Nations Unies

CED/C/URY/AI/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

19 juillet 2019

Français

Original : espagnol

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Dix-septième session

30 septembre-11 octobre 2019

Point 7 de l’ordre du jour provisoire

Examen des rapports des États parties à la Convention

Renseignements complémentaires soumis par l’Uruguay en application du paragraphe 4 de l’article 29 de la Convention *

[Date de réception: 26juin 2019]

I.Cadre juridique général

1.Depuis l’entrée en vigueur de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (ci-après « la Convention »), aucun fait constitutif de cette infraction pénale n’a été enregistré dans le pays.

2.Aucun cas de disparition forcée au sens de la définition donnée à l’article 2 de la Convention n’ayant été signalé au cours de la période considérée (mai 2013-avril 2019), le présent rapport est axé sur les progrès accomplis et sur les affaires toujours en instance en Uruguay dans l’attente de l’élucidation des cas de disparition forcée survenus entre juin 1968 et février 1985, puisque cette infraction est considérée comme continue ou permanente tant que le sort des victimes ou le lieu où elles se trouvent n’est pas élucidé.

3.La question des disparitions forcées revêt une importance de premier plan pour l’État uruguayen. Depuis le rétablissement de la démocratie après le régime de facto (1973‑1985), l’Uruguay a adhéré à de nombreux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Il a signé la Convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes en 1994 et l’a ratifiée par la loi no16.724 du 23novembre 1995.

4.Le Gouvernement uruguayen a ainsi progressivement mis sa législation en conformité avec le droit international des droits de l’homme et introduit dans sa législation des règles et normes internationales relatives aux disparitions forcées tout en abrogeant les dispositions qui étaient incompatibles avec ces règles et ces normes ou en annulant leurs effets.

5.La Constitution uruguayenne dispose en son article 7 que les habitants de la République doivent être protégés dans leur droit à la vie, à l’honneur, à la liberté, à la sécurité, au travail et à la propriété. Nul ne peut être privé de l’un quelconque de ces droits si ce n’est en vertu d’une loi adoptée dans l’intérêt général.

6.De plus, le droit de ne pas être soumis à une disparition forcée est implicitement consacré par l’article 72 de la Constitution qui prévoit que les droits, devoirs et garanties énoncés dans la Constitution sont sans préjudice des autres droits, devoirs et garanties qui sont inhérents à l’être humain ou qui découlent du mode de gouvernement républicain.

7.L’incrimination de la disparition forcée dans le droit pénal uruguayen est récente et fait suite à l’adoption de la loi no18.026 du 4octobre 2006. Ce texte établit un cadre de coopération avec la Cour pénale internationale dans la lutte contre le génocide, les crimes contre l’humanité (ce qui comprend la disparition forcée) et les crimes de guerre.

8.Avant que la disparition forcée ne soit érigée en infraction pénale, le pouvoir législatif avait déjà introduit des dispositions tendant au règlement des aspects civils de la disparition forcée de personnes.

9.Ainsi, en vertu de la loi no17.894 du 19septembre 2005, les personnes dont la disparition forcée sur le territoire national a été confirmée dans le rapport final de la Commission pour la paix ont été déclarées «absentes pour cause de disparition forcée». Cette déclaration d’absence a permis, après des dizaines d’années, de procéder à l’ouverture de la succession légale des personnes déclarées «absentes» en vertu de cette disposition.

10.Plusieurs mois après l’adoption de cette loi, la disparition forcée de personnes a été introduite dans la législation uruguayenne en tant qu’infraction pénale, avec l’article 21 de la loi no18.026.

11.De plus, la loi no18.596 du 19octobre 2009 a établi l’illégitimité de l’action de l’État entre le 13 juin 1968 et le 28 février 1985 et a conclu à la responsabilité de l’État en ces termes : «La rupture de l’état de droit qui a empêché l’exercice des droits fondamentaux des individus, en violation des normes relatives aux droits de l’homme ou des normes du droit international humanitaire (…) est reconnue.» (art. 1er). La période visée par la loi, qui est plus longue que la durée du régime de facto, comprend les années précédant la rupture institutionnelle pendant lesquelles, comme on l’a vu, il y a eu des cas de disparition forcée.

12.Il est essentiel de mentionner ces textes qui n’entrent pas strictement dans la période couverte par le présent rapport, non seulement parce qu’ils expliquent ce qui s’est passé dans le pays avant la période considérée, mais aussi parce qu’ils témoignent de la volonté sincère de l’Uruguay de prévenir la disparition forcée et d’éviter que ne se reproduise, même marginalement, la triste expérience des décennies passées.

II.Mise en œuvre de la Convention en Uruguay

Renseignements d’ordre général

Groupe de travail pour la vérité et la justice

13.Au nombre des progrès réalisés, il convientdesignalerlacréation du Groupedetravail pourlavérité etlajustice en application du décret exécutif no131/2015 de mai 2015. Malgré la complexité de sa structure institutionnelle, ce Groupe de travail a bénéficié de ressources financières, matérielles et humaines pour s’acquitter de ses objectifs de manière directe ou au moyen d’accords.

14.Le Groupe de travail dispose d’équipes techniques de soutien composées d’archivistes, d’historiens et d’archéologues qui lui ont permis de poursuivre les fouilles sur des sites militaires ordonnées par la justice et, dans certains cas, de les achever. De la même manière et malgré quelques difficultés, il a pu avoir accès aux archives documentaires des services de répression qui, grâce à un ambitieux plan de conversion analogique-numérique, permettront de mener des recherches plus systématiques.

Parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité

15.En vertu de la loi no19.550 d’octobre 2017, le Bureau du Procureur général est habilité à transformer un parquet national en parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité. Ainsi, en application de la décision no075/2018 de février 2018, le parquet du 25eturno de Montevideo a été transformé en parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité et du personnel lui a été affecté.

16.La mise en place récente de ce parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité a donné un nouvel élan à la conduite des affaires judiciaires.

Ministère de la défense nationale

17.Le Ministère de la défense nationale a autorisé l’accès à ses archives et à ses bases de données dans le cadre des enquêtes menées sur des violations présumées des droits de l’homme commises pendant le régime civilo-militaire qui couvrent toutes les forces, agences et unités d’exécution.

18.Le Ministère de la défense nationale s’efforce d’élucider les cas de disparitions forcées survenues entre 1968 et 1985 en fournissant les informations et l’appui nécessaires aux organismes compétents dans le domaine des droits de l’homme, aux tribunaux et au parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité.

19.En application de la loi no18.381 relative à l’accès à l’information publique et notamment des dispositions de son article 12, toutes les demandes reçues font l’objet d’une réponse afin de garantir la transparence et le droit fondamental de toute personne d’avoir accès aux informations détenues par le Ministère de la défense nationale.

20.L’article 12 susmentionné, qui interdit d’invoquer la confidentialité en cas de violations des droits de l’homme, dispose que les sujets de droit auxquels s’applique la loi no18.381 ne peuvent invoquer aucune des réserves évoquées dans les articles précédents lorsque les informations demandées ont trait à des violations des droits de l’homme ou sont pertinentes pour enquêter sur des violations de ces droits, les prévenir ou les éviter.

21.En 2018, 99 demandes d’information émanant du pouvoir judiciaire et du Groupe de travail pour la vérité et la justice ont été traitées par l’intermédiaire de la Direction des affaires juridiques et notariales et des droits de l’homme.

22.En mars 2019, le Ministère de la défense nationale a collaboré aux fouilles menées sur le site du 14ebataillon de parachutistes ; elles se sont achevées sans que l’on y ait découvert la présence d’ossements.

23.Le parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité a ordonné la conduite de nouvelles fouilles sur des terrains occupés par l’armée, auxquelles le Ministère de la défense a apporté le concours voulu.

24.Un projet de loi organique régissant les forces armées et militaires, qui prévoit des améliorations en matière de droits de l’homme, a été élaboré en 2018 et récemment approuvé par la Chambre des députés. Ce texte abroge le décret-loi no14.157 du 21février 1974.

25.Le projet de loi susmentionné fait obligation à l’armée d’accomplir ses fonctions dans le respect des droits de l’homme et interdit d’invoquer le secret défense lorsque les informations demandées ont trait à une violation des droits de l’homme ou sont pertinentes pour enquêter sur des violations de ces droits, les prévenir ou les éviter.

26.En outre,le projet de loi en question dispose que le fait de donner un ordre dont l’exécution conduirait à une violation flagrante ou à une restriction illégitime des droits fondamentaux de l’homme constitue une faute très grave, et fait obligation à tous les militaires de dénoncer les ordres contraires aux dispositions de ladite loi.

Procès dit de l’« Opération Condor » tenu en Italie

27.Enmars2018, l’État uruguayen s’est constitué partie civile dans la procédure d’appel du jugement rendu dans l’affaire de l’« OpérationCóndor », tenu à Rome. Cette mesure prise par l’Uruguay est sans précédent pour ce qui est du soutien et de la coordination nécessaires à une telle affaire.

