NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.RESTREINTE*

CCPR/C/93/D/1149/200224 septembre 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMMEQuatre‑vingt‑treizième session7‑25 juillet 2008

CONSTATATIONS

Communication n o  1149/2002

Présentée par:

Vladimir Donskov (non représenté par un conseil)

Au nom de:

Vladimir Donskov

État partie:

Fédération de Russie

Date de la communication:

18 février 2002 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application de l’article 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 31 décembre 2002 (non publiée sous forme de document)

Date de l’adoption des constatations:

17 juillet 2008

Objet: Procès équitable; droit de la défense

Questions de procédure: Justification des allégations

Question s de fond: Procès équitable; tribunal indépendant; garanties de la défense

Article s du Pacte: 2, 7, 9, 14 et 26

Article du Protocole facultatif: 2

Le 17 juillet 2008, le Comité des droits de l’homme a adopté le texte ci‑après en tant que constatations concernant la communication no 1149/2002 au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif. Le texte figure en annexe au présent document.

[ANNEXE]

ANNEXE

CONSTATATIONS DU COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME AU TITRE DU PARAGRAPHE 4 DE L’ARTICLE 5 DU PROTOCOLE FACULTATIF SE RAPPORTANT AU PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES

Quatre ‑vingt ‑treizième session

concernant la

Communication n o 1149/2002 *

Présentée par:

Vladimir Donskov (non représenté par un conseil)

Au nom de:

Vladimir Donskov

État partie:

Fédération de Russie

Date de la communication:

18 février 2002 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l’homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 17 juillet 2008,

Ayant achevé l’examen de la communication no 1149/2002 présentée au nom de M. Vladimir Donskov en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l’auteur de la communication et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif

1.L’auteur de la communication est M. Vladimir Donskov, de nationalité russe, né en 1969. Il se dit victime d’une violation par la Fédération de Russie des droits garantis par les articles 2, 7, 9, 14 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il n’est pas représenté par un conseil.

Rappel des faits présentés par l’auteur §

2.1L’auteur a travaillé comme procureur adjoint au parquet militaire de la garnison de Krasnorechensk de la ville de Khabarovsk. Son travail consistait, notamment, à effectuer des vérifications dans différentes unités militaires de la région. En janvier 1996, ayant mené une enquête dans une unité de l’armée, il a constaté que certains individus substituaient des vivres dans les stocks de l’armée. Durant l’enquête, il a reçu des menaces selon lesquelles sa vie «serait détruite»; il n’y a cependant pas prêté attention à l’époque.

2.2Le 21 mars 1996, une action pénale a été engagée contre l’auteur. Le 12 avril 1996, il a été inculpé d’actes de corruption. Selon lui, l’action pénale visait à le punir de ses investigations. L’acte d’accusation qui lui a été communiqué ne mentionnait pas, selon lui, le nom du procureur qui l’avait approuvé. L’auteur a accepté de coopérer à l’instruction mais, le 5 juillet 1996, il a été menacé par les enquêteurs. En conséquence, il a décidé de s’avouer coupable. Il a alors été placé dans le centre de détention de Khabarovsk. Il a contesté la légalité de sa détention, mais les tribunaux ont déclaré, à trois reprises, que celle-ci était régulière.

2.3L’auteur affirme que durant l’instruction, des éléments de preuve à décharge ont été soustraits de son dossier pénal ou remplacés par les enquêteurs et que d’autres n’ont pas été pris en considération ni versés au dossier. Ses requêtes tendant à une clarification des éléments de fait ont été rejetées. Par ailleurs, il n’a pas pu consulter la totalité de son dossier avant le procès.

2.4Le 26 juin 1997, le tribunal militaire de Khabarovsk l’a jugé coupable de corruption passive et de tentative de corruption passive et l’a condamné à sept ans de prison. L’auteur conteste sa condamnation, prétend que le tribunal n’était pas territorialement compétent pour le juger et a manqué à son devoir d’impartialité et d’équité. Ni les enquêteurs ni le tribunal n’ont interrogé plusieurs témoins dont les dépositions auraient pu être utiles, les témoins à charge ont fait des dépositions souvent contradictoires; les motifs de sa condamnation sont restés obscurs; les conclusions du tribunal n’ont pas été fondées sur les éléments de preuve examinés; le tribunal n’a pas expliqué pourquoi il admettait certaines preuves et en rejetait d’autres. La procédure dans son ensemble n’aurait pas été menée conformément à la loi. L’auteur soutient aussi que plusieurs témoins à charge avaient un intérêt dans l’affaire.

