Nations Unies

CCPR/C/DEU/7

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

23 avril 2020

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des droits de l ’ homme

Septième rapport périodique soumis par l’Allemagne en application de l’article 40 du Pacte, selon la procédure facultative d’établissement des rapports, attendu en 2019 *

[Date de réception : 12 mars 2020]

Introduction

1.La République fédérale d’Allemagne tient à présenter une fois encore ses excuses pour le retard avec lequel elle soumet ses réponses à la liste de points, qui tiennent lieu de rapport périodique au Comité des droits de l’homme.

2.Les réponses à la liste de points ont été compilées par le Gouvernement fédéral. Sauf indication contraire, elles renvoient à la situation au 31 décembre 2019.

3.Pour le confort de lecture, un certain nombre de résumés ou tableaux statistiques ont été joints en appendice.

A.Renseignements d’ordre général sur la situation des droits de l’homme dans le pays, y compris sur les nouvelles mesures et les faits nouveaux concernant la mise en œuvre du Pacte

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 1 de la liste de points (CCPR/C/DEU/QPR/7)

4.La plupart des questions soulevées dans les précédentes observations finales du Comité sont traitées dans la liste de points établie avant la soumission des rapports. Les réponses à ces diverses questions font l’objet des paragraphes ci-dessous.

5.En ce qui concerne le paragraphe 12 des précédentes observations finales du Comité au sujet des extraditions et des assurances diplomatiques, le Gouvernement fédéral renvoie par la présente à la réponse au paragraphe 30 de la liste des points à traiter transmise par le Comité contre la torture (CAT/C/DEU/QPR/6), soumise par l’Allemagne et tenant lieu de sixième rapport périodique (CAT/C/DEU/6).

6.Les procédures permettant de donner effet aux constatations adoptées par le Comité au titre du Protocole facultatif concernant les plaintes individuelles déposées contre l’Allemagne sont coordonnées par le Ministère fédéral de la justice et de la protection des consommateurs. En fonction de chaque affaire en question, d’autres organes fédéraux ou autorités des Länderseront appelés à prendre les mesures nécessaires, au cas par cas, pour donner suite aux constatations adoptées par le Comité.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 2

7.Par la loi du 12 juin 2015 relative à la mise en œuvre des recommandations de la commission d’enquête parlementaire sur la faction clandestine nationale-socialiste (Gesetz zur Umsetzung von Empfehlungen des NSU-Untersuchungsausschusses des Deutschen Bundestages), les motivations racistes, xénophobes ou autres attestant un mépris de la personne humaine ont été expressément portées au nombre des éléments à prendre en considération aux fins de la détermination des peines à imposer, qui sont énoncés à la deuxième phrase de l’article 46 (par. 2) du Code pénal (Strafgesetzbuch, StGB). L’expression « ou autres attestant un mépris de la personne humaine » recouvre également d’autres principes reconnus de la non-discrimination.

8.La loi sur l’amélioration des mesures prises pour lutter contre la traite des êtres humains, sur la modification de la loi relative au sommier judiciaire central fédéral et sur la modification du Livre VIII du Code social (Gesetz zur Verbesserung der Bekämpfung des Menschenhandels und zur Änderung des Bundeszentralregistergesetzes sowie des Achten Buches des Sozialgesetzbuches) est entrée en vigueur en octobre 2016. Cette loi a essentiellement remanié et étendu les dispositions du droit pénal relatives à la traite des êtres humains. Elle constitue également une transposition, dans le droit national, de la Directive 2011/36/UE et des dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains. L’infraction de traite des êtres humains (art. 232 du Code pénal) englobe désormais non seulement la traite aux fins d’exploitation par la prostitution, le travail ou l’esclavage, mais aussi la traite des êtres humains dans le but de commettre des infractions pénales et à des fins de mendicité et de trafic d’organes. En outre, la définition des circonstances aggravantes a été étendue, notamment lorsque la victime est âgée de moins de 18 ans. En ce qui concerne l’exploitation des victimes de la traite des êtres humains, deux nouvelles dispositions ont été introduites qui visent deux nouvelles infractions : l’article 232a, qui confère le caractère d’infraction pénale au fait de soumettre une personne à la prostitution forcée, et l’article 232b, qui vise le travail forcé. Le paragraphe 6 de l’article 232a du Code pénal régit en particulier la responsabilité pénale des « clients » de services sexuels et érige en infraction l’exploitation de la situation de la victime pour la réalisation d’actes sexuels. Outre la révision de l’infraction d’exploitation de main-d’œuvre (art. 233 du Code pénal), l’infraction d’exploitation en tirant profit de la privation de liberté (art. 233a) érige en infraction l’acte consistant à priver une personne de sa liberté dans le but de l’exploiter.

9.La loi du 20 juillet 2017 instaurant le droit au mariage pour les personnes de même sexe (Eheöffnungsgesetz; Journal officiel fédéral I, p. 2787), entrée en vigueur le 1er octobre 2017, permet désormais aux couples de même sexe de contracter mariage. Le premier décret modifiant le décret d’application de la loi sur l’état civil (Erste Verordnung zur Änderung der Personenstandsverordnung) contient des dispositions pour l’application de la loi sur l’état civil (Personenstandsgesetz) et de la loi instaurant le droit au mariage pour les personnes de même sexe dans les registres de l’état civil.

10.La loi du 18 décembre 2018 modifiant les informations inscrites dans le registre des naissances (Gesetz zur Änderung der in das Geburtenregister einzutragenden Angaben; Journal officiel fédéral I, p. 2635) prévoit une option supplémentaire pour l’enregistrement du sexe dans le cas des personnes présentant des variations de leur développement sexuel. Celle-ci permet de donner effet à la décision de la Cour constitutionnelle fédérale du 10 octobre 2017 (1 BvR 2019/16). En plus des mentions « sexe féminin », « sexe masculin » et de la possibilité de déclarer une naissance sans mentionner le sexe du nouveau-né, les nouvelles dispositions permettent aux personnes présentant des variations de leur développement sexuel d’être inscrites au registre dans la catégorie « divers ». Cette mention peut être modifiée à une date ultérieure. En outre, les personnes qui modifient cette mention peuvent désormais introduire une nouvelle déclaration de manière à modifier leur prénom afin qu’il corresponde au sexe déclaré.

11.La loi visant à réhabiliter sur le plan pénal les personnes condamnées pour relations homosexuelles entre adultes consentants après le 8 mai 1945 (Gesetz zur strafrechtlichen Rehabilitierung der nach dem 8. Mai 1945 wegen einvernehmlicher homosexueller Handlungen verurteilten Personen) est entrée en vigueur le 22 juillet 2017. Par cette loi, ont été annulées toutes les condamnations qui avaient été prononcées entre 1945 et 1994 pour des relations homosexuelles entre personnes consentantes de plus de 16 ans, en application des dispositions abrogées depuis longtemps des articles 175 et 175a du Code pénal de la République fédérale d’Allemagne et de l’article 151 du Code pénal de la République démocratique allemande. Le principal objectif de cette loi était de lever l’opprobre pesant sur les personnes concernées du fait de leur condamnation pénale. Celles‑ci peuvent par ailleurs prétendre à une réparation. De plus, le décret relatif au versement d’indemnités, par imputation sur le budget fédéral, aux personnes concernées par l’interdiction pénale de l’homosexualité est entré en vigueur le 13 mars 2019 et ouvre le droit à réparation à un plus grand nombre de personnes. Au total, plus de 715 500 euros avaient été déboursés en décembre 2019. Le Gouvernement fédéral finance une ligne d’assistance téléphonique qui fournit des conseils aux requérants potentiels.

12.La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) a été ratifiée le 12 octobre 2017

13.La loi sur la réglementation du commerce de la prostitution et la protection des personnes travaillant dans la prostitution (Prostituiertenschutzgesetz) du 21 octobre 2016 est entrée en vigueur le 1er juillet 2017. Cette loi prévoit une protection contre la prostitution forcée.

14.La loi relative à la création et à l’exploitation d’une ligne téléphonique nationale contre la violence envers les femmes (Hilfetelefongesetz) a été adoptée le 7 mars 2012 (Journal officiel fédéral I, p. 448).

15.La loi rendant obligatoire l’approbation des mesures privatives de liberté concernant les enfants par un tribunal des affaires familiales (Gesetz zur Einführung eines familiengerichtlichen Genehmigungsvorbehaltes für freiheitsentziehende Maßnahmen bei Kindern) est entrée en vigueur le 1er octobre 2017. Elle vise à améliorer la protection des enfants dans les cliniques psychiatriques pour enfants et adolescents, ainsi que dans les établissements de protection de l’enfance et de la jeunesse et les établissements pour personnes handicapées.

16.Les principales dispositions de la loi visant à renforcer les garanties procédurales des mineurs soupçonnés ou poursuivis dans le cadre des procédures pénales (Gesetz zur Stärkung der Verfahrensrechte von Beschuldigten im Jugendstrafverfahren, Journal officiel fédéral I, p. 2146) sont entrées en vigueur le 17 décembre 2019. Les règles relatives à l’enregistrement audiovisuel des interrogatoires des accusés prévues par le Code de procédure pénale (Strafprozessordnung) et le renvoi à l’article 70c de la loi sur les tribunaux pour mineurs (Jugendgerichtsgesetz) sont entrées en vigueur le 1er janvier 2020. La loi apporte des précisions réglementaires explicites et introduit en particulier de nouvelles dispositions dans la loi sur les tribunaux pour mineurs afin d’améliorer le statut juridique des mineurs et de garantir que leur besoin particulier de protection est pris en compte dans les procédures pénales les concernant.

17.La loi sur la participation égale des femmes et des hommes aux postes de direction dans les secteurs privé et public (Gesetz für die gleichberechtigte Teilhabe von Frauen und Männern an Führungspositionen in der Privatwirtschaft und im öffentlichen Dienst) a été promulguée le 24 avril 2015 (Journal officiel fédéral I, p. 642). La loi s’articule autour de trois piliers. Le premier impose un quota de 30 % de femmes dans les conseils d’administration des entreprises cotées en bourse ou qui pratiquent la cogestion d’entreprise. Le deuxième fait obligation auxdites entreprises de fixer des objectifs concernant le pourcentage de personnel féminin dans les conseils de surveillance, les conseils d’administration et les rangs des cadres supérieurs. Le troisième concerne la loi fédérale sur la nomination et le détachement d’hommes et de femmes dans les organes qui relèvent de l’autorité du Gouvernement fédéral (Gesetz über die Mitwirkung des Bundes an der Besetzung von Gremien) et la loi fédérale sur l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’administration fédérale et dans les entreprises et tribunaux fédéraux (Gesetz für die Gleichstellung von Frauen und Männern in der Bundesverwaltung und in den Unternehmen und Gerichten des Bundes). Une version révisée de cette dernière vise à augmenter le pourcentage de femmes occupant des postes de cadres supérieurs dans la fonction publique et à améliorer l’équilibre entre les obligations familiales, les obligations d’aidant et l’activité professionnelle. Les statistiques concernant la mise en œuvre de cette loi sont enregistrées chaque année et publiées sous la forme d’un indice de l’égalité des sexes. Depuis 2016, un quota par sexe de 30 % au moins est requis pour pourvoir les postes vacants dans les organes de contrôle où le Gouvernement fédéral dispose d’au moins trois sièges, ainsi que dans les organes dits « essentiels », où la nomination d’au moins un membre revient au Gouvernement fédéral. Depuis 2018, l’objectif est de porter cette proportion à 50 %.

18.La loi fédérale sur l’égalité entre hommes et femmes du 24 avril 2015 diffère à bien des égards de la loi précédente. À l’avenir, les plans d’égalité doivent inclure des objectifs concrets, et chaque objectif doit s’accompagner de mesures humaines, sociales et organisationnelles spécifiques.

19.Afin de promouvoir le principe d’un salaire égal pour un travail égal ou équivalent, la loi sur la transparence des structures salariales (Entgelttransparenzgesetz) est entrée en vigueur le 6 juillet 2017. Elle complète la loi générale sur l’égalité de traitement (Allgemeines Gleichbehandlungsgesetz), interdit expressément la discrimination salariale entre les sexes et introduit des dispositifs pour une meilleure mise en œuvre du principe d’un salaire égal pour un travail égal ou équivalent.

20.La loi sur le statut juridique et les fonctions de l’Institut allemand des droits de l’homme (Gesetz über die Rechtsstellung und Aufgaben des Deutschen Instituts für Menschenrechte) du 16 juillet 2015 (Journal officiel fédéral I, p. 1194) définit les assises juridiques, les missions et le financement de l’Institut allemand des droits de l’homme, conformément aux Principes de Paris.

21.La liste ci-dessous énumère des affaires récentes dans lesquelles les dispositions du Pacte ont été invoquées par des juridictions nationales supérieures :

•Cour constitutionnelle fédérale concernant la loi sur l’uniformisation des conventions collectives (Tarifeinheitsgesetz), arrêt du 11 juillet 2017, dossiers nos 1 BvR 1571/15, 1 BvR 1588/15, 1 BvR 2883/15, 1 BvR 1043/16, 1 BvR 1477/16, par. 206 ;

•Cour constitutionnelle fédérale, ordonnance du 29 janvier 2019, dossier no 2 BvC 62/14, par. 61, 67 et suiv. ;

•Tribunal administratif fédéral, renvoi de la Cour de justice de l’Union européenne du 19 août 2014, dossier no 1 C 1/14, par. 16 et suiv. ;

•Tribunal administratif supérieur du Bade-Wurtemberg, arrêt du 29 août 2017, dossier no 10 S 30/16, par. 44, 46 ;

•Cour administrative supérieure du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, arrêt du 19 mars 2019, dossier no A 1361/15, par. 216, 407 et suiv.

B.Renseignements concernant spécifiquement la mise en œuvre des articles 1er à 27 du Pacte, notamment au regard des précédentes recommandations du Comité

Cadre constitutionnel et juridique de la mise en œuvre du Pacte (art. 2)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 3

22.Le Gouvernement fédéral a toujours considéré nécessaire la réserve formulée lors de la ratification du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, qui restreint la compétence du Comité lorsque l’article 26 du Pacte est en cause. Cette réserve limite la compétence du Comité aux violations des droits garantis dans le Pacte.

23.Le Gouvernement fédéral a pris note des constatations du Comité concernant la communication 3232/2018 au sujet de la réserve à l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte et en examinera les conséquences possibles.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 4

24.L’application des mesures prévues dans le Plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme (PAN) pour la période 2016-2020 est continue. Un comité interministériel veille à la cohérence de ces mesures. Dans ce plan, il est expressément attendu de toutes les entreprises commerciales domiciliées en Allemagne qu’elles intègrent des processus de diligence raisonnable en matière de droits de l’homme dans leur chaîne de valeur. La diligence raisonnable en matière de droits de l’homme repose sur les principes directeurs des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’homme. Les droits de l’homme visés par ces principes directeurs englobent ceux consacrés dans le Pacte, qui est également mentionné explicitement dans le plan d’action comme une norme obligatoire faisant partie du devoir de diligence raisonnable en matière de droits de l’homme.

25.Le Gouvernement fédéral mène actuellement une enquête auprès d’un échantillon représentatif d’entreprises de plus de 500 salariés, domiciliées en Allemagne, afin de vérifier si au moins 50 % d’entre elles font preuve de diligence raisonnable en matière de droits de l’homme et s’acquittent de leurs responsabilités en la matière. Les résultats de cette enquête seront publiés dans un prochain rapport d’étape au début de 2020. Le résultat du suivi du plan d’action constituera une base essentielle pour les décisions sur les mesures de suivi que prendra le Gouvernement fédéral, qui peuvent inclure des dispositions législatives. Cet aspect était prévu à la fois dans le plan et dans l’accord de coalition.

26.La Directive de l’Union européenne relative à la publication d’informations non financières a déjà été transposée dans le droit national. La loi d’application est entrée en vigueur le 19 avril 2017 (loi visant à renforcer la publication d’informations non financières dans les rapports d’activité et de gestion des entreprises ; Gesetz zur Stärkung der nichtfinanziellen Berichterstattung der Unternehmen in ihren Lage- und Konzernlageberichten).

27.Le Gouvernement fédéral est en désaccord avec les informations selon lesquelles les victimes de violations des droits de l’homme commises par des entreprises commerciales ont du mal à accéder à la justice. Les entreprises allemandes accusées de violations des droits de l’homme à l’étranger peuvent être poursuivies en Allemagne devant un tribunal allemand même si le préjudice subi par la personne lésée (c’est-à-dire la victime de la violation des droits de l’homme commise par l’entreprise) s’est produit à l’étranger. Le droit international de la procédure civile garantit l’accès aux tribunaux. Le fait que les requérants ne résidant pas en Allemagne puissent bénéficier d’une aide juridictionnelle dans les mêmes conditions que les requérants qui résident en Allemagne facilite en outre l’accès à la justice. Le Ministère de la justice a élaboré une brochure d’information multilingue sur ces questions afin d’informer les personnes concernées sur les moyens d’accéder aux tribunaux allemands et sur les mécanismes procéduraux disponibles pour faciliter les procédures judiciaires (comme par exemple, la requête « type » en jugement déclaratoire pour améliorer l’application du droit de la consommation ; les recours collectifs). Le droit à l’indemnisation dépend du droit matériel applicable dans chaque cas. Le droit matériel de l’État étranger s’applique en général si le préjudice s’est produit à l’étranger. Toutes ces explications figurent dans la brochure d’information. En plus des procédures judiciaires, les victimes ont la possibilité de déposer des plaintes auprès du point de contact national pour les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales.

