Comité des droits de l ’ homme
Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, concernant la communication no 2205/2012 * , **
Communication présentée par : |
Yashar Agazade et Rasul Jafarov (représentés par Rashid Hajili et Nani Jansen) |
Au nom de : |
Les auteurs |
État partie : |
Azerbaïdjan |
Date de la communication : |
2 novembre 2012 |
Références : |
Décision prise en application de l’article 97 du règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 20 novembre 2012 (non publiée sous forme de document) |
Date des constatations : |
27 octobre 2016 |
Objet : |
Accès à une licence de radiodiffusion |
Question(s) de procédure : |
Fondement suffisant des griefs |
Question(s) de fond : |
Liberté d’expression ; procès équitable |
Article(s) du Pacte : |
14 (par. 1) et 19 |
Article(s) du Protocole facultatif : |
3 |
1.1Les auteurs de la communication sont Yashar Agazade et Rasul Jafarov, de nationalité azerbaïdjanaise, nés en 1979 et 1984. Ils affirment être victimes d’une violation des articles 14 (par. 1) et 19 du Pacte. Ils sont représentés par Rashid Hajili, de l’Institut des droits des médias, à Bakou, et par Nani Jansen, de la Media Legal Defence Initiative, à Londres. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 27 février 2002.
1.2Le 22 juillet 2013, le Comité, par l’intermédiaire de son Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires, a décidé de ne pas accéder à la demande de l’État partie, qui souhaitait que la recevabilité de la communication soit examinée séparément du fond.
Rappel des faits présentés par les auteurs
2.1M. Agazade est journaliste et rédacteur en chef de l’hebdomadaire azerbaïdjanais Muhakima, une publication souvent critique à l’égard des politiques et des décisions des pouvoirs publics. M. Jafarov est cofondateur et Président de l’association azerbaïdjanaise pour le développement de la télévision et des médias non traditionnels. De mars 2009 à décembre 2010, il a dirigé un groupe de surveillance sur la télédiffusion au sein de l’Institute for Reporters Freedom and Safety (IRFS). Il est l’auteur de plusieurs rapports portant un regard critique sur la situation en matière de télédiffusion dans le pays. Il est aussi un militant des droits de l’homme réputé.
2.2Le 11 mars 2010, les auteurs ont écrit au Conseil national de la radio et de la télévision (CNRT), l’institution publique chargée de la régulation des médias audiovisuels dans le pays, pour se renseigner sur les fréquences radio disponibles et demander pourquoi aucune liste des fréquences disponibles n’avait été publiée et aucun appel d’offres pour l’attribution de ces fréquences lancé comme l’exigeait la loi. Le 12 mars 2010, le CNRT a répondu qu’il existait des fréquences radio vacantes et a reconnu qu’aucune liste n’avait été publiée.
2.3Le 19 mai 2010, les auteurs ont adressé au CNRT une demande de licence de diffusion radiophonique couvrant le territoire de Bakou et de la péninsule d’Apchéron. Le 25 mai 2010, le CNRT a répondu que la diffusion radiophonique et télévisuelle nécessitait une autorisation spéciale (licence), que ces licences, conformément à la loi, étaient attribuées sur concours, et que les auteurs pouvaient répondre aux appels d’offres pour l’attribution de licences annoncés par le CNRT dans les secteurs « jugés nécessaires à l’activité de diffusion ». Les auteurs signalent que le CNRT n’a pas indiqué s’il était prévu qu’une liste des fréquences disponibles soit publiée ni si des appels d’offres pour l’octroi de licences seraient lancés dans l’avenir.
2.4Le 10 juin 2010, les auteurs ont déposé auprès du tribunal de district de Sabail une plainte dans laquelle ils faisaient valoir qu’en ne publiant pas de liste des fréquences radio disponibles et en ne lançant pas d’appels d’offres malgré l’existence de fréquences vacantes, le CNRT avait violé leur droit à la liberté d’expression. Ils indiquaient que le CNRT n’avait annoncé un appel d’offres pour l’octroi de licences de radiodiffusion qu’une seule fois, en septembre 2008, et que depuis cette date, des licences avaient été accordées sans mise en concurrence, ce qui maintenait un monopole politique sur la télévision et la radiodiffusion dans le pays. Ils demandaient au tribunal d’exiger que le CNRT leur délivre une licence. Le 26 août 2010, le tribunal a déclaré que la plainte des auteurs était infondée car le CNRT avait fourni sans tarder des réponses bien étayées et documentées. Le tribunal a conclu qu’après avoir évalué les arguments des auteurs dans leur globalité, il ne constatait aucune violation de leurs droits ou libertés du fait de l’acte administratif en question.
