Nations Unies

CCPR/C/111/D/1956/2010

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

15 octobre 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ homme

Communication no 1956/2010

Constatations adoptées par le Comité à sa 111e session(7-25 juillet 2014)

Communication présentée par:

Nevzeta Durić et Nedzad Durić(représentés par un conseil, Track Impunity Always − TRIAL)

Au nom de:

Les auteurs et leur proche disparu,Ibrahim Durić

État partie:

Bosnie-Herzégovine

Date de la communication:

11 janvier 2010(date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application des articles 92 et 97 du règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 24 juin 2010(non publiée sous forme de document)

Date des constatations:

16 juillet 2014

Objet:

Disparition forcée et recours utile

Question(s) de fond:

Droit à la vie; interdiction de la torture et autres mauvais traitements; liberté et sécurité de la personne; droit d’être traité avec humanité et dignité; reconnaissance de la personnalité juridique; droit à un recours utile

Question(s) de procédure:

-

Article(s) du Pacte:

6, 9, 10 et 16 lus conjointement avec l’article 2 (par.3); 7 lu séparément et conjointement avec l’article 2 (par. 3)

Article(s) du Protocole facultatif:

-

Annexe

Constatations du Comité des droits de l’homme au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (111e session)

concernant la

Communication no 1956/2010 *

Présentée par:

Nevzeta Durić et Nedzad Durić (représentés par un conseil, Track Impunity Always − TRIAL)

Au nom de:

Les auteurs et leur proche disparu, Ibrahim Durić

État partie:

Bosnie-Herzégovine

Date de la communication:

11 janvier 2010 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l ’ homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 16 juillet 2014,

Ayant achevé l’examen de la communication no 1956/2010, présentée au nom de Nevzeta Durić et de Nedzad Durić en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par les auteurs de la communication et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif

1.Les auteurs de la communication sont Nevzeta Durić et Nedzad Durić (ci‑après «les auteurs»), citoyens de Bosnie-Herzégovine nés respectivement le 13 septembre 1947 et le 6 septembre 1967. Ils présentent la communication en leur nom et au nom d’Ibrahim Durić (fils de Nevzeta Durić et frère de Nedzad Durić), citoyen de Bosnie-Herzégovine né le 1er septembre 1966. Les auteurs se disent victimes d’une violation de l’article 7 lu séparément et conjointement avec l’article 2 (par. 3) du Pacte. Ils affirment également au nom d’Ibrahim Durić que celui-ci a été victime d’une violation des droits consacrés aux articles 6, 7, 9, 10 et 16 lus conjointement avec l’article 2 (par. 3) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Les auteurs sont représentés par l’organisation Track Impunity Always-TRIAL.

Rappel des faits présentés par les auteurs

2.1Les faits se sont déroulés pendant le conflit armé qui a suivi la déclaration d’indépendance de la Bosnie-Herzégovine. Depuis le début du conflit, Ibrahim Durić vivait à Dobrinja, quartier de la banlieue de Sarajevo situé face à l’aéroport. Au moment des faits décrits ci-après, Dobrinja était la cible permanente d’attaques et de bombardements massifs par la Vojska Republike Srpske. Il n’y avait pas d’hôpital dans cette zone. Chaque fois que les habitants voulaient quitter Dobrinja pour se rendre dans d’autres quartiers de la ville, ils devaient passer par les points de contrôle mis en place par la Vojska Republike Srpske.

2.2Ibrahim Durić, qui était serrurier, avait été enrôlé dans l’armée bosnienne au début du conflit. Le 14 mai 1992, il circulait dans une camionnette avec un ami, Želimir Vidovic, en tant que civil afin de conduire un voisin blessé à l’hôpital de Sarajevo. Sur le chemin de Sarajevo, ils ont été arrêtés et interrogés par des membres de la Vojska Republike Srpske à un point de contrôle situé dans la rue Kasindolska, à Dobrinja. Après avoir indiqué où ils allaient, ils ont été autorisés à passer. Ils ont cependant été arrêtés et interrogés une nouvelle fois sur le chemin du retour. C’est la dernière fois qu’Ibrahim Durić et M. Vidovic ont été vus en vie.