2.5À l’ouverture du procès, l’auteur a demandé que les débats soient enregistrés, mais cela a été refusé. Le procès-verbal a été établi, non pas dans le délai prescrit de trois jours, mais seulement quatre mois plus tard, et il contenait des erreurs. Plusieurs pièces du dossier établi durant l’enquête préliminaire ont été remplacées ou ont disparu, ce qui montre que son dossier pénal était fabriqué. Il a demandé que son affaire soit examinée par trois magistrats professionnels, mais cette demande a aussi été rejetée et le tribunal comprenait un magistrat et deux assesseurs.

2.6Selon l’auteur, le tribunal a fondé sa décision sur le fait que des documents relatifs à l’enquête sur la fraude alimentaire avaient été découverts dans son bureau. En réalité, ces documents montraient seulement qu’il menait effectivement une enquête, et son supérieur était au courant mais a fait une fausse déposition au tribunal. L’auteur conteste en outre le mode de calcul des revenus et des dépenses de sa famille, ainsi que l’évaluation par les experts de certains biens saisis à son domicile qui auraient été prétendument acquis avec l’argent provenant de versements occultes.

2.7L’auteur affirme que le tribunal de première instance a statué de manière illégale en fondant en partie ses conclusions sur ses aveux lors de l’enquête préliminaire. Il est dit dans le jugement qu’il a avoué librement, mais cela est démenti par le fait qu’avant le 5 juillet 1996 il avait affirmé son innocence. Il conteste aussi la conclusion du tribunal selon laquelle, le 5 juillet 1996, il n’était pas dans un état d’«affect émotionnel». En réalité, un expert avait conclu que, lors de son interrogatoire ce jour‑là, il était dans un état d’émotivité psychologique.

2.8Le 8 juillet 1997, l’auteur a fait appel de sa condamnation devant la cour militaire du district d’Extrême‑Orient laquelle, le 16 décembre 1997, a confirmé le jugement. Selon l’auteur, il avait demandé à être présent lors de l’examen de son appel, mais la décision a été rendue en son absence.

2.9L’auteur a ensuite formé un recours, sans succès, devant la Cour suprême de la Fédération de Russie. Il soutient que la Cour suprême a examiné superficiellement son recours, en violation des normes du droit interne et du droit international.

2.10À une date non précisée, l’auteur a saisi la Cour européenne des droits de l’homme à propos des mêmes faits. Le 31 mars 2000, la Cour a rejeté la demande comme irrecevable ratione temporis.

Teneur de la plainte

3.L’auteur se dit victime de violations par la Fédération de Russie de ses droits garantis par les articles 2, 7, 9, 14 et 26 du Pacte.

Observations de l’État partie

4.1Le 26 juin 2003, l’État partie a déclaré que l’auteur avait été reconnu coupable de corruption passive et d’une tentative de corruption. La somme reçue illégalement s’élevait à 17,5 millions de roubles, et lui avait été remise par un intermédiaire (M. Ponamoriov) le 6 janvier 1996 de la part du Chef du Service des combustibles et lubrifiants de l’unité militaire no 51 480, Mayor Nikitin, en vue de dissimuler le vol et la revente illégale de quelque 19 000 litres d’essence prélevés sur les réserves de l’armée. En outre, fin janvier 1996, l’auteur a eu connaissance d’un plan de fraude alimentaire aux dépens de l’unité militaire no 52 786. Agissant de nouveau par l’intermédiaire de M. Ponamoriov, il a tenté d’extorquer 1 000 dollars des États‑Unis au chef des approvisionnements de l’unité, M. Nitaliev, pour ne pas ouvrir d’enquête officielle.

4.2Tant l’enquête préliminaire que le procès de première instance ont été menés de manière exhaustive et objective. Le 12 janvier 2001, le Présidium de la cour du district d’Extrême‑Orient a fait droit à la demande de son vice‑président aux fins d’un réexamen de l’affaire dans le cadre d’une procédure de contrôle. Les jugements précédents ont été modifiés et l’auteur a été finalement condamné à cinq ans de prison.

4.3L’État partie ajoute qu’en raison des nombreuses réclamations de l’auteur, la légalité et les motifs de sa condamnation ont été de nouveau examinés à trois reprises par la Cour suprême (dans le cadre de la procédure de contrôle) et que l’auteur a obtenu des réponses motivées de plusieurs juges, dont le Vice‑Président de la Cour suprême.

4.4Selon l’État partie, les allégations de l’auteur dans le contexte de la présente communication ne comportent aucun argument convaincant pouvant faire douter de la légalité de sa condamnation. Ses griefs portant sur le caractère incomplet de l’enquête préliminaire et de la procédure devant le tribunal, le fait que sa culpabilité n’aurait pas été établie, les failles de la procédure pénale, la partialité du tribunal pour l’appréciation des éléments de preuve, etc., figuraient déjà dans son appel. Ils ont été dûment examinés par les juridictions, notamment par la Cour suprême, et ont été rejetés. L’auteur a obtenu des décisions motivées concluant que ces allégations n’étaient pas fondées.