2.5Le 3 octobre 2010, les auteurs ont formé un recours devant la cour d’appel de Bakou en soulevant les mêmes griefs que devant le tribunal de district de Sabail. Ils ont fait valoir en outre que le tribunal de district n’avait pas tenu compte de leurs arguments et n’avait pas motivé sa décision, ce qui constituait une violation de leurs droits à la liberté d’expression et à un procès équitable. Le 3 mars 2011, la cour d’appel a conclu à son tour que le CNRT avait agi conformément au droit en informant les auteurs des conditions requises par la loi pour obtenir une licence de radiodiffusion, et a rejeté leurs griefs. La cour d’appel a estimé que le rejet de la demande des auteurs était conforme au droit puisque aucun appel d’offres n’avait été annoncé. Cependant, elle n’a pas répondu aux arguments des auteurs concernant la nécessité de publier des renseignements sur les fréquences radio vacantes, l’absence d’appel d’offres et le manque de pluralisme qui en résultait dans les médias de radiodiffusion, et l’octroi de licences par le CNRT sans mise en concurrence.
2.6Le 13 avril 2011, les auteurs se sont pourvus en cassation auprès de la Cour suprême en se déclarant victimes d’une violation de leurs droits à la liberté d’expression et à un procès équitable. Le 5 juillet 2011, la Cour suprême les a déboutés, concluant à son tour que les actes du CNRT étaient conformes au droit et, en conséquence, qu’il n’y avait eu violation d’aucun droit.
2.7Les auteurs affirment qu’il n’existe en Azerbaïdjan pratiquement aucun organe de diffusion indépendant parmi les médias en ligne, y compris les radios et télévisions. En régulant la répartition des fréquences et des licences et la publicité, les autorités azerbaïdjanaises exercent sur les organes de diffusion un contrôle qui se traduit par une absence de pluralisme dans le secteur. Tous les membres du CNRT sont nommés par le Président et le règlement de l’institution ne prévoit pas de consultation publique ni aucune autre procédure transparente pour la nomination de ses membres.
2.8Les auteurs signalent qu’il existe seulement 14 stations de radio d’audience nationale en Azerbaïdjan, alors que des fréquences sont vacantes. En guise d’explication à ces vacances, le CNRT affirme que de nouvelles chaînes de télévision et de nouvelles stations de radio ne sont pas nécessaires.
2.9La loi sur la diffusion radiophonique et télévisuelle fait obligation au CNRT de publier la liste des fréquences disponibles au moins une fois par an et de lancer des appels d’offres pour leur attribution. Malgré cela, le CNRT n’a jamais publié la liste de toutes les fréquences disponibles destinées à la radiodiffusion et à la télédiffusion et n’a lancé d’appels d’offres pour l’attribution de fréquences disponibles qu’à deux reprises, à savoir en septembre 2008 et en novembre 2010. Chaque fois, une seule licence a été accordée. Les auteurs relèvent qu’aucun de ces appels d’offres n’était ouvert, équitable et gratuit. En 2008, la licence a été octroyée à la société Digital Media MMC, qui avait été fondée et enregistrée treize jours seulement avant que le CNRT annonce l’appel d’offres, et le nom du propriétaire de la société n’a jamais été rendu public. En 2010, la licence a également été accordée à une société récemment constituée, du nom de Golden Prince, propriété de l’ancien Directeur général de la Maison de la presse azerbaïdjanaise, connue pour ses liens avec le Gouvernement azerbaïdjanais. Le CNRT a déjà accordé des licences de diffusion hors appel d’offres à des stations de radio diffusant des programmes progouvernementaux.
2.10Le 30 décembre 2008, le CNRT a annoncé qu’il entendait interdire aux stations de radio internationales d’émettre sur la bande FM nationale. En conséquence, le 1er janvier 2009, Radio Liberty, Voice of America et la BBC se sont vu retirer leurs fréquences et leurs licences. Les auteurs relèvent que les fréquences en question, de même que celles qui sont redevenues vacantes après l’arrivée à échéance, en 2006 et 2007, des licences de huit autres stations de radio internationales et étrangères (3 stations de radio russes, 3 chaînes de télévision turques et les stations de radio FM Radio France et Radio Europa Plus), n’ont pas été réattribuées à ce jour. Aucune fréquence n’a été accordée à des stations de radio locales, sauf 12 fréquences dans la ville de Bakou et 2 autres à Nakhchivan.
