Nations Unies

A/HRC/RES/37/39

Assemblée générale

Distr. générale

5 avril 2018

Original : français

Conseil des droits de l’homme

Trente- septième session

26 février–23 mars 2018

Point 10 de l’ordre du jour

Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’homme le 23 mars 2018

3 7 / 39. Assistance technique et renforcement des capacités dans le domaine des droits de l’homme au Mali

Le Conseil des droits de l’homme,

Guidé par les buts et principes de la Charte des Nations Unies,

Réaffirmant la Déclaration universelle des droits de l’homme et les autres instruments internationaux pertinents relatifs aux droits de l’homme,

Rappelant la résolution 60/251 de l’Assemblée générale en date du 15 mars 2006,

Rappelant également ses résolutions 5/1 relative à la mise en place des institutions du Conseil et 5/2 relative au Code de conduite pour les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil, toutes deux en date du 18 juin 2007,

Rappelant en outre ses résolutions 20/17 du 6 juillet 2012 relative à la situation des droits de l’homme au Mali, 22/18 du 21 mars 2013 portant création d’un mandat d’expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Mali, 25/36 du 28 mars 2014, 31/28 du 24 mars 2016 et 34/39 du 24 mars 2017, par lesquelles il a prorogé le mandat de l’Expert indépendant,

Réaffirmant que tous les États ont la responsabilité de promouvoir, de protéger et de mettre en œuvre les droits de l’homme et les libertés fondamentales consacrés dans la Charte, la Déclaration universelle des droits de l’homme, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme et les autres instruments internationaux pertinents relatifs aux droits de l’homme auxquels ils sont parties,

Réaffirmant égalementson attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale du Mali,

Profondément préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire et par l’intensification des attaques des groupes terroristes dans le nord et leur expansion dans le centre et le sud du Mali, ainsi que par la montée de l’extrémisme violent, la prolifération des armes légères, le trafic de drogues et de migrants, la traite des êtres humains et d’autres formes de criminalité transnationale organisée,

Profondément préoccupé égalementpar la poursuite des violations des droits de l’homme et des atteintes à ces droits, incluant des exactions, par la lenteur des progrès réalisés dans la mise en œuvre de certaines dispositions pertinentes de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, et par les difficultés dans le redéploiement des services publics et l’accès de la population aux services sociaux de base,

Demeurant préoccupé par la crise alimentaire et humanitaire que subissent les populations touchées par le conflit et par l’insécurité qui entrave l’accès humanitaire, et condamnant les attaques dirigées contre le personnel humanitaire,

Notant avec satisfaction que le Gouvernement malien et les groupes signataires se sont de nouveau engagés à s’acquitter rapidement des obligations que leur impose l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, notamment l’adoption d’un calendrier d’actions prioritaires, ainsi que l’avancée que constitue la nomination d’autorités intérimaires, et soulignant que beaucoup de progrès restent à faire pour une mise en œuvre pleine et entière de l’Accord, notamment la mise en œuvre effective de la décentralisation, la justice transitionnelle, le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, la réforme du secteur de la justice ainsi que la réforme du secteur de la sécurité,

Saluant la résolution 2374 (2017) du Conseil de sécurité, en date du 5 septembre 2017, qui établit un régime de sanctions visant notamment ceux qui entravent la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, ainsi que ceux qui planifient, dirigent ou commettent des actes de violation des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits, ou des actes de violation du droit international humanitaire, y compris les actes dirigés contre les populations civiles, dont les femmes et les enfants,

Notant que le Gouvernement malien s’est engagé lors de plusieurs sessions du Conseil des droits de l’homme à privilégier le dialogue et la réconciliation nationale dans le règlement de la crise,

Notant également que le Gouvernement malien s’est engagé à rétablir la primauté du droit et à lutter efficacement contre l’impunité,

Saluant la coopération des autorités maliennes avec les mécanismes internationaux des droits de l’homme, notamment la planification de deux visites au Mali de titulaires de mandats thématiques au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme en 2018,

Notant la tenue du troisième Examen périodique universel du Mali en janvier 2018 et encourageantle Gouvernement malien à prendre les mesures nécessaires pour la mise en œuvre des recommandations qui seront acceptées,

Prenant note du dernier rapport du Secrétaire général sur la situation au Mali, dans lequel il se dit préoccupé par le fait que les femmes ne sont pas associées au processus de paix et réaffirme qu’elles doivent être incluses dans toutes les structures de décision concernant le processus de paix, et soulignant le rôle important des femmes en matière de prévention et de règlement des conflits ainsi que de consolidation de la paix,

Prenant note également du rapport conjoint de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme sur l’état des droits de l’homme dans le cadre du processus de paix au Mali, publié en février 2018, faisant état de plus de 600 cas de violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits commises entre janvier 2016 et juin 2017, qui ont fait plus de 2 700 victimes, et qui démontre que le respect des droits de l’homme peut créer un environnement propice à la mise en œuvre de l’accord de paix, et soulignant l’importance des rapports sur les droits de l’homme en tant que composante du mandat de promotion et de protection des droits de l’homme de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali,

