Nature des cas signalés

Nombre

Pays demandeur

Intervention pour obtention de pièces administratives, judiciaires et sociales justificatives de menaces de rapatriement

18

Allemagne, France, Pays‑Bas

Recherche de famille d'origine par un enfant adopté

2

France

Recherche de famille après séparation des parents

5

France, Angleterre

Recherche des parents par un enfant à l'étranger et vice‑versa

4

France, Belgique

Demande d'adoption internationale

12

France, Suisse

Total

41

6

Il ressort de l'examen de ce tableau une prédominance des cas requérant une intervention ou des actions du Ministère chargé des affaires sociales, pour la transmission de documents administratifs, judiciaires ou d'ordre social permettant d'apprécier la décision des déplacements ou de non‑retours illicites qu'encourt un enfant adopté ou vivant dans un pays étranger.

D. Recouvrement de la pension alimentaire de l'enfant (art. 7, par. 4)

94. Au Cameroun, le paiement de la pension alimentaire prévue en faveur de l'enfant abandonné est prononcé par les tribunaux de l'ordre judiciaire. Le recouvrement de cette pension peut être à l'amiable ou forcé. Il faut relever cependant que dans ce recouvrement on se heurte à des difficultés d'ordre psychologique et technique :

a)Au plan psychologique, la difficulté de recouvrement tient au fait de l'hésitation de certains parents à payer la pension à laquelle ils ont été condamnés au profit de leurs enfants. Ils ne perçoivent pas la nécessité de s'occuper d'un enfant dont ils n'ont pas la garde;

b)Au plan technique, le recouvrement s'effectue sur les ressources du débiteur. Dans certains cas, ces ressources se réduisent au salaire et la quantité saisissable est le tiers du salaire; cependant les recouvrements forcés sont au Cameroun entravés par d'énormes difficultés liées à l'exécution des décisions de justice.

Dans le cas d'impossibilité absolue de recouvrement d'une pension alimentaire et si la situation de l'enfant requiert une prise en charge immédiate, une aide d'urgence peut lui être accordée par le Ministère chargé des affaires sociales; cette aide est remise au conjoint à qui la garde a été confiée.

95.Dans tous les cas, le défaut de paiement de la pension alimentaire entraîne des sanctions pénales. Selon les alinéas 1 et 2 de l'article 180 du Code pénal :

"Est puni d'un emprisonnement de un mois à un an et d'une amende de 20 000 à 400 000 francs CFA ou de l'une de ces deux peines seulement celui qui est demeuré plus de deux mois sans fournir la totalité de la pension qu'il a été condamné à verser à son conjoint, à ses ascendants ou à ses descendants; le défaut de paiement est présumé volontaire sauf preuve contraire. Mais l'insolvabilité qui résulte de l'inconduite habituelle, notamment de l'ivrognerie, n'est en aucun cas un motif d'excuse valable pour le débiteur."

96.Cette disposition pénale renforce celle de l'article 76 de l'ordonnance No 81/02 du 29 juin 1981 qui dispose ce qui suit :

"1)L'épouse abandonnée par son mari peut saisir la juridiction compétente aux fins d'obtenir une pension alimentaire tant pour les enfants laissés à sa charge que pour elle‑même.

2)Le greffier convoque les époux dans un délai d'un mois devant le tribunal par une lettre recommandée indiquant l'objet de la demande. Ils doivent comparaître en personne sauf empêchement dûment justifié.

3)Le tribunal statue selon les besoins et la faculté de l'une ou de l'autre partie et, le cas échéant, autorise la femme à saisir‑arrêter telle part du salaire, du produit du travail ou du revenu du mari.

4)Le jugement rendu, enregistré sans frais, est exécutoire par provision nonobstant opposition ou appel et l'assistance judiciaire est de droit pour en poursuivre l'exécution.

5)Dans les mêmes conditions, à la requête du mari, la femme exerçant une profession séparée ou ayant des revenus personnels peut être contrainte à contribuer aux charges de ménage."

Il convient de remarquer que le délai de convocation prévu à l'alinéa 2 indique que le législateur a voulu qu'on agisse avec la grande célérité, l'urgence étant présumée en matière de fourniture d'aliments.

97.Eu égard à ce qui précède, il faut relever que le recouvrement de la pension alimentaire n'est réglementé que pour les unions légales en cas de divorce ou de séparation de corps. Par contre, la situation des enfants issus des unions libres reste préoccupante car il n'existe pas encore de dispositions légales ou réglementaires permettant à l'enfant naturel non reconnu de bénéficier de la pension alimentaire.

E. Enfants privés de leur milieu familial (art. 20)

98.Les principales situations qui peuvent priver l'enfant de son milieu familial sont les suivantes : le décès ou la séparation des parents (divorce ou séparation de fait), le déplacement professionnel, l'incarcération des parents, les troubles mentaux, la  déchéance de l'autorité parentale, le dysfonctionnement de la famille, les catastrophes, les guerres, le comportement inadapté de l'enfant et l'influence des sectes. Les mesures de remplacement sont de deux types : la substitution définitive et la substitution provisoire.

1. La substitution provisoire

99.Elle se subdivise également en deux types : la garde provisoire et le placement institutionnel temporaire qui sont des mesures d'ordre administratif. La lettre‑circulaire No 9002759/LC/MINASCOF/DPIF/SDPF du 5 décembre 1990 portant rappel des procédures en matière de garde provisoire d'enfants abandonnés met en place les mécanismes de protection des enfants abandonnés relevant du domaine de la petite enfance (0 à 3 ans). Seul le Ministre ordonne l'attribution de la garde provisoire d'enfants abandonnés auprès d'une famille agréée.

100.Compte tenu des difficultés d'acheminement des enfants retrouvés à Yaoundé, il est admis qu'en cas d'extrême urgence, l'autorité administrative de la localité où l'enfant est trouvé prenne un arrêté attribuant ledit enfant à une famille préalablement agréée à l'adoption. En ce qui concerne le placement temporaire administratif, il est ordonné par le travailleur social responsable de l'intervention. Au plan judiciaire, le placement intervient dans le cadre de la lutte contre la délinquance juvénile et en cas de déchéance de l'autorité parentale.

101.Pour l'exécution effective de toutes ces mesures de placement, il existe des institutions publiques spécialisées chargées de la petite enfance (0 à 3 ans), et des institutions publiques de rééducation et de resocialisation qui accueillent les enfants inadaptés de 10 à 18 ans. Pour la petite enfance, il y a le Centre d'accueil d'enfants en détresse de Nkomo, d'une capacité de 40 places. Pour les enfants inadaptés sociaux, on compte le Borstal Institute de Buéa (120 places), l'Institution camerounaise de l'enfance (ICE) de Betamba (120 places), le Centre d'accueil et d'observation de Douala (120 places), l'Institution camerounaise de l'enfance de Maroua (ICE) (60 places), le Centre d'accueil pour mineurs de Bertoua (60 places) et le Home‑Atelier de Douala (180 places). Au cours des cinq dernières années, le budget alloué à ces institutions s'est élevé à 200 millions de francs CFA.

102.Malgré les efforts du Gouvernement, il convient de relever que ces institutions sont inégalement réparties sur l'ensemble du territoire et sont actuellement confrontées à des problèmes fonctionnels dus à la récession économique. Fort heureusement les ONG et les organismes internationaux soutiennent également ces efforts gouvernementaux par la création des oeuvres sociales privées soumises à l'agrément de l'administration.

2. La substitution définitive

103. Il s'agit du placement institutionnel permanent et de l'adoption, qui sont des mesures administratives et judiciaires. Le placement institutionnel permanent est prévu dans le cadre de deux projets de décrets : le premier concerne les institutions de la petite enfance, c'est ‑à ‑dire les pouponnières, les crèches garderies et les haltes ‑garderies. Le deuxième projet de décret porte sur les institutions destinées à l'enfance inadaptée et/ou délinquante, à savoir les centres de rééducation, les centres d'accueil et d'observation, les h omes ‑ateliers, les centres d'accueil et de transit et les centres d'hébergement.

F. Adoption (art. 21)

104.Présentons tout d'abord l'arsenal juridique réglementant la pratique de l'adoption au Cameroun avant d'évoquer le cas de l'adoption internationale.

1. Cadre juridique de l'adoption

105.L'adoption au Cameroun est régie par un ensemble de textes dont l'ossature est constituée par le Code civil, auquel renvoie l'ordonnance No 81/02 du 29 juin 1981 portant organisation de l'état civil et diverses dispositions relatives à l'état des personnes physiques. Il y est fait état aussi bien des catégories et effets de l'adoption que des procédures et des conditions requises de l'adoptant.

a)Les catégories et les effets de l'adoption

106.On distingue deux catégories d'adoption : l'adoption simple et l'adoption plénière ou légitimation adoptive. La première est révocable, tandis que la seconde est définitive. La nuance est davantage perceptible au niveau des effets.

107.Dans le cas de l'adoption simple, non seulement l'adopté acquiert sur la succession de l'adoptant les mêmes droits que les enfants ou descendants légitimes de ce dernier (art. 356 du Code civil), mais aussi il reste membre de sa famille d'origine et y conserve tous ses droits; toutefois, l'adoptant est seul investi des droits de la puissance paternelle à l'égard de l'adopté (art. 351, CC). Dans la légitimation adoptive par contre, l'adopté cesse d'appartenir à sa famille d'origine; dès lors il a chez les parents adoptifs les mêmes droits et obligations que s'il était né du mariage (art. 370, CC). Il est à noter que la légitimation adoptive n'est permise qu'en faveur des enfants âgés de moins de 5 ans abandonnés par leurs parents ou dont ceux‑ci sont inconnus ou décédés (art. 368, CC).

b)La procédure

108.L'adoption est essentiellement judiciaire et obéit à une procédure spécifique qui comporte quelques nuances selon qu'il s'agit de l'adoption simple ou de l'adoption plénière. Dans le premier cas, le tribunal, saisi de la requête de l'intéressé, se réunit en chambre du conseil après s'être procuré les renseignements convenables; le Procureur de la République sera alors entendu avant que le tribunal ne décide s'il y a lieu à l'adoption. Dans le second cas, le jugement est rendu sur requête en audience publique, après enquête et débat en chambre du conseil (art. 369, CC).

109.Il convient de relever, à propos de la légitimation adoptive particulièrement, que dans la pratique le service social joue un rôle significatif en amont de la phase judiciaire. Dans cette phase pré‑adoptive, en effet, les services sociaux en charge des pupilles de l'État, entreprennent des actions diverses notamment : l'enregistrement de personnes désireuses d'adopter, les enquêtes sociales, la sélection des familles d'accueil, la délivrance d'agréments à l'adoption, la prise en charge et/ou le placement des enfants en garde provisoire dans des familles, et la saisine des tribunaux pour adoption. Il reste à mettre en place des mécanismes de suivi après qu'un placement familial est effectué par le service social ou qu'un particulier, ayant trouvé un nouveau‑né abandonné, veuille en assurer la garde, afin d'apprécier l'évolution de l'enfant et éviter tout dérapage.

c)Les conditions requises des postulants à l'adoption

110.Les couples, aussi bien que les personnes seules, sont habilités à adopter. Dans le cas d'une personne seule de l'un ou de l'autre sexe, celle‑ci doit être âgée de plus de quarante ans. Dans le cas du couple, les époux doivent être mariés depuis plus de dix ans, ne pas être séparés de corps et l'un au moins doit être âgé de plus de trente‑cinq ans. Quel qu'en soit le cas, les adoptants devront avoir en principe quinze ans de plus que les personnes qu'ils se proposent d'adopter. En outre, ils ne devront avoir, au jour de l'adoption, ni enfants, ni descendants légitimes, mais l'existence d'enfants légitimés par adoption ne fait pas obstacle à l'adoption.

d)La prise en compte de l'intérêt de l'enfant

111.Le souci de prise en compte de l'intérêt de l'enfant en matière d'adoption apparaît en filigrane à travers certaines exigences à caractère légal. D'emblée, l'article 343 du Code civil dispose que l'adoption ne peut avoir lieu que s'il y a de justes motifs et si elle présente des avantages pour l'adopté. En outre, pour une meilleure intégration de l'enfant dans son milieu, divers consentements sont exigés afin de s'assurer de l'adhésion sans réserve de tous les acteurs impliqués. On peut citer :

a)Le consentement des père et mère de l'enfant mineur s'ils existent;

b)Le consentement du conseil de famille lorsqu'il n'y a pas de parents connus ou s'ils sont dans l'impossibilité de manifester leur volonté;

c)Le consentement de l'un et de l'autre des époux pour les conjoints;

d)Le consentement de l'individu ou de l'association de bienfaisance à qui la garde de l'enfant a été confiée ou du représentant légal de ce dernier;

e)Le consentement du mineur lui-même, s'il a atteint seize ans.

Participe aussi de ce souci de protéger l'enfant, la possibilité qui est donnée à ce dernier, dans le cadre de l'adoption simple, d'obtenir la révocation de l'adoption. Mais la situation est plus complexe en cas d'adoption transnationale.

2. Le cas de l'adoption internationale

112.La législation camerounaise envisage la possibilité de recourir à l'adoption transnationale; elle présente cependant des insuffisances qui appellent certains aménagements dans la pratique.

a)L'état de la législation en matière d'adoption internationale

113.Aux termes de l'article 345 du Code civil : "Un Camerounais peut adopter un étranger ou être adopté par un étranger. L'adoption est sans effet sur la nationalité." La loi ouvre ainsi une brèche pour l'adoption internationale, mais ne prévoit malheureusement pas de mécanismes institutionnels de contrôle ou de suivi pré-adoption ou postadoption. Cette situation est d'autant plus préoccupante que certains placements en vue d'adoption internationale sont effectués librement par les membres de la famille, des ONG et autres organisations confessionnelles et des particuliers.

114.Pour le cas des enfants en détresse cependant, des efforts sont faits au niveau du Ministère des affaires sociales pour assurer un certain suivi des enfants placés en vue d'adoption internationale. C'est ainsi que les représentations diplomatiques et consulaires sont souvent saisies pour clarification sur les éventuelles adoptions internationales. En outre, la collaboration s'intensifie entre le Ministère des affaires sociales et le Service social international (SSI), organisation internationale à but non lucratif créée en 1924 qui jouit de la personnalité civile selon l'article 60 du Code civil suisse. Cette organisation se propose, entre autres, de collaborer à la protection de l'enfant dans l'adoption internationale, conformément aux dispositions de diverses conventions de La Haye; et de développer et maintenir un réseau international de branches, bureaux affiliés et correspondants.