2.11Les auteurs soulignent que l’absence de pluralisme des médias en Azerbaïdjan préoccupe les organisations internationales et les observateurs indépendants depuis de nombreuses années. Ils citent à cet égard des rapports du Conseil de l’Europe, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et du Parlement européen, ainsi que les observations finales du Comité des droits de l’homme concernant l’Azerbaïdjan. Au moment de sa demande d’adhésion au Conseil de l’Europe, l’Azerbaïdjan a entrepris de transformer la société de radiodiffusion et de télévision d’obédience gouvernementale AzTV en un organisme de radiodiffusion et de télévision de service public. Les auteurs signalent que malgré cet engagement, AzTV demeure à ce jour sous le strict contrôle des pouvoirs publics et que son président est toujours nommé par le Président de l’Azerbaïdjan. D’autres stations ayant l’apparence d’organes de radiodiffusion indépendants appartiennent en réalité à des personnes « ayant des liens avec le Gouvernement ». Les auteurs indiquent, par exemple, que Lider TV et Lider FM radio, propriété de Media Holding, sont en fait dirigées par A. Aliev, le cousin du Président de l’Azerbaïdjan. ATV, 106 FN, Azad Azerbaijan Radio et ATV International appartiennent à des membres de la famille du Ministre Nazim Ibrahimov. En réalité, toutes les sociétés de télévision et de radiodiffusion sont « sous la mainmise politique et économique du Gouvernement ». Ainsi que l’a indiqué International Partnership Group for Azerbaijan à l’issue de sa visite dans le pays en septembre 2010, « la quasi-totalité des médias audiovisuels d’Azerbaïdjan suivent une ligne éditoriale progouvernementale. Le CNRT est critiqué pour son manque de transparence dans l’attribution et le retrait des licences de diffusion. ».
Teneur de la plainte
3.1Les auteurs affirment que le rejet par le CNRT de leur demande de licence de radiodiffusion, en mai 2010, et l’absence d’appel d’offres réguliers et équitables en vue de l’attribution des licences ont constitué une violation par l’État partie du droit à la liberté d’expression qu’ils tiennent de l’article 19 du Pacte. Le rejet de leur demande serait conforme au droit uniquement s’il existait une chance véritable que des appels d’offres soient organisés régulièrement, ce qui permettrait aux diffuseurs critiques à l’égard du Gouvernement d’avoir véritablement la possibilité d’obtenir une licence. Puisque le CNRT ne respecte pas la loi sur la diffusion radiophonique et télévisuelle en n’organisant pas d’appels d’offres réguliers et équitables aux fins de l’attribution de licences de diffusion, il ne peut pas se fonder sur cette loi pour justifier son refus de leur accorder une licence. En tout état de cause, la loi sur la diffusion radiophonique et télévisuelle n’est pas d’une clarté et d’une qualité suffisantes pour répondre au critère de légalité visé au paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte car elle laisse le CNRT entièrement libre de décider quand organiser des appels d’offres et ne définit pas de critères pour l’évaluation des demandes de licence.
3.2Les auteurs affirment que l’État partie a manqué à l’obligation positive qui lui incombait en vertu de l’article 19 de garantir l’accès du public à des informations exactes et impartiales ainsi qu’à un large éventail d’opinions et de commentaires par la télévision et la radio. L’État partie a en particulier manqué à cette obligation en n’organisant pas régulièrement des appels d’offres pour l’octroi de licences de radiodiffusion et télédiffusion, en n’accordant pas de licences en réponse aux demandes faites hors appel d’offres et en ne veillant pas à ce que le système d’attribution des licences fonctionne et soit administré de manière que les médias audiovisuels de l’État partie reflètent un large éventail d’opinions. Ce manquement a, par voie de conséquence, gravement entravé l’exercice des droits démocratiques en Azerbaïdjan et empêché les citoyens d’exercer ces droits concrètement et en toute connaissance de cause.
3.3Le fait de ne pas publier de listes des fréquences disponibles et de ne pas organiser d’appels d’offres ouverts, équitables et gratuits pour l’attribution de ces fréquences constitue une immixtion illégale dans l’exercice du droit des auteurs à la liberté d’expression consacré par l’article 19. Bien que des appels d’offres pour l’attribution de deux fréquences aient été organisés en septembre 2008 et novembre 2010, les procédures n’étaient ni gratuites ni ouvertes et leurs résultats n’étaient pas motivés. Une telle immixtion ne répondait pas aux critères définis au paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte puisqu’elle n’était pas conforme au droit ni nécessaire dans une société démocratique.
