NATIONS

UNIES

HRI

Instruments

internationaux relatifs

aux droits de l'homme

Distr.

GÉNÉRALE

HRI/CORE/1/Add.90/Rev.1

30 mai 2000

FRANÇAIS

Original : ANGLAIS

DOCUMENT DE BASE CONSTITUANT LA PREMIÈRE PARTIEDES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES

GÉORGIE

[12 novembre 1999]

TABLE DES MATIÈRES

Paragraphes Page

I.GÉOGRAPHIE, MILIEU NATUREL, RESSOURCES 1 – 163

A.Ressources minérales 6 – 73B.Ressources énergétiques 8 – 114C.La terre et l'agriculture12 – 144D.Potentiel touristique15 – 165

II.POPULATION17 – 305

A.Tendances démographiques17 – 235B.Composition ethnique24 – 266C.Structure confessionnelle 27 – 306

III.APERÇU HISTORIQUE 31 – 40 7

A.Antiquité 31 –347B.Le XXe siècle 35 – 378C.La période de l'indépendance 38 – 408

TABLE DES MATIÈRES (suite)

Paragraphes Page

IV.L'ÉCONOMIE 41 – 599

Le rôle de la coopération avec les organisations internationalesdans le développement économique du pays 55 – 5911

V.LE SYSTÈME POLITIQUE 60 – 8012

A.Le Parlement 65 – 6813B.Le Président 69 – 7213C.Le pouvoir judiciaire 73 – 8015

VI.LE SYSTÈME DE PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME 81 – 9816

I. GÉOGRAPHIE, MILIEU NATUREL, RESSOURCES

1.Situation - entre les 40ème et 47ème degrés de latitude sud et les 41ème et 44ème degrés de longitude nord. Superficie - 69 700 km2.

2.La Géorgie est située sur les versants méridionaux et au sud de la chaîne du Caucase, celle‑ci constituant la frontière naturelle avec la Fédération de Russie. La Géorgie a également des frontières communes avec l'Arménie et la Turquie au sud, et avec l'Azerbaïdjan à l'est. Les zones montagneuses occupent 87 % du territoire. La Géorgie a accès à la mer Noire (le littoral mesure environ 300 km).

3.Le climat du pays va d'un climat méditerranéen modérément humide à un climat plus froid de type alpin en passant par un climat continental sec de type arabo‑caspien. La zone littorale de la Géorgie occidentale connaît un climat tropical humide, alors que la Géorgie orientale et méridionale est située dans une zone climatique plus sèche. La température moyenne de janvier (mois le plus froid de l'année) varie entre +3 et -2 °C, tandis que le mois d'août connaît des températures oscillant entre +23 et +26 °C.

4.Capitale : Tbilissi (population : 1 270 000 habitants). Villes principales : Kutaisi (240 000 habitants); Roustavi (158 000 habitants); Batoumi (137 000 habitants); Soukhoumi (112 000 habitants, d'après des statistiques approximatives); Chiatura (70 000 habitants); Gori (70 000 habitants); Poti (51 000 habitants); Zugdigi (51 000 habitants plus à l'heure actuelle à peu près le même nombre de personnes déplacées de l'intérieur venues d'Abkhazie); Tskhinvali (42 000 habitants).

5.La Géorgie comprend la République autonome d'Adjarié, l'Abkhazie (dont le statut reste à définir) et la région de Tskhinvali (idem). Le pays est divisé en 82 arrondissements. Les neuf groupes de districts ont à leur tête des plénipotentiaires désignés par le Président de la République; les arrondissements sont administrés par les gamgebelis (chefs des organes exécutifs) et des conseils d'arrondissement ou municipaux qui sont des organes élus. La première élection des autorités locales s'est tenue en 1998.

A. Ressources minérales

6.La Géorgie possédait l'un des plus riches gisements de manganèse du monde (dans les arrondissements de Chiatura et de Sachkere). Les réserves totales du gisement sont estimées à 200 millions de tonnes environ. La production de minerai de manganèse, qui se situait entre 4,9 et 5,3 millions de tonnes par an, a diminué au cours des ans pour tomber à 100 000 tonnes en 1994. La proportion de minerai à haute teneur ne cesse de diminuer en raison d'une exploitation excessive pendant la période soviétique.

7.La Géorgie possède également des gisements de métaux non ferreux et de minerais polymétalliques, notamment des gisements d'arsenic, de bentonite, de baryte, d'agates et d'obsidiennes. Parmi les métaux non ferreux, il convient de mentionner plus particulièrement les minerais cuprifères. Il existe en outre une production de matériaux de construction d'origine naturelle - granit, marbre, etc.

B. Ressources énergétiques

8.Le potentiel hydroélectrique de la Géorgie se situe entre 100 000 et 160 000 milliards de kWh. Étant donné le caractère saisonnier de la production d'hydroélectricité, le pays s'est trouvé confronté, une fois sorti du système d'approvisionnement énergétique de l'URSS, à une crise grave particulièrement aiguë entre les mois d'avril et d'octobre. Pendant cette période, la distribution d'électricité est soumise à un programme rigoureux, et le public n'est approvisionné que quatre à six heures par jour.

9.Les réserves prouvées de charbon représentent 450 millions de tonnes, plus 700 millions de tonnes de réserves probables. La plus grande partie de ces ressources est constituée par du combustible d'assez médiocre qualité, d'où son faible rendement technologique.

10.Il y a quelques gisements de pétrole dans l'est de la Géorgie. La production pétrolière a atteint un maximum d'environ 3 millions de tonnes en 1983; par la suite, la production n'a cessé de diminuer en raison d'un régime d'exploitation mal conçu. Les réserves prouvées de pétrole de la Géorgie orientale représentent 12 millions de tonnes, les réserves probables 500 millions de tonnes. On pense que d'importantes réserves de pétrole pourraient être découvertes dans l'ouest de la Géorgie grâce à des forages profonds effectués le long de la côte et du plateau continental de la mer Noire. D'après les estimations, les réserves de gaz naturel se situent entre 2 et 98 milliards de mètres cubes.