115.Concrètement, depuis 1995, il existe au Ministère des affaires sociales un bureau chargé spécifiquement des cas internationaux. En outre, le Ministère des affaires sociales a été représenté à un séminaire de formation sur les méthodes et techniques d'intervention sur les cas internationaux qui s'est tenu à Londres en octobre 1997, et il existe un échange documentaire avec le Service social international relatif aux informations concernant les procédures en matière d'intervention transnationale. Cette collaboration tend à être formalisée grâce à la signature en cours, d'une convention de coopération entre les deux structures.

116.Les cas qui sont traités sur le plan international par le Ministère des affaires sociales proviennent des différents pays d'Afrique, d'Europe, d'Amérique et d'Océanie et concernent :

a)Les demandes d'intervention pour obtention de pièces administratives, judiciaires et sociales des enfants en situation de migration;

b)La situation des enfants à la suite d'un divorce ou d'une séparation des parents par‑delà les frontières;

c)La recherche des parents par les enfants par‑delà les frontières et vice‑versa;

d)La recherche des origines par les enfants placés en adoption internationale.

117.On se heurte malheureusement à quelques difficultés qui ont trait à :

a)La tendance des pays à protéger leurs citoyens, généralement au détriment de l'intérêt supérieur de l'enfant en cause, ce qui implique parfois une interprétation très restrictive des lois nationales;

b)L'accès à la banque de données du Service social international;

c)L'absence d'outil moderne de traitement de texte et de conservation de données;

d)L'absence d'un réseau de communication rapide et efficace permettant d'obtenir et de requérir des informations sur un individu même dans les zones les plus reculées.

L'adoption internationale, en définitive, constitue une option exceptionnelle qui n'est généralement envisagée que lorsqu'on ne trouve pas localement de meilleures opportunités pour placer l'enfant.

b)Quelques perspectives

118.Des études sont en cours au Ministère des affaires sociales en vue de la réforme de la législation en matière d'adoption. Certaines ONG se mobilisent sur le terrain pour sensibiliser les autorités sur l'utilité pour le Cameroun d'adhérer à la Convention de La Haye.

G. Examen périodique du placement (art. 25)

119.La fréquence de l'examen médical et du traitement fait partie des règlements intérieurs des structures d'accueil des enfants placés. Mais, de manière générale, lesdites structures bénéficient de l'assistance d'un ou plusieurs médecins, quand elles ne comportent en leur sein une infirmerie. Ces médecins font des consultations lors des visites hebdomadaires à tous les enfants, et en cas de maladie grave, les enfants sont conduits dans les centres hospitaliers. Dans le cadre des structures relevant de l'État, cet examen est systématique, car la bonne santé physique et mentale figure dans les conditions d'admission, hormis les structures spéciales d'encadrement d'enfants malades ou handicapés. Dans les structures avec une infirmerie intégrée, tous les soins sont apportés à l'enfant sur place. De plus, les structures d'encadrement d'enfants intègrent soit une infirmerie soit une unité hospitalière. Ces structures sont cependant confrontées à un manque de moyens matériels et humains.

H. Abandon ou négligence (art. 19), y compris réadaptation physiqueet réinsertion sociale (art. 39)

120.Pour lutter contre l'abandon et la négligence des enfants, le Gouvernement a pris des mesures appropriées sur les plans juridique et institutionnel.

121.Sur le plan juridique, le Code pénal sanctionne le délaissement d'incapable (art. 282) et l'abandon du foyer familial (art. 179). Il en est de même de la loi du 19 avril 1898 sur la répression des violences, voies de fait, actes de cruauté et attentats envers les enfants. Afin de protéger les enfants contre toute négligence et violence, le Code d'instruction criminelle en son article 29 dispose :

"Toute autorité constituée, tout fonctionnaire ou officier public qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquerra la connaissance d'un crime ou d'un délit, sera tenu d'en donner avis sur‑le‑champ au Procureur de la République près le tribunal dans le ressort duquel ce crime ou délit aura été commis ou dans lequel le prévenu pourrait être trouvé, et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès‑verbaux et actes qui y sont relatifs."

Cette disposition permet à tous ceux ci-dessus cités d'intervenir à tout moment lorsque l'abandon ou la négligence de l'enfant seront signalés (inceste : art. 306 du Code pénal).

122.Hormis les mesures juridiques, des structures ont été créées pour lutter contre l'abandon et la négligence des enfants : les structures de conception et les structures d'intervention.

123.Les structures de conception. Une commission nationale pour la protection de l'enfance en danger moral, délinquante ou abandonnée a été créée par décret No 90/524 du 23 mars 1990. C'est un organe consultatif chargé d'émettre des avis et de formuler des suggestions sur toute question se rapportant à la politique nationale de protection de l'enfance, de prévention et de traitement de l'inadaptation sociale des jeunes. De même, le décret No 98/069 du 4 mai 1998 portant organisation du Ministère des affaires sociales crée une Direction de la famille et du bien-être de l'enfant.

124.Les structures d'intervention se subdivisent en structures d'accueil et en structures d'encadrement. Les postes sociaux auprès des établissements scolaires, pénitentiaires, sanitaires, tribunaux et des commissariats se situent dans les milieux où les cas d'abandon et de négligence se signalent régulièrement. Ils jouent un rôle d'accueil de tous les usagers. Les structures d'encadrement comprennent toutes les institutions de prise en charge de la petite enfance et de l'enfance inadaptée sociale.

125.Dans les domaines du travail des enfants et de mutilations génitales féminines, des études faites au Ministère des affaires sociales ont abouti à l'élaboration en septembre 1997 du plan national de lutte contre le travail des enfants qui comporte cinq axes :

a)Sensibilisation et mobilisation de la communauté sur les questions relatives au travail des enfants;

b)Développement et renforcement du bien-être et de la protection des enfants qui travaillent;

c)Promotion de l'éducation et de l'apprentissage classique et informel;

d)Amélioration et renforcement de la législation sur le travail des enfants et son application;

e)Coordination et suivi des activités de lutte contre le travail des enfants.

126.Par ailleurs, des centres spécifiques pour les enfants de la rue, notamment des aires éducatives et des centres d'écoute, ont été créés par arrêté conjoint MINEFI/MINFOPRA/MINAS du 8 juin 1999. En perspective, il est envisagé la multiplication des structures publiques de référence pour l'accueil et l'encadrement de la petite enfance. Pour opérationnaliser ces stratégies, le Ministère des affaires sociales a entrepris des activités en faveur de cette population cible ayant pour objectifs la réinsertion familiale des enfants normaux et la réinsertion socioéconomique des enfants inadaptés sociaux. Ces activités englobent l'accueil, l'assistance matérielle, l'aide psychosociale, la scolarisation et la formation professionnelle.

VI. SANTÉ ET BIEN-ÊTRE

A. Les enfants handicapés (art. 23)

127.L'article 23 de la Convention relative aux droits de l'enfant relève en substance que les États parties s'engagent à prendre toutes mesures pour permettre aux enfants handicapés d'avoir accès à l'éducation, à la formation, aux soins de santé, à la rééducation et à une formation professionnelle en vue de favoriser leur autonomie ainsi que leur intégration sociale. Le Cameroun, pour sa part, se préoccupe du bien-être des personnes handicapées, à travers un ensemble de mesures d'ordre législatif, institutionnel et administratif.

128.Au plan législatif, on peut citer :

a)La loi No 83/013 du 21 juillet 1983 relative à la protection des personnes handicapées et son décret d'application No 90/1516 du 26 novembre 1990;

b)La loi No 96/09 du 5 août 1996 fixant la Charte des activités physiques sportives;

c)Le décret No 80/380 du 13 septembre 1980 portant création de Rehabilitation Institute for the Blind;

d)Le décret No 71/DT/315 du 9 juillet 1971 portant création de la Fédération nationale des handicapés du Cameroun (FENAHCAM);

e)Le décret No 78/56 du 21 février 1978 portant création du Centre national de réhabilitation des handicapés (CNRH), puis le décret No 89/141 du 27 janvier 1989 portant réorganisation du CNRH;

f)Le décret No 82/412 du 29 septembre 1982 fixant les modalités d'octroi des secours de l'État aux indigents et nécessiteux;

g)Le décret No 96/379 du 14 juin 1996 sur la réadaptation et la réinsertion socioéconomique des personnes handicapées;

h)La lettre-circulaire No 80/I/658/MINEDUC/CTD du 18 janvier 1980 sur l'admission des enfants handicapés ou nés de parents handicapés dans les établissements publics et parapublics;

i)L'arrêté No 39/45 du 4 août 1953 concernant l'aide aux aveugles du Cameroun.

129.Au plan institutionnel et administratif, il faut noter : le décret No 98/069 du 4 mai 1998 portant organisation du Ministère des affaires sociales, lequel crée au sein de ce département ministériel une sous-direction de la protection des personnes handicapées.

130.Au Cameroun, 700 000 personnes environ sont atteintes d'un handicap moteur, sensoriel ou mental. En 1993, on comptait environ 450 000 enfants handicapés, la prise en charge de ces enfants vise essentiellement la réduction du handicap par la réadaptation fonctionnelle, la réinsertion sociale et l'implantation professionnelle. Pour ce faire, le Cameroun s'est doté de structures d'encadrement au rang desquelles on peut citer le Centre national de réhabilitation des handicapés (CNRH) de Yaoundé, le Réhabilitation Institute for the Blind (RIB) de Buea, l'atelier de couture pour femmes handicapées (Bobine d'or) d'Ekounou et le Centre de rééducation des enfants sourds (CRES).

131.À côté de ces structures, il y a des structures non étatiques dont les plus significatives sont l'Externat médico-pédagogique "la Colombe" de Yaoundé, pour handicapés mentaux, l'École spécialisée pour enfants déficients auditifs (ESEDA) de Yaoundé, le SETA Handicapped Training Center de Mbengwi (Bamenda), le Associated Rehabilitation Centre for Handicapped (ARCH) pour handicapés moteurs de Mutenguene, la Promotion des handicapés du Cameroun (PROHANDICAM), le Centre de rééducation des enfants sourds et d'action sociale (CRESAS) de Garoua et le Comité national des personnes handicapées.

132.En matière d'assistance médicale, l'intervention des pouvoirs publics s'articule autour de l'achat des médicaments, la prise en charge chirurgicale, les évacuations sanitaires et la rééducation fonctionnelle des malades indigents.

133.Depuis la proclamation de la Décennie des Nations Unies (1983-1992) pour les personnes handicapées, la préoccupation gouvernementale en ce qui concerne l'éducation, les sports et loisirs a été renforcée. À ce titre des actions suivantes ont été engagées :

a)L'insertion des enfants handicapés visuels et auditifs, mentaux ou moteurs, dans le système d'enseignement normal après l'achèvement du cycle primaire d'éducation spéciale, d'une part, dans les universités et établissements d'enseignement supérieur, d'autre part; ces insertions sont conformes aux prescriptions de la loi No 83/013 du 21 juillet 1983 suscitée;

b)L'octroi, à des promoteurs privés d'institutions d'éducation spéciale, d'autorisations d'ouverture et des subventions de fonctionnement;

c)L'octroi d'aides à l'éducation spéciale, accordées aux jeunes Camerounais inscrits dans des institutions nationales ou étrangères; ces aides servent généralement à payer les frais de scolarité et à acquérir l'appareillage approprié;

d)La création, conformément à la Charte évoquée plus haut, d'une association sportive, dénommée Handisports, chargée de la promotion des sports et des loisirs pour personnes handicapées et l'intégration de ces activités dans la pratique de la rééducation fonctionnelle. Dans le même sens, plusieurs associations sportives regroupées autour de la Fédération nationale des sports pour handicapés, ont eu à participer à des activités même au niveau international;

e)La participation des jeunes handicapés nationaux aux compétitions sportives nationales.

Ces actions se heurtent à un certain nombre de difficultés : la modicité des moyens de l'État, ce qui ne permet pas de faire face aux besoins innombrables des enfants handicapés et l'insuffisance qualitative et quantitative des institutions spécialisées et du personnel d'encadrement.

B. Santé et services médicaux (art. 24)

134.À la lumière de l'article 24 de la Convention relative aux droits de l'enfant, il ressort que l'enfant a droit de jouir du meilleur état de santé possible et de bénéficier des services de santé. Le Cameroun a souscrit à la Déclaration d'Alma‑Ata de 1978, adhérant ainsi aux idéaux de soins de santé primaires. Dans la même perspective, le Cameroun a ratifié en 1980 la Charte sur le développement sanitaire de l'enfant.

135.Pour assurer la survie et le développement de l'enfant, le Gouvernement a adopté et mis en œuvre depuis 1992, sa nouvelle politique de réorientation des soins de santé primaires (REOSSP) qui consiste à réorganiser les services de santé de manière à les rendre plus accessibles aux populations en général, et à la mère et à l'enfant en particulier, d'où la notion de district de santé qui est l'unité opérationnelle de la mise en œuvre de la REOSSP.

136.De plus, dans le cadre de la mise en œuvre de cette politique, le nouvel organigramme du Ministère de la santé publique de 1995 a mis en place à la Direction de la santé communautaire, une sous-direction de la santé familiale, spécialisée dans la prise en charge des problèmes de santé de la mère et de l'enfant. Cette sous‑direction comprend : le service de programme de survie de l'enfant et le service de la santé maternelle. De même, le service d'hygiène a été érigé en sous‑direction.

137.Les activités d'amélioration de la santé maternelle sont la santé reproductive et l'éducation nutritionnelle, les consultations prénatales, et les soins obstétricaux d'urgence.

138.La survie de l'enfant est soutenue par les quatre programmes prioritaires suivants : le Programme élargi de vaccination (PEV), le Programme national de promotion de l'allaitement maternel (PNPAM), le Programme de lutte contre les maladies diarrhéiques (PLMD) et, le Programme de lutte contre les infections aiguës (PLIA) dont le document de politique nationale est en cours de finalisation.

139.D'autres programmes concernant toute la population, mais impliquant aussi les enfants, existent; ce sont en particulier le Programme de lutte contre le paludisme (PLP), le Programme de lutte contre le sida coordonné par un comité national. Les autres activités œuvrant dans cette même perspective sont les consultations pré et postnatales, la généralisation de la supplémentation à la vitamine A et les activités d'information, éducation, communication (ICE). La mise en œuvre de la prise en charge intégrée des maladies des enfants (PCIME) qui devra regrouper tous ces programmes, ainsi que les autres problèmes de l'enfant sont en cours.

