Nations Unies

A/HRC/RES/43/26

Assemblée générale

Distr. générale

3 juillet 2020

Français

Original : anglais

Conseil des droits de l’homme

Quarante-troisième session

24 février-13 mars et 15-23 juin 2020

Point 4 de l’ordre du jour

Situations relatives aux droits de l’homme qui requièrent l’attention du Conseil

Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’hommele 22 juin 2020

43/26.Situation des droits de l’homme au Myanmar

Le Conseil des droits de l ’ homme,

Guidé par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme, et réaffirmant toutes les résolutions et décisions pertinentes que lui-même et l’Assemblée générale ont adoptées sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, dont les plus récentes sont la résolution 74/246 de l’Assemblée générale, en date du 27 décembre 2019, et ses propres résolutions S‑27/1 du 5 décembre 2017, 37/32 du 9 avril 2018, 39/2 du 27 septembre 2018, 40/29 du 22 mars 2019 et 42/3 du 26 septembre 2019,

Se félicitant des travaux que la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Myanmar a menés et des rapports qu’elle a établis, notamment celui qu’elle lui a présenté à sa quarante-troisième session, et regrettant vivement que le Gouvernement du Myanmar ne coopère pas avec la Rapporteuse spéciale et lui refuse l’accès au pays depuis décembre 2017,

Se félicitant également des travaux menés par la mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Myanmar, et en particulier du rapport final de la mission et de ses conclusions détaillées,

Se félicitant en outre des conclusions que le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le sort des enfants en temps de conflit armé a formulées sur le Myanmar, et prenant note des préoccupations exprimées par le Groupe de travail au sujet des graves violations des droits de l’homme commises dans le pays à l’égard des enfants,

Saluant les travaux du Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar, créé par sa résolution 39/2 afin de recueillir, de rassembler, de conserver et d’analyser, en utilisant les informations communiquées par la mission internationale indépendante d’établissement des faits, les éléments venant prouver que des crimes internationaux et des violations du droit international humanitaire parmi les plus graves sont commis au Myanmar depuis 2011, en particulier dans les États rakhine, kachin et shan, et de constituer des dossiers en vue de faciliter la tenue rapide de procès équitables et indépendants conduits dans le respect des normes du droit international devant des cours ou des tribunaux nationaux, régionaux ou internationaux qui ont ou pourraient avoir compétence pour connaître de pareils crimes, conformément au droit international,

Saluant également le travail accompli par l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar, et engageant celle-ci à dialoguer et à se concerter davantage avec toutes les parties prenantes, notamment avec la société civile, comme l’Assemblée générale l’a demandé dans sa résolution 72/248 du 24 décembre 2017,

Saluant en outre le rapport établi par la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme sur les causes profondes des violations des droits de l’homme et des atteintes à ces droits dont les Rohingya et d’autres minorités sont victimes au Myanmar,

Conscient des engagements humanitaires que le Gouvernement bangladais a pris en faveur des personnes qui fuient les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits commises au Myanmar et des efforts continus qu’il déploie dans ce cadre en coopération avec les organismes des Nations Unies et la communauté internationale, notamment tous les acteurs humanitaires,

Conscient également du fait que les activités menées par les divers titulaires de mandat compétents pour améliorer la situation humanitaire et la situation des droits de l’homme au Myanmar sont complémentaires et se renforcent mutuellement,

Notant que la Cour pénale internationale a autorisé son procureur à enquêter sur des infractions relevant de la compétence de la Cour qui auraient été commises au Bangladesh et au Myanmar,

Se félicitant de l’ordonnance rendue par la Cour internationale de Justice le 23 janvier 2020 sur la requête déposée par la Gambie contre le Myanmar au sujet de l’application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, dans laquelle la Cour a conclu que, prima facie, elle avait compétence pour connaître de l’affaire, que les Rohingya au Myanmar semblaient constituer un groupe protégé au sens de l’article II de la Convention et qu’il existait un risque réel et imminent qu’un préjudice irréparable soit causé à leurs droits, et a indiqué des mesures conservatoires contre le Myanmar,

Notant que, nonobstant les limites imposées par son mandat et son mode de fonctionnement, la commission d’enquête indépendante créée par le Gouvernement du Myanmar le 30 juillet 2018 a conclu dans le résumé de son rapport final, non encore publié dans son intégralité, que des crimes de guerre, des violations graves des droits de l’homme et des violations du droit interne avaient été commises et qu’il y avait des motifs raisonnables de penser que des membres des forces de sécurité du Myanmar étaient impliqués,

