Nations Unies

A/HRC/RES/48/16

Assemblée générale

Distr. générale

13 octobre 2021

Français

Original : anglais

Conseil des droits de l’homme

Quarante-huitième session

13 septembre-11 octobre 2021

Point 4 de l’ordre du jour

Situations relatives aux droits de l’homme qui requièrent l’attention du Conseil

Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’homme le 8 octobre 2021

48/16.Situation des droits de l’homme au Burundi

Le Conseil des droits de l ’ homme,

Guidé par les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies,

Rappelant la Déclaration universelle des droits de l’homme, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et les autres instruments internationaux pertinents relatifs aux droits de l’homme,

Rappelant également toutes ses résolutions pertinentes et celles de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité,

Rappelant en outre le rapport du Secrétaire général sur la mission d’évaluation stratégique sur les activités de l’Organisation des Nations Unies relatives au Burundi, en particulier le fait que Gouvernement y a été invité à collaborer avec l’Organisation afin de préserver les avancées réalisées et de faire progresser la réconciliation nationale, la consolidation de la paix, la cohésion sociale, le développement socioéconomique, la concrétisation des objectifs humanitaires prioritaires et le respect des droits de l’homme et de l’état de droit,

Rappelant la déclaration publiée par le Président du Conseil de sécurité le 4 décembre 2020 et prenant en considération les observations et recommandations qui y sont formulées,

Notant que, à la demande des autorités burundaises, le Bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Burundi a fermé le 31 mai 2021 et a transféré ses responsabilités à l’équipe de pays des Nations Unies au Burundi,

Réaffirmant qu’il respecte pleinement la souveraineté, l’indépendance politique, l’intégrité territoriale et l’unité nationale du Burundi,

Réaffirmant également que les États sont tenus de respecter, de protéger et de réaliser tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales,

Soulignant qu’il incombe au premier chef au Gouvernement burundais d’assurer la sécurité sur le territoire et de protéger la population dans le respect du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire applicables,

Rappelant l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi, qui repose sur les principes des droits de l’homme et de la justice transitionnelle et jette les bases de la paix, de la justice, de la réconciliation nationale, de la sécurité et de la stabilité au Burundi,

Considérant que la communauté internationale et le système des Nations Unies, dont lui-même et ses mécanismes, peuvent contribuer de manière décisive à renforcer la protection des droits de l’homme, à prévenir les violations et les atteintes à ces droits et à atténuer le risque d’escalade des conflits et de détérioration des situations humanitaires,

Conscient des progrès accomplis dans le domaine des droits de l’homme, de la bonne gouvernance et de l’état de droit depuis l’investiture du Président Évariste Ndayishimiye et la constitution du nouveau Gouvernement et prenant note du programme national pour la capitalisation de la paix et de la stabilité sociale et la promotion de la croissance économique qui a récemment été présenté,

Prenant note avec satisfaction du fait que, depuis le 28 juin 2021, la Commission nationale indépendante des droits de l’homme figure de nouveau parmi les institutions nationales des droits de l’homme accréditées avec le statut « A »,

Prenant note avec satisfaction également des travaux de la Commission d’enquête sur le Burundi, notamment du bilan qu’elle lui a présenté oralement à la session en cours et du dernier rapport en date qu’elle lui a soumis sur la situation des droits de l’homme dans le pays, et déplorant que le Gouvernement burundais persiste à refuser de coopérer avec la Commission, qu’il ait pris la décision regrettable de déclarer ses trois membres persona non grata et qu’il ait rejeté ses conclusions,

Regrettant profondément qu’aucune avancée n’ait été réalisée en ce qui concerne la réouverture du bureau de pays du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, que le Gouvernement a unilatéralement décidé de fermer le 28 février 2019,

1.Est conscient des progrès accomplis dans les domaines des droits de l’homme, de la bonne gouvernance et de l’état de droit depuis l’investiture du Président Évariste Ndayishimiye, condamne avec la plus grande fermeté toutes les violations des droits de l’homme et toutes les atteintes à ces droits commises au Burundi, notamment les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées, les arrestations et détentions arbitraires, la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et les actes de violence, les destructions et les vols, les actes de violence sexuelle et fondée sur le genre et l’intimidation et le harcèlement des membres des partis politiques d’opposition, des représentants de la société civile, des manifestants pacifiques, des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des blogueurs et des autres professionnels des médias, et se déclare profondément préoccupé par le fait que ces personnes sont soumises à des arrestations et des détentions arbitraires et voient érigé en crime l’exercice de leurs droits humains ;

2.Déplore les restrictions sévères imposées à l’exercice des droits civils et politiques et des libertés fondamentales, en particulier les libertés d’opinion et d’expression, de réunion pacifique et d’association, ainsi que le rétrécissement de la marge de manœuvre dont disposent la société civile et les citoyens qui militent, et demande au Gouvernement burundais de ne pas soutenir les discours haineux à connotation politique et ethnique diffusés en ligne ;

