HRI

Instruments

internationaux relatifs

aux droits de l'homme

Distr.GÉNÉRALE

HRI/CORE/1/Add.116

1er octobre 2001

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

DOCUMENT DE BASE CONSTITUANT LA PREMIÈRE PARTIE DES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES

République turque

[17 septembre 2001]

TABLE DES MATIÈRES

ParagraphesPage

I.TERRITOIRE ET POPULATION1 – 103

A.Géographie et climat1 – 83

B.Population9 – 104

II.STRUCTURE POLITIQUE GÉNÉRALE11 – 495

A.Histoire11 – 125

B.Structure unitaire de l’État13 – 166

C.La Constitution17 – 256

D.Le pouvoir exécutif26 – 348

E.Le pouvoir législatif35 – 3910

F.Le pouvoir judiciaire40 – 4911

III.CADRE JURIDIQUE GÉNÉRAL DE LA PROTECTIONDES DROITS DE L’HOMME50 – 8713

A.Protection constitutionnelle des droits fondamentaux50 – 5813

B.Recours garantissant l’exercice des droits fondamentaux59 – 6715

C.Organes d’État compétents dans le domainedes droits de l’homme68 – 8216

D.Statut des instruments internationaux relatifsaux droits de l’homme dans l’ordre juridique turc83 – 8720

IV.INFORMATION ET PUBLICITÉ88 – 9722

I. TERRITOIRE ET POPULATION

A. Géographie et climat

Géographie

1.Située à la croisée des continents asiatique, européen et africain, la Turquie a pour pays limitrophes la Géorgie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan (Nakhitchevan) et l’Iran à l’est, la Bulgarie et la Grèce à l’ouest, et la Syrie et l’Iraq au sud. La Turquie est dotée d’une triple façade maritime: sur la mer Méditerranée au sud, la mer Noire au nord et la mer Égée à l’ouest.

2.Le territoire terrestre de la République turque couvre 814 578 km2, dont 3 % se trouvent sur le continent européen (Thrace) et les 97 % restants sur le continent asiatique (Anatolie). Le territoire turc a la forme d’un rectangle d’environ 550 km de large et 1 500 km de long. Ses côtes s’étirent sur 8 333 km et ses frontières terrestres sur 2 875 km.

3.L’altitude moyenne de la Turquie est assez élevée et son territoire présente une morphologie variée. Les montagnes couvrent une bonne partie de la Turquie qui compte également de nombreuses zones de plaine, de plateau et de dépression. Ces caractéristiques influent tant sur le climat que sur l’habitat et la vie économique. Sur la base de critères tels que le climat, la végétation naturelle et la répartition des types de culture, on distingue les sept régions géographiques ci-après: littoral de la mer Méditerranée, littoral de la mer Égée, littoral de la mer de Marmara, littoral de la mer Noire, Anatolie centrale, Anatolie orientale et Anatolie du Sud‑Est.

4.Les principales chaînes de montagne du pays montagneux qu’est la Turquie sont dans l’ensemble parallèles aux côtes dans le nord (chaîne Pontique) et dans le sud (monts Taurus). Ces chaînes montagneuses sont séparées les unes des autres par les vastes plaines centrales de l’Anatolie. Ces chaînes convergent vers l’est de la Turquie, où elles culminent. L’altitude va en décroissant vers l’ouest. Les côtes de la mer Égée et de la mer de Marmara sont moins montagneuses, ces régions étant pour l’essentiel constituées par des dépressions. De vastes plaines occupent l’Anatolie du Sud‑Est ainsi que la partie centrale de la Turquie, au‑delà du Taurus.

5.La Turquie compte de nombreux cours d’eau, dont une grande partie a été aménagée pour produire de l’électricité. La plupart des fleuves se jettent dans l’une des mers baignant la Turquie alors que les autres quittent le territoire turc avant de rejoindre la mer. Les principaux fleuves de l’Anatolie orientale et de l’Anatolie du Sud‑Est, le Tigre et l’Euphrate, débouchent ainsi dans le golfe Arabo‑Persique, tandis que le Yeşil Irmak, le Kizil Irmak et le Sakarya se jettent dans la mer Noire après avoir arrosé l’Anatolie centrale; le Susurluk, le Biga et le Gönen à l’ouest ont leur embouchure dans la mer de Marmara; le Gediz, le Büyük et le Küçük Menderes se jettent dans la mer Égée. Les principaux cours d’eau débouchant dans la mer Méditerranée sont le Seyhan, le Ceyhan et le Göksu, ainsi que le Dalaman et l’Essen. Le Kizil Irmak (1 355 km) est le plus long fleuve coulant entièrement en Turquie.

6.La superficie cumulée des lacs turcs est d’environ 9 200 km2. L’Anatolie orientale est la région comptant le plus grand nombre de lacs, dont le plus étendu de Turquie: le lac de Van (3 713 km2). Les lacs d’eau douce servent à l’irrigation et la pêche est pratiquée dans de nombreux lacs. Au cours des 30 dernières années un grand nombre de barrages aux retenues assez importantes ont été construits.

7.La Turquie est entourée par la mer sur trois côtés et reliée aux océans par plusieurs voies maritimes. La mer de Marmara et les détroits turcs sont des voies d’eau très importantes reliant la mer Noire au monde extérieur. La mer de Marmara, totalement enclavée dans les frontières nationales, débouche dans la mer Noire par le Bosphore et dans la mer Égée et la mer Méditerranée par le détroit des Dardanelles. La partie turque du littoral de la mer Égée est accidentée et compte de nombreux baies et golfes de même que la partie occidentale du littoral méditerranéen de la Turquie, sa partie orientale étant moins découpée.

Climat

8.La Turquie est située en zone tempérée mais le climat y varie selon les régions en fonction du relief et du fait que les montagnes sont parallèles aux côtes. Les régions littorales se caractérisent par un climat maritime doux tandis que les régions de l’intérieur, entourées de montagnes, présentent un climat continental. La région méditerranéenne se caractérise par des étés très chauds et secs et des hivers doux et pluvieux. Le climat méditerranéen règne également dans la région de la mer Égée et dans le sud de la région de la mer de Marmara. La région de la mer Noire se caractérise par un climat maritime plus doux et pluvieux. Dans les régions de l’intérieur, les étés sont chauds et peu arrosés tandis que les hivers sont rigoureux et enneigés – caractéristiques d’un climat de steppe. En Anatolie orientale, les étés sont frais et les hivers très froids et très enneigés. Dans l’Anatolie du Sud‑Est, les étés sont chauds et secs et les hivers ne sont pas très froids.

B. Population

9.Données démographiques (pour 2000):

Population totale:

65 293 000

Pourcentage de la population urbaine:

67,6

Pourcentage de la population rurale:

32,4

Densité démographique:

85 habitants par km2

Taux d’accroissement de la population:

14,8 pour 1 000

Taux de natalité:

21,8 pour 1 000

Taux de mortalité:

6,7 pour 1 000

Indice synthétique de fécondité:

2,5 enfants par femme

Taux de mortalité infantile:

35,3 pour 1 000 naissances vivantes

Taux de mortalité maternelle:

55 pour 100 000 naissances vivantes

Espérance de vie:

66,9 ans pour les hommes

71,5 ans pour les femmes

(69,1 ans en moyenne)

Proportion de la population âgée de moins de 15 ans

29,9 %

Proportion de la population âgée de plus de 65 ans

5,6 %

Taux d’alphabétisation

94,2 % pour les hommes

77,4 % pour les femmes

(85,8 % en moyenne)

10.Indicateurs économiques (pour 2000):

Produit national brut:

198,6 milliards de dollars

PNB par habitant:

2 986 dollars

Taux annuel d’inflation:

39 %

Taux de chômage:

6,6 %

II. STRUCTURE POLITIQUE GÉNÉRALE

A. Histoire

11.Au cours de l’histoire, les Turcs ont créé de nombreux États dans différentes zones géographiques des continents asiatique et européen. Au fil des siècles, les Turcs ont fondé une série d’États puissants dans les plaines de l’Asie centrale avant de migrer vers l’ouest. Les Turcs seldjoukides, qui se sont établis dans la péninsule anatolienne après la bataille de Malazgirt en 1071, ont dominé cette région pendant près de deux siècles. L’empire ottoman, fondé au début du XIVe siècle en Anatolie, contrôlait de vastes territoires en Europe, en Asie et en Afrique et a figuré au nombre des grandes puissances pendant plus de six siècles avant de s’effondrer pour être finalement remplacé par la République turque, proclamée le 29 octobre 1923. Grâce aux réformes couronnées de succès de Mustafa Kemal Atatürk, fondateur de la République, la Turquie est devenue un État moderne. Depuis sa création, la République turque n’a cessé de mener une politique de paix. La politique étrangère de la Turquie a pour principes directeurs: entretenir des relations amicales et mutuellement avantageuses avec tous les pays; promouvoir la coopération régionale et internationale; s’efforcer de régler pacifiquement les différends; contribuer à la paix, à la stabilité et à la prospérité aux niveaux régional et international.

