Nations Unies

CAT/C/63/D/618/2014

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

8 juin 2018

Français

Original : anglais

Comité contre la torture

Décision adoptée par le Comité au titre de l’article 22 de la Convention, concernant la communication no 618/2014 * , **

Communication présentée par :

I.P.W.F (représenté par un conseil, John Phillip Sweeney)

Au nom de :

I.P.W.F

État partie :

Australie

Date de la requête :

23 mai 2014 (date de la lettre initiale)

Date de la présente décision :

10 mai 2018

Objet :

Expulsion vers Sri Lanka

Question ( s ) de procédure :

Fondement des griefs

Question ( s ) de fond :

Risque de torture en cas d’expulsion vers le pays d’origine (non-refoulement)

Article(s) de la Convention :

3 et 22

1.1Le requérant est I.P.W.F., de nationalité sri‑lankaise, né le 17 novembre 1981. Il a demandé l’asile en Australie, mais sa demande a été rejetée. Il affirme que son expulsion vers Sri Lanka constituerait une violation par l’Australie des articles 1 et 3 de la Convention. Il est représenté par un conseil.

1.2Dans sa requête datée du 23 mai 2014, le requérant priait le Comité d’adresser à l’État intéressé une demande de mesures provisoires pour empêcher son expulsion imminente vers Sri Lanka, dans l’attente de l’examen de son dossier. Le 28 juillet 2014, le Comité, agissant par l’intermédiaire de son Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires de protection, a décidé de ne pas demander de mesures provisoires au titre de l’article 114 de son règlement intérieur, considérant que les allégations selon lesquelles le requérant risquait d’être torturé s’il était renvoyé à Sri Lanka n’étaient pas suffisamment étayées. Le 18 août 2014, le Comité a confirmé sa décision et en a informé le requérant. Ce dernier a été renvoyé à Sri Lanka le 13 janvier 2015, tous ses recours contre les décisions négatives des autorités australiennes ayant été rejetés.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1Le requérant est d’origine ethnique singhalaise et de religion catholique. Il est né à Mahawewe, dans la province du Nord-Ouest de Sri Lanka. Il est pêcheur. Depuis 2009, il milite pour l’United National Party. En novembre et en décembre 2009, il a accompli diverses tâches pour celui-ci, notamment distribué des matériels électoraux et décoré le parcours de manifestations, et il a assisté à plusieurs meetings de soutien au candidat à l’élection présidentielle Sarath Fonseka. Il a adhéré à la Ligue de la jeunesse de l’United National Party en mars 2010 et a continué à soutenir ce parti en faisant campagne pour Niroshan Perera aux élections législatives et en accomplissant diverses tâches de soutien. M. Perera a été élu au Parlement, mais le parti est resté dans l’opposition. En considération de l’appui traditionnel de sa famille en faveur de celui-ci, le requérant y a formellement adhéré en 2010.

2.2Dès juin 2010, les militants de l’United National Party ont commencé à être victimes de représailles de la part d’hommes de main du parti vainqueur de l’élection, l’United People’s Freedom Alliance. L’activité du requérant au sein de l’United National Party et son soutien à M. Perera faisaient de lui une cible. À une date non précisée du mois d’août 2010, un groupe de cinq ou six personnes se serait rendu chez lui à bord d’une camionnette blanche alors qu’il était en mer, et aurait demandé à sa famille où il se trouvait en proférant des menaces à son endroit. Le chef du groupe était le fils du candidat vainqueur aux élections législatives dans le district de Puttalam, Dayasithra Tissera, et responsable politique local de l’United People’s Freedom Alliance.

2.3Étant donné les circonstances, le requérant est parti se réfugier chez son oncle à Rajanganaya, endroit reculé de la province du Nord-Ouest, avant de quitter Sri Lanka par bateau pour gagner l’Australie. Durant cette période, il travaillait sur des bateaux de pêche au large de Trincomalee et de Negombo, se sentant un peu plus en sécurité en raison de ses longues sorties en mer, qui duraient généralement un mois. De son côté, sa femme est allée se cacher à Vavuniya chez une religieuse, craignant que ceux qui recherchaient son mari ne viennent l’enlever si elle demeurait chez ses parents. Après que le requérant eut quitté le domicile familial, des membres de l’United People’s Freedom Alliances’y seraient rendus à sa recherche à quatre ou cinq reprises. Vers le milieu de l’année 2011, le requérant a appris que des membres de ce parti avaient cherché à savoir sur quel bateau il travaillait. Entre septembre 2010 et le 26 mars 2012, le requérant a continué de passer de brèves périodes à Rajanganaya, entre ses sorties d’un mois en mer pour pêcher. Il soutient qu’un de ses collègues lui a dit avoir été interrogé au sujet du lieu où il se trouvait et l’a informé que des hommes de main le cherchaient à Trincomalee. Le requérant a quand même pu retourner au domicile de son père tous les deux ou trois mois pour voir sa famille et sa femme.