Rappelant que les États sont tenus, au premier chef, de respecter, de protéger et de réaliser les droits de l’homme, et sont également tenus de s’acquitter de l’obligation qui leur est faite de poursuivre les auteurs de violations du droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit international des réfugiés, ainsi que les auteurs d’atteintes au droit des droits de l’homme, et d’offrir une réparation effective à toute personne dont les droits ont été violés ou bafoués, en vue de mettre fin à l’impunité,

Réaffirmant qu’il est urgent de faire en sorte que tous les auteurs de violations du droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit international des réfugiés, et tous les auteurs d’atteintes au droit des droits de l’homme, en particulier ceux qui ont sévi dans les États rakhine, kachin et shan, soient amenés à répondre de leurs actes devant des mécanismes de justice pénale nationaux ou internationaux indépendants, compétents et dignes de confiance, rappelant que le Conseil de sécurité est habilité à renvoyer la situation au Myanmar devant la Cour pénale internationale, et invitant à nouveau le Myanmar à devenir partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale ou à accepter la compétence de la Cour selon les termes de l’article 12 (par. 3) dudit statut,

Se déclarant de nouveau vivement préoccupé par l’escalade de la violence entre l’armée du Myanmar (la Tatmadaw) et l’armée arakanaise dans les États rakhine et chin, par le fait que des civils, y compris des membres de minorités ethniques, continuent d’être déplacés de force, enlevés, placés en détention arbitraire et tués, par l’utilisation à des fins militaires d’installations qui sont normalement des écoles, et par les signalements de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits, y compris l’utilisation de mines terrestres, qui empêchent le retour volontaire et durable, en toute sécurité et dans la dignité, de tous les réfugiés et de toutes les personnes déplacées de force, y compris les Rohingya,

Se déclarant profondément préoccupé par le fait que le détournement d’armes et le transfert non réglementé ou illicite d’armes peuvent porter gravement atteinte aux droits de l’homme, en particulier les droits des membres de minorités, des femmes, des enfants, des personnes âgées, des personnes handicapées et des personnes appartenant à d’autres groupes vulnérables,

Regrettant que le processus de paix n’ait pas progressé et que l’armée du Myanmar ait décidé de mettre fin au cessez-le-feu qu’elle avait unilatéralement déclaré en septembre 2019 dans les zones de conflit du nord et de l’est du pays, et engageant l’armée à annoncer un nouveau cessez-le-feu,

1.Se déclare gravement préoccupé par les allégations selon lesquelles le Myanmar continue d’être le théâtre de violations graves des droits de l’homme et d’atteintes graves à ces droits, parmi lesquelles des violences sexuelles et des violences fondées sur le genre et des violations et des atteintes visant des enfants, surtout dans les États rakhine, kachin et shan, et demande à toutes les parties et à tous les groupes armés, et en particulier à l’armée et aux forces de sécurité du Myanmar, de mettre immédiatement un terme à la violence, à toutes les violations du droit international, notamment le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, et à toutes les atteintes aux droits de l’homme commises dans le pays ;

2.Se déclare également gravement préoccupé par la poursuite du conflit qui oppose l’armée du Myanmar, l’armée arakanaise et d’autres groupes armés dans les États rakhine, chin, kachin et shan, par le climat d’impunité qui règne au sein des forces de sécurité du Myanmar, par les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits commises à grande échelle et de manière endémique, les meurtres et les déplacements forcés dont les civils continuent d’être la cible, ainsi que par la situation humanitaire désastreuse que le conflit a engendrée, appelle à l’élimination des mines terrestres présentes sur le territoire et à la cessation de l’utilisation de ce type de mines, quelles que soient les circonstances, et engage toutes les parties à faire preuve de retenue et à mettre un terme au conflit, à respecter les obligations mises à leur charge par le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, à assurer la sécurité et la protection des civils, à amener les auteurs d’infractions à répondre de leurs actes pour rendre justice aux victimes et aux survivants et à se montrer disposées à reprendre le dialogue ;