3.4Le manquement à l’obligation de publier une liste des fréquences disponibles au moins une fois par an et d’organiser des appels d’offres pour l’attribution de ces fréquences constitue une infraction aux dispositions de la loi nationale sur la diffusion radiophonique et télévisuelle, et ne saurait donc être considéré comme une restriction « fixée par la loi ». Cette exigence renvoie non seulement au fait que toute immixtion dans l’exercice des droits consacrés par l’article 19 doit être fondée en droit, mais aussi à la qualité des dispositions législatives en question. Celles-ci doivent non seulement être accessibles et avoir des conséquences prévisibles, mais doivent aussi garantir un certain degré de protection juridique contre les immixtions arbitraires par les pouvoirs publics, conformément aux droits consacrés par le Pacte. L’absence, dans la loi sur la diffusion radiophonique et télévisuelle, de dispositions qui : a) indiquent à quelle fréquence les appels d’offres pour l’octroi de licences de radiodiffusion devraient être organisés ; b) exigent du CNRT qu’il tienne compte de la nécessité de garantir la diversité et le pluralisme des médias dans l’organisation de ces concours ; et c) lui fassent obligation de donner des motifs valables pour justifier ses décisions et tout refus de licence, montre que cette loi n’offre pas une protection suffisante contre d’éventuelles immixtions arbitraires dans l’exercice des droits que les auteurs tiennent de l’article 19. De plus, l’argument du CNRT selon lequel des chaînes de télévision et des stations de radio supplémentaires ne sont pas nécessaires ne saurait justifier ce manquement. Même si le pluralisme des médias était assuré dans le pays, il n’en resterait pas moins nécessaire de lancer régulièrement des appels d’offres pour permettre à de nouveaux diffuseurs d’accéder au marché.
3.5Les auteurs font valoir que l’immixtion dans l’exercice de leurs droits n’était ni proportionnée ni nécessaire dans une société démocratique. L’unique motif que le CNRT et les tribunaux nationaux ont avancé pour expliquer l’immixtion dans l’exercice du droit des auteurs à la liberté d’expression était que le rejet de la demande de licence était conforme à la loi. Cette immixtion ne saurait être justifiée par l’idée que des chaînes de télévision et des stations de radio supplémentaires ne seraient pas nécessaires. Au contraire, l’Azerbaïdjan n’ayant pas permis au public d’avoir accès à une information exacte et impartiale et à un large éventail d’opinions et de commentaires par la télévision et la radio, il existe un besoin urgent de nouvelles chaînes de télévision et de nouvelles stations de radio. Même s’il existait déjà une offre variée et pluraliste de médias audiovisuels, cela ne suffirait pas à justifier que l’on n’organise pas régulièrement des appels d’offres pour permettre à de nouveaux diffuseurs ou à des diffuseurs différents d’obtenir des licences, dans la mesure où une telle restriction n’est pas nécessaire dans une société démocratique et ne viserait pas à établir un juste équilibre entre les droits des diffuseurs et les buts légitimes visés au paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte.
3.6Les auteurs affirment également que le fait que le CNRT et les tribunaux nationaux n’aient pas suffisamment motivé leurs décisions constitue une violation du droit, qu’ils tiennent du paragraphe 1 de l’article 14 du Pacte, à ce que leur cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi, qui statue sur leurs droits. Le droit à ce qu’une décision soit suffisamment motivée découle de l’obligation, visée à l’article 14, de rendre public le raisonnement juridique des jugements. L’absence de motivation d’un jugement rend impossible l’examen des conclusions du tribunal et vain le droit de faire appel. Les tribunaux n’ont pas pris en considération les griefs des auteurs concernant le manquement du CNRT à l’obligation de lancer des appels d’offres publics pour l’octroi de licences de télévision et de radiodiffusion et concernant l’attribution de licences à d’autres diffuseurs sans mise en concurrence. Les trois juridictions ne se sont pas prononcées sur le point de savoir si ce manquement constituait une restriction illégale du pluralisme des médias et une violation du droit des auteurs à la liberté d’expression, et ont rejeté les plaintes en donnant comme seul argument qu’en rejetant la demande des auteurs, le CNRT avait agi conformément à la loi.
3.7À titre de réparation, les auteurs demandent au Comité de décider que l’État partie est tenu : 1) d’ouvrir un appel d’offres pour l’attribution de licences et de veiller à ce qu’il soit tenu de manière équitable ; 2) de revoir sa réglementation concernant l’attribution des fréquences, y compris les règles relatives aux appels d’offres pour l’octroi de licences, afin que ces règles respectent les principes de transparence et d’équité ; et 3) d’offrir aux auteurs une juste indemnisation pour les violations subies.
Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond
4.1Dans ses observations en date du 23 janvier 2013 et du 23 avril 2014, l’État partie dit que la plainte des auteurs est manifestement mal fondée puisque le CNRT a annoncé les appels d’offres conformément à la législation en vigueur et que les auteurs avaient la possibilité d’y participer. Le 23 novembre 2010, le CNRT a lancé un appel d’offres − ouvert du 25 novembre au 25 décembre 2010 − pour une nouvelle station de radio destinée à émettre à Bakou et dans la péninsule d’Apchéron. Trois candidatures ont été déposées et, le 18 janvier 2011, les candidats ont été conviés à une réunion avec le CNRT au cours de laquelle leurs capacités éditoriales et techniques et leur créativité ont été évaluées. À l’issue de cette évaluation, le CNRT a décidé d’octroyer la licence de radiodiffusion à la société Golden Prince LLC. Les autres candidats ont formé un recours en justice contre cette décision et ont été déboutés. L’appel d’offres a été mené dans le respect du droit et de manière objective. Les auteurs ayant eu les mêmes possibilités de participer à l’appel d’offres que les autres participants, il n’y a pas eu de violation de leurs droits. De plus, les renseignements concernant l’appel d’offres et la fréquence radio disponible ont été communiqués aux auteurs et annoncés publiquement. Enfin, la législation en vigueur n’empêche pas les auteurs de faire à nouveau acte de candidature à l’avenir. L’immixtion dans l’exercice du droit des auteurs à la liberté d’expression était par conséquent conforme à la loi et entrait dans le cadre de la marge d’appréciation laissée à l’État en matière de protection de l’ordre public. Elle poursuivait deux des objectifs visés au paragraphe 3 de l’article 19, à savoir la préservation de l’ordre public dans les télécommunications et la protection du droit d’autrui, puisqu’elle avait pour finalité d’assurer le pluralisme de l’information en permettant une répartition équitable des fréquences.
