Nations Unies

HRI/CORE/LUX/2012

Instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

Distr. générale

22 février 2013

Original: français

Document de base faisant partie intégrante des rapports présentés par les États parties

Luxembourg *

[17 décembre 2012]

Table des matières

Chapitre Paragraphes Page

I.Aperçu historique1–83

II.Le territoire et la population9–184

III.Structure politique et générale19-1424

A.L’Etat19-1274

B.Les communes128–14219

IV.Structure politique actuelle143-15022

V.Caractéristiques économiques, sociales et culturelles151-19623

A.Caractéristiques économiques151-16623

B.Caractéristiques sociales167-19025

C.La vie culturelle191-19628

VI.Cadre juridique général de la protection des droits de l’homme.197-24629

A.Principales garanties constitutionnelles des droits de l’homme et des libertés fondamentales198-20430

B. Portée des traités, pactes et protocoles205-20631

C.Sanction judiciaire20731

D.Situation actuelle208-21031

E.Organes et institutions indépendantes211-22832

F.Autres précisions229-24635

VII.Information et publicité donnée aux pactes et aux rapports247-24839

I.Aperçu historique

1.Le Grand-Duché est un Etat plus que millénaire, situé au cœur de l’Europe, entre la France, la Belgique et l’Allemagne.

2.Le passage des Celtes et la présence des Romains ayant laissé des vestiges très importants sur son territoire actuel, l’histoire du Grand-Duché d’aujourd’hui remonte à l’an 963. C’est alors que le comte ardennais Sigefroi, fondateur de la Maison de Luxembourg, fit construire un château sur le territoire de l’actuelle capitale. Ce château, situé au croisement de deux voies romaines principales, donna lieu à la création d’une ville et plus tard d’une forteresse célèbre, convoitée pour sa situation stratégique.

3.La Maison de Luxembourg fut appelée à de hautes destinées, puisqu’elle donna, à la fin du Moyen Age, quatre empereurs à l’Allemagne, quatre rois à la Bohème, un roi à la Hongrie et nombreux princes électeurs. Les noms de Henri VII, Jean l’Aveugle, Wenceslas, Charles IV et Sigismond rappellent en effet cette grande époque qui prit fin dès le XVe siècle. C’est alors que commença pour le Luxembourg une longue période de dominations étrangères qui ne devait se terminer qu’au XIXe siècle. En effet, la forteresse de Luxembourg devint l’enjeu incessant de luttes sanglantes que se livraient pour sa possession les Bourguignons, Espagnols, Français, Autrichiens et Prussiens. Elle fut assiégée et ravagée plus de 20 fois au cours de quatre siècles.

4.En 1815 commença enfin pour le Luxembourg une période d’indépendance nationale. C’est en effet le Congrès de Vienne qui régla les destinées de ce pays en décidant que l’ancien Duché de Luxembourg, élevé au rang de Grand-Duché, serait donné à titre personnel au roi des Pays-Bas. Le Grand-Duché vécut ainsi en union personnelle avec les Pays-Bas sous un même souverain (Roi et Grand-Duc) jusqu’en 1890. C’est cette période qui marqua le début d’une nouvelle époque de renforcement de l’indépendance politique à l’extérieur, de prise de conscience d’une identité nationale et du développement du régime démocratique à l’intérieur du pays.

5.Une des dates les plus importantes de l’histoire nationale luxembourgeoise est celle du Traité de Londres du 11 mai 1867. Ce traité confirma l’intégrité territoriale et l’indépendance politique du Grand-Duché, déjà garanties par le Traité de Londres de 1839 ; il déclara en outre le Luxembourg neutre à titre permanent, plaçant cette neutralité sous la garantie des grandes puissances.

6.A la mort de Guillaume III, Roi des Pays-Bas et Grand-Duc de Luxembourg, en 1890, la couronne du Grand-Duché passa à la branche aînée de la Maison de Nassau (Nassau-Weilbourg); depuis cette date, le Luxembourg a sa propre dynastie. Le Souverain actuel, le Grand-Duc Henri a succédé en 2000 à son père, le Grand-Duc Jean, qui abdiqua en sa faveur après un règne de 36 ans.

7.L’évolution économique alla de pair avec l’évolution politique, interrompue toutefois par la Deuxième Guerre mondiale où le Grand-Duché fut occupé malgré son statut de neutralité, tout comme en 1914, par les troupes allemandes. Le pays fut libéré par les troupes alliées en 1944/45.

8.Le Luxembourg abandonna en 1948 son statut de neutralité et adopta résolument une politique active de coopération et d’intégration sur le plan européen et international en adhérant aux diverses organisations économiques, politiques et militaires, régionales et internationales. Le Luxembourg est membre fondateur de l’Organisation des Nations Unies (ONU), de l’Union européenne, de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), pour ne nommer que celles-ci.

II.Le territoire et la population

9.Depuis le Traité de Londres du 19 avril 1839, la superficie du Grand-Duché de Luxembourg est de 2 586 km2. Bordé par l’Allemagne à l’Est, la Belgique à l’Ouest et la France au Sud, le territoire national est divisé administrativement en 106 communes, réparties sur trois districts et 12 cantons.

10.Au 1er janvier 2012, la population totale du Grand-Duché était estimée à environ 524.900habitants dont 229.900 de nationalité étrangère, soit 43,8%. Des personnes de plus de 170 nationalités différentes vivent au Luxembourg. Le pays est devenu au cours des dernières décennies un Etat multiculturel où des peuples du monde entier se côtoient au quotidien. Les manifestations d’intolérance et de racisme y sont rares.

11.La langue nationale est le luxembourgeois et les langues administratives sont le français, l’allemand et le luxembourgeois.

12.Jusqu’en 2009, la nationalité luxembourgeoise s’acquérait soit à la naissance selon l’application de la théorie du jus sanguinis, soit par option lorsque la personne non luxembourgeoise avait des attaches originaires avec le Grand-Duché soit, enfin, par naturalisation, pourvu qu’un certain nombre de conditions étaient préalablement réalisées.

13.Depuis le 1er janvier 2009, un nouveau droit de la nationalité luxembourgeoise permet à ceux qui souhaitent témoigner de leur attachement au Luxembourg et de leur volonté d’intégration, la possibilité d’acquérir la nationalité luxembourgeoise tout en gardant, à travers leur nationalité d’origine, un lien avec la patrie et la culture de leurs ancêtres.

14.La nouvelle loi introduit le principe de la double nationalité. Celui qui voudra acquérir la nationalité luxembourgeoise ne doit plus répudier sa nationalité d’origine, à condition que la loi en vigueur dans son pays d’origine le permette.

15.La distinction entre l’acquisition de la nationalité par naturalisation et l’acquisition par option n’existe plus. La nouvelle législation prévoit la seule procédure d’acquisition de la nationalité par naturalisation. Elle sera d’ordre administratif, avec possibilité de recours au tribunal administratif.

16.Le législateur a introduit un élément du droit du sol: un enfant né au Luxembourg et dont un parent est aussi natif du Luxembourg, quelle que soit sa nationalité, sera d’office considéré comme un ressortissant luxembourgeois.

17.Les enfants adoptés pourront dorénavant automatiquement bénéficier de la nationalité luxembourgeoise.

18.La nouvelle législation permet le recouvrement de la nationalité luxembourgeoise aux personnes qui disposaient dans le passé de la nationalité luxembourgeoise et avaient dû y renoncer en raison de l’impossibilité de détenir la double nationalité.

III.Structure politique et générale

A.L’Etat

19.L’actuelle Constitution qui règle l’organisation politique du pays est l’aboutissement d’une évolution qui a commencé, le 12 octobre 1841, par l’entrée en vigueur d’une première Constitution. Elle est remplacée successivement en 1848, 1856 et 1868. La Constitution de 1868 demeure inchangée jusqu’à la fin de la première guerre mondiale. Après la Première et la Deuxième Guerre mondiale, afin de faire face aux mutations sociales et économiques, des révisions régulières permettent au Luxembourg de se doter d’une Constitution consacrant les bases d’un Etat moderne. L’indépendance des trois pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire s’exerce dans le cadre d’une démocratie représentative sous la forme d’une monarchie constitutionnelle.

1.Le pouvoir exécutif

a) Le Grand-Duc

20.Le Grand-Duc est le Chef de l’Etat. Il forme avec le gouvernement l’organe constitutionnel du pouvoir exécutif. Sa situation juridique est caractérisée par la constitutionnalité de ses pouvoirs, l’inviolabilité de sa personne, son irresponsabilité, ainsi que par les dispositions spéciales concernant les droits patrimoniaux et la liste civile. Le Grand-Duc représente la Nation dans l’exercice d’une partie importante des attributs de la souveraineté. Il n’a d’autres pouvoirs que ceux que lui attribuent formellement la Constitution et les lois particulières portées en vertu de la Constitution. La Constitution place le Chef de l’Etat en dehors et au-dessus des contingences politiques et garantit ainsi son impartialité.

21.L’inviolabilité du Grand-Duc signifie qu’il ne peut être accusé ni poursuivi par personne, qu’il n’est justiciable d’aucune juridiction et qu’on ne peut lui demander compte de ses actes. L’inviolabilité implique l’irresponsabilité complète du Grand-Duc; cette irresponsabilité est générale et absolue, aussi bien au point de vue pénal qu’au point de vue politique. L’irresponsabilité politique du Grand-Duc a comme contrepartie la responsabilité ministérielle. En effet, toute mesure prise par le Grand-Duc dans l’exercice de ses pouvoirs politiques doit être contresignée par un membre du gouvernement qui en assume l’entière responsabilité. La Constitution détermine les prérogatives du Grand-Duc dans les dispositions relatives notamment à l’exercice du pouvoir exécutif, aux droits régaliens, aux attributions d’ordre international et à la participation au pouvoir législatif.

22.L’exercice du pouvoir exécutif proprement dit comprend notamment l’exécution des lois, l’exécution des décisions judiciaires, la direction de l’administration publique et le commandement suprême de la force armée. Le législateur ne peut confier les mesures d’exécution de la loi ni au Conseil de Gouvernement ni à un ministre ni à d’autres autorités. Cela n’empêche pas que tous les actes gouvernementaux du Grand-Duc nécessitent le contreseing d’un ministre responsable. Le Grand-Duc fait les règlements et arrêtés nécessaires pour l’exécution des lois, mais il ne peut jamais ni suspendre les lois elles-mêmes, ni dispenser de leur exécution. La légalité des règlements et arrêtés est soumise au contrôle des tribunaux. En effet, ceux-ci appliquent les arrêtés et règlements généraux et locaux qu’autant qu’ils sont conformes aux lois. On doit rattacher à l’exercice du pouvoir exécutif le pouvoir du Grand-Duc d’organiser le gouvernement et de nommer aux emplois civils et militaires. Pour lui permettre de veiller au maintien de l’ordre et à la sauvegarde de la sécurité du pays, la Constitution confie au Grand-Duc le commandement de la force armée. La force publique luxembourgeoise comprend l’armée proprement dite et la Police Grand-Ducale.

23.La Constitution réserve en outre au Grand-Duc le droit de grâce, c’est-à-dire le droit de remettre ou de réduire les peines prononcées par les juges, le droit de battre monnaie en exécution de la loi, le droit de conférer des titres de noblesse sans pouvoir jamais y attacher aucun privilège, ainsi que le droit de conférer des distinctions honorifiques dans les ordres civils et militaires. Il appartient au Grand-Duc de représenter le pays à l’extérieur et de veiller à la sauvegarde des droits et intérêts de l’Etat, ainsi qu’à la protection des ressortissants nationaux vis-à-vis des Etats étrangers. A cet effet, il exerce le droit de légation active et passive en accréditant des représentants diplomatiques auprès des Chefs d’Etat de pays étrangers ainsi qu’auprès de représentants diplomatiques envoyés par des Etats étrangers. La Constitution lui confère le droit de conclure des traités avec des Etats étrangers. Toutefois, aucun traité n’aura d’effet avant d’avoir reçu l’assentiment de la Chambre.

24.Les sessions de la Chambre sont ouvertes et closes par le Grand-Duc en personne ou bien en son nom par un fondé de pouvoir qu’il nomme à cet effet. Enfin, le Grand-Duc peut dissoudre la Chambre; toutefois, la Constitution subordonne le droit de dissolution du Grand-Duc à la réserve expresse que de nouvelles élections doivent avoir lieu dans les trois mois au plus tard de la dissolution. Le Grand-Duc peut par exemple user de son droit de dissolution pour consulter le pays lorsque la constellation politique empêche la formation d’un gouvernement majoritaire. Le Grand-Duc peut adresser à la Chambre les projets de loi qu’il veut soumettre à son adoption. Il a donc le droit d’initiative en matière législative.

25.La justice est rendue au nom du Grand-Duc par les cours et tribunaux. Les arrêts et jugements sont exécutés au nom du Grand-Duc.

26.Le Grand-Duc promulgue les lois endéans un délai de trois mois depuis leur vote par la Chambre des Députés. La promulgation est l’acte par lequel le Grand-Duc atteste la teneur de la loi et en ordonne la publication et l’exécution.

b) Le gouvernement

27.Le texte de la Constitution laisse au Grand-Duc la liberté absolue de choisir les ministres qui exercent avec lui le pouvoir exécutif. Pratiquement, le Grand-Duc est toutefois considérablement limité dans son choix par le principe démocratique qui exige que les membres du gouvernement aient non seulement la confiance du Grand-Duc, mais encore celle de la majorité parlementaire. En fait, et d’après des usages constants, le Grand-Duc ne choisit que le Premier ministre, soit après avoir désigné d’abord un informateur, soit directement un formateur. Celui-ci cherche lui-même ses collaborateurs en ayant soin de composer un gouvernement qui rencontre l’adhésion de la majorité de la Chambre.

28.Les ministres doivent être de nationalité luxembourgeoise. Leurs fonctions sont incompatibles avec celles de magistrat, de membre de la Cour des comptes, de conseiller d’Etat, de député et de conseiller communal. La durée des fonctions de ministre n’est pas déterminée. Les causes de démission sont ou bien d’ordre individuel, par exemple lorsqu’un ministre est en désaccord avec le Président du gouvernement, ou bien d’ordre général, par exemple lorsque la majorité politique de la Chambre des députés se trouve changée à la suite de nouvelles élections.

29.Si aucun des groupes politiques représentés à la Chambre ne dispose de la majorité absolue, un gouvernement de coalition est formé. Les partis politiques appelés à être représentés au Gouvernement se mettent d’accord sur un programme commun de gouvernement et sur la répartition des départements ministériels. Vu la diversité et le nombre des départements ministériels, et étant donné le nombre restreint des membres du Gouvernement appelés à en être les titulaires, il en résulte la nécessité de réunir entre les mains d’un même ministre plusieurs départements.

30.Le Premier ministre soumet le résultat de ces négociations au Grand-Duc. Le Grand-Duc agrée les personnalités lui présentées par le Premier ministre et procède à la nomination des ministres. Par la suite, le Premier ministre présente le programme gouvernemental dans une déclaration solennelle devant la Chambre des députés.

31.Le gouvernement se compose d’un Président, portant le titre de Premier Ministre, et de plusieurs membres ayant le titre de ministre. Il peut comprendre également des membres ayant le titre de ministre délégué ou de secrétaire d’Etat.