2.3M. Vidovic, dont la femme était Serbe, était un célèbre joueur de football. Lorsqu’il a disparu avec Ibrahim Durić, sa femme a immédiatement cherché à utiliser tous ses contacts pour savoir ce qui leur était arrivé et où ils se trouvaient. Le jour de leur disparition, elle a appris qu’ils avaient tous deux été conduits à la caserne de l’Armée nationale yougoslave (Jugoslavenska Narodna Armija) aux environs de Nedzarici, près du point de contrôle de la rue Kasindolska, pour y être interrogés. Dans les jours qui ont suivi, la femme de M. Vidovic a entendu dire que son mari et l’ami de ce dernier avaient été arbitrairement tués, mais elle n’a reçu aucune information officielle de la part des autorités locales. Après la guerre, la dépouille de M. Vidovic a été retrouvée à IIidza, un autre quartier de la banlieue de Sarajevo contrôlé par la Vojska Republike Srpskependant le conflit. Le sort d’Ibrahim Durić reste inconnu.

2.4Au moment de la disparition forcée d’Ibrahim Durić, les auteurs et Nazif Durić, le père d’Ibrahim Durić, étaient détenus dans différents camps de concentration à la suite de leur arrestation, le 4 mai 1992, par des membres de la Vojska Republike Srpske. Le 13 mai 1992, des femmes (dont Nevzeta Durić) et des jeunes (dont Nedzad Durić) ont été autorisés à quitter le camp avec l’aide de la Croix-Rouge locale de Visoko. Plus tard dans le mois, Nazif Durić s’est échappé du camp dans lequel il était détenu et a réussi à retrouver Nevzeta Durić et Nedzad Durić. En juin 1992, ils ont déménagé à Breza, le village le plus proche du camp. Sur place, ils ont appris la disparition d’Ibrahim Durić. Nedzad Durić a signalé la disparition forcée de son frère au bureau de la Croix-Rouge locale de Sarajevo sans tarder. Le 27 novembre 2002, Nevzeta Durić a obtenu de la Commission d’État chargée de retrouver la trace des personnes disparues un certificat attestant qu’Ibrahim Durić était enregistré comme porté disparu depuis le 14 mai 1992. Le 9 décembre 2002, le Comité international de la Croix-Rouge a délivré un autre certificat attestant qu’Ibrahim Durić avait été enregistré comme porté disparu et que des recherches avaient débuté.

2.5Le 24 septembre 2003, Nevzeta Durić a obtenu du tribunal municipal de Sarajevo une décision attestant du décès d’Ibrahim Durić. Selon cette décision, Ibrahim Durić est officiellement décédé le 17 mai 1992 à Ilidza. Le tribunal n’a donné aucune explication quant à la manière dont il avait déterminé la date et le lieu du décès d’Ibrahim Durić, et le sort de ce dernier et le lieu où il se trouve ne sont toujours pas connus. La famille d’Ibrahim Durić avait besoin de la déclaration de décès pour avoir droit à une «pension d’invalidité» conformément à la loi relative aux droits des soldats démobilisés et de leur famille. Nazif Durić a également obtenu un certificat attestant qu’Ibrahim Durić faisait partie de l’armée bosnienne, bien que celui-ci ait été arrêté et ait disparu en tant que civil. Le 11 janvier 2004, le Bureau pour la protection des soldats invalides de la municipalité de Vogošća a rendu une décision dans laquelle il reconnaissait le droit qu’avait Nevzeta Durić de recevoir une pension mensuelle d’un montant de 315,62 marks convertibles. Cette pension, qui constitue une forme de prestation sociale, ne saurait donc être considérée comme une mesure de réparation adéquate pour les violations subies.

2.6Le 26 juillet 2005, Nevzeta Durić et d’autres membres de l’Association des familles de personnes disparues de Vogošća ont soumis une requête à la Commission des droits de l’homme de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine. Le 23 février 2006, la Cour constitutionnelle a rendu une décision concluant que les requérants dans cette requête collective étaient dispensés de l’obligation d’épuiser les recours internes devant les tribunaux ordinaires étant donné qu’aucune institution spécialisée dans les disparitions forcées en Bosnie-Herzégovine ne semblait fonctionner de manière efficace. La Cour a en outre conclu qu’il y avait eu violation des articles 3 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Convention européenne des droits de l’homme) du fait de l’absence d’informations sur le sort d’Ibrahim Durić. La Cour a ordonné aux autorités gouvernementales compétentes de fournir aux familles toutes les informations disponibles concernant Ibrahim Durić, de veiller au bon fonctionnement des institutions créées conformément à la loi relative aux personnes disparues, et de l’informer des mesures prises pour appliquer sa décision. La Cour n’a pas adopté de décision sur la question de l’indemnisation, considérant que celle-ci était couverte par les dispositions de la loi relative aux personnes disparues concernant le «soutien financier» et par la mise en place du Fonds de soutien aux familles de personnes disparues. Les auteurs regrettent que les dispositions relatives au soutien financier auxquelles il est fait référence n’aient pas été appliquées et que le fonds n’ait toujours pas été créé.

