NATIONS

UNIES

HRI

Instruments

internationaux relatifs

aux droits de l'homme

Distr.

GÉNÉRALE

HRI/CORE/1/Add.105

18 novembre 1999

FRANÇAIS

Original : ANGLAIS

DOCUMENT DE BASE CONSTITUANT LA PREMIÈRE PARTIE

DES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES

BHOUTAN

[Original : anglais]

[20 avril 1999]

I. TERRITOIRE ET POPULATION

1.Le Bhoutan est bordé par la Région autonome du Tibet de la République populaire de Chine au nord et par les États indiens du Sikkim, du Bengale occidental, de l'Assam et de l'Arunachal Pradesh, à l'ouest, au sud et à l'est. D'une superficie de 46 500 km2 environ, il s'étend sur 150 km du nord au sud et sur 300 km d'est en ouest. Situé pour l'essentiel dans la chaîne de l'Himalaya, le Bhoutan présente un relief parmi les plus accidentés et les plus montagneux du monde. Peu élevé dans sa partie méridionale (100 m environ au‑dessus du niveau de la mer), certains de ses sommets peuvent dépasser 7 550 m dans le nord. Les plaines sont rares : quelques vallées fluviales relativement larges, orientées nord‑sud, et de petites étendues sous les contreforts montagneux, le long de la frontière indienne.

2.Le pays peut être divisé en trois régions climatiques. Dans la frange méridionale, qui peut aller jusqu'à 1 500 m d'altitude, le climat est chaud et humide, avec des températures allant de 15 °C à 30 °C, et des précipitations annuelles comprises entre 2 500 mm et 5 000 mm. La région de l'Himalaya intérieur, qui s'élève de 1 500 à 3 000 m, jouit d'un climat tempéré et enregistre des précipitations annuelles de 1 000 mm en moyenne. Dans le nord, la région du Haut‑Himalaya culmine entre 3 000 m et 7 000 m d'altitude et connaît un climat alpin rigoureux, avec des précipitations annuelles de l'ordre de 400 mm.

3.Les outils de pierre découverts dans le pays révèlent que le Bhoutan était déjà peuplé entre 2000 et 1500 av. J.‑C. Toutefois, on ne dispose de documents historiques que depuis la construction de deux lhakhangs (monastères) au VIIe siècle de notre ère, le Lhakhang Kyichu dans la vallée de Paro et le Lhakhang Jambay, dans la vallée de Bumthang. C'est à cette époque que l'on fait remonter l'apparition du bouddhisme au Bhoutan; au VIIIe siècle en effet, Guru Rimpoche (Padmasambava, le Maître vénéré né du lotus) a répandu le bouddhisme tantrique dans le pays.

4.Tout au long de son histoire le Bhoutan est demeuré indépendant. Ce n'est toutefois qu'au XVIIe siècle que Shabdrung Ngawang Namgyal (1594‑1652) a réalisé l'unité politique du pays. Il a instauré une théocratie en 1652 et doté le Bhoutan d'un système administratif et d'un recueil de lois. En 1907, la théocratie a pris fin lorsque le gouverneur de Trongsa, Ugyen Wangchuck (1862‑1926), a été élu premier Roi du Bhoutan par consensus. L'instauration de la monarchie héréditaire en 1907 a apporté au pays la paix, la stabilité et le progrès.

5.Comme dans tous les pays de l'Himalaya, il n'y a pas au Bhoutan de séparation nette entre la dimension matérielle et la dimension spirituelle de la vie. Le bouddhisme a joué un rôle majeur dans l'édification de la culture bhoutanaise : l'art, le théâtre, la musique et la danse, manifestations vivantes de traditions anciennes, sont d'essence religieuse. Dans leur grande majorité, les Bhoutanais recherchent l'illumination et croient que l'homme est bon par nature. Leur mode de vie est tout entier imprégné des préceptes bouddhistes de compassion, de tolérance et de non‑violence; bien que le Bhoutan ne soit plus une théocratie, les moines y sont respectés et continuent de jouer un rôle important dans la société.

