Nations Unies

CAT/C/CMR/6

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

21 mars 2022

Original : anglais et français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Sixième rapport périodique soumis par le Cameroun en application de l’article 19 de la Convention selon la procédure simplifiée d’établissement des rapports, attendu en 2021 * , **

[Date de réception : 11 janvier 2022]

Liste des sigles et abréviations

CAT Committee against Torture

CDHCCommission des Droits de l’Homme du Cameroun

CICRComité International de la Croix-Rouge

CJMCode de Justice Militaire

CNDHLCommission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés

CNUDHD-ACCentre des Nations Unies pour les Droits de l’Homme et la Démocratie en Afrique Centrale

CPCode Pénal

CPP Code de Procédure Pénale

CRCCroix-Rouge Camerounaise

C/Contre

DGSN Délégation Générale à la Sûreté Nationale

DIHDroit International Humanitaire

DSCEDocument de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi

FDSForces de Défense et de Sécurité

HCR Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés

LGBTILesbiennes, Gays, Bisexuels, Transgenres et Intersexués

MDP Mandat de Détention Provisoire

MGF Mutilations Génitales Féminines

MINASMinistère des Affaires Sociales

MINDEF Ministère de la Défense

MINJUSTICEMinistère de la Justice

MINPROFF Ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille

MNPT Mécanisme National de Prévention de la Torture

MP Ministère Public

OEVOrphelins et Enfants Vulnérables

ONG Organisation Non Gouvernementale

OPJ Officier de Police Judiciaire

ORD Ordonnance

OSC Organisations de la Société Civile

PNG Politique Nationale Genre

RECODHRéseau Camerounais des Organisations des Droits de l’Homme

REDHAC Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale

SND-30Stratégie Nationale de Développement 2020-2030

TGI Tribunal de Grande Instance

TPI Tribunal de Première Instance

UNICEF Fonds des Nations Unies pour l’Enfance

VBG Violences Basées sur le Genre

VCEViolences Contre les Enfants

Introduction

1.À l’issue de l’examen du 5ème Rapport périodique de l’État du Cameroun au titre de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, les 8 et 9 novembre 2017, le Comité contre la Torture (le Comité) a adopté ses observations finales le 29 novembre 2017. Dans lesdites observations finales, le Comité a noté des aspects positifs portant sur la mise en œuvre par l’État du Traité, la ratification de certains instruments internationaux, l’élaboration des outils de stratégie, l’adoption des textes législatifs et règlementaires, la mise en place de certaines institutions, et tous les autres efforts déployés par l’État pour donner effet à la Convention sur son territoire.

2. Le Comité a également noté des sujets de préoccupation, sur lesquels il a formulé des recommandations. En 2019, l’État avait soumis un Rapport de suivi qui répondait à certaines préoccupations jugées prioritaires par le Comité, et qui étaient relatifs à la lutte contre le groupe terroriste Boko Haram dans la Région de l’Extrême-Nord (Recommandation 12), la crise humanitaire liée à l’afflux des réfugiés et des déplacés dans ladite Région (Recommandation 18), la crise sociopolitique dans les Régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (Recommandation 20) et le dépôt des instruments de ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Recommandation 40).

3.Il convient de relever que le 1er avril 2014, l’État du Cameroun avait accepté la procédure de rapport simplifié instituée par le Comité. C’est dans ce cadre que le 2 décembre 2020, durant l’intersession, le Comité a adopté une Liste de points à traiter, laquelle a été communiquée à l’État. Les réponses apportées aux préoccupations y contenues constituent la substance du 6ème Rapport périodique de l’État du Cameroun au titre de l’article 19 de la Convention.

4. Comme à l’accoutumée, le Rapport a été élaboré suivant une approche participative et inclusive, qui a impliqué les Administrations publiques, la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun (CDHC) et les Organisations de la Société Civile (OSC). Il couvre la période allant de 2017 à 2021.

5. Ce 6ème Rapport périodique, qui doit être lu en lien avec le Document de Base Commun, contient les renseignements spécifiques sur la mise en œuvre des articles 1 à 16 de la Convention (I), les renseignements sur d’autres questions (II) et les renseignements sur les mesures et faits nouveaux concernant la mise en œuvre de la Convention (III).

I.Renseignements spécifiques sur la mise en œuvre des articles 1 à 16 de la Convention, notamment au regard des précédentes recommandations du Comite

1. Renseignements sur la suite donnée à certaines recommandations figurant dans les précédentes observations finales

a) Sur la question du recours généralisé à la torture dans les centres de détention au secret

6. L’État du Cameroun n’a pas connaissance de l’existence des centres de détentions secrets sur son territoire, mais uniquement des Unités de Police et de Gendarmerie, ainsi que des prisons officiellement reconnues, créées en application du Décret no92/052 du 27 mars 1992 portantrégime pénitentiaire au Cameroun. Davantage, les cas de torture, tout comme ceux de traitements cruels, inhumains ou dégradants, restent marginaux dans les centres de privation de liberté.

7. Par ailleurs, la réponse contenue dans le Rapport de suivi (CAT/C/CMR/FCO/5) reste pertinente, à savoir que dans l’optique de satisfaire ses engagements internationaux, l’État partie a, par le biais de la Lettre-Circulaire no190256/DV/MINDEF/01 du 18 janvier 2019 du Ministre de la Défense, relayée par la Note no00000153/MRP/GN/244 du 23 janvier 2019 du Secrétaire d’État auprès du Ministre de la Défense chargé de la Gendarmerie Nationale, rappelé aux Forces de Défense et de Sécurité (FDS) l’interdiction absolue de la torture, tout en les avisant de ce que tout agent public qui méconnaîtrait cette interdiction verrait sa responsabilité personnelle engagée.

8. Pendant la période sous revue, les allégations de torture et de mauvais traitement ainsi que les morts suspectes en détention ont donné lieu à des enquêtes, et le cas échéant à des poursuites judiciaires contre les concernés, sans préjudice des sanctions disciplinaires. À titre d’exemple, à la suite d’allégations de coups mortels et de torture commis le 18 mai 2021 au Poste de contrôle de Koumtchoum (dans la Région de l’Adamaoua) au préjudice de J. P., une enquête a été ouverte contre le Soldat de 1ère classe L.B.D. et 2 civils. À l’issue des investigations, le procès-verbal d’enquête a été transmis au Commissaire du Gouvernement près le Tribunal Militaire de Ngaoundéré. L’information judiciaire était en cours dans cette affaire. En outre, par jugement no42/CRIM du 1er novembre 2017, le Tribunal de Grande Instance (TGI) de la Kadey (Région de l’Est) a condamné les nommés E.J.B., H.O. et A.M., tous fonctionnaires de police, à 10 ans d’emprisonnement et 100 000 F CFA d’amende chacun, pour les faits de coaction de torture commis au préjudice de M.A., N.H. et I.F.

9. Sur le plan disciplinaire, des sanctions ont été infligées à des agents chargés de l’application de la loi pour des faits afférents, entre autres, à la torture ou au traitement inhumain. Ainsi, en 2018, 26 policiers et 2 gardiens de prison ont été sanctionnés, environ 150 policiers, Gendarmes et Gardiens de prison en 2019 et 9 policiers en 2020.

10. Sur le plan judiciaire, un Gendarme a été condamné en 2018 pour les faits de torture, et des poursuites ont été engagées contre 4 gardiens de prison à la suite de traitements inhumains commis sur des détenus. En 2019, des poursuites ont été initiées contre 2 policiers pour les faits d’usage abusif d’une arme à feu et de violence au préjudice d’une personne gardée à vue. Le 6 mai 2020, le TGI du Mbam et Inoubou, vidant sa saisine dans l’affaire Ibrahim BELLO, a déclaré les deux policiers concernés coupables de torture et de blessures graves. L’Inspecteur de Police de Premier Grade D.S.J. a écopé d’une peine de 4 ans d’emprisonnement ferme, tandis que l’Officier de Police Judiciaire B.N. a été condamné à 3 ans d’emprisonnement avec sursis. Les deux ont été condamnés à payer la somme de 50 000 000 F CFA à la victime à titre de dommages et intérêts. La procédure était pendante devant la Cour d’Appel du Centre suite à l’appel du Ministère Public et des accusés.

11. Les registres des détenus et ceux des gardes à vue sont tenus dans toutes les prisons et toutes les unités de police judiciaire. En outre, conformément aux dispositions légales, les observateurs des Droits de l’Homme sont autorisés à accéder aux lieux de privation de liberté. Tel est le cas de la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun (CDHC), du Comité International de la Croix-Rouge (CICR), de la Croix-Rouge Camerounaise (CRC) et de diverses autres Organisations Non Gouvernementales (ONG) et associations œuvrant dans la défense des Droits de l’Homme.

12. En 2018, la CNDHL a visité 19 prisons centrales et principales sur l’ensemble du territoire national, afin d’évaluer les conditions de détention des détenus. En 2019, cette institution a effectué des visites dans 15 prisons et 36 brigades de gendarmerie et commissariats dans 6 Régions du pays, à savoir l’Adamaoua, le Nord, l’Extrême-Nord, le Littoral, le Nord-Ouest et le Centre. Pour les visites effectuées en 2021, voir point 6 (c), § 60. Depuis 2017, la CRC a effectué plus d’une dizaine de visites dans les lieux de privation de liberté. Les 18, 19 et 24 janvier 2018, l’Association dénommée Protection Africaine des Droits de l’Homme et des Libertés (PADHL) a visité les Prisons Principales de Monatelé et de Sa’a, ainsi que les Commissariats et Brigade de Gendarmerie du Département de la Lékié dans la Région du Centre.

13. En plus, la Direction des Droits de l’Homme et de la Coopération Internationale du Ministère de la Justice, l’Inspection Générale de l’Administration Pénitentiaire du Ministère de la Justice et les Parquets effectuent également les visites et les contrôles des lieux de privation de liberté.

b) Sur la question des retours forcés dans la Région de l’Extrême-Nord du Cameroun

14. Contrairement à certaines allégations, l’État réitère que des instructions fermes ont été données aux personnels Militaires et Policiers déployés dans la Région de l’Extrême-Nord du Cameroun de ne point procéder à des expulsions forcées des demandeurs d’asile nigérians, et ce conformément au principe de non-refoulement. Par Lettre-Circulaireno190256/DV/MINDEF/01 du 18 janvier 2019 sus évoquée, le Ministre de la Défense avait rappelé ce principe aux responsables Militaires.

15. Par ailleurs, la mise en œuvre du processus de rapatriement volontaire des réfugiés nigérians a été effectuée conformément à l’Accord tripartite signé le 2 mars 2017 entre la République du Cameroun, la République Fédérale du Nigéria et le HCR. Débuté en 2019, ce processus a été ralenti en 2020 du fait de la fermeture des frontières imposée par la pandémie de la Covid-19. À la fin de ladite année, le Cameroun abritait au total 117 422 réfugiés nigérians, installés dans la Région de l’Extrême-Nord dans le site de Minawao et en communauté dans plusieurs localités.

16. D’une manière générale, les demandeurs d’asile sont identifiés et enregistrées par les Services de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale (DGSN) en partenariat avec le HCR. Depuis 2016, les demandeurs d’asile et les réfugiés font l’objet d’un enregistrement biométrique. En 2020, leur nombre total était de 436 397.

c) Sur la question de la crise sociale dans les Régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest

17. La loi pénale s’imposant à tous conformément à l’article 1er du Code Pénal, les agents de l’État déployés dans les Régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ne jouissent pas de l’impunité. Aussi, les allégations d’usage excessif de la force, d’exécutions extrajudiciaires, de mauvais traitements et d’arrestations arbitraires qui leur sont imputées, donnent lieu à des enquêtes objectives et le cas échéant à des poursuites judiciaires.

18. En 2019, devant le Tribunal Militaire de Bamenda, 31 militaires ont été poursuivis dans le cadre de 10 procédures. Parmi les affaires jugées, des peines allant de 12 mois à 7 ans d’emprisonnement ont été infligées pour des faits de violation de consignes, enlèvement avec fraude, abus de fonction, viol, menaces sous condition, assassinat, entre autres. 19 procédures étaient pendantes en fin 2019 devant les autres juridictions d’instance du ressort de la Cour d’Appel du Nord-Ouest pour diverses atteintes aux Droits de l’Homme.

19. Devant le Tribunal Militaire de Buea, à la date du 7 novembre 2019, 48 procédures étaient pendantes contre 88 éléments des FDS poursuivis pour diverses infractions commises au préjudice des particuliers, notamment violation de consignes, assassinat, abus de fonction, tentative de meurtre, blessures légères et simples, menaces sous conditions, violation de domicile, outrage à la pudeur d’une personne mineure de 16 ans suivi de viol, arrestation et séquestration.

20. Par ailleurs, l’État a continué à déployer des efforts afin que les personnes privées de liberté soient promptement traduites en jugement conformément à l’article 114 du Code de Procédure Pénale (CPP), qu’elles soient informées des faits qui leur sont reprochés (articles 119, 167 et 359 du CPP), et qu’elles aient accès à des procédures judiciaires leur permettant de contester la légalité de leur privation de liberté. Ces personnes avaient ainsi la possibilité de se prévaloir des dispositions du CPP relatives à l’habeas corpus ou libération immédiate (articles 584 et suivants du CPP) et à la demande de mise en liberté (articles 222 et suivants du CPP). À titre d’illustration, en 2020, les Tribunaux de Grande Instance (TGI) du Cameroun ont fait droit à 36 demandes de libération immédiate. À l’information judiciaire la même année, les Juges d’instruction ont fait droit à 347 demandes de mise en liberté.

21. L’État du Cameroun réitère que la Loi no2014/028 du 23 décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme n’a pas vocation à s’appliquer aux personnes qui font pacifiquement valoir leur droit de manifester conformément à la Loi no90/053 du 19 décembre 1990 portant régime des manifestations et réunions publiques.