2.4En mars 2012, le requérant a accepté de faire partie de l’équipage d’un navire en partance pour l’Australie ; c’était son oncle qui organisait l’expédition. Il a été payé 7 500 roupies pour faire la traversée entre Negombo et Beruwala comme membre d’équipage. Le 26 mars 2012, le navire a quitté Beruwala pour l’Australie avec 99 personnes à bord au total. Le requérant n’a pas été rémunéré pour cette partie du trajet.

2.5Le 11 avril 2012, le requérant est arrivé illégalement en Australie et a été placé dans un centre de détention pour migrants. Le 30 juin 2012, il a demandé un visa de protection (classe A) auprès du Ministère de l’immigration, des affaires multiculturelles et de la nationalité, faisant valoir que l’Australie était tenue de protéger les réfugiés qui, comme lui, risquaient s’ils étaient renvoyés dans leur pays d’être persécutés pour leur appartenance à un parti politique, leur origine ethnique, en l’occurrence l’origine singhalaise, leur religion et leur qualité de demandeur d’asile débouté. Il craignait en outre, s’il était renvoyé à Sri Lanka, d’être poursuivi non seulement pour avoir quitté illégalement le pays, mais aussi pour trafic d’êtres humains, infraction punie par l’article 45 C de la loi sri‑lankaise sur l’immigration, et d’être maintenu en détention sans pouvoir bénéficier d’une mise en liberté sous caution. Il n’a toutefois pas mentionné dans sa demande d’asile qu’il avait fait partie de l’équipage du navire qui l’avait amené en Australie, craignant d’être accusé d’introduction clandestine de migrants en Australie. Conformément à l’article 65 de la loi australienne de 1958 sur l’immigration, un visa peut être octroyé au non-ressortissant qui est admissible à la protection prévue par la Convention relative au statut des réfugiés, modifiée par le Protocole relatif au statut des réfugiés. Le 1er octobre 2012, le Ministère a rejeté la demande du requérant, considérant que celui-ci ne remplissait pas les critères à satisfaire pour prétendre au statut de réfugié. Le requérant a fait appel auprès du Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés, qui a confirmé la décision du Ministère le 4 décembre 2012. Le Tribunal a jugé que le requérant n’avait pas été pris pour cible par l’United People’s Freedom Alliance après les élections de 2010 et ne risquait pas d’être exposé à un risque réel de persécution car il avait juste participé à une campagne électorale pendant quelques mois avant l’élection et n’avait pas été actif en politique par la suite. Le Tribunal a aussi rejeté l’argument selon lequel le requérant courrait un risque en tant que catholique, l’intéressé résidant dans un district où presque un tiers des habitants étaient de la même religion que lui, ainsi que l’argument selon lequel il courrait un risque en tant que demandeur d’asile débouté, puisqu’il était d’origine ethnique singhalaise et n’était pas accusé de faire partie des Tigres de libération de l’Eelam tamoul.

2.6Le 9 janvier 2013, le requérant a sollicité auprès du Tribunal de circuit fédéral de l’Australie le contrôle juridictionnel de la décision du Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés. Le Tribunal de circuit fédéral a rejeté ce recours le 22 mai 2013 au motif que le requérant n’avait pas été la cible de l’United People’s Freedom Alliance après les élections de 2010. Il a en conséquence conclu que le risque que le requérant soit persécuté pour avoir participé à la campagne pendant les mois précédant l’élection n’était pas réel et qu’il n’existait aucune preuve d’une activité politique notable de sa part après les élections. Le requérant a par la suite contesté la décision du Tribunal de circuit fédéral auprès de la Cour fédérale d’Australie, qui a rejeté son recours le 16 août 2013. Le 14 octobre 2013, le conseil du requérant a demandé au Ministre de l’immigration, des affaires multiculturelles et de la nationalité d’intervenir en vertu de l’article 46 A de la loi relative aux migrations de 1958 (Commonwealth), qui dispose que le ministre peut accorder un visa à un demandeur débouté s’il estime qu’il y va de l’intérêt général. La demande d’intervention ministérielle a néanmoins été rejetée le 4 février 2014.

2.7Le requérant soutient qu’il a épuisé tous les recours internes utiles, disponibles et propres à empêcher son renvoi, affirmant qu’il ne devrait pas être tenu de se pourvoir devant des instances supérieures car de telles procédures pourraient être très longues avant d’aboutir alors qu’il court un risque imminent de renvoi. Il affirme qu’aucune autre instance internationale d’enquête ou de règlement n’est ou n’a été saisie de la même affaire.

Teneur de la plainte

3.1Le requérant avance que, en le renvoyant de force à Sri Lanka, l’Australie, violerait les droits qu’il tient des articles 1 et 3 de la Convention. Il affirme que, à son retour dans ce pays, il courrait un risque sérieux de torture et autres traitements inhumains ou dégradants, en particulier de la part du Département des enquêtes criminelles de la police sri‑lankaise et de l’armée sri‑lankaise, car il est soupçonné d’être partisan, et même membre, des Tigres de libération de l’Eelam tamoul.

