaire est autorisée à ouvrir et mener une enquête sur une infraction relevant du champ d’application du décret d’exception ou de la loi sur la prévention du terrorisme, le suspect est détenu dans les locaux de ce département, jusqu’à ce qu’il soit déféré devant un magistrat.

148. Tous les suspects arrêtés par des policiers relevant de la Division des recherches antiterroristes sont détenus dans les locaux de cette Division.

Recommandation c)

149. Dans sa première réponse, en date du 28 mars 2001, le Gouvernement a expliqué qu’en vertu des dispositions du décret d’exception, l’organe chargé de l’application des lois concerné était tenu de présenter à un magistrat les personnes arrêtées et détenues en vertu desdites dispositions dans un délai de 30 jours à compter de leur arrestation. À la suite des débats qui ont eu lieu au sein du Groupe de travail interminist é riel sur les questions relatives aux droits de l’homme, il a été décidé de modifier les dispositions du décret, de façon à ramener à 14 jours le délai dans lequel les suspects doivent être déférés devant un magistrat.

150. Dans sa réponse du 27 avril 2001, le Gouvernement a ajouté que, par un décret daté du 6 avril 2001, la Présidente, agissant en vertu de l’article 5 de l’ordonnance sur la sécur i té publique, a promulgué les di s positions suivantes: «Lorsqu’une personne est arrêtée et détenue en application de l’article 18 du décret [d’exception], cette personne doit être pr é sentée à un magistrat dans un délai raisonnable, eu égard aux ci r constances de chaque cas et, en tout état de cause, 14 jours au plus tard après la date de l’arrestation.».

151. La loi sur la prévention du terrorisme prévoit que tout suspect arrêté en vertu de ses dispositions doit être déféré devant un magistrat au plus tard 72 heures après son arrestation, sauf s’il est sous le coup d’une ordonnance de mise en détention délivrée en vertu de l’article 9 1) de cette même loi, auquel cas il ne peut être présenté au magistrat qu’après la fin de l’enquête le concernant (il est alors maintenu en détention pendant une période maximale de 18 mois).

Recommandation d)

152. Le Gouvernement a indiqué que le pouvoir du Secrétaire à la défense d’autoriser la «détention pr o visoire» est susceptible de révision judiciaire durant toute la période de détention. Eu égard à la situation qui prévaut actuellement à Sri Lanka, le Gouvernement n’estime pas nécessaire d’abroger l’article en que s tion.

Recommandation e)

153. Le Gouvernement a informé le Comité que le Département de la police avait mis en place un fichier central informatisé, qui contient des données précises et à jour relatives à l’arrestation et au placement en détention de suspects en vertu des dispositions de la loi sur la prévention du terrorisme et des décrets d’exception que le Président de Sri Lanka peut prendre. Les policiers qui ont procédé à une arrestation en vertu de ces dispositions sont tenus de faire consigner les informations dans le Fichier au plus tard dans les six heures qui suivent l’arrestation. Le Fichier est entré en service le 1 er  novembre 2001. La population a été informée de sa création et peut poser des questions et obtenir des renseignements dans l’une des trois la n gues officielles (sinhala, tamoul ou anglais). Les parents de personnes dont on pense qu’elles ont été arr ê tées peuvent grâce au Fichier savoir si l’intéressé a bien été arrêté, par quelle autorité et où il se trouve d é tenu.

Recommandations f), g) et h)

154. Selon le Gouvernement sri ‑lankais, plusieurs sources d’information peuvent donner lieu à l’ouverture d’une enquête criminelle ou d’une enquête interne, comme les plaintes pour torture déposées directement par les victimes ou les communications émanant des mécanismes des Nations Unies. Toute i n formation de cette nature parvenant à un organisme public autre que les services du Procureur général d e vrait d’abord être transmise à l’Unité de poursuite des auteurs d’actes de torture de ces services, qui enregistrerait l’affaire.

155. Les enquêtes sont confiées à la police judiciaire. Toutefois, si une plainte met en cause un fonctio n naire de ce service, c’est une équipe de policiers relevant de la Direction de la police qui est chargée de l’enquête. Une fois celle ‑ci terminée, les conclusions sont transmises à l’Unité de poursuite des auteurs d’actes de torture, qui décide s’il y a lieu d’engager une procédure pénale selon les dispositions de la Convention contre la torture de 1994. Lorsqu’il est décidé d’engager une action pénale, un acte d’inculpation est dressé et l’affaire est renvoyée au tribunal compétent. Parallèlement à la mise en mouv e ment de l’action pénale, le Procureur général transmet à l’organe disciplinaire compétent un avis l’invitant à envisager d’ouvrir une procédure disciplinaire. L’Unité gère une base de do n nées informatiques où sont consignées toutes les actions qu’elle a engagées, notamment comme suite à des allégations de torture.

Recommandation i)

156. D’après les renseignements donnés par le Gouvernement, le Département de la police n’a pas d’objection à ce que le conseil défendant un suspect placé en garde à vue dans un commissariat de police s’entretienne avec ce suspect et le conseille avant qu’il ne soit présenté à un magistrat. Néanmoins, afin de permettre aux policiers de procéder à l’enquête préliminaire et d’interroger le suspect sans obstacle, cet e n tretien ne peut avoir lieu avant que la déclaration du suspect ait été recueillie. Toutefois, le suspect ou son conseil peut déposer une plainte pour voies de fait commises par la police lors de la première présentation du suspect à un juge. Les avocats qui représentent un suspect en état d’arrestation ont le droit de s’entretenir avec le responsable du commissariat de police concerné à tout moment après l’arrestation.

Recommandation j)

157. Le Gouvernement a indiqué qu’il existait deux systèmes d’aide judiciaire subventionnés par le Gouvernement et gérés par l’Association pour la protection des détenus et le Projet communautaire de se r vices juridiques, grâce auxquels les suspects bénéficient d’une aide judiciaire gratuite. Plusieurs autres se r vices d’assistance judiciaire sont assurés par des organisations non gouvernementales. La Commission sri ‑lankaise des droits de l’homme a recensé 34 organisations non gouvernementales procurant une assistance judiciaire de ce type.

Recommandation k)

158. Dans sa réponse du 28 mars 2001, le Gouvernement a informé le Comité que tous les magistrats étaient habilités à inspecter les centres dans lesquels les suspects sont placés en détention provisoire (sur mandat judiciaire délivré par eux). À la suite des débats du Groupe de travail interministériel sur les que s tions relatives aux droits de l’homme, il a été décidé de modifier les dispositions du décret d’exception de façon à habiliter les magistrats à inspecter (sans préavis) tous les lieux dans lesquels des suspects sont dét e nus en vertu des dispositions dudit décret.

159. Dans sa réponse du 27 avril 2001, le Gouvernement a ajouté que, par un décret daté du 6 avril, la Présidente, agissant en vertu de l’article 5 de l’ordonnance sur la sécurité p u blique, avait promulgué une disposition tendant à ce que «le responsable de tout établi s sement agréé par l’Inspecteur général de la police comme lieu de détention autorisé aux fins prévues aux articles 17 ou 18 communique tous les 14 jours au magistrat dans le re s sort duquel se trouve ce lieu de détention la liste des noms de toutes les personnes qui y sont détenues. Le magistrat veille à ce que cette liste soit apposée sur le tableau d’affichage du tribunal. Le magistrat dans le ressort duquel se trouve l’un de ces lieux de détention autorisés se rend dans l’établissement au moins une fois par mois. Il incombe au responsable de l’établissement de veiller à ce que toute personne qui y est détenue autr e ment que sur décision d’un magistrat soit présentée au magistrat qui effectue la visite».

160. Quand le décret d’exception a cessé d’être en vigueur le pouvoir conféré le 6 avril 2001 aux magistrats d’effectuer des visites sans préavis dans les lieux où se trouvent des personnes détenues en application de ce décret a cessé d’exister. Toutefois, le Groupe de travail interministériel sur les questions relatives aux droits de l’homme ayant relevé la nécessité d’habiliter les magistrats à visiter et inspecter tous les lieux de détention et à interroger les suspects, le Ministère de la justice envisage d’ajouter au Code de procédure pénale une nouvelle disposition visant à habiliter les magistrats à exercer cette fonction à l’égard de tous les suspects arrêtés en vertu de toutes les lois applicables.

Recommandation l)

161. D’après le Gouvernement, tous les anciens groupes combattants ont été enjoints de respecter la loi et de s’abstenir d’arrêter ou de garder quiconque en détention. Toute arrestation ou détention serait consid é rée comme une infraction pénale et tomberait sous le coup de la loi.

Recommandation m)

162. Dans sa réponse du 28 mars 2001, le Gouvernement sri ‑lankais a indiqué qu’un inspecteur général adjoint de la police avait été chargé de coordonner tous les efforts visant à protéger et promouvoir les droits de l’homme et à mettre en œuvre les dispositions de la législation nationale concernant les violations pr é sumées de ces droits. C’est à lui qu’il appartient de veiller au strict respect des directives concernant la pr é vention de la torture.

163. En outre, le commandant de l’armée sri-lankaise a chargé un général de brigade de coordonner to u tes les questions concernant les droits de l’homme. Il incombe à l’intéressé de veiller à la stricte application de ces directives par l’armée sri-lankaise. Un contre-amiral a été désigné par la marine pour assumer les mêmes fonctions.

164. Dans sa réponse du 27 avril 2001, le Gouvernement a ajouté que l’Inspecteur général adjoint avait récemment entrepris d’examiner, en particulier, la façon dont la politique du Gouvernement était mise en œuvre et notamment de vérifier que les personnes détenues dans les commissariats de police étaient traitées conformément aux normes et règles internationalement reconnues et qu’elles n’étaient soumises à aucune forme de torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

165. L’Inspecteur général adjoint de la police chargé des questions relatives aux droits de l’homme continue de surveiller personnellement le respect des directives émises par l’Inspecteur général de la police et le Quartier général de la police. Ces directives visent à garantir la protection des droits fondamentaux des suspects arrêtés et placés en garde à vue. Pour obtenir le respect des directives, l’Inspecteur fait des visites sans préavis dans les postes de police.

Recommandation n)

166. Les personnels des commissariats de police reçoivent tous une formation au moment de leur séle c tion, puis périodiquement par la suite. Le Secrétaire à la défense a officiellement invité le Sri Lanka Fou n dation Institute à examiner tous les programmes de formation de la police et des forces de sécurité en m a tière de droits de l’homme, en vue d’en revoir le contenu et la méthodologie, dans le but essentiel non se u lement d’élargir les connaissances mais aussi de favoriser une évolution des mentalités qui fasse à son tour évoluer les comportements. Le Sri Lanka Foundation Institute a déjà entrepris d’élaborer un nouveau pr o gramme de formation aux droits de l’homme destiné aux fonctionnaires de police.

Recommandation o)

167. L’amélioration des conditions de détention exige des ressources considérables et d’importants tr a vaux de rénovation des infrastructures. Elle se fera progressivement et prendra du temps.

Recommandation p)

168. Le Comité permanent interministériel et le Groupe de travail interministériel sur les questions rel a tives aux droits de l’homme continueront de suivre la situation. Le Groupe de travail prendra toutes les m e sures nécessaires pour prévenir les actes de torture et assurer le respect des garanties prévues par la loi en ce qui concerne toutes les allégations de torture.

169. Dans sa lettre du 28 mars 2001, outre ses réponses aux recommandations, le Gouvernement a pr é senté les mesures complémentaires qu’il a prises: enregistrement vidéo des aveux faits par les suspects aux adjoints aux commissaires de police, conform é ment aux dispositions de la loi sur la prévention du terr o risme et du décret d’exception; ouverture de locaux de détention supplémentaires à la Division des recherches antiterrori s tes, pour désengorger les locaux existants situés au 6 e étage du nouveau bâtiment de la p o lice; et définition et formulation de méthodes légales d’enquête criminelle permettant d’obtenir des suspects eux-mêmes des éléments de preuve à charge.

170. Dans sa réponse du 27 avril 2001, le Gouvernement a ajouté que le Ministère de la défense avait entrepris d’engager les services compétents à envisager de prendre des sanctions disciplinaires à l’encontre des policiers et des membres des forces de sécurité qui auraient commis des actes de torture. Des sanctions de cet ordre ont été prises à l’encontre de deux membres de la police sri ‑lankaise. L’application de mesures disciplinaires continue d’être examinée dans des cas sur lesquels la Cour suprême a statué et des cas portés à l’attention du Gouvernement sri ‑lankais par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la question de la torture.

171. En outre, le Gouvernement a fourni des statistiques sur le nombre de personnes a r rêtées par les autorités de police en vertu de la loi sur la prévention du terrorisme, du d é cret d’exception et de la législation ordinaire. Il a communiqué ces données car il estime que le Comité ne devrait établir que la torture est pratiquée systématiquement sur le terr i toire d’un État partie que si des cas de torture sont fréquemment et co u ramment constatés et revêtent un caractère systématique dans le cadre de la procédure commençant avec l’arrestation des intéressés et s’achevant avec leur libération ou l’imposition de sanctions pénales par le pouvoir judiciaire ou des instances analogues, de jure ou de facto.

5.   Constatations et conclusions du Comité contre la torture

172. En novembre 2001, le Comité a adressé au Gouvernement sri ‑lankais les constatations et concl u sions ci ‑après. Celles ‑ci reposent principalement sur ce que les deux membres du Comité chargés de l’enquête ont observé pendant leur visite à Sri Lanka.

173. Le problème le plus grave auquel se heurte Sri Lanka est le conflit interne qui fait rage depuis des années et qui crée un climat de violence en particulier dans les régions du nord et de l’est du pays et qui est aggravé par les actes terroristes perpétrés dans les zones urbaines par les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE).

174. Le Gouvernement a pris et continue de prendre des mesures draconiennes pour mettre fin au conflit interne. Ces mesures comprennent notamment le recours à une réglementation d’exception qui a des effets beaucoup plus étendus que la législation ordinaire.

175. Le Gouvernement emploie non seulement la police et ses forces armées pour lutter contre le terr o risme, mais également des groupes paramilitaires, dont certains comprennent des transfuges tamouls. Tout e fois, ces groupes ne sont pas totalement sous le contrôle des autorités civiles ou militaires.

176. La torture est fréquemment pratiquée dans les cas suivants:

a) Par la police, en particulier durant les premiers jours qui suivent l’arrestation et la déte n tion de suspects;

b) Par l’armée à l’encontre des personnes capturées soupçonnées d’être des terroristes pour «faciliter» les opérations de poursuite et avant de les remettre aux autorités civiles;

c) Par les groupes paramilitaires qui, apparemment ne sont pas des forces régulières appelées à répondre pleinement de leurs actes devant le commandement militaire.

177. Si le nombre de cas de torture est assez élevé, la majorité des suspects ne sont pas torturés; certains sont peut ‑être traités avec brutalité.

178. Le Gouvernement ne tolère pas la torture et recourt à divers moyens pour l’éviter. Il semble que les instructions à cet effet ne soient pas toujours observées et qu’il n’y ait pas de contrôle suivi pour veiller à ce qu’elles le soient.

179. Les enquêtes de police sur les cas de torture qui se seraient produits ne sont pas s a tisfaisantes car elles sont souvent excessivement retardées. Les poursuites ou les actions disciplinaires ont été rares jusqu’à une époque récente.

180. Il y a lieu de relever l’action entreprise par la Haute Cour pour répondre aux demandes de protection des droits fondamentaux. Il convient aussi de mentionner le travail de la Commission des droits de l’homme. Ce travail, qui a été récemment amélioré, laisse encore beaucoup à désirer, en particulier en ce qui concerne le respect des instructions visant à prévenir la torture et à remédier aux conséquences possibles pour les droits de l’homme de la nouvelle législation d’exception.

181. Sur la base de ce qui précède, les deux membres du Comité sont arrivés à la conclusion que, si un nombre préoccupant de cas de torture ainsi que de mauvais traitements tels qu’ils sont définis à l’article premier et à l’article 16 de la Convention se produisent effectivement, surtout dans le cadre du conflit interne, dans les circonstances actuelles, la pratique de la torture n’est pas systématique.

182. Pour parvenir à cette conclusion, le Comité a tenu compte de sa réflexion sur le sens de l’expression «pratique systématique de la torture», faite à l’issue de sa première enquête entreprise en application de l’article 20 de la Convention en 1993 et réitérée dans les enquêtes ultérieures (A/48/44/Add.1, par. 39; A/51/44, par. 214; et A/56/44, par. 163) 1 . Il a ainsi défini le sens ordinaire qui doit être donné à l’adjectif «systématique» dans le contexte de l’article 20 de la Convention contre la torture, comme le prévoit l’article 31 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités.

183. Le Comité a aussi tenu compte du fait que le Gouvernement et les forces de sécurité gouverneme n tales avaient commencé à donner effet à la plupart des recommandations adressées par le Comité.

184. Il va sans dire que le Gouvernement a le devoir de mettre fin à la pratique de la to r ture ou des mauvais traitements, d’examiner en toute indépendance toutes les allégations de torture et de violation de l’article 16, d’engager des poursuites contre les personnes soupçonnées d’avoir commis de tels actes et d’indemniser les victimes, ainsi que de donner pleinement effet à toutes les recommandations formulées par le Comité. En particulier, le Comité se félicite des mesures prises par le Gouvernement pour exercer un contrôle sur les groupes paramilitaires, car il a été signalé qu’ils étaient responsables de nombreux actes de torture. Le Comité est d’avis que ces groupes devraient être démantelés pour prévenir tout risque de pratique systématique de la torture.

185. Le Comité, tout en accueillant avec satisfaction la création du Comité permanent interministériel et du Groupe de travail interministériel sur les questions relatives aux droits de l’homme, qu’il considère comme un pas très important dans la bonne dire c tion, invite le Gouvernement à veiller à ce qu’ils puissent poursuivre efficacement leurs activités.

6.   Renseignements supplémentaires donnés par le Gouvernement sri ‑lankais

186. Par une note datée du 11 mars 2002, le Gouvernement sri ‑lankais a fait tenir une réponse aux constatations et conclusions du Comité. Certaines informations ont été repr i ses plus haut car elles concernaient des faits nouveaux se rapportant aux recommandations du Comité.

187. D’après la réponse, le Gouvernement, par l’intermédiaire du Sri Lanka Foundation Institute, du Police Higher Training Institute et de plusieurs institutions de formation de l’armée sri ‑lankaise, cont i nue de veiller à ce que le personnel de la police et celui des forces de sécurité reçoivent la formation voulue pour qu’ils observent et respectent les normes relatives aux droits de l’homme et au droit humanitaire. Des éléments du droit relatif aux droits de l’homme et du droit humanitaire font désormais partie du programme ordinaire de formation de la police et des forces de sécurité.

188. Le Gouvernement a aussi informé le Comité que, après avoir procédé à une analyse approfondie de la situation et conclu à la nécessité de faire en sorte que le Département de la police et son personnel se consacrent uniquement à l’application de la loi et n’agissent pas comme une force d’appoint pour les trois forces de sécurité, il crée un nouveau ministère appelé «Ministère de l’intérieur», le but principal étant de dissocier d’une manière effective la police des forces de sécurité et du Ministère de la défense.

189. De plus des directions des droits de l’homme ont été créées au sein des forces n a vale et aérienne. Le mandat actuel de la Direction des droits de l’homme de l’armée sri ‑lankaise consiste à conseiller le commandant de l’armée pour toutes les questions rel a tives au droit international humanitaire dans le contexte du conflit, exécuter des progra m mes de formation à l’intention des membres de l’armée sri ‑lankaise et assurer une étroite coordination avec le bureau du Comité international de la Croix ‑Rouge à Colombo et la Commission nationale des droits de l’homme en ce qui concerne les questions relatives aux droits de l’homme et les préoccupations humanitaires.

190. Le Gouvernement a également fait savoir qu’à la suite de négociations préliminaires, qui ont été facilitées par le Gouvernement norvégien, il avait pu, le 23 février 2002, conclure un accord de ce s sez ‑le ‑feu avec les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE). L’Accord contient une série de dispos i tions destinées à instaurer un environnement propice au renforcement de la coexistence pacifique entre les différentes communautés vivant à Sri Lanka et vise à promouvoir et à protéger les droits de l’homme.

191. Compte tenu de la conclusion du Comité selon laquelle la torture et d’autres formes de mauvais traitements sont pratiqués principalement dans le contexte du conflit interne, les faits nouveaux survenus récemment, en particulier l’entrée en vigueur, le 23 février 2002, de l’Accord de cessez ‑le ‑feu, dont le respect est surveillé par une mission de survei l lance internationale, éliminent d’une manière effective les conditions considérées par le Comité comme la principale cause du recours à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements.

192. En vertu du paragraphe 2.1 de l’Accord, le Gouvernement sri ‑lankais s’est engagé à s’abstenir de mener des opérations de ratissage ou de faire arrêter ou détenir des suspects en vertu des dispositions de la loi sur la prévention du terrorisme. S’il est nécessaire de faire arrêter un suspect soupçonné d’être l’instigateur d’un acte terroriste, l’arrestation serait opérée conformément aux dispositions du droit commun (Code de procédure pénale). L’Accord de cessez ‑le ‑feu prévoit un moratoire sur l’application des dispos i tions de la loi sur la prévention du terrorisme. Le Gouvernement a fait savoir que le décret d’exception n’était plus en vigueur et qu’il était disposé à revoir les dispositions de la loi sur la prévention du terr o risme.

193. Le paragraphe 1.8 de l’Accord prévoit que tous les groupes paramilitaires tamouls seront «désa r més» dans le mois qui suit la date d’entrée en vigueur de l’Accord.

194. En outre le Gouvernement a informé le Comité que, depuis la création de l’Unité de poursuite des auteurs d’actes de torture au Bureau du Procureur général et de l’Unité des enquêtes sur la torture au Dépa r tement des enquêtes pénales, toutes les allégations de torture font l’objet d’une enquête impartiale, rapide et approfondie et, lorsque les résultats le justifient, les auteurs sont poursuivis.

7.   Observations finales

195. Le Comité relève avec satisfaction les nombreuses initiatives importantes prises par le Gouvern e ment sri ‑lankais pour combattre et prévenir les actes de torture. Il se félicite de la signature de l’Accord de cessez ‑le ‑feu et exprime sa satisfaction pour les mesures ado p tées en vue de donner effet à presque toutes les recommandations qu’il a formulées. Le Comité souligne toutefois que la lutte contre la torture est un effort permanent, qui exige toute la vigilance de l’État partie.

V. EXAMEN DE REQUÊTES REÇUES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 22 DE LA CONVENTION

196. Conformément à l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, les particuliers qui se disent victimes d’une violation par un État partie de l’un quelconque des droits énoncés dans la Convention ont le droit d’adresser une requête au Comité contre la torture pour examen, sous réserve des conditions énoncées dans cet article. Quarante ‑neuf des 129 États qui ont adhéré à la Convention ou l’ont ratifiée ont déclaré qu’ils reconnaissaient la compétence du Comité pour recevoir et examiner des requêtes en vertu de l’article 22 de la Convention. La liste de ces États figure à l’annexe III. Le Comité ne peut recevoir aucune requête concernant un État partie à la Convention qui n’a pas reconnu sa compétence en vertu de l’article 22.

197. Les requêtes soumises en vertu de l’article 22 de la Convention sont examinées en séance privée (art. 22, par. 6). Tous les documents relatifs aux travaux du Comité dans le cadre de l’article 22 (observ a tions des parties et autres documents de travail) sont confidentiels.

198. À sa vingt ‑huitième session, le Comité a adopté la révision de son règlement intérieur, conçue pour faciliter et accélérer l’examen des requêtes (annexe IX).

199. Conformément à l’article 107 révisé du règlement intérieur, afin de se prononcer sur la recevabilité d’une requête, le Comité, son groupe de travail ou un rapporteur désigné conformément à l’article 98 ou au paragraphe 3 de l’article 106 s’assure que le requérant déclare être victime d’une violation par l’État partie intéressé des dispositions de la Convention, que la requête ne constitue pas un abus de la procédure devant le Comité et n’est pas manifestement dénuée de fondement, que la requête n’est pas incompatible avec les dispositions de la Convention, que la même question n’est pas déjà en cours d’examen devant une autre in s tance internationale d’enquête ou de règlement ou n’a pas déjà été examinée, que le requérant a épuisé tous les recours internes disponibles et que le délai écoulé depuis l’épuisement des recours internes n’est pas excessivement long, au point que l’examen de la plainte par le Comité ou l’État partie en est rendu anorm a lement difficile.

200. Conformément à l’article 109 révisé du règlement intérieur, aussitôt que possible après son enregi s trement, la requête est transmise à l’État partie qui est prié de soumettre une réponse écrite dans les six mois. À moins que le Comité, le groupe de travail ou le rapporteur n’ait décidé, du fait du caractère exceptionnel de l’affaire, de demander une r é ponse écrite qui porte exclusivement sur la question de la rec e vabilité, l’État partie soumet des explications ou des observations portant à la fois sur la recevabilité et sur le fond de la requête ainsi que sur toute mesure qui peut avoir été prise pour accorder réparation. L’État pa r tie peut demander, dans un délai de deux mois, que la requête soit déclarée irrecevable. Le Comité, ou le rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires, peut accepter ou non d’examiner la question de la recevabilité séparément de celle du fond. Lorsqu’une décision a été rendue sur la seule que s tion de la recevabilité, le Comité fixe la date limite de la réponse sur le fond au cas par cas. Le Comité, son groupe de travail ou le(s) rapporteur(s) peut demander à l’État partie ou au requérant de présenter par écrit des renseignements, éclaircissements ou observations supplémentaires et il fixe un délai. Dans le délai ind i qué par le Comité, son groupe de travail ou le(s) rapporteur(s), l’État partie ou le requérant peut bénéficier de la possibilité de faire des commentaires sur toute réponse reçue de l’autre partie. Le fait de ne pas recevoir ces commentaires dans le délai fixé ne doit pas, en règle générale, retarder l’examen de la requête et le Comité ou son groupe de travail peut décider d’examiner la question de la recevabilité ou du fond à la l u mière des renseignements disponibles.

201. Quand il a achevé l’examen d’une requête, le Comité formule une décision à la lumière de tous les renseignements qui lui ont été fournis par le requérant et par l’État partie. Ses constatations sont commun i quées aux parties (art. 22, par. 7, de la Convention et art. 112 du règlement intérieur) et sont ensuite rendues publiques. Le texte des décisions du Comité déclarant des requêtes irrecevables en vertu de l’article 22 de la Convention est également rendu public; si l’État partie est identifié, l’identité du requérant en revanche n’est pas révélée.

202. Conformément au paragraphe 1 du nouvel article 115 de son règlement intérieur révisé, le Comité peut décider d’inclure dans son rapport annuel un résumé des requêtes examinées. Il inclut aussi dans son rapport annuel le texte de ses décisions en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

A. Nouvelles méthodes de travail

203. À sa vingt ‑septième session, le Comité a nommé l’un de ses membres, M. Mavrommatis, Rappo r teur chargé des mesures provisoires et l’a confirmé dans cette fonction à sa vingt ‑huitième session, en tant que Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et les mesures provisoires (art. 98). À sa vingt ‑septième se s sion également, le Comité a décidé de créer un groupe de travail de présession composé de 3 à 5 membres pour aider le Comité plénier à s’acquitter de sa tâche en vertu de l’article 22 et il a désigné 4 de ses me m bres pour composer le premier groupe de travail: M. Burns, M. Camara, M. González Poblete et M. Yakovlev. À la vingt ‑huitième session, le groupe de travail a soumis au Comité des recommandations relatives aux conditions de recevabilité ainsi qu’au fond des requêtes. À la vingt ‑huitième session égal e ment, le Comité a créé la fonction de rapporteur chargé du suivi des constatations et a désigné M. González Poblete et M me  Gaer Rapporteur et Corapporteur (art. 114). Le mandat du rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires figure à l’annexe VIII et le texte du mandat des rappo r teurs chargés du suivi des constatations figure à l’annexe IX.

B. Mesures provisoires de protection

204. Il est fréquent que les requérants aient besoin d’une protection à titre préventif, en particulier quand ils sont sous le coup d’une mesure d’expulsion ou d’extradition imm i nente et qu’ils invoquent l’article 3 de la Convention. En vertu de l’article 108 du règl e ment intérieur révisé, le Comité, son groupe de travail ou le rapporteur chargé des nouve l les requêtes et des mesures provisoires peut, à tout moment après avoir reçu une requête, adresser à l’État partie une demande tendant à ce qu’il prenne les mesures provisoires que le Comité juge nécessaires pour éviter qu’un préjudice irréparable ne soit causé à la vi c time ou aux victimes de la violation alléguée. L’État partie est informé que la demande de mesures provisoires ne préjuge pas la décision qui sera prise en définitive sur la recevabil i té ou sur le fond de la requête. Le rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires vérifie que les demandes de mesures provisoires adressées par le Comité sont respectées. L’État partie peut informer le Comité que les raisons justifiant l’adoption de m e sures provisoires ont cessé d’exister ou peut présenter des arguments pour expliquer pourquoi il pense que les mesures provisoires devraient être levées. Le rapporteur, le C o mité ou son groupe de travail peut retirer la demande de mesures provisoires.

205. Au cours de la période couverte par le présent rapport, le rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires a demandé aux États parties de surseoir à l’expulsion dans un certain nombre d’affaires, afin de donner au Comité le temps d’examiner les requêtes selon la procédure applicable. Tous les États parties qui avaient ainsi été priés de surseoir à l’expulsion ont accédé à la demande du Comité.

C. Travaux accomplis

206. Au moment de l’adoption du présent rapport, le Comité avait enregistré 209 requêtes concernant 21 pays. Sur ce nombre, 55 avaient été classées et 38 avaient été déclarées irrecevables. Le Comité avait adopté des constatations sur le fond dans le cas de 50 requêtes et avait établi que 21 d’entre elles faisaient apparaître des violations de la Convention. Enfin, il lui restait à examiner 46 requêtes.

207. À sa vingt ‑septième session, le Comité a décidé de se dessaisir de trois communications et a déclaré recevable une requête, qui devait être examinée au fond. De plus, tout en rappelant que conformément au principe de l’épuisement des recours internes, le requérant était tenu d’épuiser des voies de recours qui soient directement en rapport avec le risque d’être soumis à la torture prévu à l’article 3 de la Convention, le Comité a déclaré irrecevable la communication n o  170/2000 ( A. R. c. Suède ) en vertu du paragraphe 5 b) de l’article 22 de la Convention. Le texte de la décision figure à la section B de l’annexe VII du présent ra p port.

208. À sa vingt ‑septième session, le Comité a adopté ses constatations concernant les communications n os  154/2000 ( M. S. c. Australie ), 156/2000 ( M. S. c. Suisse ), 162/2000 ( H. A.  c.  Australie ), 166/2000 ( B. S. c. Canada ), 175/2000 ( S. T. c. Pays ‑Bas ) et 178/2001 ( H. O.  c.  Suède ). Le texte des décisions du Comité figure à la section A de l’annexe VII du présent rapport.

209. Dans ses constatations relatives aux affaires mentionnées ci ‑dessus, le Comité a estimé que les r e quérants n’avaient pas apporté d’éléments suffisants pour permettre de conclure qu’ils risquaient d’être soumis à la torture s’ils étaient renvoyés dans leur pays d’origine. Le Comité a donc conclu dans chaque cas que la décision de renvoyer les requérants dans leur pays ne constituait pas une violation de l’article 3 de la Convention.

210. À sa vingt ‑huitième session, le Comité a déclaré irrecevable la requête n o  176/2000 ( M. R. R. c. E s pagne ) essentiellement du fait que le requérant ne pouvait pas se considérer comme une victime au sens du paragraphe 1 de l’article 22 de la Convention. Le texte de la décision figure à la section B de l’annexe VII du présent rapport.

211. À sa vingt ‑huitième session également, le Comité a adopté des décisions concernant les requêtes n os  111/1998 ( R. S. c. Autriche ), 138/1999 ( M. P. S. c. Australie ), 146/1999 ( E. T. B.  c.  Danemark ), 164/2000 ( L. M. T. c. Suède ), 177/2001 ( H. I. c. Australie ), 179/2001 ( B. A. M. c. Suède ), 180/2001 ( F. Z. c. Dan e mark ) et 185/2001 (Karoui c. Suède ). Le texte des décisions figure à la section A de l’annexe VII du présent rapport.

212. Dans sa décision concernant la requête n o  111/1998 ( R. S. c. Autriche ), le Comité a estimé que les autorités autrichiennes n’avaient pas manqué à l’obligation faite à l’article 13 de la Convention de mener une enquête immédiate et impartiale.

213. Dans sa décision concernant la requête n o  185/2001 ( C. B. A. K. c. Suède ), le Comité a estimé que le requérant avait apporté des éléments d’information suffisants, en particulier des rapports médicaux montrant qu’il avait été soumis à la torture dans le passé, une lettre de soutien d’Amnesty International et une attest a tion du dirigeant de l’organisation dont il était membre, qui donnaient des raisons de croire qu’il courrait un risque réel d’être soumis à la torture s’il était renvoyé en Tunisie.

214. Dans sa décision concernant les requêtes n os  138/1999 ( M. P. S. c. Australie ), 146/1999 ( E. T. B. c. Danemark ), 164/2000 ( L. M. T. c. Suède ), 177/2001 ( H. I. c. Australie ), 179/2001 ( B. A. M. c. Suède ) et 180/2001 ( F. Z. c. Danemark ), le Comité a estimé que les requérants n’avaient pas apporté d’éléments mo n trant qu’ils risquaient d’être soumis à la torture s’ils étaient renvoyés dans leur pays d’origine. Il a donc conclu dans chaque cas que la décision de renvoyer les requérants dans ces pays ne constituait pas une vi o lation de l’article 3 de la Convention.

VI. AVIS DU CONSEILLER JURIDIQUE DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES SUR LA QUESTION DE L’APPLICABILITÉ DE LA CONVENTION AU TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ

215. À sa vingt ‑sixième session, le Comité avait décidé de solliciter l’avis du Conseiller juridique de l’Organisation des Nations Unies sur la question de l’applicabilité de la Convention au territoire palestinien occupé. Par une lettre en date du 22 juin 2001, le Président du Comité a demandé au Conseiller juridique de lui soumettre cet avis. Dans sa réponse, en date du 19 septembre 2001, le Conseiller juridique a fait savoir qu’Israël était lié par la Convention, en tant que Puissance occupante, à l’égard du territoire palestinien o c cupé. Il a ajouté que le Comité contre la torture semblait avoir déjà agi en partant de ce postulat.

VII. DÉBAT SUR LA SITUATION DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ, AU REGARD DE LA CONVENTION

216. À sa vingt ‑huitième session, le Comité a décidé à la demande de l’un de ses me m bres de tenir un débat sur la situation dans le territoire palestinien occupé, au regard de la Convention. Ce débat a eu lieu à la 522 e  séance, le 14 mai 2002. À la fin du débat le Com i té a décidé, par neuf voix contre une, que dans l’exercice de son mandat, le rapporteur chargé du suivi des conclusions et recommandations adoptées par le Comité à l’issue de l’examen des rapports périodiques soumis par les États parties devrait prendre en consid é ration le débat qui s’était déroulé à la séance mentionnée.

VIII. ADOPTION DU RAPPORT ANNUEL DU COMITÉ

217. Conformément à l’article 24 de la Convention, le Comité présente aux États parties et à l’Assemblée générale un rapport annuel sur ses activités. Étant donné que le Comité tient chaque année sa deuxième session à la fin du mois de novembre, période qui coïncide avec celle pendant laquelle l’Assemblée générale tient ses sessions ordinaires, il adopte son rapport annuel à la fin de la session de pri n temps afin qu’il puisse être transmis à l’Assemblée générale pendant la même année civile. En conséquence à sa 528 e  séance, le 17 mai 2002, le Comité a examiné le rapport sur les travaux de ses vingt ‑septième et vingt ‑huitième sessions et l’a adopté à l’unanimité.

Annexe I

LISTE DES ÉTATS QUI ONT SIGNÉ OU RATIFIÉ LA CONVENTION CONTRE LA TORTURE ET AUTRES PEINES OU TRAITEMENTS CRUELS, INHUMAINS OU DÉGRADANTS, OU Y ONT ADHÉRÉ, AU 17 MAI 2002

État

Date de la signature

Date de réception des instruments de ratification ou d’adhésion

Afghanistan

4 février 1985

1 er avril 1987

Afrique du Sud

29 janvier 1993

10 décembre 1998

Albanie

11 mai 1984 a

Algérie

26 novembre 1985

12 septembre 1989

Allemagne

13 octobre 1986

1 er octobre 1990

Antigua-et-Barbuda

19 juillet 1993 a

Arabie saoudite

23 septembre 1997 a

Argentine

4 février 1985

24 septembre 1986

Arménie

13 septembre 1993 a

Australie

10 décembre 1985

8 août 1989

Autriche

14 mars 1985

29 juillet 1987

Azerbaïdjan

16 août 1996 a

Bahreïn

6 mars 1998 a

Bangladesh

5 octobre 1998 a

Bélarus

19 décembre 1985

13 mars 1987

Belgique

4 février 1985

25 juin 1999

Belize

17 mars 1986 a

Bénin

12 mars 1992 a

Bolivie

4 février 1985

12 avril 1999

Bosnie-Herzégovine

6 mars 1992 b

Botswana

8 septembre 2000

8 septembre 2000

Brésil

23 septembre 1985

28 septembre 1989

Bulgarie

10 juin 1986

16 décembre 1986

Burkina Faso

4 janvier 1999 a

Burundi

18 février 1993 a

Cambodge

15 octobre 1992 a

Cameroun

19 décembre 1986 a

Canada

23 août 1985

24 juin 1987

Cap ‑Vert

4 juin 1992 a

Chili

23 septembre 1987

30 septembre 1988

Chine

12 décembre 1986

4 octobre 1988

Chypre

9 octobre 1985

18 juillet 1991

Colombie

10 avril 1985

8 décembre 1987

Comores

22 septembre 2000

Costa Rica

4 février 1985

11 novembre 1993

Côte d’Ivoire

18 décembre 1995 a

Croatie

8 octobre 1991 b

Cuba

27 janvier 1986

17 mai 1995

Danemark

4 février 1985

27 mai 1987

Égypte

25 juin 1986 a

El Salvador

17 juin 1996 a

Équateur

4 février 1985

30 mars 1988

Espagne

4 février 1985

21 octobre 1987

Estonie

21 octobre 1991 a

États ‑Unis d’Amérique

18 avril 1988

21 octobre 1994

Éthiopie

14 mars 1994 a

ex ‑République yougoslave de Macédoine

12 décembre 1994 b

Fédération de Russie

10 décembre 1985

3 mars 1987

Finlande

4 février 1985

30 août 1989

France

4 février 1985

18 février 1986

Gabon

21 janvier 1986

8 septembre 2000

Gambie

23 octobre 1985

Géorgie

26 octobre 1994 a

Ghana

7 septembre 2000

7 septembre 2000 a

Grèce

4 février 1985

6 octobre 1988

Guatemala

5 janvier 1990 a

Guinée

30 mai 1986

10 octobre 1989

Guinée ‑Bissau

12 septembre 2000

Guyana

25 janvier 1988

19 mai 1988

Honduras

5 décembre 1996 a

Hongrie

28 novembre 1986

15 avril 1987

Inde

14 octobre 1997

Indonésie

23 octobre 1985

28 octobre 1998

Irlande

28 septembre 1992

11 avril 2002

Islande 

4 février 1985

23 octobre 1996

Israël

22 octobre 1986

3 octobre 1991

Italie

4 février 1985

12 janvier 1989

Jamahiriya arabe libyenne

16 mai 1989 a

Japon

29 juin 1999 a

Jordanie

13 novembre 1991 a

Kazakhstan

26 août 1998 a

Kenya

21 février 1997 a

Kirghizistan

5 septembre 1997 a

Koweït

8 mars 1996 a

Lesotho

12 novembre 2001 a

Lettonie

14 avril 1992 a

Liban

5 octobre 2000 a

Liechtenstein

27 juin 1985

2 novembre 1990

Lituanie

1 er février 1996 a

Luxembourg

22 février 1985

29 septembre 1987

Madagascar

1 er octobre 2001

Malawi

11 juin 1996 a

Mali

26 février 1999 a

Malte

13 septembre 1990 a

Maroc

8 janvier 1986

21 juin 1993

Maurice

9 décembre 1992 a

Mexique

18 mars 1985

23 janvier 1986

Monaco

6 décembre 1991 a

Mongolie

24 janvier 2002

Mozambique

14 septembre 1999 a

Namibie

28 novembre 1994 a

Nauru

12 novembre 2001

Népal

14 mai 1991 a

Nicaragua

15 avril 1985

Niger

5 octobre 1998 a

Nigéria

28 juillet 1988

28 juin 2001

Norvège

4 février 1985

9 juillet 1986

Nouvelle ‑Zélande

14 janvier 1986

10 décembre 1989

Ouganda

3 novembre 1986 a

Ouzbékistan

28 septembre 1995 a

Panama

22 février 1985

24 août 1987

Paraguay

23 octobre 1989

12 mars 1990

Pays ‑Bas

4 février 1985

21 décembre 1988

Pérou

29 mai 1985

7 juillet 1988

Philippines

18 juin 1986 a

Pologne

13 janvier 1986

26 juillet 1989

Portugal

4 février 1985

9 février 1989

Qatar

11 janvier 2000 a

République de Corée

9 janvier 1995 a

République démocratique du Congo

18 mars 1996 a

République de Moldova

28 novembre 1995 a

République dominicaine

4 février 1985

République tchèque

1 er janvier 1993 b

Roumanie

18 décembre 1990 a

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

15 mars 1985

8 décembre 1988

Saint-Vincent-et-les Grenadines

1 er août 2001 a

Sao Tomé-et-Principe

6 septembre 2000

Sénégal

4 février 1985

21 août 1986

Seychelles

5 mai 1992 a

Sierra Leone

18 mars 1985

25 avril 2001

Slovaquie

29 mai 1993 b

Slovénie

16 juillet 1993 a

Somalie

24 janvier 1990 a

Soudan

4 juin 1986

Sri Lanka

3 janvier 1994 a

Suède

4 février 1985

8 janvier 1986

Suisse

4 février 1985

2 décembre 1986

Tadjikistan

11 janvier 1995 a

Tchad

9 juin 1995 a

Togo

25 mars 1987

18 novembre 1987

Tunisie

26 août 1987

23 septembre 1988

Turkménistan

25 juin 1999 a

Turquie

25 janvier 1988

2 août 1988

Ukraine

27 février 1986

24 février 1987

Uruguay

4 février 1985

24 octobre 1986

Venezuela

15 février 1985

29 juillet 1991

Yémen

5 novembre 1991 a

Yougoslavie

18 avril 1989

10 septembre 1991 b

Zambie

7 octobre 1998 a

Annexe II

ÉTATS PARTIES QUI ONT DÉCLARÉ, AU MOMENT DE LA RATIFICATION OU DE L’ADHÉSION, NE PAS RECONNAÎTRE LA COMPÉTENCE DU COMITÉ EN APPLICATION DE L’ARTICLE 20 DE LA CONVENTION, AU 17 MAI 2002 a

Afghanistan

Arabie saoudite

Chine

Israël

Koweït

Maroc

Ukraine

Annexe III

ÉTATS PARTIES QUI ONT FAIT LES DÉCLARATIONS PRÉVUESAUX ARTICLES 21 ET 22 DE LA CONVENTION, AU 17 MAI 2002 a

État partie

Date d’entrée en vigueur

Afrique du Sud

10 décembre 1998

Algérie

12 octobre 1989

Allemagne

19 octobre 2001

Argentine

26 juin 1987

Australie

29 janvier 1993

Autriche

28 août 1987

Belgique

25 juillet 1999

Bulgarie

12 juin 1993

Cameroun

11 novembre 2000

Canada

24 juillet 1987

Chypre

8 avril 1993

Costa Rica

27 février 2002

Croatie

8 octobre 1991

Danemark

26 juin 1987

Équateur

29 avril 1988

Espagne

20 novembre 1987

Fédération de Russie

1 er octobre 1991

Finlande

29 septembre 1989

France

26 juin 1987

Ghana

7 octobre 2000

Grèce

5 novembre 1988

Hongrie

26 juin 1987

Irlande

11 avril 2002

Islande

22 novembre 1996

Italie

11 février 1989

Liechtenstein

2 décembre 1990

Luxembourg

29 octobre 1987

Malte

13 octobre 1990

Monaco

6 janvier 1992

Norvège

26 juin 1987

Nouvelle-Zélande

9 janvier 1990

Pays-Bas

20 janvier 1989

Pologne

12 juin 1993

Portugal

11 mars 1989

République tchèque

3 septembre 1996

Sénégal

16 octobre 1996

Slovaquie

17 avril 1995

Slovénie

16 juillet 1993

Suède

26 juin 1987

Suisse

26 juin 1987

Togo

18 décembre 1987

Tunisie

23 octobre 1988

Turquie

1 er septembre 1988

Uruguay

26 juin 1987

Venezuela

26 avril 1994

Yougoslavie

10 octobre 1991

ÉTATS PARTIES QUI ONT FAIT UNIQUEMENT LA DÉCLARATION PRÉVUE À L’ARTICLE 21 DE LA CONVENTION, AU 17 MAI 2002

États ‑Unis d’Amérique

21 octobre 1994

Japon

29 juin 1999

Ouganda

19 décembre 2001

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

8 décembre 1988

ÉTATS PARTIES AYANT FAIT UNIQUEMENT LA DÉCLARATION PRÉVUE À L’ARTICLE 22 DE LA CONVENTION, AU 17 MAI 2002 b

Azerbaïdjan

4 février 2002

Mexique

15 mars 2002

Seychelles

6 août 2001

Annexe IV

COMPOSITION DU COMITÉ CONTRE LA TORTURE EN 2002

Membres

Pays de nationalité

Mandat expirant le 31 décembre

M. Peter Thomas BURNS

Canada

2003

M. Guibril CAMARA

Sénégal

2003

M. Sayed Kassem EL MASRY

Égypte

2005

M me Felice GAER

États-Unis d’Amérique

2003

M. Alejandro GONZÁLEZ POBLETE

Chili

2003

M. Fernando MARIÑO MENÉNDEZ

Espagne

2005

M. Andreas MAVROMMATIS

Chypre

2003

M. Ole Vedel RASMUSSEN

Danemark

2005

M. Alexander M. YAKOVLEV

Fédération de Russie

2005

M. YU Mengjia

Chine

2005

Annexe V

PRÉSENTATION DES RAPPORTS PAR LES ÉTATS PARTIES EN VERTU DE L’ARTICLE 19DE LA CONVENTION: SITUATION AU 17 MAI 2002

A. Rapports initiaux

Rapports initiaux attendus en 1988 (27)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle devait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Afghanistan

26 juin 1987

25 juin 1988

21 janvier 1992

CAT/C/5/Add.31

Argentine

26 juin 1987

25 juin 1988

15 décembre 1988

CAT/C/5/Add.12/Rev.1

Autriche

28 août 1987

27 août 1988

10 novembre 1988

CAT/C/5/Add.10

Bélarus

26 juin 1987

25 juin 1988

11 janvier 1989

CAT/C/5/Add.14

Belize

26 juin 1987

25 juin 1988

18 avril 1991

CAT/C/5/Add.25

Bulgarie

26 juin 1987

25 juin 1988

12 septembre 1991

CAT/C/5/Add.28

Cameroun

26 juin 1987

25 juin 1988

15 février 1989 et 25 avril 1991

CAT/C/5/Add.16 et 26

Canada

24 juillet 1987

23 juillet 1988

16 janvier 1989

CAT/C/5/Add.15

Danemark

26 juin 1987

25 juin 1988

26 juillet 1988

CAT/C/5/Add.4

Égypte

26 juin 1987

25 juin 1988

26 juillet 1988 et 20 novembre 1990

CAT/C/5/Add.5 et 23

Espagne

20 novembre 1987

19 novembre 1988

19 mars 1990

CAT/C/5/Add.21

Fédération de Ru s sie

26 juin 1987

25 juin 1988

6 décembre 1988

CAT/C/5/Add.11

France

26 juin 1987

25 juin 1988

30 juin 1988

CAT/C/5/Add.2

Hongrie

26 juin 1987

25 juin 1988

25 octobre 1988

CAT/C/5/Add.9

Luxembourg

29 octobre 1987

28 octobre 1988

15 octobre 1991

CAT/C/5/Add.29

Mexique

26 juin 1987

25 juin 1988

10 août 1988 et 13 février 1990

CAT/C/5/Add.7 et 22

Norvège

26 juin 1987

25 juin 1988

21 juillet 1988

CAT/C/5/Add.3

Ouganda

26 juin 1987

25 juin 1988

Panama

23 septembre 1987

22 septembre 1988

28 janvier 1991

CAT/C/5/Add.24

Philippines

26 juin 1987

25 juin 1988

26 juillet 1988 et 28 avril 1989

CAT/C/5/Add.6 et 18

Rép. dém. allemande

9 octobre 1987

8 octobre 1988

19 décembre 1988

CAT/C/5/Add.13

Sénégal

26 juin 1987

25 juin 1988

30 octobre 1989

CAT/C/5/Add.19 (remplaçant Add.8)

Suède

26 juin 1987

25 juin 1988

23 juin 1988

CAT/C/5/Add.1

Suisse

26 juin 1987

25 juin 1988

14 avril 1989

CAT/C/5/Add.17

Togo

18 décembre 1987

17 décembre 1988

Ukraine

26 juin 1987

25 juin 1988

17 janvier 1990

CAT/C/5/Add.20

Uruguay

26 juin 1987

25 juin 1988

6 juin 1991 et 5 décembre 1991

CAT/C/5/Add.27 et 30

Rapports initiaux attendus en 1989 (10)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle devait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Chili

30 octobre 1988

29 octobre 1989

21 septembre 1989 et 5 novembre 1990

CAT/C/7/Add.2 et 9

Chine

3 novembre 1988

2 novembre 1989

1 er décembre 1989

CAT/C/7/Add.5 et 14

Colombie

7 janvier 1988

6 janvier 1989

24 avril 1989 et 28 août 1990

CAT/C/7/Add.1 et 10

Équateur

29 avril 1988

28 avril 1989

27 juin 1990 et 28 février 1991 et 26 septembre 1991

CAT/C/7/Add.7, 11 et 13

Grèce

5 novembre 1988

4 novembre 1989

8 août 1990

CAT/C/7/Add.8

Guyana

18 juin 1988

17 juin 1989

Pérou

6 août 1988

5 août 1989

9 novembre 1992 et 22 février 1994

CAT/C/7/Add.15 et 16

République fédérative tch è que et slovaque

6 août 1988

5 août 1989

21 novembre 1989 et 14 mai 1991

CAT/C/7/Add.4 et 12

Tunisie

23 octobre 1988

22 octobre 1989

25 octobre 1989

CAT/C/7/Add.3

Turquie

1 er septembre 1988

31 août 1989

24 avril 1990

CAT/C/7/Add.6

Rapports initiaux attendus en 1990 (11)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Algérie

12 octobre 1989

11 octobre 1990

13 février 1991

CAT/C/9/Add.5

Australie

7 septembre 1989

6 septembre 1990

27 août 1991 et 11 juin 1992

CAT/C/9/Add.8 et 11

Brésil

28 octobre 1989

27 octobre 1990 26 mai 2000 CAT/C/9/Add.16

Finlande

29 septembre 1989

28 septembre 1990

28 septembre 1990

CAT/C/9/Add.4

Guinée

9 novembre 1989

8 novembre 1990

Italie

11 février 1989

10 février 1990

30 décembre 1991

CAT/C/9/Add.9

Jamahiriya arabe libyenne

15 juin 1989

14 juin 1990

14 mai 1991 et 27 août 1992

CAT/C/9/Add.7 et 12/Rev.1

Pays ‑Bas

20 janvier 1989

19 janvier 1990

14 mars 1990, 11 septembre 1990 et 13 septembre 1990

CAT/C/9/Add.1 à 3

Pologne

25 août 1989

24 août 1990

22 mars 1993

CAT/C/9/Add.13

Portugal

11 mars 1989

10 mars 1990

7 mai 1993

CAT/C/9/Add.15

Rapports initiaux attendus en 1991 (7)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Allemagne

31 octobre 1990

30 octobre 1991

9 mars 1992

CAT/C/12/Add.1

Guatemala

4 février 1990

3 février 1991

2 novembre 1994 et 31 juillet 1995

CAT/C/12/Add.5 et 6

Liechtenstein

2 décembre 1990

1 er décembre 1991

5 août 1994

CAT/C/12/Add.4

Malte

13 octobre 1990

12 octobre 1991

3 janvier 1996

CAT/C/12/Add.7

No u velle ‑Zélande

9 janvier 1990

8 janvier 1991

29 juillet 1992

CAT/C/12/Add.2

Paraguay

11 avril 1990

10 avril 1991

13 janvier 1993

CAT/C/12/Add.3

Somalie

23 février 1990

22 février 1991

Rapports initiaux attendus en 1992 (10)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Chypre

17 août 1991

16 août 1992

23 juin 1993

CAT/C/16/Add.2

Croatie

8 octobre 1991

7 octobre 1992

4 janvier 1996

CAT/C/16/Add.6

Estonie

20 novembre 1991

19 novembre 1992

19 juin 2001

CAT/C/16/Add.9

Israël

2 novembre 1991

1 er novembre 1992

25 janvier 1994

CAT/C/16/Add.4

Jordanie

13 décembre 1991

12 décembre 1992

23 novembre 1994

CAT/C/16/Add.5

Népal

13 juin 1991

12 juin 1992

6 octobre 1993

CAT/C/16/Add.3

Roumanie

17 janvier 1991

16 janvier 1992

14 février 1992

CAT/C/16/Add.1

Venezuela

28 août 1991

27 août 1992

8 juillet 1998

CAT/C/16/Add.8

Yémen

5 décembre 1991

4 décembre 1992

Yougoslavie

10 octobre 1991

9 octobre 1992

20 janvier 1998

CAT/C/16/Add.7

Rapports initiaux attendus en 1993 (8)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Bénin