3.Se félicite de l’ordonnance rendue par la Cour internationale de Justice le 23 janvier 2020, et prie instamment le Gouvernement du Myanmar de respecter les dispositions de cette ordonnance en ce qu’elles concernent les Rohingya présents sur son territoire et de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir la commission de tous les actes visés à l’article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, de veiller à ce qu’aucun de ces actes, entre autres, ne soit commis par ses unités militaires, par des unités armées non conventionnelles qui pourraient relever de son autorité ou bénéficier de son appui, ou par des organisations ou personnes qui pourraient être placées sous son contrôle, son autorité ou son influence, de prévenir la destruction des éléments de preuve et d’en assurer la conservation, et de rendre compte à la Cour de l’ensemble des mesures prises pour donner effet à l’ordonnance, note l’importance que le Myanmar a jusqu’à présent accordée aux travaux de la Cour, et prend note de la réunion que le Conseil de sécurité a tenue le 4 février 2020 ;

4.Engage le Myanmar à assurer la protection des droits humains de toutes les personnes se trouvant sur son territoire et à prendre toutes les mesures nécessaires en vue de veiller à ce que justice soit faite, de faire respecter le principe de responsabilité, de mettre fin à l’impunité pour toutes les violations des droits de l’homme et toutes les atteintes à ces droits en enquêtant de manière approfondie, transparente, impartiale et indépendante sur toutes les allégations de violations du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire et d’atteintes à ces droits, et d’amener les auteurs à répondre de leurs actes dans le cadre de procès pénaux équitables menés en toute indépendance devant des cours ou des tribunaux, conformément aux normes du droit international ;

5.Engage également le Gouvernement du Myanmar à reconnaître et à satisfaire pleinement les besoins des victimes et des survivants et le droit de ces personnes à un recours effectif, notamment en procédant rapidement, efficacement et en toute indépendance à leur recensement et en offrant des garanties de non-répétition ;

6.Prie instamment le Gouvernement du Myanmar de publier sans plus attendre l’intégralité du rapport final de la commission d’enquête indépendante, y compris ses annexes, et lui demande de définir, avec la pleine participation de toutes les parties prenantes, un plan de mise en œuvre des recommandations de la commission, dans le cadre duquel il prévoira de prendre de véritables mesures en vue de faire traduire en justice les auteurs de violations graves des droits de l’homme et d’atteintes graves à ces droits ;

7.Déplore la libération, après seulement neuf mois de détention, des membres de l’armée du Myanmar que le tribunal militaire avait reconnus coupables d’homicide illicite contre des civils rohingya tués à Inn Din, dans l’État rakhine, et demande à nouveau au Gouvernement et à l’armée du Myanmar de prendre les mesures nécessaires pour faire respecter le principe de responsabilité et mettre fin à l’impunité dont bénéficient les auteurs de pareils crimes ;

8.Se félicite de la libération des journalistes Wa Lone et Kyaw Soe Oo, demande à nouveau la libération immédiate et inconditionnelle de tous les autres journalistes, professionnels des médias, défenseurs des droits de l’homme et militants détenus, accusés et arrêtés, et prie le Gouvernement du Myanmar de respecter l’engagement qu’il a pris de libérer sans condition tous les prisonniers politiques et d’assurer la pleine réhabilitation des anciens prisonniers politiques ;

9.Demande au Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar qu’il a créé par sa résolution 39/2 de continuer de s’acquitter de son mandat en utilisant les informations recueillies par la mission internationale indépendante d’établissement des faits et par d’autres sources crédibles et de coopérer étroitement et en temps voulu avec les cours et les tribunaux nationaux, régionaux et internationaux, y compris la Cour pénale internationale et la Cour internationale de Justice, dans le cadre de toutes les enquêtes que ces juridictions pourraient mener ;

10.Demande à l’Organisation des Nations Unies de veiller à ce que le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar bénéficie de l’appui, des ressources humaines, des installations et de la liberté opérationnelle dont il a besoin pour s’acquitter au mieux de son mandat, et prie instamment le Myanmar et les autres États Membres de coopérer avec le Mécanisme, de lui accorder les accès et toute l’assistance nécessaires à l’exécution de son mandat, notamment l’accès à d’autres sources d’information, et d’offrir aux victimes et aux témoins les garanties de confidentialité et de sécurité et le soutien voulus de manière à respecter pleinement le principe consistant à « ne pas nuire » ;