28.Le Gouvernement fédéral a conscience de ses responsabilités en matière de contrôle des exportations d’armes et mène donc à cet égard une politique restrictive et responsable. Le Gouvernement fédéral décide de l’octroi de licences pour l’exportation de matériel militaire au cas par cas et en fonction de la situation prévalant dans chaque pays importateur, à l’issue d’un examen minutieux, en tenant compte des considérations en matière de politique étrangère et de sécurité. Ces décisions se fondent sur les dispositions de la loi relative au contrôle des armes de guerre (Gesetz über die Kontrolle von Kriegswaffen), de la loi sur le commerce extérieur et les paiements (Außenwirtschaftsgesetz) et du décret sur le commerce extérieur et les paiements (Außenwirtschaftsverordnung), ainsi que sur les principes politiques régissant l’exportation des armes de guerre et autre équipement militaire adoptés par le Gouvernement fédéral (version du 26 juin 2019), sur la Position commune du Conseil de l’Union européenne du 8 décembre 2008 définissant des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d’équipements militaires (version du 16 septembre 2019) et sur le Traité sur le commerce des armes.

29.Le respect des droits de l’homme dans le pays importateur joue un rôle prépondérant dans le processus de prise de décisions. Par principe, les licences ne sont pas accordées lorsqu’il existe une suspicion suffisante que l’équipement militaire à livrer sera utilisé de manière abusive à des fins de répression interne ou d’autres violations continues et systématiques des droits de l’homme.

Non-discrimination et interdiction de l’appel à la haine nationale, raciale ou religieuse (art. 2, 3, 20 et 26)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 5

30.La discrimination de la part des organismes publics est déjà interdite par l’article 3 de la Loi fondamentale (Grundgesetz) et a donc rang constitutionnel. La loi générale sur l’égalité de traitement (Allgemeines Gleichbehandlungsgesetz) interdit principalement la discrimination de la part des entités privées ou des particuliers. Dans la mesure du possible, les dispositions de la loi sont également applicables aux employés de la fonction publique (art. 24 de la loi générale sur l’égalité de traitement). Dans son article premier, la loi générale sur l’égalité de traitement protège explicitement toutes les personnes contre la discrimination fondée sur la race ou l’origine ethnique, le sexe, la religion ou les convictions, le handicap, l’âge ou l’identité sexuelle. Le mémoire explicatif qui accompagne la loi dispose explicitement que le critère de l’origine ethnique doit être interprété au sens large, à la lumière des dispositions de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Ainsi, constituera également une discrimination indirecte fondée sur l’origine ethnique toute situation dans laquelle une distinction est opérée ostensiblement en raison de la nationalité ou de la langue, alors qu’elle est fondée en réalité sur l’origine ethnique.

31.La loi générale sur l’égalité de traitement prévoit également la protection des personnes victimes d’une inégalité de traitement pour plusieurs motifs. Si, dans un cas particulier, une inégalité de traitement fondée sur l’un de ces motifs est justifiée, cela ne signifie pas automatiquement qu’une inégalité de traitement fondée sur un autre motif l’est également (art. 4 de la loi générale sur l’égalité de traitement). En outre, le fait que l’inégalité de traitement soit fondée sur plusieurs motifs peut avoir une incidence sur le montant d’une éventuelle indemnisation.

32.Il n’y a aucun risque que l’exception prévue au paragraphe 3 de l’article 19 de la loi générale sur l’égalité de traitement soit invoquée afin de justifier une inégalité de traitement pour un motif arbitraire sur le marché du logement locatif. Cette disposition a pour seul but de parvenir à des structures résidentielles socialement stables et à des ensembles immobiliers équilibrés, et de maintenir les conditions économiques, sociales et culturelles en équilibre.

33.Lors de la planification initiale et de l’octroi des fonds, on veille soigneusement à ce que les logements sociaux soient répartis dans l’ensemble d’une zone urbaine afin d’éviter la ségrégation. Les structures résidentielles socialement stables jouent également un rôle dans l’attribution de logements subventionnés.

34.Les structures sociales posant problème au sein de quartiers résidentiels peuvent également être évitées ou corrigées si l’on veille, lors de l’attribution des logements, à assurer jusqu’à un certain point une forme de mixité sociale. Le paragraphe 3 de l’article 19 de la loi générale sur l’égalité de traitement prévoit la marge de manœuvre nécessaire à cet effet. Toutefois, elle n’autorise pas les pratiques discriminatoires dans l’acquisition ou la location de biens résidentiels. Cette disposition vise exclusivement − sous réserve de strictes conditions − à empêcher la formation de ghettos et de lieux de vie qui pourraient avoir des effets négatifs sur les résidents, actuels ou futurs.

35.Le délai général de deux mois prévu au paragraphe 4 de l’article 15 et au paragraphe 5 de l’article 21 de la loi générale sur l’égalité de traitement n’a pas été modifié.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 6

36.Les victimes de discrimination bénéficient d’un accès effectif à la justice et de voies de recours à un coût abordable. Aussi et surtout, elles peuvent introduire des recours fondés sur la loi générale sur l’égalité de traitement devant les tribunaux civils, du travail ou administratifs, en fonction du cas d’espèce. Aux termes de la loi de procédure civile, les plaideurs peuvent bénéficier d’une aide juridictionnelle si, eu égard à leur situation personnelle et économique, ils ne peuvent assumer les frais de justice.

37.L’Allemagne ne prévoit pas la possibilité d’intenter une actio popularis. Il est en revanche possible de se prévaloir du droit de tierce intervention dans certaines procédures (par exemple dans les procédures devant la Cour constitutionnelle, en application de l’article27a de la loi fédérale sur la Cour constitutionnelle [Bundesverfassungsgerichtsgesetz], et dans les procédures devant les tribunaux administratifs, aux termes de l’article 65 du Code de procédure administrative [Verwaltungsgerichtsordnung]) et d’intervenir en qualité d’amicus curiae. Ainsi, l’Institut allemand des droits de l’homme a exercé ses nombreuses attributions pour soumettre des mémoires en qualité d’amicus curiae dans des affaires de discrimination.

38.En outre, la loi sur l’égalité de traitement des personnes handicapées (Behindertengleichstellungsgesetz) permet à des organisations reconnues de porter certaines affaires de discrimination à l’égard de personnes handicapées devant les tribunaux administratifs et des affaires sociales. Des organismes reconnus de protection des consommateurs peuvent également engager des procédures spécifiques.

39.L’Agence fédérale de lutte contre la discrimination est habilitée à venir en aide à toute personne qui s’estime victime d’une discrimination. Elle peut notamment s’efforcer d’aider les parties concernées à parvenir à un règlement amiable. Elle n’est toutefois pas habilitée à saisir les tribunaux.

40.En revanche, les organismes de lutte contre la discrimination sont habilités, en vertu de leurs statuts, à fournir des conseils juridiques aux personnes défavorisées dans le cadre de procédures judiciaires. La représentation juridique ne peut être assurée que par des avocats.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 7

41.En ce qui concerne les discours de haine sur l’Internet, l’Allemagne poursuit une double stratégie : la suppression rapide des discours de haine en ligne et les poursuites pénales contre leurs auteurs.

42.La nouvelle loi visant à améliorer l’application de la loi sur les réseaux sociaux (Netzwerkdurchsetzungsgesetz, NetzDG) qui est entrée en vigueur en octobre 2017, vise à garantir la suppression rapide des discours de haine. La loi cible les crimes haineux, les fausses nouvelles (« troubles de l’information ») passibles de sanctions pénales et autres contenus illicites sur les réseaux sociaux. Elle oblige les opérateurs des grandes plateformes de médias sociaux à mettre en place un système efficace de gestion des plaintes permettant aux utilisateurs de signaler facilement les contenus illicites. Si un tel contenu est signalé, les opérateurs sont tenus de le supprimer ou de le bloquer dans les sept jours ou, dans le cas de contenus manifestement illicites, dans les vingt-quatre heures qui suivent leur signalement. Les opérateurs doivent également publier des rapports sur la façon dont ils traitent les plaintes. Le non-respect de ces obligations peut entraîner des amendes allant jusqu’à 50 millions d’euros. Ces amendes sont imposées non pas en cas de non-suppression de messages individuels, mais plutôt en cas de manquement systématique aux exigences susmentionnées.

43.L’Allemagne a instauré une Journée d’action nationale de lutte contre les messages haineux, dans le but de renforcer l’application de la loi dans ce domaine. Au cours des trois dernières années, cette initiative a entraîné des perquisitions et des interrogatoires de police coordonnés sur l’ensemble du territoire. Cette journée sert à rappeler qu’il n’existe pas de vide juridique sur l’Internet et permet de déployer des actions préventives pour sensibiliser la population. En outre, dans le Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, un groupe de travail dénommé « Supprimer ne suffit pas, il faut aussi poursuivre en justice − Application de la loi sur l’Internet » a été créé début 2017 pour promouvoir une action coordonnée de la part des autorités de police, des entreprises de médias et de l’autorité de contrôle des médias contre les discours de haine passibles de sanctions pénales diffusés sur le Web.

44.Depuis 2015, le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse soutient en outre les activités de « jugendschutz.net », un centre de compétences pour la protection des mineurs sur l’Internet, au niveau fédéral et dans les Länder. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une entité publique, jugendschutz.net dispose d’un mandat légal défini dans le traité entre les Länder pour la protection des mineurs contre les médias dangereux (Jugendmedienschutz-Staatsvertrag). Il propose une ligne d’assistance téléphonique pour signaler les contenus dangereux sur l’Internet, évalue les signalements, l’origine apparente du matériel et tente d’établir qui en est responsable.

45.L’Agence fédérale pour l’instruction civique (BpB) a depuis longtemps conscience que les discours de haine et l’agitation hostile de tout ordre sur l’Internet causeront des problèmes majeurs aux sociétés du XXIe siècle. Elle remplit son rôle de défenseur de la démocratie en sensibilisant aux discours haineux, en s’élevant contre la haine en ligne et en encourageant tous les citoyens à contribuer activement à un contre-discours démocratique. L’Agence a lancé diverses activités et initiatives éducatives visant à renforcer les compétences, comme une compilation de supports pédagogiques en ligne à utiliser dans le cadre du programme scolaire ordinaire ou dans des classes spéciales. Elle a rassemblé des informations de fond détaillées et élaboré des lignes directrices et des documents proposant des contre-stratégies possibles et expliquant les instruments juridiques disponibles pour lutter contre les discours de haine.

46.Le 14 juin 2017, le Gouvernement fédéral a adopté un nouveau plan d’action national contre le racisme. Le chapitre sur le racisme et la haine sur l’Internet prévoit un certain nombre d’initiatives dans ce domaine qui ont été lancées ou sont soutenues par le Gouvernement fédéral ou par les Länder. Outre les initiatives mentionnées dans le plan d’action, le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse soutient depuis 2017 de nombreux projets visant à prévenir et à combattre les discours haineux en ligne et à renforcer la démocratie et l’engagement civique sur l’Internet dans le cadre de son programme fédéral « Pour une démocratie vivante ! » (« Demokratie Leben ! »).

47.Le plan d’action national contre le racisme est disponible à l’adresse suivante : http://www.bmi.bund.de/SharedDocs/downloads/EN/publikationen/2018/nap-en.pdf?_blob=publicationFile &v=4.

48.Dans le cadre du programme « Pour une démocratie vivante ! » (2015-2019), le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse encourage la participation civile et les attitudes démocratiques aux niveaux local, régional et national. En mai 2018, décision a été prise de proroger ce programme pour une deuxième période (2020-2024) et de le doter d’un budget total de 115,5 millions d’euros. « Pour une démocratie vivante ! » s’adresse aux enfants et aux jeunes, à leurs parents, aux membres de leur famille et aux autres personnes qui s’occupent d’eux, ainsi qu’aux bénévoles, à temps partiel et à temps plein, qui interviennent auprès des jeunes, aux « personnes pouvant exercer un effet multiplicateur » et aux représentants des organisations de l’État et de la société civile. Les objectifs fondamentaux du programme fédéral sont de promouvoir la démocratie, de célébrer et d’accepter la diversité et de prévenir l’extrémisme. En plus d’environ 300 « partenariats pour la démocratie » au niveau local, 16 centres régionaux pour la démocratie dans les Länder et près de 150 projets pilotes, le programme « Pour une démocratie vivante ! » fournit un financement à 40 organismes afin de créer des centres de compétences et des réseaux pour lutter contre des phénomènes tels que la discrimination, l’antisémitisme et l’extrémisme de droite. Leur fonction est de mettre en commun les compétences dans leurs domaines respectifs et d’agir comme un lien et un point de contact, par la création de réseaux et la fédération de divers acteurs et organisations de la société civile.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 8

Application des dispositions pénales dans les procédures d’enquête (statistiques de la police)

49.Les crimes haineux sont enregistrés dans une catégorie statistique distincte dans le système d’information de la police judiciaire sur les infractions à caractère politique (Kriminalpolizeilicher Meldedienst Politisch motivierte Kriminalität), créé en 2001. Le fait de considérer les crimes haineux comme des « crimes à caractère politique » n’entraîne aucune restriction en termes d’enregistrement des infractions pénales. Cette rubrique permet plutôt d’enregistrer toutes les infractions pénales commises pour des motifs racistes. Dans cette rubrique, les infractions sont classées dans différentes sous-catégories afin de fournir un aperçu plus nuancé de leurs motifs. Ces sous-catégories correspondent aux motifs suivants : antisémitisme, handicap, xénophobie, situation sociale, racisme, religion et orientation sexuelle. En outre, depuis le 1er janvier 2017, les infractions pénales à caractère raciste commises à l’encontre de musulmans, de chrétiens ou de Tsiganes sont enregistrées dans des sous-catégories distinctes. Les infractions concernées sont signalées par la police locale, par le biais des bureaux de la police criminelle des Länder, à l’Office fédéral de police criminelle, où les données sont enregistrées de manière centralisée.

50.Le tableau intitulé « crimes de haine » (voir annexe à la question 8a) retrace l’évolution du nombre d’affaires entre 2001 et 2018.

51.Le nombre d’infractions pénales à caractère antisémite imputables à l’extrême droite a atteint un point culminant en 2014 avec 1 799 infractions enregistrées. En 2017, le nombre d’infractions pénales enregistrées s’établissait à 1 504. L’écrasante majorité des infractions à caractère antisémite continuent de relever de la catégorie dite des infractions à motivation politique imputables à l’extrême droite. En revanche, le nombre d’infractions pénales à caractère xénophobe n’a cessé d’augmenter entre 2012 et 2016, passant respectivement de 2 922 à 8 983. En 2017, le nombre d’infractions pénales à caractère xénophobe a diminué pour la première fois après plusieurs années de croissance. En 2018, le nombre d’infractions pénales à caractère xénophobe a de nouveau augmenté mais, avec 7 701 infractions enregistrées, il reste inférieur au niveau enregistré en 2016. Le nombre d’infractions pénales à caractère raciste a atteint un sommet en 2018, avec 1 725 infractions enregistrées au cours de l’année. En 2018, le nombre total d’infractions pénales à caractère politique constituant des crimes de haine a de nouveau augmenté. Le Gouvernement fédéral a l’obligation de lutter contre toutes les formes d’extrémisme, de racisme et de haine, et il continuera à le faire, en utilisant tous les moyens à sa disposition et en intensifiant encore les mesures qu’il prend.

Amélioration de l’enregistrement des crimes de haine dans les statistiques judiciaires

52.Les administrations de la justice des Länder tiennent depuis 1992 des statistiques sur le nombre de poursuites engagées pour des infractions à caractère politique imputable à l’extrême droite ou des infractions à caractère xénophobe. L’Office fédéral de la justice (Bundesamt für Justiz − BfJ) recueille ces données de manière centralisée et établit des statistiques nationales. Ce système d’enregistrement statistique a été profondément réformé et, depuis 2013, produit des ensembles de données améliorés et plus facilement comparables pour l’ensemble de l’Allemagne. Les données pour la période à partir de 2013 sont disponibles sur le site Web de l’Office fédéral de la justice (voir annexe à la question 8c).Ces statistiques rendent compte des procédures pénales engagées pour des infractions à caractère xénophobe ou imputable à l’extrême droite. Les infractions pénales à caractère antisémite et les infractions pénales commises sur l’Internet sont répertoriées séparément. Les statistiques pour 2018 ne sont pas encore disponibles.

53.Il n’est pas prévu de modifier l’article 130 du Code pénal (incitation à la haine). Cette disposition fournit déjà un cadre, étoffé par la jurisprudence, qui garantit une protection suffisante aux groupes de population et à leurs membres. Elle sert à protéger l’intérêt public, dans la coexistence pacifique, sur l’ensemble du territoire national. À cet égard, l’expression « susceptibles de troubler l’ordre public » peut servir de fondement à une interdiction légale du simple fait de l’existence d’un risque abstrait de trouble de l’ordre public. Aucune perturbation effective, ni risque spécifique de perturbation de l’ordre public n’est nécessaire. Au stade actuel, les éléments constitutifs de l’infraction sont jugés suffisants.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 9

54.Les mesures de police fondées exclusivement ou presque exclusivement sur l’apparence physique ou l’origine ethnique d’une personne (profilage racial selon la définition retenue par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale et l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne) ne font pas partie des méthodes de travail de la police allemande. Le profilage racial viole le droit allemand applicable, en particulier le principe de l’égalité de traitement consacré dans la première phrase du paragraphe 3 de l’article 3 de la Loi fondamentale. Ni la loi sur la police fédérale (Bundespolizeigesetz), ni les règlements et décrets applicables au sein de la police fédérale ne permettent l’application d’un traitement inégal à des personnes pour des motifs tels que la race, l’origine ou la religion. Il en va de même pour les règlements correspondants applicables aux autorités de police des Länder.