11 avril 1992

10 avril 1993

12 février 2001

CAT/C/21/Add.3

Bosnie-Herzégovine

6 mars 1992

5 mars 1993

Cambodge

14 novembre 1992

13 novembre 1993

Cap ‑Vert

4 juillet 1992

3 juillet 1993

Lettonie

14 mai 1992

13 mai 1993

Monaco

5 janvier 1992

4 janvier 1993

14 mars 1994

CAT/C/21/Add.1

République tchèque

1 er janvier 1993

31 décembre 1993

18 avril 1994

CAT/C/21/Add.2

Seychelles

4 juin 1992

3 juin 1993

Rapports initiaux attendus en 1994 (8)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présent a tion

Cote

Antigua-et-Barbuda

18 août 1993

17 août 1994

Arménie

13 octobre 1993

12 octobre 1994

20 avril 1995 et 21 décembre 1995

CAT/C/24/Add.4 et Rev.1

Burundi

20 mars 1993

19 mars 1994

Costa Rica

11 décembre 1993

10 décembre 1994

10 août 2000

CAT/C/24/Add.7

Maroc

21 juillet 1993

20 juillet 1994

29 juillet 1994

CAT/C/24/Add.2

Maurice

8 janvier 1993

7 janvier 1994

10 mai 1994 et 1 er  mars 1995

CAT/C/24/Add.1 et 3

Slovaquie

28 mai 1993

27 mai 1994

1 er mai 2000

CAT/C/24/Add.6

Slovénie

15 août 1993

14 août 1994

10 août 1999

CAT/C/24/Add.5

Rapports initiaux attendus en 1995 (7)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présent a tion

Cote

Albanie

10 juin 1994

9 juin 1995

États-Unis d’Amérique

20 novembre 1994

19 novembre 1995

15 octobre 1999

CAT/C/28/Add.5

Éthiopie

13 avril 1994

12 avril 1995

ex-Rép. yougoslave de Macédoine

12 décembre 1994

11 décembre 1995

22 mai 1998

CAT/C/28/Add.4

Géorgie

25 novembre 1994

24 novembre 1995

4 juin 1996

CAT/C/28/Add.1

Namibie

28 décembre 1994

27 décembre 1995

23 août 1996

CAT/C/28/Add.2

Sri Lanka

2 février 1994

1 er février 1995

27 octobre 1997

CAT/C/28/Add.3

Rapports initiaux attendus en 1996 (6)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présent a tion

Cote

Cuba

16 juin 1995

15 juin 1996

15 novembre 1996

CAT/C/32/Add.2

Ouzbékistan

28 octobre 1995

27 octobre 1996

18 février 1999

CAT/C/32/Add.3

République de Corée

8 février 1995

7 février 1996

10 février 1996

CAT/C/32/Add.1

République de Mo l dova

28 décembre 1995

27 décembre 1996

17 septembre 2001

CAT/C/32/Add.4

Tadjikistan

10 février 1995

9 février 1996

Tchad

9 juillet 1995

8 juillet 1996

Rapports initiaux attendus en 1997 (8)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Azerbaïdjan

15 septembre 1996

14 septembre 1997

18 décembre 1998

CAT/C/37/Add.3

Côte d’Ivoire

17 janvier 1996

16 janvier 1997

El Salvador

17 juillet 1996

16 juillet 1997

5 juillet 1999

CAT/C/37/Add.4

Islande

22 novembre 1996

21 novembre 1997

12 février 1998

CAT/C/37/Add.2

Koweït

7 avril 1996

6 avril 1997

5 août 1997

CAT/C/37/Add.1

Lituanie

2 mars 1996

1 er mars 1997

Malawi

11 juillet 1996

10 juillet 1997

République démocratique du Congo

17 avril 1996

16 avril 1997

Rapports initiaux attendus en 1998 (4)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Arabie saoudite

22 octobre 1997

21 octobre 1998

27 février 2001

CAT/C/42/Add.2

Honduras

4 janvier 1997

3 janvier 1998

Kenya

23 mars 1997

22 mars 1998

Kirghizistan

5 octobre 1997

4 octobre 1998

9 février 1999

CAT/C/42/Add.1

Rapports initiaux attendus en 1999 (6)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Bahreïn

5 avril 1998

4 avril 1999

Bangladesh

4 novembre 1998

3 novembre 1999

Indonésie

27 novembre 1998

26 novembre 1999

7 février 2001

CAT/C/47/Add.3

Kazakhstan

25 septembre 1998

24 septembre 1999

15 août 2000

CAT/C/47/Add.1

Niger

4 novembre 1998

3 novembre 1999

Zambie

6 novembre 1998

5 novembre 1999

1 er décembre 2000

CAT/C/47/Add.2

Rapports initiaux attendus en 2000 (8)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Afrique du Sud

9 janvier 1999

8 janvier 2000

Belgique

25 juillet 1999

25 juillet 2000

14 août 2001

CAT/C/52/Add.2

Bolivie

12 mai 1999

11 mai 2000

16 mai 2000

CAT/C/52/Add.1

Burkina Faso

3 février 1999

2 février 2000

Japon

29 juillet 1999

29 juillet 2000

Mali

28 mars 1999

27 mars 2000

Mozambique

14 octobre 1999

14 octobre 2000

Turkménistan

25 juillet 1999

25 juillet 2000

Rapports initiaux attendus en 2001 (5)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Botswana

8 octobre 2000

7 octobre 2001

Gabon

8 octobre 2000

7 octobre 2001

Ghana

7 octobre 2000

6 octobre 2001

Liban

4 novembre 2000

3 novembre 2001

Qatar

10 février 2000

9 février 2001

Rapports initiaux attendus en 2002 (4)

État partie

Date d’entrée en vigueur

Date à laquelle d e vait être présenté le rapport initial

Date de présentation

Cote

Lesotho

12 décembre 2001

11 août 2002

Nigéria

28 juillet 2001

27 juillet 2002

Saint-Vincent-et les Grenadines

31 août 2001

30 août 2002

Sierra Leone

25 mai 2001

24 mai 2002

B. Deuxièmes rapports périodiques

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 1992 (26)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Afghanistan

25 juin 1992

Argentine

25 juin 1992

29 juin 1992

CAT/C/17/Add.2

Autriche

27 août 1992

12 octobre 1998

CAT/C/17/Add.21

Bélarus

25 juin 1992

15 septembre 1992

CAT/C/17/Add.6

Belize

25 juin 1992

Bulgarie

25 juin 1992

19 juin 1998

CAT/C/17/Add.19

Cameroun

25 juin 1992

20 novembre 1999

CAT/C/17/Add.22

Canada

23 juillet 1992

11 septembre 1992

CAT/C/17/Add.5

Danemark

25 juin 1992

22 février 1995

CAT/C/17/Add.13

Égypte

25 juin 1992

13 avril 1993

CAT/C/17/Add.11

Espagne

19 novembre 1992

19 novembre 1992

CAT/C/17/Add.10

Fédération de Russie

25 juin 1992

17 janvier 1996

CAT/C/17/Add.15

France

25 juin 1992

19 décembre 1996

CAT/C/17/Add.18

Hongrie

25 juin 1992

23 septembre 1992

CAT/C/17/Add.8

Luxembourg

28 octobre 1992

3 août 1998

CAT/C/17/Add.20

Mexique

25 juin 1992

21 juillet 1992 et 28 mai 1996

CAT/C/17/Add.3 et Add.17

Norvège

25 juin 1992

25 juin 1992

CAT/C/17/Add.1

Ouganda

25 juin 1992

Panama

22 septembre 1992

21 septembre 1992

CAT/C/17/Add.7

Philippines

25 juin 1992

Sénégal

25 juin 1992

27 mars 1995

CAT/C/17/Add.14

Suède

25 juin 1992

30 septembre 1992

CAT/C/17/Add.9

Suisse

25 juin 1992

28 septembre 1993

CAT/C/17/Add.12

Togo

17 décembre 1992

Ukraine

25 juin 1992

31 août 1992

CAT/C/17/Add.4

Uruguay

25 juin 1992

25 mars 1996

CAT/C/17/Add.16

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 1993 (9)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Chili

29 octobre 1993

16 février 1994

CAT/C/20/Add.3

Chine

2 novembre 1993

2 décembre 1995

CAT/C/20/Add.5

Colombie

6 janvier 1993

4 août 1995

CAT/C/20/Add.4

Équateur

28 avril 1993

21 avril 1993

CAT/C/20/Add.1

Grèce

4 novembre 1993

6 décembre 1993

CAT/C/20/Add.2

Guyana

17 juin 1993

Pérou

5 août 1993

20 janvier 1997

CAT/C/20/Add.6

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Tunisie

22 octobre 1993

10 novembre 1997

CAT/C/20/Add.7

Turquie

31 août 1993

28 novembre 2001

CAT/C/20/Add.8

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 1994 (11)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Algérie

11 octobre 1994

23 février 1996

CAT/C/25/Add.8

Australie

6 septembre 1994

19 octobre 1999

CAT/C/25/Add.11

Brésil

27 octobre 1994

Finlande

28 septembre 1994

11 septembre 1995

CAT/C/25/Add.7

Guinée

8 novembre 1994

Italie

10 février 1994

20 juillet 1994

CAT/C/25/Add.4

Jamahiriya arabe libyenne

14 juin 1994

30 juin 1994

CAT/C/25/Add.3

Pays-Bas

19 janvier 1994

14 avril 1994 et 16 juin 1994 et

27 mars 1995

CAT/C/25/Add.1, 2 et 5

Pologne

24 août 1994

7 mai 1996

CAT/C/25/Add.9

Portugal

10 mars 1994

7 novembre 1996

CAT/C/25/Add.10

Royaume ‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

6 janvier 1994

25 mars 1995

CAT/C/25/Add.6

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 1995 (7)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Allemagne

30 octobre 1995

17 décembre 1996

CAT/C/29/Add.2

Guatemala

3 février 1995

13 février 1997

CAT/C/29/Add.3

Liechtenstein

1 er décembre 1995

3 septembre 1998

CAT/C/29/Add.5

Malte

12 octobre 1995

29 septembre 1998

CAT/C/29/Add.6

Nouvelle-Zélande

8 janvier 1995

25 février 1997

CAT/C/29/Add.4

Paraguay

10 avril 1995

10 juillet 1996

CAT/C/29/Add.1

Somalie

22 février 1995

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 1996 (10)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Chypre

16 août 1996

12 septembre 1996

CAT/C/33/Add.1

Croatie

7 octobre 1996

5 mars 1998

CAT/C/33/Add.4

Estonie

19 novembre 1996

Israël

1 er novembre 1996

6 décembre 1996 et 7 février 1997 (ra p port spécial) 26 février 1998

CAT/C/33/Add.2/Rev.1

CAT/C/33/Add.3

Jordanie

12 décembre 1996

Népal

12 juin 1996

Roumanie

16 janvier 1996

Venezuela

27 août 1996

1 er septembre 2000

CAT/C/33/Add.5

Yémen

4 décembre 1996

Yougoslavie

9 octobre 1996

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 1997 (8)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Bénin

10 avril 1997

Bosnie-Herzégovine

5 mars 1997

Cambodge

13 novembre 1997

Cap-Vert

3 juillet 1997

Lettonie

13 mai 1997

Monaco

4 janvier 1997

République tchèque

31 décembre 1997

14 février 2000

CAT/C/38/Add.1

Seychelles

3 juin 1997

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 1998 (8)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Antigua-et-Barbuda

17 août 1998

Arménie

12 octobre 1998

15 juin 1999

CAT/C/43/Add.3

Burundi

19 mars 1998

Costa Rica

10 décembre 1998

Maroc

20 juillet 1998

2 septembre 1998

CAT/C/43/Add.2

Maurice

7 janvier 1998

8 juin 1998

CAT/C/43/Add.1

Slovaquie

27 mai 1998

Slovénie

14 août 1998

8 octobre 2001

CAT/C/43/Add.4

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 1999 (7)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Albanie

9 juin 1999

États-Unis d’Amérique

19 novembre 1999

Éthiopie

12 avril 1999

ex-République yougoslave de Macédoine

11 décembre 1999

Géorgie

24 novembre 1999

15 novembre 1999

CAT/C/48/Add.1

Namibie

27 décembre 1999

Sri Lanka

1 er février 1999

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 2000 (6)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Cuba

15 juin 2000

Ouzbékistan

27 octobre 2000

5 décembre 2000

CAT/C/53/Add.1

République de Corée

7 février 2000

République de Moldova

27 décembre 2000

Tadjikistan

9 février 2000

Tchad

8 juillet 2000

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 2001 (8)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Azerbaïdjan

14 septembre 2001

2 novembre 2001

CAT/C/59/Add.1

Côte d’Ivoire

16 janvier 2001

El Salvador

16 juillet 2001

Islande

21 novembre 2001

27 novembre 2001

CAT/C/59/Add.2

Koweït

6 avril 2001

Lituanie

1 er mars 2001

Malawi

10 juillet 2001

République démocratique du Congo

16 avril 2001

Deuxièmes rapports périodiques attendus en 2002 (4)

État partie

Deuxième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Arabie saoudite

21 octobre 2002

Honduras

3 janvier 2002

Kenya

22 mars 2002

Kirghizistan

4 septembre 2002

C. Troisièmes rapports périodiques

Troisièmes rapports périodiques attendus en 1996 (26)

État partie

Troisième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Afghanistan

25 juin 1996

Argentine

25 juin 1996

26 septembre 1996

CAT/C/34/Add.5

Autriche

27 août 1996

Bélarus

25 juin 1996

29 septembre 1999

CAT/C/34/Add.12

Belize

25 juin 1996

Bulgarie

25 juin 1996

Cameroun

25 juin 1996

Canada

23 juillet 1996

19 octobre 1999

CAT/C/34/Add.13

Danemark

25 juin 1996

5 juillet 1996

CAT/C/34/Add.3

Égypte

25 juin 1996

30 octobre 1998

CAT/C/34/Add.11

Espagne

19 novembre 1996

18 novembre 1996

CAT/C/34/Add.7

Fédération de Russie

25 juin 1996

5 décembre 2000

CAT/C/34/Add.15

France

25 juin 1996

Hongrie

25 juin 1996

21 avril 1998

CAT/C/34/Add.10

Luxembourg

28 octobre 1996

30 octobre 2000

CAT/C/34/Add.14

Mexique

25 juin 1996

25 juin 1996

CAT/C/34/Add.2

Norvège

25 juin 1996

6 février 1997

CAT/C/34/Add.8

Ouganda

25 juin 1996

Panama

22 septembre 1996

19 mai 1997

CAT/C/34/Add.9

Philippines

25 juin 1996

Sénégal

25 juin 1996

Suède

25 juin 1996

23 août 1996

CAT/C/34/Add.4

Suisse

25 juin 1996

7 novembre 1996

CAT/C/34/Add.6

Togo

17 décembre 1996

Ukraine

25 juin 1996

19 juin 1996

CAT/C/34/Add.1

Uruguay

25 juin 1996

Troisièmes rapports périodiques attendus en 1997 (9)

État partie

Troisième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Chili

29 octobre 1997

18 février 2002

CAT/C/39/Add.4

Chine

2 novembre 1997

5 mai 1999

CAT/C/39/Add.2

Colombie

6 janvier 1997

17 janvier 2002

CAT/C/39/Add.4

Équateur

28 avril 1997

Grèce

4 novembre 1997

29 novembre 1999

CAT/C/39/Add.3

Guyana

17 juin 1997

Pérou

5 août 1997

12 décembre 1998

CAT/C/39/Add.1

Tunisie

22 octobre 1997

Turquie

31 août 1997

Troisièmes rapports périodiques attendus en 1998 (11)

État partie

Troisième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Algérie

11 octobre 1998

Australie

6 septembre 1998

Brésil

27 octobre 1998

Finlande

28 septembre 1998

16 novembre 1998

CAT/C/44/Add.6

Guinée

8 novembre 1998

Italie

10 février 1998

22 juillet 1998

CAT/C/44/Add.2

Jamahiriya arabe libyenne

14 juin 1998

2 septembre 1998

CAT/C/44/Add.3

Pays-Bas

19 janvier 1998

3 septembre 1998 et 27 décembre 1999

CAT/C/44/Add.4 et 8

Pologne

24 août 1998

11 novembre 1998

CAT/C/44/Add.5

Portugal

10 mars 1998

2 février 1999

CAT/C/44/Add.7

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

6 janvier 1998

2 avril 1998

CAT/C/44/Add.1

Troisièmes rapports périodiques attendus en 1999 (7)

État partie

Troisième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Allemagne

30 octobre 1999

Guatemala

3 février 1999

18 janvier 2000

CAT/C/49/Add.2

Liechtenstein

1 er décembre 1999

Malte

12 octobre 1999

Nouvelle-Zélande

8 janvier 1999

10 janvier 2002

CAT/C/49/Add.3

Paraguay

10 avril 1999

14 juin 1999

CAT/C/49/Add.1

Somalie

22 février 1999

Troisièmes rapports périodiques attendus en 2000 (10)

État partie

Troisième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Chypre

16 août 2000

29 juin 2001

CAT/C/54/Add.2

Croatie

7 octobre 2000

3 décembre 2001

CAT/C/54/Add.3

Estonie

19 novembre 2000

Israël

1 er novembre 2000

15 mars 2001

CAT/C/54/Add.1

Jordanie

12 décembre 2000

Népal

12 juin 2000

Roumanie

16 janvier 2000

Venezuela

27 août 2000

Yémen

4 décembre 2000

Yougoslavie

9 octobre 2000

Troisièmes rapports périodiques attendus en 2001 (8)

État partie

Troisième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Bénin

10 avril 2001

Bosnie-Herzégovine

5 mars 2001

Cambodge

13 novembre 2001

Cap-Vert

3 juillet 2001

Lettonie

13 mai 2001

Monaco

4 janvier 2001

République tchèque

31 décembre 2001

5 mars 2002

CAT/C/60/Add.1

Seychelles

3 juin 2001

Troisièmes rapports périodiques attendus en 2002 (8)

État partie

Troisième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Antigua et Barbuda

17 août 2002

Arménie

12 octobre 2002

Burundi

19 mars 2002

Costa Rica

10 décembre 2002

Maroc

20 juillet 2002

Maurice

7 janvier 2002

Slovaquie

27 mai 2002

Slovénie

14 août 2002

D. Quatrièmes rapports périodiques

Quatrièmes rapports périodiques attendus en 2000 (26)

État partie

Quatrième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Afghanistan

25 juin 2000

Argentine

25 juin 2000

Autriche

27 août 2000

Bélarus

25 juin 2000

Belize

25 juin 2000

Bulgarie

25 juin 2000

Cameroun

25 juin 2000

Canada

23 juillet 2000

Danemark

25 juin 2000

4 août 2000

CAT/C/55/Add.2

Égypte

25 juin 2000

19 février 2001

CAT/C/55/Add.6

Espagne

19 novembre 2000

8 janvier 2001

CAT/C/55/Add.5

Fédération de Russie

25 juin 2000

France

25 juin 2000

Hongrie

25 juin 2000

Luxembourg

28 octobre 2000

Mexique

25 juin 2000

Norvège

25 juin 2000

15 septembre 2000

CAT/C/55/Add.4

Ouganda

25 juin 2000

Panama

22 septembre 2000

Philippines

25 juin 2000

Sénégal

25 juin 2000

Suède

25 juin 2000

21 août 2000

CAT/C/55/Add.3

Suisse

25 juin 2000

Togo

17 décembre 2000

Ukraine

25 juin 2000

31 juillet 2000

CAT/C/55/Add.1

Uruguay

25 juin 2000

Quatrièmes rapports périodiques attendus en 2001 (9)

État partie

Quatrième rapport p é riodique attendu le

Date de présentation

Cote

Chili

29 octobre 2001

Chine

2 novembre 2001

Colombie

6 janvier 2001

Équateur

28 avril 2001

Grèce

4 novembre 2001

21 janvier 2002

CAT/C/61/Add.1

Guyana

17 juin 2001

Pérou

5 août 2001

Tunisie

22 octobre 2001

Turquie

31 août 2001

Quatrièmes rapports périodiques attendus en 2002 (11)

État partie

Quatrième rapport périodique attendu le

Date de présentation

Cote

Algérie

11 octobre 2002

Australie

6 septembre 2002

Brésil

27 octobre 2002

Finlande

28 septembre 2002

Guinée

8 novembre 2002

Italie

10 février 2002

Jamahiriya arabe libyenne

14 juin 2002

Pays-Bas

19 janvier 2002

Pologne

24 août 2002

Portugal

10 mars 2002

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

6 janvier 2002

Annexe VI

RAPPORTEURS ET CORAPPORTEURS POUR CHACUN DES RAPPORTSDES ÉTATS PARTIES EXAMINÉS PAR LE COMITÉ À SESVINGT-SEPTIÈME ET VINGT-HUITIÈME SESSIONS

A.   Vingt ‑septième session

Rapport

Rapporteur

Corapporteur

Ukraine: quatrième rapport périodique (CAT/C/55/Add.1)

M. El Masry

M. Rasmussen

Bénin: rapport initial (CAT/C/21/Add.3)

M. Camara

M. González Poblete

Indonésie: rapport initial (CAT/C/47/Add.3)

M me Gaer

M. Yu Mengjia

Zambie: rapport initial (CAT/C/47/Add.2)

M. Mavrommatis

M. Rasmussen

Israël: troisième rapport périodique (CAT/C/54/Add.1)

M. Burns

M. Yakovlev

B. Vingt ‑huitième session

Rapport

Rapporteur

Corapporteur

Arabie saoudite: rapport initial (CAT/C/42/Add.2)

M. Burns

M. Yakovlev

Danemark: quatrième rapport périodique (CAT/C/55/Add.2)

M. El Masry

M. Camara

Suède: quatrième rapport périodique (CAT/C/55/Add.3)

M. Camara

M. Yu Mengjia

Norvège: quatrième rapport périodique (CAT/C/55/Add.4)

M. Yu Mengjia

M. El Masry

Luxembourg: troisième rapport périodique (CAT/C/34/Add.14)

M. Mavrommatis

M. Camara

Ouzbékistan: deuxième rapport périodique (CAT/C/53/Add.1)

M. Yakovlev

M me Gaer

Fédération de Russie: troisième rapport périodique (CAT/C/34/Add.15)

M me Gaer

M. Rasmussen

Annexe VII

DÉCISIONS DU COMITÉ CONTRE LA TORTURE AU TITRE DE L’ARTICLE 22 DE LA CONVENTION

A. Décisions sur le fond

1. Requête n° 111/1998

Requérant : M. R. S. (nom supprimé) [représenté par M. Richard Soyer, conseil, Vienne (Autriche)]

État partie : Autriche

Date de la requête : 16 avril 1997 (date de la lettre initiale)

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 30 avril 2002,

Ayant achevé l’examen de la requête n° 111/1998, présentée au Comité contre la torture en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégr a dants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant est M. R. S., de nationalité autrichienne, qui était emprisonné à Vienne (Autriche) pour cambriolage, proxénétisme et trafic de drogue au moment où il a envoyé sa première lettre au Comité. Il affirme être victime de violations par l’Autriche de l’article 13 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est représenté par un conseil.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a porté la requête à l’attention de l’État partie le 11 janvier 1999.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le 30 juillet 1996, le requérant a été interrogé par des agents de police au commi s sariat d’arrondissement de Leopoldstadt, qui relève de la Direction de la police fédérale de Vienne. Trois agents sont entrés dans la pièce où il était interrogé par une équipe d’enquêteurs et l’ont emmené dans le bureau de l’un d’entre eux. Les membres de l’équipe d’enquêteurs ont protesté contre le transfert du requérant parce qu’ils n’avaient pas term i né leur interrogatoire. Peu après avoir été emmené dans l’autre bureau, le requérant a été retrouvé à l’extérieur de la pièce, blessé et saignant à trois endroits à la jambe droite. Il a été alors examiné par un médecin de la police, qui a pris des photographies des blessures. Le 1 er  août1996, son méd e cin personnel l’a fait hospitaliser pour de nouveaux examens, effectués le lendemain. Le requérant a quitté l’établissement immédiatement après. Le rapport de l’hôpital, présenté par le requérant, fait état de blessures à la jambe droite et d’une légère tuméfaction du nez.

2.2 Le 9 août 1996, la Direction de la police fédérale de Vienne a adressé au parquet un rapport sur les faits et sur les allégations du requérant selon lesquelles il avait été victime de mauvais traitements. Le 20 août 1996, le procureur a engagé des poursuites judiciaires contre les trois policiers, qui ont été inculpés pour avoir maltraité le détenu et tenté de lui extorquer des aveux sous la contrainte.

2.3 La première audience s’est déroulée le 7 octobre 1996. Le 6 novembre 1996, l’avocat du requérant a proposé au tribunal et au procureur qu’un magistrat instructeur soit désigné, conformément à un décret du Ministère fédéral de la justice, pour compléter l’enquête préliminaire de la Direction de la police fédérale. Cette proposition a été rejetée par le tribunal et le procureur. Les trois policiers ont été acquittés le 25 novembre 1996. L’appel introduit par le procureur a été retiré le 10 mars 1997. La décision du tribunal serait donc définitive.

Teneur de la requête

3.1 Le requérant déclare que le 30 juillet 1996, trois agents de police l’ont maltraité alors qu’ils l’interrogeaient au commissariat d’arrondissement de Leopoldstadt qui relève de la Direction de la police fédérale de Vienne. Un agent de police l’aurait fait tomber par terre, puis lui aurait donné des coups de pied. Il lui aurait aussi administré intentionnellement des coups de pied au tibia droit qui était déjà blessé , ro u vrant ainsi la lésion qui a commencé à saigner. Lorsque le requérant s’est relevé, un autre agent l’aurait g i flé. On l’aurait alors sommé de parler. Le requérant déclare qu’un quatrième agent de police était présent dans le bureau, mais qu’il n’a pas participé aux sévices.

3.2 Le requérant affirme qu’à la première audience, qui s’est déroulée le 7 octobre 1996 au tribunal pénal régional de Vienne, il est apparu que l’enquête préliminaire de la police était entachée de graves lac u nes. En particulier, on ne s’est pas attaché lors de ces investigations à découvrir l’identité de la quatrième personne qui était présente dans le bureau où s’est déroulé l’interrogatoire lorsque les mauvais traitements ont été infligés. Or le témoignage de cette personne était essentiel pour la manifestation de la vérité.

3.3 Le requérant déclare que l’enquête préliminaire n’a pas été impartiale puisqu’elle a été effectuée par la police, ce qui constitue une violation de l’article 13 de la Convention. Si des investigations imparti a les avaient été menées, il aurait été possible de découvrir l’identité du «quatrième homme».

3.4 Le requérant affirme en outre qu’il n’existe en droit autrichien aucune base jurid i que autorisant à effectuer une enquête préliminaire de police telle que celle qui a été m e née en l’espèce, quoique de telles enquêtes soient fréquentes en Autriche. Il n’a été proc é dé ni à l’ouverture d’une information ni à une e n quête préliminaire légale, toutes deux prévues dans le Code de procédure pénale.

3.5 Enfin, le requérant affirme que le seul recours interne dont il dispose encore est une action civile ( Amtshaftungsklage ). Selon lui, cependant, engager une telle action ne serait d’aucune utilité. En effet, faute d’une enquête criminelle en bonne et due forme, cette action ne saurait aboutir.

Observations de l’État partie concernant la recevabilité

4.1 Dans une réponse datée du 20 mai 1999, l’État partie affirme que l’affaire devrait être déclarée irr e cevable. Il déclare que l’interrogatoire du requérant par la première équipe d’enquêteurs a été interrompu lorsque l’agent habilité à s’occuper de l’affaire au commissariat l’a amené dans son bureau pour le faire examiner par le médecin de la Direction de la police fédérale de Vienne, qui devait déterminer si la santé de M. R. S. et son état mental étaient altérés par la consommation de stupéfiants.

4.2 Après avoir été examiné par le médecin, le requérant a dit à un autre membre du commissariat (le colonel P.) qu’il avait été maltraité par l’agent qui l’avait interrogé, le médecin et un autre agent de police. Le colonel P. a immédiatement informé le commissaire des allégations du requérant. Ce dernier a téléphoné sur ‑le ‑champ au préfet de la police fédérale de Vienne et au directeur du Bureau des enquêtes criminelles ( Sicherheitsbüro ), leur demandant de prendre des mesures. Le Bureau des enquêtes criminelles a immédi a tement ouvert une enquête. Le jour même, il s’était écoulé à peine une heure et demie après que le requérant eut porté ces allégations quand il a été transféré au Bureau des enquêtes criminelles, et longuement interr o gé.

4.3 Les policiers accusés et le colonel P. ont été longuement interrogés les 31 juillet et 1 er  août 1996. Cinq autres policiers ont été eux aussi longuement interrogés par des agents du Bureau des enquêtes crim i nelles les 2, 5 et 6 août 1996. Le Bureau a également essayé, sans succès, de déterminer si une quatrième personne avait assisté aux mauvais traitements allégués.

4.4 Le Bureau des enquêtes criminelles a présenté ses constatations au parquet de Vienne le 9 août 1996, l’informant des résultats de ses investigations. Le procureur a inculpé les agents de police incriminés devant le tribunal pénal régional de Vienne le 20 août 1996, pour avoir causé des souffrances et tenté d’extorquer des aveux à un détenu sous la contrainte. Le dossier est parvenu au tribunal pénal régional de Vienne le 28 août 1996.

4.5 Le Bureau des enquêtes criminelles a continué son enquête et constaté qu’un qu a trième homme (G. W.) s’était rendu dans le bureau où le requérant subissait un interrog a toire. Il s’agissait d’un fonctionnaire de l’administration municipale de Vienne qui a décl a ré dans sa déposition qu’il était resté dans le b u reau une ou deux minutes au plus et qu’il n’avait rien remarqué à ce moment ‑là qui puisse laisser penser que le requérant était maltraité. Cette information a été communiquée au parquet le 26 août 1996.

4.6 Le 7 octobre 1996, le procès des trois policiers s’est ouvert au tribunal pénal régional de Vienne. Le requérant et les policiers inculpés ont été interrogés longuement par le tribunal en présence du procureur, de l’avocat de la défense et du représentant du requérant. Un certain nombre de témoins ont également été i n terrogés, notamment G. W. qui a répété être resté peu de temps dans le bureau où le requérant affirmait avoir été maltraité et n’avoir constaté aucun mauvais traitement.

4.7 Étant donné que le requérant affirmait que G. W. n’était pas le quatrième homme, le Bureau des enquêtes criminelles a poursuivi son enquête parallèlement au procès. À cet égard, prié, le 30 août 1996, d’aider les agents du Bureau dans leurs efforts, le requérant a répondu qu’il ne se présenterait à aucune convocation et n’a fait aucune déclaration lorsqu’une photographie de G. W. lui a été présentée.

4.8 Les trois agents inculpés ont été acquittés pour insuffisance de preuves le 25 novembre 1996. Le tribunal s’est appuyé en particulier sur l’opinion du médecin légiste selon lequel les mauvais traitements que le requérant affirmait avoir subis auraient entraîné d’autres conséquences que n’aurait pas manqué de remarquer le médecin qui l’avait examiné immédiatement après l’incident. Cet expert a également estimé qu’il était possible que le requérant se soit infligé lui ‑même les blessures en question. Un appel annoncé par le parquet a été retiré le 6 mars 1997 et le jugement est donc devenu définitif. La procédure disciplinaire engagée contre l’un des trois policiers a été ensuite abandonnée tandis qu’un autre a été acquitté. Le troisième agent, lui, n’a fait l’objet d’aucune procédure disciplinaire.

4.9 L’État partie affirme que le droit conféré au requérant par l’article 13 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants de voir sa cause immédiatement et impartialement examinée par les autorités compétentes a été pleinement assuré. C’est le jour même où le requérant a déposé sa plainte que le préfet de police de Vienne en a été informé et que le Bureau des enqu ê tes criminelles a commencé ses investigations. L’État partie fait observer à cet égard que le Bureau des e n quêtes criminelles et les commissariats de police d’arrondissement appartiennent à des départements de p o lice différents, indépendants les uns des autres.

4.10 Le fait que l’enquête ait été menée par le Bureau des enquêtes criminelles, qui n’a à connaître que des crimes les plus graves, montre que l’affaire a été traitée avec diligence par les autorités compétentes. Le délai qui s’est écoulé entre le début des investigations et la communication des informations au parquet a été le plus court possible et les enquêtes menées après cela ont été approfondies. De même, une enquête approfondie a été menée après que le requérant eut déclaré qu’une quatrième personne avait assisté aux mauvais traitements qu’il prétend avoir subis. Selon l’État partie, cela montre que les autorités qui ont mené l’enquête n’avaient aucun parti pris et ont conduit les investigations en toute i m partialité.

4.11 Si les examens préliminaires avaient été effectués par un tribunal ou si le dossier avait été renvoyé au magistrat instructeur, cela n’aurait rien changé au résultat des investigations. Les témoins et les inculpés interrogés par les policiers au cours des investigations préliminaires ont été de nouveau longuement interr o gés par le juge au cours du procès. Ainsi, tout vice éventuel de l’enquête préliminaire aurait pu alors être corrigé. Il aurait été contraire au but recherché d’accéder à la demande faite le 6 novembre 1996 par le r e présentant du requérant de renvoyer le dossier au juge d’instruction, car cela n’aurait produit aucun résultat nouveau et aurait provoqué un retard considérable dans le déroulement de la procédure pénale.

4.12 L’État partie affirme enfin que les conditions préalables prévues par la Convention n’ont pas été remplies en l’espèce et estime que le Comité devrait déclarer la communication irrecevable.

Commentaires du requérant

5. Dans une lettre datée du 28 juillet 1999, le requérant a déclaré qu’il avait présenté toutes les info r mations pertinentes.

Décision concernant la recevabilité

6. À sa vingt ‑troisième session, le Comité a examiné la recevabilité de la communication en vertu de l’article 22 de la Convention. Dans le cas présent, il a noté que la communication n’était pas anonyme et que la même affaire n’avait pas été examinée et n’était pas en cours d’examen au titre d’une autre procédure d’enquête ou de règlement international. Il a aussi pris acte de la déclaration de l’auteur selon laquelle tous les recours internes avaient été épuisés. L’État partie n’a pas contesté cette déclaration. En outre, le Comité a estimé que la communication ne constituait pas un abus du droit de présentation de telles communications et n’était pas incompatible avec les dispositions de la Convention et que les observations présentées par l’État partie portaient sur le fond de la communication plutôt que sur la question de la recevabilité. Il a donc estimé que rien ne s’opposait à ce que la communication soit jugée recevable. En conséquence, il a déclaré la communication recevable le 18 novembre 1999.

Observations de l’État partie concernant le fond

7.1 Dans sa lettre du 9 juin 2000, l’État partie renvoie aux faits qu’il avait présentés précédemment.

7.2 En réponse à une demande du Comité, l’État partie donne des informations sur les procédures pr é vues dans son droit interne en ce qui concerne les plaintes pour torture. S e lon l’État partie, il existe des r e cours qui permettent tous de garantir l’examen immédiat et impartial des allégations de torture, conform é ment aux dispositions de l’article 13 de la Convention.

Commentaires du requérant concernant le fond

8.1 Dans sa lettre du 8 janvier 2002, le requérant apporte des informations supplémentaires tout en maintenant ses allégations précédentes.

8.2 Bien que l’État partie soutienne que ses allégations de torture ont fait l’objet d’une enquête appr o priée, en réalité, le Bureau des enquêtes criminelles n’aurait pas fait le nécessaire pour identifier la qu a trième personne présente lors des faits. La seule démarche mentionnée par l’État partie consiste dans la convocation du requérant devant le Bureau des enquêtes criminelles pour identifier une photographie, le 30 août 1996. Le requérant explique qu’il a refusé de coopérer parce qu’à ce moment ‑là, il doutait de l’indépendance de l’enquête, qui était menée exclusivement par la police, sans participation des autorités judiciaires.

8.3 Le requérant affirme également que le parquet ne constitue pas un organe impartial et indépendant lorsqu’il s’agit d’enquêter sur des allégations portées contre des membres des organes de sécurité, dans la mesure où il est subordonné au Ministre de la justice. Le requérant fait valoir que seul un magistrat instru c teur, dont l’indépendance est garantie par l’article 87 de la Constitution fédérale autrichienne, pourrait pr o céder à une enquête répondant à ces critères. Dans le cas présent, le tribunal pénal régional a refusé de dés i gner un magistrat instructeur.

Examen quant au fond

9.1 Le Comité a examiné la requête en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été soumises par les parties, conformément au paragraphe 4 de l’article 22 de la Convention.

9.2 Le Comité note que le requérant fait valoir que l’État partie a violé l’article 13 de la Convention parce que le tribunal pénal régional n’a pas ouvert d’instruction sur sa plainte pour tortures. Il avance que seule une enquête judiciaire pouvait être considérée comme impartiale. À ce sujet, le Comité relève qu’il ressort de la décision prise le 25 novembre 1996 par le tribunal pénal régional que celui ‑ci, lorsqu’il a déc i dé d’acquitter les trois policiers, a tenu compte de tous les éléments de preuve présentés par le requérant et le procureur. Le Comité estime donc que le requérant n’a pas fourni d’éléments suffisants à l’appui de l’allégation selon laquelle l’enquête menée par l’État partie n’avait pas été impartiale au sens de l’article 13 de la Convention.

10. Le Comité contre la torture conclut que l’État partie n’a pas violé la règle établie à l’article 13 de la Convention et estime, à la lumière des informations qui lui ont été soumises, ne pouvoir faire aucune con s tatation de violation d’aucune autre disposition de la Convention.

2. Requête n° 138/1999

Requérant : M. M. P. S. (nom supprimé)

Représenté par : M me Chanrani Buddhipala, conseil, Epping (Australie)

État partie : Australie

Date de la requête : 4 juin 1999 (date de la lettre initiale)

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 30 avril 2002,

Ayant achevé l’examen de la requête n° 138/1999, présentée au Comité contre la torture en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégr a dants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant est M. M. P. S., ressortissant sri ‑lankais de souche tamoule, qui, au moment de la pr é sentation de la requête, était détenu au Centre de détention de Villawood à Sydney (Australie). Il affirme que son renvoi à Sri Lanka a constitué une violation de l’article 3 de la Convention contre la torture et a u tres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est représenté par un conseil.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a transmis la requête à l’État partie le 21 juin 1999 à 14 h 35, heure de Genève. Sous couvert de la même lettre, agissant en vertu du paragraphe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur, le Comité a demandé à l’État partie de ne pas expulser le requérant vers Sri Lanka tant que sa requête serait à l’examen. Le Comité note l’information communiquée par l’État partie selon laquelle le requérant a été expulsé d’Australie le 21 juin 1999. La note verbale du Secrétaire général aurait été reçue par la Mission permanente d’Australie alors que le requérant avait déjà été expulsé vers Sri Lanka.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le 9 septembre 1997, le requérant est arrivé en Australie sans passeport ni aucun autre papier d’identité. Le 15 septembre 1997, il a demandé le statut de réfugié (visa de protection) au Ministère de l’immigration et des affaires multiculturelles. Sa demande a été rejetée le 25 septembre 1997. La décision de ne pas lui délivrer de visa de protection a été confirmée par la Commission de contrôle des décisions concernant les réfugiés (Ref u gee Review Tribunal) le 30 octobre 1997, à l’issue d’une audience durant laquelle le r e quérant a été assisté par un conseiller juridique et un interprète. En application d’une déc i sion du Tribunal fédéral, datée du 13 mai 1998, la question a été renvoyée à la Commi s sion de contrôle pour un nouvel examen. Le 20 août 1998, après avoir entendu le requ é rant, la Commission a décidé de nouveau de ne pas accorder de visa de protection. Le 3 février 1999, le Tribunal fédéral a rejeté le recours du requérant contre la deuxième déc i sion de la Commission de contrôle. Un recours déposé devant le Tribunal fédéral plénier a été rejeté le 14 mai 1999. Le 3 novembre 1997, le 20 août 1998 et le 18 juin 1999, il a été jugé que le cas de l’auteur ne satisfaisait pas aux conditions devant être remplies pour l’obtention d’un visa qui lui permettrait de rester en Australie pour des raisons humanita i res. Le conseil affirme que tous les recours i n ternes utiles ont été épuisés.

2.2 Le conseil indique que le requérant vivait dans la région de Nuwara Eliya, dans le sud de Sri Lanka. En 1989, lorsque des affrontements ont éclaté entre le mouvement procinghalais Janatha Virmurthi Peram u na (JVP) et le Gouvernement dans la région de Nuwara Eliya, le requérant a été arrêté et détenu six mois dans le camp militaire de Diyatalawa parce qu’il était soupçonné d’appartenir au JVP. Durant cette période, il aurait été interrogé et torturé par des officiers. Le père du requérant a payé une forte somme pour obtenir sa libération.

2.3 De 1992 à 1995, des membres des Tigres de libération de l’Eelam Tamoul (LTTE) qui étaient des amis de la famille de sa femme, sont fréquemment venus chez le requérant qui a été obligé de leur assurer le gîte et le couvert. Lors de la dernière visite, qui a eu lieu en octobre 1995, plusieurs membres des LTTE sont restés chez lui 15 jours. Au cours de cette période, il y a eu un attentat à la bombe contre les réservoirs d’essence de Kolonawa (Colombo), et la police a estimé que des personnes qui avaient séjourné dans la f a mille du requérant y étaient impliquées. Le requérant aurait été emmené au poste de police de Nuwara Eliya où il aurait été interrogé et torturé. Il est affirmé que le requérant n’a été libéré après trois jours de détention que parce qu’une forte somme avait été versée au responsable de la police.

2.4 En février 1996, les LTTE ont accusé le requérant d’avoir fourni aux autorités des renseignements sur l’attentat mené contre les réservoirs d’essence. Le conseil affirme que le requérant a été battu et menacé de mort. Après l’intervention de sa famille et de sa femme, il a été épargné.

2.5 Vers la fin de février 1996, le requérant a été arrêté par la police et conduit au camp militaire de Diyatalawa; il y a été détenu trois jours et y aurait subi des tortures. Le conseil affirme que le père du requ é rant a dû payer une forte somme d’argent pour obtenir sa libération. Immédiatement après sa remise en l i berté, le requérant a quitté Nuwara Eliya par peur des autorités sri ‑lankaises et des LTTE. Il est resté chez des amis à Kandy et a ensuite passé quelques mois à Hatton avant de se rendre à Colombo.

2.6 Plus tard en 1996, les services de police de Maradana ont arrêté le requérant à C o lombo, l’ont dét e nu une semaine et l’ont interrogé sur ses rapports avec les LTTE. Il est affirmé que le requérant a été battu chaque nuit par des agents de police et qu’il n’a pas été convenablement nourri. En mars 1997, le requérant est parvenu à s’enfuir de Sri Lanka, se rendant au Cambodge puis à Bangkok et à Sydney.

2.7 Le conseil affirme que le requérant ayant été arrêté à deux reprises à la suite de l’attentat à la bombe de Kolonawa, il y avait de fortes chances qu’il soit arrêté de nouveau à son retour à Sri Lanka. Il pense que les documents que la police a pris au requérant ont été remis à la police secrète (NIB) et que les autorités seront par conséquent en mesure de le retrouver partout. Le conseil fait valoir que le requérant a été arrêté et que les forces de sécurité l’avaient à l’œil parce qu’il avait hébergé des membres des LTTE qui seraient impliqués dans ce qui est considéré comme un des assassinats les plus graves commis par les LTTE. Le requérant serait fort probablement arrêté et interrogé à l’aéroport dès son retour à Colombo.

2.8 Le conseil affirme en outre qu’il y a de sérieuses raisons de croire que l’auteur risquerait d’être soumis à la torture par la police sri ‑lankaise, les forces de sécurité et les LTTE s’il retournait à Sri Lanka. Il a été torturé et maltraité par les autorités et les LTTE avant qu’il ne quitte le pays. Le conseil cite un rapport de Human Rights Watch et des rapports du Département d’État des États ‑Unis datant de 1996 qui attestent l’existence à Sri Lanka d’un ensemble de violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme. Il fait observer qu’en vertu de la loi d’exception et de la loi sur la prévention du terrorisme, la police peut pr o céder à des arrestations sur de simples soupçons souvent fondés sur une présomption de culpabilité due au fait que la personne concernée vient du nord ou de l’est du pays. Dans ces circonstances, le conseil pense que le requérant en tant que jeune de langue tamoule originaire de la province orientale de Sri Lanka a toutes les chances d’être harcelé et maltraité par les autorités sur de simples soupçons. Le conseil se réfère à cet égard à des titres et des articles de journaux sri ‑lankais.

Teneur de la requête

3.1 Le conseil affirme qu’en Australie l’évaluation des éléments de preuve dans les procédures d’asile laisse à désirer. Il note que les services de l’immigration australiens s’attendent à ce que le requérant leur communique tous les faits relatifs à sa requête dès son arrivée. Il estime que cela n’est pas justifié dès lors que les demandeurs d’asile se conduisent au départ d’une manière irrationnelle et inappropriée, ne font pas confiance aux autorités et ne sont prêts à relater fidèlement et d’une manière intégrale les faits qu’après avoir séjourné dans le pays un certain temps. En conséquence, le point de vue du Gouvernement australien selon lequel tous les faits invoqués ultérieurement ne sont pas fiables est jugé absurde par le conseil car, dans des cas comme ceux du requérant, de nouvelles déclarations doivent être acceptées par la Commission de contrôle des décisions concernant les réfugiés même si le récit initial était incohérent et contradictoire.

3.2 Le conseil affirme que l’expulsion du requérant vers Sri Lanka a constitué une vi o lation de l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégr a dants. Il fait valoir qu’il y avait de sérieuses raisons de croire que le requérant risquerait d’être soumis à la torture s’il était expulsé. Compte tenu de l’interdiction absolue d’expulser une personne qui risque d’être soumise à la torture, le conseil conclut que le requérant n’aurait pas dû être renvoyé à Sri Lanka.

3.3 Le conseil affirme que l’existence avérée à Sri Lanka d’un ensemble de violations graves et mass i ves des droits de l’homme fait obligation au Gouvernement australien de s’abstenir d’expulser le requérant.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond de la requête

4.1 L’État partie fait observer qu’il a jusqu’à présent honoré les demandes de mesures conservatoires présentées par le Comité chaque fois qu’il a été en mesure de le faire. En l’espèce, le requérant a été expulsé d’Australie le 21 juin 1999 à 4 h 30, heure de Genève. Le texte de la requête et de la demande du Comité a été reçu après l’expulsion, c’est ‑à ‑dire par le courrier ordinaire reçu de la Mission permanente d’Australie à Genève le 21 juin 1999 en fin de matinée et, ensuite, au moyen d’une télécopie émanant de la Mission, pa r venue le même jour à 14 h 36, heure de Genève.

4.2 L’État partie conteste les affirmations selon lesquelles il y aurait eu des déficiences dans la procédure de traitement des éléments de preuve lors de l’examen du cas du requérant. Il fait valoir que le requérant n’a pas apporté la preuve que les irrégularités qui auraient entaché la procédure constituent une violation de l’une quelconque des dispositions de la Convention et son allégation devrait être par cons é quent rejetée car elle est irrecevable ratione materiae . D’autre part, l’État partie affirme que, sauf dans ce r taines circonstances bien déterminées, il n’appartient pas au Comité d’examiner les constatations de faits des organes nationaux de l’État partie ou leur interprétation de la législation interne. En outre, l’État partie fait valoir que tout problème dû à d’éventuelles erreurs d’interprétation du droit dans la première décision de la Commission de contrôle aurait été rectifié ultérieurement. Le requérant n’a pas mentionné à cet égard la deuxième et la troisième décision du Tribunal fédéral.

4.3 L’État partie s’élève contre l’affirmation selon laquelle il y a de sérieux motifs de croire que le r e quérant risque d’être soumis à la torture s’il est renvoyé à Sri Lanka. Il fait valoir que le risque d’être so u mis à de mauvais traitements par les LTTE invoqué par le requérant ne soulève aucune question devant être examinée par le Comité puisque le requérant n’a apporté aucune preuve attestant que les LTTE agiraient avec le consentement exprès ou tacite des autorités sri ‑lankaises. En outre, le requérant n’a pas démontré que les LTTE exerçaient une autorité quasi gouvernementale sur une région vers laquelle il doit être expulsé et qu’ils pouvaient par conséquent être considérés comme un agent aux fins de l’article 3 de la Convention. Par ailleurs, l’État partie fait valoir que le requérant n’a pas prouvé qu’il risque d’être torturé par les LTTE. À cet égard, il demande que la requête soit considérée comme irrecevable ratione materiae . Pour ce qui est du risque d’être torturé par les autorités sri ‑lankaises, l’État partie affirme que les arguments présentés par l’auteur ne sont pas crédibles ou ne prouvent pas l’existence d’un risque réel, prévisible et personnel d’être soumis à la torture.

4.4 L’État partie demande que la requête soit déclarée irrecevable ratione materiae dès lors que le r e quérant se fonde sur une interprétation de l’article 3 de la Convention selon laquelle l’existence d’un e n semble de violations flagrantes systématiques des droits de l’homme dans l’État vers lequel se fait l’expulsion suffit à déclencher la protection inte r nationale prévue à l’article 3.

4.5 Enfin, l’État partie note que le droit de ne pas être torturé est protégé par la législation nationale à Sri Lanka. En outre, Sri Lanka a ratifié la Convention et est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Délibérations du Comité

5. Le Comité note que le Tribunal fédéral a rejeté le recours du requérant le 18 juin 1999, de sorte que celui ‑ci n’avait que trois jours pour se prévaloir des dispositions de l’article 22 de la Convention.

Considérations concernant la recevabilité

6.1 Avant d’examiner une plainte figurant dans une communication, le Comité contre la torture doit déterminer si cette communication est ou n’est pas recevable au regard de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire en vertu du paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée et n’est pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

6.2 Le Comité note l’affirmation de l’État partie selon laquelle la communication est irrecevable r a tione materiae (voir par. 4.2 et 4.3). Il est toutefois d’avis que les arguments de l’État partie soulèvent des questions de substance qui devraient être examinées quant au fond et non au stade de la recevabilité. Il considère par conséquent que les conditions fixées au paragraphe 5 b) de l’article 22 de la Convention sont réunies. Ne voyant pas d’autres obstacles à la recevabilité, le Comité déclare la communication recevable.

Examen quant au fond

7.1 Le Comité doit déterminer si le renvoi forcé de l’auteur à Sri Lanka a constitué une violation par l’Australie de l’obligation qui lui est faite à l’article 3 de la Convention de ne pas expulser ou renvoyer une personne vers un autre État où il y a de sérieux motifs de croire qu’elle risquerait d’être soumise à la torture.

7.2 Conformément au paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, le Comité doit d é terminer s’il existe des motifs sérieux de croire que le requérant risquerait d’être soumis à la torture s’il retournait à Sri Lanka. Pour ce faire, il doit, conformément au paragraphe 2 de l’article 3, tenir compte de toutes les considérations pertinentes, y compris de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, fl a grantes ou massives. Il s’agit toutefois de déterminer si l’intéressé risquerait personnell e ment d’être soumis à la torture dans le pays où il serait renvoyé. En conséquence, l’existence d’un ensemble de viol a tions flagrantes, graves ou massives des droits de l’homme dans un pays ne constitue pas en soi un motif suffisant pour conclure qu’un ind i vidu risquerait d’être victime de tortures à son retour dans son pays; il faut qu’il existe des motifs supplémentaires de penser que l’intéressé serait personnellement en danger. De la même manière, l’absence d’un ensemble systématique de violations flagrantes des droits de l’homme ne signifie pas qu’un individu ne peut pas être considéré comme risquant d’être soumis à la torture dans sa s i tuation particulière.

7.3 En l’espèce, le Comité note l’argument de l’État partie selon lequel il n’appartient pas au Comité d’examiner les constatations de fait des organes nationaux de l’État partie ou leur interprétation de la lég i slation interne. Tout en convenant qu’il ne peut infirmer l’interprétation faisant autorité que donne, de l’application de la législation interne, un organe national, le Comité réaffirme qu’il n’est pas tenu par les constatations de faits des organes de l’État partie et qu’il est, au contraire, habilité, en vertu du paragraphe 4 de l’article 22 de la Convention, à apprécier librement les faits en se fondant sur l’ensemble des circonsta n ces de chaque affaire a . Le Comité rappelle que même s’il subsiste des doutes quant à la véracité des faits présentés par le requérant, il doit veiller à ce que la sécurité de ce dernier ne soit pas mise en danger b . Pour ce faire, il n’est pas nécessaire que tous les faits invoqués par le requérant soient prouvés; il suffit que le Comité considère qu’ils ont été suffisamment étayés et qu’ils sont dignes de foi.

7.4 S’agissant de l’allégation du requérant selon laquelle il risque d’être torturé par les LTTE, le Com i té rappelle que l’obligation qu’a l’État partie de ne pas renvoyer contre son gré une personne dans un autre État, où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture, est directement liée à la définition de la torture figurant à l’article premier de la Convention. Aux fins de la Convention, en vertu de cet article, «le terme “torture” désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fon c tion publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite». Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle la question de savoir si l’État partie a l’obligation de ne pas expulser une personne qui risque de se voir infliger une douleur ou des souffrances par une entité non gouvernementale, sans le consentement exprès ou tacite du gouvernement, est en dehors du champ d’application de l’article 3 de la Convention c .