11.Souligne qu’il faut remédier efficacement aux causes profondes des violations des droits de l’homme et des atteintes à ces droits dont sont victimes les minorités ethniques dans l’État rakhine, notamment les Rohingya, et créer, selon un plan préétabli, des conditions propices au retour volontaire et durable, en toute sécurité et dans la dignité, de tous les réfugiés et de toutes les personnes déplacées de force, y compris les Rohingya ;

12.Réaffirme qu’il importe d’appliquer intégralement toutes les recommandations de la Commission consultative sur l’État rakhine, notamment celles qui concernent l’accès à la nationalité, la liberté de circulation, l’élimination de la ségrégation systématique et de toutes les formes de discrimination, l’accès équitable et inclusif aux services de santé et à l’éducation et l’enregistrement des naissances, en consultant pleinement tous les groupes ethniques et minoritaires, y compris les Rohingya, ainsi que les personnes vulnérables et la société civile, et demande au Gouvernement du Myanmar de rendre régulièrement compte à l’Organisation des Nations Unies des mesures concrètes qui ont été prises pour donner suite à chacune des 88 recommandations de la Commission ;

13.Note que le Gouvernement du Myanmar s’est engagé à permettre aux jeunes musulmans de suivre des cours dans les universités du pays en mettant des bourses à la disposition des étudiants de toutes les communautés de l’État rakhine, et l’engage vivement à prendre cet engagement à l’égard de toutes les minorités ethniques et religieuses, y compris les Rohingya, et à réviser les programmes d’enseignement pour qu’ils tiennent pleinement compte de la diversité ethnique et religieuse du pays ;

14.Demande au Gouvernement du Myanmar de prendre des mesures concrètes pour créer des conditions favorables au retour volontaire et durable, en toute sécurité et dans la dignité, des Rohingya déplacés de force au Bangladesh, conformément aux instruments bilatéraux relatifs au rapatriement signés par le Bangladesh et le Myanmar en novembre 2017, et de diffuser, en partenariat avec l’Organisation des Nations Unies et les autres acteurs concernés, des informations reflétant la réalité de la situation dans l’État rakhine, de sorte à répondre aux préoccupations fondamentales des Rohingya de manière suffisamment satisfaisante pour encourager ceux-ci à retourner vers leur lieu d’origine ou à se rendre dans le lieu de leur choix, notamment en appliquant le mémorandum d’accord signé par le Gouvernement du Myanmar, le Programme des Nations Unies pour le développement et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ;

15.Engage la communauté internationale à agir dans un véritable esprit d’interdépendance et de partage des charges et à continuer d’aider le Bangladesh à fournir une assistance humanitaire aux Rohingya déplacés de force et aux membres d’autres minorités jusqu’à ce qu’ils regagnent leur lieu d’origine ou se rendent dans le lieu de leur choix au Myanmar, et à aider le Myanmar à fournir une assistance humanitaire à toutes les personnes touchées appartenant à une population déplacée à l’intérieur du pays, notamment dans l’État rakhine, en tenant compte de la vulnérabilité des femmes, des enfants, des personnes âgées et des personnes handicapées ;

16.Note que, en novembre 2019, le Gouvernement du Myanmar a adopté une stratégie nationale de réinstallation des personnes déplacées à l’intérieur du pays et de fermeture des camps de personnes déplacées, demande instamment que cette stratégie soit mise en œuvre conformément aux normes internationales, en consultation avec les organismes des Nations Unies et les organisations de la société civile concernées et en pleine concertation avec les personnes déplacées, et donc que soit favorisé le retour volontaire et durable de ces personnes vers leur lieu d’origine ou le lieu de leur choix, qui doit pouvoir s’effectuer en toute sécurité et dans la dignité, et que toute restriction à la circulation dans les États kachin, rakhine et shan et dans le sud-est du Myanmar soit levée à titre prioritaire, et recommande que les femmes soient consultées et représentées à tous les niveaux de la prise de décisions relatives à la stratégie de fermeture des camps et à sa mise en œuvre ;

17.Engage le Gouvernement du Myanmar à coopérer pleinement avec tous les titulaires de mandat des Nations Unies et tous les mécanismes relatifs aux droits de l’homme, y compris le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar, la Rapporteuse spéciale, les organismes des Nations Unies compétents, les tribunaux internationaux et régionaux et les organes internationaux et régionaux chargés des droits de l’homme, et à permettre à ces personnes et mécanismes d’accéder à l’ensemble du pays sans restriction ni surveillance afin qu’ils puissent observer indépendamment la situation des droits de l’homme, et l’engage aussi à faire en sorte que les particuliers aient librement accès aux organismes des Nations Unies et aux autres entités chargées des droits de l’homme et puissent communiquer avec ceux-ci sans crainte de représailles, d’intimidation ou d’agression ;