3.2Le requérant soutient qu’il risque d’être arrêté à son arrivée, interrogé et placé en détention provisoire à la prison de Negombo, d’autant qu’il a quitté le pays illégalement, en violation de l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 45 de la loi sur l’immigration. Il ajoute qu’il est établi que le centre de détention provisoire de Negombo est surpeuplé et que les conditions d’hygiène y sont déplorables, et que, quelle qu’en soit la durée, sa détention dans ce lieu constituerait un traitement inhumain et dégradant. Il déclare craindre d’être d’autant plus pris pour cible qu’il serait considéré comme un traître. De plus, il fait valoir qu’une réinstallation dans le pays ne serait pas une solution car il serait immédiatement repéré et placé en détention par les autorités à son arrivée à l’aéroport de Colombo, où il serait interrogé parce qu’il a quitté illégalement le pays, sans compter qu’il serait un demandeur d’asile débouté sans passeport.

3.3Le requérant dit être en danger du fait que les autorités sri‑lankaises pourraient apprendre qu’il a pris part à des activités de trafic d’êtres humains puisqu’il faisait partie de l’équipage du navire qui l’a amené en Australie. Il risque selon lui d’être soumis à de mauvais traitements ou à la torture pendant la procédure d’enquête et de mise en accusation, et de se voir éventuellement infliger une peine de longue durée pour violation de l’article 45 C de la loi sur les immigrants et les émigrants. Il soutient qu’il risque d’être maintenu en détention plus longtemps que la plupart des personnes renvoyées, car son passeport peut être utilisé comme élément de preuve dans une affaire de trafic d’êtres humains. Il évoque à cet égard le cas de ses deux cousins, à qui l’Australie a accordé un visa de protection parce qu’on a considéré qu’ils étaient exposés à un risque de torture et/ou de traitement cruel ou inhumain, étant soupçonnés à Sri Lanka d’avoir participé à l’affrètement des deux navires à bord desquels ils étaient arrivés en Australie.

3.4Le requérant évoque en outre le traitement subi par son oncle, Nihal Pieris, qui l’a informé le 26 septembre 2013 que, lorsqu’il était rentré volontairement à Sri Lanka, il avait été interrogé pendant seize heures et menacé verbalement et physiquement à l’aéroport de Colombo par les agents du Département des enquêtes criminelles de la police sri‑lankaise. Il avait été accusé, entre autres, de trafic d’êtres humains et de sortie illégale du pays, puis il avait été conduit à la prison de Negombo et remis en liberté vers le 20 mai 2014. Le requérant fait valoir qu’il existe une très forte probabilité qu’il soit soumis au même traitement que son oncle étant donné qu’il appartient à la même famille de pêcheurs, qu’il a participé à l’organisation de la traversée du navire de passeurs et qu’on peut le soupçonner de faire partie de la même organisation de passeurs.

3.5Le requérant rappelle que la torture et les mauvais traitements sont généralisés et persistants à Sri Lanka, de même que les enlèvements, les disparitions et la détention dans des centres secrets. Il renvoie à divers documents d’information et rapports décrivant la situation à Sri Lanka, notamment aux observations finales formulées par le Comité en 2011 (CAT/C/LKA/CO/3-4).

Autres observations du requérant

4.1Le 12 août 2014, le requérant a présenté des observations complémentaires, priant le Comité de revenir sur sa décision de ne pas demander à l’Australie de prendre des mesures provisoires pour suspendre son renvoi à Sri Lanka.

4.2S’agissant de ses activités politiques à Sri Lanka, le requérant dit qu’il a assisté à des meetings de l’United National Party à partir de 2006 et est devenu plus actif sur la scène politique à partir de 2009, lorsqu’il a commencé à militer pour le parti. En novembre et en décembre 2009, il a participé à la distribution de matériels électoraux pour le compte du candidat à l’élection présidentielle Sarath Fonseka. Il a notamment aidé à décorer le parcours de manifestations et assisté à des meetings de soutien en faveur du candidat. Lors de l’élection présidentielle, il n’a pas rencontré de problèmes puisque des mesures de sécurité étaient en place.

4.3En mars 2010, il a adhéré à la Ligue de la jeunesse de l’United National Party, qui comptait entre 15 et 20 membres. Ensuite, il a pris part à la campagne de Niroshan Perera, candidat aux élections législatives dans le district de Puttalam en avril 2010, en distribuant des affiches, en trouvant des lieux de rassemblements et de meetings et en faisant du porte à porte.

4.4L’United National Party est resté dans l’opposition à l’issue des élections, bien que M. Perera ait été élu. Le requérant explique que, postérieurement à la campagne, des hommes de main de l’United People’s Freedom Alliance, le parti qui avait remporté les élections, s’en sont pris aux militants de l’opposition. Sa participation à la campagne de M. Perera et son soutien à l’United National Party en faisaient donc une cible et il a été l’objet de mesures d’intimidation politique.