2.7Le délai fixé dans la décision de la Cour constitutionnelle a expiré sans que les institutions compétentes ne fournissent d’informations pertinentes au sujet des personnes disparues ni ne soumettent d’informations à la Cour quant aux mesures prises pour appliquer sa décision. Le 18 novembre 2006, la Cour constitutionnelle de Bosnie‑Herzégovine a rendu une décision en vertu de l’article 63.6 de son Règlement intérieur, dans laquelle elle a déclaré que les institutions compétentes n’avaient pas appliqué sa décision du 23 février 2006. Cette décision est définitive et contraignante et aurait dû être transmise au Bureau du Procureur, qui est chargé d’engager des poursuites contre ceux qui ne respectent pas les décisions de la Cour constitutionnelle. À la connaissance des auteurs, le Bureau du Procureur n’a pas pris de mesures à cette fin. Ces dix-sept dernières années, Nevzeta Durić n’a eu de cesse de présenter des requêtes au sujet de son fils auprès des différentes autorités officielles. En dépit de ses tentatives, Nevzeta Durić et son fils, Nedzac Durić, n’ont jamais obtenu d’informations plausibles quant au sort d’Ibrahim Durić après le 14 mai 1992. Les auteurs affirment n’avoir aucun autre recours utile à épuiser. Le silence et l’indifférence des autorités face au souci des auteurs de connaître le sort d’Ibrahim Durić ont généré chez ces derniers un profond sentiment de frustration et de découragement.

Teneur de la plainte

3.1Concernant l’épuisement des recours internes, les auteurs affirment que, pour ne pas créer de confusion ou de chevauchement, Nedzad Durić et sa mère ont décidé que cette dernière serait la seule à représenter la famille et à déposer officiellement des plaintes auprès des autorités compétentes. Néanmoins, Nedzad Durić a activement contribué à toutes les activités de recherche et au dépôt des plaintes. Les auteurs se réfèrent en outre aux conclusions de la Cour constitutionnelle, qui a affirmé qu’actuellement «s’adresser aux tribunaux ordinaires ne donnerait aucun résultat» et qu’aucune institution chargée des personnes disparues ne fonctionnait efficacement.La décision adoptée par la Cour constitutionnelle en date du 18 décembre 2006 concernant la non-exécution de la décision du 23 février 2006 par les autorités de la Bosnie-Herzégovine est définitive et contraignante. Les auteurs n’ont donc plus aucun recours utile à épuiser.

3.2Concernant la recevabilité de la communication ratione temporis, les auteurs font valoir que, bien que les événements se soient produits avant l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’État partie, les disparitions forcées sont en elles‑mêmes une violation continue de plusieurs droits de l’homme. En l’espèce, les auteurs font référence: a) à l’absence d’information sur les causes et les circonstances de la disparition d’Ibrahim Durić; b) au fait que les autorités nationales n’ont pas procédé d’office à une enquête diligente, impartiale, approfondie et indépendante sur son arrestation arbitraire et sur sa disparition forcée; c) au fait que les responsables n’ont pas été identifiés, poursuivis et punis; et d) au fait qu’aucun recours utile n’a été offert à Ibrahim Durić et à sa famille. Les auteurs considèrent que ces violations ont perduré après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif et qu’elles constituent une violation des articles 6, 7, 9, 10 et 16 lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte.