140.En outre, les mesures ci-après contribuent à améliorer la santé de la mère et de l'enfant. Il s'agit notamment de :

a)L'approbation d'une politique nationale de population (PNP);

b)La publication de documents de politique et standards de santé maternelle et infantile/planification familiale (SMI/PF);

c)L'intégration des contraceptifs dans la liste nationale des médicaments essentiels;

d)La mise sur pied d'un sous-comité ad hoc de coordination des activités des SMI/PF;

e)L'implication des ONG dans la mise en œuvre des activités des SMI/PF en collaboration avec le Ministère de la santé publique;

f)L'intégration depuis 1994 des activités des SMI/PF dans le paquet minimum d'activités à tous les niveaux;

g)La finalisation du document de politique de santé des adolescents;

h)Le consensus national sur les composantes de la santé de reproduction.

141.De façon plus concrète, les données statistiques figurant dans les sous‑sections suivantes permettent de se faire une idée plus précise de l'état de santé maternelle et infantile au Cameroun.

1. Indicateurs de mortalité

142.Les taux de mortalité materno‑infantile sont relativement élevés :

a)Probabilité de décès avant le cinquième anniversaire : 126/1 000;

b)Taux de mortalité par infections respiratoires aiguës chez les enfants de moins de 5 ans : 27 %;

c)Décès chez les enfants de 0 à 5 ans par les maladies diarrhéiques : 17,6 %;

d)Nombre de décès par rougeole chez les enfants de moins de 5 ans : 12,3 %;

e)Décès par paludisme chez les enfants de moins de 5 ans : 43 %;

f)Taux brut de mortalité : 13,7 %;

g)Taux de mortalité infantile : 81/1 000;

h)Taux de mortalité maternelle : 547 décès/100 000 naissances.

143.Ces chiffres laissent apparaître que la mortalité infantile et la mortalité maternelle sont relativement élevées au Cameroun. Pourtant des efforts considérables sont faits dans le sens du renforcement de l'encadrement prénatal et du suivi postnatal. À titre d'exemple, la proportion de l'accouchement en présence de personnel qualifié est de 55 % et celle des nourrissons suivis par un personnel qualifié est de 50 %.

2. Indicateurs de morbidité

144.L'indicateur de deux grandes maladies cibles du Programme élargi de vaccination a évolué comme suit :

Années

Antigènes

1993

1994

1995

1996

1997

TNN (tétanos néonatal)

345

285

95

-

-

Rougeole

14 171

6 712

5 535

-

7 210

a)Nombre de cas dus à une carence en iode : 18 % des enfants de 6 à 12 ans des provinces à risque;

b)Anémie chez les enfants de moins de 5 ans : 44,7 % des enfants de 6 à 59 mois;

c)taux de prévalence avitaminose A dans les provinces septentrionales : Xérophtalmie (3,1 %) ; cécité (1,2 %).

Tableau de 5 ans de couverture vaccinale

Années

Antigènes

1993

1994

1995

1996

1997

BCG

53 %

54 %

55 %

55 %

Diphtérie, tétanos et coqueluche 3

34 %

38 %

46 %

44 %

49 %

Polio 3

34 %

36 %

46 %

43 %

47 %

Rouvax

32 %

38 %

46 %

39 %

43 %

Vaccin antitétanique 2 et plus

9 %

10 %

12 %

35 %

32 %

Taux de complétude

66 %

71 %

70 %

77 %

75 %

Ces données statistiques sont calculées sur la base du pourcentage des rapports reçus qui correspond au taux de complétude.

145.Il faut dire que les Journées nationales de vaccination Polio 97 avec un résultat de 93 % et 102 % aux premier et deuxième passages respectivement, ont contribué à l'amélioration significative de cette couverture; ces journées qui constituent l'une des stratégies de l'éradication de la poliomyélite seront organisées jusqu'à l'an 2000 au moins. Dans le même sens, des campagnes antirougeole en zones urbaines sont prévues en 1999.

3. Politique sanitaire

146. La politique actuelle consiste à rapprocher les services à offrir à des populations. C'est l'esprit du décret No 95/013 du 17 février 1995 portant organisation des services de santé de base, qui consacre l'approche du district de santé. Ce dernier correspond à une agglomération d'environ 100 000 habitants comprenant : un service de santé de district (SSD); un hôpital de district (HD); des centres de santé intégrés (CSI); des structures de dialogue : comité de santé (COSA) et comité de gestion (COGE). Il est à noter que toutes ces structures doivent être opérationnelles. On dénombre environ 135 districts de santé répartis dans les dix provinces du pays : Adamaoua (5), Centre (22), Est (11), E xtrême-Nord (22), Littoral (15), Nord (12), Nord-Ouest (13), Ouest (16), Sud (6) et Sud-Ouest (13).

147.Dans cette nouvelle organisation du système de santé et afin de mieux responsabiliser les formations sanitaires, celles-ci ont été classées en six catégories :

a)Première catégorie : hôpitaux généraux, au nombre de 3, plus un centre hospitalier universitaire;

b) Deuxième catégorie : hôpitaux centraux, au nombre de 3 dont un hôpital d'un organe parapublic;

c)Troisième catégorie : hôpitaux provinciaux au nombre de 8;

d) Quatrième catégorie : hôpitaux de district;

e) Cinquième catégorie : centres médicaux d'arrondissement (structure intermédiaire entre les centres de santé intégrés et les hôpitaux de district);

f) Sixième catégorie : centres de santé intégrés (CSI).

4. Les ressources humaines, financières et matérielles

148. Les ressources humaines, financières et matérielles ne suivent pas toujours, face à des besoins sans cesse croissants. Avec un chiffre de 10 493 665 habitants en 1987 et un taux d'accroissement annuel de 2,9 %, on estime à 14 452 270 habitants, la population camerounaise en 1998.

Effectifs des personnels de santé

Catégorie

Effectifs en 1996

Nombre pour 1000 habitants

Médecins

1 007

0,74

Sages-femmes

69

0,05

Administrateurs de santé

21

0,01

Infirmiers (toutes catégories)

4 998

3,66

Pharmaciens

59

0,04

Chirurgiens‑Dentistes

59

0,04

Autres*

1 578

1,16

* Laborantins, techniciens du génie sanitaire, aides-anesthésistes, aides-pharmaciens, etc.

Source : MINSANTE 1996.

5. Appui aux efforts du Gouvernement

149.Le Cameroun bénéficie de l'appui des partenaires internationaux. À cet égard l'aide internationale reçue en pourcentage du total de dépenses publiques de santé s'élève à 66 % soit 12 797 millions de francs CFA en 1995/1996. De manière générale, on note une tendance à l'évolution de financement extérieur de 1993 à 1996, comme l'indique le tableau ci-après :

Année

93/94

94/95

95/96

Montant en millions

7 979

8 828

12 797

C'est ainsi que les organismes bilatéraux et multilatéraux, ainsi que les ONG locales, appuient sur le terrain les actions du Gouvernement en matière de santé de la mère et de l'enfant. Il va de soi qu'on ne saurait prétendre, comme le dit le slogan, à la "Santé pour tous en l'an 2000" si les populations aujourd'hui n'ont pas accès aux médicaments essentiels.

150.C'est dans ce sens que le système d'approvisionnement en médicaments essentiels a été réorganisé avec la mise en place de pharmacies communautaires dans les centres de santé intégrés et les hôpitaux publics, de centres provinciaux d'approvisionnement pharmaceutiques (CAPP) et du Centre national d'approvisionnement en médicaments essentiels (CENAME). Dans le souci de mettre à la disposition des populations des médicaments à moindre coût, la crise économique ayant considérablement amenuisé le pouvoir d'achat des citoyens, l'État a adopté la loi No 90/062 du 19 décembre 1990 accordant une dérogation spéciale en matière financière aux formations sanitaires pour la vente des médicaments essentiels et l'utilisation de fonds générés pour le réapprovisionnement.

151.La pharmacopée traditionnelle fait l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics dans le cadre de la santé communautaire. Pour la promouvoir, il existe un Institut de recherches médicales des plantes médicinales (IMPM). La médecine traditionnelle est encouragée et les tradipraticiens collaborent avec les autorités sanitaires locales dans la prise en charge des patients. Un projet de loi est en cours d'élaboration au sein du bureau de la médecine traditionnelle qui se trouve au sein de la Direction de la santé communautaire.

6. Le Programme national de lutte contre le sida

a)Stratégie de lutte

152.La lutte contre le sida repose sur quatre grandes activités : la prévention, la prise en charge des malades, la surveillance épidémiologique et la recherche.

i)La prévention

153.La prévention est le principal élément de la stratégie de lutte. La composante essentielle est l'information‑éducation‑communication (IEC) qui consiste à sensibiliser la population en général et les groupes à risque en particulier sur les domaines suivants :

-La connaissance des modes de transmission;

-Les moyens de prévention, basés sur les comportements sexuels responsables et l'utilisation de matériel médical à usage unique ou stérile;

-La sécurité transfusionnelle qui consiste à réduire au minimum les transfusions sanguines et à ne les prescrire que dans les cas indiqués, après un test préalable du sang à transfuser. À cet effet un réseau de laboratoires équipés en matériels de sérologie HIV couvrira tous les districts de santé. Un guide de la transfusion sanguine a été élaboré.

ii)La prise en charge

154.La prise en charge effective vise les malades, les séropositifs, les orphelins et les parents.

Les malades

155.Il existe un traitement spécifique qui n'est pas accessible à la grande majorité de la population camerounaise. Ce traitement devrait être la trithérapie ou au moins la bithérapie. L'accessibilité de cette trithérapie va sûrement s'améliorer à la faveur de la collaboration effective entre le Ministère de la santé publique, les organismes et les ONG qui sont engagés dans cette voie. La prise en charge des malades en milieu hospitalier concerne le traitement des infections opportunistes. En outre, il est conseillé aux malades d'éviter les rapports sexuels non protégés pour ne pas augmenter la charge virale.

Les séropositifs

156.Les activités de conseils les amènent à vivre positivement avec leur infection en adoptant des comportements sexuels responsables et un suivi médical strict et régulier.

Les orphelins

157.Le personnel du programme, en collaboration avec certaines ONG, rend visite aux enfants orphelins et leur dispense des soins appropriés. Par ailleurs, il existe une ONG qui les récupère et les prend entièrement en charge.

Les parents

158.Les activités de conseils leur permettent de mieux connaître la maladie, de mieux soutenir le malade et de l'aider au mieux de leurs possibilités.

iii)La surveillance épidémiologique

159.En dehors de la surveillance épidémiologique systématique, la surveillance sentinelle reste la principale source d'informations. Différentes enquêtes et études permettent d'avoir des informations ponctuelles sur la pandémie. La surveillance sentinelle a pour population cible les femmes enceintes.

iv)la recherche

160.Cette dernière composante de la lutte contre la pandémie est axée sur les formes virales, le vaccin, le traitement en collaboration avec les tradipraticiens.

161.L'exposition grandissante de certains groupes socioprofessionnels à la maladie a permis de définir quatre grands groupes à risque au Cameroun : les prostituées, le groupe des militaires, policiers et assimilés, les camionneurs et les prisonniers.

162.Afin d'assurer une prise en charge globale des communautés dans le cadre du programme, la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles (MST) et le sida fait partie des composantes du paquet minimum d'activités des formations sanitaires. La composante IEC accorde aussi une place importante à cette lutte.

163.Dans le cas d'une femme enceinte séropositive suivie dans une formation sanitaire, les principes suivants sont établis : a) pratiquer la contraception, b) suivre les consultations prénatales régulières jusqu'à terme en cas de grossesse et assurer les consultations post-natales strictes et c) à la naissance, l'enfant sera suivi régulièrement, avec une prise en charge globale et des tests successifs.

164.Dans certains cas rares, on a remarqué une négativation de la séropositivité due à une séroconversion spontanée et naturelle.

b)Situation de la pandémie au Cameroun

i)La population générale

165. La séropositivité au sein de la population générale connaît un taux de prévalence de 5,5M. C'est le résultat de la surveillance sentinelle chez les femmes enceintes, réalisée par le Projet MOSCAP dans le cadre de ses activités; cette prévalence était de 1 % dans les années 90. Avec l'arrêt des activités du projet suscité, il est pratiquement impossible de faire une nouvelle évaluation de la situation, la dernière datant de l'année 1995. Des enquêtes sont actuellement mises en oeuvre par l'Institut de formation et de recherches démographiques (IFORD) qui estimera la nouvelle situation.

ii)Les groupes à risque

166.À Yaoundé le taux de prévalence était de 25 % en 1992 et de 15 % en 1995. À Douala, il était de 45 % en 1992. Chez les camionneurs il était de 15 % en 1994. Chez les prisonniers il était de 16 % en 1994. En 1995, 2 766 cas de sida ont été déclarés chez les enfants. Les taux de prévalence étaient les suivants : 3,5 % chez les enfants de 0 à 4 ans, 3,1 % chez les enfants de 5 à 14 ans, et 18,6 % dans le groupe d'âge 15‑24 ans.

c)La lutte contre les maladies sexuellement transmissibles (MST)

167.Cette lutte comprend quatre grands axes : a) consulter dans une formation sanitaire dès les premiers signes, b) éviter l'automédication, c) utiliser des algorithmes permettant au personnel de prendre facilement en charge un cas de MST, et d) promouvoir à travers l'IEC l'adoption de comportements sexuels responsables.

168.Jusqu'en 1997, le Programme national de lutte contre le sida a fonctionné exclusivement avec des financements extérieurs. Dès l'année budgétaire 1998/1999, le plan d'action quinquennal budgétisé est mis en oeuvre avec un financement du budget de l'État ajouté aux interventions des bailleurs de fonds.

C. Sécurité sociale et services et établissements de garde d'enfants (art. 26 et 18 , par. 3)

169.Aux termes de l'article 26 de la Convention, l'enfant a le droit de bénéficier de la sécurité sociale, y compris les assurances sociales. Au Cameroun, la sécurité sociale est gérée par :

a)La Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS) en ce qui concerne les travailleurs régis par le Code du travail; il s'agit des travailleurs des entreprises privées et parapubliques, ainsi que le personnel non fonctionnaire de l'État;

b)Les Ministères de la fonction publique, de l'économie et des finances, ainsi que tous les départements ministériels concernés, pour les fonctionnaires et les agents décisionnaires, à l'exclusion de la catégorie du personnel qui relève du Code du travail.

Il apparaît donc que le droit aux prestations en matière de sécurité sociale est ouvert à titre principal aux travailleurs salariés, et à titre accessoire à leurs enfants ou à ceux qui sont régulièrement pris en charge par eux.

1. Le cadre normatif

170.Plusieurs textes législatifs et réglementaires régissent la sécurité sociale parmi lesquels :

a)Les lois No 67/LF/7 du 12 juin 1967 instituant un code de prestations familiales et No 84/007 du 4 juillet 1984 modifiant la loi No 69/LF/18 du 10 novembre 1969 instituant un régime d'assurance de pension de vieillesse, d'invalidité et de décès;

b)Le décret No 94/199 du 7 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'État en son article 31, et ses textes d'application.

