Nations Unies

A/HRC/RES/27/21

Assemblée générale

Distr. générale

3 octobre 2014

Français

Original: anglais

Conseil des droits de l’homme

Vingt-sept ième sessionPoint 3 de l’ordre du jour

Promotion et protection de tous les droits de l ’ homme, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement

Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’homme

27/21Les droits de l’homme et les mesures coercitives unilatérales

Le Conseil des droits de l ’ homme,

Rappelant les buts et les principes énoncés dans la Charte des Nations Unies,

Rappelant aussi toutes les résolutions précédentes sur les droits de l’homme et les mesures coercitives unilatérales adoptées par la Commission des droits de l’homme, le Conseil et l’Assemblée générale,

Réaffirmant sa résolution 24/14 du 27 septembre 2013 et la résolution 68/162 de l’Assemblée générale en date du 18 décembre 2013,

Soulignant que les mesures et dispositions législatives coercitives unilatérales sont contraires au droit international, au droit international humanitaire, à la Charte des Nations Unies et aux normes et principes régissant les relations pacifiques entre les États,

Conscient du caractère universel, indivisible, interdépendant et indissociable de tous les droits de l’homme et réaffirmant à cet égard que le droit au développement est un droit universel et inaliénable et fait partie intégrante de tous les droits de l’homme,

Inquiet des effets négatifs que les mesures coercitives unilatérales ont sur les droits de l’homme, le développement, les relations internationales, le commerce, l’investissement et la coopération,

R éaffirmant qu’aucun État ne peut recourir ni encourager le recours à des mesures économiques, politiques ou autres pour contraindre un autre État à lui subordonner l’exercice de ses droits souverains et pour en tirer un avantage quelconque,

Reconnaissant que les mesures coercitives unilatérales qui revêtent la forme de sanctions économiques peuvent avoir des incidences de grande portée sur les droits de l’homme des populations des États ciblés, et toucher démesurément les classes défavorisées et les plus vulnérables,

Soulignant qu’en aucun cas des personnes ne devraient être privées de leurs moyens de survie essentiels,

Reconnaissantque des mesures coercitives unilatérales de longue durée peuvent engendrer des problèmes sociaux et soulever des préoccupations d’ordre humanitaire dans les États ciblés,

Appelant l’attention sur les problèmes et les griefs profonds qui existent au sein du système international et soulignant combien il importe que l’Organisation des Nations Unies permette à tous les membres de la communauté internationale de s’exprimer afin de garantir le multilatéralisme, le respect mutuel et le règlement pacifique des différends,

Rappelant le document final de la seizième Conférence des chefs d’État ou de gouvernement des pays non alignés, tenue à Téhéran du 26 au 31 août 2012, le document final de la dix-septième Conférence ministérielle du Mouvement des pays non alignés, tenue àAlger les 28 et 29 mai 2014, et ceux qui ont été adoptés lors de conférences et de sommets antérieurs, dans lesquels les États membres du Mouvement ont décidé de s’abstenir de reconnaître, d’adopter ou de mettre en œuvre des mesures ou des lois coercitives extraterritoriales ou unilatérales, notamment des sanctions économiques unilatérales, d’autres mesures d’intimidation et des restrictions arbitraires des déplacements destinées à exercer des pressions sur les pays non alignés − menaçant leur souveraineté et leur indépendance, le libre exercice du commerce et leur liberté d’investir − et à les empêcher d’exercer leur droit de décider librement de leur régime politique, économique et social, lorsque ces mesures ou lois constituent des violations flagrantes de la Charte des Nations Unies, du droit international, du système commercial multilatéral et des normes et principes régissant les relations amicales entre les États, et ont décidé à cet égard de rejeter et de condamner ces mesures et ces lois et la poursuite de leur application, de persévérer dans leurs efforts visant à en obtenir la suppression, d’inviter instamment les autres États à en faire de même, comme l’ont demandé l’Assemblée générale et d’autres organes des Nations Unies, et de demander aux États appliquant lesdites mesures ou lois de les abroger totalement et immédiatement,

Rappelant aussi qu’à la Conférence mondiale sur les droits de l’homme, tenue à Vienne du 14 au 25 juin 1993, il a été demandé aux États de s’abstenir de prendre toute mesure unilatérale qui soit incompatible avec le droit international et la Charte des Nations Unies, qui fasse obstacle aux relations commerciales entre les États, qui entrave la pleine réalisation de tous les droits de l’homme et qui, en outre, menace gravement le libre exercice du commerce,