4.5Contrairement aux allégations de l’auteur, tous les faits relatifs à ses activités délictuelles ont été confirmés par les dépositions sous serment de plusieurs témoins (MM. Ponomarev, Nikitin, Nitaliev, Gusarin, Kosilov, Padalki, Beznosov, Galuzion et Besedin). Ces dépositions étaient cohérentes et concordantes. La culpabilité de l’auteur a aussi été établie par d’autres éléments de preuve, notamment de nature documentaire.

4.6L’affirmation de l’auteur selon laquelle les témoins à charge avaient un intérêt dans l’affaire n’a pas été confirmée à la lumière des autres éléments de preuve. En plus de ces témoignages, le tribunal a pris en considération les aveux de l’auteur durant l’enquête préliminaire, qui corroborent aussi bien les dépositions des témoins que les autres éléments de preuve. L’allégation selon laquelle il aurait été contraint d’avouer est dépourvue de fondement comme le montre l’enregistrement vidéo des interrogatoires. En outre, selon la conclusion du psychologue, au moment de l’interrogatoire et lors de sa confrontation avec M. Ponomarev (les 5, 6 et 8 juillet 1996), l’auteur n’était pas dans un état d’«affect émotionnel», et il était donc à même de comprendre correctement la teneur des actes d’investigation, était conscient de l’importance de ses dépositions, et capable de contrôler ses paroles. Il n’a été décelé aucune particularité psychologique qui aurait pu conduire l’auteur à témoigner contre lui‑même. Les affirmations de l’auteur selon lesquelles il aurait été soumis à des méthodes d’investigation illégales n’ont pas été confirmées par les éléments du dossier pénal.

4.7Selon l’État partie, la décision d’engager une action pénale contre l’auteur était légale et fondée. Après avoir reçu un rapport du Procureur militaire de la garnison de Krasnorechensk à propos des actes de corruption, le Procureur militaire du district d’Extrême‑Orient a ordonné d’engager l’action et a désigné l’équipe chargée de l’enquête. Après les actes d’investigation préliminaire, l’auteur a été provisoirement suspendu de ses fonctions et a été prié de s’engager par écrit à ne pas quitter le pays. Lorsqu’il est ensuite apparu clairement qu’il avait commis une infraction grave, il a été arrêté. Selon l’État partie, toute la procédure a été conduite conformément à la loi relative au Bureau du Procureur et à la Constitution de la Fédération de Russie.

4.8Il ressort du dossier pénal que M. Nitaliev a refusé de verser une rétribution occulte à l’auteur et, après avoir consulté un avocat, a signalé la situation à ses supérieurs. Le Procureur militaire de la garnison, M. Besedin, a déclaré avoir reçu la visite, le 19 mars 1996, d’un représentant des services spéciaux qui l’a informé que l’auteur avait reçu des paiements occultes et avait tenté d’en obtenir d’autres. Le même jour, le Procureur a interrogé plusieurs personnes à ce propos et, le 21 mars 1996, il a fait rapport au Procureur militaire du district d’Extrême‑Orient. L’affirmation de l’auteur selon laquelle son supérieur aurait fait une fausse déposition ne correspond pas aux éléments du dossier pénal, et c’est à juste titre que les tribunaux ont retenu celle‑ci à titre de preuve.

4.9Les témoins Gusarin, Nikitin et Grigoriev ont fait des dépositions concordantes et cohérentes, ultérieurement corroborées par d’autres éléments de preuve. Le fait que les personnes ayant remis la somme occulte ne se souvenaient pas de la date ni du montant exacts ne permet pas de mettre en doute la véracité de leur déposition.

4.10L’État partie affirme en outre que le tribunal a correctement apprécié l’analyse des revenus et des dépenses de la famille Donskov pour la période allant de 1995 à mars 1996. Les données ont fait apparaître que les dépenses de la famille ont excédé ses revenus d’un montant qui correspond plus ou moins à la somme perçue de manière occulte. Même si l’analyse était approximative, elle était fondée sur les données recueillies lors de l’enquête. Devant le tribunal, cette analyse a été rapprochée d’autres éléments et a été prise en considération parce qu’elle corroborait les autres éléments de preuve. C’est pourquoi le tribunal a rejeté la demande de l’auteur tendant à une nouvelle expertise de ses revenus et dépenses.

