Nom du membre

Pays de nationalité

Mandat venantà expirationle 19 janvier

M. Mahmoud ABOUL‑NASR

Égypte

2006

M. Nourredine AMIR

Algérie

2006

M. Alexei S. AVTONOMOV

Fédération de Russie

2008

M. Ralph F. BOYD Jr.

États‑Unis dAmérique

2008

M. Jose Francisco CALI TZAY

Guatemala

2008

Mme Fatimata‑Binta Victoire DAH

Burkina Faso

2008

M. Régis de GOUTTES

France

2006

M. Kurt HERNDL

Autriche

2006

Mme Patricia Nozipho JANUARY‑BARDILL

Afrique du Sud

2008

M. Morten KJAERUM

Danemark

2006

M. Jose A. LINDGREN ALVES

Brésil

2006

M. Raghavan Vasudevan PILLAI

Inde

2008

M. Agha SHAHI

Pakistan

2006

M. Linos Alexander SICILIANOS

Grèce

2006

M. TANG Chengyuan

Chine

2008

M. Patrick THORNBERRY

Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord

2006

M. Luis VALENCIA RODRÍGUEZ

Équateur

2008

M. Mario Jorge YUTZIS

Argentine

2008

6.Tous les membres du Comité ont assisté à la soixante‑sixième et à la soixante‑septième session.

D. Bureau du Comité

7.À sa 1613e séance (soixante‑quatrième session), le 23 février 2004, le Comité a élu les membres ci‑dessous Président, Vice‑Présidents et Rapporteur, conformément au paragraphe 2 de l’article 10 de la Convention, pour les mandats indiqués entre parenthèses.

Président:

M. Mario Yutzis (2004‑2006)

Vice‑Présidents:

Mme Patricia Nozipho January‑Bardill (2004‑2006)

M. Raghavan Vasudevan Pillai (2004‑2006)

M. Alexander Linos Sicilianos (2004‑2006)

Rapporteur:

M. Patrick Thornberry (2004‑2006)

E. Coopération avec l’Organisation internationale du Travail, le Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, la Commission du droit international, le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible et la Sous ‑Commission de la promotion et de la protection des droits de l’homme

8.Conformément à la décision 2 (VI) du Comité en date du 21 août 1972, sur la coopération avec l’Organisation internationale du Travail (OIT) et l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), ces deux organisations ont été invitées à se faire représenter aux sessions du Comité. Conformément à la pratique récente du Comité, le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a été également invité à s’y faire représenter.

9.Conformément aux arrangements de coopération entre le Comité et la Commission d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et recommandations, les membres du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale disposaient des rapports que la Commission avait présentés à la Conférence internationale du Travail. Le Comité a pris note avec satisfaction des rapports de la Commission d’experts, en particulier des chapitres qui traitent de l’application de la Convention no 111 concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, et de la Convention no 169 relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989, ainsi que des autres informations intéressant les activités du Comité.

10.Le HCR soumet aux membres du Comité des observations sur tous les États parties dont le rapport est en cours d’examen au moment où le HCR mène des activités dans leur territoire. Ces observations portent sur les droits de l’homme des réfugiés, des demandeurs d’asile, des rapatriés (anciens réfugiés) des apatrides et d’autres catégories de personnes qui intéressent le HCR. Les représentants du HCR assistent aux sessions du Comité et lui font rapport sur tout problème soulevé par ses membres. Dans les pays, à défaut d’un suivi systématique de la mise en œuvre des observations finales et des recommandations du Comité dans les 130 opérations menées sur le terrain par le HCR, lesdites observations et recommandations sont régulièrement prises en considération dans les activités visant à incorporer les droits de l’homme dans les programmes.

11.M. Paul Hunt, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, a pris la parole devant le Comité à sa 1698e séance (soixante-sixième session), le 9 mars 2005, et il s’est ensuivi un débat fructueux sur les moyens de renforcer la coopération avec le Comité.

12.Dans une lettre datée du 29 juillet 2005 adressée au Comité, Mme Antoanella‑Iula Motoc, Présidente du groupe de travail de session sur l’administration de la justice de la Sous‑Commission de la promotion et de la protection des droits de l’homme, s’est enquise des vues du Comité concernant l’utilité d’une étude approfondie sur la mise en œuvre concrète du droit à un recours efficace. La Présidente a fait part du point de vue selon lequel une étude serait très utile pour les travaux du Comité si elle traitait en particulier, entre autres, de la question des recours relatifs aux droits des populations autochtones, notamment leurs droits à la terre.

13.Au cours de leur bref entretien avec des membres de la Sous‑Commission, qui a eu lieu le 3 août 2005, M. de Gouttes et M. Sicilianos ont appelé en particulier l’attention de leurs interlocuteurs sur l’examen prochain par le Comité du projet de recommandation générale XXXI sur la prévention de la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale (voir le chapitre IX).

F. Questions diverses

14.La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a pris la parole devant le Comité à sa 1678e séance (soixante-sixième session), le 24 février 2005. Rappelant que la discrimination persiste dans certains États dans le fonctionnement du système pénal et dans l’application de la loi ainsi que dans les actes et le comportement des institutions et des particuliers responsables de l’exercice de la force publique, la Haut-Commissaire a accueilli avec satisfaction le projet de recommandation générale sur la prévention de la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale, que le Comité allait examiner à sa soixante-sixième session. La Haut-Commissaire s’est aussi félicitée de ce que le Comité avait choisi de faire porter son débat thématique prochain sur la prévention du génocide. Elle a souligné qu’une coopération étroite entre le Conseiller spécial sur la prévention du génocides et le Comité, ainsi qu’avec les autres organes conventionnels et les détenteurs de mandat au titre des procédures spéciales de la Commission des droits de l’homme, était essentielle pour aider le Conseiller spécial à mieux comprendre les situations complexes et à être ainsi en mesure de proposer des actions judicieuses. La Haut-Commissaire a en outre souligné que tout État partie devrait pouvoir montrer et expliquer au Comité les stratégies de prévention qu’il a mises en place et les institutions qu’il a créées pour assurer la protection spéciale dont les groupes en situation de risque ont besoin.

15.Mme María‑Francisca Ize‑Charrin, Administrateur chargé du Haut‑Commissariat aux droits de l’homme, a pris la parole devant le Comité à sa 1702e séance (soixante‑septième session), le 2 août 2005. Elle a souligné que le Haut‑Commissariat suivait avec un intérêt particulier les activités menées par le Comité en vertu de l’article 14 de la Convention et a émis l’espoir que l’influence de sa jurisprudence aux niveaux régional et national irait croissant. Elle s’est félicitée de l’examen prochain par le Comité de la mise en place d’une procédure de suivi des opinions adoptées au titre de l’article 14 de la Convention. Mme Ize‑Charrin a informé le Comité que le Haut‑Commissariat avait entrepris activement de renforcer la mise en œuvre des recommandations des organes conventionnels par le biais de différents projets de formation, notamment d’un atelier sous‑régional, tenu au Caire, sur le suivi des observations finales du Comité et du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’encontre des femmes, qui devrait avoir lieu du 5 au 8 décembre 2005. Mme Ize‑Charrin a ensuite évoqué le Plan d’action adopté par la Haut‑Commissaire aux droits de l’homme et souligné en particulier les propositions relatives à un organe conventionnel permanent unifié. Elle a souligné que le Haut‑Commissariat serait très heureux de connaître les réactions initiales du Comité à ces propositions (voir au chapitre XIII un compte rendu des travaux du Comité portant sur cette question).

G. Adoption du rapport

16.À sa 1732e séance, le 19 août 2005, le Comité a adopté son rapport annuel à l’Assemblée générale.

Note

II. PRÉVENTION DE LA DISCRIMINATION RACIALE, ALERTE RAPIDE ET PROCÉDURES D’URGENCE

17.À sa 979e séance, le 17 mars 1993, le Comité avait adopté un document de travail destiné à l’orienter dans ses travaux futurs. Ce document portait sur les mesures que le Comité pourrait prendre pour prévenir les violations de la Convention et pour intervenir plus efficacement en cas de violation. Le Comité notait dans son document de travail que l’action destinée à prévenir les violations graves de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale comprendrait des mesures d’alerte rapide et des procédures d’urgence.

18.Les décisions ci-après ont été adoptées par le Comité à sa soixante‑sixième session au titre de l’alerte rapide et de la procédure d’urgence.

Note

Décision 1 (66) sur la loi néo ‑zélandaise sur l’estran et les fonds marins, 2004

1.Au titre de sa procédure d’alerte rapide et d’action urgente, le Comité s’est interrogé sur la compatibilité de la loi néo‑zélandaise sur l’estran et les fonds marins de 2004 avec les dispositions de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, compte tenu des informations fournies tant par le Gouvernement néo‑zélandais que par plusieurs organisations maories et de sa recommandation générale XXIII (1997) concernant les droits des populations autochtones.

2.Le Comité se félicite d’avoir pu nouer un dialogue constructif avec l’État partie à sa 1680e séance, le 25 février 2005, et apprécie également que l’État partie ait répondu oralement et par écrit à ses demandes d’information concernant la loi susmentionnée, notamment les réponses soumises les 17 février et 9 mars 2005.

3.Le Comité reste préoccupé par le climat politique qui s’est instauré en Nouvelle‑Zélande après que la cour d’appel eut rendu sa décision dans l’affaire Ngati Apa, qui a servi de toile de fond à l’adoption et à la promulgation de la loi. Rappelant les obligations qui incombent à l’État partie en vertu du paragraphe 1 d) de l’article 2 et de l’article 4 de la Convention, il espère que toutes les parties prenantes en Nouvelle‑Zélande s’abstiendront d’exploiter les tensions raciales aux fins de leur propre intérêt politique.

4.Tout en notant l’explication offerte par l’État partie, le Comité s’inquiète de la rapidité avec laquelle la loi a été promulguée et de ce que l’on n’ait peut-être pas suffisamment étudié les autres solutions à l’affaire Ngati Apa, de manière à inscrire les droits des Maoris dans un cadre plus acceptable tant pour les Maoris que pour tous les autres Néo‑Zélandais. À cet égard, le Comité regrette que le processus de consultation n’ait pas contribué à réduire davantage les divergences sur la question entre les parties.

5.Le Comité note l’ampleur de l’opposition à la loi parmi les groupes les plus directement touchés par ses dispositions, à savoir les Maoris, et leur sentiment très vif que la loi constitue une discrimination à leur encontre.

6.Compte tenu de la complexité des questions en jeu, il semble en définitive au Comité que la loi présente des aspects discriminatoires pour les Maoris, en particulier parce qu’elle ne leur permet plus de faire valoir leurs droits fonciers coutumiers sur l’estran et les fonds marins et ne leur ouvre pas droit à réparation, nonobstant les obligations de l’État partie en vertu des articles 5 et 6 de la Convention.

7.Le Comité se félicite que l’État partie ait pour tradition de négocier avec les Maoris sur toutes les questions qui les concernent, et exhorte l’État partie, dans un esprit de bienveillance et conformément aux idéaux du Traité de Waitangi, à renouer le dialogue avec la communauté maorie au sujet de la loi, afin de trouver les moyens d’en réduire les effets discriminatoires, y compris, si besoin est, en l’amendant.

8.Le Comité prie l’État partie de suivre attentivement la mise en œuvre de la loi sur l’estran et les fonds marins, ses incidences sur la population maorie et l’évolution des relations raciales en Nouvelle‑Zélande, et de prendre des mesures pour en réduire les effets négatifs, en particulier au moyen d’une application flexible de la loi et en élargissant les possibilités de recours pour les Maoris.

9.Le Comité a noté avec satisfaction que l’État partie avait l’intention de présenter son quinzième rapport périodique d’ici la fin de 2005, et prie l’État partie d’y faire figurer le maximum de renseignements sur la mise en œuvre de la loi sur l’estran et les fonds marins.

1700 e  séance 11 mars 2005

Décision 2 (66) sur le Darfour

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale,

Considérant ses pratiques ordinaires ainsi que l’obligation qui lui incombe d’informer, au titre de sa procédure d’alerte rapide et d’action urgente, de tout signe laissant craindre l’aggravation d’une situation,

Se référant à sa décision 1 (65) du 18 août 2004 sur la même question,

Rappelant sa Déclaration sur la prévention du génocide en date du 11 mars 2005,

Recommande au Secrétaire général et, par son intermédiaire, au Conseil de sécurité le déploiement au Darfour, sans plus de retard, d’une force de l’Union africaine suffisamment nombreuse qui soit mandatée par le Conseil de sécurité pour protéger la population civile, notamment celle des camps, les personnes déplacées et les réfugiés qui regagnent leur foyer au Darfour, contre les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le risque de génocide.

1701 e séance 11 mars 2005

19.La décision ci‑après a été adoptée par le Comité au titre des mesures d’alerte rapide et des procédures d’urgence, à sa soixante‑septième session:

Décision 1 (67) sur le Suriname

1.Le Comité rappelle que dans sa décision 3 (66) du 9 mars 2005, il s’est dit préoccupé de ce qu’une version révisée du projet de loi sur les mines, qui a été approuvée par le Conseil des ministres du Suriname à la fin de 2004, pourrait ne pas être conforme aux recommandations du Comité adoptées en mars 2004 à l’issue de l’examen des premier à dixième rapports périodiques du Suriname.

2.Le Comité regrette profondément de n’avoir reçu de l’État partie, au titre de la procédure de suivi, aucune observation sur l’appréciation susmentionnée concernant le projet de loi, contrairement à ce qui lui avait été demandé dans la décision 3 (66).

3.Le Comité est profondément préoccupé par des informations selon lesquelles le Suriname ignorerait délibérément les recommandations du Comité en autorisant l’exploitation de ressources supplémentaires et des projets d’infrastructures connexes qui menacent fortement de causer des dommages irréparables aux populations autochtones et tribales, sans en avertir officiellement les communautés touchées et sans chercher à obtenir leur accord préalable ou leur consentement en connaissance de cause.

4.Appelant de nouveau l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXIII (1997) concernant les droits des populations autochtones, le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que le projet de loi révisé sur les mines soit conforme à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ainsi qu’aux recommandations formulées en 2004 par le Comité. En particulier, le Comité invite instamment l’État partie à:

a)Assurer la reconnaissance légale des droits des populations autochtones et tribales de posséder, mettre en valeur, contrôler et d’utiliser leurs terres communautaires et de participer à l’exploitation, à la gestion et la conservation des ressources naturelles de ces terres;

b)S’efforcer dans toute la mesure possible de conclure des accords avec les populations concernées, avant d’octroyer toute concession;

c)Veiller à ce que le droit de recourir aux tribunaux ou à tout autre instance indépendante spécialement créée à cet effet soit reconnu aux populations autochtones et tribales, afin de leur permettre de défendre leurs droits traditionnels et leur droit d’être consultées avant l’octroi de concessions et d’être indemnisées équitablement pour tout dommage.

5.Le Comité recommande de nouveau qu’un cadre juridique sur les droits des populations autochtones et tribales soit élaboré et que l’État partie tire parti de l’assistance technique fournie au titre du programme de services consultatifs et d’assistance technique du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme à cette fin.

6.Le Comité recommande à l’État partie d’adresser une invitation au Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones.

7.Le Comité demande instamment au Secrétaire général d’appeler l’attention des organismes compétents des Nations Unies sur la situation particulièrement alarmante des droits des populations autochtones au Suriname, et de les prier de prendre toutes les mesures appropriées à cet égard.

Note

20.À la suite de l’adoption, à sa soixante‑sixième session, d’une déclaration sur la prévention du génocide (voir le chapitre VIII), le Comité a adopté la décision suivante à sa soixante‑septième session:

Décision sur le suivi de la déclaration sur la prévention du génocide: indicateurs de pratiques systématiques et massives de discrimination raciale

À sa soixante‑sixième session, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) a adopté une déclaration sur la prévention du génocide en vue de la soumettre pour examen aux États parties à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, au Secrétaire général et à son Conseiller spécial sur la prévention du génocide ainsi qu’au Conseil de sécurité. Dans cette déclaration, le Comité s’est engagé à:

Mettre au point un ensemble spécial d’indicateurs relatifs aux génocides;

Renforcer et affiner ses mesures d’alerte rapide et d’intervention d’urgence ainsi que ses procédures de suivi dans toutes les situations où les indicateurs signalent des risques accrus de conflit violent et de génocide.

Compte tenu que la discrimination, le mépris ou l’exclusion systématiques figurent souvent parmi les causes profondes des conflits, la présente décision a pour but de renforcer la capacité du Comité de déceler et de prévenir le plus tôt possible les faits de discrimination raciale susceptibles de conduire à un conflit violent et au génocide.

I. Indicateurs

Les indicateurs clefs suivants pourraient être utilisés par le Comité, lorsqu’il examine la situation dans un État partie au titre de l’une de ses procédures, pour déterminer l’existence de facteurs considérés comme des éléments importants de situations conduisant à des conflits et au génocide. Si un ou plusieurs des indicateurs ci‑après sont représentés, il conviendrait soit que cela soit signalé clairement dans les observations finales ou une décision et que le Comité recommande à l’État partie de lui faire savoir dans un délai précis, au titre de la procédure de suivi, ce qu’il compte faire pour améliorer la situation. Dans la liste suivante d’indicateurs, le mot «groupes» s’entend des groupes raciaux, ethniques et religieux:

1.Absence de cadre législatif et d’institutions propres à prévenir la discrimination raciale et à offrir des voies de recours aux victimes d’actes de discrimination.

2.Négation systématique par les autorités de l’existence de groupes distincts particuliers.

3.Exclusion systématique − de droit ou de fait − de groupes de fonctions d’autorité, d’emplois dans les organismes publics et dans des professions clefs telles que l’enseignement, la justice et la police.

4.Identification obligatoire imposée contre leur gré aux membres de groupes particuliers, notamment l’usage de cartes d’identité indiquant l’appartenance ethnique.

5.Présence de versions manifestement tendancieuses de faits historiques dans les livres scolaires et d’autres ouvrages d’enseignement ainsi que célébration de faits historiques qui aiguisent les tensions entre des groupes et des peuples.

6.Politiques de retrait forcés d’enfants appartenant à des minorités ethniques ayant pour but de parvenir à une assimilation complète.

7.Politiques de ségrégation directes et indirectes, par exemple des écoles et des zones d’habitation séparées.

8.Utilisation et acceptation systématiques et généralisées de propos ou de propagande prônant la haine et/ou incitant à la violence contre des groupes minoritaires, en particulier dans les médias.

9.Déclarations graves faites par des dirigeants politiques/des personnes éminentes qui expriment leur appui à l’affirmation de la supériorité d’une race ou d’un groupe ethnique, à la déshumanisation et à la démonisation de minorités, ou qui approuvent ou justifient l’emploi de la violence contre une minorité.

10.Violences ou restrictions strictes visant des groupes minoritaires considérés comme les détenteurs d’une situation traditionnellement éminente, par exemple en tant qu’élites du secteur commercial ou de la vie politique et dans les organismes publics.

11.Pratique préoccupante d’attaques individuelles contre les membres de minorités par des particuliers dont la motivation principale est apparemment l’appartenance des victimes à tel ou tel groupe.

12.Constitution et organisation de milices et/ou de groupes politiques extrémistes sur la base d’un programme raciste.

13.Flux importants de réfugiés et de personnes déplacées, en particulier quand les intéressés appartiennent à certains groupes ethniques ou religieux.

14.Disparités sensibles entre des indicateurs socioéconomiques reflétant la pratique d’actes de discrimination raciale préoccupants.

15.Politiques tendant à empêcher la fourniture de services essentiels ou d’assistance, notamment en entravant la distribution de l’aide ou l’accès à la nourriture, à l’eau, à l’assainissement ou à des fournitures médicales essentielles dans certaines régions ou visant des groupes spécifiques.

Étant donné que ces indicateurs peuvent concerner des États qui n’évoluent pas vers une situation de violence ou de génocide, l’évaluation de leur importance aux fins de la prévision du génocide ou de la violence contre des groupes raciaux, ethniques ou religieux identifiables devrait être complétée par l’examen du sous‑groupe suivant d’indicateurs généraux:

1.Actes passés de génocide ou de violence à l’encontre d’un groupe.

2.Politique d’impunité ou pratique de l’impunité.

3.Existence de communautés actives à l’étranger encourageant l’extrémisme et/ou fournissant des armes.

4.Présence de facteurs externes modérateurs tels que l’Organisation des Nations Unies et d’autres tiers invités reconnus comme tels.

II. Procédures de suivi et mesures d’alerte rapide et d’intervention d’urgence

Lorsqu’il reçoit entre les sessions du CERD des informations faisant état d’incidents graves de discrimination raciale correspondant à un ou plusieurs indicateurs pertinents, le Président du Groupe de travail sur les mesures d’alerte rapide/d’intervention d’urgence, en consultation avec les membres du Groupe et le coordonnateur des activités de suivi ainsi que le Président du Comité, peut prendre les mesures suivantes:

1.Demander à l’État partie concerné de lui fournir d’urgence des informations supplémentaires.

2.Transmettre lesdites informations au Secrétaire général et à son Conseiller spécial sur la prévention du génocide.

3.Élaborer une décision en vue de la soumettre pour adoption au Comité à sa session suivante.

4.Adopter une décision au cours de la session à la lumière des faits nouveaux les plus récents et des mesures adoptées par d’autres organisations internationales.

Note

III. EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

AUSTRALIE

21.Le Comité a examiné les treizièmeet quatorzième rapports périodiques de l’Australie, qui auraient dû être soumis en 2000 et 2002, respectivement, présentés en un seul document (CERD/C/428/Add.2), à ses 1685e et 1686e séances (CERD/C/SR.1685 et 1686), tenues les 1er et 2 mars 2005. À sa 1699e séance (CERC/C/SR.1699), tenue le 10 mars 2005, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

22.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie, essentiellement consacré à des points soulevés par le Comité dans ses observations finales précédentes, ainsi que les renseignements complémentaires apportés oralement par la délégation.

B. Aspects positifs

23.Le Comité note avec satisfaction que les actes graves motivés par la haine raciale ou incitant à la haine raciale constituent des infractions pénales dans la plupart des États et Territoires australiens. À ce propos, il se félicite particulièrement des changements législatifs intervenus dans les États du Victoria et du Queensland.

24.Le Comité note avec satisfaction que des progrès considérables ont été accomplis dans l’exercice, par les populations autochtones, de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il se félicite que tous les gouvernements australiens se soient engagés à collaborer sur cette question dans le cadre du Conseil des gouvernements australiens, et de l’adoption d’une stratégie nationale sur la violence familiale parmi les autochtones.

25.Le Comité note avec un vif intérêt les programmes de déjudiciarisation et de prévention visant à réduire le nombre de jeunes autochtones qui entrent dans le système de justice pénale, ainsi que l’adoption, par la police et la magistrature, de procédures et de pratiques sensibles aux différences culturelles.

26.Le Comité se félicite que les dispositions relatives aux peines statutaires aient été supprimées dans le Territoire du Nord.

27.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la Charte de la fonction publique dans une société culturellement diverse qui vise à s’assurer que les services publics soient fournis en tenant compte des besoins linguistiques et culturels de tous les Australiens.

28.Le Comité accueille avec satisfaction les nombreux programmes d’éducation dans le domaine des droits de l’homme élaborés par la Commission des droits de l’homme et de l’égalité des chances.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

29.Tout en prenant note des explications fournies par la délégation, le Comité se déclare une nouvelle fois préoccupé par l’absence de toute garantie solidement établie contre la discrimination raciale à laquelle aucune loi postérieure du Commonwealth ne pourrait porter atteinte (art. 2 de la Convention).

Le Comité recommande à l’État partie de s’employer à incorporer dans son droit interne une garantie solidement établie contre la discrimination raciale.

30.Le Comité note que le projet de loi de 2003 prévoyant une réforme de la Commission des droits de l’homme et de l’égalité des chances est devenu caduc, mais que l’État partie reste résolu à promouvoir la réforme de la Commission. Il relève que la Commission s’est déclarée préoccupée de ce que certains aspects de la réforme risquaient de compromettre gravement son intégrité, son indépendance et son efficacité (art. 2).

Le Comité note l’importance que l’État partie accorde à la Commission des droits de l’homme et de l’égalité des chances pour ce qui est de surveiller le respect par l’Australie des dispositions de la Convention et lui recommande de prendre pleinement en compte les observations faites par la Commission au sujet du projet de réforme, et de veiller à ce que l’intégrité, l’indépendance et l’efficacité de la Commission soient pleinement préservées et respectées.

31.Le Comité est préoccupé par la suppression de la Commission pour les aborigènes et les insulaires du détroit de Torres (ATSIC), principal organe de décision en matière d’affaires aborigènes composé de représentants autochtones élus. Il craint que la création d’un comité d’experts désignés chargé de conseiller le Gouvernement à propos des questions relatives aux populations autochtones, ainsi que le transfert de la plupart des programmes auparavant exécutés par l’ATSIC et la Aboriginal and Torres Strait Inslander Service vers des organismes gouvernementaux ne réduisent la participation des populations autochtones à la prise de décisions et n’altèrent ainsi la capacité de l’État partie de gérer tout l’éventail des questions concernant les populations autochtones (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les décisions qui affectent directement les droits et intérêts des populations autochtones avec le consentement informé de celles ‑ci , comme il l’a fait dans sa recommandation générale XXIII. Il recommande à l’État partie de réexaminer la suppression des garanties permettant aux populations autochtones de participer effectivement et de manière représentative à la conduite des affaires publiques ainsi qu’à la prise de décisions et à l’élaboration de politiques concernant leurs droits et intérêts.

32.Le Comité note que l’Australie n’a pas retiré sa réserve à l’article 4 a) de la Convention. Il constate avec préoccupation que le Commonwealth, l’État de Tasmanie et le Territoire du Nord n’ont aucune législation qui érige en infraction pénale les actes graves motivés par la haine raciale ou incitant à la haine raciale.

Le Comité recommande une nouvelle fois à l’État partie de faire des efforts pour adopter une législation appropriée en vue de donner pleinement effet aux dispositions de l’article 4 a) de la Convention, et de retirer la réserve qu’il avait émise à cet égard. Il souhaiterait obtenir des informations sur les plaintes, poursuites et condamnations en rapport avec des actes graves de haine raciale ou d’incitation à la haine raciale dans les États et Territoires dont la législation sanctionne ce type d’infraction.

33.Le Comité note avec préoccupation que, selon certaines informations, les préjugés contre les Arabes et les musulmans en Australie augmentent et que l’application des lois antiterroristes risque d’avoir un effet discriminatoire indirect sur les Australiens arabes et musulmans (art. 4 et 5).

Le Comité accueille avec satisfaction la tenue de consultations nationales visant à éliminer les préjugés contre les Australiens arabes et musulmans et souhaiterait recevoir des informations plus détaillées sur les résultats de ces consultations. Il recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour éliminer ces préjugés et veiller à ce que l’application des lois antiterroristes n’ait pas un effet disproportionné sur des groupes ethniques spécifiques ou des personnes d’origine étrangère.

34.Le Comité est préoccupé de ce que, selon certaines informations, les questions relatives aux demandeurs d’asile seraient traitées de manière tendancieuse dans les médias (art. 4).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures résolues pour combattre toute tendance à prendre pour cible ou à stigmatiser des non ‑ressortissants , y compris des demandeurs d’asile, à en faire l’objet de stéréotypes ou de catégorisations fondés sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, en particulier de la part des médias et de l’ensemble de la société. À ce propos, il appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXX concernant les non ‑ressortissants .

35.Le Comité note avec préoccupation que des plaignants qui avaient invoqué la loi sur la discrimination raciale avaient eu du mal à établir les faits en l’absence de preuves directes, et qu’aucune affaire de discrimination raciale, à distinguer de la haine raciale, n’a eu d’issue positive devant les tribunaux fédéraux depuis 2001 (art. 4 et 6).

Ayant pris note des explications fournies par la délégation, le Comité invite l’État partie à envisager d’adopter des dispositions relatives au fardeau de la preuve de manière que, dans les procédures civiles en rapport avec la discrimination raciale, lorsqu’une victime présumée a établi, sauf preuve contraire, qu’elle a fait l’objet d’une telle discrimination, il incombe au défendeur de fournir la preuve que ce traitement différent était motivé par des éléments objectifs et raisonnables.

36.Le Comité note avec préoccupation la persistance de perceptions divergentes entre les autorités gouvernementales et, entre autres, les populations autochtones, au sujet de la compatibilité des amendements apportés en 1998 au Native Title Act (loi relative aux droits fonciers autochtones) avec la Convention. Il réaffirme son opinion selon laquelle l’affaire Mabo et le Native Title Act de 1993 ont constitué une avancée importante vers la reconnaissance des droits des populations autochtones, mais que les amendements de 1998 ont retiré certaines des garanties qui leur étaient auparavant offertes et ont fourni des certitudes juridiques au Gouvernement et aux tiers, au détriment des autochtones. Le Comité souligne à ce propos que l’utilisation, par l’État partie, d’une marge d’appréciation en vue de concilier les intérêts en jeu est limitée par ses obligations en vertu de la Convention (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de ne pas adopter de mesures qui suppriment les garanties existantes en faveur des droits autochtones et de n’épargner aucun effort pour obtenir le consentement informé des populations autochtones avant de prendre des décisions concernant leurs droits fonciers. Il recommande en outre à l’État partie de rouvrir les discussions avec les populations autochtones en vue d’examiner les amendements qui pourraient être apportés au Native Title Act et de trouver des solutions acceptables pour tous.

37.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles, pour satisfaire aux critères énoncés dans la définition des droits fonciers autochtones figurant dans le Native Title Act, les autochtones doivent prouver qu’ils n’ont cessé d’observer et d’appliquer les lois et coutumes de leur communauté depuis que la Couronne britannique a acquis la souveraineté sur l’Australie. Le haut niveau de preuve requis aurait pour conséquence que de nombreuses populations autochtones ne parviennent pas à établir l’existence d’un lien traditionnel avec leurs terres (art. 5).

Le Comité souhaiterait recevoir davantage d’informations sur cette question, y compris sur le nombre de réclamations qui ont été rejetées en raison du haut niveau de preuve requis. Il recommande à l’État partie de réexaminer cette exigence en tenant compte de la nature des relations que les populations autochtones entretiennent avec leurs terres.

38.Le Comité note que depuis 1998, 51 décisions concernant des titres fonciers ont été prises et que 37 d’entre elles ont confirmé l’existence de ces titres. Il prend note également des dispositions figurant dans les amendements apportés en 1998 au Native Title Act concernant les accords relatifs à l’utilisation des terres autochtones, et de la création du Fonds pour la terre des aborigènes, en 1995, en vue d’acheter des terres pour les Australiens autochtones qui ne pouvaient pas bénéficier de la reconnaissance de leurs droits fonciers (art. 5).

Le Comité souhaiterait recevoir des renseignements plus détaillés, y compris des données statistiques, sur la mesure dans laquelle ces accords répondent aux revendications foncières des autochtones. Des informations sur ce qui a été accompli au niveau des États et des Territoires pourraient également être fournies.

39.Tout en notant une amélioration dans l’exercice, pour les populations autochtones, de leurs droits économiques, sociaux et culturels, le Comité est préoccupé par l’écart important qui persiste entre les populations autochtones et les autres groupes de population, en particulier en ce qui concerne l’emploi, le logement, la santé, l’éducation et le revenu (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour parvenir à l’égalité dans l’exercice des droits et d’allouer des ressources suffisantes aux programmes visant à éliminer les disparités. Il lui recommande en particulier de prendre des mesures décisives pour veiller à ce qu’un nombre suffisant de professionnels de la santé fournisse des services aux populations autochtones et de définir des objectifs intermédiaires pour suivre les progrès accomplis dans les principaux domaines où les autochtones sont défavorisés.

40.Ayant pris note des explications fournies par l’État partie, le Comité réaffirme sa préoccupation au sujet des dispositions du Code pénal de l’Australie occidentale relatives aux peines statutaires. Il est préoccupé par les informations selon lesquelles ces dispositions auraient un effet distinct sur les groupes autochtones et rappelle à l’État partie que la Convention interdit la discrimination directe comme la discrimination indirecte (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures appropriées en vue d’abroger cette législation, en suivant l’exemple du Territoire du Nord. Il souligne en outre le rôle et la responsabilité du Gouvernement fédéral à cet égard en vertu de la Convention.

41.Le Comité demeure préoccupé par la surreprésentation saisissante des populations autochtones dans les prisons et par le pourcentage de décès d’autochtones en détention. En outre, selon certaines informations, les femmes autochtones constitueraient, parmi les détenus, le groupe dont les effectifs augmentent le plus rapidement (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour remédier à cette situation. Il souhaiterait recevoir davantage d’informations au sujet de la mise en œuvre des recommandations de la Commission royale d’enquête sur les décès d’aborigènes en détention.

42.Le Comité prend note avec préoccupation des informations selon lesquelles une discrimination en matière de délivrance de visas serait pratiquée à l’égard de personnes originaires de pays asiatiques et musulmans, et note en outre les assurances données par la délégation qu’une telle discrimination n’avait pas lieu (art. 5).

Le Comité souhaiterait recevoir davantage d’informations sur cette question, y compris des données statistiques. Il réaffirme que les États parties devraient veiller à ce que les politiques d’immigration ne reviennent pas à pratiquer une discrimination fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique.

43.Le Comité se déclare préoccupé par la détention obligatoire de migrants en situation illégale, y compris des demandeurs d’asile, en particulier lorsqu’il s’agit de femmes, d’enfants, de mineurs non accompagnés, ou de personnes considérées comme apatrides. Il s’inquiète de ce que de nombreuses personnes sont ainsi placées en rétention administrative depuis plus de trois ans (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de réexaminer le caractère obligatoire, automatique et indéfini de la détention de migrants en situation illégale. Il souhaiterait recevoir des données statistiques, ventilées par nationalité et durée de la détention, relatives aux personnes ainsi détenues, notamment dans les centres de détention «offshore».

44.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les visas de protection temporaire délivrés aux réfugiés n’ayant pas de visa valide ne leur donneraient pas accès à de nombreux services publics, n’ouvriraient aucun droit à la réunification familiale et rendraient leur situation précaire. En outre, les migrants seraient privés d’accès à la sécurité sociale pour une période de deux ans à compter de leur arrivée en Australie (art. 5).

Le Comité souhaiterait recevoir des données statistiques, ventilées par nationalité, concernant les visas de protection temporaire. Il recommande à l’État partie de revoir ses politiques, en tenant compte du fait que, selon la Convention, l’application d’un traitement différent, fondé sur le statut quant à la citoyenneté ou à l’immigration, constituerait une discrimination si les critères de différenciation, jugés à la lumière des objectifs et des buts de la Convention, ne visaient pas un but légitime et n’étaient pas proportionnés à l’atteinte de ce but.

45.Tout en saluant les efforts que l’État partie a accomplis pour parvenir à la réconciliation, et ayant pris note de la Motion de réconciliation de 1999, le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles l’État partie aurait rejeté la plupart des recommandations adoptées par le Conseil pour la réconciliation aborigène en 2000 (art. 6).

Le Comité encourage l’État partie à redoubler d’efforts en vue d’assurer qu’une réconciliation authentique ait lieu et soit acceptée tant par les autochtones que par l’ensemble de la population. Il recommande une nouvelle fois à l’État partie d’envisager la nécessité de réparer comme il convient les souffrances occasionnées par la séparation forcée des enfants autochtones et de leurs familles.

46.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action ou autres mesures adoptés pour appliquer cette déclaration et ce programme d’action au niveau national.

47.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations finales du Comité. Il suggère que des consultations d’organisations non gouvernementales et de populations autochtones soient organisées pendant l’établissement du prochain rapport périodique.

48.L’État partie devrait adresser dans un délai d’un an des renseignements sur la suite donnée aux recommandations du Comité figurant aux paragraphes 30, 31, 36 et 37 (par. 1 de l’article 65 du Règlement intérieur). Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses quinzième, seizième et dix‑septième rapports périodiques en un seul document, attendu le 30 octobre 2008.

AZERBAÏDJAN

49.Le Comité a examiné les troisième et quatrième rapports périodiques de l’Azerbaïdjan, présentés en un seul document (CERD/C/440/Add.1), à ses 1691e et 1692e séances (CERD/C/SR.1691 et 1692), tenues les 4 et 7 mars 2005. À sa 1700e séance (CERD/C/SR.1700), tenue le 11 mars 2005, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

50.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport que l’État partie lui a soumis et les informations complémentaires que la délégation lui a fournies oralement. Il a jugé encourageante la présence d’une délégation de haut niveau et se félicite de la possibilité ainsi offerte de poursuivre son dialogue avec l’État partie. Il regrette toutefois que le rapport, dans l’ensemble, ne contienne pas suffisamment de renseignements sur la mise en œuvre concrète de la Convention.

B. Aspects positifs

51.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a promulgué une nouvelle législation comprenant des dispositions antidiscriminatoires, notamment un Code pénal et un Code de procédure pénale.

52.Le Comité se félicite de l’adoption, en juin 2002, de la Loi constitutionnelle sur la mise en œuvre des droits et des libertés de l’homme dans la République azerbaïdjanaise.

53.Le Comité accueille avec satisfaction la création du Commissariat aux droits de l’homme de la République azerbaïdjanaise, en application de la Loi constitutionnelle relative au Médiateur adoptée en décembre 2001.

54.Le Comité se félicite que l’État partie ait ratifié la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales en 2000, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en 2002 et la Charte sociale européenne en 2004.

55.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a commencé à appliquer la procédure de détermination du statut de réfugié, dans le cadre de sa coopération avec le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

56.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la stratégie nationale de réduction de la pauvreté pour 2003-2005, qui s’adresse aux déplacés en tant que groupe vulnérable.

57.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a fait en 2001 la déclaration facultative reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir des communications, prévue à l’article 14 de la Convention.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

58.Le Comité note la position de l’État partie selon laquelle, malgré les effets négatifs du conflit du Haut‑Karabakh, les personnes d’origine arménienne ne sont pas victimes de discrimination en Azerbaïdjan. Il est cependant préoccupé des informations selon lesquelles les Arméniens résidant en Azerbaïdjan seraient victimes de discrimination raciale et préfèreraient, pour la plupart, dissimuler leur identité ethnique afin de ne pas subir de discrimination (art. 2 de la Convention).

Le Comité encourage l’ État partie à continuer de surveiller toutes les tendances susceptibles de donner naissance à des comportements racistes et xénophobes et à combattre les conséquences négatives de ces tendances. En particulier, il lui recommande de réaliser des études en vue d’évaluer correctement la fréquence des cas de discrimination raciale, en particulier contre les personnes d’origine arménienne.

59.Tout en se félicitant des informations que la délégation a fournies sur les mesures de lutte contre la traite prises par l’État partie, notamment l’adoption, en 2004, du Plan d’action national de lutte contre la traite d’êtres humains et la création, au sein des services de police, d’un département d’aide aux victimes, le Comité est préoccupé par le fait que la traite d’êtres humains, notamment de femmes, d’hommes et d’enfants étrangers, reste un problème grave dans l’État partie, qui est à la fois un pays d’origine et un point de transit (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie d’inclure, dans son prochain rapport périodique, des renseignements détaillés sur la traite d’êtres humains et de continuer de prendre les mesures législatives et politiques nécessaires pour prévenir et combattre ce phénomène. Il invite instamment l’État partie à apporter aide et assistance aux victimes, dans leur propre langue chaque fois que cela est possible. Il lui recommande également de continuer de déployer des efforts déterminés pour poursuivre les auteurs d’infractions dans ce domaine et souligne qu’il est de la plus haute importance de mener des enquêtes promptes et impartiales.

60.Le Comité s’inquiète de ce que des demandeurs d’asile, des réfugiés, des apatrides, des déplacés et des résidents de longue durée en Azerbaïdjan soient victimes de discrimination dans les domaines de l’emploi, de l’éducation, du logement et de la santé (art. 5).

Le Comité invite instamment l’État partie à continuer de prendre les mesures nécessaires, conformément à l’article 5 de la Convention, pour garantir aux demandeurs d’asile, aux réfugiés, aux apatrides, aux déplacés et aux résidents de longue durée les mêmes possibilités de jouir pleinement de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il lui demande d’inclure, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur les mesures prises à cet effet et appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXX concernant la discrimination contre les  non ‑ressortissants .

61.Le Comité note que, même si l’État partie s’efforce généralement de se conformer aux normes de la Convention relative au statut des réfugiés, certains demandeurs d’asile sont exclus par la procédure de détermination du statut de réfugiés de l’État partie. Il s’inquiète de ce que des personnes qui ne sont pas officiellement reconnues comme des réfugiés puissent tout de même avoir besoin de formes subsidiaires de protection, étant donné qu’elles ne peuvent rentrer dans leur pays pour des raisons impérieuses telles qu’un conflit armé en cours. Il s’inquiète également des informations faisant état de cas de refoulement de réfugiés (art. 5 b)).

Le Comité demande à l’État partie de faire en sorte que ses procédures relatives à l’asile n’aient pas pour but ou pour effet d’entraîner une discrimination entre les demandeurs d’asile fondée sur la race, la couleur, ou l’origine nationale ou ethnique, conformément à la section VI de sa recommandation générale XXX. Il lui recommande d’envisager d’adopter des formes subsidiaires de protection accordant le droit de séjour aux personnes qui ne sont pas officiellement reconnues comme des réfugiés mais peuvent tout de même avoir besoin d’une protection, et de poursuivre sa coopération avec le Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Il lui recommande en outre, lorsqu’il renvoie des demandeurs d’asile dans leur pays, de respecter le principe de non-refoulement.

62.Tout en accueillant avec satisfaction les renseignements donnés sur les groupes minoritaires, le Comité regrette l’insuffisance des informations fournies sur la participation de ces groupes à l’élaboration des politiques culturelles et éducatives. Il est également préoccupé par l’absence de programmes de soutien des langues minoritaires et par le fait que ces langues ne sont pas utilisées dans le système éducatif dans une mesure proportionnelle à la part que représentent les différentes communautés ethniques dans la population de l’État partie (art. 5).

Le Comité invite l’ État partie à faciliter la participation des minorités ethniques à l’élaboration des politiques culturelles et éducatives. Il lui recommande également de prendre les mesures nécessaires pour créer les conditions qui permettront aux personnes appartenant à des minorités de développer leur culture, leur langue, leur religion, leurs traditions et leurs coutumes, et de faire des études ou de suivre un enseignement dans leur langue maternelle. Il l’invite à inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur cette question.

63.Le Comité note avec préoccupation l’explication avancée par l’État partie selon laquelle, malgré les dispositions législatives prévoyant le droit à une protection et des voies de recours effectives, aucune affaire fondée sur les dispositions pertinentes du Code pénal relatives à la discrimination raciale n’a été portée devant les tribunaux (art. 6).

Le Comité demande à l’État partie d’inclure, dans son prochain rapport périodique, des données statistiques sur les poursuites engagées et les peines infligées dans les cas d’infractions en rapport avec la discrimination raciale où les dispositions pertinentes de la législation interne en vigueur ont été appliquées. Il lui rappelle que l’absence de plaintes et d’actions en justice de la part des victimes de discrimination raciale peut, dans une large mesure, être le signe de l’absence de législation appropriée, de l’ignorance de l’existence de voies de recours ou d’un manque de volonté des autorités d’engager des poursuites. Il est donc essentiel de prévoir les dispositions nécessaires dans la législation nationale et d’informer le public de l’existence de voies de recours dans le domaine de la discrimination raciale.

64.Le Comité regrette l’absence d’informations sur les mesures prises par l’État partie pour améliorer la compréhension, le respect et la tolérance entre les différents groupes ethniques vivant en Azerbaïdjan, en particulier sur les programmes qui ont été éventuellement adoptés pour dispenser un enseignement interculturel (art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures propres à promouvoir la compréhension et l’éducation interculturelles entre groupes ethniques, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements plus détaillés à ce sujet.

65.Le Comité, tout en notant les renseignements fournis par la délégation, continue d’estimer que les mesures prises pour informer le public, les responsables de l’application des lois, les membres des partis politiques et les professionnels des médias sur les dispositions de la Convention pourraient être renforcées (art. 7).

Le Comité encourage l’ État partie à étendre et à renforcer l’action qu’il a engagée dans le domaine de l’éducation en matière de droits de l’homme . En outre, une attention particulière devrait être portée à la recommandation générale XIII, selon laquelle les responsables de l’application des lois devraient recevoir une formation particulière pour faire en sorte que, dans l’exercice de leurs fonctions, ils respectent et protègent les droits de l’homme de tous sans distinction de race, de couleur, d’ascendance ou d’origine nationale ou ethnique.

66.Le Comité note l’insuffisance des informations fournies sur les mesures prises par l’État partie pour associer les organisations non gouvernementales à l’élaboration du rapport périodique et s’inquiète de ce que les organisations de la société civile, y compris les organisations qui luttent contre la discrimination raciale, ne puissent pas opérer librement.

Le Comité souligne l’importance du rôle que joue la société civile dans la pleine application de la Convention et recommande à l’ État partie de promouvoir le libre fonctionnement des organisations de la société civile qui contribuent à promouvoir les  droits de l’homme et à combattre la discrimination raciale. Il l’encourage en outre à consulter les groupes de la société civile œuvrant dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

67.Le Comité recommande instamment à l’État partie de ratifier la modification du paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptée le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvée par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, il attire l’attention de l’État partie sur la résolution 57/194 de l’Assemblée générale, dans laquelle celle‑ci a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de la modification et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cette modification. L’Assemblée générale a renouvelé cette demande dans sa résolution 58/160.

68.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de continuer de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban. Il lui recommande en outre d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures adoptées pour appliquer cette déclaration et ce programme d’action au niveau national, en particulier l’élaboration et la mise en œuvre du Plan d’action national.

69.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations finales du Comité.

70.L’État partie devrait, dans un délai d’un an, donner des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations que le Comité a formulées aux paragraphes 58 et 61 (par. 1 de l’article 65 du Règlement intérieur). Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses cinquième et sixième rapports périodiques en un seul document le 15 septembre 2007 et de veiller à traiter dans ce rapport tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

BAHREÏN

71.Le Comité a examiné les sixième et septième rapports périodiques du Bahreïn, présentés en un seul document (CERD/C/443/Add.1), à ses 1689e et 1690e séances (CERD/C/SR.1689 et 1690), tenues les 3 et 4 mars 2005. À sa 1700e séance (CERD/C/SR.1700), tenue le 11 mars 2005, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

72.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport que l’État partie lui a soumis et se félicite des réponses constructives apportées aux questions posées durant l’examen de ce document. Il juge encourageante la présence d’une délégation nombreuse et de haut niveau.

73.Le Comité se félicite que le rapport, qui respecte dans l’ensemble ses principes directeurs, soit le fruit de la collaboration entre plusieurs services ministériels. Il regrette cependant qu’il ne contienne pas suffisamment de renseignements sur la mise en œuvre concrète de la Convention.

B. Aspects positifs

74.Le Comité accueille avec satisfaction les sérieuses réformes politiques, juridiques et économiques que l’État partie a engagées et note en particulier l’adoption de la Charte nationale d’action, en 2001, la promulgation de la Constitution révisée et la création de la Cour constitutionnelle, en 2002, ainsi que la mise en place d’un nouveau parlement bicaméral doté d’une chambre de députés élus.

75.Le Comité se félicite de la constitution de syndicats pour la première fois à Bahreïn, en 2002, ainsi que de la création d’associations culturelles composées d’étrangers.

76.Le Comité accueille avec satisfaction l’organisation, à l’intention des responsables de l’appareil judiciaire et des responsables de l’application des lois, de plusieurs programmes de formation à la promotion et à la protection des droits de l’homme dans le domaine de la discrimination raciale.

77.Le Comité se félicite également que Bahreïn ait adhéré, en 2002, à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

78.Le Comité note également avec satisfaction que l’État partie lui présente plus souvent, ainsi qu’à d’autres organes conventionnels, des rapports et des communications sur des questions de fond concernant l’application des conventions relatives aux droits de l’homme auxquelles il a adhéré.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

79.Le Comité est préoccupé par les affirmations de l’État partie selon lesquelles il n’existe pas de discrimination raciale à Bahreïn.

Le Comité, estimant qu’aucun pays n’est exempt de discrimination raciale, rappelle à l’ État partie qu’il est tenu, en vertu de la Convention, de prendre des mesures d’ordre législatif, judiciaire, administratif ou autre pour donner effet à ses dispositions, même en l’absence apparente de discrimination raciale.

80.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni de données précises sur la composition ethnique de sa population et rappelle que ces informations sont nécessaires pour évaluer la mise en œuvre concrète de la Convention.

Le Comité appelle l’attention de l’ État partie sur ses recommandations générales IV et VIII ainsi que sur le paragraphe 8 de ses principes directeurs concernant la présentation des rapports, et lui recommande de nouveau de fournir dans son prochain rapport périodique des données sur la population ventilées par race, ascendance, appartenance ethnique, langue et religion ainsi que sur la situation socioéconomique de chaque groupe.

81.Le Comité note que la Loi fondamentale et les décrets, règlements et codes royaux que l’État partie a adoptés se contentent de mentionner le principe général de non-discrimination, ce qui est insuffisant eu égard aux exigences de la Convention.

Le Comité recommande à l’ État partie d’incorporer dans son droit interne une définition de la discrimination raciale contenant les éléments énoncés à l’article premier de la Convention.

82.Le Comité prend note de la suppression du Comité des droits de l’homme, qui était chargé de donner des avis au Chef de l’État et aux autorités exécutives sur un large éventail de questions relatives aux droits de l’homme, y compris celles concernant spécifiquement la Convention. Il regrette en outre qu’il n’y ait pas à Bahreïn d’institution nationale des droits de l’homme.

Le Comité recommande à l’ État partie d’envisager de créer une institution nationale des droits de l’homme, conformément aux Principes relatifs au statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (les Principes de Paris) (résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe).

83.Le Comité est préoccupé par l’absence d’organisations et de mouvements intégrationnistes multiraciaux dans l’État partie et en particulier par l’interdiction prononcée à l’égard du Centre bahreïnite pour les droits de l’homme.

Compte tenu de l’article 2 e) de la Convention, le Comité prie l’ État partie d’autoriser ce type d’organisations et de mouvement s et de créer un environnement qui leur soit propice, et l’encourage à entretenir le dialogue avec toutes les organisations de la société civile , y compris celles qui critiquent ses politiques.

84.Le Comité reste préoccupé par la situation des travailleurs migrants, en particulier en ce qui concerne l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels.

Compte tenu de l’article 5 e) i) de la Convention et de sa recommandation générale XXX concernant les non-ressortissants, le Comité prie instamment l’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer à tous les travailleurs migrants une pleine protection contre la discrimination raciale et pour supprimer les obstacles les empêchant d’exercer leurs droits économiques, sociaux et culturels, notamment dans les domaines de l’éducation, du logement, de l’emploi et de la santé. En outre, l’ État partie devrait fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements sur tout accord bilatéral conclu avec les pays d’origine d’un nombre significatif ou important de travailleurs migrants.

85.Le Comité est préoccupé par les allégations selon lesquelles les employées de maison immigrées, en particulier celles venant d’Asie, subissent une discrimination marquée, notamment en matière de conditions de travail, et par le fait qu’elles ne bénéficient pas des protections prévues dans le Code du travail.

Compte tenu de sa recommandation générale XXX et de sa recommandation générale XXV concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale, le Comité prie l’ État partie de prendre des mesures concrètes pour prévenir et régler les problèmes graves auxquels les employées de maison doivent généralement faire face, notamment le servage pour dettes, la rétention du passeport, l’enfermement illégal, le viol et les violences physiques, et de lui rendre compte des mesures prises pour protéger leurs droits.

86.Le Comité note avec préoccupation la différence de traitement et la discrimination qui toucheraient les membres de certains groupes, en particulier les Chiites, qui peuvent se distinguer par leur origine tribale ou nationale, leur ascendance, leur culture ou leur langue; il est particulièrement préoccupé par les possibilités apparemment différentes offertes à ces groupes.

Le Comité recommande à l’ État partie de veiller à ce que chacun, sans distinction de race, de couleur ou d’origine nationale ou ethnique, jouisse des droits au travail, à la santé et à la sécurité sociale, à un logement convenable et à l’éducation, conformément à l’article 5 e) i), iii ), iv ) et v) de la Convention.

87.Le Comité, notant les informations relatives à l’acquisition de la nationalité que l’État partie a fournies, s’inquiète de ce qu’une Bahreïnite mariée à un ressortissant étranger ne puisse transmettre sa nationalité à son enfant et qu’un homme étranger ne puisse acquérir la nationalité bahreïnite de la même façon qu’une femme étrangère.

Le Comité prie l’ État partie d’envisager la possibilité de modifier ces dispositions afin de se conformer à l’article 5 d)  iii ) de la Convention. À cet égard, il appelle son attention sur sa recommandation générale XXV et sa recommandation générale XXX, qui enjoint les États parties de veiller à ce que des groupes particuliers de non ‑ressortissants ne subissent pas des discriminations en matière d’accès à la citoyenneté ou de naturalisation.

88.Le Comité regrette qu’aucune statistique n’ait été fournie sur les cas où les dispositions pertinentes du droit interne relatives à la discrimination raciale ont été appliquées.

Le Comité recommande à l’ État partie d’examiner la question de savoir si l’absence de plaintes pour discrimination raciale peut être due à l’ignorance des droits des victimes, à la méfiance à l’égard de la police et des autorités judiciaires ou à une attention, une sensibilité ou un attachement insuffisants des autorités aux cas de discrimination raciale. Il prie l’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données statistiques sur les plaintes déposées, les poursuites engagées et l’issue d’affaires concernant la discrimination raciale ou ethnique, ainsi que des exemples précis de ces affaires.

89.Le Comité recommande instamment à l’État partie de ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention internationale sur la protection de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, compte tenu de leurs rapports étroits avec les articles 2, 4, 5 et 6 de la Convention.

90.Le Comité note que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention et le prie instamment d’envisager de la faire.

91.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action ou autres mesures supplémentaires adoptés pour appliquer cette déclaration et ce programme d’action au niveau national.

92.Le Comité recommande à l’État partie de continuer de consulter les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale, et d’envisager d’élargir le dialogue avec ces organisations, dans la perspective de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

93.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations et recommandations finales du Comité.

94.L’État partie devrait, dans un délai d’un an, fournir des informations sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations que le Comité a formulées aux paragraphes 82, 83, 85 et 86 ci‑dessus (paragraphe 1 de l’article 65 du Règlement intérieur du Comité). Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses huitième et neuvième rapports périodiques en un seul document, attendu le 26 avril 2007.

FRANCE

95.Le Comité a examiné les quinzième et seizième rapports périodiques de la France, qui auraient dû être présentés les 27 août 2000 et 2002 respectivement, soumis en un seul document (CERD/C/430/Add.4), à ses 1675e et 1676e séances (CERD/C/SR.1675 et 1676), tenues le 22 et le 23 février 2005. À sa 1698e séance (CERD/C/SR.1968), le 10 mars 2005, le Comité a adopté les conclusions et recommandations suivantes.