32.En tant que Ministre d’Etat, le Premier ministre est chargé par le Grand-Duc d’organiser le Gouvernement, d’en assurer la présidence, d’en coordonner la politique générale ainsi que de veiller à la coordination entre les départements ministériels.

33.Chaque ministre a la direction d’au moins un département ministériel. Le secrétaire d’Etat peut avoir la direction d’un ou de plusieurs départements ministériels, en tout ou en partie, par délégation de compétence qui lui est donnée avec l’accord du Grand-Duc par le ministre du département ministériel auquel il est affecté.

34.La responsabilité ministérielle est inséparable de l’irresponsabilité du Grand-Duc. Pour qu’un acte du Grand-Duc puisse sortir ses effets, il faut qu’il soit contresigné par un membre du gouvernement qui en assume l’entière responsabilité. La Constitution dispose d’une façon générale que les membres du gouvernement sont responsables. Cette responsabilité est générale en ce qui concerne les actes qui sont en rapport direct ou indirect avec les fonctions ministérielles. Elle peut être aussi bien juridique, c’est-à-dire pénale ou civile, que politique. Les ministres sont responsables des actes dont ils sont eux-mêmes les auteurs, soit individuellement, soit collectivement. La responsabilité de toute mesure prise en Conseil de Gouvernement incombe à tous les membres du Gouvernement qui ont concouru à cette mesure. Toutefois, le ministre qui a fait constater son vote dissident au procès-verbal de la séance du Conseil de Gouvernement est dégagé de sa responsabilité.

35.Le gouvernement dans son ensemble et les ministres, individuellement, sont politiquement responsables de leurs actes devant la Chambre des députés. Si la Chambre désapprouve la politique d’un ou de plusieurs ministres ou du gouvernement entier, elle exprime son désaccord soit par un vote négatif au sujet d’un ordre du jour déterminé proposé par le gouvernement, soit par le rejet d’un projet de loi présenté par les ministres. En refusant de voter le budget annuel, la Chambre peut mettre le gouvernement qu’elle désapprouve dans l’impossibilité pratique de gérer les affaires publiques. La sanction de la responsabilité politique des ministres consiste dans l’obligation dans laquelle ils se trouvent de cesser leurs fonctions lorsque la Chambre leur refuse sa confiance. Il est d’usage que les ministres démissionnent au premier vote hostile de la Chambre.

36.En aucun cas l’ordre verbal ou écrit du Grand-Duc ne peut soustraire un ministre à sa responsabilité. En effet, la responsabilité des ministres deviendrait illusoire et serait dépourvue de sanction si le Grand-Duc pouvait la couvrir de sa propre inviolabilité.

37.En vertu de la Constitution, seule la Chambre a le droit d’accuser les ministres. Si l’accusation des ministres est réservée à la Chambre, c’est pour empêcher que des poursuites intempestives ou vexatoires intentées par de simples citoyens n’entravent la marche des affaires publiques. Les accusations admises contre les ministres pour des actes commis dans l’exercice de leurs fonctions sont portées devant la Cour supérieure de justice, siégeant en assemblée plénière. Pour empêcher que la responsabilité pénale des ministres ne puisse devenir illusoire, la Constitution établit une exception au droit de grâce du Grand-Duc en disposant qu’un ministre, qui aurait été condamné, ne peut être gracié que sur demande de la Chambre.

2.Le pouvoir législatif

38.La Chambre des députés représente le pays. Elle partage avec le Grand-Duc l’exercice du pouvoir législatif. La Constitution lui réserve en outre certaines attributions en matière financière et lui accorde un droit de regard sur les actes du gouvernement. Enfin, en matière internationale, l’assentiment de la Chambre est nécessaire pour qu’un traité puisse sortir ses effets sur le territoire du Grand-Duché.

39.Les députés sont élus par la nation. Le mode d’élection est déterminé dans ses grandes lignes par la Constitution et dans le détail par la loi électorale portée en vertu de la Constitution. Le nombre des députés est fixé par la Constitution à 60. Ils sont élus pour cinq ans.

40.La périodicité des élections permet de maintenir la communauté d’idées et de vues entre le corps électoral et les représentants de la nation. Les élections ordinaires ont lieu de plein droit, de cinq en cinq ans. Des dispositions particulières permettent en cas d’élection concomitante du Parlement européen de faire coïncider la date des deux élections. En cas de dissolution de la Chambre, il est procédé à de nouvelles élections dans les trois mois au plus tard de la dissolution.

41.Les élections sont directes, c’est-à-dire que les électeurs pourvoient directement aux sièges vacants et ne désignent pas seulement des intermédiaires, et secrètes. Le vote est obligatoire. Des tempéraments à ce principe sont cependant prévus et le vote par correspondance facilite l’exercice du droit de vote. Les députés sont élus sur la base du suffrage universel pur et simple. Le régime du suffrage universel permet à tous les citoyens luxembourgeois, hommes et femmes, qui remplissent les conditions prévues par la loi, de participer à l’élection des députés. Le suffrage universel pur et simple, c’est-à-dire sans distinction de fortune, de qualité ou de rang, assure une stricte égalité à tous les électeurs en ce qui concerne l’exercice de leur droit de vote. L’élection se fait au scrutin de liste. Pour chaque circonscription électorale, les groupements politiques qui se présentent aux élections doivent constituer des listes de candidats dont le nombre ne peut être supérieur au total des députés à élire dans la circonscription. Toute candidature isolée est considérée comme formant une liste à elle seule. La répartition des sièges se fait suivant les règles de la représentation proportionnelle et conformément au principe du plus petit quotient électoral.

42.Pour être électeur aux élections législatives nationales, il faut être Luxembourgeois ou Luxembourgeoise, être âgé de dix-huit ans accomplis, jouir des droits civils et politiques et être domicilié dans le Grand-Duché. La qualité d’électeur est constatée par l’inscription sur les listes électorales. Pour être éligible, il faut être Luxembourgeois ou Luxembourgeoise, jouir des droits civils et politiques, être âgé de dix-huit ans accomplis au jour de l’élection et être domicilié dans le Grand-Duché. Les cas d’exclusion de l’électorat passif sont les mêmes que ceux prévus pour l’électorat actif.

43.Chaque électeur dispose d’un nombre de suffrages équivalant au nombre de députés à élire dans sa circonscription. Le vote peut être exprimé soit par suffrage de liste, soit par suffrage nominatif. L’électeur qui vote par suffrage de liste ne peut exprimer aucun autre vote, sous peine de faire annuler son bulletin de vote, à moins que la liste choisie comprenne moins de candidats qu’il n’y a de députés à élire dans la circonscription. Celui qui vote nominativement peut choisir ses candidats sur la même liste ou sur des listes différentes, toutefois il doit avoir soin de ne pas exprimer plus de votes qu’il n’y a de sièges disponibles.

44.Les opérations électorales se déroulent sous la surveillance des bureaux électoraux, mais il appartient exclusivement à la Chambre des députés de se prononcer sur la validité des opérations électorales. Toutes les pièces relatives aux élections lui sont transmises à cet effet.

45.L’Etat accorde à chaque parti ou groupement politique une dotation destinée à couvrir une partie des frais de la campagne électorale relative aux élections législatives, s’il présente des listes complètes de candidats dans toutes les circonscriptions électorales et s’il obtient au moins un siège à la Chambre des députés. Il en est de même des élections au Parlement européen si le parti ou groupement politique présente une liste complète de candidats dans la circonscription électorale unique et s’il obtient au moins 5% des suffrages exprimés.

46.Par parti politique ou groupement politique au sens de la loi électorale il y a lieu d’entendre l’association de personnes physiques, dotée ou non de la personnalité juridique, qui concourt, dans le respect des principes fondamentaux de la démocratie, à l’expression du suffrage universel et de la volonté populaire selon la manière définie dans ses statuts ou son programme.

47.En vertu de la Constitution le mandat de député est incompatible notamment avec les fonctions de membre du gouvernement, de membre du Conseil d’Etat, de magistrat de l’ordre judiciaire, de membre de la Chambre des comptes, de commissaire de district, de receveur ou agent comptable de l’Etat et de militaire de carrière en activité de service. L’acceptation se constate par la prestation du serment de député. La loi prévoit encore d’autres incompatibilités : il en va ainsi de la qualité de fonctionnaire, employé ou ouvrier exerçant un emploi rémunéré par l’Etat, par un établissement public soumis à la surveillance du Gouvernement, par une commune, un syndicat de communes ou un établissement public placé sous la surveillance d’une commune comme de la qualité d’agent exerçant un emploi rémunéré par la Société nationale des chemins de fer luxembourgeois.

48.Toutes ces personnes peuvent certes se présenter comme candidats aux élections, mais, si elles sont élues et si elles acceptent le mandat de député, cette acceptation entraîne de plein droit la démission de leurs fonctions, emplois ou charges. L’acceptation se constate par la prestation du serment de député. Inversement, le membre de la Chambre, qui accepte d’être nommé à une fonction, un emploi ou une charge incompatibles avec son mandat de député, est déchu de plein droit de son mandat par cette nomination.

49.Les députés ne peuvent être parents ou alliés jusqu’au deuxième degré ni être unis par les liens du mariage. Dans le cas où ils seraient élus ensemble, il est procédé par tirage au sort.

50.La situation personnelle des députés et le mécanisme suivant lequel la Chambre exerce ses attributions font l’objet de dispositions constitutionnelles destinées à sauvegarder la liberté d’expression et l’indépendance des mandataires élus de la nation et à garantir l’efficacité des travaux parlementaires.

51.La Constitution garantit aux députés l’immunité parlementaire. Aucun député ne peut être poursuivi ni arrêté pour des paroles prononcées dans l’enceinte de la Chambre, même lorsque ces paroles constitueraient des infractions à la loi pénale comme par exemple des injures, des diffamations, des exhortations à l’émeute, etc. Cette irresponsabilité est permanente. Elle protège le député pendant et en dehors de la durée des sessions. Elle couvre également l’ancien député pour des opinions émises pendant l’exercice de son mandat. Le député qui se rend coupable d’un crime, d’un délit ou d’une contravention ne peut être arrêté ni poursuivi pénalement pendant la durée de la session, sans l’autorisation de la Chambre, sauf le cas de flagrant délit. Si la Chambre le requiert, la détention ou la poursuite d’un député est suspendue pendant la session et pour toute sa durée. L’inviolabilité ne vaut pas en dehors des sessions.

52.Le fonctionnement de la Chambre est réglé par un certain nombre de dispositions contenues dans la Constitution et par le règlement d’ordre intérieur, élaboré par la Chambre elle-même. Ses séances sont publiques. Elle ne peut prendre de résolution que lorsque la majorité de ses membres est réunie (c.-à-d. au moins 31 députés). Toute résolution est prise à la majorité absolue des suffrages. En cas d’égalité de voix, la proposition mise en délibération est rejetée. Chaque année, la Chambre se réunit en session ordinaire.

53.Le règlement de la Chambre reconnaît aux députés le droit de se constituer en groupes politiques. Pour être reconnu comme tel, un groupe politique doit comprendre au moins cinq membres. Les députés qui n’appartiennent à aucun groupe politique peuvent s’apparenter à un groupe de leur choix avec l’agrément du bureau de ce groupe.

54.Les députés qui ne font pas partie d’un groupe politique et ceux qui ne sont pas apparentés à un groupe politique peuvent former un groupe technique qui, pour être reconnu, doit également comprendre au moins cinq membres. Ces députés désignent un coordonnateur qui sera leur porte-parole pour toutes les questions administratives et qui les représentera dans la Commission de travail. Pour assurer le fonctionnement des groupes politiques et techniques, la Chambre met à leur disposition les locaux et les installations nécessaires ainsi que des crédits et elle assure en partie le remboursement des frais d’engagement de personnel.

55.Pour faciliter et pour rationaliser les travaux parlementaires, le Règlement de la Chambre institue une commission de travail et prévoit la formation de commissions permanentes et de commissions spéciales. Les commissions examinent non seulement les projets de loi, mais également les amendements et les motions que le président de la Chambre leur renvoie. Elles ont le droit de présenter elles-mêmes des propositions et des amendements.

56.Chaque député peut assister comme observateur aux réunions de toutes les commissions dont il n’est pas membre, sans toutefois pouvoir participer aux débats ni prendre part aux votes.

57.La Conférence des Présidents se compose du président de la Chambre, ainsi que d’un seul délégué par groupe politique ou technique. Chaque délégué y dispose d’un nombre de voix égal au nombre de membres du groupe qu’il représente au sein de la commission. Aussi la Conférence des Présidents a-t-elle pu être définie comme une émanation concentrée de la Chambre, appelée à prêter son concours au président pour la gestion des affaires et plus spécialement à mettre les groupes politiques d’accord sur la meilleure façon d’évacuer le travail de la Chambre. Elle donne son avis sur l’ordre des travaux de la Chambre et fixe, le cas échéant, le temps imparti à une discussion ainsi que l’heure limite à laquelle auront lieu les votes. Elle a en surplus pour mission de marquer son assentiment au sujet de projets de règlements grand-ducaux si celui-ci est formellement requis en vertu d’une disposition législative.

58.Les commissions permanentes sont des commissions compétentes d’une façon générale pour certaines matières déterminées. La Chambre les forme en son sein au début de chaque législature, c’est-à-dire après chaque renouvellement intégral, et non au début de chaque session annuelle. Elle en fixe le nombre, la dénomination et les attributions. Les commissions permanentes se composent de cinq membres au moins et de treize membres au plus, nommés par la Chambre au début de chaque session. Il est tenu compte de la représentation proportionnelle des groupes politiques pour la composition de chaque commission. Chaque commission nomme en son sein un président et deux vice-présidents à la majorité absolue des votants et pour la durée de la session. Citons à titre d’exemples la Commission des pétitions, la Commission du contrôle de l’exécution budgétaire (présidée par un membre de l’opposition parlementaire), la Commission des affaires étrangères et européennes, de la défense, de la coopération et de l’immigration, la Commission des finances et du budget, la Commission de la famille, de l’égalité des chances et de la jeunesse, la Commission des institutions et de la révision constitutionnelle, la Commission juridique.

59.Des commissions spéciales peuvent être formées par la Chambre ou, à sa demande, par le président de la Chambre, en observant les conditions de composition prévues pour les commissions permanentes. Les commissions spéciales sont chargées de l’examen des projets de loi ou de propositions déterminés. Leur mission prend normalement fin avec le dépôt de leur rapport sur les projets de loi ou sur les propositions dont elles ont été saisies.

60.Les commissions permanentes et les commissions spéciales peuvent constituer des sous-commissions dont elles déterminent la composition et la compétence. Elles peuvent aussi consulter des personnes ou des organismes extraparlementaires et se documenter auprès d’eux. Pour chaque affaire qui leur est soumise, elles nomment un ou plusieurs rapporteurs qui seront leurs porte-parole à la Chambre.

61.La situation personnelle des députés et le mécanisme suivant lequel la Chambre des députés exerce ses attributions font l’objet de dispositions constitutionnelles destinées à sauvegarder la liberté d’expression et l’indépendance des mandataires élus de la nation et à garantir l’efficacité des travaux parlementaires.