3.Condamne l’impunité généralisée pour toutes les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits et demande instamment au Gouvernement burundais de faire en sorte que, indépendamment de leur affiliation ou de leur statut, tous les auteurs, fussent-il membres des forces de défense et de sécurité ou du mouvement de la jeunesse du parti au pouvoir, les Imbonerakure, soient amenés à répondre de leurs actes, y compris les violences sexuelles et fondées sur le genre et les mauvais traitements infligés aux enfants, et de veiller à ce que les victimes puissent demander justice et obtenir réparation ;

4.Prend note avec satisfaction à cet égard de l’augmentation du nombre de cas dans lesquels des membres des Imbonerakure, du Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces pour la défense de la démocratie, des administrations locales, des services secrets et de la police sont reconnus coupables de crimes graves, et engage le Gouvernement à se montrer déterminé à amener tous les auteurs de pareils crimes, sans exception, à rendre compte de leurs actes ;

5.Demande de nouveau au Gouvernement burundais de mettre d’urgence un terme à toutes les violations des droits de l’homme et toutes les atteintes à ces droits, de garantir le plein respect, la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, d’assurer la sécurité, l’intégrité physique et la protection de sa population, de respecter l’indépendance du pouvoir judiciaire, de prendre immédiatement des mesures pour faire les réformes dont le secteur judiciaire a besoin et de renforcer la séparation des pouvoirs, sous le contrôle du Parlement, ainsi que l’état de droit et la bonne gouvernance, en prenant note toutefois que des mesures encourageantes ont récemment été prises ;

6Demande au Gouvernement burundais de créer les conditions politiques, juridiques et administratives dont la société civile a besoin pour agir librement, et constate avec satisfaction à cet égard que la mesure de suspension visant l’organisation non gouvernementale Parole et actions pour le réveil des consciences et l’évolution des mentalités a été levée ;

7.Note que plus de 5 000 prisonniers ont été graciés, se félicite de la libération de quatre journalistes de l’hebdomadaire Iwacu et des défenseurs burundais des droits de l’homme Germain Rukuki et Nestor Nibitanga, et prie instamment les autorités burundaises de libérer tous les défenseurs des droits de l’homme, les journalistes et les prisonniers d’opinion toujours en détention pour avoir fait leur travail et défendu les droits de l’homme ;

8.Engage le Gouvernement burundais à promouvoir et protéger l’exercice effectif de toutes les libertés fondamentales, le pluralisme et l’indépendance des médias en créant des conditions permettant à tous les journalistes, blogueurs et autres professionnels des médias de faire leur travail en toute sécurité et en toute indépendance, sans intimidation ni ingérence indue et sans crainte de violence ou de persécution, et constate avec satisfaction que les sanctions imposées à Radio Bonesha FM et à d’autres stations de radio ont été levées et que les discussions en cours avec d’autres médias devraient conduire à la levée de leur suspension ;

9.Demande au Gouvernement burundais de fournir à la Commission nationale indépendante des droits de l’homme toutes les ressources dont elle a besoin pour s’acquitter de ses fonctions de promotion et de protection des droits de l’homme conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) ;

10.Demande également au Gouvernement burundais d’appliquer les recommandations que le Secrétaire général a récemment formulées dans son rapport sur la mission d’évaluation stratégique sur les activités de l’Organisation des Nations Unies relatives au Burundi ;

11.Demande en outre au Gouvernement burundais d’appliquer les recommandations formulées dans les rapports de la Commission d’enquête sur le Burundi ;

12.Demande au Gouvernement burundais d’appliquer les recommandations qu’il a acceptées à l’issue de l’Examen périodique universel de 2018 ;

13.Demande également au Gouvernement burundais de coopérer pleinement avec les enquêtes que la Cour pénale internationale mène sur les crimes relevant de sa compétence qui auraient été commis au Burundi ou par des ressortissants burundais à l’extérieur de leur pays entre le 26 avril 2015 et le 26 octobre 2017, alors que le Burundi était un État partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, et l’encourage à revenir sur sa décision de se retirer du Statut de Rome ;

14.Prie instamment le Gouvernement burundais de coopérer pleinement avec les organes conventionnels, d’autoriser les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales à effectuer des visites dans le pays, de nouer un dialogue constructif avec le Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, en particulier son bureau régional pour l’Afrique centrale aux fins de la réouverture du bureau de pays du Haut‑Commissariat, de faciliter le suivi de la situation des droits de l’homme au Burundi et de coopérer avec l’équipe de pays des Nations Unies au Burundi ;

15.Demande au Gouvernement burundais de s’abstenir de tout acte d’intimidation ou de représailles contre les défenseurs des droits de l’homme, y compris ceux qui coopèrent avec les mécanismes internationaux de protection des droits de l’homme et avec lui-même ;

16.Engage le Gouvernement burundais à nouer un véritable dialogue sans exclusive avec toutes les parties prenantes burundaises, qu’elles soient à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, y compris les représentants de la société civile, les défenseurs des droits de l’homme, les professionnels des médias et les représentants des partis politiques, en vue de régler les problèmes multiples et profonds auxquels le pays fait face et qui sont exacerbés par la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19) ;