55.Afin de garantir que chaque agent de police accomplit ses fonctions sans exercer de discrimination, la formation de la police au niveau fédéral et au niveau des Länder se concentre en particulier sur les questions de racisme et de discrimination. L’objectif est de faire en sorte que les policiers (stagiaires) soient dotés des connaissances nécessaires pour interagir avec des personnes d’origines diverses. Cela permet d’éviter l’émergence de préjugés et d’attitudes discriminatoires (conscientes ou inconscientes). Depuis 2014, le profilage racial figure directement ou indirectement au programme de toutes les étapes pertinentes de la formation des forces de police. Les approches existantes, comme par exemple les séminaires organisés en interne par le Ministère fédéral de l’intérieur et la police fédérale sur la définition du racisme et sur le profilage racial selon la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, continuent d’être appliquées et approfondies. Depuis 2016, la police fédérale s’emploie à actualiser et à améliorer les programmes de formation de base et continue, les documents correspondants, ainsi que les décrets et règlements applicables en matière de discrimination, de racisme et de profilage racial.

56.Les formations initiales et complémentaires dispensées aux forces de la police fédérale portent régulièrement sur l’application de l’article 22 (par. 1a) de la loi sur la police fédérale, et le réexaminent constamment. L’article 22 (par. 1a) de la loi sur la police fédérale autorise la police à interpeller toute personne se trouvant dans une gare, un aéroport ou un train, à l’obliger à présenter une pièce d’identité et à inspecter les biens en sa possession, si des informations particulières ou l’expérience de la police des frontières donnent à penser qu’il s’agit d’une personne en situation d’immigration illégale. Le Gouvernement fédéral estime que cette disposition est compatible avec la Loi fondamentale ainsi qu’avec le droit international et européen, étant donné que le renseignement de situation et l’expérience de la police des frontières sont des critères admissibles qui − lorsqu’ils sont accompagnés d’une formation et d’une sensibilisation suffisantes des policiers concernés − permettent une sélection non discriminatoire. C’est pourquoi la police fédérale accorde une importance particulière à la formation et à la sensibilisation dans ce domaine, conformément à ce qui est précisé ci-dessus.

57.Lorsque, dans des cas isolés, des plaintes sont déposées pour comportement discriminatoire de la part de la police, le cadre juridique allemand prévoit des procédures immédiates et effectives afin d’en élucider les circonstances. Quiconque estime avoir été interpellé par la police pour un motif discriminatoire peut saisir les tribunaux administratifs allemands, qui examinent alors l’affaire en question. Les procédures officielles de gestion des plaintes de la police fédérale prévoient plusieurs modalités internes et externes de dépôt de plainte donnant lieu à une procédure d’examen indépendante menée par les autorités de contrôle.

58.Les personnes concernées peuvent s’adresser à n’importe quel poste de la police fédérale pour déposer leur plainte oralement, par écrit ou par téléphone. En outre, toutes les autorités de la police fédérale peuvent être contactées sur l’Internet. Afin de garantir une enquête indépendante, impartiale et complète, chaque plainte reçue est traitée et fait l’objet d’un examen approfondi.

59.Plusieurs décisions rendues par des tribunaux allemands (comme par exemple, les arrêts du Tribunal administratif supérieur de Coblence du 21 avril 2016 et du Tribunal administratif supérieur de Rhénanie-du-Nord-Westphalie du 7 août 2018) ont souligné que les contrôles de police effectués en application de l’article 22 (par. 1a) de la loi sur la police fédérale devaient s’appuyer sur des indications fiables au sujet d’un groupe de personnes facilement identifiables et qu’à cet égard, une charge de la preuve plus lourde incombait aux autorités. Il ressort de ces décisions qu’une norme de suspicion raisonnable s’applique déjà. Le Gouvernement fédéral ne voit pas la nécessité de prendre d’autres mesures législatives. La police fédérale a tenu compte des décisions susmentionnées des tribunaux allemands en actualisant ses instructions internes et son matériel de formation continue en 2016.

60.En outre, en 2016, la police fédérale a mis en place un mécanisme interne indépendant de traitement des plaintes.

Mesures de lutte contre le terrorisme et mesures de sécurité (art. 9, 12, 14 et 17)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 10

61.De l’avis des Länder, les récentes modifications apportées aux lois sur la police des Länder de Bavière, de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, du Bade-Wurtemberg, du Mecklembourg-Poméranie occidentale, d’Hambourg, de Brandebourg, de Basse-Saxe, de Saxe et de Saxe-Anhalt ne portent atteinte à aucune des obligations de l’Allemagne relatives aux droits de l’homme au regard du droit international (comme par exemple, l’accès à un conseil juridique et à réparation).

62.La loi sur la police du Land de Schleswig-Holstein a fait l’objet d’une « évaluation de la vulnérabilité » dont les résultats sont actuellement examinés par les autorités ; aucune décision n’a encore été prise sur la portée des modifications.

63.Les réformes apportées à la loi sur les fonctions et les pouvoirs de la police bavaroise (loi sur les pouvoirs de la police bavaroise ; Bayerisches Polizeiaufgabengesetz) ont étendu les pouvoirs d’intervention de la police dans le but de les adapter à l’évolution des technologies et de lui permettre de répondre efficacement à de nouveaux types de menaces, y compris celles à caractère terroriste. Les pouvoirs prévus par la loi bavaroise sur les pouvoirs de la police sont généraux et sont à la disposition de la police pour répondre aux différents types de menaces qu’elle est chargée de prévenir aux termes de ladite loi. Cette loi n’accorde pas de pouvoirs spéciaux à la police dans le seul but de prévenir les menaces de nature terroriste. Certains pouvoirs prévus par cette loi sont soumis à une décision judiciaire afin de protéger les droits des personnes concernées par les mesures de police. En outre, toutes les personnes concernées ont accès à des recours juridiques contre les mesures prises par la police. Dans certaines circonstances, les personnes placées en garde à vue bénéficient des services d’un avocat désigné par le tribunal. De plus, toute personne visée par une mesure de police est libre de se faire assister d’un avocat. Les obligations d’information, de documentation et de compte rendu garantissent également que la conduite de la police reste soumise à un contrôle effectif.

64.La loi sur la police criminelle fédérale (Bundeskriminalamtgesetz), qui est entrée en vigueur au niveau fédéral le 25 mai 2018, met en œuvre à la fois les exigences européennes dans le domaine de la protection des données et l’arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale du 20 avril 2016 (BVerfGE 141, 220), qui a précisé les exigences relatives aux opérations d’infiltration. Dans l’accomplissement de sa mission de prévention de la menace du terrorisme international, telle que décrite à l’article 5 de la loi sur la police criminelle fédérale, l’Office fédéral de police criminelle ne peut exercer les compétences prévues aux articles 38 et suivants de ladite loi, eu égard à la gravité de la mesure envisagée, que si certains éléments factuels sont réunis et que d’autres conditions (par exemple, l’exigence générale selon laquelle l’opération doit avoir été ordonnée par un tribunal) sont remplies. À cela s’ajoutent les obligations légales d’information, de documentation et d’établissement de rapports. La loi sur la police criminelle fédérale respecte les principes de sécurité juridique (principe de spécificité) et de proportionnalité. Les personnes concernées ont accès à des recours efficaces, y compris à la possibilité d’obtenir un contrôle juridictionnel.

65.Le rétention (Sicherungshaft) prévue à l’article 62 (par. 2) de la loi relative au séjour des étrangers (Aufenthaltsgesetz) a été remaniée très récemment par la deuxième loi pour une meilleure exécution de l’obligation de quitter le territoire fédéral (Zweites Gesetz zur besseren Durchsetzung der Ausreisepflicht), qui est entrée en vigueur le 21 août 2019.

66.Les exigences en matière de rétention ont été révisées et élargies. La loi a défini les situations qui constituent automatiquement une présomption réfragable de risque de fuite.

67.La nécessité et la proportionnalité de ces mesures sont régies par la loi. Le paragraphe 1 de l’article 62 de la loi relative au séjour des étrangers est libellé comme suit : « La rétention en attente d’expulsion n’est pas autorisée si l’objectif de la rétention peut être atteint par d’autres moyens moins sévères et tout aussi suffisants. La rétention doit être limitée à la durée la plus courte possible. Les mineurs et les familles avec mineurs ne peuvent faire l’objet d’une mesure en rétention en attente d’expulsion que dans des cas exceptionnels et pour une durée raisonnable, eu égard au bien-être de l’enfant. ».

68.Afin de protéger contre l’arbitraire et l’injustice, la rétention ne peut être ordonnée que par un juge, qui examine si les conditions légales sont remplies.

Violence à l’égard des femmes, notamment la violence sexuelle et la violence familiale (art. 2, 3, 6, 7 et 26)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 11

Mutilations génitales féminines

69.En septembre 2013, le législateur allemand a érigé les mutilations génitales féminines (MGF) en infraction pénale à part entière (art. 226a du Code pénal), sanctionnée par une peine maximale de quinze ans d’emprisonnement. Auparavant, ces infractions étaient déjà passibles d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à dix ans au chef de lésions corporelles dangereuses (art. 224 du Code pénal) ou, selon les circonstances de l’espèce, au chef de lésions corporelles graves (art. 226 du Code pénal).

70.En 2016, le Gouvernement fédéral a financé une étude empirique sur les MGF en Allemagne et, la même année, a présenté pour la première fois des statistiques sur les femmes et les filles ayant subi des mutilations génitales ou risquant de les subir.

71.D’octobre 2017 à décembre 2018, le Gouvernement fédéral a financé un projet visant à fournir des informations sur les MGF dans les centres d’hébergement pour réfugiés.

72.Suite à une décision adoptée par les Ministres-Présidents des Länder en octobre 2019, une « Déclaration d’opposition aux mutilations génitales féminines » contenant des informations sur les MGF et leurs conséquences juridiques en Allemagne sera élaborée et mise à la disposition des autorités publiques sur l’ensemble du territoire fédéral. Les parents de filles qui risquent de subir des mutilations génitales peuvent se munir de cette déclaration et la présenter à des tiers dans leur pays d’origine afin de se prémunir des pressions exercées sur eux et sur leurs filles.

Harcèlement obsessionnel

73.Par la loi relative à l’amélioration de la protection contre le harcèlement obsessionnel (Gesetz zur Verbesserung des Schutzes gegen Nachstellungen), qui est entrée en vigueur en mars 2017, l’Allemagne a amélioré la protection accordée aux victimes (en pratique, principalement des femmes). Grâce à la modification de l’article 238 du Code pénal, il n’est plus nécessaire de démontrer que le harcèlement a fortement restreint le mode de vie de la personne victime (ce qui constituait un niveau élevé de preuve à respecter). Il suffit désormais que l’un des actes visés soit commis d’une manière susceptible d’entraîner une telle restriction.

74.Chaque fois que l’obligation découlant d’une conciliation confirmée par un tribunal est violée, le contrevenant encourt une peine en application de l’article 4 de la loi sur la protection contre la violence (Gewaltschutzgesetz). Ainsi, une disposition vient désormais compléter la protection découlant, en droit pénal, des arrêtés des tribunaux assurant une protection contre la violence. En outre, une nouvelle disposition incluse dans la loi garantit que les autorités de police et autres autorités publiques compétentes doivent recevoir notification d’une conciliation confirmée par un tribunal.

Collecte de données

75.Une étude a été menée pour mettre en lumière les possibilités de création d’un système de suivi en matière de violence à l’égard des femmes dans le but d’améliorer la collecte des données et de disposer d’informations plus complètes au sujet des infractions non signalées. Ce système de suivi permettra d’obtenir des informations fiables, tirées de données recueillies de façon systématique, qui serviront de base solide, à long terme, pour les politiques spécialisées de la Fédération et des Länder et celles applicables aux dispositifs de soutien mis en place afin de lutter contre la violence à l’égard des femmes. Les statistiques pénales, qui constituent un élément du dispositif de suivi, seront évaluées à l’aune des cas enregistrés de violence dans le cadre de relations intimes. Une évaluation de ces statistiques est réalisée chaque année depuis 2016. L’évaluation la plus récente a été publiée par le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse le 25 novembre 2019.

Violence familiale

76.Le 11 mai 2011, le Conseil de l’Europe a ouvert à la signature la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul), qui établit des mesures d’ensemble et spécifiques visant à prévenir la violence à l’égard des femmes et la violence dans la famille, à lutter contre ces fléaux et à protéger les victimes. L’Allemagne a signé la Convention le jour même de son ouverture à la signature et l’a ratifiée le 12 octobre 2017. La Convention est entrée en vigueur le 1er février 2018.

77.Avec l’entrée en vigueur de la Convention, il incombe à tous les niveaux de l’administration publique − la Fédération, les Länderet les municipalités − de garantir l’application durable de cet instrument.

78.À l’avenir, la Fédération entend soutenir encore davantage les Länder dans l’accomplissement de leur mission, qui consiste à mettre en place un réseau de services de soutien pour protéger les personnes victimes de violence.

79.Au cours de la dix-neuvième législature, le Gouvernement fédéral a lancé un programme d’action visant à soutenir et à déployer un système de services d’aide aux femmes victimes de violence. Un élément clef de ce programme d’action est le programme de financement fédéral « Ensemble contre la violence à l’égard des femmes ».

80.Il s’agit d’un programme d’investissement visant à soutenir les projets de création d’installations et d’un programme d’innovation. Dans le cadre de ses responsabilités en matière de financement, la Fédération utilisera ce programme pour expérimenter des concepts visant à combler les lacunes connues dans le réseau des services de soutien. Il s’agit notamment d’améliorer l’accès aux services de soins et de soutien pour les femmes que ces services n’ont pas pu sensibiliser en nombre suffisant jusqu’à présent (par exemple, les femmes issues de minorités ethniques, ayant plusieurs enfants ou des fils plus âgés, les femmes souffrant de handicaps physiques et celles présentant des problèmes psychologiques ou d’addiction) et de mettre au point des modèles de soutien novateurs pour les victimes de violence qui s’inspirent des meilleures pratiques en la matière.

81.En 2012, le Gouvernement fédéral a publié un rapport sur la situation des refuges pour femmes battues, des services de consultation spécialisés et des autres dispositifs de soutien mis à la disposition des femmes victimes de violence et de leurs enfants. À l’échelle du pays, plus de 350 refuges ont été recensés, ainsi que plus de 40 centres d’accueil protégés totalisant plus de 6 000 lits, où, chaque année, entre 15 000 et 17 000 femmes accompagnées de leurs enfants viennent chercher protection et conseils − en d’autres termes, ces établissements accueillent entre 30 000 et 34 000 personnes. À cela, il convient d’ajouter plus de 750 services de consultation spécialisés répartis sur l’ensemble du territoire de la République fédérale, dans lesquels les femmes victimes de violence ont la possibilité d’obtenir des conseils et un soutien de la part de personnes qualifiées. Outre le nombre élevé de centres de consultation destinés aux femmes et des permanences téléphoniques mises en place pour les femmes en détresse − où des professionnels dispensent des services de soutien généraux aux femmes victimes de violence ou des services de soutien et de conseil spécialisés aux victimes de violence sexuelle −, il existe également quelque 130 antennes d’intervention spécialisées dans la violence familiale, et une quarantaine de services de consultation spécialisés destinés aux victimes de la traite des femmes ainsi que d’autres formes de violence spécifiques. Parmi ceux-ci figurent en particulier des centres de conseil spécialisés et des centres de coopération qui accueillent des victimes de mariage forcé ou de harcèlement obsessionnel.

82.Entre 2020 et 2023, la Fédération prévoit d’investir un total de 120 millions d’euros pour construire, agrandir et réaménager les refuges et les centres de conseil pour femmes dans toute l’Allemagne. Les modalités de la mise en œuvre de ce programme d’investissement ont été présentées et débattues le 21 octobre 2019, dans le cadre d’une réunion de la Table ronde contre la violence à l’égard des femmes, mise en place par le Gouvernement fédéral, les Länder et les municipalités.

83.En mars 2013, le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse a lancé, à l’échelle du territoire national, un service d’assistance téléphonique destiné aux femmes victimes de violence. Lorsqu’elles composent le 08000 116 016, les femmes victimes de violence peuvent s’entretenir avec d’autres femmes spécialisées dans ce domaine, 24 heures sur 24, dans 17 langues, sans obstacle, de façon anonyme et gratuitement. Elles reçoivent des conseils, un soutien, des informations, de même que les coordonnées des centres de conseil locaux vers lesquels elle peuvent se tourner. Par ailleurs, le site Web www.hilfetelefon.dedonne également accès à des informations et à des conseils. À la fin de 2018, le service d’assistance téléphonique destiné aux femmes victimes de violence avait déjà traité 185 000 appels.

84.En outre, le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse et le Ministère fédéral de la justice ont publié une brochure gratuite intitulée « Une meilleure protection contre la violence familiale », qui est régulièrement mise à jour et est disponible en allemand, anglais, turc, arabe et persan.

85.Le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse apporte également son soutien au dispositif de services destinés aux femmes, dans les limites de la compétence de la Fédération, en finançant des projets de coopération déployés sur l’ensemble du territoire ainsi que des réseaux (Frauenhauskoordinierung e.V., Bundesverband für Frauenberatungsstellen und Frauennotrufe, Bundesweiter Koordinierungskreis gegen Frauenhandel und Gewalt an Frauen im Migrationsprozess e.V.). Le déploiement de réseaux de centres proposant consultations, soutien et aide aux femmes victimes de violence constitue un élément important de la stratégie d’ensemble mise en œuvre par le Gouvernement fédéral pour prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes.

Traite des êtres humains

86.La loi portant ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains du 12 octobre 2012 a transposé les dispositions de la Convention dans le droit national. La Convention est entrée en vigueur le 1er avril 2013. Elle est le premier instrument contraignant centré explicitement sur les droits humains et les droits des victimes de la traite. La situation juridique allemande étant déjà conforme à la Convention, la loi portant ratification n’apporte aucune modification au droit allemand.