4.5Le requérant réitère les allégations formulées dans sa requête initiale concernant un épisode survenu en août 2010 au cours duquel un groupe de cinq ou six personnes est venu à sa recherche à son domicile alors qu’il se trouvait en mer. Il apporte en outre des précisions sur l’affrètement du navire en partance pour l’Australie et explique qu’il a été payé 7 500 roupies pour faire partie de l’équipage.

4.6Le requérant réitère également ses affirmations selon lesquelles il risque d’être soumis à la torture en raison de ses liens supposés avec les Tigres de libération de l’Eelam tamoul et de son activité au sein de l’United National Party. En outre, il dit craindre d’être torturé par les membres de l’United People’s Freedom Alliance, qui pourraient agir en toute impunité car il ne bénéficiera pas forcément de la protection de la police.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

5.1Le 16 avril 2015, l’État partie a présenté ses observations sur la recevabilité et sur le fond de la requête. Il fait valoir que les allégations du requérant sont irrecevables au motif qu’elles sont manifestement dénuées de fondement, l’intéressé n’ayant pas établi que ses droits avaient à première vue étaient violés. Dans l’éventualité où le Comité jugerait recevable l’un quelconque des griefs du requérant, les allégations devraient être rejetées pour défaut de fondement. Le requérant n’a pas soumis d’éléments de preuve suffisants à l’appui de l’allégation selon laquelle il y a des motifs sérieux de croire qu’il risque, s’il est renvoyé à Sri Lanka, d’être soumis à la torture au sens de l’article 1 de la Convention.

5.2L’État partie affirme que tous les griefs dont le requérant a saisi le Comité ont déjà été examinés par diversesinstances nationales, dont le Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés, et ont fait l’objet d’un contrôle juridictionnel de la part du Tribunal de circuit fédéral et de la Cour fédérale d’Australie, qui ont conclu qu’ils n’étaient pas crédibles. Si les autorités australiennes ont en particulier tenu compte de cequ’« on peut rarement attendre des victimes de la torture une exactitude sans faille », elles ont conclu que les griefs du requérant n’engageaient pas les obligations de l’État partie en matière de non‑refoulement. Ce dernier fait valoir que le Comité n’est pas un organe judiciaire ni une juridiction d’appel, et doit accorder un poids considérable aux constatations faitespar les organes de l’État partie. Les griefs du requérant ont notamment été appréciés à la lumière des dispositions relatives à la protection complémentaire figurant à l’alinéa aa) du paragraphe 2 de l’article 36 de la loi relative aux migrations de 1958 (Commonwealth), qui donnent effet aux obligations incombant à l’État australien en matière de non-refoulement au titre de la Convention et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. En outre, le requérant n’a apporté aucun élément nouveau dans ses observations au Comité.

5.3L’État partie rappelle que le requérant a déposé une demande de visa de protection le 30 juin 2012. Il s’est vu octroyer deux visas (généraux) temporaires (l’un valable du 30 janvier au 16 octobre 2013 et l’autre, du 16 juillet au 27 août 2014) dans l’attente de l’examen de sa demande de visa de protection par le Ministère de l’immigration et de la protection des frontières. Le 1er octobre 2012, sa demande de visa de protection a été rejetée. Ayant examiné toutes les informations soumises par le requérant, l’autorité compétente a considéré que ce dernier, bien qu’ayant pu participer à des activités politiques pour le compte de l’United National Party, n’avait pas suffisamment de visibilité politique pour que l’United People’s Freedom Alliance, les factions soutenant ce parti ou les autorités sri‑lankaises continuent de s’intéresser à lui. De plus, cette activité politique limitée a pris fin après les élections de 2010. L’autorité compétente a également jugé que la crainte d’être persécuté en raison du rejet de sa demande d’asile ne constituait pas un risque réel de préjudice sérieux, n’étant pas convaincue que les demandeurs d’asile renvoyés soient placés en détention ou poursuivis par les autorités sri‑lankaises à moins d’être visés par d’autres accusations pénales.

5.4De plus, l’autorité compétente a constaté que les catholiques singhalais n’étaient pas exposés à des risques particuliers à Sri Lanka. En conséquence, il n’y avait pas de motifs sérieux de croire que le requérant courrait un risque prévisible, réel et personnel de préjudice, sous forme de torture ou autre, s’il était renvoyé à Sri Lanka. Le visa de protection demandé lui a donc été refusé. L’autorité compétente a expressément fait observer que, au moment d’apprécier la crédibilité du témoignage du requérant, il lui fallait être sensible aux difficultés fréquemment rencontrées par les demandeurs d’asile, le bénéfice du doute devant être accordé à ceux qui sont dans l’ensemble crédibles mais ne sont pas en mesure d’étayer tous leurs griefs. À cet égard, l’auteur de la décision a constaté que, si le requérant et sa famille pouvaient avoir pris part à la vie politique locale, ce dernier ne satisfaisait pas aux critères permettant de le considérer comme une cible de l’United People’s Freedom Alliance ou des partisans du parti au pouvoir. Il en est donc venu à mettre en doute la véracité des affirmations du requérant voulant qu’il fût persécuté par des personnes liées à l’United People’s Freedom Alliance. Il ne croyait pas non plus que des membres de ce parti soient revenus au domicile du requérant à quatre ou cinq reprises après les élections de 2010, considérant que le requérant aurait été une proie facile ; le fait qu’il n’ait jamais été agressé par les membres de l’United People’s Freedom Alliance affaiblissait encore l’allégation selon laquelle ce parti s’intéressait à ce point à lui.