7.5 Le Comité note avec préoccupation les rapports selon lesquels la torture est prat i quée à Sri Lanka, y compris ceux présentés par le requérant, mais fait valoir qu’aux fins de l’article 3 de la Convention, il doit y avoir des motifs sérieux de croire qu’existe dans le pays vers lequel le requérant doit être renvoyé un risque prévisible, réel et personnel pour celui ‑ci d’être torturé. Au regard des faits présentés par le requérant, le Comité est d’avis que de tels motifs n’ont pas été établis. Il considère par conséquent que le requérant n’a pas prouvé son allégation selon laquelle il risquerait personnellement d’être soumis à la torture s’il était renvoyé à Sri Lanka.

8. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, estime que les faits dont il est saisi ne font pas apparaître de violation de l’article 3 de la Convention.

3. Requête n o  146/1999

Requérante : M me  E. T. B. (nom supprimé)

Représentée par : Une organisation non gouvernementale appelée Let Bosnia Live

État partie : Danemark

Date de la requête : 9 août 1999

Date de la présente décision : 30 avril 2002

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 30 avril 2002,

Ayant achevé l’examen de la requête n o  146/1999, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par la requérante, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

Décision

1.1 La requérante est E. T. B., citoyenne géorgienne, née le 19 mars 1974, agissant en son nom et au nom de ses deux enfants mineurs. Tous trois résident actuellement dans le Centre de la Croix ‑Rouge danoise pour les réfugiés, au Danemark, où la requérante demande l’asile pour sa famille. Elle affirme que son re n voi en Géorgie après rejet de sa demande du statut de réfugié constituerait une violation par le Danemark de l’article 3 de la Convention. Elle est représentée par l’organisation appelée Let Bosnia Live.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a transmis la requête n o  146/1999 à l’État partie le 11 octobre 1999 en lui demandant, conformément à l’article 108 de son règl e ment intérieur, de ne pas renvoyer la requérante en Géorgie tant que le Comité serait saisi de l’affaire. Le 10 décembre 1999, l’État partie a informé le Comité qu’il avait décidé d’accéder à sa demande de ne pas expulser la requérante et ses enfants tant qu’il n’aurait pas achevé l’examen de la requête.

Rappel des faits présentés par la requérante

2.1 La requérante est une veuve ayant deux enfants mineurs; tous trois sont citoyens géorgiens, de so u che mingrélienne. En Géorgie, la requérante et son défunt mari, M. B., travaillaient pour l’ancien Président de la Géorgie, M. Gamsakhourdia (Mingrélien lui au s si) et son parti politique, le Parti zviadiste, et pour la cause mingrélienne en Géorgie. Membre du Parti zviadiste depuis le milieu de l’année 1992 la requérante a commencé à soigner des zviadistes blessés lorsqu’elle est devenue infirmière, en 1993. Son mari et son père combattaient dans l’armée des partisans mingréliens.

2.2 Le 19 novembre 1993, la requérante a été arrêtée avec 30 autres femmes, dont sa mère, alors qu’elles participaient, à Zougditi, sa ville d’origine, à une manifestation illégale d’environ 1 500 personnes contre le gouvernement Chevardnadze. Toutes les femmes arrêtées ont été collectivement condamnées à la peine de mort. Elles étaient fréquemment battues par les gardiens de la prison, et cinq d’entre elles ont été exécutées. Les gardiens de prison ont violé deux de ses codétenues avant de les exécuter. L’un des gardes a infligé des sévices sexuels à la requérante, et il l’a violée. Elle s’attendait à être tuée ensuite comme ses c o détenues mais, peu après, le 31 décembre 1993, des partisans mingréliens ont attaqué la prison de Zougditi et libéré tous les prisonniers politiques. Le père de la requérante était parmi les partisans qui ont donné l’assaut. Après sa libération, la requérante s’est installée avec sa famille à Gegetjkori. Son mari qui, pendant ce temps, vivait dans un camp de partisans mingréliens dans la forêt voisine a été blessé et fait prisonnier le 18 août 1994 par l’armée géorgienne, puis exécuté.

2.3 Le 3 février 1996, la requérante, ses deux enfants et sa mère ont quitté la Géorgie illégalement, par bateau jusqu’en Pologne, puis cachés dans un camion jusqu’au Danemark, où ils sont arrivés le 12 février 1996. Ils se sont immédiatement présentés à la police et ont demandé l’asile. Un an plus tard, le père de la requérante est aussi arrivé au Danemark où il a demandé l’asile, après un long séjour à l’hôpital dans les montagnes du Caucase. Il ignorait que sa famille résidait déjà au Danemark.

2.4 Le Service de l’immigration danois a rejeté la demande d’asile le 22 mai 1998. Le 31 juillet 1998, le conseil de la requérante a fait appel de cette décision devant la Commission des réfugiés. L’appel a été rejeté le 4 août 1998, et la requérante a reçu l’ordre de quitter le Danemark le 19 août 1998. Deux demandes de réouverture de l’affaire, présentées le 17 août et le 29 octobre 1998/1 er  décembre 1998, ont été rejetées par la Commission des réfugiés les 23 septembre 1998 et 26 janvier 1999, respectivement.

2.5 Dans l’exposé des motifs de sa décision de rejet du 4 août 1998, la Commission des réfugiés a considéré que l’attaque de la prison du 31 décembre 1993, si elle avait vérit a blement eu lieu, aurait été me n tionnée dans les documents d’information dont on disposait sur la Géorgie, et que le père de la requérante l’aurait mentionnée dans sa propre demande d’asile, ce qu’il n’avait pas fait. Et même si elle faisait fond sur le récit de la requérante pour prendre sa décision, la Commission ne pensait pas que celle ‑ci serait perséc u tée si elle retournait en Géorgie. La Commission s’est référée à cet égard à des renseignements du Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés selon lesquels les partisans de Gamsakhourdia ne sont pas persécutés pour la seule raison qu’ils ont soutenu Gamsa k hourdia.

2.6 Dans la demande du 29 octobre 1998, le conseil de la requérante a demandé la réouverture du do s sier de demande d’asile, compte tenu de nouvelles informations qu’il avait reçues. Ces informations co m prenaient deux nouveaux documents, le certificat de décès du mari de la requérante et une déclaration s i gnée par 10 de ses voisins à Gegetjkori, confirmant que la requérante avait été menacée et persécutée par des inconnus qui avaient aussi tué son chien, le laissant sur le seuil de sa porte en guise d’avertissement. Le conseil a cité aussi des articles de presse faisant état de nouvelles hostilités entre les zviadistes et les forces gouvernementales. Il a aussi présenté les «Préoccupations d’Amnesty International pour la Géorgie», datées d’octobre 1996 et contenant des informations sur les tortures et les mauvais traitements subis par les priso n niers politiques. Dans sa lettre du 1 er  décembre 1998, il a présenté le dossier médical de la requérante, d a tant de son arrivée en 1996 et décrivant comment elle avait été soumise à la torture.

2.7 Le 22 février 1999, le conseil a demandé la réouverture de l’affaire sur la base de deux rapports de la Fédération internationale d’Helsinki pour les droits de l’homme, datés de 1997 et 1998 et décrivant de graves violations des droits de l’homme en Géorgie. En réponse à l’exposé des motifs de la décision de rejet de la Commission des réfugiés, il a fait valoir que ces rapports montrent que la liberté d’expression est lim i tée en Géorgie et que c’est uniquement dans l’intérêt des autorités que les médias locaux avaient passé sous silence l’attaque de la prison de Zougditi et l’évasion des prisonniers. En outre, bien que les rapports ne d é crivent pas la manifestation du 19 novembre 1993, ils mentionnent plusieurs manifestations semblables qui ont eu lieu avant et après cette manifestation. Le conseil a aussi soutenu que la description des conditions de détention faite par la requérante concordait avec les rapports. Le 8 mars, la Commission des réfugiés a rej e té la demande.

2.8 En mai 1999, le conseil a envoyé des lettres concernant la requérante à 18 députés danois, en leur demandant de s’adresser au Ministre de l’intérieur et de réclamer un permis de séjour pour la requérante, pour raisons humanitaires. Sept députés ont pris contact avec le Ministre, qui a transmis le dossier à la Commission des réfugiés, laquelle a rejeté la demande.

Teneur de la requête

3. Le conseil déclare que la requérante craint, si elle est renvoyée en Géorgie, d’être arrêtée, torturée et tuée parce qu’elle a été membre du Parti zviadiste, organisation politique mingrélienne, qu’elle a pris part à la manifestation du 19 novembre 1993 et que son défunt mari a combattu dans l’armée mingrélienne. Le conseil ajoute qu’il existe un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme par les autorités géorgiennes, en particulier contre les opposants politiques, qui risquent d’être torturés et maltraités en pr i son, et qu’il y a d’abondantes raisons de croire que la requérante sera soumise à la torture ou à d’autres tra i tements inhumains si elle est renvoyée en Géorgie.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond

4.1 Dans sa note verbale du 10 décembre 1999, l’État partie présente ses observations sur la recevabil i té et le fond de la communication. Il soutient que la requérante n’a pas fourni des éléments suffisants aux fins de la recevabilité de sa plainte, et qu’il y a donc lieu de déclarer celle ‑ci irrecevable.

4.2 L’État partie soutient que la Commission des réfugiés a examiné l’affaire sous tous ses aspects, en tenant compte des obligations découlant pour l’État partie de la Convention, et que les informations su p plémentaires qui pourraient être présentées au Comité contre la torture ne révèleront en aucun cas que la requérante s’expose à être torturée si elle est renvoyée en Géorgie. Il souligne que le Comité n’est pas un organe de recours, mais un organe de surveillance, et que la requérante se sert du Comité pour obtenir le réexamen de sa demande.

4.3 En ce qui concerne la question de savoir s’il existe des motifs sérieux de croire que la requérante risque d’être soumise à la torture si elle est renvoyée en Géorgie, l’État partie s’en remet entièrement à l’appréciation et aux décisions de la Commission des réfugiés. Il souligne que, selon les renseignements disponibles, seuls les dirigeants ou les membres en vue du Parti zviadiste sont persécutés, et que la requ é rante ne fait pas partie de ce groupe. Renvoyant à la jurisprudence du Comité dans l’affaire I. A. O. c. Su è de a et dans l’affaire N. P.  c.  Australie b , l’État partie souligne qu’il est important de savoir si les informations dont on dispose concernant le pays d’accueil confirment les allégations des requérants selon lesquelles ils risquent d’être soumis à la torture. En outre, l’État partie rappelle l’affaire X c. Suisse c , dans laquelle le Comité avait souligné que le requérant «n’appartenait pas à un groupe politique, professionnel ou social qui serait visé par des actes de répression ou de torture imputables aux autorités».

4.4 L’État partie répète que la Commission des réfugiés n’a pas accepté les affirmations de la requérante selon lesquelles elle avait été libérée de prison par une attaque armée, e s sentiellement parce qu’elle n’avait trouvé aucune mention de ce fait dans sa document a tion. Bien que la requérante ait prétendu que son père avait pris part à l’attaque, il n’en a rien dit dans sa demande d’asile. À cet égard, l’État partie renvoie à la décision prise par le Comité dans l’affaire H. D.  c. S uisse d , dans laquelle le Comité pose la question de savoir si la présentation des faits par le requérant peut être considérée comme suffisamment étayée et créd i ble.

4.5 De plus, la Commission des réfugiés a conclu que, même si sa détention était av é rée, elle ne considérait pas que la requérante risquait d’être inquiétée et torturée à son r e tour en Géorgie. Selon l’État partie, cette conclusion est conforme à celles du Comité dans les affaires A. L. N.  c.  Suisse et X, Y et Z c. Suède e .

4.6 L’État partie souligne qu’il n’y a pas d’élément objectif à l’appui de l’allégation de la requérante selon laquelle elle aurait été soumise à la torture f , et qu’il n’a pas été établi non plus que la requérante soit recherchée par les autorités géorgiennes g . L’État partie i n siste sur le fait que, après sa libération, la requérante s’est installée dans la région de G e getjkori et y a repris ses activités politiques, mais qu’elle n’a fait état d’aucune difficulté avec les autorités pendant son séjour dans cette région h ; et que les événements qui ont m o tivé son départ sont en outre relativement anciens i .

4.7 La Commission des réfugiés n’a pas attribué d’importance à la déclaration des voisins de la requ é rante expliquant que les autorités avaient persécuté les membres de sa famille en se rendant chez eux et en les menaçant car cette allégation a été faite à un stade ultérieur de la procédure de demande d’asile et ne figurait pas dans les déclarations antérieures de la requérante. L’État partie rappelle que, selon la pratique du Comité, si un requérant modifie sa version des faits pendant l’instruction de sa demande d’asile, il est important qu’une explication logique soit donnée j .

4.8 L’État partie considère aussi comme conforme à la jurisprudence du Comité que l’on tienne dûment compte du fait que la Convention contre la torture est entrée en vigueur à l’égard de la Géorgie le 25 novembre 1994 k .

Commentaires de la requérante sur les observations de l’État partie

5.1 Dans une lettre du 7 février 2000, le conseil de la requérante renvoie à la jurispr u dence du Comité dans l’affaire E. A. c.  Suisse l selon laquelle, «si l’expression “motifs s é rieux” utilisée à l’article 3 implique qu’il doit y avoir plus qu’une simple éventualité que l’intéressé risque la torture, il n’est pas pour autant nécessaire que la torture soit hautement plausible pour que les conditions énoncées dans l’article soient réunies», et il fait valoir que ces conditions sont remplies dans le cas de la requérante.

5.2 En ce qui concerne l’argument de l’État partie selon lequel le père de la requérante n’a pas me n tionné dans sa demande d’asile qu’il avait participé à la libération des prisonniers, parmi lesquels se trouvait la requérante, cela s’explique par son scepticisme général à l’égard des autorités et son état mental résultant de l’existence qu’il avait menée en tant que partisan.

5.3 De plus, la requérante ne peut pas établir qu’elle a été soumise à la torture et violée, parce qu’elle n’a pas subi d’examen médical de ce fait. Si elle n’a pas voulu communiquer ces informations aux autorités danoises, cela s’explique par le traumatisme lié à ce genre d’expérience. Le conseil de la requérante rappelle que le Comité, dans l’affaire Kisoki c.  Suède m , a déclaré qu’«une exactitude parfaite ne peut guère être a t tendue de victimes de la torture et que les incohérences qui peuvent apparaître dans l’exposé des faits par l’auteur ne portent pas sur des questions matérielles et ne jettent pas le doute sur la vérac i té des allégations générales de l’auteur».

5.4 Le conseil fait valoir que, bien que la Géorgie ait ratifié la Convention, il est manifeste que, vu les persécutions dont sont encore victimes les opposants politiques, cet État ne respecte pas les obligations qui en découlent.

5.5 Le conseil joint en annexe une lettre de la Commission des réfugiés disant que la Commission a décidé de rouvrir le dossier de la requérante compte tenu d’informations selon lesquelles, si elle rentrait en Géorgie, elle risquerait d’être exilée en Abkhazie. Cependant, le conseil déclare dans une autre lettre du 1 er  février 2002 que la décision prise le 24 janvier 2002 par la Commission des réfugiés était défavorable à la requérante. Il ressort de cette décision de la Commission que, en réponse à une demande d’information de caractère général émanant de l’État partie, le Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a r é pondu que les citoyens géorgiens ne risquent pas, à leur retour, d’être exilés en Abkhazie.

Décision concernant la recevabilité et examen quant au fond

6. Avant d’examiner une plainte soumise dans une requête, le Comité contre la torture doit déterminer si la requête est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire en vertu du paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement et qu’elle n’est pas en cours d’examen. Le Comité relève que l’État partie a fait objection à la recevabilité de la requête au motif que la requérante n’avait pas fourni d’éléments suffisants aux fins de la recevabilité. Compte tenu, d’une part, des affirmations de la requérante concernant son appartenance au Parti zviadiste depuis le milieu de l’année 1992, sa participation à différents aspects de ses activités et les tortures qu’elle dit avoir subies et compte tenu, d’autre part, de la situation actuelle de persécution des opposants politiques en Géorgie, le Comité considère que les allégations de la requérante sont suffisantes pour que sa requête soit recevable, et il ex a mine donc la requête quant au fond.

7. Conformément au paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, le Comité doit déterminer s’il existe des motifs sérieux de croire que la requérante risquerait d’être soumise à la torture si elle était renvoyée en Géorgie. Pour ce faire, il doit, conformément au paragraphe 2 de l’article 3, tenir compte de toutes les considérations pertinentes, y compris de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives.

8. Toutefois, le Comité doit déterminer si l’intéressé risquerait personnellement d’être soumis à la to r ture dans le pays vers lequel il serait expulsé. Par conséquent, l’existence d’un ensemble de violations gr a ves, flagrantes ou massives des droits de l’homme dans un pays ne constitue pas en soi un motif suffisant pour établir qu’une personne risque d’être victime de torture à son retour dans son pays; l’existence de m o tifs supplémentaires est nécessaire pour que le Comité puisse conclure que l’intéressé court personnellement ce risque.

9. En l’espèce donc, le Comité doit déterminer si l’expulsion de la requérante en Géorgie aurait comme conséquence prévisible de l’exposer à un risque réel et personnel d’être arrêtée et torturée.

10. L’État partie a relevé dans les dires de la requérante des contradictions qui, à son avis, jettent le doute sur la véracité de ses allégations. Le Comité réaffirme sa jurisprudence selon laquelle l’on ne saurait attendre de victimes de la torture qu’elles se remémorent de façon cohérente des faits en rapport avec des événements extrêmement traumatisants. Mais elles doivent être prêtes à soumettre d’éventuels éléments de preuve à l’appui d’une telle plainte. Les activités politiques qu’elle prétend avoir eues depuis qu’elle a a d héré au Parti zviadiste ne sont pas de nature à permettre de conclure qu’elle risque d’être torturée à son r e tour. Aucune de ces informations ne montre non plus qu’elle risque d’être soumise à la torture à cause des activités partisanes de son mari ou du fait qu’il a été exécuté par les forces gouvernementales. Cette opinion est corroborée par le fait que les autorités géorgiennes ne se sont pas intéressées à la requérante après sa libération en 1993, jusqu’à ce qu’elle quitte le pays en 1996. À cet égard, le Comité n’attribue pas d’importance à la déclaration des voisins de la requérante disant qu’elle avait été persécutée pendant son séjour à Gegetjkori de 1994 à son départ en 1996, puisque la requérante n’en a pas fait état avant le 29 octobre 1998, soit plus de deux ans et demi après le dépôt de sa première demande d’asile.

11. Compte tenu de ce qui précède, le Comité estime que la requérante n’a pas montré qu’elle risquait d’être soumise à la torture à son retour en Géorgie.

12. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégr a dants, conclut que l’expulsion de la requérante vers la Géorgie ne constituerait pas une violation de l’article 3 de la Convention.

4. Requête n o 154/2000

Présentée par : M. S. (nom supprimé) [représenté par un conseil]

Au nom de : Le requérant

État partie : Australie

Date de la requête : 25 janvier 2000

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 23 novembre 2001,

Ayant achevé l’examen de la requête n o 154/2000, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant est un ressortissant algérien, actuellement détenu à l’Immigration Detention Centre de Chester Hill en Australie. Il affirme que son expulsion vers l’Algérie entraînerait une violation de l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est r e présenté par le Refugee Advice and Casework Service (Australie).

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a porté la communic a tion à l’attention de l’État partie le 28 janvier 2000. Dans le même temps, agissant en vertu du paragraphe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur, il a demandé à l’État partie de ne pas expulser le requérant vers l’Algérie tant que sa communication serait en cours d’examen.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le 24 août 1998, le requérant est arrivé en Australie en provenance d’Afrique du Sud sans doc u ment de voyage valide. Interrogé par les autorités à l’aéroport, il a sollicité la protection de l’État partie en qualité de réfugié.

2.2. Le 3 septembre 1998, le requérant a demandé le statut de réfugié (visa de prote c tion) au Ministère de l’immigration et des affaires multiculturelles en vertu de la loi sur l’immigration. Le 2 octobre 1998, un délégué du Ministre de l’immigration et des affaires multiculturelles a décidé de refuser le visa de prote c tion à l’intéressé. Le 14 décembre 1998, la Commission de contrôle des décisions concernant les réfugiés (R e fugee Review Tribunal) a confirmé cette décision. Le 30 avril 1999, la Cour fédérale au s tralienne a rej e té le recours du requérant.

2.3 Le 22 mars 1999, le requérant a demandé au Ministre de l’immigration et des affaires multiculture l les d’intervenir et de rapporter la décision de la Commission de contrôle dans l’intérêt public, conform é ment à l’article 417 de la loi sur l’immigration. Dans une lettre non datée, le Ministre a répondu qu’il avait décidé de ne pas user de ce pouvoir. Le 13 septembre 1999, le conseil a de nouveau écrit au Ministre pour demander que le requérant soit autorisé à présenter une deuxième demande de visa de protection en applic a tion de l’article 48B de la loi sur l’immigration. Il n’a pas reçu de réponse.

2.4 Le requérant dit qu’il participait à l’action sociale du Front islamique du salut (FIS) depuis 1990: après le travail il allait au bureau local du FIS et déterminait ce qu’il fallait donner aux familles dans le b e soin. En janvier 1992, après l’annulation des élections législatives générales à l’Assemblée nationale du Peuple, l’antenne locale du FIS a été fermée et l’intéressé a été convoqué par la gendarmerie et interrogé pendant plus de deux heures. Le requérant affirme qu’après sa libération il était obligé de se présenter tous les jours à la gendarmerie et de ne pas quitter sa ville natale, Ngaos. Le 16 septembre 1994, avec l’aide d’un ami, il a quitté l’Algérie pour la Syrie par avion. Le lendemain de son départ et de nouveau au mois d’octobre, la gendarmerie a interrogé son père pour savoir où il se trouvait. Le père aurait par la suite conseillé à son fils de ne pas rentrer en Algérie car la police l’accusait d’insoumission.

2.5 Le requérant dit qu’il a quitté l’Algérie en 1994 après avoir eu connaissance d’un décret officiel rappelant les réservistes qui n’avaient fait que 18 mois de service militaire pour une nouvelle période de six mois. Il avait fait son service dans l’armée nationale de mai 1988 à mars 1990. Le requérant affirme qu’en mars 1994 le Ministre algérien de l’intérieur a annoncé l’intention du Gouvernement de rappeler des milliers de réservistes, ce que la Commission de contrôle ne savait pas lorsqu’elle a examiné son cas.

2.6 Le requérant ajoute qu’en 1996, il a obtenu copie du verdict d’un tribunal, daté du 17 novembre 1996, le déclarant coupable de constitution d’un groupe terroriste et le condamnant à mort par contumace a .

La teneur de la requête

3.1 Le requérant affirme que son expulsion vers l’Algérie violerait l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il fait valoir que des motifs sérieux donnent à penser qu’il risquerait d’être torturé s’il était expulsé vers l’Algérie, car il y est considéré comme un sympathisant du FIS.

3.2 Le requérant affirme que, dès qu’il se retrouverait dans son pays il serait considéré comme un i n soumis et par conséquent on lui imputerait automatiquement des opinions hostiles au Gouvernement.

3.3 Le requérant ajoute qu’à son retour il serait arrêté et torturé en raison du verdict rendu par le trib u nal en 1996. Il affirme que ce jugement est dans la logique de ce qu’il sait des peines infligées pour dése r tion lorsque les intéressés sont considérés comme affiliés aux islamistes.

3.4 Le requérant dit qu’à son retour en Algérie, il serait interrogé à l’aéroport sur la période qu’il a pa s sée en dehors du pays et sur ses activités. On pourrait entre autres chercher à savoir s’il a demandé le statut de réfugié à l’étranger. Le requérant cite un article d’un journal britannique, daté de juin 1997, faisant état du décès d’un demandeur d’asile expulsé vers l’Algérie.

3.5 Le requérant affirme que l’Algérie commet des violations graves des droits de l’homme, qui non seulement bénéficient d’une totale immunité mais sont approuvées de surcroît en haut lieu. Rappelant les événements qui se sont produits dans ce pays depuis 1992, il ajoute que l’Algérie a coutume de faire fi de ses obligations au regard des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

3.6 Le requérant affirme que tous les recours internes disponibles ont été épuisés. Bien que le Ministre de l’immigration et des affaires multiculturelles n’ait pas répondu à la demande qui lui a été adressée et conformément à la loi sur l’immigration, le requérant pourrait être expulsé d’Australie dès que ce serait m a tériellement possible.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond de la communication

4.1 Dans sa réponse datée du 14 novembre 2000, l’État partie affirme que la communication n’est pas recevable, faute d’éléments suffisants en justifiant l’examen en vertu de l’article 22 de la Convention.

4.2 Au cas où le Comité considérerait la communication comme recevable, l’État partie fait valoir qu’elle est insuffisante quant au fond, étant donné qu’il n’y a pas de motifs sérieux de croire que le requ é rant risque d’être soumis à la torture à son retour en Algérie et que le risque n’est encouru ni personnell e ment ni actuellement.

4.3 Si l’État partie reconnaît la gravité de la situation des droits de l’homme en Algérie, il affirme que des informations récentes font état d’une amélioration. Il se réfère à ce sujet à l’adoption en 1999 de la loi relative au rétablissement de la concorde civile et au fait que le Ministère algérien de l’intérieur a accepté d’enquêter sur les cas de disparition. L’État partie affirme qu’Amnesty International, Human Rights Watch et le Département d’État des États ‑Unis indiquent à ce propos que le nombre de disparitions, d’arrestations, de cas de torture et d’exécutions extrajudiciaires perpétrés par des agents de l’Algérie ont dim i nué en 1999. Il note que l’Algérie a adhéré au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, à la Convention contre la torture, en faisant la déclaration prévue aux art i cles 21 et 22 de cet instrument, ainsi qu’à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

4.4 L’État partie affirme qu’il n’y a aucun motif sérieux de croire que le requérant sera soumis à la to r ture à son retour en Algérie parce qu’il se dit affilié au FIS. Il prie le Comité d’accorder le crédit voulu aux conclusions de la Commission de contrôle à cet égard, étant donné que l’auteur n’a pas fourni d’informations nouvelles à l’appui de sa plainte. L’État partie rappelle que la Commission a conclu que le requérant n’avait jamais été membre du FIS, qu’il ne s’intéressait pas aux activités politiques de cette org a nisation et n’y participait et que la police algérienne ne se préoccupait nullement de lui. La Commission a fait valoir que l’affirmation du requérant selon laquelle il était tenu de se présenter à la gendarmerie et lim i té dans ses déplacements n’était pas plausible compte tenu des informations dont on disposait sur la manière dont les membres du FIS étaient traités pendant la période en question. En outre, à la lumière de l’évolution récente de la situation en Algérie, l’État partie estime qu’un sympathisant du FIS ne risque guère de retenir l’attention des autorités algériennes.

4.5 Pour ce qui du rappel du requérant sous les drapeaux, l’État partie relève que dans ses conclusions la Commission note qu’il n’y a pas eu de rappel de ce type avant mars 1995. Selon les informations sur le pays dont l’État partie dispose, il y a eu un rappel des réservistes en 1991, puis en mars 1995 seulement. L’État partie fait en outre observer que rien n’indique que le requérant a effectivement été rappelé et que selon des sources indépendantes un avis aurait été adressé à son domicile s’il l’avait été. À supposer que l’intéressé se soit soustrait à un rappel, il n’avait produit aucun élément prouvant expressément qu’il ri s quait d’être soumis à la torture. Se référant au guide établi par le Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et au cas des demandeurs d’asile algériens, l’État partie affirme que la probabilité d’une arrestation ne suffit pas à étayer des allégations de torture probable.

4.6 Pour l’État partie, la copie du verdict du tribunal présentée par le requérant n’est sans doute pas authentique étant donné que le moment où lui ‑même situe l’ordre de rappel ne cadre pas avec la date de cet ordre et que la sentence rendue ne correspond pas aux informations reçues concernant les peines imposées aux réservistes qui désertent, à savoir l’arrestation et l’emprisonnement pour une période allant de 3 mois à 10 ans, selon le cas. L’État partie rappelle en outre que d’après les informations fournies par Amnesty International l’Algérie a imposé un moratoire sur l’application de la peine de mort en décembre 1994 et qu’aucune exécution n’a eu lieu depuis cette date.

4.7 Le requérant affirme qu’il risque d’être soumis à la torture parce qu’il est soupçonné d’avoir d e mandé le statut de réfugié ou l’asile; l’État partie considère qu’il n’a pas apporté d’éléments prouvant que, comme il le soutient, les autorités algériennes ont eu connaissance des demandes qu’il avait déposées en Australie ou en Afrique du Sud. Les informations sur le pays dont l’État partie dispose indiquent que, même si les autorités algériennes étaient au courant des demandes déposées par le requérant, il n’existe a u cun motif sérieux de croire que ce dernier serait soumis à la torture.

Observations de l’auteur

5.1 Le requérant affirme que la situation des droits de l’homme demeure critique en Algérie. Il fait v a loir que ce pays continue de ne pas vouloir ou pouvoir répondre aux allégations de torture et de mauvais traitements à l’encontre de personnes arrêtées parce qu’elles sont soupçonnées d’avoir des liens avec des groupes armés. Il rappelle que dans ses observations finales en 1998, le Comité des droits de l’homme a noté que des informations émanant de nombreuses sources faisaient état de cas de torture, de disparitions et d’exécutions sommaires en Algérie. Il relève en outre que le risque de torture des personnes interrogées au sujet de leurs éventuels contacts avec des membres de groupes armés demeure une source d’inquiétude pour Amnesty International.

5.2 Le requérant affirme qu’il est artificiel de faire une distinction entre sa participation aux activités du FIS et la qualité de membre actif de cette organisation. En outre, rien ne vient étayer la conclusion selon laquelle les activités de protection sociale, qui ont une signification politique évidente, ne sont pas consid é rées comme des activités politiques par les autorités algériennes.

5.3 Le requérant affirme qu’à la lumière des événements récents, il est simpliste de dire que ses symp a thies pour le FIS ne risquent guère d’appeler l’attention de la gendarmerie algérienne sur son cas. Il fait v a loir que les personnes qui n’ont pas demandé à bénéficier des mesures d’amnistie ou dont le cas ne relève pas des dispositions de la loi relative au rétablissement de la concorde civile ont peu de chances d’échapper aux rigueurs de la justice.

Délibérations du Comité

6.1 Le Comité prend note de l’information donnée par l’État partie selon laquelle la mesure d’expulsion est suspendue, conformément à la demande qu’il a faite en vertu du paragraphe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur.

6.2 Avant d’examiner une plainte figurant dans une communication, le Comité contre la torture doit décider si cette communication est recevable au regard de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire en vertu du paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée ou n’est pas en cours d’examen devant une autre instance internati o nale d’enquête ou de règlement. Il note que l’État partie considère la communication comme irrecevable faute de justification suffisante. Toutefois, l’État partie n’a pas corroboré cette affirmation et ses arguments ne portent que sur le fond au cas où le Comité jugerait la communication recevable. Le Comité considère donc que les observations de l’État partie ne soulèvent que des questions de fond qui devraient être exam i nées au stade de l’examen quant au fond et non à celui de la recevabilité. Le Comité ne voyant pas d’autre obstacle à la recevabilité, il déclare la communication recevable.

6.3 Conformément au paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, le Comité doit d é terminer s’il existe des motifs sérieux de croire que l’auteur risquerait d’être soumis à la torture s’il retournait en Algérie. Pour ce faire il doit, conformément au paragraphe 2 de l’article 3, tenir compte de toutes les considérations pert i nentes, y compris de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives. Il s’agit toutefois de déterminer si l’intéressé risquerait personnellement d’être soumis à la torture dans le pays où il serait renvoyé. En conséquence, l’existence d’un e n semble de violations flagrantes, graves ou massives des droits de l’homme dans un pays ne constitue pas en soi un motif suffisant pour conclure qu’un individu risquerait d’être vi c time de tortures à son retour dans son pays; il faut qu’il existe des motifs supplémentaires de penser que l’intéressé serait personnellement en danger. De la même manière, l’absence d’un ensemble systématique de violations flagrantes des droits de l’homme ne signifie pas qu’un individu ne peut pas être considéré comme risquant d’être soumis à la torture dans sa situation particulière.

6.4 En l’espèce, le Comité note que les activités sociales du requérant pour le FIS remontent au début de 1992, époque à laquelle il a été arrêté et interrogé pendant deux heures. Il n’est pas affirmé que le requ é rant a été torturé ou poursuivi au motif de ses activités pour le FIS avant de partir pour la Syrie.

6.5 Le Comité note que le requérant invoque la protection de l’article 3 au motif qu’il risque d’être a r rêté et torturé à la suite du verdict contesté de 1996. Toutefois, il ne produit aucun élément à l’appui de cette affirmation. Le Comité considère que, même s’il était certain que l’intéressé serait arrêté dès son retour en Algérie en raison d’une condamnation préalable, le seul fait qu’il soit détenu et jugé de nouveau ne suffirait pas à conclure qu’il y a des motifs sérieux de croire qu’il risquerait d’être soumis à la torture b .

6.6 S’agissant de l’affirmation selon laquelle le requérant sera repéré par les autorités et automatiqu e ment accusé d’opposition au Gouvernement, le Comité note que l’intéressé n’a pas prouvé qu’il avait été réellement rappelé sous les drapeaux. Les éléments dont le Comité dispose ne permettent pas non plus de conclure que le requérant risque d’être torturé s’il est interrogé à l’aéroport à son retour en Algérie.

6.7 Le Comité rappelle que, pour que l’article 3 de la Convention s’applique, il doit exister pour la pe r sonne concernée un risque prévisible, réel et personnel d’être soumise à la torture dans le pays vers lequel elle est renvoyée. Sur la base des considérations qui précèdent, le Comité estime que le requérant n’a pas apporté d’éléments suffisants pour le convaincre qu’il risque personnellement d’être victime de torture s’il retournait en Algérie.

7. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants, estime que, sur la base des info r mations dont il est saisi, l’expulsion du requérant vers l’Algérie ne constituerait pas une violation de l’article 3 de la Convention.

5. Requête n o 156/2000

Présentée par : M. S. (nom supprimé) [représenté par un avocat]

Au nom de : Le requérant

État partie : Suisse

Date de la communication : 9 février 2000

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 13 novembre 2001,

Ayant achevé l’examen de la requête n o 156/2000, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant – né le 13 avril 1979 – est un ressortissant sri ‑lankais, d’origine tamoule. Il se trouve actuellement en Suisse où il a déposé une demande d’asile. Cette demande a été rejetée et il soutient que son renvoi au Sri Lanka constituerait une violation par la Suisse de l’article 3 de la Convention contre la torture. Il a demandé au Comité de bénéficier de mesures d’urgence, étant donné qu’au moment du dépôt de sa r e quête, il risquait une expulsion imminente. Il était représenté par un conseil jusqu’au 9 avril 2001.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a porté la communication à l’attention de l’État partie le 21 février 2000. Dans le même temps, le Comité agissant en vertu du par a graphe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur, a demandé à l’État partie de ne pas expulser le requ é rant vers le Sri Lanka tant que sa communication serait en cours d’examen. Le 23 mai 2000, l’État partie a informé le Comité que des mesures avaient été prises pour faire en sorte que le requérant ne soit pas re n voyé vers le Sri Lanka tant que sa communication serait en cours d’examen par le Comité.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le requérant affirme que comme la plupart des Sri ‑Lankais d’origine tamoule, il a été contraint de travailler dès son plus jeune âge pour le mouvement des Tigres de libér a tion de l’Ealam tamoul (LTTE), en particulier pour la construction de bunkers et le collage d’affiches de propagande. Il déclare que refusant d’adhérer plus activement à ce mouv e ment, il a dû fuir Kilinochchi pour Colombo.

2.2 Le requérant affirme qu’à Colombo, les autorités gouvernementales l’ont arrêté plusieurs fois, pa r fois pendant plus de 15 jours en le soumettant à la torture, l’accusant de faire partie du mouvement des T i gres tamouls. Il déclare qu’il a été traduit en justice à plusieurs reprises, la première fois le 15 mars 1997, avant d’être relâché peu de temps après. Il ajoute qu’il a été arrêté à nouveau le 3 janvier 1999 par la police de Colombo, a été détenu un mois avant d’être une nouvelle fois traduit devant la justice le 10 février 1999. D’après le requérant, le magistrat l’a relâché à la seule condition qu’il se rende chaque samedi au Bureau des services secrets (CID) afin de signer un registre.

2.3 Le requérant déclare avoir fui le Sri Lanka le 28 mars 1999 par l’intermédiaire d’un passeur. Il pr é cise qu’en raison de cette fuite, un mandat d’arrêt a été délivré à son encontre et un document de la police de Colombo en date du 23 août 1999 a été produit à ce sujet. Le requérant est arrivé en Suisse le 29 mars 1999.

2.4 Le requérant a déposé une demande d’asile en Suisse le 30 mars 1999, laquelle a été rejetée le 18 août de la même année. Appelée à statuer sur le recours déposé le 21 septembre 1999, la Commission suisse de recours en matière d’asile a confirmé la décision initiale de rejet le 10 décembre 1999. Un délai de départ a été fixé au 15 janvier 2000. Le 10 janvier 2000, le requérant a sollicité une prolongation du délai de départ en raison de son état de santé. Le 20 janvier 2000, l’Office fédéral des réfugiés a constaté que ces motifs n’étaient pas de nature à justifier un report, mais a décidé de proroger le délai au 15 février 2000 afin de permettre au requérant de mieux préparer son départ.

Teneur de la requête

3.1 Le requérant affirme que son retour au Sri Lanka accentuera les soupçons de la police locale selon lesquels il appartiendrait au mouvement des Tigres tamouls, d’où un risque d’arrestation sommaire et de torture à son arrivée à Colombo. Selon le requérant, force est de constater qu’un ressortissant sri ‑lankais d’origine tamoule, qui fuirait son pays suite aux persécutions des forces gouvernementales, risque d’être torturé à plus forte raison à son retour au pays.

3.2 Le requérant fait référence au bulletin d’Amnesty International du 1 er juin 1999, d’après lequel des actes de torture perpétrés par les forces de sécurité sont signalés presque quotidiennement dans le contexte du conflit armé qui les oppose au LTTE. D’après ce bulletin, ce problème se fait également sentir dans le domaine du maintien de l’ordre courant car régulièrement, des policiers torturent des suspects de droit commun. Ainsi, toujours selon cette source, malgré l’existence de dispositifs de protection juridique, la torture continue d’être pratiquée dans une relative impunité.

3.3 Le requérant en conclut que l’argument selon lequel les persécutions à son encontre n’étaient pas suffisamment intenses pour faire naître un droit d’asile est sans valeur par rapport aux persécutions qu’il va certainement subir à son retour au Sri Lanka.

3.4 Le requérant ajoute que depuis mai 1999, il souffre d’une tuberculose pleurale. Il précise qu’un tra i tement antituberculeux a été effectué de mai à décembre 1999 à la division de pneumologie de la polyclin i que médicale universitaire du Canton de Vaud (Suisse). D’après le requérant, les médecins de cette division estiment que son évolution clinique doit pouvoir être surveillée dans les deux années à venir, l’affection médicale dont il souffre devant être considérée comme grave. Le requérant affirme qu’une intervention m é dicale urgente et indispensable pourrait s’imposer et que les conditions d’hospitalisation à Sri Lanka, ma l gré l’avis contraire de la Commission suisse de recours en matière d’asile, ne permettront pas un traitement médical convenable.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond de la requête

4.1 L’État partie n’a pas contesté la recevabilité de la communication et, dans une lettre datée du 21 août 2000, a formulé des observations sur son bien ‑fondé.

4.2 L’État partie a examiné, en premier lieu, la décision de la Commission suisse de recours en matière d’asile.

4.3 L’État partie relève que la Commission, bien qu’ayant considéré que le recours était manifestement mal fondé et pouvait dés lors être rejeté par voie de procédure simplifiée, a néanmoins procédé à un examen circonstancié du cas d’espèce.

4.4 L’État partie a rappelé que la Commission, à l’instar de l’Office fédéral des réfugiés, a considéré que le requérant n’avait pas démontré avoir subi de sérieux préjudices qui pourraient entraîner la crainte obje c tive et subjective de subir des persécutions en cas de retour à Sri Lanka. Selon l’État partie, le requérant n’a en effet pas établi l’existence d’un risque personnel, concret et sérieux d’être soumis, en cas de renvoi dans son pays d’origine, à un traitement prohibé par l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et la Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En vertu de la décision de la Commission suisse de recours en matière d’asile, il ressort, selon l’État partie, qu’à la lumière des engagements internationaux de la Suisse, le refoulement du requérant s’avère licite. L’État partie rappelle que la Commission a écarté les arguments du requérant qui invoquait son état de santé pour l’opposer à son refoulement.

4.5 L’État partie a examiné, en second lieu, le bien ‑fondé de la décision de la Commission à la lumière de l’article 3 de la Convention et de la jurisprudence du Comité.

4.6 L’État partie déclare que le requérant, dans sa requête, se borne à rappeler les motifs qu’il avait inv o qués devant les autorités nationales. Selon l’État partie, le requérant n’apporte aucun élément nouveau qui permettrait de mettre en question les décisions de l’Office fédéral des réfugiés du 18 août 1999 et de la Commission du 10 décembre 1999. L’État partie affirme que le requérant n’explique notamment pas au Comité les incohére n ces et les contradictions figurant dans ses allégations. Bien au contraire, d’après l’État pa r tie, le requérant ne fait que les confirmer puisque, pour des raisons ignorées des autorités suisses, il invoque qu’il aurait été arrêté à nouveau le 3 janvier 1999 par la police de C o lombo et ensuite traduit devant la justice le 10 février 1999. L’État partie rappelle que ces affirmations seraient confirmées selon le requérant par le document de la police de C o lombo daté du 23 août 1999.

4.7 L’État partie estime que ces affirmations sont pour le moins surprenantes car lors de la procédure interne, le requérant a d’abord déclaré spontanément qu’il n’avait plus été arrêté par la police ou par le B u reau des services secrets (CID) après avril 1997. Lors de son audition, le requérant a toutefois prétendu qu’il aurait été arrêté par le People Liberation of Tamil Eelam (PLOTE) en février 1998. D’après l’État partie, ce n’est que dans son recours à la Commission que le requérant a signalé, de façon très vague et en pleine contradiction avec ses allégations antérieures, avoir été arrêté ou détenu par la police ou le CID, plusieurs fois entre février 1998 et son départ en Suisse.

4.8 L’État partie souligne que, bien que le document qui aurait été établi par la police de Colombo porte la date du 23 août 1999, le requérant n’a jamais spécifié qu’il aurait été arrêté en 1999, ni à l’occasion des auditions précitées, ni dans son recours à la Commission du 21 septembre 1999, ni dans ses lettres à la Commission des 15 et 19 octobre 1999. D’après l’État partie, il est encore plus étonnant que le requérant ne se soit pas référé à ce document lors de sa demande de prorogation du délai de départ le 10 janvier 2000. L’État partie précise que ce document n’ayant jamais été produit en cours de procédure ordinaire, le requ é rant pouvait agir par voie de révision, ce qu’il n’a pas fait. L’État partie rappelle que la procédure de rév i sion est reconnue comme voie de recours interne efficace au sens de l’alinéa b de l’article 22.5 de la Convention. L’État partie estime, quoi qu’il en soit, que ce document ne saurait être pris en considération dans la présente affaire.

4.9 L’État partie explique qu’il est de surcroît légitime de s’interroger sur l’origine et le contenu de ce document qui, une fois encore, n’a jamais été produit devant les instances nationales. L’État partie déclare que l’on peut se demander pour quelles raisons le requérant craint d’être poursuivi par la police, alors que celle ‑ci lui procure complaisamment un document qui reprend dans l’ordre chronologique toutes les arrestations dont il prétend avoir été l’objet. Selon l’État partie, quelle étrange police qui a l’amabilité de procurer à la personne qu’elle souhaite arrêter les moyens de lui échapper. L’État partie conclut que de toute év i dence, l’arrestation de 1999 est invraisemblable et que le document prétendument établi par la police de Colombo, produit en copie non certifiée, n’a aucune valeur probante.

4.10 Ayant rappelé la jurisprudence du Comité et son Observation générale relative à l’application de l’article 3, l’État partie déclare qu’en l’espèce le Gouvernement suisse fait entièrement siens les motifs ret e nus par la Commission à l’appui de sa décision rejetant la demande d’asile du requérant et confirmant son renvoi. Sous l’angle de l’article 3 de la Convention, l’État partie tient à préciser, à titre liminaire, que selon la jurisprudence du Comité (communication n o 57/1996 P. Q. L. c. Canada ), cette disposition n’offre aucune protection au requérant qui allègue simplement craindre d’être arrêté à son retour dans son pays. Cette conclusion s’impose a fortiori pour le simple risque d’arrestation (communic a tion n o 65/1997 I. A. O. c. Suède ). L’État partie rappelle qu’en l’espèce le requérant pr é tend en effet qu’il serait arrêté pour ne pas avoir satisfait à l’obligation qu’il aurait de se rendre au Bureau du CID une fois par semaine.

4.11 L’État partie affirme que c’est à la suite d’une motivation convaincante que la Commission a cons i déré que les allégations du requérant manquaient de crédibilité. Selon l’État partie, cette motivation ne sa u rait être ébranlée du seul fait que le requérant communique à présent au Comité, pour la première fois, un document qui aurait été établi par la police de Colombo le 23 août 1999, selon lequel le requérant aurait été arrêté à nouveau le 3 janvier 1999 et qu’il serait recherché par la police pour avoir manqué à son obligation de se rendre au Bureau du CID. L’État partie précise que le requérant aurait dû et aurait pu fournir ces i n formations aux autorités nationales lors de la procédure interne puisque le requérant d’asile est tenu à un devoir de collaboration. L’État partie estime qu’il est notamment surprenant que le requérant n’ait jamais fait allusion devant les instances internes à son arrestation du 3 janvier 1999 alors que celle ‑ci serait inte r venue peu de temps avant son départ du Sri Lanka. L’État partie ajoute que le requérant fait également v a loir qu’il aurait été soumis à la torture lors des arrestations. Les autorités l’auraient ligoté et battu. Or, d’après l’État partie, les médecins suisses qui ont examiné le requérant et lui ont administré un traitement antituberculeux n’ont jamais fait état d’éventuelles séquelles dues à des actes de violence.

4.12 L’État partie explique qu’indépendamment de ces incohérences il sied de relever que les allégations du requérant relatives à l’arrestation du 3 janvier 1999 et au mandat d’arrêt sont peu crédibles. Lors de l’audition cantonale, le requérant a déclaré explicitement qu’après son arrestation à Colombo par le PLOTE, en février 1998, il aurait été libéré «à la condition de retourner immédiatement à Kilinochchi» en ajoutant que les membres du PLOTE «m’ont interdit de retourner à Colombo». En cas de retour à Colombo, le requérant aurait couru le risque d’être «détenu plus longtemps, sans être transféré au tribunal». Or, d’après l’État partie, force est d’admettre que ces affirmations sont peu crédibles au regard de l’arrestation par la police de Colombo le 3 janvier 1999, et surtout au regard de l’ordonnance du magistrat libérant le requérant à la condition qu’il se rende chaque samedi au Bureau du CID.

4.13. Enfin, l’État partie estime que les explications du requérant concernant les modalités de son départ du Sri Lanka sont pour le moins sujette à caution. Le requérant n’explique pas, en particulier, comment il a pu quitter ce pays à partir de l’aéroport de Colombo bien que recherché par la police. Selon l’État partie, les contrôles de sécurité extrêmement sévères qui sont opérés à cet aéroport n’auraient en effet en aucun cas permis au requérant d’être enregistré sur le vol et de passer les contrôles de police et de frontières. L’État partie considère qu’il est peu probable qu’il ait pu, comme il l’affirme, recourir aux services d’un passeur, lequel lui aurait interdit de parler avec les douaniers et aurait promis d’intervenir en cas de questions. Selon l’État partie, les faits démontrent au contraire qu’il n’y a aucun élément permettant d’admettre que le requ é rant était recherché au moment de son départ, le 24 ou le 25 mars 1999.

4.14 L’État partie conclut que l’on peut raisonnablement douter que le requérant soit r e cherché par les autorités sri ‑lankaises. Il est également peu vraisemblable que ce dernier serait exposé à un risque d’arrestation en cas de retour dans son pays. Mais, selon l’État partie, même s’il existait, ce risque «ne suff i rait pas à conclure qu’il y a des motifs sérieux de croire qu’il risquerait d’être soumis à la torture (comm u nications n o 157/1996 et n o  65/1997).

4.15 Relativement aux motifs de santé invoqués par le requérant, l’État partie rappelle que la Commission en a tenu compte. En se basant sur deux certificats médicaux, elle a conclu que l’essentiel du traitement a n tituberculeux était terminé et que le requérant ne souffrait plus d’une affection susceptible de mettre en da n ger sa vie ou sa santé. D’après l’État partie, le nouveau certificat médical du 6 janvier 2000, sur lequel le requérant s’appuie, ne fait que confirmer cette conclusion. Les chirurgiens consultés, après concertation, ont renoncé à pratiquer une opération de décortication chirurgicale. L’État partie ajoute que même si une inte r vention s’avérait nécessaire, ce qui n’est pas le cas actuellement selon ledit certificat, elle serait possible à Colombo. D’après l’État partie, il en va de même de la surveillance de l’état de santé du requérant et du su i vi médical qu’il pourrait nécessiter. L’État partie déclare que c’est donc à juste titre que la Commission a estimé que la situation médicale à Colombo devait être considérée comme bonne et permettre, au besoin, d’apporter les soins nécessaires au requérant.

4.16 À la lumière des développements qui précèdent, l’État partie conclut que rien n’indique qu’il existe des motifs sérieux de craindre que le requérant serait exposé concrètement et personnellement à la torture à son retour à Sri Lanka. D’après l’État partie, les allégations du requérant ne permettent pas non plus de considérer que son renvoi au Sri Lanka l’exposerait à un risque réel, concret et personnel d’être torturé.

Commentaires du requérant sur les observations de l’État partie

5.1 Le requérant rappelle que les contradictions et incohérences figurant dans ses allégations dont se prévaut le Gouvernement suisse pour confirmer la décision de la Commission suisse de recours en matière d’asile doivent être examinées dans le cadre du contexte dans lequel il a été entendu par les autorités suisses après son arrivée. À cet effet, le requérant déclare qu’il était gravement malade, atteint de tuberculose, et que c’est dans cet état fortement affaibli qu’il a dû répondre à toutes les questions des autorités suisses. Le requérant affirme qu’il est évident que, dans un tel état, certains détails aient pu être oubliés ou imparfait e ment expliqués, et que d’ailleurs, six semaines après son arrivée, il devait être hospitalisé durant trois s e maines.

5.2 Le requérant conteste ensuite les arguments de l’Office fédéral des réfugiés selon lesquels sa fuite de Sri Lanka était irréaliste et déclare que l’appel à un passeur était précisément destiné à éviter les contrôles policiers et douaniers de l’aéroport de Colombo.

Délibérations du Comité

6.1 Avant d’examiner une plainte contenue dans une requête, le Comité contre la torture doit décider si elle est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’alinéa  a du paragraphe 5 de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée et n’est pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement. Dans le cas d’espèce, le Comité note aussi que tous les recours internes sont épuisés; et que l’État partie n’a pas contesté la recevabilité. Il estime donc que la communication est rec e vable. L’État pa r tie et le requérant ayant chacun formulé des observations sur le fond de la communication, le Comité pr o cède à l’examen quant au fond.

6.2 Le Comité doit se prononcer sur le point de savoir si le renvoi du requérant vers Sri Lanka violerait l’obligation de l’État partie, en vertu de l’article 3 de la Convention, de ne pas expulser ou refouler une pe r sonne vers un État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture.

6.3 Le Comité doit décider, comme le prévoit le paragraphe 1 de l’article 3, s’il existe des motifs sérieux de croire que le requérant risquerait d’être soumis à la torture s’il était renvoyé à Sri Lanka. Pour prendre cette décision, le Comité doit tenir compte de toutes les considérations pertinentes, conformément au par a graphe 2 de l’article 3, y compris l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme graves, flagrantes ou massives. Toutefois, le but de cette analyse est de déterminer si l’intéressé risquerait personnellement d’être soumis à la torture dans le pays où il serait renvoyé. Il s’ensuit que l’existence, dans un pays, d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme graves, flagra n tes ou massives ne constitue pas en soi une raison suffisante d’établir qu’une personne donnée serait en danger d’être soumise à la torture à son retour dans ce pays. Il doit exister d’autres motifs qui donnent à penser que l’intéressé serait personnellement en danger. Pareillement, l’absence d’un ensemble de violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme ne signifie pas qu’une personne ne puisse pas être so u mise à la torture dans la situation particulière qui est la sienne.

6.4 Le Comité rappelle que son Observation générale sur l’application de l’article 3, qui se lit comme suit: «Étant donné que l’État partie et le Comité sont tenus de déterminer s’il y a des motifs sérieux de croire que l’auteur risque d’être soumis à la torture s’il est expulsé, refoulé ou extradé, l’existence d’un tel risque doit être appréciée selon des éléments qui ne se limitent pas à de simples supputations ou soupçons. En tout état de cause, il n’est pas nécessaire de montrer que le risque couru est hautement probable.» (A/53/44, annexe IX, par. 229.)

6.5 Dans le cas d’espèce, le Comité note que l’État partie fait état d’incohérences et de contradictions dans les récits du requérant permettant de douter de la véracité de ses allégations. Il prend également acte des explications fournies par le Conseil à cet égard.

6.6 Le Comité note qu’il n’est pas clairement établi que le requérant soit recherché par la police ou le CID sri ‑lankais et que le document de la police de Colombo qu’il a fourni comme preuve soit authentique, étant au demeurant précisé qu’il est surprenant que ce document en date du 23 août 1999 n’ait jamais été présenté devant les instances suisses, y compris lors de la demande du requérant le 20 janvier 2000 de pr o rogation de son délai de départ.