Il en résulte la coexistence de deux régimes de sécurité sociale qui déterminent, chacun, la nature des prestations sociales servies. Certaines de ces prestations sont accordées aux enfants à travers leurs parents ou tuteurs.

a)Le régime de sécurité sociale gérée par la Caisse nationale de prévoyance sociale

171.Plusieurs prestations sont versées pour garantir le bien‑être de l'enfant. Elles sont exposées ci‑dessous.

i)Aide à la mère et aux nourrissons

172.L'aide à la mère et aux nourrissons prend la forme d'allocations prénatales, d'allocations de maternité, de prestations de frais médicaux de grossesse, de maternité et éventuellement des prestations en nature :

a)L'allocation prénatale est servie à toute femme salariée ou conjointe d'un travailleur salarié régulièrement déclarée à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), et à l'occasion de chaque grossesse; le paiement se fait en deux tranches, chaque fraction correspondant à quatre mois et demi des allocations familiales versées pour un enfant;

b)À l'issue de la grossesse, l'allocation de maternité est due en cas de naissance d'un enfant viable et déclaré à l'état civil; elle est payable une seule fois et correspond à 12 fois le taux mensuel des allocations familiales versées pour un enfant;

c)Les frais médicaux engagés à l'occasion des examens prénataux de l'accouchement et de la consultation du nourrisson à 6 mois sont remboursés en partie par la CNPS.

ii)Indemnité de congé de maternité

173.L'indemnité journalière de congé de maternité est servie par la CNPS à toute femme salariée ou conjointe d'un travailleur salarié en état de grossesse; elle est égale à la totalité du salaire journalier perçu au moment de la suspension du contrat de travail pour cause de grossesse.

iii)Allocation familiale

174.L'allocation familiale est versée à l'allocataire (parent ou tuteur) qui a des enfants à charge. L'enfant à charge est celui pour lequel on assure de façon effective et permanente le logement, la nourriture, l'éducation et l'entretien. Cet enfant peut être légitime, légitimé, reconnu, adoptif ou né de l'épouse d'un allocataire lors d'un précédent mariage. Le taux des allocations familiales est fixé à 1 800 francs CFA par mois et par enfant. Ces allocations sont payées à trimestre échu.

175.Par‑delà ces diverses allocations familiales, des types d'aide ou d'assistance sont apportés aux parents dans l'exercice de leurs responsabilités d'éducation des enfants par le biais de l'action sanitaire et sociale. À cet effet, la CNPS crée et gère des oeuvres sanitaires, des œuvres sociales, attribue des subventions et des prêts à des institutions, établissements ou oeuvres d'intérêt sanitaire et social pour les familles des assurés.

Les oeuvres sanitaires

176.Il s'agit des centres de protection materno‑infantile et des centres médico-sociaux. Dans le cadre de la médecine préventive, ils assurent les consultations prénatales, les pesées hebdomadaires des nourrissons de 0 à 2 ans, les vaccinations sanitaires et les démonstrations diététiques. Dans le cadre de la médecine curative, ils pratiquent des consultations et dispensent des soins aux malades qui sont essentiellement les enfants, les femmes enceintes et les victimes d'accidents du travail et des maladies professionnelles.

177.Les prestations dispensées par les centres de PMI sont gratuites. Les centres médico‑sociaux, en plus des activités des PMI, font des consultations et donnent toutes sortes de soins aux malades externes, hospitalisent les malades adultes et enfants, et mènent des activités liées à l'assistance morale et maternelle des usagers. À cet effet, ils disposent chacun :d'un service de pédiatrie, d'un service de médecine générale, d'une maternité, d'un centre de chirurgie, d'un service de radiologie, d'un laboratoire et d'une pharmacie, d'une antenne de service social. Les prestations dispensées par ces centres sont payantes, mais les frais sont nettement plus bas que ceux pratiqués par les formations privées.

178.Il existe aujourd'hui 3 centres médico-sociaux à Yaoundé (120 lits), à Maroua (50 lits) et à Garoua (60 lits) et 4 centres de protection maternelle (PMI) à Douala, Bafoussam, Bamenda et Bertoua.

Les oeuvres sociales

179.Elles comprennent les centres sociaux, les sections et secteurs sociaux, et les centres ménagers :

a)Les centres sociaux mènent diverses activités dans les domaines de la protection materno-infantile et de l'assistance. C'est ainsi que dans le domaine de l'éducation familiale, ils dispensent aux jeunes mères de famille des cours de gestion du budget familial, de couture, de broderie, de tricotage et de cuisine. Quant aux activités liées à la prévention et à l'assistance psychologique et matérielle, les centres sociaux aident, dans la mesure du possible, les usagers à résoudre certains de leurs problèmes, notamment les conflits conjugaux et les constitutions de dossiers de prestations. Aujourd'hui, sur les 282 centres sociaux prévus à travers le pays, 146 sont fonctionnels;

b)Les sections sociales sont des antennes des centres sociaux créées auprès des services de la CNPS. Elles mènent des actions liées à l'assistance morale, psychologique et matérielle des usagers. Le tableau en annexe 1 signale 56 sections sociales;

c)Les secteurs sociaux sont créés en principe à raison d'un secteur social par arrondissement. Pour l'instant un seul secteur existe dans la ville de Douala;

d)Quant au Centre ménager, il dispense un enseignement théorique et pratique en puériculture, secourisme, éducation sanitaire, couture, cuisine, etc. Il est ouvert sans aucune discrimination aux jeunes filles ayant au moins suivi le cycle complet de l'enseignement primaire.

iv)Allocation de survivant

180.La pension ou allocation de survivant est servie aux descendants d'un travailleur salarié décédé, même lorsque le de cujus bénéficiait déjà de sa pension de vieillesse.

b)Le régime de la sécurité sociale dans la fonction publique

181.En ce qui concerne les enfants, les prestations servies sont :

a)Les prestations familiales octroyées aux parents pour chacun de leurs enfants en âge scolaire; ces prestations sont constituées de l'allocation mensuelle par enfant; du supplément familial de traitement et de l'allocation de naissance; pour les fonctionnaires et assimilés, ces prestations sont servies en même temps que les salaires;

b)Le remboursement d'une partie des frais occasionnés par les soins médicaux, pharmaceutiques, d'évacuation sanitaire hors du Cameroun, d'hospitalisation, de rééducation fonctionnelle et d'appareillage des enfants du personnel de l'État;

c)La pension ou l'allocation de survivant servie mensuellement aux descendants du fonctionnaire ou assimilé décédé.

2. Modalités d'octroi des prestations

182.Dans l'ensemble, les procédures diffèrent selon les régimes et à l'intérieur de chaque régime selon la nature des prestations :

a)À la CNPS, la prestation n'est sollicitée et n'est servie que lorsque le parent de l'enfant est un travailleur salarié immatriculé à la CNPS; la CNPS dispose de ses propres guichets de paiement;

b)Dans la fonction publique, les actes concédant les différentes prestations sont constatés par les diverses autorités compétentes, liquidés par le Ministère de l'économie et des finances et payés par ses services du Trésor; il n'existe pas de compte "gestion de la sécurité sociale" au Trésor public;

c)Dans les deux régimes, les prestations familiales et les pensions de survivant sont régulièrement servies, toutes les autres n'étant possibles qu'à partir de la survenance d'un événement; par ailleurs, les prestations ne sont pas servies directement aux enfants, mais à leurs représentants.

3. Financement de la sécurité sociale

183.Dans la fonction publique, les charges en matière de sécurité sociale sont réglées par le budget de l'État au titre des dépenses obligatoires; les cotisations sont inscrites en recettes. Au niveau de la CNPS, la sécurité sociale est financée conjointement par les cotisations des employeurs et des travailleurs; elle est fondée sur le système de la répartition.

4. Problèmes

184.Les problèmes sont les suivants :

a)Lourdeur de procédures;

b)Faiblesses structurelles et organisationnelles;

c)Complexité du système;

d)Disparités entre les deux régimes;

e)Absence d'informatisation des prestations;

f)Banque de données irrégulièrement fournie;

g)Arriérés de cotisations dus aux difficultés économiques rencontrées par les entreprises privées et par l'État en ce qui concerne le personnel relevant du Code du travail;

h)Cumul des arriérés de prestations dus aux allocataires de la CNPS du fait des arriérés de cotisations et de la baisse des ressources de financement d'une part, et d'autre part de la contraction de l'emploi salarié;

i)Restriction des bénéficiaires de la sécurité sociale : les enfants des travailleurs non salariés, les travailleurs du secteur informel, les agriculteurs indépendants et les chômeurs sont exclus;

j)Modicité des prestations qui demeurent purement symboliques;

k)Champ d'application de la sécurité sociale limité : les branches de l'assurance maladie et de l'assurance chômage ne sont pas couvertes;

l)Effets néfastes de la crise économique.

5. Perspectives

185.Une réflexion est en cours sur la réhabilitation de la CNPS et la réforme de la sécurité sociale au Cameroun.

6. Structures ou services d'appui pour assurer la garde des enfants

186.Selon l'article 18, paragraphe 3 de la Convention, les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour assurer aux enfants dont les parents travaillent le droit de bénéficier des services et établissements de garde d'enfants pour lesquels ils remplissent les conditions requises. Sur le plan juridique, le droit pour les parents qui travaillent de bénéficier desdits services n'est encore consacré par aucun texte. Sur le plan économique et social, l'ouverture et la gestion des crèches impliquent des investissements qui ne sont pas toujours à la portée des entreprises ni de l'État. Les tarifs des services ne sont pas également à la portée des travailleurs, lesquels préfèrent les domestiques. Dans l'ensemble, la politique du Gouvernement en matière de création des crèches est fondée sur le principe selon lequel l'enfant est une richesse à promouvoir; elle se propose de donner à chaque enfant qui naît l'encadrement affectif et psychologique nécessaire à son développement et à son épanouissement harmonieux. Des programmes sont mis en place et visent une adéquation rendement professionnel et encadrement des enfants. À cet effet, un programme dénommé "Point Ami des Mères Allaitantes" est développé par une ONG, en collaboration avec le Ministère de la santé et le Ministère des affaires sociales.

D. Niveau de vie (art. 27, par. 1 à 3)

187.La Convention relative aux droits de l'enfant en son article 27 stipule que tout enfant a le droit à un niveau de vie suffisant pour permettre son développement physique, mental, spirituel, moral et social. C'est aux parents qu'incombe la responsabilité primordiale de lui assurer ce niveau de vie. L'État a le devoir de faire en sorte que cette responsabilité puisse être - et soit - assumée. La responsabilité de l'État peut inclure une aide matérielle aux parents et à leurs enfants. Au regard de cette disposition, deux principaux acteurs doivent concourir pour garantir à l'enfant un niveau de vie suffisant, les parents et l'État.

1. Responsabilité des parents

188.Les articles 180, 282 et 358 du Code pénal font obligation aux parents d'assurer un niveau de vie décent à leurs enfants.

Article 180 : pension alimentaire

"1)Est puni d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de 20 000 à 400 000 francs CFA ou de l'une de ces deux peines seulement celui qui est demeuré plus de deux mois sans fournir la totalité de la pension qu'il a été condamné à verser à son conjoint, à ses ascendants ou à ses descendants.

2)Le défaut de paiement est présumé volontaire sauf preuve contraire, mais l'insolvabilité qui résulte de l'inconduite habituelle notamment de l'ivrognerie, n'est en aucun cas un motif d'excuse valable pour le débiteur."

Article 282 : délaissement d'incapable

"1)Est puni d'un emprisonnement d'un à trois ans et d'une amende de 5 000 à 25 000 francs CFA, celui qui déplace pour l'abandonner une personne incapable de se protéger en raison de son état physique ou mental.

2)La peine d'emprisonnement est de 5 à 10 ans si la victime est abandonnée dans un lieu solitaire.

3)La peine est un emprisonnement de 10 à 20 ans lorsque le coupable est un ascendant ou toute autre personne ayant autorité sur l'incapable ou en ayant la garde légale ou de fait.

4)Dans tous les cas la juridiction peut prononcer les déchéances de l'article 30 du présent code ainsi que la déchéance de la puissance paternelle et pour la même durée."

Article 358 : abandon de foyer

"1) Est puni d'un emprisonnement de trois mois à un an ou d'une amende de 5 000 à 500 000 francs CFA le conjoint, le père ou la mère de famille qui, sans motif légitime, se soustrait, en abandonnant le foyer familial ou par tout moyen, à tout ou partie de ses obligations morales ou matérielles à l'égard de son conjoint ou de son ou ses enfants.

2) La juridiction peut prononcer les déchéances de l'article 30 du présent code et priver le condamné de toute tutelle ou curatelle pendant la durée prévue à l'article 31 4) du présent code et le priver de la puissance paternelle pendant la même durée à l'égard de l'un ou de plusieurs de ses enfants."

2. Responsabilité des pouvoirs publics

189.Quant aux mesures appropriées prises par le Gouvernement, elles sont assez variées; nous pouvons citer entre autres :

a)Le décret No 82/412 du 9 septembre 1982 fixant les modalités d'octroi des secours de l'État aux indigents et nécessiteux;

b)La lettre circulaire No 80/I/658/MINEDUC/CTD du 18 janvier 1980 sur l'admission des enfants handicapés ou nés de parents handicapés dans les établissements publics et parapublics;

c)La lettre circulaire No 90/02800/LC/MINASCOF/SG/DRS du 10 décembre 1990 sur l'octroi des aides aux nécessiteux et personnes handicapées;

d)La loi No 67/LF/7 du 12 juin 1967 instituant un code de prestations familiales.

190.De même, dans le souci de l'amélioration du cadre de vie de sa population au niveau de l'habitat, le Cameroun s'est doté de plusieurs structures :

a)La cellule d'urbanisme au sein du Ministère de l'urbanisme et de l'habitat en vue de planifier le développement urbain;

b)La Mission d'aménagement et d'équipement des terrains urbains et ruraux (MAETUR), créée par décret No 77/193, modifié et complété dans ses articles 1er, 2, 3, 11 et 13 par décret No 82/599 du 25 novembre 1982;

c)Le Crédit foncier du Cameroun, destiné à financer l'habitat, créé par décret No 77/140 du 13 mai 1977;

d)La Société immobilière du Cameroun (SIC), réorganisée en vue d'une meilleure production de logement au Camerounais.

