HRI

Instruments

internationaux relatifs

aux droits de l'homme

Distr.GÉNÉRALE

HRI/CORE/1/Add.11825 avril 2002

Original: FRANÇAIS

DOCUMENT DE BASE FAISANT PARTIE INTÉGRANTEDES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES

MONACO

[21 mars 2002]

TABLE DES MATIÈRES

Paragraphes Page

I.TERRITOIRE ET POPULATION1 - 113

II.STRUCTURE POLITIQUE GÉNÉRALE12 - 665

A.Aperçu de l’histoire politique de la Principauté12 - 185

B.Le cadre institutionnel19 - 516

1.Le pouvoir exécutif22 - 367

2.Le pouvoir législatif37 - 449

3.Les organes consultatifs45 - 4910

4.La commune50 - 5111

C.Le cadre juridictionnel52 - 66111.Le Tribunal suprême54 - 56112.Les juridictions civiles et pénales57 - 61123.Les juridictions spécialisées62 - 65134.Le ministère public6614

III.CADRE JURIDIQUE GÉNÉRAL DE LA PROTECTIONDES DROITS DE L’HOMME67 - 8714

A.Autorités judiciaires et administratives compétentes en matièrede droits de l’homme69 - 7214

TABLE DES MATIÈRES (suite)

Paragraphes Page

B.Recours dont dispose une personne qui prétend que ses droitsont été violés et systèmes d’indemnisation et de réhabilitation73 - 7615

C.Protection des droits prévus dans les divers instrumentsinternationaux relatifs aux droits de l’homme77 - 81161.Droits garantis par la Constitution78 - 79162.Droits garantis par la loi et la jurisprudence80 - 8117

D.Modalités d’incorporation des instruments relatifs aux droits del’homme au droit interne et modalités d’invocation de cesinstruments devant les instances judiciaires82 - 8417

E.Institutions ou organismes nationaux chargés de veiller aurespect des droits de l’homme85 - 8718

IV.INFORMATION ET PUBLICITÉ88 - 9018

* * * *

Note: Le présent document est complété par une annexe composée d’une série d’indicateurs chiffrés concernant les principales caractéristiques démographiques, économiques et sociales présentés sous forme de tableaux et de graphiques. Cette annexe peut être consultée au secrétariat du Haut‑Commissariat aux droits de l’homme.

I. TERRITOIRE ET POPULATION

État indépendant et souverain, la Principauté de Monaco couvre une superficie de 1,95 km2, dont près de 0,40 a été gagné sur la mer au cours des 30 dernières années. La Principauté ne forme qu’une seule ville, Monaco, dont les limites se confondent avec celles de l’État, la population est par conséquent urbaine à 100 %. Le territoire de la Principauté est enclavé dans celui de la République française et possède une ouverture sur la mer Méditerranée. Depuis la Convention franco‑monégasque du 16 février 1984, les eaux territoriales, sur lesquelles la Principauté exerce sa souveraineté, représentent une superficie de 71 km2 et les espaces maritimes situés au‑delà (le plateau continental sur lequel Monaco détient des droits souverains) s’étendent sur un corridor d’une largeur de 3,16 km et d’une longueur de 88 km.

Le français est la langue officielle, mais l’italien et l’anglais sont aussi communément compris et parlés. La langue traditionnelle monégasque, pratiquée par les «anciens», est également enseignée aux plus jeunes dans les écoles de la Principauté; elle peut être choisie comme option facultative au baccalauréat.

La religion catholique, apostolique et romaine est la religion d’État, mais l’article 23 de la Constitution garantit la liberté des cultes. Ainsi, il existe des lieux de cultes protestant, anglican, orthodoxe grec et israélite sur le territoire de la Principauté.

La Principauté, bien qu’État tiers par rapport à l’Union européenne, a été autorisée à donner cours légal à l’euro sur son territoire le 1er janvier 1999, soit en même temps que les autres pays de la zone euro (décision du Conseil des ministres de l’Union européenne en date du 31 décembre 1998). En outre, des pièces libellées en euro et comportant une face monégasque seront frappées et acceptées légalement dans tous les États de la zone euro.

Au dernier recensement général de la population effectué en juillet 2000, la Principauté comptait 32 020 habitants (15 544 hommes et 16 476 femmes), ce qui représente une progression de 7 % par rapport à 1990. Depuis 1968, la population résidant à Monaco a augmenté de plus de 31 % et elle a doublé depuis le début du siècle. Le nouveau quartier de Fontvieille (gagné sur la mer) absorbe en très large partie cet accroissement de la population, tandis que les quartiers plus anciennement urbanisés (Monaco‑Ville et le quartier de la Condamine) voient leur population décroître très légèrement.

Quelque 120 nationalités composent la population de la Principauté, parmi lesquels 6 089 Monégasques (19 %), 10 229 Français (32 %), 6 410 Italiens (20 %) et 1 703 Britanniques (5,3 %). Les communautés suisse, allemande, belge, portugaise et nord‑américaine (États‑Unis et Canada) sont également bien représentées.

La population de nationalité monégasque résidant à Monaco a vu son nombre augmenter de près de 75 % en 30 ans (3 489 en 1968, 6 089 en 2000). Cet accroissement considérable s’expliquant entre autres par la possibilité offerte depuis 1992 à toute mère née monégasque (ou à toute Monégasque naturalisée possédant un ascendant de la même branche qui soit né monégasque) de transmettre cette nationalité à ses enfants (loi no 1155 du 18 décembre 1992 relative à la nationalité), par la faculté pour toute femme étrangère épousant un Monégasque d’acquérir la nationalité par déclaration et par la faculté que possède le Prince Souverain d’accorder la nationalité monégasque par voie de naturalisation. Pendant cette même période, la communauté française a connu un net déclin de sa population (13 424 en 1968, 10 229 en 2000). Les Italiens sont de plus en plus nombreux à vivre en Principauté: depuis 1968, leur communauté s’est accrue de 68 %.

La répartition de la population monégasque par tranche d’âge fait apparaître une pyramide des âges en forme «d’as de pique» (voir annexe). L’espérance de vie à la naissance est de 78,4 ans (74,7 ans pour les hommes et 83,6 pour les femmes). En 2000, les personnes âgées de plus de 65 ans représentent 7 181 personnes, soit 22,4 % de la population totale. Ce taux relativement élevé est stable depuis 30 ans, la Principauté de Monaco attirant historiquement une population retraitée aisée. La proportion des jeunes de 0 à 14 ans se maintient également (13,2 %). À ce titre, le taux de fécondité demeure inchangé depuis 10 ans avec 1,7 enfant par femme en âge de procréer. En revanche, les 15‑24 ans ne représentent que 8 % de la population et les 25‑64 ans plus de 56 %.