11.Il existe également un important potentiel géothermique sur tout le territoire du pays. Les réserves de la Géorgie sont estimées à 200 ou 250 millions de m3 d'eau à une température variant entre 50 et 100 °C. Elles pourraient assurer le chauffage et l'approvisionnement en eau chaude de 500 000 à 1 million de personnes, ce qui se traduirait par une économie annuelle de 1,3 à 1,5 million de tonnes de combustible. La mise en valeur des réserves existantes ouvre de nouvelles perspectives en ce qui concerne la production d'électricité en Géorgie. Les projets élaborés dans ce domaine attendent leur mise en route.

C. La terre et l'agriculture

12.En Géorgie, près de la moitié des terres sont consacrées à l'agriculture, la superficie restante étant en grande partie couverte de forêts. Étant donné la prédominance du relief montagneux, une forte proportion des terres agricoles est exploitée en régime de pâturage ou de prairie. Les terres arables représentent environ le quart de la superficie totale des terres agricoles ‑  800 000 hectares en tout en 1992, donc un septième d'hectare par habitant au maximum.

13.L'utilisation des sols dépend des conditions pédologiques et climatologiques locales. La culture des agrumes est concentrée dans la zone côtière subtropicale. On trouve des plantations de thé dans l'ouest de la Géorgie, principalement en Abkhazie, dans le Samegrelo, en Gourie et en Adjarie, dans une moindre mesure en Imérétie. La pommiculture intéresse surtout la Géorgie orientale - la Chidakartlie - mais la fruiticulture est pratiquée à une échelle plus modeste un peu partout dans le pays. La culture de la pomme de terre et d'autres cultures maraîchères se rencontrent essentiellement dans le sud de la Géorgie - la Kvemokartlie et la Samtskhe‑Tjavakhétie. Il y a des productions vinicoles dans l'est de la Géorgie et, en quantités minimes, dans les diverses régions du pays.

14.L'élevage intéresse toutes les régions. L'élevage ovin est pratiqué dans l'est de la Géorgie ‑ en Kharétie ou dans la Chidakartlie, l'élevage bovin dans le sud, notamment dans la Kvemokartlie. L'élevage porcin est largement répandu, mais moins pratiqué dans les régions à forte population musulmane comme l'Adjarie ou la Kvemokartlie où vivent de fortes concentrations d'Azerbaïdjanais.

D. Potentiel touristique

15.La Géorgie possède un potentiel touristique considérable. Des chaînes de montagne aux paysages grandioses, d'antiques et splendides monuments culturels, de magnifiques stations de ski et le long de la mer Noire, un littoral au climat subtropical humide sont autant d'attraits pour les touristes du monde entier.

16.La stabilité politique a été favorable au tourisme dans le pays. La situation géopolitique de celui‑ci et la nouvelle "Route de la soie" ont suscité de l'intérêt. Les États‑Unis ont financé l'étude d'un plan de développement de l'industrie hôtelière. Un plan de développement du tourisme a été mis au point avec l'aide du Ministère du tourisme d'Israël.

II. POPULATION

A. Tendances démographiques

17.Population au début de 1996 : population totale : 5 394 892 habitants; de sexe masculin : 2 577 368, de sexe féminin : 2 817 524. Taux de mortalité pour 1 000 habitants, en 1995 : 7,8; en 1996 : 7,1; mortalité infantile (pour 1 000 naissances vivantes), en 1995 : 14,4; en 1996 : 17,4.

18.On note un tassement de la population : il y avait 5 447 300 habitants en 1992, 5 394 892 en 1996. Il y a eu une croissance démographique modérée, de 26 492 habitants, depuis 1996. L'accroissement naturel était de l'ordre de 0,5 % par an.

19.L'émigration a sensiblement augmenté depuis 1989. Beaucoup de gens sont partis pour l'étranger, en Russie surtout, afin d'échapper aux difficultés économiques, et cette tendance s'est maintenue en 1994 et 1995. L'accroissement naturel de la population s'en est trouvé ralenti.

20.Outre l'émigration, la baisse progressive de la natalité a joué un rôle important, tout d'abord de 1960 à 1981, puis, plus nettement encore, les années suivantes. Le nombre des naissances est tombé de 89 000 en 1989 à 64 000 en 1993, puis à 57 000 en 1994. Le taux de natalité, qui était il y a 30 ans de 23,7 naissances pour 1 000 habitants, n'était plus que de 16,6 en 1991 et de 14,9 en 1992. La Géorgie a enregistré un taux moyen de natalité de 11,6 % en 1995, de 11,1 % en 1996, et de 9,1 % en 1998.

21.L'évolution démographique a eu également des répercussions sur la structure par âge. À cet égard, l'augmentation du nombre de personnes âgées doit retenir l'attention. Dans le même temps, il y a de plus en plus d'actifs de plus de 40 ans.

22.En 1991, plus de la moitié de la population (56 %) habitaient dans des villes. Après 1988, l'écart s'est légèrement resserré en raison de l'importance de l'émigration des populations citadines vers les zones rurales où l'accès à la terre garantit de meilleures possibilités d'approvisionnement. Cependant, l'exode massif de la population (essentiellement à destination des agglomérations urbaines) résultant des conflits d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud a inversé le sens du processus : la population urbaine a commencé à augmenter par rapport à la population rurale. Au mois de janvier 1998, il y avait 561 142 urbains de plus que de ruraux.

23.Comme dans beaucoup d'autres pays, les femmes constituent une majorité de plus en plus nombreuse dans les groupes d'âge des plus de 25 ans. Pour les deux sexes, l'espérance de vie était supérieure à l'espérance de vie observée dans d'autres républiques soviétiques (68,7 ans pour les hommes, 76,1 ans pour les femmes). En moyenne, l'espérance de vie de la population géorgienne est aujourd'hui de 72,6 ans.