12.La Turquie est membre de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, du Conseil de l’Europe, de l’Organisation de coopération et de développement économiques, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, de l’Organisation de la Conférence islamique, de l’Organisation de coopération économique et de l’Organisation de coopération économique de la mer Noire. La Turquie a en outre conclu un accord d’association avec l’Union européenne et aspire à en devenir membre à part entière.

B. Structure unitaire de l’État

13.La République turque est un État unitaire subdivisé en 81 provinces administratives. Cette structure unitaire trouve son origine dans le Pacte national de 1920, adopté durant la guerre d’indépendance, qui fixait les frontières du pays. Le combat acharné mené pour libérer le territoire de l’occupation étrangère et y instituer un État souverain a conditionné la structure unitaire de l’État. L’Anatolie, qui au cours de son histoire a accueilli de nombreuses civilisations, est une mosaïque de cultures. Tout en protégeant cette diversité culturelle, la Constitution consacre l’indivisibilité de l’État et de la nation. Les facteurs historiques, sociaux, économiques, géographiques et culturels ont déterminé la forme de l’État.

14.L’État unitaire s’organise autour de l’administration centrale et des administrations locales. L’administration centrale, outre les organes législatifs et judiciaires, se compose du bureau du Premier Ministre et des ministères, à quoi s’ajoutent certains organismes liés aux ministères ou en relevant.

15.La République turque s’est dotée d’un État unitaire décentralisé. Les différentes régions du pays sont administrées par des élus locaux et des représentants de l’administration centrale. Les structures administratives locales (administrations provinciales spéciales, municipalités et villages) sont dotées d’une personnalité juridique distincte et investies de devoirs et de compétences et d’avoirs distincts de ceux de l’État. Les structures administratives locales sont régies par des lois adoptées par l’administration centrale et fonctionnent dans ce cadre. Un mécanisme de supervision dit «tutelle administrative» a été institué afin d’éviter que les administrations locales ne soient dominées par des intérêts politiques partisans et ne portent atteinte au principe d’égalité. Dans l’exercice de sa tutelle administrative, l’administration centrale détermine si les actes des collectivités locales sont conformes à la loi et, parfois même, s’ils sont appropriés. Dans l’exercice de sa tutelle l’administration centrale ne peut toutefois se substituer à l’administration locale et effectuer des transactions. Les décisions prises par le conseil provincial sont ainsi soumises à l’approbation du Gouverneur.

16.La Constitution envisage les administrations locales sous les angles territorial et fonctionnel. Les administrations locales sont les administrations provinciales spéciales, les municipalités et les villages. Les administrations locales sont des personnes morales publiques constituées en vue de répondre aux besoins collectifs locaux de la population et dont les organes de décision sont élus par le peuple. Les administrations d’ordre fonctionnel sont également appelées «administrations de service locales» ou «administrations autonomes». Elles sont constituées en fonction de la nature du service et restent en dehors de l’administration générale. Elles sont indispensables à une société moderne et se sont considérablement développées en peu de temps. Les organisations professionnelles possédant les caractéristiques d’organismes publics en constituent un exemple.

C. La Constitution

17.Les travaux préparatoires à l’élaboration d’une constitution ont commencé dans la seconde moitié du XIXe siècle, la première Constitution de la Turquie étant adoptée en 1876 au cours de la dernière phase de l’Empire ottoman. La deuxième Constitution, celle de 1921, a été promulguée durant la guerre d’indépendance et ses dispositions étaient dictées par les nécessités de la guerre. Trois Constitutions ont été promulguées depuis l’instauration de la République. La première Constitution de la République turque a été adoptée en 1924, la deuxième en 1961 et la troisième, en vigueur à l’heure actuelle, a été adoptée en 1982 par voie de référendum.

18.La République turque repose sur le principe de la séparation des pouvoirs, à l’instar de toutes les démocraties modernes. Dans le préambule de la Constitution, qui précise les fondements de l’État, il est souligné que la séparation des pouvoirs n’implique pas un ordre de préséance entre les organes de l’État, mais consiste en l’exercice exclusif par chacun d’eux de compétences et fonctions étatiques déterminées assorti d’une forme de coopération entre eux.

19.Aux termes de la Constitution, la souveraineté appartient sans condition ni réserve à la nation turque. Le peuple exerce sa souveraineté directement par les élections et indirectement par des organes habilités dans le cadre des principes fixés par la Constitution. La souveraineté est mise en œuvre par les branches législative, exécutive et judiciaire. Le pouvoir législatif appartient à la Grande Assemblée nationale de Turquie et ne peut être délégué. Le pouvoir et les fonctions exécutifs sont exercés par le Président de la République et le Conseil des ministres, conformément à la Constitution et à la loi. Le pouvoir judiciaire est exercé par des tribunaux indépendants au nom de la nation turque.

20.Le principe dont découle la séparation des pouvoirs est la primauté du droit, en vertu duquel la loi et la société sont régies par le droit. Les pouvoirs des organes législatif et exécutif sont limités et contrebalancés par le pouvoir judiciaire en vertu du principe de la primauté de la loi. Toutes les procédures et activités législatives et exécutives sont soumises à un contrôle judiciaire. Le caractère démocratique de l’administration étatique est ainsi assuré. La Constitution énonce les règles garantissant ce système. Les dispositions de la Constitution sont des règles juridiques fondamentales qui lient les organes législatif, exécutif et judiciaire, le Gouvernement et toutes les personnes physiques et morales. Ces dispositions constituent la source de la légalité des procédures gouvernementales.

21.La Constitution dispose que l’État turc est une République et que la souveraineté appartient sans condition ni réserve à la nation. La République turque est un État de droit, démocratique, laïque et social, respectueux des droits de l’homme et attaché au nationalisme d’Atatürk.

22.Le fait que la souveraineté appartient sans condition ni réserve à la nation se reflète dans le modèle de l’État démocratique. Le type de démocratie institué par la Constitution est la démocratie représentative. Le peuple et ses représentants exercent donc de manière indirecte ces droits souverains. Cette souveraineté est mise en œuvre par les organes habilités conformément aux principes de la séparation des pouvoirs et aux dispositions de la Constitution. Nul ni aucun organe ne peut exercer d’autorité étatique n’ayant pas sa source dans la Constitution. La forme d’exercice direct de la souveraineté que constitue le référendum n’est prévue que pour les amendements à la Constitution. Les organes habilités à exercer la souveraineté ne peuvent le faire que dans le cadre démocratique et le système juridique fixé par les préceptes démocratiques.

23.L’État de droit institué par la Constitution repose sur le principe de protection des droits et libertés fondamentaux et de séparation des pouvoirs. La primauté du droit est le socle de l’édifice. La procédure législative est soumise au contrôle de la Cour constitutionnelle et la procédure administrative et les actes de l’administration au contrôle des tribunaux administratifs.

24.En vertu du principe de laïcité consacré par la Constitution, nul ne peut, de quelque manière que ce soit, exploiter la religion, les sentiments religieux ou les choses considérées comme sacrées par la religion, ni en abuser dans le but de faire reposer, fût‑ce partiellement, l’ordre social, économique, politique ou juridique de l’État sur des préceptes religieux ou de s’assurer un intérêt ou une influence politique ou personnel.

