Observations finales concernant le rapport initial de l’Ouganda

Le Comité a examiné le rapport initial de l’§Ouganda (CMW/C/UGA/1) à ses 277e et 278e séances (voir CMW/C/SR.277 et 278), tenues les 15 et 16 avril 2015. À sa 289e séance (voir CMW/C/SR.289), le 23 avril 2015, le Comité a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité se félicite de la soumission du rapport initial de l’État partie, qui a été établi en réponse à la liste de points à traiter avant la présentation du rapport (CMW/C/UGA/QPR/1), et des informations additionnelles fournies pendant le dialogue par la délégation de haut niveau, qui était conduite par Madada Kyebakoze Sulaiman, Ministre d’État chargé des questions relatives aux personnes âgées et aux handicapés, et comprenait des représentants de la Mission permanente de la République d’Ouganda auprès de l’Office des Nations Unies à Genève. Le Comité regrette toutefois que le rapport n’ait été soumis que le 31 mars 2015, ce qui ne lui a pas laissé suffisamment de temps pour le faire traduire dans ses langues de travail ni pour l’examiner convenablement.

Le Comité apprécie le dialogue constructif tenu avec la délégation mais note avec regret que les informations fournies avaient souvent un caractère général ou étaient incomplètes, en particulier s’agissant de l’application pratique de la Convention dans l’État partie. Il regrette également que l’État partie n’ait pas assuré une plus large participation des ministères et des organismes publics compétents à l’établissement du rapport et qu’il n’ait pas tenu de vastes consultations avec la société civile et autres parties prenantes pertinentes.

Le Comité note que certains pays dans lesquels sont employés des travailleurs migrants ougandais ne sont pas parties à la Convention, ce qui peut constituer un obstacle à l’exercice des droits des migrants au titre de la Convention.

B.Aspects positifs

Le Comité note que l’État partie a conclu des accords bilatéraux et multilatéraux aux niveaux régional et international et encourage la conclusion de tels accords dans la mesure où ils visent à promouvoir et à protéger les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille. Le Comité note, en particulier, que l’État partie a ratifé les instruments ci-après ou y a adhéré :

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et son Protocole facultatif, en septembre 2008;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en mai 2002;

c)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en novembre 2001;

d)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée en septembre 2003;

e)La Convention de l’Organisation internationale du Travail (OIT) (no100) sur l’égalité de rémunération (1951), en juin 2005;

f) La Convention de l’OIT (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession) (1958), en juin 2005;

g)La Convention de l’OIT (no 138) sur l’âge minimum (1973), en mars 2003;

h)La Convention de l’OIT (no182) sur les pires formes de travail des enfants (1999), en juin 2001; et

i)La Convention de l’Union africaine pour la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de Kampala), en janvier 2010.

Le Comité se félicite de l’adoption des mesures législatives suivantes :

a)Les règlements en matière d’emploi (emploi des enfants) (2012);

b)Le Protocole sur l’établissement du marché commun de la Communauté d’Afrique de l’Est (sur la libre-circulation des personnes et de la main-d’œuvre (2010);

c)La loi sur la prévention de la traite des personnes (2009);

d)La loi sur la Commission de l’égalité des chances (2007);

e)La loi sur l’emploi no 6, de 2006;

f)Le règlement no 62 en matière d’emploi (Recrutement de travailleurs migrants ougandais à l’étranger) (2005); et

g)La loi sur la nationalité et le contrôle de l’immigration (art.66) (1999), telle que modifiée par les lois sur la citoyenneté ougandaise et le contrôle de l’immigration (amendement), de 2006 et 2009.

Le Comité accueille également avec intérêt les mesures institutionnelles et de politique générale suivantes :

a)Le Programme par pays pour la promotion du travail décent (2013-2017), en collaboration avec l’OIT;

b)L’adoption du Plan d’action national pour l’élimination des pires formes de travail des enfants (2012-2013 et 2016-2017);

c)Le Plan national de développement (2010-2011 et 2014-2015);

d)L’établissement du Bureau de coordination chargé de lutter contre la traite des personnes (2012);

e)L’adoption de la politique nationale en matière d’emploi (2011); et

f)Création du Groupe de l’emploi à l’étranger au sein du Département des services de l’emploi du Ministère du genre, du travail et des affaires sociales, en 2005.