17.Se félicite des mesures que le Gouvernement burundais a prises en vue de renforcer la coopération avec la communauté internationale et les organisations régionales, notamment l’Union africaine, la Communauté d’Afrique de l’Est, la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et les garants de l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi, et de promouvoir l’instauration d’une paix durable, la réconciliation et le développement sans exclusion, et engage les autorités à poursuivre et à renforcer encore la coopération dans ce domaine ;

18.Exprime sa vive préoccupation devant la situation difficile dans laquelle se trouvent les Burundais qui ont fui le pays, dont près de 268 000 sont actuellement installés dans quatre pays voisins, sachant en outre que plus de 116 000 Burundais sont déplacés à l’intérieur du pays, constate que bon nombre de ceux qui s’étaient réfugiés dans les pays voisins sont rentrés au Burundi, prend note avec satisfaction de l’accord tripartite du 29 novembre 2019 conclu entre le Burundi, la République-Unie de Tanzanie et le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ainsi que de l’accord tripartite conclu le 13 août 2020 entre le Burundi, le Rwanda et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, prie instamment toutes les parties d’honorer l’engagement qu’elles ont pris de permettre le rapatriement volontaire des réfugiés en toute sécurité et dans la dignité, conformément à l’obligation de non-refoulement qui leur est faite, demande au Gouvernement burundais et aux pays qui accueillent des réfugiés de faire le nécessaire pour que ceux qui rentrent chez eux puissent le faire en toute sécurité et être durablement réintégrés, et félicite les pays qui accueillent des réfugiés, les donateurs et les autres partenaires qui apportent une assistance humanitaire et une protection internationale aux réfugiés ;

19.Prend note avec satisfaction des efforts que le Gouvernement burundais a faits pour présenter son programme national pour la capitalisation de la paix, la stabilité sociale et la promotion de la croissance économique en vue de faire face à la situation humanitaire et socioéconomique précaire, encore exacerbée par la pandémie de COVID-19 ;

20.Décide de nommer un rapporteur spécial ou une rapporteuse spéciale qui sera chargé de surveiller la situation des droits de l’homme au Burundi et de faire des recommandations en vue de l’améliorer, de recueillir, d’examiner et d’évaluer les informations fournies par toutes les parties prenantes en faisant fond sur le travail de la Commission d’enquête, de conseiller le Gouvernement burundais pour qu’il s’acquitte des obligations en matière de droits de l’homme mises à sa charge par les traités internationaux et d’offrir conseils et assistance à la société civile et à la Commission nationale indépendante des droits de l’homme, qu’il aidera à s’acquitter de son mandat indépendant de promotion et de protection des droits de l’homme et à faire mieux connaître les questions relatives aux droits de l’homme ;

21.Prie le ou la titulaire du mandat de lui présenter, à sa cinquantième session, un bilan oral de la situation des droits de l’homme au Burundi, et de lui soumettre un rapport écrit complet à sa cinquante et unième session ainsi qu’à la soixante-dix-septième session de l’Assemblée générale ;

22.Demande au Gouvernement burundais de coopérer pleinement avec le ou la titulaire de mandat, d’accorder à l’intéressé un accès sans entrave au pays et de lui fournir toutes les informations nécessaires à la bonne exécution de son mandat, conformément aux engagements publics pris par l’administration actuelle de faire progresser les droits de l’homme et de renouer le dialogue avec la communauté internationale ;

23.Prie le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme de veiller à maintenir un suivi de la situation en attendant la nomination du rapporteur spécial ou de la rapporteuse spéciale et de fournir au ou à la titulaire du mandat toute l’assistance et les ressources nécessaires aux fins de l’exécution de son mandat ;

24.Prie la Haute-Commissaire de veiller à ce que les informations et les éléments de preuve recueillis par la Commission d’enquête au sujet des violations des droits de l’homme et des atteintes à ces droits commises au Burundi soient rassemblés et conservés afin qu’ils puissent être consultés et utilisés, actuellement et à l’avenir, pour amener les responsables à rendre compte de leurs actes ;

25.Décide de rester saisi de la question.

44 e séance 8 o ctobre 2021

[Adoptée à l’issue d’un vote enregistré par 21 contre 15, avec 11 abstentions. Les voix se sont réparties comme suit :

Ont voté pour:

Allemagne, Argentine, Arménie, Autriche, Bahamas, Brésil, Bulgarie, Danemark, Fidji, France, Îles Marshall, Italie, Japon, Mexique, Pays-Bas, Pologne, République de Corée, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Tchéquie, Ukraine et Uruguay.

Ont voté contre:

Bolivie (État plurinational de), Cameroun, Chine, Cuba, Érythrée, Fédération de Russie, Gabon, Libye, Malawi, Mauritanie, Pakistan, Philippines, Somalie, Togo et Venezuela (République bolivarienne du).

Se sont abstenus:

Bahreïn, Bangladesh, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Inde, Indonésie, Namibie, Népal, Ouzbékistan, Sénégal et Soudan.]