87.Compte tenu du caractère extrêmement complexe des enjeux que soulèvent la violence dans la famille et la traite des femmes ou des êtres humains et au fait qu’ils renvoient à toute une série de politiques, de groupes cibles et de niveaux d’action, le Gouvernement fédéral a institué, dans la Fédération et les Länder, des groupes de travail sur la violence dans la famille et sur la traite des êtres humains œuvrant sous les auspices du Ministère de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse. Ces groupes de travail ont pour mission d’échanger en continu des informations sur les multiples actions menées par les 16 Länder, ainsi que par les comités nationaux et internationaux compétents, d’analyser les problèmes spécifiques rencontrés dans le cadre de la lutte contre la violence dans la famille et la traite des femmes, et d’élaborer des recommandations et, le cas échéant, des mesures conjointes pour combattre ces phénomènes. En ce qui concerne la lutte contre la traite des êtres humains, un forum réunissant tous les groupes de travail du Gouvernement fédéral et des Länder intervenant dans ce domaine s’est réuni pour la première fois au printemps 2019 en vue d’échanges approfondis sur cette question.

Protection des femmes réfugiées

88.En 2016, le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse a lancé une initiative, conjointement avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et d’autres partenaires, dans le but d’assurer la protection des femmes et des enfants dans les centres d’hébergement pour réfugiés. Dans le cadre de cette initiative, « des normes minima pour la protection des enfants, des jeunes et des femmes dans les centres d’hébergement pour réfugiés » ont été élaborées et publiées. Les normes portent en particulier sur les femmes, les enfants et d’autres groupes de personnes vulnérables, tels que les personnes handicapées, les réfugiés et les migrants souffrant de troubles post-traumatiques, de même que les réfugiés lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes.

89.Jusqu’à la fin de 2018, en vue d’expérimenter l’application de ces normes minima, le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse a financé la création d’un total de 100 postes de coordonnateurs de la protection contre la violence dans les centres d’hébergement pour réfugiés. De plus, une aide est fournie pour la création et la mise en place de structures décentralisées de conseil et de soutien au sein des organisations sociales allemandes afin de protéger les personnes contre la violence dans les centres d’hébergement pour réfugiés, ainsi que pour élaborer un outil de suivi destiné à aider les fournisseurs d’hébergement.

90.L’accent est également mis sur des campagnes de sensibilisation et d’information, afin de faire mieux connaître aux femmes et aux filles leurs droits et les services de conseil et de protection auxquels elles peuvent faire appel en Allemagne. Une contribution significative à cette initiative est le service national d’assistance téléphonique d’urgence destiné aux femmes victimes de violence, ainsi que les unités de coordination contre la violence à l’égard des femmes et la traite des êtres humains, réparties sur l’ensemble du territoire.

91.La deuxième loi pour une meilleure exécution de l’obligation de quitter le territoire fédéral (Zweites Gesetz zur besseren Durchsetzung der Ausreisepflicht), entrée en vigueur le 21 août 2019, a introduit des dispositions de portée fédérale pour protéger les personnes vulnérables vivant dans des centres d’hébergement pour réfugiés. Conformément à l’article 44 (par. 2a) de la loi sur l’asile (Asylgesetz), les Länder « doivent, en ce qui concerne l’hébergement des demandeurs l’asile en application du paragraphe 1, prendre les mesures appropriées pour assurer la protection des femmes et des personnes vulnérables ». Comme le souligne le mémoire explicatif de la loi, les personnes vulnérables au titre de cette disposition s’entendent notamment, outre des femmes, « des mineurs, des personnes handicapées, des personnes âgées, des femmes enceintes, des lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels et intersexes, des parents isolés avec des enfants mineurs, des victimes de la traite des êtres humains, des personnes souffrant de maladies graves, des personnes atteintes de troubles mentaux et des personnes ayant subi des tortures, des viols ou d’autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, comme par exemple des victimes de violence sexiste, de mutilations génitales féminines ou de mariage forcé, ou des victimes de violence à motivation sexuelle, sexiste, raciale ou religieuse ».

Interruption volontaire de grossesse (art. 3, 6, 7, 17 et 26)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 12

92.Même si l’avortement constitue fondamentalement une infraction passible de sanctions pénales (art. 218 du Code pénal), le législateur allemand a introduit une série de dispositions permettant de garantir un accès effectif à l’avortement, en toute légalité et dans des conditions sûres. Ainsi, l’article 218a du Code pénal dispose que l’interruption de grossesse au cours des douze premières semaines de la grossesse n’est pas punissable si la femme enceinte décide d’y recourir de son plein gré, si elle présente une attestation prouvant qu’elle s’est rendue, au moins trois jours auparavant, dans un centre de conseil spécialisé et si l’intervention est pratiquée par un médecin. En outre, l’interruption de grossesse avec le consentement de l’intéressée n’est ni illégale, ni punissable si la grossesse est consécutive à un abus sexuel ou à un viol et si douze semaines maximum se sont écoulées depuis. Il en va de même, quel que soit le nombre de semaines de grossesse, si l’interruption de grossesse est nécessaire pour écarter un danger pour la vie ou pour la santé de l’intéressée. Compte tenu de la situation spécifique des femmes enceintes, l’article 218a du Code pénal prévoit une exemption de peine en cas d’avortement entre la 12e et la 22e semaines de grossesse (uniquement) si la femme s’est présentée, au moins trois jours auparavant, dans un centre de conseil spécialisé et si l’intervention est pratiquée par un médecin. Enfin, les circonstances extraordinaires, telles qu’une détresse personnelle ou sociale grave, sont prises en considération. Lorsque de telles circonstances sont jugées applicables, le tribunal peut s’abstenir d’imposer une sanction à toute femme qui a recours à une interruption de grossesse sans indication médicale, à tout moment au cours de sa grossesse.

93.La loi visant à améliorer l’accès à l’information sur l’avortement (Gesetz zur Verbesserung der Information über einen Schwangerschaftsabbruch), entrée en vigueur le 29 mars 2019, a modifié l’article 219a du Code pénal (« Publicité pour l’avortement »). Cette disposition précise désormais que les médecins, les hôpitaux et les établissements de santé sont autorisés à mentionner publiquement le fait qu’ils pratiquent des avortements légaux. Cela permet aux femmes de vérifier, par exemple, sur le site Web d’un médecin, s’il pratique des interruptions volontaires de grossesse. En outre, les médecins, les hôpitaux et les établissements de santé sont autorisés à reprendre les informations sur l’interruption volontaire de grossesse fournies par l’autorité compétente de la Fédération ou du Land, par un service de conseil spécialisé prévu par la loi sur les grossesses conflictuelles (Schwangerschaftskonfliktgesetz), ou par une association médicale.

94.La loi sur les grossesses conflictuelles a également été modifiée. En application du paragraphe 3 de l’article 13 de ladite loi, la Société allemande de médecine (Bundesärztekammer) établit désormais une liste des cabinets médicaux, hôpitaux et établissements de santé qui déclarent pratiquer des interruptions de grossesse dans les conditions prévues aux paragraphes 1 à 3 de l’article 218a du Code pénal. Cette liste est mise à jour chaque mois et publiée en ligne. Conformément à l’article 13a de la loi sur les grossesses conflictuelles, le Centre fédéral d’éducation sanitaire (Bundeszentrale für gesundheitliche Aufklärung) publie également la liste de la Société allemande de médecine, ainsi que d’autres informations sur les avortements. En outre, la ligne d’assistance téléphonique d’urgence nationale « Femmes enceintes en détresse », créée en application de la loi sur les grossesses conflictuelles, fournit des informations à partir de cette liste. Fin juillet 2019, la Société allemande de médecine a rempli son obligation légale et publié cette liste pour la première fois. La liste répertorie 302 adresses de médecins, d’hôpitaux et d’établissements de santé dans tous les Länder allemands. D’autres sont actuellement en cours de vérification. La prochaine mise à jour aura lieu en février 2020.

95.Les contraceptifs hormonaux doivent être prescrits par un médecin. Les caisses d’assurance maladie obligatoires remboursent les contraceptifs prescrits aux femmes de moins de 22 ans (art. 24a du livre V du Code social). À ce titre, il convient de noter que les bénéficiaires d’aides sociales, comme des allocations de chômage, ont également droit aux prestations prévues par le système d’assurance maladie obligatoire. En outre, sur la base des résultats d’un projet pilote sur le conseil, l’information et la prise en charge des contraceptifs (Beratung, Information und Kostenübernahme bei Verhütungsmitteln), financé par le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse, les autorités fédérales compétentes examinent si les contraceptifs prescrits sur ordonnance pourraient éventuellement être pris en charge pour les femmes à revenus modestes.

96.En cas de harcèlement dans la rue, les forces de police et les autorités chargées de l’ordre public ont pour principale responsabilité de veiller à ce que les femmes cherchant à se renseigner sur l’interruption volontaire de grossesse aient librement accès aux centres de conseil pour femmes enceintes vivant des situations de conflit. La loi sur la police et les lois relatives à l’ordre public relèvent généralement de la compétence des Länder (art. 30 et 70, par. 1, de la Loi fondamentale). La Fédération, en revanche, est responsable des lois pénales et civiles. Les victimes peuvent engager une procédure civile contre de tels actes de harcèlement en déposant une demande d’injonction ou intenter une action pénale pour injure (Beleidigung) ou diffamation (üble Nachrede). Toutefois, pour statuer, les tribunaux doivent également prendre en considération le droit à la liberté d’expression, au cas par cas.

97.Les affaires concernant la protection contre le harcèlement dont sont l’objet des femmes enceintes et des médecins dans la rue ont récemment fait l’objet de plusieurs plaintes de la part d’un militant antiavortement auprès de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Après que la Cour a rendu un arrêt contre l’Allemagne dans une première affaire en 2015 (Annen c. Allemagne , 3690/10), elle a approuvé, dans un certain nombre d’arrêts récents, l’approche des tribunaux civils allemands à l’égard des plaintes dont ils avaient été saisis de la part de médecins et d’un chercheur au sujet de la campagne virulente menée contre eux par l’activiste Klaus Günter Annen, qui comprenait notamment des « conseils dispensés dans la rue » aux passants, et peut-être à des patients, aux abords de leurs cabinets (CEDH, arrêts du 20 septembre 2018, Annen c. Allemagne (nos 2 à 5), requêtes nos 3682/10, 3687/10, 9765/10 et 70693/11 et CEDH, arrêt du 18 octobre 2018, Annen c. Allemagne (no 6), requête no3779/11).

98.Dans ses arrêts, la CEDH a souligné que les actions des militants pro-vie sont protégées dans une large mesure par la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme. Dans le même temps, elle a précisé qu’il existe une limite à discréditer publiquement et à qualifier de meurtriers des médecins qui pratiquent des avortements dans le respect de la législation nationale et à harceler des patientes dans la rue sous la forme de « conseils » (voir Annen c. Allemagne (no 4), 9765/10, par. 26).

99.Il convient de saluer cette jurisprudence, car elle garantit une plus grande sécurité juridique dans les futures affaires − tant pour les médecins pratiquant des avortements que pour les tribunaux nationaux. Il faut donc s’attendre à ce que, dans de futures affaires, les autorités et les tribunaux nationaux compétents soient en mesure de trouver des solutions adéquates sur la base du droit national en vigueur.

Enfants présentant des variations des caractéristiques sexuelles (enfants intersexes) (art. 7, 9, 17, 24 et 26)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 13

100.Pour donner suite aux observations finales du Comité, le Gouvernement fédéral a donné pour mandat au Conseil d’éthique allemand (un conseil d’experts indépendants) d’établir un rapport sur la situation des personnes intersexes en Allemagne. Dans son rapport de 2012, le Conseil a recommandé que les interventions chirurgicales et autres traitements médicaux concernant les nourrissons et les enfants ne soient autorisés que s’ils sont strictement nécessaires, eu égard à l’intérêt supérieur de l’enfant. Le Gouvernement fédéral a engagé des procédures législatives pour réglementer les interventions chirurgicales et autres traitements médicaux concernant les enfants intersexes. Les partis formant le Gouvernement actuel sont convenus d’introduire une législation prévoyant de n’autoriser ces procédures qu’en cas de risque immédiat et afin d’éviter des situations susceptibles de mettre la vie des intéressés en danger.

101.En amont du processus de rédaction de ce projet de loi, le Ministère de la justice a organisé un colloque interdisciplinaire en octobre 2018 avec la participation d’experts de divers domaines (médecine, droit, psychologie, études sur le genre), ainsi que de personnes concernées et de leurs représentants, et de groupes d’intérêt. Ce colloque a révélé que tous les participants étaient largement d’accord pour interdire les interventions chirurgicales. Cependant, la question de savoir quelle forme précise devrait prendre cette interdiction a fait l’objet de nombreuses discussions.

102.Ce projet de loi est actuellement examiné par les ministères concernés. Une décision du cabinet est attendue dans les premiers mois de 2020.

103.Une étude de 2016 soutenue par le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse sur la pertinence actuelle des interventions chirurgicales pratiquées sur des enfants présentant des organes génitaux « ambigus » fournit une analyse des résultats de la toute première enquête exhaustive menée en Allemagne sur la fréquence des génitoplasties réalisées sur des enfants auxquels des « troubles du développement sexuel » ont été diagnostiqués. L’étude a évalué rétrospectivement les données des statistiques hospitalières sur les chirurgies de féminisation et de masculinisation des organes génitaux pratiquées dans les hôpitaux allemands entre 2005 et 2014. Sur la base de l’accord de coalition gouvernementale actuel, selon lequel les opérations dites d’assignation sexuée ne devraient être autorisées chez les enfants qu’en cas de nécessité impérieuse et pour éviter une menace immédiate sur leur vie, l’Université de Bochum a étudié en 2018 l’évolution, en termes de fréquence, des génitoplasties féminisantes et masculinisantes pratiquées sur des enfants au cours des dernières années. Il ressort globalement de cette analyse que le nombre d’enfants de moins de 10 ans présentant des variations congénitales des caractéristiques physiques liées au sexe ayant subi une génitoplastie masculinisante ou féminisante dans un hôpital allemand est resté relativement stable entre 2005 et 2016, eu égard au nombre de diagnostics. Rien n’indique qu’il y ait eu une diminution du nombre de génitoplasties masculinisantes ou féminisantes pratiquées sur des enfants incapables de donner leur consentement. Ce résultat est conforme à celui de la première étude (2016) couvrant la période entre 2005 et 2014.

104.En outre, depuis le printemps 2019, le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse prend part à des actions ciblées de sensibilisation et d’éducation du public à l’échelle nationale par le biais de son « portail Internet arc‑en‑ciel », afin de rappeler que les variations des caractéristiques sexuelles ne nécessitent généralement pas de traitement médical et qu’il importe de tenir compte du droit de l’enfant à développer sa propre identité de genre.

105.Des préparatifs sont en cours pour mettre en place une tribune de dialogue en vue d’étendre les services de conseil et de soutien aux personnes intersexes et à leurs proches, et d’améliorer et garantir leur qualité. Le lancement de cette tribune est prévu pour la fin de mars ou le début d’avril 2020.

106.L’Association fédérale des personnes intersexes (Bundesverband Intersexuelle Menschen e. V.) a été chargée par le Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse d’élaborer un programme de formation au conseil des personnes intersexes et de leur famille. Ce programme se présentera sous la forme de lignes directrices et servira de base pour améliorer la qualité des conseils et du soutien offerts aux personnes intersexes.

Droit à la vie, interdiction de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, liberté et sécurité de la personne et traitement des personnes privées de liberté (art. 6, 7, 9, 10 et 24)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 14

107.Dans le cadre de ses discussions avec les États-Unis, le Gouvernement fédéral exige régulièrement que les forces armées américaines basées en Allemagne agissent conformément aux obligations qui leur incombent en vertu de la Convention sur le statut des forces de l’OTAN, en particulier celles prévues à l’article II, et qu’elles respectent le droit applicable en Allemagne, qui comprend le droit international. Les représentants des États-Unis confirment régulièrement se considérer obligés de satisfaire à cette exigence.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 15

108.À Hambourg, les enquêtes pénales visant des policiers sont menées par un service d’enquête centralisé (Département des enquêtes internes, Dezernat Interne Ermittlungen, DIE), qui est rattaché au Ministère de l’intérieur. Pour l’heure, 168 enquêtes en lien avec le sommet du G20 qui s’est tenu à Hambourg sont en cours (situation au 21 janvier 2020) ; celles-ci font suite à des plaintes déposées contre un total de 221 policiers. Parmi ces enquêtes, 146 concernent 189 policiers pour des allégations de recours illégal à la force. Quatre-vingt-trois des 168 procédures d’enquête ont été ouvertes d’office (c’est-à-dire par la police, le Département des enquêtes internes ou le ministère public), à l’issue d’une évaluation exhaustive du matériel vidéo disponible. Trente-six autres procédures ont été engagées sur la base d’informations fournies par des tiers. Seulement 49 procédures d’enquête sont fondées sur des plaintes pénales déposées par des personnes lésées.

109.Après la conclusion de l’enquête pénale par le Département des enquêtes internes, le ministère public est chargé de son évaluation juridique et de rendre une décision. Selon les informations fournies par le ministère public de Hambourg, 103 affaires ont été classées sans suite en application du paragraphe 2 de l’article 170 du Code de procédure pénale (Strafprozessordnung), faute d’éléments suffisants (situation au 14 octobre 2019). L’identité des accusés n’a pas pu être établie avec certitude dans 54 des procédures classées sans suite. Pour 11 d’entre elles, cela est dû au fait que les policiers n’ont pas pu être identifiés. En outre, les enquêtes ont été rendues plus difficiles par le fait que, dans le cadre des procédures pour atteinte à l’intégrité physique par un dépositaire de l’autorité publique, l’identité de 60 personnes lésées n’a pas été établie. Les autres enquêtes préliminaires se poursuivent.