28.En mars 2019, le parquet de Rome a demandé la révision des peines prononcées en première instance et la condamnation à la perpétuité des 24 membres des juntes militaires de Bolivie, du Chili, du Pérou et de l’Uruguay accusés de la disparition de ressortissants italiens dans le cadre de l’opération Condor. Le parquet a principalement fondé sa requête sur les nouveaux éléments de preuve présentés par le représentant légal de l’État uruguayen.

Suivi de l’arrêt rendu dans l’affaire Gelman c. Uruguay

29.L’État uruguayen a reconnu sa responsabilité dans les actes de terrorisme d’État et la répression coordonnée menée au niveau régional dans le cadre de l’opération Condor. Au cours d’une cérémonie publique organisée le 21mars 2012, en application de l’arrêt rendu par la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans l’affaire Gelman, le Président José Mujica, en présence de membres des pouvoirs exécutif, judiciaire et législatif, a reconnu la responsabilité de l’État uruguayen et a souligné que sous le prétexte de la doctrine de la sécurité nationale, une politique systématique de répression des organisations sociales, syndicales et politiques avait été menée ainsi qu’une politique de persécution des membres de ces organisations et de surveillance de la société civile tout entière, autant de formes du terrorisme d’État. Il a également indiqué que l’État uruguayen s’était associé à l’opération Condor, exécutée en coordination avec l’Argentine, le Brésil, le Chili, la Bolivie et le Paraguay, afin de persécuter les habitants des pays concernés pour des motifs idéologiques, de procéder à leur arrestation et à leur transfert clandestin, ou de les assassiner et de les faire disparaître. Il a ajouté que l’on ignorait toujours le lieu où se trouvaient nombre de ces personnes, que l’on ne savait pas si elles avaient été tuées et qu’aujourd’hui encore, on ne connaissait pas le sort qui leur avait été réservé et que leurs dépouilles n’avaient pas été retrouvées.

30.En outre, l’État uruguayen continue de s’employer à appliquer l’arrêt rendu par la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans l’affaire Gelman c. Uruguay. Au moment de l’achèvement du présent rapport, l’Uruguay assurait le suivi de l’exécution de cet arrêt.

Condamnations prononcées pour des infractions commises pendant la période civilo‑militaire

Gregorio Álvarez et Juan Carlos Larcebeau

31.En septembre 2011, la Cour suprême de justice a confirmé la peine de 25 ans de réclusion criminelle prononcée à l’encontre du général à la retraite Gregorio Álvarez (ex‑Président de facto de la République) pour le meurtre avec circonstances aggravantes de 37personnes entre 1977 et 1978.

32.La Cour suprême de justice a également confirmé la peine de 20 ans de réclusion criminelle prononcée à l’encontre du capitaine de vaisseau retraité Juan Carlos Larcebeau pour le transfert clandestin de passagers depuis l’Argentine et pour le meurtre avec circonstances aggravantes de 37 personnes au crépuscule du régime civilo-militaire, de 1973 à 1985.

José Gavazzo, Ricardo Arab, Gilberto Vázquez, Ernesto Rama, Jorge Silveira, José Sande, Ricardo Medina

33.En mars 2009, José Gavazzo, Ricardo Arab, Gilberto Vázquez, Ernesto Rama, et Jorge Silveira, officiers retraités des forces armées, ont été condamnés à 25 ans de réclusion criminelle et Ricardo Medina et José Sande, tous deux ex-policiers, à 20 ans de réclusion criminelle. Ces condamnations portaient sur 28 meurtres avec la circonstance particulièrement aggravante de cumul réel d’infractions.

Ernesto Soca

34.En septembre 2010, Ernesto Soca, membre des forces armées, a été reconnu coupable de 28 meurtres avec circonstances particulièrement aggravantes et condamné à 15ans de réclusion criminelle.

Excuses de l’État pour deux crimes commis durant la dictature

35.Il convient de souligner qu’en mars 2019, le Président Tabaré Vásquez a présenté, au nom de l’État uruguayen, ses excuses aux familles de deux ressortissants argentins arrêtés en Uruguay et assassinés au Paraguay durant la dictature militaire.

Déclarations faites devant le tribunal spécial d’honneur à l’intention des officiers supérieurs de l’armée

36.Après la divulgation de déclarations faites devant le tribunal spécial d’honneur à l’intention des officiers supérieurs de l’armée concernant les agissements de Jorge Silveira Quesada et de José Nino Gavazzo Pereira, le Président de la République a ordonné que les témoignages des inculpés soient immédiatement transmis au Bureau du Procureur général pour enquête. Ces témoignages attestent le meurtre et la disparition forcée de l’activiste politique Roberto Gomensoro en 1973.

37.D’après les déclarations prononcées par les inculpés devant la juridiction en question, José Nino Gavazzo Pereira, notamment, aurait avoué des crimes et fait savoir que le tribunal d’honneur et le tribunal d’honneur d’Alzada avaient délibérément enfreint l’article 77 du décret no55/985 qui prévoit que lorsque le tribunal d’honneur intervient dans une affaire où il existe une présomption de délit, de droit commun ou militaire, le président du tribunal en informe immédiatement l’autorité supérieure compétente qui suspend la conduite de l’affaire jusqu’à ce qu’elle se soit prononcée.

38.De ce fait, le 1eravril 2019, le Président de la République a ordonné la révocation du commandant en chef de l’armée, chef d’état-major de la défense, et demandé au Sénat d’approuver la mise à la retraite d’office de quatre généraux de l’armée. Le Sénat a rejeté cette proposition par manque de voix, seuls les représentants du parti au pouvoir l’ayant soutenue.

39.En outre, le Procureur spécial chargé des crimes contre l’humanité a demandé à la justice de rouvrir l’affaire Gomensoro au vu des déclarations faites par d’anciens militaires devant le tribunal d’honneur à l’intention des officiers supérieurs de l’armée.

40.Il convient de souligner qu’en 2010, la justice avait condamné l’ancien colonel Juan Carlos Gómez, détenu pendant trois ans, pour le meurtre de l’activiste politique Gomensoro et acquitté José Nino Gavazzo.

41.Au moment de l’achèvement du présent rapport, les enquêtes sur cette affaire se poursuivaient.

Loi portant création de sites officiels commémorant des événements de l’histoire récente

42.La loi no19.641 a été promulguée le 13juillet 2018 afin de commémorer et de désigner officiellement des lieux où les victimes du terrorisme ou d’actes illégitimes commis par l’État ont subi des violations de leurs droits de l’homme pour des motifs politiques, idéologiques ou syndicaux. Elle porte création de la Commission nationale honoraire des sites de mémoire, qui est présidée par l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple et composée de représentants du Ministère de l’éducation et de la culture, de l’Université de la République, de l’Administration nationale de l’éducation publique, de deux organisations de la société civile actives dans ce domaine et de trois délégués du Réseau national des lieux de mémoire.

43.Les missions de la Commission honoraire sont, notamment, les suivantes: i) se prononcer sur les demandes de création et de désignation officielle de sites dédiés à la mémoire ; ii) veiller à la mise en fonction de ces sites et en assurer la protection ; iii)permettre l’identification des sites au moyen d’une plaque ou d’un autre signe distinctif; iii) aider à faire connaître leur emplacement et en faciliter l’accès ; iv)encourager l’établissement de commissions pour chaque site ; v) promouvoir les journées commémoratives ; vi) créer un catalogue national des lieux de mémoire et le tenir à jour.

44.Au moment de l’achèvement du présent rapport et depuis l’adoption de la loi no19.641, la Commission honoraire a décidé de créer trois lieux de commémoration : i)l’ancienne prison de Cabildo; ii) la zone de Toledo dans laquelle les dépouilles de Julio Castro et Ricardo Blanco ont été retrouvées; iii) le centre de détention clandestin de La Tablada, où une plaque commémorative avait déjà été apposée en application de la loi no18.596 de 2009 relative à la réparation.

45.En outre, le 3mars 2019, la Commission honoraire a décidé de placer un panneau devant le troisième commissariat de police de Carmelo et a approuvé la pose de cinq autres dont la date d’installation n’a pas encore été fixée. Les sites concernés sont : i) l’église San Bautista en hommage à Kleber Silva, dit « Père Maurice »; ii) le siège départemental de la police à Salto; iii) le siège historique de la Fédération uruguayenne des coopératives de logements par entraide mutuelle; iv) le commissariat de Chuy (département de Rocha); v)la caserne de Rocha (département de Rocha).

46.La Commission honoraire a décidé de consacrer un espace à la mémoire de Carlos Jacina Leiva dans la ville de San Javier (département de Río Negro), ce qui a été fait le 3mai 2019.

47.Enfin, par sa décision no7/2019 du 8mai 2019, la Commission honoraire a désigné comme lieu de mémoire les locaux situés au 2020 rue Eduardo Víctor Haedo, qui abritaient l’ancien Centre général de formation des officiers de réserve. Le bâtiment accueille aujourd’hui le siège du Centre des hautes études nationales, du Système national des opérations de paix et de l’Institut national des opérations de paix d’Uruguay.

48.Il convient de souligner qu’en application de la loi no18.596, le Ministère de l’éducation et de la culture a fait poser 31 plaques commémoratives dans différents lieux du pays.

49.De plus, en mai 2018, un mémorial a été inauguré dans la prison Libertad, en hommage aux 2872 prisonniers politiques qui y ont été détenus entre 1972 et 1985.