6.Les Lhotsampas (Bhoutanais du sud d'origine népalaise), hindous pour la plupart, sont arrivés au Bhoutan durant la première moitié du XXe siècle. Ils représentent aujourd'hui près de 25 % de la population; ils bénéficient de l'égalité des chances et sont représentés à tous les niveaux de la société au même titre que le reste de la population. Ayant les mêmes origines, l'hindouisme et le bouddhisme ont beaucoup de faits communs. Parmi les divinités du vajrayana, qui est la forme du bouddhisme mahayana pratiqué au Bhoutan, figurent les dieux et les déesses principaux du panthéon hindouiste.

7.L'essentiel de la population est concentré dans les vallées; seuls quelques pasteurs nomades parcourent les vastes étendues montagneuses et désolées du nord du pays. La plupart des Bhoutanais continuent de privilégier la famille élargie ou conservent des liens étroits avec les membres de leur famille qui vivent en milieu rural. Une famille de taille moyenne se compose de cinq à six personnes. Le nombre de maisons par village varie de deux à une centaine, la moyenne étant de 43. Quatre vingt‑cinq pour cent environ de la population vivent de l'agriculture et d'autres activités traditionnelles en milieu rural. La principale ville du Bhoutan, qui est également la capitale, Timphu, compte près de 35 000 habitants. Les autres centres urbains d'importance, Gelephu, Phuentsholing et Samdrupjonkhar, sont tous situés dans le sud.

8.L'économie du Bhoutan a été en grande partie déterminée par l'isolement que le pays s'est lui‑même imposé et par sa décision tardive de privilégier le développement planifié. L'agriculture de subsistance est complétée par les diverses utilisations des ressources forestières, l'élevage et les industries familiales fondées sur l'artisanat traditionnel. Ce n'est que dans les années 60, du fait du développement des échanges avec l'Inde et de l'apport d'aide au développement, que la monnaie s'est largement répandue. Depuis lors, l'économie monétisée a pris une ampleur accrue, qui est allée de pair avec le développement économique et social, l'amélioration des infrastructures de transport et de communication et l'urbanisation.

9.Les objectifs et les politiques nationaux sont arrêtés en mettant l'accent non seulement sur le développement matériel mais aussi sur d'autres éléments difficilement quantifiables, comme le bien‑être spirituel, l'épanouissement des individus et la préservation du patrimoine culturel du Bhoutan et de la richesse et la variété de ses ressources naturelles. Au cours de la période 1985‑1995, l'économie bhoutanaise a enregistré un taux de croissance de 6,8 % par an, qui a multiplié par deux le PNB réel (de 1 519,8 millions de ngultrums à 2 946 millions de ngultrums). Des efforts ont été faits pour que les fruits de la croissance servent à promouvoir l'accès de tous aux soins de santé de base, à l'éducation et aux services essentiels.

10.Outre les contraintes à long terme liées au fait que le Bhoutan est un pays enclavé, confronté à d'énormes difficultés dues à la topographie et la géologie, ainsi que par le passage, en moins d'une génération, d'une économie de subsistance à une économie moderne et ouverte, le pays doit également surmonter les problèmes que pose la gestion du développement avec des ressources insuffisantes. Dans ce contexte, le Gouvernement continue de privilégier le développement humain et le renforcement des capacités, ainsi que la protection et la préservation de l'environnement. L'amélioration de l'éducation et des services de santé, la participation accrue des femmes au développement, en tant que responsables et que représentantes de la population au niveau local, l'accroissement de l'efficacité des fonctionnaires en nombre limité, et le renforcement des capacités par la mise en valeur permanente des ressources humaines sont parmi les objectifs prioritaires du Gouvernement, pour lequel la décentralisation et la participation active de tous les secteurs de la société, y compris du secteur privé, constituent un impératif.

II. STRUCTURE POLITIQUE GÉNÉRALE

A.   Monarchie

11.Jusqu'au début du XXe siècle, le Bhoutan était dirigé par une administration bicéphale, le Chhosi, mise en place par Shabdrung Ngawang Namgyal en 1651. Selon ce système, le Druk Desi (dirigeant temporel) était responsable de l'administration temporelle du pays, tandis que le Je Khenpo (chef spirituel) était chargé des affaires religieuses. Ce système de gouvernement s'est maintenu pendant plus de deux siècles. Toutefois, dans la seconde moitié du XIXe siècle, l'élection du Druk Desi et les fréquentes controverses autour de la réincarnation du Shabdrung ont provoqué des troubles et créé une situation d'instabilité. C'est pour répondre à la volonté de stabilité politique et de paix interne de la population que la monarchie héréditaire a été instaurée.