C.Principaux domaines de préoccupation, suggestions et recommandations

1.Mesures générales d’application (art. 73 et 84)

Législation et application

Le Comité accueille avec intérêt les mesures prises par l’État partie pour adopter des politiques visant à protéger les droits des travaillleurs migrants, y compris le projet de politiques concernant la migration, la diaspora et les immigrants. En outre, il prend note de la mise en place de la Direction de la citoyenneteté et du contrôle de l’immigration en vertu de la loi ougandaise (modifiée) sur la citoyenneté et le contrôle de l’immigration de 2006, qui est une instance autonome chargée de la mise en œuvre des obligations qui incombent à l’État partie au titre de la Convention. Le Comité est toutefois préoccupé par le fait que :

a)Le cadre juridique régissant la migration demeure fragmenté;

b)Une perspective de genre n’ait pas été prise en considération dans le cadre de l’élaboration de politiques et de programmes, malgré le pourcentage élevé de travailleuses migrantes tant dans l’État partie qu’au sein de la diaspora; et

c)La coordination entre les institutions et les services qui s’occupent des diverses mesures visant à réaliser les droits au titre de la Convention est insuffisante.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires afin de garantir que ses lois et politiques nationales soient conformes aux dispositions de la Convention et qu’elles soient simplifiées. Il lui recommande aussi d’adopter et de mettre en œuvre la politique migratoire nationale, la politique nationale relative à la dia s pora et la politique nationale relative aux immigrants , conformément aux dispositions de la Convention et en prenant les femmes en considération. Le Comité recommande en outre à l’État p artie de redoubler d’efforts pour améliorer la coordination entre les minist è res et les organismes à tous les niveaux du Gouvernement en vue de l’application effective des droits protégés au titre de la Convention, notamment en garantissant d es ressources financières et humaines suffisantes ainsi que des capacité s pour les institutions cl efs s’occupant des questions relatives aux migrations, telles que le Ministère des affaires étrangères, le Ministère du genre, du travail et des affaires sociales, la Direction de la citoyenneté et du contrôle de l’immigration, le Conseil national de la citoyenneté et de l’immigration et la Commission ougandaise des droits de l’homme.

Le Comité est préoccupé par le manque d’informations concernant l’application de la Convention par les tribunaux nationaux.

Le Comité invite l’État partie à fournir, dans son deuxième rapport périodique, des informations sur l’application de la Convention par les tribunaux nationaux.

Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie ait formulé une réserve au sujet du paragraphe 3 d) de l’article 18 de la Convention, ce qui pourrait entraver le plein exercice des droits des migrants au titre de la Convention.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour retirer la réserve faite au sujet du paragraphe 3 d) de l’article 18 de la Convention.

Le Comité note que l’État partie n’a pas fait les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications d’États parties et de particulier se rapportant à des violations des droits consacrés par la Convention.

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention .

Le Comité note que l’État partie a ratifié plusieurs conventions de l’Organisation internationale du Travail ou y a adhéré mais qu’il n’a pas encore ratifié la Convention no189 (révisée) (1949) sur les travailleurs migrants ni la Convention no 97 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (2011), ou adhéré à ces instruments.

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention (révisée) de l’OIT n o  97 sur les travailleurs migrants (1949) et la Convention n o 189 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (2011), ou d’y adhérer, dès que possible .

Le Comité note que l’État partie a signé, mais n’a pas ratifié le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ni le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée.

Compte tenu de l’importance des Protocoles pour la mise en œuvre effective des dispositions de la Convention, y compris celles qui figurent à l’article 68, le Comité recommande à l’État partie de procéder à la ratification des Protocoles dès que possible .

Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni suffisamment d’informations sur les mesures spécifiques prises pour mettre en œuvre la Convention.

