Nations Unies

A/HRC/RES/50/20

Assemblée générale

Distr. générale

19 juillet 2022

Français

Original : anglais

Conseil des droits de l ’ homme

Cinquantième session

13 juin-8 juillet 2022

Point 4 de l’ordre du jour

Situations relatives aux droits de l ’ homme qui requièrent l ’ attention du Conseil

Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’homme le 8 juillet 2022

50/20.Situation des droits de l’homme au Bélarus

« Le Conseil des droits de l ’ homme,

Guidé par les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, les dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme, les pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme et les autres instruments applicables relatifs aux droits de l’homme,

Rappelant toutes les résolutions adoptées par la Commission des droits de l’homme, par l’Assemblée générale et par lui-même au sujet de la situation des droits de l’homme au Bélarus, notamment ses résolutions 47/19 du 13 juillet 2021 et 49/26 du 1er avril 2022, et rappelant également les déclarations faites par la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, le Bureau du Secrétaire général et les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales sur la détérioration de la situation des droits de l’homme au Bélarus,

Regrettant le manque de coopération des autorités bélarussiennes et le fait que celles‑ci n’ont pas donné la suite voulue aux demandes qu’il a formulées dans les résolutions susmentionnées, notamment en ce qui concerne l’accès, ni aux recommandations que leur ont adressées la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus et d’autres titulaires de mandat au titre de procédures spéciales,

Rappelant ses résolutions 5/1 et 5/2, du 18 juin 2007,

1.Accueille avec satisfaction le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus ;

2.Se déclare profondément préoccupé par la persistance des violations systématiques des droits de l’homme et des libertés fondamentales au Bélarus, en particulier par les restrictions à l’exercice des libertés de réunion pacifique, d’association et d’expression, en ligne et hors ligne, qui se traduisent par des actes de harcèlement, d’intimidation et de répression visant la société civile et les médias indépendants, et un nombre sans cesse croissant de détentions et d’arrestations arbitraires pour des motifs politiques ou visant des personnes ayant exercé leurs droits de l’homme ou leurs libertés fondamentales, notamment des journalistes et autres professionnels des médias, des défenseurs et défenseuses des droits humains, des médecins, des avocats, des travailleurs culturels, des enseignants, des étudiants, des personnes appartenant à une minorité nationale, des personnes ayant exprimé des opinions dissidentes, des membres de syndicats et de comités de grève, et d’autres membres de la société civile ;

3.Condamne fermement les cas signalés de privation arbitraire de la vie de personnes en détention, en violation du droit international des droits de l’homme, ainsi que la persistance du recours systématique et généralisé à la torture et à d’autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants et aux violences sexuelles et fondées sur le genre à l’égard des personnes, y compris des enfants et des jeunes, arrêtées et détenues au Bélarus, les conditions de détention inhumaines et le refus de donner accès à des soins médicaux et à une assistance juridique appropriés dans les centres de détention et les prisons, ainsi que le déni du droit à un procès équitable et l’absence d’enquêtes rapides, efficaces, approfondies, transparentes et impartiales par les autorités bélarussiennes sur toutes les violations des droits de l’homme susmentionnées ;

4.Se déclare profondément préoccupé par la répression dont feraient l’objet les personnes qui exercent leur droit à la liberté d’expression et d’opinion en dénonçant l’agression commise par la Fédération de Russie contre l’Ukraine et le soutien apporté par le Bélarus à cette agression, ainsi que par les restrictions à la liberté de chacun de rechercher, de recevoir et de répandre des informations, notamment en ce qui concerne l’utilisation par l’État du territoire et des infrastructures du pays pour faciliter cette agression, et demande instamment aux autorités bélarussiennes de garantir un environnement propice au fonctionnement de médias véritablement indépendants, tant en ligne que hors ligne, y compris un accès sans entrave à un Internet ouvert, interopérable, fiable et sécurisé ;