12.L'année 1907 a marqué le début d'une ère nouvelle dans l'histoire du Bhoutan. En effet, le 17 décembre 1907, la Communauté des moines, les conseillers d'État, les Chillahs (gouverneurs) de tous les districts et les représentants du peuple se sont réunis à Punakha pour élire le Penlop (Gouverneur) de Trongsa, Ugyen Wangchuck, premier roi héréditaire du Bhoutan. Possédant de remarquables qualités de dirigeant et d'homme d'État, Ugyen Wangchuck fut sans conteste l'homme providentiel dont le Bhoutan avait besoin. En procédant à l'unification du pays et à l'établissement d'une autorité centrale, il a apporté la paix et la stabilité et jeté les bases d'un État moderne.

13.Depuis l'instauration de la monarchie en 1907, quatre rois héréditaires se sont succédé : Ugyen Wangchuck (1907-1926), Jigme Wangchuck (1926-1952) et Jigme Dorji Wangchuck (1952-1972). Le monarque actuel, Sa Majesté le Roi Jigme Singye Wangchuck, est monté sur le trône en 1972.

B.  Forme de gouvernement

14.Les trois principaux organes de gouvernement sont l'Assemblée nationale, le pouvoir judiciaire et le Conseil des ministres.

1. L'Assemblée nationale

15.L'Assemblée nationale est l'organe législatif. Elle a été créée en 1953 par le troisième roi du pays, Jigme Dorji Wangchuck, soucieux de développer la conscience politique de son peuple et d'accroître la participation de celui-ci à la direction du pays. Ses principales fonctions sont les suivantes :

a)Voter les lois;

b)Élire les ministres;

c)Débattre de toute question d'importance nationale.

16.L'Assemblée nationale se réunit en principe une fois par an mais elle peut être convoquée en cas de besoin pour examiner des questions d'intérêt national. Elle se compose de 150 membres ainsi répartis : 105 représentants élus par le peuple, 10 représentants de la Communauté des moines, 29 représentants désignés par le Gouvernement et 6 ministres élus. Le mandat de tous les élus est de trois ans à l'exception des ministres, élus pour cinq ans. L'Assemblée nationale élit son Président et son Vice-président parmi ses membres.

17.Jusqu'en 1968 pour être promulgués, tous les projets de loi adoptés par l'Assemblée devaient être approuvés par le Roi. En 1968, à la session d'automne, en renonçant volontairement à son droit de veto, le Roi a permis à l'Assemblée de devenir un organe souverain. Désormais, aucune décision de l'Assemblée ne requiert l'approbation du Roi pour devenir exécutoire. À la soixante‑seizième session, en 1998, le Roi a habilité par ordonnance l'Assemblée nationale à lui voter la confiance.

2. Le pouvoir judiciaire

18.La première série de lois codifiées a été promulguée par Shabdrung Ngawang Namgyel en 1652. Par la suite, le treizième dirigeant temporel, Deb Choegyal Sherub Wangchuck (1744‑1764) a élaboré un ensemble complet de lois, que le premier souverain de la dynastie Wangchuck, Sa Majesté Ugyen Wangchuck, a amendées et améliorées.

19.De nombreuses lois importantes ont été adoptées pendant le règne de Sa Majesté Jigme Dorki Wangchuck, troisième Roi du Bhoutan. Sur son initiative, dans les années 50, l'Assemblée nationale a adopté au cours de plusieurs sessions le premier recueil complet de lois codifiées. Celles‑ci sont rassemblées dans le "Recueil législatif général" (Thrimzhung Chhenpo), et couvrent la quasi­‑totalité des infractions pénales et les peines correspondantes. Sous le règne du même souverain, l'Assemblée nationale a également adopté d'autres lois importantes, notamment les suivantes : loi sur la nationalité (1958), loi sur les forêts (1969), loi relative aux forces armées (1971), loi relative au drapeau national (1972).

20.Cependant, c'est depuis que Sa Majesté Jigme Singye Wangchuck a accédé au trône que l'Assemblée nationale a adopté le plus grand nombre de lois. La plupart de celles‑ci ont été promulguées afin de répondre efficacement à l'évolution des besoins d'une nation qui se modernise rapidement.