Les principaux indicateurs en matière de santé indiquent que la Principauté a atteint des niveaux particulièrement satisfaisants dans ce domaine:

a)Une espérance de vie à la naissance proche des meilleures performances mondiales (78,4 ans);

b)Un taux brut de mortalité de 17 ‰, avec près de 30 % des décès dus au cancer (28,3 % en 1999), plus de 40 % dus à des maladies de l’appareil circulatoire (44,2 % en 1999) et moins de 10 % dus à des maladies de l’appareil respiratoire (6,3 %) en 1999);

c)Un taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans de 7 ‰ pour les filles et de 9 ‰ pour les garçons, similaire aux standards des pays industrialisés.

Monaco ne disposant pas, à ce jour, de comptabilité nationale, l’activité économique s’apprécie actuellement en fonction du chiffre d’affaires que dégage la Principauté chaque année. En 2000, celui‑ci atteint 60,3 milliards de francs (9,2 milliards d’euros). Les commerces de gros et de détail (37,5 % du chiffre d’affaires total de 2000), le secteur bancaire et financier (20,8 %), le secteur industriel (7,7 %) et le secteur immobilier, du bâtiment et des travaux publics (7,2 %) sont les principaux pôles d’activités en Principauté. Il n’existe pas de statistiques définissant le revenu par habitant pour les raisons précisées ci‑dessus, mais il convient d’indiquer que conformément aux dispositions de l’arrêté ministériel no 63‑131 du 21 mai 1963 modifié par le no 84‑101 du 6 février 1984, les montants minima des salaires, primes, indemnités de toutes natures ne peuvent être inférieurs à ceux pratiqués, pour des conditions de travail identiques, dans les même professions, commerces ou industries de la région économique voisine. Ainsi, le taux horaire du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) est revalorisé chaque année au 1er juillet sur des bases identiques à la France (42,02 francs/heure (6,41 euros), soit 7 101,38 francs/mois (1 082,53 euros) en 2000). Par ailleurs, les rémunérations minimales doivent être majorées d’une indemnité exceptionnelle de 5 % de leur montant. En pratique, le «5 % monégasque» est appliqué pour tous les salaires versés en Principauté.

La population active au sens du BIT (c’est‑à‑dire la population active occupée plus les chômeurs) est estimée à 38 595 personnes au 31 décembre 2000. Depuis 1998, grâce au retour d’une croissance soutenue, la population active s’est considérablement étoffée (+ 6 000 salariés, soit 18,4 % par rapport au 31 décembre 1997). Le taux de chômage, traditionnellement bas, se situe à un niveau de 3,6 % en 2000. Le secteur public emploie 8,8 % de la population active, tandis que le secteur privé représente les neuf dixièmes restants, avec 35 168 actifs. Parmi ces derniers, 6 887 sont domiciliés à Monaco et 28 281 constituent des travailleurs frontaliers, provenant essentiellement des communes limitrophes, du département français des Alpes‑Maritimes et de l’Italie (distante de 12 km). Les hommes représentent 57,5 % des salariés du secteur privé et les femmes 42,5 %. Le secteur tertiaire (services) absorbe 82,5 % de la main‑d’œuvre, tandis que le secondaire (industrie) représente 17,4 % . Le secteur primaire est quasi inexistant, car hormis les 39 hectares d’espaces verts, le territoire monégasque est entièrement urbanisé.

II. STRUCTURE POLITIQUE GÉNÉRALE

A. Aperçu de l’histoire politique de la Principauté

Dès les plus anciennes époques de la préhistoire et la plus haute Antiquité, le Rocher de Monaco et le port naturel servent de refuge aux populations primitives, puis à des navigateurs venant d’Orient. Au VIe siècle avant J.‑C., une tribu ligure habite la région qui aurait donné son nom à Monaco. Après une période de présence phénicienne, les Romains s’installent dans la région du IIe siècle avant J.‑C. au Ve siècle de notre ère. Ils utilisent la rade de Monaco qui a pris le nom de Portus Herculis Monoeci (Port Hercule). Du début du VIe siècle à la fin du Xe siècle, la région subit de nombreuses invasions et ce n’est qu’en l’an 975 que le comte de Provence réussit à repousser les Sarrasins marquant ainsi le début d’une ère nouvelle.

En 1162, Gênes voit son autorité reconnue par l’Empereur Frédéric Ier Barberousse sur la côte ligure, jusqu’à Monaco. Les Génois installent une colonie sur le Rocher et construisent un château‑fort (1215), qui devient le poste frontière à l’ouest de la République. En 1270, une guerre civile à Gênes met aux prises les Guelfes, partisans du Pape et les Gibelins, partisans de l’Empereur romain germanique. À la suite d’une victoire de ces derniers, de nombreuses familles guelfes sont exilées parmi lesquelles celle des Grimaldi.

En réaction contre l’exil imposé aux Guelfes, le château de Monaco est pris par surprise le 8 janvier 1297 par certains d’entre eux sous la conduite de François Grimaldi dit «Malizia». Cette date marque la naissance de la souveraineté des Grimaldi sur Monaco. En 1346 et en 1355, les Grimaldi font l’acquisition des seigneuries et fiefs de Menton et Roquebrune. Ces seigneuries, avec celle de Monaco, constitueront le territoire de la Principauté jusqu’en 1861. Avant de mourir en 1454, Jean Ier prend des dispositions testamentaires fondamentales, qui vont constituer, pendant cinq siècles, la base du règlement successoral dans la Maison de Monaco. Il édicta que la succession se ferait dans sa descendance directe et légitime, par ordre de primogéniture avec priorité des descendants mâles au même degré de parenté; à défaut seulement, les femmes seraient appelées, à la condition que leurs descendants prennent le nom et les armes des Grimaldi.