B. Composition ethnique

24.D'après les chiffres du recensement de 1989, on comptait cette année‑là en Géorgie 437 211 Arméniens (8,1 %), 341 720 Russes (6,3 %), 307 556 Azerbaïdjanais (5,7 %), 164 055 Ossètes (3 %), 100 342 Grecs (1,9 %), 33 333 Kurdes (0,6 %), 24 795 Juifs (0,5 %), etc. Des représentants de 94 ethnies vivent aujourd'hui en Géorgie.

25.Les régions qui connaissent les plus fortes densités de minorités ethniques et linguistiques sont : la Djavakhétie, peuplée essentiellement d'Arméniens (plus de 90 %); la Basse-Kartélie (peuplée en majorité d'Azerbaïdjanais) (entre 42 et 85 % selon les secteurs); le district de Tsalka, peuplé de Grecs (61 %); l'Ossétie du Sud où les Ossètes constituent 66 % de la population. Ces populations minoritaires sont tantôt concentrées, tantôt dispersées. Les autres minorités sont diffuses, et ne constituent dans certains secteurs que de très petites communautés (c'est le cas des Russes, par exemple).

26.La langue officielle est le géorgien ‑ et l'abkhaze dans l'Abkhazie autonome. La langue géorgienne ainsi que les langues des sous‑groupes ethniques géorgiens ‑ le mingrélien, le svane et le laz ‑ appartiennent au groupe des langues kartvèles.

C. Structure confessionnelle

27.Dans sa majorité, la population géorgienne appartient à l'Église orthodoxe autocéphale géorgienne, dirigée par le patriarche Catholicos. Après de longues années d'oppression, la vie religieuse est en plein épanouissement dans le pays. Les valeurs religieuses offrent un moyen de combler le vide laissé par la faillite de l'idéologie communiste. Elles jouent désormais un grand rôle dans le développement culturel du pays.

28.L'Église orthodoxe russe et l'Église arménienne grégorienne sont traditionnellement les plus influentes. Il faut également noter l'influence croissante d'autres confessions chrétiennes ‑ le catholicisme et le protestantisme ‑ ce qui s'explique par le développement de l'activité missionnaire et l'aide reçue de centres étrangers.

29.La plupart des habitants de l'Abkhazie autonome sont de souche géorgienne et de religion musulmane. L'islam est également la religion des habitants de la Meskhétie (en Géorgie méridionale), qui ont pu rentrer au pays après avoir été déportés en masse en 1944. Plusieurs centaines de milliers de Meskhètes, dont une partie se disent turcs, une partie Géorgiens musulmans, vivent, pour l'essentiel, en Azerbaïdjan voisin et dans le nord du Caucase. La population azerbaïdjanaise de Géorgie est de religion musulmane, ainsi qu'une partie des Abkhazes, des Ossètes, des Kurdes et des Grecs.

30.Il existe d'autres petits groupes religieux, à savoir les Juifs géorgiens, les ézydes, et la secte des molokane et des doukhobors. Par suite de l'émigration, les effectifs de ces groupes ont considérablement diminué dans la période 1991‑1999.

III. APERÇU HISTORIQUE

A. Antiquité

31.Au cours de son histoire millénaire, la Géorgie a connu à maintes reprises des périodes extrêmement difficiles. Malgré les agressions continuelles d'envahisseurs étrangers, elle a aussi connu des périodes d'indépendance et de souveraineté. Il y a eu dans l'Antiquité plusieurs États sur le territoire de l'actuelle Géorgie. L'État d'Ibérie a été fondé vers le VIe siècle avant J.‑C. en Géorgie orientale dans la vallée de la Kur. Un autre État, l'Egrissi, s'était constitué dans l'ouest de la Géorgie. Plus tard, d'après les chroniques anciennes, l'empereur Parnavaz a régné sur la Géorgie occidentale et orientale unifiée qui avait pour capitale Mtskheta (entre 299 et 344 av. J.‑C.). Au Ier siècle environ, le pays s'est de nouveau scindé en deux : l'Ibérie, dans la sphère d'influence sassanide, et la Lazique, dans l'orbite de Rome et de Byzance. Au IVe siècle, la Géorgie occidentale a adopté le christianisme comme religion d'État. Au Ve siècle, la ville de Tbilissi, fondée par le roi Vakhtang Gorgasal, est devenue capitale nationale.

32.Vers 640, la région a été conquise par les Arabes qui ne sont cependant pas parvenus à y implanter l'islam. En 1008, l'empereur Bagrat III Bagrationi a restauré le Royaume unifié de Géorgie.

33.La période qui va du Xe au XIIIe siècle est considérée comme l'âge d'or de l'État géorgien, qui se distingue alors par sa puissance politique et son épanouissement culturel. L'apogée de cette période est le règne de David IV le Constructeur (1089-1125) et de la reine Thamar, sa petite‑fille légendaire, qui a régné un siècle plus tard. Cependant, à la fin de cette période remarquable, le pays est tombé sous la coupe de conquérants, d'abord Djalal‑Ad‑Din‑Khorezmski, puis les Mongols au milieu du XIIIe siècle. Les hordes de Tîmur (Tamerlan) ont ravagé le pays un siècle plus tard, et à partir du XVe siècle la Géorgie s'est trouvée sous la menace permanente des Turcs et des Perses, dont la rivalité a été le trait déterminant de la réalité politique géorgienne jusqu'au XIXe siècle.

34.À partir du XVIIe siècle, l'Empire russe a commencé à jouer un rôle dans la lutte pour la domination de la région. Les territoires orientaux de la Géorgie sont devenus partie intégrante de l'Empire en 1801; les régions occidentales ont été peu à peu rattachées à la Russie ou conquises par elle au cours des décennies suivantes.