110.En réponse à la difficulté d’établir l’identité des policiers accusés, le Land de Hambourg a entre-temps introduit une obligation d’identification pour les policiers (initialement limitée à deux ans). En octobre 2019, le Parlement de la ville de Hambourg a adopté la loi portant modification de la loi sur la fonction publique de Hambourg (introduction de l’article 111a HmbBG). De plus, en novembre 2019, le Sénat de Hambourg a adopté un décret précisant les règlements d’application de la loi. Ce décret fait obligation aux membres de la police antiémeute de Hambourg de porter une identification personnelle lors d’opérations de grande envergure sous commandement unifié menées à l’occasion de rassemblements, de manifestations ou d’autres événements publics.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 15 a)

111.Les chiffres relatifs aux plaintes contre la police pour les années 2011 à 2018 figurent en annexe.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 15 b)

112.En cas de suspicion d’infraction pénale, l’enquête pénale est, en principe, conduite par le ministère public. Des garanties sont en place dans presque tous les Länderpour que les enquêtes spécifiques relatives à une affaire en particulier soient transférées à un autre poste de police que celui auquel la personne visée est rattachée.

113.En outre, les Länder de Bavière, Brême, Hambourg et du Schleswig-Holstein disposent d’un office central d’enquête qui est soit rattaché au Ministère de l’intérieur, soit à l’Office de police criminelle du Land, et qui mène des enquêtes sur les plaintes déposées contre des policiers.

114.Des bureaux centraux des plaintes ont été créés au sein des Ministères de l’intérieur de Basse-Saxe, de Saxe, de Saxe-Anhalt et du Schleswig-Holstein pour recevoir les plaintes contre la police.

115.Les citoyens de Rhénanie-Palatinat peuvent adresser leurs plaintes contre des policiers ou des mesures de police au chef de la police (Beauftragter für die Landespolizei), qui fait fonction de point de contact pour les plaintes ou les suggestions concernant la police du Land.

116.Dans le Schleswig-Holstein, la fonction de chef de la police (similaire à celle du Land de Rhénanie-Palatinat) a été créée le 1er octobre 2016.

117.Dans le Mecklembourg-Poméranie occidentale, toute faute présumée peut être portée à l’attention du « médiateur du Land » au Parlement du Land. Le médiateur est indépendant dans l’exercice de sa charge et n’est soumis qu’à la loi.

118.Le Land de Bade-Wurtemberg dispose d’un médiateur depuis 2016. Celui-ci est indépendant dans l’exercice de sa fonction et n’est soumis à aucune instruction mais uniquement à la loi. Le Médiateur a une responsabilité spécifique en ce qui concerne la police. Il fait fonction de point de contact pour les policiers, ainsi que de référent et de représentant des intérêts des citoyens qui signalent d’éventuelles fautes commises par des policiers ou contestent la légalité d’une mesure de police.

119.Dans le Land de Brême, chaque citoyen a la possibilité de s’adresser au Département des enquêtes internes pour toute situation revêtant un caractère pénal (par exemple, des préjudices corporels). Si une plainte est déposée contre la police, l’affaire est immédiatement transmise au Département des enquêtes internes, qui relève de l’administration sénatoriale de l’intérieur, pour une enquête plus approfondie.

120.Dans le Thuringe, le Ministère de l’intérieur et des communautés a créé un bureau du médiateur (Vertrauensstelle) au sein de la police du Thuringe le 1er décembre 2017.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 15 c)

121.Dans les Länderde Berlin, Brandebourg, Brême, Hambourg, Hesse, Mecklembourg‑Poméranie occidentale, Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Rhénanie-Palatinat, Saxe-Anhalt, Schleswig-Holstein et Thuringe, les policiers sont tenus de porter une identification personnelle (obligation visant jusqu’à un certain point les unités placées sous commandement unifié). Bien qu’il n’y ait actuellement aucune obligation d’identification dans les autres Länder, des réflexions ont été engagées pour introduire cette obligation dans une certaine mesure. Certains Länder ont pris la décision de demander le port d’une identification personnelle sur une base volontaire.

122.Il n’est pas prévu que les agents de la police fédérale portent des badges nominatifs ou des numéros matricules. Dans la pratique, il n’y a eu jusqu’à présent aucun cas où il était impossible d’identifier des agents de la police fédérale et donc d’enquêter sur des allégations faites à leur encontre.

123.Par un arrêt du 7 mai 2019 (LVG 4/18), la Cour constitutionnelle du Land de Saxe‑Anhalt a déclaré constitutionnelles les règles faisant obligation aux policiers de porter des badges nominatifs et des numéros matricules.

124.Par un jugement du 26 septembre 2019, la Tribunal administratif fédéral a confirmé la légalité de la règle du Land de Brandebourg faisant obligation aux policiers de porter une identification personnelle. Le tribunal a estimé que l’obligation de porter un badge nominatif ou un numéro matricule portait effectivement atteinte au droit à l’autodétermination informationnelle des policiers, mais il a néanmoins jugé qu’elle n’était pas inconstitutionnelle (dossiers nos BVerw 2 C 32.18 et BVerwG 2 C 33.18).

Office national pour la prévention de la torture

125.Dans la mesure où ses fonctions ont une portée à la fois nationale et régionale, l’Office a été créé sur la base d’un accord administratif entre la Fédération et les Länder. Depuis 2015, il bénéficie d’un financement de 180 000 euros provenant du budget du Ministère de la justice (bureau national) et de 360 000 euros provenant du budget des Länder. Le montant du financement ayant été précisé dans l’accord administratif relatif à la coopération entre l’Office national et la commission des Länder, toute modification nécessite par conséquent une modification de l’accord administratif.

126.En novembre 2019, la Conférence des Ministres de la justice des Ländera décidé d’augmenter de 100 000 euros le financement annuel de l’Office à partir de 2020.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 16

Garde à vue

127.Les Länderqui se réservent toujours la possibilité d’avoir recours à la pratique de la contention physique (Fixierung) pendant les gardes à vue sont constamment encouragés à s’inspirer de l’expérience des Länder qui l’ont abandonnée. Dans les établissements pénitentiaires, il est rare désormais d’y avoir recours. Lors de sa visite de 2015, le CPT a formulé les commentaires suivants sur cette pratique :

128.« Le CPT se félicite que, depuis sa visite de 2010, le recours à la contention physique (Fixierung) pendant les gardes à vue ait été abandonné par les autorités policières de plusieurs Länder, notamment le Bade-Wurtemberg, Berlin, la Sarre et la Thuringe. Le Comité invite les autorités policières de Basse-Saxe, de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, de Saxe-Anhalt et tous les autres Länder concernés à mettre fin à cette pratique sans plus de délai. »

129.« Le CPT note avec satisfaction que la tendance à la diminution de l’utilisation de la contention physique (Fixierung) dans les établissements pénitentiaires qu’il avait observée pendant sa visite de 2013 se poursuit. De fait, dans la plupart des établissements pénitentiaires visités, aucun prisonnier ou presque n’y avait été soumis ces dernières années. Le CPT encourage les autorités compétentes de tous les Länder à abandonner la pratique du Fixierung dans les établissements pénitentiaires .»

130.Avec sa loi visant à renforcer les droits des personnes gardées à vue (Gesetz zur Stärkung der Rechte von im Polizeigewahrsam festgehaltenen Personen; GV.NRW p. 995), qui est entrée en vigueur le 31 décembre 2019, le Land de Rhénanie‑du‑Nord‑Westphalie a donné suite aux exigences posées par la Cour constitutionnelle fédérale dans son arrêt du 24 juillet 2018 concernant les formes particulièrement intrusives de contention physique (2 BvR 309/15 ; 2 BvR 502/16) visant les personnes placées en garde à vue. Aux termes de cette loi, le recours à ce type de contention n’est donc autorisé que si de nouvelles exigences légales beaucoup plus strictes sont respectées.

Mesures de contrôle

131.En ce qui concerne l’inspection des établissements de soins et des services de soins ambulatoires, se reporter à la question 17.

132.Les mesures privatives de liberté font l’objet d’une attention croissante, comme en témoigne notamment la publication de lignes directrices fondées sur la recherche et élaborées en étroite collaboration par des experts de terrain et des professionnels de santé pour aider les soignants à éviter les mesures qui restreignent la liberté des patients (www.leitlinie-fem.de). Ces lignes directrices ont été élaborées avec un groupe de spécialistes de divers disciplines. Ont participé, entre autres, des représentants des patients et des établissements de soins, les autorités de surveillance des établissements de soins, ainsi que le Service médical des caisses d’assurance maladie. Ce projet a été financé par le Ministère fédéral de l’éducation et de la recherche.

133.Deux projets − Werdenfelser Weg et ReduFix − proposent des séminaires de formation sur les moyens à mettre en œuvre pour éviter le plus possible le recours aux méthodes de contention. Le projet Werdenfelser Weg a eu une incidence considérable. Il a d’abord vu le jour en Bavière et il est aujourd’hui mis en œuvre dans toute l’Allemagne ; il fournit des directives à ceux qui sont aux prises avec cette question sur le terrain. Le projet ReduFix a permis de former un certain nombre d’instructeurs (de manière à créer un effet multiplicateur) qui propose des formations dans les établissements cherchant à réduire le recours aux méthodes de contention. Des manuels et des documents d’orientation, ainsi que les coordonnées des points de contact pour les formations, sont disponibles sur le site Web du projet. Tous les documents et séminaires de formation en question visent à sensibiliser non seulement aux dispositions législatives susmentionnées, mais aussi à la nécessité d’éviter autant que possible le recours aux mesures privatives de liberté en général.

134.L’École allemande de la magistrature continue elle aussi de proposer des séminaires sur cette question.

Poursuites pénales

135.En cas de recours à la contention physique pour un motif inadmissible, les autorités d’enquête compétentes sont tenues d’ouvrir des enquêtes conformément au principe de l’obligation de poursuivre. L’obligation d’engager des poursuites pénales effectives est d’autant plus impérieuse que la victime fait l’objet d’une protection spéciale. Par exemple, dans son arrêt du 15 janvier 2020, la Cour constitutionnelle fédérale a fait droit à une plainte constitutionnelle contestant l’abandon des poursuites pénales dans une affaire de contention physique, et a renvoyé l’affaire à une juridiction inférieure pour clarification.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 17

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 17 a)

136.Tous les services de soins doivent respecter la dignité humaine et avoir mis en place un système de gestion de la qualité. L’ensemble des établissements médicalisés et des services de soins de proximité sont régulièrement inspectés, au moins tous les ans, par le Service médical des caisses d’assurance maladie et le Service d’inspection des caisses d’assurance maladie privées (Prüfdienst des Verbandes der privaten Krankenversicherung e. V.). Les résultats de ces inspections sont publiés et peuvent donner lieu à des mesures correctives ou à des sanctions.

137.Dans le cadre des inspections annuelles de contrôle de la qualité effectuées dans les établissements de soins hospitaliers, en application des articles 114 et suivants du Livre XI du Code social (SGB XI), des données sont collectées, entre autres, sur le recours à des mesures privatives de liberté dans un échantillon de patients. L’une des questions examinées est de savoir si le recours à ces mesures est soumis à un consentement ou à une autorisation, et si la nécessité de ce consentement ou de cette autorisation est régulièrement vérifiée. Tous les trois ans, le service de conseil médical de l’Association nationale des caisses d’assurance maladie obligatoires (MDS) établit un rapport basé sur les conclusions de ces audits qualité. Le cinquième rapport de la MDS, présenté en février 2018 et fondé sur les résultats de l’inspection de 2016, montre une diminution du recours aux mesures privatives de liberté dans les établissements de soins.

138.La mise en place d’un nouveau système d’évaluation, de contrôle et de compte rendu de la qualité dans les établissements de soins et d’hébergement de longue durée, fondé sur des indicateurs spécifiques pour mesurer la qualité des résultats, a débuté le 1er octobre 2019. Ce nouveau système prévoit des évaluations régulières (deux fois par an) de l’utilisation de sangles et de barrières de lit, pour tous les résidents de ces établissements. Ces évaluations permettront de mieux répondre encore à l’avenir aux enjeux que soulève le recours à des mesures coercitives. Aucune mesure supplémentaire n’est envisagée à cet égard pour le moment.

139.En plus des inspections annuelles régulières décrites ci-dessus, des inspections ponctuelles peuvent être effectuées à la suite d’un incident, d’un signalement ou d’une plainte. Si les patients d’établissements de soins et d’hébergement de longue durée ou les membres de leur famille constatent d’importants manquements dans les soins dispensés, ou qu’ils n’approuvent pas le choix d’un prestataire de soins de proximité ou de soins hospitaliers, ils peuvent s’adresser à la caisse d’assurance maladie concernée ou à l’autorité de surveillance compétente.

140.En outre, des contrôles réguliers sont effectués en application des lois sur l’encadrement des établissements médicalisés et des dispositions législatives respectives des Länder.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 17 b)

141.Le personnel de la Clinique de psychiatrie légale de Brandebourg participe régulièrement à des formations obligatoires sur les mesures privatives de liberté à l’encontre des patients. Des formations de désescalade ont lieu une fois par an. La participation à ces formations est strictement encadrée afin de garantir que tous les membres du personnel reçoivent une formation appropriée. En cas d’urgence, des médecins sont appelés pour conseiller le personnel sur le type et l’étendue des mesures de protection à mettre en place, et restent sur place tout au long du processus. Une fois la situation d’urgence terminée, une réunion est organisée avec le patient pour évaluer la situation, et la clinique notifie sans délai chaque incident au ministère public ou à la division de l’exécution des peines du tribunal compétent.

142.Le ministère compétent du Land n’a reçu aucune observation ou information concernant l’allégation selon laquelle, dans un cas particulier, le personnel de la Clinique de psychiatrie légale de Brandebourg aurait fait usage de la force à plusieurs reprises contre un patient. En outre, aucune allégation de ce type n’a été confirmée lors des réunions ultérieures qui ont eu lieu comme l’exige la loi d’encadrement.

143.En cas de violence entre patients au sein de la clinique, une réunion est convoquée avec les patients concernés et le médecin-chef. Les patients sont informés des éventuelles mesures qui pourraient être prises, y compris les procédures judiciaires. Au besoin, les patients sont placés dans des secteurs distincts de la clinique.

144.Toutefois, il convient de garder à l’esprit que les patients doivent toujours pouvoir exercer leurs libertés fondamentales. La clinique est un établissement thérapeutique. Une surveillance permanente ne saurait donc être approuvée.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 17 c)

145.Conformément aux lois sur la santé mentale (« PsychKG ») des Länder, toute personne peut être internée dans une clinique sans son consentement s’il existe un risque aigu et considérable d’automutilation ou de préjudice à autrui en raison de la maladie ou du trouble mental dont elle est atteinte. En cas d’internement, la plupart des Länder ne prévoient pas l’application de sanctions disciplinaires.

146.La Cour constitutionnelle fédérale a affirmé très clairement que l’imposition d’un traitement médical sans le consentement du patient, dans le cadre d’un internement, est autorisé, mais uniquement en dernier recours et si, en raison de sa maladie, l’intéressé est incapable d’estimer avoir besoin d’un traitement ou d’agir en conséquence. À la lumière de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle fédérale, les Länder ont déjà révisé leurs lois sur la santé mentale ou sont en train de le faire. Les droits et les besoins des personnes concernées sont au premier plan des considérations sur cette question. La coercition doit être évitée autant que possible et n’est autorisée que dans le respect des exigences strictes définies par la Cour constitutionnelle fédérale. De nouvelles structures doivent être mises en place pour éviter la coercition et pour renforcer les services de soutien. Entre-temps, les Länder ont également élaboré des propositions concernant les procédures que doivent suivre toutes les cliniques psychiatriques relevant de leur compétence respective.

147.Dans leurs lois respectives, les Länder ont également légiféré sur la mise en place de nouvelles structures visant à améliorer les services de prévention et de soutien post‑thérapeutiques pour les enfants, les jeunes et les adultes, et à assurer une meilleure interconnexion entre ces services. L’amélioration de la prévention et du suivi peut réduire le nombre d’hospitalisations non volontaires et d’internements forcés. En outre, il a été possible de réduire le nombre de mesures privatives de liberté en désignant des tuteurs ad litem possédant des connaissances spécialisées en matière de mesures de remplacement. Le respect des droits des patients est contrôlé par divers organismes au sein du système de santé et par des organisations indépendantes de consommateurs et de patients.

148.Le Gouvernement fédéral finance un projet de recherche intitulé « Éviter les mesures coercitives en psychiatrie » dans le but de rendre plus transparent le recours aux mesures de contrainte en Allemagne et d’éviter la coercition en ayant recours à des traitements de substitution volontaires.Le but est de formuler des recommandations visant à réduire le recours aux mesures coercitives et de mettre en place un système de contrôle pour enregistrer des données sur le recours à la coercition et sur les mesures prises pour éviter de telles mesures.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 17 d)

149.La stérilisation et l’avortement sans le consentement de la personne concernée sont interdits. Est réputée capable de donner son consentement, toute personne en mesure de comprendre la signification et la portée de la mesure envisagée, à la suite des explications fournies par un médecin, d’en peser le pour et le contre et de prendre une décision sur la base de cet examen. Ce n’est que lorsque l’intéressé n’est pas en mesure de donner son consentement que son tuteur peut consentir en son nom. En matière de stérilisation, cependant, des règles particulièrement strictes s’appliquent. Celles-ci sont énoncées à l’article 1905 du Code civil. Aux termes de l’alinéa 1 du paragraphe 1 de l’article 1905 du Code civil, le tuteur peut refuser de donner son consentement à la stérilisation de la personne placée sous sa tutelle si cette mesure entre en contradiction avec la volonté (naturelle) de cette personne, que celle-ci soit ou non capable de donner son consentement. En conséquence, la stérilisation forcée est interdite en Allemagne. Lorsqu’une aide à la prise de décisions doit être apportée, il incombe au tuteur d’informer l’intéressé, de le conseiller s’il n’est pas en mesure de donner son consentement, et de déterminer quelle est sa volonté effective. Si la personne sous tutelle refuse la stérilisation, l’intervention ne peut être réalisée, quelles que soient la manière et la forme sous lesquelles celle-ci oppose son refus. Dans tous les cas, un tuteur spécial doit être désigné pour valider le consentement à une stérilisation (par. 2 de l’article 1899 du Code civil). De plus, le consentement donné par le tuteur doit être approuvé par le tribunal des tutelles (par. 2 de l’article 1905 du Code civil). Ainsi, l’article 1905 du Code civil sert également à protéger les personnes placées sous tutelle de toute mesure de stérilisation sans avoir été suffisamment informées et conseillées et sans que leur volonté effective ait été établie.

