Ministère

En francs malgaches (FMG)

Loi de finances rectifiée 1997

Projet de loi de finances 1998

Ministère de l’enseignement secondaire et de l’éducation de base

235 498 568 000

332 500 077 000

Ministère de l’enseignement technique et de la formation professionnelle

15 780 852 000

17 462 731 000

Ministère de la jeunesse et des sports

4 422 858 000

6 142 399 000

Ministère de la population, de la condition féminine et de l’enfance

8 486 740 000

6 173 644 000

Ministère de la santé

119 961 444 000

139 029 257 000

124.On constate cependant une légère diminution des crédits accordés au Ministère de la population, de la condition féminine et de l’enfance, au sein duquel le montant des crédits alloués à la Direction de l’enfance et du bien‑être de la famille est de 109 878 000 FMG.

125.S’agissant du Ministère de la santé, de 1993 à 1998, les crédits ouverts pour le volet santé de la mère et de l’enfant (confondus) sont:

199341 451 000 FMG

199447 451 000 FMG

199551 808 000 FMG

199646 008 000 FMG

199746 008 000 FMG

199850 000 000 FMG

126.Les crédits du Ministère de la justice méritent une mention particulière, dans la mesure où des mineurs sont détenus dans les établissements pénitentiaires soit comme prévenus, soit comme condamnés, ou séjournent au centre de rééducation dépendant du Ministère.

127.Au 16 décembre 1998, les mineurs étaient ainsi répartis:

Centre de rééducation d’Anjanamasina (réservé aux garçons): 25

Établissements pénitentiaires (confondus): 65 condamnés mineurs dont 3 filles; 347 prévenus mineurs garçons; 25 prévenus mineurs filles.

128.Le budget de l’administration pénitentiaire est intégré dans le budget de fonctionnement du Ministère de la justice, qui s’élevait à 22 736 879 000 FMG en 1997 et 41 556 910 000 FMG en 1998. On constate donc une augmentation notable des crédits du Ministère de la justice, qui comprennent ceux de l’administration pénitentiaire pour une population carcérale totale de 19 163 détenus (alors que la capacité d’accueil est de 13 202).

129.Les crédits consacrés à la protection des enfants en détention sont notoirement insuffisants et la situation des mineurs en détention est critique, alors que l’on constate que le nombre de prévenus mineurs (372) est anormalement élevé.

130.Les enfants mineurs ayant fait l’objet d’une décision du juge des enfants ne sont pas tous placés en détention. Dès lors que le juge des enfants constate qu’ils sont en état de danger moral ou physique ou abandonnés, ils peuvent faire l’objet d’une décision judiciaire de placement auprès d’une personne digne de confiance ou d’un centre d’accueil. En ce cas, ils bénéficient d’une allocation de placement prélevée sur une rubrique particulière du budget du Ministère de la justice, les frais de justice criminelle (FJC), qui font l’objet du décret no 62.314 du 28 juin 1962.

131.Par décret, le gouvernement a fixé cette allocation à 5 000 FMG par jour. Cent soixante‑cinq enfants sont actuellement placés sous ce régime.

132.L’examen global des allocations budgétaires accordées aux ministères directement concernés par la protection de l’enfant conduit aux conclusions suivantes:

Compte tenu de l’évolution démographique et de la hausse du coût de la vie, les allocations budgétaires accordées aux ministères sont insuffisantes;

Certes, un effort incontestable est fait pour augmenter chaque année les allocations budgétaires, mais cet effort est absorbé précisément par l’augmentation de la population infantile et la hausse des prix;

Par ailleurs, les chiffres d’allocations budgétaires qui ont pu être recueillis ne permettent pas d’obtenir des précisions sur le montant consacré à l’enfance.

2. Aide internationale

133.Durant les cinq dernières années, l’aide internationale a connu de notables modifications.

134.En premier lieu, elle s’est diversifiée et multipliée. L’aide des institutions internationales vient principalement de l’UNICEF, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), de l’Union européenne, du groupe de la Banque mondiale, du Programme alimentaire mondial (PAM) et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’assistance bilatérale s’est renforcée grâce à l’action de la Mission d’aide et d’action culturelle française (MAAC), de l’Agency for International Development (États‑Unis d’Amérique) (AID) et d’agences relevant de pays étrangers telles que la GTZ (Allemagne).

135.Il faut noter l’intervention de plus en plus importante de l’Allemagne, la Suisse, l’Italie et le Japon. L’aide bilatérale se manifeste également à travers des ONG étrangères telles que l’Aumônerie catholique des prisons, Sentinelles, Médecins sans frontières ou Scouts de France.

136.En second lieu, un effort considérable a été accompli pour coordonner cette aide très diversifiée et dont l’injection désordonnée et mal orientée aurait pu créer des dysfonctionnements dans l’effort d’harmonisation de l’aide à l’enfance.

137.À cet égard, il faut notamment souligner l’action de l’UNICEF pour redéfinir les cibles, initier des actions coordonnées entre les organismes étatiques ou municipaux, les institutions d’aide multilatérale ou bilatérale et les ONG étrangères ou nationales.

a) UNICEF

138.L’UNICEF met en œuvre un plan‑cadre d’opérations pour le programme de coopération 1996‑2000 dont les dispositions puisent leur source d’interprétation dans un accord conclu avec le gouvernement le 15 mai 1987. Ce plan‑cadre est susceptible de modifications d’un commun accord et d’ajouts sous la forme de programmes additionnels.

139.Les modifications du plan‑cadre interviennent généralement à l’occasion des examens à mi‑parcours.

140.Dans sa version initiale, les objectifs globaux du programme de coopération 1996‑2000 étaient les suivants:

Réduction de 114 pour 1 000 à 76 pour 1 000 du taux de mortalité infantile et de 166 pour 1 000 à 111 pour 1 000 du taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans;

Réduction du taux de malnutrition modérée et sévère chez les enfants de 0 à 5 ans de 40 % à 20 %.

141.Les objectifs sectoriels comprenaient la santé, la nutrition, l’éducation, l’accès à l’eau potable et l’assainissement de l’environnement de vie, la protection des enfants en situation particulièrement difficile, l’amélioration de la condition sociale et du statut juridique des filles et fillettes, les interventions d’urgence.

142.Les actions sectorielles se situent dans le cadre du Programme national d’action pour le redressement social (PNARS) et sont mises en œuvre en partenariat avec d’autres agences internationales ou bilatérales et les ONG étrangères et la société civile.

143.Le tableau suivant rend compte de la contribution de l’UNICEF à des projets de santé et nutritionnels de 1993 à 1997 et en 1998.

(En milliers de dollars É.‑U. − 1 dollar = 5 395 FMG)

Projets de santé

1993

1994

1995

1996

1998

Santé maternelle et infantile

2 470,9

1 341,8

1 751,7

1 018,6

1 476,4

FIB/IB a

503

499,9

1 016,2

612,9

421,3

Paludisme

42,5

5,7

3,2

-

-

Sida

64,1

38

79,7

30,3

19,6

Appui au programme

-

-

-

159,4

125,4

Total

3 080,5

1 885,4

2 850,8

1 821,2

2 042,7

1998

Projets de santé

Dépenses en dollars É.‑U.

Dépenses en francs malgaches

FIB/IB a

697 131

3 733 136 505

Santé maternelle et infantile

1 899 876

10 173 835 980

Sida

100 266

536 924 430

Total

2 697 273

14 443 896 915

a FIB/IB: Fahasalamana Iraisam ‑bahoaka (Santé avec la participation communautaire)/Initiative de Bamako.

(En milliers de dollars É.‑U.)

Projets de nutrition

1993

1994

1995

1996

1997

Anémie

108,3

92,5

150

-

-

Troubles dus à la carence en iode

171,7

274,3

350,6

180,2

101,2

Surveillance nutrition à assise communautaire

67

127,1

98,7

249,9

206,1

Nutrition générale

79

154,8

217,7

-

-

Appui au programme

200,3

11,2

31,7

112,6

89,8

Total

626,3

659,9

848,7

542,7

397,1

1998

Projets de nutrition

Dépenses en dollars É.‑U.

Dépenses en francs malgaches

Nutrition à assise communautaire

217 137

1 162 822 185

Troubles dus à la carence en iode

111 867

599 047 785

Total

329 004

1 761 869 970

b) AID (États ‑Unis)

144.L’AID intervient dans le cadre du projet Participation et pauvreté qui a fait l’objet d’une convention de subvention passée entre le Gouvernement malgache et les États‑Unis.

145.Quelques exemples d’interventions de l’AID sont donnés ci‑dessous.

Projet Durée de vie de l’enfant

Durée

Objet

Montant en dollars É.‑U.

CRS/FACS

1996‑1999 (4 ans)

Réduire le taux de mortalité infantile et améliorer la sécurité alimentaire à travers le projet Survie de l’enfant

868 000

Avec l’UNICEF

1994‑1998 (5 ans)

Programme élargi de vaccination

1 236 000900 000

Peace corps

1998‑2002 (5 ans)

Adopter un comportement contribuant à la survie de l’enfant par l’intermédiaire de l’information, l’éducation et la communication

1 641 625

Projet Survie de l’enfant

Durée

Objet

Montant en dollars É.‑U.

BASICS

1997‑1998 (2 ans)

Assistance technique aux projets Survie de l’enfant

2 536 000

AAPS/PCIME

1997‑1998 (2 ans)

Améliorer la survie des enfants de 0 à 5 ans

200 000

AAPS/Antsirabe

1997‑1998 (2 ans)

"

71 067

AAPS/Fianarantsoa

1997‑1998 (2 ans)

"

60 476

Care Touch 2000

1996‑1999 (4 ans)

Améliorer la situation des enfants de 0 à 5 ans (20 000 enfants choisis dans 22 fokontany)

2 460 000

c) GTZ (Allemagne)

146.Le projet Renforcement santé de base, dans le cadre de la coopération technique, n’a pas d’enveloppe budgétaire réservée spécifiquement aux activités liées à l’enfant. Cependant, le projet travaille depuis 1987 dans le domaine de la revitalisation des centres de santé de base pour donner l’accès aux soins à des groupes cibles femmes et enfants.

147.Depuis 1998, la GTZ a initié des activités de prise en charge des maladies de l’enfant en collaboration avec l’OMS et l’UNICEF (20 millions de FMG pour la formation des formateurs en juillet 1998).

d) Mission française de coopération et d’action culturelle

148.Les interventions sont nombreuses, importantes et revêtent des formes diverses, par exemple:

Relance de l’usage et de l’enseignement du français: 19,1 millions de francs français;

Programme de renforcement du système éducatif malgache: 30 millions de francs français.

e) Appui au système éducatif

149.Il convient de citer les interventions suivantes:

Intitulé

Projet

Montant

Banque africaine de développement

Renforcement des structures éducatives

14,53 millions d’unités de compte FAD

Banque africaine de développement

Appui au programme d’amélioration qualitative du système éducatif malgache

24 millions de dollars É.‑U.

Association internationale de développement

Crédit de renforcement du système éducatif depuis 1990

39 millions de dollars

PNUD

Appui à la réforme de l’éducation

500 000 dollars

FNUAP

Introduction de l’éducation en matière de population dans le système scolaire

500 000 dollars

UNICEF

Généralisation de l’éducation nutritionnelle et des activités productives

4 millions de dollars

E. Disparités régionales

150.Le premier rapport de Madagascar avait été l’occasion de présenter le territoire de la grande île et de caractériser les différentes régions: les hautes terres, la région côtière de l’ouest qui descend en pente douce des hautes terres vers le canal de Mozambique, la bande étroite des terrains sédimentaires descendant en pente raide des hautes terres vers l’océan Indien, la région du nord‑est et le sud, cette dernière région étant aride, à faible pluviométrie et caractérisée par une longue saison sèche.

151.Le présent rapport ne reviendra pas sur la géographie. Il doit, en revanche, mentionner les facteurs nouveaux qui renforcent les disparités régionales nées de la géographie.

1. Dégradation des infrastructures routières

152.Plusieurs régions souffrent de la dégradation de leurs infrastructures routières. Les habitants des régions isolées ou enclavées revendiquent la réhabilitation des routes qui mènent à leurs collectivités locales. Ils constatent, eux aussi, que cette dégradation est la source de leur pauvreté; en effet:

Les produits locaux ne peuvent pas être écoulés et sont difficilement vendus à des prix équitables; le prix des engrais ne cesse d’augmenter; les paysans savent que le bon état d’une route facilite la circulation des gens et des biens et réduit les frais de transport;

Les produits de première nécessité deviennent rares, sinon introuvables; en tout cas, leur prix est élevé et dépasse souvent les possibilités d’achat du paysan;

L’état de santé de la population, surtout celui du groupe le plus vulnérable, les enfants, s’aggrave; la circulation des groupes mobiles de vaccination se raréfie ou devient impossible; l’approvisionnement en médicaments des centres de santé de base devient très difficile ou est interrompu; des établissements sanitaires ne sont plus en mesure de fonctionner;

La population et particulièrement les enfants souffrent de malnutrition. Le personnel médical, habitué à instruire et conseiller sur l’alimentation des enfants, ne peut plus effectuer de tournées. La malnutrition aboutit souvent à la mortalité.

2. Dégradation des installations sanitaires

153.La dégradation des installations affecte inéluctablement la qualité des soins auxquels les enfants ont droit. Un proverbe malgache dit «La santé est la première richesse» (Ny fahasalamana no voalohan ‑karena). Il ne s’agit pas seulement de dégradations matérielles, mais également de la dégradation en qualité et quantité du personnel. L’État a dû procéder au gel du recrutement des fonctionnaires et des agents publics pour des raisons budgétaires. Cette situation a contribué à diminuer les effectifs du personnel en activité.

154.Par ailleurs, l’insécurité dans les campagnes et les conditions de vie de plus en plus difficiles démotivent les agents de santé. À certaines époques difficiles, il a fallu procéder à la fermeture de centres de santé de base.

3. Insécurité dans les campagnes

155.L’accentuation de la pauvreté et le relâchement de la pression sociale ont provoqué une augmentation de l’insécurité: les actes de banditisme, les vols des bovidés – véritable fléau social –, les vols et destructions de récoltes se multiplient, contribuant à la désertion de certains villages et à des mouvements de migration. Déjà en survie, les enfants souffrent de cette insécurité et de ses conséquences.

4. Déperdition scolaire

156.Sacrifiant l’intérêt supérieur de l’enfant, des parents préfèrent garder leurs enfants auprès d’eux pour les aider dans leurs tâches quotidiennes. Néanmoins, la principale cause de la déperdition scolaire est la pauvreté. Particulièrement dans les régions défavorisées, les parents n’ont pas la possibilité de faire face même aux menues dépenses d’une scolarité pourtant gratuite, et retirent leurs enfants dès qu’ils savent lire et écrire. D’autres enfants ont la chance d’aller jusqu’à l’obtention du certificat d’études primaires élémentaires. Les enfants qui pourraient poursuivre des études secondaires sont découragés par l’éloignement géographique du collège d’enseignement général (CEG) le plus proche. Dans certaines régions, des parents en viennent à donner des bœufs aux instituteurs ou aux responsables de la scolarisation afin que leurs enfants ne soient pas recensés pour une inscription à l’école.

157.On constate ainsi un net recul des conditions de la scolarisation malgré les efforts déployés par les ministères concernés: déperdition scolaire, pauvreté, dégradation des infrastructures, classes surpeuplées, mauvaise répartition des corps enseignants.

5. Calamités naturelles

158.Il faut rappeler les calamités naturelles qui se produisent à l’échelle régionale ou nationale, comme une série de dépressions atmosphériques et de cyclones (certains cyclones revenant deux fois sur la même région) détruisant les structures de base, chassant les populations, et ce, dans un contexte socioéconomique rendant difficile la venue des secours d’urgence, l’acheminement de nourriture et la réhabilitation des infrastructures scolaires ou sociales.

159.En outre, certaines régions, particulièrement le sud de Madagascar, ont souffert d’une sécheresse exceptionnelle, portant gravement atteinte aux récoltes vivrières et à la survie du cheptel.

160.Enfin, depuis des années, certaines régions souffrent d’une invasion exceptionnelle de criquets dévastateurs, contre lesquels les moyens de défense se sont révélés insuffisants ou lents à produire des effets.

161.Cette situation a accru les disparités régionales, s’ajoutant à celles découlant de la nature. Si les hautes terres ont été relativement épargnées, certaines régions, après avoir souffert fortement de la sécheresse, sont actuellement inondées suite à de fortes pluies. Dans d’autres régions, l’accumulation des calamités a accru l’insécurité et, par conséquent, l’abandon des villages par leurs habitants.

6. Les remèdes

162.Les pouvoirs publics ne sous‑estiment pas la gravité de ces disparités et ont pris des mesures pour les corriger dans les domaines juridique, des travaux publics, de la santé et de l’enseignement primaire et de base.

a) Domaine juridique

163.Des structures juridiques ont été mises en places ou sont en cours d’installation. Le premier rapport avait déjà fait mention des efforts de décentralisation effective. La Constitution révisée de 1998 a permis la mise en place des provinces autonomes ayant leur personnalité propre et leur autonomie financière.

164.Selon l’article 2 de la Constitution , ces provinces autonomes sont: Antananarivo, Antsiranana, Fianarantsoa, Mahajanga, Toamasina et Toliara.

165.Selon l’article 127, chaque province autonome gère démocratiquement et librement ses propres affaires dans le cadre de la loi statutaire adoptée par le Conseil provincial et conformément aux règles fixées par une loi organique.

166.La séparation des pouvoirs est nette et claire dans les provinces autonomes. Selon l’article 130 de la Constitution, «dans les provinces autonomes, les fonctions exécutive, législative et juridictionnelle sont exercées par des organes distincts».

167.Les articles 131, 132 et 133 définissent ces pouvoirs. La province autonome est dirigée par le Gouvernement composé d’un Gouverneur et de Commissaires généraux. Le Gouvernement assure donc le rôle exécutif. Le Gouverneur est élu par le Conseil provincial et nomme les Commissaires généraux.

168.La fonction législative est assurée par le Conseil provincial. La loi statutaire de la province autonome définit sa composition, son fonctionnement et ses conditions d’élection.

169.La fonction juridictionnelle relève de la compétence exclusive des tribunaux de l’ordre judiciaire, administratif et financier.

170.Selon l’article 131.1, les domaines qui intéressent spécifiquement les provinces autonomes relèvent de leur compétence, à savoir: administration des collectivités locales, organisation des offices et organismes administratifs à caractère provincial, police urbaine et rurale, foires et marchés, services publics à intérêt provincial et allocations d’études et bourses provinciales.

171.Par contre, selon l’article 135, relèvent de la compétence exclusive de l’État: la nationalité; les relations internationales; la justice; la défense nationale; la sécurité intérieure; les ressources stratégiques; la monnaie, les finances et la douane; le transfert de propriété d’entreprises du secteur public au secteur privé et inversement; la garantie des droits et liberté fondamentaux.

172.Le résultat attendu de ces nouvelles structures juridiques est une meilleure répartition des allocations budgétaires, atténuant les disparités régionales et assurant une répartition équitable des ressources nationales.

b) Travaux publics

173.Le Ministère des travaux publics, grâce à un plan d’action à court terme dans le cadre du programme de politique générale du gouvernement, contribue à remédier au problème des disparités régionales. Son objectif est de désenclaver toutes les régions du territoire de Madagascar et, par conséquent, de faciliter la circulation des populations et des biens.

