Nations Unies

HRI/CORE/FRA/2017

Instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

Distr. générale

23 novembre 2017

Original : français

Document de base faisant partie intégrante des rapports présentés par les États parties

France * , **

[Date de réception : 3 novembre 2017]

Table des matières

Page

I.Territoire et population3

A.Territoire3

B.Population3

IIStructure politique générale14

A.Le cadre constitutionnel français14

B.Le cadre institutionnel : la séparation des pouvoirs18

C.Les organes juridictionnels21

III.L’acceptation des normes internationales relatives aux droits de l’homme29

A.Acceptation des principales normes internationales relatives aux droits de l’homme30

B.Acceptation d’autres normes internationales relatives aux droits de l’homme32

C.Acceptation d’instruments régionaux relatifs aux droits de l’homme38

IV.Le cadre juridique de la protection des droits de l’homme à l’échelon national39

A.La protection des droits énoncés dans les instruments internationaux en droit interne39

B.L’incorporation dans le droit interne des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et leur invocation devant les juridictions nationales46

C.Recours ouverts en cas de violation des droits fondamentaux et systèmes de compensation et de réhabilitation des victimes49

D.La reconnaissance de la compétence de la Cour européenne des droits de l’homme55

V.Le cadre de la promotion des droits de l’homme à l’échelon national55

A.Rôle du Parlement et des collectivités locales en faveur de la promotion et de la protection des droits de l’homme55

B.Rôle des institutions nationales de défense des droits de l’homme56

C.La diffusion des instruments relatifs aux droits de l’homme62

D.L’éducation des jeunes aux droits de l’homme64

E.La formation aux droits de l’homme des agents publics et autres professionnels64

I.Territoire et population

A.Territoire

1.Le territoire de la France s’étend sur 551 602 km², hors collectivités territoriales d’outre-mer (128 101 km²) et Terres Australes et Antarctiques Françaises (432 000 km²).

2.La France se compose en effet d’une métropole (territoires situés en Europe), et de collectivités territoriales d’outre-mer. Ces dernières sont classées en deux catégories :

•Les départements et régions d’outre-mer (DROM) : la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et la Réunion (ces DROM remplacent les DOM) ;

•Les collectivités d’outre-mer (COM) : la Polynésie française, Saint-Barthélemy et Saint Martin, Saint Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna (ces COM remplacent les TOM).

3.La France hors COM se divise administrativement en 18 régions (13 en métropole et 5 outre-mer), 101 départements (96 en métropole et 5 outre-mer) et 36 658communes (dont 129 outre-mer).

4.La Nouvelle-Calédonie, l’île de Clipperton et les Terres Australes et Antarctiques Françaises ont des statuts particuliers.

B.Population

5.Au 1er janvier 2015, la France comptait 66,4 millions d’habitants, dont 64,2 millions en France métropolitaine et 2,2 millions dans les DROM. Elle concentrait ainsi 13 % de la population de l’Union européenne (508,2 millions).

6.Au 1er janvier 2016, 66,6 millions de personnes résident en France, dont 64,5 millions en France métropolitaine et 2,1 million dans les DROM. La densité de population de la France métropolitaine est de 118 habitants au km².

7.Le bilan démographique n’inclut Mayotte, devenu un DROM le 31 mars 2011, qu’à partir de l’année 2014. Les COM et collectivités à statut particulier ne sont pas toujours pris en compte dans les données statistiques.

1.Données démographiques

a)Croissance de la population

8.La population résidant en France a augmenté de 0,4 % au cours de l’année 2015 (+ 247 000). Comme les années précédentes, l’accroissement de la population est essentiellement porté par le solde naturel (+ 200 000 naissances). Ce dernier est pourtant le plus bas enregistré depuis 1976 du fait du haut niveau de décès en 2015 qui est le plus élevé depuis l’après-guerre (600 000 décès, soit une augmentation de 7,3 % par rapport à 2014). Le solde migratoire reste relativement faible (+ 47 000).

9.Régions: Entre 2008 et 2015, toutes les régions de métropoles ont gagné des habitants, les plus dynamiques étant la Corse et le Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées. Ces deux nouvelles régions attirent bien plus de personnes qu’elles n’en voient partir alors que dans le même temps, les naissances compensent tout juste les décès. Le Nord-Est attire peu d’habitants. En effet, l’Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne et les Hauts de France progressent le moins en raison d’un solde migratoire négatif à peine compensé par l’excédent des naissances par rapport aux décès. En Île-de-France, la population s’est accrue au même rythme que la moyenne nationale, cette évolution résultant cependant d’une combinaison de deux extrêmes : le solde naturel y est le plus élevé de métropole et le solde migratoire particulièrement négatif. Entre 2008 et 2015, la Guyane a connu la plus forte augmentation de population des DROM (2,2 % par an en moyenne) grâce à un solde naturel très élevé. À l’inverse, en Martinique, le nombre d’habitants a diminué de 0,7 % par an en moyenne, en raison d’un déficit d’entrées sur le territoire, que le solde naturel positif n’a pas permis de compenser.

10.Villes/communes: entre 1982 et 2012, la France a gagné 9,7 millions d’habitants, dont 20 % dans l’aire urbaine de Paris et 30 % dans les treize grandes aires urbaines de province. Au 1er janvier 2015, la France métropolitaine compte 36 529 communes. Plus de la moitié de ces communes (54 %) comptent moins de 500 habitants au 1er janvier 2013. Ces 19 800 petites communes accueillent 4,5 millions d’habitants, soit 7 % de la population résidant en France métropolitaine : c’est à peu près autant que le total des cinq plus grandes communes réunies : Paris, Marseille, Lyon, Toulouse et Nice. En 1968, les communes de moins de 500 habitants représentaient 11 % de la population de France métropolitaine.

11.Ce phénomène a conjugué une extension de la superficie des villes à une densification de peuplement. Plus précisément, au cours des trente dernières années, près de 80 % de la hausse de population urbaine relève d’une agglomération de 400 000 habitants ou plus. L’attractivité des grandes villes conforte un système urbain dominé en premier lieu par Paris, et en second lieu par un ensemble de 14 unités urbaines de 400 000 habitants ou plus, situées sur le littoral, le long des fleuves et près des frontières. L’unité urbaine de Paris rassemble aujourd’hui comme en 1982 plus du quart de la population urbaine. En 2010, les villes occupaient 22 % du territoire et abritaient 47,9 millions d’habitants, soit 77,5 % de la population. Entre 2000 et 2010, la superficie de l’espace urbain en métropole a progressé de 20 % environ. L’absorption dans l’espace urbain d’anciennes communes rurales est la principale raison de sa croissance. Malgré ce phénomène et celui de l’extension du périmètre des agglomérations, en 2008 les trois quarts des communes comptaient moins de 1 000 habitants et en 2009 seules 11 communes comptaient plus de 200 000 habitants et 30 communes plus de 100 000 habitants. Les régions de métropole où le nombre d’habitants par commune est le plus élevé sont l’Île-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur avec respectivement 9 000 et 5 000 habitants en moyenne, suivies des Hauts de France, de la Bretagne et des Pays de la Loire. Outre-mer, presque toute la population vit en ville. En effet, dans les cinq DROM, la très grande majorité des communes sont urbaines notamment parce qu’elles sont souvent de grande taille.

b)Répartition de la population par appartenance ethnique

12.Il est impossible de connaitre la répartition de la population par appartenance ethnique car de telles données sont considérées comme contraires à la Constitution. En effet, il est un principe constitutionnel que la France est « une et indivisible » : à ce titre, les autorités ne peuvent pas établir de distinction selon l’origine ethnique.

13.La loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés interdit ainsi « de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l’appartenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci ».

c)Taux de natalité

14.Nombre: La natalité est globalement stable en France depuis la fin du baby-boom, oscillant autour de 800 000 naissances par an depuis les années 1980. Le point bas est atteint en 1994 avec 741 000 nouveau-nés et le pic date de 2010 avec 833 000 bébés. En 2015, le taux de natalité est estimé en France à 12,0 ‰ contre 12,4 ‰ en 2014, 12,3 ‰ en 2013 et 12,6 ‰ en 2012. La même année, 800 000 bébés sont nés. Le nombre de naissance a ainsi diminué de 2,3 % depuis 2014 (pour information, il était de : 818 600 en 2014, 811 500 en 2013 et 821 000 en 2012). L’indicateur conjoncturel de fécondité français est en léger recul en 2015, à 1,96 enfant par femme, contre 2,00 en 2014. La France se place en deuxième position parmi les pays de l’Union européenne.

15.Age: les taux de fécondité des femmes de moins de 30 ans continuent de baisser, et même un peu plus fortement en 2015 que les années précédentes. En revanche, ceux des femmes de 30 à 34 ans se sont stabilisés entre 2009 et 2014, avant de diminuer eux aussi en 2015. L’âge moyen des mères à l’accouchement poursuit sa hausse : il atteint 30,4 ans en 2015 contre 30,3 ans en 2014. Il avait déjà atteint 30,1 ans en 2012, constituant ainsi une hausse de 0,7 année en dix ans. L’âge au premier enfant était alors plus faible d’environ deux ans.

d)Taux de mortalité

16.Pour l’année 2015, le taux de mortalité est estimé à 9,0 pour 1000 habitants, et 600 000 décès ont été enregistrés en France (41 000 décès supplémentaires, soit 7,3 % par rapport à 2014, après deux années de recul). Il s’agit du niveau le plus élevé depuis l’après-guerre. Si les taux de mortalité à chaque âge ne variaient pas, l’augmentation du nombre de personnes de 65 ans ou plus conduirait à une hausse tendancielle des décès. Dans les années passées, cette hausse était atténuée et parfois plus que compensée par la baisse de la mortalité. En 2015, au contraire, les taux de mortalité se sont accrus, particulièrement aux âges élevés, suite notamment à des conditions épidémiologiques (épidémie de grippe durant les trois premiers mois de l’année 2015) et météorologiques (canicule en juillet) peu favorables.

17.Pour l’année 2015, le taux de mortalité infantile est estimé à 3,7 pour 1 000 naissances vivantes. Il est en légère hausse (3,5 en 2014) mais reste dans la limite de la fluctuation habituelle de cet indicateur. La mortalité infantile est en effet relativement stable depuis une quinzaine d’années. Après avoir fortement diminué entre 1950 et 2000, elle se situe autour de 3,7 enfants décédés à moins d’un an pour 1 000 naissances vivantes. Entre 2001 et 2006 le taux de mortalité maternelle était estimé entre 8 et 12 décès pour 100 000 naissances vivantes. Il était de 10,3 entre 2007 et 2009.

e)Structure de la population par tranche d’âge, espérance de vie et taux de dépendance

18.Structure par tranche d’âge: au 1er janvier 2016, on estime que 24,6 % de la population a moins de 20 ans, 50,5 % a entre 20 et 59 ans et 24,9 % à 60 ans ou plus. Cependant les populations des régions d’outre-mer sont beaucoup plus jeunes que celles de métropole : à la fin de l’année 2015, près de 33 % des habitants y ont moins de 20 ans, contre 24,4 % en métropole.

19.Espérance de vie : Dans les conditions de mortalité de 2015 en France, l’espérance de vie d’une femme est en moyenne de 85,0 ans et de 78,9 ans pour un homme. L’écart est alors de 6,1 ans, il était de plus de 5 en 1946.

Pour autant, l’espérance de vie à la naissance diminue, aussi bien pour les femmes (- 0,4 an) que pour les hommes (- 0,3 an). Cette diminution s’explique essentiellement par une hausse de la mortalité après 65 ans. Cependant, depuis 1990, l’espérance de vie à 60 ansa progressé. En 2015, une femme de 60 ans peut espérer vivre encore 27,3 ans (25,6 en 2000) et un homme du même âge 22,9 ans (20,4 en 2000).

20.L’avancée en âge des générations du baby-boom et l’allongement de la durée de vie sont les principaux facteurs du vieillissement de la population. En effet, entre 1981 et 2011, l’espérance de vie à la naissance a augmenté de 8 ans pour les hommes et de 6,5 ans pour les femmes. Cependant, du fait du grand nombre de décès survenus en 2012, elle a légèrement diminué pour les femmes (84,8 ans, soit - 0,2 an par rapport à 2011) et est restée stable pour les hommes (78,4 ans).

21.En vingt ans, l’espérance de vie des femmes a progressé de 3,1 ans et celle des hommes de 5,1 ans.

22.Taux de dépendance: en 2009, le taux de dépendance économique est en moyenne de 89 %, avec 16 millions de jeunes et 14 millions de personnes âgées de 60 ans ou plus pour 34 millions de personnes en âge de travailler. Il est plus faible dans les zones d’emploi incluant de grandes agglomérations, où se concentre la population active.

f)Etrangers et immigrés

23.La population étrangère est composée de personnes nées hors de France, c’est-à-dire d’immigrés au sens propre, et de personnes mineures pour la plupart nées en France de parents étrangers.

24.Au 1er janvier 2014, 65,8 millions de personnes vivent en France, hors Mayotte. Parmi elles, 58,2 millions sont nées en France et 7,6 millions sont nées à l’étranger, soit 11,6 % de la population. Parmi les 58,2 millions de personnes nées en France, 57,6 millions ont la nationalité française, certaines pouvant avoir une double nationalité, et 0,6 million sont étrangères. Ces personnes nées étrangères en France sont dans quatre cas sur cinq des enfants de moins de 14 ans dont les parents sont étrangers. Ils acquerront de droit la nationalité française au plus tard à leur majorité, sous réserve d’avoir résidé au moins cinq ans en France depuis l’âge de 11 ans.

25.En 2014, le flux annuel des acquisitions de la nationalité française, avec 105 613 nouveaux Français connaît une hausse par rapport à 2013, principalement liée à la progression des acquisitions de la nationalité par décret (+ 10,4 %) et au redressement des acquisitions par déclaration à raison du mariage (+ 12,6 %). Les déclarations anticipées (mineurs nés en France de parents étrangers) progressent également (+ 3,9 %). L’acquisition de la nationalité française ne signifie pas forcément le renoncement à sa nationalité d’origine. En 2008, on estime qu’un immigré âgé de 18 à 50 ans devenu Français sur deux a gardé sa nationalité d’origine et a donc une double nationalité.

26.La part de la population immigrée dans la population totale est passée de 8,1 % début 2006 à 8,9 % début 2014. Son augmentation est essentiellement liée aux flux migratoires : alors que 1,6 millions d’immigrés sont, dans cette période, arrivés en France, 500 000 en sont repartis et 400 000 y sont décédés.

27.Pour l’année 2012, la répartition des continents de naissance des immigrés est la suivante : 43,2 % viennent d’Afrique (2,4 millions), 36,8 % d’Europe (2,1 millions), 21,6 % d’Asie (1,2 million), 5,6 % d’Amérique et d’Océanie (soit 319 000 personnes).

28.La France a accueilli 298 902 étudiants étrangers en 2014-2015, 295 084 en 2013-2014. On en comptait 161 100 en 1990.

29.D’après le site de données du Gouvernement français, l’aide médicale d’état (AME), réservée aux immigrés en situation irrégulière résidant en France depuis au moins 3 mois, était versée en 2013 à 282 425 bénéficiaires, sans franchise.

g)Asile

30.En 2015, l’OFPRA a pris un total de 61 903 décisions hors mineurs accompagnants, soit une augmentation de 18,9 % du nombre de décisions par rapport à 2014. L’OFPRA a pris 14 060 décisions d’accord contre 8 763 en 2014.

31.En 2015, la CNDA a rendu 35 162 décisions, soit une baisse de 8,2 % du nombre de décisions par rapport à 2014.

32.Au total, le nombre de décisions d’accord d’un statut de protection (réfugié et protection subsidiaire) prises par l’OFPRA et la CNDA s’établit en 2015 à 19 447, en hausse de 33,3 % par rapport au total des décisions positives de 2014. Alors que la République démocratique du Congo était le premier pays d’origine des demandes en 2015, il n’est plus que quatrième derrière le Soudan, la Syrie, le Kosovo et Haïti. La loi no 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile vise à réduire le temps d’instruction des demandes d’asile et à améliorer l’accueil et l’hébergement des demandeurs et l’insertion des réfugiés.

2.Données sociales

a)Ménages et familles

33.Le nombre de ménages n’a cessé d’augmenter quand leur taille a graduellement diminué. Entre 1975 et 2012, le nombre de ménages est passé de 17,74 millions à 28,3 millions, et leur taille de 2,9 à 2,26 personnes. En 2010, la personne de référence était une femme dans 7,64 millions ménages.

34.En 2012, 22 % des familles étaient monoparentales, et 18,6 % d’entre elles étaient composées d’une femme seule avec un ou plusieurs enfants.

35.En 2015, 239 000 mariages ont été célébrés en France dont 231 000 entre personnes de sexe différent et 8 000 entre personnes de même sexe. Le nombre global de mariages diminue du fait d’un nombre moindre de célébrations entre personnes de même sexe en 2015. Durant 2014, à l’inverse, les mariages de personnes de même sexe avaient plus que compensé la baisse du nombre de mariages de personnes de sexe différent. Les mariages sont de plus en plus tardifs : depuis 2000, l’âge moyen au premier mariage a progressé de 2,4 ans pour les hommes et 2,9 ans pour les femmes, atteignant en 2014 32,6 ans pour les hommes et 30,9 ans pour les femmes.

36.En 2013, année de la promulgation de la loi no 2013-404du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personne de même sexe, 41 % des couples étaient des couples de femmes. En 2015, cette proportion atteint 48 %. Par ailleurs, l’âge des mariés de même sexe diminue. Les hommes qui se sont mariés en 2013 avaient 50 ans environ en moyenne ; on estime qu’ils en ont 45 en 2015. De même, les femmes avaient 43 ans en moyenne en 2013 et 40 ans en 2015. En 2015, les mariages entre personnes de même sexe ont représenté 3,3 % de l’ensemble des mariages contre 4,4 % en 2014.

37.En 2014, 123 537 divorces ont été prononcés en France ; plus de la moitié l’ont été par consentement mutuel. Hors Mayotte, ce sont 1 400 divorces de moins qu’en 2013. Depuis 2005, on conclut moins de deux mariages pour un divorce.

38.La part des enfants nés hors mariage augmente tendanciellement, car le nombre de mariages diminue sur longue période et la natalité progresse. En 2015, 59,6 % des enfants sont nés hors mariage contre 47,4 % en 2004 et 37 % en 1994.

b)Contraception et interruptions volontaires de grossesse (IVG)

39.En France, les indicateurs liés à l’entrée dans la sexualité et à la contraception témoignent d’une utilisation élevée du préservatif lors du premier rapport sexuel et d’une bonne couverture contraceptive chez les adolescentes et les jeunes filles. En effet, en 2010 seules 7,7 % des femmes de 15 à 49 ans à risque de grossesse non prévue déclaraient ne pas utiliser de moyen de contraception.

40.D’après l’Institut national d’études démographiques (INED), le nombre d’IVG est resté stable depuis 1975. D’après le site d’information gouvernemental créé fin 2013, 222 500 IVG sont pratiquées en France chaque année, concernant 1,5 % des femmes de 15 à 49 ans. Depuis 2000, l’IVG est autorisée jusqu’à 12 semaines de grossesse. Depuis 2013, la contraception des jeunes filles de 15 à 18 ans est gratuite, de même que l’IVG pour l’ensemble des femmes. L’INSEE notait en 2009 que ce sont principalement les jeunes femmes de 20 à 24 ans qui ont recours à une IVG. Les pouvoirs publics continuent à développer les efforts entrepris en matière d’éducation sexuelle et d’information sur la contraception, notamment par la création du site gouvernemental. Fin 2013, suite à sa saisine par la Ministre des droits des femmes, le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a remis au gouvernement 40 recommandations pour améliorer l’accès à l’IVG.

c)Maladies et décès

41.En 2013, les principales causes de décès étaient un cancer (28,7 %), une maladie de l’appareil circulatoire (25 %), une maladie de l’appareil respiratoire (6,6 %), une maladie de l’appareil digestif (4 %), des troubles mentaux et du comportement (4 %), une maladie infectieuse ou parasitaire (1,9 %), un suicide (1,7 %), un accident de transport (0,5 %) et d’autres causes allant jusqu’à 13 %. Les deux causes principales de décès des enfants âgés de 0 à 15 ans sont les infections d’origine périnatale et les malformations congénitales et anomalies chromoso­miques.

42.En France, les maladies chroniques touchent près de 20 % de la population et elles sont encore aujourd’hui l’une des causes principales de décès et de handicap. Avec l’allongement de la durée de vie, la plupart de ces maladies sont en augmentation constante. Parmi ces pathologies, on peut citer les cancers, le diabète, l’hypertension artérielle qui touche 66 % des plus de 50 ans, l’obésité qui concerne 17 % des 18-74 ans et les maladies cardiovasculaires et respiratoires.

43.Les deux plus graves maladies transmissibles et non transmissibles sont la tuberculose avec 8,2 cas pour 100 000 habitants (2009) et la légionellose avec 1,9 cas pour 100 000 habitants (2009).

44.En 2009, le taux d’incidence du sida s’élevait à 2,2 pour 100 000 habitants en 2009. On estimait à 152 000 le nombre de personnes vivant avec le VIH ou le SIDA (dont 50 000 ne le sachant pas), à 6 700 les nouveaux diagnostics de séropositivité, à 1 450 les nouveaux cas de SIDA, et à 46 000 le nombre de décès depuis 1995. Les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes contaminées par rapports hétérosexuels et nées à l’étranger (dont les ¾ dans un pays d’Afrique subsaharienne) restent les deux groupes les plus concernés et représentent chacun 40 % des découvertes de séropositivité en 2011. Entre 2010 et 2011 le nombre de sérologies réalisées a augmenté de 4 %, montrant que les recommandations d’élargissement du test de dépistage préconisées fin 2010 ont été suivies par des professionnels de santé.

d)Scolarisation et alphabétisation

45.À la rentrée 2014 les écoles de l’enseignement du premier degré scolarisent 6,8 millions d’élèves (enfants d’environ 2 à 10 ans) ce qui représente une augmentation de 0,4 % par rapport à l’année précédente. L’enseignement du second degré dans les établissements publics et privés, sous tutelle du ministère de l’Éducation nationale, accueille 5,5 millions d’élèves à la rentrée 2014, soit une progression de 0,4 % par rapport à la rentrée précédente également. À la rentrée 2014, 2 470 700 étudiants sont inscrits dans l’enseignement supérieur, soit une hausse de 1,7 % par rapport à 2013. Les effectifs inscrits dans l’enseignement supérieur augmentent ainsi pour la sixième année consécutive, atteignant un niveau jamais atteint. Cette année, le nombre d’étudiants étrangers augmente un peu plus faiblement (+ 1,3 %).

46.Taux de scolarisation. En 2013, pour les enfants de 2 à 10 ans, le taux de scolarisation variait de 11,9 à 2 ans à 98,6 % à 10 ans (avec un taux de 100 % pour les enfants âgés de 4 à 7 ans). Pour les enfants de 11 à 17 ans, ce taux variait de 98,9 % à 11 ans à 90,3 % à 17 ans. Pour les étudiants de 18 à 25 ans, ce taux variait de 77,4 à 18 ans à 11,1 % à 25 ans.

47.En 2010, 12,8 % des jeunes de 18 à 24 ans dont le niveau d’étude ne dépassait pas le premier cycle du secondaire étaient considéré comme ayant quitté prématurément l’école (10,3 % étaient des filles et 15,4 % des garçons). Ce taux était de 8,5 % en 2014 (7,4 % pour les filles et 9,5 % pour les garçons). 77,4 % des personnes âgées de 25 à 64 ans ont terminé au moins le 2nd cycle du secondaire.

48.Nombre d’élèves par classe. En 2012, on compte en moyenne 22,7 élèves par classe de primaire, 25,1 élèves par classe de premier cycle de secondaire (collège), et 9,9 étudiants par enseignant dans le second cycle du secondaire (lycée).

49.D’après l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI), en 2013 l’illettrisme touchait 2,5 millions de personnes en métropole, soit 7 % des 18-65 ans ayant été scolarisés en France, contre 9 % en 2004. L’illettrisme a été déclaré grande cause nationale en 2013.

3.Données économiques

a)PIB, BNP, taux de croissance économique et indice des prix à la consommation

50.En 2015, le produit intérieur brut (PIB) de la France s’élevait à 2 183,6 milliards d’euros courants, soit 14,9 % du PIB du l’Union européenne.

51.En 2014, le PIB de la France s’élevait à 2 132,4 milliards d’euros courants, soit 15,3 % du PIB de l’Union Européenne, ou 1 907,7 milliards d’euros en parité de pouvoir d’achat (PPA), soit 13,9 % du PIB en PPA de l’Union européenne. Il croît ainsi de 0,2 % en euros constants, après deux années de croissance modérée (+ 0,2 % en 2012, + 0,7 % en 2013). Le PIB par habitant était de 29 290 en PPA.

52.Le revenu national brut (RNB) était de 2 174,5 milliards d’euros, et le revenu national disponible brut (RNDB) de 2 122,7 milliard d’euros.

53.En 2015, la croissance a été de 1,1. L’OCDE prévoit 1,3 % de croissance en 2016 et 1,6 % en 2017.