4.11Contrairement à ce qu’il affirme, l’auteur a été autorisé à prendre connaissance de son dossier pénal. Le 21 février 1997, il a été informé que l’enquête préliminaire était achevée et a reçu communication de tous les éléments du dossier. Le 4 mars 1997, cependant, il n’avait examiné que 167 pages du premier volume, et il a refusé de poursuivre l’examen en présentant des requêtes non prévues par la loi. À la suite de cela, le 13 mars 1997, l’enquêteur, avec l’autorisation d’un procureur, a reporté au 28 avril 1997 le terme du délai accordé pour son examen du dossier. Celui‑ci a donc été étudié par l’auteur. Cela est confirmé par les signatures qu’il a apposées au dos de la totalité des documents, et il ne l’a pas contesté devant le tribunal. En conséquence, ses allégations relatives au contenu du dossier et au fait qu’il n’aurait pu l’étudier sont dénuées de fondement. L’acte d’accusation de l’auteur a été dûment établi et versé au dossier pénal. Il a été signé par l’enquêteur et par le procureur chargé de l’approuver. L’auteur en a reçu un exemplaire.

4.12Contrairement à ce qui est affirmé par l’auteur, sa déposition et celles des témoins ont été correctement transcrites. Les observations de l’auteur concernant le procès‑verbal des débats ont été examinées le 20 novembre 1997. Certaines d’entre elles ont été admises et incluses dans la version définitive.

4.13L’État partie soutient que la culpabilité de l’auteur a été pleinement établie. La peine prononcée correspondait tant aux circonstances de l’affaire qu’à la personnalité de l’auteur. Le tribunal de première instance était territorialement compétent pour juger l’auteur. Dans ces conditions, les allégations de l’auteur à cet égard sont dénuées de fondement.

Commentaires de l ’ auteur sur les observations de l ’ État partie

5.1Le 26 août 2003, l’auteur a réitéré ses allégations initiales. Le 5 décembre 2003, il a présenté ses commentaires sur les observations de l’État partie. Il affirme que l’État partie n’a pas présenté d’arguments convaincants pour réfuter ses allégations, et qu’il n’a pas répondu à celles concernant le caractère incomplet de l’enquête préliminaire et de l’instruction du tribunal, la violation des règles de procédure pénale, et la partialité du tribunal.

5.2Il insiste sur le fait que plusieurs témoins qui ont déposé contre lui se connaissaient et s’étaient précédemment livrés ensemble à des activités illégales. Il rappelle que dans le cadre de la vérification qu’il avait menée, il avait reçu des menaces.

5.3L’auteur conteste la valeur probante de plusieurs des éléments de preuve à charge, comme l’analyse des revenus de sa famille, les comptes rendus des actes de perquisition et de saisie, etc. Il explique être passé aux aveux à cause des menaces des enquêteurs qui lui ont dit que sa femme pourrait subir des violences et que lui‑même, en tant que procureur, pourrait être maltraité en détention. On lui a assuré que s’il avouait, il serait immédiatement libéré. Il réaffirme qu’il était dans un état d’angoisse émotionnelle lors de l’interrogatoire du 5 juillet 1996. Durant l’enquête, toutes ses requêtes adressées aux instances supérieures ont été renvoyées aux autorités contre lesquelles elles étaient dirigées.

5.4Il soutient en outre qu’il était inutile de le placer en détention provisoire parce qu’il ne s’est pas soustrait à la justice. L’argument de l’État partie selon lequel il a été placé en détention lorsqu’il est apparu qu’il avait commis une infraction grave est dénué de fondement parce que les charges contre lui n’ont jamais varié après l’ouverture de l’affaire pénale.

5.5L’auteur soutient en outre avoir demandé au tribunal de faire citer comme témoin l’agent des services secrets qui aurait prétendument informé son supérieur des actes de corruption, mais que sa demande a été rejetée. Il réaffirme que son supérieur a fait de fausses dépositions, puisqu’il était au courant des vérifications qu’il avait menées.

5.6L’auteur conteste l’invocation par l’État partie du témoignage de M. Kosilov, et explique que celui‑ci était en réalité responsable des activités de MM. Nikitin et Gusarin et, de ce fait, avait un intérêt dans l’affaire. À propos de l’observation de l’État partie concernant l’oubli par les témoins du montant exact de la somme et de la date du paiement, l’auteur affirme qu’aux termes de l’article 68 du Code de procédure pénale «… l’existence de l’infraction (temps, lieu, moyens employés, et toutes autres circonstances entourant la commission de l’infraction)» doit être prouvée en matière pénale. Or, cela n’a pas été fait en l’espèce.

5.7S’agissant de l’affirmation selon laquelle il aurait reçu des réponses détaillées à toutes ses requêtes, l’auteur fait observer qu’en réalité il n’a reçu que deux réponses positives. Il relève que, conformément à l’article 131 du Code de procédure pénale (2001), un accusé ne peut se voir refuser le droit de faire citer des témoins ni de faire procéder à d’autres mesures d’instruction, si cela peut avoir une importance pour l’action pénale.

5.8L’auteur soutient que la déclaration de l’État partie selon laquelle l’enquêteur M. Morozov a été interrogé comme témoin est dépourvue de fondement.