B. Le XXe siècle

35.La Géorgie a connu une première et brève période d'indépendance de 1918 à 1921 avec l'arrivée au pouvoir du Gouvernement social‑démocrate de Noé Jordania. En février 1921, des unités de l'Armée rouge font leur entrée en Géorgie, ce qui met fin à l'indépendance et inaugure une période de soviétisation forcée. La période soviétique de l'histoire de la Géorgie a été marquée par les répressions massives des années 30 et des années suivantes. Des centaines de milliers de Géorgiens ont trouvé la mort au cours de la Seconde Guerre mondiale, puis après la fin de la guerre dans le goulag.

36.Les années qui ont précédé l'effondrement de l'URSS ont été marquées par une nouvelle tragédie : le 9 avril 1989, des manifestants pacifiques qui réclamaient l'indépendance de la Géorgie ont été soumis à une répression brutale. Des centaines d'entre eux ont été victimes des substances toxiques employées à cette occasion, et 19 ‑ des femmes pour la plupart ‑ ont trouvé la mort.

37.La profonde déception qui s'est alors emparée de la Géorgie a rendu la population plus réceptive à la rhétorique nationaliste et populiste des chefs du mouvement de libération nationale alors que les communistes perdaient progressivement le contrôle de la situation dans le pays. Au début de 1991, le pouvoir central était extrêmement affaibli et la Géorgie est l'une des premières ex‑Républiques soviétiques à avoir obtenu officiellement l'indépendance. Aux élections de 1990, la majorité des suffrages étaient allés à ceux qui se montraient les plus virulents dans le maniement des mots d'ordre anticommunistes, en l'occurrence les représentants du bloc "Table ronde ‑ Géorgie libre" dirigé par Zviad Gamsakhourdia.

C. La période de l'indépendance

38.Le 31 mars 1991, le Soviet suprême a procédé à un référendum afin de consulter la population sur le problème de l'indépendance. À une écrasante majorité les électeurs se sont prononcés en faveur de l'indépendance. Fort de l'état d'esprit nationaliste et anticommuniste de la population, Zviad Gamsakhourdia a remporté à une très large majorité les élections présidentielles du mois de mai de la même année. Tout semblait indiquer qu'un État légitime était en train de se constituer. Cependant, le Président Zviad Gamsakhourdia, qui n'avait pas tardé à concentrer tous les pouvoirs entre ses mains, n'a pas réussi à réaliser la concorde nationale, à réformer l'économie déliquescente et à rompre l'étreinte de l'isolement international. Il a été renversé par ses propres partisans en décembre 1991.

39.Incapable de faire face aux nombreux problèmes à résoudre sur le plan national et international, le Conseil militaire arrivé au pouvoir après le renversement de Zviad Gamsakhourdia a cédé la place à un Comité d'État dirigé par l'ancien Premier Secrétaire du Comité central du Parti communiste de Géorgie et ex‑Ministre des affaires étrangères de l'URSS, Edouard Chevarnadzé. Aux élections d'octobre 1992, Edouard Chevarnadzé a obtenu une nette victoire et a été élu Président du Parlement. Avec les années, son autorité et son prestige auprès de la population n'ont cessé de s'affirmer, ce qui a permis d'arrêter la montée de la criminalité et de stabiliser la situation politique et sociale et la situation économique du pays. Grâce à ses efforts, la Géorgie est désormais membre de plein droit de la communauté internationale.

40.Les conflits ethniques et politiques dans les régions autonomes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud ont été l'épreuve la plus difficile pour le jeune État géorgien, car ils ont débouché sur des actions militaires qui ont fait des milliers de victimes et contraint des milliers de personnes à fuir leur foyer et à devenir des personnes déplacées, des réfugiés. Grâce à la médiation des organisations internationales, essentiellement de l'ONU, un processus de règlement pacifique des conflits est enclenché.

IV. L'ÉCONOMIE

41.La vie économique de la Géorgie postsoviétique se situe dans un contexte assez particulier. La gestion économique de la Géorgie socialiste, organisée selon les principes d'une exploitation intensive des ressources, se caractérisait par son manque d'efficacité et un faible niveau d'intégration; elle était pratiquement incapable de fonctionner en mode autonome. Sa dépendance à l'égard de l'espace postsoviétique, sans solution de rechange possible, et son isolement de fait par rapport aux processus de l'économie mondiale posaient un autre problème crucial.

42.C'est ce qui a conduit à la crise économique qui a débuté en 1989. La crise a été aussi exacerbée par les conflits armés d'ordre ethnique et politique que le pays a connus de 1991 à 1993. La situation criminogène de plus en plus aiguë était un facteur qui pesait sur la vie politique et économique du pays.

43.Dans ces conditions, l'économie nationale est entrée dans une phase de marasme aigu qui a entraîné une forte contraction des recettes de l'État et des entreprises. On a tenté de combler les déficits par le recours à l'inflation. C'est ainsi que les prix de détail ont été multipliés par 12,8 en 1992 et pratiquement par 76 en 1993. L'absence de monnaie nationale a entraîné une pénurie cruciale de numéraire et dans ce climat d'inflation les autorités ont été contraintes d'introduire des coupures provisoires (appelées "coupons"). Cette mesure n'a fait qu'accélérer les poussées inflationnistes et finalement le pays s'est trouvé en proie à l'hyperinflation.

44.En 1994, le produit intérieur brut (PIB) de la Géorgie avait été divisé par six par rapport à 1988, ce qui signifie que l'économie était retombée à son niveau du début des années 60. La structure du PIB faisait apparaître des distorsions considérables, tant du point de vue de sa composition sectorielle que de la consommation. Plus particulièrement, en ce qui concerne la structure sectorielle, près de la moitié du PIB provenait de l'agriculture, un quart environ du commerce et pratiquement un quart des autres secteurs, alors qu'avant la crise l'industrie était à l'origine de plus du tiers du PIB. Les investissements étaient pratiquement tombés à zéro.