50.En décembre 2018, a été inauguré le mémorial érigé en hommage à Héctor Brum, María de los Ángeles Corbo, Floreal García, Mirtha Hernández et Graciela Estefanell, assassinés dans la ville de Soca après leur enlèvement à Buenos Aires, en août 1974, et leur transfert en Uruguay à bord de ce que l’on appelé le « Vol zéro ».

Lieu de mémoire de l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple

51.Le 16 décembre 2016, l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple a inauguré son nouveau siège dans le bâtiment qui, de 1970 à 1988, avait abrité les locaux du Service du renseignement de la défense, centre clandestin de détention et de torture et lieu emblématique de l’opération Condor, avant d’accueillir, de 1988 à 2012, le siège du Centre des hautes études nationales, relevant du Ministère de la défense.

52.Il a fallu réhabiliter un lieu emblématique pour reconstruire la mémoire sociale des faits survenus dans ce bâtiment pendant la période de terrorisme d’État et la création, dans ce lieu particulier, d’une institution chargée de défendre, promouvoir et protéger les droits de l’homme est un acte porteur d’une forte charge symbolique pour la démocratie.

53.La première exposition, qui s’est tenue le 27 juin 2018 à l’issue d’un processus participatif et d’une collaboration entre le conseil de direction de l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple et des survivants, des familles et des organisations sociales, avait pour objectif de transmettre la mémoire des faits survenus dans ce bâtiment en 1976 et qui ont marqué l’histoire récente du pays et de la région. Premier lieu de mémoire à avoir été réhabilité en Uruguay, ce site constitue un témoignage auquel le public a accès en permanence.

Réponse au paragraphe 8 des observations finales

54.Comme il est signalé plus haut, la Constitution uruguayenne dispose en son article 72 que les droits, devoirs et garanties expressément énoncés dans la Constitution sont sans préjudice des autres droits, devoirs et garanties qui sont inhérents à l’être humain ou qui découlent du mode de gouvernement républicain. L’Uruguay s’est donc conformé à l’ensemble des obligations internationales qui lui incombent en matière de droits de l’homme ; celles‑ci tiennent lieu de cadre général et il y est fait constamment référence lors de l’adoption des politiques publiques, des lois nationales et des décisions judiciaires. En résumé, les droits consacrés par les différents instruments internationaux, notamment par la Convention, peuvent être invoqués devant les tribunaux nationaux, lesquels peuvent les appliquer directement pour motiver leurs décisions.

Réponse au paragraphe 10 des observations finales

Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple

55.L’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple a été dotée du statut « A » en mai 2016, ce qui confirme sa pleine conformité aux Principes de Paris.

56.L’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple est composée d’organismes tels que le Mécanisme national d’établissement de rapports et de suivi des recommandations et, par conséquent, elle participe en qualité d’observateur à l’élaboration des rapports nationaux destinés aux organes de suivi des traités mais conserve son indépendance et son autonomie pour pouvoir élaborer et soumettre des rapports parallèles.

57.En ce qui concerne le renforcement de l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple, il est important de signaler que, depuis 2013, l’Institution emploie des fonctionnaires. Au début de ses travaux, en 2012 et 2013, elle ne comptait que 10 fonctionnaires détachés (relevant d’autres organes de l’État qui ont ainsi collaboré à la phase de mise en place), en plus des 5 membres du conseil de direction.

58.Au cours du premier semestre de 2016, l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple a engagé son propre personnel, à savoir 5 avocats, 6 psychologues, 1 diplômée en communication, 1 enseignant, 7 agents administratifs, 1 diplômée en sciences sociales et 1 assistant comptable.

59.En 2017, 6 autres fonctionnaires ont été recrutés, soit 1 assistant, 1 comptable et 2 avocats, ainsi que 1 enseignant et 1 diplômée en sciences sociales.

60.Le 31 juillet 2018, le Sénat a approuvé la loi relative à l’exécution du budget pour l’exercice 2017.

61.Comme il ressort de la session au cours de laquelle la loi susmentionnée a été approuvée, le Parlement a suivi une « politique de gestion fondée sur une utilisation mesurée des ressources ». C’est pourquoi, bien que la plupart des objectifs fixés aient été atteints, l’exercice 2017 s’est soldé avec une économie de 30 % sur le budget disponible.

62.Si cette situation ne signifie pas un affaiblissement de la position de l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple par rapport à l’époque de sa création, il est vrai qu’elle a influé sur la capacité de l’Institution à étendre ses attributions et à mener ses travaux avec davantage d’efficacité dans les domaines qui relèvent de son mandat.

63.En ce qui concerne la coopération de l’administration publique avec l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple, il convient de signaler que, par une décision du Ministère de l’intérieur datée du 20 juin 2017, le bureau des communications avec l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple a été créé dans le domaine du notariat ; il est chargé de traiter les actes adressés à l’Institution et de recueillir les informations nécessaires pour répondre aux requêtes et communications qui émanent de l’Institution et pour en accélérer le traitement.

64.La création de ce bureau a permis au Ministère de mieux gérer les dossiers présentés par l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple ou adressés à celle‑ci, de raccourcir les délais de réponse et d’assurer un suivi des affaires.

65.Le Ministère de la défense nationale, par l’intermédiaire de la Direction des affaires juridiques et notariales et des droits de l’homme, collabore avec l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple en lui fournissant les informations et le soutien dont elle a besoin.

66.Il convient en outre de mentionner que, le 31 juillet 2018, la Commission honoraire contre le racisme, la xénophobie et toutes les formes de discrimination et l’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple ont signé un protocole qui définit les critères et procédures à respecter en cas de plainte ou de requête concernant des actes de racisme, de xénophobie et toute autre forme de discrimination, ainsi que les mesures que doivent prendre les institutions signataires pour donner suite à ces plaintes et requêtes et pour coopérer entre elles.

Articles 1er à 7

Réponse au paragraphe 12 des observations finales

67.En Uruguay, la disparition forcée est érigée en infraction par le droit interne depuis l’adoption du paragraphe 1 de l’article 21 de la loi no 18.026 susmentionnée.

68.La loi no 18.026 érige également en infraction d’autres actes visés par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, y compris le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.

69.La loi uruguayenne, en son chapitre 2, titre II, va plus loin que la Convention, puisqu’elle qualifie les cas isolés de disparition forcée de crimes contre l’humanité.

70.La loi no 19.446 du 28 octobre 2016, qui modifie le régime de la libération anticipée et prévoit des peines de substitution à la privation de liberté dispose, en son article premier, que l’octroi d’une mesure de libération anticipée peut être limité lorsque diverses infractions « graves » sont commises ou qu’un crime visé par la loi no 18.026 est perpétré (al. k)).

71.L’adoption du nouveau Code de procédure pénale a permis de mettre en place d’autres solutions pour régler les conflits avec le droit pénal, de recourir à différentes formes de procédure accélérée et d’instaurer des exceptions au principe selon lequel la mise en mouvement de l’action pénale présente un caractère obligatoire.

72.Une exception est prévue notamment pour les crimes énoncés dans le Statut de Rome (loi no 18.026). Les actes visés sont les suivants :

Médiation extrajudiciaire (art. 382) − Cette mesure est applicable lorsqu’un comportement qui semble être délictueux n’est pas grave mais elle n’est pas envisageable en cas de torture, de disparition forcée, de traite des personnes, de crime contre l’humanité ou de génocide − conformément aux dispositions du Statut de Rome − d’acte susceptible de constituer une violation grave du droit international humanitaire, de trafic de stupéfiants et de terrorisme (art. 1er et 8 de la loi no 18.026 et art. 1er du Code pénal).

Principe d’opportunité (art. 100) − Il s’agit de la décision de ne pas exercer l’action pénale, que le procureur chargé de l’enquête prend pour des motifs de politique pénale. Il appartient au Bureau du Procureur général de définir, dans des instructions générales, les motifs de politique pénale à prendre en compte. Une telle décision doit être motivée et ne peut être prise que dans les cas expressément prévus par le législateur (infractions mineures qui ne portent pas gravement atteinte à l’intérêt public, délits dont la peine minimale ne dépasse pas deux ans d’emprisonnement, délits qui ne sont pas commis par des agents publics dans l’exercice de leurs fonctions, délits par négligence qui ont amené l’inculpé à éprouver un sentiment de détresse grave, délits commis il y a plus de quatre ans et dont l’auteur n’est passible d’aucune peine d’emprisonnement). Le principe d’opportunité ne s’applique pas dans les cas non prévus par la loi, lorsqu’il est établi, à l’issue de l’instruction, que l’infraction porte gravement atteinte à l’intérêt public ou dans les cas qui ne sont pas d’une importance mineure. Le Bureau du Procureur a adopté des instructions générales à cet égard. Le principe d’opportunité n’est pas applicable en cas de torture, de disparition forcée, de traite des personnes, de crime contre l’humanité ou de génocide − conformément aux dispositions du Statut de Rome − d’acte susceptible de constituer une violation grave du droit international humanitaire, de trafic de stupéfiants et d’acte de terrorisme.