5.9Il conteste en outre l’invocation par l’État partie d’un compte rendu d’enquête en ce qui concerne l’affirmation de M. Ponomarev selon laquelle certains des objets saisis au domicile de l’auteur avaient été acquis avec l’argent obtenu illégalement. Il affirme que ce témoin n’était pas présent lors de l’achat des objets. De plus, bien que ni le compte rendu ni les objets en question n’aient été examinés à l’audience, ils sont énumérés comme éléments de preuve dans le jugement. L’auteur ajoute qu’il a vainement demandé aux enquêteurs d’interroger les personnes qui lui avaient vendu les objets, et qu’il avait acquis ceux‑ci avant les événements incriminés, comme il l’a dit au tribunal.

5.10Le 21 février 1997, l’auteur n’a reçu que le premier volume de son dossier pénal. Contrairement aux règles de procédure, le contenu n’était pas indexé et les pages n’étaient pas numérotées. Il s’en est plaint et a refusé de poursuivre l’examen. L’enquêteur a alors numéroté les pages en sa présence. L’auteur a ensuite reçu communication d’autres volumes, de nouveau sans liste des pièces et avec des pages en désordre. Selon lui, l’absence de numérotation des pages montre l’intention des enquêteurs de modifier le dossier pénal ultérieurement. Pour éviter cela, il a demandé que les pages soient numérotées au stylo et non au crayon. En réponse, on lui a fixé un délai pour prendre connaissance de son dossier pénal. Il s’est plaint auprès du Bureau du Procureur général, qui a transmis sa réclamation au Procureur du district d’Extrême‑Orient, c’est‑à‑dire l’organe contre les actions duquel celle‑ci était dirigée. Le Bureau du Procureur du district d’Extrême‑Orient l’a donc rejetée.

5.11L’auteur réaffirme que l’exemplaire de l’acte d’accusation qu’il a reçu ne portait pas la signature du procureur censé l’approuver, et ne reflétait pas correctement ses moyens de défense ni les arguments à charge.

5.12L’auteur réaffirme une fois encore que le jugement ne relatait pas correctement ses propres dépositions ni celles des témoins, et que le procès‑verbal des débats, établi tardivement, était incorrect. Ses observations concernant celui‑ci ont été examinées par le tribunal le 20 novembre 1997 en son absence, et deux points seulement ont été modifiés. Il a demandé à connaître les motifs de la décision du tribunal, mais ne les a jamais reçus.

5.13Enfin, l’auteur réaffirme qu’il a été jugé par un tribunal incompétent. Alors que les faits incriminés ont été prétendument commis au sein de la garnison de Krasnorechensk, dans le ressort du tribunal militaire de Krasnorechensk, il a été jugé par le tribunal militaire de la garnison de Khabarovsk.

Observations complémentaires de l ’ État partie

6.1Le 25 juin 2004, l’État partie a présenté des observations complémentaires et noté que les commentaires de l’auteur constituaient de nouveau une évaluation des éléments utilisés par les tribunaux pour apprécier sa culpabilité. Il relève en particulier les allégations de l’auteur faisant valoir que les témoins à charge avaient un intérêt dans l’affaire, que tous les éléments de preuve nécessaires n’ont pas été évalués, que ses aveux ont été obtenus de manière illégale, et que sa culpabilité n’a pas été établie. Il affirme que ces allégations ont été examinées et rejetées par les tribunaux de première et de seconde instance, ainsi que par la Cour suprême.

6.2Toutes les requêtes de l’auteur, y compris celles tendant à faire citer d’autres témoins, ont été examinées par les juges et ont reçu une réponse motivée. La prétendue partialité du tribunal n’est pas corroborée par les faits. Les allégations de l’auteur selon lesquelles il aurait avoué sous la menace ont été examinées par le tribunal avec l’aide d’un psychologue et il a été conclu qu’elles étaient dénuées de fondement. Le jugement s’est fondé sur les éléments de preuve examinés à l’audience en présence de toutes les parties.

6.3L’affirmation de l’auteur relative à l’irrecevabilité de l’analyse des revenus et des dépenses de sa famille est incorrecte; l’analyse de pièces écrites correspond aux exigences de la procédure pénale.

6.4Contrairement aux allégations de l’auteur, tous les éléments de l’infraction ont été établis − temps, lieu et mode opératoire − ainsi que le montant du versement occulte et les circonstances du paiement, tels qu’ils sont relatés dans le jugement.

6.5Le droit de l’auteur de consulter son dossier pénal à la fin de l’enquête n’a pas été violé. L’article 201 du Code de procédure pénale alors en vigueur n’exigeait pas une liste des pièces du dossier et ne précisait pas les modalités de numérotation. L’utilisation du crayon n’était pas illégale, et n’indiquait pas l’intention des enquêteurs de modifier le contenu du dossier ultérieurement. Le refus de l’auteur de prendre connaissance du dossier ne saurait être considéré comme constituant une violation du droit procédural. Il s’agit là d’un droit et non d’une obligation pour l’accusé. L’auteur a refusé d’examiner son dossier pénal sous un prétexte inventé.