5.5Le 17 octobre 2012, le requérant a saisi le Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés d’une demande d’examen indépendant au fond. Le 5 décembre 2012, le Tribunal a confirmé la décision portant refus d’accorder au requérant un visa de protection. Après avoir considéré les moyens de celui-ci concernant sa crainte d’être victime d’un préjudice du fait de son activité politique pour le compte de l’United National Party, de sa situation de demandeur d’asile débouté et de son état de catholique intéressant les extrémistes bouddhistes, le Tribunal, tout en admettant que le requérant ait pu mener des activités politiques en tant que participant ordinaire à la campagne de l’United National Party dans sa circonscription, n’a pas pu se convaincre que des membres de l’United People’s Freedom Alliance se soient mis à sa recherche plusieurs mois après l’élection, alors qu’il n’était plus actif dans le parti. Le Tribunal ne croyait donc pas que le requérant fût exposé à un risque réel d’être persécuté pour un motif prévu par la Convention ou de subir un préjudice sérieux s’il était renvoyé à Sri Lanka. Il a mis en doute les craintes du requérant en tant que demandeur d’asile débouté et catholique, car rien ne portait à croire qu’il risquait d’être torturé pour ces raisons. Il a pris en considération un rapport du Ministère des affaires étrangères et du commerce indiquant que, en date du 16 octobre 2012, aucun demandeur d’asile débouté n’avait été accusé d’infraction à raison d’un départ illégal de Sri Lanka. Il a également observé que le requérant vivait dans une région où près du tiers des habitants étaient catholiques ; il n’a trouvé aucune information indiquant que les catholiques y aient rencontré quelque problème particulier.

5.6Le 22 mai 2013, le Tribunal de circuit fédéral a rejeté la demande de contrôle juridictionnel de la décision du Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés déposée par le requérant. L’État partie fait observer que le requérant a invoqué un seul moyen devant le Tribunal de circuit fédéral : le Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés aurait commis une erreur de compétence en se méprenant sur le droit applicable ou en appliquant celui-ci à mauvais escient, ou en se posant la mauvaise question. Il avait conclu que le risque que le requérant soit soumis à des violences à l’avenir ou soit arrêté en raison de son activité politique était très faible, étant donné le très grand nombre de personnes qui participaient aux campagnes électorales à Sri Lanka. Le Tribunal de circuit fédéral a jugé que le Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés s’était appuyé sur les éléments de preuve et écritures dont il était saisi pour parvenir aux conclusions sous-tendant sa décision, après avoir appliqué correctement le droit.

5.7Le 18 septembre 2013, la Cour fédérale a également rejeté la demande de contrôle juridictionnel du requérant, laquelle reposait sur deux moyens. Le premier était le même que celui invoqué dans le recours porté devant le Tribunal de circuit fédéral et a été rejeté pour les mêmes raisons que précédemment. Le second était que le Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés avait fait fausse route en se méprenant sur sa compétence, ou en omettant de considérer en tout ou en partie l’un de ses moyens ou de tenir compte d’un élément important. Le moyen en question correspondait à l’allégation du requérant voulant que son nom figurât sur une liste de partisans locaux de l’United National Party qui avait été communiquée à l’United People’s Freedom Alliance. La Cour fédérale a considéré que ce moyen avait déjà été directement évalué et rejeté par le Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés, et qu’il n’y avait donc pas eu manquement à l’examen d’un grief.

5.8Le 16 octobre 2013, le requérant a fait une demande d’intervention ministérielle sous le régime des articles 417 et 48 B de la loi de 1958 relative aux migrations (Commonwealth). Dans sa demande initiale, il a présenté des moyens qu’il n’avait pas invoqués devant les instances nationales concernant sa participation supposée au trafic d’êtres humains et ses liens familiaux présumés avec des passeurs. Cependant, il n’a pas fourni la moindre information crédible et susceptible d’accroître ses chances d’obtenir un visa de protection. Aussi, le 14 janvier 2014, le Ministère a-t-il conclu que la demande du requérant ne satisfaisait pas aux exigences voulues pour que le dossier soit renvoyé au ministre adjoint afin qu’il exerce son pouvoir discrétionnaire en vertu des articles 48 B et 417 de la loi. Le requérant a déposé une nouvelle demande d’intervention ministérielle le 27 août 2014. Le 16 septembre 2014, une fois le Comité saisi, le Ministère a évalué la demande d’intervention ministérielle et a conclu de nouveau qu’elle ne satisfaisait pas aux critères régissant le renvoi au ministre.