54.En décembre 2014, la hausse de l’indice des prix à la consommation s’établit à + 0,1 % sur un an, après + 0,7 % fin 2013.

b)Dette et déficit publics

55.En 2014, le déficit public notifié à la Commission européenne s’établissait à 84,1 milliards d’euros, soit 3,9 % du PIB. Il a ainsi diminué de 2,3 milliards d’euros depuis 2013. Le poids de la dette publique notifiée atteignait 2 037, 8 milliards d’euros soit 95,6 % du PIB (+ 3,3 par rapport à 2013), et la dette publique nette 1 849, 9 milliards d’euros soit 86,7 % du PIB.

c)Dépenses sociales publiques et aide publique au développement

56.En 2014, les dépenses sociales publiques s’élevaient à 31,9 % du PIB.

Elles s’élevaient à 31,5 % en 2012. Plus précisément, cette même année, les dépenses publiques de santé représentaient 9 % du PIB, les dépenses de prestations de protection sociale 29,5 % du PIB, les dépenses d’éducation6,8 % du PIB et les dépenses de logement 22,5 % du PIB.

57.En 2014, l’aide publique au développement nette atteignait 8 005 milliards d’euros soit 0,37 % du RNB, faisant de la France le quatrième contributeur mondial à cette aide.

d)Dépenses de consommation des ménages

58.En 2014, sur le total de leurs dépenses de consommation, les ménages ont consacré 24 % au logement, à l’équipement du logement, au chauffage et à l’éclairage ; 10 % à l’alimentation ; 3,2 % à la santé ; et 0,7 % à l’éducation.

e)Pauvreté

59.Le seuil de pauvreté traditionnellement retenu en Europe et en France, notamment par l’INSEE, est fixé à 60 % du niveau de vie médian. En 2012, ce seuil était fixé à 1004 euros par mois et en 2013 à 1 000 euros par mois. En 2013, le taux de pauvretéau seuil de 60 % s’établissait à 14 % et concernait 8,6 millions de personnes. Les plus touchés sont les jeunes (19,6 % des moins de 18 ans vivent sous le seuil de pauvreté et 18,6 % des 18-29 ans). Pour les personnes âgées (75 ans et plus) ce chiffre est de 8,7 %. Les femmes sont également plus touchées que les hommes : 14,3 % des femmes vivent en dessous de seuil de pauvreté contre 13,6 % des hommes.

60.Pour l’année 2016, la fondation Abbé Pierre évalue à 3,8 millions environ le nombre de personnes mal logées en France.

61.Plusieurs minima sociaux (le revenu de solidarité active, l’allocation pour adulte handicapé et ses compléments, l’allocation minimum vieillesse et l’allocation supplémentaire d’invalidité) bénéficient aux personnes les plus démunies et permettent de réduire les inégalités.

f)Emploi et chômage

62.En 2014 en France métropolitaine, la population active s’établissait à 28,6 millions de personnes de 15 ans ou plus. 25, 8 millions d’entre elles avait un emploi, et 2,8 millions étaient au chômage au sens du Bureau international du travail (BIT). Le taux de chômage s’élevait alors à 9,9 %. Le taux d’activité des 15-64 ans était de 71,4 %. La féminisation de l’emploi s’est accentuée depuis les années 90 : entre 1990 et 2014, le taux d’activité des femmes de 15 à 64 ans vivant en France métropolitaine est passé de 58,2 % à 67,5 %.

63.Depuis une quinzaine d’années la part des salariés syndiqués s’est établie autour de 8 % de la population active, voire a très légèrement diminué. Le taux de syndicalisation était ainsi de 7,7 % en 2013. Mais malgré la faiblesse du nombre de leurs adhérents, les organisations syndicales sont assez largement présentes sur les lieux de travail. 56 % des salariés déclaraient en 2005 qu’un ou plusieurs syndicats étaient présents sur leur lieu de travail, contre 50,3 en 1996.

g)Salaires

64.Le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) est revalorisé chaque 1er janvier, en tenant compte de l’évolution des prix à la consommation et du pouvoir d’achat du salaire horaire moyen des ouvriers et des employés.Le 1er janvier 2016, le SMIC horaire a été porté à 9,67 euros bruts (7,54 euros nets), soit 1466,62 euros bruts mensuels (1121,71 euros nets) sur la base de la durée légale du travail de 35 heures hebdomadaires.

65.En 1990, sur l’année un cadre gagnait 3,12 fois plus qu’un ouvrier. En 2013, dans le secteur privé un ouvrier gagnait 1 686 euros net par mois et un cadre 4 072, soit 2,42 fois plus. Le montant moyen du revenu salarial net dans le secteur privé en 2013 était de 1 934 euros pour les femmes, soit 19 % de moins que les hommes qui percevaient en moyenne 2 389 euros. Cet écart était de 28 % en 2010 et de 32,1 % en 1990. La persistance de cet écart s’explique d’une part par un niveau de salaire horaire moyen inférieur de 18 % à celui des hommes, et d’autre part parce que les femmes ont travaillé en moyenne dans l’année 13 % d’heures en moins.

4.Indicateurs relatifs à la criminalité et à l’administration de la justice

a)Détention provisoire

66.En matière correctionnelle, la durée initiale de la détention provisoire ne peut excéder 4 mois, mais elle peut être prolongée sur décision judiciaire par périodes successives de 4 mois maximum chacune. La durée maximale de détention dépend surtout de l’infraction pour laquelle est poursuivie la personne et de la condamnation encourue. Elle est de quatre mois si la personne n’a jamais été poursuivie auparavant et encourt une peine de moins de 5 ans d’emprisonnement, et d’un an dans les autres cas. Par dérogation, si la personne est poursuivie pour des faits commis hors de France ou pour certaines infractions graves (trafic de stupéfiants, terrorisme, association de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou infraction commise en bande organisée) et qu’elle encourt une peine d’emprisonnement d’au moins 10 ans, la durée maximale de la détention provisoire peut être portée à 2 ans.

67.En matière criminelle, la durée initiale de la détention provisoire ne peut excéder 1 an, mais elle peut être prolongée sur décision judiciaire par périodes successives de 6 mois maximum chacune. La durée maximale de détention dépend surtout de l’infraction pour laquelle est poursuivie la personne et de la condamnation encourue. Elle est de 2 ans lorsque la personne encourt une peine de réclusion inférieure ou égale à 20 ans, et de 3 ans dans les autres cas. Par dérogation, pour les mêmes raisons qu’en matière correctionnelle, la durée maximale de la détention provisoire peut être portée à 2 ans à 4 ans.

68.La France prévoit une procédure de réparation intégrale et obligatoire du préjudice matériel et moral en cas de détention injustifiée, c’est-à-dire au cours d’une procédure terminée par une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive. Quand une condamnation a finalement été prononcée, une indemnisation est néanmoins possible en cas de durée excessive de la détention.

b)Faits constatés, mises en cause et condamnations pour infraction

i)Faits constatés (2014)

69.En 2014, 374 214 atteintes volontaires à l’intégrité physique (violences physiques, violences sexuelles, menaces criminelles ou délictuelles) ont été enregistrés par la Police nationale en France métropolitaine, dont 103 468 vols avec violence, 17 941 actes de violence sexuelle et 803 homicides volontaires et involontaires (932 en 2015). Depuis 2008, le nombre d’atteintes volontaires à l’intégrité physique enregistrées par la police nationale s’est élevé de 7,3 %, mais cette augmentation sur cinq ans résulte à 90 % de variations annuelles en 2009 et en 2010.

70.En 2013, le taux d’homicide en France était l’un des plus bas au monde : 1,1 pour 100 000 habitants en France métropolitaine et 1,2 dans la France entière. Ce taux s’établissait à 2 pour 100 00 en 1996 et à 1,4 pour 100 000 en 2008 ; depuis 2009, il s’est stabilisé entre 1 et 1,2. Sur la période 2008-2013, le nombre d’homicides a globalement diminué de 18,7 %.

71.Le nombre d’actes de violence sexuelle constatés par la Police nationale est de 17 941 en 2014. Le nombre des viols enregistrés en 2014 a particulièrement augmenté par rapport aux années précédentes. On relève une augmentation de 12,5 % pour les faits de viols sur majeurs (contre une diminution de 1,5 % en 2013 par rapport à 2012 et de 0,6 % en 2012 par rapport à 2011) et + 5,3 % pour ceux de viols sur mineurs (contre une augmentation de 3,4 % en 2013 et de 0,6 % en 2012). En 2014, la Police nationale a constaté 3 768 viols sur majeurs et 3 238 viols sur mineurs.

ii)Mises en cause (2012)

72.Le nombre global de personnes mises en cause par la Police nationale hors infractions à la législation sur les étrangers a baissé de 3,3 % entre 2011 et 2012, ce qui représente 684 136 mis en cause pour cette année. En particulier, le nombre de personnes mises en cause par la Police nationale pour atteintes volontaires à l’intégrité physique est en baisse, de – 4,3 % (soit – 6 666 mis en cause). Cette baisse provient à 90 % de la baisse du nombre de mis en cause pour violences physiques ne résultant ni d’un vol ni d’un règlement de compte entre malfaiteurs (- 4,7 %, soit – 6 048 mis en cause). Le nombre de personnes mises en cause pour violences sexuelles diminue aussi, mais dans des proportions plus faibles (- 1,1 %, soit – 97 mis en cause).

iii)Condamnations (2014)

73.En 2014, 584 000 condamnations ont été prononcées. Ces 584 000 condamnations se rapportent à 494 000 condamnés, étant donné que la même année une personne peut être condamnée plusieurs fois. En revanche, ce sont plus de 878 000 infractions qui ont été sanctionnées par les 584 000 condamnations. En effet, plusieurs infractions peuvent être visées par une seule condamnation.

74.Concernant les délits sanctionnés, 34,3 % représentaient des infractions au Code de la route. Venaient ensuite les atteintes aux biens (vols, recels, escroqueries, dégradations), avec un délit sur cinq. Les vols et recels constituaient l’essentiel de ces atteintes (74 %).

75.Concernant les crimes sanctionnés, 44 % étaient des viols (1 300 infractions). Les autres atteintes criminelles à la personne étaient pour 14,2 % des homicides volontaires et pour 11,7 % des coups et violences graves. Les atteintes aggravées aux biens représentaient près de 27,4 % des crimes, le terrorisme environ 1,2 % et les autres crimes dont le trafic de stupéfiants 1,2 %.

76.Le nombre de compositions pénales a fléchi depuis 2012 (- 5,3 %). Cette procédure créée en 2004 s’applique à des auteurs qui ont reconnu des faits constitutifs de contraventions et de délits de faible gravité, tels que ceux liés à la circulation routière et aux transports ou l’usage de produits stupéfiants diminue avec le recours à la procédure de composition pénale (créée en 2004). Une sanction est proposée par le procureur : une amende (66,5 %) ou une peine de substitution (suspension du permis de conduire, travail non rémunéré, stage de citoyenneté, etc.). En 2014, 65 700 compositions pénales ont été homologuées par les juges et inscrites au casier judiciaire. 49,7 % d’entre elles concernaient la circulation routière.

77.En revanche, le nombre de personnes écrouées a augmenté depuis 2008, en lien avec l’augmentation des condamnations à des peines d’emprisonnement et l’augmentation de la durée des peines, notamment suite à la loi sur les peines « planchers » ou « minimales ». Celles-ci étaient prévues par les anciens articles 132-19-1 et 132-19-1-2 du code pénal, respectivement applicables aux récidivistes et aux auteurs de certaines infractions graves contre les personnes, même non récidivistes. Ces peines planchers impliquaient que dès lors que les conditions imposées par les articles précités étaient remplies, le juge étaient tenu de prononcer une peine dont le quantum ne pouvait être inférieur à un seuil minimal. La loi no 2044-986 du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales a supprimé ce mécanisme.

78.En vertu de l’article 66-1 de la Constitution et de la loi du 9 octobre 1981, nul ne peut être condamné à la peine de mort.

c)Population carcérale (2014)

79.Au 1er janvier 2015, le nombre de places opérationnelles en établissements et quartiers carcéraux était de 57 841, et le nombre de personnes sous écrou s’élevait à 77 291. Cependant, parmi les personnes écrouées, 11 021 d’entre elles bénéficiaient d’un aménagement de peine (condamnés en semi-liberté, en placement sous surveillance électronique ou en placement à l’extérieur). Ces mesures permettent ainsi que seules 66 20 soient détenues. Parmi les personnes écrouées, 60 742 étaient condamnées, et 16 549 étaient prévenues. 81 % avaient la nationalité française, et 19 % étaient de nationalité étrangère.

80.Parmi les personnes écrouées et condamnées (détenues et non détenues), 26,1 % ont été condamnées pour violence volontaire, 14,7 % pour infraction à la législation des stupéfiants, 12,8 % pour violence sexuelle, 11, % pour vol aggravé, qualifié ou criminel, 8,4 % pour escroquerie, 8,9 % pour vol simple, 5,8 % pour homicide volontaire, 5,7 % pour homicide ou atteinte à l’intégrité physique involontaire, 0,5 % pour infraction à la législation sur les étrangers et 7,5 % pour d’autres infractions. Toujours parmi les personnes écrouées et condamnées (détenues et non détenues), 17,2 % effectuaient une peine de moins de 6 mois, 19,2 % une peine de 6 mois à moins d’un an, 28,9 % d’un an à moins de 3 ans, 11,7 % de 3 ans à moins de 5 ans, et 23 % de 5 ans et plus. Parmi cette dernière catégorie composée de 8 123personnes, 3,1 % purgeaient une peine de 5 ans à moins de 10 ans, 66,8 % de 10 ans à moins de 20 ans, 24,2 % 20 ans à moins de 30 ans,et 5,9 % une peine de réclusion à perpétuité.

81.En 2014, l’administration pénitentiaire a recensé 94 suicides en détention (+16 hors détention) et 1 033 tentatives de suicides.

d)Forces de police et de sécurité

82.En 2012, il y avait 143 000 membres des forces de police, contre 148 855 en 2008. Cette diminution des effectifs s’explique par l’instauration de la règle de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux en 2008. Après sa suppression en 2013, 480 postes de policiers et de gendarmes ont notamment été créés.

83.Depuis juillet 2012, 64 zones de sécurité prioritaires concernant 1,6 million de Français ont été créées en en vue de lutter contre la délinquance enracinée. Une baisse de la délinquance a d’ores et déjà été enregistrée dans plusieurs zones.

e)Nombre de procureurs et de juges pour 100 000 habitants

84.En 2015, l’ensemble des effectifs de la justice s’élevait à 78 941 (+3,2 % par rapport à 2014), les membres de la justice judiciaire étant au nombre de 31 641 (+1,9 % par rapport à 2014).

85.En 2015, il y avait 62 073 avocats, soit 93 pour 100 000 habitants.

86.En 2014, on comptait 6 935 juges professionnels affectés en juridiction, soit 10,5 pour 100 000 habitants. En outre, 510 juges professionnels jugeaient occasionnellement, soit 0,8 pour 100 000 habitants ; ce sont des professionnels expérimentés du droit dont la présence tient à une demande des citoyens de proximité et de rapidité de la justice. On dénombrait également 24 921 juges non professionnels ; ils siègent principalement dans des tribunaux spécialisés en droit du travail et en droit commercial. Au total, 22 360 personnes non-juges travaillaient pour des tribunaux.

87.En 2014, 1 882 procureurs étaient en poste dans les parquets, soit 2,8 pour 100 000 habitants.

f)Budget de la justice et de l’aide juridictionnelle

88.En 2015, le budget total annuel alloué à la justice dans son ensemble s’établissait à 7,9 milliards d’euros en loi de finance initiale, auxquels il convient d’ajouter 109,8 M€ au titre du plan de lutte contre le terrorisme. Les frais de justice s’élevaient à 444 millions d’euros (abondés de 7 millions d’euros au titre du plan de lutte contre le terrorisme) et l’aide juridictionnelle à 375,4 millions d’euros (dont 43 millions d’euros de ressources extra-budgétaires). L’aide juridictionnelle est attribuée sous condition de ressources et de nationalité ou séjour sur le territoire français. En 2015, elle a bénéficié à 989 576 personnes. Toute personne recevant l’aide judiciaire est en plus automatiquement dispensée de payer les frais de procédure. La France fait partie des États membres du Conseil de l’Europe à avoir développé l’aide judiciaire tant en quantité qu’en qualité ; elle est surtout l’un des deux seuls, avec le Luxembourg, à prévoir un accès gratuit à l’ensemble des tribunaux. En effet, la contribution pour l’aide juridique d’un montant de 35€, due entre 2011 et 2013, a été supprimée à la date du 1er janvier 2014 en vertu de la loi de finances pour 2014 et du décret de suppression de la contribution.

g)Proportion des victimes indemnisées par type d’infraction

89.Les victimes d’infraction peuvent être indemnisées pour le préjudice qu’elles ont subi par l’auteur de l’infraction lorsque ce dernier est condamné à verser à la victime des dommages et intérêts. En cas de difficultés pour recouvrer le montant de l’indemnisation prononcé, la victime a la possibilité de recourir à des procédures civiles d’exécution, en faisant par exemple appel à un huissier.

90.Les victimes ont également la possibilité de recourir à différents dispositifs d’indemnisation au titre de la solidarité nationale en fonction de la nature de l’infraction et/ou du préjudice subi. Indépendamment de la procédure pénale, elles ont la possibilité d’adresser une demande d’indemnisation aux commissions d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI). L’indemnisation peut être intégrale en cas de décès d’un proche, de préjudice corporel grave, de traite d’être humain ou d’agression sexuelle, et partielle en cas de préjudice corporel léger, de vol, d’escroquerie, d’abus de confiance, d’extorsion de fonds ou d’atteinte à un bien. Au regard des statistiques disponibles, les indemnisations attribuées représentent en moyenne la moitié des montants demandés. Environ 15 % des demandes recevables font l’objet d’un rejet par les CIVI. 15 381 dossiers ont été traités par les CIVI en 2015 (49 % liés à des blessures volontaires, 17 % à des agressions sexuelles, 9 % à des viols, 4 % à des vols, 4 % à des escroqueries, 3 % à des homicides volontaires ou encore 3 % à des véhicules incendiés). 271,8 millions d’euros ont été versés en 2015 dans le cadre de ce dispositif et 55,7 millions d’euros ont été recouvrés auprès des auteurs des infractions ou des compagnies d’assurance. Le délai de traitement des demandes est de 12 mois en moyenne. Près de la moitié des affaires font l’objet d’un accord entre les parties sans intervention du juge. Environ 30 % des décisions des CIVI font l’objet d’un appel.

91.Par ailleurs, les victimes qui ont des difficultés à recouvrer auprès des auteurs le montant des dommages et intérêts attribués par les juridictions et qui ne sont pas éligibles au dispositif CIVI peuvent faire appel au service d’aide au recouvrement en faveur des victimes d’infractions (SARVI). En 2015, 72 % des dossiers traités par le SARVI concernaient des indemnités dont le montant était inférieur à 1 000 euros et ont donc pu faire l’objet d’une réparation intégrale. Les 28 % restants ont fait l’objet d’un paiement d’une provision égale à 30 % du montant total, avec un minimum de 1 000 euros et un maximum de 3 000 euros. En janvier 2016, le SARVI était parvenu à recouvrer 19 % des avances versées en 2014 et à récupérer 3 % des créances restantes dues aux victimes pour des dossiers ouverts en 2014.

92.Enfin, des dispositifs spécifiques existent pour certaines infractions, tel que le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de dommages (FGAO) pour les accidents de circulation, de chasse, etc. en cas de défaut d’assurance, et le Fonds de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI) pour les actes de terrorisme. En 2015 par exemple, 986 dossiers ont été ouverts et 23,4 millions d’euros versés par le FGTI pour les victimes d’actes terroristes.

93.Le Gouvernement français présente en annexe une série d’indications sur les principales caractéristiques démographiques, économiques et sociales de la France, présentées sous forme de tableaux et de graphiques.

II.Structure politique générale

94.La tradition française d’attachement aux droits de l’homme a été doublement consacrée : d’une part, par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, concernant les droits civils et politiques ; d’autre part, par le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, concernant les droits économiques, sociaux et culturels. Ces normes, auxquelles se réfère le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, ont valeur constitutionnelle. La prise en compte de ces droits s’est enracinée au cours de l’Histoire dans les institutions et les esprits et s’est enrichie plus récemment du fait de l’adhésion de la France à de nombreuses conventions internationales. Le régime actuel de protection des droits de l’homme est donc étroitement lié au contexte juridique et politique dans lequel il s’inscrit, dont les composantes fondamentales sont l’existence d’une démocratie politique, la séparation des pouvoirs, l’indépendance du pouvoir judiciaire et le contrôle de l’administration.

A.Le cadre constitutionnel français

1.Principales caractéristiques du système et du régime politiques français

95.En 1875, la Troisième République a définitivement établi un régime de démocratie représentative dont les principes ont été consacrés et développés dans la Constitution du 4 octobre 1958. La France est une République démocratique, indivisible, laïque et sociale. La langue de la République est le français (art. 2 de la Constitution). La France est un État unitaire, avec un seul pouvoir politique détenu au niveau national, mais c’est aussi un État déconcentré et décentralisé, dans lequel les collectivités territoriales ont des compétences propres.

96.L’Assemblée Nationale et le Sénat, que l’on trouve dans la Constitution de 1958, sont généralement considérés comme caractéristiques d’un régime parlementaire, mais l’élection du Président de la République au suffrage universel direct, combinée avec une séparation souple des pouvoirs, engendre souvent la qualification de régime mixte ou semi-présidentiel.

97.Dans la pratique, en période de concordance entre la majorité présidentielle et la majorité à l’Assemblée nationale, le régime se présidentialise. En période de cohabitation d’un Président de la République avec une majorité politique qui lui est opposée à l’Assemblée nationale, le régime se parlementarise. Avant 2000, la différence entre la durée du mandat présidentiel (sept ans) et celle de la législature (cinq ans) et le décalage de deux ans entre les élections présidentielles et législatives qui s’en suivait, donnaient aux électeurs la possibilité de désavouer le chef de l’État en désignant une majorité parlementaire lui étant hostile. Cependant, depuis la réforme du quinquennat présidentiel et l’inversion du calendrier électoral (les élections législatives suivent immédiatement l’élection présidentielle), l’éventualité d’une cohabitation est réduite à deux hypothèses : suite à une dissolution de l’Assemblée nationale, et suite au départ, au décès ou à la destitution du Président de la République.

98.La souveraineté nationale appartient au Peuple et non à un groupe ou à un individu (art. 3). En principe, le Peuple l’exerce par ses représentants élus, même s’il peut parfois être consulté par voie de référendum (art. 3). Le Peuple choisit ses représentants au suffrage universel, égal et secret (art. 3). Le suffrage peut être direct (élections présidentielles, législatives, régionales, cantonales, municipales, européennes) ou indirect (élections sénatoriales). Le scrutin peut être majoritaire ou proportionnel ; uninominal, plurinominal ou de liste ; à un tour ou à deux tours.

2.Electeurs, partis politiques et élections

99.Sont électeurs tous les nationaux français de plus de 18 ans, jouissant de leurs droits civils et politiques. Depuis 1997, les personnes de 18 ans ayant été recensées sont inscrites d’office sur les listes électorales. Au 1er mars 2015, 44,6 millions d’électeurs français étaient inscrits sur les listes électorales. Ces chiffres ne prennent pas en compte les collectivités d’outre-mer. Le nombre d’électeurs français inscrits sur les listes électorales était relativement stable entre 2014 et 2015 après avoir connu une progression importante entre 2013 et 2014 (+ 1,1 %) En revanche, ils étaient moins nombreux qu’en 2012, année durant laquelle s’étaient déroulées les élections présidentielles et législatives. La variation du nombre d’électeurs est donc très dépendante de la présence de scrutins et de leur nature. Fin 2013, environ 3 millions de Français en âge de voter n’étaient pas inscrits sur les listes, mais ce chiffre a diminué suite à la vague d’inscriptions en vue des élections. Les électeurs français non-inscrits étaient majoritairement des hommes, jeunes, peu diplômés, nés à l’étranger et habitant en zone urbaine.

100.En 2012, parmi les Français en âge de voter, seulement 67 % nés étrangers à l’étranger et 85 % nés Français à l’étranger étaient inscrits sur les listes électorales. Par contre, une fois inscrits ils ont autant voté que les Français nés en France. Les personnes inscrites sur les listes électorales dans les DROM-COM votent, elles, moins que les personnes inscrites en métropole.

101.Les ressortissants de l’Union européenne peuvent voter et se présenter aux élections municipales et européennes. Au 1er mars 2014, 281 000 ressortissants de l’Union européenne étaient inscrits sur les listes électorales. En 2008, lors des dernières municipales, ils étaient 220 000 ; le nombre de candidats européens dans les communes d’au moins 3 500 habitants s’était élevé à 1 206 et le nombre d’élus à 244.

102.Le rôle des partis politiques a été inscrit dans la constitution de 1958 (art. 4) qui depuis 1999 leur donne aussi pour mission de favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. La loi du 11 mars 1988 portant sur le financement des partis affirme qu’ils se forment et exercent leur activité librement, qu’ils sont dotés de la personnalité morale et qu’ils peuvent agir en justice. D’après la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), au 30 juin 2013, le nombre de partis enregistrés s’établissait à 402. 285 étaient agréés, 55 étaient éligibles à l’aide publique (qui s’élevait à 70 millions d’euros). En 2014, 13 étaient représentés au Parlement français et/ou au Parlement européen.

103.Toutes les élections françaises sont organisées dans les délais prescrits par la loi.

104.Le taux d’inscription sur les listes électorales et le taux de participation aux élections fluctuent d’une élection à une autre en fonction des déménagements (principale cause de non-inscription sur les listes électorales) mais également en fonction de l’enjeu de l’élection. En effet, on constate un regain d’inscription dans les périodes de campagnes électorales pour les présidentielles jugées fondamentales par les électeurs.