22. En vertu de la Loi no90/54 du 19 décembre 1990 relative au maintien de l’ordre, du Décret no2008/377 du 12 novembre 2008 fixant les attributions des chefs de circonscriptions administratives et portant organisation et fonctionnement de leurs services, ainsi que du Décret no2019/030 du 23 janvier 2019 portant organisation du Ministère de l’Administration Territoriale, les Autorités Administratives sont responsables du maintien de l’ordre. Sur le plan opérationnel, les forces de première et de deuxième catégorie, que sont les Policiers et les Gendarmes, assurent le maintien de l’ordre sous la supervision desdites Autorités.

d) Sur le dépôt des instruments de ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention

23. La procédure de dépôt des instruments de ratification suit son cours.

Articles 1er et 4

2. Sur la modification de l’article 277-3 du Code Pénal relatif à la torture

24. Le Cameroun a aménagé des peines suffisamment lourdes et proportionnellesqui prennent en considération la gravité des faits de Torture. Ainsi, cette infraction est passible d’un emprisonnement à vie quand la mort de la victime en résulte. La peine est de 10 à 20 ans lorsque la torture cause à la victime la privation permanente de l’usage de tout ou partie d’un membre, d’un organe ou d’un sens. Elle est de 5 à 10 ans et une amende de 100 000 à 1 000 000 FCFA lorsque la torture cause à la victime une maladie ou une incapacité de travail supérieure à 30 jours. Enfin, lorsque la maladie ou l’incapacité de travail est égale ou inférieure à 30 jours, ou lorsque la torture cause des douleurs ou des souffrances mentales ou morales, la peine est de 2 à 5 ans et une amende de 50 000 à 200 000 FCFA.

25. Lorsqu’elles sont saisies des cas de torture, les juridictions font une application de l’article 277-3 du Code Pénal. Cependant, il convient de préciser que les articles 90 et suivants de ce Code laissent au juge un pouvoir d’appréciation du quantum de la peine en fonction des circonstances de commission des faits.

26. Le Cameroun prend note des réformes suggérées par le Comité relativement à la prescription et aux circonstances atténuantes.

Article 2

3. La mise en œuvre des droits reconnus aux personnes privées de liberté

a) Le respect des garanties juridiques fondamentales des personnes privées de liberté

27. Les personnes privées de liberté bénéficient des droits reconnus par le CPP, parmi lesquels le droit à l’information, à la santé et à l’assistance d’un avocat.

28. Afin de garantir le respect desdits droits, des contrôles sont exercés par les Chefs des Unités de police et de Gendarmerie (qui sont tenus de rendre compte à leurs supérieurs hiérarchiques des états des personnes gardées à vues), par les Procureurs de la République, par les Procureurs Généraux et par la CDHC. Ces contrôles peuvent intervenir même en cas de dénonciation par des tiers et durant les jours non ouvrables.

29. En tout état de cause, la non-observation des dispositions protectrices des droits des personnes privées de liberté par les personnels chargés de l’application de la loi est passible de sanctions disciplinaires et judiciaires (article 122 alinéa 5 du CPP, Décret no2012/546 du 19 novembre 2012 portant Code de déontologie des fonctionnaires de la Sûreté Nationale, Décret no2007/199 du 7 juillet 2007 portant Règlement de Discipline Générale des Forces de Défense).

30. Il convient de relever que le Projet de renforcement des capacités de la société civile camerounaise pour l’accès à la justice des personnes en détention (RECAJUD) mis en œuvre par le Réseau camerounais des organisations des Droits de l’homme (RECODH) entre novembre 2020 et octobre 2021 dans les prisons de Yaoundé, Buea et Bamenda, a permis d’accorder des consultations juridiques gratuites à 2 500 détenus, l’assistance judiciaire à 100 autres, y compris les détenus vulnérables que sont les femmes, les mineurs et les malades, ainsi que l’organisation de plusieurs tables rondes sur l’application des peines alternatives. Le Projet, réalisé avec l’appui de l’ONG Avocats sans Frontière France (ASF) et la participation de la CDHC, a permis la libération de 50 personnes en situation de détention irrégulière.

b) Sur l’uniformisation des registres et la création d’un registre central des détenus

31. Une réflexion était en cours au Ministère de la Défense relativement à la mise sur pied d’un registre central des personnes gardées à vue et/ou détenues susceptible d’être consulté par les familles de celles-ci. Dans la pratique, il est tenu dans toutes les Unités de gendarmerie et de police, ainsi que dans les Prisons, des registres des personnes privées de liberté qui contiennent tous les renseignements les concernant, conformément aux dispositions du CPP, du Décret no92/052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun, du Décret no2012/540 du 19 novembre 2012 portant organisation de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale modifié et complété par celui no2016/372 du 4 août 2016, et du Décret no2014/309 du 14 août 2014 portant modification du Décret no2001/181 du 25 juillet 2001 portant organisation de la Gendarmerie Nationale. Les rubriques de ces registres (n° d’ordre, noms, prénoms, âge, date et heure d’entrée, motif, autorité ayant ordonné la mesure, date de la cessation de la mesure, solution, observations, etc.) sont quasiment les mêmes dans toutes les Unités.

c) Sur les ressources allouées à l’aide juridictionnelle

32. L’aide juridictionnelle est supportée par le Trésor Public. Les données relatives à l’assistance judiciaire laissent entrevoir une évolution méliorative. Ainsi, courant 2017, devant les Tribunaux de Première Instance (TPI), sur 30 demandes d’assistance enregistrées, 16 ont été accordées ; devant les TGI, l’on a enregistré 110 demandes pour 62 accords ; devant les Cours d’Appel, 60 demandes pour 9 accords ; et devant la Cour Suprême, l’on a dénombré 30 demandes pour 22 accords.

33. En 2020, les commissions d’assistance judiciaire ont rendu 163 décisions accordant l’assistance judiciaire en tout ou partie, contre 126 en 2019.

4. Les clarifications sur le régime de l’interpellation et de la garde à vue

a)Sur le délai et les autorités compétentes pour ordonner la garde à vue

34. Le CPP n’admet l’interpellation et la restriction de la liberté des suspects que dans le cadre de la garde à vue, effectuée dans les locaux de police judiciaire, pour une durée qui ne peut excéder 48 heures renouvelable une fois par l’Officier de Police Judiciaire (OPJ), et exceptionnellement deux fois sur autorisation du Procureur de la République (article 119 alinéa 2 du CPP).

35. La garde à vue judiciaire peut être ordonnée par un OPJ, par le Procureur de la République ou par le Commissaire du Gouvernement (articles 118 et suivants du CPP, Code de Justice Militaire (CJM), Loi no2014/028 du 23 décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme).

b)Les enquêtes sur les cas de détention au secret

36. Les personnes interpellées et placées en détention, le sont dans le cadre des poursuites initiées contre elles conformément aux dispositions des articles 218 et suivants du CPP ou de la Loi no2017/012 du 12 juillet 2017 portant CJM. La détention s’effectue dans l’une des prisons fonctionnelles que compte le Cameroun.

37. Il convient de relever que les allégations de détention au secret peuvent s’expliquer par l’ignorance et les conclusions hâtives des familles, notamment pour le cas des détenus ayant fait l’objet d’une procédure de transfert des Régions vers le Tribunal militaire de Yaoundé qui a, suivant les dispositions de l’article 4 du CJM, une compétence nationale pour connaître de certaines infractions.

c)Les renseignements sur quelques allégations d’arrestations signalées par le Comité

38. Par Décision no186575/DM/MINDEF/01 du 13 décembre 2018, le Ministre de la Défense a ordonné l’arrêt de certaines poursuites judiciaires pendantes devant les Tribunaux Militaires de Bafoussam, Bamenda, Buea, Douala et Yaoundé. En vertu de cette décision, 289 personnes interpellées dans le cadre de la crise dite anglophone, parmi lesquelles les 174 détenus évoqués par le Comité, ont été libérés. En 2019, par Décision no196663/DM/MINDEF/01 du 3 octobre 2019 du Ministre de la Défense ordonnant l’arrêt de certaines poursuites judiciaires pendantes devant les Tribunaux Militaires de Bafoussam, Bamenda, Buea, Douala et Yaoundé, 333 personnes interpellées pour les mêmes faits ont été remises en liberté.

d)L’ouverture des enquêtes et les poursuites contre les membres des Forces de Défense et de Sécurité (FDS)

39. Durant la période sous revue, l’État a continué à lutter contre les détentions arbitraires perpétrées par les FDS. Cela s’est traduit par l’ouverture d’enquêtes et le cas échéant, l’infliction des sanctions disciplinaires et judiciaires.

40. Pour ce qui est des enquêtes, les instructions du Ministre de la Défense contenues dans la Lettre-Circulaire no190256/DV/MINDEF/01 du 18 janvier 2019 ont continué à être appliquées. Ainsi, une enquête conjointe de la Gendarmerie Nationale, de la Police et de l’Administration Territoriale a été ouverte suite aux allégations de détention arbitraire et disparition forcée du nommé Samuel AJIEKAH ABUWE alias Samuel WAZIZI. Il en fut de même pour les allégations de détention arbitraire et disparition forcée du nommé NJOKA Kingsley FOMONYUY. Les investigations dans ce dernier cas ont pu établir que l’intéressé était en détention provisoire dans le cadre d’une procédure régulière conduite dans le respect des droits de la défense.

41. Par ailleurs, le 27 septembre 2017, le TGI du Djerem a reconnu les militaires E.E., A.O.T. et Y.P. coupables de coaction d’arrestation et de séquestration suivies de sévices corporels et moraux et les a condamnés à huit mois d’emprisonnement. Par jugement no26/CRIM du 13 décembre 2017, le même Tribunal a reconnu le fonctionnaire de Police M. M.A.E. coupable d’arrestation, de séquestration et de coups avec blessures graves au préjudice de N.S.B., et l’a condamné à cinq ans d’emprisonnement et 150 000 FCFA d’amende.

5.Les clarifications sur les mesures législatives

42. Une réflexion était en cours en vue de la modification de la Loi no2014/028 du 23 décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme. Dans l’attente de l’aboutissement du processus, l’État trouve utile d’apporter les clarifications suivantes.

a ) Sur la durée de la garde à vue

43. Il ressort du CPP que la garde à vue est une mesure exceptionnelle qui ne peut être ordonnée que dans des conditions précises et dont la durée est rigoureusement encadrée. Ce texte prévoit que la durée de la garde à vue ne peut excéder 48 heures. Ce délai de base peut exceptionnellement être renouvelé une fois par l’OPJ, ou deux fois parle Procureur de la République, qui est tenu de motiver la décision de prorogation.

44. En prévoyant ces marges de prorogation, somme toute exceptionnelles, le législateur pénal a voulu trouver le juste équilibre entre les contraintes imposées par certaines enquêtes complexes et par la distance qui peut séparer le lieu d’arrestation du lieu où la garde à vue doit être exécutée ou du lieu où le suspect doit être présenté à une autorité judiciaire d’une part, et l’exigence de respect des droits fondamentaux du suspect d’autre part. Durant toute la durée de la garde à vue, le suspect bénéficie en effet de toutes les garanties matérielles et procédurales prévues par le CPP. L’inobservation des règles édictées pour la garde à vue entraîne la nullité des procès-verbaux et des actes subséquents d’une part, et peut engager la responsabilité pénale et disciplinaire des auteurs d’autre part.

45. En outre, les victimes de gardes à vue abusives ou illégales peuvent saisir le juge de l’habeas corpus afin qu’il y soit mis un terme (articles 584 et suivants du CPP) ou la Commission d’indemnisation instituée à la Cour Suprême si la procédure aboutie à une décision de non-lieu ou d’acquittement devenue irrévocable (articles 236 et suivants du CPP).

b) Sur la présentation de la personne gardée à vue devant une autorité judiciaire

46. Aux termes de l’article 114 du CPP, « le suspect arrêté en flagrant délit est déféré par l’officier de police judiciaire devant le Procureur de la République qui procède à son identification, l’interroge sommairement et, s’il engage les poursuites, le place en détention provisoire, ou le laisse en liberté avec ou sans caution (…) ». L’article 116 (2) du même Code ajoute que les originaux des procès-verbaux d’investigation dressés par les OPJ doivent être adressés au Procureur de la République dans les meilleurs délais. L’article 11(2) du CJM indique pour sa part que « sauf disposition spéciale contraire, les officiers de police judiciaire sont tenus de transmettre, sans délai, les originaux des procès-verbaux d’enquête de police au Commissaire du Gouvernement (…) ».

47. Il s’en évince que le CPP et le CJM prévoient déjà clairement le droit pour la personne gardée à vue d’être présentée dans le plus court délai possible devant le Procureur de la République ou le Commissaire du Gouvernement, accompagnée des procès-verbaux d’enquête.

c ) Sur le jugement des civils devant les Tribunaux Militaires

48. Dans l’organisation judiciaire du Cameroun, le Tribunal Militaire n’est pas une juridiction d’exception, mais une juridiction à compétence spéciale. À la lecture des dispositions de l’article 8 du CJM, il ressort globalement que ce Tribunal est compétent pour connaître des infractions militaires, des infractions commises dans les établissements militaires ou portant atteinte aux équipements et aux installations militaires, des infractions commises avec les armes à feu, des infractions à la législation sur les armes et les effets et insignes militaires, des infractions relatives aux actes de terrorisme ou à la sûreté de l’État, quel quesoit le statut des auteurs et complices (civil ou militaire).

49. Aux termes de l’article 9 du CJM, les mineurs de 18 ans, auteurs, coauteurs ou complices des infractions relevant de la compétence du Tribunal Militaire sont justiciables des juridictions compétentes en matière de délinquance juvénile.

50. La situation vécue sur le terrain au Cameroun et ailleurs démontre que les actes de terrorisme impliquent quasi systématiquement l’utilisation des armes à feu. De plus, après une formation militaire de base, les magistrats militaires reçoivent la même formation que les magistrats civils à l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM). Au sein des Tribunaux Militaires, les magistrats civils officient aux côtés des magistrats militaires, en application de l’article 5 (2) du CJM.

51. Au demeurant, les personnes poursuivies devant le Tribunal Militaire qu’elles soient civiles ou militaires,bénéficient de toutes les garanties d’un procès équitable au même titre que celles poursuivies devant les autres juridictions pénales. Il ressort en effet des dispositions des articles 13, 15, 19 et 25 du CJM que le régime du déclenchement et de l’exercice de l’action publique, de l’information judiciaire, du jugement et des voies de recours est celui de droit commun, prévu par le CPP.

52. En outre, les décisions rendues par le Tribunal Militaire peuvent faire l’objet d’appel devant la Cour d’Appel, au même titre que les décisions rendues par toutes les autres juridictions d’instance.