Au cours du XVe siècle, la seigneurie sera reconnue notamment par le duc de Savoie, et en 1512 par le Roi de France Louis XII, qui reconnaît que Lucien, seigneur de Monaco de 1481 à 1523, ne tient la seigneurie de Monaco que «de Dieu et de son épée». À cette époque, toute vassalité disparaît vis‑à‑vis de Gênes. Les alliances conduiront les seigneurs de Monaco à être proches de la France, à lutter contre Naples, à être sous la protection de l’Espagne de 1524 à 1641, avant que, par le Traité de Péronne (1641), Louis XIII, Roi de France, replace définitivement la Principauté dans la sphère d’influence française, tout en réaffirmant la liberté et la souveraineté du Prince de Monaco. Le Traité de Péronne prononce l’attribution des fiefs du Valentinois, de Carladès, des Baux, de Saint‑Rémy au Prince Honoré II et à son fils. Louis Ier promulgue, en décembre 1678, les statuts juridiques de la Principauté ou «Code Louis». Durant la Révolution française, la Principauté est rattachée au territoire de la République en 1793 sous le nom de «Fort Hercule» jusqu’en 1814, où le Traité de Paris rétablit les Grimaldi dans leurs droits et prérogatives, en les plaçant sous protection du Roi de Sardaigne.

En 1848, Menton et Roquebrune se proclament «villes libres» et sont placées sous protection sarde. Les droits souverains sur ces deux villes seront officiellement cédés à la France par Charles III dans le Traité du 2 février 1861 signé avec Napoléon III (Monaco perd alors plus de neuf dixièmes de son territoire et six septièmes de sa population), lequel assure à nouveau l’indépendance de Monaco. Selon des articles secrets du Traité, le Prince s’engage pour lui et ses descendants à n’aliéner aucun de ses droits de souveraineté, si ce n’est en faveur de la France. Il n’accepte éventuellement un protectorat que de la France. Par ailleurs, une clause du Traité prévoit la création d’une union douanière entre les deux États, laquelle sera conclue en 1865. Le 5 janvier 1911, le Prince Albert Ier dote pour la première fois Monaco d’une organisation constitutionnelle qui règle l’organisation des pouvoirs publics et le fonctionnement des institutions.

Le 17 juillet 1918 est signé le «Traité fixant les rapports de la France avec la Principauté de Monaco». Par ce Traité, la France assure la défense de l’indépendance et de la souveraineté ainsi que l’intégrité du territoire de la Principauté. En retour, l’expression de cette souveraineté ne peut s’effectuer qu’en parfaite conformité avec les intérêts politiques, militaires, navals et économiques de la France. De même, les mesures concernant les relations internationales de la Principauté devront toujours faire l’objet d’une entente préalable entre le Gouvernement princier et le Gouvernement français. Ce Traité fait actuellement l’objet d’une renégociation.

Le 9 mai 1949, le Prince Rainier III monte sur le trône. Son règne est l’un de ceux qui ont le plus transformé la Principauté. Il intensifie et diversifie les actions mises en œuvre pendant les trois règnes précédents, aussi bien dans les domaines politique, diplomatique, international, économique et social que dans ceux de l’éducation et du sport, de la santé, de la science, de la culture et de la communication. Il y ajoute une dimension industrielle. Le 17 décembre 1962, il promulgue une nouvelle Constitution qui consacre la séparation des pouvoirs et l’État de droit. En 1993, il obtient l’admission de Monaco comme État Membre de l’Organisation des Nations Unies.

B. Le cadre institutionnel

La Principauté de Monaco est une monarchie héréditaire et constitutionnelle. La primauté du droit est reconnue sur l’ensemble des institutions et la séparation des grandes fonctions de l’État se trouve renforcée et précisée. La Constitution actuelle consacre la souveraineté et l’indépendance de la Principauté «dans le cadre des principes généraux du droit international et des conventions particulières avec la France».

La Constitution déclare par ailleurs que «la Principauté est un État de droit attaché au respect des libertés et droits fondamentaux». Ceux‑ci sont énumérés à la section C.1 du chapitre III et correspondent à de nombreux droits figurant dans les principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et notamment la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 (voir le paragraphe 78 ci‑dessous).

La Constitution ne peut faire l’objet d’aucune suspension. Sa révision totale ou partielle est subordonnée au commun accord du Prince et d’une assemblée élue, le Conseil national.

1. Le pouvoir exécutif

a)Le chef de l’État

Le Prince souverain est le chef de l’État monégasque: le pouvoir exécutif relève de sa haute autorité, le pouvoir législatif est exercé conjointement par le Prince et le Conseil national et le pouvoir judiciaire est délégué par le Prince aux cours et aux tribunaux.

Sa succession, ouverte par suite de décès ou d’abdication, s’opère dans sa descendance directe et légitime, par ordre de primogéniture avec priorité des descendants mâles au même degré de parenté.

Le Prince représente la Principauté dans ses rapports avec les puissances étrangères. Ils se traduisent par le développement de la représentation diplomatique monégasque à l’étranger – auprès de 10 États européens et d’organisations internationales (ONU et Union européenne) – et consulaire (100 missions consulaires ouvertes dans 47 pays d’Europe, d’Asie, d’Afrique et d’Amérique du Nord, centrale et du Sud), ainsi qu’au travers de la représentation consulaire étrangère à Monaco (71 pays). Au titre des rapports avec les puissances étrangères, le Prince peut conclure des accords bilatéraux de coopération, d’entraide, d’extradition, sectoriels, etc.

Le Prince signe et ratifie, après consultation du Conseil de la Couronne, les traités et conventions internationaux. Il a également permis l’adhésion de Monaco à de nombreux organismes internationaux, mentionnés en annexe, et a favorisé l’établissement en Principauté de sièges d’organisations internationales à caractère scientifique, telles la Commission internationale pour l’exploration scientifique et de la mer Méditerranée, l’Organisation hydrographique internationale, ainsi que du Laboratoire de l’environnement marin de l’Agence internationale de l’énergie atomique, etc.

Le Prince exerce le droit de grâce et d’amnistie, ainsi que le droit de naturalisation et confère les honneurs et distinctions.

b)Le gouvernement

Le gouvernement est exercé, sous la haute autorité du Prince, par un Ministre d’État et trois Conseillers de gouvernement nommés par le Prince et responsables devant lui. Le Ministre d’État et les Conseillers de gouvernement composent le Conseil de gouvernement, qui se réunit généralement une fois par semaine. Le Conseil est présidé, avec vois prépondérante, par le Ministre d’État.

i)Le Ministre d’État

Le Ministre d’État représente le Prince. Il exerce la direction des services exécutifs et dispose de la force publique; il prend les arrêtés nécessaires à l’application des lois et des ordonnances souveraines.