6.7 Le Comité estime en outre que les allégations du requérant selon lesquelles il aurait été soumis à la torture à Sri Lanka ne sont pas suffisamment étayées et, en particulier, ne sont pas corroborées par des él é ments médicaux alors même que le requérant a fait l’objet d’un suivi médical en Suisse peu de temps après son arrivée.

6.8 Le Comité est conscient de la gravité de la situation des droits de l’homme à Sri Lanka y compris des rapports relatifs à des allégations de torture. Il rappelle toutefois que, pour que l’article 3 de la Convention s’applique, il doit exister pour la personne concernée un risque prévisible, réel et personnel d’être soumise à la torture dans le pays vers lequel elle est refoulée. Sur la base des considérations qui précèdent, le Comité est d’avis que ce risque n’est pas établi.

7. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, estime que le renvoi du requérant à Sri Lanka ne ferait apparaître aucune violation par l’État partie de l’article 3 de la Convention.

6. Requête n o 162/2000

Présentée par: Y. H. A (nom supprimé)

[représenté par un conseil]

Au nom de : Le requérant

État partie : Australie

Date de la requête : 14 avril 2000

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 23 novembre 2001,

Ayan achevé l’examen de la requête n o  162/2000, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1. Le requérant est M. Y. H. A., de nationalité somalienne, appartenant au clan Shikal qui est actue l lement interné dans un centre de détention en Nouvelle ‑Galles du Sud, et a demandé à être admis au bén é fice du statut de réfugié en Australie. Il affirme que le renvoyer contre son gré en Somalie constituerait une violation par l’Australie de l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est représenté par un conseil.

1.2 Le 20 avril 2000, le Comité a transmis la requête à l’État partie pour observations et lui a demandé, en application du paragraphe 9 de l’article 108 du règlement intérieur, de ne pas expulser l’auteur tant que sa communication serait en cours d’examen par le Comité. L’État partie a accédé à cette demande.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le requérant est né le 1 er  janvier 1967 à Mogadishu. Il a un fils; au moment où le requérant a saisi le Refugee Review Tribunal (RRT), ce fils vivait au Kenya chez son grand ‑père paternel. La mère du requ é rant est morte et il a quatre frères et sœurs, dont trois vivent au Kenya et un en Hollande.

2.2 De 1980 à 1987, M. Y. H. A. a habité avec sa famille dans le nord-est de la Som a lie, à Galkayo, où il a suivi une formation théorique et pratique à la mécanique. Sa famille est par la suite rentrée à Mogadi s hu, où le requérant a travaillé comme commerçant de 1989 à 1991.

2.3 M. Y. H. A. a quitté la Somalie en 1991 parce que son père, qui avait été policier sous le régime Syad Barré, était recherché par la milice de l’United Somali Congress (USC). Au début de 1991, des me m bres de cette milice ont fait irruption chez le requérant et tué sa sœur après l’avoir violée. Le requérant s’est réfugié au Kenya, où il a vécu du début de 1991 à la fin de 1992 puis un certain temps en 1994. Pendant son séjour au Kenya, il a été employé dans un restaurant.

2.4 En 1992, le requérant a décidé de rentrer en Somalie car l’appartenance de sa femme au même clan (Hawiye) que les miliciens de l’USC lui assurait une certaine protection. De 1992 à 1994, il a été employé par l’Opération des Nations Unies en Somalie (ONUSOM) à Mogadishu, comme informateur chargé de r e cueillir des renseignements sur la localisation des caches d’armes. L’USC ayant découvert que le requérant renseignait l’ONUSOM, le 3 octobre 1993 des membres de sa milice ont abattu sa femme et lui ont tiré de s sus, le blessant au rein.

2.5 En 1994, des miliciens de l’USC ont tiré sur le requérant le blessant à l’épaule et tué sa belle ‑sœur alors qu’ils se trouvaient chez son beau ‑père. Ce dernier appartenant au clan Hawiye, il est parvenu à arrêter la tuerie mais il a dit ensuite à M. Y. H. A. qu’il ne pouvait plus le protéger, il l’a conduit à l’aéroport d’où il a pris un avion pour le Kenya avec son fils.

2.6 Le requérant a séjourné illégalement au Kenya jusqu’en 1997 avant de se rendre en Zambie puis en Afrique du Sud, où il a acheté un passeport indiquant une fausse identité, qu’il a utilisé pour embarquer à destination de l’Australie. Il est arrivé en Australie le 16 juillet 1998 dépourvu de papiers. Le 28 juillet 1998, il a sollicité le statut de réfugié (visa de protection) auprès du Département australien de l’immigration et des affaires multiculturelles (DIMA). Le 21 août 1998, sa demande a été rejetée. Le requ é rant a contesté cette décision devant le RRT qui a confirmé la décision de ne pas lui accorder de visa de pr o tection.

2.7 Le RRT a émis des doutes quant à la véracité des dires de l’auteur sans pour autant en conclure que les événements relatés par lui ne s’étaient pas produits. Cet organe a estimé que le requérant pouvait rentrer en Somalie et s’y installer ailleurs qu’à Mogadishu, à Galkayo dans le nord ‑est du pays. Le RRT a rendu sa décision en ayant connaissance des informations de sources indépendantes indiquant que dans le nord ‑est et le nord ‑ouest de la Somalie les factions n’acceptaient pas les personnes rapatriées contre leur gré; il a également noté que le requérant ne souhaitait pas rentrer où que ce soit en Somalie, même à Galkayo. Le RRT a néanmoins estimé que ces éléments ne suffisaient pas à faire de lui un réfugié.

2.8 Le requérant a contesté la décision du RRT par la voie judiciaire auprès de la Cour fédérale d’Australie. Le 10 septembre 1999, la Cour fédérale l’a débouté et il a alors inte r jeté appel devant la Cour fédérale plénière de l’Australie. Le 10 mars 2000, la Cour féd é rale plénière a rejeté cet appel. L’auteur a alors sollicité l’autorisation spéciale de contester la décision de la Cour fédérale plénière devant la Haute Cour d’Australie. Le conseil ind i que qu’il s’agit de la juridiction de dernier ressort en Australie.

2.9 Selon le requérant, la Somalie reste un non-État sur le territoire duquel se produit un ensemble de violations systématiques et flagrantes des droits de l’homme a . Il affirme que la situation du clan Shikal en Somalie est bien connue. Amnesty International décrit le clan Shikal comme la cible de graves atteintes, notamment d’exécutions arbitraires et s’est prononcée contre le renvoi de tout membre du clan Shikal en Somalie. Le requérant fait valoir que les circonstances de cette affaire sont analogues à celles de l’affaire Elmi  c. Australie b , dans laquelle le Comité a conclu à une violation de l’article 3 de la Convention. Le r e quérant se réfère également aux organismes compétents des Nations Unies qui ont indiqué clairement être opposés au rapatriement contre leur gré des demandeurs d’asile somaliens déboutés c .

Teneur de la requête

3. Le requérant affirme qu’eu égard aux agressions dont il a été antérieurement victime de la part de l’USC, il existe des motifs sérieux de croire qu’il risque d’être soumis à la torture en cas de retour en Som a lie et, en conséquence, que l’Australie violerait l’article 3 de la Convention si elle l’y rapatriait. Le requ é rant fait valoir que, selon des sources respectées, il existe en Somalie «un ensemble de violations systémat i ques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives» et il renvoie sur ce point au paragraphe 2 de l’article 3 de la Convention. Le requérant affirme qu’il encourrait personnellement le risque d’être soumis à la torture en cas de retour en Somalie. Il précise que son clan est minoritaire et serait donc dans l’incapacité de le protéger.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond

4.1 L’État partie considère que la Convention ne s’applique pas aux faits décrits par le requérant et que la requête est donc irrecevable ratione materiae . En particulier, l’État partie soutient que le traitement que le requérant risque ou non de subir en cas de retour en Somalie n’entre pas dans le champ de la définition de la torture donnée dans l’article premier de la Convention. Il souligne que pour entrer dans la catégorie «to r ture » , les actes visés doivent se traduire par «une douleur et des souffrances aiguës, physiques ou ment a les». L’État partie estime que même si les événements passés peuvent être indicatifs de l’avenir, les inc i dents passés décrits ne permettent pas d’affirmer qu’il est prévisible que le requérant sera soumis à la to r ture en cas de retour à Mogadishu. L’État partie admet que la situation politique en Somalie est susceptible de se traduire par des violations des droits fondamentaux du requérant mais fait valoir que ces violations ne prendraient pas nécessairement la forme d’actes du type visé à l’article premier de la Convention.

4.2 L’État partie note que le requérant considère que les membres de l’United Somali Congress (USC) constituent un risque pour lui et qu’il serait en danger pour avoir dans le passé été employé comme inform a teur par l’Opération des Nations Unies en Somalie (ONUSOM) sans toutefois affirmer qu’il courrait le ri s que ou le danger d’être victime d’actes du type de ceux prohibés par la Convention. Dans les documents soumis au RRT, le requérant affirmait courir le risque d’être attaqué par des membres du clan Hawiye vo u lant lui extorquer de l’argent destiné à soutenir la milice de l’USC. Or les menaces aux fins d’extorsion n’entrent pas dans le champ de la définition donnée à l’article premier de la Convention.

4.3 L’État partie fait observer que le requérant n’a pas produit d’éléments probants établissant que le risque d’être torturé par l’USC était supérieur au risque auquel tout résident de Mogadishu est confronté de se trouver pris au milieu d’un affrontement entre factions armées. L’État partie souligne que lors des proc é dures d’examen interne des doutes sérieux ont été émis quant à la véracité du récit des événements fait par le requérant, en particulier les contradictions concernant l’incident au cours duquel sa femme aurait été tuée et lui ‑même blessé. Selon l’État partie, lors de l’entretien initial à l’aéroport, le requérant n’a pu fournir de renseignements détaillés à l’appui de l’affirmation selon laquelle sa sœur avait été violée puis tuée en 1991 et sa belle ‑sœur tuée en 1991 lors d’une fusillade au cours de laquelle lui ‑même aurait été blessé. Le requ é rant avait indiqué à l’origine n’avoir jamais quitté la Somalie avant d’admettre ultérieurement en être sorti une première fois en 1991. Dans une déclaration solennelle faite au RRT le 2 septembre 1998, il a reconnu avoir fait un certain nombre de fausses déclarations à son arrivée à Sydney. L’État partie indique en outre que le RRT n’a pas jugé plausible que l’ONUSOM ait recruté une personne s’étant absentée du pays pe n dant un certain temps afin de localiser des caches d’armes à Mogadishu. L’État partie signale de plus que le RRT a découvert que le requérant avait tenté de l’empêcher de mener son enquête auprès de personnes dét e nant des renseignements de première main sur sa situation depuis 1991.

4.4 L’État partie fait en outre valoir que les actes dont le requérant craint d’être victime en cas de retour en Somalie n’entrent pas dans la définition de la «torture» au sens de l’article premier de la Convention en ce qu’ils ne seraient pas le fait d’un agent de la fon c tion publique ou de toute autre personne agissant à titre officiel. L’État partie reconnaît que «les membres de groupes minoritaires font l’objet d’actes de harcèl e ment et d’intimidation ainsi que de mauvais traitements de la part d’hommes armés appartenant à différe n tes factions» d mais fait valoir que ces actes ne sont pas commis par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite, et ne sont dès lors pas couverts par l’article pr e mier de la Convention. L’État partie estime que ces actes sont commis par des particuliers à titre privé et sont motivés par la recherche d’un gain personnel e .

4.5 L’État partie mentionne les constatations du Comité adoptées le 14 mai 1996 dans l’affaire Elmi c. Australie f (n o 120/1998) et souligne, tout en reconnaissant que dans plusieurs régions de Somalie certains clans fonctionnent comme des institutions quasi gouvernementales, qu’à l’évidence une distinction nette doit être établie avec les actes de violence aveugle perpétrés par des individus agissant à titre privé. Rien ne donne à penser que tous les membres d’un clan dominant agissent en tout temps en une capacité quasi gouvernementale. Il est également difficile de déterminer si les milices agissent à tout moment sur ordre spéc i fique puisque «les forces de sécurité ne sont pas fiables, sont mal payées, mal formées aux opérations de paix et souvent échappent à tout contrôle» g . À l’appui de son argumentation en faveur de la nécessité d’établir si des actes sont accomplis à titre officiel ou privé afin de déterminer si lesdits actes entrent dans le champ de la définition de la torture, l’État partie cite les opinions d’universitaires ainsi que les vues de jur i dictions internationales et nationales.

4.6 L’État partie soutient de plus qu’aucun élément probant ne donne à penser que les actes mentionnés par le requérant se soient produits suite à une décision émanant de la hiérarchie du clan ou sur ordre des dirigeants de l’USC. Aucun élément probant ne donne davantage à penser que les actes mentionnés aient été commis à l’instigation du clan ou de la milice ou que le clan ou la milice aient approuvé ces actes ou en aient eu la moindre connaissance. À l’appui de cet argument, l’État partie relève que le viol et le meurtre de la sœur du requérant qui auraient été commis à l’instigation de l’USC à la recherche de membres des forces de police du précédent régime – dont le père du requérant – sont incompatibles avec les conclusions form u lées par une mission d’évaluation s’étant rendue à Mogadishu en 1991 h . L’État partie estime cet incident probablement davantage imputable au climat général de violence qui régnait alors à Mogadishu qu’aux a c tes d’individus ayant reçu instruction de la direction de l’USC de torturer et de tuer les familles d’anciens membres de l’administration Barré.

4.7 Au sujet du meurtre de sa femme et de l’agression contre lui ‑même, l’État partie souligne que le requérant a donné deux versions de ces incidents. Dans un premier temps, il a affirmé que son domicile avait été atteint par un projectile au cours d’un accrochage entre les forces d’Aïdid (USC) et celles de l’ONUSOM. Ultérieurement il a déclaré que l’attaque contre son domicile faisait suite à des conversations antérieures avec des membres du clan Hawiye concernant le poste occupé par son père du temps du régime Barré, à l’occasion desquelles des membres du clan Hawiye avaient dit vouloir sa maison. Au cas où cette seconde version des événements serait exacte, l’individu en question ne semble pas avoir agi à titre officiel. De plus, le requérant ne dit pas que sa femme ou son beau ‑père ont indiqué que les miliciens en cause étaient des dirigeants du clan ou étaient investis d’une autorité en son sein alors que tous deux appartenaient à ce même clan.

4.8 En ce qui concerne l’incident au domicile du beau ‑père du requérant, au cours d u quel ce dernier aurait été blessé et sa belle ‑sœur tuée, tous deux par balle, l’État partie so u ligne que même s’il est probable que des membres de la milice de l’USC ont reçu pour o r dre de procéder à des arrestations, de torturer ou de tuer des informateurs de l’ONUSOM à l’époque, aucun élément n’explique pourquoi la belle ‑sœur du requ é rant avait été tuée, alors qu’elle ne travaillait sans doute pas pour l’ONUSOM, tandis que le requérant n’avait été que blessé. Si les miliciens de l’USC avaient agi à titre officiel, ils n’auraient pas tenu compte des protestations du beau ‑père du requérant à moins qu’il n’ait occupé un poste d’autorité à l’USC ou dans le clan Hawiye. Aucun élément n’indique que tel était le cas.

5.1 Quant au fond, l’État partie fait valoir qu’aucun élément probant n’indique qu’en cas de renvoi en Somalie, le requérant courrait le risque d’être torturé par des agents du Gouvernement à cause du poste o c cupé par son père sous le régime de Syad Barré ou du fait de l’emploi du requérant par l’ONUSOM i . L’État partie indique que les informations en sa possession font ressortir que le nouveau Gouvernement somalien, constitué en re s pectant rigoureusement les clivages entre clans, est dirigé par un président de transition qui a été ministre sous le régime Syad Barré j . Le Président a nommé Premier Ministre un ancien membre du Gouvernement Barré ayant été ministre de l’industrie entre 1980 et 1982. L’Assemblée nationale de transition se compose de 245 membres, dont des repr é sentants tant des clans minoritaires que des clans dominants de la Somalie, et compte en outre actuellement trois représentants Shikal qui occupent des sièges du contingent attr i bué au clan Hawiye. Ces représentants ont du reste eux aussi été étroitement impliqués dans le régime Syad Barré. Le fait que le Président et le Premier Ministre du Gouvern e ment nouvellement mis en place aient été ministres du temps de Syad Barré montre que les hauts fonctionnaires de l’ancien régime ne sont plus visés, même s’ils ont pu l’être tout de suite après sa chute.

5.2 L’État partie fait par ailleurs référence à l’allocution prononcée devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 19 septembre 2000 par le Président de transition, dans laquelle il exprimait sa profonde reconnaissance à l’ONU pour le rôle louable qu’elle avait joué dans les efforts visant à atténuer les sou f frances du peuple somalien, ces 10 dernières années et signalait la création récente de l’Assemblée nationale de la Somalie, qui marquait le début d’une ère nouvelle, de paix et de stabilité.

5.3 Sans contester que le requérant, sa femme, sa sœur et sa belle ‑sœur aient pu être victimes des agre s sions alléguées, qu’il ait pu à cette époque et tout de suite après se sentir particulièrement exposé à un ri s que d’attaque par la milice de l’USC et que la crainte ait pu le pousser à fuir la Somalie, l’État partie estime qu’aucun élément n’indique que l’auteur serait maintenant menacé par l’une des deux factions de l’USC. Sur ce point, l’État partie ajoute que le chef de l’une des deux factions est membre de l’Assemblée nationale de transition récemment mise en place et a apporté son appui au nouveau Président.

5.4 S’agissant de la crainte exprimée par le requérant d’être torturé du fait de l’activité qu’il a exercée pour l’ONUSOM, l’État partie soutient qu’aucun élément probant n’indique qu’il a occupé une position d’importance ou a été notoirement employé par l’ONUSOM ou a contribué directement à la réalisation des buts de l’ONUSOM. Aucun élément non plus n’indique de manière probante que les ex ‑employés de l’ONUSOM courent un risque du fait de l’une des deux factions de l’USC. Au demeurant, aucun registre central n’ayant été tenu en Somalie depuis près d’une décennie, il est difficile de concevoir comment des membres du l’USC pourraient être au courant de la fonction assumée par le requérant pour l’ONUSOM, à moins qu’il ne l’avoue de lui ‑même.

5.5 Pour ce qui est de l’affirmation selon laquelle le requérant appartient à un clan minoritaire incap a ble d’assurer sa protection où que ce soit en Somalie, l’État partie fait observer que lors de l’audience du Refugee Review Tribunal le requérant n’a pas indiqué dans sa déposition craindre d’être soumis à la torture à cause de son appartenance au clan Shikal. En revanche, il a indiqué que son clan n’était pas à même de le protéger et qu’il risquait d’être attaqué par des membres du clan Hawiye voulant lui extorquer de l’argent pour financer la milice de l’USC. Selon l’État partie, rien de cela ne montre que le requérant serait perso n nellement exposé à un risque du fait de son appartenance au clan Shikal.

5.6 L’État partie admet qu’il y a eu un ensemble de violations systématiques des droits de l'homme, graves, flagrantes ou massives en Somalie, en général, et que les membres des petits clans non alignés et non armés comme le clan Shikal ont été plus vulnérables aux violations des droits de l’homme que les membres des clans plus importants. La violence et les bouleversements persistent mais c’est l’intégralité de la population qui est exposée à un risque, ce risque étant particulièrement élevé à Mogadishu et dans le sud de la Somalie. Cet état de fait ne prouve pas que le requérant lui ‑même court personnellement le risque d’être torturé. L’État partie constate que la situation demeure tendue même si le niveau de violence a dim i nué depuis l’élection du Gouvernement de transition. Ce dernier a intégré de nombreux miliciens dans la force de police nationale. Certains chefs de faction de M o gadishu ont certes refusé de reconnaître le Go u vernement de transition, mais le sous ‑clan Habr-Gadir du clan Hawiye soutient le Président de transition. Les chefs de faction du sud de Mogadishu appartiennent au sous ‑clan Habr-Gadir, comme le Président de transition.

5.7 L’État partie souligne que les procédures d’examen interne ont fait apparaître que même si le requ é rant courait le risque d’être torturé en cas de retour à Mogadishu, il lui resterait la possibilité de s’installer à Galkayo (dans le nord ‑est de la Somalie), où il a résidé relativement longtemps dans le passé et a acquis des compétences. Les procédures d’examen interne ont en outre fait apparaître que les autorités de cette région acceptaient les membres d’autres clans, que la région était encore relativement stable et que l’auteur bénéf i cierait d’une protection appréciable contre toutes les éventualités qu’il affirme craindre. Ni la milice de l’USC ni ses factions n’opèrent dans cette zone, qui est sous le contrôle du Somali Salvation Democratic Front (SSDF). Dans les rapports de deux missions effectuées dans cette région, il est indiqué que le nord ‑est de la Somalie est un îlot de paix et de stabilité relatives, où les membres de tous les clans somaliens sont bien accueillis.

5.8 L’État partie fait observer que la constatation faite dans le cadre des procédures d’examen interne au sujet de la possibilité pour le requérant de se réinstaller à Galkayo a été formulée avant la constitution du Gouvernement central somalien à présent en place à Mogadishu. L’État partie note que le requérant s’est dit peu enclin à retourner dans cette zone du pays mais que face à la nouvelle situation politique régnant dans le pays, décrite plus haut au paragraphe 5.1, il n’est à présent guère probable qu’il ait la moindre raison de juger nécessaire de s’installer à Galkayo plutôt qu’à Mogadishu.

Commentaires du requérant sur les observations de l’État partie

6.1 En réponse à l’État partie, le requérant réaffirme qu’il risque d’être torturé à cause de son appart e nance au clan minoritaire Shikal et qu’il est donc particulièrement vulnérable à la situation de non ‑droit r é gnant dans l’ensemble de la Somalie. Il souligne que le RRT a admis que le requérant était vulnérable tout en rejetant sa demande du fait de l’absence de lien entre le danger auquel il était confronté et son appart e nance clanique. Il fait observer que l’existence d’un tel lien n’est pas requise aux termes de la Convention contre la torture.

6.2 Pour ce qui a trait aux actes de torture commis par des acteurs dits «non étatiques» ou «quasi état i ques», il est avancé que le Comité devrait adopter une conception large du champ de la responsabilité de l’État. À ce sujet, le requérant renvoie à la jurisprudence relative à l’application de la Convention eur o péenne des droits de l’homme. De l’avis du requérant, il n’est pas nécessaire que les personnes commettant des actes de torture soient à un titre ou à un autre habilitées ou autorisées à le faire par un quelconque organe comp é tent. L’article premier de la Convention contre la torture inclut dans le champ de la respo n sabilité pour acte de torture l’acquiescement de la personne responsable. En outre, le r e quérant fait valoir que, comme il a été reconnu dans l’affaire Elmi c. Australie , là où l’autorité gouvernementale a cessé de s’exercer, des groupes privés pratiquant la torture agissent effectivement «à titre officiel» dans la zone en question et que la protection de l’article 3 doit donc s’appliquer.

6.3 Le requérant constate que les récentes initiatives de paix n’ont pas mis un terme au conflit en Somalie. Dans son rapport le plus récent sur la situation des droits de l’homme en Somalie, la Rapporteuse spéciale de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies relève que Mogadishu reste divisée en fiefs sous contrôle du Gouvernement national de transition et de divers chefs de factions. Le requérant note en outre que les affrontements entre factions font souvent des victimes parmi les civils et des dégâts matériels et souligne que de tels incidents montrent à quel point la ville est devenue une zone de non ‑droit. Il fait valoir que, en tant que membre d’un clan vulnérable, il est exposé à un risque particulier dans un tel environnement. Même s’il était renvoyé dans le nord ‑est, comme l’a proposé l’État partie, il lui faudrait transiter par Mogadishu et il se trouverait ainsi en danger.

6.4 Enfin, le requérant ajoute qu’il ne devrait en aucun cas être renvoyé contre son gré à Galkayo pui s que les documents examinés par le RRT faisaient apparaître que les personnes rapatriées contre leur gré n’étaient pas acceptées dans cette partie de la Somalie. En tout état de cause, l’appartenance du requérant au clan Shikal fait qu’il est tout aussi vulnérable dans le nord ‑est de la Somalie puisque, comme il est égal e ment constaté dans le rapport de la Commission des droits de l’homme, des combats sérieux se poursuivent dans le nord ‑est de la Somalie, en particulier autour de Galkayo.

Délibérations du Comité

7.1 Avant d’examiner toute plainte contenue dans une requête, le Comité contre la torture doit déterm i ner si elle est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. À cette fin, le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même que s tion n’a pas été examinée et n’est pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement. Le Comité note aussi que l’État partie ne conteste pas que tous les recours internes aient été épuisés. Il note aussi que, de l’avis de l’État partie, la communication doit être déclarée irrecevable r a tione materiae parce que la Convention n’est pas applicable aux faits allégués, le traitement auquel le requ é rant risque ou non d’être exposé en cas de renvoi en Somalie ne revenant pas de façon prévisible ou nécessaire à la torture au sens de la définition donnée dans l’article premier de la Convention, et parce que ces actes ne seraient de toute façon pas infligés par – ou à l’instigation ou avec le consentement ou l’accord d’ – un agent public ou une personne agissant à titre officiel. Le Comité estime toutefois que l’exception d’irrecevabilité ratione materiae invoquée par l’État partie soulève une question ne pouvant être traitée au stade de la décision concernant la recevabilité. Étant donné que le Comité ne voit pas d’autre obstacle à la recevabilité, il déclare la communication recevable.

7.2 Le Comité doit déterminer si le renvoi du requérant en Somalie violerait l’obligation qui incombe à l’État partie, en vertu du paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, de ne pas expulser ni refouler une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture. Pour ce faire, le Comité doit tenir compte de toutes les considérations pertinentes, y compris l’existence, dans l’État concerné, d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives. Il s’agit toutefois de déterminer si l’intéressé risquerait personne l lement d’être soumis à la torture dans le pays où il serait renvoyé. En conséquence, l’existence d’un ensemble de violations systém a tiques, flagrantes ou massives des droits de l’homme dans un pays ne constitue pas en soi un motif suffisant pour conclure qu’un individu risquerait d’être victime de torture à son retour dans ce pays. Il doit exister des motifs supplémentaires de penser que l’intéressé serait personnellement en danger. Inve r sement, l’absence d’un ensemble systématique de violations flagrantes des droits de l’homme ne signifie pas qu’une personne ne risque pas d’être soumise à la torture dans la situation particulière qui est la sienne.

7.3 Le Comité note que le requérant affirme qu’il risque effectivement d’être torturé en cas de renvoi en Somalie parce que son père a été fonctionnaire de police sous le précédent régime, parce qu’il a été lui-même employé par l’ONUSOM et parce qu’il est vulnérable en raison de son appartenance au clan Shikal. À l’appui de sa demande, il fait état d’actes de torture commis dans le passé à son encontre et à l’encontre de sa famille. Le Comité constate que l’État partie ne nie pas que de tels incidents aient pu se produire mais objecte que le requérant n’a pas fait preuve de cohérence dans son récit des événements et que les attaques mentionnées étaient probablement davantage imputables au climat général de violence régnant à Mogadishu à l’époque qu’à une tentative délibérée visant le requérant pour les raisons avancées par lui. Le Comité constate également que le requérant n’a pas expliqué les incohérences que présente son récit des attaques en question, ce qui amène le Comité à douter de la crédibilité de l’auteur.

7.4 En outre, le Comité rappelle que même s’il était établi que l’auteur a été victime de torture dans le passé, il doit déterminer si le requérant risque d’être soumis à la torture maintenant en cas de renvoi en Somalie. Vu la composition du Gouvernement de transition nouvellement mis en place, dont font partie des membres du clan Shikal lui ‑même, le Comité est d’avis que l’auteur ne courrait pas maintenant un tel risque. Compte tenu de ce qui précède et tout en ayant conscience des violations massives des droits de l’homme qui se produisent en Somalie, le Comité estime que le requérant n’a pas montré qu’il courait rée l lement et personnellement un risque prévisible d’être soumis à la torture au sens de l’article 3 de la Conve n tion.

8. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, estime que le renvoi du requérant en Somalie par l’État partie ne constituerait pas une violation de l’article 3 de la Convention.

7. Requête n o 164/2002

Présentée par : L. M. T. D. (nom supprimé)

Au nom de : La requérante

État partie : Suède

Date de la requête : 22 mars 2000

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 15 mai 2002,

Ayan achevé l’examen de la requête n o  164/2000, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par la requérante et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 La requérante est L. M. T. D, de nationalité vénézuélienne, qui réside actuellement en Suède. Elle affirme que son renvoi au Venezuela à la suite du rejet de sa demande d’asile politique constituerait une vi o lation par la Suède de l’article 3 de la Convention. Elle est représentée par un conseil.

Rappel des faits présentés par la requérante

2.1 La requérante a occupé la charge de procureur des mineurs, qui relève du parquet général de la R é publique ( Fiscalía General ) de 1988 à 1997. Elle était notamment chargée de régulariser l’inscription des enfants sur les registres de l’état civil afin que les enfants puissent obtenir ensuite leur carte d’identité. Cette procédure était soumise à l’autorisation préalable d’une juridiction civile.

2.2 En 1995, la requérante a découvert que quelques citoyens d’origine chinoise avaient obtenu des cartes d’identité et des passeports vénézuéliens en présentant de faux doc u ments comme des copies de jugements et de publications judiciaires, qui portaient la s i gnature et le cachet de la requérante elle ‑même, en plus du cachet du tribunal civil. La r e quérante a informé le  Fiscal General de la République de ces irrégul a rités afin que celui ‑ci ouvre une enquête pour déterminer qui était responsable de la falsification. Le 22 février 1995, la requérante a déposé une plainte devant la quinzième juridiction pénale de première in s tance de Caracas. En 1996, elle a demandé une vérification personnelle du juge ou une perquisition à l’Office national d’identification ( Oficina Nacional de Identif i cación – ONI) ainsi qu’aux archives de la Direction des étrangers ( Dirección de Extranj e ría – DEX) où elle avait découvert la fraude. L’inspection n’a jamais eu lieu parce que, d’après la requérante, les directeurs des deux organismes étaient liés avec le parti politique Convergencia , lequel recevait de fortes sommes d’argent pour que des personnes d’origine ch i noise puissent avoir la nationalité vénézuélienne.

2.3 En mars 1997, la requérante a été démise de ses fonctions à la Fiscalía General sans aucun motif mais a malgré tout poursuivi l’enquête. À partir de ce moment ‑là elle a commencé à recevoir des menaces par téléphone et dans des lettres anonymes glissées sous sa porte. Sa fille a été victime d’une tentative d’enlèvement et son époux a été brutalement frappé à la tête et au dos à coups de crosse de pistolet. En o u tre, la requérante a été sommée de cesser l’enquête et d’arrêter de porter des accusations.

2.4 En août 1997, à la suite des incidents décrits, la requérante a quitté Caracas avec sa famille pour s’installer à Maracaibo. En décembre 1997, sa voiture a été volée puis retrouvée incendiée. De plus elle a été harcelée par téléphone, s’entendant dire que si elle portait encore des accusations, ce serait elle qui serait accusée d’avoir fait les faux documents. Ces deux faits l’ont conduite à partir avec sa famille pour aller à Maracay, en janvier 1998. C’est alors que la famille a décidé de vendre tous ses biens et de quitter le pays pour se rendre en Suède.

2.5 La requérante et sa famille ont déposé une demande d’asile politique en Suède le 19 mars 1998. Le service suédois de l’immigration a rejeté la demande le 24 août 1998, faisant valoir que les faits ne just i fiaient en aucune manière l’obtention du droit d’asile en Suède et qu’en outre la requérante aurait pu faire la preuve de son innocence par les voies légales. La requérante a attaqué la décision auprès de la Commission des étrangers, laquelle a confirmé la décision initiale le 3 mars 2000. Ensuite, elle a déposé une nouvelle requête auprès de la Commission des étrangers, qui l’a rejetée le 14 mars 2000.

Teneur de la requête

3. La requérante fait valoir qu’il existe des motifs suffisants de croire que si elle est renvoyée au V e nezuela elle continuera d’être victime de persécutions et qu’elle sera traduite en jugement pour avoir déno n cé des hommes politiques corrompus, dans un système juridique où il n’existe aucun moyen lui permettant de faire la preuve de son innocence dans l’affaire des faux. Elle ajoute que les forces de sécurité continuent de faire subir aux personnes arrêtées des tortures et des mauvais traitements psychiques et physiques et qu’elle risque d’être arrêtée, toutes choses qui constituent une violation de l’article 3 de la Convention.

Observations de l’État partie

4.1 Dans ses observations en date du 28 août 2000, l’État partie répond aux allégations de la requérante en ce qui concerne la recevabilité et le fond. Après un bref exposé de la législation suédoise en matière d’immigration, l’État partie explique que la requérante, née en 1958, est entrée en Suède avec son mari et ses enfants le 26 février 1998, en possession de passeports valables. Ils ont déposé une demande d’asile le 19 mars 1998 au motif qu’ils avaient été victimes de harcèlements à la suite d’un scandale lié à une affaire de corruption et qu’ils avaient peur de retourner au Venezuela. La demande a été rejetée le 24 août 1998 et la Commission des étrangers a rejeté leur recours le 3 mars 2000.

4.2 En ce qui concerne la recevabilité, l’État partie affirme que la requête devrait être déclarée irrec e vable ratione materiae parce que la requérante n’a pas apporté de motifs suffisants pour que sa demande soit compatible avec la Convention, conformément au paragraphe 2 de l’article 22. L’État partie dit que d’après la requérante, si elle retourne au Venezuela elle sera arrêtée, jugée et condamnée à un emprisonn e ment, sans bénéficier des garanties d’un procès équitable. Or, objecte l’État partie, même si la requérante invoque l’article 3 de la Convention, elle n’a pas dit spécifiquement qu’elle serait victime de torture si elle retournait au Venezuela. Au contraire, elle a déclaré au fonctionnaire du service de l’immigration, que la police ne pratiquait pas la torture, quand il l’a interrogée sur les conditions dans les prisons au Venezuela. L’État partie affirme que les faits éventuels que la requérante redoute n’entrent pas dans le cadre de la déf i nition de la torture donnée dans la Convention.

4.3 En ce qui concerne le fond, l’État partie distingue la situation générale des droits de l’homme au Venezuela et la situation personnelle de la requérante si elle retournait au Venezuela.

a) En ce qui concerne la situation générale des droits de l’homme au Venezuela, l’État partie objecte que, même si elle continue de ne pas être très bonne dans certaines régions, il n’y a pas de raison d’affirmer qu’elle révèle un ensemble systématique de violations graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme. Il rappelle à ce sujet que, s’il est vrai que les rapports concernant les violations des droits de l’homme au Venezuela, comme le rapport du Département d’État des États ‑Unis pour 1999, le rapport de Human Rights Watch pour 1999 et le rapport d’Amnesty International pour 2000 font état d’exécutions e x trajudiciaires de la part des membres de l’armée et de la police ainsi que d’une augmentation des cas de to r tures et de mauvais traitements infligés aux détenus, les femmes sont placées dans des centres de détention distincts, où les conditions sont meilleures que dans les prisons pour hommes. L’État partie affirme en outre que le Gouvernement Chávez a rétabli en février 1999 les articles de la Constitution garantissant l’interdiction de l’arrestation sans mandat ainsi que la liberté de déplacement. Enfin, l’État partie rappelle que les rapports mentionnés font état de tortures et indiquent que les forces de sécurité continuent de so u mettre les détenus à des tortures et mauvais traitements physiques et psychiques. Toutefois, bien que la s i tuation générale des droits de l’homme au Venezuela laisse beaucoup à désirer, en particulier en ce qui concerne les conditions carcérales, cela ne suffit pas à conclure qu’une personne renvoyée au Venezuela sera soumise à la torture.

b) Pour ce qui est de la situation personnelle de la requérante, l’État partie ra p pelle que, contrairement à de nombreuses autres personnes qui ont adressé des requêtes au Comité, la requérante n’a jamais appartenu à un parti ou une organisation politique. Sa plainte repose sur le fait qu’elle est soupço n née à tort d’être impliquée dans une affaire de corruption, ce qui pourrait lui valoir d’être condamnée à une peine de prison si elle retou r nait au Venezuela, et sur les mauvaises conditions carcérales. La requérante n’a pas fait valoir non plus qu’elle avait été torturée dans le passé et, plus important encore, elle n’a pas montré de façon claire pourquoi elle serait soumise à la torture si elle retournait au V e nezuela. L’État partie fait s a voir enfin que le Venezuela n’a pas demandé l’extradition de la requérante et ajoute qu’il n’existe aucun élément permettant de penser que les autorités vénézuéliennes ont l’intention de la mettre en prison. Au contraire, l’État partie a pu confirmer que le chef de l’ONI, principal suspect dans l’affaire de corruption, n’avait pas été arrêté.

4.4 L’État partie indique que le service national de l’immigration dans sa décision du 24 août 1998, comme la Commission des étrangers dans sa décision du 14 mars 2000, ont fait valoir qu’encourir le risque d’être jugé ou être l’objet de harcèlement ne constituait pas un motif pour obtenir l’asile en Suède. De plus, ils se sont assurés que si elle était traduite en jugement, la requérante bénéficierait de toutes les garanties d’un procès équitable et que de surcroît elle avait beaucoup de chance de gagner un éventuel procès. L’État partie ajoute qu’il n’a aucun doute sur l’authenticité du récit de la requérante au sujet de l’affaire de corru p tion et des harcèlements dont elle a fait l’objet ultérieurement. Toutefois, il estime que les arguments donnés par les deux organes sont fondés.

Commentaires de la requérante

5.1 Dans ses commentaires en date du 27 mars 2002, la requérante reconnaît que l’État partie ne met pas en doute ses déclarations concernant les faits mais doute qu’elle risque d’être soumise à la torture si elle retourne au Venezuela. Toutefois, elle explique qu’elle risque effectivement et incontestablement d’être j u gée et condamnée à une longue peine d’emprisonnement et par conséquent qu’il existe aussi pour elle le risque d’être soumise à la torture dans une prison vénézuélienne, en contravention des dispositions de l’article 3 de la Convention.

5.2 En ce qui concerne les arguments de l’État partie qui fait valoir que la requête devrait être déclarée irrecevable ratione materiae , la requérante explique que, quand elle a été démise de ses fonctions, elle a perdu la protection dont elle jouissait en tant que fonctionnaire et qu’elle est devenue la cible de harcèl e ments et de menaces de la part de l’ONI et de la DEX, qui lui disaient qu’elle allait être accusée de faux. La requérante fait valoir que, comme les menaces émanent de personnes qui occupent encore des postes polit i ques importants, il est tout à fait douteux que son procès puisse être équitable. Elle ajoute que les décisions des autorités de l’État partie à son égard ont été prises sur la foi d’informations fausses, puisqu’elles n’ont pas su faire la distinction entre le Fiscal General , d’une part, et la DEX et l’ONI, d’autre part, et qu’elles n’ont pas compris que le chef de l’ONI n’avait jamais été son supérieur hiérarchique. La requérante reco n naît également que devant les fonctionnaires du service national de l’immigration elle a bien dit que la to r ture n’était pas autorisée au Venezuela mais elle a expliqué qu’elle avait peur de la torture et des conditions dans les prisons vénézuéliennes.

5.3 En ce qui concerne l’argument de l’État partie sur le fond, la requérante affirme qu’elle avait des motifs sérieux de craindre pour sa sécurité et que l’argument de l’État partie qui affirme que les conditions générales dans un pays ne sont pas un motif suffisant pour apprécier le risque encouru par un individu d’être soumis à la torture s’il est renvoyé dans son pays n’est en aucune manière une preuve satisfaisante. En outre, malgré les am é liorations qu’aurait apportées Chávez, nul n’ignore le degré de corruption du Gouvern e ment vénézuélien. De plus, poursuit la requérante, d’après l’État vénézuélien lui ‑même chaque jour au moins une personne est soumise à la torture.

5.4 La requérante répond à l’argument de l’État partie qui dit qu’elle n’a jamais milité dans un parti politique quel qu’il soit ou qu’elle n’a eu aucune activité politique en expliquant que, même si elle était se u lement fonctionnaire, le fait que les responsables de la fraude étaient des agents publics d’un organisme p o litique rend l’affaire politique et fait qu’elle craint à juste titre pour sa sécurité si elle revient dans son pays. En ce qui concerne l’objection de l’État partie qui fait valoir que le directeur de l’ONI n’a pas été arrêté, la requérante dit que cet élément ne peut pas servir à prouver qu’elle est en sécurité car les puissants protègent les puissants.

5.5 Enfin la requérante réaffirme que la situation actuelle au Venezuela, après le coup d’État contre le Président Chávez, lui fait craindre encore plus pour sa sécurité.

Délibérations du Comité

6. Avant d’examiner toute plainte soumise dans une requête, le Comité contre la torture doit déterm i ner si elle est ou non recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement et n’est pas en cours d’examen. Le Comité relève que l’État partie ne conteste pas que les recours internes aient été épuisés. Il note aussi que de l’avis de l’État partie la requête doit être déclarée irrecevable ratione materiae parce que la Convention n’est pas applicable aux faits allégués, étant donné que les actes auxquels la requérante dit qu’elle sera exposée si elle est renvoyée au Venezuela n’entrent pas dans le cadre de la définition de la «to r ture» donnée à l’article premier de la Convention. Le Comité estime toutefois que les arguments de la r e quérante soulèvent une question de fond, qui doit être traitée dans le cadre de l’examen au fond et non pas au stade de la recevabilité. Ne voyant pas d’autre obstacle à la recevabilité, le Comité déclare la requête recevable et, étant donné que l’État partie et la requérante ont formulé l’un et l’autre des observations sur le fond, il procède donc à l’examen au fond.

7. Conformément au paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, le Comité doit d é terminer s’il existe des motifs sérieux de croire que la requérante risque d’être soumise à la torture si elle est renvoyée au Ven e zuela. Pour ce faire, il doit tenir compte de toutes les considérations possibles, conformément au paragr a phe 2 de l’article 3, y compris de l’existence d’un ensemble systématique de violations graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme. Il s’agit toutefois de déterminer si l’intéressé court personnellement le ri s que d’être soumis à la torture dans le pays dans lequel il est renvoyé. L’existence d’un ensemble de viol a tions graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme dans un pays ne constitue pas en soi un motif suffisant pour conclure qu’un individu risquerait d’être victime de torture à son retour dans ce pays; il faut qu’il existe des raisons supplémentaires de penser que l’intéressé serait personnellement en danger. Dans le cas à l’étude, le Comité doit déterminer si l’expulsion de la requérante vers le Venezuela aurait comme cons é quence prévisible de l’exposer à un risque réel et personnel d’être arrêtée et torturée.

8. Le Comité prend note des arguments de l’État partie qui fait valoir que si la situation des droits de l’homme au Venezuela continue d’être mauvaise, en particulier en ce qui concerne les conditions de déte n tion, il n’y a pas de motif suffisant pour affirmer qu’il existe au Venezuela un ensemble systématique de violations graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme. De même, le Comité prend note des arg u ments de la requérante et de l’État partie en ce qui concerne le risque de torture qu’encourrait la requérante et estime que cette dernière n’a pas fourni d’éléments suffisants pour montrer qu’elle courrait au Venezuela un risque prévisible, réel et personnel d’être soumise à la torture.

9. Le Comité est convaincu par les arguments de l’État partie et considère que les informations dont il est saisi ne montrent pas qu’il existe des motifs suffisants de croire que la requérante court personnellement le risque d’être torturée si elle est renvoyée au Venezuela.

10. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, estime que la décision de l’État partie de renvoyer la requérante au Venezuela ne constitue pas une violation de l’article 3 de la Convention.

8. Requête n o 166/2000

Présentée par : B. S. (nom supprimé) [représenté par un conseil]

Au nom de : Le requérant

État partie : Canada

Date de la requête : 22 avril 1999

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 14 novembre 2001,

Ayan achevé l’examen de la requête n o  166/2000, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant est B. S, un citoyen iranien résidant actuellement à Vancouver (Canada). Il affirme que son expulsion vers la République d’Iran constituerait une violation par le Canada de l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est représe n té par un conseil.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a transmis, le 21 juillet 2000, la requête à l’État partie et lui a aussi demandé, en application du paragraphe 9 de l’article 108 du règlement intérieur, de surseoir à l’expulsion du requérant vers la République d’Iran tant que sa requête serait en cours d’examen par le Comité. L’État partie a accédé à cette demande.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le 2 août 1990, le requérant est arrivé au Canada. Le statut de réfugié lui a été accordé par décision de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié le 11 janvier 1996.

2.2 Depuis 1992, le requérant a été condamné pour diverses infractions pénales, n o tamment pour vols, menaces, coups et blessures, dommages intentionnels aux personnes, usage d’un faux droit de priorité, agressions sexuelles, résistance à l’action d’un agent de la force publique et falsification de documents. Des ordonnances imposant certaines re s trictions au requérant ont été rendues en 1997 et 1998. Le 15 janvier 1999, le délégué du Ministre de la citoyenneté et de l’immigration a déclaré dans un avis donné en application des articles 70 5) et 53 I) de la loi sur l’immigration que l’auteur constituait un danger pour la société canadienne en raison du nombre et de la nature des condamnations pénales prononcées contre lui depuis 1992. Un arrêté d’expulsion a été pris à l’encontre du requ é rant le 1 er  mars 1999.

2.3 Le 15 avril 1999, le requérant a sollicité l’autorisation de présenter une demande de contrôle jur i dictionnel de la décision de l’expulser vers l’Iran. La Cour fédérale a rejeté cette demande le 12 juillet 2000. La Cour fédérale avait déjà refusé de l’autoriser à présenter une demande de contrôle juridictionnel de la décision selon laquelle il constituait un danger pour la société le 14 juillet 1999. Son conseil soutient que tous les recours internes utiles ont été épuisés et que le requérant s’attend à être expulsé à tout moment.

2.4 Le requérant dit qu’il s’est enfui de la République d’Iran en juillet 1990 parce qu’il était persécuté. Il fait valoir que, au début de 1985, alors qu’il fréquentait une école secondaire, il avait été arrêté et interr o gé par les gardiens de la révolution au sujet de sa participation à des discussions politiques. Il avait été d é tenu pendant huit jours au cours desquels il avait été battu à coups de poing et de pied et torturé. En se p tembre 1984, les gardiens de la révolution avaient fait irruption au domicile de sa famille après que d’autres membres de sa famille avaient quitté le pays parce qu’ils craignaient d’être accusés d’appartenir au mouvement promonarchiste. Le requérant affirme qu’il a été détenu pendant 18 jours et que sa sœur, sa mère et lui ‑même ont été battus. En janvier 1985, alors qu’il accomplissait son service militaire, le requ é rant a été soupçonné d’avoir des activités politiques et détenu et interrogé par un officier du Département des affaires idéologiques et religieuses de l’armée pendant deux jours. Le requérant affirme aussi qu’il a été contraint d’assister à l’exécution de six soldats condamnés pour s’être opposés au régime et à ses efforts de guerre. En avril 1985, le requérant a été blessé par des éclats de grenade et réformé après avoir été soigné dans un hôpital militaire, en février 1986. En octobre 1989, il a été arrêté par les gardiens de la révolution, menotté et conduit dans les bureaux du service de la police chargé de lutter contre les activités contre ‑révolutionnaires (le  Komiteh ), où il aurait été battu et détenu pendant un mois. Le  Komiteh a encore détenu le requérant pendant deux périodes de 24 heures en mars et avril 1990. Après sa seconde arrestation, il lui a été ordonné de se présenter tous les jours au bureau du Komiteh . Le requérant affirme que chaque fois qu’il se présentait à ce bureau, il craignait d’être tué ou torturé par les fonctionnaires de police. Après quatre ou cinq jours, il s’est enfui à Bandar Abbas, a obtenu un faux passeport et a quitté la République d’Iran par avion. En 1993, une citation à comparaître a été publiée dans le journal iranien «Khabar» indiquant que le requérant était accusé d’évasion et qu’il devait se présenter au Département des enquêtes du parquet général à Chiraz (République d’Iran).

2.5 Le requérant affirme qu’il craint pour sa vie et sa sécurité s’il est renvoyé dans la République d’Iran. En outre, les autorités iraniennes seraient informées de son retour car il aurait besoin de titres de voyage délivrés par la République d’Iran. Le requérant affirme que l’État partie n’a pas évalué les risques qu’il encourt s’il était renvoyé dans la Républ i que d’Iran. Il soutient aussi que les risques qu’il commette de nouvelles infractions n’avaient jamais été évalués.

Teneur de la requête

3. Le requérant affirme que son expulsion vers la République d’Iran constituerait une violation des articles 3 et 16 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou d é gradants. Il fait valoir qu’il y a des motifs sérieux de croire que l’auteur risque d’être soumis à la torture à son retour s’il est expulsé, car il a déjà été torturé avant de quitter la République d’Iran et qu’il sera prob a blement arrêté et gravement puni pour ne pas s’être conformé aux obligations de se présenter chaque jour devant le Komiteh . Le requérant ajoute en outre que les réfugiés et les personnes qui demandent à bénéficier du statut de réfugié risquent d’être torturés à leur retour s’ils sont renvoyés en Iran.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond

4.1 L’État partie affirme que le requérant n’a pas épuisé tous les recours internes utiles disponibles. Il fait en outre valoir qu’il n’a pas cherché à obtenir une dispense ministérielle pour motifs humanitaires en vertu de l’article 114 2) de la loi canadienne sur l’immigration et de l’article 2.1 de ses règles relatives à l’immigration. Ce recours lui aurait permis de demander à tout moment au Ministre de l’immigration et de la citoyenneté à être dispensé des dispositions sur l’immigration ou à être admis au Canada pour des raisons humanitaires. L’État partie renvoie à ce sujet aux constatations antérieures du Comité qui avait estimé que les demandes de dispense pour motifs humanitaires constituaient des voies de recours internes disponibles et utiles a .

4.2 L’État partie estime en outre que l’affirmation du requérant selon laquelle les droits énoncés aux articles 3 et 16 de la Convention seraient violés n’a été étayée par aucun élément de preuve. Le requérant n’a pas fourni d’éléments suffisants permettant de penser que son expulsion en Iran aurait pour conséquence prévisible de l’exposer à un risque réel et personnel de torture. L’existence d’un acte isolé de torture dans le passé ne prouve pas qu’il risque d’être torturé à son retour en Iran. L’État partie fait observer que le requ é rant a affirmé qu’il avait été torturé à l’occasion de sa première détention en 1984, mais non lorsqu’il a été détenu par la suite. Ses deux dernières détentions n’ont duré que 24 heures et le requérant a été remis en liberté avec la seule obligation de se présenter chaque jour devant le Komiteh . L’État partie conclut que le traitement infligé à l’auteur était de moins en moins strict et qu’il ne présente aucun intérêt pour les autor i tés de la République d’Iran aujourd’hui.

4.3 D’après l’État partie, étant donné l’interprétation de l’article 3 par le Comité qui considère qu’il offre une protection absolue quel que soit le comportement dans le passé d’une personne, la détermination du risque doit être particulièrement rigoureuse. À cet égard, l’État partie relève qu’une évaluation du risque a été entreprise lorsque le délégué du Ministre de la citoyenneté et de l’immigration a examiné la question de savoir si le r e quérant constituait un danger pour la société canadienne et devait être expulsé. Une no u velle évaluation faite par le Département de la citoyenneté et de l’immigration pour prép a rer la réponse de l’État partie au Comité a confirmé la conclusion antérieure selon laquelle le requérant ne risquait pas d’être torturé s’il était renvoyé en Iran. L’État partie soutient à cet égard que le Comité ne devrait pas substituer ses propres conclusions à celles des in s tances nationales puisqu’elles ne révèlent pas l’existence d’abus, de mauvaise foi, de pa r tialité manifeste ou d’irrégularités graves dans la procédure. C’est aux juridictions nation a les des États parties à la Convention qu’il appartient d’évaluer les faits et les preuves dans une a f faire donnée et le Comité ne devrait pas devenir une «quatrième instance» ayant compétence pour réévaluer des faits ou pour contrôler l’application de la législation nati o nale.

4.4 En ce qui concerne le risque que le requérant soit torturé s’il est renvoyé en Iran, l’État partie e s time que les faits exposés dans la présente communication sont analogues à ceux décrits dans la commun i cation n° 36/1995 ( X.  c.  Pays ‑Bas ). Le requérant n’a produit aucun certificat médical concernant les ma u vais traitements qu’il aurait subis en 1984. L’État partie soutient en outre que le requérant n’a pas indiqué que, après septembre 1984 ou à la suite de son départ, un membre quelconque de sa famille résidant en Iran a été victime de représailles de la part des autorités iraniennes en raison des opinions politiques présumées de l’auteur. L’État partie fait valoir, en outre, que la citation à comparaître ne prouve pas que le requérant risquerait d’être torturé. Les «citations à comparaître», dans des affaires pénales, ne sont que de simples notifications officielles indiquant que la participation de la personne désignée est requise dans le cadre d’une enquête, soit à titre de témoin, soit comme accusée. Rien ne permet de conclure que la citation a été émise pour de prétendus délits politiques. De plus, le requérant n’a présenté aucun élément de preuve pe r mettant de dire que les autorités iraniennes ont délivré un mandat d’arrêt à son encontre parce qu’il n’avait pas répondu à cette convocation et il n’a pas dit qu’il était encore tenu de se présenter devant une instance compétente pour y donner suite.