Le Comité exhorte l’État partie à faire figurer dans son deuxième rapport périodique des informations actualisées, étayées par des statistiques, concernant les mesures concrètes prises pour mettre en œuvre les droits des travailleurs migrants, ainsi qu’il est énoncé dans la Convention, tant en droit que dans la pratique.

Collecte de données

Le Comité est préoccupé car l’État partie n’ait pas été en mesure de fournir suffisamment d’informations sur les flux migratoires et sur d’autres questions liées aux migrations, qui lui permettraient d’évaluer précisément dans quelle mesure et par quels moyens les droits consacrés par la Convention sont mis en œuvre dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie d’établir un système pour la compilation de statistiques et d’informations migratoires , tant qualitatives que quantitatives , couvrant tous les aspects de la Convention, y compris en ce qui concerne les travailleurs migrants en situation irrégulière, et de veiller à recueillir des données détaillées sur le statut des travailleurs migrants dans l’État partie. Il l’encourage à compiler des informations et des statistiques ventilées par sexe, âge, nationalité, motif d’entrée et de sortie et type de travail effectué, afin d’orienter efficacement les politiques pertinentes et l’application de la Convention. Le Comité recommande également à l’État partie de coopérer avec ses représentations diplomatiques et consulaires à l’étranger afin de compiler des données sur les migrations, notamment sur la situation des migrants en situation irrégulière et des victimes de la traite. Lorsqu’il n’est pas possible d’obtenir des renseignements précis, par exemple en ce qui concerne les travailleurs migrants en situation irrégulière, le Comité serait heureux de recevoir des informations fondées sur des études ou des estimations.

Formation et diffusion de la Convention

Le Comité note que la Commission ougandaise des droits de l’homme, en étroite collaboration avec d’autres institutions des secteurs de la justice et du maintien de l’ordre, diffuse des informations sur les droits de l’homme, notamment sur les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille. Il note également que la Direction de la nationalité et du contrôle de l’immigration et l’Équipe spéciale contre la traite mènent des activités de sensibilisation relatives à la prévention de la traite. Toutefois, il est préoccupé par le manque d’informations concrètes sur les documents et programmes de formation portant spécifiquement sur la Convention et les droits qui y sont consacrés, ainsi que sur la diffusion de telles informations auprès des parties prenantes, notamment les autorités nationales, régionales et locales, les tribunaux, les organisations de la société civile, ainsi que les travailleurs migrants et les membres de leur famille.

Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer des programmes d’éducation et de formation portant sur la Convention et de veiller à ce que cette formation soit dispensée à tous les agents publics et aux autres personnes qui travaillent dans des domaines liés aux migrations. Il lui recommande également de veiller à ce que les travailleurs migrants aient accès à l’information sur les droits que leur reconnaît la Convention , et de collaborer avec les organisations de la société civile et les médias pour diffuser des informations sur la Convention et promouvoir son application.

2.Principes généraux (art. 7 et 83)

Non-discrimination

Le Comité note avec préoccupation que, selon l’État partie, la Constitution et la loi no 6 de 2006 sur l’emploi garantissent le droit à la non-discrimination uniquement aux travailleurs migrants pourvus de documents. Il est également préoccupé par le manque d’informations sur la réalité de la pratique et par le manque d’exemples qui permettraient d’évaluer le degré de réalisation du droit à la non-discrimination consacré par la Convention en ce qui concerne tous les travailleurs migrants, qu’ils soient pourvus de documents ou non.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre to utes les mesures nécessaires, notamment en modifiant sa législation, pour que tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille qui se trouvent sur son territoire ou sous sa juridiction, qu’ils soient pourvus de documents ou non, jouissent sans discrimination des droits consacrés par la Convention, conformément à son article 7. Il lui recommande également de fournir dans son deuxième rapport périodique des informations sur la pratique à cet égard, en citant des exemples pertinents.

