Nations Unies

CAT/OP/HND/3

Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

25 janvier 2013

Français

Original: espagnol

Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Rapport du Sous-Comité pour la préventionde la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sur sa visite de conseil au mécanisme national de prévention du Honduras

Rapport à l’intention du mécanisme national de prévention * , **

Table des matières

Paragraphes Page

I.Introduction1−53

II.Recommandations à l’intention du mécanisme national de prévention6−323

I.Introduction

1.Dans le cadre du mandat à lui confié par le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (le Protocole facultatif), le Sous-Comité pour la prévention de la torture (SPT) s’est rendu en République du Honduras du 30 avril au 4 mai 2012.

2.L’objectif principal de la visite était de fournir des conseils et une assistance technique au mécanisme national de prévention de la torture du Honduras, conformément aux dispositions de l’article 11 b) du Protocole facultatif. La visite visait aussi à renforcer la capacité et le mandat du mécanisme national de prévention. Enfin, le SPT souhaitait évaluer la mesure dans laquelle il avait été donné suite aux recommandations qu’il avait formulées à l’issue de la première mission au Honduras, effectuée en 2009.

3.Dans le présent rapport figure un ensemble de recommandations à l’intention du Comité national pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CONAPREV), qui est le mécanisme national de prévention du Honduras. Ces recommandations sont faites dans le cadre du mandat fixé par les dispositions du paragraphe b) des alinéas ii) et iii) de l’article 11 du Protocole facultatif, qui prévoient que le SPT doit offrir aux mécanismes nationaux de prévention une formation et une assistance technique en vue de renforcer leurs capacités ainsi que des avis et une assistance pour évaluer les besoins et les moyens nécessaires afin de renforcer la protection des personnes privées de liberté contre la torture et autres mauvais traitements.

4.Le présent rapport est transmis au mécanisme national de prévention à titre confidentiel, et la décision de le rendre public est laissée à sa discrétion. Toutefois, le SPT en recommande la publication et souhaite être informé de la décision que le m écanisme prendra .

5.Le SPT adressera aux autorités de l’État partie des recommandations dans un rapport confidentiel distinct.

II.Recommandations à l’intention du mécanisme nationalde prévention

6.Les membres du SPT ont visité conjointement avec le CONAPREV six centres de détention choisis d’un commun accord; la seule exigence du SPT avait été de visiter certains des lieux de détention qu’il avait déjà visités en 2009. Lors de ces visites, qui ont également été planifiées conjointement, le SPT est demeuré en retrait, et les membres du mécanisme national dirigeaient la délégation.

7.Les visites ont permis aux membres du SPT d’observer les méthodes de travail du CONAPREV. Ils en ont retiré une bonne impression générale et estiment que le CONAPREV a d’importantes potentialités en tant que mécanisme national de prévention, qu’il serait possible de développer en le dotant des ressources humaines et financières nécessaires à l’accomplissement de ses fonctions, afin de lui permettre de renforcer ses capacités techniques et d’améliorer la méthodologie suivie pour les visites ainsi que la qualité des rapports établis à la suite de celles-ci. Le SPT est d’avis qu’à cette fin, les membres et le personnel du CONAPREV devraient être tenus d’examiner leurs méthodes de travail et de suivre des formations de façon régulière afin de renforcer leur capacité à s’acquitter de leurs responsabilités en vertu du Protocole facultatif.

8.Outre les visites des lieux de détention menées conjointement avec le CONAPREV, les membres du SPT ont tenu des réunions avec plusieurs hauts responsables ainsi qu’avec des représentants d’organisations de la société civile, au cours desquelles ils se sont entretenus des aspects institutionnels du mécanisme national de prévention et de ses relations avec d’autres organismes. Le CONAPREV n’a assisté qu’à quelques-unes de ces réunions.

Recommandations concernant les questions institutionnelles

9.Le SPT a constaté que les principaux obstacles institutionnels entravant l’action du mécanisme national de prévention étaient l’insuffisance de son budget, une structure du personnel inadéquate et son absence de visibilité. Il reconnaît que le CONAPREV a pris des mesures en vue de remédier à certains de ces problèmes, comme la création d’un site Web et la publication d’un manuel de règles pour la prévention de la torture. Le SPT est également conscient que l’institution est jeune et que ces difficultés ne lui sont pas entièrement imputables. Il a donc fait à l’État partie des recommandations à ce propos. Cependant, en vue d’améliorer son efficacité, le CONAPREV pourrait prendre les mesures énumérées ci-après.