A. Introduction

96.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport présenté par l’État partie conformément aux principes directeurs concernant la présentation des rapports, ainsi que les renseignements supplémentaires que la délégation de haut niveau a fournis oralement et par écrit.

B. Aspects positifs

97.Le Comité prend note avec satisfaction des nombreuses mesures législatives tendant à renforcer la lutte contre la discrimination raciale et tout particulièrement la loi du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations, la loi du 17 janvier 2002 dite «loi de modernisation sociale», la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité et la loi du 30 décembre 2004 portant création de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité.

98.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises pour lutter contre la diffusion de messages à caractère raciste sur Internet et notamment l’adoption de la loi du 21 juin 2004.

99.Le Comité salue l’abolition du critère de l’origine étatique des persécutions des demandeurs d’asile par la loi du 10 décembre 2003.

100.Le Comité se félicite également de la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation qui, depuis sa décision du 1er juin 2002, a admis la pratique du «testing» comme moyen de preuve en matière de discrimination raciale, et encourage l’État partie à promouvoir l’application plus fréquente de cette méthode.

101.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures tendant à rationaliser le cadre institutionnel de lutte contre les discriminations.

102.Le Comité se félicite du rôle que la Commission nationale consultative des droits de l’homme joue dans la lutte contre la discrimination raciale et encourage l’État partie à prendre davantage en considération ses avis en la matière.

103.Le Comité prend note également du rapport approfondi de la Cour des comptes relatif à «L’accueil des immigrants et l’intégration des populations issues de l’immigration» (novembre 2004).

C. Sujets de préoccupation et recommandations

104.Tout en tenant compte de la création, en juillet 2004, d’un Observatoire des statistiques de l’immigration et de l’intégration, le Comité partage l’appréciation de la Cour des comptes dans le rapport précité, selon laquelle «la lutte contre les discriminations a souffert et souffre encore de l’insuffisance de la connaissance statistique».

Le Comité rappelle sa recommandation générale XXIV concernant l’article premier de la Convention, ainsi que sa recommandation générale XXX sur les non ‑ressortissants et invite l’État partie à harmoniser et à affiner ses outils statistiques lui permettant de concevoir et de mettre en œuvre une politique globale et efficace de lutte contre la discrimination raciale .

105.Tout en notant la réactivation du Comité interministériel à l’intégration depuis avril 2003 et la création récente de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, le Comité se préoccupe de la superposition des dispositifs et du risque de dilution qu’ils peuvent avoir sur les efforts de l’État partie en matière de lutte contre la discrimination raciale et la xénophobie.

Le Comité encourage l’État partie à coordonner davantage l’action des autorités compétentes en cette matière; à préciser le rôle et les moyens du Haut Conseil à l’intégration; à délimiter clairement les compétences de la Haute Autorité par rapport notamment au Médiateur et à la Commission nationale consultative des droits de l’homme, et à fournir à cette nouvelle instance tous les moyens nécessaires pour s’acquitter efficacement de son mandat.

106.Tout en prenant note de la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1er août 2003, le Comité reste préoccupé par la situation défavorable des immigrés et des «populations issues de l’immigration» dans le domaine du logement.

Le Comité appelle l’État partie à renforcer sa politique pour l’intégration des immigrés et des «populations issues de l’immigration», notamment dans le domaine du logement, et attire son attention sur ses recommandations générales XIX et XXX concernant respectivement l’article 3 de la Convention et la discrimination contre les non ‑ressortissants . Le Comité invite l’État partie à suivre les recommandations du r apport de la Cour des comptes, précité au paragraphe 9, dans ce domaine.

107.Le Comité reste également préoccupé par la situation défavorable dans laquelle se trouvent les immigrés et les «populations issues de l’immigration» dans le domaine de l’emploi et de l’éducation, malgré les efforts substantiels de l’État partie en la matière.

Le Comité encourage l’État partie à suivre les recommandations du r apport de la Cour des comptes dans le domaine de l’emploi et de l’éducation des immigrés et des «populations issues de l’immigration». En attirant l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXV concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale, le Comité l’invite également à tenir compte plus concrètement, dans toutes les mesures adoptées ou envisagées, de la situation des femmes qui sont parfois victimes d’une double discrimination.

108.Malgré les efforts de l’État partie, le Comité reste préoccupé par la situation des non‑ressortissants et des demandeurs d’asile dans les centres de rétention et dans les zones d’attente et par les délais de traitement des dossiers de demandes de regroupement familial des réfugiés.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures d’encadrement des agents de police chargés de l’accueil et du suivi quotidien du maintien en rétention des non ‑ressortissants et des demandeurs d’asile; d’améliorer les conditions d’hébergement des personnes retenues; de rendre opérationnelle la Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention et des zones d’attente; et de traiter dans les délais les plus courts possibles les demandes de regroupement familial des réfugiés.

109.Le Comité reste préoccupé par le fait que les demandes d’asile ne peuvent être rédigées qu’en langue française.

En vue de permettre le plein exercice des droits des demandeurs d’asile, le Comité invite l’État partie à prévoir que les demandeurs d’asile puissent être assistés par des traducteurs/interprètes chaque fois que cela s’avère nécessaire et/ou d’accepter que les demandes d’asile puissent être rédigées dans les langues étrangères les plus courantes.

110.Tout en appréciant les réponses orales et écrites de l’État partie aux questions concernant la situation des «gens du voyage», le Comité reste préoccupé par les retards dans l’application effective de la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des «gens du voyage» et par les difficultés persistantes que ceux-ci rencontrent notamment en matière d’éducation, d’emploi et d’accès au système de sécurité sociale et de santé.

Le Comité rappelle à l’État partie sa recommandation générale XXVII concernant la discrimination à l’égard des Roms et lui recommande d’accroître ses efforts en vue de fournir aux «gens du voyage» davantage de terrains de stationnement bénéficiant des facilités et infrastructures nécessaires et situés dans un environnement sain, d’intensifier ses efforts en matière d’éducation et de combattre plus efficacement les phénomènes d’exclusion de ces personnes, y compris en matière d’emploi et d’accès aux services de santé.

111.Le Comité partage les préoccupations de la délégation au sujet de la montée des actes racistes, antisémites et xénophobes.

Le Comité encourage l’État partie à appliquer plus efficacement les dispositions existantes en matière de répression de tels actes; à octroyer des réparations adéquates aux victimes; à renforcer la sensibilisation des responsables de l’application des lois; et à intensifier ses efforts dans le domaine de l’éducation et de la formation des enseignants en matière de tolérance et de diversité culturelle.

112.Le Comité a pris note des informations fournies par l’État partie sur l’application de la loi du 15 mars 2004, «encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics».

Le Comité recommande à l’État partie de continuer à suivre attentivement l’application de la loi du 15 mars 2004, à veiller à ce qu’elle n’ait pas d’effets discriminatoires, à ce que les procédures de son application privilégient toujours le dialogue, à éviter qu’elle ne crée d’exclusion au droit à l’éducation et à s’assurer que tous puissent toujours jouir de ce droit.

113.Tout en jugeant encourageants les efforts faits par l’État partie pour sensibiliser les membres des forces de l’ordre et autres fonctionnaires sur la lutte contre les discriminations, le Comité est préoccupé par des allégations faisant état de la persistance de comportements discriminatoires de la part de ces derniers à l’égard des membres de certains groupes ethniques.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures préventives nécessaires pour faire cesser les incidents à caractère raciste impliquant des membres des forces de l’ordre. En outre, il devrait veiller à ce que des enquêtes impartiales sur toutes ces plaintes soient entreprises et que, le cas échéant, les sanctions infligées soient proportionnelles à la gravité des actes commis.

114.Le Comité considère, comme il l’avait déjà fait lors de ses précédentes conclusions relatives à l’État partie, que l’interdiction de la justification des crimes contre l’humanité ou la négation de leur existence ne doit pas concerner que les actes commis pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le Comité encourage l’État partie à incriminer les contestations des crimes de guerre et crimes contre l’humanité tels que définis dans le Statut de la Cour pénale internationale et non seulement de ceux qui ont été commis durant la Seconde Guerre mondiale.

115.Tout en constatant les efforts de l’État partie quant à la transposition en droit interne de la Directive 2000/43/CE du Conseil, du 29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique, le Comité s’inquiète du fait que la notion de discrimination indirecte s’applique uniquement en matière d’emploi et de logement.

Le Comité recommande à l’État partie de généraliser l’application de la notion de discrimination indirecte en prenant toutes les mesures législatives nécessaires à cet effet.

116.Le Comité est préoccupé par l’obstacle que le manque de maîtrise de la langue française constitue pour certaines populations locales dans ses collectivités d’outre-mer dans la jouissance de leurs droits, notamment le droit d’accès à la justice.

En vue de permettre le plein exercice des droits de toutes les personnes sous la juridiction de l’État partie dans ses collectivités d’outre-mer, le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures appropriées afin de faire bénéficier des services de traducteurs/interprètes les populations locales dans les collectivités d’outre-mer qui ne maîtrisent pas la langue française, notamment dans leurs contacts avec la justice.

117.Le Comité note l’insuffisance d’enseignement de certaines langues de groupes ethniques − notamment l’arabe, l’amazigh ou le kurde – dans l’éducation.

Le Comité encourage l’État partie à promouvoir l’enseignement des langues de ces groupes dans le cadre de l’éducation, comme le propose le rapport de la Commission Stasi.

118.Tout en notant les mesures prises pour régler la question des pensions des anciens combattants de nationalité étrangère, le Comité reste préoccupé par le traitement toujours différencié de ces personnes par rapport aux anciens combattants de nationalité française.

Le Comité encourage l’État partie à régler définitivement la question des pensions des anciens combattants de nationalité étrangère en appliquant le principe de l’égalité de traitement.

119.Le Comité recommande à l’État partie de diffuser largement les informations relatives aux recours internes disponibles contre les actes de discrimination raciale, aux moyens juridiques disponibles pour obtenir réparation en cas de discrimination, et à la procédure des plaintes individuelles prévue à l’article 14 de la Convention que la France a accepté.

120.Le Comité encourage l’État partie à consulter les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la lutte contre la discrimination lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

121.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les présentes conclusions du Comité.

122.Tout en reconnaissant le travail déjà accompli dans ce domaine, le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la déclaration et du programme d’action de Durban, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action ou autres mesures adoptés pour appliquer cette déclaration et ce programme d’action au niveau national.

123.En vertu de l’article 9, paragraphe 1 de la Convention, et de l’article 65 du Règlement intérieur du Comité, tel qu’amendé, le Comité prie l’État partie de l’informer de la suite donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 107, 108 et 110 ci-dessus dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes conclusions.

124.Le Comité recommande que les dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques de l’État partie, dus le 27 août 2008, soient soumis en un seul rapport et constituent une mise à jour des questions soulevées lors de l’examen des présents rapports ainsi que de tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

IRLANDE

125.Le Comité a examiné le rapport initial et le deuxième rapport périodique de l’Irlande, présentés en un seul document (CERD/C/460/Add.1), à ses 1687e et 1688e séances (CERD/C/SR.1687 et 1688), tenues les 2 et 3 mars 2005. À sa 1699e séance (CERD/C/SR.1699), tenue le 10 mars 2005, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

126.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport présenté par l’État partie, qui est conforme aux principes directeurs du Comité et a été établi après consultation des organisations de la société civile, ainsi que les renseignements complémentaires très complets fournis oralement et par écrit par la délégation de haut niveau. Le Comité a noté avec satisfaction la présence d’une délégation nombreuse et compétente et se félicite de l’occasion qui lui a ainsi été donnée d’engager un dialogue constructif avec l’État partie.

B. Aspects positifs

127.Le Comité se félicite que l’État partie ait adopté récemment son premier Plan d’action national contre le racisme et ait abondamment consulté les organisations de la société civile durant l’élaboration de ce plan. Le Comité note également avec satisfaction les renseignements fournis par la délégation concernant l’intégration prochaine de représentants d’organisations de la société civile au sein du Groupe de haut niveau chargé de la surveillance stratégique de l’application du Plan d’action national. Il se félicite de cette initiative qui témoigne positivement de l’engagement de l’État partie à établir des liens permanents et constructifs avec la société civile.

128.Le Comité prend note avec satisfaction de la création de plusieurs instances indépendantes dotées de compétences en matière de droits de l’homme et de discrimination raciale, à savoir la Commission irlandaise des droits de l’homme, le Bureau de l’égalité et le Comité consultatif national sur le racisme et l’interculturalisme, et la mise en place d’organes judiciaires dotés de compétences spécifiques en matière d’égalité et de lutte contre la discrimination, tels que le Tribunal de l’égalité.

129.Le Comité se félicite de la mise en place d’un cadre législatif très complet en vue de lutter contre la discrimination, comprenant la loi de 1998 sur l’égalité en matière d’emploi, la loi de 2000 sur le statut d’égalité et la loi de 2004 sur l’égalité, et note avec satisfaction que le Parlement examine actuellement une loi visant à assurer l’application de la Directive 2000/43/EC du Conseil, en date du 29 juin 2000, qui interdit la discrimination fondée sur l’origine raciale ou ethnique en ce qui concerne l’emploi, l’éducation, la protection sociale et l’accès aux marchandises et aux services.

130.Rappelant qu’il est important de rassembler des données exactes et à jour relatives à la composition ethnique de la population, le Comité se félicite de la décision prise par l’État partie d’inclure une question sur l’appartenance ethnique dans les formulaires de son prochain recensement en 2006, et l’encourage à inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur la population, notamment les non‑ressortissants.

131.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié l’amendement à l’article 8 de la Convention et fait la déclaration, prévue à l’article 14, reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles. S’agissant de ce dernier point, le Comité espère que l’État partie prendra des mesures appropriées pour que le public en soit bien informé.

132.Le Comité note également avec satisfaction les initiatives spécifiques prises jusqu’ici en ce qui concerne la communauté des gens du voyage, notamment la Stratégie nationale pour le logement des gens du voyage et la Stratégie sanitaire pour les gens du voyage.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

133.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas encore incorporé la Convention dans son ordre juridique interne, compte tenu du fait qu’il y a déjà incorporé d’autres instruments internationaux (Convention, art. 2).

Le Comité invite l’État partie à envisager d’incorporer la Convention dans son ordre juridique interne.

134.Le Comité note que l’État partie a fait une déclaration relative à l’article 4 de la Convention. Il est d’avis qu’il n’existe pas de motifs contraignants empêchant le retrait de cette déclaration (art. 2).

Rappelant sa recommandation générale XV, le Comité recommande à l’État partie de réexaminer sa position et l’encourage à retirer la déclaration faite au sujet de l’article 4 de la Convention.

135.Tout en notant les efforts continus de l’État partie pour lutter contre la discrimination raciale et l’intolérance qui y est associée, le Comité continue de déplorer que des incidents teintés de racisme et de xénophobie ainsi que des attitudes discriminatoires envers des minorités ethniques soient encore observés dans le pays (art. 2).

Le Comité encourage l’État partie à continuer à lutter contre les préjugés et les stéréotypes xénophobes, particulièrement dans les médias, et à combattre les préjugés et les attitudes discriminatoires. À cet égard, il recommande à l’État partie d’introduire dans son droit pénal une disposition prévoyant que le fait de commettre une infraction avec un mobile ou dans un but raciste constitue une circonstance aggravante et donne lieu à une peine plus sévère.

136.Tout en notant l’existence en Irlande d’une communauté diversifiée d’ONG dans le domaine de l’application de la Convention, et en se félicitant en particulier de la création par l’État partie de plusieurs instances et organes judiciaires indépendants en matière de droits de l’homme et de lutte contre la discrimination (ainsi qu’il est mentionné au paragraphe 4 ci‑dessus), le Comité tient à souligner qu’il est important d’affecter des ressources adéquates à ces institutions pour leur permettre d’exercer leurs fonctions et de s’acquitter de leurs obligations de manière efficace (art. 2).

Le Comité recommande à l’État partie d’allouer aux institutions récemment créées dans le domaine des droits de l’homme et de la lutte contre la discrimination des fonds et des ressources appropriés afin de leur permettre d’exercer pleinement leurs fonctions statutaires, et lui recommande en outre d’apporter un appui à la communauté des ONG.

137.Le Comité est préoccupé par les incidences possibles de la politique de dispersion des demandeurs d’asile sur le territoire et de «prise en charge directe» de ceux‑ci (art. 3).

Le Comité encourage l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que les demandeurs d’asile ne subissent les conséquences négatives de cette politique, et à adopter des mesures favorisant leur pleine participation à la société.

138.Le Comité est préoccupé par les renseignements faisant état de cas d’exploitation d’ouvriers étrangers par certains employeurs et de violations des dispositions de la réglementation du travail interdisant la discrimination (art. 5).

Rappelant sa recommandation générale XXX concernant la discrimination contre les  non ‑ressortissants , le Comité encourage l’État partie à veiller à la pleine application dans la pratique de la législation interdisant la discrimination dans le cadre de l’emploi et du marché du travail. À cet égard, l’État partie pourrait également envisager de réexaminer la législation relative aux permis de travail et de délivrer ces permis directement aux employés.

139.Le Comité regrette qu’il n’existe pas de centres de rétention spéciaux pour les demandeurs d’asile lorsque leur demande a été rejetée et pour les migrants sans papiers qui sont en attente d’expulsion (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de fournir dans son prochain rapport des renseignements complémentaires sur les conditions de rétention des demandeurs d’asile et des migrants sans papiers qui sont en attente d’expulsion.

140.Le Comité note que certains renseignements font état de cas de traitement discriminatoire à l’égard de ressortissants étrangers entrant en Irlande lors des contrôles de sécurité aux aéroports (art. 5).

Le Comité encourage l’État partie à examiner ses procédures et ses pratiques en matière de sécurité aux points d’entrée dans le pays afin de faire en sorte qu’elles ne soient pas discriminatoires.

141.Tout en saluant l’action menée par l’État partie pour former les forces de police nationales en matière de droits de l’homme, l’établissement d’un Bureau des affaires raciales et interculturelles de la Garda et la nomination de fonctionnaires de police chargés de liaison pour les affaires ethniques, le Comité est préoccupé par les allégations faisant état de comportements discriminatoires de la police envers des membres de certaines minorités et regrette qu’il ne figure dans le rapport aucun renseignement relatif aux plaintes déposées contre la police pour discrimination raciale (art. 5 b) et art. 6).

Le Comité invite l’État partie à inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements relatifs au nombre de plaintes déposées contre des membres de la police au sujet de traitements discriminatoires ainsi que sur la suite donnée à ces plaintes. Il recommande en outre à l’État partie d’accentuer ses efforts de sensibilisation auprès des fonctionnaires chargés de l’application des lois, notamment en mettant en place un mécanisme de surveillance efficace chargé des enquêtes sur les allégations de conduite répréhensible d’inspiration raciste de la part de la police.

142.Notant que presque toutes les écoles primaires sont sous la tutelle de groupes catholiques et que les écoles laïques ou pluriconfessionnelles représentent moins de 1 % de l’ensemble des établissements d’enseignement primaire, le Comité est préoccupé par le fait que les lois et pratiques existantes risquent de favoriser l’admission d’élèves catholiques au détriment d’autres élèves dans les écoles catholiques si les places viennent à manquer, compte tenu en particulier du nombre limité de solutions de rechange existantes (art. 5 d) vii) et 5 e) v)).

Conscient des croisements que l’on peut constater entre la discrimination raciale et la discrimination religieuse, le Comité encourage l’État partie à favoriser la création d’écoles laïques ou pluriconfessionnelles et à modifier le cadre législatif existant de sorte qu’aucune discrimination ne puisse être exercée eu égard à l’admission des élèves (de toutes religions).

143.Le Comité est préoccupé par le fait que la disposition de la loi de 2000 sur le statut d’égalité prescrivant la non‑discrimination ne s’applique qu’aux fonctions publiques pouvant être définies comme des «services» au sens de la loi elle‑même (art. 5 f)).

Afin de garantir à tous une protection complète contre la discrimination exercée par les pouvoirs publics, le Comité engage l’État partie à envisager d’élargir le champ de sa loi sur le statut d’égalité de sorte qu’elle recouvre la totalité des fonctions et activités étatiques, y compris le contrôle du respect des obligations.

144.Rappelant sa recommandation générale VIII relative au principe d’auto‑identification ethnique, le Comité est préoccupé par la position de l’État partie concernant la reconnaissance des gens du voyage en tant que groupe ethnique. Le Comité est d’avis que la reconnaissance des gens du voyage en tant que groupe ethnique a des implications importantes au titre de la Convention (art. 1 et 5).

Notant avec satisfaction l’ouverture d’esprit dont témoigne l’État partie à cet égard, le Comité encourage celui ‑ci à prendre des mesures concrètes pour que la communauté des gens du voyage soit reconnue en tant que groupe ethnique.

145.Tout en notant les efforts réalisés jusqu’ici par l’État partie en ce qui concerne la situation des gens du voyage en matière de santé, de logement, d’emploi et d’éducation, le Comité reste préoccupé par les questions liées à l’efficacité des politiques et des mesures dans ce domaine (art. 5 e)).

Le Comité recommande à l’État partie d’accroître ses efforts visant à donner pleinement effet aux recommandations de l’Équipe spéciale sur la communauté des gens du voyage, et de prendre d’urgence toutes les mesures nécessaires pour améliorer l’accès des gens du voyage à tous les niveaux d’éducation, à l’emploi, ainsi qu’à des services sanitaires et à un logement appropriés à leur style de vie.

146.Le Comité note que la communauté des gens du voyage n’est pas représentée en juste proportion au sein des institutions politiques de l’État partie et ne participe pas effectivement à la conduite des affaires publiques (art 5 c)).

Le Comité engage l’État partie à envisager d’adopter des programmes d’action positive afin d’améliorer la représentation politique des gens du voyage, en particulier au niveau du Dáil Eireann (Chambre basse du Parlement) et/ou du Seanad Eireann (Chambre haute du Parlement (Sénat)).

147.Le Comité est préoccupé en particulier par la situation à laquelle doivent faire face les femmes appartenant à des groupes vulnérables et par les cas de discrimination multiple auxquelles elles peuvent être soumises (art. 5).

Rappelant sa recommandation générale XXV, le Comité encourage l’État partie à prendre des mesures concernant les besoins particuliers des femmes appartenant à des minorités et à d’autres groupes vulnérables, notamment les gens du voyage, les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile.

148.Le Comité reste préoccupé par le fait que l’État partie a instauré un délai assez court pour l’examen juridique des décisions administratives relatives aux questions d’immigration (art. 6).

Le Comité espère que toutes les questions liées à la procédure d’appel seront réglées de manière appropriée dans le cadre du projet de loi proposé sur l’immigration et la résidence.

149.Le Comité souhaite encourager l’État partie à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, et la Convention de l’OIT sur les travailleurs migrants (révisée), 1949 (no 97), afin de garantir une meilleure protection des migrants et des travailleurs migrants.

150.Le Comité encourage l’État partie à continuer de consulter les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

151.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations finales du Comité.

152.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses troisième et quatrième rapports périodiques en un seul document, attendu le 28 janvier 2008, et de veiller à ce que ce rapport traite tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

RéPUBLIQUE DéMOCRATIQUE POPULAIRE LAO

153.Le Comité a examiné les sixième à quinzième rapports périodiques de la République démocratique populaire lao, devant être soumis de 1985 à 2003 en un seul document (CERD/C/451/Add.1), à ses 1673e et  1674e séances (CERD/C/SR.1673 et 1674), tenues les 21 et 22 février 2005. À sa 1696e séance, le 9 mars 2005, le Comité a adopté les conclusions suivantes.

A. Introduction

154.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de la République démocratique populaire lao. Il salue les efforts de l’État partie pour se conformer aux directives du Comité en matière d’établissement des rapports, tout en notant que le rapport ne contient pas suffisamment d’informations relatives à l’application effective de la Convention.

155.Le Comité salue le fait que l’État partie se soit fait représenter par une délégation de haut rang, ainsi que les efforts déployés pour répondre aux questions posées. Il se félicite du dialogue constructif renoué avec l’État partie, de même que de la volonté exprimée par l’État partie de poursuivre ce dialogue sur une base régulière.

B. Aspects positifs

156.Le Comité salue les efforts de l’État partie pour réduire la pauvreté, en particulier dans les zones rurales et celles des groupes ethniques.

157.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a adopté, en 2004, des dispositions pénales destinées à lutter contre le trafic d’êtres humains.

158.Le Comité apprend avec satisfaction que la Convention a été traduite en langue lao.

159.Le Comité salue le programme de coopération conclu entre l’État partie et le Programme des Nations Unies pour le développement, relatif à la ratification et la mise en œuvre des instruments internationaux de protection des droits de l’homme. Il invite l’État partie à utiliser ce cadre pour assurer le suivi des présentes conclusions et recommandations, et à demander l’assistance technique complémentaire du Haut‑Commissariat aux droits de l’homme.

160.Le Comité salue la signature par l’État partie des deux Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme en 2000, et l’encourage à ratifier ces deux instruments dans les meilleurs délais.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

161.Le Comité, notant que le rapport lui a été remis avec 19 ans de retard, invite l’État partie à respecter la périodicité indiquée pour la soumission de ses prochains rapports.

162.Le Comité note avec préoccupation qu’il n’existe pas de définition claire de la discrimination raciale en droit interne.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une définition de la discrimination raciale reprenant les éléments énoncés à l’article premier de la Convention.

163.Le Comité note avec préoccupation que la Convention n’est pas incorporée en droit interne, et que la question de sa place hiérarchique dans l’ordre juridique interne n’est pas résolue (art. 2).

Le Comité invite l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour assurer une application effective de la Convention en droit interne.

164.Le Comité regrette l’inexistence d’une institution nationale des droits de l’homme en République démocratique populaire lao (art. 2).

Le Comité invite l’État partie à envisager la création d’une telle institution, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) (résolution 48/134 de l’Assemblée générale).

165.Le Comité est préoccupé par la situation des organisations non gouvernementales indépendantes œuvrant dans le domaine des droits de l’homme et de la lutte contre les discriminations (art. 2).

Le Comité invite l’État partie à créer des conditions permettant l’émergence d’organisations non gouvernementales nationales indépendantes.

166.Le Comité note l’absence de dispositions législatives incriminant les actes de violence et d’incitation à la violence motivés par des considérations raciales.

Le Comité invite l’État partie à adopter une législation mettant pleinement en œuvre les dispositions de l’article 4 de la Convention.

167.Le Comité prend note de la déclaration de l’État partie selon laquelle il n’existe pas de discrimination raciale sur son territoire, et croit comprendre que l’État partie entend par là qu’il ne commet pas de discrimination raciale systématique.

Le Comité rappelle ses réserves habituelles sur une telle déclaration générale, aucun É tat partie n’étant à l’abri, à son avis, de discrimination raciale sur son territoire.

168.Le Comité note, ainsi que le reconnaît l’État partie, que la pauvreté frappe plus durement les groupes ethniques des zones reculées (art. 2 et 5).

Le Comité rappelle que la Convention prohibe non seulement les actes intentionnels et systématiques de discrimination raciale, mais aussi les discriminations qui ne procèdent pas d’une volonté gouvernementale directe d’empêcher une partie de la population de jouir de ses droits. De l’avis du Comité, le faible développement économique, social et culturel de certains groupes ethniques, comparé au reste de la population, pourrait être le signe d’une discrimination existant dans les faits. Il recommande donc à l’État partie d’établir des études en vue d’apprécier et d’évaluer concrètement l’existence de la discrimination raciale dans le pays et d’en déterminer les principaux facteurs. Des informations statistiques ventilées par groupes ethniques sur la participation politique et le niveau de vie de la population pourraient figurer dans le prochain rapport périodique.

169.Le Comité prend note des explications de la délégation en ce qui concerne la réticence des autorités de qualifier les groupes ethniques sur le territoire lao de minorités ou de peuples autochtones (art. 1, 2 et 5).

Le Comité recommande à l’État partie de reconnaître les droits des personnes appartenant à des minorités et des peuples autochtones tels qu’énoncés en droit international et ce, quelle que soit l’appellation donnée aux groupes concernés en droit interne. Il l’invite à prendre en considération la façon dont les groupes eux-mêmes se perçoivent et se définissent. Le Comité rappelle que le principe de non ‑discrimination demande que les spécificités ethniques, culturelles et religieuses des groupes soient prises en considération.

170.Le Comité note que l’État partie a adopté une politique de réinstallation dans les plaines de membres des groupes ethniques habitant les montagnes et les hauts plateaux (art. 5).

Le Comité recommande que l’État partie décrive dans son prochain rapport périodique l’ampleur des politiques de réinstallation mises en œuvre, les groupes ethniques concernés, et l’impact de ces politiques sur leur mode de vie et la jouissance de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il recommande à l’État partie d’étudier toutes les alternatives possibles afin d’éviter les déplacements; de faire en sorte que les personnes concernées soient pleinement informées des raisons et modalités de leur déplacement et des mesures d’indemnisation et de réinstallation; de s’efforcer d’obtenir le consentement libre et informé des personnes et groupes concernés; et de mettre à leur disposition des voies de recours. L’État partie devrait prêter une attention particulière aux liens culturels étroits que certains peuples autochtones ou tribaux entretiennent avec leurs terres, et prendre en considération la recommandation générale 23 (1997) du Comité à ce propos. L’élaboration d’un cadre législatif décrivant les droits des personnes et groupes concernés, de même que les procédures d’information et de consultation, serait particulièrement utile.

171.Le Comité note avec préoccupation que, selon certaines informations, un obstacle majeur à l’éducation et à la formation professionnelle des personnes appartenant à des groupes ethniques réside dans le fait que l’enseignement est dispensé uniquement en langue lao. Des obstacles linguistiques seraient également à l’origine de difficultés en matière d’accès aux services sociaux (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de faire tout son possible pour que les personnes appartenant à des groupes ethniques reçoivent un enseignement et une formation professionnelle dans leur langue maternelle, tout en augmentant ses efforts pour qu’elles apprennent la langue lao.

172.Le Comité s’inquiète d’informations faisant état d’atteintes à l’exercice de la liberté de religion de membres des minorités religieuses, en particulier les chrétiens, lesquelles seraient également souvent des minorités ethniques.

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que toutes les personnes jouissent de leur droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, sans discrimination, conformément à l’article 5 d) de la Convention.

173.Le Comité demeure préoccupé par des allégations persistantes faisant état d’un conflit entre le Gouvernement et une partie de la minorité hmong qui a trouvé refuge dans la forêt et les régions montagneuses du territoire lao depuis 1975. Selon des informations nombreuses et concordantes, cette population vit dans des conditions humanitaires difficiles (art. 5).

Le Comité exhorte l’État partie à mettre tout en œuvre, si nécessaire avec l’appui du Haut ‑Commissariat aux droits de l’homme, des Nations Unies et de la communauté internationale, pour trouver au plus vite une solution politique et humanitaire à cette crise, et créer les conditions nécessaires à l’ouverture d’un dialogue avec ce groupe. Le Comité encourage vivement l’État partie à autoriser les institutions des Nations Unies à fournir une assistance humanitaire d’urgence à ce groupe.

174.Le Comité est préoccupé par des informations selon lesquelles des exactions seraient commises contre des membres de la minorité hmong, en particulier par des allégations selon lesquelles des soldats auraient brutalisé et tué un groupe de cinq enfants hmong le 19 mai 2004 (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de fournir des indications plus précises sur les instances chargées d’enquêter sur les allégations précitées. Il recommande en outre vivement à l’État partie de permettre aux organes des Nations Unies de protection et de promotion des droits de l’homme d’accéder aux régions dans lesquelles des membres de la minorité hmong ont trouvé refuge.

175.Le Comité note la déclaration de l’État partie selon laquelle il n’existe ni plaintes ni décisions judiciaires en matière de discrimination raciale (art. 6).

Le Comité engage l’État partie à rechercher si cette situation n’est pas le résultat de l’absence d’un arsenal législatif complet de lutte contre la discrimination raciale, d’une méconnaissance de leurs droits par les victimes, de la peur de représailles, d’un manque de confiance à l’égard des autorités de police et de justice, ou d’un manque d’attention ou de sensibilisation de ces autorités aux affaires de discrimination raciale.

176.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie déclare ne pas être en mesure d’introduire des programmes d’éducation aux droits de l’homme dans les établissements scolaires. Il s’inquiète également d’informations selon lesquelles les connaissances en matière de droits de l’homme tels qu’ils sont énoncés dans la loi, la Constitution et les instruments internationaux restent minimales parmi les responsables de l’application des lois (art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie, le cas échéant avec l’assistance de la communauté internationale, d’introduire dans les établissements scolaires des programmes d’éducation aux droits de l’homme et à la lutte contre les discriminations raciales, et d’accroître ses efforts en matière de formation des agents responsables de l’application des lois.

177.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans l’ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban et de communiquer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action et autres mesures adoptées pour appliquer au niveau national la Déclaration et le Plan d’action de Durban.

178.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité renvoie à la résolution 57/194 de l’Assemblée générale, du 18 décembre 2002, dans laquelle l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement. Un appel similaire a été formulé par l’Assemblée générale dans sa résolution 58/160 du 22 décembre 2003.

179.Le Comité note que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultativeprévue à l’article 14 de la Convention, et recommande que cette possibilité soit envisagée.

180.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques publics et de diffuser de la même manière les conclusions du Comité.

181.Conformément à l’article 65 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait adresser dans un délai d’un an des renseignements sur la suite donnée aux recommandations du Comité figurant aux paragraphes 162, 173 et 174. Le Comité recommande à l’État partie de soumettre en un seul document ses seizième et dix‑septième rapports périodiques, dus le 24 mars 2007.

Luxembourg

182.Le Comité a examiné les dixième, onzième, douzième et treizième rapports périodiques du Luxembourg, devant être soumis de 1997 à 2003 et soumis en un seul document (CERD/C/446/Add.1), à ses 1678e et  1679e séances (CERD/C/SR.1678 et 1679), tenues les 23 et 24 février 2005. À sa 1697e séance, le 9 mars 2005, le Comité a adopté les conclusions suivantes.

A. Introduction

183.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport du Luxembourg, qui est conforme aux principes directeurs du Comité concernant la présentation des rapports. Il se félicite des efforts qui ont été déployés par la délégation pour répondre de façon complète et très constructive aux questions posées. Il salue la possibilité qui lui a été ainsi offerte de renouer le dialogue avec l’État partie.

184.Le Comité, notant que le rapport lui a été remis avec plus de sept ans de retard, invite l’État partie à respecter la périodicité fixée pour la soumission de ses prochains rapports.

B. Aspects positifs

185.Le Comité prend note avec satisfaction des renseignements fournis par la délégation sur la mise en œuvre d’un plan d’action national sur le suivi de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.

186.Le Comité salue avec satisfaction la loi du 19 juillet 1997 complétant le Code pénal, qui accroît la répression du racisme et porte incrimination du révisionnisme et d’autres agissements fondés sur des discriminations.

187.Le Comité note avec satisfaction la transposition en cours de la directive du Conseil 2000/43/CE du 19 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes indépendamment de l’origine raciale ou ethnique, et à l’instauration d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail.

188.Le Comité se félicite de l’entrée en vigueur de la loi du 24 juillet 2001, portant modification de la loi du 22 février 1968 sur la nationalité, qui a eu pour effet d’alléger les conditions d’accès à la nationalité luxembourgeoise.

189.Le Comité salue l’entrée en vigueur de la loi du 8 juin 2004 sur la liberté d’expression dans les médias, qui prévoit un cadre déontologique pour l’exercice des activités journalistiques.

190.Le Comité note avec satisfaction la signature du Protocole no 12 à la Convention européenne des droits de l’homme sur la non-discrimination.

191.Le Comité se félicite de la création de la Commission consultative des droits de l’homme, du Bureau des plaintes de la Commission spéciale permanente contre la discrimination raciale, des commissions consultatives communales pour les étrangers, ainsi que de la mise en place d’un médiateur.

192.Le Comité note également avec satisfaction les programmes scolaires qui favorisent l’interculturalisme, ainsi que les cours en certaines langues maternelles pour des enfants issus de l’immigration et l’instauration de médiateurs interculturels dans les écoles.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

193.Le Comité constate que les données statistiques fournies par l’État partie ne sont pas complètes. Il rappelle que ces données lui sont nécessaires pour l’évaluation de la mise en œuvre de la Convention et le suivi des mesures prises en faveur des groupes vulnérables.

Rappelant ses recommandations générales XXIV et XXX, le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données statistiques actualisées, en particulier sur les communautés Rom, ainsi que sur les groupes vulnérables tels que les non-ressortissants, les réfugiés, les demandeurs d’asile et les travailleurs clandestins.

194.Le Comité, tout en notant les efforts de l’État partie tendant à renforcer le dispositif légal et les institutions créées pour combattre la discrimination raciale, constate que des incidents racistes et xénophobes, en particulier contre les arabes et les musulmans, ainsi que des attitudes discriminatoires envers les groupes ethniques, continuent à être recensés dans l’État partie.

Le Comité encourage l’État partie à continuer la lutte contre les préjugés et stéréotypes xénophobes, en particulier dans les médias, et à combattre les préjugés et les attitudes discriminatoires. Le Comité recommande que les autorités adoptent une stratégie afin de mieux sensibiliser le grand public sur l’existence et la mission des institutions créées pour combattre la discrimination raciale.

195.Le Comité est préoccupé par l’apparition de la propagande raciste et xénophobe sur les sites Internet.

Le Comité encourage l’État partie à combattre cette forme contemporaine de discrimination raciale, qui est couverte par les principes de la Convention. Le Comité souhaite être informé des mesures prises par l’État partie à cet égard à l’occasion de la présentation de son prochain rapport périodique. De surcroît, il suggère à l’État partie de ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité et son protocole additionnel relatif à l’incrimination d’actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques.

196.Le Comité relève avec satisfaction les efforts de l’État partie pour combattre les infractions motivées par la haine raciale. Il se félicite aussi du projet de loi prévoyant le renversement de la charge de la preuve en matière civile au profit des victimes de discrimination raciale. Cependant, il observe que les poursuites judiciaires en la matière sont peu nombreuses .

Le Comité encourage l’État partie à veiller à ce que les membres du parquet et les magistrats poursuivent, sur la base des dispositions pénales pertinentes, les infractions à caractère raciste et appliquent les sanctions pénales nécessaires. Il suggère en outre l’institution d’une circonstance aggravante générale des infractions lorsqu’elles sont commises avec une motivation raciste, ainsi que la limitation des cas de dérogations à l’interdiction des discriminations tels que prévus actuellement par l’article 457-5 du Code pénal. Le Comité prie l’État partie de lui fournir, dans son prochain rapport périodique, des statistiques actualisées sur les actes de discrimination raciale et sur les actions judiciaires engagées.

197.Le Comité, tout en prenant note des mesures prises pour répondre aux exigences de l’article 4 de la Convention, constate que l’État partie maintient son interprétation des dispositions de cet article selon laquelle les actes délictueux commis par les membres d’une organisation raciste ou par leur sympathisants peuvent être interdits ou punis par la loi, mais non l’existence de ces organisations racistes ou le fait d’y participer.

Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur la recommandation générale XV qui énonce que toutes les dispositions de l’article 4 de la Convention sont impératives, y compris l’obligation de déclarer illégale et d’interdire toute organisation poussant ou incitant à la discrimination ou encore d’ériger en infraction punissable par la loi la participation à ce type d’organisation. En conséquence, le Comité recommande à l’État partie de revoir sa position sur ce point.

198.Le Comité, tout en reconnaissant les mesures entreprises par l’État partie dans la lutte contre la discrimination raciale, relève qu’une protection suffisante n’est pas assurée pour certains groupes vulnérables tels que les non-ressortissants, les réfugiés et les demandeurs d’asile.

À la lumière de sa recommandation générale XXX, le Comité propose que des mesures spécifiques soient prises afin de garantir la jouissance égale du droit à un logement adéquat pour les ressortissants et les non ‑ressortissants , notamment en évitant toute ségrégation dans le logement et en veillant à ce que les organismes de logement s’abstiennent de recourir à des pratiques discriminatoires.

199.Le Comité est préoccupé par le fait qu’un certain nombre de non-ressortissants soient employés illégalement au Luxembourg, étant ainsi exposés aux abus des employeurs.

À la lumière de sa recommandation générale XXX, le Comité encourage l’État partie à prendre des mesures concrètes pour prévenir et régler les problèmes graves auxquels les travailleurs non-ressortissants sont confrontés en ce domaine, en veillant à ce que les employeurs qui recrutent des travailleurs illégaux soient sanctionnés.

200.Le Comité est préoccupé par des allégations faisant état de comportements discriminatoires ou vexatoires à l’encontre de non-ressortissants de la part de fonctionnaires travaillant dans diverses administrations nationales ou locales.

Tout en tenant compte des informations fournies par l’État partie concernant les formations en matière de droits de l’homme accordées aux agents de l’État, le Comité encourage l’État partie à inclure dans ces formations des aspects visant plus spécifiquement les problèmes de racisme et de discrimination, en faisant bénéficier de ce type de formation et de sensibilisation tout fonctionnaire en contact avec les groupes minoritaires.

201.Le Comité invite l’État partie à examiner la possibilitéderatifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles, ainsi que la Convention sur la réduction des cas d’apatridie de 1961.

202.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques publics et de diffuser de la même manière les conclusions du Comité.

203.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses quatorzième et quinzième rapports périodiques, en un seul document, le 31 mai 2007.

BARBADE

204.Le Comité a examiné les huitième à seizième rapports périodiques de la Barbade, présentés en un seul document (CERD/C/452/Add.5) à ses 1709e et 1710e séances (CERD/C/SR.1709 et CERD/C/SR.1710), tenues les 5 et 8 août 2005. À sa 1727e séance (CERD/C/SR.1727), le 18 août 2005, le Comité a adopté les conclusions suivantes.

A. Introduction

205.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie, qui est tout à fait conforme aux principes directeurs concernant la présentation des rapports, et se félicite que le dialogue ait été renoué avec l’État partie. Il se félicite également des informations complémentaires fournies par l’État partie par écrit aussi bien qu’oralement. Le rapport et la présentation ont permis au Comité d’engager avec l’État partie une discussion instructive sur le contexte social et historique des problèmes raciaux à la Barbade.

206.Notant que le rapport a été présenté avec 12 ans de retard, le Comité invite l’État partie à respecter les délais qu’il a proposés pour la soumission de ses futurs rapports.

B. Aspects positifs

207.Le Comité note avec satisfaction la création du Comité pour la réconciliation nationale chargé d’élaborer, de coordonner et de mettre en œuvre un programme de réconciliation nationale.

208.Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir fourni des statistiques sur la composition de la population.

209.Le Comité se félicite de l’élaboration du projet de plan national pour la justice, la paix et la sécurité, qui favorisera le droit des victimes de crimes violents à obtenir réparation.

210.Le Comité se félicite de l’organisation dans le Département de la formation de la police régionale de plusieurs programmes relatifs à la promotion et à la protection des droits de l’homme axés sur la discrimination raciale.

211.Le Comité prend également note avec satisfaction du programme éducatif pilote, portant notamment sur le patrimoine africain, la citoyenneté, la vie familiale et la connaissance pratique des langues étrangères, qui a été introduit dans plusieurs écoles primaires et secondaires.

212.Le Comité note avec satisfaction le bon classement du pays dans le Rapport mondial sur le développement humain (PNUD).

C. Sujets de préoccupation et recommandations

213.Tout en se félicitant de la recommandation de la Commission de révision constitutionnelle visant à ce que la notion de discrimination fondée sur le sexe soit incluse dans la Constitution, et de la création d’un comité constitutionnel, qui a entamé la procédure de révision de la Constitution afin notamment d’y inclure une définition de la discrimination raciale protégeant les personnes contre tous les actes discriminatoires commis par des particuliers et des entités privées, le Comité note avec préoccupation qu’il n’existe pas dans le droit interne de définition juridique de la discrimination raciale conforme à l’article premier de la Convention.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une définition de la discrimination raciale reprenant les éléments énoncés à l’article premier de la Convention.

214.Tout en prenant note de la création de la fonction de médiateur, le Comité regrette l’absence d’une institution nationale des droits de l’homme mise en place conformément aux Principes relatifs au statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris, résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe).

Le Comité invite l’État partie à envisager la création d’une institution nationale des droits de l’homme, conformément aux Principes de Paris.

215.Le Comité regrette l’absence de mouvements sociaux défendant des valeurs multiraciales d’intégration dans l’État partie et, en particulier, le fait que le rapport n’a pas été diffusé plus largement auprès de la société civile avant d’être présenté.

À la lumière de l’article 2 e) de la Convention, le Comité prie l’État partie de créer des conditions favorables aux organisations intégrationnistes multiraciales, et invite l’État partie à poursuivre le dialogue avec les organisations de la société civile.

216.Le Comité est préoccupé par le «crypto‑racisme … invisible» mentionné dans le rapport, qui est induit par la séparation des communautés noire et blanche et est enraciné dans les relations sociales au niveau interpersonnel.

Le Comité rappelle à l’État partie sa recommandation générale XIX où il est dit qu’une ségrégation raciale de facto peut survenir sans que les autorités en aient pris l’initiative ou y contribuent directement. Le Comité encourage donc l’État partie à surveiller toutes les tendances susceptibles de conduite à une telle ségrégation, à prendre des mesures pour éliminer toutes les conséquences négatives qui en découlent et à décrire ces mesures dans le prochain rapport périodique.

217.Le Comité note avec préoccupation que, en raison de son caractère général, le paragraphe 1 de la réserve émise par l’État partie compromet l’application de plusieurs dispositions de la Convention, notamment les articles 2, 4, 5 et 6. En outre, le paragraphe 2 de la réserve restreint l’interprétation d’une disposition essentielle à la mise en œuvre effective de la Convention, à savoir l’article 4.

Le Comité invite l’État partie à envisager de retirer sa réserve et à légiférer afin de donner pleinement effet à l’article 4 de la Convention, et d’assurer des voies de recours effectives en application de l’article 6.

218.Le Comité note avec préoccupation qu’aucune plainte pour discrimination raciale n’a été déposée devant la Haute Cour depuis 1994, et qu’aucune plainte n’a jamais été déposée devant l’Inspection générale des services de police.

Le Comité invite l’État partie à se demander si l’absence de plainte formelle pourrait être la conséquence d’une méconnaissance de leurs droits par les victimes, d’une méfiance à l’égard de la police et des autorités judiciaires ou d’un manque d’attention, d’intérêt ou de volonté des autorités pour les affaires de discrimination raciale. Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données statistiques concernant les plaintes déposées, les poursuites engagées et les peines prononcées pour les infractions liées à la discrimination raciale ou ethnique ainsi que des exemples précis de telles affaires.

219.Tout en prenant note de l’observation de l’État partie selon laquelle, à la Barbade, l’éducation est «garantie socialement», le Comité est préoccupé par le fait que le droit à l’éducation et d’autres droits économiques et sociaux ne sont pas adéquatement protégés dans le droit interne.

Le Comité invite l’État partie à assurer à toutes les personnes une égale jouissance des droits économiques et sociaux, notamment du droit à l’éducation énoncé à l’article 5 e) de la Convention.

220.Le Comité regrette la fermeture du Centre d’études multiethniques du campus de l’Université des Indes occidentales à la Barbade, qui avait été créé pour étudier les questions raciales et ethniques dans la Caraïbe.

Le Comité invite l’État partie à envisager de rouvrir ce centre.

221.Le Comité prie l’État partie de donner davantage de précisions sur des Amérindiens à la Barbade.

222.Le Comité note que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention et le prie instamment d’envisager de la faire.

223.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans l’ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action ou autres mesures adoptés pour appliquer au niveau national la Déclaration et le Plan d’action de Durban.

224.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité rappelle la résolution 59/176 de l’Assemblée générale, du 20 décembre 2004, dans laquelle l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général, dans les meilleurs délais, de leur acceptation de cet amendement.

225.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ainsi que la Convention relative au statut des réfugiés.

226.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations finales du Comité. Il suggère en outre à l’État partie de prendre des mesures pour faire mieux connaître la Convention, notamment en organisant des campagnes de sensibilisation.

227.Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 du Règlement intérieur du Comité, modifié, le Comité prie l’État partie de lui adresser, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 213 et 217 ci‑dessus.

228.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre en un seul document attendu le 8 décembre 2007 ses dix‑septième et dix‑huitième rapports périodiques et d’y traiter tous les points soulevées dans les présentes observations finales.

GÉORGIE

229.Le Comité a examiné les deuxième et troisième rapports périodiques de la Géorgie, qui étaient attendus le 2 juillet 2002 et le 2 juillet 2004 respectivement, soumis en un seul document (CERD/C/461/Add.1), à ses 1705e et 1706e séances (CERD/C/SR.1705 et 1706), tenues les 3 et 4 août 2005. À sa 1721e séance, le 15 août 2005, il a adopté les conclusions suivantes:

A. Introduction

230.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport périodique de l’État partie et les renseignements supplémentaires fournis par la délégation. Il salue la présence d’une délégation de haut niveau et se félicite de l’échange franc et constructif engagé avec l’État partie.

231.Le Comité note avec satisfaction la qualité du rapport, qui est conforme aux principes directeurs du Comité concernant la présentation des rapports, et juge très encourageant le fait que l’État partie ait soumis le rapport dans les délais prescrits.

B. Facteurs et difficultés entravant l’application de la Convention

232.Le Comité prend acte du fait que, depuis l’indépendance, la Géorgie doit faire face à des conflits à caractère ethnique et politique en Abkhazie et en Ossétie du Sud. Faute d’autorité gouvernementale suffisante, il est difficile à l’État partie d’exercer, dans ces régions, sa compétence en matière de protection des droits de l’homme et de mise en œuvre de la Convention.

233.D’autre part, les conflits qui touchent l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie ont entraîné une discrimination à l’encontre de populations d’origines ethniques différentes, notamment de nombreux réfugiés et personnes déplacées. Le Conseil de sécurité a adopté plusieurs recommandations visant à faciliter la libre circulation des réfugiés et des personnes déplacées.

C. Aspects positifs

234.Le Comité prend acte du fait que l’État partie est un pays multiethnique, composé de communautés nombreuses et diverses, et apprécie les efforts faits par l’État partie pour fournir des informations relatives à la composition ethnique de la population ainsi que d’autres données statistiques relatives aux minorités.

235.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie continue de faire d’importants progrès en matière de réforme législative et que, dans ce domaine, il a pris en considération certaines de ses recommandations.

236.Le Comité note également avec satisfaction que l’État partie a fait la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention, reconnaissant ainsi la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications, et escompte que le public dans son ensemble en sera informé.

237.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures que l’État partie a récemment prises pour renforcer la participation des minorités ethniques à la vie des institutions politiques.

D. Sujets de préoccupation et recommandations

238.Tout en prenant acte de l’adoption d’un plan d’action détaillé pour le renforcement de la défense des droits et libertés des différents groupes de la population géorgienne pendant la période 2003-2005, le Comité regrette que le projet de loi visant à assurer la protection des minorités n’ait pas encore été adopté (art. 2).

Le Comité recommande à l’État partie de fournir des informations détaillées sur la mise en œuvre et les résultats du Plan d’action pour le renforcement de la défense des droits et libertés des différents groupes de la population géorgienne pendant la période 2003-2005 et l’encourage à adopter une législation spécifique en vue de la protection des minorités.

239.Tout en prenant acte de l’introduction, dans le Code pénal, de l’article 142 (par. 1) relatif à la discrimination raciale, le Comité s’inquiète de l’insuffisance des dispositions pénales inscrites dans la législation nationale de l’État partie pour donner effet aux alinéas a et b de l’article 4 de la Convention (art. 4).

Le Comité recommande que, conformément à sa recommandation générale XV, l’État partie adopte une législation qui donne pleinement effet aux dispositions des alinéas a et b de l’article 4 de la Convention, notamment en déclarant délit punissable par la loi la diffusion d’idées inspirées par des notions de supériorité raciale ou par la haine raciale et l’assistance fournie aux activités racistes, y compris leur financement, en déclarant illégales les organisations ainsi que les activités de propagande qui encouragent et prêchent la discrimination raciale, et en déclarant délit punissable par la loi la participation à des organisations ou à des activités de cette nature.

240.Tout en accueillant avec satisfaction les renseignements fournis sur plusieurs minorités de l’État partie, le Comité regrette que des informations détaillées n’aient pas été données sur la situation de certains groupes minoritaires vulnérables, en particulier les Roms, et sur la manière dont s’exercent, dans leur ensemble, les droits de l’homme de ces groupes (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur la situation de tous les groupes minoritaires, dont les plus vulnérables et en particulier les Roms, et, à cet égard, appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXVII relative à la discrimination à l’égard des Roms.

241.Le Comité constate l’absence de toute législation traitant du statut des langues, le fait que les groupes minoritaires ne connaissent guère le géorgien et l’absence de mesures efficaces susceptibles de pallier cette situation et de renforcer l’usage des langues minoritaires au sein de l’administration publique (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une législation sur le statut des langues, ainsi que des mesures efficaces destinées à améliorer la connaissance du géorgien chez les groupes minoritaires, et de renforcer l’usage des langues minoritaires au sein de l’administration publique.

242.Le Comité note que la représentation de divers groupes ethniques dans les institutions de l’État et l’administration publique est proportionnellement faible, ce qui limite leur participation à la vie publique (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements plus détaillés sur la composition ethnique des institutions de l’État et de l’administration publique et d’adopter des mesures concrètes visant à assurer la représentation des minorités ethniques au sein de l’administration publique et de ces institutions et à renforcer leur participation à la vie publique, notamment en élaborant des politiques culturelles et éducatives les concernant.

243.Tout en notant l’engagement de l’État partie à rapatrier et à intégrer les Meskhètes expulsés de Géorgie en 1944, ainsi que la création récente d’une Commission d’État pour le rapatriement des Meskhètes, le Comité constate avec préoccupation qu’aucune mesure concrète n’a encore été prise pour apporter une solution à cette question (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur la situation des Meskhètes et de prendre les mesures voulues pour faciliter leur retour et leur permettre d’obtenir la nationalité géorgienne, notamment en adoptant le cadre législatif nécessaire, qui est en cours d’élaboration depuis 1999.

244.Le Comité regrette que le rapport de l’État partie ne contienne pas d’informations sur les droits fondamentaux des non-ressortissants installés à titre temporaire ou permanent en Géorgie, notamment l’exercice effectif, sans discrimination, des droits énoncés à l’article 5 de la Convention (art. 5).

Appelant l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXX concernant la discrimination à l’égard des non-ressortissants, le Comité lui recommande d’assurer, sans discrimination, l’exercice effectif des droits énoncés à l’article 5 de la Convention, en accordant une attention particulière aux droits à la justice et à la santé.