Il exerce également, sous l’autorité immédiate du Prince, les fonctions de Directeur des relations extérieures, qui comprennent notamment les rapports avec les gouvernements étrangers et les organisations internationales, la conduite des négociations diplomatiques, les relations avec les postes diplomatiques et consulaires de Monaco et les représentations consulaires étrangères dans la Principauté. Il coordonne les actions des missions permanentes de la Principauté de Monaco auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York et de l’Office des Nations Unies à Genève. Il mène également au travers du dispositif de la «Coopération internationale pour l’environnement et le développement» des actions dans ce domaine, essentiellement auprès des États du pourtour méditerranéen.

Certains services administratifs lui sont directement rattachés: Contrôle général des dépenses, Secrétariat général du Ministère d’État, Direction du contentieux et des études législatives, Direction de la fonction publique, Direction des relations extérieures, Centre de presse.

ii)Les Conseillers de gouvernement

Les Conseillers de gouvernement dirigent les trois départements ministériels, dont les attributions sont les suivantes.

Département de l’intérieur: sûreté publique, nationalité, cultes, associations, éducation, jeunesse et sports, affaires culturelles, action sanitaire et sociale, tutelle administrative de la commune et des établissements publics.

Département des finances et de l’économie: budget, fiscalité, administration domaniale, prix et enquêtes économiques, commerce et industrie, sociétés, propriété industrielle, tourisme, statistiques et études économiques.

Département des travaux publics et des affaires sociales: travaux publics, affaires maritimes, travail et sécurité sociale, environnement, urbanisme et construction, circulation, aviation civile, télécommunications, services publics concédés.

Chaque Conseiller de gouvernement est assisté d’un directeur général et dispose d’un secrétariat et de services administratifs placés sous l’autorité d’un directeur ou d’un chef de service.

Les fonctionnaires sont nommés par ordonnance souveraine. Leurs obligations, droits et garanties fondamentaux, ainsi que leur responsabilité, sont fixés par la loi no 975 portant statut des fonctionnaires de l’État du 12 juillet 1975.

2. Le pouvoir législatif

a)Le Conseil national

Le Conseil national comprend 18 membres, élus pour cinq ans au suffrage universel direct et au scrutin de liste. Sont électeurs les personnes, de l’un et l’autre sexe, possédant la nationalité monégasque depuis au moins cinq ans et âgées de 21 ans au moins. Sont éligibles les électeurs monégasques des deux sexes âgés de 25 ans au moins et non privés de l’éligibilité pour l’une des causes prévues par la loi no 839 sur les élections nationales et communales du 23 février 1968.

Le Prince peut, après avoir pris l’avis du Conseil de la Couronne (voir les paragraphes 45 et 46 ci‑dessous), prononcer la dissolution de l’assemblée. Il est procédé, dans ce cas, à de nouvelles élections dans un délai de trois mois.

Le Conseil national exerce le pouvoir législatif avec le Prince; chaque année, au cours de la session de novembre, il vote le budget de l’État; aucune contribution directe ne peut être établie que sur son vœu ou avec son assentiment. Le budget est voté et promulgué sous forme de loi. Le contrôle de son exécution et de la gestion financière de l’État, de la Commune et des établissements publics est assuré par une Commission supérieure des comptes.

Le Bureau du Conseil national, réélu chaque année, comprend un président et un vice‑président, désigné par l’assemblée parmi ses membres. Le Ministre d’État et les Conseillers de gouvernement assistent aux séances de l’assemblée.

b)La loi et l’ordonnance souveraine

La loi: le Prince a seul l’initiative des lois. Le Conseil national a néanmoins la faculté de présenter des propositions de lois qui, si elles sont acceptées par le gouvernement, sont présentées par celui‑ci au Prince sous forme de projets, en vue de leur approbation. Ces projets sont ensuite soumis par le Ministre d’État au Conseil national, auquel appartiennent la délibération et le vote des lois. Une collaboration s’établit alors, au sein des commissions de l’assemblée qui procèdent à l’étude du projet, entre les Conseillers nationaux et les représentants du gouvernement. Lorsque la loi est votée, sa sanction appartient au Prince qui peut soit la promulguer, soit s’abstenir de le faire. La loi est opposable aux tiers à compter du lendemain de sa publication au Journal de Monaco (Journal officiel).

L’ordonnance souveraine: délibérées en Conseil de gouvernement, les ordonnances souveraines sont présentées au Prince qui les signe et leur donne ainsi force exécutoire. Elles sont opposables aux tiers dans les mêmes conditions que les lois, c’est‑à‑dire à compter du lendemain de leur publication au Journal de Monaco.

Les ordonnances souveraines sont fréquemment des actes ayant pour objet de déterminer les modalités d’application des lois. Elles peuvent également porter sur des matières relevant de la compétence exclusive du Prince, détenteur du pouvoir exécutif, et ne sont pas alors soumises à la délibération préalable du Conseil de gouvernement: affaires relevant de la Direction des services judiciaires; nomination des membres de la Maison souveraine, du Corps diplomatique et consulaire, du Ministre d’État et des Conseillers de gouvernement, des magistrats; délivrance de l’exequatur aux représentants consulaires étrangers à Monaco; dissolution du Conseil national; distinctions honorifiques.

Enfin, les ordonnances souveraines rendent exécutoires à Monaco les traités internationaux auxquels la Principauté est partie ou déterminent leurs conditions d’application. Le Prince a en effet l’initiative et la conduite des négociations diplomatiques, et ratifie, après consultation du Conseil de la Couronne, les conventions internationales que ses plénipotentiaires ont signées. Seuls les traités affectant l’organisation constitutionnelle doivent être ratifiés en vertu d’une loi.

3. Les organes consultatifs

a)Le Conseil de la Couronne

Il est composé de sept membres de nationalité monégasque, nommés par le Prince pour une durée de trois ans. Le Président et trois membres sont directement désignés par le Prince, les trois autres étant nommés sur présentation du Conseil national et hors de son sein. Le Conseil se réunit au moins deux fois par an sur convocation du Prince.