25.Les partis politiques sont des composantes indispensables de la vie démocratique. La Constitution garantit à cet égard l’indépendance de l’État, l’indivisibilité du pays et de la nation, la souveraineté nationale, la promotion de la liberté et de la démocratie, la laïcité, les droits de l’homme et les libertés fondamentales et le principe de l’État de droit.

D. Le pouvoir exécutif

26.Le pouvoir exécutif est exercé par le Président de la République et le Conseil des ministres. Les institutions dont le nom ou la structure organisationnelle sont mentionnés dans la section de la Constitution relative au pouvoir exécutif ont le statut d’«institutions constitutionnelles»; parmi elles figurent les établissements et les instituts spéciaux d’enseignement supérieur, les établissements publics d’enseignement professionnel, la Société turque de radiotélédiffusion et l’Institut supérieur Atatürk de culture, de langue et d’histoire.

Le Président

27.Le Président de la République est le chef de l’État. En cette qualité, il représente la République turque et incarne l’unité de la nation turque. Le Président est élu par la Grande Assemblée nationale de Turquie, soit parmi ses propres membres ayant atteint l’âge de 40 ans accomplis et fait des études supérieures, soit parmi les citoyens turcs possédant ces qualités et celles qui sont requises pour être élus députés. Le Président est élu pour sept ans au scrutin secret à la majorité des deux tiers du nombre total des membres de la Grande Assemblée nationale de Turquie. Si le Président élu est membre d’un parti ou de la Grande Assemblée nationale de Turquie, il voit ses liens avec son parti rompus et perd sa qualité de membre de l’Assemblée. Nul ne peut être élu plus d’une fois Président de la République. Au moment de son entrée en fonctions, le Président de la République prête serment devant la Grande Assemblée nationale de Turquie dans les termes énoncés dans la Constitution.

28.Le Président de la République veille à l’application de la Constitution et au fonctionnement régulier et harmonieux des organes de l’État. À ces fins, le Président est investi de pouvoirs et attributions d’ordres législatif, exécutif et judiciaire. Dans le domaine législatif, le Président a pour attributions: de convoquer la Grande Assemblée nationale de Turquie en cas de nécessité; de promulguer les lois et le cas échéant de renvoyer les lois au Parlement en vue d’une nouvelle délibération; d’organiser un référendum en vue d’apporter les amendements qu’il juge nécessaires à la Constitution; de saisir la Cour institutionnelle d’un recours en annulation des lois, des décrets‑lois, du règlement intérieur de la Grande Assemblée nationale de Turquie ou de certaines de leurs dispositions, qu’il estime inconstitutionnelles; de décider de la tenue de nouvelles élections législatives quand les circonstances l’exigent. Dans le domaine exécutif les fonctions du Président sont très vastes: il nomme le Premier Ministre, ainsi que les ministres sur proposition du Premier Ministre; il accrédite les représentants de l’État turc auprès des États étrangers et reçoit l’accréditation des représentants des États étrangers; il entérine et promulgue les traités internationaux. En outre, il signe les décrets, gracie des individus ou réduit leur peine s’ils remplissent certaines conditions, il nomme les membres et le Président du Conseil de contrôle d’État, du Conseil de l’enseignement supérieur et les recteurs d’université. En matière judiciaire, les attributions du Président se limitent à la nomination des membres des juridictions supérieures.

29.Dans la section de la Constitution relative à la présidence sont mentionnées deux institutions constitutionnelles: le Secrétariat général de la Présidence de la République et le Conseil de contrôle d’État. Ce dernier est chargé de veiller à l’amélioration des services administratifs d’une manière coordonnée et efficace et au respect de la légalité par l’administration.

Le Conseil des ministres

30.Le Conseil des ministres se compose du Premier Ministre et des ministres. Le Premier Ministre est nommé par le Président de la République parmi les membres de la Grande Assemblée nationale de Turquie. Les ministres sont désignés par le Premier Ministre, parmi les membres de la Grande Assemblée nationale de Turquie ou parmi les personnes possédant les qualités requises pour être éligibles à la députation et ils sont nommés par le Président de la République. Le cas échéant, il est mis fin à leurs fonctions par le Président de la République, sur proposition du Premier Ministre.

31.Une fois constitué le Conseil des ministres, son programme est lu devant la Grande Assemblée nationale de Turquie et le vote de confiance est demandé. Le Gouvernement entre en fonctions après obtention du vote de confiance. Les membres du Conseil des ministres sont solidairement responsables de la mise en œuvre de la politique générale. La loi réglemente la création et la suppression des ministères, leurs pouvoirs et attributions ainsi que leur organisation.

32.La partie de la Constitution relative à la défense nationale figure dans la section relative au Conseil des ministres. Y sont énoncées les attributions et fonctions du Commandement suprême et du Bureau du chef d’état‑major général ainsi que du Conseil de sécurité national.

33.Le Conseil de sécurité national se compose du Président de la République – qui en assure la présidence –, du Premier Ministre, du chef d’état‑major, du Ministre de la défense nationale, du Ministre de l’intérieur, du Ministre des affaires étrangères, des commandants des forces terrestres, navales et aériennes et du commandant en chef de la gendarmerie. Il adresse au Conseil des ministres des avis sur l’adoption de décisions concernant la formulation, la mise au point et l’application de la politique de sécurité nationale. Les décisions du Conseil de sécurité national relatives aux mesures qu’il estime indispensables en vue de sauvegarder l’existence et l’indépendance de l’État, l’intégrité et l’indivisibilité du territoire et la paix et la sécurité de la société sont prises en considération à titre prioritaire par le Conseil des ministres.

L’administration

34.L’administration, qui constitue un tout par sa structure et ses fonctions, est réglementée par la loi. L’organisation et les fonctions de l’administration reposent sur les principes de centralisation et de collectivité locale. Sous l’angle de l’organisation de l’administration centrale, la Turquie est subdivisée en provinces, districts, sous‑districts et villages. Les collectivités locales sont les administrations provinciales spéciales, les municipalités et les villages. Les collectivités locales sont des personnes morales de droit public créées pour satisfaire les besoins collectifs locaux de la population des provinces, municipalités et villages, dont les organes de décision sont élus au suffrage direct.

E. Le pouvoir législatif

35.La Grande Assemblée nationale de Turquie se compose de 550 députés. Les élections législatives ont lieu tous les cinq ans. L’Assemblée peut décider la tenue de nouvelles élections avant l’expiration de ce délai et de nouvelles élections peuvent également être tenues en vertu d’une décision prise par le Président de la République dans les conditions prévues par la Constitution. L’Assemblée peut décider de reporter les élections d’un an pour cause de guerre. En cas de vacance de sièges à la Grande Assemblée nationale de Turquie, il est procédé à une élection intermédiaire; une élection intermédiaire n’a lieu qu’une fois par législature.

36.Les élections se déroulent sous la conduite et le contrôle généraux des organes judiciaires et le mode de scrutin est fixé par la loi. Les lois électorales sont agencées de manière à concilier les principes de «juste représentation et de stabilité de l’administration». Ces principes ont été posés pour la première fois dans une décision de la Cour constitutionnelle qui a été incorporée dans les amendements apportés à la Constitution le 25 juillet 1995.

37.Les députés représentent la nation entière et au moment de leur entrée en fonctions prêtent serment dans les termes énoncés dans la Constitution. L’immunité parlementaire des députés couvre leur vote et toute opinion qu’ils ont exprimée devant le Parlement. Pour qu’un député puisse être interrogé ou faire l’objet d’une enquête judiciaire, son immunité doit être levée, sauf en cas de flagrant délit. Une peine peut être appliquée à un député après l’expiration de son mandat législatif.

38.La Grande Assemblée nationale de Turquie s’acquitte de ses activités conformément à son règlement intérieur. La Constitution et le règlement intérieur disposent que le Parlement travaille dans le cadre de commissions. Des commissions sont constituées pour différents domaines spécialisés et sont chargées d’élaborer des avant‑projets de loi devant être approuvés par l’Assemblée plénière.