6. Renseignements sur la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun (CDHC)

a) La mise en œuvre effective de la loi portant création de la CDHC

53. La mise en œuvre effective de la Loi no 2019/014 du 19 juillet 2019 portant création, organisation et fonctionnement de la CDHC a été amorcée par la nomination de ses différents membres le 19 février 2021. Par Décret no2021/107, M. MOUANGUE KOBILA James a été hissé à la tête de cet organe. Par Décret no2021/108, M. Raphaël GALEGA GANA a été nommé Vice-président ; Par décret no2021/109, M. ABOUEM ESSEBA Jean-Pierre a été nommé Secrétaire Permanent. Suivant Décret no2021/110, Mesdames ASUAGBOR née AYUK Lucy, ENDELEY née Joyce BAYANDE MBONGO, BOUBA née HAMAN HAWE, Messieurs BIKORO Aimé Parfait, AMOUGUI Apollinaire TITE, SALIHOU LABARANG, SOULEY MANE, DJIBOMADOM MAMENE Dieudonné, SEINI BOUKAR LAMINE, TEZANOU Paul, BALLA Joseph Constantin, NGALLE MBONJO Jean-Marc et NKWEBO Denis ont été nommés Membres. Toutes ces personnalités, nommées pour un mandat de 5 ans renouvelable une fois, ont pris fonction et ont prêté serment le 29 avril 2021 devant la Cour Suprême du Cameroun statuant en Chambres réunies. Depuis lors, la CDHC est opérationnelle.

b) Les garanties d’indépendance du Président et du Vice-Président de la CDHC

54. Le mode de désignation du Président et du Vice-président est la principale garantie de leur indépendance. En effet, l’article 12 alinéa 3 de la Loi no2019/014 du 19 juillet 2019 dispose que « le Président, le Vice-président (…) de la Commission sont nommés par décret du Président de la République pour un mandat de 5 ans renouvelable une fois, sur proposition des administrations, associations et organismes socioprofessionnels auxquels ils appartiennent ». Ils ne représentent ni le Gouvernement, ni le Parlement, ni la justice.

55. De plus, ils sont inamovibles pendant la durée de leur mandat, qui ne peut prendre fin que dans les cas prévus à l’article 16 de la Loi : à l’expiration normale de la durée du mandat ; au décès ou à la démission ; à la survenance d’un cas d’incompatibilité au sens de l’article 15. Aussi, les Commissaires, le Président et le Vice-président ne peuvent être poursuivis pour les idées et les opinions exprimées dans l’exercice de leurs fonctions au sens de l’article 21 de la loi sus-évoquée.

56. Par ailleurs, l’article 59 (1) de la Loi dispose que « dans le cadre des actions de promotion et de protection des Droits de l’Homme et de prévention de la torture, le personnel de la Commission ne peut recevoir d’instructions des pouvoirs publics ou de tout groupe d’intérêt ».

57. Les garanties d’indépendance du Président et du Vice-président peuvent également être appréciées sous le prisme de la personnalité juridique et de l’autonomie financière dont jouit la CDHC (article 2 alinéa 1 de la loi sus visée). De plus, suivant l’article 44 de la Loi, « les locaux du siège de la commission et de ses antennes sont inviolables et bénéficient d’une protection des forces de sécurité ».

c) Les mesures garantissant la mise en œuvre effective par la CDHC des pouvoirs de visite inopinée des lieux de détention

58. Suivant les articles 7, 8, 9 et 10 de la Loi no2019/014 du 19 juillet 2019, la CDHC peut effectuer des visites inopinées ou notifiées dans tous les lieux de privation de liberté, civils et militaires, y compris les lieux non officiels. Elle peut effectuer toutes descentes nécessaires et accéder à tout lieu où des cas de violation des Droits de l’Homme sont allégués. Elle effectue des visites régulières de tous les lieux de privation de liberté, et dialogue avec les Autorités chargées de l’administration et de la gestion des lieux de privation de liberté. Que les visites soient inopinées ou informées, le Procureur de la République, le Commissaire du Gouvernement ou l’Autorité en charge de la gestion du lieu de privation de liberté ne peut s’opposer à la mission de la CDHC. Ces autorités sont d’ailleurs tenues de fournir les informations à la Commission lorsqu’elle les requiert.

59. Le 30 avril 2021, la Sous-Commission de la prévention de la torture, composée de quatre commissaires dont un médecin, a été mise en place au sein de la CDHC.

60. Entre juillet et septembre 2021, la CDHC a effectué des visites dans 16 unités de police judiciaire, 9 prisons et un hôpital psychiatrique dans les Régions du Nord, de l’Extrême-Nord, de l’Ouest, du Littoral, du Sud-Ouest, du Sud, ainsi qu’à l’hôpital Jamot dans la Région du Centre. Comme plus-value, du fait du signalement effectué par la CDHC, plusieurs personnes illégalement privées de liberté ont été libérées, dont 6 dans la Région du Sud-Ouest.

7. Les renseignements sur les violences à l’égard des femmes et des enfants

a) Les mesures de lutte contre les violences à l’égard des femmes et des enfants

61. Le Gouvernement a mené des actions sur plusieurs axes qui sont en relation avec les différentes situations de crise auxquelles le pays fait face.

62. Au plan stratégique, la Stratégie Nationale de Développement 2020-2030 (SND-30) a maintenu le principe de l’égalité des sexes avec l’inscription de la promotion du genre et de l’équité dans la section 4.5.4 dont l’intensification de la lutte contre les Violences Basées sur le Genre (VBG) est un axe prioritaire.

63. La Stratégie nationale de lutte contre les Violences Basées sur le Genre et le Plan d’Action National de lutte contre les mutilations génitales féminines sont en cours de révision.

64. Par ailleurs, le Code Pénal adopté en 2016 a renforcé le dispositif de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, en incriminant les mutilations génitales (article 277-1), l’atteinte à la croissance d’un organe (article 277-2), et le harcèlement (article 302-1). De plus, le mariage subséquent entre l’auteur d’un viol et sa victime n’est plus une cause d’exonération de la responsabilité pénale (article 297).

65. En outre, l’État a amélioré le système de protection sociale des enfants en procédant à : la finalisation du Document de Politique Nationale de Protection de l’Enfant; l’élaboration d’un document de Politique Nationale de Développement de la Petite Enfance (DPE); la mise en place d’un système de référencement des enfants associés aux groupes et forces armées ; l’élaboration du Guide de prise en charge des enfants en situation d’urgence et du Guide de prise en charge des Orphelins et Enfants Vulnérables; et l’implémentation du Plan d’Action Multisectoriel budgétisé pour l’abandon du mariage d’enfants au Cameroun (2020-2024). Par ailleurs, l’accent a été mis surla prévention des violences, la poursuite des auteurs et la réhabilitation des survivantes à travers une prise en charge holistique, avec une attention particulière accordée aux survivantes des Régions en crise.

66. Les actions de prévention ont porté sur la sensibilisation et la formation des acteurs. Les campagnes de sensibilisation ont été organisées lors des différentes journées dédiées à la femme, à la famille et à l’enfant. De manière générale, l’État a mené des actions de sensibilisation transversale contre les violences faites aux femmes et les mariages d’enfants dans les 10 régions du pays avec la formation de plus de 900 leaders et relais communautaires avec l’appui des acteurs de la société civile et des partenaires techniques et financiers.

67. De plus, en janvier 2018, le Gouvernement a lancé une vaste campagne de sensibilisation impliquant le Ministère des Affaires Sociales et le Ministère des Enseignements Secondaires auprès des établissements scolaires dans l’optique de mobiliser la communauté éducative contre les fléaux émergents tels que le trafic d’organes, l’usage incontrôlé des réseaux sociaux, la consommation des drogues et stupéfiants et l’usage des armes blanches en milieu scolaire et parascolaire, la traite et le trafic de personnes. Cette campagne a permis de sensibiliser 14 établissements scolaires.

68. Enfin, la mission d’appui à la sensibilisation des riverains de la voie ferrée sur les dangers de l’utilisation des traverses de bois usagées traitées à la créosote, la prévention des VBG et le mécanisme de gestion des plaintes, conduite par le RECODH de février à mars 2021, a permis de former un total de 717 personnes sur la prévention des VBG et des violences contre les enfants (VCE). Parmi les parties prenantes figuraient 271 personnels de CAMRAIL, 80 sous-traitants, 122 chefs traditionnels, 134 relais communautaires et 110 points focaux femmes regroupés en 181 comités de vigilance. Le deuxième volet du projet conduit en deux phases et axé sur l’information et la sensibilisation des riverains sur les VBG a touché 9 918 personnes, soit 4 387 hommes, 3 036 femmes, 315 enfants, 88 personnes handicapées et 1120 jeunes.

68bis. Au bilan, l’on a pu noter de façon générale une amélioration de la protection et de la prise en charge des victimes qui sont désormais mieux accompagnées ; l’implication des communautés à la protection et à la prise en charge ; le développement d’un système d’alerte et de surveillance ; la reconversion économique des praticiens à travers l’octroi des dons et aides divers ; la prise en charge holistique des survivantes ; le renforcement des capacités des acteurs en vue d’une meilleure prise en charge des victimes ; la mise en place des espaces pour accueillir les victimes ; et le renforcement du cadre de collaboration avec la société civile et les partenaires techniques et financiers en vue d’une meilleure coordination.

b) Les données sur les violences à l’égard des femmes et des enfants

69. Les auteurs des violences commises à l’encontre des femmes et des enfants sont systématiquement traduits devant les juridictions compétentes lorsque les faits sont portés à l’attention des autorités. Ainsi, le nommé Y.M., Enseignant, a été placé en détention provisoire le 21 décembre 2020 et inculpé des faits de séquestration et assassinat en coaction commis au préjudice de l’enfant nommé N.F.B., âgé de 15 ans. L’affaire est en cours de jugement devant le Tribunal de Grande Instance du Ndé (Région de l’Ouest). De même, par jugement no215/COR du 14 octobre 2020, le TPI de Bandjoun a condamné le nommé M.S. à 17 mois d’emprisonnement pour les faits de violences sur enfant commis au préjudice du jeune K.F., âgé de 13 ans. En outre, par jugement no12/COR du 5 janvier 2021, le TPI de Dschang a déclaré le nommé F.J. coupable des faits de blessures légères et viol au préjudice de la nommée S.E.M. et l’a condamné à 8 mois d’emprisonnement et 100 000 FCFA d’amende. Le même Tribunal a condamné la nommée M.T.C. à 2 mois d’emprisonnement et 25 000 F CFA d’amende pour les faits d’enlèvement de mineur avec fraude par jugement no978/COR du 2 novembre 2018. Pour d’autres exemples, voir point 28 (b) § 190.

c) Sur la pénalisation des violences au sein de la famille

70. Le Code Pénal renferme des incriminations générales qui permettent de réprimer toutes formes de violences, y compris celles commises au sein de la famille. L’on peut évoquer les articles 275 (meurtre), 276 (assassinat), 277 (blessures graves), 277-3 (torture), 278 (coups mortels), 279 (coups avec blessures graves), 280 (blessures simples), 281 (blessures légères), 296 (viol) et R370-1 (violences légères). D’autres incriminations se rapportent au délaissement d’incapable, à l’enlèvement de mineur, à la séquestration, aux violences sur enfant, au trafic d’enfant, etc. Toutes ces infractions sont assorties de peines conséquentes. Le Code ne prévoit pas d’exonération de responsabilité pénale en cas d’existence du lien de famille entre la victime et l’auteur des violences, ce facteur constituant à certains égards un motif d’aggravation de la peine.

70bis. Faisant écho à ces dispositions, le TGI du Djérem, par jugement no14/CRIM du 13 septembre 2017, a condamné le nommé N.L. à 15 ans d’emprisonnement pour les faits de meurtre commis au préjudice de la nommée Z.A. Par jugement no178/CRIM du 14 novembre 2020, le TGI de la Vina a condamné le nommé A.O. à 5 ans d’emprisonnement pour les faits d’enlèvement de mineure, arrestation et séquestration commis au préjudice de la jeune N.A. âgée de 4 ans. De même, par jugement no107/COR du 1er septembre 2020, le TPI de Meiganga a condamné le nommé A.I. à 3 ans d’emprisonnement pour les faits de violences sur enfants. Par jugement no40/CRIM/TGI/EB du 15 mai 2019, le TGI de la Mvila a infligé les peines d’un an d’emprisonnement et 10 000 F CFA d’amende au nommé T.N.C pour les faits de trafic d’enfant. La même juridiction, par jugement no46/CRIM/TGI/EB du 16 mai 2019, a condamné la nommée E.M.L. à 17 mois d’emprisonnement et 150 000 F CFA d’amende pour des faits similaires.

d) Les avancées enregistrées en matière de protection et de prise en charge des victimes

71. Une réponse holistique et intégrée a été apportée aux violences à l’égard des femmes et des filles. À cet effet, grâce à l’appui du système des Nations Unies, un paquet de services essentiels offerts aux victimes des VBG a été mis en place en 2019 avec le soutien de l’UNFPA. Il s’est agi d’opérationnaliser une plateforme multisectorielle pour assurer à toutes les femmes victimes de n’importe quel type de violence l’accès aux services psychosociaux ou de prise en charge de leur santé mentale dans les centres de promotion de la femme et de la famille et dans toutes les structures opérationnelles du MINPROFF. Parmi ces structures, l’on peut citer les gender desk, les espace sûrs, les centres de femmes en détresse, les espaces de cohésion des femmes et les cases management des Régions du Nord-ouest et du Sud-Ouest qui ont accueilli 1 677 femmes en 2017, 1 175 en 2018, 1675 en 2019 et 2025 en 2020, en collaboration avec les OSC. Aussi, plus de 200 personnels de santé travaillant dans ces régions ont été formés à la prise en charge des survivantes des VBG.

72. Avec l’appui de ses partenaires techniques et financiers, l’État a mis en place plusieurs projets, notamment le projet de modélisation de la prise en charge des enfants victimes de violences dans l’Arrondissement de Yaoundé 2 avec le soutien de l’UNICEF qui consiste en l’identification des acteurs et intervenants, la mise en place des stratégies de signalement des cas d’enfants victimes de violences et la détermination de la méthode de prise en charge efficace ; le projet de prise en charge des Orphelins et Enfants Vulnérables (OEV) avec l’appui du Catholic Relief Service.