5.Prend note avec une profonde inquiétude du caractère de plus en plus restrictif du cadre juridique qui limite encore davantage l’exercice des libertés d’opinion et d’expression et de réunion pacifique en violation du droit international des droits de l’homme ou qui conduit à des violations d’autres droits de l’homme, et qui vise en particulier les militants prodémocratie, les personnes qui manifestent pacifiquement contre l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie, les acteurs de la société civile, les défenseurs et défenseuses des droits humains, les avocats, les médias indépendants, les journalistes et les autres professionnels des médias, mais aussi d’autres personnes, y compris des enfants, s’agissant notamment des modifications apportées à la loi sur les rassemblements de masse, à la loi sur les médias, à la loi sur la lutte contre l’extrémisme et à la loi sur le barreau et la profession d’avocat, adoptées en mai 2021, des modifications du Code pénal criminalisant la participation aux activités d’entités de la société civile dissoutes ou la participation aux activités d’organisations non enregistrées, adoptées en mai et décembre 2021, du nouveau Code des infractions administratives adopté en janvier 2022, des modifications du Code pénal élargissant l’application de la peine de mort, adoptées en mai 2022, et de certaines modifications de la Constitution adoptées par voie référendaire le 27 février 2022 ;

6.Exhorte vivement les autorités bélarussiennes à respecter, garantir et remplir pleinement toutes leurs obligations internationales en matière de droits de l’homme, notamment celles découlant des Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme, de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et de la Convention relative aux droits de l’enfant ;

7.Exige à cet égard la libération immédiate et inconditionnelle de toutes les personnes détenues arbitrairement ou illégalement au Bélarus et exigeégalement que les autorités bélarussiennes cessent immédiatement de soumettre des personnes à des poursuites pénales ou administratives et à des actes de harcèlement, d’intimidation et de répression pour la seule raison qu’elles ont exercé leurs droits de l’homme et leurs libertés fondamentales ;

8.Exige en outre que des enquêtes rapides, efficaces, approfondies, transparentes et impartiales soient menées afin que les responsabilités soient établies dans tous les cas allégués de violations des droits de l’homme ou d’atteintes à ces droits, tout particulièrement lorsqu’il y a eu décès, détention arbitraire, torture et mauvais traitements, y compris des actes de violence sexuelle et fondée sur le genre, et que les victimes puissent bénéficier de mesures de restitution, d’indemnisation, de réadaptation et de satisfaction ainsi que de garanties de non-répétition ;

9.Exhorte de nouveau vivement les autorités bélarussiennes à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer l’indépendance et l’impartialité totales du pouvoir judiciaire et l’indépendance et la protection des gens de loi, pour garantir le droit de toute personne à un procès équitable et le droit de faire examiner les déclarations de culpabilité et les condamnations par une juridiction supérieure, ainsi que le droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et de communiquer avec le conseil de son choix et de bénéficier d’autres garanties tout au long de la procédure, y compris pour les personnes accusées d’infractions administratives ou pénales, et regrette l’absence de progrès dans ce domaine ;

10.Se félicite de l’assistance apportée par la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus à la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme dans le cadre de son mandat conformément à la résolution 49/26 du Conseil des droits de l’homme, et accueille avec intérêt le rapport de la Haut-Commissaire sur la situation des droits de l’homme au Bélarus à l’approche et au lendemain de l’élection présidentielle de 2020 ;

11.Demande à nouveau aux autorités bélarussiennes de procéder à une révision complète de la législation, des politiques, des stratégies et des pratiques pertinentes pour faire en sorte que les dispositions qui y figurent soient clairement définies et conformes aux obligations et aux engagements du Bélarus au regard du droit international des droits de l’homme, et ne soient pas utilisées pour entraver ou restreindre indûment l’exercice de ces droits, et d’investir dans le renforcement des capacités et la formation appropriée des membres de l’appareil judiciaire et des organes chargés de faire respecter la loi ;

12.Encourage vivement le Bélarus à entamer sans délai la réforme complète de son cadre juridique électoral et à remédier aux insuffisances structurelles dont le cadre juridique et les pratiques électorales sont entachées de longue date, conformément aux recommandations que lui ont adressées le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) et la Rapporteuse spéciale, et relève avec préoccupation l’absence de transparence et le caractère non inclusif du référendum constitutionnel tenu le 27 février 2022 ;

13.Déplore la discrimination persistante dont sont victimes les femmes et les filles et les personnes en situation de vulnérabilité, notamment les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes, les personnes handicapées et les personnes appartenant à une minorité nationale ou ethnique, linguistique et religieuse, tout en prenant note de la modification de la Constitution en ce qui concerne les droits des personnes handicapées ;