62.La Chambre a, tout comme le Grand-Duc, le droit d’initiative en matière législative. L’initiative de la Chambre, ou initiative parlementaire, s’appelle proposition de loi, alors que l’initiative du Grand-Duc, ou initiative gouvernementale, s’appelle projet de loi. La procédure préliminaire varie suivant qu’il s’agit d’un projet de loi ou d’une proposition de loi. La Chambre instruit et discute les projets ou propositions de loi dont elle est saisie. Elle les approuve ou les rejette par voie de vote.

63.En cas d’initiative gouvernementale, l’administration centrale élabore un projet de loi que, une fois approuvé par le Conseil de Gouvernement, elle soumet à l’avis du Conseil d’Etat. Le projet est généralement accompagné d’un exposé des motifs dans lequel le ministre compétent explique les raisons qui sont à la base du projet, ainsi que d’un commentaire des articles. L’avis du Conseil d’Etat est transmis au Gouvernement sous la forme d’un rapport motivé, contenant des conclusions et, le cas échéant, un contre-projet. Le Gouvernement soumet le projet définitif au Grand-Duc en lui demandant l’autorisation de le présenter en son nom à la Chambre des députés.

64.Dans le cas où le Gouvernement estime qu’il y a urgence pour la présentation d’un projet de loi, la Chambre peut en être saisie avant qu’il n’ait été soumis à l’avis préalable du Conseil d’Etat. Si la Chambre est d’accord avec le Gouvernement en ce qui concerne l’urgence, la discussion peut même être ouverte sans que le Conseil d’Etat ait préalablement donné son avis, mais la Chambre des députés ne peut procéder au vote définitif avant que l’avis du Conseil d’Etat ne lui ait été communiqué. De nos jours, le Gouvernement procède généralement au dépôt du projet à la Chambre des députés simultanément à la saisine du Conseil d’Etat ou du moins à un moment où l’avis du Conseil d’Etat n’a pas encore été reçu. Cette façon de procéder a, entre autres, pour effet de porter le débat sur la place publique en permettant notamment aux milieux intéressés de prendre position à l’égard du projet, publié sous forme de document parlementaire, et ceci tout au long de la période qui précède l’émission de l’avis du Conseil d’Etat et l’instruction du projet à la Chambre.

65.Lorsque le Grand-Duc a accordé au Gouvernement l’autorisation demandée, le dépôt du projet a généralement lieu en séance publique par le ministre compétent. Le texte du projet et de ses annexes est distribué aux députés et le président de la Chambre ordonne le renvoi du projet à une ou plusieurs commissions.

66.Chaque député a le droit de faire des propositions de loi. Le député qui veut faire une proposition de loi la signe et la dépose sur le bureau de la Chambre. La Chambre décide de la recevabilité d’une proposition de loi sur proposition de la Conférence des Présidents. La proposition de loi est transmise au Gouvernement qui peut rendre un avis et elle est renvoyée par la Conférence des Présidents à une commission. La proposition de loi figure à l’ordre du jour d’une réunion de commission et ensuite d’une séance publique dans un délai de 6 mois après le dépôt. La proposition de loi est présentée et discutée en séance publique quant à la poursuite de la procédure législative. A l’issue de la discussion, la Chambre se prononce par un vote sur la poursuite de la procédure législative.

67.Si la Chambre se prononce en faveur de la poursuite de la procédure législative de la proposition de loi, celle-ci est renvoyée par la Conférence des Présidents pour examen à une commission. La proposition de loi est également transmise au Conseil d’Etat et aux chambres professionnelles concernées pour avis. Si la Chambre se prononce en défaveur de la poursuite de la procédure législative de la proposition de loi, celle-ci est classée sans suites. Ne peuvent être réintroduites au cours d’une même session les propositions que la Chambre a classées sans suites ou qu’elle n’a pas adoptées.

68.Tout rapport qui sera fait sur une proposition provenant de l’initiative parlementaire et tendant à augmenter directement ou indirectement les dépenses publiques ou à diminuer les recettes devra, s’il est favorable à la proposition, indiquer les ressources ou les diminutions de dépenses permettant de couvrir la dépense ou la diminution de recettes devant résulter de l’adoption de la proposition.

69.Chaque député a le droit de retirer une proposition de loi dont il est l’auteur avant le vote sur la poursuite de la procédure législative. La Chambre est informée du retrait.

70.Le retrait d’une proposition de loi après le vote sur la poursuite de la procédure législative est décidé par la Chambre sur proposition de la Conférence des Présidents.

71.Une proposition de loi ne peut être retirée du rôle après le premier vote constitutionnel.

72.Les projets ou propositions de loi sont renvoyés par le président de la Chambre soit à l’une des commissions permanentes, soit à une commission spéciale formée à cet effet, soit à deux ou plusieurs commissions permanentes qui siégeront ensemble. A partir du renvoi aux commissions, la procédure est la même pour les propositions de loi que pour les projets de loi.

73.La commission saisie d’un projet de loi délibère et fait son rapport dans un délai rapproché, si elle ne décide pas de soumettre à l’avis (complémentaire) du Conseil d’Etat des amendements au projet. Le rapport est distribué aux membres de la Chambre. Le rapport est présenté en séance publique de la Chambre par le rapporteur de la commission. Après avoir entendu le rapport, la Chambre procède à la discussion publique qui porte sur le principe, sur l’ensemble du projet, sur les différents articles et sur les éventuels amendements.

74.L’auteur de l’initiative et le rapporteur de la commission défendent leurs points de vue respectifs. Chaque membre de la Chambre peut intervenir dans la discussion. Au cours de celle-ci, les députés peuvent présenter des amendements. Les amendements doivent être rédigés par écrit et remis au président de la Chambre. Il faut qu’ils soient appuyés par au moins cinq députés. Si la Chambre décide qu’il y a lieu de renvoyer les amendements au Conseil d’Etat ou à une commission parlementaire, la discussion peut être suspendue jusqu’à ce que le Conseil d’Etat ait formulé son avis et que la commission ait rédigé son rapport complémentaire. Les votes sont émis soit par appel nominal, au moyen d’un système de vote électronique, soit par main levée. Toutefois, le vote sur l’ensemble d’un projet intervient toujours par appel nominal. En cas de doute sur la régularité des votes exprimés par le système électronique, le président a toujours le droit de recourir au vote par appel nominal et à haute voix. A la demande de cinq députés au moins, le vote sur l’ensemble de la loi peut être précédé par un vote sur un ou plusieurs articles de la loi.

75.Lorsqu’une proposition ou un projet de loi aura été discuté sans que l’avis du Conseil d’Etat soit disponible, l’avis de ce corps devra être communiqué à la Chambre avant le vote sur l’ensemble de la proposition ou du projet de loi. Si la Chambre des Députés a procédé au vote sur un ou plusieurs articles conformément à l’article 65 de la Constitution, sans pouvoir procéder au vote sur l’ensemble de la loi du fait qu’une proposition ou un projet de loi aura subi, par l’adoption d’amendements ou le rejet d’articles, des modifications sur lesquelles le Conseil d’Etat n’aura pas été entendu, celui-ci rend son avis sur les dispositions votées par la Chambre dans un délai de trois mois au plus tard à partir de la date de la communication des dispositions au Conseil d’Etat. Faute d’avis dans ce délai, la Chambre peut passer au vote sur l’ensemble du projet de loi ou de la proposition de loi.

76.Immédiatement après le vote sur l’ensemble du projet, la Chambre décide sur la dispense du second vote constitutionnel. Ce procédé, qui implique également l’intervention subséquente du Conseil d’Etat, constitue une particularité de la procédure législative luxembourgeoise. En effet, dans les pays à système bicaméral, le vote sur l’ensemble d’un projet de loi arrête définitivement la décision de chacune des deux assemblées et met le point final à leur intervention dans la procédure législative. Il n’en est pas ainsi au Grand-Duché où la représentation nationale est assurée par une seule assemblée, la Chambre des députés : l’élément modérateur que formerait une seconde assemblée, éventuellement élue à deux degrés, y fait donc défaut. Les auteurs de la Constitution ont cherché à pallier cet inconvénient en instituant la procédure du second vote constitutionnel.

77.Après avoir voté sur l’ensemble d’un projet de loi, la Chambre est dès lors, du moins en théorie, appelée à se prononcer une seconde fois sur le même projet, sous l’observation d’un délai de réflexion. Or la Constitution permet à la Chambre de se dispenser de ce second vote, à condition que le Conseil d’Etat y marque son accord. Dans la pratique donc, après le vote sur l’ensemble d’un projet de loi, la Chambre décide la plupart du temps qu’il n’y a pas lieu à second vote, et le projet est renvoyé au Conseil d’Etat qui se prononce à son tour, en séance publique, sur la dispense d’un second vote.

78.Dans le cas où le Conseil d’Etat se rallie à la décision de la Chambre, le projet de loi est définitivement dispensé du second vote. Par contre, si le Conseil d’Etat décide le refus de la dispense du second vote, - notamment pour attirer l’attention sur des incompatibilités du texte voté avec les principes généraux du droit, l’ordre constitutionnel ou les normes de droit international, la Chambre est obligée de procéder au second vote constitutionnel en respectant un intervalle d’au moins trois mois après le premier vote sur l’ensemble de la loi. L’œuvre législative de la Chambre s’achève ainsi, soit par la dispense du second vote, soit, après un intervalle de trois mois, par le second vote constitutionnel. Mais la procédure législative n’est pas encore terminée pour autant. La loi ne peut entrer en vigueur qu’après avoir été promulguée et publiée au Mémorial. La mise en œuvre de la loi par la promulgation et la publication rentre essentiellement dans l’exercice du pouvoir exécutif. Le Grand-Duc promulgue la loi en apposant sa signature en bas du texte de loi revêtu de la formule de promulgation. Il est rappelé à cet effet que la loi doit être contresignée par un membre du Gouvernement qui en assume l’entière responsabilité.

79.La Constitution a réservé à la Chambre, organe du pouvoir législatif, une série de moyens d’action sur le gouvernement, organe du pouvoir exécutif. Le contrôle de la Chambre s’exerce aussi bien en matière financière qu’en matière politique et administrative. En matière financière, le contrôle du gouvernement par la Chambre consiste dans le vote annuel du budget et des impôts, le droit d’arrêter chaque année les comptes de l’Etat et une certaine surveillance exercée sur la gestion du patrimoine public. La Constitution confie au pouvoir législatif la faculté d’accorder ou de refuser au gouvernement l’autorisation de percevoir des recettes et d’effectuer des dépenses. Cette autorisation s’exprime normalement par le vote annuel du budget. Le budget est établi sous la forme d’une loi et selon les règles prescrites pour la procédure législative en cas d’initiative gouvernementale.

80.Le droit de la Chambre d’arrêter les comptes de l’Etat est le corollaire de son droit de voter le budget. En dehors du contrôle annuel de la gestion financière courante de l’Etat, la Constitution réserve au pouvoir législatif une série de décisions qui dépassent le cadre de l’administration normale du patrimoine public. Aucun impôt ne peut être établi que par une loi. La loi budgétaire contient l’autorisation de percevoir les impôts ordinaires. Les impôts extraordinaires doivent être autorisés par une loi spéciale.

81.Le Gouvernement ne peut contracter des emprunts, ni procéder à un engagement financier important de l’Etat, ni aliéner une propriété immobilière de l’Etat, ni acquérir au profit de l’Etat une propriété immobilière importante, ni réaliser au profit de l’Etat un grand projet d’infrastructure ou un bâtiment considérable, sans y être autorisé par une loi spéciale. Toutefois, une loi générale détermine le seuil en dessous duquel une autorisation spéciale de la Chambre n’est pas requise. Aucune charge grevant le budget de l’Etat pour plus d’un exercice ne peut être établie autrement que par une loi spéciale.

82.La Cour des comptes exerce une fonction consultative à la demande de la Chambre des députés. Ainsi elle rend, à la demande de celle-ci, un avis sur les dispositions de la loi budgétaire et sur les propositions ou projets de loi concernant la comptabilité de l’Etat et celle des personnes morales de droit public. Elle peut être consultée par la Chambre sur les propositions ou projets de loi ayant une incidence financière significative pour le Trésor public. Finalement, la Chambre peut à tout moment la charger de présenter des rapports spéciaux sur des domaines spécifiques de la gestion financière, en étendant ses contrôles sur plusieurs exercices.

83.L’action de la Chambre par rapport aux affaires gouvernementales ne se manifeste pas seulement en matière financière, mais encore par les moyens de contrôle et de surveillance que son règlement intérieur, la Constitution et certaines lois spéciales lui accordent en matière politique et administrative.

84.Selon le règlement de la Chambre, chaque député a le droit de poser des « questions » au Gouvernement. Le texte des questions doit se restreindre aux termes indispensables pour formuler avec concision et sans commentaires l’objet de la question. La recevabilité des questions est fonction de l’intérêt général, de l’importance ou de l’actualité de leur objet. Une question, à laquelle le ministre compétent a fourni une réponse, ne peut être représentée dans les mêmes conditions au cours d’une même session. Le député qui désire poser une question au Gouvernement en remet le texte écrit au président de la Chambre, qui est seul juge de la recevabilité des questions. La réponse écrite du ministre compétent est en principe envoyée au président de la Chambre au plus tard dans un délai d’un mois. Lorsque, pour des raisons d’urgence, un député désire poser une question à un ministre, il doit la communiquer par écrit au président de la Chambre qui juge de sa recevabilité. Si son caractère urgent est accepté par le président, elle pourra, après accord du ministre, être posée au moment fixé par le président ou, s’il n’y a pas de séance, le ministre donnera une réponse écrite dans le délai d’une semaine.

85.Une partie de la séance publique est réservée par la Chambre à des « questions avec débat ». Le président de la Chambre fait parvenir les questions au moins deux semaines en avance au Gouvernement. En outre, il a été prévu qu’une « heure de questions » ait lieu chaque mardi, en début de séance, pendant les semaines où la Chambre Le Gouvernement est interrogé par les députés sur des sujets d’intérêt général définis dans la déclaration sur le programme gouvernemental ou dans les orientations contenues dans la déclaration sur l’état de la nation ou dans la déclaration sur la politique étrangère, auxquelles les députés doivent se référer. Les questions visées doivent être soumises par écrit au président de la Chambre au moins trois heures avant l’heure des questions. Par ailleurs, l’ « heure d’actualité » a également lieu chaque mardi, en début de séance, pendant les semaines où la Chambre.

86.Chaque député a le droit d’interpeller le Gouvernement par voie d’une déclaration écrite dans laquelle il spécifie les éléments faisant l’objet de son interpellation et qu’il remet au Président. L’interpellation devra en principe être évacuée dans les six mois suivant l’introduction de la demande.

87.La Chambre peut encore organiser des « débats de consultation », sur initiative du Gouvernement, soit sur initiative de cinq députés au moins, des « débats d’orientation » sur des sujets d’intérêt général déterminés, et elle organise chaque année un « débat sur la politique étrangère du Gouvernement ».