45.Avec la contraction de l'emploi, le chômage a pris une ampleur nouvelle. Vu les lacunes des mécanismes de régulation du marché du travail, il n'est pas possible d'indiquer des chiffres précis. D'après les sources de l'Office national d'information socioéconomique, le nombre des chômeurs peut être estimé à 600 000 ou 650 000 personnes (de 20 à 25 % de la population active). Certes, ces chiffres appellent des connections, vu leur caractère approximatif dû à l'absence de méthodes d'analyse statistique rigoureuses.

46.Très peu de chômeurs sont inscrits au Service de l'emploi. Au 1er mai 1999, le nombre des chômeurs inscrits était en effet de 100 000. Cela peut s'expliquer par le fait que les services de l'emploi ne disposent pratiquement pas d'informations sur les emplois vacants, par le montant symbolique de l'allocation de chômage et par l'impossibilité d'offrir des emplois appropriés aux diplômés de l'enseignement supérieur qui constituent l'immense majorité des demandeurs d'emploi.

47.Grâce à l'action énergique des dirigeants du pays, il a été possible de mettre en place et de renforcer les bases législatives des réformes économiques, d'introduire et de consolider la monnaie nationale ‑ le lari (1 dollar É.‑U. = 1,8-2,2 lari) et de juguler l'inflation. Des succès ont été obtenus dans la lutte contre la criminalité, ce qui a permis d'assainir la situation dans les milieux politiques et économiques. Les conditions, encore rudimentaires, certes, d'un développement normal de l'économie ont été créées. Des entreprises privées commencent peu à peu à voir le jour. L'effet bienfaisant de ces changements est apparu dès 1995 où la croissance du PIB est ressortie à 3,3 %.

48.Grâce également aux mesures résolues prises par les autorités, 1996 a été une année de stabilisation macroéconomique, ce qui a permis une amélioration progressive du niveau de vie. Le PIB a augmenté de 11 % avec un volume de 5,1 milliards de lari (4,08 milliards de dollars) en valeur nominale. Le PIB par habitant a été de 948 lari (753,4 dollars).

49.Les chiffres ci‑dessous indiquent l'évolution du produit intérieur brut de 1993 à 1998, aux prix de 1992 (en pourcentage) :

1993

1994

1995

1996

1997

1998

70,7

63,3

64,9

72,2

80,4

82,7

50.La réduction considérable des taux d'inflation est un autre résultat d'une importance cruciale obtenu au cours de la dernière période. En 1996, l'inflation est ressortie à 13,5 %, soit un taux mensuel de 1,05 %. Dans le deuxième semestre de 1998, l'évolution négative de la situation budgétaire et financière s'est traduite par une poussée d'inflation. Le taux de change du lari contre le dollar a baissé de 38 %. L'indice des prix à la consommation était de 110,3 % en décembre 1998.

51.La stabilisation financière réalisée dans le pays et la reprise économique de 1995‑1996 ont eu des effets positifs sur le niveau de revenu de la population. D'après les chiffres de décembre 1996, le salaire mensuel moyen des personnes employées dans l'économie nationale a atteint 35‑38 lari (28‑30 dollars) dans les secteurs à financement budgétaire ‑ 27 lari (21,6 dollars), et dans les secteurs financés hors budget ‑ 45 lari (36 dollars). Dans le secteur privé, le salaire se situe entre 120 et 140 lari (96‑112 dollars). Étant donné que, d'après les chiffres de 1995, le salaire moyen des personnes employées dans l'économie nationale était de 15,7 lari (12,5 dollars) et dans le secteur à financement budgétaire de 9,4 lari (7,5 dollars), l'amélioration des revenus de la population apparaît clairement. Certes, leur montant nominal reste peu élevé. À l'heure actuelle, le salaire minimum est de 20 lari (10 dollars), et le salaire mensuel moyen de 60 lari (30 dollars).

52.Dans le même temps, l'amélioration des revenus de la population s'est accompagnée de changements dans la structure de ces revenus. Le coefficient de Gini, qui mesure les inégalités dans la répartition du revenu, a été ramené de 0,58 en 1995 à 0,50 en 1996 (en 1992‑1993, il était très nettement inférieur ‑ 0,30‑0,35), ce qui signale l'amorce d'une réduction des écarts entre les revenus des particuliers.

53.La Géorgie développe et diversifie ses relations économiques avec l'étranger. C'est ainsi qu'en 1996, elle entretenait des relations commerciales avec 100 pays; le volume du commerce extérieur s'établissait à 242,6 millions de dollars, dont 194 millions de dollars au titre des exportations et 1 048,6 millions de dollars au titre des importations. Le déficit de la balance commerciale atteignait 854,6 millions de dollars.

54.L'endettement extérieur du pays était de 1 875 millions dollars en 1998.

Le rôle de la coopération avec les organisations internationales dans le développement économique du pays

55.De nombreux pays et de nombreuses organisations internationales ont apporté à la Géorgie une aide précieuse pour la mise en place des structures de l'État, l'établissement d'un système démocratique, la réalisation des réformes économiques, la mise en place d'un filet de protection sociale.

56.L'aide fournie à la Géorgie par les pays et les organisations internationales depuis son accession à l'indépendance (de 1992 à 1996) représente 1 353 800 000 dollars. Elle est ventilée comme suit :

a)Assistance technique (95 332 000 dollars) essentiellement destinée à des services de consultants, à des activités de perfectionnement du personnel local d'encadrement, à l'acquisition de matériel de bureaux et de transport. En règle générale, la bonne utilisation de l'assistance technique est vérifiée par les organismes compétents des donateurs;

b)Aide financière (311 947 000 dollars) accordée par l'intermédiaire du système bancaire à différents secteurs de l'économie nationale pour l'acquisition d'équipement, de matières premières et de produits finis;

c)Aide budgétaire (179 670 000 dollars) accordée à la Géorgie sous forme de crédits destinés à renforcer le budget de l'État (prêt à la reconstruction consenti par la Banque mondiale et prêt à l'ajustement structurel consentis par le Fonds monétaire);

d)Aide humanitaire (573 368 000 dollars) provenant d'organisations internationales et destinée à des groupes de la population socialement vulnérables. Il y a actuellement sur place en Géorgie plus de 50 ONG internationales et géorgiennes financées par l'organisme d'aide humanitaire de la Communauté européenne, des organismes de l'ONU et le Gouvernement des États‑Unis. L'aide humanitaire revêt également la forme de dons provenant d'organisations internationales et de gouvernements de pays étrangers;

e)Aide monétaire (193 485 000 dollars) accordée sous forme de crédit pour soutenir le cours de la monnaie nationale. Pratiquement, il s'agit d'un crédit accordé par le Fonds monétaire international à la Banque nationale de Géorgie.