6.6Contrairement aux allégations de l’auteur, l’acte d’accusation le concernant a été établi conformément aux exigences de la procédure pénale alors en vigueur, ce qui a été confirmé d’une part par le Procureur qui l’a approuvé, et d’autre part par les tribunaux. L’absence de visa du procureur qui avait approuvé l’acte d’accusation sur l’exemplaire remis à l’accusé ne constitue pas une violation de la procédure pénale.

6.7La décision de déférer l’affaire concernant l’auteur au tribunal militaire de la garnison de Khabarovsk a été prise en conformité avec le Code de procédure pénale alors en vigueur, l’infraction ayant été commise sur le territoire de la ville de Khabarovsk.

Commentaires complémentaires de l ’ auteur

7.1L’auteur a présenté des commentaires complémentaires le 30 septembre 2004. À propos des observations de l’État partie selon lesquelles tous ses griefs ont été examinés par les tribunaux, il réaffirme que le tribunal de première instance n’a pas examiné la totalité des éléments de preuve énumérés dans l’acte d’accusation, que plusieurs de ses requêtes ont été rejetées sans justification, et que la cour d’appel a examiné son affaire en son absence.

7.2L’auteur se réfère à plusieurs décisions interprétatives de la Cour suprême, concernant notamment la motivation du refus d’un tribunal de rechercher des éclaircissements sur des questions intéressant l’affaire, l’appréciation des éléments de preuve, l’égalité des armes, le strict respect des règles en vue d’une appréciation exhaustive, complète et objective des éléments du dossier pénal, l’élaboration des procès‑verbaux d’audience, le rôle de la défense en matière pénale, l’irrecevabilité des éléments de preuve recueillis en violation de la loi, et les droits de l’accusé. Il soutient que les directives de la Cour suprême énoncées dans de telles décisions s’imposent à tous les tribunaux mais que, dans la pratique, certains n’en tiennent pas compte.

7.3L’auteur affirme que dans le contexte de son affaire, les autorités ont saisi des pièces qui confirment les activités illégales de certains témoins à charge, mais que ces pièces ont disparu. La saisie elle‑même est confirmée par un compte rendu versé à son dossier. Néanmoins, une lettre d’un procureur indique que les documents en question n’ont pas été reçus par le Bureau du Procureur.

7.4Le tribunal n’a pas vérifié sa déclaration concernant l’enregistrement des investigations qu’il avait menées à l’encontre de MM. Nikitin et Padalki, ce qui démontrerait que le tribunal a manqué à son devoir d’objectivité et d’impartialité.

Observations additionnelles de l ’ État partie

8.1Le 20 mai 2005, l’État partie a présenté des informations additionnelles. Il fait observer que de nouvelles vérifications confirment que les allégations de l’auteur sur la légalité de sa condamnation, contenues dans ses nombreuses plaintes, ont été examinées par le parquet et les tribunaux et jugées infondées. Les griefs de l’auteur quant à l’existence, lors de l’enquête préliminaire et devant le tribunal, de nombreuses violations de la procédure pénale et du droit international, sont dénués de fondement. Sa référence à des décisions de la Cour suprême ne vise pas des actes spécifiques des enquêteurs ou des tribunaux dans son dossier.

8.2L’État partie fait en outre observer que les arguments de l’auteur selon lesquels il était innocent et aurait été diffamé par plusieurs témoins, et contraint d’avouer, ont été examinés à de nombreuses reprises par les tribunaux et n’ont pas été confirmés. La tentative de l’auteur de mettre en doute la recevabilité et la fiabilité de certains des éléments de preuve utilisés devant le tribunal pour l’établissement de sa culpabilité repose sur une interprétation aléatoire du droit national de procédure pénale.

8.3Le calcul des revenus et des dépenses de la famille de l’auteur était fondé sur des pièces justificatives et n’enfreignait pas les dispositions du Code de procédure pénale. Ce calcul a été examiné par le tribunal et a été considéré comme objectif et digne de foi.

8.4Les griefs de l’auteur quant à l’incompétence territoriale du tribunal dans son affaire correspondent aussi à une interprétation aléatoire du droit national. Étant donné sa position de procureur au sein de la garnison de Krasnorechensk, son cas ne pouvait être examiné par le tribunal militaire de cette garnison en vertu des dispositions du Code de procédure pénale. Pour ce motif, et conformément aux règles du Code de procédure pénale, le Président de la cour du district d’Extrême‑Orient a transmis l’affaire au tribunal de la garnison de Khabarovsk.