39.Outre les fonctions et attributions spéciales dont elle est investie par la Constitution, la Grande Assemblée nationale de Turquie élabore, amende et abroge les lois, contrôle et conseille les ministres, habilite le Conseil des ministres à édicter des décrets‑lois, approuve les projets de budget et de lois de règlement. Elle est également investie des fonctions suivantes: autoriser l’émission de monnaie, déclarer la guerre, proclamer la loi martiale ou l’état d’urgence, confirmer la ratification des conventions internationales, proclamer l’amnistie générale ou particulière, entériner l’exécution des peines capitales prononcées par les tribunaux et devenues définitives.

F. Le pouvoir judiciaire

40.En Turquie, le pouvoir judiciaire est exercé par les tribunaux indépendants et les organes judiciaires suprêmes au nom de la nation turque. Le chapitre de la Constitution relatif au pouvoir judiciaire pose l’indépendance absolue des tribunaux et des juges.

41.Les audiences sont publiques; le huis clos peut être décidé dans certaines circonstances particulières. Le principe de légalité s’applique aux infractions et aux peines; la responsabilité d’une infraction est individuelle et la présomption d’innocence s’applique.

42.Chacun a le droit de faire valoir ses droits devant les tribunaux et de se défendre s’il est mis en cause. C’est un droit de rang constitutionnel qui constitue un important élément du principe de l’état de droit. Nul ne peut être traduit devant une autorité autre que le tribunal juridiquement compétent.

43.Le droit de juger a été conféré aux seuls juges indépendants. Les juges et les procureurs exercent leurs fonctions conformément aux principes de l’indépendance des tribunaux. Les juges et les procureurs sont inamovibles et ne peuvent, sauf consentement de leur part, être mis à la retraite avant l’âge de 65 ans; ils ne peuvent pas être privés de leurs traitements, indemnités et autres droits relevant de leur statut, même pour cause de suppression d’un tribunal ou d’un poste permanent.

44.Les principes régissant l’indépendance des tribunaux et l’inamovibilité des juges et des procureurs sont énoncés dans le troisième chapitre de la Constitution, intitulé «Pouvoir judiciaire» (art. 138 à 160). En vertu de ces dispositions, aucun organe, autorité, service ou particulier ne peut donner d’ordres ou d’instructions aux tribunaux et aux juges, leur adresser de circulaires, ni leur faire de recommandations ou suggestions concernant l’exercice de leur pouvoir juridictionnel. On ne peut ni poser de questions ni susciter des débats ni faire une déclaration quelconque, à l’Assemblée législative, concernant l’exercice du pouvoir juridictionnel dans une affaire en cours. Les organes législatifs et exécutifs de même que l’administration sont tenus de se conformer aux décisions des tribunaux.

45.Les dispositions de la Convention sont des règles juridiques fondamentales liant les organes législatif, exécutif et judiciaire ainsi que les autorités administratives et l’ensemble des autres institutions et des particuliers. Les textes législatifs ne peuvent être contraires à la Constitution. Afin de donner corps à ce principe, une Cour constitutionnelle a été instituée avec le statut de primus inter pares à l’égard des juridictions supérieures de l’appareil judiciaire.

46.La Cour constitutionnelle contrôle quant à la forme et au fond la constitutionnalité des lois, des décrets-lois et des dispositions du règlement intérieur de la Grande Assemblée nationale de Turquie. Le Président de la République, le groupe parlementaire du parti au pouvoir et le groupe parlementaire du principal parti d’opposition et un groupe d’au moins 110 députés (soit le cinquième de l’effectif total) de la Grande Assemblée nationale sont habilités à former un recours en annulation auprès de la Cour constitutionnelle s’ils contestent la constitutionnalité quant au fond et à la forme de lois, de décrets–lois ou du règlement intérieur de la Grande Assemblée nationale ou d’articles spécifiques de ces textes. En outre, si un tribunal saisi d’une affaire considère la loi ou le décret loi applicable en l’instance contraire à la Constitution ou s’il est convaincu du sérieux du recours en inconstitutionnalité formé par l’une des parties, il peut saisir la Cour constitutionnelle et surseoir à l’examen de l’affaire dans l’attente de la décision de cette dernière. Les arrêts de la Cour constitutionnelle sont définitifs. Ses arrêts ne peuvent en rien être modifiés et leur application est immédiate.

47.La Cour constitutionnelle est investie des autres fonctions ci‑après:

Elle juge, en qualité de Haute Cour, le Président de la République, les membres du Conseil des ministres, les membres des juridictions supérieures, le Président et les membres du Conseil supérieur des juges et des procureurs, les membres de la Cour des comptes, pour les infractions liées à l’exercice de leurs fonctions;

Elle examine les demandes de dissolution définitive des partis politiques et les demandes de l’avocat général de la Cour de cassation tendant à adresser un avertissement à un parti politique;

Elle vérifie les comptes financiers des partis politiques;

Elle examine toutes décisions prises par la Grande Assemblée nationale de Turquie tendant à lever l’immunité parlementaire d’un député ou à prononcer la déchéance d’un député.

48.La Cour constitutionnelle se compose de 11 membres titulaires et de 4 membres suppléants. Ses arrêts sont rendus par une formation de 11 membres. Ses membres sont choisis selon une procédure spéciale, et en respectant certains quotas, parmi les membres de la Cour de cassation, du Conseil d’État, de la Cour de cassation militaire, du Tribunal administratif militaire supérieur et de la Cour des comptes, ainsi que parmi des hauts fonctionnaires, des universitaires et des avocats.

49.L’organisation juridictionnelle de la Turquie comprend trois ordres (administratif, judiciaire et militaire). L’article 142 de la Constitution dispose que la création des tribunaux, leurs pouvoirs et attributions et leur fonctionnement, ainsi que les procédures applicables devant eux, sont réglementés par la loi. L’organisation juridictionnelle de la Turquie se récapitule comme suit:

a)Les juridictions judiciaires:

i)Les tribunaux ordinaires de première instance:

Juridictions pénales: tribunal d’instance pénale, tribunal de grande instance pénale, Cour d’assises,

Juridictions civiles: tribunal d’instance civile (ou tribunal de paix civile), tribunal de grande instance civile; tribunaux de commerce;

ii)Juridiction spécialisée de première instance:

Tribunaux de sûreté de l’État,

Tribunaux pour enfants,

Tribunaux de l’enregistrement foncier,

Tribunaux du travail,

Tribunaux de la propriété intellectuelle;

iii)La Cour de cassation (également appelée Cour d’appel suprême) est l’instance d’examen en dernier ressort des décisions et jugements rendus par les juridictions judiciaires (art. 154 de la Constitution).

b)Les juridictions administratives:

i)Tribunaux administratifs;

ii)Tribunaux fiscaux;

iii)Tribunaux administratifs régionaux;

iv)Le Conseil d’État est l’instance d’examen en dernier ressort des décisions et jugements rendus par les tribunaux administratifs (art. 155 de la Constitution).

c)La justice militaire est rendue par les tribunaux militaires et les tribunaux de discipline militaire. Ces tribunaux sont chargés de statuer sur les affaires concernant des infractions commises par des militaires et ayant le caractère d’infraction militaire ou commises soit contre des militaires, soit dans des locaux militaires, soit dans le cadre du service militaire et des missions qui s’y rapportent. Les tribunaux militaires sont également chargés de connaître des infractions commises par des personnes civiles qui sont des infractions militaires visées par une loi particulière ou qui ont été commises contre des militaires pendant l’accomplissement de fonctions déterminées par la loi ou dans des locaux militaires également déterminés par la loi (art. 145 de la Constitution). La Cour de cassation militaire est la juridiction de dernier ressort chargée de réexaminer les décisions et jugements rendus par les tribunaux militaires (art. 157 de la Constitution).