Sa mission est de donner un avis sur les questions que le Prince lui soumet touchant aux intérêts supérieurs de l’État. Il est obligatoirement consulté sur les traités internationaux, la dissolution du Conseil national, les demandes de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité monégasque, les grâces et les amnisties. Il peut présenter au Prince ses suggestions sur les affaires dont il a de lui‑même entrepris l’étude.

b)Le Conseil d’État

Le Conseil d’État est de droit présidé par le Directeur des Services judiciaires et comprend 12 membres, nommé par le Prince. Il est chargé de donner un avis sur les projets de lois et ordonnances souveraines ou tout autre projet. Le projet de budget de l’État lui est soumis au cas où le vote des crédits par le Conseil national n’est pas intervenu avant le 31 décembre et où le report des crédits correspondants aux services votés lors de l’exercice précédent est décidé par le gouvernement.

c)Le Conseil économique et social

Il est composé de 30 membres, nommés pour trois ans par ordonnance souveraine: 10 sont présentés par le gouvernement en raison de leur compétence; 10 sont choisis sur une liste de 20 noms dressée par les syndicats de salariés; 10, enfin, sont choisis sur une liste de 20 noms dressée par les syndicats d’employeurs.

Les membres, qui peuvent être de nationalité monégasque ou étrangère, doivent être âgés de 21 ans au moins et domiciliés à Monaco depuis au moins cinq ans. Le Président est obligatoirement de nationalité monégasque. Assemblée consultative, le Conseil économique et social est appelé à donner un avis sur les questions sociales, financières, touristiques, industrielles et commerciales qui intéressent la vie économique de la Principauté.

4. La commune

Le territoire de la Principauté forme une seule commune. Celle‑ci est administrée par un Conseil communal composé de 15 membres élus pour quatre ans au suffrage universel direct et au scrutin de liste. Sont électeurs et éligibles les Monégasques âgés de 21 ans au moins et possédant cette nationalité depuis cinq ans. Le Conseil communal désigne, parmi ses membres, un maire et des adjoints, qui forment la municipalité. Il peut être dissous par un arrêté motivé du Ministre d’État, après avis du Conseil d’État.

Les attributions de la commune comprennent notamment l’état civil, l’hygiène, les halles et marchés, les festivités, les sports et l’administration des biens communaux. Le Conseil communal est obligatoirement consulté sur les projets de plans d’urbanisme, de certaines constructions d’immeubles et de création ou de suppression de zones vertes. Il vote le budget de la Commune; en cas d’excédent des dépenses, les sommes nécessaires sont inscrites dans le budget de l’État.

C. Le cadre juridictionnel

Aux termes de la Constitution du 17 décembre 1962, le pouvoir judiciaire appartient au Prince qui en délègue le plein exercice aux cours et tribunaux, et nomme les magistrats. La séparation des fonctions administrative, législative et judiciaire est assurée; l’indépendance des juges est garantie (art. 88 de la Constitution).

L’organisation judiciaire forme un ensemble homogène et complet, sous l’autorité du Directeur des Services judiciaires, qui a mission d’assurer la bonne administration de la justice. Elle met en œuvre les grands principes posés en matière de libertés et de droits fondamentaux par la Constitution. Cette dernière garantit la liberté et la sûreté individuelles. Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, devant les juges qu’elle désigne et dans la forme qu’elle prescrit. Hors le cas de flagrant délit, aucune personne ne peut être arrêtée qu’en vertu de l’ordonnance motivée d’un juge, laquelle doit être signifiée au moment de l’arrestation ou, au plus tard, dans les 24 heures. Toute détention doit être précédée d’un interrogatoire. Les peines ne peuvent être établies qu’en vertu d’une loi. Les lois pénales – qui ne peuvent avoir d’effet rétroactif – doivent assurer le respect de la personnalité et de la dignité humaine. Nul ne peut être soumis à des traitements cruels, inhumains et dégradants. La peine de mort a été abolie par la Constitution du 17 décembre 1962.

1. Le Tribunal suprême

Le Tribunal suprême est composé de cinq membres titulaires et de deux membres suppléants, nommés par le Prince sur des présentations faites par le Conseil national, le Conseil de la Couronne, le Conseil d’État, la cour d’appel et le tribunal de première instance. Le Tribunal suprême veille au respect des droits et libertés consacrés par la Constitution.

En matière constitutionnelle, il statue souverainement sur les recours en annulation, en appréciation de validité et en indemnité ayant pour objet une atteinte à ces droits et libertés.

En matière administrative, il statue souverainement:

a)Sur les recours en annulation pour excès de pouvoir formés contre les décisions des diverses autorités administratives et les ordonnances souveraines prises pour l’exécution des lois, ainsi que sur l’octroi des indemnités qui en résultent;

b)Sur les recours en cassation formés contre les décisions des juridictions administratives statuant en dernier ressort;

c)Sur les recours en interprétation et les recours en appréciation de validité des décisions des diverses autorités administratives et des ordonnances souveraines prises pour l’exécution des lois.

2. Les juridictions civiles et pénales

a)Le juge de paix

Le juge de paix siège seul et constitue le premier échelon de la hiérarchie judiciaire. En matière civile, il statue sur les différends les moins importants, dont l’objet n’excède pas une somme assez modique. En matière pénale, en qualité de juge de police, il connaît des infractions les moins graves, les contraventions, qui sont punies de peines relativement légères.

b)Le tribunal de première instance

Il est une juridiction collégiale composée d’un président et de deux assesseurs. En matière civile, commerciale et administrative, le tribunal de première instance est le juge de droit commun, auquel la loi attribue la compétence la plus générale. En matière pénale, il connaît des infractions, dites délits, qui sont punies de peines correctionnelles. Le Président du tribunal préside la juridiction des référés, qui statue en cas d’urgence.

c)La cour d’appel

En vertu du principe du double degré de juridiction, garantie fondamentale pour les justiciables, la cour d’appel constitue le juge de droit commun au second degré. Elle connaît des appels des jugements rendus par le tribunal de première instance en matière civile, commerciale, administrative et pénale. La cour comprend un premier président, un vice‑président et des conseillers.

d)Le tribunal criminel

Le tribunal criminel est chargé de juger les infractions les plus graves, qualifiées de crimes. Il est composé de trois magistrats et de trois juges supplémentaires pris à tour de rôle sur une liste de Monégasques, dressée tous les trois ans par arrêté ministériel.

e)La cour de révision judiciaire

Compétente à l’égard de toute décision de justice rendue en dernier ressort, elle a mission, non de statuer à nouveau sur les faits, mais de dire le droit après avoir examiné si les décisions qui lui sont déférées ont fait une correcte application de la loi. S’il en est ainsi, elle rejette le pourvoi. Dans le cas contraire, elle casse et annule. S’il s’agit d’une affaire civile, elle juge alors elle‑même. Au pénal, elle renvoie l’affaire devant la juridiction qui a statué, sauf à ordonner, selon les circonstances, que cette juridiction sera composée d’autres juges.