88.Chaque député a le droit de déposer des « motions » adressées au Gouvernement et des « résolutions » adressées à la Chambre. Les motions et résolutions sont soumises aux délibérations et au vote de la Chambre si elles sont appuyées par au moins cinq députés. Elles doivent être motivées au moment de leur dépôt et peuvent avoir de multiples objets. Elles peuvent amener la Chambre à se prononcer sur une action gouvernementale déterminée, inviter le Gouvernement à prendre certaines initiatives, prononcer un blâme, manifester une approbation, exprimer ou retirer la confiance au Gouvernement etc.

89.La Chambre peut retirer sa confiance au Gouvernement, soit par le vote sur une motion de défiance, soit par un vote négatif sur une disposition quelconque en débat au sujet de laquelle le Gouvernement aura posé la question de confiance. La décision de la Chambre, acquise contre le désir expressément formulé du Gouvernement, met celui-ci en minorité et le contraint à se démettre de ses fonctions.

90.La Chambre a le droit d’enquête. Elle peut entendre des témoins et commettre des experts pour se former une opinion au sujet de certains cas douteux qui sont soumis à son appréciation. La Chambre exerce ce droit elle-même ou par une commission formée en son sein. Les pouvoirs qui leur sont attribués sont ceux du juge d’instruction en matière criminelle. L’enquête parlementaire est contradictoire. Toute personne à laquelle l’enquête peut porter préjudice a le droit d’y être entendue et aura le droit de demander des mesures d’instruction.

91.Les pétitions adressées à la Chambre sont examinées au sein de la Commission des pétitions. Les membres du Gouvernement sont obligés de fournir des explications sur le contenu de ces pétitions chaque fois que la Chambre le demande.

92.Le Grand-Duc procède à certaines nominations sur proposition de la Chambre. Ainsi, le président, le vice-président et les trois conseillers de la Cour des comptes sont choisis par le Grand-Duc sur une liste de trois candidats qualifiés proposés par la Chambre pour chaque place vacante. Chacun des titulaires ainsi nommés ne peut être révoqué que sur proposition de la Chambre, la Cour demandée en son avis. D’autre part, lorsqu’il s’agit de pourvoir à la vacance d’un siège de conseiller d’Etat, le remplacement de chaque troisième siège se fait par nomination d’un des trois candidats présentés par la Chambre des députés. Enfin, la Chambre a le droit d’accuser les membres du Gouvernement pour des faits relatifs à l’exercice de leurs fonctions. Les accusations admises par la Chambre contre les ministres sont portées devant la Cour supérieure de justice, réunie en assemblée plénière.

3.Le pouvoir judiciaire

93.Les cours et tribunaux sont chargés par la Constitution d’exercer le pouvoir judiciaire et de n’appliquer les arrêtés et règlements généraux et locaux que pour autant qu’ils soient conformes aux lois. En particulier, la Cour constitutionnelle est habilitée à statuer, à titre préjudiciel, sur la conformité des lois à la Constitution. La Constitution applique le principe de la séparation des pouvoirs en rendant les Cours et tribunaux indépendants dans l’exercice de leurs fonctions, en limitant leur sphère d’activité, en déterminant leur compétence et en prévoyant une série de garanties de procédure.

94.Les organes du pouvoir judiciaire comprennent les juridictions de l’ordre judiciaire, les juridictions de l’ordre administratif ainsi que la Cour constitutionnelle. Ils sont appelés à statuer sur les contestations qui intéressent la personne, les biens et la liberté des citoyens. Une indépendance aussi complète que possible est la première condition de l’impartialité qui doit présider à l’exercice de cette mission particulièrement importante. C’est la raison pour laquelle la Constitution et les lois spéciales ont décrété une série de dispositions destinées à soustraire les juges à l’ingérence des organes du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif, mais aussi à les rendre indépendants des justiciables.

95.Le statut personnel des juges est déterminé par les règles constitutionnelles concernant leur nomination, leur inamovibilité ainsi que les incompatibilités relatives à leurs fonctions. Tous les juges, quel que soit le degré qu’ils occupent dans la hiérarchie judiciaire, sont nommés par arrêté grand-ducal. Les juges de paix et les juges des tribunaux sont directement nommés par le Grand-Duc. Les conseillers de la Cour supérieure de justice, ceux de la Cour administrative ainsi que les présidents et vice-présidents des tribunaux d’arrondissement et des tribunaux administratifs, sont nommés par le Grand-Duc sur avis de la Cour respective.

96.En effet, lorsqu’une place de président de la Cour supérieure de justice, de conseiller à la cour de cassation, de président de chambre, de premier conseiller ou de conseiller à la cour d’appel, de président, de premier vice-président ou de vice-président d’un tribunal d’arrondissement devient vacante, la Cour supérieure de justice se réunit en assemblée générale, sur la réquisition du procureur général d’Etat, et elle désigne trois candidats, au scrutin secret, pour chaque place vacante. En outre le Procureur général d’Etat émet un avis. Pareillement, les magistrats appelés à parfaire la composition de la Cour constitutionnelle sont nommés pour chaque place vacante sur une liste de trois candidats, présentée conjointement par la Cour supérieure de justice et la Cour administrative. Les membres effectifs et suppléants de la Cour administrative, ainsi que les président et vice-présidents du tribunal administratif, sont nommés par le Grand-Duc sur simple avis de la Cour administrative.

97.Les juges de paix, les juges des tribunaux et les conseillers à une Cour sont inamovibles. Ils ne peuvent être suspendus ou révoqués si ce n’est par une décision de leur Cour. Aucun juge ne peut être déplacé sans son consentement. Le déplacement doit avoir lieu par une nomination nouvelle. En disposant que les traitements des juges sont fixés par la loi, la Constitution met les magistrats à l’abri de l’influence que pourrait exercer sur eux le pouvoir exécutif sous la menace d’une diminution ou la promesse d’une augmentation de leurs traitements. La limite d’âge pour les membres des Cours et tribunaux est fixée à soixante-huit ans. La décision de mise à la retraite d’un magistrat appartient à la Cour respective.

98.Les fonctions de l’ordre judiciaire sont incompatibles avec le mandat de député, avec toute fonction salariée publique ou privée, avec les fonctions de notaire, d’huissier de justice, avec l’état militaire et l’état ecclésiastique de même qu’avec la profession d’avocat, sauf si ce dernier exerce les fonctions de juge suppléant ou d’attaché de justice.

99.Les membres de la Cour, des tribunaux d’arrondissement et des justices de paix ainsi que les membres des parquets ne peuvent être bourgmestre, échevin ou conseiller communal.

100.Il en va de même pour les magistrats de l’ordre administratif qui ne peuvent pas non plus être membre du Conseil d’Etat.

101.Il est interdit aux magistrats (sauf pour les juges de paix suppléants) d’exercer, même sous le nom de leur conjoint ou par l’intermédiaire de toute autre personne interposée, toute affaire de commerce, d’être agent d’affaires ou de participer à la direction, à l’administration ou à la surveillance de toute société ou d’un établissement industriel ou financier. Les juges ne peuvent avoir des entretiens particuliers avec les parties ou leurs défenseurs à propos des contestations qui sont soumises à leur décision. Par ailleurs, les parties ne peuvent confier leur défense, même à titre de consultation, aux juges titulaires en activité de service, aux membres des parquets ou aux greffiers, même dans les tribunaux autres que ceux près desquels ils exercent leurs fonctions.

Les justices de paix

102.Les justices de paix forment le premier échelon de la hiérarchie judiciaire. Il y a trois justices de paix, dont une à Luxembourg, une à Esch-sur-Alzette et une à Diekirch.

103.Au siège de chaque justice de paix, il y a un tribunal du travail composé d’un juge de paix comme président et de deux assesseurs, dont l’un est choisi par le juge de paix parmi les employeurs et l’autre parmi les salariés. Les juges de paix directeurs administrent la justice de paix, répartissent le service entre les juges et assurent le bon fonctionnement du service.

104.Les justices de paix ne sont compétentes que pour les affaires de moindre importance dont la loi leur a expressément attribué la connaissance, tant en matière civile et commerciale qu’en matière répressive, à condition que l’objet du litige en matière civile ou commerciale ne dépasse pas le montant de 10.000 Euros à charge d’appel et elles sont compétentes en dernier ressort jusqu’à 1.250 Euros. En matière civile et commerciale, elles jouent, principalement, le rôle de conciliateurs. Elles cherchent avant tout à trouver une solution à l’amiable pour les conflits qui sont portés devant elles. En matière répressive, elles fonctionnent comme tribunaux de simple police. Ces derniers connaissent des contraventions ou infractions à la loi que celle-ci punit d’une peine comportant une amende allant jusqu’à 250 Euros, ainsi que les infractions, qualifiées de délits par la loi, que la chambre du conseil renvoie devant les tribunaux de police.

105.Les tribunaux du travail siégeant auprès des justices de paix sont compétents pour les contestations relatives aux contrats de travail et aux contrats d’apprentissage.

Les tribunaux d’arrondissement

106.Le pays est divisé en deux arrondissements judiciaires, celui de Luxembourg et celui de Diekirch.

107.Les deux tribunaux d’arrondissement sont divisés en sections siégeant au nombre de trois juges; auprès de chaque tribunal d’arrondissement il existe un parquet composé d’un procureur d’Etat et de substituts. Des juges d’instructions auprès de chaque tribunal d’arrondissement sont chargés d’instruire les affaires criminelles et, s’il y a lieu, les affaires correctionnelles.

108.Les tribunaux d’arrondissement siègent en matière civile, en matière commerciale et en matière pénale, chambre criminelle ou correctionnelle.

109.En matière civile et en matière commerciale, les tribunaux d’arrondissement sont compétents pour toutes les affaires dont la loi n’a pas expressément attribué la connaissance à d’autres juridictions. Ils ne peuvent rendre leurs jugements qu’au nombre fixe de trois juges, y compris le président. Les exceptions à cette règle sont le juge unique en matière répressive, qui connaît notamment d’infractions au code de la route, et le juge des référés.

110.En matière pénale, la chambre correctionnelle juge les délits, c’est-à-dire les infractions pour lesquelles le code pénal ou des lois spéciales prévoient un emprisonnement de huit jours au moins et de cinq ans au plus et une amende de plus de 251 Euros, prononcés séparément ou cumulativement. En outre, elle est compétente pour juger les faits qualifiés de crimes par la loi, qui sont renvoyés devant eux par la chambre du conseil, moyennant admission de circonstances atténuantes. Les crimes, c’est-à-dire les infractions pour lesquelles le code pénal ou des lois spéciales prévoient la réclusion à vie ou à temps, la réclusion ou la détention, sont de la compétence de la chambre criminelle.

111.La section dénommée tribunal de la jeunesse et des tutelles est la seule à connaître des affaires qui lui sont attribuées par la législation sur la protection de la jeunesse et par les dispositions légales relatives aux administrations légales, aux tutelles et autres mesures de protection à l’égard des incapables. Le tribunal d’arrondissement connaît en appel des jugements rendus en premier ressort par les justices de paix qui ont leur siège dans l’arrondissement.

112.La Constitution attribue en outre aux tribunaux d’arrondissement la connaissance des contestations qui ont pour objet des droits politiques, c’est-à-dire des droits que la loi reconnaît aux citoyens dans leurs rapports avec l’Etat. Au sens restreint, ce sont notamment ceux qui permettent aux citoyens de participer aux affaires de l’Etat, comme par exemple le droit de vote, le droit d’éligibilité et le droit d’être nommé à des fonctions publiques. Dans un sens plus large, les contestations qui ont pour objet des droits politiques sont celles qui dressent les particuliers contre l’administration publique ou qui divisent entre eux des services publics.

La Cour supérieure de justice

113.La Cour supérieure de justice a son siège à Luxembourg. Elle comprend une Cour de cassation et une Cour d’appel, ainsi qu’un parquet général formé par le procureur général d’Etat et les avocats généraux.

114.La Cour d’appel est subdivisée en neuf chambres qui siègent chacune au nombre de trois conseillers ; toutefois, la chambre criminelle siège au nombre de cinq conseillers. La Cour d’appel connaît des décisions rendues en premier ressort par les tribunaux d’arrondissement. Elle connaît des affaires civiles, commerciales, criminelles et correctionnelles, ainsi que des affaires jugées par les tribunaux du travail.

115.La Cour de cassation comprend une chambre. Elle connaît essentiellement des arrêts rendus par la Cour d’appel, par la Cour militaire, ainsi que des jugements rendus en dernier ressort par les tribunaux d’arrondissement et par les juges de paix. Aucun arrêt ou jugement ne peut être déféré à la Cour de cassation si ce n’est pour contravention à la loi, pour excès de pouvoir ou pour violation des formes, soit substantielles, soit prescrites à peine de nullité.

116.La Cour supérieure de justice se réunit en assemblée générale pour s’occuper des affaires internes qui la concernent, comme par exemple la présentation de candidats. L’Assemblée générale de la Cour connaît en outre des accusations admises par la Chambre des députés contre les membres du gouvernement, des conflits d’attribution et des affaires disciplinaires contre les magistrats.

Les juridictions administratives

117.La Constitution dispose que le contentieux administratif relève du ressort du Tribunal administratif et de la Cour administrative. Leur siège se trouve à Luxembourg.

118.Le Tribunal administratif comprend deux chambres. Il statue sur les recours dirigés pour incompétence, excès, et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements et contre les actes administratifs à caractère réglementaire, quelle que soit l’autorité dont ils émanent. Il connaît aussi en principe des contestations relatives aux impôts directs et aux impôts et taxes communaux.

119.Contre les décisions du tribunal administratif, appel peut être interjeté devant la Cour administrative.

120.Le tribunal administratif connaît comme juge du fond des recours dirigés contre les décisions du directeur de l’Administration des contributions directes dans les cas où les lois relatives à ces matières prévoient un tel recours.

121.La Cour administrative constitue la juridiction suprême de l’ordre administratif.

122.Sauf disposition contraire de la loi, appel peut être interjeté devant la Cour administrative, contre les décisions rendues par le tribunal administratif statuant comme juge d’annulation, contre les décisions rendues en matière d’actes administratifs à caractère réglementaire. La Cour administrative statue encore en appel et comme juge de fond sur les recours dirigés contre les décisions d’autres juridictions administratives ayant statué sur des recours en réformation dont les lois spéciales attribuent compétence à ces juridictions. Finalement, la Cour administrative statue sur les conflits qui opposent le Gouvernement et la Cour des Comptes.

La Cour constitutionnelle

123.La Cour constitutionnelle est composée de neuf membres, à savoir d’un président, d’un vice-président et de sept conseillers. Le président de la Cour supérieure de justice, le président de la Cour administrative et les deux conseillers à la cour de cassation sont membres de droit de la Cour constitutionnelle. Les cinq autres membres sont nommés sur l’avis conjoint de la Cour supérieure de justice et de la Cour administrative, réunies en assemblée générale conjointe. Le président de la Cour supérieure de justice est président de la Cour constitutionnelle, alors que le président de la Cour administrative en est vice-président. Les membres de la Cour continuent à exercer leurs fonctions à leur juridiction d’origine. La Cour, qui siège à Luxembourg, délibère et rend ses arrêts en formation de cinq membres.