Prenant note avec satisfactiondu rapport de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Mali,

Notant la prise en compte par la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel (G5 Sahel) de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’Organisation des Nations Unies à des forces de sécurité non onusiennes,

Notant égalementla mise en place du cadre de conformité pour le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire pour les opérations de la même force conjointe,

1.Condamne fermement les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits et les violations du droit international humanitaire, dont celles impliquant l’enrôlement d’enfants et leur utilisation comme soldats, et les violations de leurs droits, de même que les violations des droits des femmes et les atteintes à ces droits, qui ont été perpétrées au Mali depuis le début de la crise, ainsi que toutes les attaques terroristes, notamment les attentats meurtriers commis en 2018 contre des forains ;

2.Condamne fermement également les attaques, y compris les attaques terroristes, contre les civils, les Forces de défense et de sécurité maliennes, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali et les forces françaises, soulignel’importance de traduire en justice les auteurs, commanditaires et organisateurs de ces actes et ceux qui les ont financés, et exhorte le Gouvernement malien à prendre des mesures pour s’assurer que les auteurs de ces actes soient poursuivis ;

3.Renouvelle son appel à l’arrêt immédiat de toutes les exactions, violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits, ainsi qu’au strict respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

4.Demande à toutes les parties de faciliter le libre passage, en toute sécurité et sans restriction, de l’aide humanitaire, afin qu’elle puisse être rapidement distribuée à tous ceux qui en ont besoin sur tout le territoire malien, et d’assurer la sécurité et la protection des civils qui la reçoivent et celles du personnel humanitaire travaillant au Mali ;

5.Engage le Gouvernement malien à poursuivre et à intensifier ses efforts visant à assurer la protection, le respect et la mise en œuvre des droits de l’homme et à favoriser la réconciliation nationale, en particulier par le renforcement de l’appareil judiciaire, la mise en place de mécanismes de justice de transition et le redéploiement effectif des services de l’État sur l’ensemble du territoire ;

6.Engage tous les signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali à mettre en œuvre l’intégralité de ses dispositions, comme ils s’y sont engagés à nouveau lors de la dernière réunion du Comité de suivi de l’Accord tenue les 15 et 16 janvier 2018, y compris celles qui portent sur le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des anciens combattants rebelles, sur le redéploiement des forces armées maliennes sur l’ensemble du territoire et sur la décentralisation, sur la lutte contre l’impunité, sur le fonctionnement des administrations provisoires dans le nord et sur la participation des femmes, et salue l’engagement du Centre Carter en tant qu’observateur indépendant de l’accord de paix ;

7.Encourage les autorités maliennes à mettre en place toutes les mesures nécessaires visant à prévenir le recrutement illégal des enfants et leur utilisation comme soldats et à mettre fin à ces pratiques, et à mettre en œuvre des programmes durables de réintégration et de réhabilitation, y compris en prenant en compte la dimension genre ;

8.Note avec satisfaction l’ouverture par le Procureur de la Cour pénale internationale, en janvier 2013, d’une enquête sur les crimes commis depuis janvier 2012 sur le territoire malien, note que la Cour a jugé le 27 septembre 2016 un individu coupable de crime de guerre pour avoir dirigé intentionnellement des attaques contre des bâtiments à caractère religieux et historique à Tombouctou, et rappelle qu’il importe que toutes les parties maliennes concernées prêtent leur concours à la Cour et lui apportent leur coopération ;

9.Appuie à cet égard les efforts fournis par le Gouvernement malien afin de traduire devant des tribunaux impartiaux et indépendants tous les auteurs de violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire et d’atteintes à ces droits, l’exhorte à renforcer les actions en ce sens et l’encourage à poursuivre sa coopération avec la Cour pénale internationale ;

10.Salue l’établissement par le Secrétaire général de la Commission d’enquête internationale prévue par l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali pour enquêter sur les graves violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises au Mali depuis janvier 2012, et encourage le Secrétariat des Nations Unies à doter la Commission des moyens nécessaires afin qu’elle puisse accomplir son mandat ;

11.Engage le Gouvernement malien à assurer une meilleure implication des femmes dans le processus de réconciliation nationale et dans toutes les structures de décision du processus de paix, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et à la loi imposant un quota de 30 % de femmes dans les institutions nationales adoptée par le Gouvernement en décembre 2015, et à améliorer l’autonomisation politique des femmes à tous les niveaux ;

12.Appuie les mesures prises par le Gouvernement en vue de transférer des élèves de certaines localités du nord et du centre en proie à l’insécurité vers d’autres écoles, et d’organiser à leur intention des évaluations spéciales ;

13.Accueille avec satisfaction la création par les autorités maliennes d’un département ministériel dédié exclusivement à la promotion et à la protection des droits de l’homme, se félicitede l’avancée des travaux de la Commission vérité, justice et réconciliation qui ont permis de recueillir plus de 7 000 dépositions de victimes dans plusieurs régions du Mali, et encourage les autorités maliennes à garantir l’indépendance et les moyens de la Commission afin qu’elle puisse remplir son mandat de soutien aux victimes des crises survenues au Mali ;