4.2L’État partie relève que, dans la plainte dont ils ont saisi le tribunal de district, les auteurs faisaient valoir que le CNRT n’avait pas lancé un appel d’offres mais que dans leurs recours ultérieurs il n’était question que du fait qu’ils n’avaient pas remporté l’appel d’offres de novembre 2010. Les auteurs avaient demandé à la juridiction de première instance d’ordonner que les autorités compétentes attribuent à leur société une fréquence alors qu’ils ne possédaient pas de licence de diffusion. Le tribunal avait, à raison, estimé que les auteurs devaient répondre à un appel d’offres en vue d’obtenir une licence. Par conséquent, les griefs soulevés par les auteurs au titre de l’article 14 sont manifestement mal fondés.
4.3L’État partie affirme également que les auteurs ne peuvent pas se dire victimes de violation des droits consacrés par le Pacte étant donné qu’ils ont dissimulé leur participation à l’appel d’offres organisé en novembre 2010 aux fins de l’attribution d’une licence de radiodiffusion. Leur plainte constitue en conséquence un abus du droit de présenter une communication et devrait être déclarée irrecevable au regard de l’article 3 du Protocole facultatif.
4.4En ce qui concerne les griefs que les auteurs tirent du paragraphe 1 de l’article 14 du Pacte, l’État partie relève que les juridictions nationales n’ont pas considéré que la réponse faite par le CNRT aux auteurs revenait à rejeter une demande de licence et qu’elles ont conclu à l’absence de violation des droits des auteurs.
Commentaires des auteurs sur les observations de l’État partie
5.1Dans leurs commentaires en date du 1er mars 2013 et du 30 juin 2014, les auteurs affirment que l’État partie n’a pas répondu à leurs griefs. L’État partie fait référence à un appel d’offres organisé en novembre 2010 alors que la plainte des auteurs porte sur la demande de licence de radiodiffusion qu’ils ont présentée le 19 mai 2010 et que le CNRT a rejetée dans une lettre datée du 25 mai 2010, ainsi que sur le manquement du CNRT à l’obligation d’organiser régulièrement des appels d’offres, dans des conditions d’équité, pour l’attribution de licences de diffusion.
5.2Les auteurs contestent l’argument de l’État partie selon lequel le CNRT a agi dans le respect du droit et réaffirment qu’en vertu de la loi azerbaïdjanaise sur la diffusion radiophonique et audiovisuelle, le CNRT avait l’obligation de publier une liste des fréquences disponibles au moins une fois par an et d’organiser des appels d’offres. Le CNRT a ouvert, en novembre 2010, un appel d’offres pour l’attribution d’une seule fréquence, mais il n’a jamais été publié de liste de toutes les fréquences disponibles, bien que la loi l’exige.
5.3Les auteurs soulignent que, depuis qu’ils ont soumis leur communication au Comité, le CNRT n’a organisé qu’un seul appel d’offres pour une fréquence radio couvrant le territoire à l’extérieur de Bakou et Nakchivan, appel d’offres qui a suscité des critiques de la part de la société civile parce que la licence a été accordée à un candidat progouvernement. En outre, des licences ont été octroyées depuis, sans mise en concurrence, à une chaîne de télévision ayant des liens avec l’État, en 2011, et à une radio liée à l’État, en 2012. Les auteurs ajoutent que la dégradation de la situation des médias préoccupe les organisations nationales et internationales.