5.9Les allégations du requérant selon lesquelles des proches (son oncle et ses deux cousins) se sont livrés au trafic d’êtres humains et il risquerait d’être soumis au même traitement que son oncle Nihal s’il était renvoyé à Sri Lanka ont été examinées dans le contexte des deux demandes d’intervention ministérielle, compte ayant été tenu des doutes sérieux qui pesaient sur la crédibilité générale de l’intéressé. Lorsqu’on a demandé à celui‑ci si, à son arrivée ou au moment où il a fait sa demande de visa de protection le 30 juin 2012, il connaissait quelqu’un sur l’île Christmas ou ailleurs en Australie, il a répondu par la négative. Sans se prononcer sur le traitement qui aurait été réservé à M. Pieris à son retour à Sri Lanka, le Ministère a constaté que ce dernier était rentré volontairement avec l’assistance de l’Organisation internationale pour les migrations après que ses fils eurent obtenu des visas. Le Ministère a également constaté que rien ne prouvait que le requérant était lié de quelque manière que ce soit à ces trois hommes ni que les dossiers de ceux-ci avaient une incidence notable sur le sien.

5.10L’État partie fait valoir que le requérant a reconnu qu’il n’avait pas invoqué, dans sa première demande soumise au Ministère ou dans son recours auprès du Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés, l’allégation selon laquelle il aurait participé à un trafic d’êtres humains alors qu’il faisait partie de l’équipage du navire qui l’a amené en Australie, mais qu’il avait soulevé ce point uniquement dans le cadre de ses demandes d’intervention ministérielle. Étant donné les doutes sérieux du Ministère et du Tribunal de contrôle des décisions concernant les réfugiés quant à la crédibilité du requérant et à la plausibilité de ses griefs, et faute de tout autre élément de preuve à l’appui de cette nouvelle allégation, celle-ci a été jugée peu convaincante et non étayée. Lorsqu’il a examiné les demandes d’intervention ministérielle du requérant, le Ministère a relevé que celui-ci avait été identifié comme faisant éventuellement partie de l’équipage par d’autres demandeurs d’asile qui avaient gagné l’Australie à bord du même navire que lui, mais il ne s’est pas présenté comme tel à ce moment-là. La police fédérale australienne a enquêté sur sa conduite après son arrivée en Australie et il n’a fait l’objet d’aucune poursuite pour trafic d’êtres humains et n’intéresse plus la police fédérale. Ainsi, le Ministère a considéré que rien n’indiquait que le requérant ait jamais participé à des activités de trafic de personnes et qu’il y ait quelque raison que ce soit de croire que les autorités sri‑lankaises le soupçonneraient d’être impliqué dans de telles activités. Il a jugé que, même si le requérant était accusé de trafic d’êtres humains à son retour à Sri Lanka, cela ne constituerait pas en soi pour lui un risque réel de préjudice sérieux. Le requérant n’a donc fourni au Comité aucune nouvelle information susceptible de modifier la conclusion établie à cet égard. Les renseignements complémentaires communiqués par lui le 14 octobre 2014 sur les contacts qu’il aurait eus avec son oncle Nihal et les fils de celui-ci, Amith et Asith, ainsi qu’avec une autre personne du nom de Rokshan, à Sri Lanka en février et en mars 2012, concernant l’organisation de la traversée qui l’a amené en Australie, ne constituent pas de nouvelles informations crédibles de nature à accroître ses chances d’obtenir un visa de protection.

5.11L’État partie conteste les allégations du requérant voulant que, en tant que demandeur d’asile débouté ayant quitté illégalement Sri Lanka et ayant des liens supposés avec des opérations de trafic d’êtres humains, il serait arrêté et placé en détention, voire torturé, s’il était renvoyé à Sri Lanka. Il fait valoir, se référant au paragraphe 2 de l’article 3 de la Convention, que l’existence d’un risque général de violence ne permet pas en soi de conclure que telle ou telle personne serait en danger d’être soumise à la torture à son retour dans ce pays ; il doit exister des raisons particulières de penser que l’intéressé serait personnellement en danger. Les questions soulevées par le requérant concernant les violations des droits de l’homme et le renvoi de demandeurs d’asile à Sri Lanka ont été expressément et soigneusement examinées dans le cadre de toutes les procédures internes, compte dûment tenu des informations générales concernant le pays. Les autorités compétentes ont systématiquement conclu qu’il n’y avait aucun motif sérieux de croire que le requérant serait exposé à un risque prévisible, personnel et réel de torture s’il était renvoyé à Sri Lanka. L’État partie soutient donc que le requérant n’a pas fourni d’éléments de preuve suffisants pour montrer qu’il courrait personnellement un risque réel de préjudice, ou que toute décision défavorable constituerait un acte de torture au sens de l’article 1 de la Convention.