73.Il est dans l’intérêt public d’engager des poursuites pénales contre les auteurs des crimes suivants (conformément à l’instruction générale du Bureau du Procureur général) : torture, disparition forcée, traite des personnes, crime sexuel (viol, attentat à la pudeur avec violence), crime contre l’humanité ou génocide et acte susceptible de constituer une violation grave du droit international humanitaire, entre autres crimes.

74.En outre, l’article 301 bis du Code de procédure pénale dispose que la libération anticipée n’est pas envisageable en cas de crime ou de délit visé par la loi no 18.026.

Articles 8 à 15

Réponse au paragraphe 14 des observations finales

Responsabilité pénale et coopération judiciaire en matière de disparition forcée

Groupe de travail pour la vérité et la justice

75.Le Groupe de travail pour la vérité et la justice a repris les enquêtes menées dans certaines affaires de disparition forcée portées devant les tribunaux, essentiellement pour mettre en avant de nouveaux témoignages ou pour engager des poursuites sur la base de témoignages existants.

76.La liste de tous les détenus disparus a été établie. Elle inclut les personnes disparues en Uruguay et à l’étranger pendant la période visée par le décret portant création du Groupe de travail. Le nombre de victimes de disparition forcée s’élève à 196.

77.La recherche des restes des détenus disparus s’est poursuivie sans relâche. Les opérations menées dans les quartiers du régiment d’artillerie antiaérienne de Montañesa (département de Canelones) ont été achevées, elles avaient été engagées à la suite d’une plainte pénale déposée en temps utile au motif que les restes de détenus disparus se trouvaient probablement dans cette caserne.

78.Au cours de la période considérée, les travaux menés en lien avec les activités de l’ancien bataillon no 13 et du Service du matériel et de l’armement militaires se sont poursuivis. En outre, une opération ciblée a été effectuée dans une propriété de l’armée connue sous le nom de la ferme de Pajas Blancas, sans aboutir à un résultat positif.

79.En 2018, comme suite à une demande émanant de la municipalité de Canelones et sur ordre du Procureur, des fouilles ont été menées sur un terrain privé situé dans la localité de Neptunia. Cette opération a donné lieu à l’analyse préalable de photographies aériennes et d’images satellites, à des activités de planimétrie et au recueil de témoignages. L’excavation de 975 m2 de terrain n’a toutefois débouché sur aucun résultat positif.

80.En ce qui concerne le bataillon no 14, un appui a été fourni aux techniciens de l’Équipe argentine d’anthropologie médico-légale, qui ont collaboré aux recherches en utilisant les instruments appropriés pour analyser les éventuels mouvements de terrain autour de deux bâtiments récents. Les modifications et les mouvements ainsi détectés ont justifié la mise en place d’une opération coordonnée avec la justice, qui a débuté au mois de mars 2019 et qui s’est achevée sans qu’aucune trace d’ossements ne soit décelée. Le parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité a ordonné que de nouvelles fouilles soient effectuées sur des terrains militaires.

81.Dans le même temps, les photographies aériennes figurant dans les archives de l’équipe argentine font l’objet d’un examen complet, puisque les données du Service de télédétection aérospatiale de l’armée de l’air uruguayenne et du Service de géographie militaire présentent des contradictions et, dans certains cas, ne contiennent aucune référence.

82.Un relevé de toutes les informations disponibles concernant les corps inhumés sous X et découverts le long des côtes uruguayennes depuis 1973 est en cours.

83.Les travaux en lien avec les détenus disparus ne se limitent pas aux actions en justice ou à la recherche de restes humains. Par exemple, des documents ont été retrouvés au sujet de l’enlèvement puis de la disparition forcée, en Uruguay, de José Potenza, citoyen argentin, et de Rafaela Filipazzi, citoyenne italo-argentine, dont les restes ont été découverts en République du Paraguay, et dont le décès est dû aux activités illégales d’agents uruguayens opérant au sein du mécanisme de coordination de la répression dénommé « opération Condor ». À l’occasion d’une réunion tenue à l’ambassade d’Uruguay en Argentine, qui est dirigée par l’Ambassadeur de la République uruguayenne, Héctor Lescano, ont été mis au jour des documents démontrant que les personnes en question avaient été détenues par le commando de fusiliers de la marine uruguayenne et transférées ultérieurement au Paraguay avec d’autres personnes de même nationalité, qui pourraient être leurs gardes ; en outre, dans une note signée par le Président de la République, l’État uruguayen a reconnu que ses propres agents avaient commis des actes illégitimes dans le cadre de l’« opération Condor ».

84.En outre, le Groupe de travail pour la vérité et la justice a décidé que les documents se trouvant dans le fonds documentaire du Secrétariat aux droits de l’homme pour le passé récent devraient être accessibles à toutes les victimes et à leur famille. Le 11 septembre 2017, il a adopté une décision prévoyant des règles générales sur le sujet qui ont été reprises dans le protocole et le formulaire adoptés le 23 octobre 2017, ce qui a permis de clarifier en partie cet aspect de la question.

85.En ce qui concerne l’enquête menée en l’espèce, il n’a malheureusement pas été possible de progresser malgré les tentatives faites en collaboration avec les équipes en place. Il s’agit d’une tâche très chronophage qui requiert un degré de spécialisation élevé, et étant donné sa composition, le Groupe de travail n’est pas doté de telles compétences. Néanmoins, le Groupe de travail a pleinement coopéré aux enquêtes menées par le parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité, qui jouent un rôle central dans les décisions prises au sujet des fouilles effectuées à Neptunia et des opérations menées par le bataillon no 14.

86.Le Groupe de travail pour la vérité et la justice poursuit ses activités, à la demande de l’organisation Mères et Familles des détenus-disparus uruguayens. En concertation avec la municipalité de Montevideo et le Ministère de l’éducation et de la culture, il a soutenu un projet intitulé « Pixeles de la Memoria » (pixels de la Mémoire), qui vise à rendre aux familles des victimes les photographies saisies par les forces de répression, tout en privilégiant la restauration de ces documents.

Parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité

87.Il convient de signaler en ce qui concerne le ministère public que, depuis 2012, la position suivie par le Procureur de général de la nation (Fiscal de Corte y Procurador General de la Nación), comme suite à une décision rendue dans un cas particulier, consiste à souligner le caractère imprescriptible des crimes contre l’humanité.

88.Les activités du parquet spécialisé s’articulent autour de deux axes : a) la recherche des restes des personnes disparues ; et b) l’enquête sur les circonstances des disparitions forcées, ainsi que l’identification et l’inculpation des responsables.

89.En ce qui concerne le premier axe, il convient de signaler qu’au moment de l’achèvement du présent rapport, des fouilles étaient en cours dans les lieux occupés par les bataillons nos 13 et 14. De même, les actes commis dans l’ancien centre de détention clandestin « La Tablada » faisaient l’objet d’une enquête.

90.En ce qui concerne les enquêtes visant à établir les circonstances des disparitions et à punir les responsables, toutes les enquêtes qui n’ont pas encore abouti à une condamnation sont toujours en cours. En résumé, aucune affaire n’a été classée et, bien au contraire, le parquet a demandé que deux soldats soient poursuivis en rapport avec la disparition forcée de Gelós Bonilla.

91.Il ressort clairement de ce qui précède que le parquet spécialisé mène ses enquêtes avec la plus grande rigueur et le plus vif intérêt. Il exerce ses fonctions dans le respect des dispositions de la Convention des Nations Unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et de l’ensemble des normes internationales de protection des droits de l’homme.

Réponse au paragraphe 16 des observations finales

92.L’article 82 de la Constitution de la République dispose que la nation adopte comme forme de gouvernement la démocratie républicaine. La souveraineté est exercée directement par le corps électoral par le biais des élections, des initiatives et des référendums, et indirectement par les pouvoirs représentatifs prévus par la Constitution, en vertu des règles énoncées dans cette dernière.

93.En ce qui concerne l’indépendance du pouvoir judiciaire, le nouveau Code de procédure pénale (CPP), établi par la loi no 19.293 du 19 décembre 2014 entrée en vigueur le 1er novembre 2017, dispose, en ses articles 18 et 19, que le pouvoir judiciaire est compétent pour rendre la justice dans les affaires pénales et que cette compétence ne saurait être déléguée. En outre, l’article 46 de cette loi dispose que le Bureau du Procureur général est indépendant sur le plan technique.

94.La mutation et la promotion des juges sont régies par le décret no 7772 du 20 août 2013. Elles relèvent de la compétence de la Commission consultative de la Cour suprême de justice, qui a pour mission de conseiller les membres de la Cour lorsqu’il s’agit de se prononcer sur la mutation et la promotion de l’ensemble des magistrats du pays. Il appartient à la Commission de nommer les magistrats à chaque échelon de la carrière judiciaire (art. 98 de la loi no 15.750) en fonction de leur mérite et de leur formation (art. 97, al. 2 et 3 de la loi précitée). À cet effet, il convient de prendre en considération les remarques figurant au dossier des candidats, la déclaration sous serment établie chaque année en vue de contrôler l’exercice de la profession (habilitation), les données statistiques et les rapports d’inspection émanant des services de la Cour suprême de justice, les rapports des supérieurs hiérarchiques (évaluation à la fois de la nature des commentaires et de leur nombre), les rapports des organes dont les représentants font partie de la Commission ainsi que toute autre information que la Commission juge utile de prendre en compte ou de demander. À cet égard, il convient de tenir compte tout particulièrement des délais de fixation des audiences et des reports d’audience et, de manière générale, de la durée des procès que les magistrats en question instruisent.

