Nations Unies

A/HRC/RES/25/25

Assemblée générale

Distr. générale

9 avril 2014

Français

Original: anglais

Conseil des droits de l ’ homme

Vingt-cinquième session

Point 4 de l’ordre du jour

Situations relatives aux droits de l ’ homme qui requièrent l ’ attention du Conseil

Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’homme

25/25Situation des droits de l’homme en République populairedémocratique de Corée

Le Conseil des droits de l ’ homme,

Guidé par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme et d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme,

Rappelant toutes les résolutions précédentes adoptées par la Commission des droits de l’homme, le Conseil des droits de l’homme et l’Assemblée générale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, notamment la résolution 22/13 du Conseil, en date du 21 mars 2013, et la résolution 68/183 de l’Assemblée, en date du18 décembre 2013, et demandant instamment l’application de ces résolutions,

Ayant à l ’ esprit le paragraphe 3 de la résolution 60/251 de l’Assemblée générale, en date du 15 mars 2006,

Rappelant les résolutions 5/1 et 5/2 du Conseil des droits de l’homme, en date du 18 juin 2007, relatives, respectivement, à la mise en place des institutions du Conseil et au Code de conduite des titulaires de mandat du Conseil au titre des procédures spéciales, et soulignant que tout titulaire de mandat doit s’acquitter de ses fonctions conformément à ces résolutions et aux annexes à celles-ci,

Félicitant la Commission d’enquête sur les droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée pour les activités qu’elle mène à bien de façon transparente, impartiale et consultative, en dépit des efforts du Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée pour réduire l’accès à l’information en refusant d’autoriser laCommission à se rendre dans le pays,

Saluant les efforts déployés par la Commission d’enquête pour garantir la pleine transparence de l’enquête en fournissant des renseignements complets sur ses activités au Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée, ainsi qu’en invitant le représentant de la République populaire démocratique de Corée aux audiences publiques,

Regrettant profondément le refus du Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée d’accorder toute coopération à la Commission d’enquête et au Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, notamment l’accès au pays,

Soulignant l’importance des récits livrés par les victimes et les témoins eux-mêmes dans le cadre des audiences publiques et des entretiens confidentiels organisés par la Commission,

Rappelant l’appel lancé à la communauté internationale par la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme dans sa déclaration du 18 février 2014, visant à utiliser tous les mécanismes à sa disposition pour garantir l’établissement des responsabilités, y compris le renvoi devant la Cour pénale internationale,

Profondément préoccupé par les violations systématiques, généralisées et flagrantes des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée qui, dans de nombreux cas, constituent des crimes contre l’humanité, ainsi que par l’impunité dont jouissent leurs auteurs, comme décrit dans le rapport de la Commission d’enquête,

Se déclarant gravement préoccupé par le refus persistant du Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée de préciser, au moment de l’adoption par le Conseil des droits de l’homme du rapport final de son Examen périodique universel, en mars 2010, quelles sont les recommandations auxquelles il souscrit, et regrettant le fait que la République populaire démocratique de Corée n’a à ce jour donné aucune suite aux recommandations formulées dans ce rapport,

Notant avec inquiétude que la situation humanitaire précaire dans le pays est aggravée par le fait que le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée ne fournit pas aux organismes humanitaires un accès libre et sans entrave à toutes les populations dans le besoin et qu’il accorde notamment la priorité, dans ses politiques nationales, aux dépenses militaires plutôt qu’à l’accès des citoyens à l’alimentation,

Réaffirmant qu’il incombe au Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée d’assurer le plein exercice de tous les droits de l’homme et libertés fondamentales de la population tout entière, notamment en garantissant l’accès, dans des conditions d’égalité, à une alimentation suffisante, ainsi que, notamment, la liberté de religion et de conviction, la liberté d’expression et la liberté d’association et de réunion,

Conscient de la vulnérabilité particulière des femmes, des enfants, des personnes handicapées et des personnes âgées et de la nécessité de leur garantir la pleine jouissance de tous les droits de l’homme et libertés fondamentales, en les protégeant contre la négligence, les mauvais traitements, l’exploitation et la violence,

Réaffirmant qu’il importe que les États participent pleinement et de manière constructive au processus de l’Examen périodique universel ainsi qu’aux autres mécanismes du Conseil des droits de l’homme, aux fins de l’amélioration de leur situation dans le domaine des droits de l’homme,

Accueille avec satisfaction le rapport de la Commission d’enquête sur les droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée1, et réaffirme que ce rapport devrait être transmis à tous les organes compétents de l’Organisation des Nations Unies etauSecrétaire général pour suite à donner;

