Nations Unies

CED/C/SEN/CO/1/Add.1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

17 mai 2018

Original : français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Observations finales concernant le rapport soumis par le Sénégal en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention

Additif

Renseignements reçus du Sénégal au sujet de la suite donnée aux observations finales *

[Date de réception : 7 mai 2018]

Paragraphe 14  : Le Comité recommande à l’Etat partie d’accélérer le processus de révision du Code pénal visant à mettre en œuvre la Convention afin de définir et d’incriminer la disparition forcée en tant qu’infraction autonome, conformément à la définition figurant à l’article 2 de la Convention, et passible de peines appropriées qui prennent en compte son extrême gravité.

1.Plusieurs points des projets de réforme de la législation pénale nationale ont déjà fait l’objet d’adoption. Il s’agit notamment des dispositions relatives au terrorisme, à la cybercriminalité, au travail au bénéfice de la société, à la mise en danger d’autrui, à la fausse alerte, à la présence de l’avocat dès l’interpellation (loi no 2016-29 et 2016-30 du 8 novembre 2016), des dispositions relatives à l’instauration des chambres criminelles permanentes au sein des tribunaux de grande instances (loi no 2014-28 du 3 novembre 2014). Les autres dispositions des projets de réformes, y compris celles relatives à l’incrimination de la disparition forcée en infraction autonome, sont en cours et seront soumises à l’adoption dans les meilleurs délais. Il s’agit d’un processus législatif de révision des lois pénales que le Sénégal a engagé pour mettre en œuvre les obligations nées de sa ratification de plusieurs instruments internationaux mais aussi des recommandations des différents mécanismes internationaux et régionaux des droits de l’homme.

Paragraphe 18  : Le Comité recommande à l’Etat partie de modifier sa législation pénale relative à la disparition forcée constitutive d’un crime contre l’humanité (notamment l’alinéa 6 du paragraphe 1 de l’article 431-2 du Code pénal) afin d’en garantir sa conformité avec l’article 5 de la Convention. Le Comité recommande en particulier que la disparition forcée soit mentionnée séparément de la réduction en esclavage et de l’enlèvement de personnes, et que l’article 431-2 fasse explicitement mention de l’acte de disparition forcée constitutive d’un crime contre l’humanité.

2.La réforme envisagée prendra en compte cette recommandation pertinente du Comité. Un paragraphe séparé sera inséré à l’article 431-2 du Code pénal afin d’ériger la disparition forcée en crime sous-jacent du crime contre l’humanité.

Paragraphe 34  : Le Comité recommande à l’Etat partie d’adopter les mesures nécessaires pour garantir que :

a) Tous les registres et dossiers de personnes privées de liberté soient correctement et rapidement complétés et mis à jour, de manière à contenir tous les renseignements requis en vertu du paragraphe 3 de l’article 17 de la Convention  ;

3.La loi fait obligation aux OPJ de tenir un registre de garde à vue spécifique mentionnant le début et la fin de la garde à vue, en passant par la précision des heures de repos, la nature de l’infraction et le motif de la garde à vue. Le procès-verbal de garde à vue est aussi dressé par l’officier de police judiciaire qui a pris la mesure. L’identité de celui-ci, sa fonction et le lieu de garde à vue y sont clairement mentionnés. Ces mesures sont prévues par, notamment l’article 55 alinéa 6 qui dispose :

« Dans tous les lieux où la garde à vue s’applique, les officiers de police judiciaire sont astreints à la tenue d’un registre de garde à vue, coté et paraphé par le parquet qui est présent à toutes réquisitions des magistrats chargés du contrôle de la mesure ».

4.Et l’article 57 du même code ainsi libellé :

« Les procès-verbaux dressés par l’officier de police judiciaire en exécution des articles 46 et 54 sont rédigés sur le champ et signés par lui sur chaque feuillet du procès-verbal.