245.Tout en prenant note de l’adoption de nouvelles dispositions juridiques concernant les réfugiés, le Comité reste préoccupé par le fait que des réfugiés et demandeurs d’asile appartenant à certaines ethnies ont été renvoyés de force dans leur pays alors qu’il existait des raisons sérieuses de penser qu’ils pourraient y subir des violations graves des droits de l’homme (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur la situation des réfugiés et des demandeurs d’asile, la protection juridique qui leur est fournie, notamment leurs droits d’obtenir une assistance juridique et de faire appel contre un arrêté d’expulsion, et les fondements juridiques de l’expulsion. Il demande instamment à l’État partie de veiller, conformément à l’article 5 b) de la Convention, à ce qu’aucun réfugié ne soit renvoyé de force dans un pays lorsqu’il y a des motifs sérieux de croire qu’il pourrait y subir de graves violations des droits de l’homme. Le Comité engage l’État partie à ratifier la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie.

246.Les questions religieuses concernent le Comité lorsqu’elles sont liées à des questions d’appartenance ethnique et de discrimination raciale. À cet égard, tout en prenant acte des mesures que prend l’État partie pour combattre la violence à caractère ethnique ou religieux, le Comité demeure préoccupé par la situation des minorités ethniques et religieuses, telles que les Kurdes yézidis (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur la situation des minorités ethniques et religieuses et d’adopter le projet de loi sur la liberté de conscience et la liberté religieuse afin d’assurer la protection des minorités contre la discrimination et, particulièrement, les actes de violence.

247.La pauvreté est une question qui relève des droits de l’homme et un facteur qui entrave le plein exercice par tous, notamment les groupes minoritaires vulnérables, de ces droits. Le Comité est préoccupé par l’extrême pauvreté dans laquelle vit une partie de la population et par les effets de cette pauvreté sur l’exercice des droits de l’homme des groupes minoritaires vulnérables et regrette que le programme de l’État partie visant à atténuer la pauvreté et à favoriser la croissance économique n’ait pas encore été adopté (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur la situation économique, notamment celle des minorités, et d’adopter toutes les mesures nécessaires pour atténuer la pauvreté, particulièrement celle qui touche les groupes minoritaires vulnérables, et pour favoriser la croissance économique, par exemple en adoptant un plan national spécial.

248.Le Comité est préoccupé par les allégations d’arrestation et de détention arbitraires, le recours excessif à la force par les agents de la force publique, les mauvais traitements subis par les membres des groupes minoritaires et les non-ressortissants en garde à vue et le fait que ces cas ne donnent lieu à aucune enquête (art. 5 et 6).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues pour éliminer toutes les formes de mauvais traitements imputables à des agents de la force publique et assurer des enquêtes rapides, approfondies, indépendantes et impartiales sur toutes les allégations de mauvais traitements, particulièrement ceux subis par les membres des groupes ethniques et les non-ressortissants. L’État partie devrait poursuivre et sanctionner les auteurs de ces actes et veiller à ce que les victimes soient indemnisées.

249.Tout en prenant acte de l’existence d’un Médiateur, le Comité regrette que le rapport de l’État partie ne contienne pas suffisamment d’informations sur le niveau d’indépendance, les compétences et l’efficacité de cette institution (art. 6).

Le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations détaillées concernant le niveau d’indépendance et les compétences du Médiateur, ainsi que les résultats concrets qu’il a obtenus. En outre, le Comité engage l’État partie à renforcer cette institution et à la doter de ressources suffisantes afin qu’elle puisse jouer le rôle d’une institution nationale indépendante de défense des droits de l’homme, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme ou «Principes de Paris» (résolution 48/134 de l’Assemblée générale).

250.Tout en notant avec appréciation que la Convention peut être invoquée directement devant les tribunaux nationaux, le Comité constate un manque d’informations sur les plaintes pour discrimination raciale, l’absence d’affaires judiciaires relatives à la discrimination raciale et la nécessité de diffuser plus largement la Convention auprès des autorités de l’État (art. 6 et 7).

Le Comité recommande à l’État partie de s’assurer que l’absence d’affaires judiciaires relatives à la discrimination raciale n’est pas due au fait que les victimes ignorent leurs droits, à la modicité de leurs moyens financiers, à leur méfiance à l’égard de la police et des autorités judiciaires ou au manque d’intérêt ou de sensibilité des autorités aux cas de discrimination raciale. Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que la législation nationale contienne des dispositions assurant une protection et des voies de recours efficaces contre toute violation de la Convention et de diffuser aussi largement que possible dans la population des informations sur les voies de recours judiciaire disponibles. Le Comité recommande aussi à l’État partie de prendre des dispositions pour informer les membres de la police et de la magistrature des dispositions de la Convention.

251.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action au niveau national.

252.Le Comité demande à l’État partie de diffuser largement, à l’échelon du pays et dans les diverses langues, son rapport et les présentes conclusions du Comité et de communiquer son prochain rapport périodique aux organisations non gouvernementales présentes dans le pays avant de le transmettre au Comité.

253.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité attire l’attention de l’État partie sur la résolution 59/176 du 20 décembre 2004, dans laquelle l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général, dans les meilleurs délais, de leur acceptation de cet amendement.

254.En vertu des dispositions du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 du Règlement intérieur du Comité, tel qu’amendé, le Comité prie l’État partie de l’informer de la suite donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 238, 244 et 245 ci-dessus, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes conclusions.

255.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses quatrième et cinquième rapports périodiques en un seul document, attendu le 2 juillet 2008, et d’y traiter tous les points soulevés dans les présentes conclusions.

ISLANDE

256.Le Comité a examiné les dix-septième et dix-huitième rapports périodiques de l’Islande, qui étaient attendus entre 2002 et 2004, soumis en un seul document (CERD/C/476/Add.5), à ses 1715e et 1716e séances (CERD/C/SR.1715 et 1716), tenues les 10 et 11 août 2005. À sa 1725e séance (CERD/C/SR.1725), le 17 août 2005, il a adopté les conclusions suivantes:

A. Introduction

257.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’Islande, qui est conforme aux principes directeurs concernant la présentation des rapports, ainsi que les informations complètes que la délégation a fournies oralement et par écrit en réponse à ses questions. Il salue aussi la rapidité et la régularité avec lesquelles l’État partie soumet ses rapports périodiques. Il apprécie la possibilité ainsi offerte d’entretenir une concertation soutenue et constructive avec l’État partie.

B. Aspects positifs

258.Le Comité note avec satisfaction que, depuis l’examen de ses quinzième et seizième rapports en 2001, l’État partie a ratifié un certain nombre d’instruments relatifs aux droits de l’homme, y compris les deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant ainsi que des instruments régionaux ayant un rapport avec le mandat du Comité.

259.Le Comité note avec satisfaction que le statut juridique des ressortissants étrangers a été renforcé par des modifications récentes de la législation, telles que l’adoption, en 2002, de la loi relative aux droits des étrangers en matière d’emploi, l’amendement, en 2002, de la loi sur les élections municipales, qui accorde aux étrangers le droit de voter et d’être élu dans les élections municipales, ainsi que l’application de cet amendement, pour la première fois, lors des élections de 2002 qui ont vu quelque 1 000 ressortissants étrangers exercer leur droit de vote.

260.Le Comité note avec satisfaction la création récente du Comité pour les réfugiés et les demandeurs d’asile, ainsi que du Conseil islandais de l’immigration qui, composé de représentants des ministères concernés et d’un représentant des immigrants, sera chargé de formuler, à l’intention du Gouvernement, des recommandations sur la politique d’immigration et de coordonner l’offre de services et la communication d’informations aux immigrants.

261.Le Comité note avec appréciation que, dans un jugement d’avril 2002, la Cour suprême d’Islande a confirmé la condamnation d’une personne reconnue coupable, aux termes de l’article 233 a) du Code pénal général, d’avoir publiquement agressé un groupe de personnes en raison de leur nationalité, de leur couleur et de leur race.

262.Le Comité se félicite de la création, en 2001, d’un bureau de la police de Reykjavik, qui joue le rôle d’intermédiaire entre la police et les personnes d’origine étrangère et est notamment chargé de transmettre aux autorités compétentes les plaintes déposées par les ressortissants étrangers.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

263.Le Comité note que la Convention n’a pas été incorporée dans le droit interne de l’État partie.

Le Comité engage l’État partie à envisager d’incorporer les dispositions de fond de la Convention dans son droit interne, afin d’assurer une protection complète contre la discrimination raciale. 

264.Tout en constatant qu’il n’existe pas de graves conflits sociaux au sein de la société islandaise, le Comité juge néanmoins que l’État partie devrait adopter une démarche plus anticipative pour prévenir la discrimination raciale et l’intolérance qui y est associée (art. 2).

Le Comité rappelle que la notion de prévention est inscrite dans de nombreuses dispositions de la Convention et engage l’État partie à prendre des mesures spécifiques pour prévenir la discrimination raciale dans tous les secteurs et, à cet effet, à envisager d’adopter une législation antidiscriminatoire complète, qui comporte notamment des recours efficaces contre la discrimination raciale dans les procédures civiles et administratives.

265.Le Comité constate que le financement direct du Centre islandais des droits de l’homme a été supprimé dans le budget de 2005 et que les fonds initialement destinés au Centre ont été réaffectés à l’ensemble des projets relatifs aux droits de l’homme (art. 2, par. 1 e)).

Le Comité invite l’État partie à maintenir son niveau de coopération avec les organisations non gouvernementales qui luttent contre la discrimination raciale, notamment en contribuant à assurer à ces organisations un niveau satisfaisant de financement et d’indépendance, étant entendu qu’aux termes des dispositions du paragraphe 1 e) de l’article 2 de la Convention, chaque État partie s’engage à favoriser, le cas échéant, les organisations et mouvements intégrationnistes multiraciaux.

266.Tout en prenant note du fait que la police des frontières reçoit une formation dans les domaines des normes internationales relatives aux droits de l’homme et du droit des réfugiés, le Comité s’inquiète des informations selon lesquelles les demandes d’asile ne sont pas dûment prises en charge par les gardes frontière (art. 5).

Le Comité encourage l’État partie à redoubler d’efforts pour assurer la formation systématique des gardes frontière, afin de leur permettre de mieux connaître tous les aspects pertinents de la protection des réfugiés ainsi que la situation qui prévaut dans les pays d’origine des demandeurs d’asile.

267.Tout en prenant acte du fait que l’exigence selon laquelle l’époux ou le partenaire étranger vivant en cohabitation ou au titre d’un partenariat enregistré avec une personne vivant légalement en Islande doit avoir atteint l’âge de 24 ans pour obtenir un permis de séjour en tant que membre d’une famille a pour objectif de prévenir les mariages fictifs ou forcés, le Comité s’inquiète néanmoins de ce que cette disposition pourrait avoir des effets discriminatoires, étant donné qu’aux termes de la loi islandaise sur le mariage (loi n° 31/1993), l’âge minimum du mariage est de 18 ans (art. 5 d) iv)).

Le Comité recommande à l’État partie de revoir cette disposition relative à l’âge et d’envisager d’autres moyens pour prévenir les mariages fictifs ou forcés.

268.Tout en notant que le fait de remettre le permis de travail temporaire à l’employeur plutôt qu’à l’employé étranger a pour objet de mieux suivre la situation du marché du travail et qu’une copie du permis indiquant la date d’expiration est remise à l’employé, qui peut changer d’emploi pendant la période visée par le permis, le Comité s’inquiète de ce que cette situation peut entraîner des violations des droits des travailleurs étrangers temporaires (art. 5, par. e) i)).

Rappelant sa recommandation générale XXX (2004) sur la discrimination à l’égard des non-ressortissants, le Comité recommande à l’État partie de renforcer les garanties contre la discrimination afin de prévenir ces violations et d’assurer la protection des travailleurs étrangers contre la discrimination, notamment en ce qui concerne les conditions de travail et les exigences professionnelles.

269.Le Comité s’inquiète des informations selon lesquelles l’accès à des lieux publics, tels que des bars ou des discothèques, a été refusé pour des motifs racistes et constate que ces faits n’ont pas donné lieu aux poursuites prévues par l’article 180 du Code pénal portant interdiction des actes discriminatoires (art. 5 f)).

Le Comité rappelle le droit de toute personne à accéder à des lieux publics sans subir de discrimination et recommande à l’État partie de réglementer la charge de la preuve dans les procédures civiles concernant le refus de l’accès à des lieux publics fondé sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, de sorte que, lorsqu’une personne fournit un commencement de preuve établissant qu’elle a été victime d’un tel refus, il incombe au défendeur de fournir la preuve d’une justification objective et raisonnable du traitement différencié.

270.Le Comité note avec préoccupation que les personnes dont la demande d’asile a été rejetée ou qui font l’objet d’une mesure d’expulsion de la part de la Direction de l’immigration ne peuvent interjeter appel qu’auprès du Ministre de la justice, qui est l’autorité de tutelle et dont l’intervention consiste en un contrôle juridictionnel de la procédure plutôt qu’en un examen quant au fond (art. 6).

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager l’institution d’un recours de pleine juridiction, auprès d’un organe judiciaire indépendant chargé d’examiner la décision de la Direction de l’immigration et/ou du Ministre de la justice de rejeter une demande d’asile ou d’expulser un demandeur d’asile.

271.Le Comité constate l’absence, en Islande, d’une institution nationale de défense des droits de l’homme répondant aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme ou «Principes de Paris» (résolution 48/134 de l’Assemblée générale).

Le Comité invite l’État partie à envisager de mettre en place une institution nationale de défense des droits de l’homme répondant aux Principes de Paris.

272.Le Comité engage l’État partie à ratifier la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie et à mener à son terme le processus de ratification du Protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité, relatif à l’incrimination d’actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques.

273.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action au niveau national.

274.Le Comité recommande à l’État partie de continuer à faire connaître au public ses rapports périodiques et les conclusions du Comité concernant lesdits rapports.

275.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses dix-neuvième et vingtième rapports périodiques en un seul document, attendu le 4 janvier 2008.

NIGÉRIA

276.Le Comité a examiné les quatorzième, quinzième, seizième, dix‑septième et dix‑huitième rapports périodiques du Nigéria présentés en un seul document (CERD/C/476/Add.3), à ses 1720e et 1722e séances (CERD/C/SR.1720 et 1722), tenues les 15 et 16 août 2005. À sa 1728e séance (CERD/C/SR.1728), tenue le 19 août 2005, il a adopté les conclusions ci‑après.

A.  Introduction

277.Le Comité prend acte avec satisfaction du rapport présenté par l’État partie et des informations complémentaires fournies par écrit. Il se félicite de la participation d’une délégation à son examen, ce qui lui a donné l’occasion de reprendre le dialogue avec l’État partie. Le Comité regrette cependant que le rapport ne soit pas pleinement conforme à ses directives concernant l’établissement des rapports et ne contienne pas suffisamment d’informations sur l’application concrète de la Convention.

278.Notant que le rapport a été reçu avec plus de huit ans de retard, le Comité invite l’État partie à respecter les délais fixés pour la présentation de ses futurs rapports.

B.  Aspects positifs

279.Le Comité note avec satisfaction la ratification par l’État partie, en 2002, de la Convention (no 111) de l’OIT concernant la discrimination en matière d’emploi et de profession de 1958.

280.Le Comité se félicite de la création d’une commission nationale des droits de l’homme en application de la loi sur la Commission des droits de l’homme adoptée en 1995.

281.Le Comité prend acte avec satisfaction de l’adoption en 2004 du Plan d’action national pour la promotion et la protection des droits de l’homme.

282.Le Comité se félicite de la mise en place d’un conseil national interreligions (National inter‑religions Council) et d’un institut pour la paix et le règlement des conflits (Institute for Peace and Conflict) qui ont pour but de promouvoir l’harmonie entre les ethnies, les communautés et les confessions. Il prend acte aussi avec satisfaction de la mise en place d’un système national de répartition des recettes qui vise à améliorer la répartition des ressources entre les différents États.

283.Le Comité se félicite de la création dans les postes de police de guichets des droits de l’homme chargés des plaintes relatives aux violations des droits de l’homme commises par des membres des forces de police.

284.Le Comité note avec satisfaction la création d’écoles mobiles pour les enfants des communautés nomades.

C.  Sujets de préoccupation et recommandations

285.Tout en notant que l’État partie craint que l’identification des différents éléments de sa population par appartenance ethnique ou religieuse ne favorise les clivages dans le pays, le Comité constate avec préoccupation qu’aucun chiffre précis n’a été fourni quant à la composition de la population et fait observer que des données de ce type sont nécessaires pour évaluer l’application concrète de la Convention.

Le Comité invite l’État partie à effectuer le prochain recensement dès que possible et à inclure des indicateurs ventilés par appartenance ethnique, religion et sexe recueillis sur la base d’une auto ‑identification volontaire de façon qu’il soit possible de déterminer la situation des groupes qui relèvent de la définition figurant à l’article premier de la Convention. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale IV (1973) sur la présentation de rapports par les États ainsi que sur le paragraphe 8 de ses directives concernant l’établissement des rapports.

286.Le Comité est préoccupé par l’absence d’une définition juridique de la discrimination raciale en droit interne (art. 1 de la Convention).

Le Comité invite l’État partie à demander au Comité conjoint de son Assemblée nationale chargé de revoir la Constitution d’étudier la possibilité d’adopter une définition de la discrimination qui reprenne les éléments figurant à l’article premier de la Convention.

287.Le Comité regrette qu’il y ait dans le rapport de l’État partie si peu de renseignements sur les droits des non‑ressortissants résidant temporairement ou en permanence au Nigéria, notamment les réfugiés, les apatrides, les personnes déplacées et les travailleurs migrants. En outre, il note que les garanties contre la discrimination raciale figurant à l’article 42 de la Constitution ne s’appliquent pas aux non‑ressortissants (art. 1 et 2).

Dans le contexte de l’actuelle révision de la Constitution et de l’élaboration d’un projet de loi antidiscrimination par le Parlement, le Comité invite l’État partie à songer à élargir le champ d’application de la législation interne de façon à protéger les non ‑ressortissants de la discrimination raciale. Le Comité prie l’État partie de fournir des informations à jour sur l’évolution de la situation dans ce domaine et à fournir dans son prochain rapport périodique d’autres informations sur l’exercice de leurs droits par les non ‑ressortissants résidant au Nigéria , en particulier les réfugiés, les apatrides, les personnes déplacées et les travailleurs migrants. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXX (2004) concernant la discrimination contre les non ‑ressortissants .

288.Le Comité note avec préoccupation que les grands principes de la Convention n’ont pas été incorporés au droit interne en sorte qu’ils ne peuvent pas encore être invoqués directement devant les tribunaux nigérians (art. 2).

Le Comité invite l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour incorporer les dispositions de fond de la Convention à la législation interne de façon à assurer une protection complète contre la discrimination raciale.

289.Le Comité note avec une vive préoccupation que malgré les tentatives pour promouvoir l’unité nationale, les préjugés et les rancœurs persistent entre certains groupes ethniques, ainsi qu’une discrimination active exercée par les personnes qui se considèrent comme étant les habitants originels d’une région à l’égard des personnes venues d’autres États du pays. Le Comité est particulièrement préoccupé par la persistance de violences interethniques, intercommunautaires et interreligieuses nourries par ces rancœurs ainsi que par des conflits autour d’intérêts commerciaux et au sujet du contrôle des ressources qui ont déjà fait des milliers de victimes et causé le déplacement d’une bonne partie de la population (art. 2).

Le Comité encourage l’État partie à continuer de surveiller toutes les initiatives et tendances susceptibles de susciter un comportement raciste et xénophobe et à combattre les conséquences néfastes de telles tendances. Le Comité recommande à l’État partie de surveiller de près les effets néfastes des efforts qu’il fait pour promouvoir l’unité nationale à travers des mesures prises au niveau régional et à celui des États et, en particulier, les effets sur les relations au sein et entre les groupes ethnoreligieux . Il recommande à l’État partie de s’efforcer, en encourageant un dialogue authentique, d’améliorer les relations entre les différentes communautés ethniques et religieuses, de façon à promouvoir la tolérance et à combattre les préjugés et les stéréotypes négatifs. Il invite l’État partie à effectuer des études en vue d’évaluer d’une manière concrète les cas de discrimination raciale.

290.Tout en notant que la loi du 12 août 1958 (1958 Osu Abolition Law) a mis juridiquement fin à la discrimination fondée sur le travail et l’ascendance, le Comité demeure préoccupé par les allégations persistantes selon lesquelles des membres des communautés Osu et d’autres communautés similaires continuent d’être victimes d’ostracisme, de ségrégation et de mauvais traitements ainsi que d’une discrimination en matière d’emploi et de mariage (art. 2, 3 et 5).

Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXIX (2000) concernant la discrimination raciale fondée sur l’ascendance et suggère qu’une réponse détaillée à ce propos soit fournie dans son prochain rapport de l’État partie. Il recommande vivement à l’État partie d’élaborer, en coopération avec les organisations non gouvernementales et les chefs religieux, des programmes efficaces pour prévenir, interdire et éliminer les pratiques privées qui constituent une ségrégation quelle qu’en soit la forme, notamment de lancer une vaste campagne d’information et de sensibilisation pour mettre fin à ces pratiques.

291.Le Comité est vivement préoccupé par les nombreuses informations faisant état de mauvais traitements, d’un usage excessif de la force et d’exécutions extrajudiciaires, ainsi que d’arrestations et de mises en détention arbitraires effectuées par les agents de la force publique en vue de mettre un terme aux violences intercommunautaires, interethniques et interreligieuses. Le Comité est en particulier inquiet des informations faisant état d’actes graves de violence visant des membres de certains groupes ethniques commis en représailles contre les attaques menées contre les forces de sécurité, dont l’incident qui s’est produit dans l’État de Benue en octobre 2001. Tout en prenant note de la création de nombreux organes pour enquêter sur ces incidents, notamment les commissions d’investigation, il constate avec préoccupation que la plupart des enquêtes n’ont pas débouché sur des poursuites et des condamnations à la mesure de la gravité des actes commis, ce qui a donné naissance à un sentiment d’impunité (art. 2, 4 et 5).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier son action pour mettre un terme à ce phénomène et lui demande de fournir des renseignements détaillés en ce qui concerne le nombre de personnes qui ont trouvé la mort et leur appartenance ethnique, les poursuites engagées contre ceux qui sont impliqués dans ces incidents, et le cas échéant, les peines qui ont été prononcées. Le Comité demande instamment à l’État partie de rendre publics les résultats de toutes les enquêtes annoncées à la suite de ces incidents et de punir les responsables.

292.Le Comité est préoccupé par l’absence dans la législation de l’État partie d’une disposition pénale expresse interdisant les organisations et les activités de propagande qui incitent à la haine raciale comme l’exige l’article 4 b) de la Convention.

Dans sa recommandation générale XXX (2004), le Comité recommande à l’État partie d’ajouter à sa législation pénale une disposition stipulant que la commission d’une infraction avec des motivations ou une intention raciste constitue une circonstance aggravante. Le Comité souhaiterait en outre obtenir des renseignements plus détaillés sur la procédure applicable aux organisations dénoncées comme racistes et sur les autorités compétentes pour s’occuper du cas de telles organisations.

293.Le Comité s’inquiète de la persistance de la discrimination à l’égard des personnes appartenant à différents groupes ethniques dans le domaine de l’emploi, du logement et de l’éducation, ainsi que de pratiques discriminatoires de la part de personnes qui se considèrent comme les habitants originels de leur région contre des personnes venues d’autres États. Tout en notant les efforts consentis par l’État partie pour améliorer la représentation de différents groupes ethniques dans la fonction publique, et tout particulièrement par la Federal Character Commission (Commission à caractère fédéral), le Comité demeure préoccupé par les informations faisant état de rapports de clientélisme et de relations traditionnelles fondés sur l’origine ethnique qui ont pour effet la marginalisation de certains groupes ethniques dans les organismes publics, les organes législatifs et l’appareil judiciaire (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l’État partie de continuer de promouvoir l’égalité de chance entre toutes les personnes sans discrimination en vue d’assurer à tous la pleine jouissance des droits de l’homme conformément au paragraphe 2 de l’article 2 et à l’article 5 de la Convention. À cet égard le Comité prie instamment l’État partie de renforcer ses plans d’action palliative en faveur des groupes sous ‑représentés ou marginalisés de la population, notamment les femmes, dans sa politique relative à l’emploi dans la fonction publique et de fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les résultats obtenus dans le cadre de ces programmes.

294.Le Comité est vivement préoccupé par les effets néfastes sur l’environnement d’une exploitation sur une vaste échelle des ressources naturelles dans l’État du Delta et d’autres États des rivières, en particulier dans la région des Ogonis. Il note avec inquiétude que l’État partie n’a pas engagé de consultations sérieuses avec les communautés concernées et les effets délétères de l’exploitation des puits de pétrole sur l’infrastructure, l’économie, la santé et l’enseignement dans les régions touchées. À cet égard, le Comité constate avec préoccupation que la loi sur l’occupation des sols de 1978 et le Décret relatif au pétrole de 1969 sont contraires aux dispositions de la Convention. En outre, le Comité est alarmé par des informations faisant état d’agressions, d’un usage excessif de la force, d’exécutions sommaires et d’autres violations des droits de l’homme commises contre des membres de communautés locales par des agents de la force publique, ainsi que par le personnel de sécurité employé par les sociétés pétrolières (art. 2 et 5).

Dans sa recommandation générale XXIII (1997) sur les droits des peuples autochtones, le Comité invite instamment l’État partie à prendre d’urgence des mesures pour combattre le «racisme environnemental» et la détérioration de l’environnement. En particulier il lui recommande d’abroger la loi sur l’occupation des sols de 1978 et le décret relatif au pétrole de 1969 et de mettre en place un cadre juridique qui soit de nature à énoncer clairement les principes généraux régissant l’exploitation des terres, notamment l’obligation d’observer des normes environnementales strictes, ainsi que d’assurer une répartition juste et équitable des revenus. Le Comité réaffirme que parallèlement au droit d’exploiter les ressources naturelles, il y a d’autres obligations connexes à l’égard de la population locale, notamment celle d’engager de véritables consultations avec elle. D’autre part, le Comité invite instamment l’État partie à enquêter de manière impartiale et approfondie sur les cas présumés de violation des droits de l’homme par des agents de la force publique et le personnel de sécurité privé, à engager des poursuites contre les auteurs de telles violations et à assurer une juste réparation aux victimes et/ou à leurs familles.

295.Vu l’interaction entre la discrimination ethnique et la discrimination religieuse, le Comité demeure préoccupé par le fait que les membres de communautés ethniques de confession musulmane, en particulier les femmes, peuvent être condamnés à des peines plus sévères que les autres Nigérians. Tout en prenant acte des explications fournies par la délégation, selon lesquelles chacun peut choisir librement son régime (droit écrit, droit coutumier ou droit religieux), le Comité note que les personnes concernées ne sont pas toujours en position de faire un libre choix en la matière (art. 5 a)).

Le Comité rappelle à l’État partie que toutes les personnes ont droit à l’égalité de traitement devant les tribunaux et tous les autres organes qui administrent la justice, et appelle l’attention de l’État partie sur la recommandation générale XXV (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale.

296.Le Comité note avec préoccupation que la disposition concernant l’acquisition de la nationalité figurant au paragraphe 2 a) de l’article 26 de la Constitution ne semble pas être pleinement conforme à l’alinéa d iii) de l’article 5 de la Convention, dans la mesure où elle stipule qu’un étranger ne peut acquérir la nationalité nigériane de la même manière qu’une étrangère (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de songer à revoir le paragraphe 2 a) de l’article 26 de la Constitution de façon à le mettre en conformité avec les dispositions de la Convention et d’informer le Comité à ce sujet dans son prochain rapport périodique. À cet égard, il appelle l’attention de l’État partie sur ses recommandations générales XXV (2000) et XXX (2004), où il est demandé à l’État partie de garantir que certains groupes de non ‑ressortissants ne fassent pas l’objet d’une discrimination en ce qui concerne l’accès à la nationalité ou la naturalisation.

297.Tout en se félicitant des vastes mesures contre la traite des êtres humains prises par l’État partie, notamment la création en 2003 d’une agence nationale pour l’interdiction de la traite des personnes et l’adoption en 2003 de la loi contre la traite des êtres humains, le Comité demeure préoccupé par le fait que la traite des êtres humains, notamment de femmes, d’hommes et d’enfants reste un sérieux problème dans l’État partie (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur la traite des êtres humains et de continuer de prendre les mesures législatives et politiques nécessaires pour prévenir et combattre ce phénomène. Le Comité invite instamment l’État partie à fournir un soutien et une assistance aux victimes, si possible dans leur propre langage. Tout en soulignant qu’il importe au plus haut point de mener des enquêtes rapides et impartiales, le Comité recommande à l’État partie de continuer d’agir avec détermination pour traduire en justice les trafiquants.

298.Le Comité regrette qu’aucune donnée statistique n’ait été fournie sur les affaires dans lesquelles les dispositions de la législation interne concernant la discrimination raciale ont été appliquées. Il rappelle à l’État partie que l’absence de plaintes et d’actions en justice de la part des victimes de la discrimination raciale dénote peut‑être l’absence de lois précises dans ce domaine, la méconnaissance des moyens de recours disponibles ou la réticence des autorités à engager des poursuites (art. 6).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour incorporer les dispositions requises à la législation nationale et d’informer le public de tous les moyens de recours disponibles en cas de discrimination raciale. Le Comité demande en outre à l’État partie de fournir dans son prochain rapport des données statistiques sur les poursuites engagées et les peines prononcées dans les affaires de discrimination et sur les affaires dans lesquelles les dispositions pertinentes de la législation nationale ont été appliquées.

299.Tout en prenant acte des informations sur les mesures prises par l’État partie pour améliorer la compréhension, le respect et la tolérance entre les différents groupes ethniques vivant au Nigéria, le Comité estime que les dispositions prises pour promouvoir la compréhension et la sensibilisation interculturelles laissent à désirer (art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier son action pour promouvoir la compréhension, la tolérance et l’amitié entre les groupes ethniques, notamment en lançant de vastes campagnes d’éducation du public et en inscrivant l’éducation interculturelle dans les programmes scolaires. Il invite l’État partie à fournir des informations plus détaillées sur cette question dans son prochain rapport périodique.

300.Tout en prenant acte des renseignements fournis par la délégation, le Comité exprime à nouveau sa préoccupation quant au fait que les mesures prises pour faire connaître au public, aux agents de la force publique, aux membres des partis politiques et aux journalistes les dispositions de la Convention demeurent insuffisantes (art. 7).

Le Comité encourage l’État partie à renforcer les efforts en cours dans le domaine de l’éducation relative aux droits de l’homme. En outre, une attention particulière devrait être accordée à la Recommandation XIII (1993) selon laquelle les agents de la force publique devraient recevoir une formation spécifique pour que, dans l’exercice de leurs fonctions, ils respectent et protègent la dignité humaine et défendent les droits de l’homme de toutes les personnes sans distinction de race, de couleur, d’ascendance ou d’origine nationale ou ethnique.

301.Le Comité invite l’État partie à songer à ratifier:

a)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille; et

b)La Convention (no 169 de l’OIT) concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants, de 1989.

302.Le Comité note que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention. Il lui recommande vivement de songer à faire cette déclaration.

303.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième session des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, il se réfère à la résolution 59/176 de l’Assemblée générale en date du 20 décembre 2004, dans laquelle l’Assemblée a demandé instamment aux États parties de hâter les procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général, dans les meilleurs délais, de leur acceptation de cet amendement.

304.Le Comité recommande à l’État partie de tenir compte des sections pertinentes de la Déclaration et du Programme d’action de Durban en mettant en œuvre la Convention dans l’ordre juridique interne, en particulier en appliquant les articles 2 à 7 de la Convention. Il lui recommande en outre de fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national, en particulier sur la préparation et l’application de son plan d’action national.

305.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ces rapports disponibles au public dès qu’ils sont présentés et d’en faire de même pour les conclusions du Comité relatives à ces rapports.

306.En application du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 du Règlement intérieur du Comité tel que modifié, le Comité invite l’État partie à l’informer sur l’application des recommandations figurant aux paragraphes 289, 291 et 294 ci‑dessus dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes conclusions. Il lui recommande de présenter son dix‑neuvième rapport périodique en même temps que son vingtième rapport périodique le 4 janvier 2008, et d’y aborder tous les points soulevés dans les présentes conclusions.

TURKMÉNISTAN

307.Le Comité a examiné le rapport initial et les deuxième, troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques du Turkménistan présentés en un seul document (CERD/C/441/Add. 1) à ses 1717e et 1718e séances (CERD/C/SR.1717 et 1718), tenues les 11 et 12 août 2005. À ses 1725e et 1727e séances (CERD/C/SR.1725 et 1727), tenues les 17 et 18 août 2005, il a adopté les conclusions ci‑après.

A. Introduction

308.Le Comité se félicite du rapport présenté par le Turkménistan et se réjouit de la possibilité ainsi offerte d’entamer un dialogue franc avec l’État partie. Il regrette cependant que le rapport ne contienne pas d’informations détaillées sur l’application concrète de la Convention et ne soit pas conforme aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports.

309.Le Comité note avec une vive préoccupation les contradictions majeures entre, d’une part, les informations cohérentes émanant d’organisations intergouvernementales et non gouvernementales faisant état de graves violations de la Convention au Turkménistan, et d’autre part, les démentis parfois catégoriques de l’État partie. Le Comité souligne que l’examen des rapports vise à instaurer un dialogue constructif et sincère, et encourage l’État partie à redoubler d’efforts à cet effet.

310.Notant que le rapport a été présenté avec environ neuf ans de retard, le Comité invite l’État partie à respecter les délais fixés pour la présentation de ses futurs rapports.

B. Aspects positifs

311.Le Comité se félicite de la présence d’une délégation de haut niveau et des efforts faits par celle‑ci pour répondre aux nombreuses questions posées par ses membres. Il note les assurances de la délégation quant à la volonté de l’État partie de poursuivre le dialogue avec le Comité.

312.Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie a ratifié depuis son indépendance la plupart des principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme.

313.Le Comité note avec satisfaction l’adoption en mars 2005 d’un règlement sur la détermination du statut de réfugié, et que l’État partie accueille généreusement sur simple présomption plus de 10 000 réfugiés originaires du Tadjikistan.

314.Le Comité se félicite de la modification apportée le 2 novembre 2004 au Code pénal, par laquelle il a abrogé l’article 223/1 qui prévoyait des sanctions pénales pour les associations non enregistrées, y compris les organisations non gouvernementales.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

315.Le Comité note avec préoccupation l’absence de données cohérentes concernant la composition ethnique de la population. Il constate que la proportion des personnes appartenant à des minorités nationales et ethniques semble avoir nettement diminué entre 1995 et 2005, mais a du mal à interpréter ces chiffres qui peuvent être le résultat d’une politique d’assimilation menée par l’État partie, de l’émigration de nombreux membres de groupes minoritaires ou d’une distorsion présumée des statistiques par l’État partie pour minimiser l’importance des minorités sur son territoire.

Le Comité invite l’État partie à fournir des données cohérentes sur la composition de sa population.

316.Le Comité note que conformément à l’article 6 de la Constitution, l’État partie reconnaît la primauté des normes universellement reconnues du droit international mais constate avec préoccupation que la place de la Convention dans l’ordre juridique interne demeure peu claire. Il s’inquiète en outre du fossé existant entre le droit et la pratique (art. 2).

Le Comité recommande à l’État partie de garantir pleinement la primauté du droit, ce qui est indispensable pour l’application de la Convention, et de fournir des renseignements plus détaillés sur la place de la Convention dans l’ordre juridique interne.

317.Le Comité est vivement préoccupé par les cas signalés de discours haineux ciblant des minorités nationales et ethniques, notamment des déclarations attribuées à des responsables de haut rang et des personnalités publiques vantant la pureté ethnique turkmène, ce qui aurait un effet très néfaste sur la population compte tenu de restrictions draconiennes des libertés d’opinion et d’expression qui font qu’il n’est pas possible de s’opposer à un tel discours. Le Comité s’inquiète entre autres du fait que ce discours est incompatible avec les principes fondamentaux de l’égalité raciale et ethnique qui sous‑tendent la Convention (art. 4).

Le Comité invite instamment l’État partie à honorer l’obligation qui lui est faite à l’article 4 c) de la Convention de ne pas permettre aux autorités publiques ni aux institutions publiques nationales ou locales d’inciter à la discrimination raciale ou de l’encourager. Il souhaite recevoir des renseignements plus détaillés sur l’application concrète de l’article 4 de la Convention dans sa totalité.

318.Le Comité est vivement préoccupé par les informations persistantes relatives à la politique de «turkménisation» suivie par l’État partie et appliquée au moyen de différentes mesures dans les domaines de l’emploi et de l’éducation et dans la vie politique (art. 2 et 5).

Le Comité rappelle que les politiques d’assimilation forcée constituent des actes de discrimination raciale et des violations graves de la Convention. Il exhorte l’État partie à respecter et à protéger l’existence et l’identité culturelle de toutes les minorités nationales et ethniques qui vivent sur son territoire. Il souhaite recevoir des informations détaillées sur les mesures prises à cet effet, notamment celles visant à faire face à la situation de la minorité baloutche, dont l’existence en tant que communauté culturelle distincte serait menacée.

319.Le Comité note avec préoccupation que, selon certaines informations et compte tenu du paragraphe 2 e) de la résolution 59/206 de l’Assemblée générale en date du 22 décembre 2004, les minorités nationales ethniques sont victimes de restrictions sévères dans le domaine de l’emploi, en particulier dans le secteur public. Il s’inquiète en particulier d’informations faisant état de l’exclusion de nombreuses personnes qui ne sont pas turkmènes de souche de la fonction publique et de l’imposition du «critère de la troisième génération» aux personnes qui souhaitent accéder à l’enseignement supérieur et à des postes dans le secteur public (art. 2 et 5).

Le Comité invite l’État partie à vérifier si «le critère de la troisième génération» est appliqué et à garantir le droit du travail sans discrimination aucune fondée sur l’origine nationale ou ethnique. L’État partie est prié de fournir des données statistiques fiables sur l’emploi des membres des minorités nationales, en particulier dans le secteur public.

320.Le Comité note avec une vive préoccupation les informations selon lesquelles l’État partie a procédé à des déplacements forcés de populations, touchant en particulier des personnes de souche ouzbèke, vers des régions inhospitalières du Turkménistan. Il s’inquiète en outre des informations faisant état de restrictions à la liberté de circulation imposées au moyen de documents de voyage internes et de permis spéciaux que doivent détenir les personnes qui souhaitent se rendre dans les régions frontalières, mesure dont pâtissent particulièrement les membres des minorités nationales et ethniques (art. 2 et 5).

Le Comité invite l’État partie à s’abstenir de procéder à des déplacements forcés de populations et à réexaminer sa politique en la matière. L’État partie est prié de fournir des informations sur le nombre de personnes qui ont été réinstallées en application du décret présidentiel du 18 novembre 2002 et des dispositions pertinentes du Code pénal, sur leur origine ethnique, la date et le motif de leur réinstallation et leur lieu de résidence avant et après la réinstallation. Le Comité recommande en outre à l’État partie de lever ses restrictions à la liberté de circulation qui ont un effet disproportionné sur les membres de minorités nationales.

321.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles des personnes appartenant à des minorités nationales et ethniques sont empêchées d’exercer le droit de jouir de leur propre culture. Il s’inquiète en particulier de la fermeture présumée d’institutions culturelles appartenant aux minorités et de nombreuses écoles enseignant dans la langue des minorités, en particulier l’ouzbek, le russe, le kazakh et l’arménien et des possibilités de plus en plus limitées d’utiliser les langues des minorités dans les médias (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à l’État partie de respecter pleinement les droits culturels des personnes appartenant à des minorités nationales et ethniques. En particulier l’État partie devrait envisager la réouverture des écoles ouzbèkes , russes, kazakhs, arméniennes et autres enseignant dans la langue d’une minorité. Le Comité propose à l’État partie de reconsidérer l’obligation faite aux étudiants appartenant à des minorités nationales ou ethniques de porter le costume national turkmène et lui demande de fournir plus d’informations à ce sujet. l’État partie devrait faire en sorte que les membres des minorités nationales et ethniques ne soient pas soumis à une discrimination dans l’accès aux médias et qu’ils aient la possibilité de créer et d’utiliser leurs propres médias dans leur propre langue.

322.Le Comité note que l’accord bilatéral entre la Fédération de Russie et le Turkménistan de 2003 sur la double nationalité a été abrogé par l’État partie. Il note avec préoccupation que les personnes qui ont choisi la nationalité russe auraient été obligées de quitter rapidement le pays (art. 2 et 5).

Le Comité, soulignant que la privation de la citoyenneté sur la base de l’origine nationale ou ethnique constitue une violation de l’obligation d’assurer la jouissance sans discrimination du droit à la nationalité, invite instamment l’État partie à n’adopter aucune mesure de nature à enchaîner directement ou indirectement sur une telle privation. Il appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXX (2004) concernant les non ‑ressortissants et souhaite recevoir des informations plus détaillées quant au nombre de personnes touchées par cette mesure et aux conséquences concrètes sur leur vie.

323.Tout en étant conscient de la relation complexe entre l’appartenance ethnique et l’appartenance religieuse au Turkménistan, le Comité note avec préoccupation l’information selon laquelle les membres de groupes religieux ne jouissent pas pleinement de leur droit à la liberté de religion et que certaines confessions religieuses ne sont pas encore reconnues. Il note, cependant, l’assouplissement des règles d’enregistrement en 2004.

Le Comité rappelle à l’État partie l’obligation d’assurer à toutes les personnes la jouissance du droit à la liberté de religion sans discrimination fondée sur l’origine nationale ou ethnique, conformément à l’article 5 d) de la Convention. L’État partie devrait en conséquence respecter le droit des membres des religions reconnues et non reconnues d’exercer librement leur liberté de religion et d’autoriser les groupes religieux qui le souhaitent à s’enregistrer. Des informations détaillées devraient être fournies au Comité sur les religions actuellement reconnues au Turkménistan.

324.Le Comité se félicite de la déclaration du Gouvernement selon laquelle il accorderait la citoyenneté à environ 16 000 réfugiés qui résident au Turkménistan depuis quelques années, et le statut de résident permanent à 3 000 autres (art. 5).

Le Comité encourage l’État partie à poursuivre le processus de naturalisation sans discrimination fondée sur l’origine ethnique. Il recommande en particulier que le même traitement soit accordé aux réfugiés d’origine ethnique turkmène, ouzbèke ou autre comme ceux qui sont originaires d’Afghanistan. Le Comité souhaite recevoir des données détaillées ventilées par origine ethnique sur le résultat de ce processus.

325.Le Comité est vivement préoccupé par l’information selon laquelle l’État partie a adopté des mesures limitant de manière draconienne l’accès à la culture et à l’art étrangers, aux médias étrangers et à l’Internet. Tout en prenant acte de la suppression du visa de sortie en 2004, il demeure préoccupé par les restrictions imposées aux étudiants turkmènes qui souhaitent étudier à l’étranger (art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie de respecter la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre les informations et les idées de toutes espèces, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen, de façon à promouvoir la compréhension et la tolérance entre les nations et les groupes ethniques. Le Comité recommande également à l’État partie d’autoriser les étudiants à étudier à l’étranger et de fournir des informations détaillées sur les règlements et pratiques en vigueur concernant la reconnaissance des diplômes étrangers.

326.Le Comité note que la «Ruhnama» dominerait les programmes scolaires au Turkménistan. Il est préoccupé par le contenu de ce texte et souhaite en recevoir un exemplaire (art. 7)

Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les programmes scolaires favorisent la compréhension, la tolérance et l’amitié entre les nations et les groupes ethniques.

327.Le Comité note que depuis l’indépendance, aucune affaire de discrimination raciale n’a été soumise aux tribunaux. Selon certaines informations, les membres des minorités nationales et ethniques qui souffrent de discrimination raciale ne s’en plaignent pas devant les tribunaux par peur de représailles, par manque de confiance dans la police et dans les autorités judiciaires et parce que les autorités ne font pas preuve d’impartialité et de sensibilité dans les affaires de discrimination raciale (art. 6).

Le Comité recommande à l’État partie d’informer les victimes de leurs droits, notamment des recours disponibles, de faciliter leur accès à la justice, de garantir leur droit à une réparation juste et adéquate et de faire connaître les lois applicables. L’État partie devrait faire en sorte que ses autorités compétentes procèdent à une enquête rapide et impartiale sur les plaintes de discrimination raciale ou chaque fois qu’il y a des motifs sérieux de penser qu’il y a eu discrimination raciale sur le territoire. Les juges et les avocats, ainsi que les agents de la force publique devraient être formés en conséquence.

328.Tout en notant la déclaration de la délégation selon laquelle en 1996 l’État partie a créé un Institut des droits de l’homme, le Comité note que cette institution ne semble pas remplir les conditions requises pour être considérée comme une institution indépendante de défense des droits de l’homme au titre des principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) (résolution 48/134 de l’Assemblée générale) (art. 6).

Le Comité invite l’État partie à songer à créer une telle institution nationale indépendante de protection des droits de l’homme, avec pour mandat, en particulier, de surveiller le respect par le Gouvernement des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention.

329.Le Comité recommande à l’État partie de prendre en considération les sections pertinentes de la Déclaration et du Programme d’action de Durban en mettant en œuvre la Convention dans l’ordre juridique interne, notamment en ce qui concerne les articles 2 à 7, et qu’il fournisse dans son prochain rapport périodique des informations sur les plans d’action et autres mesures adoptés pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

330.Le Comité note que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention et recommande qu’il songe à la faire.

331.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité se réfère à la résolution 59/176 de l’Assemblée générale en date du 20 décembre 2004, dans laquelle l’Assemblée a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer le Secrétaire général par écrit, dans les meilleurs délais, de leur acceptation de cet amendement.

332.Le Comité recommande que les rapports des États parties soient rendus accessibles au public dès leur publication et que les conclusions adoptées par le Comité à l’issue de l’examen de ces rapports soient diffusées de la même manière en turkmène et dans les principales langues des minorités, en particulier le russe.

333.Le Comité invite l’État partie à tirer parti de l’assistance technique disponible dans le cadre des services consultatifs et d’assistance technique du Programme du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en vue de revoir ses lois et ses politiques sous l’angle des préoccupations formulées ci‑dessus par le Comité. Compte tenu de la situation qui règne au Turkménistan, le Comité recommande vivement à l’État partie d’adresser une invitation au Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, pour qu’il effectue une visite dans le pays.

334.En application du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 du Règlement intérieur du Comité, tel que modifié, le Comité invite l’État partie à l’informer de l’application des recommandations figurant aux paragraphes 317, 319, 320, 321 et 326 ci‑dessus dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes conclusions.

335.Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses sixième et septième rapports périodiques en un seul document le 29 octobre 2007.

RÉPUBLIQUE-UNIE DE TANZANIE

336.Le Comité a examiné les huitième à seizième rapports périodiques de la Tanzanie, soumis en un seul document (CERD/C/452/Add.7) à ses 1713e et 1714e séances (CERD/C/SR.1713 et 1714), tenues les 9 et 10 août 2005. À sa 1725e séance (CERD/C/SR.1725), tenue le 17 août 2005, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

337.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport soumis par l’État partie ainsi que les renseignements supplémentaires que la délégation a fournis oralement. Il doit cependant regretter que le rapport ne donne pas suffisamment de renseignements sur les mesures prises pour donner effet aux dispositions de la Convention.

338.Le Comité a noté avec appréciation la présence d’une délégation de haut niveau et s’est félicité des entretiens francs et constructifs qu’il a eus avec elle et de la possibilité qui lui était ainsi offerte de renouer le dialogue avec l’État partie.

339.Notant que le rapport lui était soumis avec 17 ans de retard, le Comité invite l’État partie à respecter pour ses rapports futurs les délais qui lui sont impartis.

B. Aspects positifs

340.Le Comité constate que la Tanzanie continue d’accueillir plus de 600 000 réfugiés, soit la population de réfugiés la plus nombreuse d’Afrique malgré un certain recul du phénomène.

341.Le Comité est conscient que la Tanzanie est un État multiethnique qui compte plus de 120 groupes ethniques et minoritaires et il prend note des efforts entrepris par le pays pour édifier un État où tous ces groupes vivraient en harmonie.

342.Le Comité se félicite de la création de la Commission des droits de l’homme et de la bonne gouvernance, qui a notamment compétence pour faire enquête sur les plaintes pour violation des droits de l’homme et diffuser des renseignements sur les droits de l’homme.

343.Le Comité prend acte du rôle que jouent les ward tribunals dans l’administration de la justice au niveau local, qui donnent de la promptitude à l’action judiciaire et la rendent accessible à la population.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

344.Le Comité prend note des raisons qu’a présentées l’État partie pour expliquer pourquoi il n’a pas rassemblé de données détaillées sur les groupes ethniques qui composent sa population, mais il constate que l’absence de statistiques sur la composition de la population fait qu’il est impossible d’avoir un tableau complet de la société tanzanienne dans toute sa complexité.

Le Comité recommande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique l’évaluation au moins approximative de la composition ethnique et linguistique de sa population et du nombre de non ‑ressortissants ; à cet égard, il attire l’attention de l’État partie sur le paragraphe 8 de ses directives pour la présentation des rapports et sur sa recommandation générale XXIV (1999).

345.Le Comité note que l’article 13 de la Constitution tanzanienne interdit la discrimination raciale et que son article 9 impose aux organes de l’État de garantir l’égalité, mais il s’inquiète de l’absence dans l’État partie de législation visant expressément la discrimination raciale (art. 1 et 2).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une législation expresse sur la discrimination raciale donnant effet aux dispositions de la Convention et, notamment, de définir la discrimination raciale en termes légaux dans le sens de l’article premier de la Convention.

346.Gardant à l’esprit que l’État partie est doté d’un système juridique double, le Comité s’inquiète que la Convention n’ait pas été intégrée au droit interne et que son application directe dans l’État partie ne soit pas évidente (art. 2).

Le Comité recommande fortement à l’État partie d’envisager d’incorporer la Convention dans son ordre juridique interne.

347.Le Comité prend note de l’alinéa 1) du paragraphe b) de l’article 63 du Code pénal mais s’inquiète de l’insuffisance des dispositions pénales donnant expressément suite à l’article 4 de la Convention (art. 4).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter, à la lumière de sa recommandation générale XXV (1993) une législation incorporant pleinement dans son ordre juridique interne l’article 4 de la Convention.

348.Le Comité se réjouit que la mutilation génitale des femmes ait été érigée en crime dans l’État partie en 1998, mais il reste préoccupé par le fait que cette pratique reste courante dans certaines communautés ethniques (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur la mutilation génitale des femmes. Il lui recommande également de renforcer les mesures qu’il a prises pour en faire disparaître la pratique, grâce notamment à des programmes de sensibilisation visant à faire évoluer les attitudes, en consultation avec les communautés traditionnelles.

349.Le Comité note avec inquiétude que l’État partie ne donne aucun renseignement sur l’expropriation de certains groupes ethniques de leurs territoires ancestraux, de leur déplacement et leur réinstallation forcés (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de donner des renseignements détaillés sur l’expropriation des terres de certains groupes ethniques, sur les indemnisations versées et sur la situation de ces groupes après leur éviction.

350.Le Comité regrette de ne pas disposer de renseignements sur le nombre de non‑ressortissants qui vivent dans l’État partie ni sur leur statut du point de vue de l’exercice de leurs droits (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les non ‑ressortissants et leur statut − en ce qui concerne notamment les immigrants et les demandeurs d’asile − ainsi que sur les étrangers résidents de longue durée et la possibilité qu’ils ont d’acquérir la citoyenneté, conformément à sa recommandation générale XXX (2004).

351.Le Comité constate également avec inquiétude qu’aucun renseignement n’est fourni sur certains groupes ethniques vulnérables, notamment les populations nomades et semi‑nomades − par exemple les Barbaigs, les Massaïs et les Hadzabes − quant aux difficultés qu’ils pourraient rencontrer en raison de leur mode de vie particulier, ni sur les mesures spéciales prises pour garantir dans leur cas l’exercice des droits de l’homme (art. 5 et 2).

Le Comité recommande à l’État partie de donner des renseignements détaillés sur la situation des groupes ethniques nomades et semi ‑nomades et sur les mesures spéciales qu’il aurait éventuellement prises pour garantir dans leur cas l’exercice des droits que leur reconnaît la Convention, notamment la liberté de mouvement et le droit de participer aux décisions qui les touchent.

352.Le Comité constate avec inquiétude que, selon les informations qu’il a reçues de source sûre, certains réfugiés ont été renvoyés de force dans des pays où il y a de bonnes raisons de croire que leurs droits fondamentaux seront gravement violés (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de donner des renseignements sur la situation des réfugiés, sur le fondement légal de leur déportation et sur la protection juridique qui leur est accordée, y compris le droit à l’aide juridictionnelle et le droit de faire appel des ordonnances de déportation. Le Comité prie instamment l’État partie de s’assurer, selon le paragraphe b) de l’article 5 de la Convention, qu’aucun réfugié n’est renvoyé de force dans un pays où il y a de bonnes raisons de croire que ses droits fondamentaux seront gravement violés.

353.Le Comité est préoccupé par les indications selon lesquelles des réfugiés, notamment les femmes, feraient l’objet d’arrestations et de détentions arbitraires, de brutalités et de mauvais traitements de la part des fonctionnaires chargés de l’application des lois, ainsi que par l’absence d’enquête sur ce genre d’affaires (art. 5 et 6).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour faire disparaître toute forme de mauvais traitement infligé par les fonctionnaires chargés de l’application des lois à des réfugiés, en particulier les femmes, et de faire procéder promptement à des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales sur toute présomption de mauvais traitements de réfugiés. Il lui recommande aussi de poursuivre et de punir les personnes responsables de ce genre de mauvais traitements et d’indemniser les victimes.

354.Le Comité note que l’État partie a entrepris de réformer son secteur judiciaire et de s’interroger sur l’accessibilité de la justice, mais il s’inquiète des difficultés qu’éprouvent particulièrement les pauvres et les membres des groupes minoritaires à recourir au système judiciaire (art. 5 et 6).

Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place des dispositifs améliorant la capacité et l’efficacité de l’appareil judiciaire pour garantir à tous sans exclusive l’accès à la justice, et d’établir des mécanismes mettant l’aide juridictionnelle à la disposition de tous les membres des groupes vulnérables.

355.Les questions religieuses relèvent des compétences du Comité lorsqu’elles sont liées à l’ethnicité et à la discrimination raciale. À cet égard, le Comité s’inquiète de ne pas disposer de renseignements sur la composition ethnoreligieuse de la population de l’État partie ni sur les tensions qui existeraient entre groupes ethnoreligieux (art. 5 et 7).

Le Comité recommande à l’État partie de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur la situation des communautés ethnoreligieuses et sur les mesures prises pour favoriser la tolérance entre elles.

356.Le Comité regrette de ne pas disposer de renseignements suffisamment détaillés sur l’indépendance, les compétences et l’efficacité réelle de la Commission des droits de l’homme et de la bonne gouvernance. Il note qu’alors que sa charge a été instituée en 1966, le Médiateur n’a été saisi d’aucune plainte pour discrimination raciale (art. 6).