73. Le 16 mai 2019, l’Agence de Régulation des Télécommunications (ART) a attribué un numéro vert (1503) au Ministère des Affaires Sociales, dédié à la dénonciation de toutes violences. Le processus s’est poursuivi en 2020 avec l’identification, la réhabilitation et l’équipement des locaux devant abriter cette ligne verte, la formation des agents utilisateurs ainsi que l’élaboration du Guide d’utilisation de ladite ligne.

Article 3

8. Les données sur les demandes d’asile et autres formes de protection humanitaire

a) sur les demandes d’asile enregistrées

74. Depuis plusieurs années, le Cameroun accueille des milliers de personnes en quête d’asile, provenant de plusieurs pays, et dont la plus grande partie est d’origine centrafricaine et nigériane. Ainsi, le nombre de demandes d’asile en 2017 était estimé à 5 784, dont 4 744 centrafricains et 9 nigérians ; ces personnes comprenaient 395 filles et 389 garçons de 0 à 4 ans, 406 filles et 354 garçons de 5 à 11 ans, 284 filles et 262 garçons de 12 à 17 ans, 1 246 femmes et 2 390 hommes de 18 à 59 ans, 29 femmes et 29 hommes de plus de 59 ans. Ce nombre est passé à 8 117 en 2018 (569 filles et 567 garçons de 0 à 4 ans ; 573 filles et 527 garçons de 5 à 11 ans ; 384 filles et 343 garçons de 12 à 17 ans ; 1 691 femmes et 3 380 hommes de 18 à 59 ans ; 40 femmes et 35 hommes de plus de 59 ans), à 9 948 en 2019 (568 filles et 552 garçons de 0 à 4 ans ; 695 filles et 670 garçons de 5 à 11 ans ; 459 filles et 387 garçons de 12 à 17 ans ; 2 048 femmes et 4 449 hommes de 18 à 59 ans ; 62 femmes et 58 hommes de plus de 59 ans) et à 6 819 en 2020 (318 filles et 329 garçons de 0 à 4 ans ; 473 filles et 442 garçons de 5 à 11 ans ; 255 filles et 220 garçons de 12 à 17 ans ; 1 423 femmes et 3 276 hommes de 18 à 59 ans ; 32 femmes et 51 hommes de plus de 59 ans).

b) S ur les demandes d’asile et autres formes de protection humanitaire acceptées

75. En matière d’enregistrement, de détermination du statut de réfugié et d’étude des demandes d’asile, un Protocole d’accord sur le partage des données à caractère personnel a été signé le 7 mars 2019 entre le Ministère des Relations Extérieures (MINREX) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR). Au cours de la même année, les Commissions d’éligibilité au statut de réfugié et des recours ont été mises en place et les membres desdites commissions désignés et installés. De façon générale, les motifs récurrents à l’appui des demandes reposaient sur la crainte de la persécution et le risque de subir la torture en cas de renvoi dans le pays d’origine. Ainsi, de 2017 à 2020, sur 7 706 demandes d’asiles traitées en 1ère instance, 6 832 ont été acceptées, tandis que sur 439 demandes traitées en appel, 176 ont été acceptées.

c) Sur l’extradition, l’expulsion et le renvoi des étrangers

76. Le Cameroun a privilégié l’option du retour volontaire des réfugiés vers leurs pays et c’est dans ce sens qu’il a signé des Accords tripartites d’une part avec la République Fédérale du Nigéria et le HCR le 2 mars 2017, et d’autre part avec le Gouvernement centrafricain et le HCR le 29 juin 2019. La mise en œuvre de ce processus s’est matérialisée par le départ d’un premier contingent constitué de 133réfugiés nigérians rentrant volontairement au Nigéria le 22 août 2019. Ils ont été rejoints en 2020 par 12 279 compatriotes. Pour ce qui est des réfugiés centrafricains, l’on a enregistré le retour volontaire de 3 309 personnes en 2019 et 230 en 2020. En 2021, le Cameroun a facilité le rapatriement volontaire de près de 135 éléments des FDS de la République centrafricaine, accueillis au Cameroun lors des fortes tensions sociopolitiques en RCA.

d) Sur les recours contre les décisions d’expulsion

77. Aucun recours contre des décisions d’expulsion ou d’annulation de renvoi n’a été enregistré au cours de la période sous revue.

9. Données sur les plaintes et rapports d’enquête sur les exactions commises au préjudice des demandeurs d’asile

78. Suite à des allégations faisant état des reconduites à la frontière des Nigérians dans la Région de l’Extrême-nord du Cameroun par les éléments des FDS, le Ministre de la Défense a, par la lettre circulaire no190256/DV/MINDEF/01 du 18 janvier 2019, instruit aux responsables Militaires de ne procéder à aucune expulsion forcée des refugiés. Depuis lors, l’État a procédé, avec l’accompagnement du HCR et le concours des autorités nigérianes, à des retours volontaires desdits réfugiés. Par ailleurs, aucune plainte n’a été enregistrée par les autorités camerounaises relativement à des traitements cruels, inhumains ou dégradants ou à des actes d’extorsions commis au préjudice de ces demandeurs d’asile au cours de la période sous revue.

10. Dispositif de repérage des demandeurs d’asile en situation de vulnérabilité

79. L’enregistrement des demandeurs d’asile à leur entrée sur le territoire camerounais intègre la vérification et la documentation biométrique des réfugiés, ce qui permet de repérer parmi eux les personnes en situation de vulnérabilité, à l’instar des personnes âgées, des personnes atteintes des maladies chroniques, des femmes enceintes ou victimes de VBG, des enfants non accompagnés ou séparés de leurs familles, des personnes vivant avec un handicap ou des victimes de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants. C’est également le cas lors des campagnes de sensibilisation en communauté ou de proximité organisées par le Gouvernement et ses partenaires, au cours desquelles une assistance médicale ou juridique, à travers des cliniques juridiques notamment, est apportée aux demandeurs d’asile et aux survivantes de VBG.

80. En outre, des procédures standards opérationnelles ont été mises en place pour améliorer les services en matière d’assistance, d’orientation et de référencement de ces personnes à besoins spécifiques. Concernant l’assistance médicale offerte à ces personnes, elle est de 100 % dans les cas d’urgence, pour les femmes enceintes, les accouchements dans un centre de santé, les consultations et soins des enfants de moins de 5 ans, les malades chroniques et psychiatriques, les survivantes de VBG et les enfants non accompagnés.

Articles 5 à 9

11. Sur les demandes d’extradition pour des faits de torture et d’infractions connexes

81. Au cours de la période sous revue, le Cameroun n’a pas reçu de demande d’extradition émanant d’un autre État réclamant un individu soupçonné d’avoir commis des actes de torture.

Article 10

12. La formation des agents publics sur les dispositions de la Convention

a) Les programmes de formation des agents de l’ État sur les dispositions de la Convention

82. Dans le cadre des formations initiales, un cours sur les Droits de l’Homme est dispensé aux Auditeurs de justice (Elèves-Magistrats) à l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM). De plus, le module intitulé « Interdiction, prévention et répression de la torture » a été maintenu dans les programmes de formation initiale et continue des personnels des forces de défense (militaires et gendarmes), à partir de la formation commune de base jusqu’à la formation militaire supérieure. Également, le module des « Droits de l’Homme et Libertés » a été maintenu dans les Ecoles et Centres d’Instruction et d’Application de la Sûreté Nationale. Il en est de même des modules dédiés aux Droits de l’Homme à l’Ecole Nationale d’Administration Pénitentiaire.

83. Tous ces programmes de formation intègrent les enseignements portant sur les sanctions des agents publics en cas de torture, le traitement particulier à réserver aux demandeurs d’asile en situation de vulnérabilité, l’interdiction du refoulement des demandeurs d’asile, ainsi que les techniques de détection des victimes de torture ou d’autres types de violence.

b) Les sessions de renforcement des capacités des agents de l’ État

84. Les sessions de renforcement des capacités sont de rigueur pour les agents de l’État désignés pour y participer. Ces sessions se tiennent aussi souvent que possible. Elles sont organisées par l’État et ses partenaires, soit conjointement, soit distinctement.

85. Au cours de la période sous revue, plusieurs séminaires, ateliers et activités de renforcement des capacités ont été organisés. Les efforts dans ce sens vont se poursuivre.

c) La méthode d’évaluation

86. L’État n’avait pas encore mis au point une méthode aboutie d’évaluation des résultats des programmes de formation des agents publics et d’évaluation de leur efficacité.

13. Renseignements sur les formations spécifiques à l’intention des personnels judiciaires et de santé

87. En février 2019, le Ministère de la Justice a organisé un séminaire de formation des acteurs judiciaires (Magistrats, OPJ, Personnels de l’Administration pénitentiaire), au cours duquel un module sur le protocole d’Istanbul a été développé. En application des recommandations formulées à l’occasion dudit séminaire, les instruments internationaux relatifs à l’interdiction de la torture, notamment les Lignes Directrices de « Robben Island » et le Protocole d’Istanbul, ont fait l’objet d’une vulgarisation spéciale au moyen d’une compilation dans les CD-ROM et d’affichage dans les Unités de police.

88. En sus, du 16 au 22 juillet 2018 à Ebolowa, un atelier de formation des formateurs à l’intention des gynécologues, psychiatres, sages-femmes et autres personnels de santé impliqués dans les soins médicaux des victimes de viols a été organisé.

Article 11

14. Les conditions de détention

a) Les statistiques carcérales

89. Voir Annexe no1.

b) Sur la séparation des différentes catégories de détenus

89bis. Dans quasiment toutes les prisons du Cameroun, il existe des quartiers distincts pour les majeurs hommes, les femmes et les mineurs. Faute de quartier pour femmes et mineurs à la Prison principale d’Eséka et à la Prison secondaire de Ndikiniméki, les détenus relevant de ces catégories sont référés dans les Prisons les plus proches à Edéa et Bafia respectivement.

90. L’État continue d’œuvrer afin que la séparation stricte entre les prévenus et les condamnés, déjà effective dans certaines prisons, le soit partout. Les nouvelles prisons en construction permettront de garantir l’effectivité de cette séparation.

c) Sur la promotion des mesures alternatives à l’emprisonnement

91. Le Décret d’application des articles 18-1, 26 et 26-1 du Code Pénal n’avait pas encore été pris. Dans l’attente, des Ateliers sur les alternatives à la détention ont été organisés à l’intention des acteurs de la chaine de justice, à l’exemple de celui tenu à Ngaoundéré du 8 au 10 décembre 2020.

92. De plus, l’ONG Nouveaux Droits de l’Homme-Cameroun a organisé le 9 décembre 2020, en partenariat avec la CDHC, le Programme National de Gouvernance (PNG) et l’Association APRODHAFIM, un symposium national sur les peines alternatives, auquel ont pris part les acteurs de la chaîne judiciaire, les défenseurs des Droits de l’Homme, les universitaires et les journalistes.

d) Sur le contrôle du respect du délai de détention

93. Il existe plusieurs modalités de contrôle du respect de la durée de détention provisoire. L’Inspection Générale des Services Judiciaires du Ministère de la Justice effectue régulièrement des contrôles sur ce point et attire permanemment l’attention des juges et juges d’instruction sur l’observance des dispositions légales y relatives. Des contrôles administratifs sont aussi effectués régulièrement par les Chefs de juridictions, notamment par les Procureurs de la République lors des contrôles de prisons (au moins une fois par mois), et par les Présidents de Tribunaux (chaque mois) à travers les notices établies par les Juges d’instruction qui font ressortir l’état des détenus et les durées de détention. Des contrôles sont aussi effectués par la CDHC, qui entre janvier 2017 et septembre 2021, a mené 67 missions de contrôle dans les prisons et 194 visites dans les unités de police judiciaires sur l’ensemble du territoire.La CDHC a planifié d’autres visites dans les 10 régions du pays en novembre 2021.

94. Tout détenu qui juge sa détention abusive peut introduire une procédure d’Habeas Corpus devant le président du Tribunal de Grande Instance compétent. Des décisions favorables sont fréquemment rendues (Arrêt no2/HB/PCA/LIT/20 du 13 novembre 2020 par lequel la Cour d’Appel du Littoral a ordonné la mise en liberté de dame B. L. E. J. ; Ordonnance no01/LI du 17 septembre 2018 par laquelle le Président du TGI de la Vallée du Ntem a ordonné la libération immédiate du sieur O. E. T. ; Ordonnance no01/L1/CRIM du 14 août 2019 par laquelle la même juridiction a ordonné la libération immédiate de dame K.M. A. ; Ordonnance no25/OHC/CAB/PTGI/Mifi du 12 septembre 2019 par laquelle le Président du TGI de la Mifi a ordonné la libération immédiate du nommé P. R. ; Ordonnance no43/HC du 22 novembre 2018 par laquelle la même autorité a ordonné la libération du sieur K. P. D., etc.).

95. Au cours de la période sous revue, aucune sanction disciplinaire n’a été prononcée contre les Magistrats du chef de violation de la durée maximale de la détention provisoire prévue par la loi.

15. Les conditions de détention (suite)

a) Les avancées sur l’amélioration des conditions de détention

Les conditions d’hébergement

96. La carte pénitentiaire révèle que 79 prisons sont opérationnelles et 12 projets de construction sont en cours. L’État a poursuivi ses efforts de réhabilitation et d’équipement des prisons. Ainsi, la Prison Secondaire de Bali dans la Région du Nord-Ouest, devenue opérationnelle en 2016, a été équipée en matériel de bureau, d’infirmerie, de cuisine et en literie en 2017. La Prison Centrale de Yaoundé pour sa part a bénéficié du matériel d’infirmerie. La Prison principale de Kumba a été entièrement réhabilitée en 2018. Des fosses septiques ont été construites à la Prison Centrale de Buea. La Prison secondaire de Bengbis s’est vue dotée de nouveaux équipements en 2018.

97. L’apparition de la pandémie à coronavirus en 2020 a eu un impact significatif sur la mise en œuvre de la politique de réhabilitation pénitentiaire. Malgré tout, les travaux de réhabilitation et de construction des infrastructures pénitentiaires ont été poursuivis. Ainsi, la première phase de construction du complexe pénitentiaire de Douala-Ngoma a été achevée et réceptionnée. Sont également achevées, la réfection de la toiture du quartier féminin de la Prison principale de Monatélé, la construction d’une infirmerie à la Prison principale de Bangangté, et la construction d’un forage à motricité humaine et d’un bloc de latrines à la Prison principale d’Ambam. La Prison de Djoum a connu des travaux de réaménagement.