Constatant avec une vive préoccupation que, malgré les résolutions adoptées à ce sujet par l’Assemblée générale, le Conseil et la Commission des droits de l’homme, ainsi qu’à l’occasion des conférences des Nations Unies tenues dans les années 1990 et de leur examen quinquennal, l’adoption, l’application et l’exécution de mesures coercitives unilatérales se poursuivent, au mépris des normes du droit international et de la Charte, notamment par le recours à la guerre et au militarisme, avec toutes les conséquences négatives qu’elles ont pour l’action sociale et humanitaire et le développement économique et social des pays en développement, notamment leurs incidences extraterritoriales, créant ainsi de nouveaux obstacles au plein exercice de tous les droits de l’homme par les peuples et les individus relevant de la juridiction d’autres États,

Profondément troublépar les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur le droit à la vie, les droits à la santé et aux soins médicaux, le droit d’être à l’abri de lafaim et le droit à un niveau de vie suffisant, à l’alimentation, à l’éducation, au travail et au logement,

Alarmé par le coût humain disproportionné et arbitraire des sanctions unilatérales et leurs effets négatifs sur la population civile des États ciblés, notamment les femmes et les enfants,

Réaffirmant que les mesures coercitives unilatérales sont un obstacle majeur à l’application de la Déclaration sur le droit au développement,

Constatant avec préoccupation que les mesures coercitives unilatérales ont, dans certains cas, empêché les organisations humanitaires d’effectuer des transferts de fonds vers des États sur le territoire desquels elles interviennent,

Soulignant qu’il faut examiner les divers effets des mesures coercitives unilatérales sur le droit international humanitaire et le droit international relatif aux droits de l’homme, ainsi que sur l’économie, la paix, la sécurité et le tissu social des États,

Insistant sur la nécessité de surveiller les violations des droits de l’homme associées aux mesures coercitives unilatérales et de promouvoir le principe de responsabilité,

Mettant l’accent sur le fait qu’une procédure spéciale doit être mise en place dans le cadre du Conseil en ce qui concerne l’impact de l’application de mesures coercitives unilatérales sur l’exercice de tous les droits de l’homme,

Rappelant ses résolutions 5/1 sur la mise en place des institutions du Conseil et 5/2 sur le Code de conduite pour les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales duConseil, en date du 18 juin 2007, et soulignant que le titulaire de mandat doit s’acquitter de ses obligations conformément à ces résolutions et à leurs annexes,

Rappelant également le paragraphe 2 de l’article premier commun au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui dispose qu’en aucun cas un peuple ne peut être privé de ses moyens de subsistance,

1.Demande instamment à tous les États de cesser d’adopter ou d’appliquer des mesures coercitives unilatérales qui ne sont pas conformes au droit international, au droit international humanitaire, à la Charte des Nations Unies et aux normes et principes régissant les relations pacifiques entre les États, en particulier les mesures à caractère coercitif ayant des incidences extraterritoriales, qui font obstacle aux relations commerciales entre les États et empêchent ainsi la pleine réalisation des droits énoncés dans la Déclarationuniverselle des droits de l’homme et dans d’autres instruments internationaux relatifs auxdroits de l’homme, notamment le droit des personnes et des peuples au développement;

2.Désapprouve vivement la forme extraterritoriale que peuvent prendre ces mesures, qui, de surcroît, menacent la souveraineté des États, et demande dans ce contexte à tous les États Membres de refuser à la fois de reconnaître et d’appliquer ces mesures, et de prendre selon qu’il y a lieu des dispositions administratives ou législatives efficaces pour contrer l’application ou les incidences extraterritoriales des mesures coercitives unilatérales;

3.Condamne le fait que certaines puissances continuent d’appliquer et d’exécuter unilatéralement des mesures de cette nature pour exercer des pressions politiques ou économiques sur tel ou tel pays, en particulier les pays en développement, dans le dessein de les empêcher d’exercer leur droit de décider librement de leur régime politique, économique et social;

4.Constate avec une vive inquiétude que, dans certains pays, la situation des enfants et des femmes pâtit de mesures coercitives unilatérales contraires au droit international et à la Charte des Nations Unies qui font obstacle aux relations commerciales entre les États, entravent la pleine réalisation du développement social et économique et nuisent au bien-être de la population des pays touchés, avec des conséquences particulières pour lesfemmes, les enfants, les adolescents, les personnes âgées et les personnes handicapées;