10.En ce qui concerne le budget, pendant sa visite au Honduras le SPT a fait des démarches auprès du Président et du Ministre des finances afin d’obtenir que le versement de l’allocation budgétaire prévue pour 2012 soit versée au CONAPREV. En outre, les membres du SPT se sont adressés à des députés au Congrès national et leur ont fait valoir l’utilité de réviser l’actuelle loi portant organisation du CONAPREV afin de régler les difficultés rencontrées. De son côté, le CONAPREV devrait prendre des mesures pour appuyer les démarches du SPT. Le SPT recommande au mécanisme national de prévention d ’ exécuter de façon opportune et responsable le budget annuel , au cours de l ’ année pour laquelle il a été accordé et conformément à un plan opérationnel préalablement adopté. Dans ce plan opérationnel devraient figurer, au minimum, un tableau d’ effectifs adéquat ( qui assure une répartition hommes-femmes équilibrée et une représentation adéquate des groupes ethniques et minoritaires du pays ), les règles de fonctionnement et la description des postes.

11. En outre, le SPT recommande au mécanisme national de prévention de soumettre à l ’ Assemblée législative une proposition de modification de la loi, de façon à garantir que le CONAPREV dispose de son propre budget, et de faire campagne en faveur de cette réforme.

12.En ce qui concerne le manque de personnel et en attendant que le mécanisme ait un secrétariat technique, le SPT recommande d ’ étudier des mesures créatives visant à renforcer les ressources humaines, comme des programmes de stages ou des partenariats avec des universités et la société civile.

13.En ce qui concerne le manque de visibilité, le SPT recommande au mécanisme national de prévention d ’ organiser des activités visant à accroître sa visibilité institutionnelle et d ’ élaborer une stratégie pour faire connaître son mandat et son travail au public et d ’ établir une procédure simple et accessible permettant au public de lui communiquer des renseignements pertinents . Il lui recommande aussi d ’ organiser des conférences et ateliers, de participer de façon volontariste aux réunions gouvernementales relatives à son mandat et de publier des rapports, et de renforcer les contacts et la coopération avec d ’ autres partenaires nationaux et internationaux, comme les ministères compétents, le Commissa riat national aux droits de l ’ homme et les mécanismes nationaux de prévention d ’ autres pays.

14.Afin que le mécanisme national de prévention s’acquitte pleinement du mandat à lui confié par l’alinéa c de l’article 19 du Protocole facultatif et par le paragraphe 9 de l’article 13 du décret no 136/2008, le SPT lui recommande de faire preuve d’initiative et de présenter des propositions et des observations au sujet de la législation en vigueur ou des projets de loi en matière de prévention de la torture et autres mauvais traitements, et d ’ établir à cet effet une stratégie lui permettant de définir des priorités et d ’assurer le suivi des observations qu ’ il aura formulées .

15.Le SPT souligne que le mécanisme national de prévention doit faire en sorte d’éviter les conflits d’intérêts réels ou perçus dans tous les aspects de l’exercice de son mandat. À ce propos, afin de préserver son indépendance, le SPT recommande aux membres du CONAPREV de ne pas occuper ni accepter de fonctions susceptibles d ’ entraîner des conflits d ’ intérêts .

16.Le SPT fait observer que le suivi de la mise en œuvre des recommandations qu’il pourrait formuler relativement au pays incombe au mécanisme national de prévention. Il a noté avec satisfaction que le CONAPREV avait établi une matrice pour le suivi des recommandations figurant dans son rapport de 2009, ce qu’il estime être une bonne pratique.

Recommandations d’ordre méthodologique

17.Afin d’aider et de conseiller le mécanisme national de prévention dans sa mission de protection des personnes privées de liberté, le SPT formule les recommandations suivantes concernant la préparation des visites des lieux de privation de liberté, la méthode à suivre pendant les visites et les mesures à prendre après les visites.