Le Comité recommande à l’État partie de présenter dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur l’indépendance, les compétences et les résultats effectifs de la Commission des droits de l’homme et de la bonne gouvernance. Il l’encourage à renforcer cette institution conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) (résolution 48/134 de l’Assemblée générale) et à la doter de ressources suffisantes. Il lui recommande d’autre part de faire largement connaître l’existence de cette institution, notamment ses compétences en matière d’enquête sur les violations des droits de l’homme.

357.Le Comité constate l’absence de renseignements sur les plaintes pour discrimination raciale et l’inexistence de la jurisprudence dans cette matière (art. 6 et 7).

Le Comité rappelle que l’absence d’affaires peut s’expliquer par le fait que les victimes manquent d’informations sur les recours qui leur sont offerts; il recommande donc à l’État partie de prévoir dans la législation nationale des dispositions contre toute violation de la Convention et sur les recours offerts éventuellement, et d’informer l’ensemble de l’opinion publique des droits existants et des recours disponibles en cas d’infraction. Il lui recommande enfin de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plaintes et les affaires apparues dans l’ entretemps .

358.Le Comité recommande à l’État partie de prendre en considération les passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban lorsqu’il donne suite à la Convention dans son ordre juridique interne, en ce qui concerne notamment les articles 2 à 7 de celle‑ci. Il lui recommande également d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures qu’il aura prises pour donner suite à la Déclaration et au Programme d’action.

359.Le Comité demande que le rapport de l’État partie et ses propres observations soient largement diffusés dans tout le pays et que le prochain rapport périodique, avant de lui être présenté, soit porté à l’attention des organisations non gouvernementales qui y travaillent.

360.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111, concernant le financement de ses sessions par le budget ordinaire de l’Organisation des Nations Unies. À cet égard, il rappelle les dispositions de la résolution 59/176 du 20 décembre 2004 dans laquelle l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement en question et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement.

361.En application du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 de son propre règlement, le Comité prie l’État partie de l’informer de la suite donnée aux recommandations figurant ci‑dessus aux paragraphes 348, 352 et 353 dans l’année suivant l’adoption des présentes conclusions.

362.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses dix‑septième et dix‑huitième rapports périodiques en un seul document le 26 novembre 2007 et d’y traiter tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

VENEZUELA (RÉPUBLIQUE BOLIVARIENNE DU)

363.Le Comité a examiné les quatorzième à dix‑huitième rapports périodiques de la République bolivarienne du Venezuela – qui auraient dû lui être présentés les 4 janvier 1996, 1998, 2000, 2002 et 2004 – soumis en un seul document (CERD/C/476/Add.4) à ses 1703e et 1704e séances (CERD/C/SR.1703 et 1704), tenues les 2 et 3 août 2005. À sa 1725e séance (CERD/C/SR.1725), tenue le 17 août 2005, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

364.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie et constate que celui‑ci s’est fait représenter par une délégation de fonctionnaires des différentes administrations publiques responsables des domaines couverts par la Convention. Il se déclare satisfait de la qualité du dialogue qui s’est instauré de nouveau avec la République bolivarienne du Venezuela. Il remercie la délégation des réponses franches et détaillées qu’elle a données aux nombreuses questions qui lui étaient posées.

365.Le Comité a conscience des efforts qu’a déployés l’État partie pour suivre les directives pour la préparation de rapports mais constate que le document à l’examen ne répond pas à certaines des préoccupations et des recommandations que contenaient ses observations finales précédentes.

B. Aspects positifs

366.Le Comité prend note avec satisfaction des droits et des principes consacrés dans la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela de 1999, en particulier le préambule, qui énonce la nature multiethnique et multiculturelle de la société vénézuélienne ainsi que l’article 21 et le chapitre VIII qui garantissent les droits des peuples autochtones, notamment le droit à une éducation bilingue interculturelle, le droit à la médecine traditionnelle et le droit de participer à la vie politique.

367.Le Comité note avec satisfaction que la législation récemment adoptée par l’État partie au niveau fédéral et au niveau des États s’inspire des principes fondamentaux de la Constitution et développe les garanties de non‑discrimination raciale et ethnique.

368.Le Comité prend note de la création d’institutions spécialisées chargées de lutter contre la discrimination raciale, par exemple la Commission présidentielle de lutte contre la discrimination raciale et toutes les autres formes de discrimination dans le système éducatif vénézuélien, le Groupe national de coordination pour la santé des autochtones, qui relève du Ministère de la santé et du développement social, et le Département de l’éducation autochtone qui relève du Ministère de l’éducation, de la culture et des sports.

369.Le Comité constate avec satisfaction que les populations autochtones sont représentées à l’Assemblée nationale, qui compte au moins trois députés autochtones avec leurs suppléants, élus par les autochtones selon leurs traditions et leurs coutumes.

370.Le Comité note avec intérêt l’existence de tribunaux spéciaux chargés de régler les litiges selon les traditions et les coutumes autochtones ainsi que la création du poste de médiateur spécial pour les questions autochtones.

371.Le Comité prend note avec satisfaction du décret présidentiel no 1795 du 27 mai 2002 concernant la protection des langues autochtones. Il note que les autochtones peuvent utiliser leur propre langue dans leurs rapports avec les autorités ou disposer, le cas échéant, d’un interprète officiel, et que la Constitution a été traduite en wayuu.

372.Le Comité se félicite que l’article 31 de la Constitution reconnaisse le droit de faire appel aux organes internationaux créés par les traités relatifs aux droits de l’homme et que l’État partie ait fait en 2003, la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention en réponse à une demande du Comité; il espère que l’opinion publique est dûment informée des possibilités et des procédures que prévoit l’article en question.

373.Le Comité se félicite que l’État partie ait ratifié en 2002 la Convention no 169 (1989) de l’Organisation internationale du Travail relative aux peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants.

374.Le Comité note avec satisfaction que l’un des objectifs de la loi sur la responsabilité de la radio et de la télévision de 2004 est de favoriser la tolérance entre les peuples et les groupes ethniques.

375.Le Comité prend acte avec satisfaction des progrès des relations entre le Gouvernement et les organisations non gouvernementales représentant les Vénézuéliens d’ascendance africaine et de la proclamation du 10 mai comme Journée nationale des Afro‑Vénézuéliens, qui est une illustration de l’amélioration de ces relations.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

376.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a pas fourni de données statistiques détaillées sur les Vénézuéliens d’ascendance africaine. Il rappelle que ces renseignements sont indispensables pour évaluer le niveau d’application de la Convention et contrôler les politiques qui affectent les minorités.

Le Comité recommande à l’État partie de donner dans son prochain rapport périodique les renseignements statistiques détaillés sur les Vénézuéliens d’ascendance africaine qui permettront d’évaluer plus précisément la situation des intéressés.

377.Le Comité constate que la pièce d’identité délivrée aux autochtones selon les règlements pris en vertu de la loi portant organisation de l’identification des autochtones indique le nom du groupe ethnique, du peuple et de la communauté auxquels l’intéressé appartient.

Le Comité demande à l’État partie, conformément à sa recommandation générale VIII, de veiller à ce que la pièce d’identité délivrée aux autochtones soit fondée sur les déclarations de l’intéressé lui ‑même .

378.Se référant à l’article 369 du projet de Code pénal, qui réprime les actes de discrimination raciale, le Comité souhaiterait recevoir des renseignements sur les plaintes pour discrimination raciale et sur les actions en justice entreprises par les victimes ou en leur nom.

Le Comité invite l’État partie à adopter le projet de Code pénal dès que possible et le prie de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements statistiques détaillés sur les affaires de discrimination raciale dans lesquelles les dispositions de droit interne ont été appliquées et sur les peines imposées à cette occasion.

379.N’oubliant pas les efforts que déploie l’État partie, le Comité se réaffirme préoccupé par la persistance des disparités sociales et économiques structurelles profondes qui compromettent l’exercice des droits de l’homme, notamment des droits économiques et sociaux, et qui touchent les populations autochtones et les Vénézuéliens d’ascendance africaine.

Le Comité invite l’État partie à redoubler d’efforts pour améliorer le statut économique et social des populations autochtones et des Vénézuéliens d’ascendance africaine, en ce qui concerne par exemple le droit au logement, le droit aux services de santé et d’assainissement, le droit au travail et le droit à une alimentation suffisante, afin de lutter contre la discrimination raciale et de faire disparaître les disparités structurelles.

380.Le Comité s’inquiète vivement du fait qu’entre 1995 et 2003 61 personnes, la plupart autochtones ou d’ascendance africaine, ont été tuées dans des litiges fonciers, vraisemblablement par des groupes armés privés (des sicarios), et du fait que le problème se soit aggravé depuis 2001.

Le Comité demande à l’État partie de prendre d’urgence des mesures pour mettre fin aux violences de ce type, qui touchent essentiellement les autochtones et les personnes d’ascendance africaine, notamment grâce à un mécanisme de surveillance indépendant compétent pour enquêter sur les affaires de cette nature et faire en sorte que les auteurs ne restent pas impunis.

381.Le Comité relève avec inquiétude dans le rapport de l’État partie que les populations autochtones du haut Onéroque et des bassins du Casiquiare et du Gaqinia‑Río Negro rencontrent des difficultés de diverse nature. Plus précisément, il est établi que dans les centres de prospection illégale de l’or des enfants et des adolescents autochtones font l’objet d’une exploitation par le travail et sont soumis aux pires formes du travail des enfants, dont la servitude, l’esclavage, la prostitution, la traite et la vente.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre d’urgence des mesures pour régler cette situation et de donner des renseignements sur la manière dont les mesures prises ont été appliquées.

382.Le Comité prend note de ce que fait l’État partie pour délimiter les terres autochtones, par exemple l’adoption de la loi sur la protection et la démarcation de l’habitat et du territoire des peuples autochtones, mais est préoccupé par le fait que l’utilisation et la possession des terres et des ressources autochtones restent menacées et limitées en pratique par les agressions répétées d’individus et de groupes privés qui cherchent à évincer les populations autochtones de leurs terres.

À la lumière de la recommandation générale XXIII sur les droits des populations autochtones, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour reconnaître et protéger les droits qu’ont les populations autochtones de posséder, mettre en valeur, maîtriser et exploiter leurs terres, leurs territoires et leurs ressources. Il l’invite à cet égard à donner des renseignements sur la manière dont se règlent les conflits d’intérêt sur les terres et les ressources autochtones, notamment les litiges dans lesquels des groupes autochtones ont été évincés de leurs terres.

383.Le Comité recommande à l’État partie de prendre en considération les passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban lorsqu’il met en œuvre la Convention, notamment ses articles 2 à 7, dans son droit interne. Il lui recommande également de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures qu’il aura prises pour donner effet au niveau national à la Déclaration et au Programme en question, en ce qui concerne notamment l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan national d’action.

384.L’État partie a informé le Comité qu’il s’occuperait plus activement de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité attire l’attention de l’État partie sur la résolution 59/176 dans laquelle l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement.

385.Le Comité invite l’État partie à envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

386.Le Comité recommande que les rapports de l’État partie soient rendus publics dès qu’ils lui sont présentés et que ses propres observations finales soient largement diffusées.

387.En vertu du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 de son propre Règlement intérieur, tel qu’amendé, le Comité prie l’État partie de l’informer de la suite donnée aux recommandations figurant ci‑dessus aux paragraphes 376, 380 et 381 dans l’année suivant l’adoption des présentes observations finales.

388.Le Comité recommande que l’État partie présente ses dix‑neuvième et vingtième rapports dans un document unique le 4 janvier 2008.

ZAMBIE

389.Le Comité a examiné les douzième à seizième rapports périodiques de la Zambie, soumis en un seul document (CERD/C/452/Add.6/Rev.1), à ses 1707e et 1708e séances (CERD/C/SR.1707 et 1708), tenues les 4 et 5 août 2005. À ses 1721e et 1723e séances (CERD/C/SR.1721 et 1723), tenues les 15 et 16 août 2005, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

390.Le Comité se félicite du rapport présenté par l’État partie, dont la qualité montre que celui‑ci est disposé à reprendre le dialogue. Il note avec satisfaction que le document à l’examen suit les directives concernant la présentation des rapports et donne des renseignements pertinents sur les circonstances et les difficultés qui caractérisent la mise en œuvre de la Convention.

391.Le Comité sait gré à la délégation des efforts qu’elle a faits pour répondre aux nombreuses questions qu’ont posées ses membres et encourage l’État partie à s’efforcer encore dans les échanges futurs de donner des réponses de fond.

392.Rappelant que le rapport est en retard de neuf ans, le Comité invite l’État partie à respecter les délais de présentation de ses futurs rapports.

B. Aspects positifs

393.Le Comité note avec satisfaction que plusieurs institutions nationales ont été créées, notamment la Commission zambienne des droits de l’homme et l’Autorité des plaintes concernant la police.

394.Le Comité se félicite particulièrement du fait que la délégation ait accepté que la Commission zambienne des droits de l’homme participe au dialogue, manifestation supplémentaire de la volonté de l’État partie de s’entretenir avec le Comité de façon franche et constructive. Le Comité relève avec plaisir que la Commission en question et la société civile ont participé à l’élaboration du rapport à l’examen.

395.Le Comité prend acte avec satisfaction de l’attitude généreuse de l’État partie, qui accueille et protège plus de 271 000 réfugiés depuis plusieurs années.

396.Le Comité félicite l’État partie des efforts qu’il fait pour rendre ses tribunaux plus accessibles aux réfugiés, notamment la création de tribunaux spéciaux itinérants et d’unités spéciales de la police dans les camps et les villages de réfugiés.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

397.Le Comité se félicite de la création en 2003 de la Commission de révision de la Constitution mais se déclare une fois de plus contrarié par le fait que l’article 23 de la Constitution, qui autorise à déroger durablement à l’interdiction de la discrimination à l’égard des non‑ressortissants dans le domaine du droit des personnes et du droit coutumier, ne soit pas conforme aux dispositions de la Convention (art. 1).

Le Comité recommande à l’État partie de faciliter la révision de la Constitution et d’amender le paragraphe 4 de l’article 23 de celle ‑ci afin de poser l’interdiction absolue de la discrimination raciale. Il attire l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXX (2004) relative aux non ‑ressortissants . Il insiste d’autre part sur le fait que le respect du droit coutumier et des pratiques traditionnelles ne doit pas se traduire par une exception générale au principe de la non ‑discrimination , mais prendre la forme d’une reconnaissance positive des droits culturels.

398.Le Comité prend note de la déclaration de la délégation selon laquelle le Gouvernement a entrepris d’incorporer la Convention dans le droit interne, mais il s’inquiète une fois encore que cette démarche n’ait pas encore abouti (art. 2).

Le Comité invite l’État partie à procéder à l’incorporation des dispositions de la Convention dans son droit interne et lui demande des renseignements détaillés sur ses intentions à cet égard.

399.Le Comité s’inquiète particulièrement du fait que, selon l’article 11 de la Constitution, l’interdiction de la discrimination ne s’applique qu’à quelques droits, essentiellement civils et politiques, et que les principes directeurs de la politique d’État, qui font également partie de la Constitution, ne prévoient aucune clause antidiscriminatoire concernant les droits économiques, sociaux et culturels. Il regrette d’autre part de ne pas disposer de renseignements précis sur la législation interdisant la discrimination raciale dans la jouissance des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels et dans l’exercice pratique de ces droits (art. 1, 2 et 5).

Le Comité recommande à l’État partie de garantir à tous le droit d’être protégés de la discrimination dans la jouissance des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Il souhaite recevoir à ce propos des renseignements plus détaillés sur la législation actuelle et la manière dont elle est mise en pratique.

400.Le Comité prend note de l’amendement apporté à la Constitution en 1996, qui exige que le candidat à la présidence soit un Zambien né de Zambiens.

Le Comité recommande à l’État partie de réviser cette disposition pour la rendre pleinement conforme au paragraphe c) de l’article 5 de la Convention.

401.Le Comité note avec inquiétude que l’État partie a décidé de faire appel du jugement de la Haute Cour en l’affaire Roy Clarke c.Attorney ‑General annulant l’ordonnance de déportation d’un Britannique résidant depuis longtemps en Zambie au motif qu’il n’aurait pas été puni pour ses activités de journaliste s’il avait été zambien (art. 5, par. d), al. viii).

Le Comité rappelle que selon la Convention des différences de traitement fondées sur la citoyenneté sont discriminatoires si les critères de différenciation ne sont pas appliqués dans un dessein légitime et proportionnés à l’accomplissement de ce dessein. Il recommande à l’État partie de respecter la liberté d’expression sans aucune discrimination fondée sur la citoyenneté et de lui donner des renseignements détaillés sur la suite qu’il aura donnée à l’appel en question.

402.Le Comité prend note des efforts que fait l’État partie, notamment dans le cadre de l’Initiative zambienne, pour répondre aux besoins qui apparaissent dans les domaines de l’éducation, des soins de santé et de l’alimentation dans les régions qui accueillent une importante population de réfugiés. Il s’inquiète cependant du sort des milliers de réfugiés de longue date qui sont incapables de retourner dans leur pays d’origine, en particulier les Angolais, alors que la loi zambienne sur le contrôle des réfugiés de 1970 n’encourage pas leur insertion sur place (art. 5).

Le Comité invite l’État partie à revoir sa politique actuelle en matière de réfugiés afin d’améliorer les perspectives d’insertion locale des réfugiés de longue date. Il lui recommande de réviser la loi sur le contrôle des réfugiés et d’envisager de retirer la réserve qu’il a faite à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés .

403.Le Comité note avec inquiétude que la discrimination raciale exercée de facto par des acteurs non étatiques soulève pour l’État partie des difficultés quotidiennes (art. 4 et 5).

Le Comité invite instamment l’État partie à définir une stratégie face à ce problème, en collaboration avec la Commission zambienne des droits de l’homme et les autres parties intéressées.

404.Le Comité se déclare à nouveau inquiet devant le fait que le paragraphe b) de l’article 4 de la Convention n’ait pas encore été pleinement intégré dans le droit interne.

Le Comité recommande à l’État partie d’ériger en infraction tombant sous le coup de la loi la participation à des organisations encourageant ou incitant à la discrimination raciale.

405.Le Comité regrette de ne pas disposer de données statistiques sur les affaires de discrimination raciale dont les institutions zambiennes compétentes ont été saisies (art. 4 et 6).

L’État partie devrait donner dans son prochain rapport périodique des renseignements statistiques sur les plaintes pour discrimination raciale déposées auprès des tribunaux nationaux et de la Commission zambienne des droits de l’homme, et sur le sort qui leur a été réservé. Des renseignements sur des affaires précises devraient également être présentés.

406.Le Comité note que les plaintes pour discrimination raciale n’ont pas prospéré devant des institutions comme la Commission zambienne des droits de l’homme ou le Tribunal des relations industrielles parce qu’il était impossible de faire la preuve des faits de discrimination (art. 6).

Le Comité recommande que les plaintes pour discrimination raciale fassent l’objet d’une procédure complète, notamment lorsqu’elles sont associées à des plaintes pour violation d’autres droits, comme les droits liés au travail. Il recommande également à l’État partie de rester très attentif à l’éventualité d’une discrimination indirecte, que la Convention interdit également. Il l’encourage d’autre part à envisager d’établir le droit de la preuve en matière civile de telle sorte que dans les affaires de discrimination raciale, ce soit au défendeur de prouver qu’il était objectivement et raisonnablement justifié d’appliquer un traitement différent à l’intéressé si celui ‑ci a pu établir une présomption de faits de discrimination.

407.Le Comité se félicite des efforts que fait l’État partie dans le domaine de l’éducation relative aux droits de l’homme mais reste préoccupé par le fait que la plupart des gens qui vivent en Zambie ne connaissent pas leurs droits et ont donc du mal à demander réparation lorsqu’ils sont violés. Le fait que les victimes de la discrimination raciale se plaignent rarement devant les autorités compétentes peut s’expliquer notamment par les ressources limitées dont disposent les intéressés, par leur méfiance à l’égard de la police et des autorités judiciaires ou encore par le manque d’attention ou d’intérêt des autorités pour les affaires de discrimination raciale (art. 6).

L’État partie devrait redoubler d’efforts pour faire prendre conscience de leurs droits aux Zambiens, informer les victimes des voies de recours qui leur sont ouvertes, leur rendre la justice plus accessible et former dans le même sens les magistrats, les avocats et les personnels chargés de faire appliquer les lois.

408.Le Comité prend note avec inquiétude des difficultés de la Commission zambienne des droits de l’homme dont le rapport fait état, notamment le manque de personnel qualifié, l’insuffisance des moyens de transport, la centralisation et la lenteur de réaction des autorités publiques concernées à ses demandes d’intervention. Il relève cependant avec intérêt que l’État partie a l’intention de décentraliser les bureaux de la Commission et que le nouveau projet de constitution contient des dispositions tendant à donner plus d’efficacité au travail de cet organe.

Le Comité recommande à l’État partie de s’efforcer davantage de rendre la Commission des droits de l’homme plus efficace, notamment en lui affectant des ressources suffisantes. Les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) (résolution 48/134 de l’Assemblée générale) devraient être pris en considération dans la réforme constitutionnelle concernant la Commission des droits de l’homme. Le Comité souhaite disposer de renseignements détaillés sur la suite que les autorités publiques donnent aux recommandations de la Commission et sur les rapports qui se sont établis entre celle-ci et la société civile.

409.Le Comité recommande à l’État partie de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban lorsqu’il incorpore la Convention dans l’ordre juridique interne, notamment les articles 2 à 7, et de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans ou autres mesures qu’il aura adoptés pour donner suite au niveau national à la Déclaration et au Programme en question.

410.Le Comité note que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention et lui recommande d’envisager de le faire.

411.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité rappelle la résolution 59/176 du 20 décembre 2004 dans laquelle l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement.

412.Le Comité recommande à l’État partie de mettre à la disposition du grand public ses rapports périodiques dès leur soumission et de faire connaître de la même manière les conclusions du Comité.

413.En application du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 de son propre Règlement intérieur tel qu’amendé, le Comité demande à l’État partie de l’informer de la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant ci‑dessus aux paragraphes 401, 402 et 407 dans l’année suivant l’adoption des présentes observations finales.

414.Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses dix‑septième, dix‑huitième et dix‑neuvième rapports périodiques en un seul document le 5 mars 2009.

IV. SUIVI DE L’EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

415.Le Comité, à sa 1698e séance, tenue le 10 mars 2005, a adopté le mandat du Coordonnateur chargé des activités de suivi (voir le mandat figurant à l’annexe IV).

416.Le Comité, à sa 1699e séance, le 10 mars 2005, a décidé d’adresser au Représentant permanent du Botswana auprès de l’Office des Nations Unies à Genève la lettre suivante:

Lettre au Botswana

«Le 10 mars 2005

Monsieur le Représentant permanent,

Le Comité souhaite vous informer qu’il a examiné, à sa soixante‑sixième session en mars 2005, les réponses préliminaires communiquées par la République du Botswana dans sa lettre datée du 10 février 2005 concernant la mise en œuvre du paragraphe 301 des observations finales précédentes du Comité la concernant, adoptées en août 2002 (voir A/57/18).

Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements nombreux et détaillés fournis par la République du Botswana, en réponse à la demande formulée par le Comité dans ses lettres datées des 20 août et 23 septembre 2004. Il apprécie que l’État partie se montre disposé à poursuivre avec lui un dialogue constructif.

Le Comité prend note avec un intérêt particulier des précieuses informations fournies par l’État partie sur l’histoire du Botswana et ses implications en matière de territoires, de tribus et de représentation à la Chambre des chefs traditionnels. Le Comité comprend bien que les traditions et les coutumes constituent un patrimoine important pour le Botswana, mais il tient néanmoins à insister sur le fait que l’État partie devrait également tenir compte des obligations qu’il a contractées en vertu de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Le Comité se tient à son opinion que, dans leur version actuelle, la loi sur les territoires tribaux, la loi sur les chefferies et les articles 77 à 79 de la Constitution ont un caractère discriminatoire, notamment à l’égard des groupes ethniques qui sont subordonnés à une tribu dominante sur un territoire tribal et ne sont pas représentés sur un pied d’égalité à la Chambre des chefs traditionnels. Il note que la Haute Cour du Botswana, dans une décision adoptée le 23 novembre 2001, a déclaré que la loi sur les chefferies était discriminatoire et ordonné d’en modifier l’article 2, afin d’offrir une égalité de traitement et de protection à toutes les tribus.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour améliorer la représentation à la Chambre des chefs traditionnels et prend acte de la volonté de celui‑ci d’y renforcer la représentation territoriale plutôt qu’ethnique.

Le Comité entend toutefois souligner que, quel que soit le système choisi, il ne devrait pas y avoir de discrimination entre les groupes et qu’on ne devrait pas aboutir à une situation où certains groupes sont reconnus et d’autres non, seuls les intérêts de certains groupes étant pris en considération. À cet égard, le Comité insiste sur le fait que la Convention interdit la discrimination tant directe qu’indirecte, et appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXIV, selon laquelle les critères de reconnaissance des groupes devraient être appliqués de manière uniforme. Il note encore que, selon les informations dont il dispose, les régions qui ne sont pas de langue tswana auraient toutes rejeté le projet de loi.

L’État partie indique qu’il a entrepris de remanier certains des points de l’article 2 de la loi sur les chefferies qui avaient été déclarés discriminatoires par la Haute Cour et que le projet de loi sur la Chambre des chefs traditionnels sera amendé en conséquence. Le Comité souhaite être tenu pleinement informé du processus de réforme en cours et demande que des exemplaires des nouveaux projets de loi lui soient communiqués dès qu’ils seront disponibles. Il souhaite également recevoir des renseignements plus fournis sur la signification exacte des expressions “tribu dominante” et “accord historique de toutes les parties concernées”, désignant une situation dans laquelle tous les groupements tribaux vivant dans des territoires tribaux sont soumis à un chef suprême.

Permettez‑nous, Monsieur le Représentant permanent, de réaffirmer la volonté du Comité de poursuivre le dialogue constructif renoué avec votre gouvernement en 2002, et de souligner que les observations et les demandes d’informations complémentaires formulées par le Comité visent à garantir l’application de la Convention, en collaboration avec votre gouvernement.

Veuillez agréer, Monsieur le Représentant permanent, les assurances de ma très haute considération.

Le Président du Comité pour l’éliminationde la discrimination raciale,(Signé) Mario Yutzis

Le Coordonnateur du Comité pour l’élimination de ladiscrimination raciale chargé des activités de suivi,(Signé) Morten Kjaerum»

417.À sa 1700e séance, le 11 mars 2005, le Comité a adopté la décision suivante:

Décision 3 (66) concernant le Suriname

1.À sa soixante‑quatrième session, qui s’est tenue du 23 février au 12 mars 2004, le Comité a examiné les premier à dixième rapports périodiques du Suriname et s’est félicité de la possibilité qui lui était donnée d’ouvrir un dialogue constructif avec l’État partie.

2.Dans les observations finales qu’il a adoptées à l’issue de l’examen de ces rapports, le Comité a recommandé à l’État partie «de reconnaître légalement le droit des populations autochtones et tribales de posséder, mettre en valeur, contrôler et utiliser leurs terres et territoires communaux, et de participer à l’utilisation, la gestion et la conservation des ressources naturelles de ces terres», et «de s’efforcer, dans toute la mesure possible, de conclure des accords avec les populations concernées avant d’autoriser des concessions».

3.Le Comité a également adopté les conclusions et recommandations suivantes:

«Le Comité relève qu’en vertu du projet de loi sur les mines (Mining Act), les populations autochtones et tribales seront tenues d’accepterles activités minières sur leurs terres, après avoir conclu avec les exploitants un accord de compensation des dommages, et qu’en cas d’impossibilité de parvenir à un tel accord, il reviendra au pouvoir exécutif, et non judiciaire, de trancher la question. De façon plus générale, le Comité s’inquiète de ce que les populations autochtones et tribales ne pourraient pas, en tant que telles, saisir les tribunaux pour faire reconnaître leurs droits traditionnels, du fait de l’absence de reconnaissance légale de la personnalité juridique de ces populations.

Le Comité recommande que des recours devant les tribunaux ou toute instance indépendante spécialement créée à cet effet soient ouverts aux populations autochtones et tribales, aux fins de faire valoir leurs droits traditionnels de même que leur droit d’être consultées avant l’octroi de concessions et leur droit à indemnisation équitable pour tout dommage subi.».

4.Le projet révisé de loi sur les mines, qui a été approuvé par le Conseil des ministres surinamais à la fin de 2004 et qui devrait être adopté par l’Assemblée nationale dans les prochains mois, n’est peut‑être pas conforme aux recommandations du Comité.

5.Le Comité invite donc l’État partie à lui faire part, avant le 11 avril 2005, des observations que lui inspire son appréciation du projet de loi susmentionné.

6.Le Comité souhaite appeler une nouvelle fois l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXIII (1997) concernant les droits des populations autochtones. Il rappelle également les conclusions et recommandations qu’il a adoptées à l’issue de l’examen des premier à dixième rapports périodiques du Suriname. Il recommande à l’État partie de faire en sorte que le projet révisé de loi sur les mines soit conforme à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et aux recommandations formulées par le Comité.

7.Le Comité souhaite poursuivre le dialogue constructif qu’il a engagé avec le Suriname en 2004, et souligne que sa demande de clarification vise à garantir l’application de la Convention en coopération avec l’État partie.

9 mars 2005 1696 e séance

418.À sa 1728e séance, le 19 août 2005, le Comité a décidé de demander au Président d’adresser au Gouvernement des États‑Unis d’Amérique une lettre l’informant que le Comité avait examiné à titre préliminaire les demandes formulées par le Conseil national des Shoshones de l’Ouest et par les groupes de l’Ouest de la tribu shoshone Timbisha, de la colonie indienne de Winnemuca et de la tribu shoshone Yomba, tendant à ce que le Comité adopte des mesures d’alerte rapide et des procédures d’urgence face à la situation des populations autochtones shoshones de l’Ouest dans les États‑Unis d’Amérique.

419.Au nom du Comité, le Président s’est félicité du caractère franc et ouvert de la discussion préliminaire qui avait eu lieu le 8 août 2005 entre les représentants des États‑Unis d’Amérique et le groupe de travail du Comité sur les mesures d’alerte rapide et les procédures d’urgence, ainsi que le Coordonnateur chargé des activités de suivi et d’autres membres du Comité. Le Président a déclaré que le Comité avait pris note avec intérêt des assurances données par l’État partie que ses quatrième et cinquième rapports périodiques, attendus depuis le 20 novembre 2003, étaient en cours d’élaboration, et que des informations exhaustives relatives à la suite donnée aux observations finales du Comité de 2001 y figureraient. Il fallait toutefois déplorer que l’État partie ne soit pas en mesure de s’engager à présenter ces rapports à une date donnée.

420.Le Président a également souligné que le Comité avait constaté avec préoccupation que les populations autochtones shoshones de l’Ouest étaient privées de leurs droits traditionnels sur la terre et que l’effet combiné des mesures prises par l’État partie concernant le statut, l’utilisation et l’occupation des terres en question risquait de causer un préjudice irréparable à cette communauté.

421.À la lumière de ces informations, le Président a informé le Gouvernement des États‑Unis d’Amérique que de l’avis du Comité, l’ouverture d’un large dialogue sur ces questions contribuerait à clarifier la situation avant la présentation et l’examen des quatrième et cinquième rapports périodiques de l’État partie. Afin de faciliter ce dialogue, et conformément à l’article 9.1 de la Convention et à l’article 65 de son Règlement intérieur, le Comité a appelé l’attention du Gouvernement sur une liste de questions à laquelle il l’a prié de répondre avant le 31 décembre 2005, de manière que les réponses puissent être examinées à la soixante‑huitième session du Comité, qui devait se tenir du 20 février au 10 mars 2006.

422.À la même séance, le Comité a également décidé de demander au Président d’adresser au Gouvernement ukrainien une lettre l’informant que le Comité avait examiné à titre préliminaire la demande formulée par la Fondation pour la recherche et l’aide en faveur des populations autochtones de Crimée, tendant à ce que le Comité adopte des mesures d’alerte rapide et des procédures d’urgence face à la situation des Tatars de Crimée.

423.Après avoir rappelé les dispositions pertinentes de ses observations finales adoptées en 1998 et en 2001, et, conformément à l’article 9.1 de la Convention et à l’article 65 de son Règlement intérieur, le Comité a appelé l’attention de l’État partie sur une liste de questions à laquelle il l’a prié de répondre avant le 31 décembre 2005, de manière que le sujet puisse être examiné à la soixante‑huitième session du Comité.

424.Le Président a en outre réitéré la volonté du Comité de poursuivre le dialogue constructif engagé avec le Gouvernement ukrainien et de souligner que la demande d’informations complémentaires formulée par le Comité vise à garantir l’application de la Convention, en collaboration avec l’État partie. Le Comité a en outre rappelé à l’État partie que les dix‑septième et dix‑huitième rapports de l’Ukraine, à soumettre en un seul document, étaient attendus depuis le 6 avril 2004. Il a donc vivement encouragé l’État partie à soumettre le rapport périodique en retard dès que possible.

Notes

V. EXAMEN DE L’APPLICATION DES DISPOSITIONS DE LA CONVENTION DANS LES ÉTATS PARTIES DONT LES RAPPORTS SONT TRÈS EN RETARD

A. Rapports attendus depuis plus de 10 ans

425.Les États parties ci‑après ont au moins 10 ans de retard dans la présentation de leurs rapports:

Sierra Leone

Quatrième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1976, et le dernier, en 2004)

Libéria

Rapport initial et deuxième à quatorzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1977, et le dernier, en 2003)

Gambie

Deuxième à treizième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1982, et le dernier, en 2004)

Togo

Sixième à seizième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1983, et le dernier, en 2003)

Somalie

Cinquième à quinzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1984, et le dernier, en 2004)

Papouasie‑Nouvelle‑Guinée

Deuxième à douzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1985, et le dernier, en 2005)

Îles Salomon

Deuxième à douzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1985, et le dernier, en 2005)

République centrafricaine

Huitième à dix‑septième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1986, et le dernier, en 2004)

Mozambique

Deuxième à onzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1986, et le dernier, en 2004)

Afghanistan

Deuxième à onzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1986, et le dernier, en 2004)

Seychelles

Sixième à quatorzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1989, et le dernier, en 2005)

Éthiopie

Septième à quinzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1989, et le dernier, en 2005)

Congo

Rapport initial et deuxième à neuvième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1989, et le dernier, en 2005)

Antigua‑et‑Barbuda

Rapport initial et deuxième à huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1989, et le dernier, en 2003)

Sainte‑Lucie

Rapport initial et deuxième à huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1991, et le dernier, en 2005)

Maldives

Cinquième à onzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1993, et le dernier, en 2005)

B. Rapports attendus depuis plus de cinq ans

426.Les États parties ci‑après ont au moins cinq ans de retard dans la présentation de leurs rapports:

Tchad

Dixième à quatorzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1996, et le dernier, en 2004)

Monaco

Rapport initial et deuxième à cinquième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1996, et le dernier, en 2004)

Nicaragua

Dixième à quatorzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1997, et le dernier, en 2005)

République démocratique du Congo

Onzième à quinzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1997, et le dernier, en 2005)

Malawi

Rapport initial et deuxième à cinquième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1997, et le dernier, en 2005)

Émirats arabes unis

Douzième à seizième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1997, et le dernier, en 2005)

Burkina Faso

Douzième à seizième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1997, et le dernier, en 2005)

Namibie

Huitième à onzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1997, et le dernier, en 2003)

Bulgarie

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Inde

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Koweït

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Niger

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Pakistan

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Panama

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Philippines

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Serbie‑et‑Monténégro

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Swaziland

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Ex‑République yougoslave de Macédoine

Quatrième à septième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Pérou

Quatorzième à dix‑septième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Burundi

Onzième à quatorzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Cambodge

Huitième à onzième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1998, et le dernier, en 2004)

Iraq

Quinzième à dix‑huitième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1999, et le dernier, en 2005)

Cuba

Quatorzième à dix‑septième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1999, et le dernier, en 2005)

Gabon

Dixième à treizième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1999, et le dernier, en 2005)

Jordanie

Treizième à seizième rapports périodiques (attendus, le premier, en 1999, et le dernier, en 2005)

C. Décisions prises par le Comité pour assurer la présentation des rapports des États parties

427.À ses soixante‑sixième et soixante‑septième sessions, le Comité a examiné la question de la présentation tardive et de la non‑présentation par les États parties des rapports qu’ils ont l’obligation de présenter en vertu de l’article 9 de la Convention.

428.À sa quarante‑deuxième session, le Comité, ayant souligné que les retards intervenant dans la présentation des rapports par les États parties le gênaient pour suivre l’application de la Convention, a décidé de continuer de procéder à l’examen de la mise en œuvre des dispositions de la Convention par les États parties dont les rapports étaient attendus depuis cinq ans ou plus. Conformément à une décision prise à sa trente‑neuvième session, le Comité a décidé que, pour ce faire, il se fonderait sur le dernier en date des rapports présentés par l’État partie concerné et sur son examen par le Comité. À sa quarante‑neuvième session, le Comité a décidé de procéder aussi à l’examen de la mise en œuvre des dispositions de la Convention par les États parties dont les rapports initiaux étaient attendus depuis cinq ans ou plus. Le Comité est convenu qu’à défaut de rapport initial il examinerait à ce titre tous renseignements communiqués par l’État partie à d’autres organes des Nations Unies ou, faute de tels renseignements, les rapports et informations établis par des organes des Nations Unies. Dans la pratique, le Comité examine également des informations pertinentes émanant d’autres sources, notamment des organisations non gouvernementales, qu’il s’agisse d’un rapport initial ou d’un rapport périodique très en retard.

429.À l’issue de sa soixante‑cinquième session, le Comité a prévu d’examiner, à sa soixante‑sixième session, l’application de la Convention dans les États parties ci‑après, dont les rapports périodiques étaient très en retard: Bosnie‑Herzégovine, El Salvador, Éthiopie, Nicaragua et Papouasie‑Nouvelle‑Guinée. El Salvador a été retiré de la liste avant la soixante‑sixième session après avoir soumis un rapport. L’examen de l’application de la Convention en Bosnie‑Herzégovine, en Éthiopie et au Nicaragua a été reporté à la demande de ces États parties qui ont indiqué leur intention de présenter sous peu les rapports concernés. À sa 1695e séance, le Comité a examiné l’application de la Convention en Papouasie‑Nouvelle‑Guinée (voir par. 431).

430.À l’issue de sa soixante‑sixième session, le Comité a prévu d’examiner, à sa soixante‑septième session, la mise en œuvre de la Convention dans les États parties ci‑après, dont les rapports initiaux et les rapports périodiques étaient très en retard: Bosnie‑Herzégovine, Malawi, Mozambique, Sainte‑Lucie et Seychelles. La Bosnie‑Herzégovine a été retirée de la liste avant la soixante‑septième session après avoir soumis un rapport. Dans le cas du Mozambique, l’examen a été reporté à la demande de l’État partie, qui a indiqué son intention de présenter le rapport concerné avant le 31 décembre 2005. Le Comité a examiné la mise en œuvre de la Convention au Malawi à sa 1712e séance, et aux Seychelles et à Sainte‑Lucie à sa 1719e séance (voir par. 432 à 434).

D. Décisions

431.À sa 1695e séance, le 8 mars 2005, le Comité a décidé de demander au Président d’adresser une lettre au Représentant permanent de la Papouasie‑Nouvelle‑Guinée auprès de l’Organisation des Nations Unies. Dans une lettre datée du 11 mars 2005, le Président a informé le Représentant permanent que le Comité avait examiné la situation de la Papouasie‑Nouvelle‑Guinée en l’absence d’un rapport. Il a de plus réitéré l’appel que le Comité avait lancé en 2003 demandant instamment une reprise du dialogue interrompu depuis 1984 et, à cette fin, engageant l’État partie à soumettre un rapport conformément à l’article 9 de la Convention. Le Comité regrettait que, malgré ses demandes renouvelées, la Papouasie‑Nouvelle‑Guinée ne se soit pas encore acquittée de ses obligations au titre du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention. Pour faciliter l’examen de l’application de la Convention auquel le Comité procédera à sa soixante‑huitième session, le Président a joint à sa lettre une liste de questions, élaborée par le Comité, en sollicitant une réponse avant le 30 novembre 2005. Le Comité appelait de nouveau l’attention de l’État partie sur la possibilité de demander l’assistance technique offerte dans le cadre du programme de services consultatifs et d’assistance technique du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

432.À sa 1712e séance, le 9 août 2005, le Comité a décidé de demander au Président d’adresser une lettre au Représentant permanent du Malawi auprès de l’Organisation des Nations Unies. Dans une lettre datée du 19 août 2005, le Président a informé l’État partie que le Comité avait examiné la mise en œuvre de la Convention au Malawi en l’absence d’un rapport et a vivement déploré le fait que le Malawi soit très en retard dans la présentation de son rapport initial et de ses deuxième à cinquième rapports périodiques au Comité, attendus, le premier, en 1997 et le dernier, en 2005. Afin de faciliter l’ouverture d’un dialogue sur les mesures adoptées par le Malawi en vue de mettre en œuvre la Convention, le Comité a décidé d’adresser à l’État partie une liste de questions à laquelle il l’a prié de répondre par écrit avant le 31 janvier 2006. Dans l’éventualité où aucune réponse n’aurait été reçue à cette date, le Comité adopterait ses observations finales concernant le Malawi au titre de sa procédure de bilan.

433.À sa 1719e séance, le 12 août 2005, le Comité a décidé de demander au Président d’adresser une lettre au Représentant permanent des Seychelles auprès de l’Organisation des Nations Unies. Dans une lettre datée du 19 août 2005, le Président a informé l’État partie que le Comité avait examiné la mise en œuvre de la Convention aux Seychelles en l’absence d’un rapport. Le Président a déploré que le dialogue entre le Comité et les Seychelles soit interrompu depuis 1988. Afin de faciliter la reprise du dialogue, le Comité a décidé d’adresser à l’État partie une liste de questions à laquelle il l’a prié de répondre par écrit avant le 31 janvier 2006. Dans l’éventualité où aucune réponse n’aurait été reçue à cette date, le Comité adopterait ses observations finales concernant les Seychelles au titre de sa procédure de bilan. Le Comité appelait l’attention de l’État partie sur la possibilité de demander l’assistance technique offerte dans le cadre du programme de services consultatifs et d’assistance technique du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

434.À la même séance, le Comité a en outre décidé de demander au Président d’adresser une lettre au Représentant permanent de Sainte‑Lucie auprès de l’Organisation des Nations Unies. Dans une lettre datée du 19 août 2005, le Président a informé l’État partie que le Comité avait une nouvelle fois examiné la mise en œuvre de la Convention à Sainte‑Lucie en l’absence d’un rapport. Il a rappelé que le Comité avait déjà examiné la situation à Sainte‑Lucie sans disposer d’un rapport à sa soixante‑quatrième session, en mars 2004, et qu’il avait décidé à sa soixante‑cinquième session, en août 2004, de publier ses observations finales provisoires dans son rapport annuel à l’Assemblée générale. Le Président a vivement déploré le fait que Sainte‑Lucie soit très en retard dans la présentation de son rapport initial et de ses deuxième à septième rapports périodiques au Comité, attendus, le premier, en 1991 et le dernier, en 2003, à publier en un seul document, et n’ait encore donné aucune indication concernant l’état d’avancement de ce rapport. Le Président a prié le Gouvernement saint‑lucien d’indiquer au Comité s’il souhaitait demander l’assistance technique offerte dans le cadre du programme de services consultatifs et d’assistance technique du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, aux fins de l’élaboration du rapport en retard. Afin de faciliter la reprise du dialogue, le Comité a décidé d’adresser à l’État partie une liste de questions à laquelle il l’a prié de répondre par écrit avant le 31 janvier 2006. Dans l’éventualité où aucune réponse n’aurait été reçue à cette date, le Comité adopterait ses observations finales concernant Sainte‑Lucie au titre de sa procédure de bilan.

Note

VI. EXAMEN DES COMMUNICATIONS PRÉSENTÉES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 14 DE LA CONVENTION

435.En vertu de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, les personnes ou groupes de personnes qui s’estiment victimes de violations par un État partie de l’un quelconque des droits énoncés dans la Convention et qui ont épuisé tous les recours internes disponibles peuvent adresser des communications écrites au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale. On trouvera à l’annexe I la liste des 46 États parties qui ont reconnu la compétence du Comité pour examiner ces communications. Pendant la période considérée, un autre État, la Géorgie, a fait la déclaration prévue à l’article 14.

436.Les séances du Comité au cours desquelles sont examinées les communications qui lui sont soumises en vertu de l’article 14 de la Convention se tiennent à huis clos (art. 88 du Règlement intérieur du Comité). Tous les documents en rapport avec les travaux du Comité au titre de l’article 14 (communications émanant des parties et autres documents de travail du Comité) sont confidentiels.

437.À sa soixante‑sixième session, le Comité a déclaré recevable la communication n° 30/2003. Il a par ailleurs adopté des opinions concernant les communications nos 31/2003 (L.R. c. Slovaquie), 32/2003 (Sefic c. Danemark) et 33/2003 (Quereshi c. Danemark (n° 2)). Le texte de ces opinions est reproduit intégralement à l’annexe III, section A.

438.Dans la communication n° 31/2003 (L.R. c. Slovaquie), les requérants, 27 Roms slovaques, se disaient victimes d’une privation discriminatoire du droit au logement, en violation des articles 2 et 5 de la Convention, conjuguée à une privation du droit à un recours utile, garanti par l’article 6. Un conseil municipal avait élaboré et adopté un plan de création de logements bon marché, essentiellement au profit des Roms de la région. À la suite de cette décision, certains habitants ont signé une pétition dénigrant les Roms bénéficiaires de ce plan et demandant l’annulation de la décision du conseil municipal. Lors d’une réunion organisée par la suite, le conseil, citant la pétition, est revenu sur sa décision sans proposer d’autre solution. Les plaintes pénales et les recours en constitutionnalité présentés jusqu’au niveau de la Cour constitutionnelle n’ont pas eu d’effets.

439.Examinant la recevabilité de la requête, le Comité a estimé que les actes des conseils municipaux étaient suffisants pour invoquer la responsabilité internationale de l’État partie et que les recours internes avaient été épuisés. Sur le fond, le Comité a estimé que la deuxième résolution du conseil faisait apparaître un cas de discrimination indirecte contre les Roms. Il a indiqué que la première résolution constituait l’étape préliminaire de l’élaboration d’une politique, étape importante et concrète qui était nécessaire pour la réalisation du droit au logement et était donc protégée par les dispositions de la Convention, même si la résolution ne conférait pas un droit au logement immédiatement applicable. Les requérants étaient par conséquent victimes d’une discrimination raciale contraire à l’article 2 et à l’alinéa e de l’article 5 de la Convention. Le fait que les tribunaux de l’État partie n’aient pas offert un recours contre cette discrimination constituait une violation distincte de l’article 6. À titre de recours, le Comité a indiqué que les requérants devraient être placés dans la même situation qu’après l’adoption de la première résolution.

440.La communication n° 32/2003 (Sefic c. Danemark) concernait un ressortissant bosniaque résidant au Danemark, qui a voulu souscrire une assurance de responsabilité civile auprès d’un assureur local. Il a été informé qu’il ne pouvait être assuré car il ne parlait pas le danois. Il s’est plaint aux autorités, faisant valoir que l’exigence linguistique n’était pas objectivement motivée et qu’elle était discriminatoire au sens du paragraphe 1 de l’article premier de la loi danoise contre la discrimination. Dans son opinion, le Comité a noté que la réclamation de l’auteur et les éléments de preuve qu’il avait fournis concernant les véritables raisons de la politique de la compagnie d’assurances avaient été pleinement examinés tant par les autorités compétentes, y compris le Procureur, qui a estimé que l’exigence linguistique n’était pas fondée sur la race ou l’origine ethnique du requérant mais qu’elle était liée au besoin de communiquer avec les clients. Le Comité a conclu que les raisons avancées par la compagnie d’assurances pour justifier l’exigence linguistique, notamment le fait qu’il s’agissait d’une compagnie relativement petite fonctionnant essentiellement par le biais de contacts téléphoniques, constituaient des motifs raisonnables et objectifs. Les faits ne faisaient donc pas apparaître de violation de la Convention.

441.La communication Quereshi c. Danemark (n° 2) (33/2003) faisait suite à une requête déclarée précédemment recevable. Le requérant, député, a vu une émission politique diffusée par la télévision publique dans laquelle les membres d’un parti tenaient des propos insultants. Examinant la première requête, qui visait à attribuer la responsabilité de ces propos à un membre de la direction du parti, le Comité avait estimé qu’il n’y avait pas eu de violation de la Convention, étant donné qu’une procédure pénale avait été engagée contre les orateurs concernés. Dans la deuxième requête, le requérant contestait la décision qui avait été prise de ne pas poursuivre l’un des orateurs. Après avoir déclaré la communication recevable, en partie parce que l’exercice de nouveaux moyens de recours devant les tribunaux constituerait une procédure excédant des délais raisonnables étant donné la nature de l’affaire, le Comité a jugé qu’il n’y avait pas eu de violation de la Convention. Il a rappelé que plusieurs orateurs avaient été reconnus coupables d’infractions pénales et qu’on ne pouvait donc pas considérer que le système pénal de l’État partie était inefficace. S’agissant de l’orateur mis en cause, le Comité a conclu que ses déclarations ne visaient pas un groupe particulier de personnes sur la base des critères énoncés à l’article premier, et qu’il n’avait donc pas commis d’acte de discrimination raciale qui ferait entrer en jeu les obligations contractées par l’État partie en vertu de la Convention.

442.À sa soixante‑sixième session, le Comité a déclaré recevable la communication n° 30/2003, soumise au nom des membres des communautés juives d’Oslo et de Trondheim et de divers particuliers, relative à des observations racistes faites par un membre d’un groupe d’extrême droite (Bootboys) dans un discours à la mémoire d’un dirigeant nazi. L’orateur a fait l’objet de poursuites mais a en fin de compte été acquitté par la Cour suprême de Norvège au motif du respect de la liberté d’expression.

443.L’État partie avait contesté la recevabilité de la communication en faisant valoir qu’aucun des groupes ou particuliers concernés n’était «victime» des commentaires en cause; ils n’étaient pas présents au moment où le discours avait été prononcé et aucun d’entre eux n’avait été singularisé. L’État partie a également fait valoir que les auteurs n’avaient pas épuisé les voies de recours internes étant donné que même si l’auteur du discours ne pouvait être rejugé, aucun des auteurs de la communication n’avait jamais porté plainte contre ce discours auprès des autorités. Le Comité a cependant estimé que le statut de «victime» pouvait s’appliquer à tous les membres d’un groupe particulier de victimes potentielles et que, même si aucun des auteurs n’avait porté plainte auprès des autorités, lesdits auteurs n’avaient pas eu la possibilité d’influer sur le déroulement des poursuites pénales engagées contre l’orateur.

444.Le 15 août 2005, le Comité a examiné le fond de la communication. Tout en reconnaissant que la Cour suprême avait analysé en profondeur les circonstances de l’espèce, il a estimé qu’il demeurait de sa responsabilité de veiller à la cohérence de l’interprétation des dispositions de l’article 4 de la Convention à la lumière de sa recommandation générale XV. S’agissant de savoir si les propos en cause entraient dans l’une des catégories de discours visées par l’article 4, le Comité a estimé que lesdits propos contenaient des idées fondées sur la supériorité ou la haine raciales; la référence à d’anciens dirigeants nazis et à leurs convictions devait être considérée comme une incitation, sinon à la violence, du moins à la discrimination raciale.

445.Quant à la question de savoir si les propos en cause étaient protégés par la clause de sauvegarde de l’article 4, le Comité a estimé que donner au droit à la liberté d’expression un rôle plus limité dans le contexte de l’article 4 ne privait pas cette clause de sens et ce d’autant moins que tous les instruments internationaux garantissant la liberté d’expression prévoient l’éventualité d’en limiter l’exercice dans certaines circonstances. Étant donné que les propos en cause revêtaient un caractère particulièrement agressif, ils ne bénéficiaient pas de la clause de sauvegarde et il y avait violation de l’article 4 et par conséquent de l’article 6 de la Convention.

446.Enfin, le Comité a estimé, à l’opposé de l’argumentation de l’État partie, que sa compétence pour recevoir et examiner des communications au titre de l’article 4 de la Convention que sa compétence pour recevoir et examiner des communications au titre de l’article 14 n’était pas limitée aux plaintes pour violation de l’un ou de plusieurs des droits énoncés à l’article 5 (par. 10.6 de l’opinion). L’opinion du Comité est reproduite dans l’annexe III, section B, du présent rapport.

Suite donnée aux opinions adoptées par le Comité au titre de l’article 14 de la Convention

447.Par le passé, le Comité se contentait de contrôler de manière informelle la manière dont les États parties appliquaient les recommandations formulées dans les opinions mettant en évidence des violations de la Convention. Compte tenu de l’expérience positive d’autres organes conventionnels en matière de procédures de suivi, le Comité a débattu pendant sa soixante‑sixième session de l’opportunité de mettre en place une procédure de suivi des opinions adoptées au titre de l’article 14 de la Convention. Il a prié le secrétariat d’élaborer à ce sujet un document de travail présentant différentes options (voir CERD/C/67/FU/1, consultable sur le site Web du HCDH).

448.À sa soixante‑septième session, le Comité a examiné un document élaboré par le secrétariat présentant diverses options concernant les considérations justifiant une procédure de suivi des opinions adoptée par le Comité au titre du paragraphe 7 de l’article 14 de la Convention et les éventuelles modalités d’une telle procédure. On s’est accordé à estimer juridiquement possible et appropriée la mise en place d’une procédure de suivi dans le souci d’obtenir des États parties des mesures en réponse aux suggestions et recommandations du Comité. Le 8 août 2005, le Comité a donc décidé d’instituer une telle procédure. Le 15 août, il a adopté deux nouveaux paragraphes définissant les modalités de la procédure de suivi, qui ont été incorporés à l’article 95 du Règlement intérieur du Comité. Ces deux nouveaux paragraphes sont reproduits dans l’annexe IV au présent document.

449.Le 9 juin 2005, le Gouvernement slovaque a informé le Comité de la suite donnée à l’opinion concernant la communication n° 31/2003 (L.R. et consorts c. République slovaque), adoptée à la soixante‑sixième session (voir par. 3 ci‑dessus). Il a fait savoir que le texte de l’opinion avait été traduit et distribué aux autorités et services gouvernementaux concernés, y compris aux municipalités et au Centre national des droits de l’homme. En particulier, il a été transmis à la ville de Dobsiná et au Procureur du district de Rožňava, l’accent étant mis sur le fait que la République slovaque avait l’obligation d’assurer aux requérants une voie de recours effective et que des mesures devaient être prises pour que les requérants soient placés dans la même situation qu’après l’adoption de la première résolution du conseil municipal. Le 26 avril 2005, le conseil, tenant compte de l’opinion du Comité, a décidé d’annuler ses deux résolutions et est parvenu à un accord indiquant qu’il allait formuler des propositions concernant la création de logements bon marché dans la région concernée. Ce faisant, le conseil prêterait particulièrement attention aux problèmes de logement des Roms afin de favoriser la réalisation du droit au logement. Concernant la pétition présumée discriminatoire des habitants de Dobsiná, des poursuites ont été engagées contre le comité de cinq membres à l’origine de la pétition, en vertu de l’article 198 a) du Code pénal (incitation à la haine ethnique ou raciale).