150.L’ensemble des exigences énoncées aux alinéas 1 à 5 du paragraphe 1 de l’article 1905 du Code civil (la décision ne doit pas être contraire à la volonté naturelle de la personne sous tutelle ; la personne sous tutelle est dans l’incapacité permanente à donner son consentement ; en l’absence de stérilisation, une grossesse est hautement probable ; la grossesse présente un danger pour la vie ou la santé de la femme enceinte ; existence d’autres moyens raisonnables) ne sont réunies que dans des cas très exceptionnels. Ce constat est confirmé par les statistiques, qui révèlent que, dans la pratique des juridictions compétentes, la stérilisation n’est envisagée que dans des cas de plus en plus rares. En 2008, à l’échelle de l’Allemagne, la stérilisation a été autorisée dans 91 cas et refusée dans 22. En 2014, elle n’a été approuvée que dans 36 cas, mais rejetée dans 21 autres. Il convient en outre de tenir compte du fait que l’autorisation accordée ne signifie pas nécessairement que l’intervention a été effectivement pratiquée. Les chiffres enregistrés en 2015 confirment cette tendance à la baisse (26 autorisations et 13 refus). En raison d’un ajustement de la méthode statistique, des chiffres fiables plus récents ne sont actuellement pas disponibles, bien que certaines indications laissent penser que les chiffres continueront à diminuer de manière significative.

151.Néanmoins, une nouvelle révision de l’article 1905 du Code civil est certainement nécessaire à la lumière des dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Il faudra dans un premier temps disposer d’une base factuelle suffisante pour préciser les situations dans lesquelles la stérilisation de personnes sous tutelle est autorisée ou refusée dans la pratique judiciaire, sur la base de l’article 1905 du Code civil. Le Ministère fédéral de la justice prévoit donc de lancer un projet de recherche sur la stérilisation des personnes placées sous tutelle légale. Un appel à propositions est en voie de préparation. L’objectif du projet est d’établir un corpus de recherches juridiques empiriques afin de déterminer si l’article 1905 du Code civil doit être maintenu, modifié ou abrogé et remplacé par une interdiction générale de la stérilisation des personnes placées sous tutelle.

152.Depuis l’introduction de la loi sur le consentement à l’administration de traitements médicaux sous contrainte aux personnes sous tutelle (Gesetz zur Regelung der betreuungsrechtlichen Einwilligung in eine ärztliche Zwangsmaßnahme),le législateur a modifié le droit régissant l’internement des personnes sous tutelleen établissant une distinction entre le consentement à l’administration de traitements médicaux sous contrainte et l’internement avec mesures privatives de liberté.

153.Tout en conservant des exigences matérielles et procédurales strictes, l’article 1906a du Code civil nouvellement créé prévoit désormais, à l’alinéa 1 du paragraphe 7, que l’administration de tout traitement médical sous contrainte est toujours subordonnée à l’hospitalisation de la personne sous tutelle dans un établissement fournissant le traitement médical nécessaire, y compris tout traitement ultérieur dont elle peut avoir besoin. Conformément à la règle de l’ultima ratio , les traitements médicaux sous contrainte en ambulatoire continuent d’être interdits. En outre, la loi a introduit d’autres dispositions servant à renforcer le droit à l’autodétermination des personnes sous tutelle en matière de traitement médical.

154.Par ailleurs, s’il y a lieu, le tuteur doit informer la personne sous tutelle de la possibilité d’élaborer des directives médicales anticipées (Patientenverfügung) et, si l’intéressée le souhaite, l’aider à le faire. Tout en encourageant davantage l’utilisation généralisée des directives médicales anticipées, cette mesure vise également à éviter les traitements médicaux sous contrainte.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 18

155.La loi visant à renforcer les droits des accusés dans le cadre des procédures pénales et portant modification de la loi sur les tribunaux de juges non professionnels (Gesetz zur Stärkung der Verfahrensrechte von Beschuldigten im Strafverfahren und zur Änderung des Schöffenrechts) dispose que les organes chargés de l’application de la loi sont tenus de communiquer des renseignements d’ordre général à tout accusé qui souhaite consulter un avocat de la défense avant d’être interrogé, de telle sorte qu’il puisse se mettre en contact avec lui. Les coordonnées de cabinets d’avocats susceptibles d’intervenir en urgence doivent aussi être communiquées.

156.Le Gouvernement fédéral n’estime pas nécessaire de modifier les dispositions juridiques pertinentes, car la loi autorise déjà toute personne en état d’arrestation à avertir un parent ou une personne de confiance immédiatement après son arrestation.

157.En application de la première phrase du paragraphe 2 de l’article 114 b, no 6, du Code de procédure pénale, toute personne arrêtée doit être informée de la possibilité qui lui est donnée d’avertir un proche ou une personne de confiance, sous réserve que cette notification ne compromette pas le bon déroulement de l’enquête (modification du 27 août 2017 de la deuxième loi visant à renforcer les droits des accusés dans le cadre des procédures pénales et portant modification de la loi sur les tribunaux de juges non professionnels [Zweites Gesetz zur Stärkung der Verfahrensrechte von Beschuldigten im Strafverfahren und zur Änderung des Schöffenrechts]).

158.Ce droit est lui-même énoncé au paragraphe 1 de l’article 114 c du Code de procédure pénale. Il y est indiqué explicitement que le droit d’avertir un proche ou une personne de confiance est de règle et qu’il n’est possible d’y déroger ou de repousser la notification que dans des cas exceptionnels, lorsqu’il est à craindre que celle-ci compromette le bon déroulement de l’enquête.

159.Le Gouvernement fédéral est d’avis que cette disposition est suffisamment claire et assure une protection aux personnes placées en garde en vue, tout en donnant à la police les moyens d’exécuter les tâches qui lui incombent. La seule autre solution envisageable consisterait à instituer des dispositions applicables au cas par cas, ce qui ferait courir un risque d’omissions compte tenu de la diversité des situations susceptibles de survenir dans la pratique.

160.La dérogation prévue au paragraphe 2 de de l’article 114 b, no 6, du Code de procédure pénale et au paragraphe 1 de l’article 114 c, lorsqu’elle est exercée, ne s’applique que pendant une période d’une durée aussi courte et limitée que possible. Celle-ci découle de la disposition énoncée au paragraphe 1 de l’article 114 c du Code de procédure pénale, selon laquelle la partie accusée a la possibilité de faire connaître sa situation sans délai (unverzüglich) à un proche ou à une personne de confiance. Selon la définition universellement acceptée de cette expression, qui figure au paragraphe 1 de l’article 121 du Code civil (Bürgerliches Gesetzbuch), « sans délai » signifie également dans ce cas « sans retard répréhensible». Cela correspond à la norme appliquée par la Cour européenne des droits de l’homme, selon laquelle, sur la base du droit au respect de la vie privée et de la vie familiale, il incombe aux États de veiller à ce que les membres de la famille d’une personne arrêtée soient avertis « rapidement ». À cet égard, il convient de noter que le paragraphe 2 de l’article 114c du Code de procédure pénale impose une autre limite en termes de durée : selon cette disposition, si le tribunal a donné force exécutoire à sa décision de mise en détention, il doit ordonner qu’une personne proche de la personne arrêtée − ou une personne de confiance − soit informée de cette décision sans retard (sans retard répréhensible). Cette obligation ne souffre aucune dérogation et n’est soumise à aucune restriction, même si elle risque de compromettre le bon déroulement de l’enquête, ce qui la distingue du droit de tout accusé d’avertir des tierces personnes en application du paragraphe 1 de l’article 114c du Code de procédure pénale. La décision relative à la détention provisoire est prise une fois que la personne arrêtée a été présentée devant le juge compétent, ce qui doit toujours avoir lieu le lendemain au plus tard de son arrestation (par. 1 et 2 de l’article 115 et par. 1 de l’article 128 du Code de procédure pénale). Dans le cas où il ordonne l’exécution de la détention provisoire, le tribunal devant lequel l’accusé est présenté pour une audience personnelle au plus tard le lendemain de son arrestation (par. 1 de l’article 128 du Code de procédure pénale) doit ordonner qu’un des parents de l’accusé, ou une personne de confiance de celui-ci, soit informé sans délai (par. 2 de l’article 114c du Code de procédure pénale). Cela permet d’assurer la protection prévue au paragraphe 4 de l’article 104 de la Loi fondamentale, selon lequel un parent ou une personne jouissant de la confiance de la personne détenue doit être informé sans délai de toute décision judiciaire imposant ou prolongeant une privation de liberté. La loi ne prévoit aucune exception à cette obligation judiciaire de notification.

161.Cette obligation existe indépendamment du droit de l’accusé d’avertir un proche parent ou une personne de confiance aux termes des articles 114c (par. 1) et 114b (par. 2), no 6, du Code de procédure pénale.

162.En conséquence, le dernier délai pour la notification d’office d’un proche ou d’une personne de confiance par la partie accusée est le lendemain du jour où son arrestation est intervenue.

163.Enfin, les décisions du tribunal concernant la notification d’un parent ou d’une personne de confiance peuvent être contestées par l’accusé (Beschwerde; art. 304 du Code de procédure pénale).

164.En outre, les accusés étrangers doivent être informés qu’ils peuvent demander à ce que la représentation consulaire de leur pays d’origine soit avisée et à ce que des messages lui soient transmis (quatrième phrase du paragraphe 2 de l’article 114b du Code de procédure pénale).

165.La participation d’un avocat de la défense est également garantie par la loi.

166.La deuxième phrase du paragraphe 1 de l’article 136, qui doit être lue en conjonction avec la deuxième phrase du paragraphe 4 de l’article 163a du Code de procédure pénale, dispose que toute partie accusée doit être informée au début du premier interrogatoire mené par la police qu’elle est libre, comme la loi le prévoit, de répondre aux accusations portées contre elle ou de ne faire aucune déclaration à ce sujet (par. 2 de l’article 114b no 2 du Code de procédure pénale). La troisième phrase du paragraphe 4 de l’article 163a, qui doit être lue en conjonction avec les paragraphes 1 et 5 de l’article 168c du Code de procédure pénale, stipule que l’avocat de la défense a le droit d’être présent lors du premier interrogatoire de police et de tout interrogatoire ultérieur. Il en va de même pour les interrogatoires menés par le tribunal ou le ministère public (par. 1 et 5 de l’article 168c et deuxième phrase du paragraphe 3 de l’article 163a qui doivent être lus en conjonction avec les paragraphes 1 et 5 de l’article 168c du Code de procédure pénale).

167.Selon le paragraphe 2 de l’article 114b, no 4, du Code de procédure pénale, les parties accusées doivent également être informées qu’elles peuvent consulter un avocat de leur choix à tout moment, y compris avant leur interrogatoire. Dans ce cas, les policiers sont tenus de leur fournir des informations (y compris le numéro de téléphone des cabinets d’avocats d’urgence) afin de leur faciliter la tâche (deuxième phrase du paragraphe 4 de l’article 163a, à lire conjointement avec les troisième et quatrième phrases du paragraphe 1 de l’article 136 du Code de procédure pénale).

168.En outre, conformément au paragraphe 2 de l’article 114b, no 4a, du Code de procédure pénale dans sa version actuelle (voir la loi portant réforme de la loi relative à l’obligation d’être représenté par un avocat [Gesetz zur Neuregelung des Rechts der notwendigen Verteidigung], en vigueur depuis le 13 décembre 2019), les parties accusées doivent être informées de leur droit de demander l’assignation d’un avocat commis d’office (Pflichtverteidiger) dans les cas où l’obligation d’être représenté par un avocat s’applique (c’est-à-dire, dans les cas où les chefs d’inculpation sont particulièrement lourds − voir ci‑dessous). La décision relative à la demande d’assignation d’un avocat commis d’office en application du paragraphe 1 de l’article 141 du Code de procédure pénale (nouvelle version) doit également être prise sans délai et, surtout, avant l’interrogatoire de l’accusé.

169.Ces instructions explicites indiquent clairement aux accusés qu’ils ne sont pas obligés de se soumettre à un interrogatoire de police sans la présence d’un avocat, ce qui atténue toute pression psychologique.

170.En droit allemand, l’assignation d’un avocat commis d’office garantit également le droit des accusés de bénéficier des services d’un avocat payé par l’État. Les critères applicables sont énumérés à l’article 140 du Code de procédure pénale. Ils sont fonction de la gravité de l’infraction pénale en question (par. 1, art. 140, nos 1 et 2, du Code de procédure pénale), des conséquences juridiques à attendre (par. 1, art. 140, nos 1, 2, 3 et 7, et par. 2 du Code de procédure pénale), de la complexité de l’affaire (par.2, art. 140 du Code de procédure pénale) et de la situation personnelle de l’accusé, plus précisément de sa capacité d’assurer ou non lui-même sa défense (par. 1, art. 140, nos 4, 5 et 9, ainsi que par. 2 du Code de procédure pénale). Ces critères sont par conséquent conformes aux critères établis par la Cour européenne des droits de l’homme pour interpréter le concept des « intérêts de la justice » évoqué à l’alinéa c) du paragraphe 3 de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. L’assistance d’un avocat commis d’office, sans frais pour l’accusé, est assurée sous réserve que les conditions énoncées à l’article 140 du Code de procédure pénale soient remplies, que l’accusé soit ou non indigent. Partant, les dispositions de la législation allemande vont au-delà des prescriptions susmentionnées de la Convention européenne des droits de l’homme.

171.Outre leur droit de bénéficier de l’assistance d’un avocat commis d’office, les accusés indigents peuvent se prévaloir des avis et consultations juridiques dispensés dans le cadre du système d’aide juridictionnelle. En application de la loi sur le conseil juridique et la représentation en justice des citoyens disposant de faibles revenus (Gesetz über Rechtsberatung und Vertretung für Bürger mit geringem Einkommen), les accusés qui ne sont pas habilités à bénéficier des services d’un avocat commis d’office en application de l’article 140 du Code de procédure pénale, mais qui n’ont pas la possibilité, compte tenu de leur situation économique, de réunir les fonds nécessaires pour payer les services d’un avocat, ont le droit de recevoir des conseils juridiques gratuitement de la part d’un avocat.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 19

172.Conformément au paragraphe 1 de l’article 137 du Code de procédure pénale − qui est également applicable dans les procédures pénales pour mineurs en vertu du paragraphe 2 de l’article 2 de la loi sur les tribunaux pour mineurs − les parties accusées peuvent se faire assister d’un avocat à tout moment de la procédure. Conformément à la deuxième phrase du paragraphe 4 de l’article 163a et à la deuxième phrase du paragraphe 1 de l’article 136 du Code de procédure pénale, lus conjointement avec le paragraphe 2 de l’article 2 de la loi sur les tribunaux pour mineurs, les mineurs doivent être informés avant le début de leur (premier) interrogatoire de police que la loi les autorise à faire appel à un avocat de leur choix à tout moment, même avant le début de l’interrogatoire. En outre, les dispositions allemandes sur l’obligation d’être représenté par un avocat prévoient un droit à l’assistance d’un avocat aux frais de l’État dans les affaires portant sur de lourds chefs d’inculpation.

173.Deux lois sont entrées en vigueur en décembre pour mettre en œuvre la Directive (UE) 2016/1919 concernant l’aide juridictionnelle et la Directive (UE) 2016/800 (mentionnée dans la question) : premièrement, la loi portant réforme de la loi relative à l’obligation d’être représenté par un avocat (Gesetz zur Neuregelung des Rechts der notwendigen Verteidigung), qui étend principalement les dispositions régissant le droit à un conseiller juridique obligatoire dans la partie du Code de procédure pénale régissant le droit pénal procédural général (également applicable aux accusés mineurs conformément au paragraphe 2 de l’article 2 de la loi sur les tribunaux pour mineurs) ; deuxièmement, la loivisant à renforcer les garanties procédurales des mineurs soupçonnés ou poursuivis dans le cadre des procédures pénales (Gesetz zur Stärkung der Verfahrensrechte von Beschuldigten im Jugendstrafverfahren). Cette dernière introduit l’article 68a de la loi sur les tribunaux pour mineurs qui prévoit expressément que dans les cas où l’assistance d’un avocat de la défense est obligatoire (conformément à l’article 68 de la loi sur les tribunaux pour mineurs et à l’article 140 du Code de procédure pénale, c’est-à-dire en particulier dans les cas de détention ou de placement provisoire, lorsque les accusations portent sur des infractions pénales graves, dans les cas où il faut s’attendre à ce que le mineur soit détenu et dans les cas où les parties accusées ne sont pas suffisamment en mesure de se défendre elles‑mêmes), un avocat de la défense doit, en règle générale, être désigné d’office avant que l’interrogatoire du mineur puisse débuter (y compris avant le premier interrogatoire de police). Le nouvel article 70c (par. 4) de la loi sur les tribunaux pour mineurs prévoit en outre que dans ces cas, les interrogatoires doivent, en règle générale, être reportés jusqu’à l’arrivée de l’avocat de la défense, si ce dernier n’est pas présent. Ces nouvelles dispositions garantissent qu’en cas de défense obligatoire, les mineurs accusés sont assistés par un avocat à tous les stades de la procédure jusqu’au jugement définitif et contraignant.