191.S'agissant des mesures relatives au niveau de vie de l'enfant, elles seront appréhendées principalement à travers les indicateurs liés à son environnement; les données qui suivent sont tirées du deuxième recensement général de la population et de l'habitat (RGPH) et de l'enquête camerounaise auprès des ménages (ECAM) :

Population totale (en milliers) RGPH, projection pour 1997

Ensemble

14 174

Masculin

6 986

Féminin

7 188

Population urbaine

6 633

Population rurale

7 441

Population de 6 à 4 ans (en milliers) RGPH, projection pour 1997

Ensemble

3 477

Masculin

1 748

Féminin

236

Population de 65 ans et plus (en milliers) RGPH, projection pour 1997

Ensemble

439

Masculin

203

Féminin

1 729

Taux d'accroissement démographique : 2,9 RGPH, 1997

Logement (ECAM)

Taille moyenne des ménages

5,9 personnes

Logements avec des murs en terre ou en briques

de terre non cuites

51,8 %

Logements avec murs en parpaings, béton,

pierre de taille en briques cuites

16,7 %

Propriétaires de logement

71,5 %

Locataires

20,3 %

Logés par l'employeur ou gratuitement

8,2 %

Mode d'éclairage (ECAM)

Électricité

37 % 

Pétrole

54,4 %

Autre mode

8,6 %

Mode d'approvisionnement en eau (ECAM)

Approvisionnement à partir des branchements d'eau

de la Société nationale de distribution d'eau

31,3 %

Approvisionnement des sources, rivières ou puits

55,8 %

Autres modes

12,9 %

Inégalités des revenus et pauvreté (ECAM)

Ménages en dessous du seuil de pauvreté

38,4 %

Ménages intermédiaires

33 %

Ménages non pauvres

28,6 %

Il ressort de l'examen de ces différents indicateurs que le niveau de vie de l'enfant mérite une attention de la part des pouvoirs publics. Étant donné son indexation à celui des parents, toute amélioration de ce niveau de vie passe nécessairement par le relèvement de celui des parents.

VII. ÉDUCATION, LOISIRS, ACTIVITÉS RÉCRÉATIVES ET CULTURELLES

A. Éducation, formation et orientation professionnelle (art. 28 et 29 )

192.L'article 29 de la Convention relative aux droits de l'enfant dispose en substance que l'éducation de l'enfant doit viser à favoriser l'épanouissement de l'enfant sur les plans physique, intellectuel, moral et culturel ainsi que le développement de sa personnalité et le sens de responsabilité, et à inculquer à l'enfant le sens du respect de l'autre et les vertus de paix, de tolérance et d'égalité des sexes. Par ailleurs, afin de rendre cette éducation accessible à tous, l'article 28-a de la Convention dispose de façon péremptoire que les États parties s'engagent à rendre l'enseignement primaire "obligatoire et gratuit pour tous". Le Cameroun ne semble pas s'éloigner de ces prescriptions, attachés que sont les pouvoirs publics à promouvoir l'éducation de base à tous. Aussi le préambule de la Constitution affirme-t-il que "l'État assure à l'enfant le droit à l'instruction. L'enseignement primaire est obligatoire". En outre, poursuit le préambule, l'État garantit à tous les citoyens de l'un et l'autre sexe la jouissance de ce droit à l'instruction. Dans le même sens, la loi No 63/COR/5 du 3 juillet 1963 et le texte sur la "West Cameroon Education Policy" reconnaissent le droit de tout citoyen à l'éducation et à l'instruction sans discrimination.

193.Au Cameroun, la philosophie de l'éducation vise entre autres objectifs :

a)L'éducation de masse et de qualité : cette démocratisation de l'éducation consiste à favoriser l'accès d'un plus grand nombre à l'éducation tout en préservant la qualité de la formation;

b)L'épanouissement de l'enfant sur les plans physique, moral, intellectuel et culturel;

c)L'intégration nationale; et

d)La promotion du bilinguisme conformément aux dispositions de l'article 1er, alinéa 3 de la Constitution de la République, à travers l'enseignement de l'anglais et du français dès l'école primaire.

Dans le même sens, la loi No 98/004 du 14 avril 1998 portant orientation de l'éducation au Cameroun stipule :

"Article 6 : l'État assure à l'enfant le droit à l'éducation.

Article 7 : l'État garantit à tous l'égalité de chance d'accès à l'éducation sans discrimination de sexe, d'opinion politique, philosophique et religieuse, d'origine sociale, culturelle, linguistique ou géographique.

Article 9 : l'enseignement primaire est obligatoire."

194.Pour atteindre les objectifs susvisés, un ensemble de mesures ont été prises par les pouvoirs publics parmi lesquelles on peut citer les quatre plus importantes.

1. L'amélioration de l'offre d'éducation

195.Au niveau de l'enseignement primaire et maternel, 2 304 écoles ont été créées entre 1990 et 1998 (cf. tableau 1*) contre 184 écoles privées, ce qui a permis d'accueillir en 1996/1997 1 966 950 élèves pour le cycle primaire et 87 318 élèves pour le cycle maternel, répartis selon les tableaux 2 et 3*. Durant la même année, la population scolaire scolarisable (enfants âgés de 5 à 14 ans) était de 3 444 740. D'où une demande sociale d'éducation non satisfaite se chiffrant à 1 477 790. S'agissant des enseignements postprimaire, secondaire général et technique, 314 collèges d'enseignement général et technique, ainsi que 240 SAR/SM et 254 lycées d'enseignement général et technique assuraient l'encadrement de 558 424 élèves répartis conformément aux tableaux 2 à 9* en 1996-1997.

2. L'amélioration de la qualité

196.Celle-ci passe par la formation initiale assurée aux jeunes des deux sexes. Elle est assurée par l'École normale supérieure (ENS) et l'École normale supérieure de l'enseignement technique (ENSET) pour les professeurs des collèges et lycées d'enseignement général et technique. Les instituteurs de l'enseignement général et technique sont formés par les écoles normales des instituteurs de l'enseignement général et de l'enseignement technique. Ainsi, près de 8 000 professeurs ont été formés et recrutés par l'État, tandis que près de 8 703 instituteurs ont aussi été formés et recrutés.

197.En 1996/1997 par exemple, sur 5 339 élèves–maîtres en formation, les filles représentaient 48 % de ces effectifs, soit 2 563 (tableau 7*). Au niveau de l'enseignement secondaire général, sur 907 élèves-professeurs de lycées sortis de l'ENS en 1998, les filles représentent 37,8 % de l'effectif. Toutefois, force est de constater qu'on retrouve surtout celles-ci dans les filières littéraires.

198.La formation continue est assurée aux enseignants en activité : elle se matérialise par l'organisation de journées pédagogiques, de séminaires qui s'adressent aussi au personnel d'encadrement (directeurs et directeurs d'écoles primaires et maternelles; directeurs de collèges d'enseignement secondaire; proviseurs de lycées…). Ces mécanismes permettent de disposer d'enseignants en nombre suffisant et de relever leur niveau de compétence.

3. La garantie de l'équité

199.Pour réduire l'écart qu'il y a entre le taux de scolarisation des filles et celui des garçons d'une part et les disparités dans la répartition géographique des effectifs d'autre part (cf. tableau 8*), le Gouvernement, avec l'appui des bailleurs de fonds, a entrepris des réformes et mis sur pied des stratégies visant à améliorer le taux d'accès dans les provinces sous-scolarisées en général et à assurer la rétention des filles à l'école. En outre, une politique incitative et un plaidoyer social sont développés en vue d'attirer plus de filles dans les filières scientifiques. Plus de 2 millions d'adultes de 15 ans et plus sont analphabètes, le taux le plus élevé se trouvant chez les femmes. Aussi le Gouvernement met-il en place des programmes d'alphabétisation et d'éducation afin de réduire le nombre d'analphabètes.

4. Le financement de l'éducation

200.En dépit de la cries économique qui a sévèrement frappé le pays et entraîné la réduction du volume de l'enveloppe budgétaire allouée aux différents secteurs économiques, la part consacrée à l'éducation est restée relativement importante (cf. tableau 10*). Toutefois, des mesures visant à la mise en application de l'initiative 20/20 sont en train d'être prises par le Gouvernement. En application du cadre et du plan d'action adoptés à la Conférence de l'UNESCO de Jomtien, des réformes visant à la recherche de nouvelles opportunités de financement de l'éducation, ainsi qu'une meilleure gestion des ressources collectées sont en cours.

201.Au niveau de la mobilisation des ressources financières et matérielles, nous pouvons citer les contributions suivantes :

a)Les parents d'élèves, à travers la contribution exigible, dont 80 % servent au fonctionnement des établissements;

b)Les collectivités locales décentralisées (communes), à travers des programmes de construction et d'équipement des établissements scolaires et de "nivaquinisation" des élèves;

c)Les associations des parents d'élèves dont l'apport est appréciable dans l'équipement des établissements scolaires et leur fonctionnement;

d)Les ONG, dans la construction, l'équipement et l'amélioration de l'environnement scolaire;

e)Les promoteurs privés.

Cette mobilisation des ressources a pour effet d'améliorer la carte scolaire et le fonctionnement des établissements scolaires et, partant, d'améliorer la qualité de l'éducation offerte et le taux d'accès dans l'optique de "l'éducation pour tous" et de "l'éducation tout au long de la vie".

202.Parmi les stratégies globales de promotion du plan d'action de Jomtien, il y a lieu de relever le développement de l'approche "moindre coût" qui vise à l'amélioration du rapport coût‑bénéfice/coût-efficacité dans l'acquisition et l'utilisation des biens et services destinés à l'éducation.

203.Il faut relever que la mise en œuvre de toute cette politique d 'éducation de masse et de qualité se heurte malheureusement à des obstacles divers au rang desquels la récession économique, le fardeau de la dette extérieure, la dévaluation du franc CFA, le poids des traditions, la poussée démographique et la forte concentration dans les grandes villes.

B. Loisirs et activités culturelles (art. 31)

204.Pour promouvoir le droit de l'enfant aux loisirs et activités récréatives et culturelles, le Cameroun a pris un ensemble de mesures d'ordre législatif, administratif et institutionnel.

205.Au plan législatif et réglementaire, de nombreux textes existent. Citons notamment :

a)La loi No 74/22 du 5 décembre 1974 sur les équipements sportifs et socioéducatifs;

b)La loi 96/09 du 5 août 1996 fixant la Charte des activités physiques sportives;

c)Le décret No 69/DF/302 du 8 août 1969 modifiant le décret No 67/DF/503 du 2 novembre 1967 sur la réorganisation des mouvements de jeunesse et de l'éducation populaire;

d)Le décret No 96/CAB/MINJES du 12 mars 1006 fixant l'organisation du Ministère de la jeunesse et des sports;

e)Le décret No 91/255 du 30 mai 1991 organisant l'Institut national de la jeunesse et des sports;

f)L'arrêté No 002/C/JS/EP du 15 février 1977 portant réglementation de l'organisation et du fonctionnement des œuvres de vacances;

g)L'instruction ministérielle No 001/IM/MJS du 18 janvier 1979 instituant les équipes mobiles d'animation;

h)L'instruction ministérielle No 001/IM/MJS/DJA/MINJES du 23 janvier 1990 portant administration et gestion des centres de jeunesse et d'animation.

206.S'agissant des mesures administratives et institutionnelles allant dans le sens de la promotion des loisirs et activités culturelles, le décret No 96/CAB/MINJES du 12 mars 1996 portant organisation du Ministère de la jeunesse et des sports a prévu une Direction de la jeunesse et de l'animation, avec une Sous‑Direction des activités socioéducatives composée de deux services chargés de la promotion des activités socioculturelles et éducatives. Au niveau des services extérieurs, des services provinciaux et départementaux, des activités de jeunesse et animation et des activités physiques et sportives ont été créés pour promouvoir le développement des activités sportives et socioculturelles au niveau scolaire. Cela se traduit entre autres par la création des services et divisions des activités sportives et culturelles au niveau de l'enseignement supérieur et des associations sportives et culturelles dans le secondaire.

207.Hormis le décret sus‑cité, le décret No 98/003 du 8 janvier 1998 portant organisation du Ministère de la culture prévoit une direction de la promotion des arts et des industries culturelles chargée de développer et promouvoir la création et la production dans le domaine des arts et de la culture et de définir la mise en œuvre des stratégies de promotion de la lecture, des arts et des industries culturelles.

208.En outre, certaines activités sont menées afin d'assurer l'encadrement des jeunes pendant les vacances. Parmi celles‑ci il y a les colonies de vacances, qui regroupent les jeunes de 8 à 12 ans, les camps et chantiers de vacances et l'initiative baptisée "INJS ‑ Sports Loisirs‑Vacances" pour la promotion des activités de loisirs et socioculturelles.

209.Diverses structures existent aussi pour favoriser l'encadrement des jeunes dans les loisirs et activités sportives, socioculturelles et artistiques. Elles sont les unes publiques, les autres privées. On peut citer :

a)L'Institut national de la jeunesse et des sports, chargé de former les cadres supérieurs de la jeunesse et des sports;

b)Les centres nationaux de la jeunesse et des sports, pour la formation des cadres moyens de la jeunesse et des sports; ils sont au nombre de trois : Dschang, Garoua et Kribi;

c)Les centres de jeunesse et d'animation, établissements d'éducation non formelle qui offrent aux adhérents les possibilités de développer leur sens de créativité et d'entreprise pour une meilleure insertion socioprofessionnelle; ils sont destinés aux jeunes rejetés du système formel d'éducation âgés de 12 ans au moins; il existe environ 317 centres dont 11 provinciaux, 56 départementaux et 251 centres d'arrondissement;

d)Les équipes mobiles d'animation urbaine, créées dans les chefs‑lieux de circonscriptions administratives; elles s'occupent de l'initiation des jeunes et adultes aux activités de développement intégré;

e)L'Institut artistique de Mbalmayo.

210.À côté de ces structures étatiques, des initiatives privées viennent appuyer l'action des pouvoirs publics. À cet égard on peut citer notamment :

a)Les mouvements et associations de jeunesse. Ce sont des organisations relevant des confessions religieuses qui œuvrent pour la formation morale, spirituelle et civique de leurs adhérents tout en promouvant des activités de loisirs et culturelles; il en existe environ 405 agrées;

b)Les centres privés de loisirs et de rééducation qui développent des activités de loisirs et d'éducation socioculturelle; ils offrent également à leurs adhérents une formation technique appropriée pour leur insertion dans les circuits de production. À titre d'exemple, on peut citer le Centre René‑Durand de Mbalmayo, le Centre Jean‑Bosco de Yaoundé et le quartier général des Guides;

c)Le projet de mobilisation des jeunes par des activités sportives (MOJAS), créé dans le cadre de la coopération entre la Mission française de coopération et les communautés urbaines de Yaoundé et de Douala; ce projet vise l'encadrement des jeunes par les activités sportives, pour une meilleure insertion sociale et économique. C'est ainsi qu'en dehors des championnats de vacances qui sont organisés à l'intention des jeunes, ces derniers se regroupent en coopératives où on les initie à la fabrication des matériels sportifs.

