Nations Unies

A/HRC/RES/51/25

Assemblée générale

Distr. générale

11 octobre 2022

Français

Original : anglais

Conseil des droits de l’homme

Cinquante et unième session

12 septembre-7 octobre 2022

Point 4 de l’ordre du jour

Situations relatives aux droits de l’homme qui requièrent l’attention du Conseil

Résolution adoptée par le Conseil des droits de l’homme le 7 octobre 2022

51/25.Situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie

Le Conseil des droits de l’homme,

Guidé par les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, les dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme et les instruments internationaux pertinents relatifs aux droits de l’homme,

Réaffirmant qu’il incombe au premier chef à chaque État de respecter, protéger et réaliser les droits de l’homme conformément aux obligations qui lui incombent en vertu du droit international des droits de l’homme,

Réaffirmant aussi son profond attachement à la souveraineté et à l’indépendance politique de la Fédération de Russie dans ses frontières internationalement reconnues,

Rappelant toutes les déclarations pertinentes faites par le Secrétaire général, la Haute‑Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, la Haute-Commissaire par intérim, les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme et les organes conventionnels sur la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie,

Prenant note avec inquiétude des conclusions figurant dans le récent rapport du Mécanisme de Moscou de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe sur les pratiques juridiques et administratives de la Fédération de Russie, notamment l’utilisation par les autorités russes de la propagande, d’une législation répressive et de la violence pour créer un climat de peur et d’intimidation dans la société civile et parmi les militants, et le lien évident entre la répression dans le pays et la guerre à l’étranger, et prenant note de la recommandation formulée dans le rapport selon laquelle le Conseil des droits de l’homme devrait nommer un rapporteur spécial pour la Fédération de Russie,

Gravement préoccupé par la nette détérioration de la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie, en particulier par les restrictions draconiennes imposées aux droits à la liberté d’opinion et d’expression, de réunion pacifique et d’association, en ligne et hors ligne, qui se traduisent par des mesures de répression systématiques prises par les autorités russes visant les organisations de la société civile, les défenseurs des droits de l’homme, en particulier les femmes, qui font l’objet de menaces fondées sur le genre, les médias indépendants, les journalistes, les professionnels des médias, les avocats et l’opposition politique, et par l’exécution extrajudiciaire de détracteurs du Gouvernement,

Se déclarant profondément préoccupé à cet égard par les informations faisant état d’arrestations et de détentions arbitraires en masse et du harcèlement de représentants de la société civile, de défenseurs des droits de l’homme, de représentants de l’opposition politique, de journalistes et d’autres professionnels des médias, en particulier de femmes, de personnes appartenant à des minorités et à des groupes victimes de discrimination et marginalisés et d’autres personnes exerçant leurs droits de l’homme, y compris des personnes protestant et s’exprimant pacifiquement contre la dégradation de l’état de droit dans la Fédération de Russie et l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie, et par le recours excessif à la force contre ces personnes, ainsi que par le déni du droit à l’aide juridique, y compris pour les personnes détenues, et le déni de leur droit à un procès équitable,

Se déclarant préoccupé par les fermetures massives et forcées d’organisations de la société civile, notamment le Centre international des droits de l’homme « Memorial » et le Centre de soutien aux peuples autochtones du Nord, et de médias indépendants, notamment de chaînes de radio, de chaînes de télévision, de médias en ligne et de journaux, dont Novaya Gazeta, l’Écho de Moscou et la chaîne de télévision Dozhd, par l’interdiction de médias étrangers et les annulations ciblées de l’enregistrement d’organisations étrangères par les autorités russes, ainsi que par l’accès limité de la société civile russe aux infrastructures d’information et de communication et par l’augmentation de la censure et de la désinformation,