3.3Les auteurs affirment qu’Ibrahim Durić a été détenu de manière arbitraire et illégale par des agents de l’État le 14 mai 1992 et qu’il demeure introuvable. Ils rappellent que la disparition forcée d’Ibrahim Durić a eu lieu alors que des attaques généralisées et systématiques étaient commises contre la population civile, et qu’elle constitue donc un crime contre l’humanité, engageant la responsabilité aggravée de l’État. Les auteurs affirment également qu’Ibrahim Durić a été vu en vie pour la dernière fois le 14 mai 1992 alors qu’il se trouvait en danger, entre les mains d’agents de l’État, ce qui amène à la conclusion qu’il a été exposé à de graves risques de préjudices irréparables à son intégrité personnelle et à sa vie. Les auteurs estiment qu’il est important de noter que la dépouille de Želimir Vidović, qui a été privé de liberté au même moment qu’Ibrahim Durić, a été retrouvée à Ilidza alors que le sort d’Ibrahim Durić demeure inconnu. Les auteurs font valoir que l’État partie a manqué à son devoir de prendre les mesures qui s’imposaient pour protéger la vie d’une personne, ce qui constitue une violation de l’article 6 lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte.

3.4S’agissant du grief de violation de l’article 9 du Pacte, les auteurs considèrent que bien qu’un témoignage fasse état de la présence d’Ibrahim Durić dans une caserne de la Jugoslavenska Narodna Armija située dans la banlieue de Nedzarici, sa détention n’est mentionnée dans aucun registre officiel. Ibrahim Durić n’a jamais été présenté à un juge et n’a jamais pu contester la légalité de sa privation de liberté. Les auteurs estiment en outre que l’État partie a le devoir de faire la lumière sur le sort d’Ibrahim Durić. Ils affirment que la gravité particulière du crime de disparition forcée et le fait que ce crime porte atteinte à de multiples droits amènent à conclure que «l’interdiction des disparitions forcées et l’obligation connexe de mener une enquête et de punir les responsables font désormais partie du jus cogens». Malgré les différentes requêtes des auteurs, aucune explication n’a été apportée par l’État partie et aucun effort n’a été fait pour enquêter sur la détention arbitraire et illégale d’Ibrahim Durić, sa disparition forcée et le sort qui lui a été réservé. Les auteurs considèrent par conséquent qu’il y a violation par l’État partie de l’article 9 lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte.

3.5Les auteurs estiment que la disparition forcée d’Ibrahim Durić constitue également un traitement contraire à l’article 7 lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte. À cet égard, ils renvoient à la jurisprudence du Comité, qui estime que «la disparition de personnes est inséparablement liée à un traitement qui équivaut à une violation de l’article 7», et que le degré de souffrance qu’implique une détention sans contact avec le monde extérieur pendant une durée indéfinie équivaut à de la torture. En outre, l’État partie a l’obligation d’enquêter sur toutes les allégations de torture et de faire en sorte que les responsables soient traduits en justice.

3.6Les auteurs font également valoir qu’il y a eu violation de l’article 10 lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte, dans la mesure où la situation décrite correspond à un cas de disparition forcée dans lequel Ibrahim Durić n’a pas eu la possibilité de communiquer avec le monde extérieur.

3.7De plus, les auteurs estiment que la disparition forcée d’Ibrahim Durić a eu pour effet de suspendre la jouissance de tous les autres droits fondamentaux qui étaient les siens, ce qui l’a réduit à un état d’impuissance absolue. Ils affirment en outre que les efforts qu’ils ont déployés pour pouvoir engager des recours éventuels ont été entravés. Ils renvoient à la jurisprudence du Comité, selon laquelle le fait que les autorités n’aient pas ouvert d’enquête revient à soustraire la personne disparue à la protection de la loi, ce qui est contraire à l’article 16 lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte.

3.8Les auteurs affirment en outre être eux-mêmes victimes d’une violation, par la Bosnie-Herzégovine, de l’article 7 lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte compte tenu de la vive souffrance morale et de l’angoisse profonde que leur ont causées: a) la disparition d’Ibrahim Durić; b) l’obligation de déclarer son décès pour avoir droit à une pension; c) l’incertitude persistante concernant son sort et l’endroit où il se trouve; d) l’absence d’enquête et d’accès à un recours utile; et e) le climat d’impunité qui entoure l’affaire relative à Ibrahim Durić. Les auteurs renvoient à la jurisprudence du Comité, selon laquelle l’angoisse et la détresse causées aux proches par la disparition forcée d’un être cher et par les incertitudes qui persistent quant au sort de la personne disparue et au lieu où elle se trouve constituent une violation de l’article 7 du Pacte.