4.5 En ce qui concerne la situation générale en Iran, l’État partie estime que des changements impo r tants ont eu lieu depuis 1984, notamment l’établissement d’un Département des droits de l’homme au sein du Ministère des affaires étrangères et de la Commission islamique des droits de l’homme, ainsi que l’élection de M. Khatami comme Président de l’Iran. De plus, dans la plus récente publication de la Co m mission de l’immigration et du statut de réfugié il était indiqué que la sécurité d’une personne à son retour dans son pays dépend de l’interprétation de la politique gouvernementale générale par les autorités locales et, partant, la simple allégation d’un risque de torture parce que l’intéressé est un réfugié est insuffisante pour établir qu’il risque personnellement d’être torturé. L’État partie soutient que l’existence d’un ensemble de violations des droits de l’homme dans un pays ne suffit pas pour dire qu’une personne déterminée risqu e rait d’être soumise à la torture.

Commentaires du requérant

5.1 Le requérant fait valoir que la décision d’accorder une autorisation ou une dispense ministérielle en application de l’article 114 2) de la loi sur l’immigration est entièrement discrétionnaire et exécutoire. Il n’aurait pas le droit d’entrer au Canada ou d’obtenir l’autorisation requise du Ministre en raison de ses condamnations pour agressions sexue l les. Le requérant affirme que l’État partie n’exercerait pas son po u voir discrétionnaire en sa faveur. La seule décision susceptible d’appel serait la décision de l’expulser vers l’Iran. Le requérant a demandé à faire appel de cette décision, mais la Cour fédérale a rejeté sa requête. En conséquence, les recours proposés par l’État partie ne sauraient être considérés comme des recours internes utiles.

5.2 Le requérant considère en outre que les affaires évoquées par l’État partie sont soit assez différentes de la présente instance soit entièrement dénuées de pertinence. Selon lui, dans l’affaire P. Q. L. c. Canada b , le Comité a conclu que tous les recours internes avaient été épuisés bien que l’auteur aurait pu présenter une demande pour des raisons humanitaires.

5.3 Le requérant estime que son cas satisfait aux conditions énumérées dans l’Observation générale du Comité au sujet de l’article 3. En outre, le Comité ne devrait pas ajouter foi au premier avis donné conce r nant le risque de torture, car un décideur indépendant n’a pas participé à la procédure, il n’y a pas eu d’audience orale, les règles d’administration des preuves n’ont pas été appliquées et la décision prise dans cette affaire n’a pas été motivée par écrit. La deuxième évaluation des risques a été faite à l’insu du requ é rant et sans sa participation et s’appuie presque entièrement sur les enquêtes menées par un autre service du bureau de l’immigration de l’État partie.

5.4 Le requérant fait observer que la division compétente pour la détermination du statut de réfugié au sens de la Convention a admis les allégations de torture énoncées dans sa demande. Le requérant est un r é fugié au sens de la Convention et il a été établi qu’il encourait un risque sérieux d’être persécuté en Iran. La conclusion selon laquelle la citation à comparaître n’était pas en fait qu’une simple «convocation» est s u jette à caution, étant donné que l’État partie s’appuie sur des renseignements recueillis durant un entretien téléphonique avec un avocat dont il n’a pas donné le nom à Téhéran, qui n’aurait apparemment pas vu la citation. Le requérant demande en outre au Comité d’examiner le traitement dont l’auteur pourrait faire l’objet en Iran en raison de ses condamnations pour agressions sexuelles au Canada, si les autorités iranie n nes en avaient connaissance.

5.5 En ce qui concerne la situation générale des droits de l’homme dans la République d’Iran, le requ é rant mentionne les rapports de Human Rights Watch de 1999 et du Département d’État des États ‑Unis de 2000 et déclare que si des faits positifs se seraient produits, rien n’a changé jusqu’à présent à cet égard et la situation des droits de l’homme s’est peut ‑être même en fait détériorée.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

6.1 Avant d’examiner toute plainte contenue dans une communication, le Comité contre la torture doit décider si elle est ou non recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Conformément à l’alinéa  a du paragraphe 5 de l’article 22, le Comité s’est assuré que la même question n’avait pas été et n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

6.2 Le Comité note que l’État partie estime que la communication est irrecevable parce que les recours internes utiles n’ont pas été épuisés. Dans l’avis sur les risques encourus par le requérant qu’il a donné le 11 août 2000, le Département de la citoyenneté et de l’immigration a dit qu’il ne croyait pas que le requ é rant risquait d’être torturé s’il était expulsé vers la République d’Iran; le Comité note que c’est le même organisme gouvernemental qui serait appelé à prendre une décision concernant une demande présentée pour des raisons humanitaires ou une dispense ministérielle. Il note en outre que les autorisations que le requ é rant avait sollicitées pour présenter des demandes de contrôle juridictionnel des décisions de l’expulser vers la République d’Iran et de le considérer comme un danger pour la société ont été rejetées par la Cour féd é rale; la même cour serait chargée de réexaminer une décision au sujet d’une demande fondée sur des raisons humanitaires ou d’une dispense ministérielle. L’État partie n’a pas indiqué dans quelle mesure les personnes qui prendraient les décisions ne seraient pas liées par ce qu’elles ont elles ‑mêmes décidé auparavant, lor s qu’elles se prononceraient sur le cas de B. S. dans le cadre de la demande fondée sur des motifs humanita i res ou d’une dispense ministérielle. En conséquence, le Comité estime que, dans la situation du requérant, une demande pour des raisons humanitaires présentée en vertu de l’article 114 2) de la loi sur l’immigration ou une dispense ministérielle ne constituerait pas un recours interne utile. Dans ces circonstances, le Comité constate que les conditions prescrites à l’alinéa  b du paragraphe 5 de l’article 22 de la Convention ont bien été remplies.

6.3 Le Comité note que l’État partie estime que la communication est irrecevable car elle n’a pas été suffisamment étayée par des éléments de preuve. À ce sujet, le Comité estime que les arguments de l’État partie ne soulèvent que des questions de fond qui doivent être traitées dans le cadre de l’examen au fond, et non au stade de la recevabilité. Étant donné que le Comité ne voit pas d’obstacle à la recevabilité, il déclare la communication recevable.

Examen quant au fond

7.1 Le Comité doit déterminer si le renvoi forcé de l’auteur dans la République islamique d’Iran serait une violation de l’obligation du Canada, en vertu de l’article 3 de la Convention, de ne pas expulser ou de ne pas refouler une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture.

7.2 Conformément au paragraphe 1 de l’article 3, le Comité doit déterminer s’il existe des motifs sérieux de croire que le requérant risquerait d’être soumis à la torture à son r e tour en Iran. Pour ce faire, il doit, conformément au paragraphe 2 de l’article 3, tenir compte de toutes les considérations pertinentes, y compris de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagra n tes ou massives. Il s’agit, toutefois, de déterminer si l’intéressé risquerait d’être personnellement soumis à la torture dans le pays dans lequel il retournerait. En conséquence, l’existence dans un pays d’un e n semble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives, ne constitue pas en soi un motif suffisant pour conclure qu’une personne risquerait d’être soumise à la torture à son retour dans ce pays; il doit exister des motifs supplémentaires de penser que l’intéressé serait personnellement en danger. De même, l’absence d’un ense m ble de violations flagrantes, constantes et systématiques des droits de l’homme ne signifie pas qu’une personne ne puisse pas être soumise à la torture dans sa situation partic u lière.

7.3 En l’espèce, le Comité note que le requérant a affirmé que, lors de sa première détention au début de 1985, il avait été torturé. Bien que cette assertion n’ait pas été expressément corroborée par un certificat médical ou des renseignements détaillés présentés par l’auteur, le Comité est disposé à admettre que B. S. a été maltraité lors de sa première détention. Le Comité note aussi que B. S. n’a pas dit qu’il avait été torturé durant ses détentions ultérieures. Enfin, le Comité relève que les deux dernières détentions de l’auteur en 1990 ont été de courte durée, que celui ‑ci n’a pas dit être un opposant politique actif et que rien n’indique qu’il est recherché par les autorités iraniennes actuellement ou qu’il serait exposé à un risque particulier d’être torturé en raison de ses condamnations pour agressions sexuelles au Canada. En conséquence, le C o mité estime que le requérant n’a pas étayé son affirmation selon laquelle il risque personnellement d’être soumis à des tortures, s’il est renvoyé en Iran.

7.4 En ce qui concerne l’allégation de violation de l’article 16 de la Convention, le Comité note que l’article 3 ne couvre pas les situations de mauvais traitements visées à l’article 16 et constate de plus que le requérant n’a pas étayé l’affirmation selon laquelle il serait exposé, à son retour en Iran, à des traitements de nature à constituer une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant au sens de l’article premier de la Convention.

Conclusions

8. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, conclut que l’expulsion de M. B. S. vers la République islamique d’Iran, sur la base des informations qui ont été portées à sa connai s sance, ne constituerait pas une violation de l’article 3 de la Convention.

9. Requête n o  175/2000

Présentée par :

S. T. (nom supprimé) [représenté par un conseil]

Au nom de :

Le requérant

État partie :

Pays ‑Bas

Date de la requête :

27 novembre 2000

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 23 novembre 2001,

Ayant achevé l’examen de la requête n o  175/2000, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant est M. S. T., de nationalité sri ‑lankaise, né le 3 janvier 1979, actuellement interné dans un centre de rétention aux Pays ‑Bas. Il affirme que le renvoyer contre son gré à Sri Lanka constituerait une violation par les Pays ‑Bas de l’article 3 de la Convention. Il est représenté par un conseil.

1.2 Le 5 décembre 2000, le Comité a porté la communication à l’attention de l’État partie, afin qu’il puisse formuler ses observations, et lui a demandé, en vertu du paragraphe 9 de l’article 108 de son règl e ment intérieur, de ne pas expulser le requérant vers Sri Lanka tant que sa communication serait en cours d’examen. L’État partie a accédé à cette demande.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le requérant est un Tamoul de la région de Jaffna, dans le nord de Sri Lanka, qui affirme avoir tr a vaillé pendant deux mois, en 1994, pour les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE) dans un atelier de réparation de voitures à Killinochi. Pendant cette période, il aurait aussi été chargé des soins aux blessés et de la distribution de vivres.

2.2 En 1996, le requérant s’est installé à Vavuniya. En avril 2000, les Tigres de libér a tion de l’Eelam tamoul ont attaqué un camp de l’organisation paramilitaire PLOTE. Après cet incident, les forces de la PLOTE l’ont arrêté ainsi que de nombreuses autres personnes qui se trouvaient dans la région. Il aurait été torturé à l’aide d’instruments brûlants, ce dont son corps porte les cicatrices. Il n’a signalé ces faits et les cicatrices en résultant aux aut o rités néerlandaises qu’au stade de la procédure de recours judiciaire.

2.3 Le 10 octobre 2000, le requérant a été retenu pendant une journée par la PLOTE, a été interrogé sur ses liens avec les LTTE et a été brutalisé.

2.4 Le 15 octobre 2000, le requérant a été arrêté par l’armée sri ‑lankaise et détenu pendant une journée, durant laquelle il affirme avoir reçu des coups de pied, avoir été suspendu la tête en bas et avoir été frappé. Depuis lors, il souffre de maux d’estomac chroniques, en particulier lorsqu’il se penche mais ne porte pas de cicatrice. Un membre de sa famille est intervenu et, après versement d’une somme d’argent, il a été libéré et est allé s’installer chez une tante.

2.5 Le 17 octobre 2000, des membres de la PLOTE sont venus au domicile du requérant demander où il se trouvait. Le 24 octobre 2000, le requérant est parti pour Colombo.

2.6 Les incidents des 10 et 15 octobre ont poussé le requérant à quitter Sri Lanka, le 25 octobre 2000, et il est arrivé le 26 octobre 2000 aux Pays ‑Bas après avoir transité par un autre pays (le requérant ne sait pas lequel). À son arrivée aux Pays ‑Bas, il a téléphoné à sa sœur, qui lui a appris que l’armée sri ‑lankaise et la PLOTE avaient à nouveau cherché à savoir où il se trouvait.

2.7 À son arrivée aux Pays ‑Bas, le requérant a déposé une demande d’asile, à la suite de quoi il a été interrogé une première fois par le Département de l’immigration et des naturalisations, qui relève du Mini s tère de la justice. Se fondant sur cet interrogatoire, le Département, qui avait des raisons de croire que la demande n’était pas fondée, a décidé de la traiter selon la procédure accélérée. Le requérant a été placé en rétention pendant l’examen de sa demande. Il a été remis en liberté le 26 février 2001 et est actuellement hébergé dans un foyer pour demandeur d’asile.

2.8 Le deuxième interrogatoire par le Département de l’immigration et des naturalisations a eu lieu le 27 octobre 2000. La demande d’asile a été rejetée le 28 octobre 2000 au motif qu’elle était manifestement infondée. Le même jour, l’avocat du requérant a formé un recours judiciaire contre cette décision, ainsi que contre la décision de maintien en rétention. Dans son jugement du 13 novembre 2000, le tribunal de district de La Haye a estimé que ce recours n’était pas fondé. Selon le conseil, cette décision n’était pas équitable, essentiellement pour les raisons ci ‑après:

a) Le tribunal a estimé que les marques que portait le requérant − séquelles, s e lon le requ é rant, d’un incident survenu en avril 2000 mais que ni lui ni son avocat n’ont mentionnées avant le stade du recours judiciaire − ne prouvaient pas que le requérant ri s quait personnellement d’être torturé vu que cet incident s’inscrivait dans le contexte d’une enquête plus large sur la mort de soldats de la PLOTE. Le conseil souligne que la présence de cicatrices sur un individu peut amener les autorités sri ‑lankaises à le soupçonner d’être lié aux LTTE et que c’est un facteur de risque. Si l’incident d’avril 2000 n’a pas été me n tionné avant le stade du recours judiciaire, c’est parce que le requérant avait fui Sri Lanka non pas à cause de cet incident mais bien à cause des événements d’octobre. Appare m ment, lors de son interrogatoire par le Ministère, on avait demandé au requérant ce qui l’avait poussé à fuir son pays.

b) Le conseil fait aussi valoir que l’application de la procédure accélérée rend de tels male n tendus inévitables. Cette procédure, au titre de laquelle une demande d’asile peut être examinée en 48 he u res à compter de l’arrivée du requérant, n’est selon le conseil à l’évidence pas de nature à permettre au d e mandeur d’asile de donner une version exacte des faits susceptibles d’éclairer l’affaire, puisque celui ‑ci est épuisé, que l’intimité dont il jouit en rétention est limitée et qu’il n’a le droit de consulter un conseiller jur i dique que pendant trois heures après son premier interrogatoire par les fonctionnaires du ministère, des pr o blèmes d’interprétation se posant inévitablement dans cet intervalle.

Teneur de la requête

3. Le conseil affirme que vu la manière dont le requérant a été traité par la PLOTE et l’armée sri ‑lankaise, il existe des motifs sérieux de croire qu’il serait personnellement exposé à la torture en cas de retour à Sri Lanka et que les Pays ‑Bas violeraient dès lors l’article 3 de la Convention s’ils l’y renvoyaient. Le conseil souligne que, selon des sources dignes de foi, il existe «un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives» à Sri Lanka et renvoie à cet égard à l’article 3.2 de la Convention. Le conseil affirme aussi que, compte tenu de la situation des droits de l’homme qui prévaut à Sri Lanka, la procédure accélérée est inappropriée pour statuer sur ce type d’affaires.

Observations de l’État partie quant à la recevabilité et au fond de la communication

4.1 Le 1 er  juin 2001, l’État partie a présenté ses observations quant à la recevabilité et au fond de la communication. Il ne conteste pas la recevabilité de la communication.

4.2 En ce qui concerne le fond, l’État partie décrit tout d’abord la procédure d’examen des demandes d’asile aux Pays ‑Bas. Les demandes d’asile sont instruites par le Département de l’immigration et des nat u ralisations. Si une demande d’admission au bénéfice du statut de réfugié peut être évaluée dans un délai de 48 heures, elle est examinée dans un des quatre centres de traitement des demandes. Les demandeurs d’asile sont interrogés à l’aide d’un questionnaire qui ne contient aucune question relative aux raisons les poussant à demander l’asile. Il est au besoin fait appel aux services d’un interprète.

4.3 L’étape suivante consiste en un interrogatoire approfondi auquel le requérant a la possibilité de se préparer pendant deux heures avec l’aide d’un conseiller juridique. Si la préparation de ce second interrog a toire prend plus de deux heures, le délai de 48 heures fixé pour aboutir à une décision au sujet de la d e mande est prorogé d’autant. Le second interrogatoire est essentiellement axé sur les raisons ayant motivé le départ du pays d’origine. Le demandeur dispose d’un délai de trois heures, susceptible d’être prorogé le cas échéant, pour apporter des corrections au procès ‑verbal de cet interrogatoire ou y ajo u ter des renseignements avec l’aide de son conseiller juridique. Un fonctionnaire du Dépa r tement de l’immigration et des n a turalisations statue alors sur la demande.

4.4 L’État partie indique que le Ministère des affaires étrangères publie régulièrement des rapports sur la situation dans chaque pays d’origine afin d’aider les fonctionnaires du Département de l’immigration et des naturalisations à évaluer les demandes d’asile. Le Ministère élabore ce rapport en utilisant divers doc u ments publiés et les rapports d’organisations non gouvernementales ainsi que les notes établies par les mi s sions diplomatiques néerlandaises dans les pays d’origine.

4.5 L’État partie signale que les demandeurs d’asile qui séjournent dans les centres de traitement des demandes ont accès à des soins médicaux. Ces centres disposent des installations de base, dont un dortoir, proposent des activités de loisirs et servent des repas chauds ou froids. L’État partie explique qu’un requ é rant dont la demande d’asile est rejetée peut demander au Ministère de la justice de réexaminer la décision, puis former un recours auprès du tribunal de district. Lorsque l’intéressé fait l’objet d’une mesure privative ou restrictive de liberté, il peut immédiatement former un recours auprès du tribunal de district.

4.6 L’État partie précise que la politique actuellement applicable aux demandeurs d’asile originaires de ce pays se fonde sur un rapport du Ministère des affaires étrangères en date du 28 juillet 2000 décrivant l’évolution récente dans ce pays. Sur la base de ce rapport, le Secrétaire d’État à la justice a estimé que le renvoi des demandeurs d’asile déboutés restait une option responsable. L’aggravation sensible du conflit ethnique en cours à Sri Lanka constatée en octobre ‑novembre 1999 a certes engendré une grande instabilité dans le nord et l’est du pays mais les Tamouls ont toujours la possibilité de s’installer dans des régions sous contrôle du Gouvernement.

4.7 L’État partie fait en outre valoir que, de l’avis du HCR, les demandeurs d’asile originaires de Sri Lanka dont la demande a été rejetée à l’issue d’un examen approfondi peuvent être renvoyés dans leur pays d’origine. L’État partie souligne que le rapport du Ministère des affaires étrangères en date du 22 août 2000 relatif à Sri Lanka indique que cette position n’a pas changé. L’État partie cite de plus un ra p port du même Ministère en date du 27 avril 2001 mettant en doute le risque de détention, prolongée ou non, qui pèserait sur les Tamouls porteurs de cicatrices. Selon ce rapport, «toutes les sources consultées ind i quent que des cicatrices visibles peuvent susciter des questions supplémentaires mais pas, à elles seules, être à l’origine d’un interrogatoire... Aucune des sources consultées n’est d’avis qu’une cicatrice constitue un facteur de risque pour quiconque est en possession des papiers requis et a une raison valable d’être à Colombo…».

4.8 L’État partie renvoie à la jurisprudence du Comité, selon laquelle un individu doit prouver qu’il y a des motifs sérieux de croire qu’il risque personnellement d’être soumis à la torture en cas de renvoi dans son pays a . L’État partie conteste que l’auteur court un tel risque et estime que l’auteur n’a pas pu démontrer qu’il serait soupçonné par les autorités ou par la PLOTE, d’autant plus que le travail qu’il affirme avoir e f fectué pour les LTTE remonte à plus de sept ans. L’État partie ne juge pas plausible l’affirmation selon l a quelle l’auteur risque d’être confronté à des problèmes en raison des activités mentionnées.

4.9 L’État partie fait valoir qu’après avoir été arrêté par la PLOTE puis l’armée sri ‑lankaise en octobre 2000 l’auteur a dans un cas comme l’autre été relâché au bout d’une seule journée et n’estime pas plausible qu’il puisse avoir été relâché aussi rapidement s’il était soupçonné d’entretenir des liens avec les LTTE. L’État partie estime en outre révélateur qu’après ses arrestations d’octobre 2000 S. T ait été autorisé à se rendre à Colombo puis à l’aéroport et n’ait nullement été inquiété lors de deux contrôles dont il a été l’objet de la part desdites autorités en cours de route. S. T a ensuite quitté le pays en utilisant un passeport authe n tique à son nom. L’État partie fait valoir que le déroulement des événements ne semble pas indiquer que les autorités sri ‑lankaises aient la moindre animosité envers le requérant ou le suspectent d’être lié aux LTTE.

4.10 L’État partie objecte de plus que l’affirmation du requérant selon laquelle la rapidité de la procédure mise en œuvre au centre de traitement des demandes ne lui a pas permis de mentionner ses cicatrices n’affecte en rien le bien ‑fondé de la décision rendue au sujet de sa demande d’asile. L’État partie fait valoir que la procédure décrite aux paragraphes 4.2 à 4.5 garantit de manière adéquate le traitement de toute d e mande avec le soin voulu. S’agissant de l’évaluation de la situation du requérant, l’État partie souligne que celui ‑ci a pu préparer le second interrogatoire avec l’aide d’un conseiller juridique et qu’on lui a clairement indiqué qu’il devait divulguer toute information pertinente, que le procès ‑verbal de son interrogatoire rev ê tait une grande importance pour la procédure de demande d’asile et qu’il ne devait rien dissimuler suscept i ble d’avoir un rapport avec sa demande. Durant son interrogatoire, on lui a expressément demandé s’il po r tait des marques de mauvais traitements subis, ce à quoi il a répondu par la négative. Le requérant a consu l té le procès ‑verbal du second interrogatoire avec son conseiller juridique pendant plus de trois heures et a ensuite proposé des corrections et des ajouts qui ne mentionnaient pas l’arrestation dont il affirme avoir été l’objet en avril 2000 ni les marques résultant des mauvais traitements subis à cette occasion. En cons é quence, l’État partie estime que le requérant a été suffisamment informé de la nécessité de faire une déclar a tion complète et que sa demande d’asile a été examinée de façon approfondie au centre de traitement des demandes.

4.11 Au sujet des cicatrices, l’État partie estime en outre que le requérant n’a pas prouvé avoir été arrêté et avoir subi des mauvais traitements en avril 2000 et pas davantage mo n tré qu’il portait des marques résu l tant des mauvais traitements allégués. Ces affirmations n’ont toujours pas été étayées par un certificat méd i cal alors que, selon l’État partie, il n’aurait pas été déraisonnable de s’attendre à ce que pareil certificat ait été produit vu le temps depuis lequel le requérant se trouve aux Pays ‑Bas. L’État partie souligne aussi qu’il n’a pas été établi que lors de ses deux arrestations présumées d’octobre 2000 le requérant ait été soupçonné de liens avec les LTTE du fait des cicatrices mentionnées et que, du reste, lui ‑même ne considère pas les cicatrices comme un facteur de risque − l’arrestation et les mauvais traitements dont il aurait été victime en avril 2000 n’étant pas le motif de son départ de Sri Lanka.

4.12 L’État partie signale de plus qu’il a été proposé à S. T − dans une lettre datée du 1 er  février 2001 – de déposer une nouvelle demande d’asile, dans laquelle il aurait pu apporter des indications sur son arrest a tion d’avril 2000. Il aurait alors été autorisé à rester aux Pays ‑Bas en attendant les résultats de l’examen de pareille demande, mais il n’a pas saisi cette occasion.

Commentaires du conseil sur les observations de l’État partie

5.1 Dans sa réponse aux observations de l’État partie, datée du 24 juillet 2001, le requérant réitère les affirmations formulées dans sa lettre initiale, concernant notamment le caractère inéquitable de la procédure accélérée d’examen des demandes d’asile. Sur ce point, il souligne que même si un conseiller juridique a s siste au premier interrogatoire il ne peut pas poser lui ‑même des questions ni aider le demandeur d’asile à s’y préparer. En général, le conseiller juridique n’a d’ailleurs même pas le temps de se rendre à ce premier interrogatoire. Ce point est très important puisque c’est à l’issue de ce premier interrogatoire qu’est prise la décision d’examiner ou non l’affaire selon la procédure accélérée et de placer ou non le demandeur d’asile en rétention. Le conseil indique en outre que trois avocats se sont succédé pour représenter le requérant à différents moments et que les deux premiers ne connaissaient pas suffisamment la situation à Sri Lanka pour lui poser les questions utiles, notamment sur l’éventuelle présence de marques sur son corps. Seul le tro i sième avocat connaissait l’importance de cette question à Sri Lanka et lui a posé la bonne question.

5.2 Le requérant conteste l’opinion de l’État partie concernant la situation générale des droits de l’homme à Sri Lanka. Il s’interroge sur les sources mentionnées dans le rapport de juillet 2000 du Ministère et affirme que le constat figurant dans ce rapport, selon lequel la situation est source de préoccupations, est un euphémisme. Il renvoie aussi à un rapport du HCR dans lequel il est indiqué qu’en cas de rapatriement à Sri Lanka les demandeurs d’asile tamouls déboutés portant des cicatrices sont le plus susceptible d’éveiller la méfiance des forces de sécurité et de subir un interrogatoire musclé, voire des mauvais traitements. Le requérant cite d’autres rapports, émanant d’organisations internationales, pour étayer l’affirmation selon laquelle la présence de cicatrices sur le corps d’un Tamoul renvoyé à Sri Lanka l’expose à un risque partic u lier. Selon lui, en cas de renvoi à Colombo, le requérant risque de voir son identité et ses antécédents vér i fiés car il n’a pas de raison valable de vouloir rester à Colombo, n’est pas immatriculé auprès de la police locale et ne possède pas de carte d’identité nationale.

5.3 Au sujet de l’argument de l’État partie selon lequel si des soupçons avaient pesé sur lui il n’aurait pu se rendre à Colombo et fuir le pays, après avoir été contrôlé à deux reprises en route et avoir produit un passeport authentique à son nom, le requérant fait observer qu’aucun élément ne permet d’affirmer que les autorités disposent d’un système centralisé recensant toutes les personnes soupçonnées d’entretenir des liens avec les LTTE − ce que confirme le rapport de juillet 2000 du Ministère des affaires étrangères.

5.4 Concernant l’argument de l’État partie qui affirme qu’une seconde demande d’asile aurait pu être déposée, le requérant estime qu’elle aurait été inutile puisque le tribunal de district avait conclu, tout en ayant connaissance de la présence de marques sur son corps, qu’il ne courrait aucun risque en cas de renvoi à Sri Lanka. Aucun fait nouveau n’aurait pu être invoqué en l’occurrence. Le requérant ajoute qu’il avait montré ses cicatrices aux membres du tribunal, y compris au magistrat du ministère public, ce qui rendait un certificat médical inutile.

Délibérations du Comité

6.1 Avant d’examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité contre la torture doit déterminer si cette communication est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée et n’est pas en cours d’examen dans une autre instance internati o nale d’enquête ou de règlement. Le Comité note aussi que l’État partie n’a pas contesté la recevabilité de la communication. Le Comité estime qu’il n’existe aucun autre obstacle à la recevabilité de la communication et il la déclare donc recevable et procède immédiatement à son examen quant au fond.

6.2 Le Comité doit déterminer si le renvoi de S. T. à Sri Lanka constituerait une violation de l’obligation contractée par l’État partie en vertu du paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, de n’expulser ni de refouler une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture. Pour ce faire, il doit tenir compte de toutes les considérations pertinentes, y compris de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives dans l’État en question. Il s’agit cependant de déterminer si l’intéressé risquerait personnell e ment d’être soumis à la torture dans le pays où il serait renvoyé. Dès lors, l’existence d’un ensemble de vi o lations flagrantes, graves ou massives des droits de l’homme dans un pays ne constitue pas en soi un motif suffisant pour conclure qu’un individu risquerait d’être victime de torture à son retour dans ce pays; il faut qu’il existe des motifs supplémentaires de penser que l’intéressé serait personnellement en danger. De même, l’absence d’un ensemble systématique de violations flagrantes des droits de l’homme ne signifie pas qu’un individu ne puisse être considéré comme risquant d’être soumis à la torture eu égard à sa situation particulière.

6.3 Le Comité note l’argumentation du requérant qui affirme qu’il risque d’être soumis à la torture s’il est renvoyé à Sri Lanka du fait que dans le passé il a eu des liens avec les LTTE, qu’il aurait déjà subi à deux reprises des mauvais traitements de la part des autor i tés et qu’il porte des cicatrices que les autorités attribueraient selon toute probabilité à des combats menés aux côtés des LTTE. Le Comité note également l’argument selon lequel la rapidité de la procédure accélérée n’avait pas permis au requérant de signaler à un stade précoce de la procédure aux autorités néerlandaises qu’il avait des cicatrices résultant de mauvais traitements alors que pareille information aurait amené les autorités à examiner sa demande avec davantage de bienveillance. Le Comité note que l’État partie a quant à lui décrit la procédure comme étant équitable et a exposé en détail les dispositions en vigueur tendant à garantir un examen adéquat des demandes d’asile, en particulier les contacts fr é quents avec un conseiller juridique et la possibilité de former un recours judiciaire. Le Comité note aussi que le tribunal saisi du recours a examiné la question des cicatrices et que ce n’est pas uniquement en fonction de cet élément mais compte tenu de l’ensemble des faits dont il disposait qu’il a décidé de ne pas accorder l’asile.

6.4 Le Comité note en outre que l’État partie semble admettre que le requérant a été arrêté et détenu par les autorités à deux reprises en octobre 2000 tout en doutant qu’il ait pu être soupçonné d’entretenir des liens avec les LTTE puisqu’il n’a été détenu que pendant une journée à chacune de ces arrestations et n’a en réalité jamais été membre de l’organisation en question. Le Comité relève que le requérant n’affirme pas qu’il a été membre des LTTE ou a pris part à des activités politiques. Il note de plus que le requérant n’a travaillé que deux mois pour cette organisation, six ans avant sa première arrestation. Pour le Comité, le requérant n’a pas invoqué d’éléments, autres que la présence de marques sur son corps, qui permettraient d’affirmer qu’il court un risque particulier d’être soumis à la torture. Pour les raisons susmentionnées, le Comité estime que le requérant n’a pas avancé de motifs sérieux permettant de croire qu’il risque, perso n nellement et actuellement, d’être soumis à la torture s’il est renvoyé à Sri Lanka.

7. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, estime que le renvoi de S. T. à Sri Lanka par l’État partie ne constituerait pas une violation de l’article 3 de la Convention.

10. Requête n o  177/2001

Requérant :

H. M. H. I. (nom supprimé)

Représenté par :

M. Simon Jeans

État partie :

Australie

Date de la requête :

12 décembre 2000

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 1 er mai 2002,

Ayant achevé l’examen de la requête n o  177/2001, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant est M. H. M. H. I., de nationalité somalienne, né en Somalie le 1 er  juillet 1960. Il affirme que son expulsion en Somalie qui est actuellement envisagée constituerait une violation de l’article 3 de la Convention. Il est représenté par un conseil.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a transmis la commun i cation à l’État partie le 25 janvier 2001. Dans le même temps, agissant en vertu du paragraphe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur, il a demandé à l’État partie de ne pas expulser le requérant vers la Somalie tant que sa requête serait examinée par le Comité. Le 20 septembre 2001, l’État partie a informé le Comité qu’il accédait à sa demande.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le requérant appartient au sous ‑clan des Dabarre (clan des Rahanwein). Son cousin était Ministre de l’enseignement supérieur sous le régime de Siad Barre. Lorsque les affrontements entre clans ont éclaté, en 1991, le requérant et sa famille résidaient à Baidoa, dont les habitants étaient à majorité des Rahanwein mais qui était contrôlée par le beau ‑frère de Siad Barre qui était membre du sous ‑clan des Marehan (clan des Darod). Selon le requérant, un sous ‑clan rival a détruit la ville, tuant de nombreuses personnes avant que les forces des Rahanwein n’y retournent, suivies par les forces des Marehan qui s’y sont livrées à des pillages.

2.2 À la suite de la destruction de la maison du requérant, les forces des Marehan l’ont arrêté avec sa femme. Lorsqu’ils ont appris qu’ils étaient des Rahanwein, ils les ont faits prisonniers et forcés à travailler dans des fermes locales. Le requérant affirme que sa femme a été violée mais qu’ils ont réussi à s’échapper en avril 1992. Après que son beau ‑frère eut été tué par les forces d’un seigneur de la guerre du clan des H a wiye, Hussain Aideed, le requérant, accompagné de sa femme, a pu atteindre une région où vivaient certains membres de son sous ‑clan, les Dabarre, et y a laissé sa famille. Comme les forces d’Aideed avaient tué bon nombre de ses proches, il a quitté la région. En novembre 1992, alors qu’il était à proximité de la frontière nationale, le requérant a entendu que le sous ‑clan des Dabarre, auquel il appartenait, avait été attaqué par un autre sous ‑clan des Rahanwein. En décembre 1994, il a appris que son oncle, un ancien ministre, avait été tué par les forces d’Aideed.

2.3 Le 25 décembre 1997, le requérant est arrivé à Sydney (Australie) via la Thaïlande sans pièce d’identité valide. Depuis lors, il est détenu par les services de l’immigration. Le 2 janvier 1998, le requérant a demandé un «visa de protection» (statut de réfugié) et s’est vu accorder l’aide d’un représentant en justice. Il affirme craindre d’être victime d’un traitement pouvant être assimilé à de la persécution en Somalie (to r ture ou exécution) du fait de sa race ou de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un groupe social donné parce qu’il est membre d’un clan et a des liens de parenté avec une personnalité politique du régime de Siad Barre. Le 15 janvier 1998, sa demande a été rejetée.

2.4 Après avoir entendu le requérant le 9 avril 1998, la Commission de contrôle des décisions conce r nant les réfugiés (Refugee Review Tribunal) a rejeté, le 8 juillet 1998, sa demande de révision de la décision prise en première instance. La Commission a jugé le requérant crédible et a ajouté foi à son récit concernant ce qu’avaient vécu les membres de son clan et de son sous ‑clan. Elle a toutefois estimé que les violations des droits de l’homme qu’il redoutait ne constituaient pas une «persécution» au sens de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés puisqu’il était plutôt une victime de la guerre civile.

2.5 Le 15 octobre 1998, le Tribunal fédéral d’Australie a rejeté le recours de H. M. H. I. contre la déc i sion de la Commission. Mais, le 9 avril 1999, le Tribunal fédéral plénier a accepté sa demande tendant à ce que la décision du Tribunal fédéral soit révisée. Le 26 octobre 2000, une majorité des membres de la Haute Cour s’est prononcée en faveur d’un appel du Ministre de l’immigration et des affaires multiculturelles contre la décision du Tribunal fédéral plénier et a approuvé la décision de la Commission.

2.6 Le 30 novembre 2000 et le 2 février 2001, le Ministère de l’immigration et des affaires multicult u relles a rejeté des demandes de dispense ministérielle discrétionnaire à la décision de la Commission, pr é sentées au titre de la loi sur la migration.

Teneur de la requête

3.1 Le requérant affirme qu’il y a des motifs sérieux de croire qu’il sera soumis à la to r ture s’il est re n voyé en Somalie, ce qui constituerait une violation par l’État partie des obligations qui lui incombent en vertu de l’article 3 de la Convention. Il fait valoir qu’il n’y a pas un seul endroit en Somalie où il serait en sécurité dès lors que l’aéroport de M o gadishu et Baidoa sont contrôlés par le clan d’Aideed, les Hawiye. Qui plus est, d’autres sous ‑clans des Rahanwein sont en conflit avec son propre sous ‑clan. Le requérant a f firme en outre qu’il est personnellement en danger parce qu’il est un proche d’un ancien ministre du régime de Siad Barre. Il craint qu’à son retour à Mogadishu, le clan des Hawiye déco u vre immédiatement à quel clan il appartient et tente de lui extorquer de l’argent. Il craint que les Hawiye ne le torturent ou l’exécutent sommairement s’il n’est pas en mesure de leur donner ce qu’ils demandent. Il affirme que même s’il n’est pas détenu ou exécuté à l’aéroport, comme il a perdu tout contact avec ses proches et ses amis, il ne tard e rait pas à être arrêté et torturé par des clans hostiles.

3.2 En ce qui concerne la situation générale en Somalie, le requérant cite une lettre d’Amnesty Intern a tional (Australie), un rapport du HCR, un rapport du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme, un rapport du Département d’État des États ‑Unis et un rapport de l’US Committee for Refugees datant respectivement d’octobre 1998, de septembre 1999, de janvier 2000, de février 2000 et d’août 2000, attestant l’existence de violations persistantes systématiques et flagrantes des droits de l’homme dans de nombreuses régions du pays. À l’appui de son allégation selon laquelle il risque personnellement d’être to r turé, le requérant affirme que ce que sa famille et lui ont vécu, y compris le fait qu’ils ont été astreints à un travail forcé, le viol de sa femme et la mort de son beau ‑frère prouvent que toutes ses craintes sont justifiées et qu’il serait torturé s’il retournait en Somalie.

Observations de l’État partie

4.1 Dans une note verbale datée du 20 septembre 2001, l’État partie a contesté à la fois la recevabilité de la communication et son bien ‑fondé.

4.2 L’État partie affirme que la communication est irrecevable à la fois parce que les faits allégués n’entrent pas dans le champ d’application de la Convention ratione materiae et parce que les allégations ne sont pas suffisamment étayées comme l’exige l’article 107 b) du règlement intérieur du Comité. Il fait o b server que les questions soulevées ont déjà été examinées d’une manière détaillée à tous les niveaux de l’institution judiciaire et par le Ministre. Il fait valoir que la demande de protection internationale formulée par le requérant a déjà fait l’objet d’un examen complet et que ce dernier tente de se servir du Comité pour faire examiner une demande d’asile.

4.3 L’État partie affirme que la communication est irrecevable ratione materiae parce qu’à maints égards la Convention n’est pas applicable aux faits allégués. Premièrement, le traitement auquel le requérant affirme qu’il sera soumis s’il est renvoyé en Somalie ne relève pas de la définition de la torture donnée à l’article premier de la Convention où il est question d’actes dans lesquels est impliqué «un agent de la fon c tion publique ou toute autre personne agissant à titre officiel». L’État partie se fonde également sur les tr a vaux préparatoires de la Convention pour affirmer qu’aux fins de la Convention pour qu’il y ait torture, il faut qu’il y ait une responsabilité pour des actes de torture attribuables à l’État.

4.4 L’État partie se réfère à cet égard à la jurisprudence du Comité. Dans l’affaire G. R. B.  c.  Suède a , le Comité a, en effet, estimé que l’article 3 de la Convention n’était pas applicable aux actes infligés par une entité non gouvernementale sans le consentement exprès ou tacite de l’État partie. Dans l’affaire Elmi c.  Australie b , le Comité a nuancé ce principe dans le cas exceptionnel d’un État sans gouvernement central depuis un certain temps où la communauté internationale a négocié avec des factions belligérantes et où certaines de ces factions ont mis en place des institutions quasi gouvernementales, étant donné que la Convention pouvait s’appliquer aux actes des groupes exerçant de facto les pouvoirs d’un gouvernement.

4.5 L’État partie souligne qu’il y a d’importantes différences de fait et de droit entre le cas à l’examen et la situation dans l’affaire Elmi . Il note que le gouvernement central a été rétabli en Somalie en août 2000 et que les 245 membres de l’Assemblée nationale transitoire ont été élus compte dûment tenu des différents clans en veillant à ce qu’aussi bien les clans minoritaires que les clans dominants soient représentés. En o c tobre 2000, le nouveau Premier Ministre a constitué un gouvernement de 22 ministres dans lequel tous les clans importants étaient représentés. Les membres du clan des Rahanwein y occupent plusieurs postes i m portants et un membre du sous ‑clan des Dabarre détient aussi un portefeuille ministériel. En outre, les a c tuels Président et Premier Ministre étaient des ministres sous le régime de Siad Barre. Le gouvernement national de transition est reconnu par la communauté internationale en tant que gouvernement effectif de la Somalie et, par conséquent, au regard du droit international, ce gouvernement constitue l’autorité étatique compétente aux fins de la Convention. De ce fait, les groupes qui ne relèvent pas du gouvernement national de transition, qui a été mis en place à Mogadishu et qui cherche à établir son contrôle effectif sur l’ensemble de la Somalie et à restaurer pleinement la stabilité et l’ordre, ne peuvent être considérés comme des agents de la fonction publique ou des personnes agissant à titre officiel aux fins de l’article premier de la Convention. Rien ne permet non plus de dire que le gouvernement national de transition consent d’une manière expresse ou tacite aux actes de ces groupes.

4.6 L’État partie insiste sur la distinction entre les actes privés et les actes publics en droit international et les circonstances dans lesquelles des actes privés peuvent être imp u tés à l’État. Citant des doctes co m mentaires c et les décisions de la Cour internationale de Justice d et du Tribunal des différends ir a no ‑américains e ainsi que des décisions de hautes cours nationales f , l’État partie fait observer qu’il est néce s saire que les actes de groupes privés soient étroitement liés à l’État, et notamment que celui ‑ci en soit au courant ou y ait donné son consentement ou qu’ils s’inscrivent dans le cadre de sa politique, pour qu’ils puissent lui être attribués.

4.7 Abordant les faits de la cause, l’État partie mentionne diverses preuves documenta i res g indiquant que les incidents évoqués par le requérant étaient dus à des affrontements entre factions et à des troubles civils plutôt qu’à ses liens familiaux ou à des facteurs pe r sonnels. En particulier, il n’y a aucun élément de preuve attestant que la destruction de la maison du requérant était un acte commis par des personnes qui exécutaient les ordres des dirigeants des Marehan en vue de porter préjudice à d’anciens membres du r é gime de Siad Barre, surtout que le beau ‑frère de Barre contrôlait ce sous ‑clan. De même, en ce qui concerne l’arrestation du requérant par les Marehan et le fait qu’il ait été astreint à un tr a vail forcé, il ne fait aucun doute qu’en fonction des affiliations de l’époque, les circonsta n ces de son arrestation auraient été les mêmes même s’il avait appartenu à une autre tribu. S’agissant de l’assassinat du frère du requérant, puis de son o n cle, par les forces d’Aideed, rien ne prouve que le requérant ait été poursuivi par quiconque en raison des liens que sa famille avait avec le régime de Siad Barre. Quoi qu’il en soit, de tels règlements de compte sont à présent moins fréquents et leurs motivations sont plutôt économiques que polit i ques. En conséquence, l’État partie affirme que ce qui est allégué n’est pas suffisant pour invoquer l’article 3 et un risque de torture en cas de retour.

4.8 Deuxièmement, la requête devrait être considérée irrecevable ratione materiae dans la mesure où le requérant n’a pas démontré l’existence de motifs sérieux de craindre actuellement que lui soit extorqué de l’argent en cas de retour. En tout état de cause, ce n’est pas de torture qu’il s’agit ici. En outre, les craintes du requérant concernent une petite partie de Mogadishu et non l’ensemble de la Somalie et, conformément à la pratique suivie en cas de renvoi, le requérant a la possibilité de choisir sa destination en Somalie. D’ailleurs, l’État partie n’a pas l’intention de le renvoyer à Mogadishu.

4.9 Pour ce qui est du fond, l’État partie affirme qu’il n’existe aucun motif sérieux de croire que le r e quérant court un risque réel, prévisible et personnel d’être torturé par le nouveau Gouvernement somalien en raison de ses liens familiaux. Il note que la situation générale s’améliore et que les allégations du requ é rant doivent être examinées en fonction des conditions actuelles. Il appelle en outre l’attention sur les no u veaux arrangements concernant l’exercice du pouvoir en Somalie et le fait que de nombreux membres du Go u vernement étaient liés au régime de Siad Barre. Compte tenu de la mise en place d’un nouveau gouve r nement et de la stabilité relative qui s’instaure dans le pays, il n’y a aucune raison de penser que le requ é rant risque d’être soumis à la torture par le Gouvernement s’il est renvoyé en Somalie que ce soit du fait de ses liens familiaux avec Siad Barre, de son appartenance à un clan donné ou pour tout autre motif.

4.10 L’État partie affirme que le requérant ne court en outre aucun risque réel, prévisible et personnel d’être torturé par les forces d’Aideed ou d’autres sous ‑clans. Il note que d e puis la mise en place du nouveau Gouvernement, il n’y a apparemment plus de combats prolongés dans la capitale et qu’il contesterait toute affirmation selon laquelle les factions armées en présence dans le pays exerceraient une autorité quasi go u vernementale. Depuis 1999, la région de Bay a connu une paix relative et, selon la Rapporteuse spéciale de l’ONU h , la vie reprend son cours à Baidoa. Quelle que soit la situation passée, il n’y a aucun signe de m e naces actuelles de la part du clan des Marehan ou des forces d’Aideed. Le fait est qu’Aideed est le Président du Conseil de réconciliation et de reconstruction de la Somalie créé en mars 2001, dont les Rahanwein et d’autres clans sont membres. Les rapports de force entre les clans et les liens d’allégeance ont beaucoup changé depuis la fuite du requérant. L’État partie affirme que même si le risque d’être victime des affrontements entre factions subsiste à Mogadishu et dans le sud de la Somalie, avec la mise en place d’un gouve r nement central, c’est l’ensemble de la population qui est en butte à ce risque, qui n’a rien de personnel.

4.11 Même si le requérant est renvoyé à Mogadishu, ce qui n’est pas l’intention de l’État partie, il pou r rait se réinstaller dans la région relativement stable du nord ‑ouest ou du nord ‑est. L’État partie propose pl u tôt que le requérant soit envoyé au Kenya pour qu’il puisse bénéficier du programme de rapatriement volo n taire du HCR pour se rendre dans une région stable de son choix.

Commentaires du requérant

5.1 Dans une lettre datée du 27 mars 2002, le requérant a formulé des commentaires sur les observ a tions de l’État partie. Pour ce qui est de la recevabilité de la requête, il reconnaît que ses allégations ont été examinées en Australie avant la présentation de la requête mais estime qu’avec l’épuisement des recours internes le Comité peut les examiner. Le requérant affirme que le principe adopté dans l’affaire Elmi est applicable à son cas, faisant valoir que l’évaluation par l’État partie de la situation politique en Somalie ne résiste pas à une réalité qui est connue de tous. Il affirme qu’il n’y a pas de gouvernement central en Som a lie et que les milices agissent d’une manière organisée pour réprimer d’autres clans.

5.2 Sur le fond, le requérant rejette les observations de l’État partie, affirmant que le climat politique et militaire demeure instable et qu’il risque d’être torturé. Il rejette l’affirmation selon laquelle la situation a suffisamment changé pour qu’il n’ait plus de crainte à se faire et que la plupart des actes de violence qui se produisent actuellement ont des causes privées. Il se réfère à divers rapports indiquant que l’instabilité pe r siste et qu’il règne un climat caractérisé par l’existence de risques de violations des droits de l’homme. Le requérant fait valoir que le gouvernement national de transition exerce un pouvoir re s treint dans le pays étant plutôt confiné dans Mogadishu. Il affirme en outre que les déclar a tions de l’État partie selon lesquelles un gouvernement central serait en place sont contr e dites par les instructions de voyage données par le Gouvernement australien qui d é conseille à ses concitoyens de se rendre en Somalie.

5.3 Le requérant ne partage pas non plus l’opinion selon laquelle il doit apporter la preuve directe qu’il serait soumis à la torture en Somalie, affirmant qu’il est rare qu’un risque de cette nature puisse être prouvé d’une manière absolue. Le requérant conteste aussi qu’il puisse être réinstallé dans une autre partie de la Somalie que la région de Bay, dont il est originaire, notant simplement qu’actuellement le HCR ne rapatrie pas des personnes se trouvant dans la position du requérant dans les régions du Puntland ou du Somaliland.

Délibérations du Comité

6.1 Le Comité a examiné la communication en tenant compte de toutes les informations communiquées par les parties, conformément au paragraphe 4 de l’article 22 de la Convention.

6.2 Avant d’examiner toute plainte figurant dans une requête, le Comité contre la torture doit déterm i ner si elle est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. À cette fin, le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même que s tion n’a pas été examinée et n’est pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement. Le Comité s’est également assuré, comme l’exige le paragraphe 5 b) de l’article 22, que les recours internes ont été épuisés.

6.3 Le Comité considère que les allégations formulées dans la requête ont été étayées aux fins de la recevabilité et que le requérant a présenté les faits et les fondements de sa plainte d’une manière suffisa m ment détaillée pour que le Comité puisse prendre une décision. S’agissant des arguments de l’État partie selon lesquels la communication est irrecevable ratione materiae , le Comité considère qu’il est préférable d’aborder les questions relatives à la portée des articles 1 er  et 3 et à l’applicabilité de ces articles aux faits de la cause au stade de l’examen du fond. En conséquence, il estime qu’il n’y a aucun obstacle à la recevabilité de la requête. Comme l’État partie et le requérant ont tous deux formulé leurs observations sur le contenu de la requête, le Comité procède sans plus tarder à son examen quant au fond.

6.4 Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle l’obligation faite à l’État partie à l’article 3 de la Convention de ne pas renvoyer contre son gré une personne dans un autre État s’il existe de sérieux motifs de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture − telle qu’elle est définie à l’article premier de la Convention − requiert que les actes visés soient commis par «un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre off i ciel». En conséquence, dans l’affaire G. R. B. c.  Suède i le Comité a estimé que les allég a tions faisant état d’un risque d’être torturé par le Sentier lumineux, entité non étatique contrôlant d’importantes parties du Pérou, étaient en dehors du champ d’application de l’article 3 de la Convention. D’autre part, dans l’affaire Elmi  c.  Australie j , le Comité a jugé que, dans des circonstances exceptionnelles caractérisées par l’absence totale d’une autor i té étatique, la définition figurant à l’article premier pouvait englober les actes des groupes exerçant une autorité quasi gouvernementale auxquels s’appliqueraient alors les dispos i tions de l’article 3. Le Comité considère que trois années se sont écoulées depuis la déc i sion dans l’affaire Elmi , et que la Somalie possède actuellement une autorité étatique rev ê tant la forme d’un gouvernement national de transition qui a des relations avec la comm u nauté internationale encore que que l ques doutes puissent exister quant à l’étendue de son pouvoir territorial et à sa longévité. En conséquence le Comité n’est pas d’avis que la s i tuation exceptionnelle décrite dans l’affaire Elmi puisse être invoquée en l’espèce et appl i que sa règle générale selon laquelle les actes d’entités non gouvernementales sont en d e hors du champ d’application de l’article 3 de la Convention.

6.5 De plus, le Comité a tenu compte de toutes les considérations pertinentes, y compris de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives, bien que l’existence dans un pays d’un tel ensemble de violations des droits de l’homme ne constitue pas en soi un motif suffisant pour conclure qu’une personne risquerait d’être soumise à la torture à son retour dans ce pays; il doit exister des motifs supplémentaires de penser que l’intéressé serait personnellement en danger. En l’espèce, le Comité considère que le requérant n’a pas montré qu’il existait des motifs sérieux de croire qu’il était personnellement exposé au risque d’être soumis à la torture s’il était renvoyé en Somalie.

6.6 Le Comité note aussi que l’État partie n’a pas l’intention de renvoyer le requérant à Mogadishu, mesure sur laquelle portent ses principales allégations au titre de l’article 3, et que le requérant sera en outre libre de bénéficier du programme de rapatriement du HCR et de choisir la région de la Somalie où il so u haite retourner.

7. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants est d’avis que le renvoi du requérant d’Australie ne constituerait pas une violation de l’article 3 ni de l’article 16 de la Convention.

11. Requête n o 178/2001

Présentée par : H. O. (nom supprimé) [représenté par un conseil]

Au nom de : Le requérant

État partie : Suède

Date de la requête : 11 janvier 2001

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 13 novembre 2001,

Ayant achevé l’examen de la requête n o  178/2001, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant est H. O., citoyen iranien né le 18 mars 1973, résidant actuellement en Suède où il demande le statut de réfugié. Il affirme qu’en le renvoyant en Iran après l’avoir débouté de sa demande, la Suède violerait l’article 3 de la Convention. Il est représenté par un conseil.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a porté la requête n° 178/2001 à la connaissance de l’État partie, le 23 janvier 2001. Il lui a demandé, en vertu du paragr a phe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur, de ne pas expulser l’auteur vers l’Iran tant que sa requête serait en cours d’examen. Dans une lettre datée du 20 mars 2001, l’État partie a informé le Comité que le Conseil suédois de l’immigration avait décidé, le 24 janvier 2001, de surseoir à l’exécution de l’arrêté d’expulsion.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le conseil indique que le requérant est d’ascendance kurde, qu’il vient de la ville de Sanandaj et qu’il avait commencé en 1990 à prendre part à des activités politiques v i sant à défendre les intérêts du peuple kurde et à lutter contre le régime islamique. Ces act i vités consistaient notamment à retourner les po r traits de l’Ayatollah et à encourager les élèves de son école à participer à des manifestations. En f é vrier 1994, le requérant aurait été arrêté par les forces révolutionnaires et accusé d’avoir distribué des tracts dans son école et écrit des slogans hostiles au régime. Il affirme qu’il a été interrogé pendant deux jours et qu’il a ensuite subi diverses tortures, notamment des coups sur la plante des pieds. Il aurait été remis en l i berté après deux mois de détention. Il avait alors appris qu’il avait été exclu de son école. Il aurait travaillé ensuite comme chauffeur de taxi. Après sa libér a tion, le requérant aurait cessé toute activité politique par crainte d’être persécuté.

2.2 Le 22 février 1999, des manifestations officiellement autorisées ont eu lieu à Sanandaj pour prote s ter contre l’arrestation à Nairobi, par le Gouvernement turc, du dirigeant du PKK, Abdullah Oçalan. D’après le requérant, le régime iranien avait pour but de dresser la population kurde contre les Gouvernements des États-Unis et d’Israël.