Préparation préalable

18.Le mécanisme national de prévention devra établir un plan ou un programme de travail qui couvre progressivement tous les lieux placés sous la juridiction de l’État où se trouvent ou pourraient se trouver des personnes privées de liberté conformément aux articles 4 et 29 du Protocole facultatif. Le SPT recommande au mécanisme national de prévention d’arrêter des critères pour choisir les lieux qu’il inspectera de manière à garantir que tous soient visités périodiquement, en fonction du type et de la taille de s établissements et de la gravité des problèmes de droits de l ’ homme dont le mécanisme aura eu connaissance, mais sans exc lure du champ de ses travaux un type d’établissement ou une zone géographique.

19.Le mécanisme national de prévention doit planifier ses activités et utiliser ses ressources d’une manière qui lui permette de visiter les lieux de privation de liberté selon des modalités appropriées. L e SPT recommande au mécanisme national de prévention de répartir les tâches entre ses membres avant l ’ arrivée au lieu de détention , a fin d ’ éviter les chevauchements et de couvrir le plus grand nombre d’aspects. En outre, il recommande de choisir des éléments précis qui seront plus particulièrement étudiés pendant la visite. L’équipe qui réalise la visite doit être composée de manière à pouvoir couvrir des questions générales et des questions particulières et devrait comprendre un professionnel de la santé, de préférence un médecin .

20.Le SPT estime que, à moyen terme, il est important que le mécanisme national de prévention ait des directives et des manuels de bonnes pratiques, ce qui devrait permettre le transfert des connaissances quand ses membres changent. Le SPT recommande au CONAPREV d ’ élaborer des directives concernant les visites des différentes catégories de lieux de détention, notamment des directives relatives à la conduite d ’ entretiens en privé, ainsi que des consignes pour agir à l’égard des détenus appartenant à des groupes vulnérables, et de veiller à recueillir des informations de toutes les sources disponibles .

21.Le SPT estime que les visites inopinées ou annoncées peu de temps à l’avance permettent de se faire une idée plus proche de la réalité des conditions de vie qui règnent dans un lieu de détention. Le SPT recommande au mécanisme national de prévention de garde r confidentiel le programme de ses visites, de manière à effectuer celles-ci à l ’ improviste.

Déroulement des visites

22.En règle générale, le SPT a noté que les membres du CONAPREV se présentaient correctement aux autorités dans les lieux de détention mais qu’ils se présentaient aux détenus très sommairement, et que le principe selon lequel l’entretien doit être volontaire et confidentiel n’était pas strictement respecté. Le SPT est d’avis qu’une présentation exacte et complète du mandat et des objectifs du mécanisme facilite la communication avec la personne interrogée et améliore par conséquent l’entretien. Le SPT recommande que chacun des membres de l’équipe se présente aux détenus en précisant son nom, sa profession et la position qu’il occupe au sein du mécanisme . La personne chargée de l ’ entretien devra expliquer au détenu le mandat du mécanisme national de prévention, en insistant sur son objectif préventif; elle doit obtenir son consentement en lui précisant que l ’ entretien est confidentiel et volontaire et qu ’ il peut être interrompu à tout moment à la demande du détenu. Le SPT recommande également au CONAPREV d ’ établir une brochure dans laquelle il décrit son mandat et se s méthodes de travail, explique ce qu ’ est le consentement éclairé et d onne ses coordonnées. Il devra aussi indiquer que toute forme de représailles devrait être portée à son attention.

23.La possibilité de s’entretenir en privé avec les personnes privées de liberté, qui est un aspect fondamental des visites préventives, est expressément prévue par le Protocole facultatif. En principe, et sauf s ’ il existe des raisons impérieuses de le déconseiller, le SPT recommande au mécanisme national de prévention d ’avoir des entretiens en privé avec les détenus et les employés de l ’établissement , y compris le personnel médical.

24. En outre, à titre de règle générale, le SPT recommande au x membres du mécanisme national de prévention de poser pendant l es entretiens des questions relatives à la santé des détenus et à l ’ accès qui leur est donné à un médecin ou un autre professionnel de la santé.

25. Le SPT recommande au mécanisme national de prévention de visiter tous les locaux des établissements et de vérifier systématiquement les registres et les dossiers afin de recouper les informations obtenues d ’ autres sources. Si les registres ne sont pas disponibles, le mécanisme national de prévention devra f aire des recommandations visant à changer les pratiques de façon à permettre la vérification des registres et dossiers des détenus.