Droit à un recours utile

Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie concernant la médiation assurée par la Commission ougandaise des droits de l’homme s’agissant des plaintes déposées par des travailleurs migrants. Il relève toutefois avec préoccupation que ces affaires sont traitées au cas par cas et que, d’après le rapport de l’État partie, aucune affaire de violation des droits de travailleurs migrants et de membres de leur famille n’a été portée devant les tribunaux, ce qui peut laisser penser que les travailleurs migrants ne connaissent pas bien leurs droits et les voies de recours qui leur sont offertes.

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que, en droit et en pratique, les travailleurs migrants et les membres de leur famille, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, aient la même possibilité que les nationaux de porter plainte et d’obtenir réparation devant les tribunaux , y compris les tribunaux du travail, lorsque les droits qui leur sont reconnus par la Convention ont été violés. Il lui recommande également de prendre des mesures supplémentaires pour informer les travailleurs migrants et les membres de leur famille, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, des recours judiciaires et autres qui leur sont ouverts en cas de violation des droits qui leur sont reconnus par la Convention.

3.Droits de l’homme de tous les migrants et des membres de leur famille (art. 8 à 35)

Le Comité est préoccupé par les informations indiquant qu’un certin nombre d’enfants travailleurs migrants sont soumis au travail forcé dans les secteurs de l’agriculture, de la pêche, de l’exploitation minière et de la fabrication de briques dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie d’accroître le nombre des inspections du travail et d’infliger des sanctions appropriées aux employeurs qui exploitent des enfants travailleurs migrants ou les soumettent au travail forcé et à d’autres abus, en particulier dans le secteur informel. Le Comité lui recommande également de fournir une assistance, une protection et une réadaptation adéquate s , notamment une réadaptation psychologique, aux enfants qui ont été victime s d’exploitation par le travail.

Le Comité note que l’État partie a indiqué que la loi sur la nationalité et le contrôle de l’immigration garantissait aux migrants frappés d’une ordonnance de placement en détention le droit de faire appel. Il est toutefois préoccupé par le manque d’informations concernant les mesures que l’État partie a prises pour que, dans les procédures pénales et administratives, notamment les procédures relatives à la détention et à l’expulsion, les travailleurs migrants et les membres de leur famille, en particulier ceux qui sont en situation irrégulière, bénéficient d’une procédure régulière, sur un pied d’égalité avec les nationaux de l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour que, dans les procédures administratives et judiciaires , notamment celles relatives à la détention et à l’expulsion, les travailleurs migrants et les membres de leur famille, en particulier ceux qui sont en situation irrégulière, bénéficient d’une procédure régulière, sur un pied d’égalité avec les nationaux de l’État partie. Compte tenu de son Observation générale n o  2 (2013) sur les droits des travailleurs migrants en situation irrégulière et des membres de leur famille, le Comité rappelle que la détention administrative ne doit être utilisée qu’en dernier ressort, et il recommande à l’État partie d’envisager des mesures de substitution à la détention administrative. Il lui recommande également  :

a) De faire figurer dans son deuxième rapport périodique des informations détaillées et ventilées sur le nombre de travailleurs migrants détenus pour des infractions à la législation relative à l’immigration, ainsi que sur le lieu, la durée moyenne et les conditions de leur détention;

b) De fournir des informations actualisées, notamment des statistiques ventilées, sur le nombre d’expulsions de travaileurs migrants ainsi que sur les procédures utilisées;

c) De veiller à ce que les garanties minimales consacrées dans la Convention soient respectées dans le cadre des procédures pénales et ou administratives et judiciaires engagées contre des travailleurs migrants et des membres de leur famille .

Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie selon lesquelles tous les migrants arrêtés ou détenus avaient le droit de demander une protection consulaire. Il est toutefois préoccupé par le manque d’informations sur l’assistance consulaire spécifiquement offerte aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille.

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille puissent bénéficier d’un appui consulaire pour faire protéger les droits énoncés dans la Convention. Il lui recommande de prendre les mesures nécessaires pour que ses services consulaires puissent répondre de manière efficace aux besoins des travailleurs migrants ougandais et des membres de leur famille en matière d’assistance et de protection de leurs droits, notamment en affectant le cas échéant des moyens humains et financiers suffisants et en mettant au point , à l’intention du personnel consulaire , des programmes de formation et des manuels portant sur la Convention ainsi que sur les lois et procédures applicables dans l’État d’emploi.