III. CADRE JURIDIQUE GÉNÉRAL DE LA PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

A. Protection constitutionnelle des droits fondamentaux

50.Le préambule de la Constitution dispose que chaque citoyen turc a le droit et le pouvoir innés de mener une vie honorable et de s’épanouir matériellement et spirituellement dans le cadre de la culture nationale, de la civilisation et de l’ordre juridique, en jouissant des droits et libertés fondamentaux énoncés dans la Constitution, conformément aux impératifs de l’égalité et de la justice sociale.

51.Le respect des droits de l’homme est cité à l’article 2 de la Constitution parmi les principes fondamentaux sous‑jacents à la République turque, qui est un État de droit démocratique, laïque et social régi par la primauté du droit. L’article 5 dispose que l’État a pour devoir fondamental, entre autres, de s’employer à supprimer tout obstacle d’ordre politique, économique ou social qui restreint les droits et libertés fondamentaux de l’individu d’une manière incompatible avec les principes de l’état de droit social et de justice, ainsi qu’à assurer les conditions nécessaires à l’épanouissement de l’existence matérielle et spirituelle de l’individu.

52.Aux termes de l’article 10, tous les individus sont égaux devant la loi sans aucune discrimination fondée sur la langue, la race, la couleur, le sexe, l’opinion politique, les croyances philosophiques, la religion, la secte religieuse ou d’autres motifs similaires. Cet article pose en outre qu’aucun privilège ne peut être accordé à un individu, une famille, un groupe ou une classe et que les organes de l’État et les autorités administratives sont tenus d’agir, dans tous leurs actes, conformément au principe de l’égalité devant la loi.

53.La deuxième partie de la Constitution porte sur les droits et devoirs fondamentaux. La Constitution contient des normes inspirées tant du droit naturel que du droit contemporain. À cet égard, l’article 12 dispose que tout individu jouit de droits et libertés fondamentaux, inhérents à sa personne, qui sont inviolables et inaliénables. Cet article dispose en outre que les droits et libertés fondamentaux impliquent également des devoirs et responsabilités de l’individu envers la société, sa famille et autrui.

54.Les droits et devoirs fondamentaux de l’individu sont énoncés dans le chapitre 2 (art. 17 à 40) de la deuxième partie de la Constitution portant ce titre.

55.S’agissant des droits fondamentaux, l’article 17 dispose que chacun a le droit à la vie ainsi qu’à la préservation et à l’épanouissement de sa personnalité physique et spirituelle. Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité corporelle de l’individu sans son consentement, sauf en cas de nécessité médicale et dans les cas prévus par la loi; nul ne peut être soumis à des expériences scientifiques ou médicales sans son consentement. Nul ne peut être soumis à la torture ni à des sévices, ni faire l’objet de peines ou de traitement, incompatibles avec la dignité humaine.

56.Le travail forcé est interdit; nul ne peut être astreint à accomplir contre son gré un travail. Le travail obligatoire non rémunéré est interdit (art. 18). L’article 19 de la Constitution (Liberté et sûreté de la personne) indique que toute personne a droit à la liberté et à la sûreté individuelle. Cet article fixe clairement les conditions dans lesquelles une personne sur laquelle pèsent de sérieux soupçons d’infraction peut être arrêtée sur décision d’un juge, disposant ce qui suit:

a)Toute personne arrêtée ou placée en détention doit être informée des motifs de son arrestation ou de sa mise en détention et des charges portées contre elle;

b)Les proches de toute personne arrêtée ou placée en détention sont immédiatement avisées de sa situation, à moins de nécessité absolue imposée par les inconvénients qui naîtraient de la divulgation de l’objet ou de la portée de l’enquête;

c)Les personnes détenues ont le droit de demander à être jugées dans un délai raisonnable et à être mises en liberté pendant l’enquête ou l’instruction;

d)Toute personne privée de sa liberté pour quelque motif que ce soit a le droit d’introduire un recours devant une autorité judiciaire compétente afin qu’elle statue à bref délai sur son sort et, au cas où cette privation est illégale, ordonne sa libération immédiate.

57.Outre les droits et libertés venant d’être mentionnés, la Constitution consacre et garantit: le secret de la vie privée (art. 20); l’inviolabilité du domicile (art. 21); la liberté de communication (art. 22); la liberté d’établissement et de mouvement (art. 23); la liberté de religion et de conscience (art. 24); la liberté de pensée et d’opinion (art. 25); la liberté d’expression et de diffusion de la pensée (art. 26); la liberté des sciences et des arts (art. 27); la liberté de la presse (art. 28); la liberté d’association (art. 33); le droit de réunion et de manifestation (art. 34) et le droit de propriété (art. 35).

58.Les règles relatives aux infractions et aux peines sont énoncées à l’article 38 de la Constitution, aux termes duquel:

a)Les peines et les mesures de sûreté substitutives ne peuvent être établies que par la loi;

b)Nul ne peut être considéré comme coupable avant que sa culpabilité ne soit établie de manière définitive en justice;

c)Nul ne peut être contraint à faire une déclaration où il s’accuserait lui-même ou accuserait des proches désignés par la loi ni à fournir des preuves en ce sens;

d)La responsabilité pénale est personnelle;

e)L’administration ne peut infliger de sanction restreignant la liberté personnelle.

B. Recours garantissant l’exercice des droits fondamentaux

59.Parmi les fondements du système juridique turc figure le principe selon lequel l’État est directement responsable des abus ou infractions commis par des agents publics. En conséquence, les demandes d’indemnisation de tout préjudice résultant de tels actes sont adressées à l’État.

60.À cet égard, l’article 40 de la Constitution dispose que toute personne dont les droits et libertés reconnus par la Constitution sont violés a le droit de demander à disposer des moyens qui lui permettent de saisir sans délai l’autorité compétente. Le préjudice subi par une personne par suite d’actes injustifiés commis par des agents publics est réparé par l’État conformément à la loi. L’État se réserve le droit de se retourner contre l’agent en cause.

61.L’article 125 de la Constitution (Voies de recours en justice), dispose que tous les actes et décisions de l’administration peuvent faire l’objet d’un recours en justice. Cet article pose en outre que l’administration est tenue d’indemniser tout dommage résultant de ses activités, actes et décisions.

62.Aux termes de l’article 129 de la Constitution, les actions en réparation des dommages résultant de fautes commises par des fonctionnaires et d’autres agents publics dans l’exercice de leurs fonctions ne peuvent être intentées que contre l’administration.

63.L’article 13 de la loi no 657 sur la fonction publique stipule qu’en cas de perte imputable à un acte illégal d’un agent public, l’État est directement responsable et qu’une action en réparation est intentée devant un tribunal administratif. L’article 467 du Code pénal de la Turquie stipule que toute personne victime de mauvais traitements ayant occasionné une perte ou un dommage est habilitée à intenter une action en réparation.

64.C’est sur la base des dispositions constitutionnelles et légales susmentionnées qu’a été adoptée, le 7 mai 1964, la loi no 466 sur l’indemnisation des personnes soumises à une arrestation ou une détention illégales, aux termes de laquelle les catégories de personnes ci‑après sont habilitées à être indemnisées par l’État:

a)Les personnes ayant été détenues ou arrêtées illégalement ou dont la période de détention a été illégalement prolongée;

b)Les personnes qui n’ont pas été immédiatement informées du motif de leur arrestation ou de leur détention et des charges pesant sur elles;

c)Les personnes qui après avoir été arrêtées ou détenues n’ont pas été déférées devant un juge dans les délais fixés par la loi;

d)Les personnes qui ont été privées de liberté sans décision de justice après expiration du délai légal fixé pour leur traduction en justice;

e)Les personnes dont les proches n’ont pas été immédiatement avisés de leur arrestation ou détention;

f)Les personnes qui, après avoir été arrêtées ou détenues conformément à la loi, n’ont pas été mises en jugement ou ont été acquittées ou relaxées à l’issue de leur procès;

g)Les personnes qui ont été condamnées à une peine de prison d’une durée inférieure à la durée de leur détention provisoire ou n’ont été condamnées qu’à une amende.