95.La Commission consultative est composée de 5 membres : 1 juge de la Cour suprême de justice, 2 juges de cours d’appel (dont l’un est nommé par l’Association des magistrats uruguayens), 1 avocat en exercice (dont la candidature est proposée par l’Ordre des avocats uruguayens) et 1 professeur titulaire de la faculté de droit de l’Université de la République. La Commission soumet à la Cour suprême de justice les listes de candidats au plus tard le 15 décembre de chaque année. À compter de cette date, l’historique de l’activité de la Commission est mis à la disposition des juges intéressés, afin que ceux qui le souhaitent puissent le consulter.

Réponse au paragraphe 18 des observations finales

96.L’article 81 du Code de procédure pénale énumère les droits reconnus à la victime, laquelle peut intervenir dans la procédure pénale conformément aux dispositions du Code. L’alinéa d) de cet article dispose que la victime a notamment le droit de demander des mesures de protection contre les actes de harcèlement, les menaces ou les agressions dont elle-même, les membres de sa famille ou ses proches pourraient être victimes.

Réponse au paragraphe 20 des observations finales

97.L’article 8 de la loi no 19.653 du 17 août 2018 porte modification de l’article 224 du Code de procédure pénale. Il expose les critères qui doivent être remplis pour pouvoir prononcer le placement en détention provisoire et établit la présomption notamment pour les infractions visées par la loi no 18.026, dont le crime de disparition forcée. Il impose en outre au procureur l’obligation de demander le placement en détention provisoire lorsque certaines infractions ont été commises.

98.Le paragraphe 2 de l’article 224 du Code de procédure pénale dispose que les risques de fuite, de dissimulation ou d’obstruction à l’enquête, ainsi que le risque pour la sécurité de la victime et de la société sont présumés lorsqu’il y a cumul d’infractions ou récidive et que le ministère public impute à l’accusé certaines infractions, notamment l’une de celles prévues par la loi no 18.026 du 25 septembre 2006. Lorsque l’une des infractions en question est commise, le ministère public doit demander le placement en détention provisoire.

Réponse au paragraphe 22 des observations finales

99.Comme indiqué précédemment, le nouveau Code de procédure pénale, en application duquel la procédure inquisitoire appliquée dans les affaires pénales a été remplacée par une procédure accusatoire, orale et publique, est entré en vigueur le 1er novembre 2017. Grâce à cette modification, le ministère public peut désormais diriger les enquêtes. Le nouveau Code de procédure pénale prévoit en outre des garanties et des mesures de prise en charge et de protection à l’intention des victimes d’infractions.

100.En vertu de la loi no 19.550, le Bureau du Procureur général est habilité à transformer un parquet national en parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité. Ainsi, en application de la décision no 075/2018 de février 2018, le parquet du 25e turno de Montevideo a été transformé en parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité et du personnel lui a été affecté. Cette décision impose l’obligation de mener une enquête sérieuse, spécialisée et complète en vue de sanctionner les responsables et d’offrir réparation à leurs victimes, de sorte que la justice soit rendue et que la vérité soit rétablie, l’objectif étant de contribuer à la reconstruction de la société et à l’établissement de mécanismes institutionnels visant à garantir que de tels actes ne se reproduisent pas.

101.La loi no 19.355 de décembre 2015 porte création, au sein de la Direction des affaires internes du Ministère de l’intérieur, de l’Équipe spécialisée dans les violations graves des droits de l’homme. Celle-ci collabore directement avec les services judiciaires en général et avec le Bureau du Procureur général en particulier afin d’adapter les procédures et enquêtes relatives aux cas de disparition forcée.

102.De plus, la décision no 002/2015 du 7 septembre 2015 porte création de l’Unité spéciale des droits de l’homme. Cette Unité est chargée de mener les activités de conseil, d’analyse, de coordination, de formation et de diffusion d’informations qui permettront aux membres du Bureau du Procureur de traiter efficacement les procédures judiciaires relatives aux graves violations des droits de l’homme. Elle a établi son propre règlement intérieur et son plan de travail conformément aux dispositions de la décision.

103.En outre, la décision no 578/2016 porte création d’une commission mixte sur les droits de l’homme et les crimes récents qui est chargée d’élaborer, dans le cadre du mémorandum d’accord conclu entre le Ministère de l’intérieur et le Bureau du Procureur général, un protocole relatif à la manière d’aborder les enquêtes sur les crimes de ce type.

104.Le Bureau du Procureur général a soumis au Gouvernement un avant-projet de loi visant à l’habiliter à transformer un parquet national en parquet spécialisé ayant compétence exclusive pour connaître des affaires judiciaires en instance ou nouvellement portées devant les différents tribunaux du pays et qui concernent les violations des droits de l’homme commises pendant la période visée par la loi no 18.596.

Parquet national spécialisé dans les crimes contre l’humanité

105.Conformément aux dispositions légales, le parquet spécialisé est le seul compétent pour connaître de toutes les affaires pénales relatives aux violations des droits de l’homme commises entre le 27 juin 1973 et le 28 février 1985 (période de la dictature militaire), que ces affaires soient en instance ou nouvellement portées devant les tribunaux de l’ensemble du pays.

106.Ces dispositions légales imposent l’obligation de mener une enquête sérieuse, spécialisée et complète en vue de sanctionner les responsables et d’offrir réparation à leurs victimes, de sorte que la justice soit rendue et que la vérité soit rétablie, l’objectif étant de contribuer à la reconstruction de la société et à l’établissement de mécanismes institutionnels visant à garantir que de tels actes ne se reproduisent pas.

107.La création de ce parquet spécialisé s’inscrit dans le cadre de l’application de l’arrêt rendu par la Cour interaméricaine des droits de l’homme en l’affaire Gelman et a permis à l’État uruguayen d’avoir, pour la première fois de son histoire, une politique unique en matière de poursuites pour ce type d’infraction.

108.Il convient de souligner qu’une équipe d’enquête conjointe chargée des crimes contre l’humanité a été créée dans le cadre d’un accord de coopération signé en novembre 2016 entre le ministère public argentin et le Bureau du Procureur général uruguayen.

109.Il convient également de mentionner qu’en décembre 2018, le parquet spécialisé a reçu deux requêtes en inconstitutionnalité qui ont été rejetées. L’une des requêtes concernait loi no 19.550 et a été soumise par les avocats de deux hommes qui faisaient l’objet d’une enquête pour des crimes commis pendant la dictature (1973-1985). Les avocats ont avancé que la loi no 19.550, en ce qu’elle portait création d’un parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité et lui attribuait certaines responsabilités, était inconstitutionnelle.

110.L’autre requête en inconstitutionnalité concernait la loi no 18.831 et a été présentée par l’avocat d’un militaire à la retraite impliqué dans une affaire liée aux violations des droits de l’homme commises pendant la dictature (1973-1985). La défense a avancé que la loi no 18.831, en ce qu’elle rétablissait l’action publique pour les infractions commises jusqu’au 1er mars 1985 dans le contexte du terrorisme d’État, était inconstitutionnelle. Cette requête a elle aussi été rejetée.

Activités du parquet spécialisé

111.Entre février et septembre 2018, le parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité a comptabilisé 220 affaires de violations des droits de l’homme commises pendant la dictature (1973-1985), dont 153 à Montevideo et 67 dans le reste du pays. Il est intervenu dans presque la moitié des cas (46,3 %, répartis comme suit : 35,2 % dans la capitale et 71,4 % dans le reste du pays).

112.Au cours de la période considérée, le parquet spécialisé a notamment demandé, sur la base des enquêtes menées, le renvoi en jugement dans les affaires suivantes :

Mai 2018 : le parquet spécialisé a demandé le renvoi en jugement de quatre militaires pour quatre infractions de privation de liberté, concours sans cumul avec deux infractions de violences contre des détenus en novembre 2018 ;

Mai 2018 : le juge a donné suite à la demande de renvoi en jugement pour des violations des droits de l’homme perpétrées par le 4e bataillon du génie pendant les années 1970 à Laguna del Sauce. Il s’agit de la première affaire pour laquelle le parquet spécialisé a réussi à faire engager des poursuites ;

Juillet 2018 : le parquet spécialisé a demandé le renvoi en jugement et l’incarcération de huit militaires pour des infractions commises entre 1975 et 1977.

113.En outre, six demandes d’extradition concernant trois personnes et sept demandes de classement ont été faites. S’agissant de la recherche des dépouilles des détenus disparus, trois interventions ont été réalisées dans différents lieux, dont deux sont encore en cours.