Le procès-verbal d’audition de toute personne gardée à vue doit mentionner le jour et l’heure à partir desquels elle a été placée dans cette position, les motifs de la mise sous garde à vue, la durée des interrogatoires, la durée des repos, ainsi que le jour et l’heure à partir desquels elle a été soit libérée, soit conduite devant le magistrat compétent. Cette mention doit être spécialement émargée par les personnes intéressées et en cas de refus, il en est fait mention au procès-verbal, à peine de nullité ».

5.Le contrôle de la mesure de garde à vue est effectué par le Procureur de la République.

b) Les dossiers fassent régulièrement l’objet de vérifications et que, au cas où ces registres ne seraient pas correctement complétés et mis à jour, les agents responsables soient dûment sanctionnés, y compris sur le plan pénal, conformément aux lois établies à cet effet ;

6.Il pèse sur le Procureur de la République l’obligation légale de procéder à des inspections des lieux de garde à vue. Ces inspections sont souvent inopinées et le rapport dressé à l’issue mentionne tous manquements aux formalités obligatoires relatives à la tenue des registres. Ces manquements sont susceptibles de sanctions prononcées par l’autorité de nomination à qui lesdits rapports sont adressés. L’article 59 du Code de procédure pénale prévoit en effet que :

« Lorsque des abus sont constatés de la part des officiers de police judiciaire dans l’application des mesures de garde à vue, le Procureur de la République ou son délégué en informe le Procureur Général qui saisit la Chambre d’Accusation.

La victime des abus précisés à l’alinéa précédent peut également saisir par requête la Chambre d’Accusation.

Celle-ci en vertu de ses pouvoirs prévus aux articles 213, 216 et 217 du présent code, peut soit retirer temporairement ou définitivement la qualité d’officier de police judiciaire à l’auteur des abus, soit retourner le dossier au Procureur Général pour intenter des poursuites, s’il relève qu’une infraction à la loi pénale a été commise ».

c) Toutes les personnes privées de liberté, indépendamment de l’infraction dont elles sont accusées, jouissent de toutes les garanties juridiques fondamentales énoncées à l’article 17 de la Convention dès le début de leur privation de liberté ;

7.Les conditions de la garde à vue sont précisées par la loi, à l’article 55 du CPP. Celle-ci est décidée soit par l’officier de police judiciaire soit par le Procureur de la République lui-même. En tout état de cause la mesure de garde à vue s’applique selon l’alinéa 5 de l’article 55 :

« Sous le contrôle effectif du Procureur de la République, de son délégué, ou le cas échéant du Président du tribunal d’instance investi des pouvoirs du Procureur de la République ».

8.La garde à vue, comme l’emprisonnement, s’effectue en des lieux aménagés à cet effet. Ainsi la garde à vue ne peut être appliquée que dans les unités de police judicaire alors que l’emprisonnement s’effectue dans établissements pénitentiaires.

9.Aux termes de l’article 55 nouveau du CPP, l’officier de police judiciaire est tenu d’informer la personne gardée à vue de son droit de communiquer avec son conseil. Ce droit s’exerce dès l’interpellation, conformément au Règlement no 5 de l’UEMOA.

10.Le droit de visite existe dans la législation et les personnes privées de liberté reçoivent effectivement la visite de leurs familles à chaque fois que celles-ci en font la demande. Ce droit s’exerce à tous les niveaux de privation de liberté.

d) Toute personne ayant un intérêt légitime puissent avoir rapidement et facilement accès au minimum de renseignements énumérés au paragraphe 1 de l’article 18 de la Convention, y compris pendant la garde à vue, ainsi qu’un droit de recours en cas de rejet de la demande d’accès.

11.Même si des dispositions garantissant ce droit n’existent dans la loi pénale, force est de constater que dans la pratique, ces renseignements sont toujours mis à la disposition des personnes visées. Le Sénégalais note la nécessité de garantir ce droit par la réforme de sa loi et prendra en compte cette préoccupation du Comité dans son processus de réforme législative en cours.