174.Ainsi, la politique routière adoptée par le gouvernement a notamment pour but de sélectionner les routes à réhabiliter à bref délai. Cet objectif est prioritaire. C’est pourquoi le Ministère des travaux publics a procédé aux études et ainsi réparti des routes interrégionales entrant dans le réseau prioritaire (17 283 km):

Province autonome d’Antananarivo: 73 portions sont en vue, portant le total à 2 589 km;

Province autonome de Fianarantsoa: 82 portions, 4 278 km;

Province autonome d’Antsiranana: 23 portions, 1 490 km;

Province autonome de Toamasina: 17 portions, 1 926 km;

Province autonome de Toliara: 27 portions, 3 579 km;

Province autonome de Mahajanga: 26 portions, 3 421 km.

c) Santé

175.Le Ministère de la santé également, pour rendre effective sa devise «Santé pour tous à l’an 2000», oriente son action vers l’atténuation des disparités régionales en matière d’établissements et de personnel de santé.

Établissements sanitaires

176.On compte actuellement 2 199 établissements sanitaires, qui vont des centres de santé de base de première catégorie (CSB1), aux centres hospitaliers de districts (CHD) et hospitaliers régionaux (CHR).

177.La province autonome d’Antananarivo dispose de 111 CSB2. En d’autres termes, ses 19 fivondronana en sont tous pourvus. On compte 275 CSB1, 13 CHD1, 4 CHD2 et 13 centres hospitaliers universitaires, soit 416 établissements au total.

178.La province autonome d’Antsiranana dispose de 198 établissements. Les CSB1 sont au nombre de 164. Dans les neuf fivondronana, on trouve les CSB2. Vohemar, Andapa et Ambanja en disposent chacun de cinq. Quatre fivondronana disposent chacun d’un centre hospitalier de district de première catégorie. Trois CHD2 se trouvent dans trois autres fivondronana. À Antsiranana I a été installé l’unique centre hospitalier régional de la province autonome. Dans cette partie nord de Madagascar, les établissements spécialisés et les centres hospitaliers universitaires ne sont pas encore en place.

179.La province autonome de Fianarantsoa compte 482 établissements. Les 362 CSB1 se trouvent dans tous les fivondronana. Trois fivondronana sont dépourvus de CSB2, qui sont au nombre de 28. Fianarantsoa dispose de 16 CSB2, 16 CHD1, 5 CHD2 et 1 CHR.

180.La province autonome de Mahajanga est pourvue de 348 établissements, dont 305 CSB1, 33 CSB2, 7 CHD1 et 1 CHD2. Avec la capitale, c’est la seule province autonome à être pourvue de deux centres hospitaliers universitaires.

181.La province autonome de Toamasina est dotée de 410 établissements, dont 328 CSB1, 65 CSB2, 10 CHD1, 6 CHD2 et 1 CHR.

182.La province autonome de Toliara compte 345 établissements. Des CSB1 se trouvent dans tous les fivondronana. On dénombre 40 CSB2, 15 CHD1, 4 CHD2 et 1 CHR.

183.Le Ministère de la santé vient d’entamer un effort considérable, non seulement en faveur des établissements sanitaires en ce qui concerne leur nombre, mais également l’amélioration de leur qualité: plusieurs CHD1 ont été pourvus d’un médecin spécialiste.

Personnel de santé

184.Le Ministère de la santé a pris deux mesures: il a effectué un redéploiement de son personnel et il a procédé à des recrutements.

185.Le redéploiement du personnel consiste à répartir équitablement le personnel existant dans tous les établissements sanitaires de la grande Île.

186.En 1997, le Ministère a proposé 734 affectations dans toute l’Île, dont 664 ont été prononcées. Ainsi, pour la province autonome d’Antananarivo, on a enregistré 163 affectations, 71 pour Antsiranana, 78 pour Fianarantsoa, 111 pour Mahajanga, 124 pour Toamasina et 117 pour Toliara.

187.En 1998, le personnel du Ministère de la santé a été redéployé ainsi:

Antananarivo

Antsiranana

Fianarantsoa

Mahajanga

Toamasina

Toliara

Total

Total général

Central

DIRDS

Central

DIRDS

Central

DIRDS

Central

DIRDS

Central

DIRDS

Central

DIRDS

Central

DIRDS

33

107

20

51

17

61

11

101

22

102

28

89

131

511

642

188.Malgré les contraintes budgétaires et les effets du gel momentané des effectifs du secteur public, le Ministère de la santé a bénéficié de mesures spéciales qui lui ont permis de recruter 273 personnes en 1997, dont 39 médecins généralistes et 190 membres du personnel paramédical; en 1998, 427 personnes ont été recrutées, dont 240 médecins et 187 membres du personnel paramédical; en 1999, le recrutement de 702 médecins était en cours.

189.Un effort significatif a donc été accompli dans le domaine de la couverture sanitaire, dans le sens d’une diminution notable des disparités régionales.

190.On peut espérer qu’en 1999 l’objectif du gouvernement (doter chaque commune d’un dispensaire) sera atteint.

d) Enseignement primaire et de base

191.Dans ce domaine, des efforts importants ont été accomplis par le gouvernement et notamment par le Ministère de l’enseignement secondaire et de l’éducation de base, dans des conditions difficiles et, souvent dans les régions les plus démunies, en situation de pénurie.

192.Le tableau ci‑dessous décrit la situation de l’enseignement primaire et de base en 1997‑1998.

Provinces

Écoles fonctionnelles

Enseignants

Élèves

Public

Privé

Public

Privé

Public

Privé

Garçons et filles

Filles

Garçons et filles

Filles

Antananarivo

2 389

1 874

8 122

7 313

370 122

178 699

237 139

116 352

Fianarantsoa

2 815

538

7 309

1 602

323 545

157 150

64 225

3 552

Toamasina

2 020

103

5 163

1 049

317 053

149 972

42 212

22 753

Mahajanga

1 419

98

3 052

706

182 151

87 961

26 315

12 274

Toliara

1 076

317

1 454

825

142 260

72 998

46 909

24 635

Antsiranana

891

98

1 879

559

146 325

72 692

22 528

11 565

193.Grâce aux crédits du Programme d’investissements publics (PIP), 39 établissements scolaires ont été réhabilités en 1998, dont 11 dans la province de Fianarantsoa et 6 dans la province de Toliara. Il s’agissait pour la plupart d’écoles en voie de dégradation, mais également de bâtiments détruits lors des cyclones.

194.Les départements ministériels concernés procèdent par ailleurs à un redéploiement du personnel enseignant. On constate ainsi que, malgré les contraintes budgétaires au niveau national, des efforts importants ont été déployés pour atténuer les déséquilibres et les inégalités des ressources à l’intérieur du pays.

195.Lors du Sommet mondial pour le développement social en 1995, deux objectifs parmi d’autres ont été retenus: la lutte contre la pauvreté et la promotion des groupes sociaux défavorisés, marginalisés et isolés, parmi lesquels les catégories d’enfants concernées par la Convention relative aux droits de l’enfant. Les quelques actions qui viennent d’être mentionnées et qui seront poursuivie dans les prochaines années contribuent à atteindre ces objectifs.

F. Diffusion de la Convention

196.Dans le premier rapport, les actions de mobilisation sociale, de sensibilisation des adultes et d’information sur la Convention avaient été déjà mentionnées. Ces actions ont non seulement été prolongées, en particulier dans les villes éloignées et les zones rurales, mais d’autres y ont vu le jour.

1. Actions en cours

Traduction

197.Les efforts pour traduire et mieux faire connaître les dispositions de la Convention se sont renforcés.

198.En fait, les institutions publiques, les administrations territoriales, les ONG travaillant sur le terrain et, d’une manière générale, la société civile disposent déjà d’une traduction de la Convention, parue au Journal officiel en même temps que la version française. Mais il faut reconnaître que la version en langue nationale présente quelques difficultés de compréhension. La traduction est parfaitement correcte mais le langage juridique et technique utilisé n’est pas toujours à la portée des personnes peu familiarisées avec les disciplines juridiques. Il a donc fallu s’atteler à la rédaction d’un texte plus simple, mais qui ne pouvait être qu’un résumé à la portée au moins des éducateurs et des animateurs.

199.Cette difficulté sera aisément surmontée lorsque les efforts déployés pour vulgariser la langue juridique malgache porteront leurs fruits.

200.Un autre problème se pose – celui des variantes dialectales utilisées dans les régions. Si la quasi‑totalité de la population malgache comprend et parle la langue classique commune, les dialectes existent et constituent un instrument de transmission de la pensée, des idées et des connaissances dans certaines régions.

201.Ces dialectes pourraient même connaître une vie nouvelle à l’occasion de la mise sur pied des provinces autonomes. Et ils jouent un double rôle qui a son importance dans la diffusion de la Convention. Ils permettent aux animateurs de mieux faire comprendre les dispositions aux mères ou aux enfants dans les régions éloignées des grands centres. Ils contribuent également à enrichir la langue classique. Il n’est pas rare, en effet, qu’une expression dialectale est plus précise et plus significative qu’une expression savante issue du malgache classique commun.

Le mois de l’enfance

202.La tradition est désormais installée d’organiser au mois de juin toute une série de manifestations, aussi bien dans les grandes villes que dans les zones rurales. À cet égard, on peut constater diverses tendances.

203.Tantôt, des visites dans les centres d’accueil pour enfants sont organisées avec les distributions habituelles, tantôt, ce sont les enfants des rues que l’on rassemble pour des repas communs ou pour des distributions de vêtements ou encore pour des jeux éducatifs ou des moments de détente.

204.Tantôt, et c’est une tendance nouvelle, des centres de réflexion se constituent au sein des Églises ou des groupements organisés de la société civile pour sensibiliser les adultes sur les problèmes de l’enfance et sur l’application de la Convention. C’est ainsi, par exemple, qu’au sein de la société des services médicaux ou dans le cadre des activités de l’Académie des sciences, des arts et des lettres sont organisées des séances de présentation de communications sur des problèmes spécifiques, tels que la récupération nutritionnelle des enfants handicapés, la détection des effets de mauvais traitements sur les enfants, ou les causes de la déperdition scolaire. On note un effort pour approfondir des problèmes qui relèvent le plus souvent de connaissances spécifiques ou d’enquêtes sociologiques.

205.Les résultats de ces communications sont publiés dans des revues et dans les journaux, et certaines servent de base à des tables rondes faisant intervenir les médias.

Instruction civique

206.Le Ministère de l’enseignement secondaire et de l’éducation de base a procédé à une refonte des programmes scolaires. Il a donné une place importante aux questions relevant de la Convention, et en particulier celles concernant les droits de l’enfant.

207.La matière «instruction civique» a connu un grand changement. Elle est devenue une matière autonome et a pris le nom d’«éducation civique», cela dans le but de lui donner une plus large envergure et davantage de considération.

208.Ainsi, dans les écoles primaires, elle est enseignée en malgache sous le nom de «Fanabeazana sy fampivelarana ny maha olo‑mendrika» (littéralement «éducation et développement de la dignité humaine»).

209.L’Unité d’étude et de recherche pédagogiques (UERP) vient d’éditer un manuel de l’éducation civique enseignée, consacrée à cinq thèmes:

La vie scolaire et sociale: on y parle non seulement de la nécessité de la scolarisation mais également du code de la route ou de l’impôt;

La nation et l’État: structure et organisation;

Les droits de l’homme: principes généraux, les droits de l’enfant, les libertés fondamentales;

La protection de l’environnement;

Les relations internationales.

210.L’éducation civique enseignée dans les écoles malgaches est désormais une matière à part entière.

2. Actions nouvelles

211.Il faut d’abord mentionner une implication plus grande des ONG, devenues d’importants relais de communication, dans les actions d’animation, d’assistance éducative et dans le cadre du programme de mobilisation sociale. Il a donc été possible d’avoir recours à la technique des messages faisant intervenir des éléments de développement, de vie, et même de suivi tels que la thérapie de réhydratation orale, le programme de vaccination, la propreté à tous les niveaux, la lutte contre la pollution de l’eau, les sels iodés, etc.

212.La création d’une plate‑forme municipale de l’enfance pour la ville d’Antananarivo par un arrêté du 23 août 1995 a été l’occasion de rassembler des personnes directement concernées, les ONG et les institutions internationales souhaitant mettre en commun leurs efforts en faveur des enfants en situation particulièrement difficile de l’agglomération tananarivienne. Les fondateurs ont également voulu que la plate‑forme soit un centre d’information à l’intention de la population et des enfants eux‑mêmes. L’action de l’UNICEF a été déterminante dans la création et la mise en place de cette plate‑forme.

213.Une autre initiative particulièrement intéressante de l’UNICEF aidée par quelques ONG a été le Rassemblement du congrès d’enfants. Des enfants des rues ont été réunis et ont été considérés comme de véritables enfants citoyens appelés à donner leur opinion, faisant part très librement de leurs attentes, et de leurs espoirs. L’entreprise, qui n’était pas sans risques (indifférence, résignation ou une certaine indiscipline et désordre) a été une réussite et il faut en souhaiter la pérennité. Les enfants se sont exprimés, dans leur langage et avec la liberté que l’on souhaitait. C’est ainsi notamment qu’ils ont rejeté l’appellation qu’on leur avait donnée «Quat’mis» et ont préféré être appelés «Boay Kely» – expression difficilement traduisible et comportant la notion de la conscience de leur faiblesse physique (kely = petit) mais également la conscience de leur personnalité de garçon citoyen.

214.Une autre initiative est celle d’un groupe motivé de juristes – avocats et magistrats rassemblés au sein de la Fédération nationale des associations pour la sauvegarde et la protection de l’enfance et de la jeunesse – qui a rédigé un guide de la protection de l’enfance. Il s’agit à la fois: d’un aide‑mémoire destiné à toutes les personnes directement intéressées, par leur profession ou leur vocation bénévole, ou encore leur rôle social, à la protection et à la sauvegarde des droits de l’enfant et d’un manuel sommaire qui peut mieux informer les familles, les parents, et plus généralement toute personne ayant la charge d’enfants.

215.L’équipe de rédaction du guide s’est efforcée d’éviter deux écueils: vouloir trop dire et compromettre la bonne compréhension par des analyses techniques trop complexes, ou au contraire simplifier à l’excès et induire en erreur par omission le lecteur. Ce guide comporte huit rubriques: l’enfant et son individualisation; l’enfant au sein de la famille; les enfants en situation de crise; les modes de protection de remplacement; l’enfant en milieu scolaire; l’enfant au travail; l’enfant et sa santé; l’enfant en situation particulièrement difficile.

216.Il a été décidé qu’une évaluation de l’impact réel du guide de la protection de l’enfance serait effectuée après sa distribution au sein de plusieurs ONG et centres d’accueil.

I. DÉFINITION DE L’ENFANT

217.Si l’on se reporte aux directives générales concernant les rapports périodiques (CRC/C/58), on peut estimer que la plupart des questions posées par le Comité des droits de l’enfant ont déjà reçu une réponse, non pas dans le corps du premier rapport de 1993 mais dans les réponses aux questionnaires complémentaires adressées au Comité. D’autres questions reçoivent réponse dans les sections qui suivent (ayant trait notamment aux procédures judiciaires, à l’identité et aux libertés).

A. La majorité

218.Aux termes de l’article premier de la Convention un enfant s’entend de tout être humain âgé de moins de 18 ans. Dans la législation malgache, l’âge de la majorité varie selon les cas.

219.La majorité matrimoniale est de 18 ans. L’article 5 de l’ordonnance no 62.089 du 1er octobre 1962 relative au mariage dispose en effet: «On entend par mineur, au sens du présent texte, l’enfant âgé de moins de 18 ans.».

220.L’article 4 de l’ordonnance no 62.038 du 13 septembre 1962, sur la protection de l’enfant, édicte que: «La majorité pénale demeure fixée à 18 ans [et que] la preuve de la minorité résulte soit d’un jugement supplétif de naissance, soit d’un examen somatique qui tient lieu d’acte de naissance ou d’un jugement supplétif.».

221.Le droit de vote peut s’exercer à 18 ans révolus.

222.Toutefois, la majorité civile est restée fixée à 21 ans, en vertu de l’article 15 de l’ordonnance no 62.011 du 10 septembre 1962, relative aux dispositions générales du droit privé.

223.Cependant, en application des articles 101 et suivants de la loi 63.022 du 20 novembre 1963 sur la filiation, l’adoption, le rejet et la tutelle, la pleine capacité juridique est acquise au mineur du fait de son mariage.

224.Le tuteur du mineur, par l’émancipation, peut aussi lui conférer cette capacité juridique. L’acte lui conférant l’émancipation sera dressé en la forme authentique ou authentifiée.

225.À défaut d’émancipation, le mineur sera représenté dans tous les actes civils par son tuteur qui a pour fonctions essentielles de prendre soin de la personne du mineur d’une part et d’administrer ses biens d’autre part.

B. La minorité

226.Dans la civilisation malgache, la famille attache une importance particulière à sa descendance. Un enfant est considéré comme une richesse, assurant la continuité de la lignée. Aussi la naissance d’un enfant est‑elle toujours une source de réjouissance familiale.

227.L’enfant vit durant sa minorité sous l’autorité et la responsabilité de ses parents; il a droit à des protections familiales et réglementaires (légales).

1. Exercice de l’autorité parentale

228.L’enfant a pour domicile celui de ses parents; il doit vivre, normalement, avec eux, sous leur responsabilité.

229.Se traduisant concrètement par un devoir de garde, d’entretien et d’éducation, l’autorité parentale est exercée, dans la législation malgache, communément par le père et la mère ou la personne qui a autorité sur l’enfant, quelle que soit la qualité de la filiation, qu’elle soit légitime, naturelle ou adoptive.

a) La garde

230.Le droit de garde confère aux père et mère la possibilité, d’une part, de retenir l’enfant dans la maison familiale. Le mineur ne peut quitter le domicile familial sans l’autorisation de ses parents.

231.Les atteintes au droit de garde sont sanctionnées pénalement: le détournement de mineur est puni d’un emprisonnement de deux à cinq ans (art. 356 du Code pénal). Le délit de non‑présentation d’enfant (détournement de garde) à ceux qui ont le droit de la réclamer est puni d’un emprisonnement d’un mois à un an.

232.La garde ne saurait cependant se transformer en séquestration.

233.Le droit de garde permet, d’autre part, d’assurer la protection de l’enfant: l’enfant de moins de 18 ans ne peut contracter mariage sans l’autorisation parentale, celle du père ou de la mère (art. 5 de l’ordonnance relative au mariage).

234.La question a été posée de savoir comment considérer, sur le plan de la majorité, les enfants mariés âgés de moins de 18 ans, dès lors que les garçons peuvent se marier à 17 ans et les filles à 14 ans, et même avant sur dispense délivrée par le président du tribunal du lieu de la célébration pour motif grave (art. 3 de l’ordonnance relative au mariage).

235.Ces «enfants» sont‑ils protégés par la Convention? La réponse est donnée par l’article 107 de la loi du 20 novembre 1963, qui dispose que la pleine capacité juridique (c’est‑à‑dire la majorité) est acquise au mineur du fait de son mariage. Or, l’article 1er de la Convention précise que l’enfant s’entend de tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable.

236.L’autorisation parentale a comme fondement: la protection d’ordre patrimonial du mineur; la protection du mineur contre les mésalliances qui pourraient résulter de son inexpérience.

237.Enfin, le droit de garde implique pour les parents une obligation de surveillance. L’article 222 de la Théorie générale des obligations édicte à cet effet que «le père ou la mère, lorsqu’il a la qualité de chef de famille, répond des dommages causés par ses enfants mineurs».

b) L’entretien

238.Le devoir d’entretien soumet les parents à une obligation alimentaire envers leur enfant et consiste en même temps à lui fournir des soins permanents ainsi que l’affection dont il a besoin pour s’épanouir.