21.Toute personne peut proposer l'adoption de nouvelles lois ou la révision des lois existantes en suivant la procédure appropriée. Une telle proposition peut être soumise directement à l'Assemblée nationale par l'intermédiaire des députés ou au Conseil des ministres par l'intermédiaire du ministre compétent. Dans un cas comme dans l'autre, un comité désigné par l'organe qui reçoit la proposition rédige un projet qu'il soumet au Conseil; celui‑ci le transmet ensuite aux députés par le biais du Secrétariat afin de connaître les avis des représentants du peuple. À la session suivante, le projet fait l'objet d'un débat approfondi avant d'être officiellement adopté.

22.Sa Majesté le Roi est l'autorité suprême en matière législative et judiciaire. Juge en dernier ressort, il est habilité à commuer les peines et peut accorder la grâce. Le pouvoir judiciaire comprend la Thrimkhang Gongma (Haute Cour), qui dispose à la fois de compétences en cause d'appel et de quelques compétences spécialisées, le Dzongkhag Thrimkhang (tribunal de district) et le Dungkhag Thrimkhang (tribunal de sous‑district). La Haute Cour est composée du Ministre de la justice et de sept autres juges. Les thrimpons (juges) sont assistés de rabjams (juges assesseurs). Le chimi (représentant du peuple à l'Assemblée nationale), le gup (chef de village) et le barmi (négociateur/arbitre connaissant la loi) exercent quelques fonctions judiciaires; ils peuvent en particulier aider les parties à parvenir à un compromis, leur évitant ainsi les frais d'une action en justice.

23.Le Conseil consultatif royal joue également un rôle dans l'administration de la justice au Bhoutan. Il instruit les dossiers des requérants qui ne sont pas satisfaits des décisions de la Haute Cour et qui en appellent au Roi. Ces affaires sont alors examinées conjointement par la Haute Cour et le Conseil consultatif royal.

24.Dans le système juridique bhoutanais, au pénal, les prévenus sont autorisés à choisir un jabmis (un représentant ou un conseil connaissant bien la loi) pour assurer leur défense. Le pouvoir judiciaire ayant organisé une formation à l'intention des jabmis de 1995 à 1997, ceux‑ci ont pris plus d'importance ces dernières années. Il existe aujourd'hui 166 jabmis, parmi lesquels plusieurs ont une clientèle privée.

25.Les lois codifiées et édictées par l'Assemblée nationale, rassemblées dans le "Code législatif général", ont prévu la séparation du pouvoir judiciaire et des pouvoirs exécutif et législatif. Ce processus de séparation s'est achevé en 1968 par la création de la Haute Cour. Par la suite, un cadre réservé aux fonctionnaires du judiciaire, distinct du cadre de la fonction publique, a été créé pour préserver l'indépendance de la magistrature. Des dispositions légales particulières ont été adoptées pour prévenir l'immixtion de l'exécutif dans les questions judiciaires.

26.L'indépendance des magistrats est garantie par la sécurité de l'emploi (seul le Roi peut les démettre de leurs fonctions, de sa propre initiative ou sur recommandation de l'Assemblée nationale pour faute ou incompétence) et par un traitement et une pension suffisants pour les mettre à l'abri de toute tentation vénale.

27.Un certain nombre de principes juridiques occidentaux, tels que l'habeas corpus et la "doctrine du précédent", ont été adoptés lorsqu'ils ont été considérés pertinents. Le précédent n'est pas pleinement méconnu dans la mesure où la certitude et l'uniformité sont les éléments essentiels de la justice; toutefois, conformément à la doctrine "assouplie" du précédent, les juges n'ont pas l'obligation de suivre les décisions adoptées par d'autres juridictions dans des instances similaires. Tout en tenant compte des décisions antérieures, les juges sont libres de prendre les décisions qu'ils considèrent justes.

28.Afin de renforcer le pouvoir judiciaire dans le royaume, les juges tiennent des conférences annuelles à Timphu au cours desquelles ils examinent des points de droit qui appellent des éclaircissements. Ces réunions annuelles ont également contribué à moderniser le système judiciaire du point de vue de la formation, des voyages d'étude et de l'informatisation des dossiers. Des candidats ont été envoyés à l'étranger pour parfaire leur formation juridique et suivre des cours de droit. La Haute Cour s'emploie à ce que la justice soit administrée avec célérité et impartialité dans tous les tribunaux du Royaume. La justice rendue dans les tribunaux bhoutanais est une justice pragmatique, qui n'est pas dénaturée par un excès de technicisme et de formalisme externe.