57.Les réformes économiques réalisées en Géorgie le sont conformément aux recommandations des organisations internationales et avec leur soutien actif. C'est ce qui a permis de mettre en place le cadre législatif et réglementaire d'une économie de marché pouvant fonctionner correctement, de réaliser par étapes la réforme des modes de propriété, la libéralisation des prix, d'introduire dans la pratique économique les règles et les principes couramment admis dans les relations internationales.

58.La stabilisation socioéconomique et politique qui s'amorce dans le pays constitue un terrain favorable pour une bonne utilisation de l'aide internationale et crée des conditions permettant aux pays et organismes donateurs de mettre en œuvre en Géorgie une politique systématique d'investissement.

59.L'assainissement de l'économie nationale est facilité par la participation de la Géorgie aux organisations économiques internationales régionales (Organisation de coopération économique de la mer Noire, CEI, etc.). Il existe de bonnes perspectives d'association avec les institutions européennes. En 1999, la Géorgie est devenue membre du Conseil de l'Europe. Et de l'OMC en octobre de la même année.

V. LE SYSTÈME POLITIQUE

60.La Géorgie est un État indépendant uni et indivisible, comme l'a confirmé le référendum qui a eu lieu le 31 mars 1991 sur tout le territoire du pays, y compris dans la République socialiste soviétique autonome d'Abkhazie et dans l'ex‑région autonome d'Ossétie, ainsi que la proclamation du 9 avril 1991 sur le rétablissement de l'indépendance nationale de la Géorgie.

61.Du point de vue du régime politique, l'État géorgien est une république démocratique. Il est dénommé la Géorgie.

62.Le chef de l'État est le Président (depuis novembre 1995, la Géorgie a pour Président Edouard Chevarnadzé).

63.Le territoire de l'État géorgien est défini sur la base de la situation existant au 21 décembre 1991. L'intégrité et l'inviolabilité territoriales des frontières d'État de la Géorgie sont consacrées par la Constitution et la législation du pays et reconnues par la communauté internationale et par les organisations internationales. Le régime politique et la structure territoriale de la Géorgie seront définis par une loi constitutionnelle sur la base du principe de la séparation des pouvoirs après le rétablissement complet de l'autorité de la Géorgie sur l'ensemble du territoire du pays.

64.La nationalité géorgienne est acquise par la naissance et par la naturalisation. Un ressortissant géorgien ne peut pas être en même temps ressortissant d'un autre État.

A. Le Parlement

65.Le Parlement de la Géorgie est l'organe représentatif suprême du pays. Il exerce le pouvoir législatif, définit les grandes orientations de la politique extérieure et intérieure du pays, contrôle l'activité du Gouvernement et exerce d'autres compétences dans les limites définies par la Constitution.

66.Le Parlement est élu au suffrage universel et au scrutin secret pour une durée de quatre ans. Il compte 150 membres élus à la représentation proportionnelle et 85 membres élus au scrutin majoritaire. Tout citoyen géorgien âgé de 25 ans révolus et titulaire du droit de vote est éligible au Parlement.

67.Lorsque les conditions appropriées seront réunies et que des organes d'autogestion locaux auront été constitués sur tout le territoire du pays, le Parlement se composera de deux chambres ‑ le Conseil de la République et le Sénat. Le Conseil de la République se composera de membres élus à la représentation proportionnelle. Le Sénat sera constitué de membres élus en Abkhazie, en Adjarie et dans d'autres entités territoriales de la Géorgie, plus cinq sénateurs désignés par le Président.

68.Le Parlement de la Géorgie, pour la durée de son mandat et selon les modalités définies par le règlement, désigne au scrutin secret le Président et les Vice‑Présidents du Parlement de la Géorgie, dont un vice‑président choisi sur leur proposition, parmi les membres du Parlement représentant l'Abkhazie et l'Adjarie.

B. Le Président

69.Le Président de la Géorgie est le chef de l'État géorgien et le chef du pouvoir exécutif. Il est élu au suffrage universel, égal et direct et au scrutin secret pour un mandat de cinq ans. Nul ne peut être élu président pour plus de deux mandats consécutifs.

70.Peut être élu président tout Géorgien de naissance titulaire du droit de vote, âgé de 35 ans révolus et ayant résidé en Géorgie pendant 15 ans au moins et y résidant le jour où est fixée la date des élections.