5.12L’État partie avance que, même si le requérant, à son retour à Sri Lanka, était accusé, au titre de l’article 45 B de la loi sur les immigrants et les émigrants, d’avoir quitté le pays illégalement, il ne serait pas pour autant exposé à un risque réel de torture. Des rapports du Ministère des affaires étrangères et du commerce indiquent que les personnes poursuivies pour infraction à l’article 45 B sont généralement détenues pendant quelques heures avant d’être inculpées, puis remises en liberté. Le requérant prétend que le centre de détention provisoire de Negombo, où seraient détenues les personnes accusées d’infraction à l’article 45 B, est surpeuplé, que les conditions sanitaires et hygiéniques y sont déplorables et que la détention dans ce lieu constitue un traitement dégradant. Or, pour l’application de la Convention, ces griefs ne suffisent pas pour invoquer les obligations de non-refoulement prévues à l’article 3. Même si l’État partie admettait qu’il risque d’être détenu brièvement dans un tel établissement, le requérant ne serait pas pour autant exposé à un risque réel de torture, d’autant qu’il n’est pas d’origine ethnique tamoule et n’a aucun lien avec les Tigres de libération de l’Eelam tamoul ni de liens crédibles avec des opérations de trafic d’êtres humains. Pour cette raison, l’État partie soutient que les griefs du requérant sont irrecevables et/ou dénués de fondement.

Autres observations de l’État partie

6.1Le 5 août 2016, l’État partie a indiqué que le requérant avait épuisé tous les recours internes et ne pouvait donc pas légalement rester en Australie. L’intéressé a été renvoyé à Sri Lanka le 13 janvier 2015. Le Gouvernement australien a exprimé ses regrets d’avoir tardé à en informer le Comité.

6.2Compte tenu de ce fait nouveau et étant donné que le requérant n’a fourni au Comité aucune nouvelle information se rapportant à sa communication depuis son arrivée à Sri Lanka, l’État partie a demandé au Comité de mettre fin à l’examen de la requête.

Commentaires du requérant sur les observations de l’État partie

7.1Le 1er décembre 2016, le requérant a indiqué qu’il avait été renvoyé à Colombo le 13 janvier 2015, escorté par deux agents de sécurité australiens. À son arrivée, deux agents du Département des enquêtes criminelles l’ont conduit dans une pièce vétuste du bâtiment de l’aéroport. Il y a été maintenu pendant vingt-quatre heures et interrogé toutes les six heures. Le 14 janvier 2015, les agents lui ont donné un téléphone portable et lui ont demandé d’informer sa famille.

7.2Ensuite, un juge l’a libéré contre une caution d’environ 500 000 roupies, en lui demandant de se présenter devant le tribunal de Negombo le 25 janvier 2015. Depuis, son dossier a été examiné tous les cinq mois environ. Il s’est présenté pour la dernière fois devant le tribunal le 21 juin 2016. Ce jour-là, le juge lui a demandé le nom du propriétaire et du capitaine du navire qui l’a amené en Australie.

7.3Le 22 juin 2016, le requérant a été prié de se présenter au siège du Département des enquêtes criminelles, à Colombo, le lendemain 23 juin, ce qu’il a fait. Deux agents du Département l’auraient conduit au quatrième étage, où différents types d’armes étaient en vue. Il a été menacé et interrogé au sujet du propriétaire du navire, du nom du capitaine et des autres participants à l’expédition. Il soutient avoir été torturé et interrogé en termes grossiers ce jour-là. Bien qu’il ait nié avoir fait partie de l’équipage, affirmant qu’il avait dû lui-même payer la traversée et ne savait rien de plus, il a été battu, s’est mis à saigner et a fini par perdre connaissance. Lorsqu’il est revenu à lui, il se trouvait dans un lit d’hôpital. Il a de nouveau été convoqué au siège du Département des enquêtes criminelles. Depuis, il vit dans la peur car il a pris la fuite sans se présenter devant les tribunaux ni au siège du Département, raison pour laquelle il espérait que l’Australie lui accorderait un visa de sécurité.

7.4Le requérant aurait de nouveau reçu l’ordre, le 24 novembre 2016, de relater en détail au Département des enquêtes criminelles sa traversée vers l’Australie. Il ajoute que sa femme, ayant peur d’habiter avec lui, a engagé une procédure de divorce.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

8.1Avant d’examiner tout grief soumis dans une communication, le Comité doit déterminer s’il est recevable au regard de l’article 22 de la Convention. Il s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 5 a) dudit article, que la même question n’a pas été examinée et n’est pas actuellement examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

8.2Le Comité rappelle que, conformément au paragraphe 5 b) de l’article 22 de la Convention, il n’examine aucune communication d’un particulier sans s’être assuré que celui-ci a épuisé tous les recours internes disponibles. Il observe qu’en l’espèce l’État partie n’a pas contesté la recevabilité de la requête pour ce motif.