5.4Les auteurs relèvent également que l’État partie se contente de dire qu’un appel d’offres a été lancé en novembre 2010 sans indiquer si d’autres ont été organisés ni démontrer que ces appels d’offres étaient ouverts et équitables et donnaient aux diffuseurs indépendants une vraie chance d’obtenir une licence. Ainsi, l’État partie n’a pas contesté l’affirmation des auteurs selon laquelle le refus du CNRT d’organiser des appels d’offres constituait une violation de l’article 19. En outre, l’État partie n’a pas démontré en quoi le refus d’accorder une licence aux auteurs pouvait avoir pour but de « préserver l’ordre public dans les télécommunications ». Les auteurs acceptent le fait qu’une licence soit nécessaire pour émettre. Cependant, il ne découle pas de l’arrêt rendu dans l’affaire Groppera Radio AG et autres c. Suisse, invoqué par l’État partie, que les mesures touchant les licences n’auraient pas à répondre aux critères applicables aux restrictions autorisées du droit à la liberté d’expression, à savoir être fixées par la loi et être nécessaires dans une société démocratique. L’État partie n’a pas démontré qu’il répondait à ces exigences.
5.5Les auteurs signalent qu’ils n’ont pas dissimulé au Comité l’appel d’offres de novembre 2010 mais en ont au contraire fait état dans leur communication initiale. Ils ajoutent que seul M. Jafarov a répondu à l’appel d’offres, et qu’il n’a pas obtenu de licence, ce qui ne fait que donner plus de poids à l’argument selon lequel les diffuseurs n’étant pas d’obédience gouvernementale n’ont pas autant de chances d’obtenir une licence que les autres candidats. L’argument que le Comité doit examiner est toutefois que l’État partie n’a pas lancé régulièrement des appels d’offres équitables et ouverts aux fins de l’attribution de fréquences radio disponibles et qu’il a rejeté la demande de fréquence déposée par les auteurs en mai 2010.
5.6Enfin, les auteurs contestent l’affirmation de l’État partie selon laquelle les griefs formulés en appel et en cassation n’auraient pas la même portée que ceux formulés en première instance, et affirment avoir présenté devant les trois juridictions des arguments identiques, comme il ressort des décisions rendues.
Délibérations du Comité
Examen de la recevabilité
6.1Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
6.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.
6.3Le Comité note que les griefs dont il est saisi ont été portés devant les juridictions nationales, jusqu’à la Cour suprême. Il relève également l’argument de l’État partie selon lequel dans les procédures en appel et en cassation, il n’était question que du fait que les auteurs n’avaient pas remporté l’appel d’offres de novembre 2010, et pas du manquement à l’obligation de lancer des appels d’offres. Cependant, le Comité constate que les auteurs ont soulevé l’ensemble de leurs griefs devant toutes les instances judiciaires de l’État partie et que les décisions de justice qui ont été rendues en attestent. Le Comité estime par conséquent que tous les recours internes ont été épuisés comme l’exige le paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif.
6.4Le Comité prend note de l’argument de l’État partie qui affirme que la plainte constitue un abus du droit de présenter une communication parce que les auteurs ont dissimulé leur réponse à l’appel d’offres de novembre 2010. Il fait néanmoins observer que les auteurs ont fourni cette information dans les lettres qu’ils ont adressées au Comité, et ne considère donc pas que la plainte constitue un abus du droit de présenter une communication.
6.5Le Comité prend note également de l’argument de l’État partie qui juge manifestement mal fondé le grief des auteurs relatif au rejet de leur demande de licence en mai 2010, faisant valoir qu’un appel d’offres en vue de l’attribution d’une licence de radiodiffusion a été lancé en novembre 2010 à Bakou et dans la péninsule d’Apchéron et que les auteurs ont eu la possibilité d’y répondre dans des conditions d’égalité avec les autres candidats. Le Comité prend note à cet égard de l’allégation des auteurs selon laquelle tous les appels d’offres lancés par l’État partie ont été critiqués par la société civile pour leur manque d’équité et de transparence. Il prend note toutefois de la réponse de l’État partie à ce sujet, à savoir que l’appel d’offres de novembre 2010 a été conduit dans le respect du droit et de manière objective, et que les juridictions nationales ont examiné, et rejeté, les arguments des auteurs contestant les résultats de ce concours. Le Comité estime que les auteurs n’ont pas réfuté l’argument de l’État partie selon lequel la demande de fréquence radio qu’ils avaient déposée en mai 2010 avait été rejetée pour une bonne raison, à savoir que l’État partie avait l’intention de publier un appel d’offres, ce qu’il a fait peu de temps après. En outre, les auteurs n’ont pas non plus relevé, dans la procédure d’appel d’offres de novembre 2010, de vices de forme ou de fond qui l’auraient rendue inéquitable ou l’auraient privée de transparence. Le Comité rappelle à ce sujet que c’est généralement aux juridictions nationales, et non à lui, qu’il appartient d’apprécier les faits et les éléments de preuve dans une affaire donnée, ou de revoir l’interprétation de la législation nationale, sauf s’il peut être établi que les décisions des tribunaux ont été manifestement arbitraires ou ont représenté un déni de justice. Les juridictions nationales de l’État partie ayant examiné les griefs relatifs à l’appel d’offres de novembre 2010 et les ayant rejetés, et le Comité n’ayant pas été saisi d’informations qui jetteraient le doute sur ces décisions judiciaires ou la procédure les ayant précédées, le Comité juge cette partie de la communication irrecevable au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.