Prenant note avec une profonde inquiétude des mesures législatives qui restreignent de plus en plus les libertés de réunion pacifique, d’association et d’expression, y compris la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations, en ligne et hors ligne, notamment les lois relatives aux « agents étrangers », à l’« extrémisme » et aux « organisations indésirables », telles que modifiées, la loi relatives aux « fausses informations sur la guerre », adoptée le 4 mars 2022, portant modification du Code des infractions administratives et du Code pénal et prévoyant des interdictions générales de diffusion d’informations, fondées sur des notions vagues et ambiguës,

Convaincu que l’indépendance et l’impartialité de la magistrature, l’intégrité du système judiciaire et l’indépendance du barreau sont essentielles à la protection des droits de l’homme, à l’état de droit, à la bonne gouvernance et à la démocratie, ainsi qu’à une administration de la justice exempte de toute discrimination, et qu’elles devraient donc être respectées en toutes circonstances,

Regrettant le report répété par la Fédération de Russie de l’examen la concernant par le Comité des droits de l’homme au titre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Notant que la Fédération de Russie a cessé d’être une Haute Partie contractante à la Convention européenne des droits de l’homme le 16 septembre 2022, et que 17 450 requêtes dirigées contre la Fédération de Russie sont actuellement en instance devant la Cour européenne des droits de l’homme,

1.Engage vivement les autorités russes à honorer toutes les obligations qui incombent à l’État en vertu du droit international des droits de l’homme ;

2.Demande aux autorités russes de respecter les libertés fondamentales que sont la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction, la liberté d’opinion et d’expression et la liberté de réunion pacifique et d’association, notamment en supprimant les restrictions portant sur la diversité des idées, la critique et la différence d’opinion, ainsi que les droits qui y sont associés, à savoir le droit à la liberté et à la sécurité de la personne, le droit à un procès équitable et le droit pour les personnes exerçant ces libertés de ne pas être soumises à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;

3.Décide de nommer un rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie pour une période d’un an, et demande au titulaire du mandat de surveiller la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie, de recueillir, d’examiner et d’évaluer les informations pertinentes provenant de toutes les parties prenantes, y compris la société civile russe, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, en tenant compte des dimensions pertinentes que sont l’âge, le sexe et le handicap, de coopérer avec les autres mécanismes compétents de l’ONU relatifs aux droits de l’homme, de formuler des recommandations et de présenter un rapport complet au Conseil à sa cinquante‑quatrième session et à l’Assemblée générale à sa soixante-dix-huitième session ;

4.Invite les autorités russes à coopérer pleinement avec le Rapporteur spécial, notamment en accordant au titulaire du mandat toutes facilités d’accès au pays et en lui permettant de rencontrer librement les parties prenantes concernées, y compris la société civile et les défenseurs des droits de l’homme, et en lui fournissant les informations nécessaires à la bonne exécution de son mandat, et invite également les autorités russes à coopérer pleinement avec tous les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, les organes conventionnels et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, et à s’abstenir de toute forme d’intimidation et de représailles contre des personnes et des associations liées à leur coopération avec ces organes ;

5.Prie le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de fournir au Rapporteur spécial l’aide et les ressources dont il aura besoin pour s’acquitter pleinement de son mandat.

42 e séance 7 octobre 2022

[Adoptée à l’issue d’un vote enregistré par 17 voix contre 6, avec 24 abstentions. Les voix se sont réparties comme suit :

Ont voté pour :

Allemagne,Argentine, États-Unis d’Amérique,Finlande, France, ÎlesMarshall, Japon, Lituanie, Luxembourg, Monténégro, Paraguay, Pays-Bas, Pologne, République de Corée, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Tchéquie et Ukraine

Ont voté contre :

Bolivie(État plurinational de), Chine, Cuba, Érythrée, Kazakhstan et Venezuela (République bolivarienne du)

Se sont abstenus:

Arménie, Bénin, Brésil, Cameroun, Côte d’Ivoire, Émirats arabes unis, Gabon, Gambie, Honduras, Inde, Indonésie, Libye, Malaisie,Malawi, Mauritanie, Mexique, Namibie, Népal, Ouzbékistan, Pakistan, Qatar, Sénégal, Somalie et Soudan]