L’alimentation des détenus

98.Le budget alloué à l’alimentation des détenus est en constante augmentation, passant de 2 570 000 000 FCFA en 2016 à 3 070 000 000 FCFA en 2017, puis à 4 470 000 000 F CFA en 2018 et 2019, et à 5 015 891 000 FCFA en 2020, soit une augmentation de 45,65%, ce qui a permis d’accroitre la ration alimentaire journalière par détenu de 290 FCFA à 408 FCFA, puis à 421 FCFA par détenu par jour. De plus, le Gouvernement admet l’appui aux personnes détenues par leurs familles.

L’eau et l’énergie

99. De 2017 à 2021, la plupart des prisons étaient alimentées en électricité et en eau potable. Les points d’eau ont été aménagés dans les Prisons Centrales de Bamenda, Douala et Yaoundé. Les Prisons Centrales de Bertoua, Bafoussam et Maroua disposent des forages qui sont souvent utilisés lors des pénuries ou coupures d’eau courante.

100. Les prisons sont connectées aux sources d’énergie hydroélectriques. Toutes les prisons centrales ont été dotées de groupes électrogènes d’une puissance de 175 KW pour faire face aux coupures d’énergie électrique

La couverture sanitaire

101. Pour une meilleure prise en charge sanitaire des détenus, chaque prison disposait d’une infirmerie, d’une pharmacie et d’un laboratoire. Les cas graves sont référés dans les hôpitaux environnants. Le budget alloué à la couverture sanitaire en 2017 s’élevait à 150 640 000 FCFA pour 30 701 détenus, soit 4 907 F CFA le montant annuel par détenu. En 2018, ce budget a connu une hausse significative, passant à 1 050 000 000 FCFA pour 31 815 détenus. Il est resté constant en 2019. Le budget n’a subi aucune modification en 2020. Il se chiffrait à 1 015 000 000 FCFA pour 26 800 détenus, soit le ratio de 32 227 FCFA par détenu et par an. Le nombre total de personnels pénitentiaires médico-sanitaires s’élevait à 273 en 2017. Ce nombre au 31 décembre 2020 s’élevait à 272. Le ratio infirmier/détenu de 1/50, le ratio aide-soignant/détenu de 1/80, celui de technicien assistant de laboratoire/détenu de 1/60, et le ratio personnel d’assistance sociale/détenu de 1/70.

102. En 2019, un total de 65 901 consultations de routines a été effectué avec 1 455 cas référés pour des consultations externes qui ont abouti à 377 hospitalisations externes et même à des cas d’évacuation à l’étranger. En 2018, l’on a enregistré 1 189 consultations externes et 235 hospitalisations externes, et en 2020, 180 hospitalisations externes et 1 617 consultations externes.

b) Sur l’examen médical lors de l’admission dans un centre de détention

103. Au moment de l’incarcération, les détenus sont soumis à l’examen médical d’entrée, suivi de l’ouverture d’un dossier. Cet examen permet de détecter des cas présumés de torture ou de mauvais traitements. Dans cette hypothèse, l’intéressé est retourné au Parquet aux fins d’ouverture d’une enquête.

c) Les mesures spéciales prises au profit des enfants en conflit avec la loi pénale

104. Des dispositions du CPP énoncent des garanties en faveur des enfants en conflit avec la loi, notamment ceux en détention. Dans les prisons, les enfants sont détenus dans des quartiers séparés des adultes conformément à l’article 20 (1) du Décret no92-052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun. En outre, les acteurs du secteur sont formés sur les droits des enfants en conflit avec la loi dans l’optique d’améliorer leur protection. En 2019 par exemple, le Ministère de la Justice, en collaboration avec l’UNICEF, a formé 46 Magistrats, 19 Officiers de la Police et de la Gendarmerie, ainsi que 19 personnels de l’Administration Pénitentiaire.

105. Pour ce qui est de l’éducation, bien qu’il n’existe pas de système d’éducation formel en prison, il existe des infrastructures permettant aux enfants de prendre des cours et de se présenter aux examens officiels. En 2018, sur 47 candidats présentés aux différents examens organisés par le Ministère de l’Education de Base et l’Office du Baccalauréat, 33 ont été admis, dont la plupart était issu du Centre socio-éducatif de la Prison Centrale de Yaoundé. Au cours de l’année académique 2018-2019, à la Prison Centrale de Garoua, les 10 enfants candidats au Certificat d’Etudes Primairesont tous été admis. En 2020, sur 45 candidats ayant présenté les examens officiels en prison au Cameroun, 23 ont été admis.

106. Certaines prisons, à l’instar des Prisons Centrales de Bamenda et d’Ebolowa, ont fourni une formation professionnelle aux détenus. En 2018, à la Prison Centrale de Bamenda, des cours d’électricité et de mécanique automobile ont été dispensés à 8 enfants détenus pendant deux ans. Cette formation a été sanctionnée par des attestations de fin de formation délivrées par le Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle.

107. S’agissant de la réhabilitation, il existe des centres de réhabilitation et de réinsertion sociale pour mineurs qui accueillent des enfants en conflit avec la loi. Au cours de la période de référence, à l’échelle nationale, près de 548 enfants ont été placés dans des institutions spécialisées en vue de leur réinsertion. En outre, 512 délinquants mineurs ont été suivis à travers le pays par des délégués à la liberté surveillée en vue de leur réinsertion.

d) Les mesures spéciales prises au profit des femmes détenues

108. Les femmes sont détenues séparément des hommes dans toutes les prisons. Dans certaines de ces prisons (notamment les 10 prisons centrales), des ateliers de coiffure et de couture ainsi que des formations en informatique sont organisés pour faciliter leur réinsertion sociale après leur sortie de prison.

109.Les femmes enceintes détenues reçoivent des soins médicaux prodigués par les services médicaux des prisons et au besoin, elles sont escortées vers des centres spécialisés pour recevoir des soins pré et postnataux. La question des mères vivant avec leurs enfants en prison demeurant une préoccupation majeure, un atelier de réflexion national, tenu à Yaoundé du 20 au 21 février 2019, y a été consacrée. L’un des objectifs de cet atelier était de proposer des solutions aux défis rencontrés par cette catégorie de femme.

e) Les mesures de facilitation des visites des détenus par leurs proches

110. Pour ce qui est des personnes condamnées par les tribunaux militaires, les membres de leurs familles, tout comme ceux des personnes condamnées par les tribunaux civils, peuvent leur rendre visites suivant les horaires fixés par les régisseurs de prisons. Ces visites sont régies par les articles 37(1), 38, 39 et 41 du Décret portant régime pénitentiaire au Cameroun.

16. Les conditions de détention (suite)

a) Les mesures prises pour interdire l’usage des chaînes comme mesure disciplinaire

111.Bien que le Décret no92/052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun n’ait pas encore été modifié, une réflexion dans ce sens est en cours. Par ailleurs, le personnel de l’Administration Pénitentiaire est constamment sensibilisé à la prévention de la violence en prison.

b) Sur les actes de violence entre détenus

112. Des cas de violences entre détenus ont été enregistrés au cours des mutineries ayant eu lieu le 23 juillet 2019 à la Prison centrale de Buea, ainsi que les 23 avril et 22 juillet 2019 à la Prison centrale de Yaoundé. D’autres cas ont été enregistrés à la Prison Centrale de Ngaoundéré en 2020. Les auteurs desdites violences ont été identifiés, poursuivis devant les juridictions compétentes et condamnés conformément à la loi.

c) Les mesures de lutte contre la corruption dans les prisons

113. Des mesures judiciaires et disciplinaires ont été prises pour éradiquer la corruption. L’IGAPEN a mené des missions d’inspection et de contrôle dans 15 prisons en 2018 et dans 19 prisons en 2019.

114.Des auteurs d’actes de corruption ont été sanctionnés, au rang desquels le Gardien des Prisons N.A. pour avoir extorqué de l’argent à un détenu de la Prison principale de Sa’a, le Gardien-Chef des Prisons M.M.J.C pour avoir escroqué un détenu, et le nommé T.T.E.P en service à la Prison secondaire de Mantoum qui a été sanctionné pour pratique de corruption. En outre, le Régisseur de la Prison Principale d’Edéa a été sanctionné pour des faits présumés de corruption suivant Note de service no012/N/CAB/MINJUSTICE/IGAPEN/INSP2/20 du 27 novembre 2020.

115.Par ailleurs, des poursuites judiciaires avaient été engagées contre certains personnels de l’Administration Pénitentiaire soupçonnés de corruption, notamment un Gardien-Chef des Prisons qui avait, en 2018, fait l’objet d’un mandat de détention provisoire à la Prison Centrale de Buea.

116. L’IGAPEN mène régulièrement des campagnes de sensibilisation sur les méfaits de la corruption en milieu carcéral tout en mettant l’accent sur la gratuité des services dans les prisons. Cette sensibilisation a été menée par le biais des affiches. En 2020, l’IGAPEN a également organisé des causeries éducatives à l’intention des détenus dans le but de les sensibiliser sur la nécessité de dénoncer les actes de corruption. De plus, l’IGAPEN a mis sur pied des microcellules auprès desquelles les actes de corruption enregistrés dans les prisons peuvent être dénoncés.

117. En outre, le Gouvernement a entrepris d’introduire un module sur la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption dans la formation du personnel pénitentiaire à l’Ecole Nationale de l’Administration Pénitentiaire de Buea.

d) Les mesures de lutte contre le trafic des stupéfiants dans les prisons

118.Des fouilles ont été organisées dans les prisons afin de saisir de la drogue, comme ce fût le cas en 2020 à la Prison Principale de Bafang, où une importante quantité de cannabis sativa a été saisie.

119.Des sanctions disciplinaires ont été infligées aux personnels impliqués dans le trafic des stupéfiants. En 2017, des procédures disciplinaires ont été engagées contre 84 personnels de l’Administration Pénitentiaire, dont un Intendant des Prisons en service à la Prison Principale d’Edéa et un Gardien Principal des Prisons en service à la Prison Principale de Ntui. En 2020, un Gardien Principal des Prisons en service à la Prison Principale de Bangangté a été interdit d’accès à ladite prison suite à son implication dans le trafic de stupéfiants. Par ailleurs, 3 personnels de l’Administration Pénitentiaire en service à la Prison Centrale de Bafoussam ont été interdits d’accès à ladite prison pour avoir fourni de la drogue à des détenus. En outre, un Gardien des Prisons a, le 16 juillet 2020, écopé d’un retard à l’avancement d’un an pour trafic de substances psychotropes.

120. En outre, des poursuites judiciaires ont été engagées contre des personnels de l’Administration Pénitentiaire, notamment contre 2 personnels de la Prison Centrale de Bafoussam en 2018 pour avoir introduit des substances prohibées (tramadol, cigarettes, cannabis sativa et tabac) dans l’enceinte de la prison le 23 décembre 2018.

17. Les décès en détention

121. Globalement, en 2018, l’on a dénombré 86 décès survenus en détention dans les prisons, 170 en 2019 et 98 en 2020, soit des taux de mortalité respectifs de 0,42 %, 0,67 % et 0,46 %. Ces décès étaient dus au VIH/Sida, au paludisme et aux affections cutanées et respiratoires. L’État du Cameroun multiplie les efforts pour améliorer la prise en charge sanitaire des détenus afin de mitiger le nombre de décès en détention (voir point 15 (a) § 101).

122. S’agissant des décès en garde à vue, les enquêtes sont ouvertes et les poursuites engagées chaque fois qu’un cas est enregistré. C’est dans ce sillage que le jugement de l’Adjudant-Chef O.N.V. est actuellement en cours devant le Tribunal Militaire de Maroua suite au décès du nommé A.R. le 14 avril 2020 dans la chambre de sûreté de la Brigade de Gendarmerie de Moutourwa dans la Région de l’Extrême-Nord. De même, le Maréchal des Logis-Chef Y.O. est poursuivi devant le Tribunal Militaire de Douala pour y répondre des faits de coups mortels suite au décès du nommé K.O.C. dans la cellule du Groupement de Gendarmerie Territoriale de Douala.

123. Concernant le décès de NSEKA ABASSY, survenu le 28 juin 2018 à Kombo Abedimo dans le Département du Ndian, alors qu’il essayait d’échapper à une arrestation, le Commandant de Brigade de la Gendarmerie de Kombo Abedimo, le nommé K.M.A lui a tiré une balle dans la jambe. Il a été conduit à l’hôpital militaire de Buea où il a rendu l’âme le 18 juillet 2018. Par la suite, une enquête préliminaire a été ouverte contre le Commandant de Brigade, mais ce dernier est décédé le 13 novembre 2019 à l’hôpital militaire de Yaoundé alors que ladite enquête suivait son cours. Suite à son décès, l’action publique s’est éteinte conformément à l’article 62(1)(a) du CPP.

124. S’agissant du décès du nommé TIENTCHEU Laurent, survenu le 8 août 2018 à la Prison Principale de Kumba, région du Sud-Ouest, l’autopsie pratiquée a révélé qu’il est décédé des suites « d’hypoglycémie ».

125. S’agissant des allégations de décès de Ludovic TCHUIDJAN, Charles NVONDO NGA, MOHAMADOU LAWALet de quatre hommes dans la ville de Belo survenus en 2018, les recherches se poursuivaient à l’effet de vérifier l’effectivité de ces décès, d’en déterminer les causes éventuelles et d’en dégager les responsabilités le cas échéant.

Articles 12 et 13

18. Informations sur les suites de certaines procédures

a) Les suites des enquêtes ouvertes contre des gendarmes en 2018

126. Les investigations se poursuivent.

b) Les suites des sanctions disciplinaires infligées aux fonctionnaires de police en 2017

127.Les sanctions disciplinaires infligées aux fonctionnaires de police en 2017 ont effectivement été mises en œuvre par la Délégation Générale à la Sûreté Nationale (DGSN).

c) Les suites des sanctions infligées aux agents de l’Administration Pénitentiaire en 2017

128.Les sanctions infligées aux agents de l’administration pénitentiaire en 2017 ont été effectivement mises en application par le Ministère de la Justice.

d) Les suites des actions judiciaires engagées contre 75 éléments des FDS en 2017

129.En 2017, le Tribunal Militaire de Bertoua a rendu les jugements suivants contre des membres des Forces de Défense et de Sécurité. Par Jugement no62/17 du 30 novembre 2017, l’accusé A.A.P, officier de gendarmerie, a été reconnu coupable d’homicide involontaire et condamné à une peine d’emprisonnement de 3 ans et à une amende de 15 000 FCFA. Par Jugement no26/17 du 29 juin 2017, le Maréchal des Logis M.N.T a été reconnu coupable d’homicide involontaire et condamné à payer une amende de 300 000 FCFA. Pour la décision rendue dans l’affaire Ibrahim BELLO, voir point 1 (a) §... ; pour la décision rendue dans le cadre des évènements survenus à Ngarbuh, voir point 25 (a), § 165 et 166 ; pour la décision rendue relativement aux faits survenus à Zeleved, voir point 25 (f), § 170-172.