239.Le devoir d’entretien est expressément exprimé par l’article 62 de l’ordonnance relative au mariage qui édicte que «les époux contractent ensemble par le seul fait du mariage l’obligation de nourrir, entretenir leurs enfants».

240.Les parents d’un enfant né hors mariage ne sauraient pour autant se soustraire à cette obligation car le devoir d’entretien est considéré comme un effet de la paternité et de la maternité.

241.En principe, le devoir d’entretien prend fin à la majorité de l’enfant. Toutefois, le maintien de l’obligation a été admis par la jurisprudence malgache lorsque l’enfant poursuit des études au‑delà de l’âge de 21 ans (majorité civile).

242.Si le père ou la mère légitime naturel ou adoptif a failli à son obligation d’ordre moral ou matériel pendant plus de deux mois, il pourra être poursuivi pour abandon de famille et encourt une peine de trois mois à un an d’emprisonnement et 5 000 FMG à 200 000 FMG d’amende ou l’une de ces deux peines seulement.

c) L’éducation

243.Les parents malgaches ont le devoir d’éduquer leurs enfants. Ils ont le libre choix pour l’éducation à leur donner (art. 23 de la Constitution).

244.L’arrêté ministériel no 3949/87 du 2 septembre 1987 ne concerne que l’âge minimum (6 ans) et maximum (16 ans) d’admission dans une école publique d’enseignement de base.

2. Mesures légales de protection des mineurs

245.Des mesures particulières de protection des enfants sont prévues par le droit positif malgache. Ainsi, il est interdit:

De rejeter son enfant mineur; seule une personne majeure peut faire l’objet d’un rejet (art. 79 de la loi no 63.022 sur la filiation);

De procéder au partage des biens successoraux sans autorisation judiciaire s’il existe parmi les cohéritiers un mineur;

D’abuser sexuellement d’un enfant; de l’inciter à la débauche (art. 331 et suiv. du Code pénal);

De maltraiter un enfant; de l’abandonner ou le délaisser dans un lieu solitaire (art. 312 et 345 et suiv. du Code pénal);

De vendre ou d’offrir gratuitement à des mineurs de moins de 18 ans des boissons alcoolisées; de les faire boire jusqu’à ivresse;

D’employer dans des débits de boissons à consommer sur place des femmes de moins de 18 ans;

De recevoir dans les bars des mineurs de moins de 18 ans non accompagnés de leurs parents ou d’une personne âgée de plus de 21 ans (loi no 61.053 du 13 décembre 1961 sur la lutte contre l’alcoolisme).

246.Parallèlement, une protection judiciaire du mineur délinquant est assurée par l’ordonnance no 62.038 du 19 septembre 1962. Selon les articles 35 et suivants de cette ordonnance:

Le mineur de 13 ans bénéficie d’une irresponsabilité pénale absolue; aucune sanction pénale ne pourra être prononcée à son encontre (art. 35);

À l’égard d’un mineur de 13 à 16 ans, le tribunal pour enfants ou la cour criminelle des mineurs délibère sur la question de la responsabilité pénale;

Si la responsabilité pénale est retenue, l’excuse attenante de minorité jouera de plein droit et la peine prononcée contre le mineur ne pourra s’élever au‑dessus de la moitié de celle à laquelle il aurait été condamné s’il avait été majeur;

Si, au contraire, l’irresponsabilité est admise, le tribunal pour enfants ou la cour ordonnera des mesures éducatives ou la remise du mineur à sa famille (art. 36);

À l’égard d’un mineur de 16 à 18 ans, les dispositions de l’article 36 seront applicables; toutefois, le tribunal pour enfants aura la faculté d’écarter, par décision spéciale et motivée, l’excuse attenante de minorité.

II. PRINCIPES GÉNÉRAUX

A. Non ‑discrimination

1. Situation actuelle

247.Bien que l’égalité entre les citoyens soit garantie par la Constitution et que la législation malgache reconnaisse à tout enfant, indépendamment de sa filiation, de son sexe, de sa religion et de son groupe ethnique, de multiples droits, il existe encore certaines catégories d’enfants qui ne peuvent jouir de la majeure partie de leurs droits pour les raisons évoquées ci‑après.

a) Les coutumes

248.Pratiquées en marge du droit, certaines coutumes contraires à la loi demeurent. Signalons la coutume de la tribu Antambahoaka, de la région de Mananjary, située au sud‑est de Madagascar, laquelle fait interdiction à ses membres d’élever des jumeaux, qui sont rejetés par leurs propres parents dès leur naissance; ces enfants ne connaîtront jamais leurs parents biologiques ni leur famille d’origine.

249.Si ces coutumes ont tendance à persister dans des régions reculées, elles font de plus en plus l’objet de réactions sociales de sauvetage et de protection. Des ONG ou des organismes religieux accueillent les enfants exclus, parfois même obtiennent l’accord des parents pour leur remise et leur accueil.

250.Signalons également une forme particulière de discrimination propre aux grands centres urbains ou aux régions où l’asservissement ou l’esclavage traditionnel avaient sévi dans les temps anciens. Certes, l’esclavage a été aboli en 1896 et il a été mis fin à la distinction entre castes dès cette époque, mais les souvenirs historiques, générateurs d’usages sociaux, sont lents à disparaître. L’histoire intérieure enseigne que, dès leur libération en 1896, les esclaves devenus hommes libres se sont efforcés soit de rester sur les terres qu’ils cultivaient, soit de s’intégrer dans les sociétés urbaines ou villageoises; le plus grand nombre y a réussi, mais certains usages les tenant à l’écart de la vie sociale persistent et atteignent maintenant leurs descendants. Le sort des enfants vivant dans les régions pauvres doit, à cet égard, faire l’objet de préoccupations particulières, dans la mesure où il s’agit, dans la plupart des cas, d’enfants en situation particulièrement difficile.

251.Il s’agit là d’un problème d’éducation des adultes et de prise de conscience des enfants eux‑mêmes qui, avec l’aide des ONG, comprendraient mieux et surmonteraient leur éventuel handicap.

b) La pauvreté

252.Les problèmes économiques auxquels Madagascar est confronté depuis une décennie ont engendré:

L’émergence d’une catégorie d’enfants dits «enfants en situation difficile» (4 500 environ à Antananarivo actuellement) qui vivent pratiquement de la rue et dans la rue; sans toit ni protection, obligés de lutter quotidiennement pour leur survie, ces enfants vivent et grandissent dans l’insécurité totale, exposés à diverses maladies, aux abus sexuels, aux agressions, aux mauvais traitements, à la malnutrition, etc.;

La recrudescence de la prostitution enfantine, avec tous les risques auxquels ces enfants sont exposés: de contracter des maladies sexuellement transmissibles, d’être contaminés par le virus du sida; de grossesse.

c) Les pratiques sociales négatives

253.Les parents pratiquent souvent, inconsciemment ou à cause des usages, la discrimination entre leurs propres enfants. Cette discrimination se voit dans la vie de tous les jours et lors des prises de décisions concernant les enfants:

Les filles sont plus sollicitées que les garçons pour aider les parents dans les tâches domestiques;

Lorsque le ménage est confronté à des difficultés financières, les jeunes filles sont souvent obligées de quitter l’école, soit pour permettre à leurs frères de continuer leurs études, soit pour garder leurs jeunes frères et sœurs pour permettre à leurs parents de travailler, soit pour chercher du travail afin d’assurer la survie de la famille. La majorité de ces jeunes filles deviennent précocement mères de famille.

2. Mesures administratives de lutte contre la discrimination

254.La sensibilisation, les informations et discussions ont constitué jusqu’à récemment les principales actions entreprises pour lutter contre la discrimination dont certains enfants peuvent faire l’objet.

255.Depuis quelques années, cependant, l’État et les collectivités décentralisées s’impliquent davantage dans la protection des individus, dont les enfants, à travers des programmes de développement et des mesures d’assistance appropriées.

256.Pour la réalisation de ces programmes, l’État ou les collectivités œuvrent de concert avec les ONG ou les associations militant en faveur des enfants et font appel aux initiatives locales. Nous ne citerons ici que les plus importantes de ces mesures.

a) Plan d’action national pour l’éducation des filles

257.Le PANEF, approuvé par le décret no 95‑645 du 10 octobre 1995, a pour objectif de préparer les filles aux différents rôles d’épouse, de mère, de citoyenne et d’actrice du développement et de favoriser leur épanouissement pour les raisons suivantes:

Dans le domaine de l’éducation, les valeurs et les connaissances sont transmises à la communauté par la mère et ce rôle éducatif s’étend jusqu’à la stimulation de l’intelligence et de la curiosité de l’enfant;

Dans le domaine de la santé, l’instruction de la mère a un effet positif considérable sur la survie et le bien‑être de l’enfant; par ailleurs, une mère instruite élève ses enfants dans de meilleures conditions de santé, d’hygiène et de nutrition.

258.Une cellule chargée de pilotage et de la réalisation du PANEF a été créée au sein de l’Unité d’étude et de recherche pédagogiques par arrêté (no 377/96).

b) Plan d’action national sur le travail des enfants

259.Adopté en 1998, ce plan est réalisé dans le cadre du programme IPEC (Programme MAG/97/Moi/FRA), qui vise à abolir le travail des enfants et, dans l’immédiat, à améliorer leurs conditions de travail.

260.Pour la réalisation des programmes ayant ces objectifs, il a été créé, en 1998, un comité directeur national qui a pour rôle de coordonner et d’approuver les différents programmes nationaux sur le travail des enfants.

c) Plate ‑forme d’Antananarivo

261.Dans la commune urbaine d’Antananarivo, un comité d’action sociale dit «plate‑forme de coordination, d’information et de suivi des enfants en situation difficile dans le fivondronana d’Antananarivo Renivohitra» (commune urbaine d’Antananarivo), a été créé par l’arrêté no 764/DLA/95 du 23 août 1995.

262.La plate‑forme est composée de représentants des départements ministériels concernés, des institutions internationales intéressées par la protection de l’enfance en situation difficile, des associations, organismes ou groupements souhaitant siéger au sein de la plate‑forme ou participer à ses actions et de toutes personnes directement engagées dans une action générale ou locale en faveur de l’enfance difficile (art. 7).

263.La plate‑forme a pour objectifs principaux d’animer, de coordonner et de donner sa pleine efficacité à l’action des organismes, associations, groupements œuvrant ou ayant l’intention d’œuvrer en faveur des enfants en situation difficile, particulièrement dans les zones socialement et économiquement vulnérables du fivondronana d’Antananarivo Renivohitra (art. 3).

d) Plan d’action national de lutte contre la pauvreté urbaine

264.Adopté à l’issue d’un atelier qui s’est tenu en 1998 à Antananarivo et organisé par le Ministère de l’aménagement du territoire et de la ville, ce plan a bénéficié du soutien et de la participation du Centre des Nations Unies pour les établissements humains (CNUEH) [Habitat].

265.Les actions prévues dans ce plan visent, entre autres, l’éradication de la pauvreté urbaine en facilitant l’accès des populations urbaines démunies à un logement décent et aux services urbains et sociaux de base.

3. Garanties légales de protection contre la discrimination des enfants

a) Le droit à la filiation

266.Au regard du droit positif malgache, la filiation peut être légitime, hors mariage ou adoptive. La loi no 63.022 du 20 novembre 1963 sur la filiation a essentiellement facilité l’établissement des liens de l’enfant à son père ou à sa mère, indépendamment du caractère légitime ou illégitime de ces liens; dans cette loi, la législation se défend toutefois de consacrer les filiations prohibées (incestueuses).

267.Pour l’effectivité du droit de l’enfant à la filiation, la reconnaissance pour l’établissement de la filiation hors mariage et la recherche de paternité en justice sont prévues par l’article 23 de cette loi.

268.L’établissement de la filiation offre à tout enfant un droit de créance alimentaire à l’égard de ses auteurs, un droit à l’entretien et à l’éducation.

b) Le droit à la nationalité

269.Régie par l’ordonnance no 60.064 du 22 juillet 1960, la nationalité malgache est essentiellement une nationalité de filiation jus sanguinis.

270.Le parent transmet la nationalité à son enfant, aussi bien la nationalité d’origine que la nationalité acquise.

271.Dans la filiation légitime, la nationalité est transmise aux enfants par leur père, sauf dans le cas où le père légitime est un apatride ou de nationalité inconnue; les enfants acquièrent alors la nationalité de leur mère (art. 94).

272.Dans la filiation naturelle hors mariage, la mère transmet la nationalité malgache à ses enfants, car, en droit malgache, la filiation maternelle est toujours établie en premier lieu par le fait de l’accouchement.

c) Le droit au travail

273.Les dispositions de l’article 103 du Code du travail prescrivent qu’aucune discrimination ne peut être faite, en matière de travail ou d’emploi, à égalité de capacité et d’aptitude, entre les personnes valides et les personnes handicapées.

274.Les personnes handicapées ont droit au travail et à l’emploi à égalité de chances et de traitement en matière d’apprentissage, de formation professionnelle et d’emploi.

d) Le droit à une protection judiciaire

275.Tout enfant dont la sécurité, la nationalité, la santé et l’éducation sont compromises est en droit de réclamer protection en justice (ordonnance no 62.038 sur la protection de l’enfance).

B. Intérêt supérieur de l’enfant

276.La notion d’intérêt supérieur de l’enfant est connue du droit positif malgache. La Constitution la prévoit en son article 21, et l’ordonnance no 62.030 du 19 septembre 1962 relative à la protection de l’enfance, dans ses articles 1er et suivants, définit la place de l’enfant au sein de la famille et les rôles respectifs de celle‑ci et de l’État dans la protection de l’enfance.

277.Dans la civilisation malgache traditionnelle, l’instruction et l’éducation d’un enfant sont des devoirs confiés aux aînés, gardiens de la tradition. La protection de l’enfant revient aux membres de la famille élargie, qui se sentent tous responsables dès qu’un danger guette l’enfant.

278.Dans la législation moderne, ce rôle d’éducation et de protection de l’enfant tenu par la famille est confirmé par l’ordonnance relative à la protection de l’enfance, à la différence que la législation a consacré, pour l’exercer, le père et la mère de l’enfant ou la personne qui a autorité sur lui.

279.Aucune définition légale de l’intérêt supérieur de l’enfant n’a été avancée par la législation malgache. Elle a toujours été laissée à l’appréciation souveraine du juge.

280.Cependant, à l’issue des décisions rendues, on constate que l’intérêt supérieur de l’enfant est protégé lorsque les droits qui lui sont reconnus ont été respectés, lorsqu’il a pu avoir au sein de sa famille la protection matérielle et morale dont il a besoin et les soins nécessaires à son bien‑être et l’épanouissement de sa personne.

281.Aussi des actes susceptibles de compromettre la moralité, la santé, la sécurité et l’éducation de l’enfant sont‑ils réputés contraires à ses intérêts.

282.Assurer à l’enfant la sécurité matérielle et morale consiste à le nourrir, l’habiller, le scolariser, lui fournir un logement décent et l’élever dans un environnement sain, dénué de tout comportement indigne et immoral susceptible de l’influencer (ivresse manifeste des parents, querelles, mauvais traitements, etc.).

283.Fournir à un enfant les soins permanents nécessaires ne consiste pas seulement à le soigner en cas de maladie, mais aussi à prendre toutes les mesures de prévention possibles pour maintenir l’enfant en bonne santé, afin qu’il puisse jouir de ses forces physiques et intellectuelles.

284.Dans la pratique, cependant, il est souvent difficile de concilier la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant avec l’intérêt de la famille et l’intérêt des pouvoirs publics.

1. Intérêt supérieur de l’enfant et intérêt de la famille

285.Dans certains ménages malgaches, l’enfant constitue une source de main‑d’œuvre, une domesticité gratuite. Souvent, il est obligé d’effectuer de lourdes tâches ménagères, susceptibles d’entraîner des effets néfastes pour sa santé: porter l’eau et le bois, couper le bois de chauffage, faire la cuisine, la lessive, etc.

286.L’enfant peut aussi constituer une source de revenu: il est parfois obligé de travailler pour assurer la survie de la famille, alors que le travail qu’il effectue (aide‑mécanicien, aide‑menuisier dans une fabrique de meubles, ou se prostituer) comporte des risques pouvant compromettre sa sécurité physique et morale).

287.Lequel des intérêts en conflit est à protéger? La réponse à cette question est avancée par l’article 3 de l’ordonnance relative à la protection de l’enfance qui prévoit que «lorsque la famille a failli à ses obligations et que la moralité, la santé ou la sécurité de l’enfant sont compromises, l’État intervient soit pour aider et assister la famille dans son rôle d’éducateur, soit pour prendre des mesures d’assistance éducative et de surveillance appropriées, soit lorsque les circonstances et la personnalité de l’enfant paraîtront l’exiger, pour déférer le mineur à des juridictions spécialisées de l’ordre judiciaire».

2. L’assistance éducative

288.En l’état, il s’avère difficile de rendre effective la disposition de l’article 3 concernant l’assistance éducative. En effet, seule la juridiction pour enfants près le tribunal de première instance d’Antananarivo dispose d’un service social, comportant deux assistances sociales qui assistent les juges des enfants dans leurs fonctions. Dans les autres juridictions, les juges des enfants doivent recourir à l’aide des assistantes sociales travaillant dans des centres privés pour mener à bien leur mission.

3. Placement des enfants dans des centres

289.Le placement du mineur dans les centres d’accueil ou de rééducation se fonde sur la protection du mineur concerné, soit pour le retirer des influences négatives de sa famille, de son entourage ou de ses relations, soit pour le protéger contre lui‑même. Cependant, force est d’admettre que l’état des centres (publics) ne permet pas d’assurer pleinement les besoins des enfants qui y sont placés à cause de l’insuffisance des structures d’accueil, de programmes de réinsertion sociale individualisés et d’éducateurs spécialisés.

290.Par ailleurs, il n’existe pas encore au sein du Ministère de la justice un service éducatif auprès des tribunaux chargé spécialement du suivi des enfants placés en détention préventive.

291.Face à ces lacunes, l’on se demande si le placement de ces enfants constitue réellement une protection de leurs droits.

4. Intérêt supérieur de l’enfant et intérêt de l’État

292.Le conflit d’intérêts survient lorsque l’État ou les collectivités locales ont pris des décisions non conformes à la protection de l’intérêt de l’enfant.

293.En ce sens, une décision prise par le gouvernement sur proposition du Ministère de la santé mérite d’être évoquée. En 1998, le gouvernement a décidé d’opter pour une politique de recouvrement des coûts des soins médicaux; par conséquent, la gratuité de la santé n’est plus effective: le coût des consultations médicales dans les dispensaires publics varie entre 100 FMG et plus de 10 000 FMG. La somme paraît modique; toutefois, il s’avère difficile pour certaines catégories de personnes d’être immédiatement en possession des montants requis au moment où la maladie survient.

294.Les premières victimes seront nécessairement les enfants issus des familles nécessiteuses car, pour éviter de débourser de l’argent, les mères ont recours aux pratiques traditionnelles avec toutes les conséquences médicales qui pourraient en résulter.

5. La sécurité sociale

295.Seule une infime partie de la population bénéficie de la sécurité sociale.