105.Ainsi, de par leur enjeu et leur médiatisation, les élections présidentielles sont traditionnellement marquées par une participation plus forte que les législatives. En 2012, environ 80 % des Français inscrits ont voté lors de l’élection présidentielle contre environ 56 % aux élections législatives. Par ailleurs, 62,13 % des Français inscrits ont voté au second tour des élections municipales en 2014, 42,43 aux européennes en 2014, 49,98 % au second tour des élections départementales en 2015 et 58,41 % au second tour des élections régionales en 2015.

106.L’organe ayant compétence pour statuer en cas de contestation sur la régularité des élections législatives, sénatoriales, des élections présidentielles et des référendums, est le Conseil constitutionnel. Sur ce fondement, le Conseil a été saisi, à la suite des élections législatives de juin 2012, de 108 réclamations formées par des candidats ou des électeurs, ainsi que de 238 saisines de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Il a également dû se prononcer sur 4 réclamations contestant l’établissement de la liste des candidats à l’élection présidentielle. Les protestations dirigées contre les élections au parlement européen et les élections régionales relèvent quant à elles de la compétence de premier et dernier ressort du Conseil d’État. Enfin, les recours dirigés contre les élections municipales et départementales relèvent de la compétence des tribunaux administratifs.

3.Associations

107.La liberté d’association a été reconnue par la loi du 1er juillet 1901 et constitue un principe à valeur constitutionnelle. En 2010, on comptait 1,3 million d’associations actives. Une association peut être formée librement, sans autorisation ni déclaration préalable : il suffit que deux personnes ou plus rédigent ses statuts (qui précisent entre autres le titre et l’objet de l’association, ses organes dirigeants et la personne habilitée à la représenter) et qu’elles indiquent son siège social. Seules deux restrictions existent à cette liberté de création : l’association ne doit pas porter atteinte à l’ordre public et le partage de bénéfices est interdit entre membres.

108.En revanche, une association ne jouit de la capacité juridique que si ses fondateurs effectuent une déclaration préalable à la préfecture du département où elle a son siège social. Après délivrance d’un récépissé aux fondateurs, la mention de la création de l’association paraît au Journal officiel. Le préfet ne peut refuser de délivrer le récépissé, sauf dans les départements d’Alsace et de Moselle, soumis à un régime différent du fait de leur appartenance à l’Empire allemand entre 1870 et 1919. Le préfet peut seulement, une fois le récépissé délivré, saisir le juge si l’objet de l’association lui paraît illégal.

109.Une association peut être reconnue d’intérêt général. Cela lui permet de délivrer des reçus de dons à ses donateurs, qui peuvent ainsi bénéficier de réductions d’impôt. Si elle est d’intérêt général, une association peut ensuite être reconnue d’utilité publique par décret en Conseil d’État si elle remplit certaines conditions (période de fonctionnement d’au moins trois ans, action qui dépasse le cadre local, plus de 200 adhérents, montant annuel minimum de ressources estimé à 46 000 €, désintéressement financier). Une association reconnue d’utilité publique peut recevoir, en plus des dons manuels, des donations et des legs. En 2015, environ 1900 associations étaient reconnues d’utilité publique.

110.En France, une association peut asseoir sa légitimité internationale par divers moyens, dont l’affiliation à des réseaux reconnus et l’habilitation comme organisation non gouvernementale (ONG) partenaire de structures internationales. Mais il n’existe pas de liste officielle des ONG françaises.

4.Médias

111. Selon l’étude Media in Life de Médiamétrie, en 2014, les français ont eu en moyenne 44,4 contacts médias et multimédia quotidiens par personne, contre 33,9 en 2005, soit une hausse de 31 % en 10 ans.

112.Presse. En 2012, on dénombrait plus de 4700 titres de presse éditeurpouvant prétendre à une certaine stabilité et à une certaine diffusion. Près de 4.9 milliards d’exemplaires ont été diffusés en 2012.

113.La presse spécialisée grand public rassemble 52 % des titres, 28 % de la diffusion totale et 38 % des revenus des éditeurs. La presse spécialisée technique et professionnelle regroupe plus de 30 % des titres de presse mais seulement 3 % de la diffusion totale et 9 % des revenus. Inversement, les quotidiens locaux d’information générale et politique représentent un peu plus de 1 % de l’ensemble des titres mais concentrent 36 % de la diffusion et un tiers des revenus des éditeurs.

114.En 2014-2015, 63 % de la population âgée de plus de 15 ans (soit 32, 8 millions de personnes) lisait chaque jour au moins un titre de la presse quotidienne ou magazine. Parmi elles, 18 millions lisaient la presse quotidienne régionale, 8,2 millions lisaient la presse quotidienne nationale et 4,8 millions lisaient la presse gratuite d’information.

115.Depuis plusieurs années, la diffusion de la presse payante d’information a diminué : entre 1995 et 2005, elle a perdu 3 millions de lecteurs et 852 millions d’exemplaires de moins ont été vendus.Au contraire, la diffusion de la presse gratuite d’information a augmenté : sa diffusion a progressé de 27 % entre 2005 et 2006. Quant à la diffusion des magazines, elle s’est maintenue : en 2006, 97,2 % des Français lisaient au moins un titre de la presse magazine chaque mois, un record mondial.

116.Télévision. Fin 2014, on dénombre 33 chaînes nationales et 46 chaînes locales (soit 3 de moins par rapport à 2013) diffusées en télévision numérique terrestre (« TNT ») en métropole. Sur les autres réseaux de diffusion, 208 chaînes nationales (+ 3) et 87 chaînes locales (- 19) ont été déclarées ou conventionnées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel.

117.En 2014, la quasi-totalité des foyers français (95,7 %) est équipée d’au moins un poste de télévision. Un peu plus de la moitié des foyers sont équipés de plus d’un téléviseur, le taux de multi-équipement diminuant toutefois depuis cinq ans.

118.En 2014, les Français ont regardé la télévision en moyenne 3 heures et 41 minutes par jour, soit 5 minutes de moins qu’en 2013 et 9 minutes de moins qu’en 2012.TF1 reste de loin la chaîne la plus regardée en France avec 22,9 % de part d’audience en 2014. La part d’audience de la première chaîne privée a néanmoins perdu près de 10 points depuis l’arrivée de douze nouvelles chaînes gratuites de la télévision numérique terrestre (TNT) en 2005. France 2 est la deuxième chaîne la plus regardée, avec 14,1 % de part d’audience, et M6 est troisième avec 10,1 % de part d’audience. La part d’audience des chaînes hertziennes n’a cessé de baisser depuis 2005. Celle des nouvelles chaînes de la TNT gratuite lancées en 2005 (hors chaînes locales) n’a cessé de croître jusqu’en 2012 (22 %), suivie d’une stabilisation en 2013 et d’une baisse en 2014 (21 %).

119.En 2012, les chaînes nationales gratuites ont diffusé plus de 160 000 heures de programmes.

120.Radio. La France est l’un des pays au monde les mieux dotés en radios FM. Leur grande diversité (public/privé, national/local) et leur nombre témoignent d’une régulation équilibrée et soucieuse de la variété de l’offre.

121.En 2014, 854 opérateurs privés utilisent des fréquences assignées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (plus de 5 000 fréquences au total), dont 5 radios nationales généralistes et 25 radios nationales thématiques. Les services nationaux représentent ainsi 4 % des opérateurs privés et utilisent 51 % des fréquences assignées à ces opérateurs. Les services associatifs représentent 68 % des opérateurs, pour 21 % des fréquences. Les sept radios du groupe Radio France se partagent environ 2 400 fréquences, dont un quart pour France Inter.

122.RTL est la première radio de France en termes de part d’audience, entre septembre et octobre 2014 (11,6 %). Elle est suivie de France Inter (9,2 %) et Europe 1 (7,5 %). Les radios généralistes ont capté près de 41 % de part d’audience sur cette période, contre 33 % pour les radios musicales et 15 % pour les stations locales.

123.En septembre et octobre 2014, les Français ont écouté la radio 2 heures 50 par jour en moyenne, une durée d’écoute relativement stable depuis dix ans.

124.Internet. En 2013, Internet comptait 41,2 millions d’utilisateurs en France. En 2014, 82 % des Français de plus de douze ans disposaient d’un ordinateur (contre 74 % en 2009) et autant d’un accès Internet, dont la quasi-totalité avec une connexion à haut débit (98 %) ; ils n’étaient que deux sur trois en 2009. Près d’un français sur deux était équipé d’un smartphone (46 %), et plus d’un sur quatre d’une tablette (29 %).

125.D’après une étude de l’INSEE, en 2012 trois personnes sur quatre résidant en France métropolitaine avaient utilisé Internet au cours des trois derniers mois, contre seulement 56 % en 2007. La fracture numérique se réduit entre catégories sociales : Internet touche la quasi-totalité des cadres depuis 2007 ; quatre ouvriers sur cinq l’utilisent en 2012, contre un sur deux cinq ans auparavant. Des différences de pratique selon l’âge demeurent, les plus jeunes restant les plus équipés, mais l’usage de l’internet se banalise. De nombreuses fonctionnalités disponibles sur la toile sont de plus en plus utilisées. Achats mais aussi ventes en ligne sont ainsi de plus en plus sollicités ces dernières années.

126.Le développement accéléré de l’internet mobile accompagne ces évolutions : en 2012, 40 % des personnes résidant en France ont déjà surfé sur Internet, en dehors de chez elles, via un ordinateur portable, un téléphone portable ou un appareil de poche, elles n’étaient que 10 % cinq ans auparavant.

B.Le cadre institutionnel : la séparation des pouvoirs

1.Le pouvoir exécutif

a)Le chef de l’État

127.Le Président de la République, chef de l’État, est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans ; il ne peut exercer plus de deux mandats successifs (art. 6 de la Constitution). Le scrutin est uninominal majoritaire à deux tours (art. 7). Le Président de la République a pour rôle d’assurer, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État (art. 5). Il est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect des traités (art. 5), et de l’indépendance de l’autorité judiciaire (art. 64).

128.Pour ce faire, il dispose de divers pouvoirs, qui peuvent être propres, ou partagés et alors nécessiter l’intervention d’un autre organe.

i)Les pouvoirs propres

129.Il s’agit de pouvoirs que le Président de la République exerce sans contreseing du Premier ministre et, le cas échéant, du ou des autres ministres concernés.

Les pouvoirs de garantie et d’arbitrage

130.En matière constitutionnelle : Le Président de la République veille au respect de la Constitution (art. 5) et a en pratique un pouvoir d’interprétation de cette dernière (exemple : du référendum pour la révision constitutionnelle, refus de signer des ordonnances en période de cohabitation). Il nomme trois membres du Conseil constitutionnel (art. 56) et peut saisir celui-ci pour vérifier la constitutionnalité d’une loi ou d’un traité (art. 54 et 61).

131.En matière judiciaire : Le Président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire ; il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature (art. 64).

Les pouvoirs exceptionnels (art. 16)

132.Pour que le Président de la République puisse y recourir, une menace grave et immédiate doit peser sur les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux, et le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels doit être interrompu. En cas d’application de l’article 16, le Président de la République prend les mesures exigées par les circonstances, dans le but d’assurer aux pouvoirs publics les moyens d’accomplir leur mission.

Les prérogatives liées aux relations avec les autres institutions

133.Avec le Gouvernement : le Président de la République nomme le Premier ministre et met fin à ses fonctions (art. 8) ; il convoque, approuve l’ordre du jour et préside le Conseil des ministres (art. 9).

134.Avec le Parlement : le Président de la République communique par messages avec le Parlement et peut prendre la parole devant le Parlement réuni en Congrès (art. 18). Il peut souverainement prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale, bien qu’il soit tenu, avant de l’exercer, de consulter les Présidents des assemblées et le Premier ministre (art. 12).

ii)Les pouvoirs partagés

135.Il s’agit des pouvoirs que le Président de la République ne peut exercer qu’avec le contreseing du Premier ministre et, le cas échéant, du ou des autres ministres concernés, ou qu’avec l’intervention d’un autre organe.

Prérogatives diplomatiques et militaires

136.C’est en son nom que les traités sont négociés et c’est lui qui les ratifie, le cas échéant après autorisation parlementaire (art. 52). Il accrédite les ambassadeurs (art. 14). Le Président de la République est le chef des armées (art. 15), mais le Gouvernement dispose de la force armée pour servir son action (art. 20) et toute déclaration de guerre doit être autorisée par le Parlement (art. 35). Il préside les conseils et comités de la Défense nationale (art. 15), mais exceptionnellement il peut être suppléé par le Premier ministre (art. 21).

Prérogatives liées aux relations avec le Gouvernement

137.Sur proposition du Premier ministre, le Président de la République nomme les ministres et met fin à leurs fonctions (art. 8). Il nomme aux emplois civils et militaires de l’État, parfois après décision en Conseil des ministres, parfois après avis public des commissions permanentes compétentes des deux assemblées du Parlement (art. 13).

138.Il signe les ordonnances, ainsi que les décrets délibérés en Conseil des ministres (art. 13).

Prérogatives liées aux relations avec le Parlement

139.Le Président de la République peut convoquer le Parlement en session extraordinaire, à la demande du Premier ministre ou de la majorité des membres composant l’Assemblée nationale (art. 29). Il ouvre et clôt toutes les sessions extraordinaires (art. 30). Il peut demander une nouvelle délibération des lois votées, avant de les promulguer (art. 10).

Prérogatives liées aux relations avec l’autorité judiciaire

140.Le Président de la République peut faire grâce à titre individuel (art. 17).

Prérogatives liées aux relations avec le Peuple : les référendums

141.Le référendum constitutionnel : l’initiative d’une révision constitutionnelle appartient concurremment au Président de la République sur proposition du Premier Ministre et aux membres du Parlement (art. 89). En principe, le Parlement vote le projet de révision et le peuple l’approuve par référendum. Toutefois, le Président de la République peut décider que le projet de révision soit définitivement adopté par le Parlement réuni en Congrès, à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés. Des limitations sont apportées au pouvoir de révision : une révision ne saurait ni porter atteinte à l’intégrité du territoire (art. 89, al 4), ni aboutir à un changement de la forme républicaine de gouvernement (art. 89, al 5).

142.Le référendum législatif : le Président de la République peut, sur proposition du Gouvernement ou des deux assemblées, soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions (art. 11).

143.Le référendum d’initiative partagée : Un référendum portant sur un objet mentionné au point précédent peut être organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales (art. 11).

144.Le référendum conventionnel : le Président de la République peut soumettre soit au Parlement soit au Peuple par la voie du référendum les projets de loi autorisant la ratification d’un traité relatif à l’adhésion d’un État à l’Union européenne (art. 88-5).

145.Les référendums locaux : le Président de la République peut consulter les électeurs d’une collectivité territoriale d’outre-mer sur une question relative à son organisation, à ses compétences ou à son régime législatif ou sur son changement de statut (art. 72-4).

b)Le Gouvernement

146.Second organe du pouvoir exécutif, le Gouvernement est composé, entre autres, de Ministres nommés par le Président de la République sur proposition du Premier Ministre et de secrétaires d’États. Le Gouvernement constitue un organe collégial. Sa responsabilité devant le Parlement est collective et liée à sa politique générale.

147.Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation et dispose à cette fin de l’administration et de la force armée (art. 20). Le Premier Ministre dirige l’action du Gouvernement ; c’est à lui qu’appartient, sous réserve des attributions du Président de la République, le pouvoir réglementaire (art. 21). L’initiative des lois appartient concurremment au Gouvernement et aux membres du Parlement (art. 39). Le Gouvernement prépare et exécute les lois de finances. Il propose le recours au référendum législatif (art. 11) et décrète l’état de siège (art. 36).

2.Le pouvoir législatif

148.Le pouvoir législatif appartient au Parlement qui se compose de l’Assemblée nationale et du Sénat. La répartition des compétences entre le pouvoir législatif et le pouvoir réglementaire est fixée par les articles 34 et 37 de la Constitution. Le Parlement est notamment seul compétent pour la fixation des règles concernant les droits civiques, les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques, ou encore la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables. Les séances parlementaires sont publiques.

149.Le Parlement contrôle l’action du Gouvernement et évalue les politiques publiques (art. 24).

a)L’Assemblée nationale

150.L’Assemblée nationale est composée de députés, dont le nombre ne peut excéder 577 (art. 24). Ils sont élus tous les cinq ans - sauf élections anticipées résultant d’une dissolution - au suffrage universel direct dans des circonscriptions définies à l’intérieur de chaque département. Cependant, les députés représentent en droit l’ensemble de la nation.

151.Le scrutin est majoritaire uninominal à deux tours.

152.L’Assemblée nationale discute et vote les propositions de lois, qu’elle propose elle-même, et les projets de loi, proposés par le Gouvernement. Elle peut néanmoins déléguer au Gouvernement le droit de prendre par ordonnances des mesures qui sont normalement de sa compétence. Les ordonnances sont prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État ; elles entrent en vigueur dès leur publication, mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n’est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d’habilitation.

153.L’Assemblée nationale examine et vote le budget et les lois de finances ; elle contrôle, par la mise en œuvre de la responsabilité ministérielle, l’activité gouvernementale ; elle autorise la ratification de certains traités et autorise la déclaration de guerre. Elle participe à l’exercice du pouvoir de révision constitutionnelle ; la plupart de ces attributions sont exercées conjointement par le Sénat.

154.À l’issue des élections législatives en juin 2012, 155 femmes ont été élues. Elles représentent désormais 27 % des députés, le taux le plus élevé jusque-là puisqu’elles étaient 19,5 % en 2007, 13 % en 2002 et 9,5 % en 1997.

b)Le Sénat

155.Les 348 sénateurs sont élus pour six ans au suffrage universel indirect, soit par 150 000 grands électeurs (députés, sénateurs, conseillers régionaux, conseillers départementaux, conseillers à l’assemblée de Corse, de Guyane et de Martinique, délégués des conseils municipaux). Ces grands électeurs sont les seuls à avoir l’obligation de voter, sous peine de devoir s’acquitter d’une amende de 100 euros.

156.Le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales de la République, le nombre de représentant de chaque collectivité variant en fonction de sa population. Le type de scrutin dépend du nombre de sénateurs à élire dans une circonscription : scrutin uninominal ou plurinominal majoritaire à deux tours (élection de un à deux sénateurs), ou scrutin de liste proportionnel (élection de trois sénateurs ou plus).

157.Faisant partie du Parlement, il participe à l’exercice de toutes les compétences que la Constitution confère à celui-ci. Tout comme le Gouvernement et les députés, les sénateurs ont l’initiative des lois. Le Sénat discute et vote les lois ; cependant, lorsque le Sénat et l’Assemblée nationale ne parviennent pas à se mettre d’accord, le Gouvernement peut demander à cette dernière de statuer définitivement. Le Sénat participe au contrôle parlementaire de l’activité gouvernementale mais il ne peut sanctionner son contrôle par la mise en cause de la responsabilité du gouvernement.

3.L’équilibre institutionnel

158.La Constitution du 4 octobre 1958 assure l’équilibre institutionnel par une séparation souple des pouvoirs exécutif et législatif.

159.D’une part, le pouvoir exécutif peut être mis en cause par le pouvoir législatif.

160.Deux procédés traditionnels permettent la mise en cause de la responsabilité du Gouvernement : la motion de censure et la question de confiance (titre V). L’Assemblée nationale met en cause la responsabilité du Gouvernement par une motion de censure ; son adoption entraîne pour le Premier Ministre l’obligation de remettre au Président de la République la démission du Gouvernement. Avec la question de confiance, c’est le Gouvernement qui prend l’initiative d’engager sa responsabilité. Il peut le faire à propos de son programme et d’une déclaration de politique générale. Dans cette hypothèse, s’il n’a pas obtenu la majorité, il devra démissionner. Une fois par session parlementaire, il peut aussi le faire à propos de l’adoption d’un texte : ce texte sera considéré comme adopté sauf si une motion de censure, déposée dans les 24 heures qui suivent, est votée.

161.Le Président de la République peut également voir sa responsabilité engagée. S’il manque à ses devoirs de manière manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat, le Parlement constitué en Haute Cour peut le destituer (art. 68).

162.D’autre part, le pouvoir législatif peut être mis en cause par le pouvoir exécutif. En effet, le Président de la République détient le droit de dissolution de l’Assemblée nationale (art. 12), qu’il exerce sans contreseing. Dans l’hypothèse d’une dissolution, des élections générales ont lieu 20 jours au moins et 40 jours au plus après la dissolution. La nouvelle Assemblée ne peut être dissoute dans l’année suivant son élection.

C.Les organes juridictionnels

1.L’organisation juridictionnelle française

163.La France connait deux ordres de juridiction : l’ordre judiciaire, pour régler les litiges entre des personnes privées ou pour sanctionner les auteurs d’infractions aux lois pénales ; et l’ordre administratif, pour régler les litiges entre l’Administration et les administrés. Au sein de chacun de ces ordres, il existe un double degré de juridiction et une instance de cassation.

a)Schéma de la pyramide des juridictions en France

164.On remarquera qu’aux juridictions de l’ordre administratif présentées ci-dessus s’ajoutent les juridictions administratives spécialisées : les chambres régionales des comptes, la Cour des comptes, la Cour de discipline budgétaire et financière, les juridictions des ordres professionnels, la Cour nationale du droit d’asile, la Commission départementale d’aide sociale, la Section disciplinaire des ordres professionnels, etc..

b)L’ordre judiciaire

i)Compétences des juridictions de l’ordre judiciaire

165.Les juridictions de l’ordre judiciaire sont compétentes pour régler les litiges opposant les personnes privées en matière civile, et pour sanctionner les auteurs d’infractions.

166.Les juridictions civiles tranchent les litiges entre particuliers et ordonnent la réparation du préjudice subi, mais elles n’infligent pas de peines. Les litiges entre salariés et employeurs, les litiges entre commerçants, les litiges entre organismes de sécurité sociale et personnes qui y sont affiliées et les litiges entre propriétaires et exploitants agricoles sont examinés par des juridictions spécialisées. Les juges de ces tribunaux sont en partie composés de juges non professionnels, qui ne sont donc pas des magistrats. Ces tribunaux sont composés de juges non professionnels, en tout (conseil des prudhommes, tribunal de commerce) ou en partie (tribunal des affaires de la sécurité sociale, tribunal paritaire des baux ruraux). Les juridictions pénales jugent les personnes accusées d’avoir commis une infraction aux lois pénales (contravention, délit ou crime) et peuvent infliger des peines qui varient selon la gravité de l’infraction, allant de l’amende à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté.

167.Grâce au double degré de juridiction, un justiciable peut contester une décision rendue par une juridiction de l’ordre judiciaire devant une nouvelle juridiction du même ordre. Cette juridiction est une cour d’appel, sauf quand la juridiction de première instance était une cour d’assises, auquel cas l’affaire sera rejugée devant une nouvelle cour d’assises. La cour d’appel réexamine l’affaire en fait et en droit. La partie qui estime que l’arrêt rendu par la Cour d’appel ne serait pas conforme aux règles de droit peut former un pourvoi devant la Cour de cassation. Cette dernière ne rejugera pas l’affaire mais vérifiera la conformité de la décision contestée aux règles de droit.

Les juridictions civiles du premier degré

168.Les juridictions de l’ordre judiciaire comprennent des juridictions du premier degré, de droit commun ou spécialisées.

169.Parmi les juridictions civiles non spécialisées figurent:

•Les juges de proximité, juridictions compétentes pour les litiges dont le montant de la demande est inférieur à 4 000 €;

•Les tribunaux d’instance, juridictions compétentes pour les litiges dont le montant de la demande est compris entre 4 000 et 10 000 € et pour les litiges portant sur le crédit à la consommation, les litiges entre locataires et propriétaires, les litiges liés aux élections professionnelles et ceux liés à l’exercice de servitudes ;

•Les tribunaux de grande instance, juridictions de droit commun compétentes pour tous les litiges dont le montant de la demande est supérieur à 10 000 € ainsi que pour les litiges qui ne sont pas réservés par la loi à une juridiction spécialisée. Ils ont également compétence exclusive pour certains litiges, quel que soit le montant de la demande, dans le domaine de la famille, de l’état des personnes, du droit immobilier, des brevets et des actions possessoires.

170.Les juridictions spécialisées comprennent :

•Les tribunaux de commerce : juridictions professionnelles spécialisées, composées de juges élus suivant un scrutin à deux degrés ;

•Les conseils de prud’hommes : juridictions électives et paritaires, ils règlent par voie de conciliation des différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu’ils emploient. Ils jugent les différends à l’égard desquels la conciliation n’a pas abouti ;

•Les tribunaux des affaires de la Sécurité sociale : ils statuent sur les différends auxquels donne lieu l’application des législations et réglementations de sécurité sociale qui ne relèvent pas, par leur nature, d’un autre contentieux ;

•Les tribunaux paritaires des baux ruraux sont compétents en matière de contestations entre bailleurs et preneurs de baux ruraux relatives à l’application des titres 1 et 4 du Code rural.

Les juridictions pénales du premier degré

171.Le juge d’instruction est un juge du tribunal de grande instance chargé de rassembler les informations nécessaires sur les faits dont il a été saisi. Si suite à son enquête il apparait qu’une personne a participé à la commission de ces faits, elle est mise en examen afin de rechercher s’il existe des charges suffisantes pour la renvoyer devant une juridiction de jugement. L’instruction peut être obligatoire, facultative ou inexistante selon la gravité des faits. Le juge de la liberté et de la détention est un magistrat de haut rang intervenant pendant l’instruction pour se prononcer sur la mise en détention ou sur la mise en liberté du prévenu, si celui-ci est détenu de manière préventive.