VIII. MESURES SPÉCIALES DE PROTECTION DE L'ENFANCE

A. Enfants en situation d'urgence

211.Aux termes de l'article 38 de la Convention relative aux droits de l'enfant, les États parties s'engagent à respecter et à faire respecter les règles du droit international humanitaire en cas de conflit armé. Ils prennent toutes les mesures possibles pour veiller à ce que les personnes n'ayant pas atteint l'âge de 15 ans ne participent pas directement aux hostilités.

212.Il faut dire que le Cameroun a ratifié les Conventions de Genève du 12 août 1949 et les protocoles additionnels de 1977 et, d'après la réglementation en vigueur, aucun enfant de moins de 18 ans ne peut être recruté dans les forces de défense nationale (armée, gendarmerie et police). Pour y faire écho, le Cameroun organise divers séminaires à l'intention des officiers et officiers supérieurs camerounais dont l'un des objectifs est de les sensibiliser à l'application du droit international humanitaire en cas de conflit armé ou de troubles internes. Il faut également signaler que la Croix‑Rouge et le Croissant‑Rouge exercent librement leurs activités au Cameroun. C'est ainsi que le Comité international de la Croix‑Rouge a rendu visite aux prisonniers du conflit frontalier de Bakassi avec le Nigéria.

213.À propos des réfugiés, l'article 22 de la Convention relative aux droits de l'enfant prévoit que les États parties prennent les mesures appropriées pour qu'un enfant qui cherche à obtenir le statut de réfugié et qui est considéré comme tel, bénéficie de la protection et de l'assistance humanitaire.

214.Dans ce sens, le Cameroun a ratifié la Convention relative au statut des réfugiés le 23 octobre 1961 et le Protocole relatif au statut de réfugié le 19 septembre 1967. En application des dispositions de ce texte, le Cameroun, en collaboration avec le HCR, a eu à accueillir des réfugiés venant du Burundi, du Congo, du Libéria, du Rwanda, du Soudan et du Tchad.

215.D'après le rapport du HCR (1998), on estime à 47 057 le nombre des réfugiés vivant au Cameroun, dont 6 007 assistés par le HCR, à savoir : 3 053 Tchadiens, 1 227 Rwandais, 332 Burundais, 182 Congolais (Kinshasa), 230 Congolais (Brazzaville), 180 Soudanais, 167 Libériens et 636 ressortissants d'autres nationalités.

216.Dans le conflit frontalier qui oppose, dans la péninsule de Bakassi, le Cameroun et le Nigéria, le Président de la République a, par décision No 001 du 17 janvier 1997, mis sur pied un Comité chargé de l'assistance de l'État aux populations civiles déplacées des zones de combat. Ce Comité a ainsi élaboré un programme d'actions immédiates, à court terme et à moyen terme.

Actions immédiates

217.Les actions immédiates pour lesquelles l'État a débloqué 205 millions de francs CFA comprennent quatre volets essentiels, à savoir a) la sécurité alimentaire, b) la santé (médicaments essentiels et prévention des épidémies), c)  l'éducation (frais de scolarité, fournitures scolaires, uniformes), et d) les matériels de première nécessité.

Actions à court terme

218.Les actions à court terme, estimées à 462 millions de francs CFA, et dont le démarrage est imminent, comprennent a) la construction des cases de réinstallation en matériaux provisoires pour les 200 familles, avec puits d'eau et latrines, b) la construction d'une école bilingue à cycle complet (maternelle, primaire, CES), c) l'achat de matelas, draps et couvertures, d) la construction d'un dispensaire, e) la fourniture de matériel de pêche et des semences, f) l'acquisition de cinq embarcations légères pour les mouvements des autorités administratives et municipales et g) l'achèvement de la construction de la route Mundemba‑Isangele par le génie militaire.

Actions à moyen terme

219.Les actions envisagées à moyen terme sont au nombre de trois, à savoir a) la construction d'une route carrossable en toutes saisons, de préférence bitumée, entre Kumba‑Ekondo et Titi‑Mudemba, b) le développement d'un centre des métiers de la pêche maritime à Isangele (réparation des embarcations et des moteurs hors‑bord, natation), et c) l'implantation à Isangele d'infrastructures socioéconomiques incitatives au retour des déplacés et au peuplement de toute la zone de Bakassi.

220.Tout au long de la première phase de ce programme, et sans occulter les autres volets, un accent particulier a été mis sur l'éducation. C'est ainsi que tous les frais de scolarisation des enfants de toutes les unités administratives qui forment la zone de Bakassi ont été pris en charge par l'État, pour les années scolaires 1996/97, 1997/98 et 1998/99.

B. Enfants en conflit avec la loi

1. Administration de la justice pour mineurs (art. 40)

221.Depuis le décret du 30 novembre 1928 instituant les juridictions spéciales et le régime de la liberté surveillée pour les mineurs, le Cameroun a adopté le principe de la responsabilité pénale de certains mineurs délinquants; ceux‑ci ne sont cependant pas sanctionnés aveuglément. La loi No 65‑LF‑24 du 12 novembre 1965 instituant un code pénal et la loi No 67‑LF‑1 du 12 juin 1967 portant code pénal, en introduisant ce décret colonial dans le droit applicable au Cameroun indépendant, ont établi une classification de mineurs délinquants. Selon que ceux‑ci ont moins de 10 ans, entre 10 et 14 ans ou encore entre 14 et 18 ans, ils reçoivent un traitement particulier.

222.Les mineurs de moins de 10 ans sont considérés comme étant totalement irresponsables; ils ne peuvent donc pas être jugés pour les faits qu'ils ont commis. La législation camerounaise considère cette catégorie de mineurs comme étant totalement dépourvue de discernement. Ils ne peuvent donc jamais faire l'objet de déferement au parquet ni de jugement devant le juge répressif. Seuls les parents peuvent être condamnés à réparer le préjudice subi par la victime en application des règles relatives à la responsabilité civile.

223.L'enfant entre 10 et 14 ans est pénalement responsable, mais il ne peut cependant se voir infliger que l'une des mesures spéciales prévues par la loi. Seul le Ministère public peut décider de mettre l'action publique en mouvement. S'il existe des charges suffisantes à son encontre, le mineur est directement renvoyé devant la chambre du conseil du tribunal civil siégeant devant un public restreint. La décision est rendue en audience publique. Si le mineur est reconnu coupable, le tribunal a le choix entre trois mesures : a) la remise de l'enfant à sa famille, b) la mise en liberté surveillée, ou c) le placement de l'enfant, pour une durée ne pouvant aller au‑delà de la majorité civile, soit chez une personne digne de confiance, soit dans un internat approprié ou encore dans une institution charitable.

224.Le Code pénal a prévu à l'égard des mineurs entre 14 et 18 ans des mesures parallèles. Outre la possibilité de les soumettre aux mesures bienveillantes édictées en faveur des mineurs entre 10 et 14 ans, il envisage la possibilité de les condamner à une peine. Le cumul est d'ailleurs possible.

225.En dehors de cette classification des mineurs qui a pour but de soustraire certaines catégories d'enfants, soit aux poursuites soit à la condamnation, le Code pénal, en son article 80, institue une excuse atténuante automatique en faveur de tout mineur passible d'une condamnation à une peine. Celle‑ci a pour effet de réduire de façon substantielle la peine prévue par la loi et d'éviter, autant que faire se peut, l'emprisonnement des jeunes enfants. Les effets de l'excuse atténuante de minorité sont édictés par l'article 87 du Code pénal. Ce texte dispose que lorsque la loi prévoit une excuse atténuante, les peines sont réduites comme suit :

a)Si la peine de mort ou une peine perpétuelle sont encourues, la peine est réduite à une peine privative de liberté de 2 à 10 ans;

b)Si une peine à temps est encourue en cas de crime, la peine est réduite à une privative de liberté de un à cinq ans;

c)En cas de délit, le maximum des peines privatives de liberté et d'amende est réduit de moitié, le minimum est ramené à cinq jours et l'amende à 1 franc. L'enfant peut au demeurant être condamné à l'une des deux peines seulement.

226.La loi camerounaise est exclut donc toute condamnation à mort ou même perpétuelle d'un enfant de moins de 18 ans. Comme ci‑dessus indiqué, le maximum de la peine qui est susceptible de lui être infligée est de 10 ans; si l'intéressé bénéficie des circonstances atténuantes, la peine peut être réduite jusqu'à cinq jours, le sursis étant également possible. Mais l'autorité judiciaire n'est pas tenue de prononcer une peine à l'encontre de l'enfant délinquant. Le décret du 30 novembre 1928 précité organise en faveur de l'enfant, outre des mesures spéciales de tutelle, de surveillance, d'éducation, de réforme et d'assistance qui sont ordonnées par le président du tribunal civil, une mesure particulière appelée liberté surveillée. Cette mesure prononcée par le magistrat consiste à maintenir le mineur dans son milieu de vie naturel, familial ou supplétif, en vue de son éducation, sous la surveillance soit d'un magistrat, soit d'un travailleur social délégué par la juridiction des mineurs. L'enfant reste dans sa famille où il continue à vaquer à ses occupations habituelles. Le juge et le travailleur social ne font que suppléer à l'action de la famille parce que celle‑ci a été inapte pour assurer la socialisation de l'action.

227.Le juge peut également prononcer à l'encontre de l'enfant un placement dans une institution. Le placement en institution s'effectue dans des centres de rééducation pour les garçons et dans des homes‑ateliers pour les jeunes filles. L'initiative du placement provient de la justice elle‑même. Le magistrat instructeur devant lequel est conduit un mineur auquel il est reproché un fait qualifié d'infraction, peut décider de le placer provisoirement en rééducation. La juridiction de jugement qui déclare le mineur coupable d'une infraction peut aussi prendre une mesure de placement en sa faveur. Le placement en institution a pour but de soustraire l'enfant à son milieu naturel de vie qui s'est révélé incapable d'assurer son intégration sociale, pour le mettre sous l'encadrement des travailleurs sociaux.

228.La procédure judiciaire elle‑même présente des spécificités. Celles‑ci ont pour but de soustraire l'enfant, soit à une publicité nuisible à son avenir, soit à une erreur toujours possible dans l'appréciation des faits ou même sur la personnalité du délinquant. Le mineur n'est pas traduit devant la juridiction de jugement par la voie sommaire du flagrant délit ou celle de la citation directe. L'information judiciaire est obligatoire. Pendant la phase préliminaire de l'information judiciaire, l'enquête sociale est impérative : elle a pour but de découvrir la personnalité du délinquant dont elle permet de déterminer le degré de discernement, la situation familiale, les circonstances ayant entouré ou favorisé la commission des faits ainsi que les possibilités de son reclassement.

229.Les grands principes qui fondent une bonne justice ont été introduits dans le droit camerounais à la faveur de la ratification des instruments internationaux pertinents, mais également de l'adoption de textes nationaux en la matière. Ils bénéficient à l'enfant délinquant. Le droit de se faire rendre justice, l'égalité devant la loi, le droit à une justice équitable, la non‑rétroactivité de la loi pénale, la présomption d'innocence, la prise en compte de la personnalité du délinquant au moment du jugement qui font partie des libertés fondamentales reconnues à chaque citoyen ont été intégrés dans l'univers juridique camerounais. La Constitution de la République les énumère dans leur ensemble. En effet, la loi du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution reconnaît à tout être humain les libertés fondamentales inscrites dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Charte des Nations Unies, la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et tous les autres instruments internationaux ratifiés en la matière.

230.Dans son préambule, la Constitution rappelle l'attachement du peuple camerounais à divers principes, parmi lesquels certains se rapportent directement à l'administration de la justice. Ainsi affirme‑t‑elle notamment que :

a)Nul ne peut être poursuivi, arrêté ou détenu que dans les cas et selon les formes déterminées par la loi;

b)La loi ne peut avoir d'effet rétroactif; nul ne peut être jugé et puni qu'en vertu d'une loi promulguée et publiée antérieurement au fait punissable;

c)La loi assure à tous les hommes le droit de se faire rendre justice;

d)Tout prévenu est présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie au cours d'un procès conduit dans le strict respect des droits de la défense;

e)Toute personne a droit à la vie et à l'intégrité physique et morale; elle doit être traitée en toute circonstance avec humanité; en aucun cas, elle ne peut être soumise à la torture, à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

231.Les dispositions constitutionnelles ci‑dessus se retrouvent dans les textes de loi à l'instar du Code pénal qui, en son article 3, interdit la soumission à la loi pénale des faits commis antérieurement à son entrée en vigueur ou ceux qui n'ont pas été jugés avant son abrogation expresse ou même tacite. Dans son article 17, le même Code dispose que les peines et les mesures sont fixées par la loi et ne sont prononcées qu'à raison des infractions légalement prévues. La torture qui fait l'objet d'une loi No 97/009 du 10 janvier 1997 modifiant et complétant certaines dispositions du Code pénal est désormais réprimée par les dispositions expresses contenues dans l'article 132 bis.

232.Les lois de procédures, et particulièrement le Code d'instruction criminelle, assurent à chacun le droit de se faire rendre justice et édictent une procédure qui préserve la présomption d'innocence. Le même Code prévoit de façon péremptoire de notifier l'inculpation à l'accusé dès sa conduite au parquet du Procureur de la République.

233.Inhérent au droit de la défense et nécessaire à la manifestation de la vérité, le principe du contradictoire est consacré par le droit camerounais. Les jugements rendus par défaut font l'objet d'opposition par la partie qui n'a pu comparaître à l'audience.

234.Le droit de faire appel est accordé à toute partie qui s'estime lésée par une décision de justice; ce droit s'applique en toute matière, qu'il s'agisse des affaires de simple police, de délits ou de crimes. Le principe du double degré de juridiction a été consacré par l'ordonnance No 72/4 du 26 août 1972 portant organisation judiciaire et ses modifications subséquentes. Ce texte consacre la compétence au premier degré du Tribunal de première instance alors que la Cour d'appel est compétente pour connaître de tout appel formé contre une décision prononcée à l'encontre du mineur.