296.Pour le secteur public, l’État rembourse à 100 % les frais médicaux des fonctionnaires et de leurs familles (conjoint et enfants). Concernant le secteur privé, la Caisse nationale de prévoyance sociale constitue un organisme d’assurance sociale pour les travailleurs déclarés. Les personnes n’appartenant ni à l’un ni à l’autre secteur susmentionné (travailleurs occasionnels, paysans, etc.) ne disposent donc d’aucun recours en cas de maladie.

297.Pour pallier la situation, à l’initiative des villageois, des «pharmacies communautaires villageoises» sont implantées dans les lieux où il existe des centres sanitaires de base (CSB) depuis 1996. Ces pharmacies ont pu fonctionner grâce aux cotisations des villageois, qui ont constitué un fonds commun destiné à l’achat des médicaments usuels: contre les diarrhées, le paludisme, la grippe, les maladies des voies respiratoires, etc.

6. Mesure prise pour la protection de l’intérêt de l’enfant

298.Un grand pas a été franchi dans la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant par la publication du Guide de la protection de l’enfance, élaboré par la Fédération nationale des associations pour la sauvegarde et la protection de l’enfance et de la jeunesse et publié par l’UNICEF (voir supra, par. 217).

C. Droit à la vie, à la survie et au développement

299.L’article 6 de la Convention stipule que «tout enfant a un droit inhérent à la vie». L’État doit assurer dans la mesure du possible la survie et le développement permanent de l’enfant. En tant qu’être humain, l’enfant a le droit de vivre et d’être protégé contre toutes les situations qui pourraient mettre sa vie en danger.

300.Dans la tradition malgache, cette protection était assurée par la famille élargie: les membres de cette famille entouraient l’enfant et l’assistaient durant sa minorité, si bien qu’un enfant avait toujours un toit pour s’abriter et une personne pour le nourrir et veiller à son bien‑être; son éducation était assurée par l’aîné, chef de la famille.

301.Le droit positif moderne a maintenu et renforcé la protection traditionnelle existante. Les droits à la vie, à la survie, à l’éducation sont garantis par la Constitution. L’enfant est protégé par la loi dès sa conception jusqu’à sa majorité:

L’avortement, l’infanticide, les mauvais traitements, l’abandon sont réprimés par le Code pénal;

Les parents (ou la personne qui a autorité sur l’enfant) ont l’obligation de le nourrir, de l’entretenir et de l’éduquer.

1. Situation actuelle

302.La majorité des parents malgaches accorde une importance primordiale à la vie, au bien‑être et au développement de leurs enfants; avoir des descendants prospères et dignes est un honneur pour les parents, une fierté pour la famille entière.

303.Cependant, la crise économique traversée par le pays ces dernières années a provoqué une dégradation alarmante du niveau de vie de la population. Une baisse du pouvoir d’achat est constatée, d’où une réduction de la consommation des familles dans tous les domaines, avec des effets néfastes sur la nutrition, la santé et l’éducation des enfants, mettant ainsi en danger leur vie et leur développement.

a) Les contraintes à la libre jouissance des droits énoncés à l’article 6 de la Convention

La pauvreté

304.Depuis une dizaine d’années, le faible revenu des ménages ne permet plus à beaucoup de familles, rurales et urbaines, de satisfaire aisément les besoins alimentaires de leurs membres. Une modification des habitudes alimentaires se fait sentir: la quantité a primé sur la qualité de nourriture de certaines familles, tandis que, pour quelques‑unes en stratégie de survie, la nourriture quotidienne est obtenue à l’aide d’expédients (vols dans les champs en zone rurale, larcins en ville et, dans les situations les plus graves, exploration des poubelles).

305.La malnutrition est la principale source de maladie et de décès infantiles. La malnutrition a également un impact négatif sur le rendement scolaire des enfants et en matière de travail: certains enfants sont contraints de travailler, le plus souvent dans le secteur informel, pour assurer leur survie.

306.Or, le droit au développement implique le devoir de couvrir les besoins sanitaires des enfants en cas de maladie; d’offrir aux enfants un logement décent ou simplement un toit; de donner aux enfants l’éducation nécessaire à leur développement.

307.Selon un rapport du projet MADIO présenté au Ministère du plan concernant le résultat des enquêtes effectuées sur les revenus d’activités entre 1993 et 1998 à Madagascar, la rémunération mensuelle de l’emploi principal est de 215 000 FMG tandis que les rémunérations médianes ne dépassent pas 150 000 FMG.

308.Dans le secteur public, le revenu mensuel moyen est plus important dans les entreprises publiques que dans l’administration (435 000 FMG contre 342 000 FMG).

309.Dans le secteur privé, le revenu mensuel moyen est de 262 000 FMG.

310.Pour un nombre d’heures de travail plus élevé, les salariés des entreprises franches gagnent en moyenne 184 000 FMG.

311.Le secteur informel est le moins rémunérateur avec 152 000 FMG.

312.Depuis le mois de mai 1998, le salaire minimum d’embauche est de 123 000 FMG.

Les pratiques sociales négatives

313.En zone rurale, dans le Moyen‑Ouest où l’élevage du zébu se pratique à grande échelle, les parents interdisent aux enfants de fréquenter l’école pour devenir bouviers.

314.En zone urbaine, la pratique de certaines sectes, qui fait interdiction à leurs membres de consulter un médecin ou de se rendre à l’hôpital en cas de maladie, porte atteinte au droit de l’enfant de recevoir les soins nécessaires à sa santé.

b) Mesures prises pour lutter contre les contraintes

315.Lutte contre la pauvreté: adoption d’un plan national d’action de lutte contre la pauvreté en avril 1998.

316.En matière d’éducation

Participation de l’État aux frais de scolarité des enfants des fonctionnaires à chaque début d’année scolaire;

Le Ministère de l’enseignement secondaire et de l’éducation de base a opté pour une politique de décentralisation des enseignants afin de pourvoir en nombre suffisant les écoles se trouvant dans les zones enclavées;

Des matières parascolaires (couture, menuiserie, notions d’agriculture et d’élevage) sont dispensées aux élèves des écoles publiques de base et dans certaines écoles confessionnelles pour compléter la formation des enfants;

Soutien à la création des centres d’accueil pour la protection des enfants marginalisés.

2. Tableau récapitulatif

Indicateur

Année

1992/1993

1998

Mortalité infantile

93 pour 1 000 naissances vivantes

77 pour 1 000 naissances vivantes

Espérance de vie à la naissance

51 ans pour les hommes 53 ans pour les femmes

57 ans pour les hommes 60 ans pour les femmes

Taux d’analphabétisme

54 % dont 61 % en milieu rural et 32 % en milieu urbain

Taux brut de scolarisation primaire

77 % pour les garçons 74 % pour les filles

Pourcentage d’enfants atteignant la dernière année de l’enseignement primaire

36 % pour les garçons 41 % pour les filles

Taux brut de scolarisation dans le secondaire

15 % pour les deux sexes

Source: Brochure concernant les activités du FNUAP en 1998.

D. Respect de l’opinion de l’enfant

317.La Convention stipule que les États parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité.

318.L’article 10 de la Constitution de 1992 dispose que «les libertés d’opinion et d’expression, de communication, de presse … sont garanties à tous».

319.La Constitution ne fait pas de distinction d’âge; elle précise seulement que les nationaux sont égaux en droits.

320.L’enfant qui jouit de la nationalité malagasy de son père ou de sa mère est concerné par ces droits.

321.L’enfant a le droit d’exprimer librement ses opinions. Le texte souligne que l’exercice de cette liberté nécessite une faculté de discernement, c’est‑à‑dire un certain degré de maturité.

322.Comment et quand l’enfant exerce‑t‑il ce droit? Selon ses capacités évolutives, l’enfant l’exerce dans sa famille et à l’école.

1. Dans la famille

323.La famille est le domaine privilégié pour l’épanouissement physique, intellectuel et moral de l’enfant. Les parents ont le choix de l’éducation qu’ils entendent donner à leur enfant. Ils ont la principale responsabilité d’orienter et de conseiller leur enfant. Les parents guident et orientent l’enfant dans l’exercice de ses droits et c’est au sein de la famille que l’enfant évolue et commence à exprimer ses opinions.

324.Cependant, dans la société traditionnelle, les femmes et les enfants n’ont pas souvent le droit à la parole lors d’une prise de décisions au sein de la communauté, même s’il s’agit d’une question qui les concerne.

325.La tradition fait que l’enfant vient en troisième rang après les femmes. Ce sont toujours les hommes qui prennent les décisions concernant la famille et le village. L’enfant n’a que des devoirs, c’est-à-dire exécuter les ordres des grandes personnes.

326.Cependant, grâce à l’effort considérable fourni par l’État, qui répartit les écoles dans toutes les régions, même les plus éloignées, les enfants sont peu à peu libérés de l’emprise patriarcale ou traditionnelle et trouvent à l’école un nouveau domaine d’expression.

2. À l’école

327.L’éducation, qui vise surtout le développement et l’épanouissement de l’enfant, favorise l’établissement d’un dialogue entre l’enfant et les adultes.

328.L’enseignement est donc un moyen pour l’enfant de se cultiver, d’avoir des connaissances, de reconnaître ses droits et de les revendiquer. Grâce à la scolarisation, l’enfant a l’esprit critique, atteint un certain degré de maturité et a une faculté de discernement. Il peut émettre des suggestions ou des opinions concernant les questions qui peuvent l’intéresser. L’école constitue pour l’enfant, futur acteur de la vie politique ou économique un lieu d’apprentissage, lieu où il commence déjà à s’exprimer, à se personnaliser.

329.Certaines écoles ont comme politique de faire participer les élèves à l’administration de l’établissement. Ils sont représentés par un délégué pendant les conseils de classe. Au cours des réunions, on demande aux élèves leur avis dans le but d’améliorer des prestations ou des méthodes de travail des professeurs, ce qui produit des résultats satisfaisants à la fin de l’année scolaire.

III. LIBERTÉS ET DROITS CIVILS

330.Le présent chapitre est consacré aux droits civils et aux libertés fondamentales, à la protection de l’identité, qui concerne particulièrement le nom, la nationalité et la filiation, la protection de la vie privée, l’accès à l’information et le droit à l’intégrité physique.

331.Le premier rapport avait longuement commenté les dispositions du droit positif malgache concernant toutes ces matières. Il ne semble pas utile d’y revenir à moins de modifications significatives ou de nouvelles dispositions législatives; dans ce cas, les modifications ou les innovations seront expressément présentées et commentées.

332.Le présent chapitre prenant en compte le fait que l’importance d’une loi réside dans son application effective, sera consacré aux faits sociaux nouveaux, aux initiatives prises pour mieux faire connaître la loi et en faciliter l’application, aux recherches et aux études qui ont été initiées pour mieux cerner les difficultés d’application de la loi.

333.Dans cette perspective, il sera fait mention de l’action du Ministère de la justice, du Ministère de la population, de la condition féminine et de l’enfance, des initiations importantes prises par l’UNICEF et de l’impulsion qui a été donnée aux ONG dont les activités sont plus particulièrement orientées vers l’enfance.

334.Les années allant de 1993 à 1998 ont été marquées par des événements ou des faits sociaux qui ont eu un impact défavorable sur l’application des dispositions de la Convention, notamment:

L’accroissement de la pauvreté;

La dégradation de l’administration de base, notamment au niveau communal;

Corrélativement, le délabrement des services de l’état civil;

La montée de la violence et de l’insécurité, aussi bien dans les campagnes que dans les zones urbaines, menaçant ou affectant la sécurité morale ou physique des éléments les plus vulnérables de la population, dont les enfants;

La dégradation des mœurs encourageant des atteintes à la moralité et aux bonnes mœurs;

La diminution du respect dû à la personne de l’enfant, conséquence de la pauvreté, de la montée de la violence et de la dégradation des mœurs.

A. Libertés fondamentales

335.Les articles 13 à 15 de la Convention disposent que l’enfant a droit à la liberté d’expression, à la liberté de pensée, de conscience et de religion, à la liberté d’association et à la liberté de réunion pacifique.

336.Ces différentes libertés ont été traitées dans le premier rapport, qui précisait cependant que les textes législatifs et réglementaires étaient en nombre restreint dans le droit positif malgache et que, par ailleurs, aucun ne concernait l’enfant d’une manière spécifique.

337.Aussi, dans le présent rapport, a‑t‑on examiné à nouveau la portée réelle de textes généraux octroyant ces diverses libertés quand il s’agit de les appliquer aux droits de l’enfant.

338.Le texte le plus important à cet égard est la Constitution de 1992, qui a été, rappelons‑le, profondément remaniée, par la loi constitutionnelle no 95.001 du 13 octobre 1995, puis par voie de référendum le 15 mars 1998. Madagascar se trouve de fait sous le régime d’une Constitution renouvelée.

1. Apports de la Constitution

339.S’agissant des droits de l’enfant, les juristes ont en premier lieu, réexaminé le préambule de la Constitution. Il y est précisé que les Conventions relatives aux droits de la femme et de l’enfant sont considérées comme partie intégrante du droit positif. Il y a donc eu confirmation et renforcement de l’intégration de la Convention dans le droit positif malgache.

340.Les conséquences de cette intégration ont fait l’objet de commentaires antérieurs, dont on rappellera les trois éléments principaux.

341.L’ordonnance du 19 septembre 1962 portant dispositions générales de droit privé précise clairement que «les principes généraux contenus dans le préambule de la Constitution s’imposent aux juges qui doivent en tous les cas en faire assurer le respect et l’observation dans le cadre de la législation en vigueur». La Convention faisant partie intégrante du droit positif, ses dispositions font partie de «la législation en vigueur».

342.Cela n’empêche en aucune manière le législateur malgache de préciser les modalités d’application des dispositions de la Convention lorsque celles‑ci apparaissent trop générales ou nécessitent une réglementation complémentaire.

343.Toutefois, l’élément qui paraît le plus important concerne la conception nouvelle de «l’enfant citoyen» qui apparaît clairement à travers les dispositions de la Convention. L’enfant accède à un statut caractérisé aussi bien par l’ampleur de la protection juridique qui est organisée en sa faveur que par les droits importants qui lui sont conférés. Selon le préambule de la Convention, l’enfant «a droit à une aide et à une assistance spéciales»; il faut assurer «l’épanouissement harmonieux de sa personnalité» et «il importe de préparer pleinement l’enfant à avoir une vie individuelle dans la société, et de l’élever dans l’esprit des idéaux proclamés dans la Charte des Nations Unies, et en particulier dans un esprit de paix, de dignité, de tolérance, de liberté, d’égalité et de solidarité».

344.En d’autres termes, la Convention élève la condition juridique de l’enfant; certes, celui‑ci doit «grandir dans le milieu familial» et, «en raison de son manque de maturité physique et intellectuelle, a besoin d’une protection spéciale», mais il acquiert des prérogatives telles que l’expression libre de son opinion et les libertés qui viennent d’être énumérées. Ces prérogatives sont nouvelles dans la tradition et dans la culture malgache, qui, tout en manifestant une grande affection à l’égard de l’enfant, l’enferme dans un réseau d’obligations, lui enseigne le respect des anciens et le devoir d’obéissance.

345.Dès lors que le respect dû à l’enfant s’atténue sous l’effet de la dislocation du groupe familial de la pauvreté et de la montée de la violence, «l’enfant roi» devient «l’enfant domestique». Pour éviter cette dérive, il faut redonner sa pleine signification à la notion d’enfant citoyen qui n’a pas encore atteint sa majorité civile, mais qui fait l’apprentissage de la vie en communauté en apprenant à devenir un citoyen à part entière.

346.Aussi doit-on affirmer que les droits fondamentaux donnés à l’individu par la Constitution malgache sont donnés également à l’enfant, dans la seule mesure où ils ne sont pas expressément limités par la Convention ou les lois spécifiques malgaches. Ces limitations sont constituées, par exemple, par le droit de guidance parentale, les règles gouvernant la majorité civile, les interdictions imposées aux enfants dans leur propre intérêt, pour leur sécurité morale et physique ou leur santé.

347.C’est dans cet esprit que doivent être interprétés les articles suivants de la Constitution:

Article 19:«L’exercice et la protection des droits individuels et des libertés fondamentales sont organisés par la loi».

Article 10:«Les libertés d’opinion et d’expression, de communication, de presse, d’association, de réunion, de circulation, de conscience et de religion sont garanties à tous et ne peuvent être limitées que par le respect des libertés et droits d’autrui et par l’impératif de sauvegarder l’ordre public».

Article 17:«L’État organise l’exercice des droits qui garantissent pour l’individu l’intégrité et la dignité de sa personne, son plein épanouissement physique, intellectuel et moral».

Article 26:«Tout individu a le droit de participer à la vie culturelle de la communauté, au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent».

348.En revanche, un exemple de limitation est donné par l’article 23 de la Constitution, qui précise que «tout enfant a droit à l’instruction et à l’éducation sous la responsabilité des parents dans le respect de leur liberté de choix».

349.Pour illustrer ces considérations d’ordre juridique, on doit citer la loi no 94.033 du 13 mars 1995 portant orientation générale du système d’éducation et de formation à Madagascar, dont on citera quelques dispositions:

Article 2:«L’éducation et la formation à Madagascar visent à favoriser l’épanouissement physique, intellectuel, moral et artistique de la personnalité de l’individu dans la pleine jouissance de sa liberté».

Article 29:«L’école primaire ou élémentaire vise l’autonomie de l’enfant et lui donne les moyens d’agir sur son existence et sur la société, pour participer pleinement au développement, pour prendre des décisions éclairées et pour continuer à apprendre dans une perspective de formation permanente».

2. Mise en œuvre des libertés fondamentales

350.Bien que l’on constate que les efforts déployés par les autorités publiques, les institutions spécialisées, notamment l’UNICEF, les ONG, les associations et les communautés religieuses sont encore insuffisants pour faire toujours mieux connaître et assurer la réelle application de la Convention, les différentes initiatives prises pour assurer un plein épanouissement de l’enfant font espérer des progrès toujours plus significatifs dans la prise de conscience des enfants citoyens.

a) Éducation des parents

351.En présence des phénomènes tangibles de dislocation ou de fragilisation du groupement familial, des initiatives ont été prises durant les cinq dernières années pour remettre en honneur ce qu’on avait appelé «l’école des parents». Des ONG et surtout des communautés religieuses − principalement catholiques et, dans une moindre mesure, protestantes − ont organisé des rencontres avec des parents soit au niveau des parents d’élèves dans les écoles privées, soit dans les paroisses, soit encore dans le milieu des parents dont les enfants fréquentent des mouvements de jeunesse (scoutisme en particulier). Des animateurs bénévoles ont ainsi instauré un dialogue avec des parents, tuteurs ou responsables au sein des familles. D’une manière générale, il ne s’agissait pas de prodiguer des conseils pédagogiques ou moraux, mais d’attirer l’attention sur les réelles prérogatives dont les enfants bénéficient selon la Convention.

352.Cependant, il faut se rendre compte que ces initiatives, qui ont été bien accueillies, ont concerné surtout des parents déjà informés, rencontrant certes des difficultés en raison notamment du conflit entre les traditions d’une éducation à base d’obéissance et de résignation et les nouvelles prérogatives de l’enfant, mais qui étaient en mesure de résoudre ce conflit.

353.Il en est autrement dans les zones suburbaines ou rurales où dominent la suprématie des anciens et les réticences, sinon le refus, à l’égard des droits octroyés à l’enfant. Mis en œuvre pleinement, ces droits menacent la cohésion de la grande famille déjà disloquée et constituent un handicap pour une société qui est en stratégie de survie: l’enfant est un apport de main-d’œuvre, d’aide ménagère, parfois de richesse.