114.Entre novembre 2018 et mars 2019, les enquêtes du parquet spécialisé ont conduit celui-ci à soumettre les demandes de renvoi en jugement suivantes :

Novembre 2018 : le parquet spécialisé a demandé le renvoi en jugement et l’incarcération de deux militaires à la retraite dans l’affaire Gelós Bonilla ;

Novembre 2018 : le parquet spécialisé a demandé qu’une peine de vingt-deux ans de réclusion criminelle soit prononcée contre un militaire à la retraite qui serait le coauteur de l’homicide d’Aldo Perrini ;

Janvier 2019 : le parquet spécialisé a demandé le placement en détention provisoire d’un homme en fuite depuis 2009 ;

Février 2019 : le parquet spécialisé a demandé le renvoi en jugement et l’incarcération de trois anciens militaires et d’un ancien policier à la suite d’une plainte déposée par un groupe d’anciennes prisonnières politiques ;

Février 2019 : le parquet spécialisé a demandé le renvoi en jugement de cinq anciens militaires pour des infractions commises pendant la dictature ;

Mars 2019 : le parquet spécialisé a demandé le renvoi en jugement de trois militaires pour des infractions commises pendant la dictature.

Réponse au paragraphe 24 des observations finales

115.Au cours de la période considérée, le Parlement uruguayen a approuvé deux accords d’extradition, l’un avec l’Italie (loi no 19.586 de décembre 2017), qui n’a toujours pas été ratifié par celle-ci, et l’autre avec le Portugal (loi no 19.704 de décembre 2018) qui est entré en vigueur le 28 avril 2019.

116.Les deux accords contiennent des dispositions en application desquelles le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre ne sont pas considérés comme des infractions politiques.

117.À l’inverse de la version précédente, le nouveau Code de procédure pénale énonce, en son article 329, les normes en matière d’extradition qui s’appliquent chaque fois qu’aucun accord n’a été signé et il prévoit l’extradition lorsque l’infraction de disparition forcée est établie.

Articles 16 à 23

Réponse au paragraphe 26 des observations finales

118.Les articles 351 à 357 du nouveau Code de procédure pénale (loi no 19.293) établissent une procédure spéciale d’habeas corpus en vigueur depuis le 1ernovembre 2017.

119.L’article 351 dispose que l’action en habeas corpus vise à protéger les personnes contre tout acte arbitraire d’une quelconque autorité administrative qui viendrait bafouer, restreindre, limiter ou menacer leur liberté de circulation et à protéger tout détenu contre la torture et les traitements cruels ou les conditions de détention qui portent atteinte à la dignité de la personne humaine.

120.En outre, l’article 352 dispose que, quand l’une des situations prévues à l’article précédent se produit à la suite de l’adoption de mesures urgentes de sécurité, conformément aux dispositions du paragraphe 17 de l’article 168 de la Constitution, l’action en habeas corpus peut également être engagée. Dans ce cas, cette action se limite au contrôle du strict respect des obligations constitutionnelles relatives à la forme, à l’approbation par l’Assemblée générale ou par la Commission permanente ou à la notification à celles-ci, selon qu’il convient, au traitement de l’intéressé, au lieu et aux conditions de détention de l’intéressé ou à son transfert et à la possibilité effectivement offerte de quitter le territoire national, le cas échéant.

Réponse au paragraphe 28 des observations finales

121.Mis en place par l’Institut national de réinsertion, le système de gestion pénitentiaire vise à uniformiser la collecte des données sur les détenus et les différentes procédures connexes appliquées dans les établissements pénitentiaires du pays. Actuellement, son champ d’action se limite aux établissements situés dans la zone métropolitaine. Grâce à ce système informatisé, il est possible d’avoir accès à des renseignements d’ordre judiciaire et à des informations sur le logement, les conditions, les sorties provisoires, les transferts et les visites ; en d’autres termes, ce système permet de consulter des informations d’ordre général ou plus spécifique concernant la privation de liberté.

122.Le déploiement du système de gestion pénitentiaire suppose d’installer deux grands modules dans les différents établissements qui relèvent de l’Institut national de réinsertion : le module d’enregistrement des détenus et de leurs mouvements au sein de l’établissement et le module de gestion des visites.

123.L’installation du module d’enregistrement des détenus dans l’ensemble des établissements du pays s’est achevée en septembre 2018, tandis que le module de gestion des visites devrait être disponible dans tous les établissements d’ici mai 2019.

124.Il est toujours possible de faire un signalement anonyme auprès de la Direction des affaires internes et de son Service de gestion de la qualité en appelant gratuitement le 0800‑5000. Entre le 1er juin 2016 et le 24 juillet 2017, 837 plaintes ont été reçues grâce à cette ligne téléphonique. Parmi ces plaintes, 106 émanaient de femmes (dont trois ressortissantes brésiliennes) détenues dans 10 établissements pénitentiaires et 731 d’hommes (dont un ressortissant paraguayen et un ressortissant argentin) détenus dans 22 établissements, et 95 % des auteurs de plainte étaient blancs. Les plaintes sont transmises à l’Institut national de réinsertion pour enquête et traitement. Entre le 1er octobre 2017 et le 28 février 2018, le Service de gestion de la qualité a reçu 497 plaintes provenant de 18 établissements pénitentiaires, et 95 % des auteurs de ces plaintes étaient blancs. Tous les dossiers ont été transmis à l’Institut national de réinsertion.

125.En décembre 2018, 4 913 plaintes avaient été reçues au total.

Institut national de l’enfance et de l’adolescence

126.Le système d’information sur l’enfance est le logiciel dans lequel sont saisies les informations sur tous les enfants et adolescents qui sont pris en charge par l’Institut et sur les adolescents et les jeunes qui font l’objet de mesures privatives et non privatives de liberté.

127.Le système d’information enregistre notamment les renseignements suivants : les tribunaux en charge des dossiers, les avocats de la défense, les affaires en instance, les recours et toutes les données relatives à l’éducation, à la santé et à la famille. Il enregistre également les données issues des projets en cours de l’Institut national pour l’inclusion sociale des adolescents car celui-ci n’a pas encore terminé de développer, et donc d’installer, son propre système de gestion de l’information.

Institut national pour l’inclusion sociale des adolescents

128.Le système de gestion de l’Institut national pour l’inclusion sociale des adolescents est un outil de gestion informatisée qui permettra d’enregistrer les données relatives à la prise en charge globale des adolescents qui font l’objet d’une mesure judiciaire, de leur admission dans l’un des centres gérés par l’Institut à leur sortie, l’objectif étant de produire des données statistiques.

129.Ce nouvel outil de gestion, dont le développement a commencé en 2015, au moment de la création de l’Institut, est conçu pour s’adapter à la population concernée et permettra à l’Institut de disposer de son propre système informatisé.

130.La première étape du déploiement s’est achevée avec l’installation du système de gestion dans trois centres pilotes ; la deuxième phase, celle des essais, a été lancée et le système devrait être opérationnel d’ici la fin de l’année 2019.

Réponse au paragraphe 30 des observations finales

Formation aux droits de l’homme à l’intention des agents de l’État 

Forces armées

131.Les droits de l’homme ont été inclus dans les programmes de formation des officiers des forces armées. Conformément à l’article 14 de la loi no 15.848, le pouvoir exécutif soumet chaque année à l’Assemblée générale les programmes des écoles et instituts de formation militaire.

132.En outre, la Direction des affaires juridiques et notariales et des droits de l’homme est notamment chargée de collaborer avec le pouvoir judiciaire dans le cadre des affaires de crime contre l’humanité et avec des organismes publics et privés (y compris les organisations non gouvernementales) pour les questions liées aux droits de l’homme.

Ministère de l’intérieur

133.La formation aux droits de l’homme est un axe transversal du programme d’études, tant pour la formation initiale que pour la spécialisation. Tout le personnel suit le programme relatif aux droits de l’homme.

134.S’agissant du renforcement institutionnel du système pénitentiaire national, la formation professionnelle des agents se poursuit par l’intermédiaire du Centre de formation pénitentiaire qui est un établissement technique spécialisé de formation continue pour tous les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire.

135.Depuis sa création, le Centre de formation pénitentiaire élabore des programmes de formation qui intègrent, dans leurs fondements pédagogiques et méthodologiques et dans leur contenu, la notion de droits de l’homme et les concepts connexes pris sous les angles juridique, éthique, professionnel et social. Les cours dispensés dans le cadre des programmes portent notamment sur les droits de l’homme, les garanties que tous les fonctionnaires doivent promouvoir, apporter et protéger, et les sanctions encourues en cas de non-respect de ces droits.

136.Un nouveau programme de formation complète a été élaboré à l’intention du personnel civil spécialisé des centres de détention ; parmi les thèmes abordés figurent notamment les programmes de traitement pénitentiaire, la sécurité, l’administration et la gestion, les questions de genre, les droits de l’homme, l’informatique, la prévention en matière de santé et l’éducation physique.

137.Cette formation est aujourd’hui également dispensée à l’École nationale de la police et de la garde républicaine, ce qui est unique en Amérique latine. Elle inclut des ateliers de jeu de rôle, outil qui contribue au renforcement de ces deux institutions en répondant aux besoins psychosociaux des agents qui en sont l’ossature. Cet outil permet aussi de préparer les fonctionnaires, le but étant d’accroître leur motivation au travail, de les aider à trouver leur vocation, d’affermir leur identité professionnelle et de renforcer les liens professionnels, le travail en équipe et le sentiment d’appartenance au système pénitentiaire national.