65.L’article 2 de la loi n° 466 stipule que toute personne ayant subi un préjudice aux motifs énumérés à l’article 1 peut intenter une action en dommages et intérêts auprès du tribunal compétent du ressort de son lieu de résidence dans les trois mois à compter de la date à laquelle la décision auquel est imputé le préjudice objet de la plainte est devenue définitive.

66.Conformément à l’article 74 (Droit de pétition) de la Constitution, les citoyens ont le droit d’adresser par écrit aux autorités compétentes et à la Grande Assemblée nationale de Turquie des pétitions et réclamations les concernant ou concernant le public. Ce même article dispose que le résultat des requêtes est communiqué par écrit aux requérants.

67.Les modalités d’exercice du droit de pétition sont définies dans la loi n° 3071 du 1er janvier 1984. Ce texte stipule que le résultat d’une procédure engagée suite à une plainte d’un citoyen turc le concernant ou concernant le public lui est communiqué par écrit dans les deux mois au minimum (art. 7). Cette loi fixe également les modalités d’exercice du droit de pétition auprès de la Grande Assemblée nationale.

C. Organes d’État compétents dans le domaine des droits de l’homme

68.La Turquie renforce progressivement son cadre institutionnel interne régissant la protection et la promotion des droits de l’homme.

69.La Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie a été instituée par la loi n° 3686 du 5 décembre 1990, avec pour mission de protéger et promouvoir les droits de l’homme en Turquie conformément aux valeurs universelles contemporaines. Parmi les diverses fonctions que ce texte attribue à la Commission, il convient de citer les suivantes:

a)Suivre l’évolution de la situation dans les instances internationales en ce qui concerne les droits de l’homme;

b)Déterminer les changements à apporter pour mettre en conformité la Constitution et la législation nationales avec les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels la Turquie est partie et soumettre des projets d’amendements législatifs à cet effet;

c)Soumettre, sur demande ou de sa propre initiative, des avis et propositions concernant des points de l’ordre du jour des autres commissions spécialisées de la grande Assemblée nationale de Turquie entrant dans son champ de compétences;

d)Déterminer à quel point les pratiques de la Turquie dans le domaine des droits de l’homme sont conformes aux prescriptions de la Constitution, de la législation nationale et des instruments internationaux auxquels la Turquie est partie et, à cet effet, entreprendre des recherches et suggérer des améliorations et des corrections;

e)Examiner les communications faisant état de violations des droits de l’homme et, si elle le juge nécessaire, les transmettre aux autorités compétentes;

f)Se saisir, si nécessaire, de violations des droits de l’homme survenant dans d’autres pays et appeler l’attention des parlementaires du pays concerné sur ces violations, directement ou par l’intermédiaire des instances interparlementaires existantes.

70.La Commission se compose de 25 personnes, dont un président, élus par la Grande Assemblée nationale parmi ses membres. Les groupes parlementaires politiques et les non‑inscrits sont représentés dans la Commission en proportion du pourcentage de sièges qu’ils occupent – compte non tenu des sièges vacants – au Parlement. Les élections aux postes de membres de la Commission se tiennent deux fois par législature. Les membres élus lors de la première élection ont un mandat de deux ans et ceux élus lors de la deuxième élection un mandat de trois ans. Les dépenses de la Commission sont imputées au budget général de la Grande Assemblée nationale de Turquie.

71.La Commission d’enquête sur les droits de l’homme est investie de vastes pouvoirs d’investigation. Dans l’exercice de ses attributions, elle est habilitée: à demander des informations aux ministères et aux autres départements gouvernementaux, aux autorités locales, aux universités et à diverses autres institutions publiques ainsi qu’aux établissements privés; à enquêter dans les locaux de ces instances et à inviter leurs représentants à se présenter devant elle et à lui fournir des renseignements. Si elle le juge nécessaire, la Commission peut également faire appel aux services d’experts de son choix et elle peut entreprendre des travaux ailleurs qu’à Ankara. La Commission peut créer des sous‑commissions pour s’acquitter de sa tâche.

72.La Commission soumet à la présidence de la Grande Assemblée nationale de la Turquie un rapport annuel ainsi que des rapports spéciaux sur la manière dont elle s’acquitte de sa mission et sur les problèmes se posant dans son domaine de compétences. Avec l’accord du Conseil consultatif, ces rapports peuvent être inscrits à l’ordre du jour de l’Assemblée plénière pour examen. Les rapports de la Commission sont en outre soumis au Premier Ministre et au ministère concerné. Si la Commission le juge nécessaire, ces rapports peuvent être transmis par la présidence de la grande Assemblée nationale de Turquie aux autorités concernées assortis d’une injonction de remédier aux carences précises y étant signalées. La Commission peut également transmettre une affaire particulière qu’elle a examinée au pouvoir judiciaire, assortie d’une demande d’ouverture de poursuites contre les fonctionnaires en cause.

73.La Commission peut recevoir directement des plaintes individuelles. Aucune condition précise n’est à remplir pour déposer une telle plainte. Tout citoyen peut adresser à la Commission une plainte signalant des infractions de la part des autorités dans le domaine des droits de l’homme. Tous les plaignants sont informés au plus tard dans les trois mois des résultats des investigations entreprises suite à leur plainte.

74.Depuis l’entrée en activité de la Commission d’enquête sur les droits de l’homme, le 1er mars 1991, plus de 5 000 plaintes portant sur différents sujets lui ont été adressées. Ces plaintes sont très utiles en ce qu’elles permettent de déterminer sur quel point portent principalement les griefs des citoyens et en ce qu’elle fait apparaître les secteurs de l’administration publique dans lesquels le besoin de réforme est le plus urgent.

75.Outre la Commission parlementaire susmentionnée, la Turquie s’est dotée d’un large éventail d’institutions relevant du Gouvernement ayant des compétences dans le domaine des droits de l’homme. Dans tous les gouvernements qui se sont succédé depuis 1991, un ministre d’État a du reste été investi de responsabilités spéciales dans le domaine des droits de l’homme.

76.Le statut des structures organisationnelles internes du Gouvernement chargées de la protection des droits de l’homme a été relevé et renforcé en application de la loi no 4643, approuvée par le Parlement le 12 avril 2001 et entrée en vigueur le 21 avril 2001. Ce texte porte création du Haut Conseil des droits de l’homme en remplacement du Comité de coordination dans le domaine des droits de l’homme entré en activité en 1997. Le Haut Conseil, présidé par le Ministre d’État en charge des droits de l’homme, anime l’action gouvernementale dans le domaine des droits de l’homme. Les sous‑secrétaires du bureau du Premier Ministre et des Ministères de la justice, de l’intérieur, des affaires étrangères, de l’éducation nationale, de la santé et du travail sont membres du Haut Conseil. Afin d’améliorer ses travaux, le Haut Conseil a la possibilité d’inviter à ses réunions, qui se tiennent une fois par mois, des hauts fonctionnaires d’autres institutions publiques, des représentants d’organisations non gouvernementales actives dans le domaine des droits de l’homme ou des universitaires spécialistes des droits de l’homme.

77.Le Haut Conseil des droits de l’homme est chargé de formuler des recommandations à l’intention des ministères et institutions publics concernés et de soumettre des projets de loi en rapport avec la protection et la promotion des droits de l’homme. Le Haut Conseil enquête en outre sur les allégations de violation des droits de l’homme en Turquie, les résultats de ses investigations étant publiés régulièrement. Le Haut Conseil peut en outre se saisir de plaintes individuelles touchant aux droits de l’homme et les transmettre pour action aux autorités en cause. Le Haut Conseil, qui s’est doté de plusieurs sous-commissions dans le souci d’accroître son efficacité, a rendu à ce jour un nombre élevé de décisions d’ordre juridique et administratif et a veillé à la mise en œuvre de certaines d’entre elles, tout en fixant un calendrier pour les travaux préparatoires à la mise en œuvre des autres.