5.Demande à nouveau aux États Membres qui ont pris de telles mesures d’y mettre immédiatement fin en se conformant aux principes du droit international, à la Charte des Nations Unies, aux déclarations des conférences des Nations Unies et des conférences mondiales ainsi qu’aux résolutions pertinentes, et de s’acquitter des obligations et responsabilités qui découlent des dispositions pertinentes du droit international et des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels ils sont parties;

6.Réaffirme dans ce contexte le droit de tous les peuples à disposer d’eux-mêmes, en vertu duquel un peuple détermine librement son statut politique et assure librement son propre développement économique, social et culturel;

7.Réaffirme aussi son opposition à toute tentative ayant pour objet de compromettre partiellement ou totalement l’unité nationale et l’intégrité territoriale d’un État, qui est incompatible avec les dispositions de la Charte des Nations Unies;

8.Rappelle que, selon la Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies, et selon les dispositions et principes pertinents de la Charte des droits et devoirs économiques des États proclamée par l’Assemblée générale dans sa résolution 3281 (XXIX) du 12 décembre 1974, notamment l’article 32 de ladite Charte, aucun État ne peut recourir ni encourager le recours à des mesures économiques, politiques ou de toute autre nature pour contraindre un autre État à lui subordonner l’exercice de ses droits souverains et pour obtenir de lui des avantages de quelque ordre que ce soit;

9.Réaffirme que les biens de première nécessité, tels que les denrées alimentaires et les médicaments, ne doivent pas servir d’instrument de pression politique et qu’en aucun cas un peuple ne peut être privé de ses propres moyens de subsistance et de développement;

10.Souligne le fait que l’adoption de mesures coercitives unilatérales est l’un des principaux obstacles à l’application de la Déclaration sur le droit au développement et demande à cet égard à tous les États d’éviter d’imposer unilatéralement des mesures économiques coercitives et de recourir à l’application extraterritoriale de lois nationales qui iraient à l’encontre des principes du libre-échange et entraveraient le développement des pays en développement;

11.Dénonce toute tentative de mise en œuvre de mesures coercitives unilatérales ainsi que la tendance croissante à le faire, y compris par l’adoption de lois d’application extraterritoriale qui ne sont pas conformes au droit international;

12.Constateque la Déclaration de principes adoptée à l’issue de la première phase du Sommet mondial sur la société de l’information, qui a eu lieu à Genève en décembre 2003, engage vivement les États à éviter toute action unilatérale et à s’en abstenir dans l’édification de la société de l’information;

13.Invite instamment tous les rapporteurs spéciaux et mécanismes thématiques actuels du Conseil compétents en matière de droits économiques, sociaux et culturels à accorder l’attention voulue, dans le cadre de leurs mandats respectifs, aux incidences et conséquences négatives des mesures coercitives unilatérales;

14.Estime qu’il importe de réunir des informations suffisamment nombreuses et de qualité sur les incidences négatives de l’application de mesures coercitives unilatérales pour que les responsables de violations des droits de l’homme découlant de l’application de telles mesures contre tout État soient tenus de rendre des comptes;

15.Décide de prendre dûment en considération les incidences négatives des mesures coercitives unilatérales sur les droits de l’homme dans les activités qu’il mène pour faire appliquer le droit au développement;

16.Prie le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme d’accorder l’attention voulue, dans l’exercice de ses fonctions de promotion et de protection des droits de l’homme, à la présente résolution et de l’examiner d’urgence;

17.Note avec satisfaction que le Haut-Commissariat a organisé le 23 mai 2014 à Genève un atelier sur les incidences de l’application de mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme par les populations touchées, en particulier les incidences socioéconomiques sur les femmes et les enfants, dans les États ciblés;

18.Prend note avec satisfaction du rapport du Haut-Commissariat sur les travaux de l’atelier susmentionné et accueille positivement le rapport du Secrétaire général à l’Assemblée générale sur les droits de l’homme et les mesures coercitives unilatérales;

19.Décide d’organiser tous les deux ans, à compter de sa vingt-neuvième session, une réunion-débat consacrée aux mesures coercitives unilatérales et aux droits de l’homme, avec la participation des États Membres, des organes et organismes des NationsUnies concernés et d’autres parties intéressées, et demande également au Haut‑Commissariat d’élaborer et de lui soumettre un rapport sur la réunion‑débat;