26.Le SPT estime que seuls une visite approfondie des locaux, le contrôle des registres et les entretiens avec les détenus et le personnel du lieu de détention permettent de se faire une idée complète de la situation dans un lieu de détention. Étant donné le petit nombre de membres que compte actuellement le CONAPREV, le SPT estime qu’il est extrêmement important que tous mènent des entretiens avec des détenus pendant les visites. Le SPT recommande que tous les membres du mécanisme national de prévention s ’ entretiennent avec les détenus et ne donnent pas la priorité aux rencontres avec les autorités du lieu de détention.

27.Le SPT a noté quelquefois que certains membres du CONAPREV se concentraient sur les plaintes particulières de détenus et tentaient de trouver une solution. L’intention de régler des cas individuels est louable, mais le SPT rappelle que le mandat du mécanisme national de prévention diffère de celui des autres institutions de lutte contre la torture, par exemple le Commissaire national aux droits de l’homme, et se caractérise par son objectif préventif consistant à déterminer les causes et à détecter les risques systémiques de torture. Le SPT recommande au mécanisme national de prévention d’ élabore r des directives claires pour le signalement de s cas de torture ou de mauvais traitements ou autres violations des droits des détenus et pour la demande d ’ ouverture d ’une enquête, avec le consentement de la personne interrogée.

Après les visites

28.Le mécanisme national de prévention doit établir des rapports sur ses visites. À défaut de quoi, l’efficacité des visites s’en trouverait largement réduite. Le SPT recommande au mécanisme national de prévention d’établir à l’issue de chacune de ses visites un rapport, qui soit orienté sur la prévention et le diagnostic des problèmes et propose des solutions sous forme de recommandations . Celles-ci devront être étayées , être concentr ées, dans un esprit de prévention, sur les insuffisances du système et des pratiques, et être réalisables dans la pratique . Le SPT recommande au mécanisme national de prévention de s’attacher à améliorer la qualité de ses rapports de visite, de traiter d’un plus grand nombre de sujets et de façon plus approfondie; il devrait en particulier tenir compte des normes pertinentes de l’ONU en matière de prévention de la torture et autres mauvais traitements, notamment les observations et recommandations du SPT.

29.Le mécanisme national de prévention devrait arrêter une stratégie pour l’utilisation de ses rapports de visite prévoyant leur soumission aux autorités compétentes en vue de leur publication et de leur diffusion, et se servir de ces rapports pour instaurer un dialogue. Le SPT estime que la pratique actuelle du CONAPREV consistant à publier ses rapports de visite est bonne et lui recommande de continuer, pour autant qu’il le juge opportun . Le SPT recommande au mécanisme national de prévention d ’ établir, si possible en collaboration avec les autorités compétentes, des dispositifs de suivi des recommandations qu ’ il aura formulées.

30.Le SPT recommande au mécanisme national de prévention d ’ effectuer des visites de suivi dans les établissements où la situation est considérée comme le plus problématique.

Recommandations relatives aux lieux visités conjointement

31.En ce qui concerne la prison nationale Marco Aurelio Soto, le SPT recommande au mécanisme national de prévention de prévoir dans le programme de ses futures visites un examen de la situation et du traitement des détenus souffrant de troubles mentaux, ainsi que des procédures applicables pour faire soigner les détenus ayant besoin d’un traitement médical spécialisé par un médecin spécialiste hors de la prison.

32.En ce qui concerne les visites des postes de police, le SPT recommande :

De définir des objectifs à court, à moyen et à long terme en vue de mettre en place un système qui garantisse aux personnes gardées à vue l’accès à un médecin et de recueillir grâce à des examens homologués des informations fiables sur les cas de torture et de mauvais traitements;

De donner suite à la recommandation du SPT tendant à la création d’une équipe d’experts médico-psychologiques qui effectuerait des examens approfondis, suivant le Protocole d’Istanbul; l’indépendance du personnel médical à l’égard de la police doit être assurée.

Une information sur ces objectifs devrait être diffusée au moyen par exemple du rapport annuel du mécanisme national de prévention et d’ateliers organisés avec les autorités, les médecins légistes et les médecins des prisons, de préférence avec la participation d’experts en médecine et en psychologie nationaux et internationaux.