138.Le programme d’études du système de formation de la police couvre les droits de l’homme. Ce sujet est abordé dans le cadre de différents domaines d’enseignement, tels que les opérations, les techniques de maniement des armes et l’entraînement à celui-ci, et l’autodéfense, où l’accent est mis sur l’usage rationnel, proportionnel et progressif de la force. La Direction nationale de la formation de la police interdit en son sein tous types de traitements attentatoires à la dignité humaine contraires au respect des relations interpersonnelles et aux directives pédagogiques, ainsi que l’emploi de termes dégradants ou les pratiques stigmatisantes ayant pour effet d’atteindre la personne dans son estime d’elle-même et son intégrité physique ou psychologique. Il convient de signaler également le programme de formation qui fait suite au nouveau Code de procédure pénale, et qui est destiné à sensibiliser les policiers aux questions susmentionnées.

139.En ce qui concerne les droits de l’homme durant la dictature civile et militaire, en décembre 2016, le Ministère de l’intérieur, agissant en sa qualité d’auxiliaire de la justice, a remis les originaux sur papier et une copie numérique des archives de la Direction générale de l’information et du renseignement au Secrétariat aux droits de l’homme pour le passé récent et à l’Université de la République. Un protocole concernant les crimes contre l’humanité est également en cours d’élaboration avec le Bureau du Procureur général. Il vise à améliorer la conduite des enquêtes sur ces crimes au regard du nouveau Code de procédure pénale. En outre, les jeunes policiers enquêteurs sont désormais formés aux techniques d’investigation et de traitement adaptées aux cas de crimes contre l’humanité.

Pouvoir judiciaire

140.Dans le cadre des programmes de formation des magistrats, greffiers et autres fonctionnaires judiciaires, la Cour suprême de justice propose par l’intermédiaire de ses organes de formation des cours dans plusieurs domaines ayant trait aux droits de l’homme. De plus, le Centre d’études judiciaires dispense des cours de formation aux élèves magistrats et aux magistrats en poste, ainsi qu’aux avocats d’office et aux avoués.

141.Dans le cas des magistrats en poste, ces cours font partie intégrante de leur formation obligatoire et peuvent donner lieu à une évaluation qualifiante.

142.Le cours de formation initiale des élèves magistrats inclut un module expressément consacré aux droits de l’homme. Le programme de formation continue et obligatoire des magistrats comprend également des cours sur les droits de l’homme, qui englobent l’étude des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

Bureau du Procureur général

143.Depuis que la Cour interaméricaine des droits de l’homme a rendu sa décision dans l’affaire Gelman c. Uruguay , le Bureau du Procureur général organise régulièrement à l’intention de ses membres des activités annuelles de formation aux droits de l’homme. La dernière session en date s’est tenue du 15 au 30 novembre 2018, sous la forme d’un séminaire de mise à niveau, animé par des intervenants qualifiés en la matière.

144.En novembre 2018 a aussi eu lieu un séminaire international sur le thème de la protection des droits de l’homme dans les systèmes judiciaires national et international, organisé par l’Équipe de pays des Nations Unies en Uruguay, le Centre d’études judiciaires et le Centre de formation du Bureau du Procureur général.

Institut national pour l’inclusion sociale des adolescents

145.Parmi les premières mesures prises par l’équipe dirigeante de l’Institut national pour l’inclusion sociale des adolescents, qui a pris ses fonctions le 20 mai 2015, figure l’introduction de la formation continue de l’ensemble du personnel aux droits de l’homme. Le 27 mai 2015, l’Institution nationale des droits de l’homme, le Commissaire parlementaire aux affaires pénitentiaires et la Présidente de l’Institut national pour l’inclusion sociale des adolescents ont donné le premier cours destiné aux directeurs. Depuis lors, la formation a été dispensée à tous les échelons de l’administration comme suite à la signature d’un mémorandum d’accord avec le Bureau de la Coordonnatrice résidente des Nations Unies, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime.

146.Les protocoles antérieurs à 2015 ont été mis à jour. En outre, les protocoles portant sur les visites, le régime disciplinaire et les techniques de contention ont été édités à 14 000 exemplaires. L’évaluation du programme de formation continue aux droits de l’homme a bien montré que son efficacité, conjuguée à la mise à jour des protocoles susmentionnés, avait permis de faire diminuer le nombre de plaintes déposées par des détenus contre des agents pénitentiaires pour faits de violence. À cela s’ajoutent l’instauration du recours obligatoire à des dispositifs d’identification et la mise en service d’une boîte à plaintes anonymes.

147.Les médias ont été mis à profit pour faire bien comprendre à toutes les personnes qui auraient connaissance de la commission d’un acte illicite au sein du système pénitentiaire qu’elles doivent se présenter sans retard au Département juridique ou demander à s’entretenir avec leur directeur d’établissement, qui diligentera immédiatement une enquête et saisira les autorités pénales selon qu’il conviendra, ce qui pourra l’amener à demander que l’auteur de l’acte en question soit relevé de ses fonctions.

Articles 24 et 25

Réponse au paragraphe 32 des observations finales

148.Le Code de procédure pénale, qui, comme on l’a déjà vu, a modifié les fondements de la procédure pénale en Uruguay, réserve un traitement différent à la victime, en ce qu’il la revalorise, lui attache une plus grande importance et lui confère de plus importants moyens d’action. Ses dispositions s’appliquent également aux cas visés par la loi no 18.026.

149.Aux termes de son article 3 (Reconnaissance de la dignité humaine), le Code de procédure pénale prévoit que toute personne, quelle que soit la qualité en laquelle elle participe à la procédure, en particulier la victime d’une infraction et celle ou celui auquel elle est imputée, doit être traitée avec le respect dû à la dignité inhérente à l’être humain.

150.Le chapitre IV du Code de procédure pénale est consacré à la victime (art. 79 à 81). L’article 79 dispose qu’est considérée comme victime la personne lésée par l’infraction. Au moment de l’introduction de l’instance ou de la dénonciation des faits, la victime ou son représentant peut faire savoir qu’elle a l’intention de se constituer partie civile, avec les droits et les pouvoirs que lui confère le Code (art. 79, par. 2). Les victimes sans ressources qui en font la demande se voient désigner un avocat commis d’office (art. 79, par. 3).

151.De plus, en vertu de l’article 81 du Code de procédure pénale, la victime de l’infraction jouit des droits que celui-ci lui reconnaît, sans préjudice des devoirs que la défense des intérêts de la victime impose au procureur. La victime peut ainsi participer à la procédure pénale conformément aux dispositions du Code, qui lui confèrent notamment les droits suivants (art. 81, par. 2) :

a)Prendre connaissance de la totalité des actes auxquels l’enquête préliminaire a donné lieu depuis son ouverture, sans préjudice du pouvoir du procureur de décider que ceux-ci resteront confidentiels lorsque cela s’impose pour garantir le bon déroulement de l’enquête (art. 259, par. 3 du Code) ;

b)Participer à la procédure et être entendue selon les conditions énoncées dans le Code ;

c)Produire des éléments de preuve au cours de l’enquête préliminaire, de l’audience préliminaire et de la procédure de deuxième instance, le cas échéant, à l’appui des démarches d’enquête et de réunion de preuves du procureur. La victime jouit des mêmes droits que les parties à la procédure dans la production de preuves et leur administration ;

d)Solliciter des mesures de protection face au risque d’actes de harcèlement, de menaces ou d’agressions auquel la victime, les membres de sa famille ou ses proches sont exposés ;

e)Solliciter des mesures de confiscation des biens appartenant au mis en cause ou liés à l’infraction ;

f)S’opposer, devant le tribunal, à la décision du procureur de clore l’enquête préliminaire ou de ne pas ouvrir une telle enquête ou de ne pas exercer l’action pénale ;

g)Être entendue par le tribunal avant qu’il statue sur la demande de non-lieu ou prenne éventuellement une quelconque autre décision qui mettrait fin à la procédure, conformément aux dispositions de l’article 129 du Code.

152.Le Code de procédure pénale prévoit également, au paragraphe 3 de son article 360, que la victime peut former recours contre les décisions qui la concernent directement.

153.Le parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité a conscience de la mission qui est la sienne au regard de la Convention et agit en conséquence. Il entretient ainsi des contacts réguliers avec les familles des victimes et leurs avocats, ainsi qu’avec le collectif qui les réunit (Mères et Familles des détenus-disparus uruguayens).

154.Le parquet spécialisé dans les crimes contre l’humanité reçoit toutes les personnes ayant sollicité une audience et a mis en place un mécanisme qui vise à leur fournir toutes les informations disponibles susceptibles de les intéresser.

155.Le collectif susmentionné est ainsi informé de toute mesure prise aux fins de la recherche de restes humains, ainsi que de la date et du lieu de l’opération.

156.Dans le même ordre d’idées, lorsqu’un avis est rendu dans une affaire, les membres de la famille ou l’avocat saisi de l’affaire en sont les premiers informés, de manière que les victimes soient mises au fait des progrès réalisés par le paquet spécialisé plutôt que par les médias.