3. Le Conseil des ministres

29.La modernisation de l'administration a énormément progressé lorsque l'Assemblée nationale a approuvé, à la demande du Roi, la création d'un Conseil des ministres. Le Conseil des ministres, qui constitue le pouvoir exécutif est un important organe de prise de décision. Il est également chargé de conduire l'action du Gouvernement et de faire appliquer toutes les décisions de l'Assemblée nationale.

30.À la soixante-seizième session de l'Assemblée nationale, tenue du 29 juin au 30 juillet 1998, Sa Majesté le Roi a introduit des changements historiques dans la gestion des affaires publiques. Ces changements radicaux ont accentué le processus de démocratisation et de participation de la population que Sa Majesté avait engagé dès son accession au trône. Par décret royal adressé à l'Assemblée nationale, Sa Majesté a proposé que tous les ministres membres du Gouvernement soient élus par l'Assemblée et que celle-ci se dote d'un mécanisme l'habilitant à voter la confiance au Roi. Après de longs débats, l'Assemblée nationale a approuvé les changements proposés. En vertu de ces nouvelles règles, Sa Majesté ne préside plus le Conseil des ministres, qui dispose ainsi de la plénitude du pouvoir exécutif. Par ailleurs, le Président du Conseil devient chef du Gouvernement. Le Conseil des ministres a simplement l'obligation de tenir le Roi pleinement informé de toutes les questions intéressant la sécurité et la souveraineté nationales.

31.En outre, les organismes ci‑après jouent un rôle important dans le développement du pays.

4. Le Conseil consultatif royal

32.Créé en 1965, le Conseil consultatif royal est composé de neuf membres, six représentants du peuple, deux représentants de la Communauté des moines et un membre désigné par le Gouvernement. Le mandat des membres du Conseil est de trois ans, à l'exception de celui des représentants de la Communauté des moines qui est d'un an.

33.Les principales fonctions du Conseil sont les suivantes  :

Conseiller le Roi et le Conseil des ministres sur toute question d'intérêt national;

Promouvoir le bien-être de la population et les intérêts nationaux du Royaume;

Veiller à l'établissement de relations amicales et harmonieuses entre le Gouvernement et la population;

Veiller à ce que les lois et les décisions adoptées par l'Assemblée nationale soient appliquées de bonne foi par le Gouvernement et la population.

5. La Commission de la planification

34.La Commission de la planification est un organisme indépendant qui a été créé en1972. Ses principales fonctions sont les suivantes :

Diriger et coordonner l'élaboration de tous les plans de développement;

Déterminer les grandes orientations et arrêter les priorités en matière de développement;

Évaluer les ressources dont dispose le pays et répartir celles‑ci;

Dresser à intervalles réguliers le bilan des progrès réalisés et faire des recommandations à l'Assemblée nationale.

Sa Majesté a présidé la Commission de la planification de 1972 à 1991. Au cours de ces deux décennies, le Bhoutan a connu une évolution remarquable et enregistré des progrès dans tous les domaines. L'économie a connu une croissance rapide et le niveau de vie en zone rurale s'est élevé rapidement. Par ailleurs, un réseau efficace de services et d'infrastructures a été mis en place.

En 1991, dans un souci de décentralisation du processus de prise de décision, Sa Majesté a renoncé à la présidence de la Commission de la planification, qui a été confiée au Ministre de tutelle. Par ailleurs, la Commission a été réaménagée afin d'élargir la participation au processus décisionnel. En août 1998, parallèlement aux changements mentionnés, le nouveau Ministre des finances a été désigné à la présidence de la Commission de la planification.

Un Comité technique composé des chefs de départements et d'autres agents techniques de divers ministères a été créé pour assister la Commission de la planification. Grâce à ce Comité, les questions de développement sont étudiées de façon approfondie par des techniciens qualifiés.

Les divisions des politiques et de la planification des différents ministères assurent au jour le jour la coordination et les consultations entre le secrétariat de la Commission de la planification et les ministères et organismes divers. Leur mission est d'élaborer des politiques et des programmes intégrés destinés aux organismes d'exécution et de faire en sorte que l'information circule entre la Commission de la planification et les différents ministères. Le réaménagement de la Commission de la planification et la création du Comité technique et des divisions des politiques et de la planification visaient à élargir la représentation dans les instances publiques de prise de décision.