354.Il est donc souhaitable que les initiatives en direction des parents et des personnes qui occupent, par leur rôle social, une place privilégiée au sein des groupements familiaux se multiplient afin que s’atténue la résistance traditionnelle à l’épanouissement de l’enfant citoyen.

b) Actions en direction des enfants

355.De plus en plus, dans les milieux précédemment énumérés, des associations motivées, des animateurs bénévoles, des éducateurs de bonne volonté s’efforcent de rassembler des adolescents, en évitant tout autoritarisme et en faisant appel aux capacités de l’enfant à se préparer à son rôle d’enfant citoyen: les enfants ou adolescents sont invités à s’exprimer librement, à identifier leurs propres problèmes et à formuler leurs souhaits, besoins et opinions hors de la présence ou sans l’intervention des parents.

356.Les enfants qui ont pu être atteints sont généralement issus de milieux modestes et appartiennent à la catégorie des enfants en situation particulièrement difficile, parmi lesquels les enfants qui vivent dans la rue et de la rue.

357.Ces initiatives tirent leur origine d’une importante action de l’UNICEF en collaboration avec le Ministère de la population, de la condition féminine et de l’enfance. Il s’agissait, avec l’aide d’ONG motivées, de réunir des «boay kely» (jeunes garçons en «colloque» et dans une atmosphère de liberté et de les amener, après avoir acquis leur confiance, à s’exprimer.

358.Pour beaucoup, l’initiative a paru insolite et a attiré plus de curiosité et de scepticisme que d’enthousiasme; mais, constatant le sérieux avec lequel les réunions avaient été organisées et leurs réponses recueillies, les enfants et adolescents réagirent en majorité avec une maturité inattendue. Les réponses ont porté en particulier sur le manque de loisirs, sur l’impossibilité de fréquenter, comme d’autres, l’école. Les besoins en aliments ou en argent n’étaient pas prioritaires tout en étant fermement exprimés.

359.Malgré les difficultés d’organisation, de telles initiatives devraient être multipliées, notamment dans le cadre des activités d’animation de quartiers et par la création de «clubs d’enfants» pris en main par les enfants eux-mêmes.

360.Dans les zones rurales, ces actions devraient être d’une grande efficacité: habitués à remplir des tâches d’adulte, amenés à protéger et même à prendre en charge leurs cadets, les enfants de la campagne, même illettrés, ont une plus grande aptitude à se prendre en main que les enfants des villes.

c) Notion de discernement

361.L’apprentissage de la vie communautaire de l’enfant citoyen ne peut se concevoir que pour les adolescents ayant acquis un certain degré de maturité. La Convention elle‑même le reconnaît et énonce qu’il faut donner à l’enfant «l’orientation et les conseils appropriés à l’exercice des droits que lui reconnaît la présente Convention» (art. 5) d’une «manière qui corresponde au développement de ses capacités» (art. 14). L’article 12 est encore plus explicite lorsque, s’agissant d’une liberté fondamentale importante, le droit d’exprimer librement son opinion, l’enfant doit être «capable de discernement».

362.Juristes, psychologues et sociologues se sont interrogés sur les critères du «discernement» ou de «l’état de développement des capacités». Les juristes se réfèrent généralement à la législation pénale dont les dispositions concernent les mineurs ayant commis une infraction:

Dans le droit traditionnel malgache, l’article 156 du Code des 305 articles (1881) dispense de sanction pénale l’enfant de 10 ans et au‑dessous. La doctrine postérieure avait interprété cette disposition comme ayant accordé à l’enfant «l’excuse de minorité» telle que la loi française (art. 66 et suiv. du Code pénal français) l’accordait. Certes, l’effet de cette interprétation était de rechercher le fondement de l’impunité dans l’âge de l’enfant; mais le texte original en langue nationale allait plus loin en disposant que l’enfant ne pouvait être condamné par les tribunaux répressifs parce qu’il n’avait pas atteint le degré d’intelligence suffisant («tsy ampy saina»). Le fondement, dans la tradition, était donc déjà l’insuffisance de compréhension de la portée de l’acte délictueux commis.

Dans la législation coloniale, l’ancien décret du 30 novembre 1928 prévoyait que les mineurs de moins de 16 ans ayant commis une infraction pénale pouvaient être acquittés ou relaxés comme «ayant agi sans discernement».

L’ordonnance no 62038 du 19 septembre 1962 sur la protection de l’enfance prévoit qu’en cas de commission d’une infraction pénale l’enfant de moins de 13 ans ne peut faire l’objet que d’une mesure d’assistance éducative à l’exclusion de toute sanction pénale.

Si l’enfant est âgé de 13 à 16 ans, le tribunal délibère sur sa responsabilité pénale. En d’autres termes, s’appuyant sur les éléments qui ont pu être recueillis sur la personnalité du mineur, et notamment sur l’enquête sociale ou l’examen médical dont il a été l’objet, le tribunal apprécie souverainement s’il y a lieu ou non à l’application de l’excuse de minorité.

Si l’enfant est âgé de 16 à 18 ans, la même procédure est suivie mais, par décision spéciale et motivée, l’excuse atténuante de minorité peut être écartée et le mineur sera alors jugé comme un majeur.

363.Il résulte de ces explications que les critères du «discernement» sont, en matière judiciaire, l’âge et l’évaluation du degré de maturité de l’enfant. Or, l’âge est un élément insuffisant d’appréciation par son caractère automatique et l’imprécision et les risques d’erreur dus à la mauvaise organisation de l’état civil. Quant à l’évaluation du degré de maturité, elle se réduit souvent à l’interrogatoire du mineur, qui, selon la procédure, «peut être entendu» par le juge. Les examens médicaux et les enquêtes sociales ne sont pratiques que dans les grands centres urbains où il existe des spécialistes et des personnes professionnellement compétentes. Enfin, il ne faut pas perdre de vue que les critères judiciaires n’ont leur utilité que pour déterminer le degré de responsabilité pénale.

364.Pour apprécier la faculté de discernement de l’enfant, ou l’état de développement de ses capacités, il faut s’en tenir à une évaluation pragmatique, prenant en compte le milieu, le degré de scolarisation, les conditions de vie, les antécédents de l’enfant.

365.À cet effet, il pourrait être établi des questionnaires auxquels les enfants répondraient, dans une atmosphère de confiance et de confidentialité. Des ONG se préoccupent de l’établissement de ces questionnaires, qui permettraient d’établir des fiches d’assistance et de suivi et de «cibler» les enfants dont les capacités de devenir un enfant citoyen peuvent être efficacement développées.

B. Droit à l’identité et à sa préservation

366.Les articles 7 et 8 de la Convention prévoient en faveur de l’enfant le droit à un nom, l’acquisition d’une nationalité, à la connaissance de ses parents et à la préservation de son identité.

367.Ce sont précisément les aspects fondamentaux de l’identité de l’enfant qui font l’objet de la présente section. L’identité est en effet étroitement liée au nom, à la nationalité et à la filiation, elle-même génératrice des relations familiales.

368.Le premier rapport avait largement traité des efforts du législateur malgache, particulièrement après l’indépendance, de 1960 à 1963, période durant laquelle ont été promulgués:

La loi no 61.025 du 9 octobre 1961 relative aux actes d’état civil;

L’ordonnance no 62.003 du 26 juillet 1962 sur le nom, le domicile et l’absence;

Le Code de la nationalité malgache par ordonnance no 60.064 du 22 juillet 1960;

L’ordonnance no 62.089 du 1er octobre 1962 relative au mariage;

La loi no 63.022 du 20 novembre 1963 sur la filiation, l’adoption, le rejet et la tutelle.

369.À diverses reprises, ces lois ont été mentionnées et ont fait l’objet d’une présentation technique et d’un commentaire sur lesquels il n’est pas nécessaire de revenir. Certes, des articles ont été modifiés, mais ces modifications n’affectent pas la législation malgache, qui est restée remarquablement stable dans le domaine lié à l’identité et à sa préservation.

370.En revanche, il faut mentionner tant des problèmes soulevés dans les cinq dernières années que des initiatives prises pour rendre plus effective l’application de ces lois.

1. Initiatives

a) Opération «carte d’identité»

371.À l’occasion des différentes consultations électorales qui se sont déroulées durant ces dernières années, il a été constaté qu’un nombre important de citoyens étaient dépourvus de carte d’identité et n’étaient donc pas en mesure de prouver leur identité.

372.Il a donc fallu organiser une véritable opération «carte d’identité» ayant pour objet de faciliter la délivrance des documents nécessaires à l’établissement des cartes.

373.Cette opération ne concernait pas les enfants protégés par la Convention, mais elle a permis de se rendre compte à quel points les services nationaux de l’État civil étaient défaillants: perte des registres ou état de délabrement les rendant inutilisables, négligence dans la tenue de l’état civil et dans le contrôle des registres par les autorités judiciaires et administratives, négligence et anarchie dans la conservation du double des registres, inexistence d’actes de naissance et donc, à l’origine, d’enregistrement des naissances.

374.Prenant conscience de cette situation, les administrations concernées ont mis sur pied une organisation adéquate pour une meilleure tenue de l’état civil dans l’immédiat; ensuite pour une réhabilitation des services aux différents niveaux: reprise en main des archives des «firaisana» et reconstitution des archives communales, réactivation des mesures de surveillance et de contrôle, motivation des agents chargés de la tenue des registres d’état civil.

375.À cette occasion, un nombre important de tables rondes, conférences‑débats et réunions interministérielles ont été organisées sans qu’on puisse faire état de résultat tangibles.

376.Dans le domaine de l’aide extérieure, la Mission française de coopération et d’action culturelle a proposé une importante assistance pour la réhabilitation de l’état civil.

b) Opération «jugement supplétif»

377.À l’initiative du Ministère de la population et de l’UNICEF, une opération «jugement supplétif» a été lancée en 1996/97 dans la commune urbaine d’Antananarivo.

378.On avait constaté, d’une part, la très mauvaise tenue de l’état civil en matière d’enregistrement des naissances et, d’autre part, les réticences des familles à faire enregistrer les naissances en raison de l’éloignement des centres d’état civil et de leur répugnance à avoir affaire à une administration elle‑même débordée par d’autres préoccupations et démotivée par l’ampleur de la tâche à accomplir.

379.L’opération a consisté à faciliter dans toute la mesure possible la délivrance de jugements supplétifs aux enfants dépourvus d’acte de naissance. Avec l’aide de l’UNICEF et la participation d’ONG, les familles, particulièrement celles qui étaient éloignées des centres d’état civil et qui ignoraient les formalités à accomplir, ont été approchées, ont rempli les formules administratives nécessaires et se sont rendues avec les enfants dépourvus d’acte de naissance au tribunal de première instance, où, malgré la surcharge de travail, les magistrats ont tenu régulièrement des audiences consacrées à la délivrance de jugements supplétifs d’actes de naissance.

380.Cette opération, qui devra se répéter en raison du grand nombre d’enfants non atteints, devra être prise en exemple dans tous les grands centres urbains et les zones rurales.

c) Réhabilitation du service de l’état civil

381.L’opération «jugement supplétif» était essentiellement ponctuelle et a révélé les faiblesses du service de l’état civil à l’échelle nationale. Dans le premier rapport, il avait été fait mention des dispositions de la loi no 61.025 du 9 octobre 1961 relative aux actes d’état civil.

382.Il faut malheureusement constater que, durant la période 1993-1998, non seulement aucun progrès n’a été observé dans l’enregistrement des naissances, malgré un incontestable essor démographique, mais on a assisté à une lente dégradation des services, tant au niveau de la tenue des registres de l’état civil que dans leur conservation et leur contrôle par les autorités judiciaires ou les autorités administratives de tutelle.

383.Cette constatation avait déjà été faite précédemment ainsi que dans le premier rapport. Mais, durant les quatre dernières années, la situation s’est particulièrement aggravée pour des raisons qu’il convient de rappeler:

Au niveau de la population, l’éloignement des centres d’état civil et l’absence de mesures prises pour décentraliser l’état civil et rapprocher l’officier de l’état civil des citoyens;

La pauvreté, jointe à la dégradation des moyens de communication: il en est résulté une lassitude et une indifférence des parents, dont la plupart préfèrent une régularisation tardive rendue nécessaire par la scolarisation de l’enfant. En outre, bien que les formalités d’enregistrement soient gratuites, les frais de déplacement s’ajoutant à d’inévitables petites dépenses de timbres ou autres découragent les meilleures bonnes volontés;

Au niveau de l’administration communale, on a assisté à une démobilisation des agents qui étaient, au surplus, mal préparés à leurs fonctions en matière d’état civil. Les élus communaux avaient peu d’expérience; les délégations spéciales qui les ont remplacés dans les périodes de crise ont été vite découragées par l’ampleur et la nature du travail à accomplir;

L’état civil est une charge ingrate, complexe, ne rapportant ni avantage ni honneur, d’où une absence de considération et de sens du service public par rapport à d’autres charges plus médiatiques;

Malgré les dispositions de l’article 26 de la loi du 9 octobre 1961, faisant obligation aux membres du corps médical (médecins et sages-femmes) de faire parvenir à l’officier d’état civil du lieu d’accouchement une attestation relative à la naissance, et imposant également aux établissements de santé de déclarer les naissances des enfants dont ils ont assuré l’accouchement, aucun progrès notable n’a été constaté, en raison notamment de la surabondance des tâches auxquelles le corps paramédical et médical doit faire face et de l’éloignement des lieux dans les régions rurales.

L’environnement matériel est par ailleurs décourageant: l’accueil est mal assuré; les registres sont mal conservés; les fournitures sont insuffisantes; particulièrement dans les régions rurales, les déclarants sont contraints à des allers et retours imposés par des agents malintentionnés et sans surveillance.

Au niveau du contrôle des registres de l’état civil, les autorités administratives de tutelle, qui ne sont d’ailleurs pas toujours bien informées des formalités à remplir, n’ont ni le loisir ni le goût de se livrer à des contrôles. Les autorités judiciaires (procureurs de la République et leurs substituts) reconnaissent eux-mêmes que, en raison de l’ampleur de leurs responsabilités et de leur nombre restreint, elles n’ont pas le temps de se consacrer à un contrôle périodique. Il faut d’ailleurs reconnaître que les formalités de contrôle judiciaire sont particulièrement complexes et inutilement lourdes. Or, c’est précisément grâce à un contrôle régulier que l’on peut redresser les erreurs, combler les lacunes et ordonner les rectifications − toutes diligences qui contribuent à protéger l’identité de l’enfant.

384.Pour ces différentes raisons, le gouvernement a décidé de réhabiliter le service de l’état civil; il est aidé dans cette tâche, qui sera immense, par les organismes d’assistance, et notamment par le Fonds français de solidarité prioritaire (anciennement Fonds d’aide et de coopération).

385.La réhabilitation pourrait porter sur trois domaines: l’application de la loi, la formation des agents d’état civil et l’amélioration de leurs conditions de travail.

386.En premier lieu, la remise en état de l’état civil porte sur l’application de la loi elle‑même. Il a déjà été fait mention des déclarations de naissance prévues par son article 26; mais on oublie trop souvent que les déclarations de naissance peuvent être faites par des proches parents, par toute personne ayant assisté à la naissance ou par la personne chez qui la mère a accouché. Cette disposition devrait être la base d’un mouvement de mobilisation de l’entourage familial et de tous les proches du village ou du quartier. La déclaration de naissance, qui est un acte de protection de l’identité de l’enfant, n’est pas seulement un devoir parental, c’est un devoir de citoyen.

387.L’article 28 de la loi impose à toute personne qui aura trouvé un enfant nouveau‑né de le déclarer à l’officier de l’état civil du lieu de la découverte. Une précision doit être apportée sur la nature de cette déclaration. Il y a lieu en réalité à l’établissement de deux actes. Un procès‑verbal contenant tous les renseignements sur les circonstances de la découverte de l’enfant est dressé par l’officier de l’état civil qui l’inscrit dans le registre des actes de naissance. Ce document ne pourra être communiqué qu’à l’enfant lui‑même, à ses descendants ou ascendants connus, à son tuteur ou représentant légal s’il se manifeste et au procureur de la République. Le second acte en revanche sera un véritable acte de naissance comportant seulement le nom du déclarant, le sexe de l’enfant, son âge apparent et les nom et prénom que l’officier de l’état civil lui aura donnés.

388.Cette procédure paraît compliquée. Elle a été conçue à la fois pour octroyer à l’enfant une identité et pour protéger le secret de la naissance à l’égard des tiers; à l’aide du procès-verbal de découverte, l’enfant peut en effet rechercher par la suite quels sont ses véritables parents. Bien que très peu utilisées, ces dispositions préservent l’identité de l’enfant, mais protègent en même temps un élément important de sa vie privée qu’est le secret de sa naissance.

389.Dans le cadre de la réhabilitation du service de l’état civil, des dispositions trop souvent méconnues sont rappelées. Il en est ainsi de l’article 29 de la loi, qui dispose que «la déclaration de naissance d’un enfant naturel vaut reconnaissance si ladite déclaration émane du père lui‑même». Cette disposition donne ainsi à l’enfant non seulement une identité mais également une filiation.

390.On déplore la disparition de registres de l’état civil (incendie, cataclysme naturel ayant détruit le lieu abritant le centre d’état civil, suppression de certains actes dans un registre). Les articles 47 et suivants de la loi prévoient les formalités de reconstitution et de rectification des actes de l’état civil; par ailleurs, l’article 55 prévoit que si l’un des registres d’état civil légalement tenus est altéré ou détruit et que l’autre est resté intact, ou encore si les personnes intéressées peuvent produire les copies authentiques des actes disparus, la reconstitution totale ou partielle du registre peut être prescrite à la suite d’une procédure judiciaire simplifiée.

391.Les articles 60 à 64 de la loi prévoient la délivrance d’un livret de famille au moment de l’enregistrement d’un mariage. Il a été constaté que, par manque de fournitures, ce livret n’est pas toujours octroyé; or, on sait quelle utilité peut avoir le livret de famille pour un enfant dont on a besoin de connaître l’identité, ou la délivrance d’une copie, d’un extrait ou plus simplement d’un bulletin de naissance.

392.Il a été constaté que, sous l’influence des Églises chrétiennes, le nombre de mariages enregistrés était en augmentation mais que surtout des couples régularisaient leur union après une longue période de vie commune. De telles régularisations donnent aux enfants la sécurisation d’une filiation légitime.

393.Une réhabilitation du service de l’état civil doit donc comporter une campagne de sensibilisation en faveur du mariage célébré devant l’officier de l’état civil, mais également un effort matériel important pour l’impression de livrets de famille.

394.Bien que la loi du 9 octobre 1961 ne soit pas suffisamment précise sur les bulletins de naissance et les actes de notoriété, l’usage a été de considérer ces documents comme substituts d’extrait de naissance pour certaines formalités. L’enfant dépourvu de copie d’acte de naissance pourrait se voir délivrer un bulletin de naissance ou un acte de notoriété. Ce dernier document ne peut être délivré que pour l’établissement d’une pièce d’identité ou en vue du mariage: malgré ces restrictions, il peut être utile pour des mineurs de 18 ans.

395.En deuxième lieu, la réhabilitation doit porter sur la formation des agents de l’état civil. Il n’existe pas à proprement parler d’agents spécialisés dans les fonctions d’officier d’état civil. Il existe par ailleurs une formation générale donnée dans l’établissement qui forme les agents d’exécution. Mais ceux-là sont très rares dans les mairies ou les centres éloignés d’état civil. La formation doit donc porter sur une sensibilisation générale de tous les agents, sur la délivrance d’une formation en malgache portant sur la tenue de l’état civil. Une formation continue à l’intention des élus municipaux est également nécessaire.