Observations de l’État partie

4.1L’État partie a soumis ses observations le 12 avril 2011. Il fait référence au cadre juridique mis en place en vue de poursuivre les auteurs de crimes de guerre à la fin de la guerre, c’est-à-dire à partir de décembre 1995. Il déclare qu’il a adopté, en décembre 2008, une stratégie nationale de mise en accusation des auteurs de crimes de guerre dans le but de juger une fois pour toutes les auteurs des crimes de guerre les plus complexes dans un délai de sept ans et les auteurs des «autres crimes de guerre» dans un délai de quinze ans à compter de l’adoption de la stratégie. L’État partie fait en outre référence à l’adoption de la loi de 2004 relative aux personnes disparues portant création de l’Institut des personnes disparues et rappelle que sur près de 32 000 personnes portées disparues pendant la guerre, les restes de 23 000 personnes ont été retrouvés, dont 21 000 ont été identifiés.

4.2Dans ses observations, l’État partie fait valoir qu’un bureau régional a été créé à Istočno, Sarajevo, et qu’un bureau extérieur et ses unités ont été mis en place à Sarajevo. L’État partie considère que ces initiatives créent les conditions propices à des recherches plus rapides et plus efficaces concernant les personnes disparues sur le territoire de Sarajevo. Les enquêteurs se rendent chaque jour sur le terrain pour recueillir des informations sur d’éventuelles fosses communes et pour prendre contact avec des témoins. L’État partie fait savoir en outre que du 23 au 25 mai 2007, les corps de 38 personnes qui avaient disparu le 14 mai 1992 dans la rue Kasindolska ont été exhumés, identifiés et restitués à leur famille. Cependant, bien que l’Institut des personnes disparues dispose d’échantillons de sang de la famille d’Ibrahim Durić, le corps de ce dernier n’a pas été retrouvé.

4.3L’État partie transmet également un rapport du maire de la municipalité de Vogošća, dans lequel ce dernier indique qu’un mémorial a été construit en hommage aux victimes de disparitions forcées, que les autorités municipales n’épargnent aucun effort pour contribuer aux recherches des personnes disparues et qu’il estime que «toutes les institutions compétentes devraient prendre les mesures nécessaires pour localiser, exhumer et identifier les personnes disparues et restituer leur dépouille à leurs proches afin que ceux-ci puissent les enterrer dignement».

Commentaires des auteurs sur les observations de l’État partie

5.1Les auteurs ont soumis leurs commentaires le 12 mai 2011. Ils font référence à l’Observation générale du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires sur la disparition forcée en tant que crime continu. Ils estiment que les observations de l’État partie corroborent le fait qu’Ibrahim Durić reste enregistré en tant que personne disparue «dont on est sans nouvelles» et font savoir qu’aucune information n’a pu être trouvée au moyen de l’outil de recherche en ligne créé par la Commission internationale des personnes disparues. La procédure de recherche reste donc ouverte sous la responsabilité des autorités de la Bosnie-Herzégovine.

5.2Les auteurs considèrent que les observations de l’État partie ne remettent pas en cause leurs griefs et que l’État partie ne mentionne aucune enquête en cours visant à déterminer les responsables, ni aucune mesure prise pour élucider le sort d’Ibrahim Durić et le localiser. Ils font savoir qu’à ce jour, ni eux ni aucun des témoins de l’affaire concernant Ibrahim Durić n’ont été contactés par le bureau régional d’Istočno à Sarajevo ou le bureau extérieur de Sarajevo auxquels l’État partie a fait référence, alors qu’ils pensent qu’ils pourraient fournir à ces autorités des informations susceptibles d’aider à localiser Ibrahim Durić. Les auteurs font valoir en particulier que les autorités compétentes n’ont pas tenu compte du fait que la dépouille de Želimir Vidović a été retrouvée à Ilidža et que celle d’Ibrahim Durić pourrait également s’y trouver. Ils affirment en outre qu’ils devraient participer à tous les stades du processus de localisation, d’exhumation et d’identification de la dépouille d’Ibrahim Durić. Ils considèrent que l’absence persistante d’information sur le sort d’Ibrahim Durić et l’endroit où il se trouve ainsi que sur les progrès réalisés et les résultats obtenus dans le cadre de l’enquête constitue une violation de leur droit de connaître la vérité.

5.3En outre, les auteurs font observer que le fait que les autorités de l’État partie doivent encore enquêter sur un grand nombre de crimes de guerre ne les dispense pas de l’obligation qui leur incombe de mener une enquête diligente, impartiale, indépendante et approfondie sur les violations graves des droits de l’homme et d’informer régulièrement les proches des victimes des progrès enregistrés et des résultats obtenus dans le cadre de ces enquêtes. Depuis 1992, la disparition forcée d’Ibrahim Durić a été signalée auprès de différentes autorités, y compris auprès de la police de Dobrinja. Pourtant, les auteurs n’ont pas été contactés et n’ont pas non plus reçu de réponse des autorités compétentes.

