Nations Unies

CED/C/CHE/FCO/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

27 mai 2022

Original : français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Renseignements reçus de la Suisse au sujet de la suite donnée aux observations finales concernant le rapport soumis en application de l’article 29 (par. 1) de la Convention *

[Date de réception : 3 mai 2022]

I.Renseignements complémentaires concernant le paragraphe 14 des observations finales (CED/C/CHE/CO/1) : Définition de la disparition forcée

1.Déjà lors du processus interne de ratification de la Convention, le gouvernement suisse a effectué une analyse juridique détaillée pour s’assurer que le nouvel article 185bis CP soit pleinement en conformité avec l’art. 2 de la Convention. Sur la base du rapport explicatif établi par le gouvernement, la formulation de l’art. 185bis CP a été approuvée sans modification par le Parlement lors du processus législatif.

2.Cela étant, les autorités suisses suivent attentivement les éventuels développements dans la pratique et la jurisprudence qui révèleraient des ambiguïtés ou des lacunes dans la définition de la disparition forcée. En l’absence de jurisprudence et de signaux dans ce sens provenant de la pratique, les autorités suisses considèrent qu’il n’est pas opportun de réviser l’art. 185bis CP.

II.Renseignements complémentaires concernant le paragraphe 30 des observations finales : Accès aux informations

3.Dans le cadre d’une procédure pénale, l’art. 214 CPP permet de retarder l’information sur la privation de liberté, « si le but de l’instruction l’interdit ou si la personne s’y oppose expressément ». La formulation de la loi est restrictive. L’information sur la privation de liberté n’est pas communiquée aux proches s’il y a un risque concret de collusion, notamment en vue de faire disparaître des preuves (par exemple, lorsqu’une perquisition doit encore avoir lieu au domicile de la personne à informer). La non-information est une mesure de contrainte, à l’instar de la privation de liberté elle-même, et doit respecter les mêmes conditions, notamment de proportionnalité. La durée de la non-information doit être la plus courte possible et les motifs de la mesure doivent être éliminés par les autorités pénales le plus rapidement possible. La personne privée de liberté continue néanmoins à se trouver sous la protection de la loi, car toutes les garanties de procédure restent assurées, en particulier son droit de faire appel à un défenseur.

4.La décision de ne pas informer les proches doit revêtir la forme d’une ordonnance écrite et motivée (art. 80 al. 1 et 2 CPP). Lorsque la décision de ne pas informer les proches est prise par la police, elle ne vaudra que pendant 24 heures au maximum. Au plus tard à l’échéance de ce délai, la personne arrêtée provisoirement doit en effet soit être libérée soit être amenée devant le ministère public par la police. Dans ce dernier cas, la responsabilité de la procédure passe au ministère public, qui doit décider de maintenir la non-information des proches ou les informer sans délai. Dans les cas d’infractions graves, le ministère public sera même saisi plus rapidement de la procédure, puisque la police doit l’informer sans délai des infractions graves portées à sa connaissance. Dans ce cas également, dès que le ministère public est informé, la responsabilité de la procédure, y compris la décision d’informer ou non les proches, lui revient.

5.La décision de ne pas informer les proches peut être portée devant le juge par la personne arrêtée provisoirement ou par son défenseur. La question de savoir si les proches bénéficient également d’un droit à un recours judiciaire contre leur non-information, le cas échéant, n’est pas tranchée en pratique, faute de cas concret devant les tribunaux. Quoi qu’il en soit, la loi fédérale relative à la Convention assure néanmoins que le droit à l’information des familles et des proches soit effectif et soumis à un contrôle judiciaire. Elle leur permet en effet de formuler une demande de recherche au service fédéral de coordination. En cas de refus d’information basé sur l’art. 214 CPP, le service fédéral de coordination rend une décision administrative, qui peut alors faire l’objet d’un recours judiciaire devant un tribunal.

6.La violation des conditions prévues à l’art. 214 CPP est sanctionnée pénalement par l’art. 312 CP (abus d’autorité) lorsque l’acte est commis dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, ou dans le dessein de nuire à autrui.

III.Renseignements complémentaires concernant le paragraphe 40 des observations finales : Adoptions d’enfants du Sri Lanka

7.Les adoptions illégales des années 80 et 90 en provenance du Sri Lanka ne peuvent pas être qualifiées, de manière générale, de disparitions forcées. En même temps on ne peut pas non plus exclure de manière catégorique que certains cas individuels correspondent à la définition de l’article 2 en lien avec l’article 25 de la Convention. La question devrait être examinée sur la base de chaque cas individuel. De plus, l’application temporelle et spatiale de la Convention doit être réservée.

8.Un groupe de travail composé de représentants des autorités fédérales et cantonales, de personnes adoptées et de services de recherche privés a été mis en place en août 2020. L’objectif de ses travaux est de définir, sur la base d’une analyse de la situation et des besoins des personnes adoptées, des mesures visant à améliorer le soutien dans la recherche des origines. Les travaux du groupe de travail ne se limitent pas au Sri Lanka mais prennent en compte tous les pays d’origine, et adressent également la question des adoptions illicites. Le rapport final de ce groupe de travail est attendu à l’été 2022 et comprendra une série de recommandations sur des mesures à prendre, y compris par le biais de futures réformes législatives.

9.Concernant le cas spécifique des personnes adoptées du Sri Lanka, la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP) a décidé le 18 novembre 2021 que les cantons apporteraient un soutien financier supplémentaire à l’association « Back to the Roots », ce qui lui permettra de développer et intensifier ses activités de soutien aux personnes adoptées dans leurs démarches de recherche des origines. Ce projet pilote sera également cofinancé par la Confédération. Les autorités cantonales et fédérales suisses continuent de travailler en étroite collaboration avec « Back to the Roots » pour définir les possibilités de soutien des autorités suisses aux personnes adoptées à la recherche de leurs origines. Les recherches au Sri Lanka sont effectuées grâce à la collaboration des autorités compétentes au Sri Lanka. Cette collaboration sera intensifiée dans le cadre de ce projet pilote, et des discussions seront menées avec les autorités du Sri Lanka pour définir si des possibilités supplémentaires d’entraide et de coopération seraient envisageables sous l’égide de la Convention.