2.3 Le requérant et une quinzaine de ses amis ont conçu le projet de mettre à profit ces manifestations pour dénoncer les injustices endurées par la population kurde en Iran. Ils ont préparé des affiches et des tracts où figuraient des slogans hostiles à l’Iran et favorables au Kurdistan. Une fois qu’ils ont commencé à manifester, des milliers de personnes se sont jointes à eux et se sont mises à scander des slogans hostiles au régime tandis que l’auteur et ses amis distribuaient affiches et tracts. Les forces armées et les forces révol u tionnaires ont ouvert le feu sur les manifestants et ont procédé à de nombreuses arrestations. Un ami du requérant, Jamil, a été abattu et le requérant a pris la fuite; considérant qu’il était trop risqué de rejoindre sa famille, il s’est caché chez un ami pendant 13 jours. C’est là qu’il a appris que les gardiens de la révol u tion étaient venus arrêter son père et son frère chez eux. Le requérant a alors changé de cachette, trouvant refuge chez un parent à Ourmiyeh où il est resté 24 jours. Un autre parent lui a procuré un faux passeport ainsi qu’un visa de sortie. Le requérant s’est ensuite rendu à Van puis à Istanbul en Turquie. Vingt jours plus tard, il a pris l’avion pour la Suède.

2.4 Le requérant est entré en Suède le 21 avril 1999 et a demandé l’asile le lendemain. À son arrivée, il n’avait sur lui ni passeport ni aucune autre pièce d’identité. Le 22 avril 1999, le Conseil suédois de l’immigration a eu avec lui un premier entretien, qui a duré environ une heure et au cours duquel il a été invité à fournir des informations de base. Le 20 mai, a eu lieu un entretien plus approfondi, qui a duré env i ron quatre heures. Le 8 septembre 1999, le Conseil suédois de l’immigration a rejeté la demande d’asile au motif qu’elle n’était pas crédible et que le requérant n’avait pas prouvé qu’il risquait d’être persécuté s’il était renvoyé en Iran.

2.5 Le requérant a alors fait appel de cette décision auprès de la Commission de recours des étrangers, à laquelle il a notamment précisé que s’il n’avait aucune pièce d’identité sur lui à son arrivée en Suède, c’était parce qu’il avait été contraint de donner ces documents au passeur qui l’avait amené là-bas. Il a ajouté que les autorités iraniennes s’étaient par deux fois rendues au domicile de sa famille pour demander des rense i gnements sur lui. La Commission de recours des étrangers a rejeté le recours du requérant le 11 août 2000.

2.6 Le 1 er  septembre 2000, le requérant a adressé à la Commission de recours des étrangers une nouvelle demande d’asile et de permis de séjour, dans laquelle il fournissait de nouvelles informations: son père et son frère avaient été remis en liberté et les autorités iraniennes avaient de nouveau cherché à savoir où il se trouvait. Il mentionnait aussi un appel émanant du Conseil des réfugiés iraniens de Stoc k holm dans lequel cet organisme disait craindre pour la sécurité du requérant au cas où il serait expulsé vers l’Iran. Enfin, il invoquait, à l’appui de sa demande de permis de séjour, des raisons humanitaires fondées sur la déclaration d’un spécialiste en psychiatrie d’après laquelle le requérant souffrait de troubles post-traumatiques se traduisant par une profonde dépression accompagnée du souvenir vivace des tortures qu’il avait subies et par des tendances suicidaires très prono n cées. Le 5 octobre 2000, la Commission de recours des étrangers a, une nouvelle fois, rej e té sa demande.

2.7 Le 7 novembre 2000, le requérant a déposé auprès de la Commission de recours des étrangers une nouvelle demande accompagnée, d’une part, d’informations visant à préciser celles qu’il avait fournies aux étapes précédentes de la procédure et, d’autre part, d’une nouvelle déclaration émanant d’un psychiatre fa i sant état de troubles post-traumatiques et d’un risque considérable de suicide. La Commission a rejeté la demande le 12 décembre 2000.

Teneur de la requête

3. Le conseil indique que H. O. craint, s’il est renvoyé en Iran, d’être arrêté pour avoir participé aux manifestations hostiles au régime qui ont eu lieu à Sanandaj en février 1999. En outre, selon lui, les autor i tés iraniennes examineront probablement son cas à la lumière des activités qu’il a menées au début des a n nées 90 et en concluront qu’il milite en faveur de l’indépendance des Kurdes et contre le régime iranien, ce que le régime considérera comme une grave infraction politique avec toutes les conséquences que cela i m plique. Le conseil ajoute qu’il existe, en Iran, un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, dont sont en particulier victimes les opposants politiques et religieux, et que tout porte à croire que l’auteur sera soumis à la torture ou à d’autres traitements inhumains s’il est renvoyé en Iran.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4. Dans ses observations du 29 mars 2001, l’État partie ne conteste pas la recevabilité de la requête puisque les recours internes ont été épuisés avec la décision de la Commission de recours des étrangers en date du 5 octobre 2000. Toutefois, il fait observer que le requérant peut, en vertu de l’article 5 b) du chap i tre 2 de la loi sur les étrangers, faire à tout moment une nouvelle demande de permis de séjour auprès de la Commission de recours des étrangers à condition d’invoquer de nouvelles circonstances susceptibles d’entraîner une décision différente.

Commentaires du conseil sur les observations de l’État partie

5. Dans une lettre datée du 24 avril 2001, le conseil reprend les arguments avancés dans sa première communication. Il relève en outre que le principal reproche que l’on peut, dans cette affaire, adresser aux autorités responsables de l’immigration est qu’elles appliquent de manière erronée les articles 1 et 2 du ch a pitre 8 de la loi sur les étrangers.

Observations de l’État partie sur le fond

6.1 Dans ses observations du 21 juin 2001, l’État partie donne des informations sur le fond de l’affaire.

6.2 L’État partie rappelle les critères énoncés dans l’article 3 de la Convention et par le Comité, à s a voir, premièrement, que la situation générale des droits de l’homme dans le pays doit être prise en consid é ration et, deuxièmement, que l’intéressé doit courir personnellement le risque d’être soumis à la torture, et notamment que cette torture doit être une conséquence nécessaire et prévisible du renvoi de l’intéressé dans son pays.

6.3 S’agissant du premier critère, l’État partie note que même si des signes donnent à penser que la s o ciété iranienne connaît des changements susceptibles d’apporter des améliorations dans le domaine des droits de l’homme, l’Iran continuerait, d’après les informations disponibles, à commettre de nombreuses violations des droits de l’homme.

6.4 S’agissant du second critère, l’État partie conteste que le requérant coure un risque prévisible, réel et personnel d’être torturé s’il est renvoyé en Iran. Il souligne que les incohérences et les lacunes dans la version des faits donnée par H. O. font naître de sérieux doutes quant à sa crédibilité et à l’exactitude des faits rapportés. L’État partie renvoie aux règles énoncées dans le Guide des procédures et critères à appl i quer pour déterminer le statut de réfugié, établi par le HCR (Genève, 1992), aux termes duquel (par. 205) «le demandeur doit i) dire la vérité et prêter tout son concours à l’examinateur pour l’établissement des faits [et] ii) s’efforcer d’apporter à l’appui de ses affirmations tous les éléments de preuve dont il dispose et e x pliquer de façon satisfaisante toute absence de preuve. Si besoin, il doit s’efforcer de fournir des éléments de preuve supplémentaires.».

6.5 À cet égard, l’État fait observer que le requérant n’a apporté aucun élément de preuve à l’appui de l’affirmation selon laquelle son frère et son père ont été arrêtés et n’a fourni ni certificat ou autre document de ce genre concernant l’interruption de ses études, ni informations précises sur l’endroit où il était détenu ou sur la détention et la remise en liberté de son père et de son frère.

6.6 En outre, l’État partie fait observer que le requérant a déclaré au Conseil suédois de l’immigration que s’il était renvoyé en Iran, il serait accusé d’avoir organisé la manifestation de Sanandaj. Or, lorsqu’il a appris que les autorités suédoises mettaient en doute cette affirmation, il a déclaré qu’il avait bien participé à cette manifestation mais qu’il ne l’avait pas organisée. L’État partie rappelle aussi à cet égard que le r e quérant a affirmé que 20 personnes avaient été tuées pendant la manifestation de Sanandaj, affirmation qui doit être confrontée aux informations selon lesquelles une vingtaine de personnes ont été tuées lors des m a nifestations organisées à cette époque dans l’ensemble du pays.

6.7 Lorsque le Conseil suédois de l’immigration avait demandé à H. O. comment, à son avis, les autor i tés iraniennes étaient au courant de sa participation à la manifestation, il a répondu qu’il pensait avoir été filmé depuis un hélicoptère. D’après l’État partie, il est i m probable que l’on puisse ainsi identifier que l qu’un au sein d’une foule de plusieurs milliers de personnes en mouvement. Confronté à cet argument, H. O. a mentionné d’autres m é thodes d’identification.

6.8 D’après l’État partie, le requérant a donné des informations contradictoires sur le lieu de détention de son père et de son frère. Dans un premier temps, il a affirmé qu’ils étaient détenus à Ourmia avant de dire qu’ils étaient détenus à Sanandaj. Il a également modifié sa version en ce qui concerne le nom de l’ami qui aurait été abattu pendant les manifestations de 1999. D’après l’État partie, le requérant s’est également contredit au sujet de la question de savoir si sa famille était politiquement active. Au Conseil suédois de l’immigration, il a déclaré qu’à part son frère décédé, aucun membre de sa famille n’avait milité sur le te r rain politique alors que dans sa communication au Comité, il déclarait que sa famille était politiquement active depuis des années. L’État partie rappelle en outre que H. O. a déclaré au Conseil suédois de l’immigration que son passeport avait été détruit en Turquie avant d’affirmer qu’il avait remis son faux passeport au passeur qui l’avait aidé à se rendre en Suède.

6.9 Quant au diagnostic de troubles post ‑traumatiques dont le requérant souffrirait, l’État partie estime qu’il compte pour beaucoup dans l’évaluation globale de la crédibilité de l’auteur. Il note que les rapports médicaux produits semblent reposer uniquement sur les déclarations faites par le requérant. Celui ‑ci ne po r terait aucune marque physique attestant les tortures qu’il aurait subies. D’ailleurs, il a lui ‑même affirmé qu’à l’époque où il avait été battu, il n’avait aucune marque de blessure visible et n’avait pas eu besoin de consulter un médecin. En outre, les troubles psychiatriques n’avaient été mentionnés ni lors des auditions précédentes ni dans la demande adressée au Conseil suédois de l’immigration ni dans le premier recours formé devant la Commission de recours.

6.10 Étant donné ce qui précède, l’État partie estime avoir des raisons de mettre en doute, sur plusieurs points, la version des faits donnée par le requérant et par conséquent de douter que tout ce qu’il avance soit digne de foi. Se référant à la communication n o  149/1999 ( A. S.  c. Suède) , l’État partie estime que le requ é rant n’a pas fourni assez d’informations pour déplacer la charge de la preuve.

6.11 L’État partie ne souscrit donc pas à la version des faits présentée par H. O. Même si elle était jugée crédible, il considère que le requérant n’a toujours pas établi clairement qu’il risquait d’être arrêté ou torturé s’il était renvoyé en Iran. À l’évidence, il n’a jamais joué un rôle de premier plan dans l’opposition au r é gime et n’a même pas été membre de Komala. Par ailleurs, il n’a pas affirmé avoir été fiché par les autorités en raison de ses sympathies politiques mais a déclaré que les autorités ne s’étaient pas intéressées à lui jusqu’à la manifestation de février 1999.

6.12 L’État partie conclut que le requérant n’a pas étayé son allégation selon laquelle il courrait un ri s que personnel, réel et prévisible d’être torturé s’il était renvoyé en Iran; un arrêté d’expulsion ne violerait donc pas l’article 3 de la Convention.

Commentaires du requérant sur les observations de l’État partie

7.1 S’agissant de l’observation de l’État partie concernant l’affirmation de H. O. qui avait dit qu’il avait été identifié par un hélicoptère lors de la manifestation, le conseil fait observer que H. O. voulait dire qu’il avait pu être identifié par un hélicoptère ou par un autre moyen.

7.2 En outre, le conseil indique que le requérant a seulement déclaré que son frère militait au sein d’une organisation politique kurde et n’a mentionné à ce propos aucun des autres membres de la famille. Lorsque, dans sa requête au Comité, il a déclaré que sa famille était politiquement active depuis des années, il voulait dire que sa famille était considérée comme jouant un rôle politique en raison des activités politiques menées par lui ‑même et par son frère. Le conseil souligne aussi que les informations sur la détention du père et du frère du requérant que celui ‑ci avait reçues émanaient de sa mère et lui étaient parvenues par l’intermédiaire d’un ami car il n’avait pas été en mesure d’établir un contact direct avec les siens.

7.3 Le conseil affirme que lorsqu’il examine une demande de statut de réfugié, l’État partie n’applique pas les mêmes critères que ceux énoncés par le Comité. Il fait valoir que souvent, l’État partie ne tient pas compte des pièces produites par le requérant, notamment des documents médicaux. S’agissant de l’allégation de l’État partie qui objecte que le requérant ne s’est pas acquitté de son obligation de fournir des informations solidement documentées, le conseil indique que l’État partie accorde rarement de l’importance à de tels éléments de preuve. Il s’étonne donc qu’en l’espèce, l’État partie justifie le rejet de la demande par l’absence d’éléments de preuve de cette nature. En outre, il n’a pas été possible de retrouver des documents relatifs à la détention de H. O. en 1994 et à celle de son père et de son frère en février 1999. En effet, soul i gne le conseil, le requérant a quitté l’Iran dans la précipitation et n’a donc pas été en mesure de rassembler des documents.

7.4 Le conseil explique que si les problèmes de santé mentale n’ont pas été mentionnés au début de la procédure c’est parce que le requérant ne savait pas quelles informations il devait communiquer. Le conseil souligne, à ce sujet, que le requérant n’a reçu qu’une éducation élémentaire.

7.5 S’agissant de l’allégation de l’État partie qui dit que H. O. a déclaré avoir été l’un des organisateurs des manifestations de Sarandaj, le conseil souligne qu’après avoir pris conscience que l’État partie avait surestimé son niveau de participation à ces manifestations, le requérant a fourni les éclaircissements néce s saires.

7.6 En général, le conseil relève que les malentendus surviennent souvent pendant les entrevues avec les demandeurs d’asile parce que ceux ‑ci sont épuisés par un long voyage et par des expériences traumat i santes et qu’ils sont terrifiés par les autorités.

Observations supplémentaires de l’État partie

8.1 Le 2 octobre 2001, l’État partie a communiqué de nouvelles observations conce r nant le fond de l’affaire. Il a contesté la déclaration du conseil pour qui il serait vain de présenter des documents aux autor i tés suédoises. Il souligne que les autorités suédoises responsables de l’immigration examinent d’une m a nière aussi approfondie que possible toutes les affaires qui leur sont soumises ainsi que tout élément de preuve produit.

8.2 L’État partie note que le requérant a fondé sa demande sur l’arrestation présumée de son frère et de son père bien qu’il n’ait pas été en mesure de prendre contact avec l’une ou l’autre de ces personnes ni de fournir des documents les concernant. L’État partie considère que H. O. devrait au moins être en mesure d’expliquer quand il a eu des nouvelles de sa famille pour la dernière fois, quels efforts il a fait pour entrer en contact avec elle et pourquoi il n’y est pas parvenu. En outre, l’État partie renvoie à la communication n° 109/1998, K. M. c. Suisse , et affirme que rien ne donne à penser que des membres de la famille du requ é rant ont été intimidés depuis la mise en liberté de son frère et de son père au milieu de l’année 1999.

8.3 Pour ce qui est de la crédibilité du requérant, l’État partie explique que lors des deux entrevues avec le personnel du Conseil suédois de l’immigration, H. O. a déclaré qu’il comprenait l’interprète. Lors de la seconde entrevue, qui a eu lieu un mois après son arrivée en Suède, le compte rendu de l’entrevue a été lu à haute voix et traduit à H. O., qui n’en a pas contesté la teneur. Lorsqu’on lui a demandé quel était son état de santé, il a répondu qu’il était bon. L’État partie souligne que le requérant n’a pas fait état, lors de ses deux entretiens avec le personnel du Conseil suédois de l’immigration, des séquelles des tortures qu’il aurait subies en 1994.

Commentaires supplémentaires du requérant

9.1 Le 25 octobre 2001, le conseil a fait parvenir de nouveaux commentaires concernant la réponse de l’État partie datée du 2 octobre 2001. En ce qui concerne l’argument de l’État partie qui objecte que le r e quérant aurait dû apporter des documents à l’appui de sa plainte, il fait valoir qu’il est risqué et donc diff i cile de se faire envoyer des documents d’Iran.

9.2 En ce qui concerne l’argument de l’État partie qui considère que rien ne donne à penser que des membres de la famille du requérant ont été intimidés après le milieu de 1999, le conseil répond que les aut o rités iraniennes ont recherché H. O. après les manifestations de 1999 mais qu’elles ont probablement arrêté de le chercher parce qu’elles ont compris qu’il avait quitté l’Iran. Cela étant, ce n’est pas parce que le r e quérant n’a pas reçu de nouvelles lui apprenant que sa famille a été inquiétée après 1999 que les autorités iraniennes ne s’intéressent plus à lui.

9.3 Le conseil mentionne aussi un rapport de 2000 écrit par un professeur de la faculté de psychologie de l’Université de Stockholm, M me Gitte Stedt, qui critique la façon dont le Conseil suédois de l’immigration mène les entretiens des demandeurs d’asile. En particulier, elle dit que les fonctionnaires qui interrogent les intéressés n’établissent pas des relations de confiance avec eux et que les questions sont compliquées ce qui est source de malentendus.

Décision concernant la recevabilité et examen quant au fond

10. Avant d’examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité contre la torture doit décider si elle est ou non recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Il s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’alinéa  a du paragraphe 5 de l’article 22, que la même question n’avait pas été examinée ou n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de r è glement. Le Comité note que l’État partie ne soulève aucune objection quant à la recevabilité de la communication (voir les observations de l’État partie datées du 20 mars 2001). Il estime donc qu’il n’y a pas d’obstacle à la recevabilité de la communication et procède donc immédiatement à son examen quant au fond.

11. Le Comité doit déterminer, comme le prévoit le paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, s’il existe des motifs sérieux de croire que le requérant court le risque d’être torturé s’il est renvoyé en Iran. Pour prendre cette décision, le Comité doit tenir compte de toutes les considérations pertinentes, conform é ment au paragraphe 2 de l’article 3, y compris l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives. En d’autres termes, l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme au sens du paragraphe 2 de l’article 3 conforte le sentiment du Comité que des motifs sérieux existent au sens du paragraphe 1.

12. Toutefois, le Comité doit déterminer aussi si l’intéressé risque personnellement d’être soumis à la torture dans le pays vers lequel il serait expulsé. Par conséquent, l’existence d’un ensemble de violations systématiques graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme dans un pays ne saurait constituer en soi un motif suffisant pour conclure qu’un individu risque d’être soumis à la torture après son retour dans son pays; l’existence de motifs supplémentaires est nécessaire afin de pouvoir conclure que l’intéressé est personnellement en danger. De la même manière, l’absence d’un ensemble de violations systématiques et flagrantes des droits de l’homme ne signifie pas qu’une personne ne puisse pas être considérée comme ri s quant d’être soumise à la torture dans la situation particulière qui est la sienne.

13. En l’espèce, le Comité doit donc déterminer si l’expulsion du requérant vers l’Iran aurait comme conséquence prévisible de l’exposer à un risque réel et personnel d’être arrêté et torturé.

14. L’État partie fait état d’incohérences et de contradictions dans les récits du requ é rant, qui l’amènent à douter de la véracité de ses allégations. Le Comité n’a pas de raison de douter de la crédibilité du requ é rant en ce qui concerne sa détention, sa participation à la manifestation de février 1999, la détention de son frère et de son père et les circonsta n ces dans lesquelles il a dû se défaire de son passeport et de ses papiers d’identité. Il cons i dère toutefois, à la lumière des informations fournies, que les activités politiques que H. O. affirme avoir eues avant et pendant la manifestation de février 1999 ne sont pas d’une n a ture telle qu’il puisse en conclure qu’il risque d’être torturé à son retour. Le Comité est conforté dans cette idée par le fait que les autorités iraniennes ne se sont pas intéressées au requérant entre le moment où il a été remis en liberté en 1994 et la manifestation de f é vrier 1999.

15. Se fondant sur les considérations ci ‑dessus, le Comité est d’avis que les informations dont il est saisi ne montrent pas qu’il existe des motifs sérieux de croire que le requérant risque personnellement d’être soumis à la torture s’il est renvoyé en Iran.

16. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, conclut que la décision de l’État partie de renvoyer l’auteur en Iran ne constitue pas une violation de l’article 3 de la Convention.

12. Requête n o 179/2001

Requérant : B. M. (nom supprimé)

Représentée par : Juristfirma Madelaine Seidlitz

État partie : Suède

Date de la requête : 23 mars 2001

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 30 avril 2002,

Ayan achevé l’examen de la requête n o  179/2001, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

1.1 Le requérant est B. M., de nationalité tunisienne, qui se trouve actuellement en Suède où il est fra p pé d’une mesure d’expulsion. Il affirme que son expulsion forcée vers la Tunisie constituerait de la part de la Suède une violation de l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est représenté par un conseil.

1.2 Le 11 avril 2001, le Comité a transmis la communication à l’État partie en le priant de faire des o b servations et lui a demandé, en application du paragraphe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur, de ne pas expulser le requérant vers la Tunisie tant qu’il serait saisi de sa requête. L’État partie a accédé à la d e mande.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le requérant a vécu et travaillé en Arabie saoudite de 1983 à 1998, années pendant lesquelles il a été très actif dans la communauté musulmane; il se réunissait avec d’autres musulmans pour débattre de questions religieuses et recueillait des fonds pour les pauvres et pour les familles des membres du mouv e ment Al ‑Nahda (Parti de la Renaissance) emprisonnés en Tunisie. Sans être membre de ce parti, le requérant en était un partisan actif. Il dit que toutes les organisations musulmanes de Tunisie sont considérées comme des militants politiques opposés au régime tunisien, y compris Al ‑Nahda.

2.2 En 1989, 1990 et 1992, alors que le requérant habitait toujours en Arabie saoudite, il est retourné plusieurs fois en Tunisie. La première fois, en 1989, c’était pour s’occuper de son contrat de mariage. Il a été arrêté à l’aéroport, placé en détention et interrogé en prison puis conduit devant le tribunal de la Kasbah où il a été obligé de signer des aveux dans lesquels il reconnaissait adhérer au wahhabisme, doctrine d’interprétation de l’islam pratiquée en Arabie saoudite. Le requérant aurait été torturé pendant l’interrogatoire.

2.3 En 1990, le requérant est de nouveau retourné en Tunisie pour se marier. Il a été arrêté à l’aéroport, interrogé, accusé de nouveau d’être wahhabite puis remis en liberté. En 1992, le requérant et sa femme sont allés ensemble en Tunisie. Ils ont été arrêtés à l’aéroport et interrogés au sujet des activités et des convi c tions religieuses du requérant. Celui ‑ci a de nouveau été accusé d’être wahhabite et de recueillir des fonds pour les familles des détenus incarcérés à cause de leurs activités contre le régime tunisien. Après l’interrogatoire, ils ont été remis en liberté mais ont été frappés d’une interdiction de voyager. Quelques jours plus tard, des membres de la police en uniforme et en civil ont fait violemment irruption dans la ma i son où ils étaient hébergés. La police a arraché le voile de l’épouse du requérant et a roué celui ‑ci de coups. Les deux époux ont été conduits dans un camp où ils ont été interrogés séparément pendant environ trois heures puis remis en liberté après que le requérant eut signé des aveux reconnaissant qu’il avait adopté les idées wahhabites et obligeait sa femme à porter le voile. Quand les deux époux ont été remis en liberté, un ami du requérant les a aidés à quitter le pays et à rentrer en Arabie saoudite.

2.4 De retour en Arabie saoudite, en 1992, le requérant a repris ses activités dans la communauté m u sulmane. En juillet 1992, il a également reçu un nouveau passeport délivré par l’ambassade de Tunisie à Riyad. En 1993, les autorités tunisiennes ont pris un «décret secret» interdisant à leurs ambassades de dél i vrer ou de renouveler des passeports sans consulter le Ministère tunisien de l’intérieur. Dans le cas des pe r sonnes recherchées, les ambassades ne pouvaient délivrer qu’un laissez ‑passer autorisant un voyage en T u nisie.

2.5 En 1996, le requérant a appris que lui ‑même et d’autres Tunisiens étaient surveillés par l’ambassade de Tunisie. Il a également appris l’arrestation et l’incarcération pendant ses vacances en Tunisie d’un co m patriote qui vivait en Arabie saoudite et que le requérant avait l’habitude de rencontrer pour parler de rel i gion.

2.6 En 1997, un autre Tunisien qui avait le même genre d’activités que le requérant s’est vu refuser le renouvellement de son passeport par l’ambassade de Tunisie à Riyad. Il a ensuite quitté l’Arabie saoudite pour aller en Suisse. En août 1997, le requérant a fait une demande d’asile en Suisse mais l’a retirée parce qu’il n’avait pas de preuve des risques qu’il encourait s’il rentrait en Tunisie et parce qu’il souhaitait vivre en Arabie saoudite; il est donc retourné dans ce pays.

2.7 Le 27 juillet 1997, son passeport ayant expiré, le requérant a demandé sa prorog a tion à l’ambassade de Tunisie à Riyad qui l’a refusée, le 9 novembre 1997, pour «des ra i sons administratives». Le requérant est convaincu que le motif du refus était qu’il était r e cherché par les autorités tunisiennes. Avec l’aide d’amis, il a ensuite essayé d’obtenir un passeport saoudien mais sans succès. Le requérant savait que s’il restait en Arabie saoudite avec un passeport périmé il serait renvoyé de force en Tunisie où il serait arrêté, jeté en prison et très probablement soumis à la torture. Il a persuadé quelqu’un qu’il connaissait en Arabie saoudite de faire de faux tampons pour prolonger la validité de son passeport. Avec l’aide d’amis à lui, il a obtenu un visa d’affaires qui lui a permis d’entrer en Suède, le 26 mars 1998.

2.8 Depuis son arrivée en Suède, le requérant a eu des activités à la mosquée et donne des conférences sur l’islam. Il est convaincu que les autorités tunisiennes le savent. L’épouse du requérant est rentrée en T u nisie. Elle a subi divers types de harcèlements et tracasseries et a fini par être «contrainte» à divorcer. Le 14 mai 1999, le requérant a épousé une femme d’origine tunisienne ayant la nationalité suédoise. Les deux époux ont divorcé depuis, mais ils ont une fille.

2.9 Le 1 er  mars 1999, la demande d’asile et de permis de séjour a été rejetée par le Conseil suédois de l’immigration, et la Commission de recours pour les réfugiés devant laquelle le requérant s’est pourvu l’a déboutée le 28 septembre 2000.

2.10 En février 2001, le requérant a présenté à la Commission de recours pour les réfugiés une deuxième demande d’asile et de permis de séjour, qui a également été rejetée. Il avait produit les faux tampons qu’il avait achetés en Arabie saoudite pour faire prolonger son passeport, une lettre du dirigeant du parti Al ‑Nahda attestant qu’il connaissait personnellement le requérant et que celui ‑ci serait probablement soumis à la torture s’il était expulsé vers la Tunisie et une lettre du Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) indiquant ce qui suit: «Le HCR n’a aucune raison de douter de l’authenticité de l’attestation [le certificat du dirigeant d’Al ‑Nahda]. Par conséquent, et vu que les membres du parti Al ‑Nahda risquent toujours d’être persécutés en Tunisie, nous conseillons de ne pas renvoyer le requérant en Tunisie.».

2.11 Le 6 mars, le requérant a soumis une troisième demande à la Commission de recours pour les étra n gers. Il joignait une lettre d’Amnesty International et le rapport du Département d’État des États ‑Unis décr i vant la situation générale des droits de l’homme en Tunisie. Dans sa lettre Amnesty International indique également qu’à son avis, le requérant risquerait d’être torturé s’il était renvoyé en Tunisie, du fait de ses liens avec le mouvement Al ‑Nahda. Le 19 mars 2001, la Commission des réfugiés a rejeté la demande, en indiquant qu’il n’y avait pas de nouveaux éléments par rapport aux précédentes demandes.

2.12 Le requérant dit que la situation générale des droits de l’homme en Tunisie est très mauvaise. Des milliers de personnes sont jetées en prison pour leurs convictions religieuses ou politiques. Il cite plusieurs rapports d’Amnesty International selon lesquels le risque de persécution des membres et des sympathisants d’Al ‑Nahda est élevé.

Teneur de la requête

3.1 Le requérant affirme que ses liens avec le mouvement Al ‑Nahda, le fait qu’il ait d é jà été arrêté et interrogé par les autorités tunisiennes et l’existence d’un ensemble de viol a tions systématiques et graves des droits de l’homme constituent des motifs suffisants pour penser qu’il risque d’être soumis à la torture s’il est expulsé vers la Tunisie et par cons é quent la Suède commettrait une violation de l’article 3 de la Convention s’il était renvoyé.

3.2 Le requérant fait valoir que la décision du Conseil de l’immigration de lui refuser l’asile reposait sur une appréciation incorrecte des éléments qui lui étaient soumis et qu’il n’a pas été tenu compte de pièces très importantes produites par le requérant, notamment l’attestation du dirigeant d’Al ‑Nahda, la lettre du Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et les informations d’Amnesty International, qui toutes indiquaient spécifiquement que le requérant risquerait d’être soumis à la torture.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond et commentaires du requérant

4.1 L’État partie ne conteste pas la recevabilité de la requête. Le 8 octobre 2001, il a adressé ses obse r vations sur le fond. Il précise que quand le Conseil de l’immigration a rejeté la demande d’asile et de permis de séjour du requérant, il a ordonné en même temps que le requérant soit expulsé vers la Tunisie ou vers l’Arabie saoudite.

4.2 L’État partie fait valoir qu’il appartient au premier chef au requérant de recueillir et de présenter les éléments à l’appui de ses griefs a . De plus, il est d’avis que l’autorité n a tionale compétente pour conduire l’audience sur la demande d’asile est le mieux à même de juger de la véracité générale des propos du requ é rant et qu’il faut donc accorder un grand crédit à son appréciation. D’après l’État partie le requérant n’a pas apporté d’éléments permettant de montrer qu’il court personnellement un risque réel et prévisible de torture en cas de renvoi en Tunisie.

4.3 En ce qui concerne l’allégation du requérant qui affirme avoir subi des actes d’intimidation de la part de la police du fait de ses convictions politiques et religieuses en 1989, 1990 et 1992, l’État partie fait valoir que les incidents de 1989 pas plus que ceux de 1990 ne l’ont empêché de retourner dans son pays. Or, l’incident de 1989 semble avoir constitué la violation la plus grave de ses droits. L’État partie souligne que le requérant n’a donné à ce sujet aucun détail permettant de savoir en quoi consistaient les violations s u bies, aucune information sur les séquelles éventuelles et aucun élément étayant sa plainte et se réfère à l’Observation générale du Comité concernant l’application de l’article 3 de la Convention b . Il ajoute que, alors que le requérant était déjà à cette époque accusé entre a u tres choses de soutenir financièrement les familles des personnes incarcérées pour des a c tivités dirigées contre le régime, il n’a jamais été condamné du fait des accusations portées contre lui. Au contraire et selon le requérant lui ‑même, le tribunal a délivré en 1989 une attestation certifiant qu’il n’était pas recherché par les autorités. L’État partie fait valoir que les deux autres fois où le requérant dit avoir été interrogé, il ne dit pas qu’il a été to r turé et à ce sujet l’État partie relève qu’un risque de détention n’est pas suffisant pour justifier l’application de l’article 3 de la Convention et renvoie à l’affaire I. A. O . c. Suède c .

4.4 L’État partie objecte que le fait d’avoir été surveillé par les autorités tunisiennes depuis son arrivée en Arabie saoudite n’a pas été étayé et que rien n’indique que les aut o rités connaissaient ses activités en Arabie saoudite ou s’intéressaient particulièrement à lui à un autre moment entre 1992 et 1997. Dans ce contexte, le requérant n’a pas signalé que d’autres Tunisiens qui participaient aux activités qui d’après lui avaient motivé son arre s tation avaient été torturés d . De plus l’État partie relève que le requérant a obtenu un nouveau passeport délivré par l’ambassade de Tunisie en juillet 1992 et semble avoir eu des contacts avec l’ambassade sans que celle ‑ci ne lui signifie à aucun moment qu’il était recherché par les autorités tunisie n nes ou qu’il devait rentrer en Tunisie.

4.5 Compte tenu de ce qui précède, l’État partie fait valoir que l’allégation de l’auteur qui affirme qu’en 1997 le renouvellement de son passeport a été refusé parce qu’il était recherché par les autorités tun i siennes en vue de son arrestation paraît douteuse. Pour ce qui est du décret de 1993 interdisant la délivrance de passeport aux nationaux tunisiens recherchés, l’État partie n’a reçu aucun renseignement permettant de confirmer l’existence d’un tel texte. Sur le certificat de l’ambassade fourni par le requérant le motif du refus de renouveler le passeport est justifié par «des causes purement administratives» et le requérant n’a pas montré que la raison était autre.

4.6 L’État partie évoque également deux griefs avancés par le requérant pendant la procédure d’immigration. D’abord il avait dit que sa femme lui avait écrit et se plaignait d’avoir subi des actes d’intimidation de la part de la police une fois rentrée en Tunisie. Deuxièmement il avait dit avoir appris que son père avait été interrogé en 1994 par la police au sujet de ses allées et venues. Sur le premier point, l’État partie note que le requérant n’a donné aucun détail concernant les circonstances dans lesquelles se seraient produits les actes d’intimidation, qu’il n’a pas montré les lettres ni expliqué pourquoi il ne le faisait pas. Sur le deuxième point, l’État partie affirme que les documents que le requérant a apportés comme preuve ont été examinés par la Commission de recours pour les réfugiés quand elle a statué pour la première fois et n’ont pas été jugés authentiques pour plusieurs raisons.

4.7 En ce qui concerne la deuxième lettre signée du dirigeant du parti Al ‑Nadha, l’État partie fait valoir que «étant donné l’appréciation donnée du premier certificat, la fiabilité du deuxième peut être contestée». La Commission de recours avait décidé que le premier certificat avait été établi sans que le dirigeant du pa r ti connaisse personnellement le requérant.

4.8 En ce qui concerne la lettre du HCR, l’État partie dit qu’il apparaît qu’elle reposait uniquement sur le certificat du dirigeant d’Al ‑Nadha et, bien que l’État partie croie à l’authenticité du certificat, le HCR pour sa part ne semble pas s’être interrogé sur sa fiabilité. De plus rien n’indique que le HCR ait évalué le «risque prévisible, réel et personnel» dans son appréciation.

4.9 Pour ce qui est de la lettre d’Amnesty International, l’État partie objecte d’abord qu’il n’est pas possible de savoir d’après cette lettre quels sont les faits que le requérant a soumis à cette organisation. Ai n si on ne peut pas exclure qu’il puisse y avoir des différe n ces notables de contenu et de détail entre les re n seignements dont disposaient les autorités d’immigration et ceux dont disposait Amnesty International. E n suite, rien dans la note n’indique qu’Amnesty International ait procédé à la moindre évaluation de la crédibilité de l’exposé des faits donnés par le requérant. Rien n’indique non plus que le risque «prévisible, réel et personnel», encouru par le requérant au sens de la Convention contre la torture, ait été apprécié. En cons é quence l’État partie est d’avis que la conclusion de cette lettre ne peut avoir qu’une portée limitée pour a p précier les faits dans l’affaire à l’étude. En outre il précise que des rapports d’organisations comme Amne s ty International font partie de la documentation soumise aux autorités suédoises d’immigration pour qu’elles étudient un dossier avant de se prononcer.

4.10 À l’argument du requérant qui dit risquer d’être arrêté et torturé non seulement en raison de ses liens avec Al ‑Nadha mais aussi pour être entré en Suède muni d’un passeport tunisien falsifié, l’État partie répond premièrement que la Commission était d’avis que le requérant n’avait pas falsifié son passeport. Deuxièmement rien n’indique que même si le requérant était accusé en Tunisie d’avoir falsifié son passeport il subirait des mauvais traitements ou des tortures. Troisièmement aucun renseignement n’a été donné pe r mettant de penser que les autorités tunisiennes sauraient que le requérant était muni d’un passeport illégal.

4.11 Tous les arguments développés ci ‑dessus conduisent l’État partie à douter de la véracité générale des dires du requérant. À son avis, celui ‑ci ne devrait pas avoir «le bénéfice du doute» s’il ne donne pas des détails et des éléments supplémentaires e .

4.12 L’État partie ne nie pas que la situation générale des droits de l’homme en Tunisie soit «loin d’être idéale» et renvoie au rapport d’Amnesty International pour l’année 2001 et au rapport sur les pratiques en matière de droits de l’homme en Tunisie du Département d’État des États ‑Unis pour l’année 2000. Il laisse au Comité le soin de déterminer si cette situation constitue un ensemble systématique de violations graves, flagrantes et massives des droits de l’homme.

4.13 En ce qui concerne l’éventualité de l’expulsion vers l’Arabie saoudite, l’État partie note que le r e quérant n’a pas dit qu’il était recherché dans ce pays ou qu’il y serait arrêté et torturé. Toutefois, d’après l’État partie il faut que le requérant prouve qu’il y a un risque prévisible, réel et personnel qu’il soit torturé s’il est renvoyé depuis l’Arabie saoudite vers la Tunisie. D’après lui, les étrangers ont le droit d’habiter et de travailler en Arabie saoudite à condition qu’un citoyen saoudien ou une entreprise saoudienne se porte garant et à condition d’avoir un permis de séjour valable. Le requérant a vécu en Arabie saoudite pendant 15 ans et doit donc forcément avoir un garant. L’État partie fait valoir que le requérant n’a donné aucune précision tendant à indiquer que son permis de séjour en Arabie saoudite ne serait pas prolongé s’il était renvoyé dans ce pays, ni que les autorités le r e mettraient aux autorités tunisiennes. En fait, le requérant a eu l’autorisation de retourner en Arabie saoudite dans les six mois après son départ.

4.14 En réponse aux observations de l’État partie, le requérant conteste la version des faits donnée par celui ‑ci. Au sujet de la lettre d’Amnesty International, le requérant se réfère à une autre lettre d’Amnesty International, en date du 23 novembre 2001, confirmant que les renseignements qui lui ont servi à se pr o noncer sur le cas du requérant étaient ceux «obtenus à l’issue de l’enquête faite par les autorités suédoises d’immigration et les décisions prises par celles ‑ci». Amnesty International ajoutait qu’elle «avait bien procédé à l’évaluation du cas selon le critère du risque “prévisible, réel et personnel”, vu que l’organisation avait maintes fois dénoncé des violations des droits commises contre les membres et les sympathisants d’Al ‑Nahda, ainsi que contre d’autres personnes accusées de soutenir ce mouvement». En ce qui concerne les décisions des autorités suédoises, Amnesty International souligne que même des personnes qui n’avaient que des liens ténus avec Al ‑Nahda ont été soumises à des persécutions en Tunisie.

4.15 Au sujet des renseignements fournis par le Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, le requérant dit qu’ils montraient clairement que tous les membres d’Al ‑Nahda risquent d’être persécutés. Ainsi, cela va même au ‑delà de l’évaluation d’un risque individuel.

4.16 Pour ce qui est de l’attestation du dirigeant d’Al ‑Nahda, le requérant souligne que la deuxième a t testation précise qu’il le connaissait personnellement. Au demeurant, l’État partie lui ‑même a dit qu’il n’y avait pas de raison de douter de l’authenticité de l’attestation.

Délibérations du Comité

5.1 Avant d’examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité contre la torture doit déterminer si la communication est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est a s suré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement et n’est pas en cours d’examen. Le Comité note aussi que tous les recours internes ont été épuisés et qu’il n’existe aucun obstacle à la recevabilité de la communication. Il procède donc à son examen quant au fond.

5.2 Le Comité doit déterminer si le renvoi du requérant en Tunisie constituerait une violation de l’obligation contractée par l’État partie en vertu du paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention de ne pas expulser ni refouler une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture. Pour ce faire, il doit tenir compte de tous les éléments qui entrent en jeu, n o tamment de l’existence, dans l’État de renvoi, d’un ensemble systématique de violations graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme. Il s’agit cependant de déterminer si l’intéressé risquerait personnell e ment d’être soumis à la torture dans le pays où il serait renvoyé. Dès lors, l’existence d’un ensemble de vi o lations flagrantes, graves ou massives des droits de l’homme dans un pays ne constitue pas en soi un motif suffisant pour conclure qu’un individu risquerait d’être victime de tortures à son retour dans ce pays; il faut qu’il existe des raisons supplémenta i res de penser que l’intéressé serait personnellement en danger.

5.3 Le Comité note l’argument du requérant qui fait valoir qu’il y a un risque prévisible pour lui d’être torturé s’il est renvoyé en Tunisie à cause de ses liens avec le mouvement Al ‑Nahda et parce qu’il a déjà été interrogé et torturé par les autorités tunisiennes. Il note toutefois que le requérant ne dit pas qu’il a été membre du mouvement, ni qu’il a eu la moindre activité politique, mais simplement qu’il a participé à une action de type humanitaire. De plus, il relève que le requérant n’a fourni aucun élément montrant qu’il a été torturé par les autorités tunisiennes et n’a pas avancé d’autres circonstances quelles qu’elles soient qui pe r mettraient de penser qu’il est particulièrement exposé au risque de torture. Pour toutes ces raisons, le Com i té conclut que le requérant n’a pas donné de motifs suffisants pour permettre de croire qu’il risque d’être torturé s’il est renvoyé en Tunisie et que ce risque est encouru personnellement et actuellement.

6. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, estime que le renvoi du requérant en Tunisie ne constituerait pas une violation par l’État partie de l’article 3 de la Convention.

13. Requête n o  180/2001

Requérant : M. F. F. Z. (nom supprimé)

Représenté par : M me  Marianne Völund

État partie : Danemark

Date de la requête : 1 er  mars 2001

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 30 avril 2002,

Ayant achevé l’examen de la requête n o  180/2001, présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

Décision

1.1 Le requérant est F. F. Z., de nationalité libyenne, né le 29 septembre 1968, actuellement demandeur d’asile au Danemark où il réside. Il affirme que s’il était renvoyé en Libye à la suite du rejet de sa demande de statut de réfugié, il y aurait une violation de la part du Danemark de l’article 3 de la Convention. Il est représenté par un conseil.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a transmis la requête à l’État partie le 11 avril 2001. Conformément à l’article 108 du Règlement intérieur, l’État partie était prié de ne pas renvoyer le requérant en Libye tant que le Comité serait saisi de l’affaire. Dans une lettre en date du 12 juin 2001, l’État partie a confirmé que le requérant ne serait pas expulsé tant que le Comité n’aurait pas achevé l’examen de l’affaire.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le requérant a vécu à Benghazi en Libye depuis sa naissance; il a achevé sa licence d’économie en 1992 et a tenu un magasin, qu’il possédait, de 1993 jusqu’à son départ de Libye. Un de ses cousins, A. A., était membre du mouvement islamiste Al ‑Jama’a al ‑Islamiya al ‑Libya (ci ‑après appelé Al-Jama’a). Le requérant voyait beaucoup son cousin, qui lui empruntait souvent sa voiture, ce qui avait attiré l’attention des Services de sécurité sur le requérant. Celui ‑ci était également partisan d’Al ‑Jama’a et assistait souvent à des réunions dans les mosquées.

2.2 En 1989, des membres d’Al ‑Jama’a se sont affrontés aux autorités, et les Services de sécurité ont arrêté tous ceux qui avaient des liens avec le mouvement islamiste. Le requérant a été arrêté, on lui a bandé les yeux, et il a été conduit dans un endroit inconnu où il a été interrogé; pendant l’interrogatoire, il a subi des violences et a été contraint d’avouer qu’il faisait partie du mouvement islamiste. Au bout de deux he u res d’interrogatoire, le requérant a été conduit dans une cellule. Il a été de nouveau interrogé deux jours plus tard. Au bout de neuf jours de détention, il a été remis en liberté après avoir reçu l’ordre de couper compl è tement les ponts avec le mouvement islamiste.

2.3 De mai 1995 à mai 1996, le requérant a participé à une action de collecte de fonds pour les parents de prisonniers politiques, lancée à l’initiative d’Al ‑Jama’a. En juillet 1995, des agents des Services de séc u rité sont venus le chercher dans son magasin et l’ont conduit à l’extérieur de Benghazi dans une zone agr i cole, où ils l’ont interrogé pendant trois ou quatre heures sur son emploi du temps et sur les gens qu’il avait contactés depuis son arrestation en 1989; ils l’ont ensuite relâché.

2.4 Le 21 mai 1996, les Services de sécurité ont fait exécuter le cousin du requérant, A. A., sans qu’il ait été traduit en justice, en raison de son appartenance à Al ‑Jama’a. L’exécution de A. A. est citée dans le rapport sur la Libye d’Amnesty International pour 1997. Dans la nuit du 21 au 22 mai 1996, des membres des Services de sécurité ont tiré le requérant hors de son lit et lui ont passé les menottes pour le conduire, dans le coffre d’une voiture, jusqu’au poste de police où il a été placé dans une cellule; on l’a mis face au mur et deux personnes n’ont cessé de le menacer et de l’injurier. Après être resté debout sans bouger, au même endroit, pendant plusieurs heures, il a commencé à être interrogé par les Services de sécurité sur ses connaissances et les activités politiques de celles ‑ci. Il a été frappé à coups de poing et de pied, avec le plat de la main et à coups de crosse de fusil en étant constamment invectivé. Après l’interrogatoire, il a été r e conduit dans la cellule où de nouveau on l’a obligé à rester debout face au mur, les yeux bandés et les m e nottes aux poignets.

2.5 Toujours les yeux bandés, le requérant a été extrait de la cellule pour être de nouveau interrogé, cette fois au sujet de ses relations avec son cousin. À ce moment ‑là, il ne savait pas que son cousin avait été exécuté. Les enquêteurs lui ont dit que son cousin avait dit aux Services de sécurité qu’il appartenait au groupe armé du mouvement islamiste. Il a nié, ce qui lui a valu d’être frappé à coups de pied et de bâton sous les moqueries de l’assistance. Après l’interrogatoire, il a été reconduit dans sa cellule où il est resté huit jours; il est resté les yeux bandés et menottes aux poignets pendant deux jours. Il a ensuite été transpo r té à un autre endroit dans le coffre d’une voiture, et les interrogatoires ont r e commencé de nouveau. Pendant onze heures, il a subi un interrogatoire qui tendait à lui faire reconnaître qu’il appartenait au mouvement islamiste, et il a été frappé à coups de poing et de pied puis jeté à terre; on lui a attaché les pieds à un bâton placé à la verticale, on lui a frappé la plante des pieds et on l’a torturé à l’électricité. Enfin, on lui a donné une feuille de papier en lui disant que ses explications étaient inscrites dessus; il l’a signée sans savoir ce qui était écrit. Il a ensuite été reconduit dans sa cellule.

2.6 Au bout de sept ou huit jours de détention, le requérant a été conduit dans un bureau où deux ho m mes lui ont demandé s’il avait été bien traité en prison; il a répondu par l’affirmative. On lui a alors donné le choix entre passer sa vie en prison ou espionner les gens qui se réunissaient à la mosquée. Pour échapper à la prison, le requérant a accepté de devenir informateur, et a été remis en liberté le 15 juillet 1996 avec pour ordre de faire rapport aux Services de sécurité tous les jeudis.

2.7 Le requérant s’est présenté aux Services de sécurité tous les jeudis jusqu’à son départ pour Tripoli, le 21 ou le 22 août 1996. Pendant sa détention, il avait décidé de quitter la Libye, mais d’attendre un peu avant de partir, afin de ne pas causer d’ennuis à sa famille. Or un habitant du quartier du requérant, qui a p partenait au même groupe que lui et qui avait été arrêté et relâché le même jour que le requérant, F. E., avait de nouveau été arrêté en août 1996. Cet incident a décidé le requérant à partir immédiatement pour Tripoli. Plus tard, il a appris que, à cause de son départ, son frère avait été arrêté et était resté en détention pendant près d’un mois. Vers la fin de 1997 ou au début de 1998, il a également appris que son ami F. E. était mort en prison.

2.8 À Tripoli, le requérant a été hébergé par un parent en attendant le visa pour le Danemark qu’il avait demandé avant d’être arrêté, afin d’aller rendre visite à son frère. Comme la délivrance du visa prenait plus de temps qu’il ne pensait, il a demandé que le visa lui soit envoyé à Malte. Le 26 août 1996, il a pris illég a lement le bateau pour Malte, après avoir obtenu qu’une connaissance appose un tampon de sortie sur son passeport.

2.9 Le 27 août, le requérant est arrivé à Malte, a obtenu le visa, et a continué son voyage le même jour pour le Danemark. Il est entré au Danemark avec un passeport dont la validité expirait le 24 février 2000, ayant été prorogée le 25 octobre 1995. Le passeport portait un visa délivré par le consulat du Danemark à La Valette (Malte). Le requérant est d’abord allé voir son frère. Au bout de quelque temps il a rencontré une femme qu’il a épousée en octobre 1996 et, le 6 janvier 1997, il a obtenu un permis de séjour en raison de son mariage. Le couple s’est séparé en avril 1998, a repris la vie commune en mars 1999, mais a final e ment divorcé en décembre 2000. Le 24 avril 1997, le requérant avait déposé une demande d’asile.

2.10 Le 2 novembre 1998, le Service de l’immigration a rejeté la demande d’asile. Les motifs du rejet tenaient aux explications que le requérant avait données au sujet de ses trois arrestations. En ce qui concerne l’arrestation de 1989, le Service de l’immigration a jugé importants plusieurs éléments: le requérant n’était pas membre d’un parti politique et n’avait pas participé à des activités politiques, les Services de sécurité avaient arrêté tous ceux qui se trouvaient dans la mosquée, et c’était la raison pour laquelle le requérant avait lui-même été arrêté, le fait qu’il avait été frappé n’était pas en soi un motif suff i sant pour obtenir l’asile et le requérant avait été remis en liberté au bout de neuf jours.

2.11 En ce qui concerne l’arrestation de juillet 1995, le Service de l’immigration a relevé que l’arrestation était due à l’affrontement ayant opposé en mai les membres d’Al ‑Jama’a et les Services de s é curité, dans lequel le requérant n’était pas impliqué, qu’il s’agissait d’arrestations générales d’un grand nombre de gens et non pas d’un acte de persécution individuel visant le requérant, et que celui ‑ci avait été relâché au bout de trois ou quatre heures. Pour ce qui est de l’arrestation de mai 1996, le Service de l’immigration s’est attaché au fait que le requérant avait été arrêté parce que son cousin était lié au mouvement islamiste et que les Services de sécurité le soupçonnaient à tort d’en faire également partie, au fait que les traitements brutaux auxquels il avait été soumis ne constituaient pas à eux seuls un motif suffisant d’octroi de l’asile, et au fait qu’il avait été remis en liberté au bout de trois semaines environ. Le Service de l’immigration a estimé que l’ordre donné au requérant de donner des renseignements sur ses amis et de faire rapport tous les jeudis aux Services de sécurité n’était pas suffisant pour justifier l’octroi de l’asile, pas plus que ne l’était l’arrestation de son frère après son départ, étant donné que celui ‑ci avait été remis en liberté un mois plus tard. Le fait que le requérant collectait des fonds en faveur des prisonniers politiques n’était pas non plus considéré comme un motif justifiant l’asile, car il n’avait pas eu maille à partir avec les autor i tés à cause de cette activité. Le requérant avait également dit qu’il n’avait pas le droit de rester hors de Libye plus de six mois. Or le Ministère des affaires étrangères a confirmé par une lettre datée du 30 janvier 1998 que les ressortissants libyens qui rentraient en Libye plus d’un an après en être partis, que ce soit légalement ou illégalement, étaient arrêtés et interrogés puis remis en liberté au bout de quelques heures. Enfin, le Service de l’immigration avait relevé que le passeport du requérant portait un tampon de sortie daté du 27 août 1996 et qu’il n’avait demandé l’asile que le 24 avril 1997.

2.12 Le 13 janvier 1999, le requérant a été examiné par un médecin de la section danoise d’Amnesty International, qui a conclu que les symptômes qu’il avait constatés se retrouvaient souvent chez des perso n nes qui avaient été soumises à des situations extrêmement éprouvantes comme des actes de guerre, la prison ou des actes de torture, et que ces symptômes pouvaient être la conséquence des tortures dont le requérant faisait état. De plus, sans identifier de symptômes physiques de la torture, le médecin a considéré que le requérant avait besoin d’un traitement en raison de graves symptômes psychologiques. Le rapport a été adressé aux autorités danoises le 4 février 1999.

2.13 Le requérant a formé un recours contre la décision du Service de l’immigration auprès de la Co m mission des réfugiés, qui a confirmé la décision du Service de l’immigration le 2 mars 1999. Se référant à la lettre du Ministère des affaires étrangères, la Commission des réfugiés a estimé improbable que le requérant risquât des persécutions s’il rentrait en Libye. Elle a répété certains des arguments du Service de l’immigration et a en outre attaché de l’importance au fait que le requérant avait quitté la Libye légalement le 26 août 1996 avec sur son passeport un tampon l’autorisant à partir et elle n’avait donc aucune raison de croire qu’il risquait de subir des persécutions de la nature de celles qui étaient décrites dans la législation sur le droit d’asile. De plus la Commission n’a pas accordé crédit au rapport médical d’Amnesty Internati o nal car il ne contenait aucune indication objective montrant qu’il avait été soumis à la torture. La date d’expulsion a été fixée au 17 mars 1999.