5.4Les auteurs estiment que la stratégie nationale de mise en accusation des auteurs de crimes de guerre n’a pas été appliquée de manière satisfaisante et que l’État partie ne peut pas l’invoquer pour répondre à l’absence d’information sur les progrès faits et les résultats obtenus dans le cadre des enquêtes ou pour justifier l’inaction des autorités compétentes. Les auteurs affirment également que l’adoption d’une stratégie relative à la justice transitionnelle ne saurait remplacer l’accès à la justice et à la réparation pour les victimes de violations graves des droits de l’homme et leurs proches.

Observations complémentaires de l’État partie

6.1De mai à septembre 2011 et les 10 janvier et 25 mai 2012, différentes autorités de l’État partie ont soumis leurs réponses au Comité, répétant les informations fournies et mettant l’accent sur les efforts déployés par l’État partie pour élucider le sort de toutes les personnes disparues et pour les localiser. L’État partie a également fait savoir qu’aucun fait nouveau pertinent n’avait été découvert au sujet d’Ibrahim Durić et qu’aucune information n’était disponible sur les circonstances de sa mort ou de sa disparition.

6.2S’agissant de l’affirmation des auteurs selon laquelle ils n’auraient reçu aucune information à propos de l’état d’avancement de l’affaire concernant Ibrahim Durić, l’État partie fait observer que la base de données centrale recensant toutes les affaires pendantes de crimes de guerre prévue par la stratégie nationale de mise en accusation des auteurs de crimes de guerre est désormais opérationnelle.

6.3Dans ses observations du 10 janvier 2012 et du 25 mai 2012, l’État partie a également indiqué que le nom d’Ibrahim Durić ne figurait pas dans les registres du Département des anciens combattants de la municipalité d’Ilidža et que sa mère, Nevzeta Durić, ne bénéficiait d’aucune forme de prestation sociale. L’État partie affirme en outre que la famille n’a pas entrepris les démarches nécessaires pour signaler sa disparition «afin que le Groupe [chargé de l’enregistrement des conscriptions de la municipalité d’Ilidža] puisse soumettre la requête à l’Institut des personnes disparues et, partant, régler l’affaire concernant Ibrahim Durić».

Nouveaux commentaires des auteurs

7.1Les 24 août, 14 septembre et 3 octobre 2011, les auteurs ont envoyé des commentaires complémentaires dans lesquels ils indiquaient que, dans ses réponses, l’État partie n’apportait aucune information nouvelle au sujet de la disparition forcée d’Ibrahim Durić et qu’il ne répondait pas à un certain nombre de leurs questions. Les auteurs réitèrent donc les commentaires figurant dans leurs précédentes observations.

7.2Les 23 janvier et 7 juin 2012, les auteurs ont envoyé des commentaires complémentaires en réponse aux observations faites par l’État partie les 10 janvier et 25 mai 2012. Les auteurs ont également indiqué que les allégations de l’État partie selon lesquelles ils n’avaient pas entrepris les démarches nécessaires pour signaler la disparition d’Ibrahim Durić et pour obtenir le règlement de l’affaire leur causaient une souffrance supplémentaire et un nouveau traumatisme. Ils réaffirment qu’ils ont inlassablement signalé la disparition forcée d’Ibrahim Durić à de nombreuses reprises. Ils rappellent aussi que sa disparition a été officiellement reconnue et signalée dans les certificats délivrés par la Commission d’État chargée de retrouver la trace des personnes disparues, le Comité international de la Croix-Rouge et la Commission internationale des personnes disparues, ainsi que dans la décision rendue par la Cour constitutionnelle le 23 février 2006. Les auteurs considèrent qu’aucune des lettres soumises par l’État partie ne remet en cause les arguments qu’ils ont avancés concernant la violation persistante de leurs droits et de ceux d’Ibrahim Durić.