8.5L’État partie fait valoir enfin que le grief de l’auteur concernant son absence lors de l’examen de son appel doit aussi être considéré comme mal fondé, dès lors que la loi alors en vigueur (art. 335 du Code de procédure pénale) ne prévoyait pas la présence obligatoire d’un accusé lors de l’examen de son appel.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

9.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son Règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

9.2Le Comité relève, comme il est tenu de le faire par le paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même question a été soumise à la Cour européenne des droits de l’homme (requête no 54976/00) et déclarée irrecevable ratione temporis le 31 mars 2000. En conséquence, le Comité considère qu’il n’est pas tenu par la restriction résultant de la disposition susmentionnée. Il note aussi, comme l’exige le paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif, qu’il n’est pas contesté que les recours internes ont été épuisés.

9.3Le Comité a noté que l’auteur invoque une violation de l’article 7 du Pacte, sans expliquer pleinement ce point. En l’absence de toute autre information à cet égard, le Comité considère que cette partie de la communication est insuffisamment étayée et est donc irrecevable en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

9.4L’auteur prétend que son arrestation était illégale, ce qui soulève des questions au regard de l’article 9 du Pacte. L’État partie n’a pas précisément répondu à cette allégation, mais a expliqué que l’auteur n’avait été arrêté que lorsqu’il était apparu clairement qu’il était soupçonné d’une infraction grave. Le Comité note en outre que, comme l’a dit l’auteur lui‑même, la légalité de son arrestation a été contrôlée par les tribunaux qui ont jugé que celle‑ci était régulière. Dans ces conditions, et en l’absence de toute autre information à cet égard, le Comité considère que cette partie de la communication est insuffisamment étayée aux fins de la recevabilité et est donc irrecevable en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

9.5Le Comité a noté les griefs de l’auteur concernant la prétendue partialité du tribunal dans cette affaire. L’État partie a répondu que le procès de première instance avait été mené de manière exhaustive et objective et que l’affaire avait été réexaminée à de nombreuses reprises, notamment par la Cour suprême. Il a aussi affirmé que les allégations de l’auteur relatives à la partialité du tribunal avaient été examinées par les juridictions et que l’auteur avait obtenu une réponse motivée concluant que ces allégations n’étaient pas fondées. En l’absence de toute autre information à cet égard, le Comité considère que cette partie de la communication est irrecevable faute d’avoir été suffisamment étayée, en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

9.6Le Comité a pris note des allégations de l’auteur concernant l’absence de motifs et l’illégalité de l’acte d’accusation et du jugement, la manière dont ceux-ci, ainsi que le procès‑verbal des débats, ont été rédigés, le traitement de l’affaire par les enquêteurs et par les tribunaux, ainsi que l’incompétence territoriale du tribunal de première instance; le refus des enquêteurs et du tribunal de répondre à certaines de ses requêtes, notamment la manière dont son dossier a été organisé et lui a été communiqué, et les obstacles à l’exercice de son droit d’examiner le dossier; la façon dont le tribunal a admis ou rejeté les éléments de preuve et apprécié les circonstances de l’affaire en général; le refus de citer certains témoins à comparaître; le manque de fiabilité de certains témoins à charge; le mode d’évaluation de ses revenus/dépenses; etc. Le Comité note que l’État partie a réfuté ces allégations comme étant mal fondées. Le Comité relève que ces griefs ont trait essentiellement à l’appréciation des faits et des éléments de preuve par les tribunaux de l’État partie. Il rappelle que c’est généralement aux tribunaux des États parties qu’il appartient d’apprécier les faits et les éléments de preuve dans une affaire donnée, à moins qu’il ne soit prouvé que cette appréciation a été clairement arbitraire ou a constitué un déni de justice. En l’espèce, le Comité considère que n’étant saisi ni des pièces du dossier ni du procès‑verbal des débats, ni d’aucune autre information utile qui lui aurait permis de vérifier si le procès avait effectivement été entaché des vices allégués par l’auteur, cette partie de la communication est irrecevable faute d’avoir été suffisamment étayée conformément à l’article 2 du Protocole facultatif.

9.7L’auteur a aussi invoqué une violation des droits que lui confère l’article 26 du Pacte, sans développer son argumentation. En l’absence de toute autre information pertinente, le Comité considère que cette partie de la communication est irrecevable faute d’avoir été suffisamment étayée conformément à l’article 2 du Protocole facultatif.

9.8Le Comité décide que les autres allégations de l’auteur concernant le fait qu’il n’a pas pu être présent lors de l’examen de son appel, qui soulèvent des questions au regard de l’article 2 et du paragraphe 3 d) de l’article 14 du Pacte, sont suffisamment étayées aux fins de la recevabilité.

Examen au fond

10.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par les parties.