172.Le juge de proximité est compétent pour statuer sur les contraventions des quatre premières classes et le tribunal de police, formation spéciale du tribunal d’instance statuant à juge unique, est compétent pour les contraventions d’une gravité supérieure. Le tribunal correctionnel, formation spéciale du tribunal de grande instance, est compétent pour juger des délits et la cour d’assises pour juger des crimes.

173.La cour d’assises est une juridiction non permanente située soit au siège de la cour d’appel soit au siège du tribunal de grande instance du chef-lieu du département. Elle est compétente pour juger les crimes commis par les personnes majeures et par les mineurs de 16 à 18 ans, mais elle obéit alors à des règles différentes en ce qui concerne sa composition et le prononcé des peines (voire plus bas). En première instance, la cour d’assises est composée de trois juges professionnels et de six jurés tirés au sort en première instance. Les crimes de terrorisme, militaires ou relatifs au trafic de drogue sont jugés par une cour d’assises spéciale. Les jurés y sont remplacés par des magistrats professionnels.

174.Des juridictions spécialisées sont chargées de juger les mineurs :

•Le tribunal pour enfants, composé d’un juge des enfants et de deux assesseurs choisis parmi des personnes de trente ans et plus reconnus pour leur compétence vis-à-vis des problèmes de l’enfance. Il est compétent pour juger les contraventions les plus graves et les délits commis par toute personne de moins de 18 ans, les crimes commis par les personnes âgées moins de 16 ans au moment des faits.

•Le juge des enfants, dont la compétence est la même que celle du tribunal pour enfants, mais qui ne peut infliger de peine.

•La cour d’assises des mineurs, composée de trois magistrats : le président de la cour d’assises et deux assesseurs, généralement des juges des enfants. Elle est compétente en matière criminelle pour les personnes âgées de 16 à 18 ans au moment des faits.

Les juridictions militaires

175.En matière civile, les tribunaux aux armées assurent la justice militaire auprès des armées stationnées hors de France.

176.En matières pénale et en temps de paix, un tribunal correctionnel et une cour d’assises spécialement composés sont compétents dans le ressort de chaque cour d’appel pour le jugement des crimes et délits militaires ou commis par des militaires (Code de justice militaire), et des crimes et délits contre la sureté de l’État (Code de procédure pénale).

177.En temps de guerre, des tribunaux territoriaux des forces armées et des tribunaux militaires aux armées peuvent être établis, respectivement pour exercer la justice militaire sur et hors du territoire français.

Les cours d’appel et leurs formations particulières, juridictions du second degré

178.Les cours d’appel sont les seules juridictions compétentes pour statuer sur les décisions rendues à charge d’appel par toutes les juridictions civiles ou pénales de première instance dans leur ressort, de droit commun ou spécialisées.

179.La chambre de l’instruction est une chambre spécialisée de la cour d’appel. Elle examine la régularité des actes de l’instruction et statue sur les appels relevés contre les ordonnances juridictionnelles du juge d’instruction. Elle connait également des appels formés contre les ordonnances du juge des libertés et de la détention.

180.La chambre des appels correctionnels est une chambre spécialisée de la cour d’appel connaissant des appels interjetés contre les jugements rendus par le tribunal de police et le tribunal correctionnel.

181.Depuis le 1er janvier 2001, les arrêts rendus par une cour d’assises peuvent être contestés. L’appel est porté devant une autre cour d’assises, composée cette fois de neuf jurés, qui réexamine l’affaire en faits et en droit. L’arrêt de la cour d’assises « d’appel » peut lui-même faire l’objet d’un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation, juridiction suprême

182.Juridiction placée au sommet de la hiérarchie judiciaire, elle a pour rôle d’assurer une interprétation exacte et uniforme de la loi par le contrôle qu’elle exerce, en droit, sur les décisions rendues en dernier ressort.

ii)Le principe d’indépendance de l’autorité judiciaire (titre VIII de la Constitution)

183.L’indépendance de l’autorité judiciaire, principe à valeur constitutionnelle, est garantie par la Constitution (art. 64). L’indépendance de l’autorité judiciaire tient essentiellement au statut des magistrats, notamment du siège.

184.Les magistrats du siège sont inamovibles, leur inamovibilité est garantie par la Constitution en son article 64 et qui est rappelée par l’article 4 de l’ordonnance no 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée relative au statut de la magistrature. En conséquence, le magistrat du siège ne peut recevoir, sans son consentement, une affectation nouvelle, même en avancement. Les intéressés ne peuvent en outre recevoir d’instruction et décident en toute liberté dans l’exercice de leurs fonctions, dans les limites fixées par la loi, le justiciable disposant dans la plupart des cas de la faculté d’interjeter appel de ces décisions.

185.L’article 5 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 concerne les magistrats du parquet. Ce ne sont pas des juges. Membres du ministère public, ils exercent l’action publique et requièrent l’application de la loi. En matière pénale ils interviennent pour représenter l’intérêt de la société, et en matière civile pour défendre l’ordre public. Ils sont également chargés d’appliquer la politique pénale du Gouvernement. L’ordonnance du 22 décembre 1958 dispose ainsi que les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques (Procureur de la République pour les tribunaux de grande instance, Procureur général pour les cours d’appel et à la Cour de cassation) et sous l’autorité du Ministre de la justice. Néanmoins, depuis le 25 juillet 2013, ils ne peuvent plus recevoir d’instruction dans des affaires individuelles, et leur parole est libre à l’audience.

iii)Le Conseil supérieur de la magistrature

186.Institué par la Constitution, le Conseil supérieur de la magistrature intervient pour la nomination des magistrats, en présentant une proposition au Président de la République (s’agissant des magistrats du siège à la Cour de cassation, du Premier Président de la Cour d’appel ou du Président du Tribunal de grande instance), en émettant un avis conforme (s’agissant des autres magistrats du siège) ou un avis simple (s’agissant des magistrats du parquet, à l’exception des procureurs généraux).

187.Le ministre de la Justice seul a l’initiative de la poursuite disciplinaire. Il résulte de la Constitution dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle no 93-952 du 27 juillet 1993 portant révision de la Constitution, ainsi que de la loi organique du 5 février 1994 modifiant le statut de la magistrature, que le Conseil supérieur de la magistrature intervient en matière disciplinaire, suivant deux compositions différentes selon qu’il s’agit d’un magistrat du siège ou du parquet. La procédure, contradictoire, se déroule à huis clos. La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège statue comme conseil de discipline à leur égard. Sa décision est susceptible d’un recours devant le Conseil d’État. La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet donne son avis sur les sanctions disciplinaires les concernant. La décision, prise par le ministre de la Justice, est susceptible d’un recours devant le Conseil d’État.

c)L’ordre administratif

188.Les tribunaux administratifs, les cours administratives d’appel et le Conseil d’État jugent des litiges entre les particuliers et les pouvoirs publics (Gouvernement, collectivités territoriales, autorités indépendantes ou encore établissements publics). Le contrôle de l’administration garantit le respect du principe de légalité, fondement du droit administratif, et condition sine qua non de l’existence d’un État de droit. La loi des 16 et 24 août 1790 a consacré le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires. Ce principe a pour conséquence que le contrôle de l’administration ne relève pas de la compétence des juridictions judiciaires, mais de celle des juridictions administratives. Cette dualité d’ordre de juridiction est le corollaire de la summa divisio du droit français entre droit privé et droit public, et elle reflète la conception française de la séparation des pouvoirs.

189.Le Conseil d’État, juridiction administrative suprême, est la première juridiction administrative à avoir été créée, en 1799. Avant 1872, la justice était dite retenue : les décisions du Conseil d’État n’étaient pas exécutoires tant qu’elles n’avaient pas été signées par le chef de l’État. Avec la loi du 24 mai 1872, le système dit de la justice déléguée a définitivement été consacré : les décisions du Conseil d’État sont désormais exécutoires dès leur lecture, le chef de l’État n’ayant plus à les signer. Depuis lors, le juge administratif décide lui-même, « au nom du peuple français ». Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs inclus les principes d’indépendance de la juridiction administrative (décision no 80-119 DC du 22 juillet 1980, §6) et de la compétence exclusive de la juridiction administrative pour l’annulation des actes de la puissance publique (décision no 86-224 DC du 23 janvier 1987, §15) dans le « bloc de constitutionnalité » en leur reconnaissant la valeur de principe fondamental reconnu par les lois de la République. Outre cette réforme fondamentale, les améliorations qui se sont succédé depuis 1872, tantôt législatives, tantôt réglementaires, tantôt jurisprudentielles, ont poursuivi l’évolution qui a renforcé l’indépendance et la qualité de la justice administrative (recrutement, statut des membres des juridictions administratives, organisation et composition des formations contentieuses, etc.). Cette indépendance n’est pas remise en cause par l’exercice par le Conseil d’État de fonctions administratives comme conseil du pouvoir exécutif puisque les membres du Conseil d’État ayant pris part à la délibération d’un avis (fonction administrative) ne peuvent participer au jugement des recours dirigés contre les actes pris sur cet avis (fonction juridictionnelle).

190.Depuis 1889, l’organisation de la juridiction administrative a connu d’importants changements. Depuis 1953, la compétence de premier ressort de droit commun a été transférée du Conseil d’État vers les tribunaux administratifs et depuis 1987, la compétence d’appel de droit commun a été transférée du Conseil d’État vers les cours administratives d’appel. Désormais, le Conseil d’État est principalement un juge de cassation. Il connait ainsi en dernier ressort des recours formés contre les arrêts des cours administratives d’appel, contre les décisions des juridictions administratives spécialisées, et contre les décisions prises par le tribunaux administratifs dans certains litiges simples ou répétitifs définis par décret (litiges relatifs aux permis de conduire, aux pensions, à la notation ou à l’évaluation des fonctionnaires, etc.). Il juge en premier et en dernier ressort dans certains domaines définis par la loi (ex : recours contre les décrets, les actes réglementaires pris par les ministres, litiges relatifs aux élections régionales et européennes). De même, sa compétence d’appel se limite au contentieux des élections municipales et cantonales et à l’examen des questions préjudicielles en appréciation de la légalité ou en interprétation d’acte relevant de la compétence des tribunaux administratifs en premier ressort.

191.Certains litiges spécifiques relèvent de juridictions administratives spécialisées en première instance puis en appel :

•Le Conseil supérieur de la magistrature et les sections disciplinaires des ordres professionnels statuent disciplinairement sur la conduite des membres de certaines professions (architectes, commissaires aux comptes, médecins, chirurgiens-dentistes, pharmaciens, sages-femmes, vétérinaires…) ;

•Les commissions départementales et la commission centrale d’aide sociale, ainsi que les tribunaux départementaux et les cours régionales des pensions militaires d’invalidité, statuent en matière sociale ;

•La Cour nationale du droit d’asile est juge des décisions de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides, prises en matière de protection internationale ;

•Les chambres régionales des comptes et la Cour des comptes, ainsi que la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers, sont des juridictions financières.

192.Un recours devant le Conseil d’État peut être formé contre leurs décisions.

2.Les juridictions spéciales

193.Certaines juridictions n’entrent ni dans l’ordre judiciaire ni dans l’ordre administratif.

a)Le Tribunal des conflits

194.Le Tribunal des conflits a été institué par la Constitution de 1848. Il est désormais régi par la loi du 24 mai 1872 profondément modifiée par la loi du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. C’est une juridiction paritaire : elle est composée, dans sa formation ordinaire, de quatre membres du Conseil d’État, de quatre membres de la Cour de cassation, et de deux suppléants (l’un membre du Conseil d’État, l’autre de la Cour de Cassation). En cas de partage égal des voix, et après une nouvelle délibération, l’affaire est examinée en formation élargie. Dans cette hypothèse, deux membres du Conseil d’État et deux membres de la Cour de cassation viennent alors compléter la formation ordinaire. En outre, deux membres du Conseil d’État désignés parmi les rapporteurs publics et deux membres du parquet général près la Cour de cassation assurent la fonction de rapporteur public auprès du Tribunal des conflits.

195.Le Tribunal des conflits veille au respect du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires. Il a ainsi pour mission de résoudre les conflits de compétence entre les juridictions de l’ordre judiciaire et les juridictions de l’ordre administratif :

•Quand aucun ordre ne se reconnait compétent pour statuer sur une affaire ;

•Lorsque l’administration, en la personne du représentant de l’État dans le département, conteste la compétence d’un tribunal de l’ordre judiciaire pour juger d’une affaire dont ce dernier a été saisi ;

•Lorsqu’une juridiction de l’un ou l’autre ordre lui a renvoyé la question de compétence soulevée dans un litige ;

•Quand les deux ordres se sont prononcés et ont rendus des décisions contraires, conduisant à un déni de justice.

196.Le Tribunal peut être saisi, selon le cas, par les parties à l’instance, le représentant de l’État dans le département, le Conseil d’État, la Cour de cassation, ou la juridiction statuantaprès la juridiction de l’autre ordre ayant décliné sa compétence si elle estime elle-même ne pas être compétente, ou toute juridiction saisie d’un litige qui présente à juger une question de compétence soulevant une difficulté sérieuse et mettant en jeu la séparation des ordres de juridiction

197.Enfin, le Tribunal des conflits est compétent pour connaître d’une action en indemnisation du préjudice découlant d’une durée totale excessive des procédures afférentes à un même litige devant les juridictions des deux ordres, en raison des règles de compétence applicables.

b)Les juridictions réservées aux membres de l’exécutif : la Cour de justice de la République et la Haute Cour

i)La Cour de justice de la République (titre X, art. 68-1 à 68-3 de la Constitution)

198.Régie par la loi organique no 93-1252 du 23 novembre 1993, la Cour de justice de la République est chargée de juger les membres du Gouvernement pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions et qualifiés de crimes ou de délits au moment où ils ont été commis.

199.La Cour de justice de la République comprend quinze juges : trois magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation, dont l’un préside la Cour de justice ;. douze parlementaires élus, en leur sein et en nombre égal, par l’Assemblée nationale et par le Sénat après chaque renouvellement général ou partiel de ces assemblées. Le ministère public près la Cour de justice de la République est exercé par le Procureur général près la Cour de cassation. Il est assisté du Premier avocat général et de deux avocats généraux désignés par le Procureur général.

200.Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit commis par un membre du Gouvernement dans l’exercice de ses fonctions peut porter plainte auprès d’une commission des requêtes. Cette commission ordonne soit le classement de la procédure, soit sa transmission au Procureur général près la Cour de cassation aux fins de saisine de la Cour de justice de la République. Le Procureur général près la Cour de cassation peut aussi saisir d’office la Cour de justice de la République sur avis conforme de la Commission des requêtes (art. 68-2).

ii)La Haute Cour (titre IX, art. 67 à 68 de la Constitution)

Régime de responsabilité du Président de la République

201.Tant que dure son mandat, le Président de la République ne peut pas être poursuivi pour des actes étrangers à ses fonctions et accomplis avant ou pendant son mandat ; il pourra l’être dès le mois suivant la cessation de ses fonctions (art. 67). On parle d’inviolabilité temporaire du Président de la République. En revanche, que cela soit pendant ou après la fin de son mandat, le Président de la République ne peut pas être poursuivi pour les actes accomplis en sa qualité officielle. On parle d’immunité fonctionnelle du Président de la République.

202.Cette protection fonctionnelle peut cesser dans deux hypothèses :

•Il peut être poursuivi devant la Cour pénale internationale pour crime contre l’humanité, crime de génocide, crime de guerre et crime d’agression ;

•Il est susceptible d’être poursuivi devant des juridictions ordinaires si la Haute Cour prononce sa destitution pour « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ».

Rôle et fonctionnement de la Haute Cour

203.Créée par la loi constitutionnelle du 23 février 2007, cette juridiction est l’héritière de la Haute Cour de Justice, alors chargée de juger le Président de la République en cas de « haute trahison ». La Haute Cour est une formation particulière du Parlement, l’ensemble de ses membres se réunissant aux fins de décider de la destitution ou du maintien au pouvoir du Président de la République en cas de « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ».

204.La proposition de réunion de la Haute Cour doit être adoptée à la majorité des deux tiers des membres de chaque assemblée parlementaire. Présidée par le Président de l’Assemblée nationale, la Haute Cour statue sur la destitution dans un délai d’un mois, à bulletin secret, à la majorité des deux tiers.

3.Le Conseil constitutionnel, juge constitutionnel (titre VII, art. 56 de la Constitution)

a)La composition du Conseil constitutionnel

205.Outre ses attributions liées à l’exercice du suffrage et à la situation des titulaires d’un mandat électif, le Conseil constitutionnel est juge de la constitutionnalité d’un certain nombre de normes, en particulier les textes législatifs, les traités et les règlements des assemblées parlementaires. Il se compose de deux types de membres : les membres nommés et les membres de droit. Les membres nommés, au nombre de neuf, le sont pour un mandat de neuf ans non renouvelable. Ils sont renouvelés par tiers tous les trois ans. Trois sont désignés par le Président de la République, trois par le Président de l’Assemblée nationale et trois par le Président du Sénat. En sus des neuf membres précités, les anciens Présidents de la République font, de droit, partie à vie du Conseil constitutionnel.

206.Le Président du Conseil constitutionnel est nommé par le Président de la République ; il a voix prépondérante en cas de partage.

b)Les deux types de contrôle de constitutionnalité : le contrôle préventif et la question prioritaire de constitutionnalité

i)Les normes de référence pour le contrôle

207.Le « bloc de constitutionnalité », c’est-à-dire l’ensemble des normes dont le Conseil assure la protection et dont le respect s’impose au législateur, ne se limite pas au texte fondateur de la Ve République. Il comprend également, d’une part, les normes énoncées par la Constitution : la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le préambule de la Constitution de 1946, et la Charte de l’environnement de 2004 ; d’autre part, les normes dégagées par le Conseil constitutionnel au fil de sa jurisprudence : les Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et les Principes à valeur constitutionnelle.

ii)Le contrôle préventif ou a priori

208.Le juge de la régulation des compétences : comme précisé plus haut, le domaine de la loi est limité aux matières énoncées à l’article 34 de la Constitution, tout le reste relevant du domaine du règlement en vertu de l’article 37. Au cours de la procédure législative, s’il considère qu’une proposition ou un amendement n’est pas du domaine de la loi ou est contraire à une délégation accordée par le Parlement au Gouvernement en vertu de l’article 38, le Gouvernement ou le président de l’assemblée devant laquelle est discuté la proposition de loi ou l’amendement, peut opposer l’irrecevabilité du texte. En cas de désaccord entre le Gouvernement et le président de l’assemblée intéressée, le Conseil constitutionnel est saisi à la demande de l’un ou de l’autre (art. 41). Par ailleurs, le Conseil constitutionnel est saisi par le Gouvernement, lorsque ce dernier veut modifier par décret une disposition législative intervenue depuis l’entrée en vigueur de la Constitution de 1958 dans le domaine réglementaire (art. 37.2). Dans les deux cas, le Conseil constitutionnel détermine, par référence à la Constitution, la qualification législative ou réglementaire des matières sur lesquelles porte le texte.

209.Le juge de la constitutionnalité des normes: le Conseil a compétence pour se prononcer sur la conformité d’une norme infra constitutionnelle à la Constitution. Il doit être saisi avant la soumission au référendum des propositions de lois évoquées à l’article 11 de la Constitution (art. 61.1), avant l’entrée en vigueur des règlements des assemblées parlementaires (art. 61.1), avant la promulgation des lois organiques (art. 61.1). Il peut être saisi avant la promulgation des lois ordinaires (art. 61.2),des lois du pays adoptées par le congrès de la Nouvelle-Calédonie, et avant la ratification ou l’approbation des engagements internationaux (art. 54). Exceptionnellement, lorsqu’il est directement saisi, le Conseil constitutionnel peut se prononcer sur la constitutionnalité de lois déjà promulguées, au cours de l’examen de « dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine ».

210.La saisine du Conseil peut être obligatoire (art. 61.1) ou facultative (art. 61.2). Dans ce dernier cas, le Président de la République, le Premier ministre, le Président de l’Assemblée nationale et celui du Sénat, 60 députés ou 60 sénateurs peuvent déférer les lois au Conseil avant leur promulgation. Malgré le fait que cette saisine soit facultative, la plupart des lois revêtant une certaine importance sont soumises au contrôle du Conseil constitutionnel.

211.En principe, lorsqu’une norme est jugée non conforme à la Constitution, elle est privée d’existence juridique et ne peut entrer en application. Mais lorsque c’est un engagement international qui comporte une clause contraire à la Constitution, l’autorisation de le ratifier ou de l’approuver peut intervenir après révision de la Constitution. Les décisions du Conseil constitutionnel bénéficient de l’autorité de la chose jugée. Elles ne sont susceptibles d’aucun recours et elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles (art. 62).

iii)Le contrôle a posteriori : la question prioritaire de constitutionnalité (QPC)

212.Suite à la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, si un justiciable allègue une violation des droits et libertés constitutionnellement garantis par une disposition législative à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, le Conseil constitutionnel peut être saisi par la Cour de cassation ou le Conseil d’État par le biais d’un renvoi préjudiciel (art. 61-1). L’examen de la constitutionnalité d’une norme est « prioritaire » à celui de sa conventionnalité.

213.Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, erga omnes. La décision du Conseil n’est pas susceptible de recours et s’impose aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles (art. 62).

III.L’acceptation des normes internationales relatives aux droits de l’homme

214.Le Gouvernement joint en annexe au document de base commun les réserves faites aux Conventions ainsi que les explications les accompagnants.

A.Acceptation des principales normes internationales relatives aux droits de l’homme

Instrument international

Signature

Ratification/ adhésion et acceptation des amendements et procédures facultatives

Déclarations interprétatives et  réserves

Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) (1966)

-

4 novembre 1980

Déclarations interprétatives : art. 13, 14-5 ; 20-1 ; 19, 21, 22.

Réserves : art. 4-1, 9, 14 et 27.

Premier protocole facultatif se rapportant au PIDCP, concernant les communications émanant de particuliers (1966)

-

17 février 1984

Déclarations interprétatives : art. 1 et 7.

Réserves : art. 5-2 a).

Deuxième Protocole facultatif se rapportant au PIDCP, visant à abolir la peine de mort (1989)

-

2 octobre 2007

Non

Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) (1966)

-

4 novembre 1980

Déclarations interprétatives : art. 6, 9, 11 et 13 ; art. 8.

Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (2008)

11 décembre 2012

18 mars 2015

Non

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (1965)

-

Convention : 28 juillet 1971

Article 14 : 16 août 1982

Amendement art. 8 : 1er septembre 1994

Déclarations interprétatives : art. 4 et art. 15.

Déclaration : art. 6 et 14.

Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979)

17 juillet 1980

Convention : 14 décembre 1983

Amendement art. 20 §1 : 8 août 1997

Déclaration : §9 du préambule. Déclaration interprétative : art. 9 et 5.

Réserve : art. 29-1.

Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, concernant l’examen de communications et les procédures d’enquête (1999)

10 décembre 1999

9 juin 2000

Non

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (1984)

4 février 1985

Convention : 18 février 1986

Amendement art. 17 §7 et 18 §5 (non encore en vigueur) : 24 mai 1994

Réserve : art. 30-1.

Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, (2002)

16 septembre 2005

11 novembre 2008

Déclaration interprétative

Convention relative aux droits de l’enfant (1989)

26 janvier 1990

Convention : 7 août 1990

Amendement art. 43 §2 : 20 juin 1997

Déclarations interprétatives : art. 6 et 40-2 b V.

Réserve : art. 30.

Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (2000)

6 septembre 2000

5 février 2003

Déclaration

Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2000)

6 septembre 2000

5 février 2003

Non

Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications (2011)

20 novembre 2014

7 janvier 2016

Non

215.La France n’a ni signé ni ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, adoptée le 18 décembre 1990 et entrée en vigueur le 1er juillet 2003.

216.D’une part, certaines dispositions de cette Convention posent un certain nombre de principes non conformes à la législation interne.

217.Ainsi, son article 1er ne fait pas de distinction entre les travailleurs migrants en situation régulière et ceux qui se trouvent en situation irrégulière. Cette définition trouve sa traduction dans la partie 3 de la Convention (art. 8 à 35) qui prévoit un certain nombres de droits pour les travailleurs migrants indépendamment du caractère régulier de leur séjour, par opposition à la partie 4 de la Convention qui traite des « autres droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui sont pourvus de documents ou en situation régulière ».

218.Parmi les droits garantis par la partie 3, il est possible de citer les garanties en matière de conditions d’emploi et de rémunération (art. 25), de protection sociale (art. 27) ou d’accès aux soins (art. 28), lesquelles imposent aux États d’appliquer à ces travailleurs, sans que le caractère régulier du séjour ne soit exigé, la règle du « traitement national ». À titre d’exemple, l’article 25 de la Convention prévoit expressément dans son troisième alinéa, que les États doivent s’assurer que les travailleurs migrants ne se voient pas privés des droits liés au traitement national en matière de travail, d’emploi et de rémunération, en raison de l’irrégularité de leur situation en matière de séjour et d’emploi, privant ainsi d’effet l’incitation à la régularité du séjour. Par ailleurs, l’application de la règle du traitement national demeure actuellement limitée aux ressortissants des États membres de l’Union européenne et des pays tiers résidents de longue durée (cf. infra).