18.Engage également le Gouvernement du Myanmar à veiller au plein respect du droit international humanitaire, à autoriser le personnel local et international des organismes humanitaires et des autres organismes internationaux concernés à accéder librement et sans entrave à l’ensemble du territoire pour apporter à ceux qui en ont besoin une aide humanitaire adaptée à l’âge, au handicap éventuel et au sexe de chacun, et à permettre l’acheminement de fournitures et de matériel pour que ce personnel puisse prêter efficacement assistance aux populations civiles touchées, y compris les personnes déplacées à l’intérieur du pays ;

19.Prie instamment le Gouvernement du Myanmar de permettre au corps diplomatique, aux observateurs indépendants et aux représentants des médias nationaux et internationaux indépendants d’accéder pleinement et librement au pays, sans crainte de représailles, d’intimidation ou d’agression, et de lever les mesures de blocage de l’accès à Internet imposées dans les États rakhine et chin, qui touchent quatre localités depuis le 21 juin 2019 et cinq autres depuis le 3 février 2020 ;

20.Se félicite de la participation de l’Association des nations de l’Asie du Sud‑Est à la recherche de solutions pour l’État rakhine, ainsi que de la création d’une équipe de soutien ad hoc par le secrétariat de l’Association, et demande à celle-ci d’œuvrer plus activement encore, en étroite collaboration avec les organismes compétents des Nations Unies, au retour volontaire et durable des personnes déplacées, qui doit s’effectuer en toute sécurité et dans la dignité, conformément au droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit international des réfugiés ;

21.Demande au Gouvernement du Myanmar de protéger ceux qui signalent des violations et des exactions, se déclare préoccupé, à cet égard, par les informations selon lesquelles des personnes ayant exercé leur droit de dénoncer pareils actes ont été arrêtées, et prie le Gouvernement de modifier ou d’abroger les lois restrictives et de supprimer les limitations encore imposées, en ligne comme hors ligne, à l’exercice des droits à la liberté de religion ou de conviction, à la liberté d’expression et à la liberté d’association et de réunion pacifique, dont le respect est essentiel si l’on veut garantir un environnement sûr et favorable pour tous, notamment pour la société civile, les journalistes, les professionnels des médias, les défenseurs des droits de l’homme, les personnes chargées de recenser les victimes, les avocats, les défenseurs de l’environnement, les défenseurs des droits fonciers et les civils en général ;

22.Engage le Myanmar à revoir et à abroger les modifications apportées en 2018 à la loi sur les terres vacantes, en jachère ou vierges, et le prie instamment d’établir un cadre de gouvernance foncière inclusif et de régler les problèmes d’occupation des terres en consultant pleinement les populations concernées, y compris les communautés ethniques minoritaires ;

23.Se déclare préoccupé par l’érosion continue de la liberté d’expression et de la liberté de la presse et prie instamment le Myanmar de mener à bien la réforme de la loi sur les médias et de réviser, d’abroger ou de refondre toutes autres dispositions légales ayant trait à ces libertés, y compris la loi sur les secrets d’État, la loi sur les associations illégales, la loi sur les rassemblements et les manifestations pacifiques, les articles 66 d), 77 et 80 c) de la loi sur les télécommunications, la loi sur la protection de la vie privée et de la sécurité des citoyens, et les articles 500, 505 a) et 505 b) du Code pénal, de manière à les mettre en conformité avec les obligations faites à l’État par le droit international des droits de l’homme ;

24.Se félicite des mesures prises par le Parlement du Myanmar en vue de modifier la Constitution et de préparer la tenue, en 2020, de véritables élections inclusives et transparentes, de garantir la représentation et la participation égales des femmes et des membres de groupes minoritaires en tant que candidats et électeurs, de faire en sorte que tous les citoyens du Myanmar puissent voter, de veiller au respect du principe d’équité en donnant à tous les candidats la possibilité de se faire élire, d’autoriser la communauté internationale à observer les élections et de veiller à ce que la transition démocratique du pays soit viable en plaçant toutes les institutions nationales, y compris l’armée, sous l’autorité d’un gouvernement civil démocratiquement élu et pleinement représentatif ;