124.La Cour constitutionnelle statue par voie d’arrêt sur la conformité des lois à la Constitution, à l’exception de celles qui portent approbation de traités. Si une juridiction estime qu’une question de conformité d’une loi à la Constitution se pose et qu’une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, elle doit la soulever d’office après avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations. Lorsqu’une partie soulève une question relative à la conformité d’une loi à la Constitution devant une juridiction de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif, elle est tenue de saisir la Cour constitutionnelle, sauf si elle estime qu’une décision sur la question soulevée n’est pas nécessaire pour rendre son jugement, ou que la question de constitutionnalité est dénuée de tout fondement, ou bien que la Cour constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet. Dans ce cas de figure, les juridictions doivent se conformer à la décision antérieurement prise.

125.Aucun recours n’est possible contre la décision de la Cour constitutionnelle.

126.Les audiences des cours et tribunaux doivent être publiques, à moins que cette publicité ne soit dangereuse pour l’ordre public. Dans ce dernier cas, le tribunal peut exceptionnellement prononcer l’exclusion du public, par un jugement motivé, rendu dans la forme ordinaire. Tous les jugements doivent être prononcés en audience publique, même si les débats ont eu lieu à huis clos. L’obligation de motiver les jugements existe pour toutes les juridictions. L’institution de voies de recours, permettant d’attaquer devant une juridiction supérieure la décision d’une juridiction inférieure offre des garanties supplémentaires d’équité pour les justiciables.

127.L’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme prévoit en outre le droit de toute personne à un procès équitable, dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial.

B.Les communes

128.La représentativité des partis politiques à la Chambre des députés ne se reflète pas forcément dans les communes. Dans l’Etat luxembourgeois qui ne connaît ni provinces, ni départements, la commune est la seule application du principe de la décentralisation territoriale. Au point de vue administratif, la commune forme une collectivité autonome, à base territoriale, possédant la personnalité juridique. Elle gère son patrimoine et ses intérêts par l’intermédiaire de représentants locaux, sous le contrôle du pouvoir central. Les communes peuvent comporter plusieurs sections électorales.

129.Dans chaque commune il y a un conseil communal élu directement par les habitants ayant les qualités requises pour être électeurs. Les membres du conseil communal sont élus pour le terme de six ans, à compter du 1er janvier qui suit leur élection. Leur nombre varie selon la population de la commune. Il est toujours impair.

130.Chaque commune forme une circonscription électorale. Les élections se font en principe d’après le système de la majorité relative. Toutefois, dans les communes qui comptent 3.000 habitants au moins ou dont la section unique ou l’une des sections compte 3.000 habitants au moins, les élections se font au scrutin de liste avec représentation proportionnelle comme pour les élections législatives. Les communes où les élections se font d’après le mode proportionnel ne constituent qu’une section électorale, même si elles comportent plusieurs localités distinctes.

131.Pour être électeur, il faut remplir les conditions requises pour les élections législatives et être domicilié sur le territoire de la commune. Le domicile est constaté par l’inscription sur la liste électorale. Les ressortissants des autres Etats membres de l’Union européenne sont admis à participer aux élections communales s’ils sont domiciliés au Grand-Duché et y ont résidé pendant cinq années au moins et s’ils n’ont pas perdu le droit de vote en raison de leur résidence en dehors de leur Etat membre d’origine. Pour les autres ressortissants étrangers, ils doivent être domicilié dans le Grand-Duché et y avoir résidé au moment de la demande d’inscription sur la liste électorale pendant cinq années au moins. En outre ils doivent, pour toute cette période, être en possession d’une autorisation de séjour, des papiers de légitimation prescrits et d’un visa si celui-ci est requis. Une liste ne peut toutefois être majoritairement composée de candidats ne possédant pas la nationalité luxembourgeoise.

132.Pour pouvoir être élu, il faut être Luxembourgeois(e) ou ressortissant(e) d’un autre Etat membre de l’Union européenne, - à condition pour ce dernier d’avoir résidé au Grand-Duché pendant cinq années au moment du dépôt de la candidature - , jouir des droits civils et politiques, être âgé de dix-huit ans accomplis au jour de l’élection et avoir sa résidence habituelle depuis six mois au moins dans la commune ou section de commune.

133.Le Grand-Duc a le droit de dissoudre le conseil communal. Lorsqu’il fait usage de ce droit, les électeurs sont convoqués au plus tard dans les trois mois qui suivent la dissolution.

134.Le pouvoir communal est exercé par le conseil communal, sinon par le collège des bourgmestres et échevins ou le bourgmestre seul. Les rapports de ces deux organes entre eux sont analogues à ceux des organes du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif dans l’Etat. Le conseil communal représente la commune. Il correspond, toutes proportions gardées, à ce que la Chambre des députés est pour l’Etat. Il est compétent pour tout ce qui est d’intérêt communal, soit notamment tout ce qui concerne l’administration intérieure de la commune, les biens communaux, les recettes, les dépenses, les travaux à effectuer, les établissements publics des communes, la nomination du secrétaire communal, du receveur communal, ainsi que du personnel communal. De la manière fixée par la loi, la commune participe à la mise en œuvre de l’enseignement. La Constitution confère en outre au conseil communal le soin de faire des règlements d’administration intérieure et de police communale, sanctionnés par des pénalités. Ces règlements ne peuvent en aucun cas être contraires aux lois et aux règlements d’administration générale.

135.Le bourgmestre préside les séances du conseil communal et en dirige les débats. En cas d’empêchement, il désigne un échevin pour le remplacer. A défaut de délégation, il est remplacé par les échevins et ensuite par les conseillers suivant leur rang d’ancienneté. Le conseil ne peut prendre de résolution que si la majorité de ses membres est présente. Les séances du conseil communal sont publiques. Toutefois, les deux tiers des membres présents peuvent, pour des motifs d’ordre public et en raison d’inconvénients graves, décider le huis clos, à condition d’en exprimer les causes dans le procès-verbal.

136.Le collège des bourgmestres et échevins est composé de membres issus du conseil communal. Les bourgmestres sont nommés et révoqués par le Grand-Duc. Les échevins des villes sont nommés par le Grand-Duc et ceux des autres communes par le Ministre de l’Intérieur.

137.Le collège est l’organe d’exécution et d’administration journalière de la commune. Il est chargé de la publication et de l’exécution des résolutions du conseil communal, de l’administration du patrimoine de la commune, de la gestion des revenus, de l’ordonnancement des dépenses, de la surveillance de la caisse et de la comptabilité communales, de l’administration des établissements communaux, de l’exercice de la police rurale, de la direction des travaux communaux, de l’alignement de la petite voirie, des actions judiciaires de la commune, de la surveillance des employés communaux, du service d’incendie, de la garde des archives, etc. La rédaction des actes de l’état civil et la tenue des registres y relatifs sont exclusivement de la compétence des autorités communales. Le bourgmestre ou un échevin par lui délégué remplit les fonctions d’officier de l’état civil.

138.Dans des cas urgents, le collège échevinal peut édicter des règlements de police, sans être obligé de consulter préalablement le conseil communal, mais à charge d’en obtenir la ratification sans retard et d’en envoyer immédiatement copie au ministre de l’Intérieur et au commissaire de district. Il fonctionne également, dans certains cas, comme organe du pouvoir central, puisqu’il est chargé, sur le territoire de la commune, de l’exécution des lois et arrêtés de l’administration supérieure. Le bourgmestre est chargé de l’exécution des lois et règlements de police sous la surveillance du commissaire de district. La police judiciaire est spécialement attribuée au bourgmestre qui peut, après avoir obtenu le consentement du procureur d’Etat, la déléguer également à un membre du collège échevinal.

139.Les réunions du collège des bourgmestres et échevins ne sont pas publiques.

140.Pour couvrir leurs dépenses, les communes disposent des revenus de leurs biens ainsi que du produit des impôts communaux et des taxes communales. Elles bénéficient par ailleurs de dotations non affectées ainsi que de subventions spécifiques de la part de l’Etat. Lorsqu’elles doivent faire face à d’importantes dépenses extraordinaires, elles peuvent également contracter des emprunts. Aucune charge ni aucune imposition communale ne peut être établie qu’avec le consentement du conseil communal. D’autre part, aucune imposition communale ne peut être établie sans l’autorisation du Grand-Duc.

141.Le conseil communal établit annuellement, dans la première quinzaine du mois de septembre, le budget des recettes et des dépenses de la commune pour l’année suivante. Chaque année, au plus tard dans la première quinzaine du mois d’avril, le conseil communal doit établir le compte de l’exercice précédent. Les budgets et les comptes des communes doivent énumérer, en les spécifiant, toutes les recettes et toutes les dépenses de l’année qu’ils concernent. Ils sont déposés à la maison communale où chaque contribuable peut en prendre connaissance. Le droit reconnu par la Constitution aux organes représentatifs de la commune de gérer eux-mêmes les intérêts exclusivement locaux leur confère une large autonomie caractérisée par le pouvoir communal, la représentation locale et la personnalité juridique. En effet, la commune étant une personne morale de droit public, elle possède et gère un patrimoine propre, elle peut acquérir des droits et contracter des obligations et elle peut plaider en justice. Toutefois, pour éviter que l’autonomie des communes ne porte atteinte aux intérêts nationaux, la Constitution a conféré au législateur ordinaire le soin de régler la composition, l’organisation et les attributions du conseil communal et elle a réservé à l’autorité supérieure le droit d’exercer un contrôle continu, soit par l’intermédiaire d’organes spéciaux comme les commissaires de district et les contrôleurs de la comptabilité communale, soit par un système d’autorisations ou d’approbations qui porte le nom de tutelle administrative.

142.Il y a dans chaque district administratif un commissaire de district, nommé par le Grand-Duc. Ce sont des fonctionnaires de l’Etat, placés sous l’autorité directe du Ministre de l’Intérieur en particulier et du gouvernement en général. Ils ont pour mission de servir d’intermédiaires hiérarchiques entre le pouvoir central et les administrations communales. Toutes les administrations communales, à l’exception de la Ville de Luxembourg, sont placées sous leur surveillance immédiate et ne doivent correspondre avec l’autorité supérieure que par leur entremise, sauf dans des cas graves et exceptionnels. La surveillance de la gestion communale est réglée par la loi qui peut soumettre certains actes des organes communaux à l’approbation de l’autorité de surveillance et même en prévoir l’annulation ou la suspension en cas d’illégalité ou d’incompatibilité avec l’intérêt général; sans préjudice des attributions des tribunaux judiciaires ou administratifs. En cas d’annulation ou de non-approbation d’un acte d’une autorité communale par le Grand-Duc, par le Ministre de l’Intérieur ou toute autre autorité compétente, la commune dispose d’un recours en annulation de la mesure de tutelle devant la Cour administrative.

IV. Structure politique actuelle

143.Le Grand-Duché de Luxembourg est une monarchie constitutionnelle sous le régime de la démocratie parlementaire, avec à sa tête comme chef d’Etat, le Grand-Duc Henri de Luxembourg.

144.Selon la Constitution luxembourgeoise, l’héritier présomptif acquiert la couronne de plein droit dès que le trône devient vacant, soit par décès, soit par abdication du titulaire.

145.Le 24 décembre 1999, le Grand-Duc Jean a annoncé son intention d’abdiquer en faveur de son fils aîné, Henri.

146.L’avènement au trône de ce dernier a eu lieu le 7 octobre 2000.

147.Le gouvernement au sens strict est l’organe du pouvoir exécutif formé par le Grand-Duc et les ministres responsables. Dans l’acceptation courante, le gouvernement désigne l’ensemble des ministres et secrétaires d’Etat qui secondent le Grand-Duc dans l’exercice de ses pouvoirs constitutionnels.

148.Suite aux élections législatives du 7 juin 2009, le gouvernement luxembourgeois actuel, sous la présidence du Premier ministre Jean-Claude Juncker, est composé d´une coalition entre le parti chrétien-social (CSV) et le parti ouvrier socialiste luxembourgeois (LSAP).

149.Le gouvernement actuel est composé de 15 ministres.

150.Le programme gouvernemental 2009-2014 constitue la base de la politique de la coalition actuelle.

V.Caractéristiques économiques, sociales et culturelles

A.Caractéristiques économiques

151.La politique économique et sociale mise en œuvre par quasiment tous les gouvernements depuis la seconde guerre mondiale s’est appliquée à faire preuve d’un savant dosage entre idéologies politiques et économiques, dans le but de permettre au secteur productif de la nation de se développer tout en veillant à ce que la répartition du produit national se fasse de manière équitable entre toutes les parties de la population.

152.Selon les études économiques de l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) pour l’année 2010, le Luxembourg « a connu une grave récession, car il était massivement exposé à la chute du commerce mondial et à la crise financière internationale. Le chômage a augmenté et la situation budgétaire s’est dégradée. Cette détérioration est intervenue après une longue période d’expansion économique continue et rapide, durant laquelle le niveau de vie a affiché une hausse spectaculaire tandis que l’économie a été transformée par le développement de la place financière et par les flux intenses de travailleurs frontaliers et migrants. On observe des signes encourageants de reprise, mais la trajectoire de croissance future sera probablement plus faible que dans le passé récent, compte tenu de la faiblesse de la reprise internationale, de facteurs structurels et d’une érosion de la compétitivité. »

153.En 2010, selon les chiffres de l’Institut national de la statistique et des études économiques du Grand-Duché du Luxembourg (Statec), le produit intérieur brut (PIB) par habitant du Luxembourg était de 82.100 euros. Une étude d’Eurostat publiée le 20 juin 2012 indique que le PIB par habitant exprimé en standards de pouvoir d’achat est de 274, ce qui positionne le pays au premier rang du classement, suivi de la Norvège (189) et de la Suisse (151). Le PIB par habitant du Luxembourg est ainsi plus de deux fois et demie supérieur à la moyenne de l’UE-27. Au 1er trimestre de 2012, le PIB a reculé sensiblement, de 1,5%, par rapport au 4e trimestre de 2011, le problème se concentrant surtout sur le secteur financier.

154.Malgré tout, cet indicateur classe toujours le Grand-Duché en tête des pays les plus riches du monde, mais il est à relativiser compte tenu du nombre important de travailleurs frontaliers qui, par définition, ne figure pas au dénominateur de ce ratio. Le revenu national brut (RNB) par habitant exprimé en parité de pouvoir d’achat (PPA), indicateur plus fiable que le PIB par habitant, s’élevait quant à lui à 61.790 dollars (estimations de la Banque Mondiale), soit toujours le plus haut niveau mondial devant la Norvège (56.830), Singapour (55.790), la Suisse (50.170), Hong Kong (47.480) et les Etats-Unis (47.360). Selon des estimations de la Banque mondiale de 2010, le RNB par habitant exprimé en PPA s’élevait à 63.850 dollars internationaux, soit toujours le plus haut niveau mondial devant la Norvège (57.130), Singapour (54.700), la Suisse (49.180), Hong Kong (47.300) et les Etats-Unis (47.020). D’après les chiffres provisoires du Statec, l’excédent de la balance courante du Grand-Duché s’est élevé à 8,08% du PIB en 2010, ce qui représente un niveau considérable. Les bons résultats enregistrés par le Luxembourg tiennent aux forts excédents de la balance des services, résultant en grande partie des exportations de services financiers. Après un excédent de 2,6 milliards dégagé en 2009, les opérations courantes du Luxembourg avec le reste du monde se soldent en 2010 par un surplus de 3,3 milliards EUR, ce qui représente quelque 7,8 % du PIB.