20.Réitère la demandequ’il a adressée au Comité consultatif du Conseil d’établir un rapport fondé sur des travaux de recherche comportant des recommandations relatives à un mécanisme visant à évaluer les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme et à promouvoir le principe de responsabilité et de présenter au Conseil à sa vingt-huitième session, pour examen, un bilan d’étape sur l’état d’avancement du rapport demandé, fondé sur des travaux de recherche;

21.Demande au Comité consultatif de solliciter, dans le cadre de l’élaboration du rapport fondé sur des travaux de recherche susmentionné, les vues et les contributions des États Membres et des titulaires d’un mandat relevant des procédures spéciales concernés, ainsi que des institutions nationales des droits de l’homme et d’organisations non gouvernementales;

22.Décide de nommer pour trois ans un rapporteur spécial sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme, qui aura pour mandat:

a)De recueillir toutes les informations pertinentes, d’où qu’elles proviennent, notamment auprès des gouvernements, des organisations non gouvernementales et de toute autre partie, concernant les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme;

b)D’étudier les tendances, les faits nouveaux et les problèmes liés aux effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme et de formuler des lignes directrices et des recommandations sur les moyens de prévenir, de réduire et de corriger les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur les droits de l’homme;

c)De procéder à un examen d’ensemble des mécanismes indépendants permettant d’évaluer les mesures coercitives unilatérales en vue de promouvoir le principe de responsabilité;

d)De contribuer à renforcer la capacité du Haut-Commissariat de fournir aux pays touchés une assistance technique et des services consultatifs en vue de prévenir, de réduire et de corriger les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur les droits del’homme;

23.Prie le Rapporteur spécial, agissant dans le cadre de son mandat:

a)D’appeler l’attention du Conseil et du Haut-Commissariat sur les situations et les cas se rapportant aux effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur la pleine réalisation des droits de l’homme;

b)De coopérer avec d’autres organismes compétents des Nations Unies, notamment avec le Haut-Commissaire, les organes créés en vertu d’instruments relatifs aux droits de l’homme, les procédures et mécanismes spéciaux, les institutions spécialisées, les différents fonds et programmes, les organisations intergouvernementales régionales et leurs mécanismes, en vue de prévenir, de réduire et de corriger les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur les droits de l’homme;

24.Engage tous les États à coopérer avec le Rapporteur spécial dans l’accomplissement de sa tâche, à lui apporter leur concours et à lui communiquer tous les renseignements nécessaires qu’il demande;

25.Invite le Haut-Commissaire, les titulaires de mandat relevant des procédures spéciales pertinentes du Conseil et les organes conventionnels à prêter attention, dans le cadre de leur mandat, à la situation des personnes dont les droits ont été bafoués du fait de mesures coercitives unilatérales;

26.Prie le Secrétaire général de fournir au Rapporteur spécial l’assistance voulue pour qu’il puisse s’acquitter efficacement de son mandat, en particulier en mettant à sa disposition des ressources humaines et matérielles appropriées;

27.Prie le Rapporteur spécial de présenter chaque année au Conseil et à l’Assemblée générale un rapport sur les activités liées à son mandat;

28.Décide de poursuivre l’examen de la question des effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur les droits de l’homme en fonction de son programme de travail.

40 e séance 26 septembre 2014

[Adoptée à l’issue d’un vote enregistré par 31 voix contre 14, avec 2 abstentions. Les voix se sont réparties comme suit:

Ont voté pour:

Afrique du Sud, Algérie, Arabie saoudite, Argentine, Bénin, Botswana, Brésil, Burkina Faso, Chili, Chine, Congo, Côte d’Ivoire, Cuba, Émirats arabes unis, Éthiopie, Fédération de Russie, Gabon, Inde, Indonésie, Kenya, Koweït, Maldives, Maroc, Mexique, Namibie, Pakistan, Pérou, Philippines, Sierra Leone, Venezuela (République bolivarienne du), Viet Nam

Ont voté contre:

Allemagne, Autriche, Estonie, États-Unis d’Amérique, ex-République yougoslave de Macédoine, France, Irlande, Italie, Japon, Monténégro, Roumanie, République de Corée, République tchèque, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

Se sont abstenus:

Costa Rica, Kazakhstan]