219.De même, l’article 31 de la Convention, qui prévoit « le respect de l’identité culturelle des travailleurs migrants et des membres de leur famille », pourrait être analysé comme heurtant le principe constitutionnel d’unité et d’indivisibilité de la République. En application des principes constitutionnels d’égalité de droits des citoyens, et d’unité et d’indivisibilité de la nation, qui portent à la fois sur le territoire et la population, la France adhère à la conception selon laquelle l’affirmation de l’identité est le résultat d’un choix personnel, non de critères applicables définissant a priori tel ou tel groupe.

220.D’autre part, les dispositions de la Convention entrant dans un champ de compétence de l’Union européenne, les États membres ne sont plus en droit d’y adhérer unilatéralement. Ainsi à ce jour, aucun État-membre de l’Union Européenne n’a signé cette convention.

221.Il faut toutefois souligner que les dispositions internes du droit français sont déjà protectrices des droits des travailleurs migrants. Les personnes en situation régulière disposent ainsi d’une protection nationale similaire à celle prévue par la Convention. De plus, les droits des travailleurs migrants en situation irrégulière ne sont pas ignorés dans la mesure où ces personnes se voient garantir des droits fondamentaux au titre de la Convention Européenne des sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et des autres instruments internationaux de protection des droits de l’homme auxquels la France est partie, tels que la Convention du Conseil de l’Europe relative au statut juridique du travailleur migrant de 1983 et la Convention no 97 de l’OIT sur les travailleurs migrants de 1949.

222.Enfin, la France mène un dialogue continu et constructif avec les organisations et États concernés par cette thématique. A titre d’illustration, la France soutient activement l’action de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), en particulier pour les questions relatives aux violations des droits de l’homme dans le cadre des migrations. Elle participe également activement au Forum global des migrants et au Forum mondial migration et développement.

B.Acceptation d’autres normes internationales relatives aux droits de l’homme

1.Acceptation d’autres instruments des Nations Unies

Instrument international

Signature

Ratification / adhésion et acceptation des amendements et  des procédures facultatives

Déclarations interprétatives et réserves

Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948)

11 décembre 1948

14 octobre 1950

Non

Convention relative à l’esclavage (1926)

-

28 mars 1931

Non

Protocole amendant la Convention relative à l’esclavage (1953)

14 janvier 1954

14 février 1963 (Acceptation, pas de ratification nécessaire)

Non

Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui (1950)

-

19 novembre 1960

Non

Convention relative au statut des réfugiés (1951)

11 septembre 1952

23 juin 1954

Déclaration interprétative : art. 17 et 29-2.

Protocole relatif au statut des réfugiés (1967)

-

3 février 1971

Non

Convention relative au statut des apatrides (1954)

12 janvier 1955

8 mars 1960

Déclaration interprétative : art. 10-2.

Convention sur la réduction des cas d’apatridie (1961)

31 mai 1962

Explication quant à l’absence de ratification figurant en annexe au document de base commun

Statut de Rome de la Cour pénale internationale (1998)

18 juillet 1998

9 juin 2000

Déclarations interprétatives : art. 8-2 b et c.

Déclaration : 87-2

Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (2000)

12 décembre 2000

29 octobre 2002

Non

Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (2000)

12 décembre 2000

29 octobre 2002

Non

Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, contre le trafic illicite de migrants par terre, mer et air, (2000)

12 décembre 2000

29 octobre 2002

Non

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (2006)

6 février 2007

23 septembre 2008

Non

Convention relative aux droits des personnes handicapées (2006)

30 mars 2007

18 février 2010

Déclaration interprétative : art. 15.

Déclaration : art. 29

Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées (2006)

23 septembre 2008

18 février 2010

Non

Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement (1960) (adoptée sous l’égide de l’UNESCO)

-

11 septembre 1961

Non

223.La France n’a ni signé ni ratifié la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, adoptée à New York le 26 novembre 1968 et entrée en vigueur le 11 novembre 1970.

224.Par ailleurs, elle a signé, mais n’a pas ratifié, la Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre qui a été adoptée sous l’égide du Conseil de l’Europe le 25 janvier 1974.

225.Cependant, le droit interne prévoit l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité, dont le génocide (art. 213-5 du Code pénal).

226.Les crimes de guerre sont quant à eux incriminés aux articles 461-1 et suivants du Code pénal ; et ce, depuis la loi du 9 août 2010 portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale. Bien que ces crimes ne soient pas imprescriptibles, le délai de prescription de l’action pénale ainsi que celui de l’exécution de la peine ont été allongés par cette loi. La prescription des crimes de guerre n’est ainsi plus de 10 ans mais de 30 ans ; celle des délits de guerre est passée 3 ans à 10 ans.

2.Acceptation des Conventions de l’OIT

Instrument international

Ratification /adhésion et acceptation des amendements et procédures facultatives

Remarques

Convention (no 14) sur le repos hebdomadaire (industrie), 1921

3 septembre 1926

Non

Convention (no 29) sur le travail forcé, 1930

24 juin 1937

Non

Convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947

16 décembre 1950

Non

Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948

28 juin 1951

Non

Convention (no 97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949

29 mars 1954

A exclu les dispositions de l’annexe II

Convention (no 98) sur le droit d’organi-sation et de négociation collective, 1949

26 octobre 1951

Non

Convention (no 100) sur l’égalité de rémunération, 1951

10 mars 1953

Non

Convention (no 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952

14 juin 1974

A accepté les parties II et IV à IX

Convention (no 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957

18 décembre 1969

Non

Convention (no 106) sur le repos hebdomadaire (commerce et bureaux), 1957

5 mai 1971

La convention s’applique également au personnel des établissements énumérés à l’article 3, paragraphe 1

Convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958

28 mai 1981

Non

Convention (no 118) sur l’égalité de traitement (sécurité sociale), 1962

13 mai 1974

A accepté les branches a) à d), f), g) et i)

Convention (no 122) sur la politique de l’emploi, 1964

5 août 1971

Non

Convention (no 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969

28 décembre 1972

Non

Convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970

28 décembre 1972

Non

Convention (no 132) sur les congés payés (révisée), 1970

Non

-

Convention (no 138) sur l’âge minimum, 1973

13 juillet 1990

Age minimum spécifié : 16 ans

Convention (no 143) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975

Non

-

Convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978

Non

-

Convention (no 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981

Non

-

Convention (no 156) sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales, 1981

16 mars 1989

Non

Convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989

Non

Explication quant à l’absence de signature et de ratification figurant en annexe au document de base commun

Convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999

11 septembre 2001

Non

Convention (no 183) sur la protection de la maternité, 2000

Non

3.Acceptation des Conventions de La Haye de droit international privé

Instrument international

Ratification et acceptation des amendements et des procédures facultatives

Déclarations interprétatives et  réserves

Convention pour régler les conflits entre la loi nationale et la loi du domicile (1955)

Non (signée le 25 juillet 1955)

Non

Convention sur la loi applicable aux obligations alimentaires envers les enfants 1956)

2 mai 1963

Notification quant à l’extension du champ d’application territorial de la Convention.

Convention concernant la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière d’obligations alimentaires envers les enfants (1958)

26 mai 1966

Notification quant à l’extension du champ d’application territorial de la Convention.

Convention concernant la compétence des autorités et la loi applicable en matière de protection des mineurs (1961)

11 septembre 1972

Notification quant à la levée de la réserve prévue à l’article 15.

Convention concernant la compétence des autorités, la loi applicable et la reconnaissance des décisions en matière d’adoption (1965)

Non

Non

Convention la loi applicable aux obligations alimentaires (1973)

19 juillet 1977

Non

Convention sur la reconnaissance des divorces et des séparations de corps (1970)

Non

Non

Convention concernant la reconnaissance et l’exécution de décisions relatives aux obligations alimentaires (1973)

19 juillet 1977

Non

Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants (1980)

16 septembre 1982

Déclaration : art. 39

Réserves : art. 24 et 26

Convention sur la célébration et la reconnaissance de la validité des mariages (1978)

Non

Non

Convention sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux (1978)

26 septembre 1979

Non

Convention tendant à faciliter l’accès international à la justice (1980)

22 décembre 1982

Déclaration : art. 33

Réserve : art. 1 et 7

Convention sur la loi applicable aux successions à cause de mort (1989)

Non

Non

Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale (1993)

30 juin 1998

Déclarations : art. 22-4, 23-2, 25, 45-1

Convention concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (1996)

15 octobre 2010

Déclaration interprétative : ensemble les articles 23, 26 et 52

Déclaration : art. 34-2 et 52-1

Convention sur la protection internationale des adultes (2000)

18 septembre 2008

Déclaration : art. 32-2

Convention sur le recouvrement international des aliments destinés aux enfants et à d’autres membres de la famille (2007)

1er aout 2014

(du fait de l’adhésion par l’Union européenne)

Déclaration : La France est liée par la Convention du fait de l’approbation de l’Union européenne

Déclaration de l’UE : art. 59-3, 2-3, 11-1 g

Réserve de l’UE : 44-3

Déclaration unilatérale de l’UE étendant l’application des chapitres II et III aux obligations alimentaires entre époux et ex-époux et indiquant la future possibilité d’étendre l’ensemble de la convention à toutes les obligations découlant de relation de famille, de filiation, de mariage ou d’alliance.

Protocole du 23 novembre 2007 sur la loi applicable aux obligations alimentaires

1er aout 2013 (du fait de son approbation par l’UE)

Déclaration : art. 24

4.Acceptation des Conventions de Genève et autres traités relatifs au droit international humanitaire

Instrument international

Ratification / adhésion et acceptation des amendements et procédures facultatives

Déclarations interprétatives et réserves

Convention (I) de Genève pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne (1949)

28 juin 1951

Non

Convention (II) de Genève pour l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer (1949)

28 juin 1951

Non

Convention (III) de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre (1949)

28 juin 1951

Non

Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre (1949)

28 juin 1951

Non

Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I) (1977)

11 avril 2001

Réserves et déclarations interprétatives

Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II) (1977)

22 février 1984

Déclaration expliquant le refus d’adhérer au Protocole I

Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à l’adoption d’un signe distinctif additionnel (Protocole III)

17 juillet 2009

Non

Convention relative aux droits de l’enfant (1989)

7 aout 1990

Déclaration interprétative : art. 6, 40-2 b V

Réserve : Inapplication de l’article 30

Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (2000)

5 février 2003

Déclaration sur le recrutement de candidats volontaire de 17 ans avec le consentement des représentants légaux

Convention d’Ottawa sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction (1987)

23 juillet 1998

Non

C.Acceptation d’instruments régionaux relatifs aux droits de l’homme

227.Au sein du Conseil de l’Europe, la France a ratifié 135 accords, nombre d’entre eux ayant rapport aux droits de l’homme.

Instrument international

Signature

Ratification/ adhésion et acceptation des amendements et  procédures facultatives

Déclarations interprétatives et réserves

Statut du Conseil de l’Europe

5 mai 1949

4 août 1949

Non

Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (1950)

4 novembre 1950

3 mai 1974

Déclaration : art. 56.

Réserves : art. 5, 6 et 15-1.

Protocole no 6 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales concernant l’abolition de la peine de mort (1983)

28 avril 1983

17 février 1986

Non

Protocole no 13 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances

3 mai 2002

10 octobre 2007

Non

Charte sociale européenne modifiée (1996) et Protocole additionnel prévoyant un système de réclamations collectives (1988)

3 mai 1996 et 22 juin 1989

7 mai 1999

Non

Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (2000)

7 décembre 2000

Ratifiée le 14 février 2008 et entrée en vigueur le 1er décembre 2009, en même temps que le Traité de Lisbonne

Non

Convention européenne pour la prévention de la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants (1987)

26 novembre 1987

9 janvier 1989

Non

Convention européenne sur l’exercice des droits des enfants (1996)

6 juin 1996

19 septembre 2007

Déclaration : art. 1-4. Déclaration interprétative : art. 2b.

Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (2005)

22 mai 2006

9 janvier 2008

Réserves : art. 31-1 d et e

IV.Le cadre juridique de la protection des droits de l’homme à l’échelon national

A.La protection des droits énoncés dans les instruments internationaux en droit interne

1.Les droits garantis

a)Les droits garantis par le bloc de constitutionnalité

228.Le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 réaffirme l’attachement du peuple français à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946. L’ensemble de ces textes a valeur constitutionnelle. La Constitution reconnaît également l’égalité devant la loi des citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion, ainsi que la liberté de croyance (art. 1), la liberté de se regrouper dans un but politique (art. 4), la sûreté ou liberté individuelle (art. 66) et l’interdiction de la peine de mort (art. 66-1).

229.À travers sa jurisprudence, le Conseil constitutionnel a également affirmé la valeur constitutionnelle de droits et libertés fondamentaux :

•De la dignité de la personne humaine ;

•De différentes composantes de la liberté : la liberté individuelle, la liberté d’aller et venir, le droit au respect de la vie privée, la liberté d’expression, la liberté de communication, la liberté d’association, la liberté syndicale, le droit de grève, la liberté d’enseignement et de recherche, le droit de propriété ;

•De différentes composantes de l’égalité : l’égalité devant la loi fiscale, l’égalité devant les hommes et les femmes ;

•De droits sociaux : le droit au travail, le droit à la santé, le droit à un logement décent ;

•Des droits des étrangers, du droit d’asile ;

•Des garanties des droits des justiciables : l’indépendance de la justice, la légalité des délits et des peines, la non-rétroactivité de la loi pénale plus dure, les droits de la défense, la présomption d’innocence, la nécessité et la proportionnalité des peines, l’individualisation des peines.

b)Les droits garantis par la loi

230.Des dispositions législatives sont venues développer et renforcer la protection de certains droits en conformité avec les traités internationaux ratifiés par la France.

i)Condamnation des crimes contre l’humanité

231.La France a ratifié la Convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide.

232.Les crimes contre l’humanité (art. 211-1 et s. du Code pénal), leur apologie (art. 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) et la contestation de leur existence (art. 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) sont pénalement sanctionnés, respectivement de la réclusion criminelle à perpétuité ; de cinq ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ; et d’un an d’emprisonnement et/ou de 45 000 euros d’amende. L’action publique relative à ces crimes ainsi que les peines prononcées sont imprescriptibles (art. 213-5 du Code pénal).

233.Le tribunal de grande instance de Paris a créé, en janvier 2012, un pôle spécialisé pour lutter contre les crimes contre l’humanité, les délits de guerre et les crimes de guerre. Actuellement, 33 procédures d’instruction sont suivies par le pôle spécialisé, dont 27 concernent le génocide commis au Rwanda en 1994. De plus, le 7 novembre 2013, un office central de lutte contre les crimes contre l’humanité, les génocides et les crimes de guerre, rattaché à la police judiciaire a été créé. L’office est ainsi compétent pour lutter contre ces actes mais aussi pour rechercher les personnes soupçonnées de les avoir commis, dès lors qu’elles sont susceptibles de se trouver sur le territoire français ou que les juridictions françaises sont compétentes.

ii)Droit à la vie

234.La France a adhéré à la Convention européenne des droits de l’homme protégeant le droit à la vie en son article 2. Elle a ratifié le deuxième Protocole facultatif au PIDCP visant à abolir la peine de mort, le Protocole no 6 à la Convention européenne des droits de l’homme concernant l’abolition de la peine de mort, puis le Protocole no 13 à la même Convention relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances.

235.La loi no 81-908 du 9 octobre 1981 porte abolition de la peine de mort. Cet acquis a été constitutionnalisé par la loi constitutionnelle no 2007-239 du 23 février 2007 relative à l’interdiction de la peine de mort.

iii)Droit de ne pas être soumis à la torture et aux traitements inhumains et dégradants

236.La France a ratifié la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, son Protocole et la Convention européenne pour la prévention de la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

237.Conformément à l’exigence de la Convention des Nations Unies, l’article 72 de la loi no 85-1407 du 30 décembre 1985, intégré au Code de procédure pénale (art. 689-2) introduit la règle de la compétence universelle des juridictions internes en matière de torture. Cela signifie que les juridictions pénales françaises sont compétentes y compris pour les actes commis hors du territoire français, que l’auteur de l’acte de torture soit ou non de nationalité française.

238.Les actes de torture et de barbarie sont punis de 15 ans de réclusion criminelle, avec une possible augmentation en cas de circonstances aggravantes. La commission d’autres crimes avant, pendant ou après ces actes porte la peine à la réclusion criminelle à perpétuité (art. 221-1 et suivants du Code pénal). La législation française punit de la réclusion criminelle à perpétuité l’emploi de la torture par des malfaiteurs pour l’exécution de leurs crimes (art. 222-2 du Code pénal), de même que la torture accompagnant un viol (art. 222-26 du Code pénal) ou un meurtre (art. 221-2 du Code pénal). Parmi les circonstances aggravantes, figure notamment le fait que l’auteur est une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public dans l’exercice de ses fonctions (art. 222-3 7, 222-8 7, 222-10 7, 222-12 7 et 222-13 7 du Code pénal).

239.Lutte contre les violences faites aux femmes : la lutte contre les violences commises à l’encontre des femmes est une priorité des pouvoirs publics.

240.Une loi relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants a été adoptée le 9 juillet 2010. Cette loi comprend des dispositions visant à renforcer la protection des victimes, la prévention et la répression des auteurs de ces violences. La loi prévoit notamment la mise en place d’une ordonnance de protection des victimes de violence, qui permet l’éviction immédiate du conjoint violent, parfois assortie du port d’un bracelet électronique. La loi prévoit en outre l’octroi ou le renouvellement du titre de séjour aux femmes venues en France au titre du regroupement familial et bénéficiant d’une ordonnance de protection, même si elles se sont séparées de leur mari en raison de violences. Cette loi organise également la délivrance de la carte de séjour temporaire aux personnes en situation irrégulière bénéficiant d’une ordonnance de protection.

241.En janvier 2013, une Mission interministérielle de protection des femmes contre les violences et de lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF) s’est vue confier une fonction d’observatoire national des violences faites aux femmes. A ce titre, elle est chargée de rassembler, d’analyser et de diffuser les informations et données relatives à ce sujet, afin d’organiser la prévention de telles violences, ainsi que la protection et l’accompagnement des victimes.

242.La loi du 6 août 2012 a instauré par ailleurs une nouvelle définition plus précise et plus large du harcèlement sexuel à la fois dans le code pénal, dans le Code du travail et au sein du statut de la fonction publique, assortie de sanctions plus lourdes, en conformité avec le droit européen.

243.Lutte contre les violences faites aux enfants : la protection des enfants contre les violences, notamment familiales, est prise en compte par les pouvoirs publics. Un plan de lutte contre les violences a ainsi été élaboré afin d’améliorer la prise en compte du phénomène des enfants exposés aux violences au sein du couple via la diffusion de recommandations à destination des pouvoirs publics et des professionnels concernés.

244.Le quatrième plan de lutte contre les violences faites aux femmes (2014-2016) a poursuivi cette démarche et a été construit sur un plus petit nombre de priorités que le précédent, sur lesquelles le Gouvernement s’engage et dont il sera comptable notamment à l’égard du Parlement. Ses objectifs sont ainsi de :

•Organiser l’action publique autour d’un principe d’action simple : aucune violence déclarée ne doit rester sans réponse;

•Protéger les victimes;

•Mobiliser l’ensemble de la société.

iv)Droit de ne pas être soumis à l’esclavage

245.La France a ratifié la Convention relative à l’esclavage amendée par le Protocole de 1953.

246.Outre le fait qu’elle est pénalement punie de vingt ans de réclusion criminelle, la réduction d’une personne en esclavage est considérée comme un crime contre l’humanité en droit français. L’exploitation sexuelle d’une personne réduite en esclavage est également punie de vingt ans de réclusion criminelle. L’accomplissement d’autres crimes porte la durée de la réclusion à trente ans. Des circonstances aggravantes peuvent porter la durée de la peine de réclusion à la perpétuité (art.224-1 A et suivants du Code pénal).

247.Un Comité pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage a été institué à la suite de la loi du 21 mai 2001. Il a pour mission d’émettre des avis et des recommandations au Gouvernement sur les questions relatives à la recherche, l’enseignement, la conservation, la diffusion ou la transmission de l’histoire et des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition. Il peut être saisi d’une question par le Premier ministre ou les ministres intéressés, ou s’en saisir lui-même.

v)Droit de ne pas être discriminé

Dispositions générales

248.La France a ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, ainsi que la Convention européenne des droits de l’homme et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne qui prohibent tout type de discrimination, respectivement en leurs articles 14 et 21.

249.La loi no 72-546 du 1er juillet 1972 relative à la lutte contre le racisme punit la provocation à la discrimination, la diffamation envers une personne en raison de son origine, de son appartenance ou de sa non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, ou l’injure à une personne pour les mêmes raisons. La loi no 2001-1066 du 16 novembre 2001 concerne la lutte contre les discriminations dans des situations très diverses : à l’embauche, pour une sanction ou un licenciement, sur le lieu de travail, dans l’affiliation à la sécurité sociale, pour l’établissement des listes électorales. La loi no 2003-88 du 3 février 2003 a aggravé les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe. Ces dispositions ont été insérées dans le Code pénal.

250.L’article 225-1 du Code pénal punit les comportements discriminatoires à l’égard de personnes physiques et de personnes morales à raison de leurs membres. Le champ des comportements sanctionnés est particulièrement étendu, puisqu’il concerne les discriminations fondées sur l’origine, le sexe, la situation de famille, la grossesse, l’apparence physique, le patronyme, l’état de santé, le handicap, les caractéristiques génétiques, les mœurs, l’orientation ou identité sexuelle, l’âge, les opinions politiques et l’appartenance syndicale, et l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

251.La lutte contre la discrimination dans l’emploi et la garantie de l’égal accès à l’emploi pour toute personne, quelles que soient ses origines nationale, raciale, ethnique ou religieuse demeure une priorité des pouvoirs publics français. L’article 225-2 du Code pénal énumère ainsi les comportements discriminatoires liés au monde du travail, qui peuvent consister :

•À refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ;

•À entraver l’exercice normal d’une activité économique quelconque ;

•À refuser d’embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne ;

•À subordonner la fourniture d’un bien ou d’un service à une condition discriminatoire ;

•À subordonner une offre d’emploi, de stage ou de formation à une condition discriminatoire ;

•À refuser d’accepter une personne à un stage.

252.Les diffamations et injures à caractère discriminatoires, les propos discriminatoires et les provocations à la discrimination sont pénalement punis, fussent-ils commis dans le cadre privé, publiquement ou par voie de presse (art. 225-18, R. 624-3 et s. et R. 625-7 du Code pénal, et loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse). Par ailleurs, la commission d’un crime ou un délit fondée sur un motif discriminatoire est une circonstance aggravante entrainant l’élévation de la peine (art. 132-77 du Code pénal).

253.L’article 432-7 du Code pénal a pour objet de réprimer les comportements discriminatoires qui sont le fait d’agents publics ou, de manière générale, de tout dépositaire de l’autorité publique ou citoyen chargé d’un service public. Cet article punit de peines correctionnelles la personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public qui commet la discrimination de l’article 225-1 du Code pénal consistant à refuser le bénéfice d’un droit accordé par la loi ou à entraver l’exercice normal d’une activité économique quelconque.

254.La lutte contre le racisme, la xénophobie et l’antisémitisme est une priorité de l’action gouvernementale. Un dispositif interministériel, réuni au sein du Comité interministériel de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, établit chaque année un rapport d’activité remis au Premier ministre. La France a adopté un Plan national d’action contre le racisme et l’antisémitisme en février 2012 et a nommé un délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme ; ce Plan répond aux recommandations du Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale d’août 2010. Un nouveau plan a été élaboré pour les années 2015-2017. Par ailleurs, la Commission nationale consultative des droits de l’homme produit un rapport annuel sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie remis au Premier Ministre.

Associations et discriminations

255.Les dispositions de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations permettent la dissolution judiciaire des associations dont les statuts ou les activités seraient contraires aux lois et, partant, toute association contraire à la loi du 1er juillet 1972 relative à la lutte contre le racisme est susceptible d’être dissoute.

256.Le Code de procédure pénale permet aux associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits d’exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne diverses infractions commises pour des raisons discriminatoires, quand ces associations se proposent par leurs statuts de combattre les discriminations fondées sur le sexe, les mœurs, l’orientation sexuelle ou l’identité sexuelle (art. 2-6) , les discriminations raciale, ethnique, raciale ou religieuse (art. 2-1), les crimes contre l’humanité (art. 2-4), etc.

257.La loi no 90-615 du 13 juillet 1990 a créé une incrimination destinée à lutter contre certaines formes de falsification de l’histoire contemporaine. La loi prévoit des peines complémentaires facultatives pour les délits à caractère raciste. Cette loi institue un droit de réponse tant dans la presse écrite que dans la presse audiovisuelle au profit des associations de lutte contre le racisme lorsqu’une personne fait l’objet d’imputations susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à sa réputation en raison de son origine ou de son appartenance ou de sa non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

Lutte contre la discrimination à l’égard des femmes et discrimination positive

258.La France a ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui a valeur constitutionnelle, stipule que « (...) tout être humain, sans distinction de race, de religion, ni de croyance, possède des droits individuels et sacrés » puis surtout, que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme ».