450.L’État partie a aussi indiqué que le Plan national d’action 2006‑2008 pour la prévention de toutes les formes de discrimination, du racisme, de la xénophobie, de l’antisémitisme et des autres expressions de l’intolérance était en cours d’élaboration. Le Ministère des affaires étrangères avait proposé d’y inclure des activités visant à faire connaître le travail du Comité contre la discrimination raciale, ses compétences au titre de l’article 14 et sa jurisprudence.

VII. DÉBATS THÉMATIQUES ET DÉBATS GÉNÉRAUX

451.En examinant les rapports périodiques des États parties, le Comité a constaté que certaines formes de discrimination au sens de l’article premier de la Convention étaient communes à plusieurs États et pouvaient être examinées utilement dans une perspective plus vaste. En août 2000, le Comité a organisé un débat thématique sur la question de la discrimination à l’encontre des Roms et, en août 2002, il a tenu un débat thématique sur la discrimination fondée sur l’ascendance. À sa soixante‑quatrième session, en mars 2004, le Comité a tenu un troisième débat thématique sur les non‑ressortissants et la discrimination raciale. Ces trois débats thématiques ont conduit à l’adoption de la recommandation générale XXVII concernant la discrimination à l’égard des Roms, de la recommandation générale XXIX concernant la discrimination fondée sur l’ascendance et de la recommandation générale XXX concernant la discrimination contre les non‑ressortissants.

452.À sa soixante‑cinquième session, le Comité a décidé de tenir, à sa session suivante, un quatrième débat thématique sur la prévention du génocide afin, entre autres choses, de définir les indicateurs d’un processus génocidaire à ses débuts. Dans cette perspective, il a invité les États parties à donner leur avis au sujet de la prévention du génocide.

453.Ce quatrième débat thématique organisé par le Comité a eu lieu à la 1684e séance (soixante‑cinquième session), le 1er mars 2005 (voir CERD/C/SR.1684); il a été précédé d’une réunion avec les ONG intéressées, les gouvernements et d’autres mécanismes et entités des Nations Unies s’occupant des droits de l’homme, le 28 février 2005 (voir CERD/C/SR.1683).

454.Le Comité a pu exploiter les nombreuses informations que ses propres travaux lui ont permis d’obtenir, notamment au titre de ses mesures d’alerte rapide et procédures d’urgence. De plus, plusieurs États ont répondu à la demande qui leur avait été faite par le Comité de lui fournir des informations par écrit. Le Comité disposait également d’informations pertinentes émanant d’autres mécanismes de l’ONU s’occupant des droits de l’homme ainsi que d’autres organes et institutions des Nations Unies.

455.Lors de la réunion informelle, les ONG ont soulevé de nombreux sujets de préoccupation. Invités à le faire, certains représentants d’États parties, le Conseiller spécial sur la prévention du génocide, le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée et un représentant du HCR ont pris la parole.

456.Se fondant sur les informations réunies dans le cadre du débat thématique, le Comité, à l’issue d’une discussion approfondie, a adopté, à sa 1701e séance, une déclaration sur la prévention du génocide (pour le texte, voir chap. VIII), qui avait été élaborée par un groupe de rédaction informel présidé par M. Shahi.

457.À sa soixante‑septième session, le Comité a adopté une décision concernant le suivi de sa déclaration sur la prévention du génocide, dans laquelle il a défini des indicateurs de manifestations systématiques et massives de discrimination raciale (voir chap. II).

458.À sa soixante‑cinquième session, le Comité a décidé de tenir des débats généraux, à ses sessions futures, sur divers sujets dignes d’intérêt. À la suite de la décision prise à sa soixante‑cinquième session, le Comité a tenu un débat général sur la question du multiculturalisme le 8 mars 2005, à sa 1694e séance (voir CERD/C/SR.1694), sur la base d’un document de travail établi par M. Lindgren Alves. Il a décidé de poursuivre ce débat à sa soixante‑septième session en se fondant, entre autres, sur un document de travail établi par le secrétariat, avec notamment une compilation de ses observations finales qui font mention des questions entrant dans le cadre de ce débat. Ce débat s’est déroulé à sa 1724e séance (voir CERD/C/SR.1724), le 17 août 2005. Plusieurs membres ont exprimé leurs vues et suggéré d’engager des travaux en vue de l’adoption d’une nouvelle recommandation générale sur le multiculturalisme.

VIII. DÉCLARATIONS

459.Le Comité a adopté la déclaration suivante à sa soixante‑sixième session:

Déclaration sur la prévention du génocide

Le Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Rappelant que 133 États Membres de l’Organisation des Nations Unies ont adopté la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide énonçant l’obligation de prévenir et de punir les génocides, y compris les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité,

Condamnant les génocides perpétrés depuis la fondation de l’Organisation des Nations Unies, au cours desquels des dizaines de millions d’hommes, de femmes et d’enfants ont été tués,

Notant que le génocide est souvent facilité et encouragé par des lois et pratiques discriminatoires ou par le défaut d’application effective du principe d’égalité des personnes indépendamment de la race, de la couleur, de l’ascendance ou de l’origine nationale ou ethnique,

Rappelant que depuis plus d’une décennie, le Comité, au titre de sa procédure d’alerte rapide et d’action urgente pour la prévention de la discrimination raciale, a porté à l’attention du Conseil de sécurité, par l’intermédiaire du Secrétaire général, la situation dans un certain nombre de pays où des violations systématiques des droits de l’homme et des pratiques persistantes de discrimination raciale pourraient conduire à un conflit violent et à un génocide,

Notant que la première conférence internationale sur la prévention et la répression du génocide tenue depuis l’adoption de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, à Stockholm en janvier 2004, a préconisé l’adoption d’une stratégie contre le génocide qui devrait contenir des dispositions pour les cas les plus graves lorsque la prévention a échoué et des atrocités se produisent, ainsi que l’action militaire à titre de mesure de dernier recours pour arrêter les génocides dans les situations extrêmes,

Faisant sien le Plan d’action du Secrétaire général visant à prévenir tout génocide, comprenant notamment des mesures rapides et militaires dans les cas extrêmes, présenté à la Commission des droits de l’homme le 7 avril 2004 − dixième anniversaire du génocide du Rwanda − rappelant que la communauté internationale n’avait pas réussi à prévenir les génocides du Rwanda et de Srebrenica faute de volonté politique,

Notant que le Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement a estimé que la communauté internationale a aussi la responsabilité d’agir, y compris en faisant usage de la force en dernier recours, si cela est nécessaire, dans le cadre d’une action collective contre les menaces de génocide et autres violations massives des droits de l’homme, lorsqu’un État n’assure pas la protection de ses citoyens,

Ayant tenu à sa soixante‑sixième session un débat thématique opportun et constructif sur la prévention du génocide avec la participation d’États parties à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, du Conseiller spécial sur la prévention du génocide, du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, d’autres organismes des Nations Unies et d’organisations non gouvernementales internationales,

Prenant note que la mondialisation économique a souvent des effets négatifs sur les communautés défavorisées et en particulier sur les communautés autochtones,

Agissant au titre de ses mesures d’alerte rapide et procédures d’urgence pour la prévention de la discrimination raciale adoptées à sa 979e séance, en 1993, en vertu desquelles le Comité, par l’intermédiaire du Secrétaire général, a adressé au Conseil de sécurité des recommandations relatives à des mesures à prendre pour prévenir des situations comprenant des pratiques persistantes de discrimination raciale et d’autres violations systématiques des droits de l’homme, susceptibles de conduire à un conflit violent et au génocide,

Répondant à la déclaration du Secrétaire général adressée à la Conférence de Stockholm selon laquelle il ne peut y avoir de question plus importante ni d’obligation plus impérative que la prévention du génocide;

Adopte la présente Déclaration sur la prévention du génocide qui sera soumise pour examen aux États parties, au Conseiller spécial, au Secrétaire général ainsi qu’au Conseil de sécurité.

Le Comité:

1.Accueille avec satisfaction la nomination du Conseiller spécial sur la prévention du génocide, qui devra donner l’alerte rapidement et recommander des mesures de prévention appropriées au Conseil de sécurité par l’intermédiaire du Secrétaire général, afin de permettre à la communauté internationale de prendre des mesures en temps opportun en vue de prévenir un génocide;

2.Estime qu’il faut impérativement encourager le renforcement des liens et des échanges entre les niveaux local et mondial, notamment en mettant au point des stratégies nationales pour la prévention des génocides liées à des plans d’action nationaux pour l’élimination de la discrimination raciale mis au point en collaboration étroite avec la société civile, les institutions nationales de défense des droits de l’homme et d’autres acteurs non étatiques et aussi en impliquant des organes internationaux tels que le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale et le Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme;

3.Affirme sa volonté de fournir au Conseiller spécial sur la prévention du génocide des informations opportunes et pertinentes sur les lois, politiques et pratiques susceptibles d’indiquer l’existence d’une discrimination systématique ou systémique fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, potentiellement capable de conduire à un conflit violent ou à un génocide. Afin de faciliter et de centrer cet échange, le Comité a l’intention de mettre au point un ensemble d’indicateurs spéciaux relatifs au génocide, portant notamment sur les racines culturelles et historiques des génocides et la nécessité de reconnaître la dimension multiculturelle de la plupart des sociétés, comme l’a suggéré le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée;

4.Se déclare résolu à renforcer et à affiner ses procédures d’alerte rapide, d’action urgente et de suivi contre la discrimination raciale dans toutes les situations où apparaissent des signes annonciateurs d’un possible conflit violent ou d’un génocide, cas dans lesquels il envisagera d’envoyer des missions dans les pays concernés afin d’y obtenir des renseignements de première main sur la situation;

5.Estime qu’il est d’une importance vitale de renforcer les échanges entre les organes de suivi des traités relatifs aux droits de l’homme et le Conseil de sécurité et, à cet égard, examinera de quelle manière les premiers pourraient collaborer en vue de signaler le déclenchement possible d’un conflit violent et d’un génocide et de demander au Secrétaire général et au Conseiller spécial de transmettre ses préoccupations et messages d’alerte au Conseil de sécurité;

6.Souscrit aux conclusions du Groupe de personnalités de haut niveau selon lesquelles les pays développés ont dans ce domaine des responsabilités particulières et devraient s’employer davantage à transformer leurs forces armées en contingents adaptés à des opérations de maintien de la paix, et un plus grand nombre d’États devraient placer leurs contingents en état d’alerte aux fins des opérations des Nations Unies et mettre en réserve des moyens de transport aérien et d’autres moyens de transport stratégiques pour appuyer les opérations de maintien de la paix. Cela nécessitera des ressources proportionnelles à l’ampleur des défis à venir;

7.Prend note de l’Initiative globale pour des opérations de paix selon laquelle il est proposé que les pays occidentaux fournissent une formation, du matériel et un appui logistique aux forces militaires internationales souhaitant participer à des opérations de maintien de la paix qui seront financées par les pays membres du Groupe des 7 États (G‑7);

8.Préconise instamment une augmentation des ressources allouées par les États Membres de l’Organisation des Nations Unies, plus particulièrement par les pays développés, et que ces derniers renforcent les contingents de maintien de la paix provenant des pays en développement par l’apport de leurs propres contingents;

9.Estime qu’il est essentiel de renforcer l’aptitude des contingents de maintien de la paix à se déployer plus rapidement;

10.Accueille avec satisfaction la coopération globale entre l’Organisation des Nations Unies et l’Union africaine dans le domaine de la paix et de la sécurité;

11.Estime qu’il faut impérativement mettre fin au climat d’impunité qui favorise les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité en déférant tous les auteurs de tels crimes devant la Cour pénale internationale;

12.Invite instamment la communauté internationale à examiner la nécessité de parvenir à une compréhension globale des dimensions du génocide, notamment dans les situations où la mondialisation économique a des effets néfastes sur les communautés défavorisées, en particulier les peuples autochtones.

1701 e séance 11 mars 2005

Note

IX. RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES

460.À sa soixante‑cinquième session, le Comité a décidé de charger M. de Gouttes d’élaborer une nouvelle recommandation générale sur la discrimination raciale dans l’administration de la justice. À l’issue des discussions consacrées au projet de recommandation lors de ses soixante‑sixième et soixante‑septième sessions, le Comité a adopté la recommandation générale ci‑après à sa 1724e séance.

Recommandation générale XXXI sur la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale,

Rappelant la définition de la discrimination raciale qui est inscrite dans l’article premier de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Rappelant les dispositions de l’article 5 a)de la Convention, qui obligent les États parties à garantir le droit de chacun à l’égalité devant la loi sans discrimination de race, de couleur ou d’origine nationale ou ethnique, notamment dans la jouissance du droit a un traitement égal devant les tribunaux et tout autre organe administrant la justice,

Rappelant que, selon l’article 6 de la Convention, les États parties assureront à toute personne soumise à leur juridiction une protection et une voie de recours effectives devant les tribunaux nationaux et autres organismes d’État compétents, contre tous les actes de discrimination raciale, ainsi que le droit de demander à ces tribunaux satisfaction ou réparation juste et adéquate pour tout dommage dont elle pourrait être victime par suite d’une telle discrimination,

Se référant au paragraphe 25 de la Déclaration adoptée par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, tenue à Durban (Afrique du Sud) en 2001, qui a exprimé sa «profonde répugnance pour le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, qui persistent dans certains États dans le fonctionnement du système pénal et l’application de la loi, ainsi que dans les décisions et le comportement des autorités de police et agents de la force publique, en particulier lorsque cela contribue au fait que certains groupes sont surreprésentés parmi les personnes en détention provisoire ou emprisonnées»,

Se référant aux travaux de la Commission des droits de l’homme et de la Sous‑Commission pour la promotion et la protection des droits de l’homme (voir E/CN.4/Sub.2/2005/7) concernant la discrimination dans le système de justice pénale,

Tenant compte des rapports du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée,

Se référant à la Convention de 1951 sur le statut des réfugiés, notamment à son article 16 aux termes duquel «un réfugié doit avoir un libre accès aux tribunaux sur le territoire de tous les États contractants»,

Tenant compte des observations relatives au fonctionnement de la justice qui figurent dans les conclusions du Comité concernant les rapports des États parties et dans les recommandations générales XXVII (2000) sur la discrimination à l’égard des Roms, XXIX (2002) sur la discrimination fondée sur l’ascendance et XXX (2004) sur la discrimination contre les non‑ressortissants,

Convaincu que, même si la justice peut être regardée, en général, comme impartiale et non suspecte de racisme, les discriminations raciales et la xénophobie dans l’administration et le fonctionnement de la justice, lorsqu’elles existent, représentent une atteinte particulièrement grave à la règle de droit, au principe de l’égalité devant la loi, à l’équité du procès et au droit à un tribunal indépendant et impartial, en affectant directement des personnes appartenant à des groupes que la justice a précisément pour mission de protéger,

Considérant qu’aucun pays n’est à l’abri de phénomènes de discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale, quelle que soit la famille juridique du droit appliqué et quel que soit le système processuel en vigueur, qu’il soit accusatoire, inquisitoire ou mixte,

Considérant que les risques de discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale se sont accrus ces dernières années, d’une part sous l’effet de l’augmentation de l’immigration et des mouvements de population, qui ont suscité dans certaines couches de la population et chez certains agents chargés de l’application des lois, des préjugés et des sentiments de xénophobie ou d’intolérance, d’autre part sous l’effet des politiques de sécurité et des mesures contre le terrorisme adoptées ces dernières années par de nombreux États, qui ont favorisé, dans plusieurs pays, l’apparition d’attitudes xénophobes, notamment de sentiments antiarabes ou antimusulmans ou, par réaction, de sentiments antisémites,

Résolu à combattre toutes les discriminations dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale dont peuvent être victimes, dans l’ensemble des pays du monde, les personnes appartenant à des groupes raciaux ou ethniques, notamment les non‑ressortissants − incluant les immigrés, les réfugiés, les demandeurs d’asile, les apatrides − les roms/tziganes, les peuples autochtones, les populations déplacées, les personnes discriminées à raison de leur ascendance, ainsi que les autres groupes vulnérables particulièrement exposés à l’exclusion, à la marginalisation et à la non‑intégration dans la société, en portant une attention particulière à la situation des femmes et des enfants des groupes précités, susceptibles d’être l’objet d’une double discrimination à raison de leur race et à raison de leur sexe ou de leur âge,

Formule les recommandations suivantes à l’intention des États parties:

I. Mesures d’ordre général

A. Mesures à prendre en vue de mieux évaluer l’existence et l’étendue de la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale: la recherche d’indicateurs de cette discrimination

1. Indicateurs factuels

1.Les États parties devraient prêter la plus grande attention aux indicateurs possibles de discrimination raciale qui suivent:

a)Le nombre et le pourcentage de personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule qui sont victimes d’agressions ou d’autres infractions, notamment lorsqu’elles sont commises par des agents de la police ou d’autres agents de l’État;

b)L’absence ou la rareté des plaintes, des poursuites et des jugements concernant des actes de discrimination raciale dans le pays. Une telle donnée ne devrait pas, en effet, être regardée comme nécessairement positive, contrairement à ce que pensent certains États. Elle peut aussi révéler, soit une information insuffisante des victimes sur leurs droits, soit la peur d’une réprobation sociale ou de représailles, soit la crainte du coût et de la complexité des procédures judiciaires de la part de victimes dont les ressources sont limitées, soit un manque de confiance à l’égard des autorités de police et de justice, soit une insuffisante attention ou sensibilisation de ces autorités à l’égard des infractions de racisme;

c)L’absence ou l’insuffisance de renseignements sur le comportement des agents chargés de l’application des lois vis‑à‑vis des personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule;

d)Les taux proportionnellement plus élevés de délinquance imputés aux personnes appartenant à ces groupes, notamment en matière de petite délinquance de la rue et d’infractions liées à la drogue et à la prostitution, en tant qu’indicateurs d’exclusion ou de non‑intégration de ces personnes dans la société;

e)Le nombre et le pourcentage de personnes appartenant à ces groupes qui sont retenues en détention pénale ou administrative, y compris dans des centres de rétention administrative, des centres pénitentiaires, des établissements psychiatriques ou des zones d’attente dans les aéroports;

f)Le prononcé par les tribunaux de peines plus sévères ou inadaptées à l’égard des personnes appartenant à ces groupes;

g)La proportion insuffisante de personnes appartenant à ces groupes dans les effectifs de la police, de la justice, y compris les magistrats et les jurés, et dans les autres services chargés de l’application des lois.

2.Pour que ces indicateurs factuels puissent être connus et exploités, les États parties devraient procéder à des collectes d’informations régulières et publiques auprès des autorités policières, judiciaires, pénitentiaires et des services d’immigration, dans le respect des normes relatives à la confidentialité, à l’anonymat et à la protection des données à caractère personnel.

3.Les États parties devraient pouvoir disposer notamment de renseignements complets, statistiques ou autres, sur les plaintes, les poursuites, les jugements concernant les actes de racisme et de xénophobie, ainsi que les réparations allouées aux victimes de tels actes, que ces réparations soient prises en charge par les auteurs des infractions ou par des plans d’indemnisation étatiques, financés par des fonds publics.

2. Indicateurs législatifs

4.Devraient être regardés comme des indicateurs de causes de discriminations raciales potentielles:

a)Les lacunes pouvant exister dans la législation nationale concernant la discrimination raciale. À cet égard, les États parties devraient se conformer pleinement aux exigences de l’article 4 de la Convention et incriminer pénalement tous les actes de racisme couverts par cet article, qui doivent être érigés en délits punissables, notamment la diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, les incitations à la haine raciale, les violences ou incitations à la violence raciale, mais aussi les activités de propagande raciste et les organisations racistes. Les États parties, en outre, sont encouragés à instituer dans leur législation pénale une circonstance aggravante générale tenant à la motivation raciale des infractions;

b)Les effets discriminatoires indirects que peuvent avoir certaines législations nationales, en particulier les législations concernant le terrorisme, l’immigration, la nationalité, les peines prévoyant l’interdiction ou l’éloignement du territoire national contre des non‑ressortissants, ainsi que les législations ayant pour effet de pénaliser certains groupes ou l’appartenance à certaines communautés sans motif légitime. Les États devraient veiller à éliminer les effets discriminatoires de telles législations et à respecter en tout cas le principe de proportionnalité dans leur application à l’égard des personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule.

B. Stratégies à développer pour prévenir les discriminations raciales dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale

5.Les États parties devraient mettre en œuvre des stratégies nationales ayant notamment les objectifs suivants:

a)Éliminer les lois ayant un effet discriminatoire au plan racial, en particulier celles qui visent indirectement certains groupes en pénalisant des actes qui ne peuvent être commis que par des personnes appartenant à ces groupes, ou celles qui ne s’appliquent qu’aux non‑ressortissants, sans motif légitime ou sans respecter le principe de proportionnalité;

b)Développer, par des enseignements appropriés, la formation aux droits de l’homme, à la tolérance, à l’entente interraciale ou interethnique, ainsi que la sensibilisation aux relations interculturelles, pour les agents chargés de l’application des lois: personnels de la police, de la gendarmerie, de la justice, des établissements pénitentiaires, des établissements psychiatriques, des services sociaux, médicaux et autres;

c)Promouvoir le dialogue et la concertation entre les autorités de police et de justice et les représentants des différents groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule, afin de combattre les préjugés et d’établir des relations de confiance;

d)Favoriser une représentation adéquate des personnes appartenant aux groupes raciaux et ethniques au sein de la police et de la justice;

e)Veiller au respect et à la reconnaissance des systèmes traditionnels de justice des peuples autochtones, en conformité avec le droit international des droits de l’homme;

f)Apporter les adaptations nécessaires au régime pénitentiaire des détenus appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule, afin de tenir compte notamment de leurs pratiques culturelles et religieuses;

g)Mettre en place, dans les situations de déplacements massifs de population, les moyens et les dispositifs intérimaires nécessaires au fonctionnement de la justice pour tenir compte de la situation particulièrement vulnérable des personnes déplacées, en instituant notamment des tribunaux ou des chambres décentralisées sur les lieux où séjournent les personnes déplacées ou en organisant des juridictions itinérantes;

h)Instaurer, dans les périodes postconflictuelles, des plans de reconstruction du système judiciaire et de rétablissement de l’état de droit sur l’ensemble des territoires des pays concernés, en faisant appel notamment à l’assistance technique internationale des entités compétentes des Nations Unies;

i)Mettre en œuvre des stratégies ou des plans d’action nationaux en vue d’éliminer la discrimination raciale de manière structurelle. Ces stratégies à long terme devraient inclure des objectifs définis, des actions spécifiques et des indicateurs permettant de mesurer les progrès. Elles devraient notamment inclure des lignes directrices relatives à la prévention, l’enregistrement, les enquêtes et les poursuites concernant les incidents racistes ou xénophobes, l’évaluation du niveau de satisfaction de toutes les communautés dans leurs relations avec la police et la justice, le recrutement et la promotion dans le système judiciaire des personnes appartenant aux divers groupes raciaux ou ethniques;

j)Charger une institution nationale indépendante de suivre, de contrôler et de mesurer les progrès accomplis dans le cadre des plans d’action nationaux et des directives contre la discrimination raciale, de déceler des phénomènes non révélés de discrimination raciale et de faire des recommandations et des propositions d’amélioration.

II. Mesures à prendre en vue de prévenir les discriminations raciales pour ce qui concerne les victimes du racisme

A. Accès au droit et à la justice

6.Conformément à l’article 6 de la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, les États parties ont pour obligation de garantir sur leur territoire le droit de toute personne à un recours effectif contre les auteurs d’actes de discrimination raciale, sans aucune discrimination, que ces actes soient commis par des personnes privées ou des agents de l’État, ainsi que le droit de demander une réparation juste et adéquate du préjudice subi.

7.Afin de faciliter l’accès à la justice des victimes du racisme, les États parties devraient s’efforcer de fournir l’information juridique nécessaire aux personnes appartenant aux groupes sociaux les plus vulnérables, qui sont souvent dans l’ignorance de leurs droits.

8.À cet égard, les États parties devraient promouvoir dans les secteurs où vivent ces personnes des institutions telles que des permanences gratuites d’assistance et de conseil juridique, des centres d’information juridique, des maisons de justice ou des boutiques du droit ouverts à tous.

9.Les États parties devraient aussi développer en ce domaine leur coopération avec les associations d’avocats, les institutions universitaires, les centres d’information juridique et les organisations non gouvernementales spécialisées dans la défense des droits des communautés marginalisées et dans la prévention de la discrimination.

B. Saisine des autorités compétentes pour recueillir les plaintes

10.Les États parties devraient prendre les mesures nécessaires pour que les services de police soient suffisamment présents et accessibles dans les quartiers, les régions, les installations collectives ou les camps, où vivent les personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule, afin que les plaintes de ces personnes puissent être dûment recueillies.

11.Des instructions devraient être adressées aux services compétents pour que les victimes d’actes de racisme soient accueillies de façon satisfaisante dans les commissariats de police, pour que les plaintes soient enregistrées immédiatement, pour que les enquêtes soient diligentées sans retard, de manière effective, indépendante et impartiale, et pour que les dossiers en relation avec des incidents racistes ou xénophobes soient conservés et exploités dans des bases de données.

12.Tout refus de recueillir une plainte pour acte de racisme par un fonctionnaire de police devrait faire l’objet de sanctions disciplinaires ou pénales, et ces sanctions devraient être aggravées en cas de corruption.

13.À l’inverse, tout fonctionnaire de police ou tout agent de l’État devrait avoir le droit et le devoir de refuser de suivre des ordres ou des instructions lui demandant de commettre des violations des droits de l’homme, en particulier celles motivées par la discrimination raciale. Les États parties devraient garantir la liberté de tout agent de se prévaloir de ce droit sans risquer de sanctions.

14.En cas d’allégations de tortures, de mauvais traitements ou d’exécutions, les enquêtes devraient être menées conformément aux Principes relatifs à la prévention efficace des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et aux moyens d’enquêter efficacement sur ces exécutions et aux Principes relatifs aux moyens d’enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants pour établir la réalité des faits.

C. Saisine de la justice

15.Les États parties devraient rappeler aux procureurs et aux membres du ministère public l’intérêt général qui s’attache à la poursuite des actes racistes, y compris des infractions mineures inspirées par des motifs racistes, car toute infraction à motivation raciste porte atteinte à la cohésion sociale et à la société tout entière.

16.Préalablement à l’intervention de la justice, les États parties pourraient aussi encourager, dans le respect des droits des victimes, le recours à des modalités parajudiciaires de solution des conflits, incluant des modalités coutumières compatibles avec les droits de l’homme, la médiation ou la conciliation, qui peuvent constituer des voies utiles et moins stigmatisantes pour les victimes d’actes de racisme.

17.Afin de faciliter la saisine de la justice par les victimes d’actes de racisme, les mesures suivantes devraient notamment être envisagées par les États parties:

a)L’octroi d’un statut procédural pour les victimes et les associations de défense des victimes du racisme et de la xénophobie, tel que la faculté de se constituer partie civile ou d’autres modalités similaires qui puissent leur permettre de faire valoir leurs droits dans le procès pénal, sans frais de leur part;

b)L’octroi aux victimes d’une aide juridictionnelle et judiciaire effective, comprenant le bénéfice de l’assistance gratuite d’un avocat et d’un interprète;

c)L’organisation d’une information des victimes sur le déroulement du procès;

d)L’assurance d’une protection accordée à la victime ou à ses proches contre toute forme d’intimidation ou de représailles;

e)La possibilité de suspendre de leurs fonctions, pendant la durée de l’enquête, les agents de l’État contre lesquels ont été déposées des plaintes.

18.Dans les pays où il existe des plans d’aide et d’indemnisation pour les victimes, les États parties devraient veiller à ce que ces plans soient ouverts à toutes les victimes sans aucune discrimination et indépendamment de leur nationalité ou de leur statut de résident.

D. Fonctionnement de la justice elle ‑même

19.Les États parties devraient veiller à ce que la justice:

a)Accorde une place suffisante à la victime, ainsi qu’à ses proches et aux témoins, tout au long de la procédure, en permettant au plaignant d’être entendu par les juges dans le cadre de l’instruction et à l’audience, d’avoir accès aux informations, d’être confronté aux témoins qui lui sont défavorables, de contester les preuves, d’être informé sur la marche de la procédure;

b)Traite sans discrimination ni préjugé et dans le respect de leur dignité les victimes de discriminations raciales, en s’assurant en particulier que les auditions, les interrogatoires ou les confrontations soient menés avec la sensibilité nécessaire en matière de racisme;

c)Garantisse à la victime un jugement dans un délai raisonnable;

d)Garantisse une réparation juste et adéquate de la victime pour le préjudice matériel et moral qu’elle a subi du fait de la discrimination raciale dont elle a été l’objet.

III. Mesures à prendre en vue de prévenir les discriminations raciales en ce qui concerne les personnes poursuivies en justice

A. Interpellation, interrogation et arrestation des personnes

20.Les États parties devraient prendre les mesures nécessaires pour exclure les interpellations, les arrestations et les fouilles fondées de facto exclusivement sur l’apparence physique de la personne, sa couleur, son faciès, son appartenance à un groupe racial ou ethnique, ou tout «profilage» qui l’expose à une plus grande suspicion;

21.Les États parties devraient prévenir et sanctionner avec une grande sévérité les violences, les actes de torture, les traitements cruels, inhumains ou dégradants et toutes les violations des droits de l’homme à l’encontre des personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule, commis par des agents de l’État, notamment les agents de la police, de l’armée, des douanes, des aéroports, des établissements pénitentiaires, des services sociaux, médicaux et psychiatriques.

22.Les États parties devraient veiller à ce que soit respecté le principe général de proportionnalité et de stricte nécessité dans le recours à la force à l’encontre des personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule, conformément aux Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois.

23.Les États parties devraient, en outre, garantir à toute personne arrêtée, quelle que soit son appartenance raciale, nationale ou ethnique, la jouissance des droits fondamentaux de la défense consacrés par les instruments internationaux pertinents relatifs aux droits de l’homme (notamment la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques), en particulier le droit de ne pas être arrêté ou détenu de manière arbitraire, le droit d’être informé des raisons de son arrestation, le droit au concours d’un interprète, le droit à l’assistance d’un avocat, le droit d’être traduit dans un bref délai devant un juge ou une autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires, le droit à la protection consulaire garantie par l’article 36 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, le droit de contacter le Haut‑Commissariat des Nations Unies aux réfugiés pour ce qui concerne les réfugiés.

24.S’agissant des personnes qui sont placées dans des centres de rétention administrative ou dans des zones d’attente des aéroports, les États parties devraient veiller à ce qu’elles jouissent de conditions de vie suffisamment décentes.

25.Enfin, pour tout ce qui concerne l’interpellation et l’arrestation des personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule, les États parties devraient tenir compte des précautions particulières à prendre à l’égard des femmes et des mineurs, en raison de leur vulnérabilité spécifique.

B. Détention provisoire

26.Tenant compte des données qui font apparaître un nombre excessivement élevé de non‑ressortissants et de personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule parmi les détenus avant jugement, les États parties devraient s’assurer:

a)Que la simple appartenance raciale ou ethnique ou l’appartenance à l’un des groupes précités ne soit pas une raison suffisante, de jure ou de facto, pour placer une personne en détention provisoire avant son jugement, seuls des motifs objectifs prévus par la loi pouvant justifier cette détention provisoire, tel le risque que la personne s’enfuie, qu’elle détruise les preuves ou qu’elle influence les témoins, ou le risque d’un trouble grave à l’ordre public;

b)Que l’exigence d’une caution ou d’une garantie financière pour obtenir la liberté avant jugement soit appliquée de façon adaptée à la situation des personnes appartenant à ces groupes, qui sont souvent en situation de précarité économique, afin d’éviter que cette exigence ne conduise à discriminer ces personnes;

c)Que les garanties de représentation, souvent demandées aux prévenus avant jugement comme condition de leur maintien en liberté (domicile fixe, travail déclaré, attaches familiales stables), soient appréciées en tenant compte de la situation de précarité qui peut résulter de leur appartenance à ces groupes, en particulier lorsqu’il s’agit de femmes et de mineurs;

d)Que les personnes appartenant à ces groupes qui sont incarcérées avant jugement jouissent de tous les droits reconnus aux détenus par les normes internationales pertinentes, notamment les droits spécialement adaptés à leur situation: le droit au respect de leurs traditions religieuses, culturelles et alimentaires, le droit aux relations avec leur famille, le droit à l’assistance d’un interprète, le droit à l’assistance consulaire, le cas échéant.

C. Procès et jugement

27.Préalablement au procès, les États parties pourraient favoriser, le cas échéant, le recours à la déjudiciarisation ou à des modes parajudiciaires de réaction au délit, en tenant compte du milieu culturel ou coutumier de l’auteur de l’infraction, notamment lorsqu’il s’agit de personnes appartenant à des peuples autochtones.

28.D’une façon générale, les États parties devraient assurer aux personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule, comme à toute personne, la jouissance de l’ensemble des garanties du procès équitable et de l’égalité devant la loi, telles que consacrées par les instruments internationaux pertinents relatifs aux droits de l’homme, et notamment:

1. Le droit à la présomption d’innocence

29.La garantie de ce droit implique que l’interdiction soit faite aux autorités policières, aux autorités judiciaires et autres autorités publiques d’exprimer en public leur opinion sur la culpabilité des prévenus avant le jugement et, a fortiori, de jeter la suspicion d’avance sur les membres d’un groupe racial ou ethnique déterminé. Ces mêmes autorités ont l’obligation de veiller à ce que les médias ne diffusent pas des informations susceptibles de stigmatiser certaines catégories de personnes, notamment celles appartenant aux groupes énumérés dans le dernier paragraphe du préambule;

2. Le droit à l’assistance d’un conseil et le droit à un interprète

30.La garantie effective de ces droits implique que les États parties mettent en place un système de désignation gratuite d’avocats et d’interprètes, ainsi que des services d’aide, de conseil juridique et d’interprétation au profit des personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule;

3. Le droit à un tribunal indépendant et impartial

31.Les États parties devraient veiller avec fermeté à l’absence de tout préjugé racial ou xénophobe de la part des magistrats, des jurés et des autres personnels de la justice.

32.Ils devraient éviter toute influence directe des groupes de pression, des idéologies, des religions, des églises, sur le fonctionnement de la justice et sur les décisions des juges, pouvant avoir des effets discriminatoires à l’égard de certains groupes.

33.Les États parties pourraient, à cet égard, tenir compte des «Principes de Bangalore sur la déontologie judiciaire» adoptés en 2002 (E/CN.4/2003/65, annexe), qui recommandent notamment:

Que les juges soient conscients de la diversité de la société et des différences liées aux origines, en particulier raciales,

Qu’ils ne manifestent aucune partialité, par leur parole ou leur comportement, envers des personnes ou des groupes de personnes sur la base de leur origine raciale ou autre,

Qu’ils s’acquittent de leurs tâches avec la considération appropriée à l’égard de toutes les personnes, telles que les parties, les témoins, les avocats, le personnel du tribunal et leurs collègues, sans différenciation injustifiée,

Qu’ils s’opposent à ce que les personnes sous leur direction et les avocats manifestent des préjugés ou adoptent un comportement discriminatoire envers une personne ou un groupe de personnes sur la base de leur couleur, de leur origine raciale, nationale ou religieuse, de leur sexe ou sur une autre base non pertinente.

D. Garantie d’une sanction équitable

34.Les États parties devraient veiller à cet égard à ce que ne soient pas appliquées des peines plus sévères pour la seule raison de l’appartenance du prévenu à un groupe racial ou ethnique déterminé.

35.Une attention toute particulière devrait être portée à cet égard, d’une part au système de peines minimales et de détention obligatoire appliquées à certaines infractions, d’autre part à la peine capitale dans les pays qui ne l’ont pas abolie, eu égard aux informations faisant apparaître que cette peine est plus souvent prononcée et exécutée à l’encontre de personnes appartenant à des groupes raciaux ou ethniques déterminés.

36.En ce qui concerne les personnes appartenant à des peuples autochtones, les États parties devraient favoriser l’application de peines alternatives à l’emprisonnement et le recours à d’autres sanctions mieux adaptées à leurs coutumes leur système juridique, en tenant compte notamment de la Convention no 169 de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants.

37.Par ailleurs, les peines visant exclusivement les non‑nationaux et s’ajoutant aux sanctions de droit commun, telles que les peines d’éloignement, d’expulsion ou d’interdiction du territoire national, ne devraient être prononcées qu’à titre exceptionnel de façon proportionnée, pour des motifs graves d’ordre public prévus par la loi et dans le respect de la vie privée et familiale des intéressés et de la protection internationale qui leur est due.

D. Exécution des peines

38.Lorsque des personnes appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule exécutent une peine d’emprisonnement, les États parties devraient:

a)Garantir à ces personnes la jouissance de tous les droits reconnus aux détenus par les normes internationales pertinentes, en particulier les droits spécialement adaptés à leur situation: le droit au respect de leurs pratiques religieuses et culturelles, le droit au respect de leurs habitudes alimentaires, le droit aux relations avec leur famille, le droit à l’assistance d’un interprète, le droit aux prestations sociales élémentaires, le droit à l’assistance consulaire, le cas échéant; par ailleurs, les services médicaux, psychologiques ou sociaux offerts aux détenus devraient tenir compte de leur culture;

b)Garantir à tout détenu dont les droits ont été violés le droit à un recours effectif devant une autorité indépendante et impartiale;

c)Se conformer, à cet égard, aux normes des Nations Unies en la matière, notamment à l’«Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus », aux «Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus», à l’«Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement »;

d)Permettre à ces personnes de bénéficier, le cas échéant, des dispositions de la législation interne et des conventions internationales ou bilatérales relatives au transfèrement des détenus étrangers, leur ouvrant la possibilité d’accomplir la peine d’emprisonnement dans leurs pays d’origine.

39.En outre, les autorités indépendantes chargées, dans les États parties, de contrôler les établissements pénitentiaires devraient comprendre des membres ayant une expertise en matière de discrimination raciale et une bonne connaissance des problèmes des groupes raciaux et ethniques et des autres groupes vulnérables visés dans le dernier paragraphe du préambule; ces autorités de contrôle devraient être dotées d’un mécanisme efficace de visites et de plaintes, le cas échéant.

40.Lorsque sont prononcées des peines d’éloignement, d’expulsion ou d’interdiction du territoire national à l’encontre de non‑ressortissants, les États parties devraient respecter pleinement les obligations de non‑refoulement découlant des normes internationales relatives aux réfugiés et aux droits de l’homme et s’assurer que ces personnes ne seront pas renvoyées vers un pays ou un territoire où elles risquent d’être l’objet de graves atteintes aux droits de l’homme.

41.Enfin, s’agissant des femmes et des enfants appartenant aux groupes mentionnés dans le dernier paragraphe du préambule, les États parties devraient veiller avec la plus grande attention à ce qu’ils bénéficient du régime particulier d’exécution des peines auquel ils ont droit, en tenant compte des difficultés spécifiques auxquelles sont confrontées les mères de famille et les femmes appartenant à certaines communautés, notamment les communautés autochtones.

Notes

X. EXAMEN DES COPIES DE PÉTITIONS, DES COPIES DE RAPPORTS ET DES AUTRES RENSEIGNEMENTS RELATIFS AUX TERRITOIRES SOUS TUTELLE ET AUX TERRITOIRES NON AUTONOMES AUXQUELS S’APPLIQUE LA RÉSOLUTION 1514 (XV) DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE, CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 15 DE LA CONVENTION

461.En vertu de l’article 15 de la Convention, le Comité est habilité à examiner des copies de pétitions, des copies de rapports et d’autres renseignements relatifs aux territoires sous tutelle, aux territoires non autonomes et à tous autres territoires auxquels s’applique la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale, qui lui sont transmis par les organes compétents de l’Organisation des Nations Unies, et à soumettre à ceux‑ci ainsi qu’à l’Assemblée générale son opinion et ses recommandations en ce qu’elles concernent les principes et les objectifs de la Convention dans ces territoires.

462.À la demande du Comité, M. Pillai a examiné les documents mis à la disposition du Comité pour permettre à celui‑ci de s’acquitter de son mandat, conformément à l’article 15 de la Convention. À sa 1727e séance (soixante‑septième session), M. Pillai a présenté son rapport, pour la préparation duquel il avait tenu compte des rapports du Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux sur ses activités en 2004 (A/59/23) ainsi que des copies de documents de travail sur les 16 territoires établis par le secrétariat pour le Comité spécial et le Conseil de tutelle en 2004 et énumérés dans le document qui porte la cote CERD/C/503, ainsi qu’à l’annexe V du présent rapport.

463.Le Comité a noté, comme il l’avait fait par le passé, qu’il lui était difficile de s’acquitter pleinement de son mandat en vertu de l’article 15 de la Convention car aucune copie de pétition ne lui était parvenue en application du paragraphe 2 a) dudit article et que les copies des rapports qu’il avait reçus en application du paragraphe 2 b) de cet article ne contenaient que très peu d’informations ayant un rapport direct avec les principes et les objectifs de la Convention.

464.Le Comité réitère l’observation qu’il a formulée précédemment, selon laquelle les rapports du Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux évoquent les relations entre les travaux du Comité spécial et le suivi permanent par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale de l’évolution de la situation dans les territoires, eu égard aux dispositions pertinentes de l’article 15 de la Convention. Il a aussi noté, toutefois, que les questions concernant la discrimination raciale et ayant un rapport direct avec les principes et les objectifs de la Convention étaient absentes des sections du rapport du Comité spécial consacrées à l’examen des travaux du Comité spécial et à ses activités futures.

XI. DÉCISIONS PRISES PAR L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE À SA CINQUANTE-NEUVIÈME SESSION

465.Le Comité a examiné ce point de l’ordre du jour à ses soixante‑sixième et soixante‑septième sessions. Pour l’examen de cette question, le Comité était saisi de la résolution 59/176 de l’Assemblée générale en date du 20 décembre 2004 dans laquelle l’Assemblée générale a notamment: a) félicité le Comité de la contribution qu’il apporte à l’application effective de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale; b) instamment prié les États qui ne sont pas encore parties à la Convention de la ratifier ou d’y adhérer au plut tôt, en vue d’une ratification universelle d’ici à 2005; c) demandé aux États parties à la Convention d’envisager de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention; d) demandé aux États parties de présenter en temps voulu leurs rapports périodiques sur les mesures prises pour appliquer la Convention; e) instamment prié les États parties de retirer toutes réserves contraires à l’objet et au but de la Convention et de revoir périodiquement leurs réserves en vue de les retirer; f) dit apprécier les efforts que le Comité a déployés jusqu’à présent pour accroître l’efficacité de ses méthodes de travail et l’a encouragé à poursuivre ses activités dans ce domaine; h) encouragé les membres du Comité à continuer de participer aux réunions intercomités annuelles et aux réunions annuelles des présidents des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en vue, notamment, de mieux coordonner les activités du système des organes créés en vertu d’instruments internationaux et d’uniformiser l’établissement des rapports; et i) instamment demandé aux États parties de hâter leurs procédures de ratification de l’amendement de l’article 8 de la Convention relatif au financement du Comité.

XII. TROISIÈME DÉCENNIE DE LA LUTTE CONTRE LE RACISME ET LA DISCRIMINATION RACIALE: SUIVI DE LA CONFÉRENCE MONDIALE CONTRE LE RACISME, LA DISCRIMINATION RACIALE, LA XÉNOPHOBIE ET L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE

466.Le Comité a examiné la question du suivi de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, et de la troisième Décennie de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale à ses soixante‑sixième et soixante‑septième sessions.

467.À sa soixante‑sixième session, le Comité a été informé des travaux de la troisième session du Groupe de travail intergouvernemental sur l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban (voir E/CN.4/2005/20) tenue du 11 au 22 octobre 2004, et en a débattu, se concentrant notamment sur le mandat qui a été confié au Groupe de travail d’élaborer des normes internationales complémentaires destinées à renforcer et à actualiser les instruments internationaux contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, sous toutes leurs formes. Suite à la recommandation du Groupe de travail dans laquelle celui‑ci priait le HCDH «d’organiser un séminaire de haut niveau de quatre à cinq jours dans le cadre de la quatrième session du Groupe de travail» (ibid., par. 73, recommandation 36), le Comité, à sa soixante‑septième session, a discuté de sa participation à la quatrième session du Groupe de travail. Le Comité a décidé qu’il devrait être dûment représenté à cette réunion, compte tenu du fait que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale est le principal instrument juridique international dans ce domaine.

XIII. PRÉSENTATION DES MÉTHODES DE TRAVAIL DU COMITÉ

468.Le rapport du Comité à l’Assemblée générale, à sa cinquante et unième session, contenait une présentation de ses méthodes de travail. Cette présentation mettait en lumière les changements intervenus au cours des dernières années et visait à améliorer les procédures du Comité.

469.À sa soixantième session, le Comité avait décidé d’examiner ses méthodes de travail à sa soixante et unième session et avait chargé M. Valencia Rodríguez, convocateur d’un groupe de travail à composition non limitée chargé de cette question, d’élaborer un document de travail et de le lui soumettre pour examen. Le document de travail présenté par M. Valencia Rodríguez a été à nouveau examiné et révisé par le Comité à ses soixante‑deuxième et soixante‑troisième sessions et a été adopté à sa soixante‑troisième session, à l’exception d’un paragraphe qui reste en suspens. Le texte du document adopté a été inclus dans une annexe du rapport du Comité à l’Assemblée générale à sa cinquante‑huitième session.

470.À sa soixante‑quatrième session, le Comité a continué d’examiner ses méthodes de travail et, en particulier, la question du suivi des recommandations adressées aux États parties à l’issue de l’examen de leur rapport initial ou périodique. Le Comité a décidé d’ajouter à l’article 65 de son Règlement intérieur un nouveau paragraphe concernant les demandes de renseignements complémentaires adressées aux États parties. Le texte de l’article 65 tel que modifié figure à l’annexe III du rapport du Comité à l’Assemblée générale à sa cinquante-neuvième session.

471.À sa 1670e séance (soixante‑cinquième session), le Comité a décidé, en vertu du paragraphe 2 de l’article 65 de son Règlement intérieur, de nommer les personnes citées ci‑après coordonnateur et coordonnateur suppléant afin de faciliter l’application des dispositions du paragraphe 1 de l’article 65 du Règlement intérieur relatives aux demandes de renseignements complémentaires adressées aux États parties:

Coordonnateur:M. Morten Kjaerum (2004‑2006)

Coordonnateur suppléant:M. Nourredine Amir (2004‑2006).

472. Le mandat du Coordonnateur est reproduit à l’annexe IV (voir par. 447 pour ce qui est de la décision du Comité d’instituer une procédure de suivi des opinions qu’il adopte au titre de l’article 14 de la Convention).

473.À sa 1659e séance (soixante‑cinquième session), le Comité a constitué un groupe de travail sur les mesures d’alerte rapide et les procédures d’urgence. Il est composé des cinq membres du Comité suivants:

Coordonnateur:Mme Patricia NoziphoJanuary‑Bardill (2004‑2006)

Membres:M. Alexei S. Avtonomov (2004‑2006)M. Jose Francisco Cali Tzay (2004‑2006)M. Régis de Gouttes (2004‑2006)M. Agha Shahi (2004‑2006)

474.Le Groupe de travail s’est réuni pour la première fois pendant la soixante‑cinquième session du Comité afin d’étudier plusieurs affaires portées à son attention. Il s’est également réuni pendant les soixante-sixième et soixante-septième sessions.

Notes

XIV. DÉBAT SUR LA RÉFORME DU SYSTÈME DES ORGANES CRÉÉS EN VERTU D’INSTRUMENTS INTERNATIONAUX

475.En ce qui concerne l’application effective des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, notamment l’obligation de présenter des rapports au titre de ces instruments, le Comité était saisi du rapport de la soixante-dixième réunion des présidents des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. À sa soixante-septième session, le Comité a examiné en particulier la question des futures consultations sur les propositions de réforme du cadre de protection des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies, notamment celles relatives à la création d’un organe conventionnel permanent unique. Le Comité a procédé à un premier examen de la question le 16 août 2005 (voir CERD/C/SR.1723) puis en a de nouveau débattu le 18 août 2005 avec MmeMaría‑FranciscaIze-Charrin, Administrateur chargé du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (voir CERD/C/SR.1726).

476.Des membres du Comité ont mis en évidence plusieurs points qu’il faudra éclaircir dans le cadre du débat sur l’organe conventionnel permanent unique. Ils ont souligné la nécessité de tenir compte de l’opinion de tous les protagonistes, à savoir non seulement les États parties et les membres des organes conventionnels mais aussi les institutions nationales des droits de l’homme, les organisations non gouvernementales et les victimes de violations des droits de l’homme. Ils ont aussi demandé si la création d’un organe conventionnel unique aboutirait nécessairement à un rapport unique. Le risque d’une marginalisation de certains instruments et de certaines questions relatives aux droits de l’homme, notamment la Convention et la question de la discrimination raciale, a été mis en avant par plusieurs membres qui ont également souligné que la discrimination raciale est, dans le contexte mondial actuel, un problème relatif aux droits de l’homme important, auquel il convient de continuer à accorder toute l’attention voulue.

477. Des membres ont aussi demandé si un protocole amendant la Convention serait nécessaire et ont dit craindre que, si tel était le cas, l’élaboration et l’entrée en vigueur d’un tel protocole ne prennent plusieurs années. Des membres ont dit également qu’il y avait un risque de paralysie du système tout entier pendant la période de transition. Des questions ont également été posées au sujet de la composition d’un organe permanent unique, de la procédure de sélection de ses membres et de la durée de leur mandat. Des membres ont demandé si cet organe siègerait en permanence et comment il serait organisé, en particulier s’il se composerait de plusieurs chambres et en fonction de quels critères ces chambres seraient constituées.

478.Le danger de perdre les acquis du système actuel de protection des droits de l’homme a été souligné par plusieurs membres qui ont aussi fait observer qu’un organe conventionnel permanent unique ne résoudrait pas les difficultés que rencontre actuellement le système, notamment la non‑présentation de rapports et l’absence de volonté politique des États en ce qui concerne l’application des recommandations des organes conventionnels. Des membres ont formulé plusieurs propositions visant à améliorer le système actuel:

a)Continuer à appliquer les mesures actuellement mises en œuvre pour améliorer les méthodes de travail;

b)Renforcer l’application des recommandations formulées par les réunions des présidents et les réunions intercomités;

c)Créer, au sein des organes conventionnels, différentes chambres qui seraient chargées d’examiner la question des retards excessifs dans l’examen des rapports;

d)Renforcer l’Équipe des requêtes au sein du Haut‑Commissariat aux droits de l’homme;

e)Envisager la création d’un organe unique qui serait chargé de traiter les communications émanant de particuliers;

f)Renforcer le suivi des recommandations des organes conventionnels;

g)Clarifier la relation entre les organes conventionnels et le futur Conseil des droits de l’homme afin d’éviter les chevauchements d’activités;

h)Veiller à ce que le système d’examen par les pairs qui sera mis en place utilise les recommandations des organes conventionnels comme point de départ et apporte l’appui politique nécessaire pour assurer leur application.

479. Lors de son dialogue avec le Comité, MmeIze-Charrin a souligné qu’aucune décision n’avait encore été prise et que des consultations de grande ampleur étaient nécessaires pour étudier la création éventuelle d’un organe conventionnel permanent unique. Elle a insisté sur le fait que les membres des organes conventionnels et toutes les autres parties intéressées seraient consultés afin que ce processus soit le plus participatif possible, qu’il permette de recueillir des informations aussi appropriées que possible et qu’au bout du compte, il débouche sur des décisions.

480. MmeIze-Charrin a rappelé que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme s’était employé activement à renforcer la mise en œuvre des recommandations des organes conventionnels au moyen de divers projets. Elle a fait sienne l’opinion des membres selon laquelle le suivi des recommandations des organes conventionnels doit être développé et l’application des recommandations des réunions des présidents et des réunions intercomités renforcée.

481. S’agissant, d’une part, de la nécessité de clarifier la relation entre les organes conventionnels et le futur Conseil des droits de l’homme en vue d’éviter des chevauchements d’activités et, d’autre part, les mesures juridiques qu’il faudrait prendre si un organe permanent unifié unique était créé, MmeIze-Charrin a expliqué qu’il était trop tôt pour apporter des réponses précises à ces questions, qui seraient clarifiées progressivement. Elle a informé le Comité que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme commencerait prochainement l’élaboration d’un document de travail qui traiterait de toutes ces questions et que les membres des organes conventionnels seraient invités à formuler des observations au cours de ce processus.

482.En conclusion, MmeIze-Charrin a souligné que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme était déterminé à veiller à ce que toute réforme du système des organes conventionnels soit une réforme qui renforce la protection des droits de l’homme de tous les groupes et de toutes les personnes au niveau national, en particulier dans des domaines aussi importants que la discrimination, notamment la discrimination raciale, dont la Haut-Commissaire a indiqué dans son Plan d’action qu’elle était l’un des principaux problèmes à résoudre dans le domaine des droits de l’homme.

Annexe I

ÉTAT DE LA CONVENTION

A. États parties à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (170) à la date du 19 août 2005 *

Afghanistan, Afrique du Sud, Albanie, Algérie, Allemagne, Antigua-et-Barbuda, Arabie saoudite, Argentine, Arménie, Australie, Autriche, Azerbaïdjan, Bahamas, Bahreïn, Bangladesh, Barbade, Bélarus, Belgique, Belize, Bénin, Bolivie, Bosnie-Herzégovine, Botswana, Brésil, Bulgarie, Burkina Faso, Burundi, Cambodge, Cameroun, Canada, Cap-Vert, Chili, Chine, Chypre, Colombie, Comores, Congo, Costa Rica, Côte d’Ivoire, Croatie, Cuba, Danemark, Égypte, El Salvador, Émirats arabes unis, Équateur, Érythrée, Espagne, Estonie, États-Unis d’Amérique, Éthiopie, ex-République yougoslave de Macédoine, Fédération de Russie, Fidji, Finlande, France, Gabon, Gambie, Géorgie, Ghana, Grèce, Guatemala, Guinée, Guinée équatoriale, Guyane, Haïti, Honduras, Hongrie, Îles Salomon, Inde, Indonésie, Iran (République islamique d’), Iraq, Irlande, Islande, Israël, Italie, Jamahiriya arabe libyenne, Jamaïque, Japon, Jordanie, Kazakhstan, Kenya, Kirghizistan, Koweït, Lesotho, Lettonie, Liban, Libéria, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Madagascar, Malawi, Maldives, Mali, Malte, Maroc, Maurice, Mauritanie, Mexique, Monaco, Mongolie, Mozambique, Namibie, Népal, Nicaragua, Niger, Nigéria, Norvège, Nouvelle-Zélande, Oman, Ouganda, Ouzbékistan, Pakistan, Panama, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pays-Bas, Pérou, Philippines, Pologne, Portugal, Qatar, République arabe syrienne, République centrafricaine, République de Corée, République de Moldova, République démocratique du Congo, République démocratique populaire lao, République dominicaine, République tchèque, République-Unie de Tanzanie, Roumanie, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Rwanda, Sainte-Lucie, Saint-Marin, Saint-Siège, Saint-Vincent-et-les Grenadines, Sénégal, Serbie‑et‑Monténégro, Seychelles, Sierra Leone, Slovaquie, Slovénie, Somalie, Soudan, Sri Lanka, Suède, Suisse, Suriname, Swaziland, Tadjikistan, Tchad, Thaïlande, Timor‑Leste, Togo, Tonga, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Turkménistan, Turquie, Ukraine, Uruguay, Venezuela, Viet Nam, Yémen, Zambie, Zimbabwe.