130.Pour les autres cas, certaines procédures se sont soldées par un non-lieu, d’autres sont encore pendantes.

e) Les résultats des enquêtes ouvertes sur certains cas de torture et de détention au secret

131.Lors de la mutinerie survenue le 22 juillet 2019 à la Prison Centrale de Yaoundé, les forces de sécurité ont procédé à l’interpellation de certains détenus pour un interrogatoire. Ceux-ci ont ensuite été ramenés dans leurs cellules respectives. À l’issue des poursuites judiciaires qui avaient été engagées, certains détenus ont été acquittés, tandis que d’autres ont été reconnus coupables et condamnés.

132.Les poursuites judiciaires engagées contre 59 militants du MRC ontété arrêtées pour certains d’entre eux, y compris le leader du MRC. Ceux-ci ont été libérés le 5 octobre 2019 (voir point 4 § 38).

19. Sur les mesures législatives relatives à l’article 64 du CPP, l’institution d’une instance d’enquête extérieure aux FDS et la suspension de fonction automatique des auteurs d’actes de torture ou de mauvais traitement

133. Sur l’institution d’une instance d’enquête extérieure aux FDS, la CDHC, qui est dotée du mandat de Mécanisme National de Prévention de la Torture, joue en partie ce rôle, notamment en ce qui concerne les cas de torture, de mauvais traitement, et plus généralement de violations des droits de l’homme, commis par les FDS (voir point 6 (c)).

134. L’État a pris note des observations relatives à la modification de l’article 64 du CPP.

20. Informations sur les enquêtes et les actions judiciaires et disciplinaires pour acte de torture

135. Des enquêtes étaient systématiquement ouvertes, et les poursuites judiciaires sont engagées le cas échéant et des sanctions prononcées chaque fois qu’un acte de torture ou de mauvais traitement étaient dénoncés aux autorités compétentes.

136. À titre d’exemple, l’on peut évoquer la poursuite devant le Tribunal Militaire de Ngaoundéré du Soldat de 1ère classe L.B.D. pour les faits de coups mortels et torture sur le nommé J.P. perpétrés le 18 mai 2021 au poste de contrôle de Koumtchoum. Egalement, le jugement de l’Adjudant M.G. est en cours devant le Tribunal Militaire de Maroua pour les faits de torture, arrestation et séquestration commis le 28 juin 2017 à Mora au préjudice du nommé A.A.A. Pour d’autres cas, voir point 1(a) § 8 et 10, point 25.

a) Enquêtes sur les actes de torture et mauvais traitement commis à l’encontre de Bouba Yaouba , David Edmond Ngoumpoungoun NTIECHE, Aboubakary Siddiki et Abdoulaye Harissou , Blaise Eleme Koagne Nyepo et Wirba Didymus Nsoseka

137. Les investigations ont été ouvertes sur ces allégations à la suite des observations du Comité, à l’effet de vérifier leur véracité et d’établir les responsabilités éventuelles.

b) Sur le cas de Ibrahim BELLO

138.Voir point 1(a) § 10.

21. Les mesures garantissant la confidentialité et l’indépendance du dispositif de dépôt de plainte en cas de torture

139. Des mesures d’ordre général contribuent à garantir la confidentialité et l’indépendance du dispositif de dépôt de plainte en cas de torture ou de mauvais traitements, lorsque les victimes sont privées de leur liberté. Tel est le cas du secret professionnel, auquel sont tenus tous les agents publics ayant connaissance du dépôt d’une plainte.

140. Dans le cadre de son mandat du MNPT, les rapports de visites de lieux de privation de libertés établis par la CDHC ne sont pas rendus publics, ceux-ci étant transmis exclusivement aux autorités compétentes et les observations faites dans le cadre de ces visites donnent lieu à des dialogues constructifs avec lesdites autorités, conformément aux dispositions de la Loi no2019/014 du 19 juillet 2019.

141. Sur l’indépendance, la dénonciation des faits de torture ou de mauvais traitements peut être faite par un tiers. Bien plus, toute personne (y compris les fonctionnaires) ayant connaissance de tels faits est tenue, sous peine de poursuites, d’en aviser directement et immédiatement, soit le Procureur de la République, soit tout OPJ, ou à défaut, toute Autorité administrative de la localité. Davantage, les dénonciations et les plaintes ne sont assujetties à aucune forme et sont dispensées du droit de timbre. Les autorités ne peuvent refuser de les recevoir (article 135 du CPP)sous peine de poursuites judiciaires du chef de non-intervention (article 171 du CP). En outre, la dénonciation des faits de torture peut se faire, même anonymement, à travers les numéros verts de la Police (17, 117 et 1500) et de la Gendarmerie (13 et 118).

142. Le processus de mise en place du programme de protection des témoins et des victimes de torture prévu dans le Plan d’action national de promotion et de protection des Droits de l’Homme au Cameroun (2015-2019) était en cours.

Article 14

22. Les mesures de réparation et de réadaptation des victimes d’actes de torture

a) Sur les mesures de réparation

143.L’article 237 du CPP a créé une Commission d’indemnisation en raison d’une détention provisoire ou d’une garde à vue abusive.Cette Commission a effectivement été mise sur pied et est fonctionnelle.

144.Les tribunaux allouent également les dommages et intérêts aux victimes de torture. À titre d’illustration, le Tribunal militaire de Yaoundé dans son jugement du 20 septembre 2018, a condamné le nommé D.M.L.L, Officier de Gendarmerie, à 30 mois de prison pour actes de torture infligés à MOUSSA MOUPAIN qui en est décédé par la suite et a condamné l’État du Cameroun à payer la somme de 10 000 000 FCFA à titre de dommages et intérêts aux ayant-droits de la victime. De même, après avoir condamné le nommé N.A. à 70 ans d’emprisonnement par jugement no02/CRIM du 28 février 2018 pour les faits d’assassinat commis au préjudice des nommées I.M. et D.I., le TGI du Djérem a alloué aux ayants droits des victimes les sommes respectives de 1 000 000 F et 2 000 000 F CFA à titre de dommages et intérêts. Dans le même sillage, par Arrêt no138/COR du 20 décembre 2018, la Cour d’Appel de l’Adamaoua, après avoir déclaré le nommé A.A. coupable des faits de blessures légères, a alloué à la victime N.I. la somme de 1 200 000 F CFA à titre de réparation. Pour la réparation pécuniaire dans l’affaire Ibrahim BELLO (voir point 1 (a), § 10).

b) Sur les services spécialisés de réadaptation

145.Il existe des centres dans lesquels les personnes victimes de torture peuvent être prises en charge. Le Centre National de Réhabilitation des Personnes Handicapées Cardinal Paul Emile Leger en fait partie et offre des soins de réhabilitation aux personnes handicapées et à bien d’autres personnes, notamment celles victimes de torture. Ce centre a par exemple pris en charge le nommé Ibrahim BELLO (voir point 1(a), § 10), victime de torture. Ce Centre met en œuvre la politique du Gouvernement en matière de réhabilitation et fournit des soins psychosociaux.

146.S’agissant du financement des autres soins proposés par des organisations non gouvernementales, le Gouvernement travaille en étroite collaboration avec les ONG impliquées dans la réhabilitation des victimes de violation des Droits de l’Homme de manière générale.

23. Les mesures de réparation et de réadaptation des victimes d’actes de torture (suite)

147.Les statistiques annuelles sur les mesures de réparation et d’indemnisation ne sont pas disponibles. Il faut préciser qu’en application de l’article 60 du CPP, la torture donne lieu à une action civile qui tend à la réparation du dommage, laquelle peut soit être exercée par la victime en même temps que l’action publique devant la juridiction pénale au moyen de la constitution de partie civile, soit être exercée devant la juridiction civile séparément de l’action publique. À titre d’illustration, voir affaire Ibrahim BELLO (point 1(a) § 10) ; affaire MOUSSA MOUPAIN (point 22, § 144).

148.S’agissant des affaires objet des jugements no006/19 du 22 janvier 2019 du Tribunal Militaire de Buea et no060/17 du 30 novembre 2017 du Tribunal Militaire de Bertoua, les victimes ou les ayants droit ne se sont pas constitués partie civile et n’ont donc pas formulé de demande de réparation du préjudice subi. L’option de la saisine du Juge civil aux fins de réparation leur restait ouverte.

Article 15

24. Dispositif de lutte contre l’extorsion des aveux

a) Mesures prises pour rejeter les aveux extorqués

149. Aux termes de l’article 315 alinéa 2 du CPP, « l’aveu n’est pas admis comme moyen de preuve s’il a été obtenu par contrainte, violence ou menace ou contre promesse d’un avantage quelconque ou par tout autre moyen portant atteinte à la libre volonté de son auteur ». En outre, l’extorsion des aveux porte atteinte aux droits de la défense et est sanctionnée de nullité de la procédure (article 3 du CPP).

150. Pour donner plein effet aux dispositions de l’article 315 du CPP sur l’irrecevabilité des éléments de preuve obtenus par la torture, des sessions de renforcement des capacités ont été organisées à l’intention des juges civils et militaires. Ainsi, en décembre 2019, un module portant sur la nullité ou irrecevabilité des preuves obtenues par la torture en matière de lutte contre le terrorisme a été développé lors d’un séminaire organisé à Yaoundé par le Ministère de la Justice avec l’appui de l’ONUDC.

b)Données sur les affaires relatives aux aveux extorqués

151. Le Tribunal Militaire de Bafoussam a, par jugement no69/00 du 21 septembre 2020 (Affaire Ministère Public contre K.R.), annulé purement et simplement la procédure au motif que les aveux du prévenu avaient été obtenus sous la contrainte. Nonobstant l’indisponibilité des statistiques générales des affaires dans lesquelles les personnes poursuivies ont affirmé que leurs aveux ont été extorqués par la torture, il reste que les juridictions font application des dispositions de l’article 315 du CPP chaque fois que l’extorsion des aveux sous la torture est avérée.

152.En tout état de cause, en cas d’allégation de torture par une personne poursuivie ou détenue, une enquête est systématiquement ouverte pour y faire la lumière (Cf. affaire Ibrahim BELLO, affaire E.J.B et autres, voir point 1(a), § 8 et 10 ; affaire MOUSSA MOUPAIN voir point 22, § 144).

Article 16

25. Renseignements sur les allégations d’usage excessif de la force et les exécutions extrajudiciaires dans le cadre des opérations anti-insurrectionnelles et anti-terroristes

a)Sur les mesures de protection des civils

153. Des actions multiples sont menées par l’État en vue de protéger les civils, aussi bien dans les zones en crise que dans les autres localités. L’on peut évoquer :

Le déploiement des Forces de Défense et de Sécurité (FDS)

154. À l’effet d’assurer la protection de tous les citoyens et de leurs biens sur toute l’étendue du territoire, et en particulier dans les localités en proie à la crise sécuritaire, l’État a déployé permanemment ses FDS. Il a été mis en place une « Police de proximité », corollaire d’un partenariat police/population, à travers l’instauration et la vulgarisation des numéros d’utilité publique, que sont le « 1500 », le « 17 » et le « 117 ». Ces numéros permettent à toute personne victime ou témoin d’un cas d’atteinte aux Droits de l’Homme, même perpétré par un agent public, de bénéficier systématiquement de l’assistance d’une unité opérationnelle de la Police ou de porter directement ces faits à la connaissance du Délégué Général à la Sûreté Nationale.

La lutte contre le phénomène des prises d’otages

155. Face à la résurgence du phénomène de prise d’otages des civils dans les Régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, le Gouvernement a mis en œuvre des stratégies de lutte qui ont abouti à la libération des victimes, l’interpellation et la poursuite des auteurs devant les juridictions. Ainsi, en 2017, des poursuites ont été engagées contre 177 personnes pour les faits d’arrestation et séquestration, d’enlèvements de mineurs avec fraude ou violence résultant de ces prises d’otages. Des condamnations ont été prononcées à l’encontre de 6 accusés.

La lutte contre la prolifération et la circulation des armes légères et de petit calibre

156. La circulation et l’usage incontrôlés des armes sur le territoire national sont à l’origine de nombreuses atteintes au droit à la vie. Dans l’optique d’assurer une meilleure régulation et un contrôle plus renforcé de ce phénomène, l’État a, au cours de la période sous revue, mené des actions de contrôle de terrain qui ont permis, entre autres, la saisie le 3 août 2017, d’une cargaison d’armes de guerre dans la localité de Mbengwi, Région du Nord-Ouest. Il convient de signaler qu’un document final intitulé « Déclaration de Yaoundé sur le flux illicite des armes légères et de petit calibre en Afrique centrale » a sanctionné les assises sous-régionales tenues du 13 au 14 juin 2018 à Yaoundé en vue d’intensifier le combat contre la circulation de ce type d’armes. Le Gouvernement a suspendu l’activité de vente des armes et lancé le recensement des armes en circulation. En outre, par Décret no2018/456 du 3 août 2018, le Cameroun a ratifié l’Accord de coopération entre le Cameroun et le Nigéria sur la non-prolifération des armes légères et de petit calibre signé à Abuja le 6 février 2018.

L’incrimination des exactions et la lutte contre l’impunité des agents publics

157. De multiples incriminations protectrices des citoyens et des peines sont prévues dans le Code Pénal, dans le CJM, et dans diverses autres lois particulières. Le CPP règlemente clairement la voie à suivre en cas de commission d’une infraction, même par les FDS.