25.Prie instamment le Gouvernement du Myanmar de réintégrer pleinement toutes les minorités ethniques du pays dans leur nationalité, y compris les Rohingya, de rétablir leur droit de vote et de garantir la participation libre et équitable des Rohingya et des autres minorités aux élections qui se tiendront dans le pays en 2020 ;

26.Demande au Gouvernement du Myanmar de prendre les mesures nécessaires pour encourager l’inclusion et promouvoir les droits de l’homme et la dignité de toutes les personnes vivant au Myanmar, pour combattre la violence sexuelle et fondée sur le genre, la discrimination et la propagation de préjugés, y compris la diffusion d’éléments de désinformation, de discours haineux et de propos incendiaires, notamment sur les médias sociaux, et pour lutter contre l’incitation à la haine et à la violence à l’égard des minorités ethniques, religieuses et autres, conformément au Plan d’action de Rabat et à la recommandation no 9 formulée dans le résumé du rapport final de la commission d’enquête indépendante ;

27.Engage le Gouvernement du Myanmar à adhérer aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;

28.Salue la création, par le Gouvernement du Myanmar, d’un comité pour la prévention des violations graves des droits de l’enfant dans les conflits armés, et espère que ce comité obtiendra des résultats concrets et que le pays ratifiera le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, et, par ailleurs, prie instamment le Gouvernement d’accélérer l’application du plan d’action commun visant à prévenir et faire cesser l’enrôlement et l’utilisation des enfants par les forces gouvernementales, y compris la Tatmadaw, et de faire en sorte que les auteurs de violations graves des droits de l’enfant soient amenés à répondre de leurs actes, et souligne que le Myanmar doit protéger davantage le droit de tous les enfants d’acquérir la nationalité afin d’éliminer l’apatridie, conformément aux obligations mises à sa charge par la Convention relative aux droits de l’enfant, et assurer la protection de tous les enfants touchés par des conflits armés ;

29.Demande au Gouvernement du Myanmar de ratifier la Convention de 1973 sur l’âge minimum (no 138) de l’Organisation internationale du Travail, d’éliminer le travail des enfants et le travail forcé, y compris pour les groupes ethniques tels que les Rohingya, de modifier le projet de loi sur l’organisation du travail et de modifier plus avant la loi sur le règlement des conflits du travail afin de promouvoir la liberté d’association, conformément aux normes internationales du travail ;

30.Engage toutes les entreprises, y compris les sociétés transnationales présentes au Myanmar et les entreprises nationales, à respecter les droits de l’homme, dans le droit fil des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme et des recommandations que la mission internationale indépendante d’établissement des faits a formulées dans son document de séance sur les intérêts économiques de l’armée du Myanmar, et prie les États d’origine des entreprises qui investissent au Myanmar ou y ont une partie de leur chaîne d’approvisionnement de conseiller à ces entreprises de faire preuve de toute la prudence voulue pour que leurs activités ne viennent pas faciliter ni être perçues comme facilitant la perpétration de violations des droits de l’homme ou d’atteintes à ces droits ;

31.Se félicite du dialogue instauré entre le Gouvernement du Myanmar et l’Organisation des Nations Unies sur la lutte contre la violence sexuelle et la violence fondée sur le genre liées aux conflits et engage le Gouvernement à prendre des mesures afin, notamment, d’amener les auteurs de ce type de violences à répondre de leurs actes, de garantir aux victimes et aux survivants un accès à la justice et à l’assistance nécessaire, de soutenir les réformes législatives, y compris l’adoption d’une loi sur la prévention de la violence à l’égard des femmes, et de former les acteurs des secteurs de la justice et de la sécurité et de renforcer leurs capacités ;

32.Se félicite également du plan stratégique (2020‑2024) adopté par la Commission nationale des droits de l’homme du Myanmar et des efforts de réforme déployés par la Commission, engage le Parlement du Myanmar à doter la Commission des moyens de s’acquitter de son mandat en toute indépendance et en pleine conformité avec les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), regrette que la procédure de sélection des commissaires ne soit pas transparente et que les autorités n’aient pas clairement manifesté l’intention de s’assurer que la Commission reflète la diversité ethnique et religieuse du pays et soit composée de membres des deux sexes représentant différentes régions et dotés de compétences dans le domaine des droits de l’homme, et demande au Gouvernement de garantir l’indépendance de cette institution, notamment en l’aidant à se conformer aux Principes de Paris et à obtenir son accréditation auprès de l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme ;