3. Les juridictions spécialisées

a)Le tribunal du travail

Juridiction paritaire – composée d’un nombre égal d’employeurs et de salariés – il est chargé de régler les conflits individuels du travail; il comprend le bureau de conciliation qui a pour rôle de susciter une solution amiable aux différends nés entre employeurs et salariés à l’occasion de l’application du contrat de travail, et le bureau de jugement, présidé par le juge de paix qui a pour compétence de trancher les différends à l’égard desquels la conciliation a été sans effet.

b)La Cour supérieure d’arbitrage

Depuis 1948, la Principauté est dotée d’une procédure destinée à assurer, par voie de conciliation et d’arbitrage, le règlement des conflits collectifs du travail qui ne peuvent être résolus par voie amiable ou par application des conventions collectives. La procédure se déroule devant trois instances successives:

i)La requête, adressée au Ministre d’État, est d’abord soumise à une Commission de conciliation, qui réunit, sous la présidence du Président du tribunal du travail, deux employeurs et deux salariés;

ii)Faute d’accord, les parties sont invitées à désigner un arbitre commun; si elles ne le font pas, le Ministre d’État procède d’office à cette désignation sur une liste établie chaque année après consultation des syndicats d’employeurs et de salariés;

iii)Les sentences arbitrales peuvent être portées devant la Cour supérieure d’arbitrage qui tient un rôle comparable à celui de la Cour de révision judiciaire.

La Cour est composée du Premier Président de la cour d’appel, de deux magistrats et deux hauts fonctionnaires; quand elle statue au fond, après cassation de la sentence arbitrale, elle comprend également deux représentants des employeurs et deux représentants des salariés.

c)La Commission arbitrale des loyers d’habitation

Elle statue sur les litiges qui opposent les propriétaires et les locataires au sujet des prix de location et des charges locatives des appartements faisant partie du secteur dit réglementé (cela concerne les immeubles construits avant 1947, dans lesquels les loyers sont établis selon des critères fixés par des textes réglementaires et qui doivent en principe être loués à des personnes ayant la qualité de prioritaires en raison de plusieurs critères). La Commission comprend le Président du tribunal de première instance, un propriétaire, un locataire et un expert.

d)La Commission arbitrale des loyers commerciaux

La Commission a compétence pour trancher les différends qui opposent les propriétaires et les locataires au sujet des conditions de renouvellement et de révision des baux commerciaux et intervient lorsqu’une tentative de conciliation a échoué. Elle est composée du Président du tribunal de première instance et de deux juges assesseurs, commerçants ou industriels.

4. Le ministère public

Le ministère public est un corps de magistrats ayant pour mission de veiller, d’une manière générale, à l’ordre public, de rechercher et de poursuivre les crimes et délits, d’assurer au nom du Prince l’exécution des lois et des décisions de justice. Le ministère public est représenté auprès de toutes les juridictions de la Principauté par le parquet général, dont le chef, le Procureur général, est assisté par des substituts. Il est placé sous l’autorité du Directeur des services judiciaires, mais ses représentants disposent, à l’audience, de la plus entière liberté de parole.

III. CADRE JURIDIQUE GÉNÉRAL DE LA PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

L’ensemble du système juridique monégasque est conçu de manière à garantir le respect des droits de l’homme. En vertu de l’article 19 de la Constitution, nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi et nul ne peut être arbitrairement détenu: une arrestation ne peut être effectuée qu’en vertu de l’ordonnance motivée d’un juge (ou dans les 24 heures suivant celle‑ci).

Les lois, essentiellement regroupées au sein des codes pénal, civil, de procédure pénale et de procédure civile, déterminent les conditions de mise en œuvre et de protection de ces droits. Les tribunaux en assurent l’application.

A. Autorités judiciaires et administratives compétentes en matière de droits de l’homme

Aux termes de l’article 90 de la Constitution, le Tribunal suprême statue souverainement sur les recours en annulation, en appréciation de validité et en indemnité ayant pour objet une atteinte aux libertés et droits fondamentaux consacrés par le titre III de la Constitution (voir les paragraphes 55 et 56 ci‑dessus). Ainsi, les personnes physiques ou morales peuvent obtenir l’annulation des actes publics contraires aux libertés reconnues par la Constitution ou aux autres règles de droit et la réparation des préjudices causés par le fonctionnement des pouvoirs publics. Cette exigence de constitutionnalité et de légalité des actes va très loin puisqu’elle autorise le Tribunal suprême à invalider a posteriori des lois jugées non conformes aux principes généraux du droit intégrés dans la Constitution et à annuler les actes administratifs quelle que soit leur position dans la hiérarchie des normes. Dans les faits, le Tribunal suprême a déjà, à plusieurs reprises, annulé totalement ou partiellement des lois et des ordonnances souveraines.

Les tribunaux judiciaires (tribunal de première instance, cour d’appel et Cour de révision) assurent l’application des lois dans le strict respect des droits de l’homme, conformément aux règles protectrices édictées par les codes.

La Commission de contrôle des informations nominatives (CCIN), instituée par la loi no 1165 du 23 décembre 1993 et opérationnelle depuis 2000, est chargée de recevoir les déclarations de mise en œuvre de traitements automatisés d’informations nominatives effectuées par les personnes physiques ou les personnes morales de droit privé; elle doit également donner son avis lorsque des traitements doivent être mis en œuvre par des personnes morales de droit public. Dans le prolongement de cet enregistrement (ou des mises à jour) des déclarations de traitement, la CCIN peut se faire communiquer tous les documents, pièces ou informations qu’elle juge utiles auprès des opérateurs économiques ou des tiers concernés. Les enquêteurs de la CCIN peuvent contrôler le fonctionnement des traitements automatisés et signaler les irrégularités relevées; ils peuvent procéder à la convocation et à l’audition des intéressés. La CCIN instruit les pétitions et réclamations qui lui sont adressées et présente au Ministre d’État ses propositions: lorsque des irrégularités sont relevées à l’encontre de personnes physiques ou de personnes morales de droit privé, le Ministre d’État met en demeure la personne responsable de mettre fin aux irrégularités ou d’en supprimer les effets.