259.Symbole de l’engagement accru de la France à la lutte pour l’égalité entre les hommes et les femmes, un Ministère des Droits des femmes a été créé en 2012 (inclus au sein du Ministère des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes depuis le 11 février 2016). Il prépare et met en œuvre la politique du Gouvernement relative aux droits des femmes, à la parité et à l’égalité professionnelle. Il est chargé de promouvoir les mesures destinées à faire respecter les droits des femmes dans la société, à faire disparaître toute discrimination à leur égard et à accroître les garanties d’égalité dans les domaines politique, économique, professionnel, éducatif, social, sanitaire et culturel. Dans ces domaines, il prépare, avec les autres ministères compétents, les mesures visant à assurer le respect des droits des femmes, la protection effective des femmes victimes de violence et la lutte contre le harcèlement. Le 30 novembre 2012, s’est tenu le Comité interministériel aux droits des femmes. Il a permis de définir un plan d’actions 2013-2017 mettant les droits des femmes au cœur de toutes les politiques publiques.

260.Egal accès à l’éducation : la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes est mise en œuvre dans les politiques d’éducation nationale. Le principe de mixité est ainsi inscrit dans le Code de l’éducation.

261.Le Ministère de l’Education nationale a signé des conventions avec plusieurs associations afin de faire découvrir aux jeunes filles des métiers scientifiques. Par ailleurs, une brochure ministérielle intitulée « Filles et garçons sur le chemin de l’égalité de l’école à l’enseignement supérieur» a été publiée à l’occasion de la Journée de la femme, le 8 mars 2012. L’édition 2016 d’une telle brochure est également disponible.

262.Egal accès à l’emploi : la loi du 11 juillet 1975, complétée par la loi du 25 juillet 1985, insère dans le Code pénal des dispositions réprimant les discriminations à l’égard des femmes dont se rendraient coupables tant un représentant de l’État qu’un particulier.

263.La loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose qu’aucune distinction ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques, religieuses, de leur sexe ou de leur appartenance ethnique. S’agissant du secteur privé, la loi du 13 juillet 1983 est entièrement consacrée à l’égalité professionnelle.

264.La loi du 1er juillet 1989 consacre un certain nombre de discriminations positives, qui étaient antérieurement reconnues par les conventions collectives aux femmes travaillant, et qui ont trait notamment à l’allongement des congés maternité, aux pauses journalières pour certains travaux féminins dactylographiques ou standardistes.

265.La loi relative à l’accès à l’emploi et à la lutte contre les discriminations dans la fonction publique a permis d’adopter un certain nombre de mesures visant à y promouvoir la place des femmes. Cette loi rappelle le cadre de la représentation équilibrée de personnes de chaque sexe dans l’encadrement supérieur de la fonction publique. Cette loi est accompagnée de la mise en œuvre d’objectifs chiffrés et progressifs de nominations, à hauteur de 40 % et est assortie de sanctions financières devant permettre d’assurer leur respect.

266.Partant du constat de la persistance des inégalités de rémunération entre les femmes et les hommes, une loi institue, à compter du 1er janvier 2012, une pénalité financière aux entreprises d’au moins cinquante salariés qui ne sont pas couvertes par un accord collectif ou un plan d’action relatif à l’égalité professionnelle.

267.Le 5 décembre 2012, la ministre des Droits des femmes a présenté en Conseil des ministres une communication relative au plan d’action en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les administrations publiques. Ce plan se traduit par des actions concrètes :

•Au niveau interministériel, amélioration du déroulement de la carrière et de la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle ;

•Formation des enseignants et des personnels de l’éducation nationale à l’égalité entre les hommes et les femmes ;

•Formation renouvelée des professionnels intervenant dans la protection des femmes victimes de violences ;

•Poursuite de la promotion des femmes aux postes de direction et de cadres dirigeants de l’État.

268.La loi no 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes s’articule autour de cinq priorités :

•De nouveaux moyens pour l’égalité professionnelle et une meilleure articulation des temps de vie ;

•Une garantie publique contre les impayés de pensions alimentaires ;

•La lutte contre les violences faites aux femmes ;

•Le recul des stéréotypes sexistes ;

•La généralisation de la parité.

269.Cette loi pose également de nouveaux enjeux :

•La place des pères dans l’éducation des enfants ;

•Les temps de la vie personnelle ;

•Le rôle et l’image des femmes dans les médias et dans la culture.

270.Plus récemment, la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi vise notamment à favoriser et rendre plus effective la négociation sur l’égalité professionnelle.

271.Egal accès aux fonctions de représentation: l’article 1er de la Constitution de 1958 dispose que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ».

272.Pour la première fois dans l’histoire de la République, le Gouvernement au pouvoir depuis de mai à juillet 2012 était paritaire. En 2016, le gouvernement issu du remaniement du mois de février respecte une parité stricte autant pour les ministres que pour les secrétaires d’État.

273.De plus, une loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle a été adoptée. Elle vise la féminisation progressive des instances dirigeantes des entreprises cotées en bourse et des entreprises publiques, à travers la mise en place de quotas.

2.Les régimes dérogatoires

274.Prévus, de façon générale, pour l’hypothèse de circonstances présentant un caractère grave et exceptionnel, ces régimes permettent de modifier à titre provisoire les modalités d’exercice de certaines libertés publiques. Ils se traduisent pour l’essentiel par des transferts temporaires de compétences, assortis de nombreuses garanties. Ils n’altèrent en aucune façon les règles juridiques protégeant les droits fondamentaux de l’homme dont le respect ne saurait souffrir, en tout état de cause, aucune dérogation. La loi française définit de manière très stricte les régimes dérogatoires.

a)L’état d’urgence

275.Régi par la loi du 3 avril 1955 modifiée par la loi du 20 novembre 1955, l’état d’urgence peut être déclaré en Conseil des ministres en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, ou d’événements présentant le caractère de calamité publique par leur nature et par leur gravité. Sa prorogation au-delà de 12 jours ne peut être autorisée que par la loi. Il comporte une extension des pouvoirs de police compensée par des garanties spécifiques. Depuis la loi du 20 novembre 2015, l’Assemblée nationale et le Sénat doivent être informés sans délai des mesures prises par le Gouvernement pendant l’état d’urgence et peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l’évaluation de ces mesures. La loi du 20 novembre 2015 précise également que les mesures administratives prises sur le fondement de l’état d’urgence sont soumises au contrôle du juge administratif. La loi no 2016-987 du 21 juillet 2016 est venue modifier certaines des mesures prévues par la loi du 3 avril 1955 afin d’adapter son contenu aux évolutions de fait et de droit. L’état d’urgence a été décrété, depuis 1955, à 6 reprises, la dernière fois en novembre 2015 à la suite des attentats terroristes ayant frappé la région parisienne le 13 novembre 2015.

b)L’état de siège

276.En vertu de l’article L2121-1 du Code de la défense, l’état de siège peut être déclaré en cas de péril imminent résultant d’une guerre étrangère ou d’une insurrection à main armée. En vertu de l’article 36 de la Constitution, cette décision doit être prise en Conseil des ministres et ne peut être prorogée au-delà de 12 jours que par autorisation du Parlement. L’état de siège implique le transfert des pouvoirs de police et de maintien de l’ordre de l’autorité civile à l’autorité militaire. Une compétence exceptionnelle pour certaines infractions d’un degré de gravité suffisant est également reconnue aux juridictions militaires (art. L2121-3 du Code de la défense). L’état de siège n’a jamais été utilisé sous la Ve République.

c)L’article 16 de la Constitution du 4 octobre 1958

277.Ce texte dispose que « lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux sont menacées d’une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier ministre, des présidents des assemblées ainsi que du Conseil constitutionnel. Il en informe la nation par un message. Ces mesures doivent être inspirées par la volonté d’assurer aux pouvoirs publics constitutionnels, dans les moindres délais, les moyens d’accomplir leur mission. Le Conseil constitutionnel est consulté à leur sujet. Le Parlement se réunit de plein droit. L’Assemblée nationale ne peut être dissoute pendant l’exercice des pouvoirs exceptionnels. Après trente jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels, le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat, soixante députés ou soixante sénateurs, aux fins d’examiner si les conditions énoncées au premier alinéa demeurent réunies. Il se prononce dans les délais les plus brefs par un avis public. Il procède de plein droit à cet examen et se prononce dans les mêmes conditions au terme de soixante jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels et à tout moment au-delà de cette durée ».

278.Sous réserve de conditions de fond ou de forme, l’article 16 a pour effet d’étendre les compétences du Président de la République. Cependant, l’exercice de ces compétences ne va pas sans contrôle puisque les décisions réglementaires ou à caractère individuel sont des actes administratifs et, dès lors, relèvent du juge administratif par la voie du recours pour excès de pouvoir.

279.La France a émis une réserve relative à l’application de l’article 4, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques régissant les états d’exception, la formulation des circonstances dans lesquelles il peut être dérogé aux obligations prévues par le Pacte étant en effet beaucoup plus générale que les formulations de l’article 16 et des lois régissant l’état de siège et l’état d’urgence. Afin d’éviter des divergences d’interprétation, la réserve française dispose que « les circonstances énumérées par l’article 16 de la Constitution pour sa mise en œuvre, par l’article premier de la loi du 3 avril 1878 modifiée par la loi du 9 août 1849 pour la déclaration de l’état de siège, par l’article premier de la loi du 3 avril 1955 pour la déclaration de l’état d’urgence et qui permettent la mise en application de ces textes, doivent être comprises comme correspondant à l’objet de l’article 4 du Pacte ». La réserve précise en outre l’interprétation qui peut être donnée des mesures prises par le Président de la République en application de l’article 16. Les termes « dans la stricte mesure où la situation l’exige » ne sauraient limiter le pouvoir du Président de la République de prendre « les mesures exigées par les circonstances ».

B.L’incorporation dans le droit interne des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et leur invocation devant les juridictions nationales

1.L’engagement de la France à être liée par l’instrument international

280.Une fois l’engagement international négocié et signé par l’autorité constitutionnelle compétente (ou en son nom par une personne investie de pouvoirs signés par elle), la ratification par le Président de la République (art. 52) ou l’approbation donnée par le Gouvernement (art. 52) peuvent être précédées, d’une part, d’une autorisation émanant du Parlement ou du peuple, et d’autre part, d’une décision de conformité prononcée par le Conseil constitutionnel.

a)Les possibles procédures préalables à la ratification ou l’approbation

i)L’autorisation de ratifier ou d’approuver émanant du Parlement

281.L’article 53 de la Constitution prévoit que la ratification ou l’approbation de certaines catégories de traités ou accords ne pourra être réalisée qu’après une autorisation parlementaire. Il s’agit des traités de paix, des traités de commerce, des traités ou accords relatifs à l’organisation internationale, de ceux qui engagent les finances de l’État, de ceux qui modifient des dispositions de nature législative, de ceux qui sont relatifs à l’état des personnes et de ceux qui comportent cession, échange ou adjonction de territoire. En outre, le Gouvernement a la possibilité de soumettre au Parlement tout autre traité. La loi votée est une loi autorisant la ratification ou l’approbation, et non une loi procédant à la ratification ou l’approbation.

282.Il est à noter que l’article 53 alinéa 3 de la Constitution exige le consentement des populations intéressées en cas de cession, d’échange ou d’adjonction de territoire.

283.Le Président de la République promulgue la loi autorisant ou non la ratification.

284.À la suite de cette autorisation, l’exécutif demeure libre de ratifier ou d’approuver l’instrument international et d’assortir cette ratification ou cette approbation de réserves.

ii)L’autorisation de ratifier émanant du peuple

285.En outre, dans deux hypothèses la ratification ou l’approbation peuvent être précédées d’un référendum plutôt que d’une autorisation parlementaire :

•Aux termes de l’article 11 de la Constitution, le Président de la République, sur proposition du Gouvernement ou sur proposition conjointe des deux Assemblées, peut soumettre au referendum tout projet de loi « tendant à autoriser la ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions» ;

•Conformément à l’article 88-5 de la Constitution, le Président de la République a l’obligation de soumettre au referendum tout « projet de loi autorisant la ratification d’un traité relatif à l’adhésion d’un État à l’Union européenne et aux Communautés européennes ». Néanmoins, aux termes du second alinéa de l’article, le recours au référendum peut être écarté au profit de celui au parlement, qui peut, « par le vote d’une motion adoptée en termes identiques par chaque assemblée à la majorité des trois cinquièmes », autoriser la ratification selon la procédure prévue au troisième alinéa de l’article 89 relatif à la révision constitutionnelle.

iii)Le contrôle de constitutionnalité a priori de l’instrument international

286.Le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de la République, par le Premier ministre, par le président de l’une ou l’autre assemblée ou par soixante députés ou soixante sénateurs afin de contrôler la conformité de l’instrument international à la Constitution. Le Conseil constitutionnel vérifie alors la régularité interne et externe de l’instrument international. Si le Conseil constitutionnel déclare qu’un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution, l’autorisation de ratifier ou d’approuver l’engagement international en cause ne peut intervenir qu’après révision de la Constitution (art. 54). Néanmoins, le Président de la République peut aussi ratifier le traité en émettant une réserve quant à la clause contraire à la Constitution.

b)La ratification ou l’approbation de l’instrument international

287.Une fois l’autorisation accordée, en vertu de l’article 52 de la Constitution, les traités sont ratifiés par le Président de la République, qui prend à cet effet un décret de ratification comportant le contreseing du Premier Ministre et du Ministre des Affaires étrangères (art. 19 de la Constitution). Aux termes du même article de la Constitution, les accords font, eux, l’objet d’une approbation par le Gouvernement, après information du Président de la République.

2.L’introduction ou entrée en vigueur du traité en droit interne

288.L’article 55 de la Constitution consacre le système moniste selon lequel les stipulations des instruments internationaux sont introduites directement dans le droit français sans avoir à être retranscrites sous forme de dispositions nationales.

289.Ainsi, une fois signé et ratifié, un instrument international est matériellement introduit dans l’ordre juridique français par un décret portant publication au Journal officiel de la République française. En vertu de l’article 3 du décret no 53-192 du 14 mars 1953 relatif à la ratification et à la publication des engagements internationaux souscrits par la France, la publication des traités « de nature à affecter, par leur application, les droits ou les obligations des particuliers » est obligatoire., un instrument international ne sera en principe pas publié tant qu’il ne sera pas entré en vigueur au niveau international.

290.En cas de non-publication, un instrument international n’est pas opposable aux personnes et, d’une manière générale, il n’est pas invocable dans l’ordre juridique français.

291.Le décret portant publication de l’instrument international est signé par le Président de la République, le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères, à l’exclusion de tout autre ministre. Toutefois, pour les conventions internationales du travail, le ministre du Travail est également appelé à signer ce décret. Ce décret entre en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française.

292.Tout instrument international produit quant à lui ses effets dans l’ordre juridique interne dès son entrée en vigueur.

293.En vertu de l’article 5 du décret no 53-192 du 14 mars 1953, l’acte portant dénonciation par la France d’un instrument international publié conformément à l’article 3 du décret doit être publié dans les mêmes formes que l’a été l’instrument international.

294.Seule la version française des textes paraissant au Journal officiel de la République française fait foi. Les traductions du droit français consultables sur le site Légifrance sont dépourvues de valeur légale : elles ont une simple portée informative.

3.L’invocabilité d’un traité devant les juridictions internes

295.Il revient aux juges judiciaire et administratif de déterminer si les dispositions d’un instrument international sont invocables par les justiciables (CE, Sect., 23 avril 1997, Gisti).

296.D’une part, conformément à l’article 55 de la Constitution, l’instrument international doit avoir été régulièrement ratifié et publié, et faire l’objet d’une application réciproque par les autres parties pour produire des effets dans l’ordre juridique français. Cependant, la condition de réciprocité ne vaut pas pour les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

297.D’autre part, la stipulation conventionnelle dont se prévaut le justiciable doit être d’effet direct, et pour ce, présenter plusieurs critères.

298.Elle ne doit pas nécessiter de mesures internes d’exécution, être « auto-exécutoires ». En ce sens, elles doivent être précises, complètes, et inconditionnelles. Au contraire, dans certaines hypothèses, l’adoption de textes d’application internes est nécessaire. Certaines conventions laissent en effet un choix aux États parties pour les modalités d’application de certaines de leurs stipulations en prévoyant expressément une ou plusieurs alternatives ; d’autres conventions imposent sans ambiguïté des textes d’application.

299.Elle ne doit pas avoir pour objet exclusif de régir les relations entre États parties, étant pris en considération l’intention exprimée des parties ainsi que le contenu, les termes et l’économie générale de l’instrument international invoqué. Il ne suffit pas qu’une stipulation désigne les États comme sujets de l’obligation qu’elle définit pour que l’effet direct lui soit refusé, dès lors qu’elle serait par ailleurs susceptible de créer des droits à l’égard des particuliers.

4.Le contrôle de conventionnalité

300.L’article 55 de la Constitution confère aux traités et accords régulièrement ratifiés ou approuvés et publiés une autorité supérieure à celle de la loi, tant antérieure que postérieure (Cass., Ch. Mixte, 24 mai 1975, Société des cafés Jacques Vabre et CE, 20 octobre 1989, Nicolo). Ces instruments internationaux ont en revanche une valeur inférieure à celle de la Constitution (CE Ass., 30 octobre 1998, Sarran, Levacher et autres  ; décision no 2004-505 DC du 19 novembre 2004, Traité établissant une Constitution pour l ’ Europe).

301.Si le Conseil constitutionnel a refusé de se reconnaitre compétent pour juger de la conformité des lois aux instruments internationaux (décision no 74-54 DC du 15 janvier 1975, IVG), il a précisé qu’il appartient aux divers organes de l’État, notamment les juges judiciaires et administratifs, de veiller à leur application dans le cadre de leurs compétences respectives (décision no 86-216 DC du 3 septembre 1986, Loi relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France).

302.Tirant les conséquences de l’applicabilité des instruments internationaux dans l’ordre interne français et de leur primauté sur les lois, le juge écarte une disposition législative contraire à un traité, dans le cadre du litige, inter partes. La disposition législative demeure en revanche en vigueur au regard des autres sujets de droit. Par ailleurs, le juge a considéré que la responsabilité de l’État pouvait être engagée en cas de violation par la loi de normes conventionnelles (voir notamment CE Ass., 8 février 2007, Gardedieu).

C.Recours ouverts en cas de violation des droits fondamentaux et systèmes de compensation et de réhabilitation des victimes

303.Dans l’exercice de leurs fonctions, plusieurs juridictions françaises sont compétentes pour connaître des litiges portant sur une violation des droits de l’homme, que ceux-ci soient consacrés dans les instruments internationaux ratifiés par la France ou inscrits dans la Constitution et la législation française.

1.Les recours ouverts en cas de violation des droits fondamentaux

304.Le juge est appelé à titre principal à contrôler le respect des droits de l’homme et à en censurer les violations. Il existe, cependant, des procédures non juridictionnelles de protection des droits et libertés.

a)Les recours juridictionnels

305.En matière de violation des libertés, les compétences juridictionnelles se répartissent ainsi : la compétence du juge administratif s’étend à l’ensemble des actes et des agissements administratifs, le juge pénal possède une compétence exclusive dans le domaine répressif, et le juge civil est compétent en cas d’atteinte non pénalement sanctionnée à la liberté d’un particulier à un autre particulier.

i)Les recours devant le juge administratif, gardien des libertés publiques

306.Le juge administratif est compétent pour connaître de l’ensemble des litiges portant sur des actes administratifs et des agissements de l’Administration. Le particulier, victime d’une atteinte illégale à l’une de ses libertés de la part de l’autorité publique peut s’adresser au juge pour demander l’annulation de cette décision par la voie du recours pour excès de pouvoir ; il peut aussi demander la réparation du dommage qui lui a été causé. Le recours pour excès de pouvoir est conçu comme une procédure largement ouverte aux victimes d’une décision administrative. Il est ouvert, même sans texte, contre tout acte administratif et nul ne peut renoncer par avance au droit de former un recours pour excès de pouvoir. Un individu, qu’il soit français ou ressortissant étranger, peut donc former un recours contre un acte d’une autorité administrative, à l’annulation duquel il peut n’avoir qu’un intérêt moral ; ce recours peut être présenté sans ministère d’avocat, à tous les niveaux de juridiction. Le requérant doit appuyer son recours sur l’un des quatre chefs suivants : l’incompétence, le vice de forme, le détournement de pouvoir, la violation de la loi. L’annulation prononcée par le juge administratif produira effet à l’égard de toute personne, et au jour même où l’acte annulé avait été pris.

307.De plus, par exception au monopole constitutionnel de la protection de la liberté individuelle par le juge judiciaire, le juge administratif est compétent quand il est question de liberté de réunion et de manifestation, des droits et libertés des fonctionnaires, des pouvoirs de la police administrative, de l’informatique et des libertés, du régime juridique des aliénés, de certains aspects de la pratique des écoutes téléphoniques ou du fonctionnement de l’administration pénitentiaire.

ii)Les recours devant le juge judiciaire, gardien de la liberté individuelle

308.Aux termes de l’article 66 de la Constitution, nul ne peut être arbitrairement détenu. L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi. Ce rôle vaut tant pour les litiges entre particuliers qu’entre administrés et Administration.

309.La compétence du juge judiciaire joue surtout en ce qui concerne la protection des libertés dans les rapports entre personnes privées. Le juge judiciaire protège la liberté de la personne sous toutes ses formes (liberté d’aller et venir, autonomie de la volonté de l’individu, liberté contractuelle, intimité de la vie privée, liberté du domicile, secret des correspondances, etc.). Il peut attribuer des dommages et intérêts, annuler un contrat, réputer non écrite une clause, écarter un moyen de preuve obtenu en violation de la liberté de l’autre partie, etc.

310.De plus, par exception au monopole législatif du juge administratif pour contrôler l’Administration, le juge judiciaire peut être saisi d’une action en indemnité si l’acte de l’Administration a consisté en une prise de possession irrégulière d’une propriété immobilière (théorie de l’emprise) ou s’il a porté atteinte à une liberté individuelle fondamentale (théorie de la voie de fait). De plus, le juge pénal peut interpréter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et en apprécier la légalité lorsque la solution du procès pénal dépend de cet examen (art. 111-5 du Code pénal). Par ailleurs, quand elles ont commis une faute personnelle constitutive d’un acte attentatoire à la liberté individuelle, les personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public sont également traduites devant les tribunaux répressifs (art. 432-4 du Code pénal).

iii)Les recours devant le juge constitutionnel, gardien du bloc de constitutionnalité

311.Dans le cadre du contrôle de constitutionnalité des lois et de l’examen des questions prioritaires de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel examine la conformité des textes qui lui sont soumis aux normes constitutionnelles, et notamment à celles qui ont trait aux droits de l’homme.

312.Comme évoqué précédemment, grâce à la création de la question prioritaire de constitutionnalité, le justiciable peut saisir indirectement le Conseil constitutionnel par le biais d’un renvoi préjudiciel effectué par la Cour de cassation ou le Conseil d’État (art. 61-1 de la Constitution) [voir II A 3].

iv)Les recours devant le juge européen, gardien de la Convention européenne des droits de l’homme

313.Il convient également de mentionner le rôle du mécanisme subsidiaire de protection des droits de l’homme prévu par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Convention EDH) ratifiée par la France le 3 mai 1974. La France a admis le droit de recours individuel prévu par cette Convention le 2 octobre 1981 (art. 34 Convention EDH). La saisine de la Cour n’a pas d’effet suspensif et ne dispense pas les justiciables d’exécuter les décisions internes rendues à leur encontre. La Cour EDH n’est pas une instance d’appel des décisions internes, elle ne peut les annuler.

314.Pour qu’une requête soit recevable par la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH), le justiciable doit avoir épuisé toutes les voies de recours internes, introduit la requête devant la Cour EDH dans un délai de 6 mois après la décision interne définitive, allégué une violation d’une ou plusieurs dispositions de la Convention EDH ; il faut que son préjudice soit important et que sa demande ne soit pas manifestement mal fondée ou abusive (art. 35 §1 de la Convention EDH et art. 47 du règlement intérieur de la Cour EDH).

b)Les recours non juridictionnels

i)Les recours administratifs gracieux

315.Un particulier qui ne serait pas satisfait d’une décision administrative le concernant peut demander son annulation, soit directement à l’autorité publique qui l’a prise, dans le cadre d’un recours gracieux, soit au supérieur de l’autorité publique auteur de la décision, dans le cadre d’un recours hiérarchique.

316.Ce recours administratif gracieux est ouvert dans toutes les hypothèses de litiges entre un particulier et l’Administration, quels que soit l’auteur de la décision, sa forme et son contenu. La loi relative à la simplification des relations entre l’administration et les citoyens du 13 novembre 2013 prévoit que le silence gardé pendant 2 mois par l’autorité publique sur une demande vaut décision d’acceptation et non plus de refus. Ce texte s’appliquera à partir du 13 novembre 2014 pour les actes relevant de l’État et du 13 novembre 2015 pour les actes relevant des collectivités territoriales. Parfois, une disposition législative ou réglementaire impose que le recours juridictionnel soit précédé par un recours administratif. C’est notamment le cas en matière de recouvrement de l’impôt sur le revenu, de recours contre les refus de visa d’entrée en France, de procédure d’accès aux documents administratifs ou encore de recours contre une décision sur la situation individuelle d’un fonctionnaire civil ou militaire dans les cas énumérés par le décret no 2012-765 du 10 mai 2012. Le but de ce mécanisme est de réduire le volume du contentieux relevant de la juridiction administrative. Que le recours soit facultatif ou obligatoire, une fois exercé, l’administré dispose d’un délai supplémentaire de 2 mois pour saisir le juge administratif.

ii)La saisine du Défenseur des droits

317.Une protection non juridictionnelle spécifique des libertés a également été instituée, dans un premier temps à travers le Médiateur de la République, créé par la loi du 3 janvier 1973. Inscrit dans la Constitution depuis le 23 juillet 2008 et institué par la loi organique et la loi ordinaire du 29 mars 2011, le Défenseur des droits a pris sa succession, regroupant également les attributions du Défenseur des enfants, de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) et de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE). C’est une autorité constitutionnelle indépendante (titre XI bis de la Constitution). Sa nomination pour un mandat de six ans non renouvelable, effectuée par le Président de la République, est soumise au vote de l’Assemblée nationale et du Sénat.