10.2L’auteur affirme que les droits de la défense ont été violés parce que, bien qu’il ait demandé à être présent, c’est en son absence que la cour d’appel a examiné son affaire. L’État partie a répondu que le Code de procédure pénale alors en vigueur ne prévoyait pas la présence obligatoire de l’accusé devant l’instance d’appel. Le Comité note que les éléments dont il est saisi ne lui permettent pas de conclure qu’en l’espèce la cour d’appel n’a pas dûment examiné l’ensemble des faits et éléments de preuve de l’affaire, ainsi que le jugement de première instance. En l’absence de toute autre information pertinente, le Comité considère que les faits tels qu’ils sont présentés ne constituent pas une violation des droits de l’auteur au regard du paragraphe 3 d) de l’article 14 du Pacte.

10.3Compte tenu de ce qui précède, le Comité ne juge pas nécessaire d’examiner séparément les griefs de l’auteur au titre de l’article 2 du Pacte.

11.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, est d’avis que les faits dont il est saisi ne font apparaître aucune violation des droits invoqués par l’auteur en vertu du Pacte.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]

APPENDICE

O pinion individuelle de M me Ruth Wedgwood

L’auteur, qui est un avocat militaire russe condamné pour corruption passive dans l’exercice de ses fonctions officielles, a mis en cause l’équité de son procès sur plusieurs points. Le Comité a conclu que les pièces versées au dossier ne permettaient pas d’étayer la plupart de ses allégations d’erreur.

Le Comité a toutefois relevé à juste titre qu’un des griefs de l’auteur était recevable, à savoir qu’on l’avait indûment empêché d’assister à l’examen de son appel (voir le paragraphe 2.8 des constatations du Comité).

Comme le note le Comité, l’État partie répond à cette allégation en faisant simplement valoir que «le Code de procédure pénale alors en vigueur ne prévoyait pas la présence obligatoire de l’accusé devant l’instance d’appel» (voir le paragraphe 10.2 des constatations du Comité).

Or, ce rappel du droit positif ne règle pas la question de «l’égalité de moyens». Comme le Comité l’a affirmé à de nombreuses occasions, au pénal, la défense doit avoir la possibilité de présenter ses arguments. Une argumentation unilatérale à laquelle le procureur se livrerait devant une juridiction d’appel en l’absence du défendeur et de son avocat ne serait pas compatible avec le principe de l’égalité de moyens et avec les prescriptions du paragraphe 5 de l’article 14 du Pacte.

Il convient également de noter que le Code de procédure pénale applicable à l’époque pouvait garantir le droit de l’accusé et même d’une tierce personne d’être présent à l’examen d’un appel, comme il ressort du paragraphe 1 de l’article 335 du Code de procédure pénale de la Fédération de Russie, en date du 15 février 1997: «Pendant l’examen d’une affaire en appel, le procureur se prononce sur les éléments de preuve et la légalité du jugement. Le défendeur peut prendre part à l’examen en appel d’une affaire.».

Voir également le paragraphe 2 de l’article 335 du Code de procédure pénale: «Il peut être demandé au tribunal d’autoriser la participation du défendeur à l’examen de l’appel; lorsqu’il participe à l’examen, le défendeur est dans tous les cas autorisé à donner des explications.».

En ce qui concerne la participation d’une tierce personne, les paragraphes 3 et 4 de l’article 335 disposent que «Pendant l’examen en appel d’une affaire, d’autres parties peuvent participer, comme indiqué à l’article 325» et que «l’absence des tierces personnes qui ont été dûment informées de la date de l’examen n’empêche pas l’examen de l’affaire.»

Dans les paragraphes liminaires de l’avis qu’elle a rendu le 16 décembre 1997 concernant l’affaire de l’auteur, la cour militaire du district d’Extrême‑Orient a indiqué qu’elle avait «entendu le rapport du colonel chargé de l’affaire et les conclusions du Chef du Département des poursuites militaires du district d’Extrême‑Orient.» L’État partie n’a pas fait valoir que ce «rapport» portait simplement sur les pièces. La participation d’un défendeur et de son conseil à une audience en appel à laquelle l’État partie participe aussi, est importante car elle permet aux deux parties de répondre sur un pied d’égalité aux questions qui peuvent surgir au fil des débats.

Un tribunal de justice militaire peut avoir des impératifs différents de ceux d’une juridiction civile mais l’État partie ne fournit aucun argument pour justifier le fait qu’il ne pouvait pas faire effectivement participer l’accusé à l’examen de son appel, si ce n’est l’argument qu’il n’y était pas obligé. Il se peut que la législation russe de l’époque soit ainsi conçue mais cela ne répond pas à la question de savoir si les garanties du Pacte ont été respectées.

(Signé) Ruth Wedgwood

[Fait en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]

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