6.6Le Comité estime en revanche que les auteurs ont suffisamment étayé les autres griefs de violation de leur droit à la liberté d’expression, garanti par l’article 19 du Pacte, en ce qui concerne l’absence d’appel d’offres réguliers aux fins de l’attribution des fréquences disponibles ainsi que l’attribution de certaines fréquences sans mise en concurrence. Le Comité prend note des arguments que l’État partie a avancés à cet égard, mais il considère que ces arguments ne sont pas intimement liés au fond de l’affaire. En conséquence, le Comité déclare que les griefs formulés par les auteurs au titre de l’article19 sont recevables.
6.7Pour ce qui est de la violation présumée du droit que les auteurs tiennent du paragraphe 1 de l’article 14, liée au fait que les juridictions nationales n’ont pas examiné tous leurs motifs de plainte et n’ont pas motivé leurs décisions, le Comité estime que ce grief est intimement lié aux griefs soulevés au titre de l’article 19 du Pacte.
6.8Au vu de ce qui précède, le Comité déclare la communication recevable en ce qu’elle paraît soulever des questions au regard de l’article 19 et du paragraphe 1 de l’article 14 du Pacte, et il procède à son examen quant au fond.
Examen au fond
7.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations que lui ont communiquées les parties.
7.2Le Comité prend note du grief des auteurs selon lequel, en n’organisant pas régulièrement des appels d’offres ouverts et équitables aux fins de l’attribution de licences de radiodiffusion, l’État partie a violé le droit à la liberté d’expression qu’ils tiennent de l’article 19 du Pacte. Il note également que les auteurs ont affirmé que depuis la création du CNRT en 2003, cette institution n’a jamais publié de liste des fréquences radio disponibles, bien que la loi lui fasse obligation de publier une telle liste au moins une fois par an, et que durant cette période de treize ans, trois appels d’offres seulement ont été organisés aux fins de l’attribution d’une licence de radiodiffusion, en dépit de l’existence d’au moins 11 fréquences vacantes. Enfin, le Comité note que les auteurs ont affirmé que des licences de radiodiffusion avaient à plusieurs reprises été attribuées directement par le CNRT, sans mise en concurrence, à des entités ayant des liens avec le Gouvernement. Le Comité constate que l’État partie n’a contesté aucune de ces allégations et n’a pas non plus expliqué pour quelles raisons il n’organisait pas régulièrement des appels d’offres ouverts aux fins de l’attribution de licences alors qu’au fil des années, des fréquences devenaient disponibles.
7.3Dans ces circonstances, le Comité considère que le fait que l’État partie n’ait pas publié la liste des fréquences de radiodiffusion disponibles comme l’exige la loi ni organisé, à intervalles réguliers, d’appels d’offres ouverts aux fins de l’attribution de plusieurs licences a de fait empêché les auteurs d’obtenir des licences de diffusion radiophonique, et que l’État partie a donc manqué à l’obligation qui lui incombait de garantir le droit à la liberté d’expression énoncé au paragraphe 2 de l’article 19, y compris la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce. Le Comité rappelle à cet égard son observation générale no 34 (2011) relative à la liberté d’opinion et la liberté d’expression, dans laquelle il est dit que « [l]’existence d’une presse et d’autres moyens d’information libres, sans censure et sans entraves est essentielle dans toute société pour garantir la liberté d’opinion et d’expression et l’exercice d’autres droits consacrés par le Pacte. Elle constitue l’une des pierres angulaires d’une société démocratique » ; et qu’« [a]fin de protéger le droit des usagers des médias (…) de recevoir une grande variété d’informations et d’idées, les États devraient veiller tout particulièrement à encourager l’existence de médias indépendants et diversifiés ».
7.4Le Comité doit à présent déterminer si la restriction du droit des auteurs à la liberté d’expression était justifiée par le paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte. Il rappelle que le paragraphe 3 de l’article 19 autorise certaines restrictions à l’exercice du droit à la liberté d’expression, qui doivent toutefois être expressément fixées par la loi et être nécessaires : a) au respect des droits ou de la réputation d’autrui ; ou b) à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé ou de la moralité publiques. Le Comité rappelle que toute restriction imposée à l’exercice de ces libertés doit répondre aux critères stricts de nécessité et de proportionnalité. Les restrictions doivent être appliquées exclusivement aux fins pour lesquelles elles ont été prescrites et doivent être en rapport direct avec l’objectif spécifique qui les inspire. Le Comité rappelle également qu’il incombe à l’État partie de « démontrer de manière spécifique la nature précise de la menace qui pèse sur l’un quelconque des éléments énoncés au paragraphe 3 de l’article 19, et qui l’a conduit à restreindre la liberté d’expression ». Les États parties doivent éviter, en particulier, d’imposer aux médias audiovisuels des conditions d’octroi de licence trop rigoureuses et des droits de licence excessifs, et les critères d’application de ces conditions et droits de licence doivent être raisonnables et objectifs, précis, transparents et non discriminatoires, et être à tous autres égards conformes au Pacte. Le fait de réprimer un média ou un journaliste uniquement parce qu’il a critiqué le Gouvernement ou le système sociopolitique mis en place par celui-ci ne saurait en aucun cas être considéré comme une restriction nécessaire à la liberté d’expression.