6. Les Comités de district pour le développement(Dzongkhag Yargay Tshogchungs)

En 1981, S. M. Jigme Singye Wangchuck a décentralisé l'appareil administratif et créé des comités de district pour le développement (DYT) dans les 20 districts du Royaume, afin d'accroître la participation de la population aux activités nationales de développement. À maintes reprises, le Roi a souligné que l'avenir du Bhoutan était entre les mains du peuple et que l'efficacité et la pérennité de tout système administratif reposaient sur l'appui sans réserve et la coopération active de la population. Le Roi a souvent exhorté la population à assumer les responsabilités incombant à des citoyens loyaux et dévoués qui font passer les intérêts de la nation avant les leurs.

On compte aujourd'hui 20 comités de district pour le développement, composés de 570 membres élus. Présidé par le dzongda (administrateur du district), chaque comité réunit tous les chimis (députés à l'Assemblée nationale) du district, les gups (chefs de village) et des représentants élus par la population dans les groupes de villages. Le thrimpon (juge de district) et les responsables sectoriels du district ont la qualité d'observateurs.

Le Comité de district pour le développement tient une session trimestrielle mais peut se réunir plus fréquemment en cas de besoin. Il examine les questions de développement et les grandes orientations en la matière. Toutes les observations des habitants du district devant être transmises à l'Assemblée nationale sont examinées et mises en forme par le Comité, qui étudie et finalise également les activités de développement en faveur de la population proposées dans le cadre du plan quinquennal. Il veille à ce que les priorités de développement retenues par la population locale soient bien interprétées lorsque les décisions sont prises au cours de réunions annuelles et s'assure que les plans sont effectivement appliqués et font l'objet d'une évaluation de suivi qui permet de vérifier les besoins et les demandes de la population sont pris en compte.

42.Afin de renforcer les capacités des agents des dzongkhag, des gups et des chimis, le Gouvernement a organisé, en collaboration avec plusieurs partenaires d'aide au développement, des programmes de formation visant à améliorer leurs compétences en ce qui concerne la communication, la participation de la communauté et leurs qualifications en matière de planification, de surveillance et d'évaluation.

7. Les comités de groupes de village pour le développement

43.Afin de réaliser une décentralisation plus poussée, des Geog Yargay Tshogchungs (GYT) ont été créés dans chaque geog (groupe de villages) en 1991, à l'initiative de Sa Majesté; il s'agit de créer des organismes institutionnels supplémentaires permettant à la population de participer, au niveau local, au processus de décision et de développement national.

44.Il existe actuellement 202 comités qui comptent 2 606 membres élus parmi la population des villages composant le geog. L'importance d'un comité est fonction de la taille et de la population du geog. Chaque comité est présidé par le gup (chef de village) et composé de mangi‑aps (doyens du village) et de chipons (coordonnateurs de village). L'instituteur principal de l'école primaire locale fait fonction de secrétaire du Comité, tandis que les responsables du développement local sont observateurs. Le chimi (député à l'Assemblée nationale) qui les représente au niveau national n'a la qualité que de simple observateur. Le Comité se réunit une fois par trimestre ou plus souvent si nécessaire.

45.Les comités de groupes de villages pour le développement ont des responsabilités et des pouvoirs dans les domaines social et politique, religieux et culturel, ainsi qu'en matière de planification et de mise en œuvre du développement, et de sauvegarde de la sécurité et de la souveraineté nationales.

46.Étant donné que la participation directe et quotidienne de chaque famille aux activités du gup serait impossible et inefficace, les mangi-aps et les chipons représentent le village et agissent en son nom. Toutefois, le gup organise périodiquement des geog zomdus (réunions de groupe) auxquelles participent activement les représentants de chaque foyer composant le geog. Par ailleurs, on a estimé que la participation des femmes aux zomdus où étaient examinées et traitéesles questions relatives aux besoins des enfants s'élevait à 70 %.