235.Devant les juridictions de la République, la présence de l'interprète se justifie à plus d'un titre. Le Cameroun est composé d'une multitude de tribus et de langues. Bien que le français et l'anglais soient reconnus comme langues officielles, une bonne partie de la population qui croupit sous le poids de l'analphabétisme n'est pas encore capable de les utiliser de façon convenable. Pour pallier cette carence, dans l'intérêt de la justice et la mise en œuvre du principe du contradictoire, le législateur a généralisé le recours à l'interprète devant les juridictions de la République. L'assistance de l'interprète est gratuite.

236.Les poursuites judiciaires ne peuvent porter atteinte à la vie privée que dans les conditions prévues par la loi. Ces conditions sont relatives aux enquêtes menées en cas de flagrant délit ou en vertu des différents mandats de justice décernés dans le seul but de découvrir la vérité. En dehors de ces cas, le domicile et la correspondance sont inviolables. Ces dispositions s'appliquent même en cas de condamnation.

237.Les dispositions de l'article 40‑3 de la Convention relative à l'obligation qui est imposée aux États parties de s'efforcer de promouvoir l'adoption de lois, procédures, la mise en place d'autorités et institutions spécialement conçues pour les enfants suspectés, accusés ou convaincus d'infraction à la loi pénale, trouvent un début de réponse dans la création des institutions qui reçoivent les enfants délinquants ou en danger moral. À côté de ces institutions, il existe en faveur des enfants condamnés à des peines d'emprisonnement, des quartiers de mineurs dans les établissements pénitentiaires. Par ailleurs, le décret 92/52 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire crée, en son article 7, des prisons spéciales pour mineurs et des prisons‑écoles. La mise en place de ces structures n'est pas encore effective. Les mineurs ne participent normalement à des corvées qu'à l'intérieur de la prison ou dans les champs appartenant à la prison. Dans tous les cas, ils travaillent dans les groupes séparés des autres catégories de prisonniers.

238.Des mesures de contrôle et de surveillance ont été prévues par le même texte pour garantir l'application effective des dispositions bienveillantes qui y sont contenues. Outre la surveillance constante des autorités administratives et des inspecteurs de prisons, les procureurs généraux, les procureurs de la République et les magistrats chargés de l'action publique ou de l'instruction sont autorisés à visiter des prisons de leur ressort aux heures ouvrables. Ils adressent leur rapport de visite au Ministre chargé de l'administration pénitentiaire.

239.Une commission de surveillance des prisons est instituée au chef‑lieu de chaque Département. Elle comprend un Président : le Préfet ou son représentant, un Vice‑Président : le Président du tribunal de première instance et trois membres : le responsable départemental de la santé publique, le responsable départemental des affaires sociales, un rapporteur désigné par le Président de la commission. La commission de surveillance est tenue de visiter toutes les prisons implantées dans le Département au moins une fois par an; ses remarques portent notamment sur les aménagements nécessaires, l'entretien des locaux, l'état des installations sanitaires, le régime alimentaire et le traitement des détenus. Les observations et propositions écrites de la commission font l'objet d'un rapport adressé au Ministre chargé de l'administration pénitentiaire.

240.Par ailleurs, les régisseurs de prisons sont tenus d'adresser chaque mois des états récapitulatifs des détenus définitifs et à titre préventif au parquet et au Ministère de la justice. Un état distinct est établi en ce qui concerne les enfants. De même, le Procureur de la République, magistrat chargé de l'information judiciaire, adresse chaque mois à la chancellerie la situation détaillée des dossiers suivis au niveau de leur cabinet en précisant la situation des mineurs.

241.Au plan administratif, un dispositif de lutte contre les inadaptations sociales, placé sous l'autorité du Ministre chargé des affaires sociales, intervient soit pour la prévention et le traitement de l'inadaptation sociale, soit pour la rééducation de l'enfance délinquante ou en danger moral. Les moyens mis en œuvre sont de deux ordres : la rééducation en internat dont il a été question plus haut, et l'éducation en milieu ouvert.

242.L'éducation en milieu ouvert est une technique d'intervention sociale qui, utilisant tant les structures propres du Ministère que celles du milieu, consiste en des actions matérielles et immatérielles en vue de l'amélioration du comportement des mineurs et de la réadaptation réciproque entre ceux‑ci et leurs milieux naturels de vie. Elle consiste également en une mesure de suivi des mineurs délinquants et en danger moral dans leur famille, et en une action d'assistance éducative au bénéfice des familles dont les carences de toutes sortes ont pu favoriser ou provoquer l'inadaptation sociale des enfants. L'organisation de l'action éducative en milieu ouvert en fait le cadre privilégié dans lequel va s'exercer la mesure légale de la liberté surveillée. Cette mesure, prononcée par le juge à l'encontre du mineur délinquant, consiste à le maintenir dans son milieu de vie naturel, familial ou supplétif, en vue de son éducation, sous la surveillance d'un magistrat et d'un travailleur social délégué par la juridiction des mineurs.

243.Pour sa part, le Ministre de la justice Garde des sceaux, dans le souci de dépénaliser une bonne partie des comportements antisociaux des jeunes délinquants, a adressé à tous les procureurs généraux et procureurs de la République, une circulaire No 0007/7128/DAJS du 27 janvier 1995. Dans cette circulaire, le Garde des sceaux s'inquiète de l'engorgement des prisons et de l'absence de quartiers aménagés en faveur des mineurs incarcérés dans beaucoup de pénitenciers. Après avoir constaté le déficit de l'encadrement socioéducatif dans ces établissements et les difficultés du système carcéral camerounais à faire face de façon satisfaisante à la mission de resocialisation des jeunes délinquants, il convie les magistrats à ne recourir à l'incarcération qu'avec la plus grande circonspection. Il leur prescrit de prendre des mesures, chaque fois que cela est possible et souhaitable, pour traiter les enfants sans recourir à la procédure judiciaire et, lorsque celle‑ci s'avère nécessaire, d'éviter au maximum d'ordonner la détention préventive, de respecter les droits de l'homme et de mettre en œuvre toutes les garanties prévues par la loi en faveur des mineurs délinquants. Il les invite particulièrement à recourir aux mesures spéciales de protection éditées par la législation spéciale aux mineurs délinquants, et notamment aux dispositions du décret du 30 novembre 1928 modifié par la loi No 67/LF/1 du 1er juin 1967 portant institution du Code pénal.

244.La formation des professionnels de l'administration de la justice pour mineurs aux dispositions de la Convention et des autres instruments internationaux applicables à la justice pour mineurs est encore toute récente. Les Ministères de la justice et des affaires sociales organisent, depuis le mois d'août 1997, en collaboration et avec l'appui financier de l'UNICEF, des séminaires de formation des magistrats, policiers, régisseurs des prisons et travailleurs sociaux sur les droits de l'enfant. Ces séminaires vont couvrir l'ensemble du pays; ils n'ont cependant encore atteint que trois provinces sur dix. Ils viennent renforcer l'action menée à une moindre échelle par certaines ONG et associations impliquées dans la protection des droits de l'enfant. Dans le même ordre d'idées, le Ministère de la justice et l'École nationale d'administration et de magistrature préparent un cycle de séminaires; le premier s'est effectivement tenu en décembre 1998; ces séminaires seront financés par la coopération canadienne.

245.Les résultats des diverses actions entreprises ces dernières années restent toutefois difficiles à évaluer, tant auprès des professionnels de la justice pour mineurs que sur l'ensemble des comportements sociaux à l'égard des enfants. Certes, on note une plus grande attention des autorités judiciaires sur les affaires concernant les mineurs, le nombre des enfants détenus à titre préventif ne paraissant pas suivre la courbe ascendante que connaît ces dernières années la délinquance en général, et la délinquance juvénile en particulier. Cependant, l'on observe encore des détentions préventives longues, la durée de celle‑ci n'ayant pas été limitée par la loi.

2.  Traitement des enfants privés de liberté, notamment les enfants détenus,emprisonnés ou placés dans un établissement surveillé(al. b), c) et d) de l'article 37)

246.Le traitement réservé aux enfants privés de liberté est déterminé par des textes légaux ou réglementaires. L'enfant gardé à vue, détenu ou placé dans un centre de rééducation, continue à bénéficier de tous les autres droits compatibles avec sa situation. Le titre 8 du décret No 2/052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun relatif aux loisirs, activités culturelles et à l'assistance sociale prévoit que chaque établissement pénitentiaire réserve une partie de l'emploi du temps des détenus à la pratique des exercices physiques et des activités récréatives et culturelles. Chaque établissement est tenu d'organiser des cours pour les mineurs et de mettre à la disposition des détenus des livres et ouvrages nécessaires au développement de leurs connaissances. Des séances récréatives peuvent être organisées dans les établissements pénitentiaires, avec le concours éventuel des personnes venues de l'extérieur, sur autorisation préalable et écrite du régisseur de la prison.

247.L'assistance sociale aux détenus est assurée, sous l'autorité du régisseur, par les services spécialisés des affaires sociales; elle a notamment pour objet de contribuer au relèvement moral des détenus et à leur réinsertion sociale après libération. À la fin de chaque trimestre, les assistants sociaux en fonction dans les établissements pénitentiaires adressent au Ministre chargé de l'administration pénitentiaire et au Ministre chargé des affaires sociales, un rapport de leurs activités.

248.À ce jour, certains établissements pénitentiaires, à l'instar de ceux de Yaoundé et de Douala organisent des activités éducatives et socioculturelles en faveur des enfants qui y sont incarcérés; le sport y est une activité permanente. Les enfants sont soumis à l'activité scolaire et présentent normalement les examens en vue de l'obtention des diplômes officiels.

249.Les centres de rééducation ont pour but d'assurer aux enfants en conflit avec la loi un encadrement qui permette d'assurer leur réinsertion sociale; leur régime est l'internat. D'une manière générale, l'encadrement se fait en milieu naturel et ouvert, les centres de rééducation, à l'exception de ceux qui ont été érigés dans des centres urbains, ne comportant pas de mur d'enceinte. Le contact avec le milieu extérieur est encouragé pour préparer le retour du mineur dans la société. Les parents sont astreints de rendre visite aux enfants aussi fréquemment que possible. Les centres assurent aux enfants un encadrement psychosocial ainsi qu'une formation professionnelle ou scolaire. Pour favoriser les contacts avec l'extérieur, les écoles créées au sein des centres de rééducation reçoivent les enfants venus de l'extérieur.

250.Dans les cas de privation de liberté, les soins de santé sont prodigués gratuitement aux enfants. Dans les prisons et les centres de rééducation, il existe des infirmeries qui reçoivent les malades, ceux‑ci étant pris en charge par les formations hospitalières publiques lorsque leur cas présente des difficultés particulières.

251.La durée de la détention dans la prison est déterminée par la décision de condamnation; elle est connue à l'avance. Le séjour dans les centres de rééducation est également fixé à l'avance et ne saurait dépasser la période de la majorité civile, qui est encore fixée à 21 ans.

252.Les conditions de séjour dans les centres de rééducation sont prévues par des textes réglementaires propres à chacun des centres. Ces textes prennent en compte les garanties constitutionnelles, même si les difficultés économiques ne permettent pas toujours d'assurer aux enfants les conditions optimales pour leur réinsertion sociale.

3.  Exclusion de la torture et des peines ou traitements cruels,inhumains ou dégradants (al. a) de l'article 37)

253.L'article 37 a) de la Convention prescrit aux États parties de veiller à ce que "nul enfant ne soit soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants". Le Cameroun a souscrit à cette prescription en ratifiant la Convention des Nations Unies du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Cette ratification est intervenue par décret No 97/079 du 25 avril 1997. Par application de cette Convention, une loi No 97/009 du 10 janvier 1997 modifie et complète certaines dispositions du Code pénal. Cette loi insère entre les articles 132 et 133 du Code, un article 132 bis intitulé : torture.

254.Ce texte est ainsi libellé :

"1)Est puni de l'emprisonnement à vie celui qui, par la torture, cause involontairement la mort d'autrui;

2)La peine est un emprisonnement de 10 à 20 ans lorsque la torture cause à la victime la privation permanente de l'usage de tout ou partie d'un membre, d'un organe ou d'un sens;

3)La peine est un emprisonnement de cinq à dix ans et une amende de 100 000 à 1 000 000 de francs lorsque la torture cause à la victime une maladie ou une incapacité de travail supérieure à 30 jours;

4)La peine est un emprisonnement de deux à cinq ans et une amende de 50 000 à 200 000 francs lorsque la torture cause à la victime soit une maladie ou une incapacité de travail égale ou inférieure à 30 jours, soit des douleurs ou des souffrances mentales ou morales;

5)Pour l'application du présent article :

a)le terme "torture" désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques, mentales ou morales sont intentionnellement infligées à une personne par un fonctionnaire ou toute autre personne, agissant à titre officiel ou à son instigation, ou avec son consentement exprès ou tacite, aux fins notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination, quelle qu'elle soit;

b)le terme "torture" ainsi défini ne s'applique par à la douleur ou aux souffrances résultant de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles;

c)aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, qu'il s'agisse de l'état de guerre ou de menace de guerre, d'instabilité politique intérieure ou de tout autre état d'exception ne peut être invoquée pour justifier la torture;

d)l'ordre d'un supérieur ou d'une autorité publique ne peut être invoqué pour justifier la torture;

e)les conditions prévues à l'alinéa 1 de l'article 10 du présent Code ne sont pas applicables à la torture."

255.Ces dispositions récentes reçoivent une application stricte, notamment avec la mise en cause de plus en plus effective des éléments des forces de l'ordre. Elles reçoivent application, tant à l'intérieur des unités de police qu'en tout autre lieu où la torture peut être pratiquée.

256.Au demeurant, la torture est de plus en plus ouvertement condamnée par l'opinion publique, et notamment à travers des publications récentes tels l'ouvrage de M. Alexis Dipanda, Président de la Cour suprême du Cameroun, ancien Président de la Commission des Nations Unies contre la torture intitulé La torture, cette barbarie de l'humanité, ou encore celui de la Fédération internationale de l'action des chrétiens pour l'abolition de la torture intitulé Vos droits face à la torture et aux arrestations arbitraires.

4.  Réadaptation physique et psychologique et réinsertion sociale (art. 39)

257.Aux termes des dispositions du décret No 92/052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun et suivant l'instruction ministérielle No 93/00726/MINASCOF/SG du 1er avril 1993 fixant les attributions du poste social auprès des prisons, le quartier des mineurs des prisons fonctionne comme une institution de rééducation, avec trois missions fondamentales : a) une activité psychoéducative sur le comportement du mineur, b) une activité de formation professionnelle et/ou de scolarisation et c) une activité de réinsertion sociale visant à préparer la sortie du mineur pour éviter les récidives. Le poste social auprès de la prison est en outre chargé d'engager des relations avec les partenaires religieux et philanthropiques pour mobiliser diverses formes d'aides en faveur des mineurs incarcérés. Cette action bénéficie également de la collaboration du Ministère chargé de la jeunesse et des sports qui y affecte des conseillers de jeunesse et d'animation chargés de l'organisation des loisirs et des activités récréatives et culturelles.