396.Une équipe de juristes pourrait rédiger un manuel simple remplaçant les longues et complexes circulaires destinées surtout aux grands centres d’état civil.

397.En troisième lieu, la réhabilitation du service de l’état civil passe par une amélioration des conditions de travail. Un centre d’état civil doit être conçu, même en cas de moyens très modestes, comme un foyer d’accueil où le citoyen sait qu’il va être reçu avec la considération due à un citoyen venu accomplir un acte civique.

398.La déclaration de naissance doit être à cet égard considérée à sa juste valeur: c’est un acte qui donne naissance à un futur enfant citoyen. Il conviendrait tout d’abord de rapprocher les centres d’état civil des citoyens. L’idéal serait que le centre d’état civil se trouve au niveau du fokontany. On sait cependant qu’en raison d’innombrables contraintes matérielles ce vœu est pour le moment irréalisable. Mais il serait utile de créer des centres d’état civil secondaires regroupant au moins les déclarations de naissance dans les délais requis par la loi. Celles-ci seraient ensuite acheminées régulièrement vers les centres principaux d’état civil. Il faudrait également envisager d’allonger le délai minimum requis pour la déclaration, au moins dans les régions où l’état des communications le justifie.

399.Chaque centre d’état civil exilé devrait être régulièrement approvisionné en registres, fournitures, livrets de famille, formulaires divers. Cette recommandation peut paraître superflue pour les centres importants, mais elle ne l’est pas pour les régions enclavées ou les communes éloignées.

2. Le droit au nom

400.Le premier rapport avait déjà fourni des précisions sur les dispositions de l’ordonnance no 62.003 du 26 juillet 1962 prescrivant dans son article premier que «tout Malgache porte le nom exprimé dans son acte de naissance».

401.Il avait également été précisé que les changements de noms, traditionnels dans les coutumes malgaches, avaient été soumis à une procédure judiciaire destinée à les réduire.

402.En substance, le législateur malgache, précédant en cela les rédacteurs de la Convention, a voulu que le nom de l’enfant reste un attribut de sa personnalité et soit un élément permanent de son identité. C’est dans cet esprit notamment qu’il a progressivement réduit les possibilités de changer les noms et qu’il a imposé la fixation du nom dans l’acte de naissance.

403.Si des progrès dans ce sens ont été accomplis après 36 ans d’application dans les principales villes et dans les villages importants, en revanche, l’examen de la situation depuis le premier rapport révèle que la législation malgache rencontre des obstacles ayant leur origine dans la faiblesse du service de l’état civil mais également dans les traditions.

404.Il n’est plus nécessaire de revenir sur les déficiences de l’état civil et les efforts déployés pour sa réhabilitation; mais on doit insister sur la persistance des coutumes: le nom déclaré à l’état civil n’est pas toujours considéré comme un attribut permanent de l’identité et de la personnalité de l’enfant. Dès lors que cette personnalité, selon les convictions léguées par les ancêtres, change à l’occasion des événements qui marquent la vie de l’enfant, les coutumes permettent que l’on modifie ce nom. Les événements qui sont à l’origine d’un changement traditionnel de noms sont de diverses natures:

Ce peut être le décès d’une personne âgée et respectée dans le groupe familial et dont le nom est donné à l’enfant malgré l’existence d’un nom officiel, enregistré à sa naissance; un événement heureux peut avoir bouleversé la vie familiale, amenant les parents à attribuer à l’enfant un autre nom que celui inscrit à l’état civil; le passage dans le village d’un personnage célèbre peut amener les parents à attribuer à leur enfant le nom de ce personnage;

La vie de l’enfant est jalonnée d’événement auxquels on accorde une importance telle qu’ils provoquent un changement de nom: la première coupe de cheveux, la naissance inattendue d’un cadet, les premiers pas, la réussite à un examen, la guérison après une grave maladie, la circoncision, etc. Dans toutes ces circonstances, que l’enfant ait ou non une naissance régulièrement enregistrée, un nom nouveau, faisant l’objet d’un consensus familial et même social, lui est donné;

S’il advient que l’enfant présente une malformation, un défaut physique ou se différencie de ses collatéraux par ses traits physiques ou par une intelligence exceptionnelle, il lui est attribué un nom qui se rapproche plus d’un surnom ou d’un sobriquet que d’un nom accordé selon la tradition. Par un phénomène de consensus familial, ce surnom persiste à un point tel que le nom officiel − si du moins il existe à l’état civil − est oublié. On peut d’ailleurs considérer que le fait d’affubler un enfant mal formé ou atteint d’une anomalie physique ou encore dont la filiation n’est pas socialement reconnue d’un sobriquet ou d’un nom à consonance blessante est une atteinte à sa dignité et même à sa vie privée.

405.Certes, on peut raisonnablement considérer que, dès lors qu’un nom fait l’objet d’un consensus social, l’identité de l’enfant est protégée. Mais cette situation particulière doit être constatée et doit faire l’objet d’une réflexion plus approfondie dans la mesure où un changement de nom, conforme aux usages et aux traditions, peut aller à l’encontre de l’intérêt supérieur de l’enfant.

3. Le droit à la nationalité

406.Selon l’article 7 de la Convention l’enfant dont la naissance a été enregistrée a droit à un nom, à une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux.

407.Dans le précédent rapport, les explications avaient été fournies sur les principales dispositions de l’ordonnance no 60.064 du 22 juillet 1960 portant Code de la nationalité malgache ainsi que les textes modificatifs subséquents.

408.Il importe cependant de revenir sur ces dispositions qui n’ont certes pas été modifiées, mais qui méritent d’être explicitées dans leurs modalités d’application à l’occasion de faits sociaux nouveaux intervenus durant les cinq dernières années.

409.La nationalité malgache est essentiellement une nationalité de filiation. La loi attribue la nationalité malgache aux seules personnes qui sont originaires de Madagascar ou qui ont un parent malgache ou dont l’un des parents est présumé malgache. L’article 11 de l’ordonnance dispose en effet qu’«Est Malgache l’enfant né à Madagascar de parents inconnus dont on peut présumer que l’un au moins est malgache»; et la loi ajoute pour renforcer cette présomption: «Pourront notamment être pris en considération le nom de l’enfant, ses caractères physiques, la personnalité de ceux qui l’élèvent et les conditions dans lesquelles il est venu entre leurs mains, l’éducation qu’il reçoit, le milieu où il vit … l’enfant nouveau‑né trouvé à Madagascar est présumé jusqu’à preuve du contraire y être né».

410.Cette disposition est citée, car elle contribue à aider l’enfant en situation difficile, né de parents inconnus, à se faire attribuer la nationalité malgache, qui est un élément de son identité et de sa personnalité.

411.Sans qu’il soit possible de faire état de statistiques précises, on constate que le nombre d’enfants des rues dont les parents ne sont pas connus est en augmentation. On constate également qu’en raison de l’insularité de Madagascar, lieu de transit, de passage ou d’immigration, pour des minorités dont le nombre augmente également (asiatiques, indiennes, comoriennes et depuis peu, africaines), il devient parfois difficile de déterminer l’origine des enfants nés de liaisons passagères.

412.Il est vrai que, selon l’article 10 du Code de la nationalité malgache, l’enfant naturel né d’une mère malgache est toujours malgache dès sa naissance, dès lors que dans le droit civil malgache «la filiation maternelle résulte du fait de l’accouchement». En d’autres termes, lorsque le fait matériel de l’accouchement est établi, et que la mère est malgache, l’enfant est de plein droit et dès sa naissance malgache, que la filiation paternelle soit ou non établie ou que le père soit en fait de nationalité étrangère ou que sa nationalité soit inconnue.

413.Néanmoins, dans les cas, devenus plus fréquents, où la mère ne se fait pas connaître et où le fait de l’accouchement n’est pas établi (cas de l’enfant trouvé), il importe de pouvoir invoquer des dispositions législatives octroyant à l’enfant une nationalité.

414.Lorsque l’enfant naturel est né d’un père malgache, le Code de la nationalité lui attribue de plein droit la nationalité malgache, tandis que la législation civile (loi du 20 novembre 1963 sur la filiation, l’adoption, le rejet et la tutelle) comporte d’importantes dispositions facilitant considérablement l’établissement de la filiation naturelle a patre. Cette disposition contenue dans l’article 10 du Code de la nationalité prend également de l’importance dans la mesure où la filiation à l’égard de la mère n’est pas établie, et surtout lorsque la filiation est établie à l’égard d’une mère étrangère: dans ce dernier cas, si la filiation à l’égard de la mère est établie en premier lieu, l’enfant peut acquérir la nationalité malgache en la réclamant par application de l’article 16 du Code de la nationalité.

415.S’agissant de l’enfant légitime, il est malgache s’il est né d’un père malgache. Il est également malgache s’il est né d’une mère malgache et d’un père qui n’a pas de nationalité ou dont la nationalité n’est pas connue (art. 9 du Code de la nationalité).

416.On peut remarquer que cette dernière disposition est singulière car elle n’attribue pas de plein droit la nationalité malgache à un enfant légitime né d’une mère malgache mais dont le père est de nationalité étrangère connue, ce qui oblige l’enfant qui veut se prévaloir de la nationalité de sa mère à recourir à la procédure plus complexe de la naturalisation alors que, par ailleurs, dans l’esprit de la législation malgache, le jus sanguinis devrait prévaloir dès lors que l’un des parents est malgache.

417.Ces différentes dispositions ont été évoquées en raison de l’augmentation des cas où l’enfant n’a pas de parents connus, où l’enfant né de parents inconnus ne peut bénéficier des présomptions invoquées à l’article 11 précédemment cité, où l’enfant a de fait une double nationalité.

418.L’application des dispositions du Code de la nationalité malgache doit dans ces cas faire l’objet d’une attention particulière lorsqu’il s’agit d’un enfant en situation difficile ayant besoin d’être identifié au regard de la loi, ou d’un enfant qui est l’objet d’une adoption judiciaire lui donnant le statut d’enfant légitime des parents adoptifs.

C. Protection de la vie privée

419.Il a déjà été exposé précédemment que par le fait de l’intégration de la Convention dans le droit positif malgache, l’enfant citoyen bénéficie de la protection prévue par la Constitution de la République de Madagascar.

420.L’article 16 de la Convention prévoit cette protection de la vie privée de l’enfant: «Nul enfant ne fera l’objet d’immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes illégales à son honneur et à sa réputation».

421.Comment est assurée la protection contre les ingérences arbitraires ou illégales?

La réponse est donnée par l’article 13 de la Constitution, qui dispose que

«Tout individu est assuré de l’inviolabilité de sa personne, de son domicile et du secret de sa correspondance.

Nulle perquisition ne peut avoir lieu qu’en vertu de la loi et sur l’ordre écrit de l’autorité judiciaire compétente, hormis le cas de flagrant délit.

Nul ne peut être poursuivi, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu’elle a prescrites».

422.En tant que garant des droits et libertés fondamentaux de l’homme, l’État assure la protection de la famille ainsi que des individus qui la composent.

423.Pour l’enfant, un texte spécial est prévu pour sa protection, en l’occurrence l’ordonnance no 62.038 du 19 septembre 1962, déjà citée, sur la protection de l’enfance.

424.L’importance particulière que porte l’État à la protection de l’enfant est mise en évidence par l’article premier de cette ordonnance, qui dispose que «l’enfant occupe au sein de la famille une place privilégiée: il a droit à une sécurité matérielle et morale aussi complète que possible».

425.Pour garantir ces droits reconnus à chaque citoyen, et surtout à l’enfant, toute violation de ces droits est réprimée par la loi.

426.Ainsi, l’atteinte à l’intégrité physique d’une personne, la violation de domicile, ou de correspondance, l’atteinte à l’honneur ou à la réputation par des propos diffamatoires sont prévues et réprimées par le Code pénal. L’enfant victime peut être représenté en justice par ses parents ou toute personne ayant autorité sur lui en vue d’une réparation du préjudice subi. Les enfants placés en institution d’accueil ou de traitement ou par décision de justice bénéficient de la même protection prévue par l’ordonnance no 62.038 et de la protection prévue par le droit positif. Ainsi, ils ont le droit de recevoir des soins, de l’éducation, des visites et des correspondances, et ont accès à l’information.

427.Pour le cas du mineur qui a commis un crime ou un délit, pour préserver son honneur, il est interdit d’afficher publiquement son image.

428.De même l’ordonnance prescrit que l’information est secrète et que le procès se déroule à huis clos.

429.L’application stricte de la loi se heurte malheureusement à certaines pratiques médiatiques qui nécessiteraient des réactions plus énergiques de la part des pouvoirs publics, ou des actions de protection de la part des ONG s’occupant plus particulièrement de la sauvegarde et de la protection des enfants.

430.On assiste actuellement à un développement exceptionnel des moyens de communication audiovisuels ou de presse. Dans le même temps, les pouvoirs publics, inquiets à juste titre de l’augmentation des infractions qualifiées de «pédophilie», ont promulgué une loi analysée plus loin, dans la section consacrée au droit à l’intégrité physique de l’enfant) qui a attiré l’attention des médias avides de diffuser, sous prétexte d’informer, des faits divers, des informations télévisées et des nouvelles à sensation qui livrent au public des images offensant la décence, mettant en cause des mineurs des deux sexes, généralement victimes.

431.Non seulement ces informations tombent sous le coup de la loi − aucune précaution n’étant généralement prise pour dissimuler ou occulter l’identité des victimes −, mais elles portent atteinte à la dignité, à la vie privée, à la réputation et à l’honneur de mineurs. Il est certain que les autorités publiques comme la société civile devraient réagir pour un plus grand respect de l’éthique de l’information dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

D. Accès à l’information

432.Selon l’article 17 de la Convention «les États parties reconnaissent l’importance de la fonction remplie par les médias et veillent à ce que l’enfant ait accès à une information et à des matériels provenant de sources nationales et internationales diverses, notamment ceux qui visent à promouvoir son bien‑être social, spirituel et moral ainsi que sa santé physique et mentale».

433.Le premier rapport avait fait mention de l’état des textes réglementant l’accès des jeunes aux spectacles et le contrôle des publications. En substance, il avait été exposé qu’en vue de l’application réelle des dispositions de la Convention, l’État se portait garant des libertés de communication et de presse. Les seules limites imposées étaient le respect des libertés et des droits d’autrui et l’impératif de sauvegarder l’ordre public.

434.L’article 11 de la Constitution prévoit que tout individu, y compris l’enfant citoyen,«a droit à l’information … la loi et la déontologie professionnelle déterminent les conditions de la liberté d’informer et de la responsabilité de l’information». Le précédent rapport mentionnait également que, par‑delà les dispositions légales, il fallait tenir compte de divers éléments d’ordre social que l’on peut résumer ainsi: les mesures proposées par la Convention aux États parties consistent à améliorer les moyens d’information destinés aux enfants. Ces moyens doivent présenter une utilité sociale et culturelle pour l’enfant.

1. Mesures préconisées par l’État malgache

435.En vue de l’application des dispositions de la Convention, l’État malagasy se porte garant des libertés de communication et de presse. Cette garantie est prévue par l’article 10 de la Constitution. L’information est libre à Madagascar. L’article 11 de la Constitution stipule que «l’information sous toutes ses formes n’est soumise à aucune contrainte préalable». Les seules limites à ces libertés sont le respect des libertés et droits d’autrui et l’impératif de sauvegarder l’ordre public.

2. Accès inégal des enfants à l’information

436.Bien que le texte dispose que les libertés d’opinion, d’expression, de communication, de presse sont garanties à tous, il y a une différence entre les enfants minoritaires issus de familles plus ou moins aisées et les enfants de la masse issus de couches défavorisées.

437.Les enfants plus ou moins favorisés accèdent plus facilement à l’information car ils ont la possibilité de voyager, de fréquenter des centres culturels étrangers; de plus, ils ont les moyens de se procurer des livres, des journaux, la radio, des cassettes vidéo, etc., et ont la maîtrise d’au moins une langue étrangère. Les enfants de la masse, sont presque, eux, privés d’information; ces enfants sont à peine scolarisés et ne pratiquent aucune langue étrangère, ce qui constitue une barrière à leur accès à l’information.

438.Cependant, l’État s’efforce de donner aux enfants des informations appropriées. Chaque année, le Ministère de la population, le Ministère de la culture et de l’information et le Ministère de la justice conjointement avec l’UNICEF organisent des conférences-débats, des manifestations et des rencontres entre jeunes en vue de les informer et de promouvoir leur bien‑être social, spirituel et moral. Quelquefois, des émissions radiophoniques ou télévisées sont conçues pour les enfants.

439.Sur le plan international, on assiste au jumelage de certaines villes et lycées malgaches avec d’autres villes et lycées étrangers. Des échanges d’informations, d’ouvrages et de savoirs se font entre les jeunes de ces lycées, ce qui favorise l’épanouissement de leur personnalité et le développement de leurs facultés ou aptitudes.

440.L’information n’apporte pas que des bienfaits; il y a aussi les informations qui sont nuisibles aux bonnes mœurs.

3. Protection contre les informations nuisibles

441.L’État protège l’enfant contre les informations qui sont nuisibles aux bonnes mœurs. La publication de journaux et périodiques qui sont de nature à perturber l’ordre public ou à mettre en danger l’unité nationale ou à porter atteinte aux bonnes mœurs est formellement interdite (ordonnance 75.015 du 7 août 1975).

442.L’article 473 du Code pénal sanctionne les personnes qui exposent ou font exposer dans des lieux publics des affiches ou images contraires à la décence.

443.Mais il appartient surtout aux parents d’élever convenablement leurs enfants, d’assurer leur éducation et leur développement en vue de leur préparation à assumer les responsabilités de la vie. À cet égard, on doit rappeler que la Constitution prévoit que «l’État assure la protection de la famille pour son libre épanouissement, ainsi que celle de la mère et de l’enfant par une législation et par des institutions sociales appropriées» (art. 21).

444.L’article 23 de la Constitution complète ces dispositions en proclamant que «tout enfant a droit à l’instruction et à l’éducation sous la responsabilité des parents dans le respect de leur liberté de choix».

445.Enfin, l’article 26 affirme que «tout individu a le droit de participer à la vie culturelle de la communauté, au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent».

4. Le nouveau contexte

446.Durant les cinq dernières années, un contexte nouveau est apparu dans le domaine de l’information des jeunes: des lois nouvelles ont donné une importance particulière aux systèmes d’éducation et de communication.

447.La loi no 90.031 du 21 décembre 1990 sur la communication avait déjà été très brièvement mentionnée dans le premier rapport. Cette loi garantissait la liberté d’expression et de presse et réglementait les organismes et les moyens de communication. Elle rappelait que la presse a pour mandat de rapporter tout événement ou fait susceptible d’intéresser le public et de contribuer à son éducation.

448.L’article 14 de cette loi créait une Commission supérieure de la communication qui avait notamment pour attribution de contrôler les activités de publicité, de vidéogramme et de cinématographie des stations de radio et de télévision.

449.Le fait social nouveau à l’époque du premier rapport était en effet qu’à partir des années 1990 et précisément à un moment d’agitation populaire, les stations de radio et de télévision privées se sont multipliées, tandis que la presse connaissait une expansion nouvelle. Le développement des moyens audiovisuels s’est accéléré, et la loi sur la communication parue en 1990 a pris une importance nouvelle.

450.Il faut noter que cette loi, toujours applicable, comportait d’importantes dispositions protégeant l’enfant et la jeunesse.