Si la mise en demeure est restée infructueuse, le Président du tribunal de première instance, saisi par le Ministre d’État et statuant comme en matière de référé, ordonne toutes les mesures (éventuellement avec astreinte) propres à faire cesser les irrégularités, sans préjudice des sanctions pénales encourues. Lorsque des irrégularités sont observées dans la mise en œuvre de traitements par des services dépendant d’une personne morale de droit public, le Ministre d’État, également saisi par le Président de la CCIN, prend toutes mesures pour qu’il soit mis fin aux irrégularités constatées ou que leurs effets soient supprimés.

B. Recours dont dispose une personne qui prétend que ses droits ont été violés et systèmes d’indemnisation et de réhabilitation

Tout texte législatif ou réglementaire, toute décision administrative portant atteinte aux droits et libertés fondamentaux de la personne peut faire l’objet d’un recours devant le Tribunal suprême, lequel peut annuler une telle décision (art. 90 de la Constitution). Cette annulation a l’autorité absolue de la chose jugée et s’impose à tous, y compris à l’administration qui est tenue d’exécuter les arrêts rendus (Tribunal suprême, 20 février 1969, hoirs Aureglia et autres, recueil à sa date).

Toute personne qui constate une infraction dans le traitement automatisé d’informations nominatives la concernant peut saisir la Commission de contrôle des informations nominatives, qui fera procéder aux contrôles nécessaires et saisira, le cas échéant, le Ministre d’État pour y mettre fin selon la procédure décrite au paragraphe 71 ci‑dessus.

Si une décision administrative litigieuse a causé un dommage, la victime peut rechercher la responsabilité de l’État et obtenir l’allocation d’une indemnité en cas de préjudice spécial et anormal (Tribunal suprême, 1er février 1994, Association des propriétaires de Monaco, Recueil à sa date). Le Code pénal a prévu des sanctions spécifiques en cas de violations commises par des fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions (art. 106 à 136 du Code pénal).

Si la violation des droits et libertés est le fait d’une personne privée, la victime pourra saisir les tribunaux répressifs en cas d’infraction ou les tribunaux civils en cas de faute. Dans tous les cas, si cette violation est avérée, la juridiction saisie accordera une indemnisation du préjudice subi par la victime.

C. Protection des droits prévus dans les divers instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

La Principauté de Monaco est partie à la plupart des instruments relatifs aux droits de l’homme: elle a notamment adhéré aux deux Pactes internationaux relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels et aux droits civils et politiques, à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et à la Convention relative aux droits de l’enfant. La Constitution du 17 septembre 1962 souligne, à ce titre, que la Principauté est un État de droit attaché au respect des libertés et des droits fondamentaux. Ceux‑ci sont énumérés dans le détail au titre III de la Constitution et reprennent la grande majorité des droits prévus dans les divers instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

1. Droits garantis par la Constitution

Le titre III de la Constitution détermine précisément les droits et libertés fondamentaux (art. 17 à 32 de la Constitution) lesquels regroupent à la fois des droits d’ordre personnel et des libertés publiques:

–L’égalité devant la loi (art. 17);

–La liberté et la sûreté des personnes (art. 19 et 20);

–La légalité des peines et la non‑rétroactivité des lois pénales (art. 20, al. 1);

–Le droit au respect de la personnalité et de la dignité (art. 20, al. 2);

–L’abolition de la peine de mort (art. 20, al. 3);

–L’inviolabilité du domicile (art. 21);

–Le droit au respect de la vie privée et familiale et au secret de la correspondance (art. 22);

–La liberté des cultes (art. 23);

–La liberté d’opinion (art. 23);

–Le droit de propriété (art. 24);

–La liberté du travail (art. 25);

–Le droit à l’aide de l’État en cas d’indigence, chômage, maladie, invalidité, vieillesse et maternité (art. 26);

–Le droit à l’instruction gratuite, primaire et secondaire (art. 27);

–Le droit à l’action syndicale (art. 28);

–La reconnaissance du droit de grève (art. 28, al. 2);

–Le droit de réunion (art. 29);

–Le droit d’association (art. 30);

–Le droit de pétition aux autorités publiques (art. 31).

Aux termes de l’article 93 de la Constitution, celle‑ci ne peut faire l’objet d’aucune mesure de suspension, garantissant ainsi la permanence des droits énoncés ci‑dessus.

2. Droits garantis par la loi et la jurisprudence

Le législateur est également intervenu au plan législatif et réglementaire pour garantir la défense des droits fondamentaux. Ainsi, des textes protégent l’action syndicale et sanctionnent pénalement toute entrave à son libre exercice (loi no 417 du 7 juin 1945 sur la protection du droit syndical, modifiée par la loi no 1005 du 4 juillet 1978, et loi no 957 du 18 juillet 1974), garantissent la liberté d’association (loi no 1072 du 27 juin 1984) ou le droit de grève (loi no 1025 du 1er juillet 1980). De plus, la loi no 1165 du 23 décembre 1993 réglemente les traitements d’informations nominatives (voir le paragraphe 71 ci‑dessus) qui stipulent que ceux‑ci ne doivent pas porter atteinte aux libertés et droits fondamentaux consacrés par le titre III de la Constitution. Ainsi personne – à l’exception des autorités judiciaires, administratives, sanitaires ou médicales dûment autorisées – ne peut collecter, enregistrer ou utiliser des informations nominatives à caractère médical, concernant des infractions, des condamnations ou des mesures de sûreté ou encore faisant apparaître des opinions ou des appartenances politiques, raciales, religieuses, philosophiques ou syndicales, sauf acceptation écrite et expresse de la personne intéressée; celle‑ci peut à tout moment revenir sur cette acceptation et solliciter de l’auteur ou de l’utilisateur du traitement la destruction ou l’effacement des informations la concernant.