33.Demande au Gouvernement du Myanmar de démilitariser les régions minières et d’assurer la protection des droits de l’homme des travailleurs du secteur de l’extraction des ressources naturelles et l’application des normes de sécurité environnementale, et le prie instamment de collaborer avec les parties prenantes et les populations touchées pour élaborer des politiques inclusives de gestion des ressources naturelles et de partage des bénéfices ;

34.Demande de nouveau au Gouvernement du Myanmar d’honorer l’engagement qu’il a pris d’ouvrir dans le pays un bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme pleinement qualifié pour agir conformément au mandat du Haut-Commissariat, et l’engage à adresser une invitation permanente à tous les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales ;

35.Engage le Gouvernement du Myanmar à poursuivre et à resserrer sa collaboration avec l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar et à continuer de lui donner accès au pays afin qu’elle puisse s’acquitter de son mandat ;

36.Décide de prolonger d’une année le mandat de Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, demande au nouveau titulaire du mandat de lui présenter un exposé oral à ses quarante-quatrième et quarante-cinquième sessions et un rapport écrit à sa quarante-sixième session et de soumettre un rapport à la Troisième Commission à la soixante-quinzième session de l’Assemblée générale, conformément à son programme de travail annuel, et l’invite à continuer de suivre la situation des droits de l’homme et de mesurer les progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations formulées par les titulaires de mandat ;

37.Prie le Rapporteur spécial de faire des recherches thématiques en vue de suivre l’application des recommandations formulées par la mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Myanmar et de faire figurer dans ses rapports et ses documents de séance des renseignements détaillés et actualisés sur les questions traitées par la mission ;

38.Demande au Gouvernement du Myanmar de recommencer sans délai à coopérer avec le Rapporteur spécial dans le cadre de sa mission, notamment de faciliter ses visites et de lui accorder un accès sans restriction à l’ensemble du pays, et de collaborer de nouveau avec lui aux fins de l’établissement d’un plan de travail et d’un calendrier en vue de concrétiser rapidement les objectifs de référence communs que la Rapporteuse spéciale précédente avait proposés dans ses rapports et de réaliser des progrès dans les domaines prioritaires que sont l’assistance technique et le renforcement des capacités ;

39.Se félicite que le Secrétaire général ait pris l’initiative d’adopter des mesures concrètes en se fondant sur les recommandations formulées dans le rapport établi à l’issue de l’enquête indépendante menée sur le rôle joué par l’Organisation des Nations Unies au Myanmar de 2010 à 2018, intitulé « A brief and independent inquiry into the involvement of the United Nations in Myanmar from 2010 to 2018 », et l’invite à lui rendre compte oralement, à sa quarante-sixième session, des progrès accomplis dans l’application des mesures de suivi destinées à renforcer la capacité de prévention des organismes des Nations Unies et à accroître l’efficacité de leurs travaux ;

40.Prie le Secrétaire général et la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme de fournir au Rapporteur spécial et au Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar l’assistance, les ressources et les compétences nécessaires pour leur permettre de s’acquitter pleinement de leur mission.

4 5 e séance 22 juin 2020

[Adoptée par 37 voix contre 2, avec 8 abstentions, à l’issue d’un vote enregistré. Les voix se sont réparties comme suit :

Ont voté pour :

Afghanistan, Allemagne, Argentine, Arménie, Australie, Autriche, Bahamas, Bahreïn, Bangladesh, Brésil, Bulgarie, Burkina Faso, Chili, Danemark, Érythrée, Espagne, Fidji, Îles Marshall, Italie, Libye, Mauritanie, Mexique, Namibie, Nigéria, Pakistan, Pays-Bas, Pérou, Pologne, Qatar, République de Corée, Slovaquie, Somalie, Soudan, Tchéquie, Togo, Ukraine, Uruguay.

Ont voté contre :

Philippines, Venezuela (République bolivarienne du).

Se sont abstenus :

Angola, Cameroun, Inde, Indonésie, Japon, Népal, République démocratique du Congo, Sénégal.]