2.14 En ce qui concerne le rejet des demandes d’asile par les autorités danoises, le conseil affirme que le rapport médical corrobore les allégations de torture du requérant et que, si les autorités danoises n’avaient pas de certitude, elles auraient dû donner à celui ‑ci le bénéfice du doute. De plus, le requérant n’a demandé l’asile que huit mois après être arrivé au Danemark parce qu’il ne savait pas comment s’y prendre pour d e mander l’asile quand il est arrivé et que, lorsqu’il avait rencontré une femme, il avait estimé que la mei l leure solution était de se marier. Le conseil ajoute que le Service de l’immigration aurait dû considérer l’effet cumulatif des arrestations au lieu de les examiner isolément. À ce sujet, il cite un extrait du Guide du Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés: «Le fait de considérer certains incidents isol é ment hors de leur contexte peut conduire à des erreurs d’appréciation. Il conviendra de prendre en consid é ration l’effet cumulatif des expériences passées du demandeur.». En ce qui concerne la façon dont la Co m mission des réfugiés a traité le rapport médical, le conseil souligne que les autorités danoises auraient dû faire examiner le requérant par un médecin quand il a déposé sa demande d’asile en 1997, alors qu’il n’a été examiné qu’en 1999, et encore à la demande de son avocat.

Teneur de la requête

3. Le requérant fait valoir qu’il y a des motifs suffisants de croire qu’il sera de nouveau soumis à des tortures s’il retourne en Libye. Il ajoute qu’il existe dans son pays un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, flagrantes et massives, ce qui, en vertu du paragraphe 2 de l’article 3 de la Conve n tion contre la torture, est une circonstance que l’État partie devrait prendre en compte quand il décide de l’expulsion.

Observations de l’État partie

4.1 L’État partie a fait tenir ses observations au Comité le 12 juin 2001. Il conteste la recevabilité de la communication et objecte que le renvoi du requérant en Libye n’entraînerait aucune violation de l’article 3 de la Convention.

4.2 L’État partie reprend le raisonnement justifiant les décisions du Service de l’immigration et de la Commission des recours en matière de droit des réfugiés. Il ajoute une autre information: le 14 novembre 1997, le requérant a été interrogé par un fonctionnaire du Service danois de l’immigration au sujet de sa demande d’asile et il était aidé par un interprète qu’il comprenait, selon ce qu’il avait lui ‑même déclaré.

4.3 De plus, le 22 juin 1998, le Service danois de l’immigration a annulé le permis de séjour du requ é rant parce qu’il ne vivait plus sous le même toit que son épouse danoise et que les conditions d’octroi du permis de séjour n’étaient donc plus remplies. Le Ministère de l’intérieur a confirmé la décision le 9 novembre 1998.

4.4 Le 16 mars 1999, le Ministère de l’intérieur a rejeté la demande de permis de séjour pour motif h u manitaire déposée par le requérant mais, le 25 mars 1999, le Service danois de l’immigration lui a délivré de nouveau un permis de séjour parce qu’il avait repris la vie commune avec son épouse danoise. Le 4 avril 2001, le Service danois de l’immigration a de nouveau refusé de prolonger le permis de séjour parce qu’il ne cohabitait plus avec sa femme. Le Ministère de l’intérieur a fixé au 9 mai 2001 la date limite du départ du Danemark.

4.5 L’État partie fait valoir que la décision de la Commission des réfugiés de rejeter la demande d’asile reposait sur une appréciation concrète et individuelle de l’affaire et réaffirme qu’il n’y a pas de motif suff i sant pour croire que s’il retourne en Libye le requérant risque d’être soumis à des tortures. À ce sujet, l’État partie se réfère à la décision de la Commission des réfugiés et souligne que le Ministère des affaires étra n gères a enquêté sur la question et a fait savoir que de nombreux nationaux libyens, qui avaient quitté leur pays illégalement, y étaient retournés sans problèmes majeurs. En outre, les nationaux libyens de retour en Libye après être restés plus d’un an à l’étranger sont arrêtés pour être interrogés par les autorités puis sont remis en liberté. L’État partie objecte que, comme il est quasiment impossible pour un Libyen de faire renouveler son passeport si les autorités s’intéressent à lui, la délivrance d’un passeport au requérant donne à penser qu’a priori il n’est pas en danger. Se référant à l’affaire I. O. A c.  Suède a , l’État partie fait rema r quer que le risque d’être arrêté ne suffit pas en soi pour qu’une affaire entre dans le champ d’application de l’article 3 de la Convention.

4.6 De plus, au sujet de la crédibilité du requérant, l’État partie relève que la Commission des réfugiés n’a pas pu établir qu’il avait été soumis au traitement qu’il dénonçait, car ses affirmations n’étaient pas étayées par le rapport médical disponible et aucun bilan détaillé de son état psychique ni aucun diagnostic n’avait été soumis. Même à supposer que le requérant ait subi les sévices qu’il affirmait avoir subis, l’État partie renvoie à la jurisprudence du Comité, qui avait conclu dans les affaires A. L. N. c. Suisse, et X, Y et Z c. Suède b , que le fait d’avoir été soumis à la torture dans le passé «est seulement l’un des éléments à prendre en compte quand on examine une plainte pour violation de l’article 3 de la Convention» et que le but de l’examen d’une affaire est de déterminer si le requérant risque d’être soumis à la torture en cas de renvoi dans son pays.

4.7 L’État partie fait valoir aussi que les événements qui, aux dires du requérant, ont poussé celui ‑ci à quitter la Libye se sont produits il y a assez longtemps et que sa famille n’a pas été recherchée ni inquiétée du fait des agissements du requérant depuis l’arrestation et la remise en liberté de son frère, en 1996.

4.8 L’État partie fait référence à l’affaire Tahir Hussain Khan c. Canada , dans laquelle le Comité a estimé que le requérant, s’il était renvoyé dans son pays d’origine qui n’était pas partie à la Convention, n’aurait plus la possibilité de s’adresser au Comité pour obtenir sa protection en soulignant que dans le cas d’espèce le requérant risque seulement d’être renvoyé vers un pays qui a adhéré à la Convention .

Commentaires du requérant au sujet des observations de l’État partie

5.1 Dans une lettre datée du 1 er  août 2001, le requérant dit qu’il est inopportun d’invoquer en l’espèce, comme le fait l’État partie, la lettre du Ministère des affaires étrangères en date du 30 janvier 1998, car cette lettre ne porte d’après lui que sur la question de savoir si les nationaux libyens qui ont quitté la Libye illégalement ont des problèmes à leur retour et s’il est possible pour un ressortissant libyen d’obtenir le renouvell e ment de son passeport si les autorités s’intéressent à lui. Toutefois, il reconnaît qu’il est vrai, comme il est écrit dans la lettre, qu’«il est quasiment impossible pour un Libyen d’obtenir le renouvellement de son pa s seport si les autorités s’intéressent à lui», mais il souligne qu’il ne se trouve pas dans cette situation puisque son passeport a été renouvelé le 25 octobre 1995, avant que ses ennuis avec les autorités ne commencent. Depuis le 8 mars 2000, le requérant a essayé en vain de faire renouveler son passeport auprès de l’Ambassade de Libye à Copenhague.

5.2 En ce qui concerne les observations de l’État partie au sujet du rapport médical d’Amnesty Intern a tional, le conseil objecte que l’on ne peut pas dans tous les cas s’attendre à relever des marques physiques de torture trois ans après que celle ‑ci a été infligée, par exemple dans le cas où la victime a été torturée à l’électricité, a subi le «supplice de la position», a été passée à tabac ou frappée à coups de pied et a été m e nacée d’être violée ou soumise de nouveau à la torture. Le conseil fait remarquer aussi que le rapport méd i cal fait état d’une constatation physique − le pied gauche enflé − qui d’après le requérant est la séquelle de coups assénés sur la plante des pieds. Le conseil évoque aussi un article paru dans la revue Torture (vol. 11) dont l’auteur critique le fait que les symptômes psychologiques ne soient pas reconnus par les autorités a u tant que les symptômes physiques.

Décision concernant la recevabilité et examen quant au fond

6. Avant d’examiner une plainte soumise dans une requête, le Comité contre la torture doit déterminer si la requête est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire en vertu du paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement, ou n’est pas en cours d’examen devant une telle instance. Le Comité, notant que l’État partie a contesté la recevabilité de la requête, doit d’abord se prononcer sur ce point.

7. Au sujet de l’objection de l’État partie qui estime que le requérant n’a pas montré qu’il était fondé à soumettre une requête, le Comité considère que le requérant a apporté des éléments suffisants, aux fins de la recevabilité, pour montrer que, s’il était renvoyé en Libye, il risquerait de subir des tortures.

8. Conformément au paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, le Comité doit déterminer s’il existe des motifs sérieux de croire que le requérant risquerait d’être soumis à la torture à son retour en Libye. Conformément au paragraphe 2 du même article, il doit pour ce faire tenir compte de tous les éléments, y compris de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagra n tes ou massives. Autrement dit, l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, au sens du paragraphe 2 de l’article 3 de la Convention, conforte le Comité dans sa conviction que des motifs sérieux existent, au sens de ce paragraphe.

9. Toutefois, le Comité doit déterminer aussi si l’intéressé courrait personnellement le risque d’être soumis à la torture dans le pays vers lequel il serait expulsé. Par conséquent l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives, ne constitue pas en soi un motif suffisant pour établir qu’une personne risque d’être soumise à la torture à son retour dans son pays; il doit y avoir des motifs supplémentaires pour conclure que l’intéressé court personnellement ce risque. De la même manière, l’absence d’un ensemble de violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme ne signifie pas qu’un individu ne peut pas être considéré comme risquant d’être soumis à la torture dans sa s i tuation particulière.

10. Dans l’affaire à l’examen, le Comité doit donc déterminer si l’expulsion du requérant vers la Libye aurait pour conséquence prévisible de l’exposer à un risque réel et personnel d’être arrêté et torturé.

11. L’État partie a fait remarquer qu’aucune des trois arrestations dont le requérant a fait l’objet n’était liée à ses activités politiques. Il a souligné aussi que le requérant n’aurait pas pu obtenir le tampon de sortie sur son passeport s’il avait été inquiété à ce moment ‑là et que le rapport médical d’Amnesty International ne contenait aucun élément objectif permettant de penser qu’il ait subi des atteintes graves. De plus, les inc i dents qui ont motivé le départ de l’auteur remontent à une époque assez lointaine et, depuis la libération de son frère en 1996, sa famille n’a pas été inquiétée ni recherchée à cause du départ du requérant. Au vu des renseignements fournis, le Comité considère que les activités politiques décrites ne sont pas telles qu’il puisse conclure que le requérant court un risque réel d’être soumis à la torture à son retour dans son pays. En fait, il ne semble pas être particulièrement exposé à des persécutions de la part des autorités libyennes. Le Ministère danois des affaires étrangères a indiqué que les Libyens qui rentrent en Libye plus d’un an après avoir quitté le pays légalement ou illégalement sont souvent arrêtés à leur retour et interrogés, mais sont remis en liberté au bout de quelques heures.

12. Compte tenu de ce qui précède, le Comité estime que le requérant n’a pas démontré l’existence de motifs suffisants de penser qu’il risquerait la torture, ainsi qu’il l’affirme, s’il était renvoyé en Libye.

13. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, conclut que la décision de renvoyer le requérant en Libye ne constitue pas une viol a tion de l’article 3 de la Convention.

14. Requête n o 185/2001

Requérant : M. Chedli Ben Ahmed Karoui

Requête présentée par : M me Christa Nyblom, Juridiska Byrä

État partie : Suède

Date de la requête : 25 juin 2001

Date de la présente décision : 8 mai 2002

Le Comité contre la torture , institué en vertu de l’article 17 de la Convention contre la torture et a u tres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 8 mai 2002,

Ayant achevé l’examen de la requête n o 185/2001 présentée en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention.

Décision

1.1 L’auteur de la requête est M. Chedli Ben Ahmed Karoui, citoyen tunisien né le 10 novembre 1963, résidant actuellement en Suède où il demande l’asile. Il affirme que son rapatriement en Tunisie, après qu’il se soit vu refuser le statut de réfugié, constituerait une violation par la Suède de l’article 3 de la Convention. Il est représenté par un conseil.

1.2 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a porté la communication à l’attention de l’État partie, le 17 juillet 2001. Dans le même temps, le Comité, agissant en vertu du paragraphe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur, a demandé à l’État partie de ne pas e x pulser l’auteur vers la Tunisie tant que sa communication serait en cours d’examen. Le 12 septembre 2001, l’État partie a informé le Comité qu’il avait décidé de différer l’arrêté d’expulsion pris contre l’auteur et par conséquent de surseoir à la mesure d’expulsion contre l’épouse et la fille de M. Karoui.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1 M. Karoui a passé son enfance à Jendouba, au nord ‑ouest de Tunis. Pendant ses études secondaires, il s’est intéressé à la philosophie et aux questions politiques, en particulier au mouvement islamique. Il a été membre actif du mouvement islamique Al ‑Nahdha à partir de 1981. Plus tard, il a été nommé responsable de l’enseignement culturel et idéologique de l’organisation dans son quartier.

2.2 Son appartenance à Al ‑Nahdha lui a valu d’être renvoyé de l’école en 1979. Il a poursuivi ses ét u des dans une école privée avec l’aide financière de sa famille. En 1981, il a été placé en détention pendant un mois et dix jours et questionné sur ses activités politiques, en particulier au sujet des manifestations au x quelles il avait participé. Toutefois, étant encore mineur, il a été relâché sans encourir de peine. C’était la première d’une série de sept arrestations qui ont eu lieu entre 1981 et 1996.

2.3 En 1983, il a été placé en détention pendant un mois avant d’être condamné à six mois d’emprisonnement pour avoir participé à des manifestations contre le Gouvernement. Il a également été renvoyé de l’école en raison des allégations faites contre lui. Une fois libéré, il s’est trouvé sans emploi et tributaire de l’aide financière de sa famille. En 1984, il a été arrêté et condamné à deux ans et demi de pr i son pour son affiliation à Al ‑Nahdha et sa participation à des manifestations. En 1986, accusé d’avoir pr o duit et distribué des tracts contre le Gouvernement, il a de nouveau été arrêté et placé en détention pendant six mois. Les accusations n’ayant pu être étayées, il a été relâché sans avoir été inculpé.

2.4 M. Karoui a ensuite essayé de partir pour l’Algérie afin de poursuivre ses études, mais son pass e port a été confisqué et on lui a interdit de quitter le pays et d’occuper un emploi en Tunisie. Malgré cette dernière interdiction, il a travaillé occasionnellement pendant de courtes périodes. En novembre 1987, après l’élection du Président Ben Ali, les tensions ont diminué quelque peu en Tunisie avant que la répression ne se durcisse à nouveau. Recherché pour sa participation à des manifestations contre le rôle des États-Unis dans la guerre du Golfe, il a réussi à se rendre clandestinement en Algérie à la fin de 1990, pour y poursu i vre ses études. Il est revenu une fois en Tunisie en juin 1991, quand son père est tombé malade, mais est retourné en Algérie à la fin de l’année après avoir obtenu un passeport tunisien. Il a poursuivi ses études jusqu’à la fin de 1992.

2.5 En 1992, il a été expulsé vers la Tunisie avec 11 autres Tunisiens membres de mouvements islam i ques. En Tunisie, ces personnes ont été maintenues en détention avant jugement pendant deux mois et demi. M. Karoui et trois autres détenus ont réussi à s’échapper. L’auteur s’est enfui à nouveau en Algérie, où il a demandé l’asile le 8 septembre 1992. Cette demande a été rejetée en décembre 1992 et il a de nouveau été renvoyé en Tunisie en 1993.

2.6 À son retour en Tunisie, l’auteur a été arrêté et condamné à un an et demi d’emprisonnement en tant que membre d’une organisation illégale ayant participé à des manifestations et fomenté des troubles. L’auteur dit avoir subi des mauvais traitements et des tortures pendant chaque période de détention, et su r tout la dernière. Il aurait été frappé à la jambe droite avec une matraque, ce qui aurait occasionné une fra c ture, cause de douleurs permanentes; on l’aurait aspergé d’eau alors qu’il était menotté; on lui aurait arraché des poils de la peau et on l’aurait brûlé avec des cigarettes.

2.7 En décembre 1994, ayant épousé une Algérienne, il a décidé de renoncer à ses activités politiques. Du 1 er  mars 1996 au 30 juin 1999, il a travaillé pour une société de construction. Toutefois, en 1996, l’auteur a de nouveau été accusé d’activités antigouvernementales, après avoir refusé de participer à des réunions organisées par le dirigeant local du parti au pouvoir. Il a été arrêté et condamné à un an et demi d’emprisonnement. Il a été relâché en janvier 1997 suite à des manifestations et aux pressions exercées par la communauté internationale pour que cesse la répression. Après sa détention, il a été soumis à l’obligation de se présenter tous les jours à la police. À partir de 1998, cette obligation est devenue hebdomadaire et elle était toujours en vigueur lorsque l’auteur a quitté la Tunisie.

2.8 Pendant l’été de 1999, l’auteur a été informé que plusieurs membres de Al ‑Nahdha qu’il connaissait avaient été arrêtés; il a alors décidé de fuir le pays. Ayant obtenu un passeport grâce à des intermédiaires et en versant des pots de vin, ainsi qu’un visa pour la Suède pour rendre visite à son cousin, il est parti pour ce pays le 7 août 1999. Arrivé en Suède le même jour, il a immédiatement détruit son passeport. Avant de d e mander l’asile, le 24 août 1999, il a attendu que la Tunisie fournisse des pièces le concernant. Pendant qu’il était en Suède, il a été assigné en justice en Tunisie, le 15 septembre 1999, et condamné par contumace à huit ans d’emprisonnement pour tentative d’agitation, trouble de l’ordre public et collecte de fonds. Le requérant a produit une télécopie d’un certificat du tribunal de Jendouba daté du 18 février 2000 qui confirme ces allégations. La police a perquisitionné sa maison en Tunisie à plusieurs reprises et placé une fois son épouse en garde à vue pendant trois jours, à la suite de quoi celle ‑ci a fait une fausse couche. Après le départ de l’auteur pour la Suède, son épouse, qui était soumise à des pressions constantes de la part des autorités tunisiennes, s’est enfuie en Algérie, et en janvier 2000, elle et sa fille se sont rendues en Suède.

2.9 Le 4 janvier 2000, sa demande d’asile a été rejetée par le Conseil suédois de l’immigration qui a ordonné son expulsion vers la Tunisie. Le Conseil a rejeté la demande de l’auteur principalement parce qu’il mettait en doute sa crédibilité, du fait que celui ‑ci avait détruit son passeport en arrivant en Suède et avait attendu 17 jours avant de demander l’asile. Par ailleurs, le Conseil a noté que, malgré les contrôles rigo u reux mis en place, l’auteur avait pu quitter son pays en passant par un aéroport tunisien sous son propre nom. Le Conseil a donc estimé peu vraisemblable que l’auteur soit recherché par les autorités tunisiennes. Il a également noté que plusieurs éléments ne concordaient pas dans la déposition de l’auteur, s’agissant n o tamment de la durée de la période pendant laquelle il avait été employé, de la date à laquelle il avait été to r turé pour la première fois et de la durée de la peine prononcée contre lui en 1996. Le Conseil a également noté que, lors de son interview du 25 août, l’auteur a informé les autorités suédoises de l’immigration qu’il était poursuivi devant un tribunal tunisien.

2.10 Le conseil conteste la validité des motifs de rejet invoqués par le Conseil suédois de l’immigration. En premier lieu, il fait valoir que M. Karoui a détruit son passeport pour protéger la personne qui l’avait aidé à quitter la Tunisie et qu’il a attendu de nouvelles pièces avant de demander l’asile. En deuxième lieu, M. Karoui a pu quitter la Tunisie avec un passeport établi en son propre nom car la personne qui l’avait aidé s’est arrangée pour lui délivrer ce passeport sans enregistrer son nom. Le conseil affirme également que M. Karoui a été condamné à un an et demi d’emprisonnement en 1993, mais que, en raison d’une amnistie générale, sa peine avait été ramenée à un an, comme le prouve le certificat émanant du Ministère tunisien des affaires étrangères. Quant aux doutes des autorités d’immigration sur l’authenticité de l’assignation en justice, le conseil déclare qu’il s’agit de formulaires imprimés à l’avance qui ne contiennent que les i n formations relatives à chaque cas. Ce n’est pas parce qu’un formulaire est incomplet qu’il n’est pas authe n tique.

2.11 M. Karoui a fait appel de la décision devant la Commission de recours pour les réfugiés, laquelle a rejeté sa demande le 28 septembre 2000. Il a joint à sa requête une déclaration datée du 18 juillet 2000, émanant de M. Rashid Ghannouchi, dirigeant du mouvement Al ‑Nahdha et du Parti Al ‑Nahdha de Tunisie. Le dirigeant déclare que M. Karoui est un membre actif du mouvement, que les autorités algériennes l’ont déporté en 1993 en Tunisie où il a été placé en état d’arrestation, a subi de mauvais traitements et des inte r rogatoires, qu’il a été condamné par contumace à huit ans d’emprisonnement après avoir quitté la Tunisie pour la Suède, que ses parents ont été soumis à de nombreux interrogatoires et ont été victimes de harcèl e ment, que son épouse a été arrêtée, harcelée et torturée et que sa fille souffre de troubles psychologiques liés à ces faits.

2.12 La Commission de recours des réfugiés a confirmé les motifs de rejet exposés par le Conseil su é dois de l’immigration, ajoutant que les activités politiques du requérant remontaient à une période ancienne et que l’organisation politique qu’il soutenait avait été dissoute en 1992. Le Conseil a également noté que les activités politiques du requérant avaient un caractère mineur et occupaient une place de second plan au sein de l’organisation. En outre, le Conseil n’a pas tenu compte des déclarations faites par M. Ghannanchi et du Parti Al ‑Nahdha, ayant été informé que ce dernier avait fait des déclarations similaires dans d’autres cas, alors qu’il ne connaissait même pas les personnes en faveur desquelles il intervenait. Le Conseil a égal e ment noté que la lettre du dirigeant datait de l’année 2000, alors que le mouvement Al ‑Nahdha avait été di s sous en 1992.

2.13 Une nouvelle demande de révision soumise à la Commission de recours des réfugiés a été rejetée le 17 avril 2001. Bien que M. Karoui ait joint à cette dernière demande plusieurs documents nouveaux, n o tamment des rapports médico ‑légaux et des lettres de soutien émanant d’Amnesty International et d’un ami, la Commission de recours a conte s té la crédibilité de l’auteur pour les raisons exposées dans sa décision antérieure. Le ra p port médico-légal en date du 14 février 2001 émane d’un médecin légiste du Centre de traitement des personnes souffrant de stress post ‑traumatique lié à des tortures, de l’hôpital Karolinska; le rapport mentionne une cicatrice que M. Karoui aurait au doigt et qui aurait été causée par des brûlures de cigarettes, une zone d’un centimètre de diamètre de coloration particulière sur son épaule droite et des do u leurs profondes (jusqu’à 5 cm sous la peau) lorsqu’on touche cette zone, ce qui serait dû à des coups de m a traque, ainsi qu’une fracture mal cicatrisée et douloureuse au pied droit, qui aurait également été causée par des coups de matraque. Dans une évaluation faite le 6 mars 2001, le même médecin légiste concluait que ces symptômes physiques correspondaient aux allégations d’actes de torture et qu’il était effectivement pr o bable que M. Karoui avait été torturé. L’auteur a également communiqué une évaluation psychiatrique, d a tée du 2 février 2001, émanant d’un médecin légiste du Département de psychiatrie générale du Centre de traitement des personnes souffrant de stress post ‑traumatique lié à des tortures de l’hôpital Karolinska, qui concluait à l’existence de troubles post ‑traumatiques et estimait hautement probable que l’auteur disait la vérité quand il affirmait avoir été victime d’actes de torture.

2.14 Était également joint le témoignage, signé devant notaire en Allemagne, d’un ami qui avait été e x pulsé d’Algérie et torturé à son arrivée avec lui en Tunisie, lequel indiquait que M. Karoui avait été soumis à la torture. Une lettre de l’Association des victimes de la torture en Tunisie appuie les dires de cet ami. E n fin, l’auteur a produit une lettre de la branche suédoise d’Amnesty International datée du 30 mars 2001, qui décrit la situation en Tunisie, où les membres de Al ‑Nahdha sont poursuivis et torturés, même quand ils ne sont que des sympathisants. Amnesty International cite l’affaire A. c.  les Pays ‑Bas , dans laquelle le Comité a confirmé les conclusions d’Amnesty. Amnesty International confirme également avoir reçu des inform a tions selon lesquelles des personnes ont pu quitter les aéroports tunisiens avec l’aide d’intermédiaires pr é sents dans ces aéroports et que ce moyen a été utilisé, en particulier au milieu des années 90, pour fuir le territoire. Amnesty International fait observer que la description que donne M. Karoui de son expulsion de l’Algérie vers la Tunisie en 1993 corrobore les informations provenant de plusieurs sources, selon lesquelles des Tunisiens demandeurs d’asile en Algérie, en 1993, ont été renvoyés en Tunisie où, d’après ces mêmes informations, ils auraient été arrêtés et torturés par les autorités tunisiennes. Par l’intermédiaire du Haut ‑Commissariat pour les réfugiés, Amnesty International a reçu des informations selon lesquelles les autorités algériennes avaient rejeté, en 1992, la demande d’asile de M. Karoui. Amnesty International conclut que M. Karoui risquerait la torture s’il retournait en Tunisie.

Teneur de la requête

3. M. Karoui affirme que, s’il est renvoyé en Tunisie, il sera arrêté et torturé pour avoir, dans le cadre de son appartenance à l’ancien Parti Al ‑Nahdha, fait de l’agitation, troublé l’ordre public et collecté des fonds. Il ajoute qu’il existe un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme par les autorités tunisiennes, dont sont victimes, en particulier, les opposants politiques. Par conséquent, s’il était renvoyé en Tunisie, M. Karoui courrait un grand risque d’être soumis à la torture, ce qui constituerait une violation de l’article 3 de la Convention.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4. Dans sa note verbale datée du 12 septembre 2001, l’État partie fait savoir qu’il ne conteste pas la recevabilité de la requête.

Observations de l’État partie sur le fond

5.1 Dans sa note verbale datée du 11 janvier 2002, l’État partie fait part de ses observations sur le fond.

5.2 L’État partie rappelle la jurisprudence du Comité dans l’affaire S. M. R. et M. M. R. c. Suède , dans laquelle le Comité a indiqué que, outre un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives, il devait exister également d’autres motifs indiquant que l’intéressé risquait personnellement d’être soumis à la torture s’il retournait dans le pays en question.

5.3 En ce qui concerne l’existence d’un ensemble de violations systématiques, graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme dans un pays, l’État partie note que, bien que la Tunisie ait reconnu la co m pétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles en vertu de l’article 22 de la Convention, le Comité, lorsqu’il a examiné le rapport présenté par la Tunisie en 1997, s’est déclaré préo c cupé par le large fossé qui existait entre le droit et la pratique en ce qui concerne la protection des droits de l’homme dans ce pays, en particulier par les rapports faisant état de pratiques répandues de torture et d’autres traitements cruels et dégradants perpétrés par la police et par les forces de sécurité.

5.4 En ce qui concerne l’allégation de M. Karoui selon laquelle celui ‑ci risque personnellement d’être soumis à la torture s’il est renvoyé en Tunisie, l’État partie appelle l’attention sur le fait que plusieurs di s positions de la loi sur les étrangers obéissent au même principe que celui qui est énoncé dans l’article 3 de la Convention. Ainsi, lorsqu’elles examinent une demande d’asile présentée en vertu de la loi sur les étra n gers, les autorités suédoises d’immigration appliquent le même critère que le Comité lorsqu’il examine une plainte présentée en vertu de la Convention.

5.5 L’État partie souligne qu’il incombe principalement au requérant de réunir et de présenter des pre u ves pour étayer sa cause (cf. l’affaire S. L. c. Suède a ) . Rappelant les arguments des autorités suédoises d’immigration, l’État partie se déclare d’avis que M. Karoui n’a pas été en mesure d’étayer l’affirmation selon laquelle il risquerait d’être soumis à la torture s’il était renvoyé en Tunisie. Si sa demande d’asile a été rejetée, c’est parce que des doutes planent sur sa crédibilité, du fait notamment qu’il n’a pas expliqué pou r quoi, alors qu’il préparait son voyage en Suède, il n’a pas pris le temps d’emporter avec lui de Tunisie un certain nombre de documents qu’il aurait pu produire devant les autorités suédoises d’immigration. De surcroît, puisqu’il a déclaré que son passeport tunisien avait été confisqué en 1986 mais qu’il avait pu obtenir un nouveau passeport avant de se rendre en Algérie en 1991, l’auteur aurait pu tout aussi bien util i ser un passeport légal pour se rendre en Suède. Or, en détruisant son passeport, il a empêché les autorités suédoises d’examiner des pièces essentielles pour évaluer son droit à la protection.

5.6 Quand il est entré en Suède, M. Karoui était détenteur d’un visa délivré par l’ambassade suédoise en Tunisie qu’il avait obtenu sur la base de fausses déclarations, ayant prétendu que, depuis le 1 er  mars 1996, il occupait un poste permanent de cadre dans la société de construction qui l’employait. Il a produit un certificat prétendument signé par son employeur le 30 juin 1999, déclarant qu’il travaillait toujours pour cette société. D’après l’État partie, il faut confronter cette information à la déclaration faite par M. Karoui au Conseil de l’immigration, à savoir qu’il n’avait pas travaillé du tout, étant donné qu’il avait passé sept ans en prison et qu’il avait ensuite été employé comme assistant dans une société privée à partir de 1997.

5.7 L’État partie explique également que M. Karoui a déclaré, lors de son interrogatoire, qu’il avait quitté la Tunisie parce que des personnes qu’il connaissait et qui étaient également des partisans d’Al ‑Nahdha avaient été arrêtées en juin ‑juillet 1999 et qu’il avait peur de connaître le même sort. Un visa pour la Suède lui a été délivré le 2 juillet 1999. Cependant, il n’a quitté le pays que le 7 août 1999. Il n’a donné aucune explication pour justifier ce délai. Or, alors qu’il était toujours censé se présenter à la police chaque semaine, il n’a pas été arrêté pendant cette période.

5.8 À propos du certificat de condamnation par contumace daté du 18 février 2000, l’État partie note que la peine prononcée est considérablement plus longue que celles auxquelles, selon ses dires, le requérant aurait été condamné auparavant. Or celui ‑ci ne paraît pas avoir fait appel de cette condamnation ni expliqué pourquoi il ne l’a pas fait. L’État partie note également que le certificat en question ne contient aucune i n formation concernant la date des délits qui auraient été commis, ne mentionne pas le fait que M. Karoui a été condamné par contumace, ne cite pas non plus les dispositions pertinentes de la législation applicable, n’est pas signé et se présente sous la forme d’une télécopie. En l’absence d’explications convaincantes, ces lacunes justifient que l’on mette en doute également l’authenticité de ce document. À cet égard, l’État partie fait aussi observer que M. Karoui n’a pas fourni une copie du jugement lui ‑même, alors que celui ‑ci a été rendu plus de deux ans auparavant. Or, il aurait dû communiquer ce jugement, étant donné que son avocat et son frère en Tunisie l’ont aidé à obtenir d’autres documents auprès des tribunaux tunisiens concernant les jugements de 1996 et de 1999.

5.9 Se référant aux allégations d’actes de torture, l’État partie rappelle que c’est seulement après que la question eut été posée directement par son avocat que M. Karoui a déclaré avoir été torturé à d’autres occ a sions qu’en 1993 et que, par ailleurs, les rapports médico ‑légaux ne signalent qu’une seule trace de brûlure de cigarette sur le doigt, alors que l’auteur affirme avoir été brûlé sur tout le corps. L’État partie rappelle la jurisprudence du Comité, à savoir que la torture pratiquée dans le passé est l’un des éléments à prendre en considération lors de l’examen d’une requête présentée en vertu de l’article 3, mais que le but de l’examen est de déterminer si l’intéressé risque d’être soumis à la torture maintenant, s’il est renvoyé dans son pays d’origine (cf. X, Y et Z c. Suède b ).

5.10 Enfin, en ce qui concerne le jugement du 15 septembre 1999, l’État partie rappelle la jurisprudence du Comité, à savoir que le risque d’arrestation ne suffit pas en soi à déclencher la protection de l’article 3 de la Convention (cf. I. A. O. c. Suède c ) . L’État partie renvoie également à l’affaire A. S. c. Suède d et conclut que M. Karoui n’a pas fourni des informations suffisamment crédibles pour renverser la charge de la preuve.

Commentaires du requérant sur les observations de l’État partie

6.1 Dans une lettre datée du 15 mars 2000, M. Karoui conteste l’affirmation de l’État partie selon l a quelle c’est à lui qu’il incombe principalement de réunir et de présenter des preuves pour étayer sa cause. Il renvoie à la jurisprudence du Comité dans l’affaire Kisoki c. Suède , dans laquelle le Comité a déclaré que l’on attend rarement des victimes de la torture une exactitude complète.

6.2 En outre, expliquant le délai de 36 jours qui s’est écoulé entre la date de la délivrance du visa pour la Suède et le départ effectif de M. Karoui pour ce pays, le conseil fait valoir que ce dernier a eu besoin de temps pour préparer ce départ en secret, alors qu’il se cachait chez des membres de sa famille et chez des amis.

6.3 Le conseil explique que M. Karoui savait qu’il allait être jugé avant même d’avoir été assigné en justice, parce qu’il avait une certaine expérience en matière d’arrestation et de persécution politique. L’auteur a supposé qu’il serait arrêté étant donné que l’un des membres de son groupe au sein du mouv e ment l’avait déjà été. Le fait que la peine ait été portée à huit ans, ce qui est plus long que les peines préc é dentes, s’explique par l’intensification de la répression à l’encontre des opposants politiques en Tunisie.

Décision concernant la recevabilité et examen quant au fond

7. Avant d’examiner une plainte soumise dans une requête, le Comité contre la torture doit déterminer si la requête est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été examinée et n’est pas en cours d’examen par une autre instance internationale d’enquête ou de r è glement. Le Comité note que l’État partie n’a pas contesté la recevabilité de la communication. Il procède donc à son examen quant au fond.

8. Conformément au paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, le Comité doit déterminer s’il y a des motifs sérieux de croire que l’auteur risquerait d’être soumis à la torture s’il était renvoyé en Tunisie. Pour ce faire, le Comité doit, conformément au paragraphe 2 de l’article 3, tenir compte de tous les él é ments qui entrent en jeu, notamment de l’existence d’un ensemble systématique de violations graves, fl a grantes ou massives des droits de l’homme. Le Comité doit également déterminer si l’expulsion de M. Karoui en Tunisie aurait pour conséquence prévisible de faire courir à ce dernier un risque réel et pe r sonnel d’être arrêté et torturé, spécialement eu égard au jugement par contumace rendu contre lui.

9. Le Comité renvoie à son examen du rapport présenté par la Tunisie en 1997, lors duquel il s’est déclaré préoccupé par des rapports faisant état de pratiques répandues de torture et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants de la part de la police et des forces de sécurité. Des rapports ultérieurs sur la situation des droits de l’homme provenant de sources dignes de foi laissent penser que les personnes accusées de participer à des activités politiques dans les rangs de l’opposition, y compris d’avoir des liens avec le mouvement Al ‑Nahdha, sont encore régulièrement arrêtées, emprisonnées, torturées et soumises à de mauvais traitements en Tunisie.

10. Le Comité note les arguments de l’État partie, qui fait valoir que les informations contradictoires fournies par le requérant lors de la procédure de demande d’asile en Suède laissent planer des doutes sur la véracité de ses allégations. Toutefois, le Comité attache de l’importance aux arguments avancés par le r e quérant pour expliquer ces incohérences et réaffirme sa jurisprudence, à savoir qu’une exactitude totale est rarement attendue des victimes d’actes de torture. Le Comité constate qu’il est impossible de vérifier l’authenticité de certains des documents fournis par le requérant. Toutefois, étant donné l’importante doc u mentation digne de foi qu’il a fournie, en particulier des rapports médicaux, une lettre de soutien d’Amnesty International (Suède) et une attestation du dirigeant d’Al ‑Nahdha, le requérant devrait avoir le bénéfice du doute, ayant apporté suffisamment d’éléments crédibles pour renverser la charge de la preuve. Le Comité attache de l’importance aux rapports médico ‑légaux qui attestent de tortures passées, ainsi qu’à l’évaluation du risque que court l’auteur d’être soumis à la torture si, une fois revenu en Tunisie, il est placé en détention en application du jugement du 15 septembre 1999 ou en tant qu’ancien membre du mouvement Al ‑Nahdha et opposant politique au présent Gouvernement tunisien.

11. Dans ces circonstances, le Comité considère qu’il existe des motifs sérieux de penser que le requ é rant court le risque d’être soumis à la torture s’il est renvoyé en Tunisie.

12. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants conclut que le renvoi de M. Karoui en Tunisie constituerait une violation de l’article 3 de la Convention.

B. Décision concernant la recevabilité

1. Requête n o  170/2000

Présentée par : A. R. (nom supprimé)

[représenté par un conseil]

Au nom de : Le requérant

État partie : Suède

Date de la requête : 27 avril 2000

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 23 novembre 2001,

Adopte ce qui suit:

1.1 L’auteur de la communication, qui est datée du 27 avril 2000, est M. A. R., ressortissant bangladais, né le 6 septembre 1966, dont la demande de statut de réfugié a été rejetée en Suède le 19 mars 1997. Il affirme que son expulsion vers le Bangladesh constituerait une violation par la Suède de l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est repr é senté par un conseil.

1.2 L’État partie a ratifié la Convention le 8 janvier 1986 et a fait au même moment la déclaration pr é vue à l’article 22 de la Convention.

1.3 Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a porté la communic a tion à l’attention de l’État partie le 4 octobre 2000. Le Comité, agissant en vertu du paragraphe 9 de l’article 108 de son règlement intérieur, a demandé à l’État partie de ne pas expulser le requérant vers le Bangladesh tant que sa communication serait examinée par le Comité. Le 21 novembre 2000, l’État partie a informé le Comité que le requérant ne serait pas renvoyé dans son pays d’origine tant que sa communic a tion serait en cours d’examen par le Comité.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le requérant dit que depuis le début des années 80, il militait dans deux organisations l’Hindu ‑Buddha Christian Minority Organization et la Bangladesh Chattra League.

2.2 À l’automne 1992, il a été agressé et maltraité par des musulmans et arrêté par la police pour avoir participé à une manifestation. Au cours de sa garde à vue, il aurait été torturé, frappé sur la plante des pieds et suspendu la tête en bas. Il a été libéré grâce à l’aide de son groupe et est parti en Inde où il est resté pl u sieurs mois.

2.3 Il est revenu par la suite au Bangladesh et a milité au sein d’un parti politique le Bangladesh Sha r bohara Party (BSP). Au début de 1995, il a de nouveau été arrêté et placé en détention pendant deux mois par la police pour avoir participé à un rassemblement politique. Pendant sa détention, il aurait été torturé et il présente à l’appui de ses allégations un certificat médical et psychiatrique établi au Danemark attestant qu’il portait des marques de blessures et souffrait de troubles post ‑traumatiques.

2.4 Après avoir passé encore un mois en Inde, il est revenu au Bangladesh et a été chargé des relations publiques et de la publicité du BSP.

2.5 D’autres membres de son parti lui auraient alors conseillé de quitter le Bangladesh. Le parti a org a nisé et financé son départ pour la Suède en octobre 1995.

2.6 Le requérant est arrivé en Suède le 24 octobre 1995 et a demandé le statut de réfugié. Sa demande a été rejetée par le Conseil suédois des migrations le 13 décembre 1995 et la Commission de recours des étrangers à laquelle il s’était adressé l’a débouté le 19 mars 1997.

2.7 Le requérant a par la suite saisi de nouveau à trois reprises la Commission de recours des étrangers en vertu de l’article 5 b du chapitre 2 de la loi suédoise sur les étrangers, qui autorise le dépôt de nouvelles demandes devant cet organe sur la base d’éléments de fait qui n’avaient pas été précédemment examinés par les autorités compétentes. Les demandes du requérant ont toutes été rejetées, la dernière par une décision en date du 9 avril 1999.

Teneur de la requête

3.1 Le requérant affirme qu’il a été soumis à la torture pendant sa détention au Bangladesh. Il présente des certificats médicaux à l’appui de cette allégation.

3.2 Le requérant affirme que s’il était renvoyé au Bangladesh il serait de nouveau soumis à la torture et que la décision de le renvoyer de force au Bangladesh constitue par conséquent une violation de l’article 3 de la Convention par l’État partie.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond

4.1 Dans une réponse datée du 21 novembre 2000, l’État partie formule ses observations sur la recev a bilité de la communication.

4.2 L’État partie attire principalement l’attention du Comité sur la règle de l’épuisement des recours internes et sur le fait que la décision de renvoi du requérant a acquis force de loi dès l’instant où la Commission de recours des étrangers a rejeté sa demande le 19 mars 1997 mais que, conformément à l’article 15 du chapitre 8 de la loi suédoise sur les étrangers, cette décision est tombée sous le coup de la prescription au bout de quatre ans, soit le 19 mars 2001. Lorsque le Comité examinerait la présente requête, la décision de renvoi ne serait donc plus exécutoire a .

4.3 L’État partie affirme donc que si le requérant voulait toujours obtenir un permis de résidence en Suède, il devrait déposer une nouvelle demande auprès du Conseil suédois des migrations, lequel devrait tenir compte de toutes les circonstances invoquées par le requérant qu’elles aient ou non été déjà exam i nées b . La décision prise serait aussi susceptible de recours devant la Commission de recours des étrangers.

4.4 L’État partie renvoie à cet égard à une décision antérieure du Comité ( J. M. U. M. c.  Suède , co m munication n o  58/1996) dans laquelle celui ‑ci a décidé que la communication était irrecevable pour non ‑épuisement des recours internes parce que la nouvelle demande qui avait été déposée après que la déc i sion d’expulsion initiale eut cessé d’être exécutoire était toujours pendante devant le Conseil suédois des migrations.

4.5 L’État partie estime aussi que la communication pourrait être déclarée irrecevable pour incompat i bilité avec les dispositions de la Convention, conformément au paragraphe 2 de l’article 22, parce qu’il n’existe plus d’ordre d’expulsion exécutoire.

Commentaires du conseil

5.1 Dans une réponse datée du 28 décembre 2000, le requérant a fait part de ses commentaires sur les observations de l’État partie.

5.2 Le requérant affirme que, s’il avait déposé une nouvelle demande d’asile, il aurait été placé en d é tention et le Conseil suédois des migrations aurait probablement pris la décision de le renvoyer au Bangladesh même si cette décision avait fait l’objet d’un recours. Il fait valoir qu’il n’a en fait aucune chance de se voir accorder le statut de réfugié en Suède parce que la situation au Bangladesh n’a pas changé depuis l’adoption de la décision de la Commission de recours des étrangers du 19 mars 1997 et que les aut o rités d’immigration de l’État partie se trouveraient dans la même situation qu’à l’origine. Il n’a aucune chance non plus d’obtenir un permis de résidence pour motifs humanitaires pour les mêmes raisons. On lui reprocherait au contraire de s’être caché et de ne pas s’être conformé à la décision prise le 19 mars 1997.

5.3 Le requérant estime que dans la mesure où l’État partie ne lui a pas accordé le statut de réfugié bien qu’il ait présenté des documents prouvant qu’il avait été torturé dans le passé, la seule possibilité qu’il a d’échapper à la torture au Bangladesh est de faire examiner son cas par le Comité.

Observations supplémentaires de l’État partie

6.1 Dans sa réponse datée du 6 avril 2001, l’État partie répète que la décision initiale du 19 mars 1997 n’étant plus exécutoire, le requérant pouvait déposer une nouvelle demande de permis de résidence, ce qu’il n’a toujours pas fait. En outre, conformément à la législation de l’État partie, le Conseil suédois des migrations peut aussi prendre une décision, susceptible de recours devant la Commission de recours des étrangers, même si le requérant ne dépose pas de nouvelle demande. Cette décision n’avait pas non plus été prise à la date de la réponse de l’État partie.

6.2 L’État partie réaffirme que la communication devrait être déclarée irrecevable pour non ‑épuisement des recours internes. Il estime à cet égard que contrairement à ce que dit le requérant, une nouvelle demande serait efficace dans la mesure où le Conseil suédois des migrations devrait tenir compte de nouveaux él é ments de fait au même titre que ceux qui avaient déjà été présentés. Le requérant se retrouverait légalement dans la même situation que lorsqu’il avait déposé sa première demande. Il pourrait faire valoir, entre autres motifs sur lesquels fonder sa nouvelle demande, qu’il risquait d’être torturé s’il était renvoyé dans son pays natal, ou des motifs humanitaires, son état de santé et les liens créés dans la société suédoise. L’État partie note à cet égard que le requérant est en Suède depuis plus de cinq ans et que, selon les renseignements dont il dispose, il aurait épousé une Suédoise en 1996.

6.3 Enfin, l’État partie fait observer qu’il n’est possible de faire exécuter directement une décision du Conseil suédois des migrations avant même que le recours contre cette décision ait été examiné, que dans les cas où il est évident qu’il n’existe aucun motif d’accorder un permis de résidence. De plus, si le requ é rant résidait en Suède depuis plus de trois mois au moment du dépôt de sa première demande, cette mesure d’exécution directe, qui peut aussi faire l’objet d’un recours devant la Commission de recours des étrangers, ne pourrait être appliquée que dans des circonstances exceptionnelles, par exemple si le requérant avait commis des délits en Suède. L’État partie est donc d’avis qu’une telle mesure est peu probable dans le cas considéré.

Délibérations du Comité

7.1 Le Comité considère qu’en l’espèce, conformément au principe de l’épuisement des recours inte r nes, le requérant est tenu d’utiliser des voies de recours qui soient directement en rapport avec le risque d’être soumis à la torture envisagé à l’article 3 de la Convention. Par conséquent, le Comité est d’avis que le dépôt d’une demande de permis de résidence fondée sur des éléments qui n’ont aucun rapport avec les all é gations de torture, tels que la situation du requérant en Suède et le fait qu’il a épousé une Suédoise, n’est pas un recours qui doit être épuisé pour satisfaire aux conditions énoncées au paragraphe 5 b de l’article 22 de la Convention.

7.2 Néanmoins, le Comité a appris, le 6 juin 2001, que le requérant avait déposé une nouvelle demande de permis de séjour sur laquelle les autorités statueront en prenant notamment en considération le risque de torture encouru dans pays d’origine. Le Comité constate donc que le requérant n’a pas épuisé les recours internes.

8. En conséquence, le Comité contre la torture décide:

a) Que la communication est irrecevable;

b) Que la présente décision pourra être reconsidérée en vertu de l’article 109 du règlement intérieur, si le Comité est saisi par le requérant, ou en son nom, d’une demande contenant des renseignements d’où il ressort que les m o tifs d’irrecevabilité ne sont plus applicables;

c) Que la présente décision sera communiquée à l’État partie, au requérant et à son représentant.

2. Requête n o  178/2000

Requérant : Marcos Roitman Rosenmann

Représenté par : Juan A. Garcés

État partie : Espagne

Date de la requête : 25 octobre 2000

Le Comité contre la torture , institué conformément à l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 30 avril 2002,

Ayant achevé l’examen de la requête n o 178/2000 présentée au Comité en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte la décision suivante en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention * .

1. Le requérant est M. Marcos Roitman Rosenmann, citoyen espagnol d’origine chilienne, professeur de sociologie, résidant actuellement à Madrid. Il est représenté par un conseil. Il se déclare victime de viol a tions par l’Espagne du paragraphe 4 de l’article 8, des paragraphes 1 et 2 de l’article 9 et des articles 13 et 14 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. L’Espagne est partie à la Convention et a fait la déclaration prévue à l’article 22 le 21 octobre 1987.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1 Le requérant déclare qu’il a été soumis à la torture au Chili à la suite du coup d’État de septe m bre 1973. Le 4 juillet 1996, un groupe de personnes se déclarant victimes d’actes de torture a déposé plainte conformément aux dispositions applicables en action populaire (art. 19.1 et 20.3 de la loi organique relative au pouvoir judiciaire, art. 101 et 270 de la loi de procédure criminelle, action populaire , art. 125 de la Con s titution espagnole) auprès du tribunal central d’instruction relevant de l’ Audiencia Nacional (juridiction nationale compétente en matière pénale, sociale et de contentieux administratif), demandant que des pou r suites pénales soient engagées contre l’ancien chef d’État chilien, le général Augusto Pinochet, pour viol a tions des droits de l’homme commises au Chili entre septembre 1973 et mars 1990, y compris pour viol a tions des articles 1, 2, 4 et 16 de la Convention. Le 7 mai 1997, le requérant a comparu devant l’ Audiencia Nacional et a fait des déclarations témoignant d’actes de torture commis au Chili.

2.2 Le 16 octobre 1998, le général Pinochet, qui s’était rendu au Royaume ‑Uni pour suivre un trait e ment médical et qui se trouvait en convalescence à Londres, a été placé en détention par les autorités pol i cières du Royaume ‑Uni en vertu d’un mandat délivré à la suite de la procédure pénale engagée en Espagne. Après plus de 16 mois d’actions judiciaires, politiques et diplomatiques, le Ministre britannique de l’intérieur a autorisé le général Pinochet à retourner au Chili le 2 mars 2000.

2.3 Le requérant déclare que l’Espagne dispose d’une compétence extraterritoriale pour les crimes commis contre des citoyens espagnols où que ce soit dans le monde et qu’en conséquence elle avait le droit et l’obligation d’exiger que le général Pinochet soit extradé du Royaume ‑Uni, afin qu’il soit jugé par les tribunaux espagnols pour crimes commis contre des citoyens espagnols au Chili.

2.4 Le 8 octobre 1999, le Tribunal de première instance de Bow Street au Royaume ‑Uni a décidé que le général Augusto Pinochet pouvait être extradé vers l’Espagne. Le général Pinochet a déposé devant la Haute Cour une demande d’ habeas co r pus qui devait être examinée le 20 mars 2000. Entre ‑temps, le Ministère de l’intérieur, de sa propre initiative, a demandé un examen médical du général Pinochet, qui a eu lieu le 5 janvier 2000. Se fondant sur les résultats de cet examen, le Ministre de l’intérieur a i n formé les parties le 11 janvier 2000 qu’il envisageait la possibilité de suspendre la proc é dure d’extradition pour raisons médic a les et les a invitées à faire leurs observations avant le 18 janvier. Le 13 janvier, l’ Audiencia Nacional , par l’entremise du Ministère espagnol des affaires étrangères, a informé le Ministère britannique de l’intérieur qu’elle maintenait sa demande d’extradition. Toutefois, par une note verbale datée du 17 janvier 2000, l’ambassade d’Espagne à Londres a indiqué que l’Espagne ne ferait pas appel d’une déc i sion du Ministre de l’intérieur de suspendre la procédure d’extradition.

2.5 Le 19 janvier 2000, l’ Audiencia Nacional a établi un document à l’intention du Service (britann i que) des poursuites de la Couronne, équivalent des autorités judiciaires espagnoles pour la procédure d’extradition, afin qu’il fasse appel en cas de décision nég a tive du Ministère de l’intérieur. Toutefois, le M i nistère espagnol des affaires étrangères n’a pas transmis ce document au Service des poursuites de la Co u ronne.

2.6 Dans un rapport daté du 20 janvier 2000, le Service des poursuites de la Couronne a demandé des instructions en vue de la préparation d’une demande en appel à déposer avant le 23 janvier. Le Ministère espagnol des affaires étrangères n’a fait parvenir ce rapport à l’ Audiencia Nacional q ue le 10 février 2000. D’autres demandes du Service des poursuites de la Couronne, datées des 24 et 25 janvier, ne sont jamais parvenues à l’ Audiencia Naci o nal et, en conséquence, le Service des poursuites de la Couronne n’a pas pu intervenir lors des audiences tenues les 26 et 27 janvier pour examiner une requête déposée par la Belg i que et d’autres pays contre la décision du Ministre de l’intérieur de maintenir le secret sur les rapports méd i caux.

2.7 Le 24 janvier, l’ Audiencia Nacional a informé le Ministère espagnol des affaires étrangères qu’elle avait l’intention de faire appel au cas où l’extradition ne serait pas accordée. Toutefois, il a été signalé que le Ministre des affaires étrangères avait fait des d é clarations publiques indiquant qu’il ne transmettrait pas une telle demande en appel aux autorités britanniques.

2.8 Dans une décision datée du 15 février 2000, la Haute Cour a accepté la requête d é posée par la Be l gique concernant les rapports médicaux et a demandé au Ministère de l’intérieur d’en envoyer des copies à l’ Audiencia Nacional afin que celle ‑ci puisse prése n ter ses observations, si elle le souhaitait. Le même jour, le Ministère de l’intérieur a fait parvenir les rapports à l’ Audiencia Nacional par l’entremise du Ministère espagnol des a f faires étrangères. Le 22 février 2000, l’ Audiencia Nacional a communiqué au Ministère de l’intérieur ses observations accompagnées notamment d’un rapport dans lequel des méd e cins espagnols contestaient les conclusions émises par les médecins britanniques qui avaient examiné le général Pinochet le 5 janvier 2000.