155.Pour ce qui est du pouvoir d’achat, le revenu disponible des ménages par habitant, en valeur nominale, est passé de 26.700 € en 2006 à 30.000 € en 2009 au Luxembourg, soit une augmentation de 12 %.

156.La dette totale du secteur public, conformément à la définition du Règlement (CE) N° 3605/93, s’élevait à 19,1% du PIB en 2010, soit l’un des niveaux les plus faibles au sein de l’UE 27. La moyenne européenne s’élevait à 80% en 2010. Pour l’année 2011 la dette avait baissé de 1,04%, permettant au Luxembourg de se placer deuxième derrière l’Estonie.

157.L’économie luxembourgeoise a enregistré un taux de croissance moyen du PIB de 2,08% au cours de la période 2004-2010, soit l’une des meilleures performances sur le moyen terme au sein de l’UE 27. Cette performance remarquable tient pour une bonne partie aux résultats enregistrés par les institutions financières au cours de la période. Après un taux de croissance négatif de 5,3% pour l’année 2009 dû à la crise mondiale, la croissance a repris en 2010. Le Luxembourg a affiché un taux positif de 2,7% sur l’année 2010. L’année 2011 se solde également par une croissance positive, bien que faible, d’environ 1,6% selon les derniers chiffres du Statec. Cette maigre performance est due à la crise de la dette souveraine que subissent en ce moment les pays de la zone euro. Pour l’année 2012 la situation se dégrade davantage. On s’attend à une progression du PIB de seulement 0,1%.

158.Le taux de chômage au mois de décembre 2010 était de 6,5%, soit l’un des taux les plus faibles parmi les Etats membres de l’UE, en dépit d’une hausse sensible registrée depuis le début de la crise financière de 2008/2009. Malgré ce bon résultat apparent, il convient de noter que le Grand-Duché a enregistré un doublement de son taux de chômage depuis le début de la décennie en dépit d’un marché de l’emploi fortement dynamique. Ce « paradoxe luxembourgeois » s’explique notamment par une inadéquation entre l’offre et la demande de main d’œuvre et du système d’éducation et de formation ne répondant pas suffisamment aux besoins de l’économie. Les chiffres actuels se montrent quelque peu inquiétants à cause de la dégradation du marché du travail, laquelle est due à une rechute de l’environnement international depuis le printemps 2012. Cette période s’inscrit dans le prolongement de la crise économique et politique, de l’absence de solution durable à la crise de l’endettement, aux divergences accrues entre les Etats membres et du ralentissement de l’activité au niveau mondial. Néanmoins, le Luxembourg, avec un taux de chômage harmonisé de 5,2%, se retrouve, en avril 2012, parmi les pays ayant un chômage relativement faible de la zone euro.

159.En ce qui concerne la production industrielle, ArcelorMittal, dont le siège se situe à Luxembourg, est aujourd’hui le plus gros sidérurgiste mondial. En 2011, il employait 261.000 personnes dans le monde pour une production de minerai de fer de 54,1 millions de tonnes ainsi qu’une production de charbon de 8,3 millions de tonnes ; son chiffre d’affaires s’élevant à 72,8 milliards EUR. Selon la Fédération mondiale de l’acier, la production d’acier au Luxembourg s’élevait à 160.000 tonnes en décembre 2011. Le Grand-Duché fermait ainsi le classement des 40 plus gros producteurs d’acier du monde, avec 2,6 mégatonnes sur 2011. Au 31 décembre 2010, 6.070 personnes travaillaient pour l’industrie sidérurgique au Luxembourg. Si sa contribution au PIB est aujourd’hui inférieure à ce qu’elle a été, il n’en reste pas moins que l’industrie sidérurgique fut pendant longtemps la locomotive de l’économie luxembourgeoise, et ce jusqu’à la crise de la sidérurgie dans les années 1970.

160.L’histoire du Luxembourg reste à tout jamais liée à celle de l’industrie sidérurgique. Le Luxembourg est également le siège de la société Paul Wurth, l’un des leaders dans le domaine de la conception et de la réalisation d’équipements mécaniques et de systèmes et procédés pour hauts fourneaux.

161.La Recherche et Développement (R&D) assure l’essor de la société et son positionnement dans les productions à haute valeur ajoutée. Paul Wurth gère un portefeuille de 600 brevets protégés dans le monde entier. En 2008, elle employait 1450 personnes dans le monde dont 560 au Luxembourg. La société emploie actuellement 1600 salariés dans le monde. Le chiffre d’affaires en 2010 s’est élevé à 577,3 millions d’EUR. En 2011, Paul-Wurth a réalisé un chiffre d’affaire de 491 millions EUR et un bénéfice net de 18,2 millions EUR. Les produits de l’industrie sidérurgique luxembourgeoise ont un fort contenu technologique et sont véritables ambassadeurs du savoir-faire luxembourgeois. Ainsi, les fondations du Freedom Tower de New York, tour de 533 mètres de haut en construction sur le site de l’ancien World Trade Center, sont renforcées par des poutrelles en acier provenant de l’usine ArcelorMittal de Differdange. D’un point de vue technologique, l’usine de Differdange était la seule au monde capable de produire et de laminer ce type de poutrelles géantes.

162.D’autre part il est nécessaire de souligner l’aspect attractif du marché du travail luxembourgeois qui invite des milliers de frontaliers à venir travailler au pays chaque jour. En mars 2011, par exemple, 153.157 frontaliers travaillaient au Luxembourg. Avec 49% des effectifs, la France fournit le plus important contingent suivie de la Belgique (26%) et de l’Allemagne (25%). Selon les derniers chiffres (2011), 153.300 salariés font la navette vers le Grand-Duché, dont 75.700 résidents en France, 38.900 en Belgique et 38.700 en Allemagne.

163.Etant donné la dimension restreinte du bassin d’emploi national et le dynamisme de l’économie luxembourgeoise, la disponibilité de la main-d’œuvre étrangère est indispensable au développement de l’économie nationale. 44% de l’emploi salarié intérieur est ainsi occupé par des travailleurs frontaliers. Les résidents de nationalité luxembourgeoise représentent moins d’un tiers de la main-d’œuvre travaillant au Grand-Duché au 31 mars 2011.

164.Le maintien d’une situation économique satisfaisante n’a été possible, en premier lieu, que par de profonds ajustements et mutations, au gré de l’évolution du montant et de la structure de la demande intérieure et surtout étrangère. Le deuxième facteur ayant favorisé cette évolution réside dans l’importance accordée au développement parallèle des mesures sociales : une redistribution équitable du revenu national et la paix sociale qu’elle garantit sont les générateurs primordiaux des gains de productivité des entreprises et constituent, de ce fait, un des avantages comparatifs clés de l’économie nationale.

165.Le Luxembourg s’est définitivement positionné sur le plan international pour son savoir-faire financier avec le lancement du marché des euro-obligations dans les années 1960. La diversification ultérieure, notamment en matière d’obligations extérieures, d’obligations de réserves monétaires ou de dépôts auprès des banques centrales en Allemagne et en Suisse, s’est avérée primordiale pour l’ambition du pays.

166.En effet, en termes de compétitivité, l’étude de la Growth Competitiveness Index (GCI) de 2011 – laquelle évalue le potentiel des économies mondiales à atteindre une croissance soutenue à moyen et à long terme – place le Luxembourg au 23e rang sur les 142 pays analysés.

B.Caractéristiques sociales

167.L’environnement politique du Luxembourg se caractérise par des gouvernements stables. Par ailleurs, le Grand-Duché est un pays où la négociation et le dialogue sont à la base d’une paix sociale comprenant, en contrepartie, le progrès social, la justice sociale et le respect du travail.

168.Le progrès social passe par l’existence de services publics performants dans des domaines comme l’éducation, la santé ou encore la protection sociale ainsi que par l’extension et la modernisation des infrastructures indispensables à ces prestations.

169.Les dépenses de protection sociale totales, exprimées en parités de pouvoir d’achat (PPA) par habitant, s’élevaient à 17.359 EUR en 2009. Il faut cependant savoir que le Luxembourg est un cas particulier puisqu’une part importante des prestations est versée à des ayants droit non-résidents (principalement des dépenses de santé, des pensions et des prestations familiales), qui, par définition, ne sont pas comptabilisés parmi les habitants. En soustrayant les dépenses à destination des non-résidents, on obtient un montant toujours élevé, en l’occurrence 13.248 EUR (PPA) par habitant.

170.Les dépenses totales de pensions exprimées par habitant (pensions vieillesse, pensions invalidité, pensions veuves et orphelins) ont atteint 5.919 EUR (PPA) en 2009. En faisant abstraction des dépenses imputables aux non-résidents, on obtient un montant de 4.516 EUR (PPA) par habitant.

171.En 2009, les dépenses publiques de santé par habitant s’élevaient à 3.614 EUR (PPA) au Luxembourg. Une fois les dépenses à destination des frontaliers déduites, on obtient un montant de 2.758 EUR (PPA) par habitant.

172.Les dépenses totales de prestations familiales du Luxembourg en 2009 étaient de 2.532 EUR (PPA) par tête. Corrigées des transferts à l’étranger, on obtient un montant de 1.932 EUR.

173.La paix sociale est assurée également, et peut-être avant tout, par la création d’emplois nouveaux, correctement rémunérés. A ce titre, relevons que l’emploi salarié est passé de 244.400 personnes en 2000 à 351.510 salariés en 2012. Parmi celles-ci, figurent environs 37.000 travailleurs dans le secteur industriel, 185.000 dans celui des services et 39.000 dans la construction. Entre les années 1970 et 1995 le nombre des actifs non salariés se trouvait en légère décroissance. Cependant cette tendance s’est achevée. Au cours de la dernière décennie le nombre des non salariés est resté plus ou moins stable.

174.A souligner que l’Etat, avec un effectif de 24.662 fonctionnaires, reste le principal employeur au Luxembourg, suivi par la société sidérurgique ArcelorMittal, employant actuellement 5.960 personnes. En janvier 2012, l’emploi total intérieur se chiffrait à 373.050 personnes, dont 351.510 salariés et 21.540 indépendants.

175.La croissance économique des dernières années n’aurait pu se réaliser sans l’augmentation de l’emploi salarié. Trois phénomènes ont largement contribué à répondre à l’offre d’emploi sans cesse croissante : en premier lieu, le nombre des travailleurs frontaliers est passé de 87.700 en 2000 à quelques 153.300 frontaliers en 2011. En second lieu, la part de l’emploi féminin dans l’emploi intérieur salarié est passée de 23 % en 1970 à 37 % en 1994. Depuis, ce chiffre n’a cessé d’augmenter. D’après l’OCDE, le taux d’emploi féminin est passé de 50,8% en 2001 à 56,9% en 2011. Enfin, il convient de souligner l’extension du travail à temps partiel qui implique également une augmentation du nombre des emplois.

176.En 1993, le taux de chômage a franchi pour la première fois le cap des 2 %. En 1994, le taux de chômage est passé à 2,7 %. Il devient de plus en plus apparent que la croissance du chômage n’est pas un problème d’ordre macro-économique, les opportunités sur le marché du travail étant considérables et en progression continue. Entre 2000 et 2009 le taux de chômage a plus que doublé. Il est passé de 2,5% à 5,8%. D’après les dernières statistiques (juin 2012) le taux de chômage est de 6,2%.

177.Au début des années 90, les salaires ont progressé à un rythme rapide dû au système institutionnalisé d’indexation des salaires et le rattachement des salaires minimums au taux moyen de croissance des rémunérations dans l’économie. Cette évolution a eu des répercussions sur la compétitivité de l’économie luxembourgeoise et en 1994, le Gouvernement a adopté des mesures pour préserver l’emploi, la stabilité des prix et la compétitivité des entreprises. Ainsi, par exemple, dans l’industrie, la masse des salaires et appointements a diminué de 2 % entre 1993 et 1994. Entre 2010 et 2011 les salaires n’ont augmenté que de 0,6%.

178.Un facteur qui contribue de manière non négligeable au maintien de la paix sociale au Luxembourg mérite, de par son originalité, d’être évoqué ici. La « tripartite », appellation courante du Comité de coordination tripartite nomenclature légale, constitue une instance de consultations entre partenaires sociaux propice à trouver des solutions négociées à des problèmes sociaux avant qu’un arrêt de travail ne soit déclenché. Créé par la loi du 24 décembre 1977 et composé de quatre membres de gouvernement (Premier Ministre et Ministres de l’économie, des finances et du travail) ainsi que de huit représentants des organisations professionnelles des employeurs et des salariés, le Comité se réunit sous la présidence du Premier Ministre pour émettre un avis préalablement à toute mesure rendue nécessaire si un des trois seuils définis dans la loi de 1977 est atteint (1.500 chômeurs, 2.500 chômeurs, crise aiguë). Depuis, cette loi a été modifiée à plusieurs occasions, dernièrement le 29 décembre 2006.

179.Le taux de syndicalisation élevé que l’OCDE estime à 42% (2010) est un réel facteur de stabilité qui facilite la recherche du consensus. Ainsi, le Luxembourg fait partie des pays où la négociation, la concertation et le dialogue entre gouvernement et partenaires sociaux sont le ciment d’une paix sociale et d’un développement économique enviables.

180.Le Luxembourg dispose d’un système de protection sociale très développé datant du début du XXe siècle et qui a beaucoup évolué au fil des ans, principalement avec l’élargissement de la gamme de ses prestations et avec leur extension à toutes les catégories de la population, est bien structuré, transparent et, malgré sa générosité, d’un coût abordable pour la plupart de ses interventions, au moins dans une perspective à moyen terme. Il repose essentiellement sur le principe de la solidarité entre les différents groupes socio-économiques ainsi qu’entre les actifs et les retraités. Cette solidarité est assurée par un système de péréquation pour un grand nombre d’allocations, par la mise en commun des risques et par une indexation, de fait, des prestations sur les salaires et traitements réels.

181.La situation unique de ce pays peu peuplé et qui jouit d’une situation centrale en Europe permet aux travailleurs frontaliers de jouer un rôle régulateur particulièrement important sur le marché du travail. Cette particularité, conjuguée au fait que le Luxembourg a connu dans le passé des périodes de forte immigration, fait que le nombre de cotisants au système est relativement indépendant des facteurs démographiques purement intérieurs et que, même si une part importante du total des pensions est versée à des non-résidents, il s’opère néanmoins un transfert non négligeable des non-résidents au Trésor luxembourgeois.

182.Le Luxembourg a innové en mettant en œuvre, dès 1986, un dispositif de revenu minimum garanti répondant aux exigences d’une stratégie d’inclusion active dont les trois piliers sont : la garantie d’un revenu minimum, l’accompagnement personnalisé vers le marché de l’emploi et l’intégration sociale et l’accès à des services de qualité.

183.Outre les droits crées par la loi sur le revenu minimum garanti, l’aide sociale au Luxembourg est régie par la loi du 18 décembre 2009 organisant l’aide sociale. La nouvelle législation est entrée en vigueur le 1er janvier 2011. Par la création de 30 Offices Sociaux, qui sont des établissements publics placés sous la surveillance des communes, l’aide sociale a été placée dans une dynamique préventive pour briser le cercle de l’exclusion sociale.