8. La Commission royale de la fonction publique

Afin de disposer d'une administration dynamique, dévouée et efficace, qui, sans être pléthorique, soit à même non seulement de répondre aux besoins de la population mais aussi de faire face aux difficultés posées par le développement et l'édification de la nation, le Roi a créé la Commission royale de la fonction publique (RCSC) en 1982. Cette commission est chargée de l'élaboration et de l'application des politiques de la fonction publique, dont l'objectif est de promouvoir l'efficacité des fonctionnaires, leur loyauté et leur intégrité, et de maintenir un haut niveau de moralité. Les nominations, les mutations et les promotions des fonctionnaires, ainsi que les questions de discipline font également partie de ses attributions. L'une des fonctions importantes de la Commission consiste à définir et à traiter les problèmes et les besoins nouveaux de la fonction publique ainsi qu'à encourager la mise en valeur des ressources humaines et le transfert de compétences par le biais du renforcement des capacités et de la formation organisée tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays. En outre, la Commission contribue activement à définir et à promouvoir les domaines techniques et les secteurs de services nouveaux qu'il faudrait développer pour répondre aux besoins récents du public, ainsi que pour offrir des débouchés aux jeunes diplômés qui seront bientôt à la recherche d'un emploi rémunéré.

9. La communauté des moines (Dratsang )

La Communauté des moines est une institution qui ne fait pas partie de l'appareil politique du Royaume mais qui joue un rôle important dans la vie sociale et culturelle de la nation. Shabdrung Ngawang Namgyel (1594 – 1651) a créé la première Communauté des moines. La Communauté est dirigée par Sa Sainteté le Je Khenpo (chef spirituel), qui jouit d'un prestige aussi grand que le Roi. Le Je Khenpo est assisté de quatre Lopons dont le rang est équivalent à celui de ministre. Bien que le bouddhisme soit religion d'État, la liberté religieuse est totale au Bhoutan. Toutefois, afin de préserver l'harmonie sociale, il est interdit de faire du prosélytisme en public en faveur d'une religion quelconque et de critiquer les autres religions.

Les écoles monastiques et les dratsangs exercent une influence notable sur la société. La population accorde un grand crédit aux paroles et aux actes des bonzes, des croyants laïcs et des guérisseurs traditionnels. Ainsi, afin de tirer parti de cette réalité pour promouvoir la santé, l'assainissement et la nutrition parmi la population, un projet destiné à améliorer l'approvisionnement en eau potable, les installations sanitaires et l'hygiène dans les institutions religieuses a été mis en œuvre ces dernières années. Les moines, qui ont également reçu une formation dans ces domaines, conseillent et orientent désormais activement la population.

III. CADRE JURIDIQUE GÉNÉRAL DE LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

Le Bhoutan est un pays en développement qui, après s'être volontairement isolé du monde extérieur pendant des siècles, ne s'est intéressé au développement planifié qu'à partir de 1961. Avant cette date, il n'y avait pas de routes carrossables, de téléphone, d'écoles, d'hôpitaux, d'électricité ni les autres commodités de la vie moderne. Le Bhoutan a adopté une politique d'isolement pour éviter d'être colonisé par les puissances coloniales de l'époque; il a certes réussi à préserver son identité culturelle et son indépendance politique mais il n'a guère progressé sur le plan socio-économique. Cependant, les lois du pays, empreintes des préceptes du bouddhisme, ne pouvaient qu'être propices à la protection des droits de l'homme.

Les instruments relatifs aux droits de l'homme sont intégrés au système juridique lorsqu'ils sont officiellement promulgués par l'Assemblée nationale. Les dispositions de ces divers instruments ne peuvent pas être invoquées devant les tribunaux ou directement appliquées par le juge avant qu'ils ne soient ratifiés par l'Assemblée nationale. Toutefois, comme il a été indiqué précédemment, le système judiciaire bhoutanais s'est enrichi de maints principes et procédures de la jurisprudence occidentale, en particulier en matière pénale. Pour faire face aux difficultés du présent et répondre aux besoins nouveaux d'un pays en développement, il faut constamment adapter le système.

L'égalité de chacun devant la loi, quelle que soit leur condition, est un principe fondamental du droit bhoutanais. Les droits de l'homme sont protégés par un appareil judiciaire à trois niveaux, qui se compose de la Haute Cour, compétence à la fois en première instance et en appel, des tribunaux de district et des tribunaux de sous-district.