451.C’est ainsi que l’article 39 dispose que «sont interdits à la projection publique, à titre gratuit ou onéreux, les films à caractère pornographique, les films prônant la violence et le racisme, les films de nature à porter atteinte au bon ordre, à la sécurité publique et à la tranquillité, les films qui impressionnent défavorablement sur le plan moral ou physique».

452.L’article 59 prévoit que «le public a droit à une information complète et conforme aux faits et événements. La garantie de qualité de l’information est assurée par la rigueur, l’intégrité et l’honnêteté intellectuelles».

453.L’outrage aux bonnes mœurs commis par voie de presse est puni par l’article 80, qui sanctionne également la distribution ou l’exposition de dessins, gravures, peintures, emblèmes ou images obscènes.

454.En raison de la brusque expansion des moyens de communication audiovisuels, une ordonnance (no 92.039 du 14 septembre 1992) sur la communication audiovisuelle a été promulguée. Cette ordonnance comporte également des dispositions qui méritent attention.

455.L’article 17 attribue au Haut Conseil de l’audiovisuel, parmi d’autres attributions, «la charge de veiller à la protection de l’enfance et de l’adolescence dans la programmation des émissions diffusées par une entreprise de communication audiovisuelle».

456.L’article 61 interdit à la production publique les vidéogrammes ou les films pornographiques ou de nature à porter atteinte à l’unité nationale, à l’ordre, à la sécurité et à la tranquillité publics.

457.L’article 114 interdit la publication par voie de communication audiovisuelle ou de quelque manière que ce soit de tout texte ou de toute illustration concernant l’identité de la personnalité des mineurs de 18 ans qui ont quitté leurs parents, leur tuteur, la personne ou l’institution qui était chargée de leur garde ou à laquelle ils étaient confiés.

458.Certes, on remarque que tous ces textes sont essentiellement répressifs. Mais ils sont complétés par les dispositions précédemment citées de la Constitution concernant le devoir de l’État comme des institutions concernées de la société civile d’assurer le développement intellectuel et la promotion culturelle de la communauté et de chaque individu.

459.Par ailleurs, la loi no 94.033 du 13 mars 1995 portant orientation générale du système d’éducation et de formation comporte d’importantes recommandations ayant valeur d’instruction sur les objectifs de l’éducation: le respect des droits de la personne, la prise en considération des valeurs humanistes, la préparation de l’individu à une vie active intégrée dans le développement social, économique et culturel, le respect de la culture malgache et des enseignements de la civilisation universelle, la mise en œuvre d’une politique linguistique nationale comportant la première éducation dans la langue maternelle, le développement de la langue maternelle en langue de la modernité et la maîtrise de langues étrangères.

460.À ces principes d’éducation et d’information s’ajoute un développement remarquable de la communication sur la protection de l’environnement.

461.Dans le contexte nouveau d’expansion culturelle, de multiplication brutale des moyens de communication audiovisuels, de rapide accession des milieux aisés à l’Internet, il est facile de constater l’intérêt que les enfants portent à la lecture, à la télévision, à l’écoute des diverses stations radiophoniques. Dans les villages reculés, on remarque l’effort déployé par les familles pour se procurer des postes de radio. Dans les villes de petite ou moyenne importance, l’extension des stations d’émission télévisée régionale a provoqué la multiplication des appareils de télévision et la diffusion d’émissions provinciales.

462.On peut d’ailleurs s’étonner que, parallèlement à cette expansion de la communication, on n’assiste pas à un essor de la scolarisation. Cette constatation amène à confirmer que, malgré l’extraordinaire extension des réseaux de communication écrite ou audiovisuelle, un grand nombre d’enfants, dont la plupart sont en stratégie de survie ou en situation particulièrement difficile, dans les zones rurales isolées ou enclavées notamment, n’ont accès ni à l’information ni même à la scolarisation.

463.On assiste ainsi à une aggravation des inégalités sociales dans le monde des enfants et à une augmentation des risques de marginalisation, voire d’exclusion de catégories d’enfants auxquelles pourtant les dispositions de la Convention sont destinées.

E. Le droit à l’intégrité physique

464.L’article 37 (al. a) de la Convention prévoit que l’enfant a le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

465.Il a paru plus commode d’étudier l’application de cette disposition en même temps que celle de l’article 19 concernant la protection contre les mauvais traitements et celle de l’article 34 concernant la violence et l’exploitation sexuelle. [Ces différentes dispositions devraient faire l’objet d’analyses différentes si l’on devait se conformer aux directives générales concernant la présentation des rapports périodiques (CRC/C/58).]

466.Afin d’éviter des répétitions, il a été jugé préférable de regrouper les atteintes à l’intégrité physique de l’enfant sous une même rubrique, grâce à une approche multidisciplinaire (sociale, économique et juridique) et une tentative de synthèse autour de thèmes renouvelés sous l’impulsion des organisations internationales, et notamment l’UNICEF: la maltraitance, les abus sexuels, le travail des enfants.

467.On saisira l’occasion pour insister sur les nouveaux aspects d’une vie familiale et sociale subissant les retombée les plus pesantes de la crise économique, de la pauvreté de la montée de la violence, de la perte de références et valeurs morales.

468.Ce nouveau contexte, apparu surtout durant les cinq dernières années, a inquiété aussi bien les autorités publiques que la société civile et a suscité des réactions, sous la forme d’initiatives de formation et d’encadrement social, ou de réformes législatives.

469.Seront successivement examinés: la maltraitance; la notion élargie de mauvais traitements; les abus sexuels; l’évolution des mœurs et les réformes législatives.

1. La maltraitance

470.Sous ce titre, on examine les causes et manifestations des violences à l’encontre des enfants et les mesures de protection prises par l’État.

a) Causes et manifestations de la maltraitance

471.Les causes de la violence et des mauvais traitements à l’encontre des enfants sont la mauvaise éducation ou l’absence d’éducation, la sous-alimentation et la dissociation familiale. En bref, comme partout ailleurs, c’est la pauvreté sous tous ses aspects qui bouleverse le système de valeurs auquel la société a adhéré.

472.La pauvreté des parents les amène à considérer leurs enfants comme la source principale de leur «souffrance». L’exclusion du circuit de l’école obligatoire, la mendicité et même la brutalité des parents ne sont que l’expression de cet état de paupérisation.

473.À titre d’illustration, prenons le cas de la province d’Antananarivo, qui compte 3 601 127 habitants, dont 1 258 446 enfants scolarisables, mais dont 225 984 n’ont jamais fréquenté l’école, 387 163 ont cessé de fréquenter l’école, et 645 199 fréquentent l’école.

474.Sur un échantillon de 246 enfants scolarisables, 71,7 % vont à l’école et 28,3 % n’y vont pas ou n’y sont jamais allés; pour cette catégorie, les raisons de l’absence de scolarisation sont multiples:

Pas d’argent

48,5 %

Incarcération

7,4 %

Nécessité de travailler

11,8 %

Maladie

8,8 %

Nullité

8,8 %

Flemme

7,4 %

Grossesse

2,9 %

Échec scolaire

1,5 %

Violence de l’instituteur

2,9 %

Ces enfants non scolarisés deviennent des enfants de la rue.

475.La situation socioéconomique du pays est à prendre en compte si l’on veut comprendre le problème − 75 à 80 % de la population vivent en dessous du seuil de pauvreté. Dans un pays extrêmement paupérisé, les priorités de la population sont différentes de celles d’un pays riche. À Madagascar, il faut par n’importe quel moyen subvenir aux besoins primaires. L’enfant est une source de revenu légitime et normal. On assiste ainsi à de nombreuses situations complexes où l’enfant paraît maltraité, mais ne l’est pas toujours pour ceux qui l’entourent. Parmi ces situations on trouve des abus sexuels, des abus du travail des enfants et des enfants domestiques victimes d’exploitation, d’abus sexuels et de séquestrations.

476.En général, les victimes de ces violences sont des jeunes filles de la province que leurs parents «vendent» ou font adopter par des citadins aisés ou par des étrangers; des enfants et adolescents vivant dans et de la rue, avec toute la famille; des enfants et adolescents vivant de la rue et ramenant leur «salaire» à leur famille chaque semaine; des enfants de la rue maltraités par la police ou certains adultes; des mineurs et des jeunes majeurs prostitués; des enfants victimes de violences familiales.

477.La dureté de la vie exerce également son influence négative sur les relations parents‑enfants car les populations fragilisées par des conditions socioéconomiques difficiles auront plus tendance à l’individualisme, et dès lors l’application des principes de solidarité n’est plus évidente, d’où la dissociation familiale, cause de la «violence morale» à l’encontre des enfants. Ainsi, la violence morale résulte des traumatismes affectifs.

478.La «violence culturelle» telle que le meurtre ou le rejet des enfants nés un jour néfaste commence à disparaître à Madagascar. Dans la vie quotidienne de la population d’Antananarivo-ville, elle disparaît complètement. Cependant, il faut à nouveau rappeler le rejet, voire le meurtre des enfants jumeaux dans la région de Mananjary (sud-est de Madagascar), qui fait actuellement l’objet d’une discussion entre les traditionnels et les intellectuels issus de cette région.

479.Généralement, un enfant maltraité est un enfant qui a souffert physiquement de violences délibérées ou de l’abstention volontaire de soins de la part de ses parents ou d’adultes qui en ont la charge.

480.Ainsi, une étude sur les violences à l’encontre des enfants, effectuée à l’initiative du Ministère de la population et de l’UNICEF, couvrant l’année 1998, donne les renseignements suivants.

481.La réponse à la question «As-tu déjà été frappé?» est effrayante de prime abord car ce ne sont pas moins de 93,4 % des enfants qui répondent positivement (313 sur 335) alors que seuls 6,6 % répondent négativement (22).

482.En observant la distribution de la fréquence pour 283 réponses:

Tous les jours

14

4,9 %

Chaque semaine

46

16,3 %

Occasionnellement

91

32,2 %

Rarement

130

45,9 %

Autre

2

0,8 %

on constate que la violence n’est pas un phénomène quotidien et que dans 78,1 % des cas elle reste peu fréquente; reste que 4,9 % des enfants interrogés sont battus tous les jours et 16,3 % chaque semaine.

483.Quant à l’auteur de la violence, c’est avant tout une violence familiale dans la mesure où elle est exercée à 76,8 % par la mère et le père, puis par la famille élargie, mais aussi par le frère, le beau-père et le mari (12,2 %):

Mère

49,5 %

Père

27,3 %

Famille élargie

5,5 %

Frère

4,8 %

Beau-père

1,3 %

Mari

0,6 %

484.Mais la maltraitance est aussi le fait d’adultes (prisonnier, chef de chambre), d’éducateurs (instituteur, chef scout) ou de personnes supposées avoir une autorité (policier, infirmier) dans 6,6 % des cas (l’instituteur venant en tête avec 4,5 %). Les répondants étaient 311, dont 13 (4,2 %) ont répondu qu’il s’agissait de personnes inconnues de l’enfant mais adultes également.

485.Quant aux raisons de la violence, dans 81,3 % des cas, les enfants sont frappés pour avoir eu un comportement non attendu (désobéissance, entêtement, insolence, paresse) (246 enfants sur 303 réponses); 5 % reçoivent des coups à cause des résultats scolaires; 2,6 % à cause de l’ivresse de l’adulte, père ou beau-père dans les huit cas; 0,7 % parce qu’ils n’ont pas ramené d’argent (cas des enfants de la rue); 1,7 % lors de bagarres; 3 % à cause d’une jalousie; 0,3 % sous le coup d’une colère; et 5,3 % sans raisons. Il semble donc que les coups soient une composante éducationnelle.

486.Quant aux moyens utilisés, ce sont: objet en bois (37,5 %); ceinture (22,2 %); main (21,7 %); autre (15,6 %) (à la fois main et ceinture par exemple); fouet (1,8 %); poing (1,8 %). Il faut préciser que l’objet en bois est dans la plupart des cas un bâton et rarement des branchages.

487.De la question «As-tu déjà été battu» (au lieu de «As-tu déjà été frappé») apparemment les enfants interrogés ont une compréhension différente car le résultat n’est pas le même: 40,2 % de réponses positives (131 réponses) et 59,8 % négatives (195 réponses) sur 326. Les réponses aux autres questions sont ventilées comme suit:

Auteur des coups:

Père

19,1 %

Mère

9,9 %

Frère

6,1 %

Divers

36,6 %

Policier ou gardien

8,4 %

Autre

13 %

Patron

1,5 %

Fokonolona (collectivité locale)

3,1 %

Mari

2,3 %

Fréquence:

Tous les jours

4,3 %

Chaque semaine

19,8 %

Occasionnellement

25,9 %

Rarement

50 %

Raison:

Colère

22,5 %

Ivresse

8,3 %

Désobéissance, insolence

15 %

Bagarre

21,7 %

Enquête

5,8 %

Vol

9,2 %

Autre

17,5 %

Manière dont la violence a été donnée:

Coup de pied

25,2 %

Coup de poing

11,3 %

Coup de tête

7 %

Objet en bois

13,9 %

Brûlure

4,3 %

Battu à mort *

10,5 %

Autre

27,8 %

*Le terme «battu à mort» signifie que la personne a été rouée méchamment de coups avec la ferme volonté de lui infliger des coups portant atteinte à son corps voire de laisser des séquelles, (c’est le cas notamment des petits voleurs pris en flagrant délit).

488.La pauvreté est considérée comme le moteur principal des violences physiques et morales. Se surajoute à celle-ci l’envahissement de films violents et pornographiques.

b) Mesures de protection contre la maltraitance

489.Selon l’article 19 de la Convention, l’État doit protéger l’enfant contre toutes formes de mauvais traitements perpétrés par ses parents ou par toute autre personne à qui il est confié, et il établit des programmes sociaux appropriés pour prévenir les mauvais traitements et pour traiter les victimes.

c) Mesures administratives

490.Il s’agit des mesures de protection prises par le Gouvernement malgache par le biais des deux ministères concernés, à savoir le Ministère de la population et le Ministère de l’éducation nationale. Le Ministère de la population, dans le cadre de la protection des droits de l’enfant, collabore avec l’UNICEF.

491.Les objectifs sont, d’une part, de sensibiliser la population sur les droits de l’enfant et, d’autre part, de trouver des solutions à des problèmes de protection de ces droits.

492.Ainsi, suite aux recommandations des études, réunions et autres activités entreprises sur les mauvais traitements à l’encontre des mineurs, le Ministère de la population projette de mettre en place des actions et mesures concrètes visant à endiguer le phénomène de l’enfance en danger, de l’enfance en situation difficile et de l’enfance maltraitée, à Antananarivo et Toamasina dans un premier temps.

493.À cet effet, en novembre 1998, un atelier sur l’identification de «messages» à diffuser a été effectué et des formations d’animateurs chargés à la diffusion de ces messages organisées. Il s’agit de messages à adresser aux parents, aux autorités, aux centres sociaux et ONG.

494.Un centre d’accueil et d’écoute a été créé en 1998 dans un quartier populeux d’Antanarivo-ville, et la mise en place de tels centres est envisagée par le Ministère de la population dans tous les quartiers. Il s’agit d’un centre de sensibilisation et d’orientation auquel tout le monde a accès.

495.Le public ciblé et accueilli est constitué d’enfants et adolescents vivant dans la rue, d’enfants et adolescents rencontrant des problèmes de violence familiale ou autre, d’enfants et adolescents ayant besoin de soutien moral ou de conseils.

496.Le Ministère de la population ne prétend pas retirer les enfants de leur environnement quotidien: la rue. Pour cela, il faudrait des projets à long terme, des réponses adaptées à chaque situation. De plus, la majorité de ces enfants ne vivent pas seuls dans la rue − la famille est présente dans bien des cas. Une politique d’aide aux familles en détresse serait à envisager.

497.Quant au Ministère de l’éducation, ses buts sont d’une part d’améliorer l’enseignement et d’autre part d’avoir le maximum d’enfants scolarisés. À cet effet, avec les fonds que le Ministère a obtenus des bailleurs de fonds, il projette la réouverture et la réhabilitation des écoles qui ont été fermées afin de rapprocher les écoles des enfants ainsi que le recrutement d’enseignants.

498.Le Ministère de l’éducation envisage en outre, pour lutter contre la malnutrition, de créer des cantines scolaires dans chaque école primaire publique.

499.Enfin, par le biais de filets de sauvetage social dans le but d’aider les parents à faire face aux dépenses occasionnées par la rentrée scolaire, des indemnités de scolarisation sont allouées aux parents fonctionnaires et des cahiers et stylos sont en vente à l’école à des prix inférieurs.

d) Mesures législatives

500.Les lois qui régissent la protection de l’enfance et les maltraitances à l’encontre des mineurs existent. Les enfants, à Madagascar, ont théoriquement des droits définis par de nombreux textes législatifs malgaches.

Protection de l’enfant en bas âge

501.La Convention reconnaît à tout enfant un droit à la vie et à la survie (art. 6).

502.Par ailleurs, l’article 24 dispose que les États prennent les mesures appropriées pour «réduire la mortalité parmi les nourrissons et les enfants».

503.L’article 19 protège l’enfant contre toute forme de violence perpétrée par ses parents ou les personnes qui exercent les responsabilités parentales.

504.Ces dispositions peuvent concerner en particulier les enfants nouveau-nés ou en bas âge qui sont en situation d’abandon.

L’infanticide

505.La loi pénale punit l’infanticide, qui est le meurtre ou l’assassinat d’un enfant nouveau‑né.

506.Il résulte de la définition de l’incrimination que la mort doit avoir été donnée lors de l’accouchement ou dans un temps proche de la naissance: la doctrine émet l’opinion que l’enfant cesse d’être un nouveau-né dès qu’il a été déclaré à l’état civil ou que le délai de déclaration de 12 jours a expiré.

507.Par ailleurs, il y a infanticide dès lors que l’enfant était vivant lors de l’acte criminel. Il importe peu qu’il soit né viable ou non.

508.Ces éléments prennent leur importance quand il s’agit de déterminer les peines encourues: l’assassinat est puni de mort et le meurtre des travaux forcés à perpétuité.

509.Toutefois, la mère, auteur principal ou complice de l’assassinat ou du meurtre de son enfant nouveau-né, est punie des travaux forcés à temps ou à perpétuité (art. 302 du Code pénal). Cette disposition favorable à la mère ne peut cependant s’appliquer à ses coauteurs et complices. L’attitude du législateur à l’égard de la mère peut s’expliquer par les circonstances particulières qui entourent souvent l’infanticide.

L’abandon d’enfant et l’exposition d’enfant

510.L’abandon est le fait de se débarrasser de l’enfant.

511.Ces atteintes sont prévues par les articles 349 et suivants du Code pénal. Ceux qui auront exposé ou fait exposer, délaissé ou fait délaisser en un lieu solitaire un enfant ou un incapable, hors d’état de se protéger lui-même en raison de son état physique ou mental seront, pour ce seul fait, condamnés à un emprisonnement d’un à trois ans et à une amende de 25 000 à 225 000 FMG.

512.L’exposition d’enfant suppose un enfant de très jeune âge qui n’est pas en état de se mouvoir, en état de se déplacer.

513.Le délaissement suppose un enfant plus âgé capable de se mouvoir que l’on a laissé intentionnellement en état d’abandon.

514.L’article 349 du Code pénal a précisé que la victime pouvait être un enfant ou un incapable et qu’il est hors d’état de se protéger lui‑même, en raison soit de son état physique soit mental.