8.3Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel la requête est manifestement dénuée de fondement puisque le requérant n’a pas montré qu’il existait des motifs sérieux de croire qu’il serait exposé à un risque prévisible, actuel, personnel et réel de préjudice, y compris de torture, s’il était renvoyé à Sri Lanka, et qu’elle devrait donc être déclarée irrecevable.

8.4Le Comité prend également note de l’argument de l’État partie selon lequel, bien que le requérant ait pu participer à des activités politiques pour le compte de l’United National Party, il n’avait pas suffisamment de visibilité politique pour justifier que l’United People’s Freedom Alliance, les factions sympathisantes ou les autorités sri‑lankaises veuillent s’en prendre à lui. Les autorités de l’État partie ont mis en doute la véracité des affirmations du requérant voulant qu’il ait été persécuté par des personnes associées à l’United People’s Freedom Alliance plusieurs mois après l’élection, faisant valoir que l’argument selon lequel cette dernière s’intéressait encore à lui était fragilisé par le fait qu’il n’avait jamais été agressé par ses membres. Le Comité observe en outre que l’État partie a tenu pour acquis que l’activité politique limitée du requérant avait pris fin après les élections de 2010, que sa crainte d’être persécuté au motif qu’il avait été débouté de sa demande d’asile ne constituait pas un risque réel de préjudice sérieux ou un risque de torture parce que les autorités nationales n’étaient pas convaincues que les demandeurs d’asile renvoyés soient placés en détention ou poursuivis par les autorités sri‑lankaises en raison de leur départ illégal, que les catholiques singhalais ne couraient pas de risques particuliers à Sri Lanka et qu’aucun fait n’avait été signalé dans la région en question qui tende à prouver le contraire.

8.5Le Comité constate que le requérant a présenté dans le cadre de ses demandes d’intervention ministérielle de nouveaux moyens qui ont été réfutés par l’État partie, la participation présumée du requérant au trafic d’êtres humains et ses liens familiaux supposés avec des passeurs n’étant étayés par aucune information crédible et de nature à faire aboutir sa demande de visa de protection. Le Comité observe également que l’État partie n’a trouvé aucune preuve que le requérant soit effectivement lié de quelque façon que ce soit à Nihal Pieris ou aux fils de celui-ci, Amith et Asith, ou que les éléments de leurs dossiers aient une quelconque incidence sur le sien. Par conséquent, l’État partie a conclu que rien n’indiquait que le requérant ait jamais participé à un trafic d’êtres humains et qu’il n’y avait aucune raison de croire que les autorités sri‑lankaises le soupçonneraient de l’avoir fait.

8.6Le Comité prend note des nouvelles informations communiquées par le requérant le 14 octobre 2014 sur les contacts qu’il aurait eus avec son oncle et les fils de celui-ci, ainsi qu’avec une autre personne du nom de Rokshan, à Sri Lanka en février et en mars 2012, concernant l’organisation du la traversée vers l’Australie. Dans ce contexte, le Comité prend acte également des observations de l’État partie selon lesquelles les autorités compétentes ont systématiquement conclu qu’il n’y avait aucun motif solide de croire que le requérant serait exposé à un risque prévisible, personnel et réel de torture s’il était renvoyé à Sri Lanka et que, même s’il était, à son retour à Sri Lanka, accusé d’avoir quitté illégalement le pays au regard de l’article 45 B de la loi sur les immigrants et les émigrants, il ne serait pas pour autant exposé à un risque réel de torture. Enfin, le Comité observe que le requérant a été renvoyé à Sri Lanka en janvier 2015, qu’il aurait par la suite été interrogé par des agents du Département des enquêtes criminelles et battu en juin 2016, et qu’il n’a présenté aucun nouveau commentaire depuis décembre 2016. À cet égard, le Comité relève que le requérant a soumis les informations concernant les coups qu’il aurait subis plus d’un an après son renvoi à Sri Lanka seulement cinq mois après les faits, sans joindre le moindre certificat médical ni document attestant qu’il avait porté plainte à ce propos auprès des autorités officielles.

8.7À la lumière de ce qui précède et dans les circonstances de l’espèce, le Comité considère que le requérant n’a pas suffisamment étayé ses allégations selon lesquelles il serait exposé à un risque de torture ou d’autres mauvais traitements du fait qu’il a été débouté de sa demande d’asile et qu’il a quitté Sri Lanka illégalement, à cause de son appartenance à l’United National Party ou de sa religion, ou en raison de sa participation supposée à des activités de trafic d’êtres humains. En ce qui concerne les coups que des agents du Département des enquêtes criminelles lui auraient administrés après son renvoi à Sri Lanka, le Comité considère que ces allégations ne sont pas suffisamment corroborées. Il conclut par conséquent que la requête est irrecevable faute de fondement, conformément à l’article 22 de la Convention et à l’alinéa b) de l’article 113 de son règlement intérieur.

9.En conséquence, le Comité décide :

a)Que la requête est irrecevable au regard de l’article 22 de la Convention ;

b)Que la présente décision sera communiquée au requérant et à l’État partie.