158. L’État s’emploie permanemment à lutter contre l’impunité des personnels chargés de l’application de la loi, en veillant à ce que les auteurs des actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants soient poursuivis devant les juridictions compétentes et sanctionnés conformément à la législation en vigueur. À titre d’exemple, le Maréchal des Logis A.M. était poursuivi devant le Tribunal Militaire de Maroua pour les faits de coups avec blessures graves commis le 18 août 2020 à Djeki (Région de l’Extrême-Nord) contre A.B. De manière générale, les rapports successifs du Ministère de la Justice sur l’état des Droits de l’Homme au Cameroun relayent suffisamment les sanctions pénales, civiles et disciplinaires infligées aux FDS déclarées coupables de tels faits.

b)Sur les mesures de contrôle des forces de sécurité

Le contrôle par la hiérarchie militaire

159. Par Lettre-Circulaire no190256/DV/MINDEF/01 du 18 janvier 2019 évoquée plus haut, le Ministre de la Défense a rappelé à l’attention des FDS placées sous son autorité, l’interdiction légale de la torture, des traitements cruels, inhumains ou dégradants et des détentions arbitraires. À l’effet d’obvier les éventuelles violations de ces interdictions, il a prescrit l’ouverture, dans tous les lieux de rétention, d’un registre des personnes interpellées, consultable par les familles. Cette prescription est strictement respectée dans les différentes Unités de police et de gendarmerie.

160. Le contrôle permanent du respect de ces prescriptions se fait au moyen des procédés tels que les Bulletins de Renseignement Quotidien (BRQ) exigés des Chefs d’Unités opérationnelles.

Le contrôle des Unités de police judiciaire par le Procureur de la République

161. Aux termes de l’article 137 du CPP, le Procureur de la République dirige et contrôle les diligences des officiers et agents de police judiciaire. Il peut à tout moment se transporter dans les locaux de police ou de gendarmerie pour procéder au contrôle de la garde à vue. Au cours de ce contrôle, les personnes dont il ordonne la libération d’office ou en exécution d’une ordonnance d’habeas corpus doivent être immédiatement libérées, sous peine de poursuites judiciaires pour détention illégale contre l’OPJ responsable du local où s’effectue la garde à vue.

Le contrôle par la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun et les OSC

162. La CDHC, qui est une institution indépendante de promotion et de protection des Droits de l’Homme, a reçu mandat pour visiter tous les lieux de privation de liberté et en dresser rapport. Les Organisations de la Société Civile, qui sont nombreuses à mener leurs activités sur toute l’étendue du territoire, jouent également un rôle important en termes de dénonciation et d’alerte (voir points 1 (a), § 11 et 12 ; 6 (c), § 58-60).

c)Sur les résultats des enquêtes menées dans le cadre de l’opération de ratissage à Magdémé et à Doublé le 27 décembre 2014 et sur les 130 personnes disparues

163.Une enquête a été menée et les poursuites ont été engagées contre les nommés Z.O.C.G., B.P. et E.E. devant le Tribunal Militaire de Yaoundé, qui a vidé sa saisine par jugement no255/COR du 18 octobre 2018.

d)Sur le processus d’exhumation, d’analyse et d’identification des corps dans les sites présumés de fosses communes

164.L’État n’a pas connaissance de l’existence de fosses communes sur son territoire, ni dans la localité de Mindif, ni ailleurs.

e)Les informations sur certains cas spécifiques signalés par le Comité

a) Sur les évènements survenus à Ngarbuh en février 2020

165. Au début du mois de février 2020, les Services de renseignement ont été informés de ce que le village dénommé Ngarbuh-Ntumbaw, situé dans le Département du Donga-Mantung, Région du Nord-Ouest, servait de base arrière aux séparatistes, qui y ont installé un dépôt d’armes, de munitions, d’explosifs et de carburant d’origine illicite. Suite à une vaste opération de ratissage menée dans le Département par les FDS, plusieurs factions rivales des sécessionnistes, dont certains membres étaient vêtus d’uniformes de l’armée, ont convergé à Ngarbuh pour s’y retrancher. Afin de délivrer ce village de cette emprise, les FDS ont entrepris d’y mener une opération le 14 février 2020, aidés en cela par les membres du comité de vigilance. Au cours de la confrontation, il y a eu des échanges de tirs, et le dépôt d’armes, de munitions et d’explosifs a explosé. C’est dans cet imbroglio que certains civils, dont quelques enfants, pris entre deux feux, ont perdu la vie.

166. À l’effet d’élucider les circonstances de cette tragédie, d’en déterminer les auteurs et d’établir les responsabilités, les Hautes Autorités de l’État ont mis sur pied une Commission d’enquête mixte. Après les investigations sur le terrain, cette Commission a relevé que quatre Militaires n’avaient pas convenablement conduit l’opération de délivrance de Ngarbuh de l’étau des terroristes séparatistes, du point de vue de la supervision et de l’exécution mutatis mutandis. La Commission a conclu que cette défaillance a pu entraîner les dommages collatéraux déplorés. Afin d’en tirer les conséquences, une procédure disciplinaire a été engagée contre l’Officier Supérieur. S’agissant des trois autres Militaires, ils ont été mis à la disposition du Commissaire du Gouvernement près le Tribunal Militaire de Yaoundé, qui a requis l’ouverture d’une information judiciaire contre eux, pour les faits de coaction d’assassinat, incendie et destructions, violences sur femme enceinte et violation de consignes. Après les avoir inculpés desdites infractions, le Juge d’instruction les a placés sous mandats de détention provisoire le 24 avril 2020, et a clôturé son information judiciaire le 20 octobre 2020, en les renvoyant devant le Tribunal Militaire de Yaoundé statuant en matière criminelle, où l’affaire est encore pendante.

b) Sur les pillages, les incendies de villages et les meurtres de civils anglophones qui auraient été perpétrés par l’armée, notamment à Babubock, à Bangem et à Ndoh en janvier 2020, et dans les villages de Kwakwa, de Dadi, de Kajifu et de Bodam en décembre 2017

167. Les enquêtes sont en cours à l’effet de vérifier l’effectivité de ces allégations et d’établir les responsabilités éventuelles.

168. Il est cependant utile de relever de manière générale que l’armée mène régulièrement des opérations de sécurisation des localités dans les zones en proie à la crise sécuritaire, lesquelles ont largement contribué à stabiliser la situation. Les bavures commises dans le cadre desdites opérations par les FDS font systématiquement l’objet d’enquêtes et de poursuites.

c)Sur l’exécution de 10 hommes dans le village de Bole Bakundu le 6 février 2019, par des soldats du Bataillon d’Intervention Rapide

d)Sur l’exécution de 5 civils, dont une personne handicapée, le 4 avril 2019 dans le village de Meluf par des gendarmes et des membres du Bataillon d’Intervention Rapide

e)Sur l’exécution d’un homme et la destruction de maisons dans le village de Mankon le 15 mai 2019, et l’exécution de 2 hommes le 10 juillet 2019

169. Les enquêtes sont en cours afin de vérifier la véracité de ces allégations et d’établir les responsabilités éventuelles.

f) Sur l’exécution en juillet 2018 de 2 femmes et de leurs enfants, accusés d’appartenir à Boko Haram, par des membres de l’armée camerounaise

170. Courant 2015, dans un village appelé Zeleved, situé dans l’Arrondissement de Mayo Moskota, Région de l’Extrême-Nord du Cameroun, un accrochage est survenu entre les Forces de Défense camerounaises et certains combattants du groupe terroriste Boko Haram. Ces combattants ont battu en retraite en abandonnant deux femmes et deux enfants. Ceux-ci ont été interpellés et conduits au Poste commandé par un Officier. Ayant été subséquemment identifiés par les populations locales comme étant des adeptes du groupe terroriste Boko Haram, cet Officier a ordonné à ses hommes de les neutraliser. En exécution de ces ordres, trois militaires ont conduit les intéressés au pied du mont Vigibi, où ils les ont neutralisés, en présence d’un quatrième militaire qui a filmé la scène.

171. Ayant eu connaissance des faits courant juillet 2018 suite à la diffusion des images de la scène macabre sur les réseaux sociaux, les Hautes Autorités de l’État ont aussitôt instruit l’ouverture d’une enquête, qui a conduit à l’arrestation de tous les militaires impliqués et à l’ouverture d’une information judiciaire contre eux. Ils ont tous été placés sous mandat de détention provisoire par le Juge d’instruction, qui a clôturé son office en les renvoyant en jugement devant le Tribunal militaire de Yaoundé, pour y répondre des faits de coaction et complicité d’assassinat et de violation de consignes.

172. Après instruction de l’affaire, le Tribunal Militaire de Yaoundé a vidé sa saisine le 21 septembre 2020. L’officier et les trois hommes de rang qui ont ouvert le feu ont été condamnés à 10 ans d’emprisonnement, tandis que le militaire qui a filmé la scène à été condamné à 2 ans d’emprisonnement. La décision a fait l’objet d’appel du Ministère public le 30 septembre 2020. L’affaire était pendante devant la Cour d’Appel du Centre.

g) Sur l’exécution de 4 civils et la disparition forcée de 2 autres le 26 juin 2018 dans le village de Mouri, dans la région de l’Extrême-Nord, par des soldats de l’armée

h)Sur l’exécution de 2 hommes non armés par des soldats du Bataillon d’Intervention Rapide dans une zone de Buea connue sous le nom de Great Soppo, le 24 septembre 2018

173. Les investigations sont en cours afin de vérifier la véracité de ces allégations et établir les responsabilités éventuelles.

i) Sur la mort de 4 personnes dans la région de l’Extrême-Nord, courant avril 2015

174. Voir la réponse f) ci-dessus, § 170-172.

j) La mort d’un homme attribuée aux FDS au cours d’une opération d’interpellation de cultivateurs de chanvre le 4 septembre 2017, dans le village de Kifen

175. À la suite d’allégations d’usage abusif d’armes à feu ayant entrainé une mort d’homme au cours d’une opération d’interpellation des cultivateurs de chanvre indien le 4 septembre 2017 dans le village de Kifen (Département du Bui), conduite par les éléments de la Compagnie de Gendarmerie de Bui, le Commandant de cette unité a été relevé de ses fonctions et traduit avec ses éléments devant le Tribunal Militaire de Bamenda.

k)La proportion des Forces de Maintien de l’Ordre (FMO) formés en matière d’usage de la force

176. Tous les membres des FMO ont reçu une formation en matière d’usage de la force, conformément aux Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu. Cette formation était assurée tant au moment de la formation initiale des personnels concernés que dans le cadre des sessions de renforcement des capacités et des stages.

26. La situation des défenseurs des Droits de l’Homme

a)Les mesures générales de protection des défenseurs des Droits de l’Homme

177. Les défenseurs des Droits de l’Homme, dont le nombre était sans cesse croissant au fil des années, mènent leurs activités sur le territoire camerounais. L’État veille à leur sécurité, autant qu’à celle des autres citoyens et résidents. À cet effet, les enquêtes sont systématiquement ouvertes et les poursuites engagées chaque fois qu’une infraction consommée contre eux a été dénoncée ou a fait l’objet d’une plainte.

178. Les statistiques globales sur le nombre de plaintes, les résultats des enquêtes et les peines prononcées dans le cadre particulier des procédures concernant les défenseurs des Droits de l’Homme n’étaient pas disponibles.

b)Les informations sur quelques cas évoqués par le Comité

a)Sur le cas de Ahmed ABBA

179. Monsieur Ahmed ABBA a été interpellé le 30 juillet 2015 à Maroua, Région de l’Extrême-Nord, en raison de forts soupçons de sa collaboration avec les membres du groupe terroriste Boko Haram qui semaient la terreur dans la partie septentrionale du pays. Après l’enquête, il a été poursuivi devant le Tribunal Militaire de Yaoundé qui a une compétence nationale, pour les faits de non-dénonciation d’actes de terrorisme, apologie des actes de terrorisme et blanchiment du produit d’actes de terrorisme, infractions prévues et réprimées par les articles 4 et 8 de la Loi no2014/028 du 23 décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme. Vidant sa saisine le 20 avril 2017 après une procédure ayant respecté les règles fondamentales du procès équitable et les droits de la défense, ce Tribunal l’a déclaré non coupable des faits d’apologie des actes de terrorisme, et coupable des deux autres infractions. Le 24 avril 2017, il a été condamné à 10 ans d’emprisonnement. Suite à son appel, la Cour d’Appel du Centre l’a déclaré non coupable des faits de blanchiment du produit d’actes de terrorisme, mais coupable de ceux de non-dénonciation d’actes de terrorisme, et en répression, a réduit la peine à 24 mois d’emprisonnement par Arrêt rendu le 21 décembre 2017. L’intéressé a été libéré le lendemain du prononcé de cette décision.

180. Durant sa garde à vue lors de l’enquête policière et pendant sa détention provisoire à la Prison Centrale de Yaoundé, l’intéressé n’a pas subi d’acte de torture, ni d’intimidation.

b) Sur le cas de NJOKA Kinsley

181. Le nommé NJOKA Kingsley FOMONYUY était soupçonné d’être le coordonnateur de plusieurs groupes whatsApppro sécessionnistes, dont le groupe «  Bui Warriors » basé à Kumbo, sa ville natale. Les indices récoltés par les forces de sécurité révélaient que son activité a contribué à faire massacrer des jeunes ayant résolu de répondre favorablement à l’offre de paix du Chef de l’État, faite à l’occasion de son discours d’investiture le 6 novembre 2018. Il a été interpellé à Douala le 15 mai 2020 par le Service Central des Recherches Judiciaires, qui est une unité de police judiciaire de la Gendarmerie Nationale ayant une compétence nationale, où il a été gardé à vue dans le respect de ses droits à la visite de son Avocat et de son Médecin. Après l’enquête, il a été déféré devant le Commissaire du Gouvernement près le Tribunal Militaire de Yaoundé le 11 juin 2020. Une information judiciaire a été ouverte contre lui pour les faits de sécession et complicité de bande armée. Après avoir été inculpé desdits faits, il a été placé sous mandat de détention provisoire à la Prison Centrale de Yaoundé le même jour. La procédure contre lui suit normalement son cours devant le Tribunal Militaire de Yaoundé, dans le respect des droits de la défense et des exigences du procès équitable.

c) Sur le cas de Samuel WAZIZI

182. Le nommé Samuel AJIEKAH ABUWE alias Samuel WAZIZI a été interpellé le 3 août 2019 par les éléments du Commissariat de Sécurité Publique du 3ème Arrondissement de Buea, en raison des renseignements crédibles faisant état de son appartenance aux groupes terroristes. Le 7 août 2019, il a été transféré à la 21ème Brigade d’Infanterie Motorisée de la même ville. Le 13 août 2019, il a été transféré à la Division de la Sécurité Militaire à Yaoundé pour besoin d’exploitation, parce que les faits mis à sa charge touchaient intimement à la sécurité nationale et à l’intégrité du territoire.