258.L'instruction ministérielle No 87/0085 du 14 juillet 1987 sur les programmes de formation professionnelle dans les centres de rééducation en internat, permet aux travailleurs sociaux d'envisager non seulement la prise en charge psychosociale, mais aussi la réinsertion socioéconomique des mineurs. Actuellement six prisons centrales sont dotées de postes sociaux avec un personnel qualifié et stable, alors que les autres sont supervisés par un travailleur social chargé concomitamment de l'éducation en milieu ouvert.

259.Par ailleurs, des ONG et des confessions religieuses interviennent tant dans le milieu carcéral que dans les centres privés de rééducation; elles sont spécialisées dans la prise en charge des mineurs et des femmes, notamment avec les visites en prison, le counselling, l'aide psychoaffective et l'intervention auprès des familles. À titre d'exemple, en 1995, le centre socioéducatif de rattrapage scolaire des mineurs à la prison centrale de Yaoundé a eu cinq admis au brevet d'études du premier cycle et deux au certificat d'études primaires élémentaires. Mais l'existence des quartiers spéciaux pour mineurs dotés de centres de formation socioéducatifs laisse apparaître un dysfonctionnement dans le traitement entre la fille et le garçon. La fille dans la prison centrale de Yaoundé ou celle de Mfou, par exemple, se retrouve inéluctablement au quartier féminin en compagnie des condamnées adultes, alors que le jeune garçon est envoyé dans les quartiers spéciaux pour mineurs. C'est ainsi que des modalités spécifiques d'interrelation entre les services sociaux, la justice et l'administration pénitentiaire ont été discutées et arrêtées au cours des séminaires MINAS‑UNICEF, organisés en 1997 et 1998 dans trois provinces et devant s'étendre sur l'ensemble du territoire. L'application de ces recommandations est imminente.

C.  Enfants en situation d'exploitation, y compris leur réadaptation physiqueet psychologique et leur réinsertion sociale

1.  Exploitation économique, notamment le travail des enfants (art. 32)

260.Aux termes de l'article 32 de la Convention relative aux droits de l'enfant, l'enfant a le droit d'être protégé contre tout travail mettant en danger sa santé, son éducation ou son développement; l'État fixe des âges minimaux à l'emploi et réglemente les conditions d'emploi.

a)Le cadre normatif

261.Au Cameroun, des conventions ont été ratifiées et des lois ont été adoptées dans le même sens que l'article 32 ci‑dessus. Sur le plan international, le Cameroun a ratifié les sept conventions fondamentales de l'OIT relatives aux droits de l'homme (voir le document de base du Cameroun, HRI/CORE/1/Add.109, chap. III, Cadre juridique général de la protection des droits de l'homme), parmi lesquelles figure la Convention No 138 de l'OIT, sur l'âge minimum d'admission à l'emploi, 1973, ratifiée le 14 avril 1998.

262.Les normes internes relatives au travail des enfants sont :

a)La loi No 92/007 du 14 août 1992 portant Code du travail;

b)Le décret No 68/DF/253 du 10 juillet 1968 fixant les conditions générales d'emploi des domestiques et employés de maisons;

c)Le décret No 69/DF/287 du 30 juillet 1969 relatif au contrat d'apprentissage surtout en ce qu'il exige 14 ans au maximum pour l'admission en apprentissage et interdit le logement d'une apprentie par un maître homme‑célibataire (art. 2);

d)L'arrêté No 16/MTLS/DEGRE du 27 mai 1969 relatif au travail des femmes et dont l'annexe indique les travaux interdits aux femmes et aux enfants;

e)L'arrêté No 17/MTLS/DEGRE du 27 mai 1969 relatif au travail des enfants.

263.S'agissant de l'âge minimum d'admission à l'emploi, le cadre juridique ci‑dessus fixe cet âge à 14 ans pour les travaux ne comportant pas de risques particuliers (art. 2 de la Convention 138 et 86 du Code du travail) et au moins à 18 ans pour les travaux dangereux, pénibles et insalubres susceptibles de compromettre la santé et la moralité de l'enfant.

264.Constituent des travaux interdits aux enfants :

a)Des travaux excédant la force des enfants tels que le transport et la manutention des marchandises dépassant un poids évalué en fonction du sexe et de l'âge de l'enfant, le transport de marchandises par camions et véhicules assimilés;

b)Des travaux dangereux ou insalubres tels que les travaux souterrains dans les mines, carrières, fonderies, fabrication, manutention et maniement des explosifs;

c)Des travaux qui portent atteinte à la moralité des enfants tels que la fabrication et la vente des produits écrits et imprimés (posters, dessins et sculptures) qui peuvent avoir une influence néfaste sur le développement moral et psychologique de l'enfant, même si ces travaux ne sont pas interdits par la loi pénale.

265.S'agissant de la détermination des conditions de travail de l'enfant, la législation et la réglementation camerounaises ont prescrit des mesures de discrimination positive. On peut citer :

a)L'interdiction du travail de nuit aux femmes et aux enfants (art. 81 du Code du travail). De jour, la durée maximale du travail ne saurait excéder huit heures avec une interruption obligatoire d'au moins une heure pour les enfants (arrêté No 17/MTLS/DEGRE du 27 mai 1969);

b)Le repos obligatoire de 12 heures consécutives au minimum (art. 82 du Code du travail);

c)L'octroi obligatoire des congés, calculés sur la base de deux jours et demi par mois au lieu d'un jour et demi pour les adultes.

266.Le contrôle de l'application de ces mesures législatives et réglementaires est assuré par l'Inspecteur du travail du ressort (art. 104 à 109 du Code du travail). Pour faciliter ce contrôle sur le travail des enfants par l'Inspecteur, un employeur qui engage un enfant même pour une période d'essai avec ou sans contrat d'apprentissage, doit informer l'Inspecteur du travail dans les nuits et jours qui suivent. Au formulaire dûment rempli à cet effet est joint le certificat médical de l'enfant concerné.

267.Par ailleurs, des sanctions pénales sont prévues aux articles 167, 168 et 190 du Code du travail à l'encontre des auteurs d'infractions aux dispositions des articles 82, 86 et 90 du même code relatifs entre autres aux conditions de travail des enfants.

268.De même, il faut signaler que la législation camerounaise consacre le principe de l'égalité de rémunération sans distinction d'âge pour un travail d'égale valeur.

269.S'agissant de la situation des enfants dans le secteur agricole, les tableaux 11 et 12 en annexe donnent le récapitulatif*.

270.En somme, il faut préciser que tout travail effectué par des enfants dans des conditions en deçà de celles fixées par le cadre normatif ci‑dessus est qualifié d'exploitation économique.

b)Problématique du travail des enfants et mesures administratives préconisées

271.Sur le plan administratif, le Gouvernement camerounais avait adopté avant les années 1986 un ensemble de mesures visant à empêcher le travail des enfants. Ces mesures concernaient pour l'essentiel la lutte contre l'analphabétisme, l'accroissement du taux de scolarisation, la promotion de la formation professionnelle et de l'apprentissage comme stratégie de promotion de l'emploi. À titre d'illustration on peut citer :

a)La mise sur pied des programmes scolaires incitatifs tels que la création des centres pilotes gratuits dans les régions faiblement scolarisées notamment les provinces de l'Adamaoua, de l'Est, de l'Extrême‑Nord et du Nord;

b)La création des institutions postprimaires : sections artisanales rurales et sections ménagères;

c)La création des centres de jeunesse et d'animation.

Il faut dire que ces mesures antérieures à 1986 n'ont produit que des effets limités à cause de la crise économique et du taux élevé de croissance démographique qui est de l'ordre de 2,9 selon le recensement de la population de 1987.

272.En raison de la crise économique qui perdure depuis plus d'une dizaine d'années et la paupérisation des ménages qu'elle engendre, le Ministre chargé de l'emploi et du travail a enregistré de 1987 à 1994, 76 187 compressions et licenciements de personnels et 1 040 fermetures d'entreprises, le tout concourant à 105 199 pertes d'emplois avec 32 555 travailleurs réclamant des arriérés de salaire.

273.Par ailleurs, d'après le recensement général de la population de 1987, le nombre d'enfants au travail de 6 à 14 ans était de 227 337 environ, pour une population totale de 10 493 655 personnes, le secteur agricole rural non compris. Les estimations sur des hypothèses de constance du taux d'activité et de population d'actifs font état de 590 000 enfants au travail en 1997, pour une population estimée à 14 045 000 âmes.

274.Dès lors, on peut situer la problématique du travail des enfants dans la lutte pour la survie en ce qui concerne les familles pauvres exposées à l'insécurité économique d'une part, et d'autre part, cela s'explique par l'épineuse question de rémunération qui conduit les employeurs à rechercher une main‑d'œuvre bon marché, docile, ignorante ou renonçant à ses droits. À cela, on peut ajouter comme facteurs contribuant au travail des enfants la structure de la famille, les coutumes, les facteurs éducationnels et les conflits armés.

275.À partir de l'observation empirique, on peut dire que les enfants travailleurs sont utilisés à plusieurs types d'activités (des travaux légers aux travaux dangereux), dans plusieurs secteurs de l'économie (secteurs primaire, secondaire et tertiaire) tels que le commerce, les emplois de domestique, l'agriculture, la pêche, l'élevage, la carrière. Ils occupent également des emplois dans le secteur informel. La situation est plus grave dans le secteur agricole.

c)Politiques et programmes

276.Au Cameroun, la prise en compte de la situation de l'enfant en général et du travail des enfants en particulier s'intègre dans le cadre global de la politique de protection et de promotion de l'enfance. Découlant de l'orientation de cette politique gouvernementale, les stratégies élaborées visent notamment :

a)La sensibilisation et la mobilisation des communautés sur les questions relatives au travail des enfants;

b)La promotion de l'éducation et l'apprentissage tant classique qu'informel;

c)L'amélioration et le renforcement de la législation sur le travail des enfants;

d)La coordination et le suivi des activités de lutte contre le travail des enfants.

Ces grands axes stratégiques ont été pris en compte dans le projet de plan d'action de lutte contre le travail des enfants dont l'obstacle majeur à la réalisation réside dans les contraintes d'ordre financier.

d)Coopération technique et assistance internationale

277.Le Cameroun collabore avec le Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) de l'OIT. Dans ce cadre, l'IPEC a mené au Cameroun une enquête sur les enfants de moins de 14 ans qui sont dans les situations extrêmes de travail. Le Cameroun souhaiterait intensifier ce genre de coopération en vue d'assurer la mise en œuvre des stratégies opérationnelles visant à abolir les pires formes du travail des enfants.

2.  Usage des stupéfiants (art. 33)

278.Aux termes de l'article 33 de la Convention "les États parties prennent toutes les mesures, y compris les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives, pour protéger les enfants contre l'usage illicite des stupéfiants et des substances psychotropes et pour empêcher que les enfants ne soient utilisés pour le trafic illicite de ces substances". Bien avant cette convention, le Cameroun s'était joint au concert des nations en ratifiant d'autres instruments juridiques internationaux relatifs aux stupéfiants (1961), aux psychotropes (1971) et au trafic des stupéfiants (1988).

279.Au plan interne, l'article 11 du Code pénal dispose que la loi pénale de la République s'applique au trafic des stupéfiants commis même en dehors du territoire national. Par décret No 92/PM du 24 novembre 1992, il a été créé un comité national de lutte contre la drogue. C'est un organe consultatif placé auprès du Ministère de la santé, ayant en charge la coordination et l'examen de tous les problèmes relatifs à l'usage illicite de stupéfiants et à l'abus des drogues. Récemment, a été publiée la loi No 97/019 du 7 août 1997 relative au contrôle des stupéfiants, des substances psychotropes et des précurseurs et à l'extradition et à l'entraide judiciaire en matière de trafic des stupéfiants, des substances psychotropes et des précurseurs. Cette loi innove en ce sens qu'elle a des dispositions spécifiques aux enfants. Ainsi, l'article 104 de ce texte punit d'un emprisonnement de un à cinq ans et d'une amende de 25 000 à 500 000 francs CFA, celui qui, sciemment, fournit à un mineur des inhalants chimiques toxiques. Selon l'article 105, les peines prévues aux articles 91 à 99 sont doublées lorsqu'un mineur a participé aux infractions y visées (culture, production, fabrication, trafic international, blanchiment de l'argent). Ces peines sont aussi doublées lorsque l'infraction aura été commise dans un établissement pénitentiaire, un établissement militaire, un établissement d'enseignement ou d'éducation, un établissement hospitalier ou de soins, un centre de services sociaux ou d'autres lieux où des écoliers et des étudiants se livrent à des activités éducatives, sportives ou sociales ou dans le voisinage immédiat de ces établissements et de ces lieux.

280.De nombreuses actions sont menées sur le terrain par les ONG et autres associations, qui se sont constituées en réseau, sous l'impulsion du Comité national de lutte contre la drogue et l'Institut international de formation et de lutte contre la drogue basé à Paris. Lors de la Journée mondiale célébrée le 26 juin 1997, un message radiotélévisé ayant pour thème "Mobilisons les communautés pour la lutte contre la drogue" a été largement diffusé sur les antennes nationales.

D.  Enfants appartenant à une minorité ou à un groupe autochtone (art. 30)

281.L'article 30 de la Convention dispose que dans les États où il existe des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques ou des personnes d'origine autochtone, ces États doivent garantir à l'enfant autochtone ou appartenant à une de ces minorités le droit d'avoir sa propre vie culturelle, de pratiquer sa propre religion ou d'employer sa propre langue en commun avec les autres membres de son groupe. Le préambule de la Constitution du Cameroun affirme, dans le même sens, que "l'État assure la protection des minorités et préserve les droits des populations autochtones…".

282.De nombreuses actions sont entreprises, dans le cadre du programme d'intégration socioéconomique des populations autochtones ou marginales, tendant à assurer :

a)Leur protection juridique, par l'appui à la constitution ou à la reconstitution des actes d'état civil, les facilitations quant à l'accès à l'éducation, au marché de l'emploi, aux soins de santé primaires de la mère et de l'enfant et à l'accès à la propriété foncière;

b)La préservation de leur identité culturelle et de leur environnement naturel, notamment par la promotion des valeurs culturelles et l'acquisition de forêts communautaires;

c)Leur réinsertion socioéconomique, à travers les réseaux communautaires, dans les domaines de l'administration publique.

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