Le Comité salue la ratification par l’État partie, en juin 2005, de la Convention no 87 de l’Organisation internationale du Travail sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Il note toutefois avec préoccupation que l’État partie affirme que la liberté d’association telle que garantie par la Constitution, y compris la liberté de se syndiquer, ne concerne que les migrants pourvus de documents.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris de modifier sa législation, pour garantir aux migrants en situation irrégulière le droit de prendre part à des activités syndicales et d’adhérer librement à des syndicats, conformément à l’article 26 de la Convention.

Le Comité est préoccupé par le manque d’informations concernant des programmes spécifiquement destinés à garantir l’accès des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui sont en situation irrégulière sur le territoire de l’État partie aux soins médicaux d’urgence et à leur ouvrir l’accès à l’éducation.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter, conformément aux articles 28 et 30 de la Convention, des mesures concrètes et efficaces pour garantir aux travailleurs migrants en situation irrégulière l’accès aux soins médicaux d’urgence et au système éducatif, en particulier pour leurs enfants.

Le Comité note que l’État partie a indiqué que les agences privées de recrutement organisent à l’intention des travailleurs migrants ougandais des activités d’orientation avant le départ. Il regrette toutefois de ne pas disposer d’informations spécifiques sur les mesures prises par l’État partie pour informer les travailleurs migrants et les membres de leur famille des droits protégés par la Convention ainsi que de leurs droits et de leurs obligations dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures qui s’imposent pour diffuser des informations sur les droits reconnus aux travailleurs migrants au titre de la Convention, ainsi que sur les conditions de leur admission et de leur emploi, et sur leurs droits et obligations en vertu de la législation et des usages des États d’emploi. Il lui recommande également de mettre en place des programmes ciblés de préparation au départ et de sensibilisation , notamment en consultation avec les organisations non gouvernementales intéressées, les employés de maison migrants et leur famille et des agences de recrutement reconnues et fiables.

4.Autres droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui sont pourvus de documents ou en situation régulière (art. 36 à 56)

Le Comité note que l’État partie affirme que les travailleurs migrants peuvent, en principe, constituer des associations et des syndicats, mais il regrette le manque d’informations concrètes touchant à la mise en œuvre de ce droit. Il relève avec préoccupation que l’article 76 de la loi sur la nationalité et le contrôle de l’immigration interdit aux travailleurs migrants de devenir membres des organes de direction d’un syndicat ou d’un mouvement de jeunesse dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour garantir aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille, tant en droit que dans la pratique, le droit de constituer des associations et des syndicats afin de promouvoir et de protéger leurs intérêts économiques, sociaux, culturels et autres, ainsi que de devenir membres de leurs organes de direction, conformément à l’article 40 de la Convention et à la Convention de l’OIT n o  87 concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical , 1948 .

Le Comité note que la Constitution ougandaise étend le droit de vote et les droits politiques aux travailleurs migrants ougandais et aux membres de leur famille résidant hors du pays, mais il regrette qu’à l’heure actuelle aucun mécanisme n’ait été mis en place pour permettre aux membres de la diaspora ougandaise de voter lors d’élections dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour assurer la réalisation du droit de vote pour les travailleurs migrants ougandais résidant à l’étranger et de redoubler d’efforts pour faciliter l’exercice du droit de vote par les Ougandais qui résident et travaillent à l’étranger lors des élections présidentielles qui doivent se tenir en 2016.

5.Promotion de conditions saines, équitables, dignes et légales en ce qui concerne les migrations internationales des travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 64 à 71)

Le Comité note que l’État partie envisage de conclure des accords avec les pays d’emploi de travailleurs migrants ougandais, notamment les Émirats arabes unis, le Koweït et le Qatar et, en vue de protéger les droits de ces travailleurs. Il est toutefois préoccupé par le retard pris dans la signature de tels accords, compte tenu des informations faisant état de l’exploitation de travailleurs migrants ougandais et de violations de leurs droits dans certains États d’emploi, en particulier au Moyen-Orient et au Soudan du Sud.