B. États parties qui ont fait la déclaration prévue au paragraphe 1 de l’article 14 de la Convention (46) à la date du 19 août 2005

Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Australie, Autriche, Azerbaïdjan, Belgique, Brésil, Bulgarie, Chili, Chypre, Costa Rica, Danemark, Équateur, Espagne, ex-République yougoslave de Macédoine, Fédération de Russie, Finlande, France, Géorgie, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Liechtenstein, Luxembourg, Malte, Mexique, Monaco, Norvège, Pays‑Bas, Pérou, Pologne, Portugal, République de Corée, République tchèque, Roumanie, Sénégal, Serbie‑et‑Monténégro, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Ukraine, Uruguay et Venezuela.

C. États parties qui ont accepté les amendements à la Convention adoptés à la quatorzième réunion des États parties * (39) à la date du 19 août 2005

Allemagne, Arabie saoudite, Australie, Bahamas, Belize, Bahreïn, Bulgarie, Burkina Faso, Canada, Chine, Chypre, Colombie, Costa Rica, Cuba, Danemark, Finlande, France, Guinée, Irlande, Iraq, Islande, Liechtenstein, Luxembourg, Mexique, Nouvelle‑Zélande, Norvège, Pays‑Bas (également Antilles néerlandaises et Aruba), Pologne, République arabe syrienne, République de Corée, République tchèque, Royaume‑Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Saint‑Siège, Seychelles, Suède, Suisse, Trinité‑et‑Tobago, Ukraine, Zimbabwe.

Annexe II

ORDRE DU JOUR DES SOIXANTE ‑SIXIÈME ET SOIXANTE ‑SEPTIÈME SESSIONS

A. Soixante ‑sixième session (22 février ‑11 mars 2005)

1.Adoption de l’ordre du jour.

2.Questions d’organisation et questions diverses.

3.Prévention de la discrimination raciale, y compris les mesures d’alerte rapide et la procédure d’action urgente.

4.Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention.

5.Présentation de rapports par les États parties conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention.

6.Examen des communications présentées conformément à l’article 14 de la Convention.

7.Suivi de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.

B. Soixante ‑septième session (2 ‑19 août 2005)

1.Adoption de l’ordre du jour.

2.Questions d’organisation et questions diverses.

3.Prévention de la discrimination raciale, y compris les mesures d’alerte rapide et la procédure d’action urgente.

4.Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention.

5.Présentation des rapports par les États parties conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention.

6.Examen des communications présentées conformément à l’article 14 de la Convention.

7.Procédure de suivi

8.Examen des pétitions, rapports et autres renseignements relatifs aux territoires sous tutelle, aux territoires non autonomes et à tous les autres territoires auxquels s’applique la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale, conformément à l’article 15 de la Convention.

9.Suivi de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.

10.Rapport présenté par le Comité à l’Assemblée générale à sa soixantième session au titre du paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention.

Annexe III

DÉCISIONS ET OPINIONS ADOPTÉES PAR LE COMITÉ EN APPLICATION DE L’ARTICLE 14 DE LA CONVENTION

A. Soixante ‑sixième session

Opinion concernant la

Communication n o 31/2003

Présentée par:Mme L. R. et consorts (représentés par le Centre européen pour les droits des Roms et la League of Human Rights Advocates)

Au nom de:La requérante

État partie:République slovaque

Date de la communication:5 août 2003

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, créé en application de l’article 8 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Réuni le 7 mars 2005,

Adopte ce qui suit:

OPINION

1.Les requérants sont Mme L. R.et 26 autres citoyens slovaques de souche rom résidant à Dobšiná (République slovaque). Ils affirment être victimes d’une violation par la République slovaque des alinéas a, c et d du paragraphe 1 de l’article 2, du paragraphe a) de l’article 4, de l’alinéa iii du paragraphe e) de l’article 5 et de l’article 6 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Ils sont représentés par un conseil, agissant pour le Centre européen pour les droits des Roms, Budapest (Hongrie) et la League of Human Rights Advocates, Bratislava (République slovaque).

Rappel des faits tels qu’ils ont été exposés

2.1Le 20 mars 2002, les conseillers de la municipalité de Dobšiná ont adopté la résolution no 251‑20/III‑2002‑MsZ, par laquelle ils ont approuvé ce que les requérants décrivent comme un plan pour la construction de logements bon marché pour les habitants roms de la ville. Environ 1 800 Roms vivent dans la localité dans des conditions qualifiées d’«épouvantables», la plupart des habitations consistant en des huttes couvertes de chaume ou des maisons en carton, sans eau potable ni toilettes ni système d’évacuation des eaux usées. Les conseillers ont demandé au maire d’élaborer un projet en vue d’obtenir les ressources nécessaires auprès d’un fonds public mis spécialement en place pour répondre aux problèmes de logement rencontrés par les Roms dans l’État partie.

2.2Certains habitants de Dobšiná et de villages voisins ont alors créé, sous l’égide du Président de la section de Dobšiná du Vrai parti national slovaque, un comité composé de cinq membres qui a fait rédiger la pétition suivante:

«Je ne suis pas d’accord avec le projet visant à construire des maisons bon marché pour les personnes d’origine tzigane sur le territoire de Dobšiná dans la mesure où cela conduirait à un afflux des villages voisins et même d’autres districts et régions de citoyens d’origine tzigane impossibles à intégrer.».

La pétition a été signée par quelque 2 700 habitants de Dobšiná et déposée auprès du conseil municipal le 30 juillet 2002. Le 5 août 2002, le conseil a examiné la pétition et voté à l’unanimité, «après avoir examiné les éléments de fait», l’annulation de la résolution précédente au moyen d’une seconde résolution qui mentionnait expressément la pétition.

2.3Le 16 septembre 2002, conformément à la législation applicable en la matière, le conseil des requérants a demandé au Procureur du district de Rožňava d’ouvrir une enquête sur la pétition discriminatoire, de poursuivre ses auteurs et d’annuler la seconde résolution de la municipalité au motif qu’elle était fondée sur une pétition discriminatoire. Le 7 novembre 2002, le Procureur de district a rejeté la demande invoquant une absence de compétence en la matière: «… la résolution en question a été adoptée par le conseil de la ville de Dobšiná dans l’exercice de ses pouvoirs autonomes; elle ne constitue pas un acte administratif émanant d’une administration publique et le Procureur n’est donc pas compétent pour contrôler la légalité de cet acte ou pour prendre des mesures de supervision en matière non pénale [sic].».

2.4Le 18 septembre 2002, le conseil des requérants a demandé à la Cour constitutionnelle de dire si les articles 12 et 33 de la Constitution, la loi sur le droit de pétition et la Convention‑cadre pour la protection des minorités nationales (Conseil de l’Europe) ont été violés, d’annuler la seconde résolution du conseil municipal et de contrôler la légalité de la pétition. Des informations complémentaires ont été fournies à deux reprises à la demande de la Cour. Le 5 février 2003, la Cour, siégeant à huis clos, a estimé que les requérants n’avaient apporté aucune preuve attestant qu’un droit fondamental avait été violé par la pétition ou par la seconde résolution du conseil municipal. Elle a jugé que ni la pétition ni la seconde résolution ne constituant des actes juridiques, elles étaient légitimes au regard du droit interne. Elle a également estimé que les citoyens avaient le droit de formuler des pétitions quel qu’en soit le contenu.

Teneur de la plainte

3.1Les requérants affirment que l’État partie a violé l’alinéa a du paragraphe 1 de l’article 2 en ne faisant pas en sorte que «toutes les autorités publiques et institutions publiques nationales et locales se conforment à cette obligation» [de ne se livrer à aucun acte ou pratique de discrimination raciale]. Se fondant sur la jurisprudence du Comité, ils font valoir qu’un conseil municipal est une autorité publique locale et que le conseil municipal de Dobšiná s’est livré à un acte de discrimination raciale en approuvant à l’unanimité la pétition et en annulant sa précédente résolution tendant à construire des logements bon marché mais décents pour la population rom locale.

3.2Les requérants affirment qu’il y a eu violation de l’alinéa c du paragraphe 1 de l’article 2 dans la mesure où l’État partie n’a pas «annulé toute loi ou règlement ayant pour effet d’instaurer la discrimination raciale ou de la perpétuer». Ni le Procureur de district ni la Cour constitutionnelle n’ont pris de mesure pour annuler la seconde résolution du conseil qui était fondée elle‑même sur une pétition discriminatoire. Les requérants font valoir également qu’il y a eu violation de l’alinéa d du paragraphe 1 de l’article 2 ainsi que du paragraphe a) de l’article 4 puisque l’État partie n’a pas pris de mesure pour «interdire la discrimination raciale pratiquée par des personnes, des groupes ou des organisations, et pour y mettre fin», s’étant abstenu d’enquêter sérieusement sur les faits de la cause et de poursuivre les auteurs de la pétition. Ils affirment que le libellé de la pétition peut être considéré comme «une incitation à la discrimination raciale» et se réfèrent à la décision du Comité dans l’affaire L. K. c. Pays ‑Bas dans laquelle il a été jugé que l’État partie n’avait pas suffisamment enquêté sur une pétition et des menaces verbales destinées à empêcher un immigrant de s’installer dans un logement subventionné.

3.3Les requérants affirment que l’alinéa iii du paragraphe e) de l’article 5 a été violé dans la mesure où l’État partie n’a pas sauvegardé le droit des requérants à un logement adéquat. Aux yeux des requérants, les conditions locales, décrites ci‑dessus, sont bien en deçà de ce qui est requis en matière de logement et des conditions de vie dans l’État partie, et auraient été améliorées par le maintien de la décision initiale du Conseil qui avait été annulée, sans possibilité de recours, à la suite d’une pétition discriminatoire.

3.4Enfin, les requérants estiment qu’il y a eu violation de l’article 6 dans la mesure où l’État partie ne leur a pas assuré une voie de recours effective contre des actes de discrimination commis à leur encontre à la fois par les auteurs de la pétition et par la seconde résolution du conseil, qui était motivée par cette discrimination et fondée sur elle. Ils font valoir qu’aucune mesure n’a été prise pour i) annuler la seconde résolution, ii) punir les auteurs de la pétition ou iii) faire en sorte qu’une telle discrimination ne se reproduise pas.

3.5Pour ce qui est de la recevabilité de la requête, les requérants déclarent que la décision de la Cour constitutionnelle est sans appel et qu’aucune autre procédure internationale d’enquête ou de règlement n’a été engagée.

Observations de l’État partie sur la recevabilité de la requête

4.1Dans ses observations du 26 novembre 2003, l’État partie conteste la recevabilité de la requête au motif que les requérants n’ont pas épuisé les recours internes. Tout d’abord, il fait valoir qu’ils ne se sont pas prévalus de la possibilité de contester la décision du Procureur de district, comme le permet l’article 34 de la loi sur les poursuites.

4.2Deuxièmement, pour ce qui est du recours constitutionnel, l’État partie affirme que, bien que la Cour constitutionnelle les y ait exhortés, les requérants n’ont pas «précisé [en ce qui concerne la seconde résolution du conseil municipal] quelle liberté fondamentale ou droit fondamental garanti par la Constitution, d’autres lois ou d’autres instruments internationaux par lesquels la République slovaque est liée aurait été violé». En conséquence, la Cour a statué que:

«Les dispositions des paragraphes 1 et 4 de l’article 12, des paragraphes 1 et 4 de l’article 13 et de l’article 35 de la Constitution interdisent, en termes généraux, la discrimination à l’égard des personnes physiques ou morales; toutefois, elles ne peuvent être invoquées sans que soient explicitement indiqués les effets d’une procédure discriminatoire appliquée par une autorité publique ou un organe administratif de l’État sur un droit fondamental ou une liberté fondamentale d’une personne physique ou morale. Un raisonnement analogue peut être suivi en ce qui concerne l’article 33 de la Constitution qui vise à prévenir tout préjudice (discrimination ou persécution) qui serait la conséquence directe de l’appartenance à une minorité nationale ou à un groupe ethnique … Aucun des droits des citoyens appartenant à une minorité et jouissant d’une protection constitutionnelle n’implique pour une municipalité une obligation correspondante d’adopter certaines décisions, c’est‑à‑dire des décisions sur des questions précises, telles que la construction de logements bon marché.».

4.3De l’avis de l’État partie, en rejetant la plainte «comme manifestement infondée sur le plan de la procédure», la Cour ne s’est pas prononcée sur le fond en raison d’un vice de forme imputable aux requérants. Il appartient donc à ces derniers d’adresser une nouvelle plainte «sur le fond» à la Cour constitutionnelle. Enfin, l’État partie affirme que les requérants n’ont pas invoqué une violation de la Convention devant la Cour bien que les instruments internationaux soient directement applicables et que la Cour puisse accorder une réparation en cas de violation de ces instruments.

Commentaires des requérants

5.1Dans leurs commentaires du 12 janvier 2004, les requérants ont répondu aux observations de l’État partie. Pour ce qui est de l’allégation selon laquelle ils n’ont pas déposé de requête aux fins du contrôle de légalité de la décision du Procureur de district, ils affirment que ce dernier était la seule autorité habilitée à engager des poursuites pénales. Sa décision ne donnait aucune indication quant à la possibilité d’introduire un nouveau recours. Qui plus est, rien ne garantit qu’un procureur d’un niveau supérieur aurait eu une autre position que celle du Procureur de district qui avait estimé que le conseil d’une ville ou d’une municipalité n’était pas un «organe de l’administration publique» dont les décisions pouvaient faire l’objet d’un contrôle de légalité. Cette position a été adoptée bien que le Comité ait rejeté un tel argument dans l’affaire Koptova. En l’absence de tout revirement dans une jurisprudence interne «fermement établie» en la matière et en l’absence de faits nouveaux, les requérants estiment que l’État partie n’a pas démontré qu’un procureur d’un rang plus élevé adopterait une position différente si la plainte était déposée à nouveau. Le Comité était arrivé à la même conclusion dans les affaires Koptova et Lackoc. Slovaquie sur la question de l’épuisement du recours proposé.

5.2Pour ce qui est de l’argument selon lequel une nouvelle requête devrait être déposée auprès de la Cour constitutionnelle, les requérants signalent que, dans le jugement, la décision est qualifiée de définitive et que dans l’affaire Koptova, le Comité avait d’ailleurs rejeté un tel argument. En conséquence, comme il y a peu de chances que de nouvelles requêtes adressées à l’un ou l’autre des deux organes aboutissent, les requérants estiment qu’ils ont épuisé tous les recours internes utiles. Ils ajoutent que les arguments de l’État partie devraient être envisagés dans le contexte de l’absence d’une loi générale contre la discrimination; les seuls comportements actuellement interdits sont l’incitation à la haine, la violence à motivation raciale et la discrimination dans le domaine de l’emploi.

5.3Aux arguments selon lesquels les conseils municipaux ne sont pas des organes de l’État, les requérants répondent en se référant à la recommandation générale XV du Comité concernant l’article 4 de la Convention qui dit le contraire. La loi de 1990 sur le système slovaque des municipalités établit un «lien direct» entre les municipalités et l’État, dans la mesure où ces dernières sont subordonnées aux pouvoirs publics sur le plan du financement, du fonctionnement et de l’organisation. Enfin, dans son opinion sur l’affaire Koptova, le Comité a jugé que les municipalités étaient des autorités publiques aux fins de la Convention. En conséquence, les requérants font valoir que la légalité de la résolution du conseil aurait dû être contrôlée par le Procureur de district et que la responsabilité internationale de l’État partie est engagée.

5.4Les requérants contestent l’argument de l’État partie selon lequel ils n’ont pas précisé dans la requête qu’ils ont introduite auprès de la Cour constitutionnelle les droits et les libertés fondamentaux qui, selon eux, avaient été violés. Ils affirment qu’ils l’avaient fait à la fois dans la plainte initiale et dans leurs mémoires ultérieurs. Ils s’étaient plaints i) de violations du droit à l’égalité de traitement et à la dignité quelle que soit l’origine ethnique (art. 12), ii) de violation de leur droit de ne pas subir de préjudice en tant que membres d’un groupe ethnique ou d’une minorité nationale, (art. 33), iii) de violations de leur droit au logement fondées sur l’origine ethnique et iv) de discrimination à l’égard d’un groupe ethnique, les Roms. Ils signalent qu’ils continuent de vivre dans des conditions «épouvantables» qui sont loin de répondre aux normes. Ils affirment que les articles 12 et 33 de la Constitution ne sont pas de simples dispositions accessoires qui, prises séparément, n’ont aucune substance, mais qu’elles confèrent au contraire des droits substantiels. Ils font également observer que, même si la Constitution slovaque ne protège pas le droit au logement, elle accorde la primauté à des instruments internationaux tels que, outre la Convention, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qui protège le droit au logement et interdit la discrimination. Les requérants se sont également expressément référés dans leur requête à la Convention‑cadre du Conseil de l’Europe. En tout état de cause, ils affirment qu’ils se sont acquittés de l’obligation qui leur incombe en vertu de la jurisprudence applicable en la matière, en soulevant des questions de fond.

5.5Les requérants font également valoir que la discrimination raciale dont ils ont été victimes représente un traitement dégradant, interdit par l’article 12 de la Constitution. Ils se réfèrent à la jurisprudence de la Commission européenne des droits de l’homme dans l’affaire des Asiatiques de l’Afrique de l’Est, selon laquelle le refus de l’accès à des immigrants du fait de la couleur de leur peau et de leur race constituait une violation de l’article 3 de la Convention européenne et une atteinte à la dignité humaine. Ils affirment en outre que, selon des principes bien établis, si un État partie décide d’octroyer un avantage particulier (qu’il n’était pas nécessairement tenu d’octroyer au départ), cet avantage ne peut être conféré de manière discriminatoire. Ainsi, même si les requérants ne jouissaient pas dès le départ d’un droit au logement (ce qu’ils contestent), ce droit ne peut être annulé, pour des motifs discriminatoires, après leur avoir été reconnu.

5.6Enfin, les requérants contestent toute conclusion selon laquelle ils ne seraient pas «des victimes» au motif que la Cour constitutionnelle a estimé qu’aucune violation de la Constitution slovaque n’avait été commise. Ils font valoir qu’ils font partie d’un groupe particulier de personnes auquel certains droits ont été octroyés puis retirés. En effet, dès lors qu’ils sont «directement lésés par les résolutions», pour utiliser les termes employés par le Comité dans son avis dans l’affaire Koptova, ils peuvent être considérés comme «des victimes». En outre, étant donné que la plainte déposée auprès du Procureur du district n’a pas débouché sur un examen quant au fond de la légalité de la résolution du conseil municipal de Dobšiná ou sur une enquête pénale sur l’incitation à la discrimination raciale, ils estiment qu’ils ont été privés de recours. Les requérants se réfèrent à cet égard aux observations finales que le Comité a adoptées à l’issue de l’examen du rapport périodique de l’État partie, au sujet de la discrimination dans l’accès au logement.

Décision du Comité concernant la recevabilité de la requête

6.1À sa soixante‑quatrième session, le 27 février 2004, le Comité a examiné la question de la recevabilité de la requête. Pour ce qui est de l’affirmation de l’État partie selon laquelle les requérants n’ont pas soumis de nouveau leur plainte à un autre procureur après qu’elle eut été rejetée par le Procureur de district, le Comité a noté que le Procureur de district avait rejeté la plainte pour incompétence pour statuer sur un acte émanant du conseil municipal. De l’avis du Comité, en ce qui concerne la décision d’incompétence, l’État partie n’avait pas démontré en quoi le fait de présenter de nouveau la plainte offrirait un recours utile s’agissant de la violation alléguée de la Convention. Par conséquent, une telle démarche n’était pas nécessaire pour l’épuisement des recours internes. À cet égard le Comité rappelle sa propre jurisprudence, ainsi que celle du Comité des droits de l’homme.

6.2Pour ce qui est de l’affirmation selon laquelle les requérants devraient soumettre à nouveau leur plainte à la Cour constitutionnelle, le Comité a rappelé que, selon sa jurisprudence, dès lors que la Cour a rejeté une requête constitutionnelle dûment argumentée dénonçant une discrimination raciale parce que les requérants n’avaient pas prouvé l’existence à première vue d’une violation des droits en question, il ne saurait être exigé d’un requérant qu’il présente à nouveau sa requête à la Cour. En l’espèce, le Comité a noté que les requérants avaient aussi invoqué plusieurs droits constitutionnels qui auraient été violés, notamment les droits à l’égalité et à la non‑discrimination. Dans ces circonstances, l’État partie n’avait pas démontré en quoi le fait de soumettre à nouveau la requête à la Cour constitutionnelle après qu’elle l’eut rejetée permettrait d’aboutir à un résultat différent. Il s’ensuivait que les requérants avaient épuisé les recours utiles et disponibles auprès de la Cour constitutionnelle.

6.3Par ailleurs le Comité a rappelé sa jurisprudence selon laquelle les actes d’un conseil municipal, y compris l’adoption de résolutions publiques à caractère juridique comme celle qui était adoptée en l’espèce, étaient des actes émanant d’autorités publiques au sens des dispositions de la Convention. Il s’ensuivait qu’ayant été directement et personnellement affectés par l’adoption de la résolution, ainsi que par son annulation ultérieure après la présentation de la pétition, les requérants pouvaient revendiquer à juste titre le statut de «victimes» pour la présentation de leur requête au Comité.

6.4Le Comité a considéré aussi que les allégations dont faisaient état les requérants étaient suffisamment étayées aux fins de la recevabilité. En l’absence de tout autre obstacle à cet égard, il a donc déclaré la plainte recevable.

Demande de l’État partie visant au réexamen de la recevabilité et de ses observations sur le fond

7.1Dans une lettre du 4 juin 2004, l’État partie a présenté une demande de réexamen de la recevabilité et des observations qu’il avait présentées sur le fond de la requête. Il a fait valoir que les requérants n’avaient pas épuisé les recours internes, puisqu’ils auraient pu se prévaloir d’un recours utile en présentant une requête conformément à l’article 27 de la Constitution et à la loi sur le droit de pétition, pour attaquer la seconde résolution du conseil municipal et/ou la pétition présentée contre la résolution initiale. La présentation d’une telle requête aurait obligé la municipalité à accepter la plainte en révision et à examiner la situation sur le plan des faits. Cette voie de recours n’est soumise à aucun délai et elle est toujours ouverte aux requérants.

7.2L’État partie fait valoir que le fait que les requérants n’ont pas obtenu satisfaction auprès des autorités de poursuite et des tribunaux ne peut, à lui seul, représenter un déni de recours utile. Il rappelle la décision rendue par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Lacko  et consorts c. République slovaqueselon laquelle un recours, au sens de l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme, «ne signifie pas un recours qui aboutira nécessairement, mais simplement un recours accessible devant une autorité compétente pour examiner le bien‑fondé d’une plainte». Ce sont les requérants qui devraient être tenus pour responsables de l’échec de leur plainte devant la Cour constitutionnelle, parce qu’ils n’ont pas spécifié le droit fondamental dont ils alléguaient la violation par la résolution du conseil municipal, mais se sont bornés à invoquer la disposition générale relative à l’égalité figurant à l’article 12 de la Constitution.

7.3L’État partie rejette l’avis exprimé par le Comité selon lequel il suffisait aux requérants d’invoquer certains articles pertinents de la Constitution, sans faire valoir un dommage concret comme l’exige en règle générale la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et comme la Cour l’a expressément demandé aux requérants en l’espèce. L’État partie considère que l’obligation de caractériser l’atteinte, c’est-à-dire d’invoquer la violation d’une garantie générale relative à l’égalité ou à la non‑discrimination en liaison avec un droit précis est pleinement compatible avec l’esprit de la Convention.

7.4Concernant les recours effectivement utilisés par les requérants, l’État partie fait valoir que la requête qu’ils ont adressée le 16 septembre 2002 au Procureur du district de Rožňava se bornait à affirmer que la pétition adressée au conseil municipal constituait un abus du droit de présenter une pétition aux termes de la loi sur le droit de pétition, selon laquelle une pétition ne peut ni inciter à une violation de la Constitution ni dénier ou restreindre les droits individuels, politiques ou autres d’une personne en raison de sa nationalité, de son sexe, de sa race, de son origine, de ses opinions politiques ou autres, de ses croyances religieuses ou de son statut social, et ne doit pas être une incitation à la haine et à l’intolérance pour les motifs indiqués plus haut, ni à la violence ou à un outrage aux bonnes mœurs. Les requérants n’ont pas exposé en quoi les circonstances concrètes ont constitué un abus du droit de pétition, ni mentionné la question de la discrimination raciale, de l’appartenance au groupe ethnique rom ni d’autres circonstances mettant en jeu la Convention.

7.5Dans leur plainte à la Cour constitutionnelle, les requérants ont demandé une décision selon laquelle la résolution du conseil municipal portait atteinte au «droit fondamental des requérants ce que leurs droits fondamentaux et libertés fondamentales leur soient garantis sans distinction de sexe, de race, de couleur, de langue, d’origine nationale, de nationalité ou d’origine ethnique en vertu de l’article 12 de la Constitution» et au «droit fondamental du pétitionnaire de ne subir aucun préjudice en raison de son appartenance à une minorité nationale ou à un groupe ethnique garanti à l’article 33 de la Constitution». L’État partie observe que la Cour constitutionnelle a demandé notamment aux requérants de compléter leur plainte en précisant «les droits fondamentaux ou les libertés fondamentales qui ont été violés, les actes et/ou les décisions qui ont été à la source de la violation, [et] les décisions du conseil municipal qu’ils considèrent comme ayant des motivations ethniques ou raciales». Or, les requérants ont omis de spécifier les droits dont ils alléguaient la violation et la Cour constitutionnelle a donc rejeté la plainte comme étant dénuée de fondement. Compte tenu de ce qui précède, l’État partie demande le réexamen de la recevabilité de la requête.

7.6Quant au fond, l’État partie fait valoir que les requérants n’ont pas démontré l’existence d’un acte de discrimination raciale au sens de la Convention. Premièrement, il avance que les requérants ont dénaturé les faits sur des points importants. Il n’est pas exact que la résolution initiale adoptée par le conseil municipal approuvait un plan de construction de logements à bon marché; en revanche, cette résolution «approuvait l’idée de construire des logements à bon marché − maisons individuelles et/ou immeubles d’habitation», sans préciser quels en seraient les futurs occupants, Roms ou autres. Il est inexact aussi d’affirmer que le conseil a ordonné au maire de la ville d’élaborer un projet pour obtenir un financement auprès d’un fonds public mis en place spécialement pour répondre aux problèmes de logement des Roms; la résolution se bornait à recommander que le maire, pour reprendre les termes de l’État partie, «envisage de préparer les descriptifs de projet et d’obtenir des subventions publiques pour financer le projet».

7.7L’État partie souligne que ces résolutions, qui sont simplement des règles d’organisation internes, ne constituent pas des ordonnances à caractère obligatoire et ne confèrent aucun droit objectif ou subjectif pouvant être invoqué devant les tribunaux ou d’autres autorités. Il s’ensuit que ni les Roms ni les autres habitants de Dobšiná ne peuvent prétendre à une violation de leur «droit à un logement convenable» ni invoquer une discrimination découlant desdites résolutions. De même, la Cour constitutionnelle a jugé que «aucun des droits des citoyens appartenant à une minorité et jouissant d’une protection constitutionnelle n’implique pour une municipalité une obligation correspondante d’adopter certaines décisions ou d’accomplir certaines activités, telles que la construction de logements à bon marché». Les résolutions des conseils municipaux, qui sont des documents de politique générale sur la question du logement dans ladite municipalité, ne mentionnent pas les Roms et les requérants en déduisent à tort un lien de causalité. Le caractère facultatif de la résolution ressort également de l’absence de tout calendrier des travaux de construction, étant donné que ceux‑ci dépendent nécessairement du financement public.

7.8L’État partie fait observer que la seconde résolution, après avoir annulé la première, donnait pour instruction au conseil municipal, selon les termes employés par l’État partie, «d’élaborer une proposition sur la question de la présence de citoyens non intégrables dans la ville de Dobšiná et de soumettre cette proposition à un débat dans les organes de la municipalité et lors d’une séance publique ouverte aux citoyens». Cela indique clairement que la résolution fait partie d’un effort permanent pour trouver une solution de principe à la présence de «citoyens non intégrables» dans la ville. Il s’ensuit que les mesures d’orientation prises par le conseil municipal pour proposer un logement aux catégories de population ayant de faibles revenus ne relèvent pas du champ d’application de la Convention. Au contraire, les activités du conseil municipal peuvent être considérées comme une tentative positive pour offrir à ce groupe de citoyens, indépendamment de l’origine ethnique, des conditions plus favorables. L’État partie relève que ces mesures prises par la municipalité dans le domaine du logement s’inscrivaient dans le cadre plus général de la résolution no 335/2001 du Gouvernement slovaque approuvant un programme de construction d’appartements municipaux à louer destinés aux locataires à faibles revenus et qu’elles doivent être interprétées dans ce contexte.

7.9L’État partie invoque la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme dans laquelle cette dernière a refusé de donner suite à des plaintes pour discrimination présentées par les gens du voyage parce que des permis de séjour leur étaient refusés au nom de l’intérêt général, à savoir la protection de l’environnement, les projets de construction de la municipalité et d’autres raisons analogues. L’État partie fait valoir que, en l’espèce, les habitants de la ville, résolus à améliorer l’image de leur ville ainsi que leurs biens, avaient des craintes légitimes concernant certains risques liés à un afflux massif de personnes venant habiter dans des logements à bon marché, avec les répercussions sociales négatives que cela pourrait avoir. On note qu’un certain nombre de Roms ont également signé la pétition en question.

7.10L’État partie fait valoir que les références à d’autres affaires examinées par le Comité, comme les affaires Lacko et Koptova, sont déplacées car l’affaire à l’examen est différente sur le plan des faits et du droit. En particulier, dans l’affaire Koptova, il n’y avait pas de programme politique touchant la construction de logements. L’État partie observe aussi que, le 20 mai 2004, le Parlement a adopté une nouvelle loi antidiscriminatoire énonçant les critères à respecter pour l’application du principe de l’égalité de traitement et prévoyant des recours en justice pour les cas de violation. L’État partie rejette également la référence aux arrêts de la Cour européenne dans les affaires Asiatiques d’Afrique de l’Est et Linguistique belge. Il souligne que la seconde résolution n’a pas annulé un projet existant (supprimant ainsi des avantages ou des droits existants), mais a reformulé les principes devant guider la politique du logement dans la municipalité.

7.11Au sujet de l’article 6, l’État partie reprend les arguments déjà exposés au sujet de la recevabilité de la requête, à savoir que ses tribunaux et autres instances examinent intégralement et conformément à la loi, en respectant toutes les garanties de procédure, toute plainte pour discrimination raciale. En ce qui concerne les poursuites pénales visant les auteurs de la pétition au motif qu’elle diffuse la haine raciale, l’État partie fait valoir que les requérants n’ont pas apporté la preuve que les autorités de l’État ont pris des mesures contraires à la loi ou que la pétition ou sa teneur étaient illégales. Par conséquent, aucune violation du droit à une voie de recours effective protégé par l’article 6 n’a été établie.

Commentaires des requérants sur les observations de l’État partie

8.1En réponse à l’argument de l’État partie touchant le recours disponible sous forme de requête, les requérants font valoir que la seule obligation établie par la loi est que cette dernière soit reçue par l’autorité compétente. La Cour constitutionnelle a considéré qu’il n’existe aucune obligation d’examiner et de donner suite à la requête; selon les termes utilisés par la Cour, «ni la Constitution ni la loi sur les pétitions ne donnent de garanties concrètes quant à l’acceptation ou aux conséquences du rejet des requêtes». Il en résulte qu’un recours extraordinaire de ce type ne peut être considéré comme un recours effectif qui doit être épuisé aux fins de la recevabilité d’une communication devant le Comité.

8.2En ce qui concerne le fond, les requérants rejettent la qualification donnée par l’État partie aux résolutions du conseil municipal, qui seraient selon lui dénuées d’effet juridique, et ils font référence à la décision du Comité concernant la recevabilité dans laquelle ce dernier a décidé que les «résolutions publiques à caractère juridique comme celle … adoptée en l’espèce» constituaient des actes émanant des autorités publiques. Les requérants contestent également que des Roms aient signé la pétition contre la première résolution du conseil municipal, et indiquent que cette affirmation repose sur une déclaration figurant dans une lettre datée du 28 avril 2004, adressée au Ministère slovaque des affaires étrangères par le maire de Dobšiná, sans aucun élément de preuve à l’appui. En tout état de cause, les requérants font valoir que l’origine ethnique des signataires de la pétition n’entre pas en ligne de compte, étant donné que la teneur, l’objectif et l’effet de cette pétition sont discriminatoires. Les requérants font également valoir que l’usage répété du terme «citoyens non intégrables» par l’État partie est révélateur des préjugés des institutions à l’égard des Roms.

8.3Les requérants font valoir que, contrairement à ce qu’affirme l’État partie, il existe bien un lien de causalité irréfutable entre les résolutions du conseil municipal, la pétition et la discrimination dans l’accès au logement dont souffrent les requérants. Ils font valoir que la réalisation du projet de construction de logements sociaux se serait traduite pour eux par une vie plus digne et une santé mieux protégée. Toutefois, à ce jour, les autorités de l’État partie n’ont pris aucune mesure pour remédier aux difficultés de logement des requérants. Ils font valoir que leur situation s’inscrit dans un contexte plus large de discrimination dans l’accès au logement qui fait débat dans l’État partie et ils joignent, à l’appui de leur affirmation, plusieurs rapports d’organes de surveillance internationaux.

8.4Les requérants rejettent l’argument selon lequel les autorités de l’État partie n’avaient aucune obligation, en premier lieu, de fournir un logement, et invoquent les obligations énoncées à l’article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (droit à «un niveau de vie suffisant … y compris … un logement»). En tout état de cause, ils font valoir que le principe formulé dans l’affaire linguistique belge vaut non seulement pour le principe selon lequel, lorsqu’un État partie décide d’accorder un avantage, il doit le faire sans discrimination, mais aussi pour le principe selon lequel, ayant décidé d’appliquer une certaine mesure − en l’espèce, réaliser le programme de logement −, un État partie ne peut décider ultérieurement de ne pas l’appliquer en se fondant sur des considérations discriminatoires.

Délibérations du Comité

Réexamen de la question de la recevabilité

9.1L’État partie a demandé au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, en vertu du paragraphe 6 de l’article 94 du Règlement intérieur, de reconsidérer sa décision concernant la recevabilité. Le Comité doit par conséquent décider si la requête demeure recevable à la lumière des nouveaux renseignements communiqués par les parties.

9.2Le Comité note que, dans sa demande de réexamen, l’État partie soulève la question du recours possible constitué par une requête adressée à l’autorité municipale, en invoquant les affaires actuellement à l’examen. Le Comité observe, toutefois, qu’en vertu du droit de l’État partie les autorités municipales ont pour seule obligation de recevoir la requête, mais non de l’examiner ou de se prononcer sur la suite à lui donner. De surcroît, le Comité observe qu’il est capital, pour qu’un recours soit utile, que la procédure soit indépendante de l’autorité dont la décision est attaquée. Or, en l’espèce, la procédure consisterait à présenter de nouveau la plainte à l’organe même qui s’était initialement prononcé à son sujet, à savoir le conseil municipal. Dans ces conditions, le Comité ne peut considérer le droit de pétition (requête) comme un recours interne qui doit être épuisé aux fins du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention.

9.3Quant aux autres arguments de l’État partie, le Comité considère qu’ils reprennent d’une manière générale les arguments déjà avancés au cours de l’examen initial de la recevabilité de la communication. Le Comité a déjà résolu ces questions lors du premier examen de la communication; par conséquent, il serait déplacé que le Comité réexamine ses conclusions au stade actuel de ses délibérations.

9.4En conclusion, par conséquent, le Comité rejette la demande de l’État partie en faveur d’un réexamen de la recevabilité de la communication et procède à son examen quant au fond.

Examen quant au fond

10.1Agissant en application du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Comité a examiné les renseignements fournis par le requérant et l’État partie.

10.2Le Comité observe, d’emblée, qu’il doit établir qu’un acte de discrimination raciale, au sens de l’article premier de la Convention, s’est produit avant de pouvoir déterminer quelles sont, le cas échéant, les obligations de fond de la Convention, à savoir prévenir de tels actes et offrir une protection et des voies de recours contre eux, qui ont été violées par l’État partie.

10.3Le Comité rappelle que, sous réserve de certaines limitations qui ne sont pas applicables en l’espèce, l’article premier de la Convention définit la discrimination raciale comme suit: «toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, dans des conditions d’égalité, des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique».

10.4L’État partie fait valoir, premièrement, que les résolutions du conseil municipal qui sont attaquées ne font pas mention des Roms, et doivent donc être distinguées des résolutions visées, par exemple, dans l’affaire Koptova, affaire où la discrimination raciale était a priori en cause. Le Comité rappelle que la définition de la discrimination raciale donnée à l’article premier n’englobe pas seulement les mesures qui sont explicitement discriminatoires, mais aussi les mesures qui ne sont pas discriminatoires à première vue mais le sont dans les faits et dans leurs effets, c’est-à-dire des mesures qui représentent une discrimination indirecte. Pour évaluer l’existence d’une discrimination indirecte, le Comité doit prendre pleinement en compte les circonstances et le contexte particuliers entourant la requête, puisque, par définition, la discrimination indirecte ne peut être démontrée que par des preuves indirectes.

10.5En l’espèce, les circonstances ayant entouré l’adoption des deux résolutions par le conseil municipal de Dobšiná et la pétition qui a été présentée dans l’intervalle au conseil municipal après sa première résolution montrent à l’évidence que cette pétition était sous‑tendue par des considérations ethniques et qu’elle a été interprétée dans ce sens par le conseil, qui en a fait la première considération sinon la seule pour annuler sa première résolution. En conséquence, le Comité considère que les requérants ont établi l’existence d’une distinction, d’une exclusion ou d’une restriction fondée sur l’origine ethnique, et il rejette cet aspect de l’objection de l’État partie.

10.6L’État partie fait valoir, en deuxième lieu, que la résolution du conseil municipal ne conférait pas un droit direct et/ou opposable à un logement, mais constituait plutôt une étape dans un processus complexe d’élaboration d’une politique en matière de logement. Ce raisonnement implique que la seconde résolution du conseil municipal, même si elle avait des motivations ethniques, ne constituait pas une mesure «ayant pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, dans des conditions d’égalité, des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique», au sens du paragraphe 1 de l’article premier (fin du paragraphe). Le Comité fait observer que, dans les sociétés contemporaines complexes, l’exercice concret de nombreux droits économiques, sociaux et culturels, notamment ceux qui concernent le logement, dépend tout d’abord d’une série de mesures administratives et politiques que doivent prendre les autorités compétentes de l’État partie. En l’espèce, la résolution du conseil municipal définissait clairement une politique positive de construction de logements et chargeait le maire de prendre ensuite les mesures nécessaires pour la mettre en œuvre.

10.7De l’avis du Comité, ce serait aller à l’encontre du but de la Convention et faire preuve d’un formalisme excessif que de considérer que la dernière étape de l’application concrète d’un droit ou d’une liberté doit se dérouler d’une manière non discriminatoire, tandis que les éléments préalables et nécessaires (la prise de décisions) directement liés à cette application en seraient dissociés et échapperaient à tout examen. Par conséquent, le Comité considère que les résolutions du conseil municipal, qui définissaient au départ une importante mesure d’orientation et d’application concrète visant la réalisation du droit au logement pour ensuite l’annuler et la remplacer par une mesure plus faible, si elles sont prises ensemble, ont effectivement pour effet de compromettre la reconnaissance ou l’exercice dans des conditions d’égalité du droit au logement, droit de l’homme protégé par le paragraphe iii) de l’article 5 c) de la Convention ainsi que par l’article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité rejette par conséquent l’objection de l’État partie sur ce point.

10.8Ayant ainsi constaté l’existence d’un acte de discrimination raciale, le Comité rappelle sa jurisprudence, exposée au paragraphe 6.3 ci‑dessus, concernant l’examen de la recevabilité de la requête, à savoir que les actes des conseils municipaux, y compris l’adoption de résolutions publiques à caractère juridique comme c’est le cas en l’espèce, constituaient des actes émanant d’autorités publiques au sens des dispositions de la Convention. Il s’ensuit que la discrimination raciale en question est imputable à l’État partie.

10.9En conséquence, le Comité constate que l’État partie a violé l’obligation qui lui incombe, en vertu du paragraphe 1 a) de l’article 2 de la Convention, de ne se livrer à aucun acte ou pratique de discrimination raciale et de faire en sorte que toutes les autorités publiques se conforment à cette obligation. Le Comité constate aussi que l’État partie a violé son obligation de garantir le droit de chacun à l’égalité devant la loi dans la jouissance du droit au logement, contrevenant ainsi au paragraphe d) iii) de l’article 5 de la Convention.

10.10 Quant à la plainte formulée au titre de l’article 6, le Comité observe que cette obligation exige, au minimum, que le système juridique de l’État partie offre une voie de recours dans les cas où un acte de discrimination raciale au sens de la Convention a été démontré, que ce soit devant les tribunaux nationaux ou, en l’espèce, devant le Comité. Le Comité ayant établi l’existence d’un acte de discrimination raciale, il s’ensuit nécessairement que le défaut de voies de recours effectives devant les tribunaux de l’État partie révèle une violation de l’article 6 de la Convention.

10.11 Le Comité considère que les autres allégations des requérants n’ajoutent pas d’éléments de fond aux conclusions exposées ci‑dessus et n’en poursuivra donc pas l’examen.

11.Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, agissant en application du paragraphe 7 de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, estime que les faits dont il est saisi font apparaître des violations du paragraphe 1 a) de l’article 2, du paragraphe e) iii) de l’article 5 et de l’article 6 de la Convention.

12.Conformément à l’article 6 de la Convention, l’État partie est tenu d’assurer aux requérants une voie de recours effective. L’État partie devrait prendre en particulier des mesures pour que les requérants soient placés dans la même situation qu’après l’adoption de la première résolution du conseil municipal. L’État partie est également tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent plus.

13.Le Comité souhaite recevoir de la République slovaque, dans un délai de 90 jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à l’opinion du Comité. L’État partie est prié également de diffuser largement l’opinion du Comité.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol, en français et en russe. Paraîtra ultérieurement en arabe et en chinois dans le rapport annuel présenté par le Comité à l’Assemblée générale.]

Notes

Opinion concernant la

Communication n o  32/2003

Présentée par:

M. Emir Sefic (représenté par le Centre de documentation et de conseil en matière de discrimination raciale)

Au nom de:

Le requérant

État partie:

Danemark

Date de la communication:

4 août 2003

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, créé en application de l’article 8 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Réuni le 7 mars 2005,

Adopte ce qui suit:

OPINION

1.Le requérant est M. Sefic Emir, citoyen bosniaque, résidant actuellement au Danemark, où il est titulaire d’un permis de résidence temporaire et d’un permis de travail. Il affirme être victime de violations par le Danemark du paragraphe 1 d) de l’article 2, et des articles 5 et 6 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Il est représenté par le Centre de documentation et de conseil en matière de discrimination raciale (DRC), une organisation non gouvernementale établie au Danemark.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1Le 22 juillet 2002, le requérant a contacté la société Fair Insurance A/S pour souscrire une assurance automobile, couvrant à la fois la perte et les dommages, et la responsabilité civile. Il lui a été répondu qu’il n’était pas possible de l’assurer car il ne parlait pas le danois. La conversation s’est déroulée en anglais, et l’employé de la compagnie a parfaitement compris sa demande.

2.2À la fin de juillet 2002, le requérant s’est adressé au DRC, qui a demandé à la compagnie FairInsurance A/S de confirmer les allégations du requérant. Entre‑temps, celui‑ci a une nouvelle fois contacté la compagnie et sa demande a été rejetée pour les mêmes motifs. Par lettre datée du 23 septembre 2002, FairInsurance A/S a confirmé qu’il était nécessaire de connaître le danois pour pouvoir souscrire une assurance auprès d’elle pour les raisons suivantes:

«… nous devons nous assurer que nous répondons au besoin du client, c’est‑à‑dire que nous pouvons garantir que le risque couvert par l’assurance et le prix sont corrects dans toute la mesure possible. … que le client comprend les conditions et les droits afférents à toute assurance … qu’en cas de demande d’indemnisation, en particulier lorsque le dommage est substantiel (accident, incendie, etc.), il peut expliquer ce qui s’est passé afin que le traitement et l’indemnisation adéquats lui soient accordés.

Pour nous acquitter de cette tâche, il est … essentiel que le dialogue ait lieu dans une langue que les clients et les employés connaissent. Or pour le moment nous ne pouvons satisfaire cette condition et offrir un service à nos clients qu’en danois. Cette situation s’explique par le fait que nous sommes une compagnie jeune (créée il y a trois ans et demi) et relativement petite, dont les ressources limitées ne lui permettent pas de recruter des chargés de clientèle qui ont une connaissance des questions d’assurance dans des langues autres que le danois, ou d’établir ou de tenir à jour des documents relatifs à l’assurance dans d’autres langues.».

2.3Le 8 octobre 2002, le DRC a déposé plainte auprès de l’Autorité danoise de contrôle financier, chargée du contrôle des sociétés financières. Par lettre du 25 novembre 2002, l’Autorité de contrôle a indiqué que la plainte devait être adressée au Conseil de recours des assurances (le Conseil). Elle allait toutefois étudier la question de savoir si le refus général d’assurer pour des raisons de langue était conforme au droit danois. Elle a souligné qu’en vertu de l’article 1 1) de l’instruction relative à l’assurance en responsabilité civile pour les véhicules à moteur (no 585, 9 juillet 2002), la compagnie est légalement tenue d’offrir à tout client une assurance en responsabilité civile.

2.4Le 12 décembre 2002, le DRC a porté plainte devant le Conseil, lui demandant expressément si l’exigence linguistique était compatible avec la loi contre la discrimination. Le 31 janvier 2003, le Conseil a informé le DRC qu’il était hautement improbable qu’il examine la légalité de cette exigence au regard de tout texte législatif autre que la loi relative aux conventions d’assurance. Toutefois, l’affaire allait recevoir l’attention voulue. La lettre contenait également une réponse, datée du 29 juillet 2003, de Fair Insurance A/S au Conseil, qui indiquait ce qui suit:

«En ce qui concerne la loi relative aux conventions d’assurance … nous n’ignorons pas que toute personne qui accepte nos conditions d’assurance peut exiger de pouvoir souscrire une assurance en responsabilité civile. Nous regrettons que M. Emir Sefic n’ait pas pu souscrire une assurance en responsabilité civile comme il l’aurait souhaité. À cet égard, nous avons expliqué de manière plus détaillée à nos employés les règles juridiques applicables à l’assurance de responsabilité.».

2.5Le 10 janvier 2003, l’Autorité de contrôle a informé le DRC qu’elle se fonderait sur l’article 3 de la loi sur les activités financières pour déterminer si Fair Insurance A/S avait respecté «les principes de l’activité commerciale et les bonnes pratiques». Le 11 mars 2003, elle a informé le DRC que, selon elle, l’exigence linguistique n’était pas contraire à l’article 3. L’Autorité de contrôle n’a pas abordé la question de savoir si cette exigence violait tout autre texte législatif, en particulier la loi contre la discrimination.

2.6Le 12 décembre 2002, le DRC a adressé une plainte au chef de la police de Copenhague (le chef de la police). Le 24 avril 2003, celui‑ci a informé le DRC qu’«il ressort des documents reçus que la discrimination éventuelle consiste uniquement à exiger des clients qu’ils parlent danois afin de faciliter l’organisation du travail au sein de la compagnie. L’interdiction prévue à l’article 1 1) de la loi contre la discrimination ne s’applique pas à une discrimination fondée sur cette explication et objectivement motivée».

2.7Le 21 mai 2003, le DRC a introduit un recours auprès du Procureur régional de Copenhague (le Procureur). Le 13 juin 2003, celui‑ci a rejeté le recours sur le fondement de l’article 749 1) de la loi sur l’administration de la justice. Il a indiqué que l’exigence linguistique «n’était pas fondée sur la race ou l’origine ethnique du client, ou sur un autre critère similaire, mais sur le désir de communiquer avec lui en danois, les employés de la compagnie n’étant pas qualifiés pour traiter de questions d’assurance dans une langue autre que le danois». Selon lui, «la discrimination fondée sur cette base linguistique claire, associée à l’information donnée par la compagnie, n’est pas couverte par la loi sur l’interdiction d’une différence de traitement fondée sur la race, etc. En outre, le fait que Fair Insurance A/S ait reconnu qu’elle était tenue d’offrir une assurance en responsabilité civile à Emir Sefic, conformément à la loi sur les conventions d’assurance, n’est pas pertinent au regard de la loi sur l’interdiction d’une différence de traitement fondée sur la race, etc… La présente analyse se fonde sur les informations fournies par Fair Insurance A/S, selon laquelle c’est par erreur qu’une assurance en responsabilité civile n’a pas été proposée à Emir Sefic.».

2.8Le requérant affirme qu’il a épuisé les recours internes. En effet, aucune décision d’un procureur régional relative à l’enquête des services de police ne peut être attaquée devant une autre autorité. La question de l’opportunité d’engager des poursuites relevant entièrement du pouvoir d’appréciation de la police, il est impossible de porter l’affaire devant les tribunaux danois. Le requérant fait valoir qu’une action au civil au titre de la loi sur la responsabilité civile ne serait pas utile, puisque le chef de la police et le Procureur ont rejeté sa requête. En outre, dans une décision du 5 février 1999, la Haute Cour de l’Est a affirmé qu’un incident en matière de discrimination raciale n’implique pas, en soi, une atteinte à l’honneur et à la réputation d’une personne au titre de l’article 26 de la loi sur la responsabilité civile. Partant, la discrimination raciale en soi ne saurait se traduire par une demande d’indemnisation de la victime.

Teneur de la plainte

3.1En ce qui concerne la définition de la discrimination énoncée au paragraphe 1 de l’article premier de la Convention, le requérant fait valoir que, bien que le critère de la langue n’y figure pas expressément, la discrimination peut être en contradiction avec l’obligation énoncée dans la Convention, en particulier si ledit critère constitue en fait une discrimination fondée, notamment, sur l’origine nationale ou ethnique, la race ou la couleur, dans la mesure où il a un tel effet. En outre, tout critère linguistique visant à exclure, notamment, des clients ayant telle ou telle origine nationale ou ethnique serait contraire à l’article premier de la Convention. En effet, pour constituer un motif légal de discrimination, un tel critère devrait également avoir un objectif légitime et respecter le principe de proportionnalité.

3.2Le requérant soutient que l’État partie a violé le paragraphe 1 d) de l’article 2 et l’article 6 en n’assurant pas de recours effectif contre une violation des droits visés à l’article 5. Il rappelle les décisions du Comité dans les affaires L. K. c.Pays ‑Baset Habassic. Danemark, dans lesquelles le Comité a établi que les États parties ont une obligation positive de prendre des mesures effectives contre les actes de discrimination raciale qui leur ont été signalés. Le requérant fait valoir que l’exigence linguistique ne saurait être considérée comme une exigence objective, et qu’en tout état de cause les autorités danoises ne pouvaient parvenir à une telle conclusion sans avoir mené une enquête officielle. Elles ont arrêté leur position en se fondant uniquement sur la lettre de Fair Insurance A/S, datée du 23 septembre 2002, sur la plainte que DRC a adressée au chef de la police le 12 décembre 2002, et sur le recours dont le Procureur a été saisi le 21 mai 2003. Ni le chef de la police ni le Procureur n’ont abordé la question de savoir si l’exigence linguistique constituait une discrimination directe ou indirecte fondée sur l’origine nationale et/ou la race.

3.3Le requérant met l’accent sur les points et questions suivants que les autorités danoises auraient dû, selon lui, s’attacher à déterminer, si l’exigence linguistique constituait une discrimination raciale. Premièrement, dans quelle mesure le requérant et Fair Insurance A/S ont été capables de communiquer en l’espèce. La compagnie d’assurances ayant suffisamment compris le requérant pour rejeter sa demande, les autorités auraient dû se demander si elle avait compris les besoins du requérant pour s’assurer qu’il avait compris les conditions et droits afférents à chaque assurance et qu’il serait à même de fournir à la compagnie des informations nécessaires en cas d’éventuelle demande d’indemnisation. Deuxièmement, les autorités auraient dû s’attacher à déterminer dans quelle mesure la situation concernant les compétences linguistiques était différente selon qu’il s’agissait de souscrire une assurance obligatoire (l’assurance en responsabilité civile) ou une assurance facultative (l’assurance couvrant la perte du véhicule et les dommages au véhicule). À partir du moment où l’assurance en responsabilité civile est obligatoire, la compagnie est tenue, même si le client ne parle que l’anglais, comme c’est le cas en l’espèce, de faire une offre et d’accepter tout client qui admet ses conditions. Une enquête «aurait» permis de déterminer si Fair Insurance A/S était capable d’«informer de manière satisfaisante» le requérant des exigences, conditions et droits afférents à l’assurance obligatoire.

3.4Troisièmement, les autorités auraient dû s’attacher à déterminer si Fair Insurance A/S comptait parmi ses clients des personnes ne sachant pas parler danois. Si tel avait été le cas (en particulier s’agissant de l’assurance obligatoire), il aurait été intéressant de montrer comment la compagnie communiquait avec elles, et pourquoi elle ne pouvait pas communiquer avec d’autres clients potentiels souhaitant souscrire d’autres assurances. En outre, le requérant soutient que le fait que le chef de la police et le Procureur se soient abstenus de l’entendre et d’entendre Fair Insurance A/S montre une fois de plus qu’aucune enquête sérieuse n’a été menée pour établir le bien‑fondé éventuel des arguments avancés par Fair Insurance A/S. Il souligne que l’exigence linguistique pourrait s’expliquer pour d’autres raisons, et il renvoie à une émission de télévision qui a révélé que les primes proposées par Fair Insurance A/S sont plus élevées pour les personnes qui ne sont pas d’origine danoise que pour les Danois.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond

4.1Le 18 décembre 2004, l’État partie a fait connaître ses observations sur la recevabilité et le fond. S’agissant de la recevabilité, il fait valoir que, bien que le requérant ait épuisé les recours internes au pénal, il s’est abstenu d’engager deux actions au civil qui lui étaient ouvertes. La communication est donc irrecevable pour non‑épuisement des recours internes. Tout d’abord, le requérant pouvait engager une action contre Fair Insurance A/S au motif que la compagnie avait violé la loi en le soumettant à une discrimination raciale, et demander réparation à ce titre, pour préjudice tant pécuniaire que non pécuniaire.