2.9 Le 1 er  mars 2000, à 16 heures, le Ministre de l’intérieur a informé l’Ambassadeur d’Espagne à Lo n dres, par l’entremise du Service des poursuites de la Couronne, ainsi que les autorités belges, françaises et suisses, qu’il rendrait publique sa décision concernant la procédure d’extradition le lendemain à 8 heures. Le Ministre espagnol des affaires étrang è res n’en a toutefois pas informé l’ Audiencia Nacional . Simultan é ment, le Ministère de l’intérieur a également adressé une lettre au Service des poursuites de la Couronne, le priant de l’informer à l’avance au cas où il déciderait de déposer un recours en appel d e vant les tribunaux le lendemain. Une copie de cette lettre a été envoyée à l’ Audiencia N a cional par le Ministère espagnol des affaires étrangères le 2 mars seulement, à 11 h 18, alors que la presse espagnole avait déjà signalé l’affaire. Sans attendre la réception de la lettre, l’ Audiencia Nacional , le 2 mars, a pris une décision donnant pour instruction au Service des poursuites de la Couronne de faire appel contre la décision de libérer le gén é ral Pinochet. L’ordre a été envoyé par télécopie à 10 heures au Ministre espagnol des affa i res étrangères, lequel a décidé de ne pas le transmettre au Service des poursuites de la Couronne et a informé la presse en cons é quence. Étant donné qu’aucun recours en appel n’avait été déposé, le Ministre de l’intérieur, à 14 heures, a autorisé le départ du vol du g é néral Pinochet pour le Chili.

2.10 Pour ce qui est de l’épuisement des recours internes en Espagne, le requérant d é clare qu’il a déposé plainte contre D. Abel Matutes Juan, qui était alors Ministre des affa i res étrangères, devant la Cour suprême espagnole pour refus de coopérer avec les autorités judiciaires. Dans une décision datée du 1 er  février 2000, la Cour suprême a refusé d’examiner la requête. Le requérant a alors fait recours contre la décision, recours qui a également été rejeté le 22 février 2000. Le 24 février 2000, le requérant a déposé une no u velle plainte contre le Ministre des affaires étrangères pour recel de documents concernant la procédure d’extradition. Dans ses arrêts datés des 6 mars et 13 avril 2000, la Cour s u prême a refusé d’examiner cette requête. Le 16 mars 2000, le requérant a déposé une tro i sième plainte contre le Ministre pour n’avoir pas fait parvenir les lettres de l’ Audiencia Nacional au Service des poursuites de la Couronne. Cette plainte a été rejetée par déc i sions datées des 28 avril et 3 mai 2000.

2.11 Le requérant déclare que la même question n’a pas été soumise à une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

Teneur de la requête

3.1 Le requérant fait valoir qu’en vertu de la législation espagnole, les autorités jud i ciaires sont respo n sables de la procédure d’extradition et que le pouvoir exécutif a l’obligation de se plier aux décisions des autorités judiciaires. Il affirme qu’en l’espèce, en ne suivant pas les instructions des autorités judiciaires et en n’ayant pas transmis rapid e ment les documents nécessaires à son homologue britannique, le Ministre espagnol des a f faires étrangères a entravé la procédure d’extradition et n’a pas agi de façon impartiale, en violation des articles 8, 9, 13 et 14 de la Convention.

3.2 Le requérant affirme notamment que l’Espagne n’a pas respecté ses obligations en vertu de la Convention en ne faisant pas valoir avec toute la diligence requise sa demande d’extradition. Dans ce contexte, il invoque l’article 13 de la Convention, qui stipule n o tamment que «Tout État partie assure à toute personne qui prétend avoir été soumise à la torture sur tout territoire sous sa juridiction le droit de po r ter plainte devant les autorités compétentes dudit État qui procéderont immédiatement et impartialement à l’examen de sa cause». Il déclare que l’obstruction délibérée de la procédure d’extradition a constitué une violation de son droit en vertu de l’article 13 de la Convention à ce que sa cause soit ex a minée par des aut o rités compétentes et de son droit à indemnisation en vertu de l’article 14 de la Convention.

3.3 Le requérant invoque également le paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention, qui stipule que «Les États parties s’accordent l’entraide judiciaire la plus large possible dans toute procédure pénale rel a tive aux infractions visées à l’article 4…» Il déclare que l’Espagne, dans sa façon de traiter de la procédure d’extradition, n’a pas respecté cette obligation.

Observations de l’État partie

4.1 Dans une note verbale du 6 février 2001, l’État partie a fait parvenir ses observ a tions, contestant la recevabilité pour plusieurs motifs.

4.2 L’État partie estime que la communication est irrecevable car le requérant n’a pas la qualité de «vi c time» et précise que dans la procédure judiciaire espagnole qui a conduit à la demande de l’Espagne en vue de l’extradition du général Pinochet, le requérant était considéré non pas comme une victime ou une partie civile à la procédure, mais plutôt comme un témoin. À cet égard, l’État partie cite le texte de la communication initiale, s e lon lequel «le témoin peut être interrogé à propos de la pratique générale de la torture dir i gée contre des citoyens espagnols et des citoyens d’autres pays».

4.3 L’État partie ajoute que la communication est irrecevable en raison du non ‑épuisement des recours internes car au moment de la présentation de la communication, le requérant était en cours de procédure d’appel de certaines décisions. Il déclare en outre que le requérant n’a pas saisi la Cour constitutionnelle ( Tribunal Constitucional ) en invoquant la procédure d’ amparo . Il déclare que les appels en amparo constituent en Espagne des recours efficaces et qu’ils ont été invoqués avec succès dans un grand nombre d’autres affaires dans lesquelles des décisions ont été prises rejetant les requêtes.

4.4 Dans une note verbale du 5 juin 2001, l’État partie reprend les arguments énoncés dans sa lettre précédente et indique que la requête devrait être déclarée irrecevable car elle ne relève pas du champ d’application de la Convention, considérant que a) le requérant ne prétend pas être victime d’actes de torture commis par les autorités espagnoles et b) le r e quérant n’a pas prétendu avoir été victime de torture lors de la procédure engagée par l’Espagne contre le général Pinochet. Dans ce sens, l’État partie ajoute que la plainte du requérant a été déposée à titre expérimental pour mesurer le champ d’application de la Conve n tion. Il déclare que la communication est manifestement dénuée de fondement car les articles de la Conve n tion n’imposent pas d’obligations aussi étendues aux États parties et encore moins aux États parties sur les territoires desquels la personne accusée d’actes de torture ne se trouve pas. De plus, pour ce qui est du droit à indemnisation en vertu de l’article 14 de la Convention, l’État partie indique qu’étant donné que le requ é rant n’était pas l’une des parties civiles à la procédure pénale espagnole engagée contre le général P i nochet, il n’aurait pas eu droit à indemnisation en vertu de la procédure espagnole.

4.5 Pour ce qui est de l’allégation selon laquelle le Ministre espagnol des affaires étrangères ne s’est pas conformé à un ordre judiciaire ( mandato judicial ), l’État partie i n dique que cette allégation a été ava n cée par le requérant devant le tribunal suprême, lequel l’a rejetée aux motifs qu’en vertu de la législation espagnole, telle qu’elle est interprétée par le tribunal suprême, le Ministre n’était tenu de se conformer à aucun mandat judiciaire de ce type. En outre, dans l’ordre démocratique espagnol, certains domaines rel è vent à juste titre de la discrétion politique de l’exécutif. L’État partie souligne que c’est non pas le Gouve r nement espagnol, mais plutôt le Gouvernement britannique qui, dans l’exercice de son pouvoir discrétio n naire politique, a décidé de ne pas extrader le général Pinochet vers l’Espagne, la Belgique ou la Suisse, et a plutôt décidé de l’autoriser à retourner au Chili.

4.6 L’État partie déclare en outre que la Convention contre la torture n’impose à aucun État le devoir exclusif ou même préférentiel de juger une personne accusée d’actes de to r ture, en l’espèce le pouvoir exclusif ou préférentiel de l’Espagne de juger un citoyen ch i lien pour des crimes commis au Chili. L’Espagne a agi correctement en présentant une demande d’extradition au Royaume-Uni, mais il n’a pas été fait droit à cette demande d’extradition parce que le Royaume-Uni a exercé son pouvoir discrétionnaire politique.

Observations supplémentaires du requérant

5. Dans des lettres datées du 6 mars et du 18 octobre 2001, le requérant réitère les faits et les arguments qu’il a exposés précédemment. Il rappelle qu’il a comparu comme témoin dans l’affaire d e vant l’ Audiencia Nacional le 7 mai 1997, ayant alors déclaré qu’en 1973, alors qu’il était âgé de 17 ans, lui-même et d’autres élèves d’un lycée technique avaient été arrêtés et conduits dans un stade de foot transfo r mé en centre de détention, où ils avaient été soumis à diverses formes de violences physiques et mentales. Le requérant a comparu en tant que témoin, mais aurait pu être partie à la procédure pénale engagée contre le général Pinochet en vertu des articles 108, 111 et 112 de la loi espagnole sur la procédure criminelle. Il déclare en outre que le Comité devrait considérer que les recours internes ont été épuisés car, en l’espèce, un appel en  amparo auprès de la Cour constitutionnelle n’aurait pas constitué un recours utile, si l’on cons i dère que la décision du 30 mai 2000 par laquelle l’appel du requérant a été rejeté n’a pas été une décision sommaire, mais un jugement motivé et que la Cour constitutionnelle reconnaît la compétence des tribunaux pénaux de première instance pour interpréter la législation pénale espagnole.

Délibérations du Comité

6.1 Avant d’examiner une communication sur le fond, le Comité contre la torture doit déterminer si la communication est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention.

6.2 Le Comité note les affirmations du requérant qui déclare que la violation de la Convention réside dans le refus du Ministre espagnol des affaires étrangères de faire pa r venir les décisions adoptées par l’ Audiencia Nacional aux autorités britanniques comp é tentes. Le Comité a également pris note de la r é ponse de l’État partie indiquant que la question a été soulevée par le requérant devant les tribunaux esp a gnols compétents, qui ont conclu qu’il n’y avait pas eu violation de la législation espagnole. Le Comité considère que l’interprétation des textes de lois nationaux relève de la compétence des tribunaux des États parties et qu’en conséquence il n’est pas en mesure de se prononcer sur l’application ou l’interprétation de la législation espagnole en matière d’extradition. Le Comité se limite à examiner la recevabilité de la co m munication compte tenu des critères énoncés dans la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégr a dants.

6.3 Le Comité note que les objections de l’État partie concernant la recevabilité de la communication reposent essentiellement sur quatre points: a) le manque de fondement de la part du requérant qui n’affirme pas avoir été torturé par les autorités espagnoles et qui n’a pas non plus demandé à être partie à la procédure pénale engagée par l’Espagne contre le général Pinochet; b) le non-épuisement des recours internes, y compris l’absence de r e cours en  amparo devant la Cour constitutionnelle; c) ratione personae , car les actes de to r ture présumés n’ont pas été commis par des autorités espagnoles, mais par des agents de l’État chilien; d) l’absence de compétence rationae materiae , car aucun article de la Convention n’impose à un État partie l’obligation de demander l’extradition d’une pe r sonne soupçonnée d’actes de torture.

6.4 Pour ce qui est de l’argument de l’État partie selon lequel le requérant n’est pas fondé à soumettre la communication, le Comité note que le requérant affirme qu’il a été arrêté par des membres de la police chilienne, qu’il a été frappé et qu’il a subi d’autres mauvais traitements. Même si ces actes ont été commis en dehors de l’Espagne et avant l’entrée en vigueur de la Convention, le requérant ne prétend pas que l’Espagne a violé son droit de ne pas être soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il affirme plutôt que l’Espagne ne s’est pas acquittée de l’obligation que lui fait la Convention de mener des enquêtes et des poursuites complètes sur les actes présumés de torture qui rel è vent de sa compétence et, en exécution de cette obligation, de mener la procédure d’extradition à son terme. Toutefois, pour qu’il puisse se prétendre victime de la violation présumée, le requérant doit être personnellement et dire c tement touché par le manquement à l’obligation en question. Le Comité note qu’en l’espèce le requérant ne s’est pas porté partie civile lors de la procédure pénale engagée en Espagne contre le respo n sable présumé, le général Pinochet, et que son affaire n’a pas non plus été incluse dans la demande d’extradition de l’Espagne. En conséquence, même si le coupable présumé avait été extradé vers l’Espagne, la situation du requérant n’aurait pas été matériell e ment modifiée (du moins en l’absence de toute autre action de sa part). Le Comité cons i dère par conséquent que le requérant n’a pas prouvé qu’il était, au moment de la présent a tion de la communication, victime du non ‑respect présumé de l’État partie de son oblig a tion en vertu de la Convention d’épuiser intégralement tous les moyens à sa disposition pour obtenir l’extradition du coupable présumé.

6.5 En outre, pour ce qui est du point b), le Comité note que le requérant ne s’est pas prévalu des voies de recours internes en Espagne en se portant partie civile dans la proc é dure visant à obtenir l’extradition du général Pinochet. De plus, s’agissant des plaintes du requérant à l’égard du Ministre espagnol des affaires étrangères, le Comité fait observer que le requérant n’a pas formé de recours en amparo , dont l’État partie affirme qu’il s’agit d’un recours disponible et utile, citant à l’appui de son argument un certain nombre d’affaires portées devant la Cour constitutionnelle, alors que le requérant déclare qu’un recours en amparo n’aurait abouti à aucun résultat, citant la jurisprudence dans ce d o maine. Dans ces conditions, le Comité n’est pas en mesure de décider que l’exercice de tels recours aurait été a priori inutile et n’est donc pas r e quis aux fins du paragraphe 5 b) de l’article 22 de la Convention.

6.6 En ce qui concerne le point c), le Comité note que les allégations du requérant pour ce qui est des actes de torture commis par les autorités chiliennes sont ratione personae justiciables au Chili et dans d’autres États sur le territoire desquels le général Pinochet peut se trouver. Dans la mesure où le général Pinochet n’était pas en Espagne au moment de la présentation de la communication, le Comité tend à cons i dérer que les articles de la Convention invoqués par le requérant ne s’appliquent pas ratione personae à l’Espagne. En particulier, le droit du requérant en vertu de l’article 13 de la Convention de porter plainte et d’obtenir que sa cause soit examinée immédiatement et impartialement, ainsi que son droit à indemnisation en vertu de l’article 14 de la Convention seraient justiciables d e vant l’État responsable des actes de torture, à savoir le Chili et non pas l’Espagne.

6.7 Pour ce qui est du point d), le Comité note que l’Espagne peut exercer une comp é tence extraterrit o riale pour connaître des actes de torture commis contre ses ressortissants. Il rappelle que l’un des buts de la Convention contre la torture et autres peines ou trait e ments cruels, inhumains ou dégradants est d’empêcher l’impunité des personnes ayant commis de tels actes. Le Comité constate que, conformément à sa législation interne ainsi qu’au paragraphe 1 c) de l’article 5 et au paragraphe 4 de l’article 8 de la Convention, l’État partie a demandé l’extradition du général Pinochet pour qu’il soit jugé en Espagne. Tout laisse penser que l’Espagne aurait traduit le général Pinochet en justice dès que ce dernier se serait trouvé sur son territoire, conformément à l’inculpation prononcée le 4 juillet 1996 par le juge de l’ Audiencia Nacional de España . Le Comité fait observer c e pendant que la Convention impose certes l’obligation de traduire en justice une pe r sonne accusée d’avoir commis des actes de torture qui se trouve sur son territoire, mais que les articles 8 et 9 de la Convention n’imposent pas l’obligation de demander une extradition ou d’insister pour l’obtenir en cas de refus. À cet égard, le Comité se réfère au paragr a phe 1 c) de l’article 5 de la Convention en vertu duquel tout État partie doit prendre les mesures nécessaires pour établir sa compétence aux fins de connaître des infractions visées à l’article 4 «quand la victime est un ressortissant dudit État et que ce dernier le juge a p proprié». Le Comité estime que cette disposition établit une faculté discrétionnaire plutôt que l’obligation formelle de présenter une demande d’extradition et d’insister pour obtenir satisfaction. En conséquence, la requête n’entre pas ratione materiae dans le champ d’application des articles de la Convention invoqués par le requérant.

7. En conséquence, le Comité contre la torture décide:

a) Que la requête est irrecevable;

b) Que la présente décision sera communiquée à l’État partie et au requérant.

Opinion individuelle (partiellement dissidente) de M. Guibril Camara

Je partage les conclusions du Comité selon lesquelles cette plainte est irrecevable, mais seulement sur une partie des fondements avancés par la majorité du Comité. Je pa r tage tout à fait le raisonnement de la majorité en ce qui concerne les paragraphes 6.4 et 6.5 de la décision dans la mesure où l’auteur n’est pas une «victime» au sens de l’article 22 de la Convention car il n’était pas partie aux procédures engagées en Espagne contre Pinochet et qu’il n’a pas été démontré que l’épuisement des voies de recours internes sous la forme d’un appel en amparo devant la Cour constitutionnelle serait a priori ineffectif. Il aurait été compatible avec la prat i que du Comité que lorsque l’irrecevabilité de la communication a été décidée sur la base d’un ou des deux motifs énoncés, de mettre un terme à l’examen de la plainte. La majorité s’est c e pendant engagée, pour des raisons qui n’apparaissent pas clairement dans sa décision, dans une discussion complexe sur le champ d’application de certaines dispositions de la Conve n tion, ce qui aurait dû faire l’objet du débat au fond si la requête avait été déclarée recevable. En droit procédural, le premier acte d’un organe jur i dictionnel ou quasi juridictionnel, comme le Comité, consiste à vérifier la régularité de sa saisine, pratique qui a toujours été respectée par le Comité dans le passé. Et lorsque la sa i sine n’est pas régulière, notamment en cas d’irrecevabilité, la seule décision à prendre consiste, après en avoir indiqué les raisons, à pr o noncer l’irrecevabilité et à s’en tenir là, sans aborder le fond de l’affaire.

À mon sens, la majorité a fait une interprétation prématurée des articles 5, 8, 9, 13 et 14 de la Convention. La majorité considère que, dans la mesure où l’article 5 permet que la compétence juridictionnelle soit exercée par un État partie quand la victime est un re s sortissant de cet État «et que ce dernier le juge approprié», l’État possède un pouvoir di s crétionnaire à tout moment de l’enquête et des poursuites pour décider si oui ou non il doit poursuivre la proc é dure dans un cas donné. Cette approche néglige un certain nombre d’aspects:

a) Il semble, au regard de la structure de la Convention et de l’emplacement de l’article 5 et des dispositions qui l’entourent ainsi que de l’intégralité du texte de l’article 5, que l’option de l’article 5, paragraphe 1, alinéa c , est de laisser aux États le choix de décider, lors de la transposition de la Convention dans leur droit interne, s’ils vont ou non conférer, de manière générale, à leurs autorités judiciaires la compétence juridictionnelle sur des cas dans lesquels des ressortissants de l’État en question ont été victimes d’actes de torture en dehors du territoire de cet État. Les travaux préparatoires ainsi que la pratique des États semblent confirmer que l’option contenue dans l’article 5, paragraphe 1, alinéa c vise l’adoption de di s positions générales et impersonnelles de droit pénal par un État et à conférer à ses autorités la compétence pour enquêter et poursuivre en pareil cas. L’Espagne, comme d’autres États, a d é cidé d’exercer cette option et confère une telle compétence juridictionnelle extraterritoriale à ses autorités d’enquête et de poursuites. C’était en vertu de cette compétence, dont le principe avait été confirmé à un stade précédent, au cours de la procédure devant l’ Audiencia Nacional , que les autorités espagnoles ont été en mesure d’ouvrir leur enquête sur le général Pinochet. Il est dès lors difficile de comprendre pourquoi le pouvoir discrétionnaire reconnu à l’article 5, paragraphe 1, alinéa c , aux États parties qui ont fait le choix d’assumer une telle compétence juridictionnelle devrait, par conséquent, s’étendre à tous les cas individuels qui font l’objet d’une enquête ou de poursuites en vertu de cette compétence. Dans cette optique, il semble que la majorité ait fait une confusion entre la possibilité de prendre des mesures normatives de portée générale (en principe à travers un acte législatif) concernant la poursuite d’actes répo n dant aux critères de l’article 5, paragraphe 1 c de la Convention, et les poursuites qui sont e n gagées dans chaque cas particulier.

b) Le raisonnement de la majorité selon lequel le pouvoir discrétionnaire r e connu à l’article 5 a un sens plus étendu que ce qui est exposé ci ‑dessus et la Convention n’exige pas qu’une demande d’extradition soit faite est difficilement compatible avec l’importance acco r dée par le Comité à l’objet de la Convention – de faire cesser l’impunité – ainsi qu’avec l’idée qui sous ‑tend l’ensemble de la Convention, selon laquelle les États parties qui ont la comp é tence juridictionnelle pour connaître d’un acte présumé de torture doivent prendre toutes m e sures à leur disposition pour le responsable présumé. L’opinion de la majorité sur le «pouvoir discrétionnaire» énoncé à l’article 5 réduit de manière sign i ficative la possibilité que les responsables présumés d’actes de torture commis sur des re s sortissants en dehors du territoire national puissent être traduits en justice, notamment par rapport aux cas prévus à l’article 5, paragraphe 1, alinéas a et b , où aucun pouvoir discr é tionnaire ne s’applique.

Même si le Comité a raison sur le fait que la Convention ne permet pas de conclure que l’État a une obligation d’engager une procédure d’extradition dans un cas où il a la comp é tence juridictionnelle en vertu de sa législation, le Comité n’explique pas pourquoi l’on devrait également conclure que les procédures d’extradition devraient pouvoir être abandonnées à n’importe quel moment. Il y a des raisons politiques importantes, encore une fois au regard de la structure et de l’objet de la Convention, pour lesquelles une proc é dure d’extradition, une fois engagée , devrait être poursuivie jusqu’à son terme. Le principe d’un pouvoir discrétio n naire d’engager une procédure d’extradition n’implique pas un pouvoir discrétionnaire sim i laire de mettre un terme à tout moment à une procédure ainsi engagée.

Même si le Comité a raison sur le fait que la Convention permet de mettre un terme a des dema n des d’extradition, la majorité omet totalement d’aborder le problème central posé dans le cas d’espèce, qui est le point de savoir quel organe devrait exercer un tel pouvoir. La préférence du Comité a été acco r dée, dans de nombreuses situations, à la résolution judiciaire des allégations d’actes de torture commis dans un État partie. Dans ce cas, l’ordre juridique de l’État confère au pouvoir judiciaire la compétence d’enquêter sur des cas de nature extraterritoriale, d’engager des poursuites et de formuler des demandes d’extradition, d’examiner les implications juridiques des décisions concernant les demandes d’extradition et d’en tirer les conclusions nécessaires. Dans le cas qui nous occupe, le pouvoir judiciaire a considéré qu’il y a avait des fondements pour contester légalement la décision du Ministre de l’intérieur britannique de mettre un terme à la procédure d’extradition. Un autre organe de l’État partie ayant jusque ‑là agi de manière essentiellement administrative, a privé de ses effets la décision judiciaire de faire appel de la d é cision du Ministre de l’intérieur britannique en omettant de la transmettre aux autorités britanniques. L’exercice d’un tel «pouvoir discrétionnaire» par le pouvoir exécutif est difficilement compatible avec les principes qui sous-tendent la Conve n tion comme avec la volonté de la communauté internationale de lutter contre l’impunité des auteurs de crimes contre l’humanité. La décision de la majorité aboutit fin a lement à priver le requérant de la possibilité d’épuiser les recours internes concernant les questions so u levées alors que l’État partie lui-même reconnaît que les recours internes n’ont pas été épuisés, et, éventuellement, de revenir devant le Comité.

Pour ces raisons, je considère que l’opinion de la majorité exprimée dans les paragraphes 6.6. et 6.7 est prématurée et, en tout cas, inutile pour la décision finale du Comité.

( Signé ) Guibril Camara

Annexe VIII

MANDAT DU RAPPORTEUR CHARGÉ DES NOUVELLES REQUÊTES ET DES MESURES PROVISOIRES

À sa vingt ‑huitième session, en mai 2002, le Comité contre la torture a révisé son règlement int é rieur et a institué la fonction de rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires.

À sa 527 e  séance, le 16 mai 2002, le Comité a décidé que le Rapporteur chargé des nouvelles requ ê tes et des mesures provisoires aurait notamment pour mandat d’adresser des demandes de mesures proviso i res de protection en application de l’article 108 du règlement intérieur; de lever des mesures provisoires de protection le cas échéant; de s’assurer que les États accèdent aux demandes de mesures provisoires de protection; de décider de l’enregistrement de nouvelles requêtes quand le secrétariat demande des instructions en ce qui concerne l’enregistrement; d’informer le Comité à ch a que session des mesures prises depuis la session précédente; d’élaborer, pour examen par le Comité, des recommandations concernant la recevabilité des requêtes.

Annexe IX

MANDAT DU RAPPORTEUR CHARGÉ DU SUIVI DES DÉCISIONS PRISES AU SUJET DES REQUÊTES PRÉSENTÉES EN VERTU DE L’ARTICLE 22

À sa vingt ‑huitième session, en mai 2002, le Comité contre la torture a révisé son règlement intérieur et institué la fonction de rapporteur spécial chargé du suivi des déc i sions prises au sujet des requêtes présentées en vertu de l’article 22.

À sa 527 e  séance, le 16 mai 2002, le Comité a décidé que le Rapporteur chargé du suivi des décisions prises au sujet des requêtes présentées en vertu de l’article 22 aurait notamment pour mandat de surveiller l’application des décisions du Comité, notamment en envoyant des notes verbales aux États parties pour s’informer des mesures prises comme suite aux décisions du Comité; de recommander au C o mité les mesures qu’il convient de prendre comme suite aux réponses reçues des États parties, à l’absence de réponse et à toutes les lettres reçues ultérieurement des requérants à propos de la non ‑application des décisions du Comité; de rencontrer les représentants des Missions permanentes des États parties pour enco u rager l’application des décisions du Comité et déterminer si la fourniture de services consultatifs ou d’une assistance technique par le Haut ‑Commissariat aux droits de l’homme serait appropriée ou souhaitable; d’effectuer, avec l’approbation du Comité, des missions de suivi auprès des États parties; d’établir périodiquement à l’intention du Com i té des rapports sur ses activités.

Annexe X

MODIFICATIONS APPORTÉES AU RÈGLEMENT INTÉRIEUR 1

Début du mandat

Article 12

1. Le mandat des membres du Comité élus lors de la première élection prendra effet le 1 er  janvier 1988. Le mandat des membres du Comité élus lors des élections ultérieures prendra effet le jour suivant la date d’expiration du mandat des membres du Comité qu’ils remplaceront.

2. Le Président, les membres du Bureau et les rapporteurs peuvent continuer de s’acquitter des attrib u tions qui leur ont été confiées jusqu’au jour qui précède la première réunion du Comité, composé de ses nouveaux membres, à laquelle celui ‑ci élit son bureau.

Durée du mandat

Article 16

Sous réserve des dispositions du présent règlement relatives au Président, aux membres du Bureau et aux rapporteurs, les membres du Bureau du Comité sont élus pour une période de deux ans. Ils sont réél i gibles. Aucun d’eux ne peut, toutefois, rester en fonctions s’il cesse d’être membre du Comité.

Création d’organes subsidiaires

Article 61

1. Le Comité peut, compte tenu des dispositions de la Convention et sous réserve des dispositions de l’article 25, créer des organes subsidiaires ad hoc lorsqu’il le juge néce s saire et en fixer la composition et les attributions.

2. Chaque organe subsidiaire élit son bureau et adopte son règlement intérieur. À d é faut, le présent règlement sera applicable mutatis mutandis.

3. Le Comité peut aussi désigner un ou plusieurs de ses membres au poste de rappo r teur pour exercer toutes attributions qu’il leur confierait.

Présentation des rapports

Article 64

1. Les États parties présentent au Comité, par l’intermédiaire du Secrétaire général, des rapports sur les mesures qu’ils ont prises pour donner effet à leurs engagements en vertu de la présente Convention, dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur de la Convention pour l’État partie intéressé. Les États parties présentent ensuite des rapports complémentaires tous les quatre ans sur toutes nouvelles mesures prises, et tous autres rapports et renseignements demandés par le Comité.

2. Dans les cas appropriés, le Comité peut considérer que figurent dans un rapport r é cent des renseignements qui auraient dû figurer dans des rapports différés.

3. Le Comité peut, par l’intermédiaire du Secrétaire général, faire savoir aux États parties comment il souhaite que soient présentés, quant au fond, à la forme et à la méth o dologie à suivre, les rapports à soume t tre en application de l’article 19 de la Convention qu’il est appelé à examiner, et formuler des directives à cet effet.

Non ‑présentation des rapports

Article 65

1. Le Secrétaire général fera part au Comité, à chaque session, de tous les cas de non ‑présentation du ou des rapports au titre des articles 64 et 67 du présent règlement. En pareil cas, le Comité pourra prendre les mesures qu’il juge appropriées, y compris adresser à l’État partie intéressé, par l’intermédiaire du Secr é taire général, un rappel concernant la présentation du ou des rapports.

2. Si, après le rappel visé au paragraphe 1 du présent article, l’État partie ne présente pas le rapport qu’il est tenu de soumettre conformément aux articles 64 et 67 du présent règlement, le Comité signale le fait dans le rapport qu’il adresse chaque année aux États parties et à l’Assemblée générale des N a tions Unies.

3. Selon que de besoin, le Comité peut, à sa discrétion, signifier à l’État défaillant, par l’intermédiaire du Secrétaire général, qu’il entend examiner, à une date spécifiée dans la notification, les mesures prises par l’État partie pour protéger les droits reconnus dans la Convention ou leur donner effet, et formuler les observations générales qu’il juge appr o priées dans les circonstances.

Présence des États parties lors de l’examen de leurs rapports

Article 66

1. Le Comité fait connaître dès que possible aux États parties, par l’intermédiaire du Secrétaire général, la date d’ouverture, la durée et le lieu de la session à laquelle leurs rapports seront examinés. Les représentants des États parties sont invités à assister aux séances du Comité auxquelles leurs rapports sont ét u diés. Le Comité peut également informer un État partie auquel il décide de demander des renseignements supplémentaires qu’il peut autoriser son représentant à assister à une séance déterminée. Ce représentant doit être en mesure de répondre aux questions qui pourront lui être posées par le Comité et de faire des d é clarations au sujet de rapports déjà présentés par son pays et il peut également fournir des renseignements supplémentaires émanant de son pays.

2. Si un État partie a présenté en vertu du paragraphe 1 de l’article 19 de la Conve n tion un rapport mais s’il n’envoie pas, comme l’exige le paragraphe 1 de l’article 66 du présent règlement, un représentant à la session à laquelle son rapport sera examiné, comme il en aura été informé, le Comité peut, à sa discrétion, prendre l’une des mesures suivantes:

a) Informer l’État partie, par l’intermédiaire du Secrétaire général, qu’il a l’intention, à une date spécifiée, d’examiner le rapport conformément au paragraphe 2 de l’article 66 du présent règlement, puis agir conformément à l’article 68 du présent règl e ment; ou

b) Examiner le rapport à la session prévue initialement, puis formuler des o b servations finales provisoires et les soumettre à l’État partie, et fixer la date à laquelle le rapport sera examiné conformément à l’article 66 du présent règlement, ou la date à l a quelle un nouveau rapport périodique devra être soumis en vertu de l’article 67 du présent règlement.

Conclusions et recommandations du Comité

Article 68

1. Après avoir examiné chaque rapport, le Comité peut, conformément au paragr a phe 3 de l’article 19 de la Convention, formuler sur le rapport les observations d’ordre g é néral des conclusions et recommand a tions qu’il juge appropriées et les transmettre, par l’intermédiaire du Secrétaire général, à l’État partie intéressé qui peut y répondre en pr é sentant les observations qu’il estime appropriées. Le Comité peut, en part i culier, indiquer dans ses observations générales si, à la suite de l’examen des rapports et des renseign e ments communiqués par l’État partie, il lui apparaît que cet État partie ne s’est pas acquitté de certaines des obl i gations qui lui incombent en vertu de la Convention, et peut, selon que de besoin, désigner un ou plusieurs rapporteurs spéciaux pour suivre la manière dont l’État partie donne suite aux conclusions et recommand a tions du Comité.

2. Le Comité peut, s’il y a lieu, indiquer le délai dans lequel les observations des États parties doivent lui parvenir.

3. Le Comité peut, à sa discrétion, décider de reproduire dans le rapport annuel qu’il établit confo r mément à l’article 24 de la Convention toutes observations formulées par lui conformément au paragraphe 1 du présent article, accompagnées des observations reçues à ce sujet de l’État partie intéressé. Si l’État partie intéressé le demande, le Comité peut au s si reproduire le rapport communiqué en application du paragr a phe 1 de l’article 19 de la Convention.

XIX. PROCÉDURE D’EXAMEN DES REQUÊTES REÇUES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 22 DE LA CONVENTION

A. Dispositions générales

Déclarations des États parties

Article 96

1. Le Secrétaire général communique aux autres États parties copie des déclarations déposées auprès de lui par les États parties reconnaissant la compétence du Comité, conformément à l’article 22 de la Convention.

2. Le retrait d’une déclaration faite conformément à l’article 22 de la Convention est sans préjudice de l’examen de toute question qui fait l’objet d’une requête déjà transmise en vertu de cet article; aucune autre requête soumise par ou pour le particulier ne sera r e çue en vertu dudit article après que le Secrétaire général aura reçu notification du retrait de la déclaration, à moins que l’État partie intéressé n’ait fait une nouvelle déclaration.

Transmission des requêtes au Comité

Article 97

1. Conformément au présent règlement, le Secrétaire général porte à l’attention du Comité les requêtes qui sont ou semblent être présentées pour que le Comité les examine conformément au paragraphe 1 de l’article 22 de la Convention.

2. Le Secrétaire général peut, selon que de besoin, demander au requérant des éclai r cissements quant à son souhait de voir sa requête soumise au Comité pour examen conformément à l’article 22 de la Convention. Si des doutes subsistent au sujet de la v o lonté de l’auteur, le Comité est saisi de la requête.

Enregistrement des requêtes; Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires de pr o tection

Article 98

1. Les requêtes peuvent être enregistrées par le Secrétaire général ou sur décision du Comité ou par le Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires de protection.

2. Aucune requête ne sera enregistrée par le Secrétaire général si:

a) Elle concerne un État qui n’a pas fait la déclaration prévue au paragraphe 1 de l’article 22 de la Convention;

b) Elle est anonyme; ou

c) Elle n’est pas présentée par écrit par la victime ou par des parents proches de la victime au nom de celle ‑ci ou par un représentant dûment mandaté par un pouvoir écrit adéquat.

3. Le Secrétaire général établit des listes des requêtes portées à l’attention du Comité conformément à l’article 97 ci-dessus, en y joignant un résumé succinct de leur teneur, et fait régulièrement distribuer ces listes aux membres du Comité. Le Secrétaire général tient en outre en permanence un registre de toutes ces requêtes.

4. Un dossier individuel est ouvert pour toute requête qui fait l’objet d’un résumé. Le texte intégral de toute requête portée à l’attention du Comité est communiqué à tout me m bre du Comité sur sa demande.

Demande d’éclaircissements ou de renseignements supplémentaires

Article 99

1. Le Secrétaire général ou le Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mes u res de protection peut demander au requérant de fournir des éclaircissements concernant l’applicabilité de l’article 22 de la Convention à sa requête, et de préciser en particulier:

a) Ses nom, adresse, âge et profession en justifiant de son identité;

b) Le nom de l’État partie visé par la requête;

c) L’objet de la requête;

d) La ou les dispositions de la Convention qui auraient été violées;

e) Les moyens de fait;

f) Les dispositions prises par le requérant pour épuiser les recours internes;

g) Si la même question est en cours d’examen ou a déjà été examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

2. Lorsqu’il demande des éclaircissements ou des renseignements, le Secrétaire gén é ral fixe un délai approprié au requérant en vue d’éviter des retards indus dans la procédure prévue à l’article 22 de la Convention. Ce délai peut être allongé dans certaines circon s tances.

3. Le Comité peut adopter un questionnaire aux fins de demander au requérant les re n seignements susmentionnés.

4. La demande d’éclaircissements visée au paragraphe 1 c) à g) du présent article n’empêche pas que la requête soit inscrite sur les listes prévues au paragraphe 3 de l’article 98 ci ‑dessus.

5. Le Secrétaire général indique au requérant la procédure qui sera suivie et l’informe que le texte de sa requête sera porté, à titre confidentiel, à l’attention de l’État partie intéressé, conformément au paragr a phe 3 de l’article 22 de la Convention.

Résumé des renseignements

Article 100

Pour chaque requête enregistrée, le Secrétaire général établit un résumé des rense i gnements obtenus et le distribue aux membres du Comité.

Séances et auditions

Article 101

1. Les séances du Comité ou de ses organes subsidiaires au cours desquelles sont examinées les requ ê tes soumises en vertu de l’article 22 de la Convention sont privées.

2. Les séances au cours desquelles le Comité peut examiner des questions d’ordre g é néral telles que les procédures d’application de l’article 22 de la Convention peuvent être publiques si le Comité en décide ainsi.

Communiqués concernant les séances privées

Article 102

Le Comité peut publier par l’intermédiaire du Secrétaire général, à l’intention des moyens d’information et du public, des communiqués concernant ses activités au titre de l’article 22 de la Convention.

Non ‑participation obligatoire à l’examen d’une requête

Article 103

1. Ne peut prendre part à l’examen d’une requête par le Comité ou par son organe subsidiaire tout membre:

a) Qui a un intérêt personnel quelconque dans l’affaire;

b) Qui a participé à un titre quelconque autre qu’en tant que membre du Comité à l’adoption d’une décision relative à l’affaire; ou

c) Qui est ressortissant de l’État partie intéressé, ou est employé par cet État.

2. Toute question relative à l’application du paragraphe 1 ci ‑dessus est tranchée par le Comité sans la participation du membre intéressé.

Non ‑participation facultative à l’examen d’une requête

Article 104

Si, pour toute autre raison, un membre considère qu’il ne devrait pas prendre part ou continuer à prendre part à l’examen d’une requête, il informe le Président de sa déc i sion de se désister.

B. Procédure visant à déterminer la recevabilité des requêtes

Procédure applicable aux requêtes

Article 105

1. Conformément aux dispositions ci-après, le Comité décide à la majorité simple, dès que possible si la requête est ou n’est pas recevable en vertu de l’article 22 de la Conve n tion.

2. Le groupe de travail constitué conformément au paragraphe 1 de l’article 106 peut également décl a rer une requête recevable à la majorité ou irrecevable à l’unanimité.

3. À moins qu’ils n’en décident autrement, le Comité, le groupe de travail constitué conformément au paragraphe 1 de l’article 106, ou le (les) rapporteur(s) désigné(s) conformément au paragraphe 3 de l’article 106 examinent les requêtes dans l’ordre où e l les sont reçues par le secrétariat.

4. Le Comité peut, s’il le juge bon, décider d’examiner conjointement deux ou plus de deux requêtes.

5. Le Comité peut, s’il le juge bon, décider de disjoindre l’examen d’une requête soumise conjointement par plusieurs requérants. Les requêtes ainsi disjointes peuvent r e cevoir chacune un numéro d’enregistrement distinct.

Constitution d’un groupe de travail et désignation de rapporteurs chargés de requêtes pa r ticulières

Article 106

1. Le Comité peut, conformément à l’article 61 du présent règlement, constituer un groupe de travail qui se réunira peu de temps avant chaque session, ou à tout autre moment opportun que le Comité arrêtera en consultation avec le Secrétaire général, en vue de pre n dre des décisions sur la recevabilité ou l’irrecevabilité et de faire au Comité des reco m mandations concernant le fond des requêtes ainsi que d’aider le Comité de toutes les m a nières que celui ‑ci jugera appropriées.

2. Le groupe de travail sera composé au moins de trois membres et au plus de cinq membres du Com i té. Il élira son propre bureau et mettra au point ses propres méthodes de travail. Le règlement intérieur du Comité s’appliquera dans la mesure du possible aux réunions du groupe de travail. Les membres du groupe de travail seront désignés par le Comité toutes les deux sessions.

3. Le groupe de travail peut désigner parmi ses membres des rapporteurs chargés de traiter de requêtes particulières.

Conditions de recevabilité des requêtes

Article 107

Afin de se prononcer sur la recevabilité d’une requête, le Comité, son groupe de travail ou un ra p porteur désigné conformément à l’article 98 ou au paragraphe 3 de l’article 106 s’assure:

a) Que le requérant déclare être victime d’une violation par l’État partie int é ressé des dispos i tions de la Convention. La requête doit être présentée par le plaignant lui ‑même ou par des parents ou des représentants désignés ou par d’autres personnes au nom d’une victime présumée lorsqu’il appert que celle ‑ci est dans l’incapacité de présenter personnellement la requête et lorsque l’autorisation requise est remise au Comité;

b) Que la requête ne constitue pas un abus de la procédure devant le Comité ou n’est pas m a nifestement dénuée de fondement;

c) Que la requête n’est pas incompatible avec les dispositions de la Conve n tion;

d) Que la même question n’est pas déjà en cours d’examen ou n’a pas déjà été examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement;

e) Que le requérant a épuisé tous les recours internes disponibles. Toutefois, cette règle ne s’applique pas si les procédures de recours excèdent des délais raisonnables ou s’il est peu probable qu’elles constituent un recours utile pour la personne victime de la violation de la Convention;

f) Que le délai écoulé depuis l’épuisement des recours internes n’est pas exce s sivement long, au point que l’examen de la plainte par le Comité ou l’État partie en est rendu anormalement difficile.

Mesures provisoires

Article 108

1. Le Comité, un groupe de travail ou le(s) Rapporteur(s) chargé(s) des nouvelles requêtes et des m e sures provisoires de protection peut, à tout moment après avoir reçu une requête, adresser à l’État partie intéressé une demande pressante afin qu’il prenne les mesures provisoires que le Comité juge nécessaires pour éviter qu’un préjudice irréparable ne soit causé à la victime ou aux victimes de la violation alléguée.

2. Lorsque le Comité, le groupe de travail ou un ou des rapporteur(s) demande(nt) que des mesures provisoires soient prises en application du présent article, cette demande ne préjuge pas la décision qui sera prise en définitive sur la recevabilité ou sur le fond de la requête. L’État partie en est informé quand la d e mande lui est faite.

3. Lorsqu’une demande de mesures provisoires est faite par le groupe de travail ou un ou des rapporteur(s) conformément au présent article, le groupe de travail ou les rappo r teurs font connaître aux membres du Comité la nature de la demande et la requête à l a quelle elle se rapporte à la prochaine session ordinaire du Comité.

4. Le Secrétaire général tient une liste des demandes de mesures provisoires.

5. Le Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires de prote c tion s’assure aussi qu’il est accédé aux demandes de mesures provisoires du Comité.

6. L’État partie peut faire savoir au Comité que les raisons qui ont motivé la demande de mesures pr o visoires ont cessé d’exister ou avancer des arguments pour expliquer que la demande devrait être retirée.

7. Le Rapporteur, le Comité ou le groupe de travail peut retirer la demande de mesures provisoires.

Renseignements, éclaircissements et observations complémentaires

Article 109

1. Aussitôt que possible après son enregistrement, la requête est transmise à l’État partie qui est prié de soumettre une réponse écrite dans un délai de six mois.

2. L’État partie intéressé soumet par écrit au Comité des explications ou des observations portant à la fois sur la recevabilité et sur le fond de la requête ainsi que sur toute mesure qui peut avoir été prise pour accorder réparation dans l’affaire, à moins que le Comité, le groupe de travail ou le Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires de protection n’ait décidé, du fait du caractère exceptionnel de l’affaire, de demander une réponse écrite qui porte exclusivement sur la question de la r e cevabilité.

3. L’État partie à qui il a été demandé d’adresser, conformément au paragraphe 1 du présent article, une réponse écrite à la fois sur la recevabilité et sur le fond de la requête, peut demander par écrit, dans un délai de deux mois, que la requête soit déclarée irrecev a ble en indiquant les motifs d’irrecevabilité. Le Comité ou le Rapporteur chargé des no u velles requêtes et des mesures provisoires peut accepter ou ne pas a c cepter d’examiner la question de la recevabilité séparément de celle du fond.

4. Lorsqu’une décision à été rendue sur la seule question de la recevabilité, le Comité fixe la date l i mite de la réponse au cas par cas.

5. Le Comité ou le groupe de travail constitué conformément à l’article 106 ou l’un des rapporteurs désignés en vertu du paragraphe 3 de l’article 106 peut, par l’intermédiaire du Secrétaire général, demander à l’État partie intéressé ou au requérant de présenter par écrit des renseignements, éclaircissements ou o b servations supplémentaires concernant la question de la recevabilité ou sur le fond.

6. Le Comité ou le groupe de travail ou l’un des rapporteurs désignés conformément au paragraphe 3 de l’article 106 fixe un délai pour la soumission des renseignements ou éclaircissements supplémentaires afin d’éviter des retards excessifs.

7. Si le délai fixé n’est pas observé par l’État partie intéressé ou par le requérant, le Comité ou le groupe de travail peut décider d’examiner la question de la recevabilité et/ou le fond de la requête à la l u mière des renseignements disponibles.

8. Une requête ne peut être déclarée recevable qu’à condition que l’État partie intére s sé en ait reçu le texte et que la possibilité lui ait été donnée de soumettre des renseign e ments ou des observations confo r mément au paragraphe 1 du présent article.

9. Si l’État partie intéressé conteste l’affirmation du requérant selon laquelle tous les recours internes disponibles ont été épuisés, l’État partie est prié de donner des détails sur les recours utiles qui sont à la di s position de la victime présumée dans les circonstances de l’espèce et conformément aux dispositions du paragraphe 5 b) de l’article 22 de la Conve n tion.

10. Dans le délai indiqué par le Comité ou le groupe de travail ou l’un des rapporteurs désignés en ve r tu du paragraphe 3 de l’article 106 du présent règlement, l’État partie ou le requérant peut bénéficier de la possibilité de faire des commentaires sur toute réponse r e çue de l’autre partie à la suite d’une demande faite en vertu du présent article. Le fait de ne pas recevoir ces commentaires dans le délai fixé ne doit pas, en règle générale, retarder l’examen de la question de la recevabilité de la requête.

Requêtes irrecevables

Article 110

1. Si le Comité décide qu’une requête est irrecevable en vertu de l’article 22 de la Convention, ou que l’examen doit en être suspendu ou interrompu, il fait connaître sa d é cision le plus tôt possible, par l’intermédiaire du Secrétaire général, au requérant et à l’État partie intéressé.

2. Si le Comité ou le groupe de travail a déclaré une requête irrecevable en vertu du paragraphe 5 de l’article 22 de la Convention, il peut reconsidérer cette décision à une date ultérieure sur demande d’un membre du Comité ou sur demande écrite faite par le particulier ou en son nom. Cette demande écrite doit contenir des renseignements d’où il ressort que les motifs d’irrecevabilité visés au paragraphe 5 de l’article 22 de la Convention ne sont plus applicables.

C. Examen quant au fond

Procédures applicables aux requêtes recevables; procédure orale

Article 111

1. Lorsqu’il a déclaré une requête recevable en vertu de l’article 22 de la Convention avant de recevoir la réponse de l’État partie sur le fond, le Comité transmet à l’État partie, par l’intermédiaire du Secrétaire général, le texte de sa décision et les autres renseign e ments reçus du requérant qui n’ont pas encore été communiqués à l’État partie conform é ment au paragraphe 1 de l’article 109 du présent règlement. Le requ é rant est également informé, par l’intermédiaire du Secrétaire général, de la décision du Comité.

2. Pendant la période fixée par le Comité, l’État partie intéressé soumet par écrit au Comité des expl i cations ou déclarations éclaircissant la question à l’examen et indiquant, le cas échéant, les mesures qu’il a pu prendre. Le Comité peut indiquer, s’il le juge néce s saire, le type d’informations qu’il souhaite recevoir de l’État partie intéressé.

3. Toutes les explications ou déclarations soumises par un État partie en application du présent article peuvent être communiquées, par l’intermédiaire du Secrétaire général, au requérant, qui peut soumettre par écrit tous renseignements ou observations supplémenta i res dans un délai fixé par le Comité.

4. Le Comité peut inviter le requérant ou son représentant et les représentants de l’État partie intéressé à se présenter devant lui à des séances privées déterminées pour lui fournir des éclaircissements suppléme n taires ou pour répondre à des questions sur le fond de la requête. Si une partie est invitée, l’autre partie en est informée et est invitée à être présente et à faire des observations appropriées. La non ‑représentation de l’une des parties ne doit pas être préjudiciable à l’examen de l’affaire.

5. Le Comité peut révoquer la décision par laquelle il a déclaré une requête recevable, à la lumière des explications ou déclarations présentées par l’État partie conformément au présent article. Toutefois, avant que le Comité n’envisage de révoquer cette décision, les explications ou déclarations pertinentes doivent être communiquées au requérant pour qu’il puisse soumettre tous renseignements ou observations suppl é mentaires dans le délai fixé par le Comité.

Conclusions du Comité; décisions sur le fond

Article 112

1. Dans le cas où les parties ont soumis des renseignements portant à la fois sur la question de la recevabilité et sur le fond, ou dans le cas où une décision concernant la recevabilité a déjà été prise et où les parties ont soumis des renseignements sur le fond, le Comité examine la requête à la lumière de toutes les informations qui lui sont soumises par le requérant ou en son nom et par l’État partie intéressé, et il formule ses conclusions à ce sujet. Auparavant, le Comité peut renvoyer la requête au groupe de travail ou au rapporteur désigné, conformément au paragraphe  3 de l’article 106, pour qu’il lui fasse des recommandations.

2. Le Comité, le groupe de travail, le rapporteur peut à tout moment au cours de l’examen obtenir a u près d’organes des Nations Unies, d’institutions spécialisées ou d’autres sources tout document pouvant l’aider dans l’examen de la requête.

3. Le Comité ne se prononce pas sur le fond d’une requête sans avoir examiné l’applicabilité de tous les motifs de recevabilité visés à l’article 22 de la Convention. Les conclusions du Comité sont commun i quées, par l’intermédiaire du Secrétaire général, au requérant et à l’État partie intéressé.

4. Les conclusions du Comité sur le fond de la requête sont des «décisions».

5. En règle générale, l’État partie intéressé est invité à informer le Comité, dans un délai donné, des mesures qu’il a prises conformément aux décisions du Comité.

Opinions individuelles

Article 113

Tout membre du Comité qui a pris part à une décision peut demander que le texte de son opinion individuelle soit joint à la décision du Comité.

Procédure de suivi

Article 114

1. Le Comité peut désigner un ou plusieurs rapporteurs chargés du suivi des décisions adoptées au titre de l’article 22 de la Convention, afin de vérifier que les États parties ont pris des mesures pour donner effet à ses conclusions.

2. Les rapporteurs chargés du suivi peuvent établir les contacts et prendre les mesures appropriées pour s’acquitter dûment de leur mandat et ils en rendent compte au Comité. Ils peuvent recommander au Comité les mesures complémentaires qui peuvent être néce s saires.

3. Les rapporteurs font périodiquement rapport au Comité sur les activités de suivi.

4. Dans l’exercice de leur mandat, les rapporteurs peuvent, avec l’accord du Comité, effectuer les vis i tes nécessaires auprès de l’État partie intéressé.

Inclusion dans le rapport annuel du Comité de résumés des requêtes et du texte des déc i sions définitives

Article 115

1. Le Comité peut décider d’inclure dans son rapport annuel un résumé des requêtes examinées et, s’il le juge opportun, un résumé des explications et déclarations des États parties intéressés et de l’appréciation qu’il en a faite.

2. Le Comité inclut dans son rapport annuel le texte de ses décisions finales, y co m pris de ses const a tations en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention ainsi que le texte de toute décision décl a rant une requête irrecevable en vertu de l’article 22 de la Convention.

3. Le Comité consigne dans son rapport annuel des informations sur les activités de suivi.

Annexe XI

LISTE DES DOCUMENTS À DISTRIBUTION GÉNÉRALE ÉTABLIS PENDANT LA PÉRIODE SUR LAQUELLE PORTE LE PRÉSENT RAPPORT

A.   Vingt ‑septième session

Cote

Titre

CAT/C/21/Add.3

Rapport initial du Bénin

CAT/C/47/Add.3

Rapport initial de l’Indonésie

CAT/C/47/Add.2

Rapport initial de la Zambie

CAT/C/54/Add.1

Troisième rapport périodique d’Israël

CAT/C/55/Add.1

Quatrième rapport périodique de l’Ukraine

CAT/C/63

Ordre du jour provisoire et annotations

CAT/C/SR.485 à 502

Comptes rendus analytiques de la vingt ‑septième session du Comité

B.   Vingt ‑huitième session

Cote

Titre

CAT/C/34/Add.14

Troisième rapport périodique du Luxembourg

CAT/C/34/Add.15

Troisième rapport périodique de la Fédération de Russie

CAT/C/42/Add.2

Rapport initial de l’Arabie saoudite

CAT/C/53/Add.1

Deuxième rapport périodique de l’Ouzbékistan

CAT/C/55/Add.2

Quatrième rapport périodique du Danemark

CAT/C/55/Add.3

Quatrième rapport périodique de la Suède

CAT/C/55/Add.4

Quatrième rapport périodique de la Norvège

CAT/C/64

Liste des rapports initiaux attendus en 2002: note du Secrétaire général

CAT/C/65

Liste des deuxièmes rapports périodiques attendus en 2002: note du Secrétaire général

02-64708 (F) 241002 241002

*0264708*

CAT/C/66

Liste des troisièmes rapports périodiques attendus en 2002: note du Secrétaire général

CAT/C/67

Liste des quatrièmes rapports périodiques attendus en 2002: note du Secrétaire général

CAT/C/68

Ordre du jour provisoire et annotations

CAT/C/SR.503 à 528

Comptes rendus analytiques de la vingt ‑huitième session du Comité