Au niveau local, le gup, le chimiet le barmiont des compétences en matière de droits de l'homme.

La partie lésée qui n'est pas satisfaite d'une décision prise au niveau local peut en référer au Thrimkhang Gongma. Si le jugement du Thrimkhang Gongma ne la satisfait toujours pas, elle peut adresser une requête à Sa Majesté le Roi, qui la transmettra au Conseil consultatif royal; celui-ci examinera l'affaire conjointement avec la Haute Cour. En vertu de la loi, le Roi est habilité à commuer les peines et à accorder la grâce. Chaque citoyen bhoutanais jouit du droit inaliénable d'en appeler au Roi, droit qu'il exerce à l'occasion.

En 1968, lorsque la Haute Cour a été créée, le judiciaire a été séparé des pouvoirs exécutif et législatif. Par la suite, un cadre réservé aux fonctionnaires du judiciaire, distinct du cadre de la fonction publique, a également été créé pour préserver l'indépendance de la magistrature. Des dispositions légales spéciales ont été prises pour empêcher l'immixtion de l'exécutif dans les questions judiciaires (section AH du Thrimzhung Chhenpo).

S'il n'existe à l'heure actuelle aucune institution expressément chargée de superviser le respect des droits de l'homme, des mécanismes nationaux assurent cette fonction; il s'agit de l'Assemblée nationale, du pouvoir judiciaire et du Conseil consultatif royal. La Commission royale de la fonction publique est chargée de la protection des droits des fonctionnaires; par ailleurs, il incombe directement au Ministère de la santé et de l'éducation d'assurer les services et de mettre en œuvre les programmes destinés à satisfaire les besoins sanitaires et éducatifs des adultes et des enfants, et à permettre l'exercice des droits dans ces domaines. À ces institutions s'ajoutent divers organismes, notamment la Chambre de commerce et d'industrie du Bhoutan qui apporte son concours et son appui au secteur privé, ainsi que l'Association nationale des femmes du Bhoutan, qui contribue à améliorer la qualité de la vie des femmes, lesquels veillent également à la protection des droits de l'homme.

Comme on l'a vu plus haut, la Communauté des moines joue un rôle essentiel dans la vie sociale et culturelle de la nation; elle jouit d'un grand respect et exerce une influence considérable dans la mesure où les Bhoutanais sont profondément religieux. Elle contribue dans une large mesure à faire connaître les droits de l'homme, en particulier ceux qui constituent l'essence même du bouddhisme.

Le Gouvernement est profondément attaché à l'idéal des droits de l'homme; son vœu le plus cher est d'assurer au peuple bhoutanais la jouissance de l'ensemble de ces droits, notamment les droits fondamentaux de l'individu dans les domaines de l'alimentation, de l'habillement, du logement, de l'éducation et des soins de santé. Au Bhoutan, où le niveau réel de développement est mesuré par l'indice du "bonheur national brut", les pouvoirs publics ont à cœur d'assurer le bien-être général de chaque individu. Toutefois, le Bhoutan étant un petit pays en développement aux ressources limitées, le Gouvernement est conscient que la situation des droits de l'homme n'est pas parfaite.

Pour démontrer son engagement en faveur de la promotion des droits de l'homme, le Bhoutan a invité un certain nombre d'organismes internationaux de défense des droits de l'homme à visiter le pays, parmi lesquels le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, le Groupe de travail sur la détention arbitraire, le Comité international de la Croix‑Rouge (CICR), et Amnesty International. Le Gouvernement royal du Bhoutan a mis en œuvre la plupart des recommandations formulées à l'occasion de ces missions, comme l'a fait observer à juste titre le Groupe de travail sur la détention arbitraire lors de sa visite de suivi en mai 1996.

Suite à la visite que M. José Ayala Lasso, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a effectuée au Bhoutan en juillet 1994, le Centre pour les droits de l'homme (appelé désormais Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme) et le Gouvernement royal du Bhoutan ont mis au point en 1996 un projet d'assistance technique, dans le cadre duquel des fonctionnaires bhoutanais ont reçu une formation portant sur l'établissement des rapports sur les droits de l'homme. Des séminaires et des séances de formation ont également été organisés à l'intention des magistrats de la Haute Cour et des tribunaux de district, des auxiliaires de justice et des agents de la force publique sur le thème des droits de l'homme et l'administration de la justice.

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