157.L’entrée en vigueur du nouveau Code de procédure pénale a donné lieu à la mise en fonction, le 6 septembre 2017, d’un système d’information dans le cadre de la procédure pénale accusatoire en Uruguay. Ce système permettra de collecter les données de toutes les plaintes enregistrées en Uruguay (nombre, type d’infraction, etc.). Il donnera accès à des statistiques grâce auxquelles il sera notamment possible d’évaluer les politiques publiques et de redéfinir, entre autres choses, les compétences des parquets et leur nombre par région.

Unité du Bureau du Procureur général chargée des victimes

158.En février 2016, une unité chargée des victimes a été mise en place au Bureau du Procureur général comme suite à l’adoption de la loi no 19.334, qui confère un nouveau statut juridique au ministère public, et du nouveau Code de procédure pénale, qui charge le Bureau du Procureur général d’apporter assistance et protection aux victimes et aux témoins, ce à quoi celui-ci s’emploie selon les dispositions de la décision no 83/2016.

159.La nouvelle loi relative à l’organisation du Bureau du Procureur général (loi no 19.483, art. 15) autorise l’adoption par le Procureur général d’instructions générales élaborées par un Conseil honoraire des instructions générales, regroupant le Procureur général, un représentant du pouvoir exécutif, un représentant de l’Université de la République, un représentant de l’Association des procureurs et un représentant de l’organisation de la société civile la plus concernée compte tenu de la question traitée. Ces instructions générales visent à établir les normes minimales propres à garantir l’unité d’action des équipes de procureurs dans différents domaines thématiques, à l’appui de la mise en œuvre d’une politique pénale.

160.L’instruction générale no 5 relative à la prise en charge et à la protection des victimes et des témoins a été adoptée en octobre 2017. L’instruction générale no 9 relative au programme de protection spéciale des victimes et témoins d’infractions a été adoptée ultérieurement.

161.L’unité chargée des victimes et des témoins du Bureau du Procureur général a élaboré un document établissant la politique de prise en charge et de protection des victimes et des témoins du Bureau du Procureur général. En 2019, les effectifs de l’unité se sont étoffés, passant de 6 à 27 collaborateurs techniques pour l’ensemble du pays. Ils se répartissent comme suit : direction : 1 ; personnel d’encadrement : 2 superviseuses ; collaborateurs techniques : 27 (1 avocate ainsi que des travailleurs sociaux et des psychologues) ; collaborateurs administratifs : 2. Toutes les personnes arrivées en 2019 ont été recrutées par voie de concours.

162.Depuis 2018, l’unité de prise en charge et de protection des victimes et des témoins fait l’objet d’un projet de renforcement mené avec l’appui de l’Union européenne (EUROSOCIAL+). En outre, depuis 2017, elle est en cours de consolidation dans le cadre d’un partenariat de coopération Sud-Sud noué avec le Ministère argentin de la justice et des droits de l’homme. Ce partenariat a donné lieu à la venue en Uruguay en juin 2018 de deux expertes argentines du Programme d’aide et de soutien aux victimes de la traite mis en place par ce Ministère, ainsi qu’à des échanges entre les membres de l’Unité, des procureurs spécialisés de Montevideo et des procureurs non spécialisés de la province.

Réponse au paragraphe 34 des observations finales

163.Comme indiqué plus haut, l’article 21 de la loi no 18.026 introduit le crime de disparition forcée dans la législation nationale. Il prévoit que quiconque, étant un agent de l’État ou agissant avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement d’un ou de plusieurs agents de l’État, prive de quelque manière que ce soit et pour quelque motif que ce soit, une personne de liberté et nie la reconnaissance de la privation de liberté ou dissimule le sort réservé à la personne disparue ou le lieu où elle se trouve, ou omet ou refuse de donner des informations sur la privation de liberté d’une personne disparue, sur le lieu où elle se trouve ou sur son sort encourt une peine de deux à vingt-cinq ans d’emprisonnement. Le crime de disparition forcée est considéré comme une infraction continue tant que le sort de la victime ou le lieu où elle se trouve n’est pas déterminé (art. 21, par. 2).

164.Les infractions portant atteinte à la liberté individuelle sont définies aux articles 280 à 293 du Code pénal ; l’article 281 fait expressément référence à la privation de liberté.

Réponse au paragraphe 36 des observations finales

165.L’ordre juridique uruguayen ne prévoit aucune procédure visant expressément à réviser et, s’il y a lieu, à annuler les adoptions, placements ou gardes d’enfants qui trouvent leur origine dans une disparition forcée. Toutefois, la loi no 18.590 (loi sur les adoptions) porte modification des dispositions du Code de l’enfance et de l’adolescence concernant les procédures d’annulation des adoptions. L’article 147 du Code ainsi modifié peut être invoqué dans les situations susmentionnées, puisqu’il dispose que la décision portant autorisation de l’adoption n’est pas susceptible de recours (art. 405.1 du Code général de procédure) mais qu’elle peut faire l’objet d’une demande d’annulation pour fraude, dol ou complaisance.

166.La loi no 17.823 (Code de l’enfance et de l’adolescence) a modifié les articles 214 à 221 du Code civil quant à la possibilité pour l’enfant de contester sa filiation paternelle.

167.La procédure d’annulation relève du juge aux affaires familiales qui a autorisé l’adoption. Pour ce qui est de « prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant et reconnaître en particulier son droit à être entendu, s’il est capable de discernement », la loi no 17.823 dispose que toute décision doit être prise en tenant compte de ce principe directeur.

168.Au moment d’achever l’élaboration du présent document, aucun cas de substitution d’identité de filles ou d’adolescentes n’avait eu à être traité.

169.Les cas de disparitions et de sorties non autorisées d’enfants ou d’adolescents pris en charge par le système de protection donnent lieu au déclenchement d’une procédure de recherche en collaboration avec le Ministère de l’intérieur. Ils font l’objet d’un signalement, et les autorités judiciaires sont informées aux fins de la mise en place de mesures comme la fermeture des frontières et la recherche des intéressés. Les opérations de recherche sont menées avec l’appui des médias sociaux et autres médias, grâce aux efforts déployés par le Département des spectacles.

Réponse aux paragraphes 37 à 42 des observations finales

Suivi de la mise en œuvre des dispositions de la Convention

Mécanisme national d’établissement des rapports et de suivi des recommandations

170.L’exécution du décret no 358/016 du 14 novembre 2016, portant création du Réseau interinstitutionnel d’établissement des rapports et de suivi de la mise en œuvre des recommandations et observations relatives aux droits de l’homme (ci-après le « Réseau interinstitutionnel ») et mise en place du Système de suivi des recommandations en tant que dispositif informatique public permettant de consigner les mesures prises par les pouvoirs publics pour donner suite aux recommandations et observations du système universel de protection des droits de l’homme, a donné lieu au lancement de travaux de coordination interinstitutionnelle, visant à rendre effectif le respect au niveau national des obligations en matière de droits de l’homme et à accélérer la procédure suivie par l’Uruguay pour en rendre compte à la communauté internationale.

171.La consolidation du Réseau interinstitutionnel et la mise en place du Système de suivi des recommandations ont jeté les bases de la création du Mécanisme national d’établissement des rapports et de suivi des recommandations (ci-après le « Mécanisme national »).

172.Le Mécanisme national, dont la coordination est assurée par la Direction des droits de l’homme et du droit humanitaire du Ministère des relations extérieures, est constitué d’un réseau interinstitutionnel regroupant les trois branches de l’État ainsi que des administrations départementales, des services décentralisés et des entités autonomes. L’Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple est dotée du statut d’observateur permanent auprès du Mécanisme et participe aux travaux de l’ensemble de ses instances.

173.Le Mécanisme national mène son action interinstitutionnelle dans le cadre de sept groupes de travail consacrés aux questions suivantes : les femmes ; les enfants et les adolescents ; la discrimination ; les droits des personnes handicapées ; la mémoire, la vérité et la justice ; les personnes privées de liberté et les personnes placées en institution ; le renforcement des institutions.

174.Le Groupe de travail sur la mémoire, la vérité et la justice s’occupe du suivi de la mise en œuvre des recommandations relatives à ces questions et aux garanties de non-répétition, formulées par les mécanismes de protection des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies, notamment les organes conventionnels, les procédures spéciales et l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme.

175.Le Réseau interinstitutionnel a notamment pour mandat d’alimenter le Système de suivi des recommandations en données concernant les progrès réalisés dans la mise en œuvre des recommandations adressées à l’Uruguay par le système universel de promotion et de protection des droits de l’homme (organes conventionnels, procédures spéciales et Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme).

176.Le Mécanisme national a recours au Mécanisme de dialogue et de consultation mis en place par le Ministère des relations extérieures en tant que canal officiel de communication avec la société civile organisée. Le décret no 89/2018 du 9 avril 2018 dispose que, dans le cadre de ce Mécanisme, le Ministère des relations extérieures s’engage, de sa propre initiative ou à la demande des groupes de travail interinstitutionnels, à adresser un appel public aux organisations de la société civile qui s’intéressent aux questions appelées à être traitées dans les rapports destinés aux organes conventionnels et à l’Examen périodique universel, et cela, avant l’envoi de ces rapports, mettant ainsi en place un espace de dialogue entre les pouvoirs publics et la société civile.