Condamne avec la plus grande fermeté les violations persistantes, systématiques, généralisées et flagrantes des droits de l’homme et autres atteintes aux droits de l’homme qui sont actuellement commises en République populaire démocratique de Corée, et se déclare profondément préoccupé par les conclusions détaillées formulées par la Commission d’enquête dans son rapport, notamment:

a)Le déni du droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, ainsi que des droits à la liberté d’opinion, d’expression et d’association, qui se manifeste par le monopole absolu sur l’information et un contrôle total de la vie sociale organisée, ainsi que par la surveillance arbitraire et illégale de l’État qui imprègne jusqu’à la vie privée de l’ensemble de la population;

b)La discrimination fondée sur le système songbun, selon lequel les individus sont classés non seulement en fonction de leur naissance et de la classe sociale que leur assigne l’État mais aussi de leurs opinions politiques et de leur religion; la discrimination à l’égard des femmes, notamment l’inégalité d’accès à l’emploi, les lois et les réglementations discriminatoires, et la violence contre les femmes;

c)Les violations de tous les aspects du droit à la liberté de circulation, notamment l’assignation forcée d’un lieu de résidence et de travail fixé par l’État, souvent fondée sur le système songbun, et le déni du droit de quitter son pays;

d)Les violations systématiques, répandues et graves du droit à l’alimentation et d’autres aspects du droit à la vie, aggravées par la famine et la malnutrition généralisées;

e)Les violations du droit à la vie et les actes d’extermination, de meurtre, de réduction à l’esclavage, de torture, de détention, de viol et d’autres formes graves de violence sexuelle et de persécution fondés sur des motifs politiques, religieux et sexistes commis dans les camps de prisonniers politiques et dans les prisons ordinaires, et la pratique répandue des châtiments collectifs, qui inflige des sanctions sévères à des innocents;

f)Les enlèvements systématiques, le refus de rapatriement et la disparition forcée de personnes, y compris de ressortissants d’autres pays, qui s’inscrivent dans le cadre d’une politique de l’État à grande échelle;

Exhorte le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée à reconnaître les violations des droits de l’homme commises dans le pays et à prendre immédiatement des mesures pour mettre un terme à toutes ces violations et atteintes, notamment en mettant en œuvre les recommandations pertinentes formulées dans le rapport de la Commission d’enquête, y compris, mais pas seulement, les mesures suivantes:

a)Garantir le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, ainsi que les droits à la liberté d’opinion, d’expression et d’association, notamment en autorisant l’établissement de journaux et autres médias indépendants;

b)Mettre un terme à la discrimination à l’égard des citoyens, notamment à la discrimination fondée sur le système songbun cautionné par l’État, et prendre immédiatement des mesures pour garantir l’égalité des sexes et protéger les femmes contre la violence;

c)Garantir le droit à la liberté de circulation, notamment la liberté de choisir son lieu de résidence et de travail;

d)Promouvoir l’accès, dans des conditions d’égalité, à l’alimentation, notamment en garantissant la pleine transparence de la fourniture de l’aide humanitaire de sorte que cette aide parvienne vraiment aux personnes vulnérables;

e)Mettre immédiatement un terme à toutes les violations des droits de l’homme dans les camps de prisonniers, notamment la pratique du travail forcé, démanteler tous les camps de prisonniers politiques et libérer tous les prisonniers politiques, et veiller à ce que des réformes dans le secteur de la justice permettent de garantir le droit à un procès équitable et à une procédure régulière;

f)Autoriser toutes les personnes qui ont été enlevées ou qui ont été victimes de disparitions forcées, ainsi que leurs descendants, à retourner immédiatement dans leurs pays d’origine;

Se déclare très gravement préoccupé par les conclusions de la commission concernant la situation des réfugiés et des demandeurs d’asile renvoyés en République populaire démocratique de Corée et d’autres citoyens de ce pays après leur rapatriement, qui ont fait l’objet de sanctions comprenant notamment des mesures d’internement, des actes de torture, des traitements cruels, inhumains et dégradants, des violences sexuelles, des disparitions forcées ou la peine capitale, et, à cet égard, engage vivement tous les États à respecter le principe fondamental du non-refoulement, à traiter avec humanité ceux qui cherchent refuge et à garantir le libre accès du Haut-Commissaire et du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en vue de protéger les droits de l’homme de ceux qui cherchent refuge, et invite de nouveau instamment les États parties à s’acquitter des obligations que leur imposent le droit international des droits de l’homme ainsi que la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et les Protocoles de 1967 s’y rapportant en ce qui concerne les ressortissants de la République populaire démocratique de Corée qui sont visés par ces instruments;

Prend note avec une profonde consternation du constat de la Commission selon lequel l’ensemble des témoignages recueillis et l’information reçue permettent de penser que des crimes contre l’humanité ont été commis en République populaire démocratique de Corée, dans le cadre de politiques établies au plus haut niveau de l’État depuis des décennies; ces crimes contre l’humanité sont notamment l’extermination, le meurtre, la réduction en esclavage, la torture, la détention, le viol, les avortements forcés et autres violences sexuelles, les persécutions fondées sur des motifs politiques, religieux, raciaux et sexistes, les déplacements forcés de populations, les disparitions forcées et la pratique inhumaine de l’exposition prolongée et intentionnelle à la faim;