4.2L’État partie soutient que le cas d’espèce est différent de l’affaire Habassi, dans laquelle le Comité avait estimé que le fait d’engager une action au civil dans une affaire prétendue de discrimination violant la loi contre la discrimination n’était pas un recours utile, dans la mesure où, contrairement au requérant dans l’affaire Habassi, le requérant dans le cas d’espèce prétend avoir subi un préjudice financier puisqu’il a dû souscrire une assurance à un prix plus élevé auprès d’une autre compagnie. Le même argument est avancé pour distinguer la présente instance de la décision du Comité dans l’affaire B. J. c. Danemark .

4.3Le second recours civil est une action contre Fair Insurance A/S fondée sur les règles énoncées dans les pratiques commerciales danoises; en vertu de l’article 1 1) de ce texte, une entreprise privée ne saurait agir en violation des «bonnes pratiques commerciales». Le requérant aurait pu faire valoir que le traitement accordé par Fair Insurance A/S à sa demande d’assurance avait constitué une violation de la loi contre la discrimination et donc aussi des «bonnes pratiques commerciales». Il aurait pu réclamer une indemnisation conformément aux règles générales du droit danois, tant pour le préjudice financier prétendument subi que pour le préjudice non pécuniaire. Les actes contraires à cette loi peuvent être interdits par jugement et entraîner une obligation à dommages‑intérêts.

4.4En ce qui concerne le fond, l’État partie affirme que la Convention n’a pas été violée. Il admet que les États parties sont tenus d’ouvrir une enquête sérieuse lorsque des plaintes pour discrimination raciale leur sont soumises, enquête qui devrait être menée avec la diligence et la rapidité voulues, et qui doit être suffisante pour déterminer si un acte de discrimination raciale s’est effectivement produit ou non. Toutefois, de l’avis de l’État partie, il ne ressort pas de la Convention ou de la jurisprudence du Comité qu’une enquête doit être ouverte chaque fois qu’un cas est signalé à la police. S’il n’y a aucune raison d’ouvrir une enquête, l’État partie estime qu’il est conforme à la Convention de ne pas donner suite à l’affaire. En l’espèce, le chef de la police et le Procureur ont reçu du DRC un rapport écrit détaillé, avec un certain nombre d’annexes, présentant suffisamment les circonstances de l’affaire, pour pouvoir conclure, sans avoir à ouvrir une enquête, qu’il était raisonnable de présumer qu’une infraction pénale susceptible de déclencher l’action publique n’avait pas été commise.

4.5S’agissant de l’argument du requérant selon lequel le chef de la police aurait dû ouvrir une enquête pour déterminer si l’exigence linguistique constituait une discrimination directe ou indirecte, l’État partie soutient que la loi contre la discrimination ne prévoit pas une telle distinction, mais qu’elle se réfère à une personne qui «refuse de servir» une autre personne dans les mêmes conditions que d’autres, pour des motifs liés à la race, à la nationalité, etc. Il n’est donc pas fondamental en soi de déterminer si une discrimination directe ou indirecte s’est effectivement produite, mais plutôt si l’article premier de la loi contre la discrimination a été violé intentionnellement, que la prétendue discrimination contraire à la loi ait été directe ou indirecte. En ce qui concerne l’allusion faite par le requérant à l’émission télévisée, l’État partie considère qu’elle est sans intérêt en l’espèce.

4.6S’agissant du point de savoir si le chef de la police aurait dû ouvrir une enquête pour déterminer dans quelle mesure le requérant et Fair Insurance A/S pouvaient communiquer, l’État partie considère qu’il n’était pas indispensable de préciser si le requérant et Fair Insurance A/S avaient pu communiquer de manière satisfaisante, mais plutôt de savoir si l’article premier de la loi contre la discrimination avait été intentionnellement violé. L’exigence linguistique étant due à l’insuffisance des ressources de la compagnie pour recruter du personnel compétent en matière d’assurance maîtrisant des langues autres que le danois, et au fait qu’elle fonctionne essentiellement par téléphone, l’État partie considère que cette exigence est objectivement justifiée, dès lors qu’il s’agit de souscrire une police d’assurance, ce qui implique des droits et des obligations contractuels dont l’acheteur et le vendeur doivent être capables de comprendre avec certitude la teneur et les conséquences. L’État partie estime par conséquent qu’il n’était pas nécessaire d’ouvrir une enquête pour déterminer dans quelle mesure le requérant et Fair Insurance A/S étaient capables de communiquer dans une langue autre que le danois. À cet égard, le Gouvernement prend note de la décision de l’Autorité de contrôle financier, selon laquelle cette politique linguistique ne viole pas l’article 3 de la loi no 660 sur les activités financières, du 7 août 2002, étant donné que la mesure en cause constitue une mesure à caractère pratique qui a été prise en raison du caractère limité des ressources.

4.7S’agissant du point de savoir si le chef de la police aurait dû ouvrir une enquête pour déterminer dans quelle mesure la situation concernant les compétences linguistiques était différente selon qu’il s’agissait d’une assurance obligatoire ou d’une assurance facultative, l’État partie soutient qu’il ressort de la lettre de Fair Insurance A/S, du 22 janvier 2003, que la compagnie a reconnu que le requérant aurait dû se voir proposer une assurance en responsabilité civile lorsqu’il a pris contact avec elle. L’État partie fait observer que la tâche du chef de la police ne consistait pas à déterminer si Fair Insurance A/S avait une pratique générale contraire à la loi contre la discrimination, mais plutôt à établir si elle avait expressément violé la loi eu égard à la demande du requérant, et ainsi commis un acte de discrimination raciale qui constitue une infraction pénale.

4.8Pour ce qui est de la question de savoir si le chef de la police aurait dû ouvrir une enquête pour déterminer dans quelle mesure Fair Insurance A/S avait des clients qui ne savaient pas parler danois, l’État partie indique que, dans sa lettre du 19 septembre 2002, Fair Insurance A/S a informé le DRC qu’elle compte parmi ses clients de nombreuses personnes qui ne sont pas des Danois de souche mais qui parlent le danois. Compte tenu de cette information, il n’a pas été jugé nécessaire d’enquêter plus avant.

Commentaires du requérant concernant les observations de l’État partie

5.1Le 27 février 2004, le requérant a répondu aux observations de l’État partie. En ce qui concerne les arguments relatifs à la recevabilité, il fait valoir que, dans la décision Habassi, le Comité indique clairement que «les formes d’action au civil évoquées par l’État partie ne sauraient être tenues pour constituer un recours approprié car il était impossible de parvenir à cet objectif − sanctionner une infraction pénale − à travers une action au civil, laquelle n’aurait donné lieu qu’au versement de dommages‑intérêts» et non à une condamnation pénale. En outre, le Comité «n’était pas convaincu qu’une action au civil aurait eu quelque chance d’aboutir…». Le requérant affirme qu’il a un droit à un recours effectif contre la discrimination raciale, comme prévu aux articles premier et 5 de la Convention.

5.2En ce qui concerne la loi relative aux pratiques commerciales danoises, le requérant affirme que cette loi n’a rien à voir avec la discrimination raciale, et qu’une décision y relative ne constitue pas un «recours» contre la violation des droits du requérant. En outre, il indique que si cette législation civile s’appliquait à la situation du cas d’espèce, l’État partie n’aurait pas eu à adopter une nouvelle loi sur l’égalité de traitement, qui est entrée en vigueur le 1er juillet 2003 − c’est‑à‑dire après l’incident à l’origine de la présente affaire. Le requérant maintient ses arguments quant au fond.

Délibérations du Comité

Examen quant à la recevabilité

6.1Avant d’examiner une communication quant au fond, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, en application de l’article 91 de son Règlement intérieur, examine si cette communication est ou non recevable au titre de la Convention.

6.2Le Comité constate que l’État partie conteste la recevabilité de la communication au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés. Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle les formes d’action au civil évoquées par l’État partie ne sauraient être tenues pour constituer un recours approprié. La plainte, qui a été déposée auprès des services de police puis du Procureur, faisait état de la commission prétendue d’une infraction pénale, et visait à faire condamner la compagnie Fair Insurance A/S au titre de la loi contre la discrimination. Il était impossible de parvenir à cet objectif à travers une action au civil, laquelle n’aurait donné lieu qu’au versement de dommages‑intérêts au requérant. Le Comité considère par conséquent que le requérant a épuisé les recours internes.

6.3En l’absence d’autres objections concernant la recevabilité de la requête, le Comité déclare celle‑ci recevable et passe à son examen quant au fond.

Examen quant au fond

7.1Ayant examiné la présente communication à la lumière de tous les renseignements et des preuves documentaires qui lui ont été communiqués par les parties, comme l’exige le paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention et l’article 95 de son Règlement intérieur, le Comité fonde son opinion sur les considérations ci‑après.

7.2La question dont le Comité est saisi est celle de savoir si l’État partie s’est acquitté de l’obligation positive qui lui incombe de prendre des mesures effectives contre les cas signalés de discrimination raciale, c’est‑à‑dire s’il a ouvert une enquête au sujet de la plainte du requérant en l’espèce. Le requérant fait valoir que l’obligation de parler danois, préalable indispensable pour souscrire une assurance automobile, ne constitue pas une exigence objective, et qu’une enquête plus approfondie aurait été nécessaire pour déterminer les véritables raisons de cette politique. Le Comité observe qu’il n’est pas contesté que le requérant ne parle pas danois. Il constate que sa réclamation, ainsi que tous les éléments de preuve qu’il a fournis et les informations concernant les véritables raisons de la politique de Fair Insurance A/S ont été examinés tant par les services de police que par le Procureur. Ce dernier a estimé que l’exigence linguistique «n’était pas fondée sur la race ou l’origine ethnique du client, ou sur une autre considération de ce type», mais qu’elle était liée au besoin de communiquer avec les clients. Le Comité considère que les raisons avancées par Fair Insurance A/S pour justifier l’exigence linguistique, notamment la nécessité de communiquer avec le client, l’insuffisance des ressources d’une petite compagnie pour recruter des personnes maîtrisant différentes langues, et le fait qu’il s’agit d’une compagnie qui fonctionne essentiellement par le biais de contacts téléphoniques, constituaient des motifs raisonnables et objectifs et qu’une enquête approfondie ne s’imposait donc pas.

8.Agissant en vertu du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale est d’avis que les faits, tels qui lui ont été communiqués, ne font pas apparaître qu’il y ait eu violation de la Convention par l’État partie.

[Adopté en anglais (version originale), en français, en espagnol et en russe. Paraîtra ultérieurement en arabe et en chinois dans le rapport annuel présenté par le Comité à l’Assemblée générale.]

Notes

Opinion concernant la

Communication n o  33/2003

Présentée par:

Kamal Quereshi (représenté par le Centre de documentation et de conseil en matière de discrimination raciale)

Au nom de:

Le requérant

État partie:

Danemark

Date de la communication:

11 décembre 2003

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, créé en application de l’article 8 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Réuni le 9 mars 2005,

Adopte ce qui suit:

OPINION

1.Le requérant est Kamal Quereshi, citoyen danois né le 29 juillet 1970 et député du Parti socialiste du peuple (Socialistisk Folkeparti) au Parlement de l’État partie (Folketinget). Il affirme être victime d’une violation par le Danemark du paragraphe 1 d) de l’article 2 et des articles 4 et 6 de la Convention. Il est représenté par un conseil.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1Le 26 avril 2001, Mme Pia Andersen, membre du bureau exécutif du Parti progressiste (Fremskridtspartiet), a adressé par télécopie aux médias deux lettres à en‑tête du parti où l’on pouvait lire entre autres: «Halte aux viols commis par des mahométans!». «En fait d’enrichissements culturels, ce sont des expressions péjoratives et des viols auxquels nous, femmes danoises, sommes exposées chaque jour… C’en est assez, nous n’accepterons plus de violations de la part de nos citoyens venus de l’étranger. Si les mahométans ne peuvent nous témoigner un certain respect, à nous, femmes danoises, et se comporter comme les hôtes qu’ils sont dans notre pays, les hommes politiques qui sont au Parlement doivent changer d’attitude et les expulser tous.».

2.2Le 15 mai 2001, Mme Andersen a envoyé à la presse par télécopie un communiqué à propos de certains troubles survenus dans un quartier d’Odense, disant: «Qu’on fasse intervenir l’armée pour en finir avec la terreur mahométane! … Chers concitoyens, c’est de cette culture guerrière que ces étrangers enrichissent notre pays… Mépris de nos lois, viols collectifs, actes de violence, insultes aux femmes danoises, qui s’entendent traiter de “putains” ou de “salopes de Danoises”, etc. Et à présent cette situation qui est quasiment la guerre civile.».

2.3Le 5 septembre 2001, le Parti progressiste a fait paraître dans un journal local une invitation à une conférence donnée par l’ancien chef du Parti, M. Mogens Glistrup, où on lisait: «La Bible des mahométans ordonne de tuer et d’abattre l’infidèle, jusqu’à la disparition de toute trace de son infidélité.».

2.4Le requérant affirme que le Parti progressiste a mis en place des cours, dont certaines parties ont été diffusées dans un court bulletin d’information de la station publique de télévision, destinés à montrer aux membres du Parti comment éviter de tomber sous le coup de l’article 266 b) du Code pénal.

2.5Des discours prononcés à la réunion annuelle du Parti progressiste, tenue les 20 et 21 octobre 2001, ont été diffusés par l’organisme de télévision publique de l’État partie qui est tenu de retransmettre les réunions annuelles des partis politiques participant aux élections. Le requérant affirme que les déclarations suivantes ont été prononcées à la tribune, au cours de la réunion:

Vagn Andreasen (membre du parti): «L’État a donné des emplois aux étrangers. Ils travaillent dans nos abattoirs où ils peuvent facilement empoisonner notre nourriture et mettre en péril nos exportations agricoles. Ils peuvent aussi commettre d’autres actes de terrorisme, par exemple pénétrer dans nos installations de traitement d’eau et empoisonner l’eau.».

Mogens Glistrup (ancien chef du parti): «Les mahométans extermineront les populations des pays où ils se sont introduits». Le 22 octobre, cette déclaration a été rapportée dans un article paru dans le quotidien Dagbladet Politiken dans les termes suivants: «Leur devoir le plus sacré, au nom d’Allah, est d’exterminer les populations des pays dans lesquels ils se sont introduits.».

Erik Hammer Sørensen (membre du parti, dans des commentaires sur l’immigration dans l’État partie): «Des agents de la cinquième colonne sont parmi nous. Ceux que nous avons accueillis commettent des actes de violence, des meurtres et des viols.».

Margit Petersen (membre du parti, à propos de sa condamnation précédente en vertu de l’article 266 b) prononcée par les tribunaux de l’État partie): «Je suis fière d’être raciste. Nous voulons un Danemark sans mahométans»; «les Noirs se reproduisent comme des rats.».

Peter Rindal (membre du parti): «Quant à des cimetières musulmans au Danemark, nous devrions bien entendu en avoir et il faudrait de préférence qu’ils soient assez grands pour qu’on puisse les y mettre tous, et, si possible, d’un seul coup.».

Bo Warming (membre du parti): «La seule différence entre les mahométans et les rats, c’est que les rats ne touchent pas d’allocations sociales.». Il aurait distribué aux journalistes présents au congrès un dessin représentant un rat, le Coran sous le bras.

2.6Après avoir vu le reportage, le requérant a demandé au Centre de documentation et de conseil en matière de discrimination raciale (le DRC) de porter plainte contre les individus susmentionnés ainsi que les membres du conseil exécutif du Parti progressiste qui les avaient approuvés.

2.7Le 23 octobre 2001, le DRC a déposé une plainte auprès de la police de Varde, affirmant que les déclarations de Mme Guul et M. Warming constituaient séparément des violations de l’article 266 b) 1) et 2) du Code pénal, étant donné qu’ils avaient menacé, insulté ou dénigré un groupe de personnes en raison de leur race et de leur origine ethnique.

2.8Le 25 octobre 2001, le DRC a déposé une plainte auprès de la police de Varde, affirmant que les propos de M. Andreasen constituaient une violation de l’article 266 b) 1) et 2), étant donné qu’il y avait insulté et dénigré un groupe de personnes en raison de leur origine religieuse. Le DRC a ajouté que les propos en question étaient fondés sur le postulat que les immigrants et les réfugiés étaient des terroristes potentiels, et qu’un groupe de personnes d’une origine ethnique autre que danoise avait été par conséquent assimilé à une entreprise criminelle, ce de façon générale et sans aucune objectivité. Le même jour, le DRC a déposé auprès de la police de Varde une plainte dans laquelle il affirmait que les propos de M. Rindal constituaient une violation de l’article 266 b) 1) et 2), étant donné qu’il y avait menacé un groupe de personnes en raison de leur race et de leur origine ethnique.

2.9Le 26 octobre 2001, le DRC a déposé auprès de la police de Varde une plainte dans laquelle il affirmait que les propos tenus par M. Glistrup constituaient une violation de l’article 266 b) 1) et 2) du fait qu’il y avait insulté et dénigré un groupe de personnes en raison de leur origine ethnique, notamment de leur religion musulmane. Le même jour, le DRC a déposé auprès de la police de Varde une plainte dans laquelle il affirmait que les propos tenus par M. Sørensen constituaient une violation de l’article 266 b) 1) et 2), du fait qu’il y avait menacé, insulté et dénigré un groupe de personnes en raison de leur race et de leur origine ethnique. Le DRC a ajouté que, dans les propos en question, un groupe d’origine ethnique autre que danoise avait été assimilé à une entreprise criminelle.

2.10En outre, le DRC a déposé une plainte contre le Parti progressiste lui‑même auprès de la police de Thisted (section de la police dont relevait le domicile du chef du parti).

Procédures engagées ultérieurement contre les différents orateurs

2.11Le 28 mars 2003, le chef de la police de Varde a transmis les six affaires au Procureur public régional de Sønderborg, assorties des recommandations suivantes:

Il convient de poursuivre M. Glistrup, M. Rindal et M. Warming en vertu de l’article 266 b) 1) du Code pénal. Toutefois, il conviendrait, en vertu de l’article 721 1) ii) de la loi sur l’administration de la justice de rejeter la partie de la plainte contre M. Warming concernant le dessin qui aurait été distribué, étant donné que le dessin en question n’a pas pu être retrouvé.

Il convient de rejeter les accusations portées contre Mme Petersen en vertu des articles 721 1) ii) et 722 1) iv) de la loi sur l’administration de la justice.

Il convient de rejeter les accusations portées contre M. Andreasen et M. Sørensen en vertu de l’article 721 1) ii) de la loi sur l’administration de la justice.

2.12Le 23 avril 2003, le Procureur public régional a demandé au chef de la police d’ouvrir de nouvelles enquêtes sur l’ensemble des six cas − et d’obtenir de la station publique de télévision le texte des déclarations faites lors du congrès du parti. Le 9 mai 2003, le chef de la police a modifié ses recommandations, préconisant de rejeter les accusations portées contre M. Glistrup en vertu de l’article 721 1) ii) de la loi sur l’administration de la justice. En outre, il a indiqué que la chaîne de télévision avait affirmé qu’elle ne possédait aucun document non audiovisuel provenant du congrès du parti.

2.13Après avoir reçu un complément d’information, le Procureur public régional, le 18 juin 2003, a fait au Directeur des poursuites publiques (le DPP) les recommandations ci‑après concernant les poursuites contre les personnes susmentionnées, qui ont été acceptées le 6 août 2003:

Il convient d’engager des poursuites contre M. Rindal et M. Warming en vertu de l’article 266 b) 1) pour les déclarations qu’ils ont faites lors du congrès du parti. La partie des accusations contre M. Warming concernant le dessin a été retirée car il n’était pas possible de considérer raisonnablement qu’une infraction pénale avait été commise étant donné qu’un exemplaire du dessin n’avait pas pu être obtenu.

Il convient de rejeter les accusations formulées contre M. Andreasen étant donné que de nouvelles poursuites risquaient d’être vouées à l’échec. Le Directeur des poursuites publiques a souligné que, pour être constitué, l’actus reus (l’acte criminel), tel que défini à l’article 266 b) 1), exigeait que la déclaration vise un groupe de personnes notamment pour des considérations de race, de couleur, d’origine nationale ou ethnique et de religion. Le Directeur des poursuites publiques a estimé que cette condition n’était pas satisfaite car le terme d’«étrangers» employé par M. Andreasen était «si vague qu’il ne désignait pas un groupe au sens de la loi».

Il convient de rejeter les accusations portées contre M. Glistrup étant considéré que de nouvelles poursuites seraient vouées à l’échec. Le Directeur des poursuites publiques a souligné que le journaliste qui avait attribué la déclaration à M. Glistrup avait déclaré que cette dernière avait été faite à la tribune, pas au cours d’un entretien. Toutefois, la déclaration ne figurait pas dans l’enregistrement vidéo de l’émission de télévision et la chaîne de télévision n’avait en sa possession aucun document non audiovisuel. De son côté, M. Glistrup avait déclaré que ses remarques n’avaient pas été enregistrées. Le Directeur des poursuites publiques a donc estimé qu’il était «douteux» que l’on réussisse à prouver que la déclaration présumée constituait une violation de l’article 266 b).

Il convient de rejeter les accusations portées contre M. Sørensen étant considéré que de nouvelles poursuites risqueraient d’être vouées à l’échec. Concernant les conditions relatives à l’actus reus (l’acte criminel) évoquées plus haut, le Directeur des poursuites publiques a estimé que les mots «agents de la cinquième colonne» et «ceux qui sont parmi nous», employés par M. Sørensen ne désignaient pas un groupe de personnes au sens de l’article 266 b).

Il convient de rejeter les accusations portées contre Mme Petersen étant donné que le procès impliquerait des difficultés, des coûts ou des délais disproportionnés à la peine susceptible d’être prononcée si la culpabilité des accusés était reconnue. Le Directeur des poursuites publiques a souligné que le 20 novembre 2001, le tribunal de Haderslev avait condamné Mme Petersen à 20 jours amende à 300 couronnes danoises pour violation de l’article 266 b) 1), et que cette condamnation n’aurait pas été beaucoup plus sévère si l’infraction en cause avait été prise en compte. Le Directeur des poursuites publiques a fait observer que les remarques qu’elle avait faites lors du congrès avaient consisté en un résumé du procès à l’issue duquel elle avait été condamnée par le tribunal de Haderslev.

2.14Les 26 et 28 août 2003, le DRC a fait appel des décisions du Directeur des poursuites publiques concernant respectivement M. Andreasen (au nom du requérant) et M. Sørensen (en son propre nom), auprès du Ministère de la justice. Le 13 octobre 2003, le Ministère a déclaré que ces deux appels étaient irrecevables pour défaut de droit d’exercer un recours en vertu des règles de droit administratif concernant les appels des décisions du Directeur des poursuites publiques. S’agissant de l’appel concernant M. Andreasen, le Ministère de la justice a estimé que le requérant, M. Quereshi, n’avait pas «un intérêt essentiel, direct et personnel dans l’affaire impliquant qu’il puisse être considéré comme étant une partie ayant le droit de faire appel». S’agissant de l’appel concernant M. Sørensen, le Ministère a estimé que, selon les mêmes règles, «les organismes de pression, les associations, etc., ou les personnes qui défendent les intérêts de tiers, de groupes ou du public en général pour des raisons idéalistes, professionnelles, organisationnelles, socioprofessionnelles ou de même nature ne peuvent pas être normalement considérés comme étant des parties à une affaire pénale, sauf si elles ont mandat de représenter une partie à l’affaire». Le Ministère a estimé en outre que «l’affaire en cause n’est pas d’une nature qui impose que le DRC soit considéré comme étant habilité à faire appel».

2.15En octobre 2003, M. Rindal et M. Warming ont été jugés par le tribunal de district de Grindsted et reconnus coupables d’infractions prévues à l’article 266 b) 1). M. Rindal a été condamné le 26 novembre 2003 à 20 jours‑amendes à 50 couronnes danoises pour les propos tenus lors du congrès du parti. M. Warming, pour sa part, a été condamné à une peine supplémentaire de 20 jours‑amendes à 200 couronnes danoises en vertu de l’article 89 pour, premièrement, avoir affirmé lors du congrès du parti: «Un beau jour, tous les musulmans pourraient bien décider de lancer des cocktails Molotov dans toutes les maisons de leur voisinage et d’aller, dans leurs voitures de luxe, lancer des cocktails Molotov et autres dans le plus grand nombre possible de maisons. Ils sont capables de réduire la population du Danemark de moitié ou plus encore pour faire, en beaucoup moins de temps, comme leurs coreligionnaires musulmans avec le World Trade Centre», et, deuxièmement, pour avoir affirmé en recherchant délibérément une diffusion plus importante encore de ses propos, lors de l’entretien avec un journaliste présent au congrès du parti, que «la seule différence entre les mahométans et les rats, c’est que les rats ne touchent pas d’allocations sociales.». Pour fixer le montant de l’amende, le tribunal a tenu compte de deux précédentes condamnations prononcées contre M. Warming pour violation de l’article 266 b) 1) par la Haute Cour de la circonscription de l’Est (en appel), le 22 mars 1999, et par le tribunal de la ville de Copenhague, le 30 janvier 2003.

2.16Le 17 mars 2004, le conseil d’appel a rejeté la demande d’autorisation déposée par M. Warming en vue de faire appel de la décision du tribunal de district de Grindsted devant la Haute Cour de la circonscription de l’Ouest. En ce qui le concerne, M. Rindal n’a pas fait appel de la décision du tribunal de district.

Procédures engagées contre le Parti progressiste

2.17La police de Thisted a rejeté la plainte contre le Parti progressiste au motif que la législation de l’État partie ne permettait pas, en l’état, de déposer une plainte pour violation de l’article 266 b) contre des entités ayant la personnalité juridique, y compris les partis politiques. Le Procureur public régional a confirmé cette décision.

2.18Le 11 décembre 2002, le DRC, à la demande du requérant, a déposé une nouvelle plainte contre Mme Andersen auprès de la police d’Odense (dont relève son domicile), affirmant qu’il ressortait de ce qui est indiqué aux paragraphes 2.1 à 2.5 ci‑dessus qu’elle avait participé à une violation de l’article 266 b) en tant que membre du bureau exécutif du parti. Le 7 janvier 2002, le chef de la police d’Odense a rejeté la plainte, estimant qu’il n’existait pas d’éléments suffisants à l’appui de l’allégation selon laquelle un acte illégal avait été commis par Mme Andersen en tant que membre du bureau exécutif du parti. Il a estimé que le fait qu’une personne appartient au bureau exécutif d’un parti politique n’était pas en soi une raison de tenir cette personne pour pénalement responsable d’éventuels propos délictueux prononcés par des tiers au cours de la réunion annuelle du parti. Le 25 janvier 2002, le tribunal du district d’Odense a reconnu Mme Andersen coupable d’infraction à l’article 266 b) du Code pénal pour avoir publié les communiqués de presse.

2.19Le 11 mars 2002, le Procureur public régional de Fyn a rejeté l’appel du DRC, estimant que ni ce dernier ni le requérant n’avait l’intérêt essentiel, direct, personnel ou juridique requis pour être partie à l’affaire. En conséquence, le DRC a adressé la requête initiale du requérant au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale qui a estimé qu’aucune violation n’avait été commise, s’agissant des actes de l’État partie concernant Mme Andersen. Il a souligné qu’une procédure avait été engagée contre les personnes directement responsables des propos tenus lors du congrès du parti.

Teneur de la plainte

3.1Le requérant prétend que deux violations des articles 2, paragraphe 1 d), 4 et 6 de la Convention ont été commises. Il prétend, premièrement, que l’État partie n’a pas respecté l’obligation qui lui incombe de prendre des mesures concrètes en vue d’examiner les actes signalés de discrimination raciale et d’enquêter à leur sujet, étant donné que l’accusation qui portait contre M. Andreasen avait été retirée, qu’aucun des orateurs qui s’étaient exprimés lors du congrès du parti n’a été poursuivi et qu’une enquête n’a pas été ouverte sur la conduite de Mme Andersen. À son avis, le fait de ne pas poursuivre les personnes directement responsables des propos (en dépit du fait qu’elles avaient été initialement inculpées) constituait une violation de l’article 6, tandis que la décision du Procureur public régional (qui n’était pas susceptible d’appel du requérant) de considérer que les propos de M. Andreasen n’entraient pas dans le champ d’application de l’article 266 b) du Code pénal constituait une violation de l’article 2, paragraphe 1 d), de la Convention. Le requérant se fonde sur une décision de la Haute Cour de la juridiction de l’Est prononcée en 1980, pour affirmer que de tels propos entrent bien dans le champ d’application de l’article 266 b).

3.2Deuxièmement, le requérant fait valoir que la décision du Procureur public de classer l’affaire concernant M. Andreasen, qui avait été confirmée par le Ministère de la justice pour défaut de droit d’exercer un recours, viole l’obligation imposée par ces articles, en particulier l’article 6, de garantir une protection et des recours utiles contre tout acte de discrimination raciale. À son avis, par suite de ces décisions, il s’est trouvé dans l’incapacité d’engager une action contre les actes de discrimination raciale auxquels il avait été exposé, en tant que membre d’un groupe de personnes visé par les déclarations.

3.3S’agissant de l’épuisement des voies de recours internes, le requérant fait valoir qu’il serait inefficace d’engager directement une action en justice (non précisée) contre M. Andreasen sachant que la plainte a été rejetée par le Procureur public régional et le Ministère de la justice. Le requérant prétend en outre qu’une plainte en vertu de l’article 26 de la loi sur la responsabilité civile (concernant l’octroi de dommages civils pour atteinte à l’honneur et à la réputation d’une personne) serait inefficace, et cite une décision rendue en 1999 par la Haute Cour de la juridiction de l’Est selon laquelle un acte de discrimination raciale ne donne pas en soi le droit à la personne offensée de demander une indemnisation en vertu de l’article en question. En outre, le requérant écarte toute possibilité d’engager un recours constitutionnel en vertu de l’article 63 de la Constitution (concernant la révision des décisions administratives), affirmant qu’il est nécessaire d’avoir le statut de partie à l’affaire pour pouvoir engager une telle action. Cependant, ce statut a été refusé au requérant, en l’espèce, tant par le Procureur public régional (dans la décision antérieure concernant l’affaire de Mme Pia Andersen, voir par. 2.19 plus haut) que par le Ministère de la justice.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond de la requête

4.1Dans une communication datée du 17 juin 2004, l’État partie conteste tant la recevabilité que le bien‑fondé de la requête. Il fait valoir que le requérant n’a pas épuisé les recours internes disponibles en matière pénale à trois égards. Premièrement, il n’a fait appel que de la décision du Directeur des poursuites publiques (DPP) en date du 14 août 2003 relative à M. Andreasen et n’a fait appel d’aucune des décisions du DPP relatives aux autres personnes concernées. En conséquence, les voies de recours internes n’ont pas été épuisées en ce qui concerne ces personnes.

4.2Deuxièmement, l’État partie formule de nouveau son argument, qui figurait également dans la première requête présentée au Comité par le requérant, selon lequel l’article 63 de la Constitution permet la révision des décisions des autorités administratives, y compris le DPP et le Ministère de la justice, par les tribunaux. Il rejette l’argument du requérant selon lequel une telle démarche serait inefficace étant donné que le DPP a refusé de procéder à une mise en accusation et que le Ministère a estimé que l’appel du requérant était irrecevable. Par contre, le requérant aurait pu demander aux tribunaux de dire si le point de vue du DPP concernant le champ d’application de l’article 266 b) 1) ou celui du Ministère concernant son droit d’exercer des recours était fondé. Les décisions du Directeur des poursuites publiques concernant les autres cas auraient pu être également examinées. Troisièmement, l’État partie affirme que même lorsque des poursuites n’ont pas été engagées en vertu de l’article 266 b) 1) du Code pénal, une action privée peut être engagée en vertu de l’article 267 du Code pénal protégeant l’honneur des personnes. Dans l’affaire Sadicc. Danemark, le Comité a reconnu, à propos d’une affaire dans laquelle la police n’avait pas donné suite à une plainte déposée en vertu de l’article 266 b), que les exigences de l’article 267 sont différentes et que le requérant doit avoir épuisé les autres voies de recours utiles disponibles avant de s’adresser au Comité.

4.3S’agissant du fond, l’État partie fait valoir que la requête ne fait pas apparaître qu’une violation de la Convention a été commise. S’agissant de violations des articles 2, 4 et 6 liées au traitement et à l’évaluation des plaintes pénales, la façon exhaustive dont la plainte avait été traitée tant par la police, le Procureur public régional et le Directeur des poursuites publiques était pleinement conforme à l’obligation de l’État partie de prendre des mesures efficaces. L’État partie signale que la Convention ne garantit pas une issue particulière des procédures ouvertes à la suite d’allégations de violations de la Convention mais se limite à fixer certains paramètres relatifs au traitement des allégations en question. Les autorités de l’État partie se sont acquittées de leur devoir d’ouvrir une enquête en bonne et due forme, et l’ont menée avec la diligence et le zèle nécessaires en vue d’établir si un acte de discrimination raciale avait effectivement eu lieu. Cette enquête a fait apparaître que certaines plaintes − celles déposées contre M. Rindal et M. Warming à cause des déclarations qu’ils avaient faites lors du congrès − ont été considérées comme recevables, tandis que d’autres n’ont pas été considérées comme étant de nature à donner lieu à des poursuites.

4.4Concernant les affaires dans lesquelles il a été décidé de ne pas poursuivre, l’État partie fait valoir que chaque décision a été prise à la suite d’une enquête individuelle soigneuse et régulière et était justifiée par la validité de chaque plainte. S’agissant du dessin qui aurait été distribué par M. Warming, la police a interrogé ce dernier et le journaliste auquel le dessin avait été prétendument remis avant de conclure qu’il n’y avait pas lieu d’engager des poursuites. L’État partie souligne que la Convention n’exige pas que toute enquête qui est ouverte chaque fois qu’une plainte est adressée à la police donne lieu à des poursuites, y compris, par exemple, lorsque la preuve requise n’est pas disponible.

4.5Au sujet de la décision du Directeur des poursuites publiques concernant Mme Petersen, selon laquelle les ressources que nécessiterait une enquête seraient disproportionnées à la peine envisageable, l’État partie note que le Procureur public régional a obtenu une transcription de l’enregistrement vidéo de l’émission de télévision et interrogé Mme Petersen, ce qui fait apparaître que l’affaire a donné lieu à un examen suffisant. Le Directeur des poursuites publiques a estimé que la condamnation prononcée précédemment contre Mme Petersen le 20 novembre 2001 (20 jours‑amendes à 300 couronnes danoises pour violation de l’article 266 b) 1)) n’aurait pas été beaucoup plus sévère si la plainte en cause avait été prise en compte, justifiant ainsi la décision de ne pas poursuivre, prise par le Directeur des poursuites publiques en vertu de l’article 89 du Code pénal. En outre, l’État partie rappelle que les déclarations faites par l’intéressée lors du Congrès avaient pris la forme d’un résumé de son procès et de sa condamnation précédents. L’affaire avait donc été examinée conformément aux prescriptions de la Convention.

4.6Concernant la décision selon laquelle il était impossible d’établir le contexte de la déclaration de M. Glistrup, l’État partie note que la police a interrogé ce dernier ainsi que le journaliste concerné et s’est procurée une transcription de l’enregistrement de l’émission de télévision; cependant, les déclarations qui auraient été faites à la tribune n’y figuraient pas. L’État partie fait observer qu’il importe, pour assurer la régularité de la procédure, que les éléments de preuves soumis aux tribunaux en matière pénale satisfassent à certains critères de recevabilité. Dans l’affaire en cause, les accusations ont été rejetées pour défaut de preuves, après qu’une enquête conforme à la Convention eut été effectivement menée.

4.7Concernant les décisions prises au sujet de M. Andreasen et M. Sørensen, selon lesquelles les conditions nécessaires à la constitution de l’actus reus– à savoir la tenue de propos concernant des groupes de personnes visés au motif de la race, la couleur, l’origine nationale ou ethnique – n’étaient pas réunies dans l’utilisation de termes tels que «étrangers» et «agents de la cinquième colonne», l’État partie souligne que les groupes réellement concernés sont clairement désignés à l’article 266 b). Il indique que la Haute Cour de la circonscription de l’Est, dans sa décision de 1980 évoquée par le requérant, a estimé que l’expression «travailleur invité» n’entrait pas dans la catégorie désignée par les mots «un groupe de personnes» au sens de l’article 266 b). La Haute Cour a néanmoins souligné que cette expression, dans son acception générale, désignait les personnes originaires d’Europe du Sud, d’Asie ou d’Afrique vivant au Danemark, en particulier les Yougoslaves, les Turcs ou les Pakistanais. Une telle conclusion était possible car l’expression désignait des personnes originaires de pays précis, à la différence de l’affaire considérée dans laquelle les expressions ont un sens beaucoup plus vaste. La conclusion qu’il était impossible d’établir que les expressions employées par M. Andreasen et M. Sørensen concernaient un groupe précis de personnes caractérisées par la race, la couleur, l’origine nationale ou ethnique a procédé d’un examen conforme aux prescriptions de la Convention.

4.8L’État partie affirme que l’article 266 b), tel qu’il est appliqué dans la pratique et exposé de façon détaillée dans ses quatorzième et quinzième rapports périodiques au Comité, satisfait à l’obligation imposée à l’État partie par l’article 2.1 d) de la Convention d’interdire et de mettre fin à toute discrimination raciale par les moyens appropriés, y compris des mesures législatives. S’agissant de la partie de la plainte relative à l’incapacité du requérant de faire appel de la décision concernant M. Andreasen, l’État partie renvoie aux observations concernant la recevabilité qu’il a faites à propos des possibilités de déposer une plainte constitutionnelle et d’engager des poursuites à la demande d’un plaignant en vertu de l’article 267 du Code pénal.

Commentaires du requérant sur les observations de l’État partie

5.1Dans une lettre datée du 2 août 2004, le requérant conteste les observations de l’État partie sur la recevabilité et reprend ses propres observations antérieures sur le fond. Concernant la possibilité de déposer une plainte constitutionnelle contre les décisions du Directeur des poursuites publiques et du Ministère de la justice, il fait valoir que, étant donné que le Ministère a lui‑même affirmé qu’il n’avait dans l’affaire aucun intérêt essentiel, direct et personnel lui conférant le droit d’exercer des recours, il n’y a pas lieu de lui imposer l’obligation d’engager une telle procédure, laquelle entraînerait le report de la possibilité de soumettre une requête au Comité. En tout état de cause, même si un tribunal considérait qu’il avait effectivement le droit d’exercer des recours, une telle démarche serait vouée à l’échec à cause de l’expiration des délais fixés pour engager des poursuites (concernant la décision du Ministère). En conséquence, en violation des articles 4 et 6 de la Convention, aucune sanction ne pourra jamais être prononcée contre M. Andreasen.

5.2Concernant la possibilité d’engager des poursuites à la demande d’un plaignant en vertu de l’article 267 du Code pénal, le requérant fait valoir que, que les propos de M. Andreasen tombent ou non sous le coup de cette disposition, tout tribunal rejetterait une telle plainte au motif qu’il n’avait aucun intérêt essentiel, direct et personnel dans l’affaire. Il fait donc valoir de nouveau qu’il n’y a pas lieu de lui prescrire de s’engager dans une telle voie et de reporter la présentation d’une requête au Comité.

Délibérations du Comité

Examen quant à la recevabilité

6.1Avant d’examiner une communication quant au fond, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, en application de l’article 91 de son Règlement intérieur, examine si cette communication est ou non recevable au titre de la Convention.

6.2S’agissant de l’épuisement des voies de recours internes, le Comité note que la plainte du requérant ne porte que sur le traitement de la plainte déposée contre M. Andreasen, affaire pour laquelle il a effectivement adressé un appel au Ministère de la justice. Le Comité n’a donc pas besoin d’examiner l’argument selon lequel le requérant n’a pas fait également appel des décisions défavorables adoptées dans certaines autres affaires, même si le Comité note que rien n’indique que la décision du Ministère de déclarer que le requérant n’avait pas le droit d’exercer des recours n’aurait pas été différente dans ces affaires.

6.3S’agissant de l’argument de l’État partie selon lequel le requérant aurait dû demander que des poursuites soient engagées en vertu des dispositions générales de l’article 267 du Code pénal, le Comité rappelle que, dans son opinion concernant l’affaire Sadic, il a effectivement demandé au requérant d’engager une telle action. Toutefois, dans cette affaire, les faits n’entraient pas dans le champ d’application de l’article 266 b) du Code pénal étant donné que les propos mis en cause avaient un caractère essentiellement privé ou avaient été tenus dans un cercle très limité de personnes. La conduite en cause relevait donc de l’article 267 qui complétait le champ d’application de la protection garantie par l’article 266 b) et offrait une solution raisonnable et particulièrement adaptée aux faits de la cause. Par contre, dans l’affaire considérée, les propos ont été carrément tenus en public, situation qui intéresse directement la Convention et l’article 266 b). Il serait donc déraisonnable de demander au requérant d’engager une procédure distincte en vertu des dispositions générales de l’article 267 après avoir invoqué sans succès l’article 266 b) du Code pénal du Danemark pour des faits relevant directement de la lettre et de l’objet de cette disposition.

6.4S’agissant de l’argument de l’État partie selon lequel un examen judiciaire des décisions du Directeur des poursuites publiques et du Ministère pouvait être encore demandé par le biais d’une plainte constitutionnelle, le Comité rappelle que le requérant a porté plainte successivement devant quatre niveaux des instances administratives au cours d’un processus qui, à quelques semaines près, a duré environ deux ans, pour des faits qui appartenaient au domaine public dès le départ et qui ne nécessitaient pas une enquête complexe. Dans ces circonstances, le Comité estime que l’exercice de nouveaux moyens de recours devant les tribunaux à l’heure actuelle constituerait une procédure excédant des délais raisonnables au sens du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention. Il n’est donc pas nécessaire qu’ils soient épuisés aux fins de la plainte considérée. Le Comité note en outre que le requérant a mis en doute l’efficacité d’une telle procédure, faisant valoir que, étant donné l’expiration des délais fixés pour engager des poursuites, toute décision judiciaire sur la légalité des mesures prises n’aurait aucun effet pratique sur les procédures en question.

6.5À la lumière de ce qui précède et en l’absence d’autres objections concernant la recevabilité de la requête, le Comité déclare celle‑ci recevable et passe à son examen quant au fond.

Examen quant au fond

7.1Agissant en application du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Comité a examiné les renseignements fournis par le requérant et l’État partie.

7.2Le Comité rappelle que dans sa décision concernant la requête initiale du requérant, il a souligné qu’il s’était particulièrement attaché à examiner les mesures prises en se fondant sur la législation de l’État partie, principalement la loi pénale, contre les intervenants qui auraient personnellement commis un acte de discrimination raciale. Ainsi, il a noté en l’occurrence que Mme Andersen avait été condamnée pour sa conduite personnelle. Dans l’affaire considérée, deux orateurs qui s’étaient exprimés au congrès du parti ont été reconnus coupables et condamnés pour des violations de l’article 266 b) du Code pénal. L’un de ces orateurs s’est même vu infliger une condamnation plus sévère après avoir fait l’objet de deux condamnations moins rigoureuses assorties de peines plus légères pour des violations de l’article 266 b). Par contre, une oratrice n’a pas fait l’objet de nouvelles poursuites au motif que la peine envisageable n’aurait pas été plus lourde que la condamnation dont elle avait déjà fait l’objet en vertu de l’article 266 b). Concernant un autre orateur, l’enquête a fait apparaître que les propos prétendument tenus sur l’estrade n’avaient pas été effectivement prononcés. C’est en tenant compte de la manière décrite ci‑dessus, dont l’État partie a poursuivi pénalement des propos constituant une discrimination raciale, tenus tant hors du congrès du parti que dans le cadre de ce congrès, qu’il convient d’examiner au fond la requête concernant l’issue de la plainte déposée contre M. Andreasen.

7.3Le Comité rappelle que M. Andreasen a tenu des propos injurieux à l’égard des «étrangers» lors du congrès du parti. Le Comité note que, quelle qu’ait pu être la situation dans l’État partie par le passé, une allusion générale aux étrangers ne désigne pas à l’heure actuelle un groupe spécifique de personnes, contrairement à l’article premier de la Convention, défini par une race, une appartenance ethnique, une couleur, une ascendance ou une origine nationale ou ethnique spécifiques. Le Comité n’est donc pas en mesure d’établir que les autorités de l’État partie sont parvenues à une conclusion inappropriée en estimant que les propos de M. Andreasen, contrairement aux déclarations plus spécifiques des autres orateurs qui se sont exprimés lors du congrès, ne constituaient pas un acte de discrimination raciale contrevenant à l’article 266 b) du Code pénal du Danemark. Il s’ensuit que le requérant n’a pas été privé du droit d’exercer un recours utile contre un acte de discrimination commis dans le cadre des propos de M. Andreasen.

8.Le Comité se voit toutefois contraint d’appeler l’attention de l’État partie i) sur le caractère haineux des propos que M. Andreasen a tenus à l’égard des étrangers et le fait que de tels propos sont particulièrement graves lorsqu’ils sont tenus par des personnalités politiques et, dans ce contexte, ii) sur sa recommandation générale XXX, adoptée à sa soixante‑quatrième session, concernant la discrimination contre les non‑ressortissants.

9.Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 14 de la Convention, estime que les faits dont il est saisi ne font pas apparaître de violation de la Convention.

[Fait en anglais, en espagnol et en français, le texte anglais étant la version originale. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel présenté par le Comité à l’Assemblée générale.]

Notes

B. Soixante ‑septième session

Opinion concernant la

communication n o  30/2003

Présentée par:

La communauté juive d’Oslo, la communauté juive de Trondheim, Rolf Kirchner, Julius Paltiel, le Centre antiraciste norvégien et Nadeem Butt (représentés par un conseil, M. Frode Elgesen)

Au nom de:

Les requérants

État partie:

Norvège

Date de la communication:

17 juin 2003

Date de la présente décision:

15 août 2005

OPINION

1.Les auteurs de la communication, datée du 17 juin 2003, sont M. Rolf Kirchner, né le 12 juillet 1946, dirigeant de la communauté juive d’Oslo, M. Julius Paltiel, né le 4 juillet 1924, dirigeant de la communauté juive de Trondheim, et M. Nadeem Butt, né le 16 juin 1969, dirigeant du Centre antiraciste norvégien. Ils se disent victimes de violations par la Norvège des articles 4 et 6 de la Convention, et sont représentés par un conseil.

Rappel des faits présentés

2.1Le 19 août 2000, un groupe répondant au nom de «Bootboys» a pris part à un défilé qu’il avait organisé en mémoire du dirigeant nazi Rudolf Hess à Askim, près d’Oslo. Environ 38 personnes ont participé à ce défilé qui a parcouru 500 mètres dans le centre d’Askim pendant cinq minutes. Les participants portaient des uniformes «semi-militaires», et un nombre important d’entre eux auraient déjà fait l’objet de condamnations pénales. Beaucoup des participants avaient le visage caché. Le défilé était mené par M. Terje Sjolie qui, en arrivant à la place centrale de la ville, a prononcé un discours dans lequel il a déclaré:

«Nous sommes réunis ici pour rendre hommage à notre grand héros, Rudolf Hess, pour ses courageux efforts pour sauver l’Allemagne et l’Europe du bolchevisme et de la juiverie pendant la Seconde Guerre mondiale. En ce moment même, plus de 15 000 communistes et pro-Juifs sont rassemblés à Youngsroget pour manifester contre la liberté d’expression et la race blanche. Chaque jour des immigrants volent, violent et tuent des Norvégiens, chaque jour notre peuple et notre pays sont dévalisés et détruits par les Juifs qui s’emparent de nos richesses et introduisent à la place des pensées immorales et étrangères à la Norvège. On nous a interdit trois fois de manifester à Oslo, alors que les communistes n’ont même pas eu besoin de demander l’autorisation. Est-ce là la liberté de parole? Est-ce là la démocratie? […]

Notre cher Führer Adolf Hitler et Rudolf Hess ont été emprisonnés pour leurs convictions, nous n’oublierons pas leurs principes et leurs efforts héroïques: au contraire, nous suivrons leurs traces et nous combattrons pour ce en quoi nous croyons, une Norvège construite sur le national‑socialisme […]».

2.2Après son discours, M. Sjolie a demandé une minute de silence en l’honneur de Rudolf Hess. Puis les participants, entraînés par M. Sjolie, ont à plusieurs reprises fait le salut nazi et crié «Sieg Heil» avant de quitter les lieux.

2.3Selon les auteurs, ce défilé semble avoir eu pour conséquences immédiates qu’une section des Bootboys s’est créée dans la ville voisine, à Kristiansand, et que, pendant les 12 mois qui ont suivi, la ville a été «en proie» à ce que les auteurs décrivent comme des incidents violents dirigés contre les Noirs et contre les opposants politiques. Ils ajoutent que, dans la région d’Oslo, le défilé semble avoir donné confiance aux Bootboys et qu’il y a eu un regain d’activité «nazie». Plusieurs incidents violents ont eu lieu, y compris le meurtre d’un garçon de 15 ans, Benjamin Hermansen, fils d’un Ghanéen et d’une Norvégienne, qui a été poignardé le 26 janvier 2001. Trois membres des Bootboys ont été inculpés et condamnés pour cet acte. L’un d’entre eux a été condamné pour meurtre avec circonstances aggravantes, en raison de la motivation raciste de l’agression; selon les auteurs, il avait participé au défilé du 19 août 2000, de même qu’une des autres personnes condamnées dans cette affaire.

2.4Les auteurs affirment que les Bootboys sont connus en Norvège pour leur goût de la violence, et ils citent 21 cas concrets de menaces de violence et d’actes de violence dont les Bootboys se seraient rendus coupables entre février 1998 et février 2002. M. Sjolie lui‑même exécute actuellement une peine de prison pour tentative de meurtre, à la suite d’un incident dans lequel il a tiré sur un autre membre du groupe.

2.5Quelques témoins du défilé commémoratif ont porté plainte à la police. Le 23 février 2001, le Procureur d’Oslo a inculpé M. Sjolie de violation de l’article 135a du Code pénal norvégien, qui interdit de menacer, d’insulter ou de soumettre à la haine, à la persécution ou au mépris toute personne ou tout groupe de personnes en raison de sa foi, de sa race, de sa couleur ou de son origine nationale ou ethnique. Le délit est puni d’une amende ou d’un emprisonnement de deux ans au maximum.

2.6Le 16 mars 2001, M. Sjolie a été acquitté par le tribunal municipal de Halden. Le ministère public a fait appel du jugement devant la cour d’appel de Borgarting, qui a reconnu M. Sjolie coupable d’une violation de l’article 135a, à cause de ce qu’il avait dit des Juifs dans son discours. La cour d’appel a jugé qu’il fallait interpréter le discours au minimum comme acceptant l’extermination des Juifs, ce qui constituait une violation de l’article 135a.

2.7M. Sjolie s’est pourvu devant la Cour suprême qui, le 17 décembre 2002, par une majorité de 11 à 6, a cassé l’arrêt de la cour d’appel, jugeant que, si l’on punissait l’approbation du nazisme, il faudrait en conséquence interdire les organisations nazies ce qui, selon elle, serait incompatible avec la liberté d’expression. La majorité de la Cour a aussi considéré que les déclarations incriminées n’étaient que de la rhétorique nazie et ne faisaient qu’exprimer un appui à l’idéologie nationale‑socialiste: elles ne constituaient pas une approbation des persécutions et de l’extermination des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. La majorité de la Cour a considéré qu’aucun élément ne reliait particulièrement Rudolf Hess à l’extermination des Juifs, elle a relevé que de nombreux nazis niaient la réalité de l’holocauste et que les idées de M. Sjolie sur ce point particulier n’étaient pas connues. Elle a considéré que, si le discours contenait bien des remarques dénigrantes et offensantes, aucune menace réelle n’avait été proférée, pas plus qu’il n’avait été donné l’instruction d’exécuter des actes particuliers. Les auteurs notent que la majorité de la Cour a considéré que l’article 4 de la Convention n’entraînait pas l’obligation d’interdire la diffusion d’idées de supériorité raciale, contrairement à la position du Comité exposée dans sa recommandation générale XV.

2.8Les auteurs affirment que la décision fera jurisprudence pour les affaires portant sur l’article 135a du Code pénal, et qu’il ne sera plus possible désormais de réprimer la propagande et les comportements nazis du type de ceux qui se sont produits pendant le défilé du 19 août 2000. Après l’arrêt de la Cour suprême, le Procureur général a déclaré que, compte tenu de la décision de la Cour, la Norvège allait servir de refuge pour les manifestations nazies, celles‑ci étant interdites dans les pays voisins.

Teneur de la plainte

3.1Les auteurs se disent victimes de violations par l’État partie des articles 4 et 6 de la Convention. Ils affirment que l’arrêt rendu par la Cour suprême le 17 décembre 2002 les a privés de protection contre la diffusion d’idées de discrimination et de haine raciales et contre l’incitation à des actes de cette nature, lors de la manifestation du 19 août 2000, et qu’ils ne disposaient pas des voies de recours qu’exigeait la Convention en la matière.

Qualité de victimes

3.2Les auteurs font valoir qu’ils sont victimes des violations précitées parce que, de manière générale, la loi norvégienne ne les protége pas adéquatement contre la diffusion de la propagande antisémite et raciste et contre les incitations à la discrimination, à la haine et à la violence raciales. Tout en admettant que le Comité n’a pas eu jusqu’ici l’occasion d’examiner la notion de «victime» dans ce contexte, ils soutiennent que le Comité devrait suivre le point de vue adopté et par le Comité des droits de l’homme de l’ONU et par la Cour européenne des droits de l’homme. Selon eux, la disposition concernant la qualité de «victime» est rédigée en termes équivalents dans la Convention internationale sur l’élimination de la discrimination raciale, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention européenne des droits de l’homme, et le Comité des droits de l’homme et la Cour européenne des droits de l’homme ont tous deux reconnu que l’existence même de certaines lois internes peut avoir des conséquences directes sur les droits d’une personne, d’une manière qui fait de celle‑ci une victime de violations. Les auteurs renvoient à cet égard aux décisions du Comité des droits de l’homme dans l’affaire Toonen c. Australie et dans l’affaire Ballantyne et consorts c. Canada, ainsi qu’à la décision de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Dudgeon c. Royaume ‑Uni. Dans l’affaire Toonen, le Comité des droits de l’homme a estimé que l’auteur pouvait se prétendre victime d’une violation de son droit au respect de la vie privée, même s’il n’avait pas fait l’objet de poursuites, en raison de l’existence d’une loi provinciale qui punissait les relations sexuelles entre hommes adultes consentants. La Cour européenne, dans l’affaire Dudgeon, a abouti à une conclusion analogue. De même, dans l’affaire Ballantyne, qui mettait en cause l’interdiction d’utiliser l’anglais au Québec dans la publicité dans les espaces publics extérieurs, le Comité des droits de l’homme a conclu que l’auteur pouvait se dire victime, même s’il n’avait pas été poursuivi en application de la loi pertinente. Selon les auteurs, ces affaires démontrent que peuvent être considérés comme des «victimes» au sens des conventions tous les membres d’un groupe donné, puisque l’existence même d’un régime légal particulier peut avoir des conséquences directes sur les droits des victimes individuelles à l’intérieur du groupe. Dans la présente affaire, les auteurs affirment que, comme tous les autres Juifs, immigrants ou autres personnes courant un risque imminent d’être soumis à la discrimination, à la haine ou à la violence raciales, ils peuvent prétendre à la qualité de victimes de violations des articles 4 et 6 de la Convention.