Le Comité recommande à l’État partie de conclure des accords qui soient conformes à la Convention avec les pays d’emploi de travailleurs migrants ougandais afin de mieux protéger leurs droits et de faciliter l’offre de services consulaires et autres.

Le Comité note que la Direction de la nationalité et du contrôle de l’immigration a diffusé des informations sur les agences de recrutement agréées qui sont habilitées à prêter assistance dans le cadre des procédures relatives à l’émigration de travail. Il est toutefois préoccupé par les informations selon lesquelles certaines agences de recrutement privées faciliteraient la traite, l’exploitation sexuelle et/ou l’emploi à l’étranger dans des conditions de travail abusives, notamment en ce qui concerne les employés de maison au Moyen-Orient, tout en facturant des frais de placement excessifs.

Compte tenu de son Observation générale n o  1 sur les travailleurs domestiques migrants, le Comité recommande à l’État partie de renforcer la réglementation et le contrôle effectifs des agences de recrutement, des pourvoyeurs de main - d’ œuvre et autres intermédiaires, pour garantir le respect des droits des migrants domestiques . Il lui recommande également de prévoir des sanctions, notamment le retrait de l’agrément, pour les agences et intermédiaires qui se livrent à des pratiques non éthiques et illégales portant atteinte aux droits des migrants domestiques . Il lui recommande en outre d’adopter un code de conduite relatif au recrutement de migrants domestiques , comportant des règles régissant spécifiquement les charges et les retenues sur salaire, de prévoir des sanctions et des pénalités appropriées pour les faire respecter, et d’envisager d’interdire la facturation de frais de recrutement aux migrants domestiques .

Le Comité note que, dans un certain nombre de cas, l’État partie a collaboré étroitement avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) concernant le retour, la réinstallation et la réinsertion de travailleurs migrants ougandais. Il est toutefois préoccupé par le manque d’informations sur les mesures prises par l’État partie pour faciliter la réinsertion des travailleurs migrants ougandais et des membres de leur famille qui rentrent en Ouganda.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour créer des conditions sociales, économiques ou autres appropriées afin de faciliter le retour et la réinsertion durable des travailleurs migrants ougandais et des membres de leur famille dans l’État partie, comme prévu à l’article 67 de la Convention.

Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour combattre la traite des êtres humains sur son territoire. Il est toutefois préoccupé par :

a)L’absence de réglementation facilitant la mise en œuvre de la loi sur la prévention de la traite des personnes;

b)L’insuffisance des ressources financières et humaines consacrées à la détection et à l’élimination de la traite des personnes;

c)Le manque de données sur l’ampleur du phénomène dans l’État partie et, en particulier, sur le nombre de femmes et d’enfants concernés.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De redoubler d’efforts pour faire respecter la loi sur la prévention de la traite des personnes;

b) D’allouer des ressources suffisantes à la mise en œuvre de stratégies visant à détecter et à éliminer la traite des personnes et le trafic d’êtres humains;

c) D’évaluer l’ampleur de la traite des personnes, de procéder à la compilation systématique de données ventilées en vue de mieux combattre ce phénomène, en particulier la traite de femmes et d’enfants, et d’en traduire les auteurs en justice;

d) De fournir protection et assistance à toutes les victimes de la traite des êtres humains, en particulier en leur fournissant un hébergement, des soins médicaux et un appui psychosocial et en prenant d’autres mesures pour faciliter leur réinsertion sociale; et

e) De renforcer la formation des agents de la force publique, des juges, des procureurs, des inspecteurs du travail, des enseignants, des personnels de santé et du personnel des ambassades et des consulats de l’État partie, et de diffuser plus largement des informations sur la traite des personnes et l’assistance aux victimes.