14.Exhorte à nouveau les autorités bélarussiennes à adopter une politique et une législation globales de non-discrimination garantissant l’égalité des droits pour tous, en droit comme dans la pratique, y compris le plein accès à un enseignement de qualité dans des conditions d’égalité, et, soulignant la nécessité de prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant, les exhorte également à appliquer toutes les recommandations du Comité des droits de l’enfant et du Comité contre la torture concernant la justice pour mineurs, ainsi que toutes les recommandations du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, tout en relevant que quelques mesures visant à prévenir la discrimination ont déjà été mises en œuvre au Bélarus ;

15.Constate que le premier plan d’action national en faveur des droits de l’homme (2016-2019) a contribuéà faciliter la coopération intergouvernementale et le dialogue avec la société civile et favorisé une légère intensification des échanges entre l’État et la société civile, demande une nouvelle fois aux autorités bélarussiennes d’annuler les décisions relatives à la dissolution forcée des entités de la société civile, d’engager un dialogue national véritable, constructif, inclusif et transparent avec la société civile, et d’élaborer et de mettre en œuvre sans délai, en étroite coopération avec la société civile, un nouveau plan d’action en faveur des droits de l’homme, en s’appuyant sur les enseignements tirés de la mise en œuvre du premier plan et en tenant compte des recommandations acceptées par l’État dans le cadre du troisième Examen périodique universel, ainsi que des recommandations formulées par les organes conventionnels, les mécanismes des droits de l’homme et la société civile ;

16.Engage de nouveau vivement les autorités bélarussiennes à mettre en place une institution nationale des droits de l’homme qui soit conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), à appliquer les recommandations du Comité des droits économiques, sociaux et culturels à cet égardet à continuer de s’employer activement à mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 ;

17.Se déclare profondément préoccupé par le recours à la peine de mort dans un contexte où les garanties d’un procès équitable ne sont pas respectées, et par le peu d’informations pertinentes à ce sujet, compte tenu en particulier des modifications apportées au Code pénal en mai 2022, qui élargissent l’application de la peine de mort, et du fait que la transparence est indispensable à une justice pénale équitable et efficace, salue l’attentionsoutenue que la Rapporteuse spéciale accorde à la question de la peine de mort au Bélarus, prie la Rapporteuse spéciale de continuer à suivre l’évolution de la situation et à formuler des recommandations, et encourage le Bélarus à relancer un dialogue national au sujet d’un moratoire sur la peine de mort et à envisager l’abolition de cette peine ;

18.Décide de proroger d’un an le mandat de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus, et prie la Rapporteuse spéciale de continuer à suivre l’évolution de la situation et à formuler des recommandations et de lui soumettre à sa cinquante-troisième session, ainsi qu’à l’Assemblée générale à sa soixante‑dix‑huitième session, un rapport sur la situation des droits de l’homme au Bélarus ;

19.Exhorte les autorités bélarussiennes à coopérer pleinement avec la Rapporteuse spéciale, notamment en l’autorisant à se rendre en sa qualité officielle dans le pays et à y rencontrer librement les parties concernées, y compris des représentants de la société civile, afin qu’elle puisse les aider à s’acquitter de leurs obligations internationales en matière de droits de l’homme, et en étudiant la possibilité d’appliquer ses recommandations, et les exhorte également à coopérer pleinement avec les titulaires de mandat au titre de procédures spéciales thématiques et avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme ;

20.Prie le Haut-Commissariat de fournir à la Rapporteuse spéciale toute l’assistance et les ressources nécessaires pour qu’elle puisse s’acquitter pleinement de son mandat.

42 e séance 8 juillet 2022

[Adoptée à l’issue d’un vote enregistré par 23 voix contre 6, avec 18 abstentions. Les voix se sont réparties comme suit :

Ont voté pour :

Allemagne, Argentine, Bénin, Brésil, États-Unis d’Amérique, Finlande, France, Gambie, Honduras, Îles Marshall, Japon, Lituanie, Luxembourg, Malawi, Mexique, Monténégro, Pays-Bas, Paraguay, Pologne, République de Corée, Tchéquie, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et Ukraine.

Ont voté contre :

Bolivie (État plurinational de), Chine, Cuba, Érythrée, Kazakhstan et Venezuela (République bolivarienne du).

Se sont abstenus :

Arménie, Cameroun, Côte d’Ivoire, Émirats arabes unis, Gabon, Inde, Indonésie, Libye, Malaisie, Mauritanie, Namibie, Népal, Ouzbékistan, Pakistan, Qatar, Sénégal, Somalie et Soudan.]