318.Contrairement au Médiateur de la République qui ne pouvait être saisi que par l’intermédiaire d’un député ou d’un sénateur, le Défenseur des droits peut être saisi directement et gratuitement par toute personne physique ou morale, peu important sa nationalité et son lieu de résidence, pourvu que le litige soit né en France. La personne à l’origine de la saisine peut alléguer :

•L’irrespect des droits de l’administré par une administration ;

•Une discrimination à son égard, que l’auteur présumé soit une personne privée ou une personne publique ;

•Un manquement à la déontologie des personnes exerçant des activités de sécurité ;

•L’irrespect des droits fondamentaux d’un enfant. Les personnes habilitées à saisir le Défenseur des droits sont l’enfant ou le mineur de moins de 18 ans, son représentant légal, un membre de sa famille, un service médical ou social ou une association de défense des droits de l’enfant.

319.Recherchant le règlement amiable des litiges, le Défenseur dispose de pouvoirs d’investigation ; le secret administratif ne lui est pas opposable. Ses délégués départementaux et ses délégués dans les établissements pénitentiaires peuvent régler directement tous les litiges locaux dont ils sont saisis. Il peut proposer une médiation ou une transaction, prononcer une injonction si ses recommandations ne sont pas suivies d’effet et être entendu par toute juridiction. Par ailleurs, le traitement d’un cas particulier peut aboutir à une proposition de réformes en vue de l’amélioration du fonctionnement des services publics. Le Défenseur publie également un rapport annuel.

iii)Le droit de pétition

320.Tout individu peut aussi utiliser le droit de pétition, notamment auprès de l’Assemblée nationale (art. 147 et suivants du règlement de l’Assemblée nationale), du Conseil économique, social et environnemental (art. 69 de la Constitution), de l’assemblée délibérante d’une collectivité territoriale (art. 72-1 de la Constitution) et de la Commission européenne (art. 11 alinéa 4 TUE). Toute personne peut ainsi s’adresser directement à l’une des autorités suprêmes de l’État pour solliciter son intervention, en dénonçant une atteinte aux droits de l’homme, ou en sollicitant une modification du droit en vigueur. L’existence d’autres techniques plus efficaces de protection des droits, précédemment évoquées, explique la rareté et le déclin de l’usage de ce procédé. Cependant, à titre individuel ou de manière collective, les citoyens ont de plus en plus recours aux pétitions non juridiquement encadrées, telles que celles diffusées par le biais de sites Internet et de réseaux sociaux.

2.Le système d’indemnisation et d’aide aux victimes

a)Le système d’indemnisation des victimes

i)L’indemnisation du préjudice né du dommage causé par une personne privée

321.Le fait dommageable peut être né de l’inexécution ou de la mauvaise exécution d’un contrat, d’un dommage accidentel ou de la commission d’un délit ou d’un crime. Les dommages-intérêts sont une compensation financière prononcée par un juge et destinée à réparer tant le préjudice patrimonial qu’extrapatrimonial, pourvu qu’il soit certain et direct. Peuvent ainsi être indemnisés la perte subie, le gain manqué et la perte d’une chance sérieuses, s’ils apparaissent comme certains.

322.Pourront être indemnisées les victimes directes ainsi que leurs ayant-droits, victimes indirectes.

323.Le principe est celui de la réparation intégrale du préjudice par l’auteur du dommage.

324.Cependant, certaines victimes d’infractions ne peuvent être indemnisées, notamment lorsque l’auteur de l’infraction est inconnu ou insolvable. Au nom du principe de la socialisation du risque, l’État sera responsable de cette indemnisation, bien qu’aucune faute ne lui soit imputable. Ainsi, sous certaines conditions, les victimes peuvent avoir accès à divers modes d’indemnisation publics, à travers des Fonds d’indemnisation (le Fonds de Garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI), le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO), etc.) et des régimes (régime de pensions d’invalidité et d’accidents du travail, régime d’indemnisation de dommages causés par les attroupements et rassemblements, etc.). Seront ici développés les deux Fonds de garantie les plus importants.

Le Fonds de Garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI)

325.Le FGTI est destiné aux victimes d’infractions n’ayant pas pu obtenir une indemnité en réparation de leur préjudice, notamment si l’auteur des faits est inconnu, s’il est insolvable, s’il était sous l’empire d’un trouble mental lorsqu’il a commis l’infraction, si les faits sont prescrits, amnistiés, ou non poursuivis devant le juge répressif. La personne lésée doit présenter une demande d’indemnisation à une commission d’indemnisation des victimes d’infraction (CIVI), présente dans chaque tribunal de grande instance. La victime ou ses ayants droits peuvent obtenir :

•La réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne si les faits ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail égale ou supérieure à un mois, ou si les faits constituent une infraction de viol, d’agression sexuelle, de traite des êtres humains, ou d’atteinte sexuelle sur mineur de quinze ans ou moins.

•Une indemnisation plafonnée à trois fois le montant du plafond fixé pour bénéficier de l’aide juridictionnelle partielle (soit 4212 €) dans les cas d’atteintes légères à la personne et de préjudice matériel résultant du vol, de l’escroquerie, de l’abus de confiance, de l’extorsion de fonds ou de la destruction, de la dégradation ou de la détérioration d’un bien.

•La réparation intégrale des atteintes à la personne résultant d’un acte de terrorisme. De plus, si la victime est décédée, ses ayants droit peuvent être indemnisés en réparation des préjudices moraux et économiques.

Le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO)

326.Le FGAO indemnise les victimes d’accident de la circulation et de la chasse quand le responsable n’est pas identifié, quand il n’est pas assuré ou quand son assureur est insolvable. Dans les autres cas, ce sont les compagnies d’assurances qui prennent en charge l’indemnisation. Le Fonds peut être saisi par l’assureur de la victime, et à défaut, par la victime ou ses ayants droits. Les dommages corporels sont pris en charge sans limitation de somme. En revanche, l’indemnisation des dommages aux biens par le Fonds ne peut excéder, par sinistre, la somme de 1 120 000 €.

327.Lorsqu’une victime ne remplit pas les critères pour avoir accès aux Fonds de garantie, et que la personne condamnée ne paie volontairement pas les sommes dues à la victime, cette dernière peut saisir le Service d’aide au recouvrement des victimes d’infraction (SARVI) pour obtenir, d’une part, le versement d’une partie ou du total des sommes dues selon le niveau de la condamnation, et d’autre part, une aide au recouvrement. En effet, le SARVI verse les sommes accordées par le juge à la victime et se charge ensuite d’obtenir le recouvrement des dites sommes par le condamné, augmentées d’une pénalité.

ii)L’indemnisation du préjudice né du dommage causé par une personne publique

328.Le dommage causé par une personne publique est indemnisable s’il est imputable au service public et s’il est certain et direct. Dans les hypothèses de responsabilité sans faute, il doit en outre être anormal et spécial.

L’indemnisation sur le fondement de la responsabilité pour faute d’une personne publique

329.La faute peut être une faute de service, car commise par un agent public déterminé et donc individuelle, ou une faute du service public, anonyme.

330.L’indemnisation des violations des droits de l’homme découlant d’une faute d’une personne publique est possible. Parmi bien d’autres, on citera comme exemples :

•L’indemnisation pour arrestation ou détention illégale (art. 432-5 et 432-6 du Code pénal). Ainsi, tout agissement, non effectué dans les formes prescrites et dans les lieux prévus à cet effet, consistant à arrêter ou détenir un individu, à permettre ou à laisser se perpétuer une privation de liberté en dehors des cas prévus par la loi, constitue un acte attentatoire à la liberté susceptible d’entraîner l’attribution, par le juge judiciaire, de dommages et intérêts.

•L’indemnisation pour dysfonctionnement du service de la justice (art. L 141-1 du Code de l’organisation judiciaire, et jurisprudence administrative). L’État est en effet tenu de réparer les dommages causés par le fonctionnement défectueux du service public de la justice, la faute simple suffisant désormais à engager sa responsabilité.

331.Tout comme pour l’indemnisation du préjudice causé par une personne privée, la règle est celle de la réparation intégrale du dommage. L’indemnité accordée peut prendre la forme soit d’un capital, soit d’une rente et le Conseil d’État a jugé que le juge peut indexer les rentes qu’il accorde.

L’indemnisation sur le fondement de la responsabilité pour faute présumée d’une personne publique

332.Dans certains domaines, un régime de responsabilité pour faute présumée de la personne publique a été instauré. Ce régime est favorable aux victimes car il impose à la personne publique d’apporter la preuve qu’elle n’a pas commise de faute. On citera par exemple l’usager d’un ouvrage public qui subit un dommage lors de l’utilisation de l’ouvrage, ou le cas des dommages nés de soins courants aux conséquences disproportionnées en milieu hospitalier.

L’indemnisation sur le fondement de la responsabilité sans faute de l’État

333.Pour certains types de dommages, causées par l’État sans qu’une faute de ce dernier n’en soit à l’origine. Il existe deux types d’indemnisation : l’indemnisation réelle du préjudice, et l’indemnisation forfaitaire fixée par la loi (régime des pensions d’invalidité et accidents du travail, régime de réparation des dommages de guerre, l’office national d’indemnisation des accidents médicaux, etc.). La victime ne peut alors pas demander à substituer à ce régime une évaluation directe du préjudice, sauf exception.

334.En terme d’indemnisation des violations de droits fondamentaux causées par l’État sans faute de ce dernier, on citera comme exemples :

•L’indemnisation à raison du préjudice causé par une condamnation pénale. Elle est accordée à un condamné dont la révision du procès, criminel ou délictuel, fait apparaître l’innocence (art. 626 du Code de procédure pénale) ;

•L’indemnisation accordée à une personne ayant fait l’objet d’une détention provisoire au cours d’une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive, lorsque cette détention lui a causé un préjudice manifestement anormal et d’une particulière gravité (art. 149 et suivants du Code de procédure pénale).

335.Que le préjudice soit né d’un dommage causé par une personne privée ou de celui causé par une personne publique, un justiciable peut obtenir le versement d’une partie de la somme qu’il réclame ou s’apprête à réclamer, si l’existence de l’obligation invoquée par le créancier à l’encontre du débiteur n’est pas sérieusement contestable. Cette possibilité lui est offerte à travers la voie du référé-provision (art. 809 alinéa 2 du Code de procédure civile et art. R. 541-1 du Code de justice administrative).

b)Les dispositifs d’aide aux victimes

336.Un bureau d’aide aux victimes (BAV), présent dans presque chaque tribunal de grande instance, est géré par des associations d’aide aux victimes qui renseignent, orientent et accompagnent les victimes d’infractions toute au long de la procédure pénale. Les entretiens qui s’y déroulent sont gratuits et confidentiels.

337.Créées par la loi no 98-1163 du 18 décembre 1998, les Maisons de la justice et du droit (133) sont principalement situées dans les zones urbaines les plus sensibles, et les antennes de la justice (42) dans des communes éloignées de juridictions et faiblement peuplées. La différence fondamentale entre les deux types de structures réside dans le fait que les antennes de justice sont dépourvues de statut légal et peuvent résulter de la seule initiative des chefs de juridiction et des élus locaux, alors que les Maisons de justice et du droit sont inscrites dans le code de l’organisation judiciaire et créées par arrêté du Garde des Sceaux. En revanche, elles sont toutes deux placées sous l’autorité du procureur de la République et du Président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel elles sont implantées. Elles fonctionnent sur la base d’un partenariat entre magistrats, élus, policiers, associations et travailleurs sociaux. Elles assurent une présence judiciaire de proximité et concourent à la prévention de la délinquance, à l’aide aux victimes et à l’accès au droit (art. L 7-12-1-1 du Code de l’organisation judiciaire). Une de leurs missions consiste ainsi à assurer une écoute privilégiée des victimes, un accompagnement dans leurs démarches et, si nécessaire, un soutien psychologique. Des informations et des consultations juridiques y sont données par des avocats et des associations.

338.Un numéro national, 08 Victimes (08 842 846 37), propose une écoute personnalisée de toutes les victimes, qui sont ensuite orientées vers des associations d’aide aux victimes.

339.Dans chaque juridiction, un juge est spécialement chargé de l’aide aux victimes : le juge délégué aux victimes, également Président de la commission d’indemnisation des victimes d’infractions. Créé en 2007, il veille, dans le respect de l’équilibre des droits des parties, à la prise en compte des droits reconnus par la loi aux victimes. De plus, le Conseil national de l’aide aux victimes, créé en 1999, réunit de nombreux acteurs de la politique d’aide aux victimes (ministres, élus, personnalités, membres d’associations) autour du ministre de la Justice. Il est chargé de formuler des propositions visant à l’amélioration de l’accueil, l’information, la prise en charge et l’indemnisation des victimes d’infractions pénales. 

D.La reconnaissance de la compétence de la Cour européenne des droits de l’homme

340.La France a ratifié la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales le 3 mai 1974 et a admis le droit de recours individuel prévu par l’article 34 de la Convention le 2 octobre 1981.

341.C’est un mécanisme subsidiaire de protection des droits de l’homme. En effet, pour qu’une requête soit recevable par la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH), le justiciable doit avoir épuisé toutes les voies de recours internes.

342.D’autres conditions de recevabilité de la requête doivent être remplies. Le justiciable doit avoir introduit la requête devant la Cour EDH dans un délai de 6 mois après la décision interne définitive. Il doit alléguer une violation d’une ou de plusieurs dispositions de la Convention. Son préjudice doit être important et sa demande ne doit pas être manifestement mal fondée ou abusive.

343.La saisine de la Cour n’a pas d’effet suspensif et ne dispense pas les justiciables d’exécuter les décisions internes rendues à leur encontre. La Cour EDH n’est pas une instance d’appel des décisions internes, elle ne peut les annuler.

344.Depuis l’affirmation, dans son arrêt Mamatkulov c. Turquie en date du 4 février 2005, du caractère obligatoire des mesures provisoires prises par la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’article 39 de son Règlement, la France a constamment exécuté les mesures indiquées par la Cour.

V.Le cadre de la promotion des droits de l’homme à l’échelon national

A.Rôle du Parlement et des collectivités locales en faveur de la promotion et de la protection des droits de l’homme

345.L’attachement aux droits fondamentaux est dans la culture française et est diffusé dans toutes les décisions prises par les autorités. Cette imprégnation peut se constater à travers tous les programmes et toutes les mesures mises en places tant localement que nationalement. Si les droits civils et politiques font l’objet d’une certaine prérogative nationale, les droits économiques, sociaux et culturels peuvent faire et font l’objet de nombreux programmes et actions au niveau régional, départemental et local.

346.Ainsi, dans le cadre de la décentralisation des compétences étatiques, les communes sont chargées de la politique sociale et des écoles préélémentaire et élémentaire (hors définition des contenus de l’enseignement et gestion des enseignants) et à ce titre, de la promotion des droits de l’homme dans ce domaine (actions au bénéfice de la petite enfance, de l’enfance, accès au logement, etc.).

347.Les départements sont les collectivités « chefs de file » concernant l’aide sociale. Ils élaborent et mettent ainsi en œuvre des politiques visant l’égalité entre les hommes et les femmes, la protection maternelle et infantile, le soutien aux familles en difficulté financière, aux personnes âgées, l’insertion sociale des personnes handicapées. Ils attribuent des prestations légales d’aide sociale (revenu de solidarité active, prestation de compensation du handicap).

348.Les régions sont responsables de la formation professionnelle continue et d’apprentissage, qui permet notamment l’insertion des jeunes en difficulté.

349.Des pratiques originales d’apprentissage actif de la démocratie et des droits de l’homme ont également été développées, à travers le Parlement des enfants, les conseils municipaux d’enfants et les conseils régionaux de jeunes. Le Parlement des enfants est réuni chaque année à l’Assemblée Nationale après une longue préparation et une organisation précise. La valeur symbolique de cette réunion est d’autant plus forte que les « enfants-députés » sont élus par leurs camarades et que les députés adultes reprennent à leur compte le projet de loi voté par le Parlement des enfants. Cette forme parlementaire de l’éducation aux droits de l’homme et à la citoyenneté valorise le droit de l’enfant à participer à la vie en société, conformément à l’esprit de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant.

B.Rôle des institutions nationales de défense des droits de l’homme

350.Les autorités administratives indépendantes sont des institutions de l’État non soumises au contrôle hiérarchique des pouvoirs publics, et chargées par le législateur d’une mission de service d’intérêt général.

351.Seules seront ici évoquées les autorités principalement compétentes en matière de protection et de promotion des droits fondamentaux.

1.La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH)

a)Historique

352.Le 17 mars 1947, un arrêté du Ministère des Affaires étrangères donne naissance à la Commission consultative pour la codification du droit international et la défense des droits et devoirs des États et des droits de l’homme. Elle est à l’époque composée de dix membres (juristes, universitaires, diplomates). Cette première Commission consultative est en particulier chargée de l’élaboration du projet de Déclaration universelle des droits de l’homme. Le 30 janvier 1984, la Commission consultative de 1947 se transforme en Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH). Elle est chargée de conseiller le Ministre des relations extérieures quant à l’action de la France en faveur des droits de l’homme dans le monde. En 1986, sa compétence est étendue aux questions liées aux droits de l’homme au plan national. Nommée pour deux ans, la CNCDH est composée de 40 membres : représentants des grandes associations, du Parlement, des ministères concernés, ainsi que de personnalités qualifiées dans le domaine des droits de l’homme. En 1989, la CNCDH est directement rattachée au Premier Ministre. Elle se voit attribuer la faculté d’auto-saisine pour toutes les questions de sa compétence. Son indépendance, expressément reconnue à cette époque, a ensuite été inscrite dans la loi no 2007-292 du 5 mars 2007.

b)Mandat et composition

353.Le fondement de cette institution nationale tient à la conviction que l’ignorance et le mépris des droits de l’homme ne peuvent être durablement combattus que par une convergence entre l’action institutionnelle - qu’elle soit celle du pouvoir législatif, de l’exécutif ou des diverses juridictions - et la pratique sur le terrain de l’ensemble des acteurs sociaux. La Commission nationale a ainsi plusieurs missions.

i)Favoriser le dialogue entre l’État et la société civile et la coordination de leurs actions

354.Ce dialogue et cette coordination sont permis par la composition de la CNCDH, qui veille tant à la représentation des institutions politiques et de la société civile qu’au pluralisme des convictions et des opinions. La présence d’un député et d’un sénateur désignés par les présidents des deux assemblées permet la liaison avec le pouvoir législatif. Un représentant du Conseil Économique social et environnemental assure quant à lui la liaison avec cette institution. Ces membres sont nommés par le Premier ministre pour la durée de leur mandat.

355.Le Défenseur des droits apporte l’expérience de cette institution dans les rapports avec les diverses administrations nationales et locales. La société civile y est représentée par :

•23 associations nationales consacrées à la promotion et à la protection des droits de l’homme dans leurs différents aspects ;

•Les représentants des sept principales confédérations syndicales ;

•30 personnalités qualifiées représentant les religions catholique, musulmane, protestante et juive, ou bien issues de l’université, du corps diplomatique et du Barreau dont plusieurs experts indépendants siégeant dans des organisations internationales.

356.Ces membres sont nommés pour un mandat de trois ans, par arrêté du Premier ministre, après avis d’un comité composé du vice-président du Conseil d’État et des premiers présidents de la Cour de cassation et de la Cour des comptes. Des représentants du Premier ministre et des ministres intéressés peuvent également participer aux travaux de la Commission avec voix consultative.

ii)Conseiller le Premier ministre et le Gouvernement

357.La CNCDH exerce une double fonction de vigilance et de proposition aussi bien en amont de l’action gouvernementale lors de l’élaboration des projets de loi ou de règlement, des politiques et programmes, qu’en aval pour vérifier l’effectivité du respect des droits de l’homme. Ainsi, aux termes de l’article 1 de la loi no 2007-292 du 5 mars 2007 modifiée, « la Commission nationale consultative des droits de l’homme assure, auprès du Gouvernement, un rôle de conseil et de proposition dans le domaine des droits de l’homme, du droit international humanitaire et de l’action humanitaire. Elle assiste le Premier ministre et les ministres intéressés par ses avis sur toutes les questions de portée générale relevant de son champ de compétence tant sur le plan national qu’international ». De cette manière, la CNCDH contribue notamment à la préparation des rapports que la France présente devant les organisations internationales. La CNCDH peut également s’autosaisir : « Elle peut, de sa propre initiative, appeler publiquement l’attention du Parlement et du Gouvernement sur les mesures qui lui paraissent de nature à favoriser la protection et la promotion des droits de l’homme ». Ses avis sont rendus publics. Cette commission est indépendante quant aux choix des questions nationales et internationales qu’elle examine par cette voie.

358.Son large champ d’investigation lui a permis de donner des avis sur des projets de lois, sur des dispositions administratives et de faire des propositions portant, par exemple, aussi bien sur la grande pauvreté que sur le droit d’asile ou la réinsertion sociale des toxicomanes, la laïcité, le dépistage du sida, la bioéthique, la réforme du Code de procédure pénale, l’éducation aux droits de l’homme, les écoutes téléphoniques, les fichiers de la police, ou encore le droit de la nationalité et la maîtrise de l’immigration.

iii)Participer à l’éducation et à la formation au respect des droits de l’homme

359.En vertu du décret no 2007-1137 du 26 juillet 2007 relatif à la composition et au fonctionnement de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH contribue à l’éducation aux droits de l’homme. Elle assure ainsi une veille des travaux des instances internationales dans ce domaine, qu’elle fait connaître, et elle suit personnellement les travaux du Conseil des droits de l’homme et des comités des Nations Unies ainsi que ceux de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et ceux du Conseil de l’Europe. Elle anime également des cycles de formation, organise des colloques et participe à de nombreux séminaires dans le cadre de sa mission d’éducation aux droits de l’homme.

iv)Alerter sur l’état des droits de l’homme

360.Sur le plan national, la CNCDH publie chaque année un rapport sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie. Sur le plan international, elle informe les instances internationales de la situation des droits de l’homme en France.

2.Le Défenseur des droits

361.Inscrit dans la Constitution depuis le 23 juillet 2008 et institué par la loi organique et la loi ordinaire du 29 mars 2011, le Défenseur des droits a pris la succession du Médiateur de la République, regroupant également les attributions du Défenseur des enfants, de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) et de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE). C’est une autorité constitutionnelle indépendante (titre XI bis de la Constitution). Sa nomination pour un mandat de six ans non renouvelable, effectuée par le Président de la République, est soumise au vote de l’Assemblée nationale et du Sénat.

362.Le Défenseur des droits a été investi de quatre missions :

•La promotion et la défense des droits des usagers des services publics ;

•La promotion et la défense des droits de l’enfant ;

•La lutte contre les discriminations prohibées par la loi et la promotion de l’égalité dans le domaine de l’emploi, du logement, de l’éducation et de l’accès aux biens et services ;

•Le respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité.

363.Pour promouvoir les droits dans ces domaines, le Défenseur des droits mène diverses actions.

364.Il engage des démarches d’information pédagogique sur le droit de la non-discrimination et l’égalité par la réalisation de brochures de sensibilisation destinées à mieux faire comprendre les discriminations et favoriser un meilleur accès aux droits des citoyens, ainsi que par la mise à disposition de modules de sensibilisation et de formation à distance, téléchargeables sur son site internet. Il est présent sur les réseaux sociaux. En outre, le Défenseur des droits a été à l’origine de la réalisation de films et courts métrages sur les discriminations, qui peuvent être utilisés pour sensibiliser le grand public ou des publics particuliers (jeunes, femmes, employeurs, etc.) et ainsi favoriser leur prise de conscience de leurs droits.

365.Le Défenseur des droits entretient un dialogue continu avec la société civile à travers, notamment, des consultations ad hoc, des comités d’entente (handicap, LGBT…) et des groupes de travail thématiques (LGBT/emploi, emploi/handicap…).

366.Il identifie les bonnes pratiques, notamment via l’envoi de questionnaires intitulés « Cadres pour Agir et Rendre Compte » (CARC). Il publie ensuite des guides dans lesquels il identifie des points de vigilance, capitalise les pratiques innovantes et propose des conseils pour prévenir les discriminations à l’ensemble des acteurs concernés.

367.Le Défenseur des droits conduit des actions de formation destinées à accompagner les acteurs concernés dans le changement de leurs pratiques.

368.Il formule des avis et des recommandations aux pouvoirs publics ainsi que des propositions de réformes des textes ou des dispositifs.

369.Le Défenseur des droits coordonne des travaux d’études et de recherches dans ses domaines de compétence, afin de mieux connaître les pratiques discriminatoires, leurs manifestations, leurs conséquences, et ce en vue d’élaborer de nouveaux moyens d’action. Les résultats sont publiés dans la collection « études & recherches ». Différents sondages ont ainsi permis de mesurer le ressenti des discriminations.