7.5En l’espèce, l’État partie a fait valoir que l’immixtion dans l’exercice du droit des auteurs à la liberté d’expression était conforme à la loi et nécessaire à la préservation de l’ordre public dans les télécommunications et à la protection des droits d’autrui, car elle avait pour but de garantir le pluralisme de l’information. Le Comité tient compte des arguments avancés par l’État partie quant à la nécessité de réglementer les conditions d’octroi des licences, mais constate que l’État partie n’a pas expliqué de manière satisfaisante pourquoi il n’avait pas publié la liste des fréquences radio disponibles comme l’exigeait la loi, ni comment l’objectif consistant à garantir le pluralisme dans la diffusion radiophonique de l’information était atteint sans que des appels d’offres aient lieu régulièrement aux fins de l’attribution des fréquences radio. L’État partie n’a pas non plus expliqué comment il pouvait concilier les objectifs de pluralisme et de diversité avec la pratique consistant à allouer des fréquences de diffusion, sans mise en concurrence, à des entités ayant apparemment des liens avec le Gouvernement.
7.6En conséquence, le Comité conclut que l’État partie n’a pas démontré que la restriction du droit des auteurs à la liberté d’expression résultant de l’absence d’appel d’offres réguliers et du manque de transparence lié à l’attribution de licences sans mise en concurrence était légitime au regard des exceptions visées au paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte. Le Comité conclut donc que les restrictions imposées à l’accès des auteurs à une fréquence radio étaient arbitraires et ont constitué une violation des droits qu’ils tiennent du paragraphe 2 de l’article 19 du Pacte.
7.7Ayant constaté une violation de l’article 19 du Pacte, le Comité décide de ne pas examiner séparément le grief de violation du paragraphe 1 de l’article 14.
8.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation du paragraphe 2 de l’article 19 du Pacte.
9.Conformément au paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer aux auteurs un recours utile. Il a l’obligation d’accorder pleine réparation aux individus dont les droits protégés par le Pacte ont été violés. L’État partie est également tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas et de réviser ses lois sur la diffusion radiophonique et télévisuelle afin que des licences de radiodiffusion rattachées à des fréquences radios disponibles soient effectivement octroyées selon des procédures précises et transparentes prévoyant l’organisation régulière d’appels d’offres ouverts, assortis de critères d’évaluation des candidats non discriminatoires, dans le but de promouvoir le pluralisme des médias dans l’État partie.
10.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité a compétence pour déterminer s’il y a ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et une réparation exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations. L’État partie est invité en outre à rendre celles-ci publiques, à les faire traduire dans sa langue officielle et à les diffuser largement.
Annexe
[Original :espagnol]
Opinion individuelle (concordante) de M. Fabián Salvioli
1.J’approuve les constatations du Comité concernant l’affaire Agazade c. Azerbaïdjan (communication no 2205/2012), selon lesquelles les faits font apparaître une violation du paragraphe 2 de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques à l’égard de Yashar Agazade et de Rasul Jafarov.
2.J’approuve également les réparations demandées, et j’apprécie en particulier que le Comité ait exposé en détail la garantie de non-répétition demandée à l’État partie ; en l’espèce, l’État partie est tenu de de réviser ses lois sur la diffusion radiophonique et télévisuelle afin que des licences de radiodiffusion rattachées à des fréquences radios disponibles soient effectivement octroyées selon des procédures précises et transparentes prévoyant l’organisation régulière d’appels d’offres ouverts, assortis de critères d’évaluation des candidats non discriminatoires, dans le but de promouvoir le pluralisme des médias dans l’État partie. La définition précise des mesures demandées à titre de garanties de non-répétition permet à l’État partie de savoir exactement comment mettre en œuvre les constatations du Comité, et au Comité lui-même de disposer de critères plus clairs pour évaluer cette mise en œuvre dans le cadre de la procédure de suivi conduite par le Rapporteur spécial.
3.Cependant, j’estime que le Comité aurait dû prévoir parmi les réparations à accorder aux victimes le versement d’une indemnisation suffisante pour la violation de leurs droits. Cette réparation pécuniaire servirait principalement à compenser les frais que les auteurs ont supportés tout au long de la procédure conduite devant les juridictions nationales.