184.Dès 1998 la législation sur l’accueil gérontologique autorise le Fonds National de Solidarité à participer aux prix d’hébergement des personnes âgées admises dans des institutions du long séjour pour personnes âgées (centres intégrés pour personnes âgées et maisons de soins) et dont les ressources personnelles sont insuffisantes pour leur permettre de couvrir ces frais.

185.Le Luxembourg a par ailleurs introduit dans le domaine de la politique familiale et de la conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée, toute une série de prestations, comme notamment l’allocation d’éducation, le congé parental indemnisé, le congé pour raisons familiales.

186.En 2009, le Luxembourg a innové avec l’introduction du « Chèque-Service Accueil » (CSA) qui constitue une aide de l’Etat et des communes au bénéfice des enfants et de leurs familles en offrant aux parents une participation financière réduite dans le financement des structures d’accueil socio-éducatif et des assistants parentaux.

187.Les personnes en situation de handicap bénéficient depuis 2003 d’un revenu propre. Elles peuvent demander le statut de salarié handicapé et bénéficier d’une panoplie de mesures destinées à leur faciliter l’intégration sur le marché du travail ordinaire ou protégé. Si les personnes handicapées ne peuvent avoir accès à une occupation salariée, un revenu pour personnes gravement handicapées leur est versé. 

188.Une caractéristique assez inhabituelle est l’augmentation régulière, sur plus longue période, des transferts budgétaires tant en proportion du financement total de la sécurité sociale que par rapport au PIB. Cette évolution a été rendue possible par la prospérité générale de l’économie luxembourgeoise et par la politique budgétaire prudente menée dans le passé.

189.Une autre caractéristique poignante du Luxembourg est la main d’œuvre internationale hautement qualifiée et plurilingue. Des habitants originaires de plus de 170 pays vivent aujourd’hui au Grand-Duché. Au fil du temps, ces différentes cultures ont largement influencé le pays. Ces influences diverses se retrouvent à tous niveaux, rendant le pays fondamentalement multiculturel. D’ailleurs, la majorité des luxembourgeois maîtrisent au moins trois langues (à savoir généralement le luxembourgeois, le français et l’allemand), ce qui constitue sans aucun doute un avantage évident par rapport à d’autres pays.

190.Tous les différents aspects propres au Grand-Duché mentionnés ci-dessus ont contribué au classement très positif du pays dans le monde en matière de qualité de vie. Ainsi, selon le rapport 2010 de la société ECA International, Luxembourg-ville occupe le 7e rang mondial sur 254 des villes les plus agréables à vivre pour les expatriés. Selon l’index 2010 de International Living, le Grand-Duché de Luxembourg est 6e sur 194 pays en ce qui concerne la qualité de vie. Finalement, selon le rapport sur le développement humain du PNUD, le pays occupe la 25e place sur 187 en matière de développement humain.

C.La vie culturelle

191.La spécificité de la vie culturelle au Luxembourg consiste en sa capacité à surprendre par la qualité et la richesse de son offre, sa multiculturalité et son ouverture sur le monde, son plurilinguisme dans tous les domaines, une quantité d’infrastructures culturelles de choix, ainsi que par ses fêtes et traditions. Il en résulte un tourbillon culturel d’une étonnante diversité littéraire, artistique, architecturale et musicale dans lequel baigne le quotidien et qui caractérise également le développement rapide et continu de la scène culturelle luxembourgeoise.Il va de soi que la politique culturelle est dès lors basée sur une définition ouverte du concept de culture et entend contribuer à garantir les valeurs démocratiques de la société multiculturelle du Luxembourg.

192.Situé au cœur de l’Europe et hébergeant des ressortissants de plus de 170 nationalités, le Luxembourg s’affirme comme un croisement des cultures. Respect, tolérance et ouverture sont donc des attributs distinctifs de la culture au Luxembourg, environnement multiculturel qui offre de nombreuses possibilités et présente aussi la particularité de se décliner en plusieurs langues.

193.Si en effet, de par l’histoire et la géographie du pays, le Luxembourg a été influencé depuis le Moyen Âge par les deux grandes cultures française et allemande, la scène culturelle autochtone a cependant également su garder sa spécificité et son identité – une « touche personnelle » qui allie passé et contemporanéité. A ce titre, une importance certaine est p.ex. attachée à la langue et à la littérature luxembourgeoise. Cela n’empêche que les répertoires sont représentés la plupart du temps dans la version originale des pièces théâtrales etc. ou que les films soient présentés systématiquement en version originale dans les cinémas.

194.La culture luxembourgeoise a pu gagner beaucoup en reconnaissance internationale lorsque le pays s’est préparé à l’année 1995, quand la ville de Luxembourg – qui figure sur la liste de l’Unesco du patrimoine mondial de l’humanité depuis 1994 – a été nommée une 1re fois capitale européenne de la culture. Seule ville jusqu’ici à s’être vu conférer ce titre une 2e fois, « Luxembourg et Grande Région, capitale européenne de la culture 2007 » a innové en associant les régions limitrophes des pays voisins. Afin d’assurer la continuité de la coopération des acteurs, les administrations culturelles du Grand-Duché de Luxembourg, de la Sarre, de la Rhénanie-Palatinat, de la Lorraine et de la Wallonie (Communauté française et Communauté germanophone de Belgique) ont créé en 2008 l’association « Espace culturel Grande Région » à Luxembourg. Son objectif sont la mise en valeur de la richesse, de la diversité et de l’originalité de la scène culturelle et artistique de la Grande Région - première région transfrontalière à se définir et se présenter comme espace culturel commun - mais aussi l’amélioration de la mobilité des acteurs culturels et des publics, de même que la multiplication des rencontres.

195.Le développement culturel régional est également une préoccupation à l’intérieur du pays: si la capitale occupe une place prépondérante, l’offre culturelle est tout aussi complète en région et y rend possible une participation active et passive à la vie culturelle. Malgré l’exiguïté de son territoire, le Luxembourg bénéficie en effet d’un nombre impressionnant d’artistes talentueux, d’infrastructures et de sites culturels modernes, ainsi que de multiples animateurs luxembourgeois et étrangers de la vie culturelle.

196.La culture fait partie intégrante de la vie quotidienne des gens, qu’ils soient consommateurs ou acteurs. Tout comme le potentiel artistique et créatif, en particulier des jeunes talents, la scène culturelle luxembourgeoise bénéficie d’un encouragement et d’un soutien public prononcé et mériterait certainement à être connue encore davantage au-delà des frontières. La reconnaissance internationale de nombre d’artistes luxembourgeois par le secteur professionnel étranger, se traduisant en outre par des coopérations et partenariats internationaux avec des instituts culturels de grande renommée, font de l’offre culturelle multiple et variée une évidence.

VI.Cadre juridique général de la protection des droits de l’homme

197.Tous les litiges qui ont pour origine une violation des droits de l’homme figurant dans la législation nationale ou dans un des pactes ou conventions internationaux auxquels le Luxembourg est partie, peuvent être portés devant les juridictions nationales. L’objet précis du litige détermine le tribunal compétent. Le cadre formel assurant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, c’est-à-dire le fonctionnement du système judiciaire luxembourgeois, a été largement commenté ci-dessus à la section consacrée aux cours et tribunaux nationaux. On n’y reviendra donc plus à cet endroit.

A.Principales garanties constitutionnelles des droits de l’homme et des libertés fondamentales

198.La Constitution luxembourgeoise, qui est une constitution écrite du système rigide, garantit les droits des citoyens. Le nombre relativement élevé des articles de la Loi fondamentale consacrés aux droits et libertés des Luxembourgeois met en évidence l’importance qui revient, dans l’organisation étatique, au libre développement de l’individu et à sa protection vis-à-vis des détenteurs du pouvoir. Cela d’autant plus qu’au Luxembourg la Constitution prévaut sur toute autre norme juridique nationale. En cas de conflit donc, la Constitution écarte toute règle nationale contraire.

199.Concrètement, la Constitution en vigueur garantit 15 droits publics à tous les Luxembourgeois et, en principe, à tous les étrangers qui habitent le territoire du Grand-Duché :

1. L’égalité devant la loi

2. La liberté individuelle

3. L’inviolabilité du domicile

4. L’inviolabilité de la propriété

5. La liberté d’opinion

6. La liberté de la presse

7. L’inviolabilité de la correspondance

8. Le droit de pétition

9. La liberté des cultes

10. La liberté de réunion

11. La liberté d’association

12. Le droit à l’enseignement public

13. Le droit de poursuite contre les fonctionnaires publics

14. Le droit au travail et à la sécurité sociale

15. La liberté du commerce et de l’industrie.

200.Par ailleurs, chaque citoyen a le droit d’interdire à quiconque l’accès de sa demeure. Aucune visite domiciliaire ne peut avoir lieu sauf dans les cas fixés par la loi et dans les formes qu’elle prescrit. La liberté d’opinion et la liberté de la presse sont garanties, sauf les excès à ces libertés, comme par exemple, l’exhortation à commettre des crimes ou des délits ou l’atteinte portée à l’honneur et à la considération d’autrui.

201.La Constitution garantit la liberté des cultes, celle de leur exercice public, ainsi que la liberté de manifester ses opinions religieuses. D’autre part, elle garantit la liberté de conscience en disposant que nul ne peut être contraint de concourir d’une manière quelconque aux actes et aux cérémonies d’un culte, ni d’en observer les jours de repos.

202.L’enseignement primaire est obligatoire et gratuit. La Constitution impose en outre à l’Etat l’obligation de créer des établissements d’instruction moyenne gratuite et les cours d’enseignement supérieurs nécessaires.

203.Enfin, la Constitution ne protège pas seulement le travail salarié et les libertés syndicales, mais d’une façon générale toute occupation de l’homme, le commerce, l’industrie, la profession libérale et le travail agricole. Elle oblige en outre le législateur à organiser la sécurité sociale, la protection de la santé et le repos des travailleurs.

204.La Constitution ne pouvant être révisée qu’au prix d’une procédure très astreignante (dissolution et convocation d’une nouvelle chambre, vote à la majorité des deux tiers), les garanties qu’elle confère dans le domaine des droits de l’homme notamment, sont donc suffisamment protégées.

B.Portée des traités, pactes et protocoles

205.Les instruments internationaux sont susceptibles d’application directe dans l’ordre juridique interne (« self-executing ») sans requérir une mise en œuvre, à moins que leurs termes ne prévoient expressément le contraire. Ils créent donc directement des droits et obligations pour les sujets de la souveraineté nationale et ils sont susceptibles, sans autre transformation, d’être appliqués par les tribunaux nationaux de l’ordre administratif et judiciaire. Leur méconnaissance par une juridiction nationale donne ouverture à cassation.

206.En ce qui concerne les relations entre le droit international et le droit national, il est un principe général acquis que le droit international prime le droit national, c’est-à-dire que les traités internationaux prévalent sur les lois et sur toutes autres dispositions du droit national. Toutefois, avant la procédure de conclusion de traités internationaux, tout a été mis en œuvre pour vérifier si le contenu de ceux-ci est conforme aux lois internes en vigueur. Dans le cas contraire, la législation interne est adoptée préalablement à la ratification éventuelle du traité. Il résulte des dispositions de la Constitution que l’exécution interne des traités est assimilée à l’exécution des lois. Les mesures d’exécution trouvent leurs bases dans les dispositions du traité. Le traité prévaut sur la loi nationale, même postérieure, parce que le traité a une origine plus élevée que la volonté d’un organe interne. Concrètement donc, les pactes qui nous concernent font partie du droit positif luxembourgeois depuis leur ratification.

C.Sanction judiciaire

207.Dans l’Etat luxembourgeois, personne ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi et suivant la forme qu’elle prescrit. Personne ne peut être arrêté ou placé que dans les cas prévus par la loi et dans la forme qu’elle prescrit et personne ne peut être arrêté, hors le cas de flagrant délit, qu’en vertu d’une ordonnance motivée du juge et cette ordonnance doit être signifiée à la personne. Toute personne doit être informée sans délai des moyens de recours légaux dont elle dispose pour recouvrer sa liberté. La loi détermine d’avance le juge qui sera compétent pour juger les contestations civiles ou les infractions, soit en raison du domicile des justiciables, soit en raison des actes qu’il s’agit de juger. Personne ne pourra être distrait, contre son gré, du juge que la loi lui aura ainsi signifié. Aucune peine ne peut être introduite ni appliquée qu’en vertu de la loi.

D.Situation actuelle

208.En dehors des traités internationaux en matière des droits de l’homme dont le Luxembourg est déjà partie, le Luxembourg a signé depuis 2003 les instruments suivants :

le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels introduit un mécanisme pour donner suite aux plaintes relatives à la violation du Pacte par un État signataire (signature : 24 septembre 2009) ;

le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications (signature : 28 février 2012) ;

les Amendements au Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

Les procédures de ratification sont en cours.

209.Depuis 2003, le Luxembourg a ratifié les instruments suivants :

le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (ratification : 1er juillet 2003) ;

le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ratification : 19 mai 2010) ;

le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (ratification : 4 août 2004) ;

le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (ratification : 2 septembre 2011) ;

la Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées (ratification : 26 septembre 2011).

210.Il convient par ailleurs de signaler que :

le Luxembourg a approuvé par la Loi du 30 juin 2004 l’amendement à l’article 8 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale adopté à la quatorzième réunion des Etats parties à la Convention le 15 janvier 1992 ;

le Luxembourg a ratifié le 21 mars 2006 le Protocole N°12 à la Convention Européenne des Droits de l’Homme sur la non-discrimination.

E.Organes et institutions indépendantes

1. Médiateur

211.Le médiateur public ou ombudsman a été mis en place le 1er mai 2004 sur base de la loi du 22 août 2003 instituant un Médiateur.

212.Le médiateur est une instance indépendante qui ne reçoit d’instructions d’aucune autorité. Il ne dépend ni de l’administration ni du gouvernement.

213.La création du médiateur s’inscrit dans le cadre d’une politique de réforme administrative destinée à rapprocher l’administration des administrés et à améliorer les rapports que l’administration entretient avec les citoyens.

214.Nommé pour une durée de 8 ans non renouvelable, il est désigné par la Chambre des députés à la majorité simple. Il doit être de nationalité luxembourgeoise, détenteur d’un diplôme d’études universitaires et maîtriser les trois langues du pays.

215.Le médiateur a pour mission de recevoir les réclamations de personnes physiques et morales, formulées à l’occasion d’une affaire qui les concerne, relatives au fonctionnement des administrations de l’Etat et des communes.

216.Il met en balance les différents points de vue, interroge les autorités concernées, consulte les documents requis et s’entretient avec les responsables. Le cas échéant, le médiateur peut transmettre ses recommandations aux autorités en question, afin de parvenir à une solution à l’amiable du conflit.

217.Ce service offert au citoyen est une prestation gratuite et a pour objectif de renforcer la confiance des citoyens dans la démocratie et les institutions. Le citoyen peut faire parvenir sa réclamation directement ou indirectement, par l’intermédiaire d’un membre de la Chambre des députés au médiateur. L’ombudsman se voit comme le représentant des citoyens.

218.Le médiateur est en outre désigné comme mécanisme national de prévention au sens de l’article 3 du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En cette qualité, il a pour mission d’assurer sur le territoire national le contrôle externe et l’évaluation des lieux où se trouvent des personnes privées de liberté.