3.La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL)

370.La Commission nationale de l’informatique et des libertés a été instituée par la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 pour veiller à la protection des données personnelles au regard de l’expansion de l’informatisation. En effet, en vertu de l’article 1er de la loi, l’informatique « ne doit porter atteinte ni à l’identité humaine, ni aux droits de l’homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques ». Cette loi s’applique aux traitements automatisés de données à caractère personnel et aux traitements non automatisés de données à caractère personnel appelés à figurer dans des fichiers, que cela soit dans le secteur public ou le secteur privé. Tout traitement de données est soumis aux règles fixées par la loi et dont l’application est contrôlée par la Commission. Autorité administrative indépendante, la CNIL est composée de 17 membres (, 6 magistrats, 4 parlementaires, 5 personnalités qualifiées, 2 membres du Conseil économique, social et environnemental) nommés tous les cinq ans : 12 sont choisis par leurs pairs et 5 sont désignés par le Gouvernement et le Parlement. Ils ne reçoivent d’instructions d’aucune autorité.

371.La CNIL a été dotée de larges pouvoirs : avant de mettre en œuvre certains traitements automatisés d’informations nominatives, comme par exemple ceux qui intéressent la sûreté de l’État, la défense ou la sécurité publique ou qui ont pour objet la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite des infractions pénales le Gouvernement, l’Administration, l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics et les personnes morales de droit privé gérant un service public doivent obtenir un avis de la CNIL, lequel fait l’objet d’une publication. L’irrespect de cette procédure entraine des sanctions administratives ou pénales. S’agissant du secteur privé, ou des autres traitements automatisés mis en œuvre par les mentionnées ci-dessus, une déclaration préalable à tout traitement de données informatisé doit être faite auprès de la CNIL. Pour certains traitements automatisés, une autorisation de la CNIL doit être obtenue. A cette occasion, il est vérifié que le traitement automatisé satisfait aux prescriptions de la loi. Pour les catégories les plus courantes de traitement de données, du secteur public comme privé, la Commission adopte des normes simplifiées en vertu de son pouvoir réglementaire.

372.La CNIL est également habilitée à recevoir les plaintes, les pétitions et les réclamations. Suite à ces plaintes ou de sa propre initiative, la CNIL peut user de larges pouvoirs de contrôle et de vérification en se rendant sur place et en examinant précisément les conditions d’exploitation du traitement de données. Elle peut, le cas échéant, transmettre une affaire à sa formation contentieuse et prononcer des sanctions (avertissement, sanction pécuniaire, injonction, saisine du Premier ministre) (art. 45 de la loi no 78-17 du 6 janvier 1978). Cette procédure n’exclut pas une possibilité de saisine du ministère public (art. 40 du Code de procédure pénal).

373.La CNIL doit informer et conseiller les personnes sur leurs droits et leurs obligations et se tenir informée des effets de l’utilisation de l’informatique sur la vie privée, l’exercice des libertés et le fonctionnement des institutions démocratiques. Elle peut faire toutes propositions pour adapter la protection des libertés à l’évolution des procédés et techniques informatiques. Elle présente un rapport annuel au Président de la République et au Parlement, qui sera ensuite publié.

4.Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA)

374.Créé par la loi du 17 janvier 1989, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a pour mission de garantir la liberté de communication audiovisuelle en France. Il a succédé à la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (1982-1986) et à la Commission nationale de la communication et des libertés (1986-1989). L’article 1er de la loi du 30 septembre 1986 modifiée par la loi du 15 novembre 2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public prévoit notamment que « l’exercice de cette liberté ne peut être limité que dans la mesure requise, d’une part, par le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, du caractère pluraliste de l’expression des courants de pensée et d’opinion et, d’autre part, par la protection de l’enfance et de l’adolescence, par la sauvegarde de l’ordre public, par les besoins de la défense nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication, ainsi que par la nécessité de développer la production audiovisuelle ».

375.Conformément à la loi no 2013-1028 du 15 novembre 2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public, le Conseil supérieur de l’audiovisuel comprend sept membres, nommés par décret du Président de la République. Son Président est désigné par le Président de la République, trois membres sont choisis par le Président de l’Assemblée nationale et trois par le Président du Sénataprès avis conforme adopté à la majorité des trois cinquièmes des commissions chargées des affaires culturelles respectivement compétentes. Leur mandat, de six ans, n’est ni révocable, ni renouvelable. Le Conseil se renouvelle par tiers tous les deux ans.

376.Le CSA assure, aux termes de l’article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, « l’égalité de traitement (des usagers); il garantit l’indépendance et l’impartialité du secteur public de la communication audiovisuelle ; il veille à favoriser la libre concurrence et l’établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services […]; il veille à la qualité et à la diversité des programmes, au développement de la production et de la création audiovisuelles nationales ainsi qu’à la défense et à l’illustration de la langue et de la culture française […]». Le CSA assure le respect de l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion dans les programmes des services de radio et de télévision. Il veille à la protection de l’enfance et de l’adolescence, au respect de la dignité de la personne, à la défense et à l’illustration de la langue française. Il lutte contre les discriminations dans le domaine de la communication audiovisuelle et veille à ce que la programmation audiovisuelle reflète la diversité de la société française.

377.La délivrance des autorisations d’usage des fréquences pour chaque nouvelle radio ou chaîne de télévision diffusée par voie hertzienne ou numérique terrestre, ou satellite, est subordonnée à la conclusion d’une convention passée entre le CSA au nom de l’État et la personne qui demande l’autorisation. Une télévision ou une radio qui désire être diffusée en France doit accomplir les formalités nécessaires auprès du CSA. Celles-ci sont de plusieurs natures : signature d’une convention d’engagements en contrepartie de l’autorisation d’usage de fréquences dans le cas d’un service diffusé par voie hertzienne terrestre, signature d’une convention ou simple déclaration dans le cas d’un service diffusé par un autre procédé (télévisions et les radios diffusées sur internet, télévisions et radios numériques, etc.).

378.Le CSA est habilité à prononcer des sanctions contre les radios et télévisions publiques et privées. Il peut également saisir les autorités administratives ou judiciaires compétentes pour connaître des pratiques restrictives de la concurrence et des concentrations économiques.

379.Au-delà de sa fonction générale de surveillance, le CSA dispose d’un pouvoir consultatif et d’un pouvoir réglementaire. Son pouvoir consultatif résulte des larges compétences qui sont les siennes dans le domaine de la communication. Il est donc associé, à différents niveaux, à l’élaboration des normes juridiques, et peut faire des propositions. Son pouvoir réglementaire porte notamment sur les domaines suivants : l’autorisation d’usage des bandes de fréquence ou des fréquences dont l’attribution ou l’assignation lui a été confiée, et la possibilité de prendre les mesures propres à assurer une bonne réception des signaux.

5.Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté

a)Statut du Contrôleur général

380.Suite à la ratification du protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines et traitement cruels, inhumains et dégradants adopté par l’Assemblée générale des Nations-Unis le 18 décembre 2002, le législateur français a institué, par la loi no 2007-1545 du 30 octobre 2007, un Contrôleur général des lieux de privation de liberté, assisté de nombreux collaborateurs (magistrats, praticiens hospitaliers, intervenants extérieurs, etc.).

381.La loi du 30 octobre 2007 qualifie le Contrôleur général d’autorité indépendante (art. 1er) et définit les conditions de cette indépendance par rapport aux pouvoirs publics, en particulier en énonçant l’impossibilité de recevoir quelque instruction d’aucune autorité dans son domaine d’attribution. Cette indépendance est par ailleurs garantie par le non renouvellement de son mandat unique de six ans et par le fait qu’il est inamovible. En outre, le Contrôleur général ne peut en effet être poursuivi, recherché, arrêté, détenu, ni jugé à l’occasion des opinions qu’il émet ou des actes qu’il accomplit dans l’exercice de ses fonctions (art. 2). Un régime strict d’incompatibilités prévu à l’article 2, renforce cette indépendance du Contrôleur à l’égard du domaine politique (impossibilité d’exercer un mandat électoral), comme de tout intérêt économique (incompatibilité avec toute autre activité ou profession) ou encore de son propre avenir (impossibilité de renouveler son mandat).

382.La loi indique (art. 2) que si, comme il est de coutume pour les « emplois supérieurs » en France, le Contrôleur général est nommé par le Président de la République, c’est seulement « en raison de ses compétences et connaissances professionnelles » et après avis des commissions des lois des deux Assemblées. Surtout, nul ne peut mettre fin avant son terme au mandat du Contrôleur général, d’une durée de six ans, sauf lui-même, par démission ou empêchement (maladie grave).

383.Le Contrôleur général est également indépendant des autres autorités indépendantes.

384.La loi assure également l’indépendance de gestion de l’institution : le Contrôleur général choisit lui-même ses collaborateurs ; il dispose d’un budget propre, voté par le Parlement, distinct mais regroupé avec celui d’autres autorités indépendantes, pour en accentuer le caractère particulier ; ses dépenses ne sont pas contrôlées a priori comme pour les administrations, mais seulement a posteriori, sous l’angle de la régularité comptable, par la Cour des comptes.

385.En 2015, le budget alloué au Contrôleur général s’est élevé à plus de 4,79 millions d’euros.

b)Missions du Contrôleur général

i)Les visites des lieux de privation de liberté

386.Le Contrôleur général promeut et défend les droits des personnes détenues. Sa mission principale consiste ainsi à visiter les lieux où des personnes sont privées de liberté sur l’ensemble du territoire français, en vue de s’assurer qu’elles sont traitées avec humanité et dans le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. Il se rend ainsi dans les établissements pénitentiaires, les établissements de santé, les locaux de garde à vue, les locaux de rétention douanière et administrative, les zones d’attente des ports et aéroports, les établissements éducatifs fermés, ou encore tout véhicule permettant le transfèrement des personnes privées de liberté. Durant ces visites, il peut s’entretenir confidentiellement avec les personnes dont l’audition lui paraît nécessaire.

387.La loi no 2014-528 du 26 mai 2014 modifiant la loi no 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté a élargi sa compétence au contrôle des mesures d’éloignement prononcées à l’encontre d’étrangers jusqu’à leur remise aux autorités de l’État de destination. Cette loi a pour objet d’assurer la transposition de l’article 8 § 6 de la directive de l’Union européenne no 2008/115/CE du 16 décembre 2008 dite « Directive retour » qui impose de prévoir « un système efficace de contrôle du retour forcé », incluant l’ensemble des phases de transfert, y compris le voyage en avion, jusqu’à la remise de l’intéressé aux autorités du pays de destination.

388.Dans un souci de cohérence juridique, les parlementaires ont également jugé souhaitable que cette extension de compétence comprenne, non seulement les éloignements vers les États tiers à l’Union européenne, mais également les éloignements à l’intérieur même de l’UE. Ainsi, quand bien même la Directive retour n’est applicable qu’aux ressortissants de pays tiers à l’Union européenne, la loi prévoit que le contrôle qu’exerce le CGLPL est applicable à toute mesure d’éloignement d’étrangers, y compris s’ils sont citoyens de l’Union européenne. La loi renforce en outre les pouvoirs du Contrôleur général en prévoyant la publication systématique de ses avis, en protégeant les personnes lui ayant transmis des informations et en sanctionnant pénalement l’entrave à ses missions.

389.Après enquête, le Contrôleur général fait part de ses observations à l’autorité compétente qui doit y répondre dans un délai donné. Il doit porter à la connaissance du procureur de la République les infractions pénales qui lui sont signalées et peut également saisir l’autorité disciplinaire compétente. Il formule des avis, des recommandations qu’il rend publiques et propose des modifications législatives ou réglementaires.

390.Par ailleurs, toute personne physique, ainsi que toute personne morale (association, ONG, etc.) dont l’objet est le respect des droits fondamentaux, peut porter à la connaissance du Contrôleur général des faits ou des situations constituant une violation des droits fondamentaux de la personne détenue. Il peut aussi se saisir de sa propre initiative.

391.Outre les personnes rencontrées localement au cours des enquêtes et des visites, le Contrôle général entretient des relations régulières avec les organisations professionnelles des personnels publics concernés, les ordres professionnels des médecins et avocats, les écoles de service public et instituts de formation des personnels, les associations nationales dont l’objet social est d’intervenir dans les lieux de privation de liberté ou de défendre et promouvoir les droits des personnes privées de liberté, et les représentants des cultes présents dans les lieux de privation de liberté. Il recueille, en outre, aussi régulièrement que possible, les opinions et contributions de chercheurs quantitativistes ou en sciences humaines pour lesquels les lieux de privation de liberté sont un objet de recherche.

ii)L’information et la formation sur les droits des personnes détenues

392.Chaque année, le Contrôleur général remet un rapport d’activité au Président de la République et au Parlement. Ce rapport est rendu public. Outre un bilan d’activité, plusieurs analyses thématiques figurent dans ce rapport.

393.Le Contrôleur général met à la disposition du public les rapports et informations sur son activité via son site Internet.

394.Le Contrôleur général participe à la formation professionnelle sur les droits fondamentaux des personnes privées de liberté, en intervenant chaque année dans les écoles de formation des agents publics (Ecole nationale de l’administration pénitentiaire, Ecole nationale d’administration, Ecole nationale de la magistrature, Ecole nationale supérieure de la police, Ecole des officiers de la gendarmerie nationale).

6.Le Haut conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes (HCEHF)

395.Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEHF) a été créé par décret du président de la République le 3 janvier 2013. Il est actuellement composé de 72 personnalités : représentants associatifs, élus, personnalités qualifiées, chercheurs, etc.

396.Le Haut Conseil a pour mission d’assurer la concertation avec la société civile et d’animer le débat public sur les grandes orientations de la politique des droits des femmes et de l’égalité. Pour assurer ses missions, le Haut Conseil :

•Contribue à l’évaluation des politiques publiquesqui concernent l’égalité entre les femmes et les hommes ;

•Assure l’évaluation des études d’impact des lois, règlements, documents d’évaluation des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale ;

•Recueille et diffuse les analyses, études et recherchesfrançaises, européennes et internationales relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes ;

•Formule des recommandations, des avis et propose des réformes au Premier ministre.

397.Le Haut Conseil peut être saisi de toute question par le Premier ministre ou la ministre chargée des Droits des femmes. Il peut se saisir de toute question de nature à contribuer aux missions qui lui sont confiées.

C.La diffusion des instruments relatifs aux droits de l’homme

1.La diffusion des normes au niveau national

398.Le français étant l’une des langues officielles dans lesquelles les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels la France est partie ont été élaborés (dans le cadre de l’Organisation des Nations Unies comme dans celui du Conseil de l’Europe), la diffusion de ces conventions s’en est trouvée d’autant facilitée.

399.Comme détaillé plus haut, la publication des conventions au Journal officiel de la République française est systématique, celle-ci étant un préalable obligatoire comme condition de leur entrée en vigueur, au même titre que les textes législatifs et réglementaires. D’autre part, la ratification par la France de ces instruments (art. 53 de la Constitution) fait l’objet d’une procédure d’autorisation parlementaire, occasion privilégiée d’un débat public et d’une diffusion très large du contenu des textes adoptés, non seulement par les voies institutionnelles (telles que par exemple les rapports du Parlement), mais également par le relais des médias.

400.Enfin, les institutions et organismes nationaux chargés du respect des droits de l’homme jouent un rôle en la matière qui doit être souligné, soit parce que l’information des citoyens ou des justiciables est leur vocation première, soit parce qu’étant une incidence indispensable de leurs activités, cette information découle naturellement de leurs attributions principales, par l’émission d’avis publics ou la publication de rapports ou d’études.

2.L’accès au droit au sein d’organismes spécialisés

401.En adoptant la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, le législateur a créé l’aide à l’accès au droit. La politique publique mettant en œuvre l’accès au droit a pour objectif de développer un réseau de services de proximité afin d’assurer l’égal accès de tous les citoyens au droit, en permettant à toute personne de connaître ses droits et de les exercer, notamment aux personnes les plus en difficulté. Pilotée au niveau national par le Service de l’accès au droit et à la justice et de la politique de la ville (SADJPV), cette politique s’appuie au plan local sur les Conseils départementaux de l’accès au droit et elle trouve sa mise en œuvre concrète au sein des Maisons de la justice et du droit, des antennes de justice, des points d’accès au droit et des relais d’accès au droit.

a)Les Conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD)

402.Présidé par le Président du tribunal de grande instance du chef-lieu du département, le Conseil départemental d’accès au droit est chargé de définir et de mettre en œuvre la politique d’accès au droit au niveau départemental. Il identifie ainsi les besoins locaux, dresse et diffuse l’inventaire de l’ensemble des actions menées, évalue la qualité et l’efficacité des dispositifs auxquels il apporte son concours, impulse des actions nouvelles. En outre, des consultations juridiques gratuites sont proposées dans les locaux de chaque Conseil, l’accent étant mis sur les personnes nécessitant une aide spécifique (personnes âgées, ménages menacés d’expulsion locative...).

b)Les Maisons de la justice et du droit et les antennes de la justice

403.Créées par la loi no 98-1163 du 18 décembre 1998, les Maisons de la justice et du droit (133) sont principalement situées dans les zones urbaines les plus sensibles, et les antennes de la justice (42) dans des communes éloignées de juridictions et faiblement peuplées.

404.La différence fondamentale entre les deux types de structures réside dans le fait que les antennes de justice sont dépourvues de statut légal et peuvent résulter de la seule initiative des chefs de juridiction et des élus locaux, alors que les Maisons de justice et du droit sont inscrites dans le code de l’organisation judiciaire et créées par arrêté du Garde des Sceaux. En revanche, elles sont toutes deux placées sous l’autorité du procureur de la République et du Président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel elles sont implantées. Elles fonctionnent sur la base d’un partenariat entre magistrats, élus, policiers, associations et travailleurs sociaux. Elles assurent une présence judiciaire de proximité et concourent à la prévention de la délinquance, à l’aide aux victimes et à l’accès au droit (art. L 7-12-1-1 du Code de l’organisation judiciaire).

405.Une de leurs missions consiste ainsi à assurer une écoute privilégiée des victimes, un accompagnement dans leurs démarches et, si nécessaire, un soutien psychologique. Des permanences gratuites d’informations et des consultations juridiques y sont données par des avocats et des associations.

c)Les points et les relais d’accès au droit

406.Ce sont des lieux d’accueil gratuits et anonymes, permanents ou non, généralement implantés dans des structures institutionnelles et associatives. Ils permettent d’apporter une information sur leurs droits et devoirs aux personnes faisant face à des problèmes juridiques et administratifs (famille, travail, logement, entreprise, droit pénal, droit des étrangers). Cette information est délivrée par des juristes du secteur associatif et des professionnels du droit (avocat, huissier, notaires, juristes, conciliateurs, délégués du Défenseur des droits, etc.). Ce personnel intervient également dans diverses structures qui accueillent des personnes en difficulté (missions locales, centres sociaux, centres d’hébergement, etc…).

D.L’éducation des jeunes aux droits de l’homme

407.L’éducation aux droits de l’homme est cruciale pour la formation des citoyens conscients de leurs droits. Elle est effectuée au travers de programmes d’enseignement et d’actions éducatives, en s’appuyant sur la Déclaration universelle des droits de l’homme et les grandes conventions.

408.Les nouveaux programmes scolaires prennent en compte des questions majeures pour notre société : le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie, les apports successifs de l’immigration, le rapport à autrui et la compréhension de la diversité du monde.

409.Il existe en outre un programme d’éducation civique en école primaire et au collège et un programme d’éducation civique, juridique et sociale au lycée, spécifiquement dédiés à l’enseignement des droits civils.

410.Le prix des droits de l’homme – René Cassin, organisé par la CNCDH et la direction générale de l’enseignement scolaire, récompense depuis 1988 les meilleurs travaux des collégiens, des lycéens et des élèves des écoles élémentaires sur les droits de l’homme. Pour l’année scolaire 2014-2015, les prix décernés ont récompensé des travaux portant sur la liberté et l’égalité.

411.Enfin, la CNIL a conclu une convention de partenariat avec le Ministère de l’éducation nationale pour sensibiliser et former élèves, étudiants comme enseignants à ces enjeux et à un usage responsable et citoyen du numérique, notamment s’agissant de la protection des données personnelles.

E.La formation aux droits de l’homme des agents publics et autres professionnels

1.Formation des professionnels du droit

412.L’Institut des Droits de l’homme du Barreau de Paris est une association créé en 1979, par l’UNESCO et l’Ordre des Avocats du Barreau de Paris. L’Institut a pour mission principale la formation des praticiens du droit, notamment les avocats et les magistrats, au droit international des droits de l’homme et aux procédures internationales de protection des droits de l’homme. Cette formation est assurée dans les barreaux, dans les écoles de formation des avocats, et au sein de séminaires, colloques et conférences en France et à l’étranger. L’Institut intervient également dans les universités, à l’Ecole nationale de la magistrature, et auprès de Barreaux étrangers.

413.De plus, l’Institut international des droits de l’homme organise conjointement avec différents barreaux et écoles d’administration des formations spécialisées sur le droit international et européen des droits de l’homme. Elle s’inscrivent dans la formation continue des praticiens.

2.Formation des élèves magistrats et des élèves fonctionnaires

414.Entre 2009 et 2012, la formation des agents exerçant des fonctions régaliennes ou d’autres professionnels concernés par la protection et la promotion des droits de l’homme a été renforcée. En collaboration avec la CNCDH, l’École nationale de la magistrature (ENM) et l’École nationale d’administration (ENA) ont développé leur offre de formation dans ce domaine.

415.Ainsi, un séminaire sur le racisme et les discriminations raciales se déroule désormais chaque année à l’ENM. Parmi les auditeurs, il a accueilli, en plus des magistrats du siège, du parquet et des juges de proximité, des personnels de l’administration pénitentiaire. Des stages à la Cour européenne des droits de l’homme et des séminaires portant sur la Convention européenne des droits de l’homme sont également proposés aux auditeurs de justice.

3.Formation des enseignants

416.Dans les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE), le tronc commun de formation des futurs enseignants comprend un thème consacré aux valeurs de la république, qui vise à savoir transmettre et faire partager les principes de la vie démocratique ainsi que les valeurs de la République : la liberté, l’égalité, la fraternité ; la laïcité ; le refus de toutes les discriminations. Par ailleurs, les associations françaises de défense des droits de l’homme bénéficient pour la plupart d’entre elles d’un agrément du ministère de l’Education nationale leur permettant de coopérer avec les établissements scolaires ou avec les ESPE. Universités d’été ou d’automne, séminaires de formation sont autant d’actions de formation aux droits de l’homme.

4.Formation des professionnels œuvrant dans le domaine des droits de l’homme

417.La France s’est attachée à développer la formation aux droits de l’homme des forces de l’ordre, afin d’éviter toute violation des droits des personnes interpellées ou retenues. Tous les personnels de la police et de la gendarmerie, quel que soit leur corps ou leurs grades, sont concernés.

418.À titre d’exemple, la formation initiale des élèves gardiens de la paix aborde les droits de l’homme dans le cadre de l’enseignement relatif à la déontologie, aux libertés publiques et aux droits fondamentaux. Les exercices pratiques relatifs à l’accueil du public et aux contrôles d’identité insistent sur le comportement et l’attitude des policiers en fonction des catégories d’usagers auxquelles ils sont confrontés (victimes, témoins, auteurs). Les lieutenants de police suivent deux modules d’enseignements intitulés respectivement « éthique, discernement, déontologie, psychologie » et « libertés publiques et droits fondamentaux ». La formation des commissaires de police inclut l’étude de la convention européenne pour la prévention de la torture et des traitements inhumains ou dégradants ainsi que les droits fondamentaux de l’homme. Une formation éthique et déontologie est suivie par l’ensemble des personnels de la gendarmerie avec un accent mis sur la défense et le respect des droits de l’homme.

419.De plus, les chefs de centres de rétention administrative participent à une formation spécifiquement dédiée à la règlementation relative à l’interpellation des étrangers en situation irrégulière et aux procédures judiciaires et administratives qui sont liées, ainsi qu’au respect des droits fondamentaux des personnes placées en rétention.

420.Par ailleurs, le Contrôleur général des lieux de privation des libertés participe à la formation professionnelle sur les droits fondamentaux des personnes privées de liberté, en intervenant chaque année dans les écoles de formation des agents publics (Ecole nationale de l’administration pénitentiaire, Ecole nationale d’administration, Ecole nationale de la magistrature, Ecole nationale supérieure de la police, Ecole des officiers de la gendarmerie nationale). En outre, un dispositif de formation est en cours d’élaboration avec le Défenseur des droits qui est déjà appelé à intervenir dans le cadre des formations initiales des cadres de la police française.

421.Dans le domaine de la lutte contre la traite des êtres humains, depuis fin 2013 une formation spécifique sur les récits de souffrance est dispensée aux officiers de protection de l’OFPRA par l’association « Forum Réfugiés-Cosi et Ulysse ». Des stages en immersion auprès d’offices spécialisés comme l’Office central pour la répression de la traite des êtres humains sont également proposés au personnel des forces de l’ordre. Depuis 2006, des séances de formation sont dispensées par la coordination du « Dispositif National Ac.Sé » dans différentes régions de France. Cela a permis de former près de 1050 professionnels issus du secteur médico-social et des forces de l’ordre. Ces formations ont pour objectif d’améliorer les connaissances en matière d’identification et de protection des victimes de la traite des êtres humains.

422.Le Centre primo Levi dispense des formations aux professionnels de structures en lien avec les personnes ayant souffert de torture. Les membres de cette association interviennent ainsi dans des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA), des centres médico-psychologiques, des centres médico-psycho-pédagogiques, auprès de psychologues, de travailleurs sociaux, de responsables de lieux d’accueil et de médecins.

Notes