174.Le droit de l’accusé à l’assistance d’un avocat de son choix ou d’un avocat commis d’office lors des interrogatoires découle directement de la troisième phrase du paragraphe 4 de l’article 163a, lue conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 168c du Code de procédure pénale (pour les interrogatoires de police), de la deuxième phrase du paragraphe 3 de l’article 163a, lue conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 168c du Code de procédure pénale (pour les interrogatoires du ministère public), ainsi que du paragraphe 1 de l’article 168c dudit Code (pour les interrogatoires du tribunal). Le droit à la présence d’un avocat lors des interrogatoires de police a été introduit par la deuxième loi visant à renforcer les droits des accusés dans le cadre des procédures pénales et portant modification de la loi sur les tribunaux de juges non professionnels du 27 août 2017.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 20

175.La détention disciplinaire dans les prisons allemandes est une mesure disciplinaire visant les détenus ayant commis des infractions particulièrement graves en détention et qui consiste à les séparer des autres prisonniers. Dans les Länder où la loi prévoit la possibilité d’ordonner une mesure de détention disciplinaire, il s’agit de la sanction la plus grave possible. Elle n’est imposée que très rarement et pour les fautes les plus graves. De plus, elle est soumise à des conditions très strictes. Cela est particulièrement vrai pour les prisonniers mineurs.

176.L’isolement cellulaire (Einzelhaft) doit être distingué de la détention disciplinaire. L’isolement n’est pas une mesure disciplinaire et il est soumis à des dispositions légales différentes.

177.Les dispositions légales des Länderen matière de détention disciplinaire varient selon les types de détention. Dans certains Länder, il est permis de l’ordonner comme mesure disciplinaire pour une durée maximale de quatre semaines pour les adultes, et de deux semaines pour les détenus mineurs. Dans certains Länder, les durées autorisées sont plus courtes (voir annexe).

178.La loi de plusieurs Länder stipule expressément que pour les prisonniers mineurs, la détention disciplinaire doit être motivée par des considérations éducatives. En règle générale, des mesures disciplinaires à l’encontre des détenus mineurs ne peuvent être ordonnées que si la résolution amiable des conflits ou les mesures éducatives se révèlent insuffisantes.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 21

179.Le Parlement allemand a transposé la décision du 4 mai 2011 de la Cour constitutionnelle fédérale (BVerfG) en instaurant une réforme complète de la loi régissant la rétention de sûreté, tant au niveau fédéral que des Länder. Cette nouvelle réglementation est entrée en vigueur le 1er juin 2013.

180.La loi relative à la transposition du principe de la distance obligatoire dans le droit de la rétention de sûreté (Gesetz zur bundesrechtlichen Umsetzung des Abstandsgebotes im Recht der Sicherungsverwahrung) a été adoptée au niveau fédéral ; elle a permis de mettre les réglementations en vigueur en Allemagne en conformité avec les dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme.

181.Par cette loi, le législateur fédéral a mis en œuvre les directives élaborées par la Cour constitutionnelle fédérale en ce qui concerne le principe de la « distance obligatoire » (art. 66c du Code pénal). Par leurs lois respectives sur les prisons, les Länder ont mis en œuvre concrètement ces directives et ont adapté en conséquence les conditions d’hébergement des personnes faisant l’objet d’une rétention de sûreté.

182.L’objectif de la réforme est d’établir une distinction plus claire qu’auparavant entre l’exécution d’une peine d’emprisonnement et l’exécution d’une mesure de rétention de sûreté, reflétant ainsi le caractère exclusivement préventif de la rétention de sûreté et sa visée thérapeutique.

183.Les nouvelles règles contiennent des dispositions sur les traitements qui doivent être proposés aux détenus placés en rétention de sûreté, ainsi que sur l’aménagement de leur cellule et la préparation à leur libération. Comme le demande la Cour constitutionnelle fédérale, l’approche globale est clairement orientée vers la remise en liberté et la thérapie.

184.S’agissant des cas dans lesquels la rétention de sûreté a été ordonnée a posteriori (c’est-à-dire seulement après que la peine de prison a été purgée) ou a été prolongée rétroactivement (c’est-à-dire au-delà des dix ans initialement autorisés), les dispositions suivantes s’appliquent :

•Conformément aux exigences posées par la Cour constitutionnelle fédérale, une règle a été créée pour ces cas (art. 316f de la loi introductive au Code pénal [Einführungsgesetz zum Strafgesetzbuch]) qui garantit que l’ordonnance ou la prolongation rétroactive de la rétention de sûreté n’est possible que si les conditions définies au paragraphe 1 de l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme sont remplies ; cela suppose que la personne placée en rétention de sûreté souffre d’un « véritable trouble mental » (qui doit faire l’objet d’un traitement de « réforme » dans le cadre de la rétention de sûreté) et que son comportement donne des raisons concrètes de penser qu’elle est fortement susceptible de commettre un crime violent grave ou une infraction à caractère sexuel ;

•Pour l’essentiel, cette nouvelle règle n’est valable que pour les prolongations rétroactives de la rétention de sûreté, car en 2010, le législateur a abrogé l’ordonnance de placement en rétention de sûreté postérieure à une peine de prison pour les infractions commises après le 1er janvier 2011 ;

•Toutes les affaires dans le cadre desquelles une mesure de rétention de sûreté a été ordonnée ou prolongée rétroactivement ont été examinées par les tribunaux conformément aux principes énoncés dans l’arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale du 4 mai 2011 (auquel le législateur a ensuite donné une traduction législative avec effet au 1er juin 2013) ;

•En fait, la rétention de sûreté ordonnée ou prolongée rétroactivement, à la fin de l’exécution d’une peine de prison, devient de plus en plus obsolète en raison de la diminution constante du nombre de personnes placées en rétention de sûreté sur cette base. En novembre 2017, pas plus de 40 personnes environ faisaient l’objet d’un placement en rétention de sûreté sur la base d’une ordonnance ou d’une prolongation rétroactive. Selon la loi actuellement en vigueur, il n’est plus possible d ’ ordonner ou de prolonger rétroactivement la rétention de sûreté après l’exécution d’une peine de prison.

185.La nouvelle loi est également conforme aux règles imposées par la Cour constitutionnelle fédérale en ce qu’elle a ramené à un an le délai maximum pour le contrôle judiciaire du placement en rétention de sûreté en cours (après quoi le tribunal doit réexaminer s’il doit être maintenu). Lorsqu’une personne fait l’objet d’une mesure de rétention de sûreté depuis plus de dix ans, ce délai est ramené à neuf mois (par. 2 de l’article 67e du Code pénal).

186.Depuis 2016, les Chambres de la CEDH ont constaté que, dès 2016, les nouvelles dispositions juridiques entrées en vigueur le 1er juin 2013 et les mesures d’application pratiques prises par les Länder ont mis la situation en conformité avec la Convention européenne des droits de l’homme (Bergmann c. République fédérale d’Allemagne (no 23279/14) du 7 janvier 2016 ; également Ilnseher c. République fédérale d’Allemagne (10211/12 et 27505/14) du 2 février 2017).

187.Par décision du 4 décembre 2018, la Grande Chambre de la CEDH a confirmé cette évaluation et estimé que la situation juridique en Allemagne était conforme à la Convention.

188.Pour un aperçu statistique de l’évolution de la rétention de sûreté en Allemagne depuis 2010, se reporter à l’annexe à la question 21.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 22

189.Le Gouvernement fédéral ne peut pas confirmer ces chiffres. Le fichier des personnes disparues de l’Office fédéral de la police criminelle (Vermisstendatei) ne recense que les signalements de disparition, ce qui signifie que les chiffres fournis ne correspondent pas nécessairement au nombre réel de personnes disparues. Se reporter à ce sujet au rapport du Gouvernement fédéral sur la situation des mineurs étrangers non accompagnés en Allemagne, daté du 20 septembre 2018, imprimé du Bundestag (BT-Drucksache) 19/4517, p. 31 et suivantes.

190.La deuxième loi visant à améliorer l’enregistrement et le partage des données aux fins du droit de séjour et d’asile (2. Datenaustauschverbesserungsgesetz) a introduit de nouvelles dispositions permettant de verser des informations sur l’existence d’un signalement concernant une personne ayant besoin d’une protection au Registre central des étrangers (Ausländerzentralregister). L’autorité des étrangers et les autres autorités ayant accès à ces informations sont donc automatiquement informées des signalements (entrée en vigueur : 1er mai 2020). Cela permet notamment de protéger les mineurs et les adultes étrangers portés disparus, puisque l’autorité compétente (service de police, bureau d’aide à la jeunesse, etc.) peut être informée lorsqu’ils sont retrouvés.

191.Si les parents d’un nouveau-né ne peuvent pas fournir de document d’identité valide, les autorités d’enregistrement délivrent une « copie certifiée conforme » ayant la même valeur juridique qu’un certificat de naissance (art. 35 du décret d’application de la loi sur l’état civil [Personenstandsverordnung]).

Traitement des étrangers, notamment des réfugiés et des demandeurs d’asile (art. 7, 9, 10, 13 et 17)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 23

192.Suite à l’augmentation considérable et imprévisible du nombre de demandeurs d’asile observée entre 2015 et 2017 et au vu des faiblesses que les tensions que ce phénomène a exercé sur le système ont fait ressortir, des efforts ont été engagés à l’automne 2017 pour restructurer l’Office fédéral des migrations et des réfugiés (Bundesamt für Migration und Flüchtlinge, BAMF). Ces changements visent à garantir et à améliorer la qualité du travail de l’Office et se reflètent également dans le « Plan directeur en matière de migration » du Ministère fédéral de l’intérieur, de la construction et du territoire du 4 juillet 2018 qui énonce les objectifs suivants :

•Optimisation des procédures et assurance de la qualité relatives aux décisions en matière d’asile

•À l’automne 2017, des mesures d’assurance qualité « centralisées » et « décentralisées » ont été introduites sous la forme d’un programme d’assurance qualité en matière d’asile ;

•Ce programme prévoit, par exemple, que toutes les succursales de l’Office (c’est-à-dire le contrôle de qualité décentralisé) sélectionnent et examinent au hasard 10 % de chacune des étapes de la procédure d’asile (acceptation de la demande, audition et finalisation). En outre, toutes les décisions en matière d’asile doivent être réexaminées avant d’être signifiées (voir ci-dessous Mise en place du principe d ’ examen multiple).

•Mise en place du principe d’examen multiple

•En vertu du principe d’examen multiple, les décisions en matière d’asile de toutes les succursales de l’Office sont désormais examinées non seulement en termes de plausibilité (comme c’était le cas auparavant), mais aussi de manière exhaustive sous l’angle de leur intégrité formelle et concrète.

•Contrôles nationaux des décisions en matière d’asile

•Dans le cadre de l’assurance qualité « centralisée », des contrôles ponctuels sont effectués chaque mois au siège de l’Office : 1 055 décisions rendues et 106 rapports finals sont sélectionnés au hasard et examinés afin d’identifier, à un stade précoce, les carences récurrentes ou structurelles. Les éventuelles carences sont ensuite relayées au sein de l’organisation. Si des décisions erronées sont constatées, la division responsable en est informée et la révocation ou le retrait de la décision est ordonné.

•Contrôles du taux de reconnaissance à l’échelle nationale

•Deux fois par an, les taux de reconnaissance des demandes d’asile, selon les différents pays d’origine des demandeurs, sont comparés entre les différentes succursales de l’Office et si des écarts importants par rapport à la moyenne nationale sont constatés, des examens plus approfondis sont effectués. On entend par « écart significatif », tout écart supérieur ou inférieur de plus de 10 % à la moyenne nationale. Il s’agit de veiller à ce que, malgré le traitement décentralisé des demandes d’asile, les méthodes relatives aux décisions rendues soient aussi uniformes que possible.

•Introduction d’une procédure de rotation du personnel

•Afin d’éviter toute collusion entre les chargés de dossiers et les examinateurs, une procédure de rotation du personnel a été élaborée et mise en œuvre à l’échelle nationale depuis octobre 2019.

•Formation complète et lignes directrices uniformes pour toutes les étapes de la procédure d’asile

•Une campagne de qualification, largement achevée à l’été 2018, et la réintroduction d’un programme de formation de douze semaines pour les chargés de dossier venant d’être recrutés ont fourni un cadre à une formation complète. La quasi-totalité du personnel chargé des dossiers possède désormais un niveau de connaissances uniforme et les lacunes existantes en matière de connaissances ont été comblées. Grâce aux lignes directrices applicables aux différentes étapes de la procédure d’asile, sous la forme de listes de contrôle uniformes, le personnel peut accomplir ses fonctions de manière uniforme et avec un niveau de qualité élevé ;

•En outre, le Ministère de l’intérieur considère le programme d’assurance qualité de l’Office comme un processus permanent qui nécessite régulièrement de nouvelles approches et qui devra être ajusté au fur et à mesure de l’acquisition de nouvelles connaissances. Dans ce contexte, l’assurance qualité « centralisée » et « décentralisée » de l’Office n’a cessé d’évoluer depuis 2017.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 24

193.Toute allégation de mauvais traitement fait l’objet d’une enquête conformément au « principe de légalité » (principe de l’obligation de poursuivre). Lorsque ces allégations se sont révélées fondées, les responsables ont été poursuivis. Dans une affaire particulière concernant les événements de 2014 dans un centre de réfugiés à Burbach, le ministère public a porté des accusations contre 38 personnes devant le tribunal régional de Siegen. Début 2020, 11 personnes, dont le directeur du centre, qui avait été recruté par un organisme privé, ont été condamnées. Plusieurs procès sont en cours dans cette affaire.

194.Dans le cadre de la situation juridique actuelle, les étrangers dont le refoulement a été suspendu (c’est-à-dire les migrants dits « tolérés ») sont tenus par la loi d’élire leur résidence habituelle dans une localité spécifique (restriction de résidence) si leurs moyens de subsistance ne sont pas garantis (par. 1d) de l’article 61 de la loi sur le séjour des étrangers). Le législateur vise ainsi à répartir équitablement les dépenses de prestations sociales entre les Länder. Ce système garantit que les prestations sociales ne sont versées que dans la localité où le bénéficiaire est tenu de résider. Il convient de noter que la troisième phrase du paragraphe 1d) de l’article 61 de la loi sur le séjour des étrangers permet de modifier la restriction de séjour de droit ou à la demande de l’intéressé, si cela est nécessaire, par exemple, pour préserver l’unité familiale ou pour d’autres raisons humanitaires. Cette disposition permet d’apporter une réponse adéquate, dans des cas individuels, aux points soulevés dans la question.

195.L’Office examine et évalue individuellement chaque demande d’asile. Chaque décision est prise à la lumière des particularités de chaque cas. Le Gouvernement fédéral n’est pas d’accord avec le fait que les permis de séjour temporaire ne sont accordés aux étrangers victimes de la traite des êtres humains que s’ils coopèrent avec la police.

196.En tant qu’État signataire de la Convention de Genève sur les réfugiés, la République fédérale d’Allemagne tient compte des règlements et principes de la Convention − y compris le principe de non-refoulement énoncé à l’article 33 − dans toutes ses initiatives législatives.

Droit au respect de la vie privée (art. 17)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 25

197.La surveillance stratégique des télécommunications des citoyens non allemands vers l’étranger, depuis le territoire national (appelée interception des signaux étrangers), est un instrument clef de la bonne exécution du mandat législatif du Service fédéral de renseignement (BND). Elle permet à ce service de rassembler rapidement des données authentiques et actualisées, et d’obtenir ainsi des informations particulièrement importantes à partir des flux de données internationaux. Sur le fond, il s’agit de renseignements d’importance stratégique, c’est-à-dire sur des questions internationales et générales relevant de la politique étrangère allemande, comme le terrorisme international, la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs, le crime organisé international et l’évolution de la situation politique dans certains pays.

198.Le cadre juridique de l’interception des signaux étrangers est régi avec précision par des dispositions spéciales (art. 6 et suiv. de la loi sur le Service fédéral de renseignement, Gesetz über den Bundesnachrichtendienst).

199.L’application des dispositions juridiques relatives à l’interception de signaux étrangers a donné lieu à diverses mesures organisationnelles au sein du BND. Par exemple, l’assurance qualité, en tant que service central de la Division du renseignement technique (Technische Aufklärung), veille à ce que toute utilisation de termes de recherche soit strictement motivée par une mission et un incident spécifique. La création du service d’assurance qualité a permis de définir et d’appliquer des normes uniformes de qualité et de plausibilité des données. Avant d’utiliser des termes de recherche, il convient de s’assurer que leur utilisation est légalement autorisée, plausible et raisonnable.

200.L’interception des signaux étrangers est contrôlée par un Conseil indépendant (Unabhängiges Gremium) qui vient d’être créé. Celui-ci se compose de deux juges et d’un procureur de la Cour fédérale de justice, ainsi que de trois membres suppléants. Ses fonctions consistent notamment à examiner la validité et la nécessité des ordres émis en vertu du paragraphe 1 de l’article 6 de la loi sur le Service fédéral de renseignement. En outre, les citoyens de l’Union européenne ainsi que les institutions et les entités publiques des États membres de l’UE bénéficient d’une protection spéciale contre les mesures de collecte de renseignements. Le Conseil indépendant contrôle également le respect des dispositions en vigueur à cet égard. En outre, il examine si les dispositions juridiques sont respectées dans les cas où des informations spécifiques obtenues par le biais de l’interception des signaux étrangers sont transmises à des services de renseignement étrangers.