7.3Le 9 juillet 2013, les auteurs ont adressé au Comité des observations complémentaires dans lesquelles ils réaffirment que, plus de vingt ans après la disparition forcée d’Ibrahim Durić, aucune enquête n’a été ouverte, la dépouille d’Ibrahim Durić n’a pas été retrouvée et remise à sa famille, et les auteurs de la communication n’ont reçu aucune indemnisation en réparation du préjudice subi. Ils rappellent en outre qu’ils ont été forcés de déclarer le décès d’Ibrahim Durić pour permettre à Nevzeta Durić d’obtenir une pension mensuelle, ce qui leur a causé une souffrance supplémentaire qui, selon eux, équivaut à une violation de l’article 7 lu séparément et conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

8.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

8.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément aux dispositions du paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement et que les auteurs avaient épuisé tous les recours internes disponibles.

8.3Le Comité note que l’État partie n’a pas contesté la recevabilité de la communication et que les griefs des auteurs portant sur des violations des articles 6, 7, 9, 10 et 16 lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte, et de l’article 7 lu séparément, ont été suffisamment étayés aux fins de la recevabilité. Tous les critères de recevabilité ayant été satisfaits, le Comité déclare la communication recevable et procède à son examen au fond.

Examen au fond

9.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations que lui ont communiquées les parties.

9.2Les auteurs affirment qu’Ibrahim Durić a été victime de disparition forcée depuis son arrestation illégale par la Vojska Republike Srpskele 14 mai 1992 et que, malgré leurs multiples efforts, aucune enquête diligente, impartiale, approfondie et indépendante n’a été menée par l’État partie pour élucider le sort de la victime et l’endroit où elle se trouve ni pour traduire les responsables en justice. Le Comité rappelle son Observation générale no 31 (2004) relative à la nature de l’obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, dans laquelle le Comité indique que le fait pour un État partie de ne pas mener d’enquête sur des violations présumées et de ne pas traduire en justice les auteurs de certaines violations (notamment les tortures et les traitements cruels, inhumains ou dégradants analogues, les exécutions sommaires et arbitraires et les disparitions forcées) pourrait en soi donner lieu à une violation distincte du Pacte.

9.3Les auteurs n’affirment pas que l’État partie est directement responsable de la disparition forcée d’Ibrahim Durić. Le Comité fait observer que l’expression «disparition forcée» peut être utilisée au sens large pour désigner, outre les disparitions imputables à un État partie, les disparitions qui sont l’œuvre de forces indépendantes d’un État partie ou hostiles à celui-ci.

9.4Le Comité relève que l’État partie fait valoir que des efforts considérables ont été faits, au niveau général, compte tenu du fait qu’il y a eu plus de 30 000 cas de disparition forcée pendant le conflit. En particulier, la Cour constitutionnelle a établi que les autorités de l’État étaient responsables de l’enquête sur la disparition des proches des auteurs; des mécanismes internes ont été mis en place pour traiter les cas de disparition forcée et autres crimes de guerre et des échantillons d’ADN prélevés sur un certain nombre de corps non identifiés ont été comparés aux échantillons d’ADN des membres de la famille d’Ibrahim Durić, notamment à la suite de l’exhumation conduite du 23 au 25 mai 2007.

9.5Le Comité rappelle sa jurisprudence et réaffirme que l’obligation d’enquêter sur les allégations de disparition forcée et de traduire les auteurs en justice est non pas une obligation de résultat mais une obligation de moyens, et qu’elle doit être interprétée d’une manière qui ne fait peser sur les autorités aucune charge impossible à supporter ou disproportionnée.

9.6Le Comité note néanmoins qu’en l’espèce l’État partie n’a pas fourni d’information, ni aux auteurs ni au Comité, concernant l’état d’avancement de l’enquête sur la disparition d’Ibrahim Durić et les mesures spécifiques prises pour enquêter sur cette disparition et traduire les responsables en justice. Selon les auteurs, rien n’a été fait pour enquêter sur la disparition ou pour donner effet à la décision de la Cour constitutionnelle concernant Ibrahim Durić. Le Comité note également que les auteurs affirment que l’État partie n’a pas sollicité leur assistance ou celle des témoins disponibles. L’État partie fait part d’initiatives pour rechercher les restes d’Ibrahim Durić, mais n’indique pas que des mesures ont été prises pour poursuivre l’enquête par d’autres moyens, par exemple en interrogeant des témoins. Le Comité constate en outre que les informations limitées que la famille a réussi à obtenir au cours des différentes procédures ne lui ont été fournies qu’à sa demande, ou après de très longs délais, fait qui n’a pas été réfuté par l’État partie. Le Comité considère que les autorités qui mènent les enquêtes sur les cas de disparition forcée doivent donner en temps utile aux familles la possibilité de contribuer à l’enquête en communiquant les éléments dont elles ont connaissance, et que l’information concernant l’évolution de l’enquête doit être rendue rapidement accessible aux familles. Compte tenu de toutes les circonstances, le Comité conclut que les faits dont il est saisi font apparaître une violation par l’État partie des articles 6, 7 et 9, lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte à l’égard d’Ibrahim Durić.