71.Le Président de la Géorgie :

a)Conclut les traités et accords internationaux, conduit les négociations avec les États étrangers; avec l'accord du Parlement, désigne et démet de leurs fonctions les ambassadeurs et autres représentants diplomatiques de la Géorgie; reçoit les lettres de créance des ambassadeurs et autres représentants diplomatiques des États étrangers et des organisations internationales;

b)Avec l'accord du Parlement, désigne les membres du Gouvernement (les ministres);

c)Peut démettre les ministres de leurs fonctions;

d)Accepte la démission des ministres et d'autres personnes dont la liste est établie par la loi; peut inviter les ministres à exercer certaines fonctions jusqu'à la formation d'un nouveau gouvernement;

e)Présente au Parlement le projet de budget de la Géorgie après que les grandes orientations et les principales dispositions du budget ont été approuvées par les commissions parlementaires compétentes;

f)Présente les fonctionnaires au Parlement, les nomme et les démet de leurs fonctions dans les cas et selon les modalités définies par la Constitution ou la loi;

g)En cas d'agression armée contre la Géorgie, déclare le pays en état de guerre, conclut la paix lorsque les conditions voulues sont réunies et soumet cette décision à l'approbation du Parlement dans un délai de 48 heures au plus;

h)En période de guerre ou de désordres généralisés, en cas d'atteinte à l'intégrité territoriale du pays, de coup d'État militaire ou de rébellion armée, de catastrophe écologique et d'épidémie, ou dans d'autres circonstances où les pouvoirs publics ne sont pas en mesure de s'acquitter normalement de leurs fonctions constitutionnelles, déclare l'état d'urgence sur tout le territoire du pays ou dans une partie quelconque du territoire et, dans un délai de 48 heures au maximum, soumet cette décision au Parlement pour approbation. En cas d'état d'urgence, promulgue des décrets ayant force de loi et valables jusqu'à la fin de l'état d'urgence; prend des mesures d'exception. Les décrets ainsi promulgués sont présentés au Parlement quand il se réunit en session. Les pouvoirs d'exception ne s'appliquent qu'au territoire où, pour les raisons visées au présent paragraphe, l'état d'urgence a été déclaré;

i)Peut, avec l'approbation du Parlement, mettre fin à l'activité des organes d'autogestion représentatifs ou des collectivités territoriales ou les dissoudre lorsque les mesures prises par lesdits organes ou collectivités compromettent l'intégrité territoriale du pays ou l'exercice des pouvoirs constitutionnels des organes d'État;

j)Sur la base de la Constitution et de la législation, promulgue des arrêtés et ordonnances;

k)Signe et promulgue les lois selon les modalités établies par la Constitution;

l)Statue sur les questions relatives à la nationalité, ainsi que sur les questions concernant l'asile politique;

m)Décerne les récompenses officielles, confère les grades militaires supérieurs et les titres spéciaux et honorifiques, ainsi que les titres des agents diplomatiques de haut rang;

n)Prononce la grâce des condamnés.

72.Selon les modalités prévues par la loi, le Président décrète les élections au Parlement et aux autres organes représentatifs. Il peut révoquer les actes des organes exécutifs relevant de son autorité. Il est le chef suprême des forces armées de la Géorgie. Il nomme les membres du Conseil national de sécurité et préside ses séances, nomme les chefs militaires et les démet de leurs fonctions, etc.

C. Le pouvoir judiciaire

73.Le pouvoir judiciaire s'exerce par le biais du contrôle constitutionnel, dans le cadre du système judiciaire et selon d'autres modalités prévues par la loi. Le pouvoir judiciaire est indépendant et n'est exercé que par les tribunaux.

74.Le Tribunal constitutionnel de Géorgie est un organe judiciaire chargé du contrôle constitutionnel. Le Tribunal constitutionnel de Géorgie, sur la base d'une requête ou à la demande du Président de la Géorgie, ou d'au moins un cinquième des membres du Parlement, d'un tribunal, des organes représentatifs suprêmes d'Abkhazie et d'Adjarie, du Médiateur national (ombudsman) et des citoyens selon les modalités fixées par la loi :

a)Statue sur la constitutionnalité des lois et des dispositions réglementaires arrêtées par le Président et les organes suprêmes d'Abkhazie et d'Adjarie;

b)Examine les différends concernant la séparation des pouvoirs entre les organes de l'État;

c)Examine les problèmes de la constitutionnalité, de la formation et de l'activité des associations de particuliers;

d)Examine les différends concernant la constitutionnalité des référendums et élections;

e)Examine les problèmes concernant la constitutionnalité des traités et accords internationaux;

f)À la suite d'une requête de particuliers, examine la constitutionnalité des décisions réglementaires concernant les questions visées au chapitre II de la Constitution de la Géorgie;

g)Exerce d'autres pouvoirs définis par la Constitution de la Géorgie et par la loi organique.

75.La justice est rendue par des tribunaux de droit commun. L'établissement de tribunaux militaires n'est autorisé qu'en cas de guerre et seulement dans le cadre du système des tribunaux de droit commun. L'établissement de tribunaux d'exception et de tribunaux spéciaux n'est pas autorisé.

76.Les juges exercent leur activité en toute indépendance et ne sont soumis qu'à la Constitution et qu'à la loi. La procédure est conduite selon le principe de l'égalité des parties et des débats contradictoires.

77.Le Tribunal suprême de la Géorgie, selon les modalités prévues, surveille le déroulement de la procédure dans les tribunaux de droit commun de Géorgie et examine en première instance les affaires relevant de sa compétence en vertu de la loi.

78.Le Président du Tribunal suprême et les juges du Tribunal suprême sont élus par le Parlement à la majorité de ses membres.

79. Le Bureau du Procureur de la Géorgie est une institution relevant du pouvoir judiciaire à laquelle il appartient de surveiller la conduite de l'instruction et l'exécution des peines, et d'exercer également les fonctions du parquet (accusation publique).

80.Le Bureau du Procureur est un système unique centralisé. Le Procureur général est désigné par le Parlement à la majorité de ses membres, pour un mandat de cinq ans sur proposition du Président. Les procureurs sont désignés par le Procureur général.

VI. LE SYSTÈME DE PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

81.La principale garantie du fonctionnement et du développement du système des droits de l'homme et des libertés fondamentales réside dans la Constitution géorgienne, et plus spécialement dans le chapitre II de la Constitution intitulé "La nationalité géorgienne. Les droits de l'homme et les libertés fondamentales".

82.Le système de protection juridique accorde la priorité aux moyens et procédures judiciaires. Le droit à la protection judiciaire est garanti par la Loi fondamentale de la Géorgie. C'est ce qui ressort de l'article 42 de la Constitution qui consacre ce droit dans toute son étendue et garantit également la réparation du préjudice. Les personnes alléguant une violation de leurs droits peuvent s'adresser aux autorités judiciaires.