201.En tant qu’autorité fédérale supérieure, le Service fédéral de renseignement relève de la Chancellerie fédérale, qui est responsable de son encadrement administratif et fonctionnel et doit en particulier contrôler la légalité des moyens employés, de même que leur utilité.

202.Depuis le 1er juillet 2017, les fournisseurs de services de télécommunications sont tenus de conserver les données relatives au trafic de leurs abonnés, qui sont générées chaque fois que ceux-ci utilisent les services téléphoniques et l’Internet, pendant une période limitée à dix semaines, et de conserver les données de localisation pendant quatre semaines (ce qu’on appelle la conservation des données). Des catégories spécifiques de données sont exemptées de l’obligation de conservation, comme par exemple les sites Web visités et les courriels. Les services téléphoniques anonymes, tels que les lignes d’assistance téléphonique, sont également exemptés de cette obligation. Outre la courte durée de conservation et les catégories limitées de données devant être conservées, les textes réglementaires limitent strictement l’accès à ces données. Pendant la période de conservation, les données sont conservées par les sociétés de télécommunications. Leur extraction à des fins de poursuites pénales, par exemple, n’est autorisée que s’il existe un soupçon d’infraction pénale spécifique et répertoriée (par. 2 de l’article 100g du Code de procédure pénale). Cette mesure ne peut être ordonnée que par un tribunal et elle est généralement exécutée ouvertement, c’est-à-dire au su de la personne concernée.

203.La constitutionnalité de ces dispositions et leur conformité avec le droit communautaire ont fait et font toujours l’objet de diverses affaires judiciaires.

204.Trois litiges constitutionnels relatifs aux règlements sur la conservation des données sont en instance devant la Cour constitutionnelle fédérale. À l’heure actuelle, il est impossible de prévoir avec certitude à quel moment une décision sera rendue sur ces affaires.

205.Dans son arrêt du 21 décembre 2016, rendu dans le cadre d’une demande de décision préjudicielle concernant les réglementations suédoise et britannique, la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a estimé qu’une réglementation nationale prévoyant une conservation généralisée et indifférenciée de l’ensemble des données relatives au trafic et des données de localisation de tous les abonnés et utilisateurs inscrits concernant tous les moyens de communication − sans distinction, limitation ou exception en fonction de l’objectif poursuivi − n’est pas admissible parce qu’elle dépasse les limites du strict nécessaire et qu’elle est donc disproportionnée.

206.Le 22 juin 2017, le Haut Tribunal administratif de Rhénanie-du-Nord-Westphalie à Münster, se référant à l’arrêt susmentionné de la CJCE, a jugé au niveau national, dans le cadre d’une procédure de référé, qu’un fournisseur de services de télécommunications qui avait introduit un recours concernant la réglementation allemande en la matière n’était pas tenu de conserver des données jusqu’à la conclusion de la procédure au fond visant à déterminer si cette réglementation était conforme au droit communautaire. Par la suite, l’Agence fédérale des réseaux d’électricité, de gaz, de télécommunications, de poste et de chemin de fer (Bundesnetzagentur), en tant qu’autorité de surveillance compétente, a annoncé qu’elle renonçait à faire appliquer l’obligation de conservation à l’égard de toutes les entreprises qui y sont soumises.

207.La procédure principale est actuellement pendante devant le Tribunal administratif fédéral (BVerwG). Le 25 septembre 2019, ce tribunal a décidé de suspendre la procédure et de soumettre à la CJCE, pour clarification, la question de la compatibilité de la réglementation allemande sur la conservation des données avec le droit européen. Le tribunal a fondé cette décision sur le fait que, contrairement aux réglementations suédoise et britannique en cause dans l’arrêt de la CJCE du 21 décembre 2016 (C-203/15), l’obligation de conservation prévue par la réglementation allemande ne couvrait qu’un éventail restreint de moyens de communication et prévoyait des durées de conservation limitées, et que, par conséquent, la compatibilité de cette réglementation avec le droit de l’Union européenne devait faire à nouveau l’objet d’une décision. La décision de la CJCE est toujours en attente.

208.Les dispositions juridiques applicables à la conservation des données sont toujours en vigueur. Toutefois, l’Agence fédérale des réseaux s’abstient de rendre des ordonnances ou de prendre d’autres mesures pour faire respecter l’obligation de conservation des données à l’égard de toutes les entreprises qui y sont soumises jusqu’à la conclusion de la procédure au principal devant le Tribunal administratif fédéral.

Liberté de religion (art. 2, 18, 26)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 26

209.La Cour constitutionnelle fédérale a indiqué dans son arrêt du 27 janvier 2015 (BVerfGE 138, 296) que les lois des Länder interdisant le port de vêtements à caractère religieux par les enseignants doivent tenir raisonnablement compte de la liberté de foi des enseignants et des élèves concernés, ainsi que du droit des parents à éduquer leurs enfants et du devoir de neutralité idéologique et religieuse de l’État. Compte tenu de l’exigence de tolérance en tant qu’expression de la dignité humaine (art. 1 de la Loi fondamentale), un équilibre doit être trouvé entre la liberté de religion et le devoir de l’État de fournir une éducation dans un cadre religieusement neutre qui tienne compte d’éventuels conflits.

210.Une telle interdiction peut toutefois être légale si des conflits importants entraînent des troubles concrets de la paix à l’école ou une violation de la neutralité de l’État.

211.Les lois des Länder interdisant le port de vêtements à caractère religieux par un agent public doivent répondre aux critères établis par la Cour constitutionnelle fédérale qui sont eux-mêmes pleinement conformes au paragraphe 3 de l’article 18 du Pacte, conformément à ce qui est indiqué ci-dessus.

Liberté d ’ expression (art. 19)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 27

212.Le mémoire explicatif de la loi d’application sur les réseaux sociaux (NetzDG − imprimé du Bundestag 18/12356, p. 18) précise que le Gouvernement fédéral procéderait à une évaluation au plus tard trois ans après l’entrée en vigueur de la loi. Les préparatifs de cette évaluation sont en cours.

213.Les réseaux sociaux qui comptent au moins 2 millions d’utilisateurs enregistrés en Allemagne sont tenus de publier des rapports semestriels de transparence sur les plaintes des utilisateurs et la suppression des contenus. Selon les rapports de transparence pour les premier et deuxième semestres de 2018, ainsi que pour le premier semestre de 2019, le taux de contenus supprimés par les réseaux sociaux susmentionnés s’établit en moyenne à environ un quart des contenus signalés dans le cadre de la loi d’application sur les réseaux sociaux (avec quelques variations entre les fournisseurs). Rien n’indique que les réseaux recourent à une politique de suppression excessive de contenus (« surblocage »).

214.Seuls les contenus illicites qui violent des dispositions spécifiques du Code pénal allemand doivent être supprimés. Cela inclut l’incitation publique à la commission d’une infraction, la formation d’organisations criminelles ou terroristes, l’incitation à la haine, la diffusion de représentations de la violence, la diffamation des associations religieuses et idéologiques, la distribution de matériel pédopornographique, les insultes, la diffamation intentionnelle et la menace de commettre une infraction grave.

215.Dans une démocratie florissante, la liberté d’expression permet également de protéger les déclarations de mauvais goût et révoltantes. La liberté d’expression s’arrête toutefois là où commence le droit pénal. Les discours de haine pénalement répréhensibles devraient avoir aussi peu de place sur les réseaux sociaux que dans la rue. L’intimidation par des discours de haine criminels qui incitent à s’éloigner du discours public, constitue un danger pour la démocratie.

216.Les contenus que la loi d’application sur les réseaux sociaux considèrent illicites le sont au regard des dispositions du Code pénal. Les infractions pénales en question ont fait l’objet d’une abondante jurisprudence, les nombreuses décisions des tribunaux étant largement commentées dans la littérature juridique. Pour cette raison, il n’est pas nécessaire d’établir de nouvelles lignes directrices concernant l’interprétation de ces infractions pénales. En outre, la loi d’application permet aux réseaux sociaux de renvoyer les contenus pour examen à une institution d ’ autorégulation reconnue, dont les analystes doivent être indépendants et posséder toutes les compétences spécialisées requises.

217.Il est important de souligner que la loi d’application sur les réseaux sociaux ne fait pas courir aux réseaux sociaux concernés le risque de devoir payer une amende monétaire dans l’éventualité où, dans le cadre de leur système de gestion des plaintes, ils prennent une mauvaise décision au sujet d’un contenu individuel. Les amendes monétaires sont imposées uniquement en cas de violation des obligations attribuable à des défauts systémiques dans le traitement de contenus illicites. En outre, l’illégalité du contenu concerné doit également avoir été confirmée par une décision judiciaire (« procédure préjudicielle »). En dehors de cela, les utilisateurs ont toujours la possibilité de demander un contrôle juridictionnel des suppressions ou blocages de contenus.

218.Jusqu’à présent, une amende de 2 millions d’euros a été imposée à Facebook, mais elle n’est pas encore devenue définitive et contraignante. L’accusation sous-jacente concernait le respect par Facebook des obligations de déclaration au titre de la loi d’application sur les réseaux sociaux au cours du premier semestre de 2018.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 28

219.Il n’est pas prévu, à l’heure actuelle, de dépénaliser la diffamation. Toutefois, étant donné le nombre croissant de cas de diffamation commise sur l’Internet et sur les réseaux sociaux, la question de savoir si la diffamation commise en public ou par le biais de publications écrites devrait être plus sévèrement sanctionnée fait actuellement l’objet de débats.

220.L’article 202d du Code pénal, entré en vigueur le 18 décembre 2015, incrimine le fait de se procurer des données pour soi-même ou pour un tiers, de fournir des données à un tiers et de diffuser ou de donner accès de toute autre manière à des données usurpées obtenues par un tiers de manière illégale. En ce qui concerne les éléments subjectifs de l’infraction, la disposition stipule − en plus de l’intention − que l’acte soit commis à des fins d’enrichissement personnel ou pour l’enrichissement d’un tiers ou dans le but de nuire à autrui.

221.Cette infraction est punie d’une peine d’emprisonnement de trois ans maximum ou d’une amende. La peine ne peut pas être plus sévère que la peine applicable à l’infraction principale.

222.Les « détournements de données » ne sont généralement pas visés par l’article 202d du Code pénal. Selon le libellé de l’article, l’infraction dite de « traitement de données usurpées » ne peut être retenue que si l’auteur de l’infraction principale a obtenu illégalement lesdites données. Si, en revanche, les données étaient déjà à la disposition de l’auteur de l’infraction principale, l’infraction de traitement de données usurpées ne peut être retenue. Ainsi, la responsabilité pénale au titre de l’article 202d du Code pénal n’est pas engagée si les données ont été confiées à une personnes et si celle-ci les transmet ensuite (« organise leur fuite ») à un tiers. Si ladite personne était tenue de garder ces données confidentielles (par exemple en sa qualité de fonctionnaire), elle pourrait, en transmettant ces données, engager sa responsabilité pénale pour violation d’autres dispositions (notamment les obligations de confidentialité). Toutefois, cette infraction ne relève pas du détournement de données. Autrement dit, la personne qui accepte les données « usurpées » de sa part n’engage pas non plus sa responsabilité pénale pour traitement de données usurpées.

223.En outre, selon le libellé explicite de l’article, l’infraction ne s’applique pas aux activités qui relèvent exclusivement de l’exercice de fonctions officielles ou professionnelles légales, telles que, mais non exclusivement, les activités des fonctionnaires ou de leurs agents visant à fournir des données dans le seul but de les utiliser dans le cadre de procédures fiscales, pénales ou en cas d’infractions à la réglementation. Sont également exclues les activités professionnelles des personnes qui participent ou ont participé, dans le cadre de leurs fonctions, à l’élaboration, la production ou la diffusion de documents imprimés, d’émissions de radio ou de documentaires, ou aux activités de services d’information et de communication ayant pour mission d’informer ou de former l’opinion publique, et qui nécessitent la réception, l’analyse ou la publication de données.

224.Les activités des médias relèvent de cette dernière exemption et ne sont donc pas explicitement visées par cet article.

225.De même, cette infraction ne peut non plus être retenue pour des données qui sont généralement accessibles, par exemple au moyen d’une recherche sur l’Internet.

226.En conséquence, l’infraction n’a pas pour but d’imposer des restrictions disproportionnées au droit d’accès à des informations présentant un intérêt public légitime.

227.Conformément à la répartition des responsabilités propre au système fédéral, les Länder sont chargés de poursuivre les auteurs des infractions visées à l’article 202d du Code pénal. En janvier 2018, le Ministère fédéral de la justice a mené une enquête auprès des administrations judiciaires des Länder pour établir le nombre d’enquêtes ouvertes contre des journalistes en application de l’article 202d du Code pénal depuis son entrée en vigueur. Les renseignements fournis par ces administrations ont montré que moins de 10 enquêtes avaient été ouvertes contre des journalistes depuis l’entrée en vigueur de cet article. Parmi celles-ci, aucune n’a permis d’établir de motifs suffisants pour prononcer une mise en examen. Aucune saisie n’a non plus été effectuée en lien avec l’infraction visée à l’article 202d du Code pénal.

Liberté d’association (art. 22)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 29

228.De l’avis du Gouvernement fédéral, l’interdiction de faire grève qui s’applique aux agents de l’État est conforme à l’article 22 du Pacte, ainsi qu’à l’article 11 − largement parallèle − de la Convention européenne des droits de l’homme.

229.Le droit de grève n’est qu’un des éléments clefs de la liberté d’association. Lorsque, comme c’est le cas en Allemagne, d’autres moyens comparables de participation et de représentation dans la réglementation des conditions de travail sont prévus, l’interdiction du droit de grève peut être considérée comme proportionnée. Dans son arrêt du 12 juin 2018 (https://www.bundesverfassungsgericht.de/SharedDocs/Entscheidungen/EN/2018/06/rs20180612_2bvr173812en.html, en anglais, par. 163 et suiv.), la Cour constitutionnelle fédérale a analysé en profondeur la jurisprudence de la CEDH sur cette question et a estimé que l’interdiction de faire grève visant les fonctionnaires est compatible avec la Convention européenne et, par conséquent, avec le Pacte. Le Gouvernement fédéral est d’accord avec les conclusions de la Cour constitutionnelle fédérale. Toutefois, des requêtes individuelles concernant cette question sont en instance devant la CEDH et une décision est attendue prochainement.

Droit de participer à la vie publique (art. 25 et 26)

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 30

230.En Allemagne, le principe constitutionnel du suffrage universel prévoit que tous les citoyens allemands, y compris les personnes handicapées, ont le droit de voter et de se porter candidats aux élections législatives fédérales et régionales et aux élections municipales (première phrase du paragraphe 1 de l’article 38 et deuxième phrase du paragraphe 1 de l’article 28 de la Loi fondamentale). Le principe du suffrage universel s’applique également aux élections européennes (deuxième phrase du paragraphe 1 de l’article premier de la loi sur les élections européennes (Europawahlgesetz)).

231.En Allemagne, les personnes handicapées et les personnes dont la responsabilité pénale est limitée ne sont pas privées du droit de vote. Auparavant, les personnes placées sous tutelle permanente (et non plus seulement temporaire) pour la gestion de toutes leurs affaires (personnes sous tutelle complète), ainsi que les délinquants de droit commun internés dans un hôpital psychiatrique pour irresponsabilité pénale (complète), ne pouvaient pas voter aux élections législatives fédérales et européennes. Dans son arrêt du 29 janvier 2019 (dossier no 2 BvC 62/14), la Cour constitutionnelle fédérale a déclaré que le fait de priver du droit de vote les personnes internées dans un hôpital psychiatrique pour irresponsabilité pénale était incompatible avec la Loi fondamentale et donc nul et non avenu. Elle a également estimé que priver du droit de vote les personnes placées sous tutelle complète permanente était incompatible avec la Loi fondamentale et a déclaré que la disposition pertinente, dans la mesure où elle était jugée inconstitutionnelle, ne pouvait plus être appliquée par les tribunaux et les autorités administratives.

232.La loi portant modification de la loi électorale fédérale et d’autres lois (Gesetz zur Änderung des Bundeswahlgesetzes und anderer Gesetze, Journal officiel fédéral I, p. 834), entrée en vigueur le 1er juillet 2019, a supprimé les exclusions du droit de vote qui visaient auparavant les personnes placées sous tutelle complète permanente et les délinquants internés dans un hôpital psychiatrique pour irresponsabilité pénale. Elle a dans le même temps encadré les modalités de l’assistance qu’il est possible d’apporter à ces personnes pour leur permettre d’exercer leur droit de vote et a modifié l’article 107a du Code pénal afin d’ériger en infraction pénale le fait d’exprimer un vote contraire au choix de l’électeur assisté ou sans l’avoir consulté au préalable.

233.Avant l’entrée en vigueur de cette nouvelle loi, un arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale (dossier no 2 BvQ 22/19), qui était déjà en vigueur au moment des élections européennes du 26 mai 2019, stipulait que les exclusions du droit de vote susmentionnées ne devaient plus être appliquées en cas de demande d’inscription sur les listes électorales (par. 17 et 17a du Règlement relatif aux élections européennes) ou d’objections et de plaintes concernant l’exactitude et l’exhaustivité des listes électorales.

234.Les dispositions des Länder relatives aux élections législatives régionales (Landtag) et municipales contiennent des exclusions similaires du droit de vote. En raison notamment de l’arrêt précité, les Länder ont entre-temps soit supprimé ces exclusions, soit prévu de le faire avant la tenue de leurs prochaines élections.

235.La loi électorale fédérale contient de nombreuses dispositions visant à faciliter la participation des personnes handicapées aux élections, notamment l’accès sans obstacle aux bureaux de vote, l’assistance et l’information, des dispositions spéciales pour les électeurs malvoyants et d’autres groupes.

236.Des mesures similaires, également prévues par des lois ou des instruments législatifs, sont en place pour les élections régionales (Landtag) et municipales.