183. En raison de son état de santé précaire, il a été admis à l’Hôpital Militaire de Yaoundé le 17 août 2019. Suite à son décès, une enquête conjointe de la Gendarmerie Nationale, de la Sûreté Nationale et de l’Administration Territoriale a été ouverte sur Hautes Directives du Président de la République, pour faire la lumière sur les circonstances dudit décès. Les résultats de ladite enquête permettront de dégager les responsabilités.

d) Sur le cas de l’attaque contre Madame NGO MBE

184. Suite à une plainte déposée par Madame NGO MBE Maximilienne (Directrice Exécutive du Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC)), une enquête a été ouverte à la Division Régionale de la Police Judiciaire du Littoral afin d’identifier et d’interpeller l’auteur de l’agression physique dont elle prétend avoir été victime à Douala dans la nuit du 28 au 29 août 2019 de la part d’un inconnu. Il convient de relever que la susnommée ne s’est point présentée à l’unité susmentionnée pour faire une déposition devant faciliter les actes de police judiciaire subséquents et permettre la manifestation de la vérité, malgré les multiples relances du Chef d’Unité.

e) Sur le cas de la disparition de Franklin MOWHA

185.Les investigations menées ont permis d’établir que le susnommé aurait été enlevé le 6 août 2018 à l’hôtel Azim de Kumba, Région du Sud-Ouest, par des individus non identifiés. Les enquêtes se poursuivaient en vue de sa localisation éventuelle.

27. Protection des LGBT et des défenseurs des Droits de l’Homme

186. L’article 347(1) du CP qui réprime les relations sexuelles entre les personnes de même sexe est le reflet des valeurs de la société camerounaise auxquelles le corps social adhère. En général, les citoyens sont protégés par la Constitution et les autres textes juridiques sans aucune discrimination. Des enquêtes sont systématiquement ouvertes en cas de plainte ou de dénonciation de violence ou d’abus, y compris contre les personnes LGBT.

28. Les mesures prises relativement aux châtiments corporels

a) S ur l’interdiction des châtiments corporels en tous lieux

187. La Loi no98/004 du 4 avril 1998 relative à l’orientation de l’éducation au Cameroun protège les apprenants contre les châtiments corporels. L’article 35 de ladite loi dispose que « l’intégrité physique et morale des élèves est garantie dans le système éducatif. Sont de ce fait proscrits : les sévices corporels et toutes autres formes de violence, les discriminations de toute nature… ».

188. Sur l’interdiction des châtiments corporels au sein des familles, voir point 7(c), § 70 et 70-1.

b) Sur les enquêtes et les programmes de sensibilisation

189. La CDHC, dans le cadre de ses activités de promotion des Droits de l’Homme, organise les cérémonies commémoratives des journées internationales et régionales en lien avec lesdits droits, dont notamment les journées contre les violences policières et de solidarité contre les victimes de torture. Dans le cadre d’un partenariat avec l’UNICEF et l’ONG Sight Savers, les activités de sensibilisation et de formation des élèves et des enseignants ont été menées sur les thématiques liées aux mauvais traitements des élèves dans les écoles. Des supports de communication des informations relatives à la protection de l’enfant ont également été élaborés et depuis 2017, des Brigades ont été créées au sein des établissements scolaires pour enregistrer ou recueillir les dénonciations contre les parents et enseignants qui administrent des violences aux enfants et porter les différents cas devant les tribunaux.

190. En cas de dénonciation aux autorités compétentes des violences et actes assimilés commis au préjudice des enfants, les enquêtes sont systématiquement ouvertes et les auteurs desdits actes sont poursuivis devant les juridictions et condamnés conformément à la loi. À titre d’exemple, Par Jugement no51/CRIM du 27 mars 2019, le TGI du Moungo a condamné la nommée E.S.C. à l’emprisonnement à vie pour les faits de violences ayant entraîné la mort d’un enfant. De même, par Jugement no819/COR du 18 octobre 2019, le TPI d’Edéa a condamné le nommé M.M. à un mois d’emprisonnement et 50 000 FCFA d’amendes, pour les faits de violences sur enfant. En outre, la TGI de la Vallée du Ntem, par jugement no23/CRIM du 16 août 2019, a condamné les nommés E.A.B.C. et M.A.J. respectivement à 2 et 5 ans d’emprisonnement, pour les faits de tentative de trafic d’enfant. La même juridiction, suivant jugement no25/CRIM du 11 novembre 2018, a condamné les nommés O.B.F. et N.L.L. respectivement à 10 ans et un an d’emprisonnement, pour les faits de trafic d’enfant en coaction.

II.Renseignements sur d’autres questions

29. Les mesures de lutte contre la pandémie à coronavirus au Cameroun

a)Les mesures générales de lutte contre la Covid-19 au Cameroun

191. L’État du Cameroun a fait le choix d’une riposte circonspecte contre la Covid-19 avec l’adoption des mesures graduelles, lesquelles ont été ajustées au fur et à mesure de l’évolution de la situation sanitaire.

1. La mise sur pied d’une instance de coordination de la riposte contre la pandémie

191bis. Dès l’entrée du virus de la Covid-19 sur le sol camerounais au début du mois de mars 2020, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, a créé un Comité interministériel chargé du suivi de la mise en œuvre de la stratégie gouvernementale de riposte contre la pandémie, placé sous sa propre coordination.

2. La mise en œuvre graduelle du Plan d’action de lutte contre la pandémie

192. Les premières mesures inhérentes au Plan d’action gouvernemental de lutte contre la pandémie ont été prises le 17 mars 2020, avec pour souci de concilier les droits et libertés avec la protection de l’ordre public sanitaire.

193. L’évolution de la crise sanitaire et son impact économique ont subséquemment justifié un ajustement du plan de lutte par la prise de nouvelles mesures le 9 avril 2020, à savoir : la généralisation du port du masque facial dans tous les espaces ouverts au public ; la mise sur pied des centres spécialisés de traitement des patients atteints de la Covid-19 dans tous les Chefs-lieux de régions, suivant le modèle des hôpitaux de campagne, pour permettre aux hôpitaux de fonctionner normalement ; l’intensification de la campagne de dépistage de la Covid-19 avec la collaboration du Centre Pasteur et de ses démembrements, ainsi que des autres institutions sanitaires appropriées ; l’intensification de la campagne de sensibilisation en zones urbaine et rurale aussi bien dans les 2 langues officielles qu’à travers les voies complémentaires de communication à définir par le Ministre de la Communication, avec l’appui des autorités administratives, municipales, traditionnelles et religieuses ; la poursuite des activités essentielles à l’économie, dans le strict respect des directives du 17 mars 2020 et des gestes recommandées par l’OMS ; et la sanction systématique de tout contrevenant aux mesures de restriction en vigueur et de confinement imposées aux personnes à risque.

194. Dès mars 2021, des campagnes de vaccination volontaire et gratuite ont démarré sur l’ensemble du territoire national.

3.L’adoption d’une stratégie de riposte contre la pandémie

195. En juin 2020, le Gouvernement a adopté une stratégie de riposte et de résilience économique et sociale axée sur 5 piliers, à savoir : le renforcement du système de santé, la résilience économique et financière, l’approvisionnement stratégique, le renforcement de la recherche et de l’innovation et la résilience sociale. Cette stratégie de riposte est en cohérence avec les autres documents de planification du développement en cours, notamment la Stratégie Nationale de Développement 2020–2030.

b)Les mesures spécifiques de lutte contre la Covid-19 dans les lieux de détention

196. S’agissant des mesures spécifiques prises en faveur des personnes privées de liberté, l’on peut évoquer :

•La signature par le Président de la République du Décret no2020/193du 15 avril 2020 portant commutation et remise des peines. Cette mesure a permis de désengorger les prisons d’environ un tiers de sa population. Concrètement, sur un effectif total de 28806 détenus au 15 avril 2020, 9999 en ont bénéficié, soit 34,71 %. La CNDHL a fait le suivi de la mise en œuvre de ce décret dans les prisons des Régions du Littoral et du Sud, respectivement du 28 au 29 avril 2020 et du 24 au 25 septembre 2020 ;

•La signature par le Ministre de la Justice, de la Lettre Circulaire no01/LC/MINJUSTICE/CAB/SEAP du 18 mars 2020 relative au renforcement des mesures sanitaires et de sécurité dans les prisons, qui visait à adapter les actions générales de riposte contre la pandémie prescrites par le Premier Ministre, aux contextes et réalités du milieu carcéral. Parmi ces mesures, l’on peut citer : l’autorisation de l’application à toute la population carcérale du protocole thérapeutique mis en place pour les cas positifs asymptomatiques ; l’encadrement circonspect des séjours des détenus à l’extérieur des prisons ; et le respect des règles d’hygiène. De plus, en vue de prévenir toute contamination, certaines activités ont été entreprises par le personnel soignant des prisons en synergie avec le Ministère de la Santé Publique, à savoir l’installation des points d’eau pour le lavage des mains à l’entrée et à l’intérieur des prisons, le port obligatoire des masques par la population carcérale, l’intensification des campagnes de sensibilisation et autres causeries éducatives tant à l’endroit des détenus que des personnels, les campagnes de dépistage en masse des détenus et les dépistages lors de l’incarcération et la création d’un centre de dépistage à la Prison Centrale de Yaoundé ;

•La mise sur pied d’un partenariat entre les services de santé publique et les lieux de détention pour la gestion rapide des cas testés positifs dans les prisons ;

•Le décongestionnement des prisons par le transfert d’environ 800 détenus des prisons surpeuplées vers les prisons les moins peuplées ;

•L’amélioration des conditions de détention par une meilleure ventilation des cellules et une désinfection récurrente de l’espace carcéral ;

•Le traitement réservé aux enfants : avec l’appui de certains Partenaires Techniques et Financiers comme l’UNICEF, le PNUD, l’UNESCO, et des Organisations de la Société Civile, les mineurs détenus ont bénéficié d’une prise en charge nutritionnelle spécifique, avec l’allocation d’un repas spécial en plus du repas pénal. L’objectif de cette mesure était de renforcer leurs systèmes immunitaires afin de faire face à la Covid-19. Ils ont également bénéficié des kits d’hygiène (savon, détergent, eau de javel, etc.) ; et

•La poursuite du programme de réhabilitation et de construction des infrastructures pénitentiaires (voir point 15 (a), § 96-100).

III.Renseignements sur les autres mesures et faits nouveaux concernant la mise en œuvre de la Convention

30. Informations sur d’autres mesures pertinentes

a) L’adoption de la Stratégie Nationale de Développement 2020-2030

197. En 2020, le Cameroun s’est doté du document de Stratégie Nationale de Développement 2020-2030 (SND-30), qui a vocation à structurer la politique de développement du pays au cours de la décennie concernée. Cet instrument s’appuie sur quatre piliers majeurs : la transformation structurelle de l’économie ; le développement du capital humain et du bien-être ; la promotion de l’emploi et l’insertion économique ; la gouvernance, la décentralisation et la gestion stratégique de l’État. Le dernier pilier met un accent particulier sur le renforcement de l’État de droit et la protection des droits humains.

b) La ratification d’importants instruments juridiques

198. Il s’agit du Protocole Facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants suivant Décret no2020/002 du 6 janvier 2020 ; du Statut de l’Organisation pour le Développement de la Femme dans les États membres de l’Organisation de la Conférence Islamique suivant Décret no2020/396 du 27 juillet 2020 ; de l’Accord de coopération en matière de police criminelle entre les États de l’Afrique Centrale, signé le 18 septembre 2015 à Yaoundé suivant Décret no2020/797 du 29 décembre 2020; de l’Accord sur le transfèrement des personnes condamnées à une peine privative de liberté entre la République du Cameroun et la République fédérative du Brésil, signé le 4septembre 2019 suivant Décret no2021/244 du 27 avril 2021 ; de la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées adoptée le 13 décembre 2006, suivant Décret no2021/751 du 28 décembre 2021 ; du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux droits des personnes handicapées, par Décret no2021/753 du 28 décembre 2021 ; et du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux droits des personnes âgées, suivant Décret no2021/752 du 28 décembre 2021.

c) La création du Comité National de Désarmement, de Démobilisation et de Réintégration (CNDDR)

199. Créé par Décret no2018/719 du 30 novembre 2018, le CNDDR est placé sous l’autorité du Premier Ministre. Cette structure a pour mission d’organiser, d’encadrer et de gérer le désarmement, la démobilisation et la réintégration des ex-combattants de Boko Haram et des groupes armés des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest désireux de déposer les armes. Le Comité comptait trois centres régionaux à Bamenda, Buea et Mora.

200.La création du CNDDR a fortement contribué à diminuer les cas de violences dans les zones en crise par l’accueil et la déradicalisation des repentis. À la fin de l’année 2020, le nombre total des ex-combattants enregistrés dans les centres était de 584, soit 189 à Bamenda, 168 à Buea et 227 à Mora. En outre, 140 ex-combattants étrangers ont été remis à leurs pays d’origine et 70 camerounais ont été insérés dans la vie active.

Conclusion

201. Il ressort de ce qui précède qu’au cours de la période couverte par le présent Rapport, l’État du Cameroun est demeuré attaché aux valeurs, principes et dispositions de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Malgré les contraintes sécuritaires, budgétaires et sanitaires, il s’est employé, dans la mesure des moyens disponibles, à mettre en œuvre les recommandations formulées par le Comité.

202. De nombreuses avancées ont été enregistrées sur les plans stratégique, normatif, institutionnel et opérationnel. Cependant, plusieurs défis restaient à relever, notamment sur la conduite de certaines réformes, l’autonomisation des femmes victimes, la mobilité constante des personnes socialement vulnérables, l’exécution du programme d’amélioration de la carte pénitentiaire, la prise en charge des enfants associés aux groupes armés, la mise en place du dispositif de protection des témoins et victimes des actes de torture, et la ratification de certains instruments juridiques pertinents.

203.Avec l’appui de ses Partenaires Techniques et Financiers, l’État entend poursuivre ses efforts pour consolider les acquis et relever ces défis, en vue de renforcer la protection des personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants sur son territoire. Il entend ainsi maintenir un dialogue franc et constructif avec le Comité.