14.Encourage les autorités maliennes et tous les acteurs régionaux et internationaux à poursuivre leurs efforts pour consolider les progrès accomplis sur la voie de l’instauration de la paix et de la sécurité au Mali ;

15.Salue le travail réalisé par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali pour soutenir les efforts du Gouvernement malien visant à rétablir l’autorité de l’État et l’état de droit dans le pays, et déplore les pertes en vies humaines qu’elle subit ;

16.Souligne que les efforts déployés par la Force conjointe du G5 Sahel pour lutter contre les activités des groupes terroristes et d’autres groupes criminels organisés contribueront à créer un environnement plus sûr et enfin à établir des conditions permettant une amélioration de la situation des droits de l’homme au Mali, et souligne la nécessité de rendre opérationnels les mécanismes de protection et de responsabilité en matière de droits de l’homme ;

17.Demande à toutes les parties de respecter les droits de l’homme, et de veiller au strict respect du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire, notamment dans la conduite des opérations antiterroristes ;

18.Exprime de nouveau s a satisfactionpour l’assistance humanitaire déjà fournie aux populations touchées par la crise et demande instamment à la communauté internationale de continuer à apporter, en concertation avec le Gouvernement malien et les pays voisins concernés, une assistance humanitaire adéquate, dans des conditions de sécurité, aux réfugiés et aux personnes déplacées, en particulier dans le nord du Mali, afin de faciliter l’accès des populations aux services sociaux de base et d’instaurer les conditions propices au redressement progressif du pays ;

19.Salue l’élaboration de la Stratégie spécifique de développement des régions du nord du Mali, exhorte le Gouvernement à poursuivre les actions de développement à travers la mise en œuvre du Programme d’urgence pour la relance du développement des régions du nord et du Programme de reconstruction et de relance économique, et exhorte égalementle Gouvernement à accélérer le retour de l’administration et des services de base dans le centre et le nord du pays et à œuvrer au rétablissement d’un niveau de sécurité acceptable ;

20.Demande aux pays amis et aux organisations partenaires ayant fait des annonces de contributions lors des conférences successives sur le développement du Mali de les honorer afin d’aider le Gouvernement à diligenter la mise en œuvre effective et intégrale de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali ;

21.Ré affirme le besoin de la poursuite rapide du processus électoral et salue l’ensemble des dispositions prises en vue de la tenue, dans les délais constitutionnels, d’élections générales justes, libres, transparentes et inclusives en 2018, qui garantissent la liberté d’expression et la volonté du peuple ;

22.Constate avec satisfaction la coopération étroite du Gouvernement malien avec l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Mali dans le cadre de l’accomplissement du mandat qui a été confié à ce dernier ;

23.Note avec satisfaction que le Gouvernement malien s’est engagé à donner suite aux recommandations formulées par l’Expert indépendant à l’issue de ses visites au Mali ;

24.Décide de proroger d’un an le mandat de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Mali afin de permettre une évaluation de la situation des droits de l’homme dans le pays et d’aider le Gouvernement dans les efforts qu’il déploie pour assurer la promotion, la protection et la mise en œuvre des droits de l’homme et renforcer la primauté du droit ;

25.Engage toutes les parties au Mali à collaborer pleinement avec l’Expert indépendant et à l’assister dans l’exercice de son mandat ;

26.Demande à l’Expert indépendant, dans le cadre de son mandat, de travailler en étroite collaboration avec tous les organes des Nations Unies, l’Union africaine, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, les États voisins et toute autre organisation internationale intéressée, ainsi qu’avec la société civile malienne ;

27.Demande également à l’Expert indépendant de lui faire rapport sur la situation des droits de l’homme à sa quarantième session ;

28.Décide de tenir à sa quarantième session un dialogue en présence de l’Expert indépendant et des représentants du Gouvernement malien afin d’évaluer l’évolution de la situation des droits de l’homme dans le pays, en s’attachant particulièrement à la question de la lutte contre l’impunité ;

29.Invite le Secrétaire général et le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme à continuer d’apporter à l’Expert indépendant toute l’assistance dont il a besoin pour s’acquitter entièrement de son mandat ;

30.Demande au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme de continuer à fournir l’assistance technique sollicitée par le Gouvernement malien afin de renforcer les capacités de la Commission nationale des droits de l’homme du Mali, et encourage les autorités maliennes à rendre la Commission conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et à lui donner les moyens nécessaires pour effectuer son travail en toute indépendance ;

31.Engage instamment la communauté internationale à continuer d’apporter au Mali l’assistance nécessaire pour assurer sa stabilité en vue de promouvoir le respect de tous les droits de l’homme et de lutter résolument contre l’impunité, ce qui favorisera la réconciliation nationale, la paix et la cohésion sociale ;

32.Décide de demeurer saisi de cette question.

56 e séance 23 mars 2018

[Adoptée sans vote.]