Le Comité est préoccupé par le manque de clarté s’agissant des mesures concrètes prises par l’État partie pour faire en sorte que la situation des travailleurs migrants en situation irrégulière et des membres de leur famille présents sur son territoire ne se prolonge pas.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures appropriées en vue de la mise en place de procédures de régularisation pour les travailleurs migrants en situation irrégulière afin que cette situation ne perdure pas, et de veiller à ce que les travailleurs migrants en situation irrégulière soient informés de ces procédures .

6.Suivi et diffusion

Suivi

Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son deuxième rapport périodique des informations détaillées sur les mesures prise s pour donner suite aux recommandations contenues dans les présentes observations finales. Il lui recommande de prendre toutes les mesures appropriées afin de garantir la mise en œuvre de ces recommandations, notamment en les transmettant pour examen et suite à donner aux membres du Parlement et aux autorités locales.

Le Comité demande à l’État partie d’impliquer la société civile dans la mise en œuvre des recommandations contenues dans les présentes observations finales .

Rapport de suivi

Le Comité demande à l’État partie de fournir, d’ ici à deux ans, à savoir le 24  avril 2017 au plus tard, des informations écrites sur la suite donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 28, 42, 44 et 45 ci-dessus.

Diffusion

Le Comité demande aussi à l’État partie de diffuser la Convention et les présentes observations finales à grande échelle, notamment aux organismes publics, à l’appareil judiciaire, aux organisations non gouvernementales et à d’autres membres de la société civile et au grand public, afin de mieux les faire connaître.

7.Assistance technique

Le Comité recommande à l’État partie de se prévaloir de l’assistance internationale, y compris de l’assistance technique, afin d’élaborer un programme exhaustif pour la mise en œuvre des recommandations précitées et de la Convention dans son ensemble. Il exhorte aussi l’État partie à poursuivre sa coopération avec les institutions et programmes spécialisés du système des Nations Unies.

8.Prochain rapport périodique

Le Comité recommande à l’État partie de soumettre son deuxième rapport périodique d’ici au 24 avril 20 2 0 et d’y faire figurer des informations sur la mise en œuvre des présentes observations finales. Parallèlement, l’État partie peut suivre la procédure d’établissement de rapport simplifiée, par laquelle le Comité établit et adopte une liste de points qui est transmise à l’État partie avant la présentation de son prochain rapport. Les réponse s de l’État partie à cette liste de points constitueront son rapport au titre de l’article 73 de la Convention. Ainsi , l’État partie ne soumet pas son rapport de manière traditionnelle. Cette nouvelle procédure optionnelle a été adoptée par le Comité à sa quatorzième session en avril 2011 (voir A/66/48 , par. 26).

Le Comité attire l’attention de l’État partie sur les directives harmonisées se rapportant au traité proprement dit ( CMW/C/2008/1 ) et lui rappelle que ses rapports périodiques devraient être conformes aux directives et ne pas excéder 21 200 mots (voir résolution 68/268 de l’Assemblée générale). Au cas où serait présenté un rapport excédant la limite de mots établie, l’État partie sera invité à raccourcir le rapport conformément aux directives précitées . Si l’État partie n’est pas en mesure d’examiner et de soumettre le rapport à nouveau, il ne sera pas possible d’en assurer la traduction en vue de l’examen par l’organe c onventionnel .

Le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que tous les minist è res et les organismes publics participent largement à l’élaboration du prochain rapport périodique de l’État partie (ou des réponses à la liste de points à traiter, dans le cas d’une procédure d’établissement de rapport simplifiée ) et , parallèlement, d’ engager de vastes consultations avec toutes les parties prenantes pertinentes, notamment la société civile, les travailleurs migrants et les organisations des droits de l’homme.

Le Comité invite également l’État partie à soumette un document de base actualisé n’excédant pas 42  4 00 mots, conformément aux prescriptions relatives à l’établissement du document de base , énoncées dans les directives harmonisées concernant l’établissement de rapports au titre des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, y compris celles concernant un document de base commun et des documents se rapportant aux traités proprement dits, approuvés à la cinquième réunion intercomités des organes conventionnels des droits de l’homme en juin 2006 ( HRI/MC/2006/3 ).