3.3Les auteurs soutiennent qu’ils ont la qualité de victimes bien qu’il n’y ait eu aucun affrontement direct avec les participants lors du défilé. À cet égard, il faut rappeler que la Convention vise non seulement la propagation des idées racistes en soi, mais aussi ses effets (art. 1, par. 1). De plus, il est rare que des opinions racistes soient communiquées directement aux personnes de la race concernée − elles sont généralement diffusées auprès de personnes déjà acquises à ces idées. Si l’on n’interprétait pas l’article 4 dans ce contexte, on lui ôterait tout effet.

3.4Les auteurs citent également des décisions de la Cour européenne des droits de l’homme reconnaissant le droit des victimes potentielles de porter plainte contre des violations alléguées des droits de l’homme. Dans l’affaire Campbell et Cosans c. Royaume ‑Uni, la Cour a jugé qu’un écolier pouvait prétendre à la qualité de victime d’une violation de l’article 3 de la Convention en raison de l’emploi du châtiment corporel en tant que mesure disciplinaire dans l’école qu’il fréquentait, même si lui‑même n’y avait jamais été soumis. Le risque général d’être soumis à ce traitement suffisait à fonder sa prétention d’être une «victime». Les auteurs font valoir que l’existence de groupes nazis violents en Norvège, et l’état du droit norvégien après l’arrêt rendu par la Cour suprême dans l’affaire Sjolie, entraînent pour eux un risque réel et imminent d’être exposés aux effets de la diffusion d’idées de supériorité raciale et d’incitation à la haine et à la violence raciales sans qu’ils en soient protégés ou qu’ils disposent d’un recours à cet égard comme l’exigent les articles 4 et 6 de la Convention.

3.5Les auteurs disent encore que, de toute façon, ils ont déjà été personnellement touchés par les violations alléguées. Le défilé et le discours en cause ont eu des conséquences préjudiciables graves pour M. Paltiel, rescapé d’un camp de concentration pendant la guerre, qui avait auparavant reçu des menaces de mort à cause de ses activités d’enseignement. Il en va de même de M. Kirchner, dont la famille a aussi profondément souffert de la persécution des Juifs pendant la guerre. En outre, les organisations requérantes sont directement touchées, puisque, disent‑elles, elles ne pourront plus compter sur la protection de la loi dans leurs activités. Elles font valoir que la décision de la Cour suprême transfère aux organisations privées la tâche de se protéger contre les effets de la propagande raciste, et crée de nouvelles responsabilités pour ceux qui sont les cibles de la discrimination raciale.

Épuisement des voies de recours internes

3.6Les auteurs disent qu’il n’y a pas de recours internes à épuiser. La décision de la Cour suprême est définitive et non susceptible de recours.

Le fond

3.7En ce qui concerne le fond de la requête, les auteurs renvoient au paragraphe 3 de la recommandation générale XV du Comité, qui demande aux États parties de punir quatre catégories de délits: la diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciales, l’incitation à la haine raciale, les actes de violence dirigés contre toute race et l’incitation à des actes de cette nature. Les auteurs considèrent que la décision de la Cour suprême est incompatible à cet égard avec la recommandation générale du Comité relative à l’article 4.

3.8Les auteurs notent que, dans ses conclusions récentes sur le quinzième rapport périodique de la Norvège, le Comité a noté que l’interdiction de la diffusion de la haine raciale est compatible avec le droit à la liberté d’expression; c’est aussi ce que dit l’article 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Les auteurs invoquent le paragraphe 6 de la recommandation générale XV aux termes duquel les organisations qui poussent ou incitent à la discrimination doivent être interdites, et disent que le Comité a relevé avec préoccupation par le passé que l’État partie ne s’était pas conformé à ces obligations. Ils soutiennent qu’il est tout à fait acceptable pour un État partie de protéger une société démocratique contre la propagande antidémocratique. Ils disent en particulier que la conclusion de la Cour suprême selon laquelle l’article 4 de la Convention ne fait pas obligation aux États parties de punir la diffusion des idées de supériorité raciale est dépourvue de base, eu égard à la position claire prise par le Comité à cet égard.

3.9Les auteurs affirment que la Cour suprême a sous‑estimé le danger de ce qu’elle a qualifié de «rhétorique nazie», et que l’article 4 a pour objet de combattre le racisme à la racine. Comme l’a souligné la minorité de la Cour suprême, le discours de M. Sjolie acceptait et encourageait les attaques violentes contre les Juifs et rendait hommage aux efforts faits pour les exterminer pendant la Seconde Guerre mondiale. En particulier, le passage où il est dit que le groupe suivrait les traces des nazis et combattrait pour défendre ses convictions devait être compris comme une acceptation des actes de violence contre les Juifs et une incitation à de tels actes. L’utilisation du salut nazi montrait clairement que la réunion n’était pas pacifique et, compte tenu des actes de violence commis par les Bootboys dans le passé, le défilé de commémoration était inquiétant et l’incitation à la violence manifeste.

3.10Les auteurs déclarent que, à la lumière de la décision rendue par la Cour suprême, l’article 135a du Code pénal ne saurait être accepté en tant que norme de protection contre le racisme. Ils font donc valoir que l’État partie a violé l’article 4 de la Convention et, par conséquent, l’article 6, puisque le droit, tel que l’a dit la Cour suprême, implique nécessairement qu’aucune réparation ne peut être demandée, par exemple sous forme d’indemnisation.

Observations de l’État partie

4.1Par une note en date du 3 octobre 2003, l’État partie conteste la recevabilité de la communication et demande que le Comité examine la question de la recevabilité indépendamment de celle du fond.

4.2L’État partie soutient que la communication des auteurs relève de l’actio popularis, et vise à ce que le Comité examine et évalue la relation entre l’article 135a du Code pénal, tel que la Cour suprême l’a appliqué, et l’article 4 de la Convention. L’État partie considère que c’est dans le cadre de la procédure de présentation des rapports que le Comité peut le mieux examiner des questions de caractère aussi général et note que le Comité a d’ailleurs récemment abordé cette question lorsqu’il a examiné le seizième rapport de l’État partie: il a constaté alors avec préoccupation que l’interprétation stricte de l’article 135a du Code pénal pouvait ne pas couvrir tous les aspects de l’article 4 a) de la Convention, et invité l’État partie à réviser cette disposition et à fournir des renseignements sur ce point dans son rapport périodique suivant. L’État partie dit préparer actuellement un livre blanc sur les modifications qu’il propose d’apporter à l’article 100 de la Constitution, qui garantit la liberté d’expression, et au champ d’application de l’article 135a du Code pénal. Il assure le Comité que ses observations finales seront un élément de poids dans l’examen des modifications proposées à ces dispositions.

4.3L’État partie affirme que ni les communautés juives d’Oslo et de Trondheim ni le Centre antiraciste ne peuvent être considérés comme des «groupes de personnes» au sens du paragraphe 1 de l’article 14. Les communautés juives sont des congrégations religieuses comptant de nombreux membres. Le Centre antiraciste est une organisation non gouvernementale qui s’attache à promouvoir les droits de l’homme et l’égalité des chances, et qui mène des recherches sur le racisme et la discrimination raciale. L’État partie soutient que, bien que la jurisprudence du Comité n’en dise rien, il faut entendre par «groupe de personnes» un groupe dont chaque membre peut se dire victime de la violation alléguée. Ce qui est important, ce n’est pas le groupe en soi, mais les individus qui le constituent. Ce sont les individus, et non le groupe, qui ont la qualité de victime.

4.4En ce qui concerne les auteurs individuels de la communication, MM. Kirchner, Paltiel et Butt, l’État partie prétend qu’ils n’ont pas épuisé les recours internes. Il renvoie à la décision du Comité dans l’affaire POEM et FASM c. Danemark, dans laquelle le Comité avait noté que les requérants n’avaient été plaignants dans aucune procédure interne et avait considéré que «le critère essentiel» de la recevabilité était que les recours internes aient été épuisés «par les requérants eux‑mêmes». L’État partie relève qu’aucun des requérants individuels dans la présente affaire n’a été partie à la procédure interne qui a abouti à l’arrêt de la Cour suprême, et que la seule plainte qui ait été présentée à la police à propos de l’incident émanait d’un politicien local, de la ville d’Askim. Il ajoute que les requérants n’ont pas porté plainte auprès des autorités internes, ni fait de demande de protection.

4.5L’État partie conteste que les auteurs soient des «victimes» au sens du paragraphe 1 de l’article 14. Dans deux cas seulement, le Comité a apparemment constaté que l’article 4 ouvre un droit individuel susceptible d’être invoqué dans le cadre d’une communication en vertu de l’article 14 de la Convention. Dans ces deux cas, les propos racistes avaient été adressés spécifiquement aux requérants et avaient eu des effets préjudiciables sur les droits qu’ils tiraient de l’article 5. En revanche, dans la présente affaire, aucun des requérants n’était présent lorsque les remarques ont été faites pendant le défilé commémoratif. Ils n’ont pas été personnellement la cible de ces remarques, et ils n’ont pas non plus précisé comment les droits qu’ils tirent de l’article 5 auraient, le cas échéant, été atteints par les observations de M. Sjolie. En conséquence, l’État partie soutient que les auteurs ne sont pas des victimes au sens du paragraphe 1 de l’article 14.

Commentaires des requérants

5.1Dans leurs réponses aux observations de l’État partie, datées du 2 décembre 2003, les auteurs soutiennent que la communication a réellement un caractère individuel; ils ajoutent que, quoi qu’il en soit, la question de l’insuffisance de la protection contre les propos racistes prévue à l’article 4 est régulièrement abordée dans le dialogue du Comité et de l’État partie depuis un certain temps, et que les préoccupations exprimées par le Comité dans ses conclusions n’ont eu que peu d’effet sur l’État partie.

5.2Les auteurs répètent que les communautés juives et le Centre antiraciste doivent être considérés comme des «groupes de personnes» au sens de l’article 14 de la Convention et qu’ils ont qualité pour présenter des communications au Comité. Ils notent que rien dans le libellé de l’article 14 n’appuie l’interprétation selon laquelle tous les membres du groupe doivent pouvoir invoquer indépendamment la qualité de victime. Si l’on appliquait une interprétation aussi stricte que celle‑là, l’expression «groupe de personnes» perdrait toute signification distincte. Ils opposent le libellé du paragraphe 1 de l’article 14 avec la disposition correspondante du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (art. 1), qui dispose que seuls les particuliers peuvent soumettre des communications à l’examen du Comité des droits de l’homme. Ils soutiennent que l’expression «groupe de personnes», quelle que soit par ailleurs l’étendue de sa définition, s’applique de toute évidence à des entités qui organisent des individus en vue d’un objectif spécifique commun, par exemple les congrégations et les associations.

5.3À propos de l’obligation d’épuiser les recours internes, les auteurs font valoir que, compte tenu de l’arrêt de la Cour suprême, toute action qu’ils engageraient en Norvège serait vouée à l’échec. Ils invoquent une décision de la Cour européenne des droits de l’homme selon laquelle l’obligation d’épuiser les recours internes ne s’applique pas dans les cas où, en raison d’une interprétation de la loi émanant des autorités judiciaires locales et faisant autorité, une action engagée par les requérants n’aurait aucune perspective de succès. Ils font valoir que le Comité devrait adopter la même attitude au sujet de l’article 14 de la Convention. Ainsi, même si les auteurs n’avaient pas épuisé les recours internes, la Cour suprême les en a dispensés en rendant une décision définitive contenant une interprétation de la loi pertinente qui fait autorité.

5.4Au sujet de l’observation de l’État partie selon laquelle ils ne sont pas des «victimes» au sens de l’article 14, les requérants déclarent que l’article 4 garantit aux personnes et aux groupes de personnes le droit d’être protégés contre les propos haineux. Le fait de ne pas offrir une protection adéquate contre ce type de propos constitue en soi une violation des droits individuels de ceux qui sont directement touchés par la carence de l’État. Ils redisent que, de même qu’un individu peut avoir la qualité de victime potentielle s’il est formellement obligé de désobéir à la loi pour jouir de ses droits, de même cette qualité découle du fait que le droit interne ou la jurisprudence des tribunaux empêche l’individu de jouir des droits que lui reconnaît la Convention. Ils ajoutent que, en l’espèce, les auteurs individuels sont des personnalités publiques et des dirigeants de communautés juives et donc des victimes potentielles de violations de la Convention. M. Paltiel a reçu, dans le passé, des menaces de mort émanant de groupes néonazis. Cependant, la raison d’être de l’article 4 est de combattre le racisme à sa racine: il existe un lien de causalité entre les propos haineux du type de ceux qu’a tenus M. Sjolie et les actes graves de violence raciste. Des personnes comme M. Paltiel sont gravement touchées par le manque de protection contre les propos haineux. Les auteurs soutiennent qu’ils font tous partie de groupes de victimes potentielles évidentes des propos haineux contre lesquels la loi norvégienne n’offre pas de protection. Il existe selon eux une forte probabilité pour qu’ils subissent les effets préjudiciables de la violation de l’article 4 de la Convention.

5.5Dans une nouvelle communication datée du 20 février 2004, les requérants appellent l’attention du Comité sur le troisième rapport de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) consacré à la Norvège, daté du 27 juin 2003. Dans ce rapport, l’ECRI a déclaré que la législation norvégienne ne fournissait pas aux individus une protection adéquate contre les propos racistes, eu égard en particulier à l’arrêt rendu par la Cour suprême dans l’affaire Sjolie. L’ECRI a recommandé à la Norvège de renforcer la protection contre l’expression du racisme au moyen d’une réforme des dispositions pertinentes de sa Constitution et de son droit pénal.

Demande d’éclaircissements adressée à l’État partie par le Comité

6.1À sa soixante‑quatrième session, le Comité a chargé le secrétariat de demander à l’État partie des éclaircissements sur la question de savoir si, selon la législation norvégienne, il aurait été possible pour l’un quelconque des requérants de demander à se porter partie au procès pénal intenté à la suite des remarques faites par M. Sjolie à l’occasion du défilé des «Bootboys» et, dans l’affirmative, de préciser si une intervention des requérants en tant que tiers aurait eu quelque chance de succès. Cette demande d’éclaircissements a été adressée à l’État partie le 3 mars 2004; elle a aussi été transmise aux requérants pour information.

6.2Par une lettre datée du 19 juin 2004, les requérants ont affirmé qu’ils n’avaient aucune possibilité de participer au procès pénal intenté dans le cadre du défilé des «Bootboys», ajoutant qu’ils n’avaient pas non plus subi de perte pécuniaire qui aurait pu justifier le dépôt d’une plainte au civil.

6.3Dans sa communication datée du 19 août 2004, l’État partie a fait savoir que les requérants n’avaient pas la faculté d’intenter un procès pénal privé ni de se joindre aux poursuites publiques contre M. Sjolie pour des infractions présumées à l’article 135a. Selon lui, cependant, l’absence d’une telle possibilité n’a aucune incidence sur la question de savoir si les requérants avaient épuisé les recours internes et il déclare que l’on ne peut distinguer la présente affaire de la décision prise par le Comité dans l’affaire POEM et FASM c. Danemark, mentionnée au paragraphe 4.3 ci‑dessus, dans laquelle le Comité a conclu que la communication en cause était irrecevable car aucun des requérants n’avait été plaignant dans les procédures internes. L’État partie affirme qu’il n’y a pas de différence significative entre le droit procédural pénal norvégien et le droit procédural pénal danois concernant la possibilité d’engager un procès pénal privé ou de se joindre à des poursuites publiques pour des propos racistes. Dans l’affaire danoise, comme dans la présente affaire, la communication était irrecevable parce que les requérants n’avaient pris aucune mesure procédurale pour obtenir la condamnation de l’auteur présumé de l’infraction. Dans l’affaire danoise, comme dans la présente affaire, les requérants n’avaient pas porté plainte à la police. Aucun des requérants n’avait pris de mesure pour attaquer les déclarations de M. Sjolie avant la présentation de leur communication au Comité, près de trois ans après les faits. L’État partie affirme qu’il n’y a aucune raison de distinguer la présente affaire de la décision prise antérieurement par le Comité dans l’affaire danoise.

6.4L’État partie affirme en outre que les requérants individuels, et a fortiori les communautés juives, auraient pu engager des poursuites contre M. Sjolie pour diffamation criminelle, moyen ouvert aux personnes qui s’estiment visées par des propos dénigrants ou diffamatoires en vertu des articles 246 et 247 du Code pénal. S’ils l’avaient fait, les requérants auraient pu joindre leur action en diffamation criminelle au procès pénal déjà engagé contre M. Sjolie et avoir ainsi une influence sur les débats. Si les articles 246 et 247 ne visent pas expressément la discrimination, ils sont applicables aux propos racistes. Dans la décision qu’il a prise en l’affaire Sadicc. Danemark,le Comité a noté que la notion de «voie de recours effective» au sens de l’article 6 de la Convention «ne se limite pas aux procédures pénales fondées sur des dispositions qui punissent spécifiquement, expressément et exclusivement les actes de discrimination raciale». Elle s’étend à «une incrimination générale des propos diffamatoires qui est applicable aux propos racistes». Le Comité a déclaré dans la même décision que «le fait d’avoir de simples doutes sur l’efficacité des recours internes au civil ne dispense pas un plaignant de les engager».

6.5Enfin, l’État partie pense que, si le Comité devait déclarer la communication recevable et l’examiner au fond, il devrait avoir à l’esprit que le Gouvernement propose d’importantes consolidations de la protection offerte par l’article 135a et qu’un livre blanc a été présenté au Parlement sur d’éventuelles modifications de l’article 100 de la Constitution norvégienne. Il est encore trop tôt pour donner des informations sur les résultats de la procédure législative, et l’État partie fournira de plus amples renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique au Comité.

6.6Dans leur réponse datée du 22 août 2004, les requérants déclarent que l’affaire danoise mentionnée par l’État partie doit être distinguée de leur propre affaire, car les poursuites pénales dans cette affaire ont été abandonnées par la police sans qu’aucune mesure n’ait été prise par les auteurs pour engager des poursuites au civil ou au pénal contre l’auteur présumé de l’infraction. Dans la présente affaire, la Cour suprême a jugé que les propos de M. Sjolie étaient protégés par le droit constitutionnel à la liberté d’expression; en conséquence, toute action engagée par les auteurs serait vaine. Ils affirment en outre que l’applicabilité du droit de la diffamation aux propos racistes est un point non résolu en droit norvégien et que c’est précisément pour cette raison que les lois réprimant la diffamation ne sont pas invoquées dans les affaires de propos racistes. Ils déclarent qu’il leur aurait été impossible de joindre des poursuites en diffamation aux poursuites pénales instituées par les autorités; à leur connaissance, ceci n’est jamais arrivé auparavant.

Décision concernant la recevabilité

7.1À ses soixante‑cinquième et soixante‑sixième sessions, le Comité a examiné si la communication était recevable.

7.2Le Comité a relevé que, dans ses observations, l’État partie affirmait que les auteurs n’avaient pas épuisé les recours internes car aucun d’eux ne s’était plaint aux autorités de la conduite de M. Sjolie et renvoyait à la décision du Comité dans l’affaire POEM and FASM . Toutefois, dans cette dernière, comme les auteurs le faisaient remarquer, des poursuites avaient été engagées au pénal puis abandonnées par la police sans qu’aucune mesure n’ait été prise par les auteurs en vue d’obtenir la réouverture de la procédure. Dans la présente affaire, la plus haute juridiction norvégienne avait rendu un arrêt qui faisait autorité acquittant une personne accusée d’avoir tenu des propos racistes. Dans l’affaire POEM and FASM, les auteurs auraient pu prendre l’initiative de contester la décision de la police d’arrêter les poursuites, mais ils ne l’avaient pas fait. Dans la présente affaire, les auteurs n’avaient pas la possibilité de modifier le cours de la procédure pénale. Par ailleurs, M. Sjolie avait maintenant été acquitté et ne pouvait être rejugé. Le Comité a relevé en outre que l’État partie avait confirmé, en réponse à la question qu’il lui avait posée à sa soixante‑quatrième session, que les auteurs n’auraient pu demander à se porter parties au procès pénal intenté contre M. Sjolie. L’État partie affirmait que les auteurs auraient pu engager des poursuites en diffamation contre M. Sjolie, mais les auteurs faisaient valoir que l’application du droit de la diffamation aux propos racistes était un point non résolu en droit norvégien, et le Comité n’était pas en mesure de conclure qu’une telle procédure constituait un recours interne utile et effectif. Dans les circonstances de l’espèce, le Comité a estimé qu’il n’y avait pas de recours internes effectifs à épuiser et que rien ne s’opposait donc à la recevabilité de ce point de vue.

7.3Les auteurs se disaient «victimes» de violations des articles 4 et 6 de la Convention parce que, de manière générale, la loi norvégienne ne les protégeait pas contre la diffusion de propagande antisémite et raciste. Ils affirmaient aussi être «victimes» du fait de leur appartenance à un groupe particulier de victimes potentielles, comme tous les autres Juifs ou immigrants, ils couraient un risque imminent d’être soumis à la discrimination, à la haine ou à la violence raciales. Ils renvoyaient en particulier, pour étayer leur argument, à la jurisprudence d’autres organes internationaux s’occupant des droits de l’homme. Ils invoquaient la décision rendue par le Comité des droits de l’homme dans l’affaire Toonen c. Australie, dans laquelle celui‑ci avait considéré que l’existence même d’un certain régime légal touchait directement l’auteur dans ses droits d’une manière qui donnait lieu à une violation du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Les auteurs citaient aussi la décision de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Open Door and Dublin Well Women c. Irlande, dans laquelle la Cour avait estimé que certains auteurs avaient la qualité de «victimes» parce qu’ils appartenaient à une catégorie de personnes qui pourraient, dans l’avenir, être exposées aux effets préjudiciables des actes dénoncés. De même, dans la présente affaire, les auteurs déclaraient que, à la suite de la décision de la Cour suprême, ils risquaient d’être exposés aux effets de la diffusion d’idées de supériorité raciale et d’incitation à la haine raciale, sans bénéficier d’une protection adéquate. Ils faisaient également valoir que cette décision contribuait à créer une atmosphère dans laquelle des actes de racisme, y compris des actes de violence, allaient plus probablement se produire et, à cet égard, ils évoquaient des incidents spécifiques de violence et d’autres activités «nazies». Le Comité a souscrit aux observations des auteurs; il ne voyait aucune raison de ne pas adopter, en ce qui concerne la notion de «victime», un point de vue analogue à celui qui avait été retenu dans les décisions susmentionnées. Il a considéré que, dans les circonstances de l’espèce, les auteurs avaient établi qu’ils faisaient partie d’une catégorie de victimes potentielles.

7.4De l’avis du Comité, le fait que trois des auteurs étaient des organisations ne posait aucun problème pour ce qui était de la recevabilité. Comme il a été relevé, l’article 14 de la Convention mentionne expressément la compétence du Comité pour recevoir des communications émanant de «groupes de personnes». Selon le Comité, interpréter cette disposition de la manière dont l’État partie le suggérait, à savoir en exigeant que chaque membre du groupe soit individuellement victime d’une violation présumée, reviendrait à ôter son sens à l’expression «groupes de personnes». Le Comité n’avait jamais à ce jour interprété cette expression de façon aussi stricte. Il a estimé que, compte tenu de la nature de leurs activités et des catégories de personnes qu’elles représentent, les organisations requérantes avaient elles aussi la qualité de «victimes» au sens de l’article 14.

7.5Le 9 mars 2005, le Comité a donc déclaré la communication recevable.

Observations de l’État partie sur le fond

8.1Par une communication datée du 9 juin 2005, l’État partie affirme qu’il n’y a pas eu violation des articles 4 ou 6 de la Convention. Il estime que, sans déroger aux dispositions de la Convention, l’article 135a du Code pénal doit être interprété compte dûment tenu du droit à la liberté d’expression. L’obligation qui incombe à l’État partie d’ériger en infraction pénale certains propos et certaines déclarations doit être mise en balance avec le droit à la liberté d’expression, protégé par d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. En l’espèce, la Cour suprême de la Norvège a soigneusement évalué l’affaire après avoir entendu les parties, y compris les arguments relatifs aux prescriptions des instruments internationaux pertinents. Elle a estimé que la mise en balance appropriée des droits visés amènerait à conclure qu’il n’y avait pas en l’espèce de violation de l’article 135a du Code pénal et que cette conclusion était compatible avec les obligations souscrites par l’État partie en vertu de la Convention, compte dûment tenu de la clause de sauvegarde figurant à l’article 4 de la Convention.

8.2L’État partie estime que les États doivent jouir d’une marge d’appréciation pour trouver un équilibre entre les différents droits au niveau national et qu’en l’espèce cette marge d’appréciation n’a pas été dépassée. La majorité de la Cour suprême a estimé que l’article 135a s’appliquait aux remarques franchement insultantes, y compris aux propos qui constituent une incitation ou un encouragement à des violations de l’intégrité et à ceux qui portent manifestement atteinte à la dignité humaine d’un groupe donné. La majorité a considéré que ces remarques devaient être interprétées en fonction du contexte dans lequel elles étaient faites et de la façon dont elles risquaient d’être perçues par un simple particulier. L’État partie estime que le Comité devrait tenir dûment compte de l’interprétation que la Cour suprême a faite de ces remarques étant donné qu’elle a examiné toute l’affaire de façon approfondie.

8.3L’État partie considère que la recommandation générale XVdu Comité devrait être interprétée comme reconnaissant que l’application de l’article 4 exige que l’on trouve un équilibre entre le droit à la liberté d’expression et le droit à la protection contre la discrimination raciale.

8.4L’État partie note la décision du Comité selon laquelle les auteurs font partie d’une «catégorie de victimes potentielles»; à cet égard, l’État partie appelle l’attention sur les changements apportés récemment au droit norvégien pour renforcer la protection de la loi contre la diffusion d’idées racistes. Il fait valoir que, suite aux modifications apportées récemment à l’article 100 de la Constitution et à l’article 135a du Code pénal, les auteurs ne peuvent plus être considérés comme des «victimes potentielles» de la discrimination raciale interdite par la Convention; toute violation éventuelle de la Convention ne pourrait porter que sur la période antérieure à l’adoption de ces amendements.

8.5Une version entièrement révisée de l’article 100 de la Constitution est entrée en vigueur le 30 septembre 2004; ce nouveau texte élargit le pouvoir du Parlement d’adopter des lois contre les propos racistes, en conformité avec les obligations souscrites par l’État partie en vertu des conventions internationales. Le Parlement a depuis usé de ce nouveau pouvoir pour modifier l’article 135a du Code pénal de telle sorte que les remarques racistes puissent donner lieu à des poursuites même si elles ne sont pas diffusées publiquement. Les déclarations racistes faites par imprudence sont à présent aussi proscrites − l’intention délibérée n’a plus besoin d’être prouvée. La peine maximale a été portée de deux à trois ans d’emprisonnement. Toutefois, les tribunaux doivent dans chaque affaire mettre en balance l’article 135a du Code pénal et la liberté d’expression. Selon l’État partie, ces amendements récents démentent l’affirmation des auteurs selon laquelle la décision rendue dans l’affaire Sjolie ferait jurisprudence et qu’il serait plus difficile d’engager des poursuites pour diffusion d’idées de discrimination et de haine raciales. L’État partie fait mention en outre de l’adoption d’une nouvelle loi sur la discrimination qui incorpore les dispositions de la Convention, et prévoit les peines applicables dans les cas graves d’incitation ou de participation à la discrimination, complétant ainsi les nouvelles dispositions de l’article 135a. Le Gouvernement est également en train d’instituer la fonction, nouvelle, d’ombudsman contre la discrimination, lequel aura pour mandat de suivre l’application et de veiller au respect de ces nouvelles dispositions.

8.6L’État partie estime que compte tenu des modifications susmentionnées apportées à sa législation et à leurs conséquences pour les auteurs, en leur qualité de «victimes potentielles» le Comité devrait reconsidérer sa décision concernant la recevabilité, en application du paragraphe 6 de l’article 94 de son Règlement intérieur, au moins dans la mesure où la communication soulève des questions concernant les effets juridiques généraux de l’arrêt de la Cour suprême.

8.7Enfin, l’État partie relève que les auteurs n’ont pas indiqué en quoi les propos de M. Sjolie les avaient empêchés de jouir de l’un quelconque des droits protégés par l’article 5 de la Convention.

Commentaires de l’auteur concernant les observations de l’État partie sur le fond

9.1Dans leurs commentaires sur les observations de l’État partie datés du 4 juillet 2005, les auteurs invoquent leurs observations précédentes dans lesquelles ils abordaient certains points concernant le fond. Ils insistent sur le fait qu’il demeure incontesté que seules trois des quatre catégories pertinentes de discrimination raciale visées à l’article 4 de la Convention constituent des infractions pénales au regard de la législation norvégienne actuelle; la diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciales peut donc rester impunie, ce qui est contraire à l’article 4 et à la recommandation générale XV.

9.2En ce qui concerne la demande de l’État partie tendant à ce que le Comité revienne sur la question de la recevabilité de la plainte, les auteurs considèrent que le Comité doit examiner et évaluer la communication sur la base des faits au moment où ils se sont produits et non en fonction de la législation adoptée ultérieurement. En tout état de cause, la nouvelle législation ne répond pas à la préoccupation principale des auteurs à savoir que la loi ne réprime pas toutes les catégories pertinentes de délit visées dans la Convention; les auteurs demeurent donc des victimes potentielles.

9.3S’agissant de la clause «de sauvegarde» figurant à l’article 4, les auteurs maintiennent que le fait de sanctionner les quatre catégories de délit qui y sont envisagées est tout à fait compatible avec le principe international de la liberté d’expression. À leur avis, le Comité doit donner sa propre interprétation des déclarations incriminées au lieu de s’en remettre à celle de la Cour suprême de la Norvège. Pour qualifier le discours qu’ils dénoncent, les auteurs font observer que Hess était bien connu comme adjoint et confident d’Hitler, ayant joué un rôle dans l’élaboration des lois de Nuremberg. Ils maintiennent que, comme l’a estimé la minorité de la Cour suprême, quiconque ayant des notions de base sur Hitler et le national socialisme aurait interprété le discours de M. Sjolie comme une acceptation et une approbation de la violence massive dont les Juifs ont fait l’objet à l’époque nazie.

9.4Les auteurs renvoient à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et du Comité des droits de l’homme selon lesquels les propos racistes et haineux ne peuvent guère être protégés en vertu du droit à la liberté d’expression énoncé dans les instruments dont ils sont chargés de surveiller l’application. Pour les auteurs, la clause de sauvegarde figurant à l’article 4 a pour objet de protéger le rôle des médias dans la diffusion d’informations sur des questions d’importance publique, à condition que ce ne soit pas pour prôner la haine raciale. L’État partie, disent‑ils, accorde aux propos haineux un niveau de protection supérieur aux normes établies en la matière dans la jurisprudence internationale. Ils ajoutent que la décision rendue par la Cour suprême dans l’affaire Sjolie a déjà un effet considérable en créant un précédent, en dépit de l’entrée en vigueur de la nouvelle législation. Ils joignent le texte d’une décision de la police d’Oslo datée du 31 mai 2005 relative à l’abandon des poursuites contre le dirigeant d’une organisation néonazie, qui avait déclaré notamment que les Juifs avaient tué de millions des membres de «son peuple», que les Juifs devaient être «purifiés» et qu’ils n’étaient pas des «êtres humains» mais des «parasites». La police avait classé l’affaire en se référant expressément à l’affaire Sjolie .

9.5Les auteurs font en outre valoir qu’invoquer la liberté d’expression à des fins racistes et discriminatoires revient à abuser du droit de présenter des communications. Ils réaffirment que le souci de concilier le droit à la liberté d’expression et le droit à la protection contre les propos haineux suite à la décision rendue dans l’affaire Sjolieest tel que l’on ne peut en définitive être protégé que contre les remarques les plus caractérisées et les plus insultantes qui portent gravement atteinte à la dignité d’un groupe.

9.6Enfin, les auteurs constatent que la Norvège n’interdit pas les organisations racistes et que, dans l’affaire Sjolie, la Cour suprême est partie de l’idée qu’une telle interdiction serait inacceptable, ce qui va à l’encontre de ce qui est dit au paragraphe 6 de la recommandation générale XV du Comité.

Examen au fond

10.1Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, agissant en application du paragraphe 7 a) de l’article 14 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a examiné les informations qui lui ont été soumises par les requérants et l’État partie.

10.2En ce qui concerne la demande de l’État partie tendant à ce que le Comité reconsidère sa décision de recevabilité conformément au paragraphe 6 de l’article 94 de son Règlement intérieur compte tenu des modifications législatives récentes, le Comité considère qu’il doit examiner et évaluer la communication sur la base des faits de la cause à l’époque considérée, indépendamment des modifications ultérieures de la loi. De plus, les auteurs ont fait mention d’au moins un incident survenu après l’adoption des amendements récents à la législation pertinente dans le cadre duquel l’arrêt rendu dans l’affaire Sjolie a apparemment été interprété comme un obstacle à l’engagement de poursuites contre les discours incitant à la haine.

10.3Le Comité a pris note de la suggestion de l’État partie selon laquelle il devrait tenir dûment compte de l’examen de l’affaire Sjolie par la Cour suprême qui a procédé à une analyse approfondie et exhaustive; et qu’il faudrait laisser aux États une certaine marge d’appréciation pour concilier leurs obligations en vertu de la Convention avec le devoir de protéger le droit à la liberté d’expression. Le Comité estime qu’il a de fait dûment tenu compte de la décision de la Cour suprême et a pris note de l’analyse qu’elle contient. Toutefois, c’est à lui qu’il appartient de veiller à la cohérence de l’interprétation des dispositions de l’article 4 de la Convention, comme l’atteste sa recommandation générale XV.

10.4Le Comité doit déterminer en l’espèce si les déclarations de M. Sjolie, convenablement qualifiées, entrent dans l’une quelconque des catégories de déclarations punissables énoncées à l’article 4 et, dans l’affirmative, si ces déclarations bénéficient de la protection accordée par la clause de sauvegarde eu égard à la liberté d’expression. En ce qui concerne la qualification du discours en cause, le Comité ne souscrit pas à l’analyse de la majorité des membres de la Cour suprême. Si le contenu du discours est objectivement absurde, l’absence de logique de certaines remarques est sans rapport avec le fait de savoir si ces remarques violent ou non l’article 4. Dans son discours, M. Sjolie a déclaré que «[son] peuple et [son] pays sont dévalisés et détruits par les Juifs qui s’emparent de [leurs] richesses et introduisent à la place des pensées immorales et étrangères à la Norvège». Il mentionne ensuite non seulement Rudolph Hess à la mémoire duquel le discours est dédié, mais aussi Adolf Hitler et leurs convictions; il dit que son groupe «suivra leurs traces et combattra pour ce en quoi [il] croît». Le Comité estime que ces déclarations contiennent des idées fondées sur la supériorité ou la haine raciales; la référence à Hitler et ses convictions et l’appel à suivre ses traces doivent, de l’avis du Comité, être considérés comme une incitation, sinon à la violence, du moins à la discrimination raciale.

10.5Quant à la question de savoir si ces déclarations sont protégées par la clause de sauvegarde qui figure à l’article 4, le Comité note que le principe de la liberté d’expression a bénéficié d’un faible niveau de protection dans les affaires de propos racistes et haineux examinées par d’autres organes internationaux et que le Comité lui‑même, dans sa recommandation générale XV, dit clairement (par. 4) que l’interdiction de la diffusion de toute idée fondée sur la supériorité ou la haine raciales est compatible avec le droit à la liberté d’opinion et d’expression. Le Comité relève que la clause de sauvegarde a trait de façon générale à tous les principes consacrés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, pas seulement à la liberté d’expression. Donner au droit à la liberté d’expression un rôle plus limité dans le contexte de l’article 4 ne prive donc pas cette clause de sens et ce d’autant moins que tous les instruments internationaux qui garantissent la liberté d’expression prévoient l’éventualité d’en limiter l’exercice dans certaines circonstances. Le Comité conclut que les déclarations de M. Sjolie, en ce qu’elles étaient exceptionnellement/manifestement agressives ne sont pas protégées par la clause de sauvegarde et que, de ce fait, son acquittement par la Cour suprême de Norvège a entraîné une violation de l’article 4 et, par conséquent, de l’article 6 de la Convention.

10.6Enfin, s’agissant de l’argument de l’État partie selon lequel les auteurs n’ont pas indiqué en quoi les propos de M. Sjolie les empêchaient de jouir de l’un quelconque des droits protégés par l’article 5 de la Convention, le Comité considère que sa compétence pour recevoir et examiner des communications au titre de l’article 14 n’est pas limitée aux plaintes pour violation de l’un ou de plusieurs des droits énoncés à l’article 5. En fait, selon l’article 14, le Comité peut recevoir des plaintes concernant «l’un quelconque des droits énoncés dans la Convention». Cette formulation générale donne à penser que les droits en question ne sont pas énoncés dans une seule disposition de la Convention. De plus, le fait que l’article 4 traite des obligations des États parties et non des droits intrinsèques des personnes ne signifie pas qu’il s’agisse de questions relevant essentiellement de la juridiction interne des États parties et ne pouvant dont pas faire l’objet d’un examen au titre de l’article 14. Si tel était le cas, le régime de protection établi par la Convention serait considérablement affaibli. La conclusion du Comité est confortée par le libellé de l’article 6 de la Convention dans lequel les États parties s’engagent à assurer à toute personne soumise à leur juridiction une protection et une voie de recours effectives contre tous actes de discrimination raciale qui violeraient les «droits individuels» qui lui sont reconnus par la Convention. De l’avis du Comité, cela confirme que les droits consacrés dans la Convention ne sont pas limités à ceux qui sont énoncés à l’article 5. Enfin, le Comité rappelle qu’il a déjà examiné des communications soumises au titre de l’article 14 dans lesquelles aucune violation de l’article 5 n’était alléguée.

11.Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, agissant en application du paragraphe 7 de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, estime que les faits dont il est saisi font apparaître des violations des articles 4 et 6 de la Convention.

12.Le Comité recommande que l’État partie prenne des mesures pour que des déclarations telles que celles qui ont été faites par M. Sjolie lors de son discours ne bénéficient pas de la protection accordée par la loi norvégienne au droit à la liberté d’expression.

13.Le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de six mois, des renseignements sur les mesures prises à la lumière de l’opinion du Comité. L’État partie est prié également de diffuser largement l’opinion du Comité.

[Fait en anglais (version originale), en espagnol, en français et en russe. Paraîtra ultérieurement en arabe et en chinois dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]

Notes

Annexe IV

PRÉSENTATION DES MÉTHODES DE TRAVAIL DU COMITÉ

I. MANDAT DU COORDONNATEUR CHARGÉ DU SUIVI DES OBSERVATIONS ET DES RECOMMANDATIONS FORMULÉES PAR LE COMITÉ AU TITRE DU PARAGRAPHE 1 DE L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Conformément aux dispositions du paragraphe 1 b) de l’article 9 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et au paragraphe 1 de l’article 65 du Règlement intérieur du Comité (voir HRI/GEN/3/Rev. 2), le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale peut demander à un État partie un rapport additionnel ou des renseignements complémentaires. Il peut indiquer de quelle manière et dans quel délai ledit rapport ou lesdits renseignements doivent être communiqués. À sa soixante‑quatrième session, le Comité a décidé de modifier les dispositions de son Règlement intérieur relatives aux activités de suivi en ajoutant un second paragraphe à l’article 65. Aux termes de ce paragraphe, le Comité peut nommer un coordonnateur chargé de faciliter l’application des dispositions du paragraphe 1 de l’article 65. À sa soixante‑cinquième session, le Comité a nommé un coordonnateur et un suppléant.

Le mandat du coordonnateur a pris effet à partir de la soixante‑quatrième session du Comité.

Le mandat

1.Le coordonnateur est chargé de contrôler la suite donnée aux observations et recommandations du Comité par les États parties, en coopération avec le rapporteur par pays concerné.

2.Le Comité peut demander à un État partie de communiquer des renseignements dans un délai précis, avant la session à laquelle le rapport de l’État concerné doit être examiné. Le coordonnateur devra contrôler le respect par l’État partie des délais fixés par le Comité. Il devra adresser des rappels (un mois avant l’expiration du délai) à tout État partie qui n’a pas fourni les renseignements complémentaires dans le délai fixé.

3.Le coordonnateur analysera et évaluera les renseignements reçus de l’État partie à la suite d’une demande de renseignements complémentaires adressée par le Comité. Cette tâche devrait être partagée avec le rapporteur par pays. Si le rapporteur estime que des renseignements supplémentaires sont nécessaires, il abordera cette question avec l’État partie.

4.Le coordonnateur peut recommander au Comité de prendre des mesures appropriées après la réception des renseignements visés au paragraphe 2 ou en cas de non‑réception desdits renseignements. Le coordonnateur peut, entre autres, recommander au Comité de prendre note des renseignements, de demander que des renseignements complémentaires soient fournis dans le prochain rapport périodique ou rappeler à l’État partie des recommandations figurant dans les dernières observations finales du Comité et ses obligations en tant que partie à la Convention. La séance sera privée.

5.Le coordonnateur soumet un rapport intérimaire succinct au Comité à chaque session. Le Comité devrait prévoir assez de temps pour l’examen des conclusions du coordonnateur et, le cas échéant, l’adoption de recommandations formelles y compris, s’il y a lieu, pour le réexamen de la date à laquelle le prochain rapport périodique de l’État partie doit être présenté. La séance sera privée.

6.Les conclusions du coordonnateur seront incluses dans le chapitre du rapport annuel consacré aux activités de suivi. Si aucun renseignement n’a été communiqué en dépit des rappels, ce fait sera mentionné dans le rapport suivant du Comité à l’Assemblée générale.

II. SUIVI DES OPINIONS ADOPTÉES PAR LE COMITÉ AU TITRE DU PARAGRAPHE 7 DE L’ARTICLE 14 DE LA CONVENTION

À sa 1721e séance (soixante-septième session), le 15 août 2005, le Comité a ajouté les deux paragraphes suivants à l’article 95 de son Règlement intérieur:

Le Comité peut désigner unou plusieurs rapporteurs spéciaux, chargés du suivi des opinions adoptées par le Comité au titre du paragraphe 7 de l’article 14 de la Convention, afin de vérifier les mesures prises par les Etats parties à la lumière des suggestions et recommandations du Comité.

Le ou les rapporteurs spéciaux peuvent établir les contacts et prendre les mesures appropriées pour s’acquitter dûment de ce mandat. Le ou les rapporteurs spéciaux pourront recommander au Comité les mesures complémentaires qui peuvent être nécessaires, et feront périodiquement rapport au Comité sur les activités de suivi. Le Comité consigne dans son rapport annuel des informations sur les activités de suivi.

Notes

Annexe V

DOCUMENTS REÇUS PAR LE COMITÉ À SES SOIXANTE-SIXIÈME ET SOIXANTE-SEPTIÈME SESSIONS EN APPLICATION DE L’ARTICLE 15 DE LA CONVENTION

On trouvera ci-après la liste des documents de travail mentionnés au chapitre V, soumis par le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux:

A/AC.109/2004/2

Pitcairn

A/AC.109/2004/3

Îles Vierges britanniques

A/AC.109/2004/4

Sahara occidental

A/AC.109/2004/5

Guam

A/AC.109/2004/6

Samoa américaines

A/AC.109/2004/7

Gibraltar

A/AC.109/2004/8

Tokélaou

A/AC.109/2004/9

Sainte‑Hélène

A/AC.109/2004/10

Anguilla

A/AC.109/2004/11

Nouvelle‑Calédonie

A/AC.109/2004/12

Îles Falkland (Malvinas)

A/AC.109/2004/13

Montserrat

A/AC.109/2004/14

Bermudes

A/AC.109/2004/15

Îles Caïmanes

A/AC.109/2004/16

Îles Turques et Caïques

A/AC.109/2004/17

Îles Vierges américaines

ANNEXE VI

RAPPORTEURS POUR LES ÉTATS PARTIES DONT LE COMITÉ A EXAMINÉ LES RAPPORTS OU LA SITUATION, DANS LE CADREDE LA PROCÉDURE DE BILAN, À SES SOIXANTE-SIXIÈME ET

SOIXANTE‑SEPTIÈME SESSIONS

Rapports initiaux et périodiques examinés par le Comité et pays dont la situation a été examinée dans le cadre de la procédure de bilan

Rapporteur pour l’État partie

AustralieTreizième et quatorzième rapports périodiques(CERD/C/428/Add.2)

M. Pillai

AzerbaïdjanTroisième et quatrième rapports périodiques(CERD/C/440/Add.1)

M. Tang

BahreïnSixième et septième rapports périodiques(CERD/C/443/Add.1)

M. Boyd

FranceQuinzième et seizième rapports périodiques(CERD/C/430/Add.4)

M. Sicilianos

IrlandeRapport initial et deuxième rapport périodique(CERD/C/460/Add.1)

M. Herndl

République démocratique populaire laoSixième à quinzième rapports périodiques(CERD/C/451/Add.1)

M. Amir

LuxembourgDixième à treizième rapports périodiques(CERD/C/449/Add.1)

M. de Gouttes

Papouasie-Nouvelle-Guinée (procédure de bilan)Rapports en retard: rapport initial à onzième rapport périodique

Mme Dah

BarbadeHuitième à seizième rapports périodiques(CERD/C/452/Add.5)

M. Thornberry

GéorgieDeuxième et troisième rapports périodiques(CERD/C/461/Add.1)

M. Valencia

IslandeDix-septième et dix-huitième rapports périodiques(CERD/C/476/Add.5)

M. Sicilianos

Malawi (procédure de bilan)Rapports en retard: rapport initial à quatrième rapport périodique

M. Amir

Mozambique (procédure de bilan)Rapports en retard: deuxième à onzième rapports périodiques

M. de Gouttes

NigériaQuatorzième à dix-huitième rapports périodiques(CERD/C/476/Add.3)

Mme January-Bardill

Sainte-Lucie (procédure de bilan)Rapports en retard: rapport initial à huitième rapport périodique

M. Kjaerum

Seychelles (procédure de bilan)Rapports en retard: sixième à quatorzième rapports périodiques

M. Pillai

République-Unie de TanzanieHuitième à seizième rapports périodiques(CERD/C/452/Add.7)

M. Lindgren Alves

TurkménistanRapport initial à cinquième rapport périodique(CERD/C/441/Add.1)

M. Tang

République bolivarienne du VenezuelaQuatorzième à dix-huitième rapports périodiques(CERD/C/476/Add.4)

M. Avtonomov

ZambieDouzième à seizième rapports périodiques(CERD/C/452/Add.6/Rev.1)

M. Cali Tzay

Annexe VII

OBSERVATIONS DES ÉTATS PARTIES CONCERNANT LES DÉCISIONS ET LES OBSERVATIONS FINALES ADOPTÉES PAR LE COMITÉ ET RÉPONSES DU COMITÉ

Sixième et septième rapports périodiques de Bahreïn

Les observations ci-après concernant les observations finales adoptées par le Comité à l’issue de l’examen des sixième et septième rapports périodiques présentés par l’État partie*ont été envoyées le 2 septembre 2005 par le Représentant permanent de Bahreïnauprès de l’Office des Nations Unies à Genève.

«Le Royaume de Bahreïn confirme son attachement à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Aussi accueille-t-il avec satisfaction les observations finales que le Comité a adoptées à l’issue de l’examen de ses sixième et septième rapports périodiques. Il souhaiterait toutefois présenter les observations suivantes:

1.Comme l’indiquent clairement les rapports du Royaume, la Convention fait partie du droit interne de Bahreïn, la législation et les orientations fondamentales de Bahreïn affirment les principes d’égalité et de non-discrimination et il existe des voies de recours pour donner suite à toute allégation de discrimination raciale.

2.Le Comité s’est dit préoccupé par l’interdiction prononcée à l’encontre d’une association de défense des droits de l’homme, alors même que la délégation bahreïnite avait expliqué que la décision d’interdire l’association en question avait été prise conformément à la loi et que l’appel formé par cette association contre ladite décision avait été examiné par les tribunaux. La délégation avait en outre décrit les garanties juridiques dont bénéficient les organisations de la société civile.

3.Le Comité s’est déclaré préoccupé par la situation des travailleurs migrants, en particulier en ce qui concerne l’exercice de leurs droits économiques, sociaux et culturels, alors même que les rapports et la délégation bahreïnites avaient expliqué clairement que les travailleurs migrants jouissent de tous ces droits ainsi que d’une protection juridique et qu’ils ont accès à des services qui leur donnent des conseils sur leurs droits et les moyens de les protéger.

4.À la lumière de certaines questions évoquées pendant le débat, le Comité s’est déclaré préoccupé par les nombreuses allégations faisant état de la discrimination dont feraient l’objet certains groupes qui peuvent se distinguer par leur origine tribale ou nationale, leur ascendance, leur culture ou leur langue. Le Comité a recommandé à l’État partie de veiller à ce que chacun, sans distinction de race, de couleur ou d’origine nationale ou ethnique, jouisse des droits au travail, à la santé et à la sécurité sociale, à un logement convenable et à l’éducation. À cet égard, le Gouvernement du Royaume de Bahreïn souhaiterait présenter les observations suivantes:

a)Bien que les questions posées à propos de ces allégations l’aient été pour l’essentiel sous un angle religieux et bien que cet aspect religieux n’ait rien à voir avec la discrimination, la délégation du Royaume a, dans un esprit de coopération, répondu à ces questions en expliquant que les allégations étaient sans fondement;

b)Étant donné que les questions visaient à déterminer si oui ou non il y avait une part de vérité dans ces allégations, la délégation bahreïnite avait espéré que dans ses observations, le Comité aurait tenu compte des renseignements supplémentaires qui avaient été demandés à ce sujet;

c)Le Gouvernement du Royaume de Bahreïn confirme que conformément à la Convention, il met tout en œuvre pour garantir à chacun les droits au travail, à la santé, à la sécurité sociale, au logement et à l’éducation, sans discrimination, comme en témoignent les lois et les grandes orientations de l’État ainsi que les programmes du Gouvernement.

Le Gouvernement du Royaume de Bahreïn souhaiterait exprimer sa gratitude au Comité pour ses observations élogieuses sur l’évolution positive de la situation politique, juridique et économique au Bahreïn en ce qui concerne le respect des droits de l’homme. À cet égard, le Gouvernement note avec satisfaction que le Conseil consultatif et la Chambre des députés examinent actuellement deux projets de loi concernant l’adhésion de Bahreïn au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.».

Annexe VIII

LISTE DES DOCUMENTS PUBLIÉS POUR LES SOIXANTE ‑SIXIÈME ET SOIXANTE ‑SEPTIÈME SESSIONS DU COMITÉ*

CERD/C/498

Ordre du jour provisoire annoté de la soixante‑sixième session du Comité

CERD/C/499

Rapports présentés par les États parties conformément à l’article 9, paragraphe 1, de la Convention (document établi pour la soixante‑sixième session du Comité)

CERD/C/501

Ordre du jour provisoire annoté de la soixante‑septième session du Comité

CERD/C/502

Rapports présentés par les États parties conformément à l’article 9, paragraphe 1, de la Convention (document établi pour la soixante‑septième session du Comité)

CERD/C/503

Examen des copies de pétitions, copies de rapports et autres renseignements relatifs aux territoires sous tutelle, aux territoires non autonomes et à tous les autres territoires auxquels s’applique la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale, conformément à l’article 15 de la Convention

CERD/C/SR.1673 à 1701

Comptes rendus analytiques de la soixante‑sixième session du Comité

CERD/C/SR.1702 à 1729

Comptes rendus analytiques de la soixante‑septième session du Comité

CERD/C/AUS/CO/14

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Australie

CERD/C/AZE/CO/4

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Azerbaïdjan

CERD/C/BHR/CO/7

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Bahreïn

CERD/C/FRA/CO/16

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − France

CERD/C/IRL/CO/2

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Irlande

CERD/C/LAO/CO/15

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − République démocratique populaire lao

CERD/C/LUX/CO/13

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Luxembourg

CERD/C/DEC/SDN/1

Décisions du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Situation au Darfour

CERD/C/DEC/NZL/1

Décisions du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Loi néo‑zélandaise sur l’estran et les fonds marins, 2004

CERD/C/DEC/SUR/1

Décisions du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Décision 3 (66) relative au Suriname

CERD/C/DEC/SUR/2

Décisions du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Décision 1 (67) relative au Suriname

CERD/C/BRB/CO/16

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Barbade

CERD/C/GEO/CO/3

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Géorgie

CERD/C/ISL/CO/18

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Islande

CERD/C/NGA/CO/18

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Nigéria

CERD/C/TKM/CO/5

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Turkménistan

CERD/C/TZA/CO/16

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − République‑Unie de Tanzanie

CERD/C/VEN/CO/18

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − République bolivarienne du Venezuela

CERD/C/ZMB/CO/16

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale − Zambie

CERD/C/428/Add.2

Treizième et quatorzième rapports périodiques de l’Australie

CERD/C/440/Add.1

Troisième et quatrième rapports périodiques de l’Azerbaïdjan

CERD/C/443/Add.1

Sixième et septième rapports périodiques de Bahreïn

CERD/C/430/Add.4

Quinzième et seizième rapports périodiques de la France

CERD/C/460/Add.1

Rapport initial et deuxième rapport périodique de l’Irlande

CERD/C/451/Add.1

Sixième à quinzième rapports périodiques de la République démocratique populaire lao

CERD/C/449/Add.1

Dixième à treizième rapports périodiques du Luxembourg

CERD/C/452/Add.5

Huitième à seizième rapports périodiques de la Barbade

CERD/C/461/Add.1

Deuxième et troisième rapports périodiques de la Géorgie

CERD/C/476/Add.5

Dix‑septième et dix‑huitième rapports périodiques de l’Islande

CERD/C/476/Add.3

Quatorzième à dix‑huitième rapports périodiques du Nigéria

CERD/C/452/Add.7

Huitième à seizième rapports périodiques de la République‑Unie de Tanzanie

CERD/C/441/Add.1

Rapport initial, deuxième à cinquième rapports périodiques du Turkménistan

CERD/C/476/Add.4

Quatorzième à dix‑huitième rapports périodiques de la République bolivarienne du Venezuela

CERD/C/452/Add.6

Douzième à seizième rapports périodiques de la Zambie

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