78.Créé en application de la loi no 4643, le Département des droits de l’homme, relevant du bureau du Premier Ministre, est chargé de coordonner les travaux des différents organismes gouvernementaux dans le domaine des droits de l’homme. Le Département fait office de secrétariat du Haut Conseil. Le Département, dont le personnel se compose de fonctionnaires désignés par les ministères représentés au Haut Conseil, a pour principales fonctions:

a)D’assurer la coordination entre les services des droits de l’homme des différentes institutions publiques;

b)De veiller au respect des dispositions relatives à la protection et à la promotion des droits de l’homme des différents textes législatifs pertinents;

c)D’assurer la coordination des travaux en vue de l’alignement de la législation de la Turquie relative aux droits de l’homme sur les instruments internationaux auxquels la Turquie est partie et de formuler des propositions à cet effet;

d)De coordonner la formation en cours d’emploi dans le domaine des droits de l’homme à l’intention des fonctionnaires des organismes officiels pertinents;

e)D’enquêter sur les plaintes et allégations relatives à des violations des droits de l’homme et de coordonner les mesures prises pour y remédier.

79.Cette même loi prévoit la création au sein du bureau du Premier Ministre d’un conseil consultatif des droits de l’homme chargé d’assurer la liaison entre les organismes gouvernementaux et les organisations non gouvernementales dans le domaine des droits de l’homme et formuler des avis à l’intention des institutions concernées sur des questions internes et internationales en rapport avec le respect des droits de l’homme. Le Conseil consultatif sera composé de représentants des institutions publiques et d’organismes non gouvernementaux; il formulera des recommandations et soumettra des rapports sur la protection et la promotion des droits de l’homme.

80.La loi no 4643 prévoit en outre la création d’antennes locales d’enquête sur les droits de l’homme – composées de représentants d’organismes officiels et non gouvernementaux, appelées à enquêter sur les allégations faisant état de violations des droits de l’homme à l’échelon local et à rendre compte de leurs conclusions aux autorités compétentes.

81.En application d’un décret gouvernemental en date du 2 novembre 2000, des conseils des droits de l’homme ont été mis en place dans la totalité des provinces et districts de Turquie. Ces conseils, immédiatement entrés en activité, sont chargés d’enquêter sur les plaintes et allégations concernant des atteintes aux droits de l’homme, de transmettre leurs conclusions aux autorités compétentes et de fournir des informations aux communautés locales sur les droits de l’homme. Dans ces conseils siègent des représentants locaux des municipalités, des établissements universitaires, de l’ordre des avocats, de l’ordre des médecins, des chambres de commerce et d’industrie, des organisations non gouvernementales et des médias, ainsi que des fonctionnaires gouvernementaux.

82.Afin de compléter le cadre institutionnel national de protection des droits de l’homme, un projet de loi prévoyant l’institution d’un poste d’inspecteur public (appelé à exercer les fonctions d’un médiateur) a été soumis au Parlement et est actuellement inscrit à l’ordre du jour de la Commission de la justice. Cette institution, qui sera conforme aux normes universelles tout en étant adaptée aux conditions régnant en Turquie, aura pour mission de protéger les droits des individus contre toute infraction de la part d’organes officiels.

D.  Statut des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme dans l’ordre juridique turc

83.L’article 90 de la Constitution turque (Approbation des conventions internationales) dispose que «les traités internationaux dûment mis en vigueur ont force de loi». Les accords approuvés par le Parlement turc par le canal d’une loi de ratification deviennent ainsi directement partie intégrante de la législation interne et leurs dispositions priment sur celles des autres textes législatifs internes, ce en vertu du même article de la Constitution qui dispose que contrairement aux textes législatifs internes, «ils ne peuvent faire l’objet d’un recours en inconstitutionnalité auprès de la Cour constitutionnelle». Conformément à l’article 90 de la Constitution, les dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par la Turquie peuvent donc être directement invoquées devant les juridictions turques.

84.Membre fondateur de l’Organisation des Nations Unies, la Turquie a figuré parmi les premiers pays à recevoir dans son droit interne – par la voie du décret no 9119 du Conseil des ministres en date du 10 avril 1949 – la Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée le 10 décembre 1948 par l’Assemblée générale des Nations Unies. La Turquie, qui est également membre fondateur du Conseil de l’Europe, a ratifié la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales de 1950 (loi no 6366 du 10 mars 1954).

85.Le 28 juillet 1987, la Turquie a reconnu la compétence de la Commission européenne des droits de l’homme pour recevoir des pétitions de tout individu, toute organisation non gouvernementale ou tout groupe d’individus. Le 22 juillet 1990, la Turquie a déclaré reconnaître comme obligatoire de plein droit et sans convention spéciale, la juridiction de la Cour européenne des droits de l’homme sur toutes les affaires concernant l'interprétation et l'application de ladite Convention avec effet immédiat dans les limites du territoire national de la République turque. La Turquie a signé le 6 novembre 1990 le Protocole no 9 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales reconnaissant le droit de l’individu de saisir la Cour.

86.La Turquie a ratifié la Convention européenne de 1987 pour la prévention de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (loi no 3411 du 25 février 1988) et est devenue Partie à la Convention de 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (loi no 3441 du 21 avril 1988). Lors de la ratification de la Convention des Nations Unies contre la torture, la Turquie a fait par écrit la déclaration prévue au paragraphe 1 de l’article 21 de ce texte reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications dans lesquelles un État partie prétend qu’un autre État partie ne s’acquitte pas de ses obligations au titre de la Convention et a également reconnu la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications présentées par ou pour le compte de particuliers relevant de sa juridiction, en vertu du paragraphe 1 de l’article 22.

87.S’ajoutant à ce qui précède, la Turquie a signé ou ratifié les instruments ci‑après des Nations Unies et du Conseil de l’Europe en rapport avec la protection et la promotion des droits de l’homme:

a)Instruments des Nations Unies:

Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide (loi no 5630 du 29 mars 1950);

Convention de 1951 relative au statut des réfugiés (loi no 359 du 5 septembre 1961);

Protocole de 1967 relatif au statut des réfugiés (décret du Conseil des ministres no 6/10266 en date du 1er juillet 1968);

Convention de 1952 sur les droits politiques de la femme (loi no 7288 du 2 juin 1959);

Convention internationale de 1966 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (signée le 13 octobre 1972);

Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques (signé le 15 août 2000);

Pacte international de 1966 relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (signé le 15 août 2000);

Convention de 1979 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (loi no 3232 du 25 juin 1985);

Protocole facultatif de 1999 se rapportant à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (signé le 8 septembre 2000);

Convention de 1989 relative aux droits de l’enfant (loi no 4058 du 11 décembre 1994);

Protocole facultatif de 2000 à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (signé le 8 septembre 2000);

Protocole facultatif de 2000 à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (signé le 8 septembre 2000);

Convention internationale de 1990 sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles (signée le 13 janvier 1999);

b)Instruments du Conseil de l’Europe:

Protocole de 1952 additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, tel qu’amendé par le Protocole no 11 (loi no 6366 du 10 mars 1954);

Protocole no 4 de 1963 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la Convention et dans le premier Protocole additionnel à la Convention (signé le 19 octobre 1992);

Protocole no 7 de 1984 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (signé le 14 mars 1985);

Protocole no 11 de 1994 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, portant restructuration du mécanisme de contrôle établi par la Convention (loi no 4255 du 14 mai 1997);

Accord européen de 1957 sur le régime de la circulation des personnes entre les pays membres du Conseil de l’Europe (instrument de ratification déposé le 25 mai 1961);

Accord européen de 1961 sur la circulation des jeunes sous couvert du passeport collectif entre les pays membres du Conseil de l’Europe (instrument de ratification déposé le 14 septembre 1962);

Charte sociale européenne de 1961 (loi no 3581 du 4 juillet 1989);

Protocole de 1988 additionnel à la Charte sociale européenne (signé le 5 mai 1988);

Protocole no 1 de 1993 à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (loi no 4327 du 4 avril 1997);

Protocole no 2 de 1993 à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (loi no 4327 du 4 avril 1997).