83.La Constitution stipule (art. 6.2) que la législation de la Géorgie est conforme aux principes et normes universellement reconnus du droit international. Les traités et accords conclus par la Géorgie qui ne sont pas en contradiction avec la Constitution géorgienne l'emportent sur les dispositions de droit interne.

84.L'article 7 de la Constitution est ainsi conçu : "La Géorgie reconnaît et respecte en tant que valeurs immuables et supérieures de l'humanité les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement reconnus. Dans l'exercice du pouvoir, le peuple et l'État sont tenus de respecter ces droits et libertés au même titre que le droit en vigueur".

85.La Géorgie a dès à présent adhéré à 15 instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ou les a ratifiés. Son Parlement a ratifié en avril 1999 la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

86.Dans le même temps, la Loi fondamentale comporte des dispositions limitant l'exercice de certains droits et de certaines libertés. L'application de ces dispositions est dictée par des considérations liées à la sécurité de l'État ou à la sécurité publique, à l'intégrité territoriale, à la prévention de la criminalité, à la protection des droits et de la dignité d'autrui dans une société démocratique.

87.En cas d'état d'urgence ou d'état de guerre, le Président de la Géorgie peut imposer, dans l'ensemble ou dans toute partie du pays, des restrictions aux droits et libertés ci‑après consacrés par la Constitution : inviolabilité de la personne, inviolabilité de la vie privée et du domicile, liberté de circulation, liberté de recevoir et de diffuser des informations, liberté de réunion et de manifestation, droit de propriété, droit de travailler librement, droit de grève, droit d'avoir accès aux documents officiels contenant des informations sur les sujets de tel ou tel droit. Le Président est tenu de soumettre la décision à l'approbation du Parlement dans les 48 heures.

88.Les fondements du système de protection des droits de l'homme en Géorgie ont été mis en place le 20 avril 1992 lorsqu'a été créée, sur l'initiative du chef de l'État dans l'exercice de ses pouvoirs exécutifs, la Commission pour la protection des droits de l'homme et les relations interethniques. Les fonctions imparties à la Commission consistent à réunir, à l'intention des organes dirigeants du pays, des informations sur la situation des droits de l'homme, à évaluer et surveiller l'état de la législation ainsi que les décisions des tribunaux et les dispositions administratives intéressant les droits de l'homme.

89.La Commission examine également les plaintes et requêtes des citoyens faisant état d'une violation des droits et formule des recommandations sur le rétablissement de ces droits, organise des consultations sur toute question relative aux droits de l'homme, participe au travail de sensibilisation de l'opinion publique, contribue à la diffusion des connaissances sur les droits et les méthodes à mettre en œuvre pour leur protection.

90.Il n'a pas été possible de tirer pleinement parti du potentiel de cette structure faute d'un mandat défini par la loi et en raison de la situation ambiguë résultant de l'implantation de la Commission au niveau de l'exécutif. Il apparaît maintenant nécessaire de doter la Géorgie d'une institution d'un type nouveau, indépendante et dynamique, pour la protection des droits de l'homme. À cet égard, la Constitution (art. 43) prévoit la création d'un poste de Médiateur national (ombudsman).

91.La Constitution donne au Médiateur national le droit de dénoncer les faits constituant une violation des droits et libertés de la personne et d'en informer les autorités et les personnes compétentes. Toute mesure faisant obstacle à son activité est punie par la loi. La durée du mandat du Médiateur est fixée à cinq ans.

92.Le Médiateur national est élu par le Parlement et n'obéit qu'à la loi dans l'exercice de ses fonctions, ce qui constitue une garantie d'indépendance. La loi sur le Médiateur national, adoptée par le Parlement en mai 1996 et définissant ses attributions, est pleinement conforme aux principes du droit international. L'institution ainsi créée est analogue à l'institution européenne de l'ombudsman. Le Médiateur a été élu en octobre 1997.

93.Une Commission chargée des droits de l'homme et des problèmes des minorités ethniques fonctionne dans le cadre de l'organe législatif suprême du pays. Quatorze députés y participent. Outre son travail législatif, cette commission examine, dans les limites de ses compétences, des plaintes et requêtes des citoyens.

94.La création du Tribunal constitutionnel, qui a été mis en place et fonctionne dès à présent, marque un pas important vers la création d'un système global de protection de la légalité en Géorgie.

95.En créant par décret, en avril 1997, dans le cadre du Conseil de sécurité, le poste de secrétaire adjoint chargé de la protection des droits de l'homme, le Président a donné une nouvelle preuve de l'intérêt croissant que les dirigeants du pays portent à ce secteur.

96.La loi relative aux tribunaux de droit commun (adoptée le 12 juin 1997 et en vigueur à compter du 1er janvier 1998) prévoit la création de tribunaux spécialisés, notamment de tribunaux administratifs appelés à connaître des litiges entre un particulier ou une organisation, d'une part, et l'État, représenté par ses organes, de l'autre, en cas de violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

97.L'État accorde une grande importance au développement de ce qu'il est convenu d'appeler le "secteur tiers" constitué d'organisations non gouvernementales (internationales et locales) spécialisées dans la protection des droits de l'homme. À ce jour, plus de 50 organisations de ce type ont été enregistrées au Ministère de la justice.

98.La loi en vigueur dans le pays sur les organisations sociales crée des conditions favorables pour le développement d'un "secteur tiers". Certes, il convient de noter que le développement quantitatif des organisations non gouvernementales n'a pas encore trouvé son expression sur le plan de la qualité. À cet égard, il faut tenir compte de l'absence de traditions dans ce domaine et aussi des lacunes méthodologiques et du manque de moyens matériels d'organisations non gouvernementales tributaires de l'aide des donateurs. En particulier, le problème du perfectionnement de leurs membres se pose avec acuité.

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