Souligne que les autorités de la République populaire démocratique de Corée n’ont pas engagé de poursuites contre les auteurs de crimes contre l’humanité et d’autres violations des droits de l’homme, et encourage les membres de la communauté internationale à coopérer aux efforts de responsabilisation et à veiller à ce que ces crimes ne demeurent pas impunis;

Recommande à l’Assemblée générale de soumettre le rapport de la Commission d’enquête au Conseil de sécurité afin que celui-ci l’examine et prenne les mesures qu’il jugera utiles pour amener les auteurs de violations des droits de l’homme, y compris les violations susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité, à répondre de leurs actes, notamment qu’il envisage de saisir le mécanisme de justice pénale internationale pertinent de la situation en République populaire démocratique de Corée, et examine la possibilité de prendre des sanctions ciblées effectives contre ceux qui semblent porter la plus grande part de responsabilité dans les crimes contre l’humanité, en tenant compte des conclusions et des recommandations pertinentes de la Commission d’enquête;

Décide de proroger d’un an le mandat du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée conformément à la résolution 22/13 du Conseil des droits de l’homme;

Demande à toutes les parties concernées, y compris les organismes des Nations Unies, d’envisager de donner suite aux recommandations présentées par la Commission d’enquête dans son rapport en vue de remédier à la grave situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée;

Demande au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme de donner suite sans délai aux recommandations formulées par la Commission d’enquête dans son rapport et d’apporter au Rapporteur spécial un soutien accru, y compris par la mise enplace d’une structure sur le terrain visant à renforcer la surveillance de la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée et la collecte d’informations pertinentes, en vue d’établir les responsabilités, de renforcer le dialogue avec les gouvernements de tous les États concernés, la société civile et d’autres parties prenantes, et de veiller à ce que la situation des droits de l’homme dans le pays ne tombe pas dans l’oubli, notamment par le biais d’initiatives de communication, de plaidoyer et desensibilisation;

Demande aussi au Haut-Commissariat de rendre compte de ses activités de suivi dans le rapport annuel du Secrétaire général à l’Assemblée générale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, à compter de la soixante-neuvième session de l’Assemblée;

Prie le Rapporteur spécial de soumettre régulièrement au Conseil des droits de l’homme et à l’Assemblée générale des rapports sur l’exécution de son mandat, y compris sur les efforts déployés pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission d’enquête;

Engage le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée à inviter le Rapporteur spécial et à coopérer pleinement avec lui, ainsi qu’à lui permettre, avec ses collaborateurs, d’effectuer librement des visites dans le pays et à leur apporter toutes les informations dont ils ont besoin pour s’acquitter de leur mandat;

Engage aussi le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée à participer à son examen périodique universel en 2014 d’une manière constructive, à entreprendre un examen complet et ouvert de la situation des droits de l’homme dans le pays, et à fournir sans retard excessif des réponses claires aux recommandations présentées pendant l’examen;

Encourage l’Organisation des Nations Unies, y compris ses institutions spécialisées, les États, les organisations intergouvernementales régionales, les institutions intéressées, les experts indépendants et les organisations non gouvernementales à instaurer un dialogue et une coopération constructifs avec les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, dont le Rapporteur spécial, et avec la structure du Haut-Commissariat sur le terrain;

Encourage tous les États qui entretiennent des relations avec la République populaire démocratique de Corée à user de leur influence pour inciter celle-ci à prendre immédiatement des mesures visant à mettre fin à toutes les violations des droits de l’homme, notamment en fermant les camps de prisonniers politiques et en procédant à des réformes institutionnelles de fond;

Prie le Secrétaire général de fournir au Rapporteur spécial toute l’assistance nécessaire et le personnel suffisant pour lui permettre de s’acquitter efficacement de son mandat, et de veiller à ce que le titulaire de mandat bénéficie de l’appui du Haut‑Commissariat;

Décide de transmettre tous les rapports du Rapporteur spécial à tous les organes compétents des Nations Unies et au Secrétaire général pour suite à donner.

55 e séance 28 mars 2014

[Adoptée à l’issue d’un vote enregistré par 30 voix contre 6, avec 11 abstentions. Les voix se sont réparties comme suit:

Ont voté pour:

Allemagne, Argentine, Autriche, Bénin, Botswana, Brésil, Burkina Faso, Chili, Costa Rica, Côte d’Ivoire, Émirats arabes unis, Estonie, États-Unis d’Amérique, ex-République yougoslave de Macédoine, France, Irlande, Italie, Japon, Kazakhstan, Maldives, Maroc, Mexique, Monténégro, Pérou, Philippines, République de Corée, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Sierra Leone.

Ont voté contre:

Chine, Cuba, Fédération de Russie, Pakistan, Venezuela (République bolivarienne du), Vietnam.

Se sont abstenus:

Afrique du Sud, Algérie, Arabie saoudite, Congo, Éthiopie, Gabon, Inde, Indonésie, Kenya, Koweït, Namibie.]