2.Ombuds-Comité fir d’Rechter vum Kand

219.Par la loi du 25 juillet 2002, il a été institué un comité luxembourgeois des droits de l’enfant, appelé « Ombuds-Comité fir d’Rechter vum Kand » (ORK), comité indépendant et neutre appelé à mettre en œuvre et à promouvoir la Convention relative aux droits de l’enfant ratifiée par le Luxembourg en 1993.

220.Les missions de l’ORK sont les suivantes :

analyser les dispositifs institués pour protéger et promouvoir les droits de l’enfant, afin de recommander, le cas échéant, aux instances compétentes des adaptations nécessaires ;

émettre son avis sur les lois et règlements, ainsi que sur les projets concernant les droits de l’enfant ;

informer sur la situation de l’enfance et veiller à l’application de la Convention relative aux droits de l’Enfant ;

présenter au Gouvernement et à la Chambre des Députés un rapport annuel sur la situation des droits de l’enfant ainsi que sur ses propres activités ;

promouvoir le développement de la libre expression de l’enfant et de sa participation active aux questions le concernent ;

examiner les situations dans lesquelles les droits de l’enfant ne sont pas respectés et faire des recommandations afin d’y remédier ;

recevoir des informations et des réclamations relatives aux atteintes portées aux droits de l’enfant et écouter, à cet effet, selon les modalités à déterminer par lui tout enfant qui en fait la demande ;

émettre à partir à partir d’informations ou de réclamations ou au sujet de cas particuliers instruits par lui, des recommandations ou des conseils permettant d’assurer une meilleure protection des droits et des intérêts de l’enfant ;

221.L’ORK est composé de six membres qui sont nommés par le Grand-Duc et parmi lesquels un président et un vice-président sont choisis paritairement entre les deux sexes. La durée du mandat est de cinq ans. Il peut être renouvelé une fois. Les membres de l’ORK sont désignés en fonction de leur compétence en la matière.

222.Les membres de l’ORK exercent leur mission en toute neutralité et indépendance.

223.Dans l’exercice de leur mission et dans les limites fixées par les lois et règlements, les membres de l’ORK peuvent accéder librement à tous les bâtiments d’organismes publics ou privés engagés dans l’accueil avec ou sans hébergement, la consultation, l’assistance, la guidance, la formation ou l’animation d’enfants. Ils ont le droit de s’enquérir de toute information, pièce ou document, à l’exception de ceux couverts par le secret médical ou par un autre secret professionnel. Ils ne peuvent toutefois pas intervenir dans des procédures judiciaires en cours.

3.Centre pour l’égalité de traitement

224.Le Centre pour l’égalité de traitement a été institué par la loi du 28 novembre 2006. Il exerce ses missions en toute indépendance, a pour objet de promouvoir, d’analyser et de surveiller l’égalité de traitement entre toutes les personnes sans discrimination fondée sur la race, l’origine ethnique, le sexe, la religion ou les convictions, le handicap et l’âge.

225.Dans l’exercice de sa mission, le Centre peut notamment:

publier des rapports, émettre des avis ainsi que des recommandations et conduire des études sur toutes les questions liées aux discriminations ;

produire et fournir toute information et toute documentation utiles dans le cadre de sa mission ;

apporter une aide aux personnes qui s’estiment victimes d’une discrimination en mettant à leur disposition un service de conseil et d’orientation visant à informer les victimes sur leurs droits individuels, la législation, la jurisprudence et les moyens de faire valoir leurs droits ;

226.Le Centre est composé d’un collège de cinq membres dont un président. Le mandat du président et des membres du Centre a une durée de cinq ans. Ils sont nommés par le Chef de l’Etat sur proposition de la Chambre des Députés en fonction de leur compétence dans le domaine de la promotion de l’égalité de traitement. Une fois par an, le Centre adresse au Gouvernement et à la Chambre des Députés un rapport général sur ses activités.

4.Commission consultative des droits de l’homme

227.La loi du 21 novembre 2008 portant création d’une Commission consultative des Droits de l’Homme au Grand-Duché du Luxembourg a doté la Commission d’un statut légal, lui conférant le même rang formel que le Médiateur, l’ORK ou encore le Centre pour l’Égalité de Traitement.

228.Le Luxembourg a précisé dans une nouvelle loi les missions de la Commission consultative des Droits de l’Homme (CCDH). Cette loi prévoit

que le Gouvernement demande l’avis de la CCDH pour tous les projets intéressant les droits de l’homme ;

le principe de l’auto-saisine pour toutes les questions jugées opportunes par la CCDH ;

que le Gouvernement transmet les avis de la CCDH relatifs à des projets ou propositions de loi à la Chambre des Députés et au Conseil d’Etat, ce qui leur confère le statut de document parlementaire. La commission parlementaire en charge de l’analyse d’un projet de loi tient compte, au cours de ses discussions, des propositions émises par la CCDH par rapport à ce projet.

F. Autres précisions

1.Intégration des ressortissants étrangers au Luxembourg

229.La loi du 16 décembre 2008 portant sur l’accueil et l’intégration dote pour la première fois une administration publique d’une mission de coordination et de mise en œuvre de la politique d’accueil et d’intégration. Elle définit l’intégration comme étant « un processus à double sens par lequel un étranger manifeste sa volonté de participer de manière durable à la vie de la société d’accueil, qui, sur le plan social, économique, politique et culturel, prend à son égard toutes les dispositions afin d’encourager et de faciliter cette démarche. » (Article 2). Pour ce faire, la loi du 16 décembre 2008 créé deux outils : d’une part le contrat d’accueil et d’intégration et d’autre part le Plan d’action national d’intégration et de lutte contre les discriminations.

230.Le contrat d’accueil et d’intégration (CAI) est conclu pour une durée de deux ans. Il contient des engagements réciproques pour l’Etat et l’étranger en vue d’organiser et faciliter l’intégration de ce dernier. De la part de l’Etat, il s’agit d’assurer une formation linguistique, une formation d’instruction civique ainsi qu’une journée d’orientation fournissant aux candidats signataires des informations pratiques sur la vie sociétale au Luxembourg.

231.Le plan d’action national pluriannuel constitue l’instrument de coordination stratégique et opérationnelle des politiques d’intégration transversales. Il met à contribution 14 ministères et administrations gouvernementales qui mettent en commun leurs efforts pour favoriser une harmonisation interministérielle des actions qu’ils mettent en œuvre, qu’ils soutiennent financièrement et dont ils assument la responsabilité dans le domaine de l’intégration des étrangers au Luxembourg et de la lutte contre les discriminations. Échelonné sur cinq ans, le plan d’action repose sur les 11 principes directeurs de la politique d’intégration européenne. Ledit plan d’action est suivi et évalué par le Conseil Économique et Social. Ceci permettra d’apprécier le degré de conformité des actions réalisées eu égard aux objectifs visés et d’identifier les difficultés rencontrées et les ajustements appropriés. Cette évaluation permettra également de formuler des recommandations quant aux suites à donner au terme du plan d’action. Enfin afin d’assurer le dialogue avec la société civile, chaque année une consultation publique a lieu afin de contribuer à déterminer les priorités.

232.La loi du 16 décembre 2008 a également rendu obligatoire la constitution de commissions consultatives d’intégration (chargées globalement du vivre ensemble de tous les résidents de la commune et plus particulièrement des intérêts des résidents de nationalité étrangère) dans toutes les communes. Le Règlement grand-ducal du 15 novembre 2011 y afférant, spécifie son organisation et son fonctionnement. Il prévoit notamment que dans les communes où plus de la moitié des résidents sont des étrangers, le conseil communal peut décider que le nombre des membres luxembourgeois et des membres étrangers sera proportionnel au pourcentage du nombre d’habitants luxembourgeois et étrangers.

2.Indications sur différentes nationalités vivant au Luxembourg

Tableau no 1

Pays de citoyenneté

Nombre de personnes

Part dans la population totale

Total

512 353

Luxembourg

291 831

56,96%

Autres États membres de l’UE

191 685

37,41%

Portugal

82 363

16,08%

France

31 456

6,14%

Italie

18 059

3,52%

Belgique

16 926

3,30%

Allemagne

12 049

2,35%

Royaume-Uni

5 471

1,07%

Pays-Bas

3 891

0,76%

Espagne

3 657

0,71%

Pologne

2 709

0,53%

Autres pays européens

14 058

2,74%

Monténégro

3 814

0,74%

Pays en Afrique

5 565

1,09%

Cap-Vert

2 472

0,48%

Pays des Caraïbes, d’Amérique

du Sud ou Centrale

2 146

0,42%

Brésil

1 203

0,23%

Pays d’Amérique du Nord

1 671

0,33%

États-Unis d’Amérique

1 295

0,25%

Pays d’Asie

4 963

0,97%

Chine

1 610

0,31%

Pays d’Océanie

187

0,04%

Apatrides

197

0,04%

Non indiqué

50

0,01%

(Etat au 1er février 2011 - source : STATEC – RP2011)

3.Flux migratoires

233.Le solde migratoire au Luxembourg continue d’augmenter au cours des dernières années. Avec 20 268 personnes qui se sont installées au Grand-Duché en 2011, les arrivées atteignent un sommet. Etant donné que les départs stagnent, le solde migratoire se situe à + 11.004, un niveau jamais atteint auparavant.

234.La part des étrangers, respectivement des personnes nées à l’étranger dans la population atteint des sommets : 43% d’étrangers et 32% de personnes nées à l’étranger au 1er janvier 2011.

235.Globalement, l’immigration (arrivées) est en hausse très forte depuis le début des années 2000. On passe de 11.765 arrivées en 2000 à 20.268 arrivées en 2011.

236.C’est surtout à partir de l’année 2006 qu’on note une accélération des entrées au Luxembourg, avec toutefois un tassement significatif en 2009, c’est-à-dire au plus fort de la crise économique et financière au Luxembourg. On passe de 17.758 à 15.751 arrivées de 2008 à 2009.

237.A partir de 2010 – et surtout en 2011 –, le flux des entrées se réoriente à la hausse. Le nombre d’entrées évolue de 15.751 en 2009 à 16.962 en 2010 (+ 1.211) et on passe à 20 268 arrivées en 2011 (+ 3.306).

238.En ce qui concerne les départs (émigration), on constate également une tendance à la hausse de 2003 à 2008. Cette hausse est cependant beaucoup moins marquée que celle des entrées. Il y avait 7.746 départs en 2003. On atteint le chiffre de 10.674 en 2007.

239.De 2007 à 2009, les départs reculent (9.168 en 2009), puis stagnent. Les 9.264 départs de 2011 se situent en dessous du niveau de 2002 où on avait enregistré 9.452 émigrants.

240.Conséquence sur le solde migratoire : la forte hausse des arrivées (à l’exception de l’année 2009) et la hausse moins rapide, puis le recul suivi d’une stagnation des départs, fait qu’en tendance le solde migratoire augmente de façon considérable. Il évolue de 3.431 personnes en 2000 à 7.700 en 2008.

241.Le recul des arrivées lors de l’année de crise 2009 entraîne un tassement parallèle du solde migratoire (6.583 en 2009). Depuis, la hausse exceptionnelle des arrivées et la stagnation des départs expliquent le fait que le solde migratoire atteint un sommet jamais atteint jusqu’ici au Luxembourg (11.004 en 2011).

4.Demandeurs d’asile et protection internationale

242.La loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, telle que modifiée par la suite, a changé en profondeur le droit d’asile appliqué au Luxembourg en introduisant notamment un nouveau statut dit de « protection subsidiaire », la prise en considération d’une persécution non étatique ou encore la possibilité pour un demandeur de protection internationale de travailler, sous certaines conditions déterminées.

243.La loi du 5 mai 2006 prévoit également l’introduction d’une liste de pays d’origine sûrs. Cette liste a été établie par règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 et modifiée une première fois par règlement grand-ducal du 1er avril 2011 par l’ajout de la Serbie.

244.Depuis l’année 2011, on constate une augmentation dramatique du nombre des demandeurs de protection internationale par rapport aux années précédentes. Le nombre des demandes en 2011 a constitué le triple de celui de 2010 et le quadruple de 2009.

245.En 2011, la Serbie a figuré en première place (43,76%) des demandeurs, suivie des demandeurs macédoniens (20,61%), kosovars (7,02%) et monténégrins (4,76%). Les ressortissants des pays des Balkans de l’Ouest ont représenté 78% du total des demandes.

Tableau no 2

Evolution des demandes de protection internationale (1er janvier 2008 - 31 octobre 2012)

Nombre de demandeurs

Principaux pays d’origine

2008

463

1. Kosovo 201

2. Bosnie-Herzégovine 31

3. Iraq 29

4. Iran 18

5. Serbie 18

2009

505

1. Kosovo 132

2. Iraq 65

3. Bosnie-Herzégovine 35

4. Russie 27

5. Albanie 26

2010

791

1. Kosovo 162

2. Serbie 148

3. Iraq 95

4. Algérie 44

5. Iran 32

2011

2170

1. Serbie 947

2. ARYM 446

3. Kosovo 152

4. Monténégro 103

5. Bosnie-Herzégovine 51

2012

1867

1. Serbie 353

2. Albanie 282

3. Monténégro 275

4. Bosnie-Herzégovine 239

5. Kosovo 216

246.Quant aux décisions en matière de protection internationale, il y a lieu de noter au cours de la période sous rubrique une nette tendance à la baisse des décisions d’octroi du statut de réfugié en même temps qu’une hausse des demandes de rejet. En 2011, seulement 41 personnes ont été reconnues comme réfugiées au sens de la Convention de Genève, ce qui représente un taux de reconnaissance de 3%. Il faut noter que ce taux était encore de 27% en 2009. Cette baisse s’explique par le grand nombre de demandeurs de protection internationale provenant de la Serbie et de l’ARYM invoquant des motifs (d’ordre économique, familial ou médical) qui ne justifient pas la reconnaissance d’une protection internationale.

Tableau no 3

Année Accords du statut de réfugié Accords d’une protection subsidiaireDécisions de transfert (Dublin) Décision rejet (procédure normale) Décision rejet (procédure accélérée) Accords de tolérances 2008 107 0 83 188 39 200 2009 141 11 122 169 16 30 2010 83 19 130 237 3 18 2011416219494207152012 (septembre)425158684755n/a

VII.Information et publicité donnée aux pactes et aux rapports

247.D’après l’article 112 de la Constitution, aucune disposition législative ou réglementaire n’est obligatoire si elle n’a été publiée dans la forme déterminée par la loi. Cette disposition s’applique à fortiori pour les traités qui sont d’ailleurs promulgués par l’intermédiaire d’une loi d’approbation. La publication des lois se fait par voie d’impression au Journal officiel de l’Etat appelé Mémorial. La loi est obligatoire quatre jours après la date de sa publication au Mémorial, à moins qu’elle ne pose elle-même un délai différent. Dès que la loi est ainsi publiée, tous les citoyens sont présumés en être informés en vertu du principe que « nul n’est censé ignorer la loi ».

248.Le gouvernement informe régulièrement le public du dépôt des rapports périodiques et ceci notamment à travers des communiqués de presse adressés à tous les médias.