9.7Le Comité prend également note de l’angoisse et de la détresse causées aux auteurs par l’incertitude dans laquelle ils sont maintenus du fait de la disparition d’Ibrahim Durić. Pour les raisons énoncées au paragraphe précédent, le Comité conclut que les faits font apparaître une violation de l’article 7 du Pacte, lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte en ce qui concerne les auteurs.

9.8Le Comité note en outre que la prestation sociale versée aux auteurs était subordonnée à l’acceptation par ces derniers de faire déclarer le décès de leur proche disparu, bien qu’il n’y ait aucune certitude quant à son sort et à l’endroit où il se trouve. Le Comité considère qu’obliger les familles de personnes disparues à faire déclarer le décès de leur parent pour pouvoir bénéficier d’une indemnisation alors que l’enquête sur la disparition est en cours subordonne le droit à une indemnisation à une démarche pénible et constitue un traitement inhumain et dégradant, en violation de l’article 7, lu séparément et conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte, en ce qui concerne les auteurs.

9.9Compte tenu de ce qui précède, le Comité n’examinera pas séparément les griefs des auteurs tirés des articles 10 et 16 lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte.

10.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constate que l’État partie a violé les articles 6, 7 et 9 lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte, en ce qui concerne Ibrahim Durić, et l’article 7 lu séparément et conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2, en ce qui concerne les auteurs.

11.Conformément au paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer à Nevzeta Durić et à Nedzad Durić un recours utile, et notamment: a) de poursuivre les démarches visant à faire la lumière sur le sort d’Ibrahim Durić et l’endroit où il se trouve, comme l’exige la loi de 2004 relative aux personnes disparues; b) de poursuivre les actions visant à traduire en justice sans retard injustifié les responsables de cette disparition, conformément à la stratégie nationale de mise en accusation des auteurs de crimes de guerre; et c) d’assurer une indemnisation appropriée. L’État partie est en outre tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas et doit garantir en particulier que les familles des disparus aient accès aux enquêtes sur les allégations de disparition forcée et que le cadre juridique actuel ne soit pas appliqué de façon que les prestations sociales et les mesures de réparation accordées aux proches de victimes de disparition forcée soient subordonnées à l’obligation d’obtenir un certificat de décès de la victime.

12.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y avait eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations. L’État partie est invité en outre à rendre celles-ci publiques et à les diffuser largement dans ses trois langues officielles.

Appendice

Opinion (concordante) conjointe de Fabián Omar Salvioliet Víctor Manuel Rodríguez-Rescia

Nous sommes d’accord avec la décision du Comité dans l’affaire Durić et consorts c. Bosnie-Herzégovine (communication no 1956/2010). Toutefois, nous considérons que la conclusion juridique aurait dû porter principalement sur la violation du paragraphe 3 de l’article 2, lu conjointement avec les articles 6, 7 et 9 du Pacte, étant donné que la violation engageant la responsabilité de la Bosnie-Herzégovine découle de l’absence de recours utile face aux disparitions forcées et à leurs conséquences. Ces faits eux‑mêmes ne peuvent être attribués à l’État de Bosnie-Herzégovine puisqu’ils ont été commis par des membres de l’armée de la Republika Srpska.

En concluant dans la présente affaire que les faits dont il est saisi font apparaître une violation des articles 6, 7 et 9 du Pacte, lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2, le Comité s’écarte des constatations qu’il a adoptées précédemment dans l’affaire Rizvanović c. Bosnie-Herzégovine (communication no 1997/2010) sans expliquer la raison de ce changement.

Cependant, nous sommes d’avis que le Comité a eu raison de considérer comme une violation directe de l’article 7 à l’égard des auteurs le fait que ceux‑ci aient été obligés, pour pouvoir bénéficier de certaines prestations sociales, de faire déclarer le décès de leur proche disparu alors que son sort et l’endroit où il se trouve n’avaient pas été déterminés avec certitude.