La jurisprudence a précisé les divers droits consacrés par la Constitution, comme par exemple: le principe d’égalité (Tribunal suprême, 31 janvier 1975, Weill, recueil à sa date), la liberté d’expression des opinions (Tribunal suprême, 13 août 1931, Chiabaut, recueil à sa date), le droit de propriété (Tribunal suprême, 3 juin 1970, SCI Patricia, recueil à sa date), le droit d’action syndicale (Tribunal suprême, 14 juin 1983, Syndicat du personnel hospitalier du Centre hospitalier Princesse Grace, recueil à sa date).

D. Modalités d’incorporation des instruments relatifs aux droits de l’homme au droit interne et modalités d’invocation de ces instruments devant les instances judiciaires

Comme tous les traités internationaux, les instruments relatifs aux droits de l’homme doivent être signés et ratifiés par le Prince (art. 14 de la Constitution). Ils sont ensuite rendus exécutoires par ordonnance souveraine. Dans le cas où l’instrument international ratifié et rendu exécutoire nécessite une modification du droit interne monégasque, le Prince peut prendre, en vertu de l’article 68 de la Constitution, les ordonnances nécessaires pour l’application dudit instrument ou recourir à une loi. Toutefois, en vertu de l’article 14 de la Constitution, une loi s’avère nécessaire dans le cas où le traité affecte l’organisation constitutionnelle.

Ce n’est qu’après avoir été rendues exécutoires à Monaco (les lois et ordonnances souveraines ne sont opposables aux tiers qu’à compter du lendemain de leur publication au Journal de Monaco) que les dispositions d’un instrument international peuvent être invoquées devant les autorités administratives ou les instances judiciaires de la Principauté.

Ainsi, par un arrêt en date du 30 août 2001, la cour d’appel de Monaco a confirmé le principe de l’application directe au droit monégasque du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966.

E. Institutions ou organismes nationaux chargés de veiller au respect des droits de l’homme

Outre les autorités judiciaires et administratives compétentes en matière de droits de l’homme décrites dans la section A et qui sont, chacune dans leur domaine, chargées de veiller à leur respect, il n’existe pas à Monaco d’institution ou d’organisme indépendant spécialement créé à cet effet. Cette absence de structure s’explique notamment par la petite taille du pays et par le fait que le contrôle juridictionnel très large opéré par le Tribunal suprême permet à tout individu de défendre directement une atteinte à l’un de ses droits fondamentaux.

L’assistance judiciaire constitue cependant une institution qui joue un rôle primordial quant à l’effectivité de la garantie du respect des droits de l’homme. Elle permet la prise en charge des frais de procès pour toute personne – monégasque ou étrangère – étant dans l’impossibilité de faire l’avance des frais de procédure sans entamer les ressources nécessaires pour son entretien et celui de sa famille. Outre les frais de procédure, le bénéfice de l’assistance judiciaire inclut la dispense des sommes dues aux officiers ministériels et aux avocats‑défenseurs pour droits, émoluments et honoraires ainsi que la dispense, le cas échéant, de la caution pour le paiement des frais et dommages‑intérêts résultant du procès. Enfin, l’assistance judiciaire s’étend à la signification du jugement et aux actes d’exécution des décisions de justice obtenues avec son aide.

Le champ d’application de l’assistance judiciaire concerne les contentieux civils et administratifs (art. 38 à 56 du Code de procédure civile), pénaux (art. 167 et 399 du Code de procédure pénale) ainsi que certains contentieux relevant de juridictions spécialisées comme le tribunal du travail (art. 52 de la loi no 446 du 16 mars 1946 portant création du tribunal du travail et art. 32 de la loi no 790 du 18 août 1965, relative aux accidents du travail).

IV. INFORMATION ET PUBLICITÉ

En premier lieu, il est important de souligner qu’à Monaco, c’est la Constitution elle‑même (et non un préambule ou une simple «déclaration») qui énonce les libertés et droits fondamentaux, assurant ainsi une diffusion optimale de ces derniers. Par ailleurs, les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, une fois ratifiés conformément aux article 14 et 68 de la Constitution, sont systématiquement publiés au Journal de Monaco. D’autres magazines locaux s’en font largement l’écho.

Le Gouvernement princier envisage de communiquer l’ensemble des rapports présentés en application des divers instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme au Centre de presse de la Principauté et de les diffuser par le biais du site officiel Internet de Monaco («www.gouv.mc») auprès du grand public, des organisations non gouvernementales et des associations de la Principauté concernées par les questions traitées.

Par ailleurs, dans le cadre de la célébration du cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, en 1998, le Gouvernement princier a organisé un certain nombre de manifestations destinées à sensibiliser le plus grand nombre de personnes (à la fois les élèves des établissements scolaires de la Principauté et le grand public) aux questions liées au respect et à la promotion des droits de l’homme:

a)Ainsi, la Direction de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports a décidé d’inclure, dans le programme scolaire de l’année scolaire 1998/99, des cours de sensibilisation sur les fondements et les principes de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Le Manuel pour l’éducation aux droits de l’homme, édité par l’UNESCO, a été largement diffusé dans les établissements scolaires de la Principauté;

b)Dans le cadre des activités organisées par la Fondation Prince‑Pierre‑de‑Monaco, M. Tahar Ben Jelloun, écrivain, a présenté en Principauté, en décembre 1998, une conférence ayant pour thème les droits de l’homme;

c)Le discours de rentrée des tribunaux de la Principauté, en octobre 1998, a eu pour thème les droits de l’homme et la Déclaration universelle de 1948;

d)La Direction du tourisme et des congrès de la Principauté a fait figurer dans le dernier numéro de l’année 1998 de la plaquette d’information gratuite intitulée «L’Essentiel», une présentation de l’histoire et de la portée de la Déclaration universelle des droits de l’homme ainsi que des manifestations organisées par Monaco à l’occasion du cinquantième anniversaire de ladite Déclaration;

e)La Société «Monaco Telecom» a édité 50 000 exemplaires d’une carte téléphonique spéciale de 50 unités afin de célébrer le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme;

f)Une affiche réalisée par l’artiste Folon a été rééditée par la Direction des affaires culturelles de Monaco, pour servir de support à l’annonce au public du cinquantième anniversaire de ladite Déclaration; elle a été diffusée en Principauté;

g)Une flamme postale, rappelant le cinquantième anniversaire de la Déclaration précitée, a été émise par l’Office des émissions des timbres‑poste de Monaco et apposée sur le courrier au départ de la Principauté, en décembre 1998.

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