IV. INFORMATION ET PUBLICITÉ

88.Outre les réformes d’ordre législatif et administratif, introduites dans le domaine des droits de l’homme, les autorités turques s’emploient intensivement à populariser les droits de l’homme par le canal de l’éducation. Des cours obligatoires sur la citoyenneté et les droits de l’homme ont ainsi été inscrits au programme des écoles primaires et des cours facultatifs sur la démocratie et les droits de l’homme sont proposés dans le secondaire. Certaines universités étaient déjà dotées de centres d’étude des droits de l’homme et de nouveaux ont été créés. Un enseignement sur les droits de l’homme a été introduit dans les programmes préparatoires aux concours de la fonction publique.

89.Pour coordonner les efforts et les activités dans le domaine de l’éducation et de l’information relatives aux droits de l’homme, en 1998 le Haut Conseil des droits de l’homme a mis en place le Comité national de la Décennie pour l’éducation dans le domaine des droits de l’homme – organe chargé de fournir des conseils durant la Décennie des Nations Unies pour l’éducation dans le domaine des droits de l’homme. Ce Comité se compose de 15 membres, dont un représentant du Bureau du Premier Ministre et un représentant par ministère concerné (justice, intérieur, affaires étrangères, éducation nationale, santé et culture) ainsi que de représentants d’organisations non gouvernementales œuvrant dans le domaine des droits de l’homme et de quatre universitaires renommés pour leurs travaux dans ce domaine. Ce Comité a élaboré le Programme national pour l’éducation dans le domaine des droits de l’homme (1998‑2007) en s’inspirant des directives et principes pertinents énoncés dans le Plan d’action des Nations Unies concernant l’éducation dans le domaine des droits de l’homme. Ce Programme national a été adopté par le Haut Conseil en juillet 1999 et transmis par le bureau du Premier Ministre aux autorités concernées pour application. Dans le Programme, il est envisagé d’intensifier l’éducation dans le domaine des droits de l’homme, en particulier à l’intention des fonctionnaires chargés de l’application des lois.

90.Le Comité national est chargé de suivre l’application du programme national et de coopérer avec les organisations gouvernementales et non gouvernementales ainsi qu’avec les médias aux fins de sensibiliser la population à l’éducation dans le domaine des droits de l’homme. Le Comité national a identifié les groupes cibles ci‑après dans l’optique du Programme national:

Les enseignants chargés de l’éducation relative aux droits de l’homme dans les écoles;

Les fonctionnaires chargés de l’application des lois (juges, procureurs, agents de l’administration pénitentiaire, policiers, gendarmes et autres fonctionnaires);

Les membres des médias;

Les membres des organisations non gouvernementales s’occupant des droits de l’homme;

Les travailleurs sociaux et le personnel des centres communautaires qui dispensent l’éducation dans le domaine des droits de l’homme aux familles vivant dans les zones urbaines défavorisées sur le plan socioéconomique.

91.Conformément au Programme national pour l’éducation dans le domaine des droits de l’homme, toutes les institutions directement concernées par la réalisation de ces droits ont intensifié les activités de formation s’y rapportant menées dans le cadre de leurs dispositifs internes respectifs de formation en cours d’emploi.

92.Des sessions de formation portant sur les droits de l'homme sont ainsi désormais obligatoires pour les candidats aux fonctions de juge et de procureur durant la période probatoire de deux années qu’ils effectuent au centre de formation des juges et des procureurs. Le Ministère de la justice a en outre intégré un module relatif aux droits de l’homme dans la formation en cours d’emploi dispensée aux juges et aux procureurs nommés après avoir effectué avec succès ladite période probatoire. Une formation relative aux droits de l’homme est dispensée aux juges et aux procureurs en coopération avec le Conseil de l’Europe et d’autres organisations internationales et des programmes bilatéraux à cette même fin ont été mis en route avec un certain nombre de pays.

93.Outre l’inscription de sessions de formation relatives aux droits de l'homme dans le programme d’enseignement, le Ministère de la justice organise des séminaires périodiques de formation en cours d’emploi à l’intention des membres de l’appareil judiciaire des différents échelons, les participants étant informés à cette occasion des obligations incombant à la Turquie en vertu des instruments pertinents des Nations Unies, des instruments de l’OSCE, de la Convention européenne des droits de l’homme et de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, ainsi que des effets de ces instruments en droit interne turc et des décisions de la Cour européenne des droits de l’homme concernant la Turquie. Durant ces séminaires, il est en particulier expliqué aux juges et procureurs les modalités selon lesquelles les dispositions de ces instruments peuvent être invoquées par les parties et prises en considération ipso facto dans les décisions judiciaires, étant devenues parties intégrantes du droit interne turc.

94.Une formation relative aux droits de l’homme est également dispensée aux cadres des établissements pénitentiaires ainsi qu’aux médecins, psychologues, travailleurs sociaux et enseignants employés dans les établissements pénitentiaires. Avant d’être nommés, les gardiens de prison et les agents de sécurité des établissements pénitentiaires suivent également une formation préalable d’une année portant sur la profession choisie et les droits de l’homme, conformément aux dispositions du règlement sur la formation des candidats aux postes d’agent de la fonction publique relevant du Ministère de la justice avant leur nomination à titre permanent. La formation du personnel pénitentiaire aux droits de l’homme est en outre complétée par la diffusion dans tous les établissements pénitentiaires de livres, manuels et autres documents pertinents élaborés par des experts et des universitaires.

95.L’intensification de la formation des agents des organismes chargés de faire appliquer la loi est considérée comme un moyen particulièrement efficace de promotion du respect des droits de l'homme. Dans cette optique, dès 1991, des cours obligatoires sur les droits de l’homme ont été inscrits au programme d’enseignement de l’Académie de la police et des écoles de police. Les manuels utilisés pour ces cours exposent la lettre et l’esprit des instruments pertinents des Nations Unies, des conventions du Conseil de l’Europe et d’autres instruments internationaux. La loi n° 4652 sur la formation supérieure des personnels de police élaborée en s’inspirant des recommandations du Comité national, a été adoptée par le Parlement le 25 avril 2001 et est entrée en vigueur le 9 mai 2001. En application de cette loi, les 26 écoles de police de la Turquie, qui auparavant assuraient en neuf mois la formation de policiers, ont été transformées en écoles de formation professionnelle dispensant un enseignement de deux ans axé davantage sur la sensibilisation aux droits de l’homme.

96.Au cours de la période couverte par le présent rapport, un certain nombre de séminaires, conférences et ateliers ont été organisés périodiquement au titre de la formation relative aux droits de l’homme dispensée aux fonctionnaires de tous les échelons relevant du Ministère de l’intérieur. Ces séminaires ont porté sur des points tels que les dispositions du droit interne turc relatives aux droits de l’homme, les devoirs et responsabilités incombant aux hauts fonctionnaires et aux agents chargés de l’application des lois dans le domaine des droits de l’homme en vertu tant des conventions internationales auxquelles la Turquie est partie que de la législation interne, les obligations incombant à la Turquie dans le domaine des droits de l'homme en application des instruments des Nations Unies, du Conseil de l’Europe et de l’OSCE, les attributions, méthodes de travail et procédures du Comité des Nations Unies contre la torture et du Comité européen pour la prévention de la torture, et les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme.

97.Ces séminaires s’adressent principalement aux hauts fonctionnaires (gouverneurs de province et de district) et à de hauts responsables de la police et de la gendarmerie, qui sont coresponsables de la sécurité et du maintien de l’ordre dans les provinces et les districts et sont dans la pratique amenés à assurer la coordination des activités de ces services. Cependant, dans la pratique on veille à ce que les activités de ce type profitent non seulement aux cadres supérieurs mais aussi aux agents travaillant dans des services dont les attributions les mettent en contact direct avec la population. En conséquence, dans le cadre du projet concernant la formation aux droits de l'homme du personnel du Ministère de l’intérieur et des institutions en relevant, établi en collaboration avec le Comité national, le Ministère de l’intérieur prévoit de dispenser systématiquement une formation professionnelle portant directement sur les droits de l’homme aux chefs et agents subalternes des services concernés (directions provinciales de la sécurité et divisions des équipes mobiles, du maintien de l’ordre, de la sécurité, de la circulation et de la répression de la criminalité organisée) et de poursuivre pareille formation jusqu’à ce que le personnel ait été dûment formé et sensibilisé.

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