515.La loi réprime sévèrement de tels agissements en distinguant les lieux où l’enfant a été délaissé ou exposé: dans un lieu solitaire, ou dans un lieu public. Les sanctions sont relativement fortes concernant l’abandon d’enfant dans un lieu solitaire, et en fonction des suites à l’égard de l’enfant.

516.Une circonstance aggravante personnelle de deux à cinq ans d’emprisonnement et d’amende variant de 25 000 à 450 000 FMG est prévue si l’exposition a été le fait des parents de l’enfant ou de tout ascendant de l’enfant ou de la personne ayant autorité sur l’enfant ou à qui la garde de l’enfant a été confiée (art. 350 du Code pénal).

517.S’il y a eu atteinte à l’intégrité corporelle de l’enfant − maladie ou incapacité de plus de 20 jours −, le maximum de la peine est appliqué, et une circonstance aggravante personnelle est prévue si le fait a été commis par les parents ou un ascendant de l’enfant.

518.Si l’enfant a subi une infirmité permanente, s’il a été mutilé ou estropié, une peine de réclusion est encourue ainsi qu’une circonstance aggravante si les auteurs du fait sont les ascendants ou gardiens. Si la mort de l’enfant s’en est suivie, la peine prévue pour un meurtre est encourue.

519.L’abandon d’enfant dans un lieu non solitaire est prévu par l’article 352 du Code pénal. La notion de lieu non solitaire est appliquée très largement par les tribunaux. La répression est moins sévère mais les sanctions sont aggravées en fonction des atteintes subies par l’enfant ou la qualité des auteurs.

Atteinte à la liberté de l’enfant

520.Les enfants en bas sont exposés, plus que d’autres, à des actions criminelles ayant pour objet de les priver de leur liberté à des fins répréhensibles.

521.La Convention prévoit en ses articles 35 et 36 qu’il est du devoir des États d’empêcher «l’enlèvement, la vente ou la traite d’enfants à quelque fin que ce soit».

522.Le Code pénal malgache comporte des dispositions dispersées dont l’approche synthétique n’est pas toujours facile. Il faut, par exemple, distinguer clairement les dispositions qui concernent des enfants très jeunes et placés en nourrice ou sous la garde d’autrui des enfants plus âgés, capables de discernement et le cas échéant de réaction de défense et qui se laissent enlever ou détourner.

523.L’article 345 du Code pénal punit les coupables d’enlèvement, de recel ou de suppression d’enfant, de substitution d’enfant ou de supposition d’enfant à une femme qui ne sera pas accouchée.

524.La peine est celle de réclusion. Toutefois, si l’enfant a vécu et que ce fait est établi, la peine est d’un mois à cinq ans d’emprisonnement.

525.Si l’enfant n’a pas vécu et que la preuve en a été rapportée, la peine est de six jours à deux mois d’emprisonnement.

526.Le dernier alinéa de l’article 345 prévoit que la peine de réclusion est encourue par les personnes qui étaient en charge d’un enfant et qui ne le présentent pas aux personnes qui ont droit de le réclamer. Cet alinéa est inclus dans les dispositions concernant l’enlèvement, le recel, la suppression d’enfant, la substitution d’enfant et la supposition d’enfant.

527.Les infractions ainsi commises sont aussi bien des infractions portant atteinte à la personnalité et à la liberté de l’enfant que des infractions à la réglementation sur l’état civil.

528.L’article 348 du Code pénal sanctionne les personnes auxquelles un enfant au‑dessous de l’âge de 7 ans accomplis a été confié qui le portent «à un hospice». Cet article qui est une reproduction textuelle d’une disposition du Code pénal français a peu d’application à Madagascar.

529.Les articles 354 et suivants du Code pénal sanctionnent l’enlèvement de mineur et distinguent selon que l’enlèvement a eu lieu par fraude ou violence ou sans fraude ni violence.

530.En règle générale, l’enlèvement par fraude ou violence d’un mineur est puni d’une peine d’emprisonnement de 5 à 10 ans.

531.Circonstances aggravantes: la peine de travaux forcés à perpétuité est encourue si le mineur ainsi enlevé est âgé de moins de 15 ans, ou si, quel que soit l’âge du mineur, le coupable avait obtenu ou avait pour objectif de se faire payer une rançon (art. 359).

532.Si l’enlèvement a été suivi de la mort du mineur, la peine de mort est encourue.

533.L’enlèvement ou le détournement ou toute tentative d’enlever ou de détourner un mineur de 18 ans sans fraude ni violence est puni d’un emprisonnement de deux à cinq ans.

534.Si l’enlèvement ou le détournement est suivi du mariage de l’auteur avec la victime, il ne peut y avoir poursuite que sur la plainte des personnes ayant qualité pour demander l’annulation du mariage et aucune condamnation ne peut intervenir avant une telle annulation.

535.L’article 356 du Code pénal sanctionne le délit de non‑représentation d’enfant. Cette infraction consiste dans le fait de méconnaître une décision de justice qui a statué sur la garde d’un mineur. La non‑représentation ou l’enlèvement du mineur ainsi détourné au mépris d’une décision de justice est sanctionné par un emprisonnement d’un mois à un an et d’une amende de 25 000 à 100 000 FMG.

536.Il faut souligner que les conflits sur la garde des mineurs provoquent chez l’enfant disputé des troubles d’instabilité psychologique et d’affection.

Protection de l’enfant contre les violences et voies de fait

537.Le Code pénal (art. 295 et suiv.) sanctionne le meurtre, l’assassinat et l’empoisonnement. Il réprime les blessures, les coups volontaires et les violences et voies de fait (art. 309 et 311). Ces dispositions sont applicables lorsque les victimes sont majeures ou mineures de plus de 15 ans. En revanche, des dispositions particulières protègent la victime âgée de moins de 15 ans.

538.Ainsi, l’article 312 (al. 6) du Code pénal punit d’un emprisonnement d’un à cinq ans quiconque a volontairement fait des blessures, porté des coups ou commis tout autre violence ou voie de fait sur la personne d’un enfant âgé de moins de 15 ans.

539.Des circonstances aggravantes rendent plus sévères les sanctions pénales:

Lorsqu’il résulte des faits incriminés une maladie ou une incapacité de 20 jours ou s’il y a eu préméditation ou guet-apens la peine d’emprisonnement est de 3 à 10 ans et de 25 000 à 100 000 FMG d’amende;

Si les faits incriminés ont été suivis de mutilation, d’amputation ou de privation de l’usage d’un membre, de cécité, de perte d’un œil ou autre infirmité permanente, ou s’ils ont occasionné la mort sans intention de la donner, la peine est celle des travaux forcés à temps;

Si les faits incriminés ont été commis par les père et mère légitimes, naturels ou adoptifs, ou autres ascendants ou toute autre personne ayant autorité sur l’enfant ou ayant sa garde, les peines sont aggravées de la manière suivante:

S’il n’y a eu ni maladie ou incapacité de plus de 20 jours, ni préméditation ou guet‑apens, les coupables encourent une peine d’emprisonnement de 3 à 10 ans et, dans le cas contraire, une peine de 5 à 10 ans d’emprisonnement;

Si les faits incriminés ont été suivis de mutilation, d’amputation ou de privation de l’usage d’un membre, de cécité, de perte d’un œil ou autre infirmité permanente ou s’ils ont occasionné la mort sans intention de la donner, la peine encourue est celle des travaux forcés à perpétuité si les coupables sont les père et mère légitimes, naturels ou adoptifs, ou autres ascendants légitimes;

Si les faits incriminés ont été accomplis avec l’intention de provoquer la mort les auteurs seront punis comme coupables d’assassinat ou de tentative de ce crime. La peine encourue est la peine de mort.

2. Notion élargie de mauvais traitements

540.Le rappel du contexte actuel est nécessaire pour mieux saisir la signification d’une approche élargie de la notion de mauvais traitements encore mal connue des spécialistes de l’éducation ou des juristes en raison de son caractère didactique, mais qui a l’avantage de rendre plus accessible à toutes les personnes concernées la connaissance de l’ensemble des mauvais traitements, sous tous leurs aspects, au lieu de s’en tenir à une définition juridique étroite.

541.Le contexte actuel ayant fait l’objet de précédents développements peut être schématisé ainsi:

La crise économique, l’essor démographique, le choc de la mondialisation engendrent la pauvreté;

La dégradation de l’environnement entraînant la dégradation des infrastructures, isolant les populations, épuisant les ressources naturelles, atteignant l’homme dans sa santé et dans son bien‑être, les catégories les plus vulnérables − dont les enfants − sont les plus affectées;

La perte des références et des valeurs morales entraîne la montée de la violence, l’accroissement de l’insécurité, la dégradation des mœurs, la baisse de considération à l’égard de l’enfant;

Les retombées de la crise économique et financière et l’insuffisance à tous les niveaux des moyens de la collectivité sont ressenties dans les domaines de la santé publique, de l’éducation de base, de la satisfaction des besoins vitaux des classes sociales les plus démunies;

La «fracture sociale» séparant les milieux privilégiés et les exclus du développement s’élargit.

542.Notre objet n’est cependant pas de nous borner à des constats de déficience. Dans le présent rapport, les efforts déployés par les pouvoirs publics, en synergie avec la société civile, sont largement décrits: ces efforts devraient aboutir à l’application effective de la Convention, dans l’esprit de la Constitution malgache, qui précise, notamment dans son article 21, que l’État s’engage à assurer «la protection de la famille pour son libre épanouissement ainsi que celle de la mère et de l’enfant par une législation et par des institutions sociales appropriées». Néanmoins, la prise de conscience du contexte actuel permet de situer les multiples aspects et les effets des mauvais traitements ou maltraitance ainsi que les mesures qui peuvent être envisagées et mises en œuvre pour les combattre.

543.Une telle appréciation globale permet de situer l’ensemble des mauvais traitements dans un contexte sociomédical et surtout familial. Elle permet de mieux expliquer les articles 19 et 37 à 39 de la Convention, dont les dispositions traitent apparemment plusieurs problèmes, en réalité liés étroitement les uns aux autres:

La nécessité de protéger l’enfant contre toutes les formes de mauvais traitements, y compris les violences «mentales», les faits d’abandon ou de négligence, l’exploitation, la violence sexuelle;

La gravité de ces violences et mauvais traitements lorsque l’enfant est en famille ou confié à toute autre personne (morale ou physique);

La nécessité de prendre des mesures de protection législatives, administratives, sociales et éducatives;

L’intégration de ces mesures dans des programmes sociaux comportant l’assistance à l’enfant et à ceux qui en ont la charge;

L’élaboration de programmes de prévention;

La mise en œuvre de procédures appropriées et adaptées à chaque étape du processus conduisant à la solution globale de chaque cas de mauvais traitements (identification, rapport, renvoi, enquête, traitement et suivi);

Le recours, le cas échéant, à l’intervention judiciaire.

544.L’article 312 du Code pénal a déjà été évoqué à l’occasion de l’analyse de la répression pénale en cas de blessures et coups volontaires sur un enfant de moins de 15 ans. Les mêmes dispositions prévoient également que deux catégories de faits répréhensibles sont punis des mêmes peines, avec les mêmes circonstances aggravantes, lorsqu’ils sont commis sur un enfant de moins de 15 ans. Ces deux catégories sont connues dans la pratique sous le nom générique de «mauvais traitements» et sont constituées par des actes positifs (violence ou voie de fait) et par des actes d’abstention (privation volontaire d’aliments ou de soins au point de compromettre la santé de l’enfant).

La violence ou voie de fait

545.Bien que la violence ou voie de fait ne soit pas fondamentalement différente des coups et blessures, le législateur a voulu atteindre des actes plus sournois, plus spécifiques parce que laissant peu de traces, pouvant être fréquents, voire habituels, infligeant à l’enfant des souffrances provoquant au surplus des troubles psychiques, des perturbations du caractère (brûlures, coups de ceinture, jet d’eau bouillante, application de cigarette allumée, immobilisation à l’aide de liens, exposition nu dans la rue et au froid, etc.). Ces violences sont également connues sous l’appellation de «sévices»; très souvent, elles sont infligées à des enfants en bas âge, incapables de se mouvoir ou d’appeler.

546.Les violences peuvent être «mentales» (brutalités mentales selon l’article 19 de la Convention et consistent en des comportements excessifs de toutes sortes touchant par exemple des objets auxquels l’enfant est attaché, des violences verbales (quolibets blessants, allusions grossières à un handicap, etc.). Une autre forme de violence est la privation de soins et d’aliments. Il peut s’agir de parents dénaturés abandonnant l’enfant ou l’enfermant, ou de responsables de centres détournant la nourriture des enfants placés ou les privant d’aliments en guise de punition.

547.C’est à la lumière de cette interprétation de l’article 312 (al. 6) que l’on pourrait définir une incrimination des parents envoyant leurs très jeunes enfants mendier: il y aurait à la fois délaissement en un lieu non solitaire (art. 352 du Code pénal), violence (peur de l’enfant, punition s’il ne rapporte pas suffisamment d’argent) et privation de soins.

Les mauvais traitements en général

548.Bien qu’ils soient déjà réprimés par d’autres dispositions, des faits de violence constituent des mauvais traitements, tels les violences sexuelles, l’exploitation sous toutes ses formes; l’abandon et le délaissement, la séquestration.

549.Des agissements relevant du droit de correction exercé excessivement, des vexations permanentes, les sévices ou privations infligés à un petit domestique ou considéré comme tel peuvent être qualifiés de violences et voies de fait dès lors que l’enfant a moins de 15 ans.

550.La constatation suivante peut être faite: les mauvais traitements sont surtout le fait de parents ou de personnes exerçant autorité sur l’enfant. La découverte des faits est donc difficile: il faut surtout compter sur les voisins, ou la grande famille. On peut déplorer à cet égard la dégradation de la solidarité et l’absence de réaction sociale.

551.Plus efficace pourrait être l’action des travailleurs sociaux, des enseignants de classes primaires, des membres du corps médical et paramédical, qui ont la possibilité de déceler les traces de coups, les traumatismes, les fractures suspectes.

552.Le rôle des ONG en revanche devrait être déterminant dans les domaines suivants:

Le «repérage» des enfants victimes de mauvais traitements lors de leurs activités de regroupement et d’animation;

Le contact direct avec l’enfant afin de le mettre en confiance et tenter d’obtenir des renseignements sur sa famille, le milieu où il vit et les circonstances dans lesquelles il a été maltraité;

La recherche et la mise en confiance de la famille;

L’effort (qui peut prendre du temps) pour amener la famille à adhérer à une solution. (L’aide de personnes proches de la famille pourrait être nécessaire);

Le cas échéant, le recours à une structure (police, poste médical, autorités du fokontany);

En cas de danger réel menaçant l’enfant et eu égard à son état, la saisine du juge des enfants.

553.La principale contrainte vient de la difficulté à établir des relations de coopération avec la famille, d’étudier et de mettre en œuvre une assistance morale, matérielle, de requérir éventuellement une intervention médicale.

554.Si le retrait, même provisoire, de l’enfant paraît s’imposer, il faudrait s’efforcer de le faire admettre par la famille et saisir le juge des enfants.

555.Une autre contrainte est connue: c’est la méconnaissance quasi générale de la loi et de la manière dont il faut en user.

556.À moins d’une carence évidente justifiant un retrait dans les meilleurs délais, la famille demeure la cellule principale de protection. Mettre fin aux mauvais traitements consiste moins à provoquer une action répressive pouvant se retourner contre l’enfant qu’à rechercher une solution faisant intervenir plusieurs éléments: suivi immédiat sur le plan médical et nutritionnel et surveillance, préparation éventuelle d’une mesure de retrait, assistance matérielle de la famille mais en faveur de l’enfant.

557.Au niveau des autorités assurant le maintien de l’ordre et les fonctions de police judiciaire, on n’a pas connaissance de tortures, de peines ou de traitements cruels. Les modes de contrôle sur le déroulement des enquêtes sont d’ailleurs accrus, et l’assistance d’un avocat est rendue possible par une loi récente.

558.En revanche, l’attention doit être attirée sur les violences verbales, les comportements brutaux d’intimidation, les voies de fait ne laissant pas de trace, les attentats à la pudeur ou même les abus sexuels dont sont parfois l’objet les mineurs des deux sexes au cours des enquêtes préliminaires.

L’abstention de porter secours à un enfant

559.Lorsque l’enfant est en situation difficile, en particulier celui qui, en raison de son jeune âge, de sa faiblesse physique et de son incapacité à se défendre ou au moins à demander secours en cas d’atteinte à son intégrité physique ou en cas de menace imminente sur sa sécurité, n’est pas en mesure de faire prévaloir ses droits (droits à la vie et à la survie, droit à la protection contre les violences, brutalités et mauvais traitements), la solidarité de la communauté qui l’entoure et la réaction sociale du citoyen conscient devraient pouvoir suppléer à la carence de la cellule familiale et pallier la dégradation du milieu de vie habituel.

560.En d’autres termes, étant informés des mauvais traitements infligés à un enfant ou d’une situation de négligence et de carence de soins alimentaires, la communauté (fokonolona, grande famille, associations informelles de quartier) ou plus généralement tout citoyen conscient de ses devoirs de solidarité à l’égard de la société et particulièrement des plus faibles devraient adopter un comportement approprié: en cas d’urgence, intervention auprès des forces de l’ordre, ou saisine du juge des enfants, dans tous les cas prise de contact avec la famille et, le cas échéant, secours immédiat pour protéger l’enfant.

La législation existante

561.Les articles 62 et 63 du Code pénal prévoient diverses hypothèses dans lesquelles la réaction sociale est une obligation morale s’imposant au nom de la solidarité créée par le voisinage ou la conscience collective.

562.L’article 62 concerne la dénonciation auprès des autorités administratives ou judiciaires alors que l’on a connaissance d’un crime déjà tenté ou consommé, et que l’on peut penser «que les coupables ou l’un d’eux commettraient de nouveaux crimes».

563.L’hypothèse n’aurait pas de relation directe avec la sécurité des mineurs si ce n’était une disposition de l’alinéa 2 de l’article 62: les parents ou alliés proches des auteurs ou complices du crime ou de la tentative ne peuvent pas être poursuivis sur la base de l’article 62 «sauf en ce qui concerne les crimes commis sur les mineurs de 15 ans».

564.L’article 53 concerne l’abstention de porter secours; il ne mentionne pas spécialement les mineurs mais, a fortiori, tout mineur de 18 ans est inclus parmi les victimes protégées par cet article.

565.Quelles sont les victimes protégées par l’article 63? Il distingue trois catégories de personnes exposées à un danger certain:

Les personnes menacées par un fait criminel ou délictuel pouvant porter atteinte à l’intégrité corporelle;

Les personnes qu’un danger quelconque menace;

Les personnes faisant l’objet d’une poursuite judiciaire, incarcérées de ce fait alors qu’un témoignage pourrait apporter la preuve de leur innocence.

566.Dans ces trois hypothèses, un mineur de 18 ans menacé dans sa sécurité corporelle ou sa liberté pourrait être efficacement secouru, soit par une action positive de sauvegarde et de protection, soit par un témoignage en justice.

567.La personne qui est en mesure d’apporter ou de provoquer un secours et qui s’en abstient volontairement peut être poursuivie conformément aux dispositions de l’article 63 (emprisonnement de trois mois à cinq ans, amende de 18 000 FMG à 750 000 FMG).

568.S’agissant de la protection pénale des mineurs, l’article 63 a une utilité incontestable, spécialement lorsqu’il s’agit d’enfants martyrs, de petits domestiques objets de sévices, d’enfants en bas âge privés de soins élémentaires et d’aliments. Selon le cas, la réaction sociale devrait émaner du voisinage averti par des cris, des pleurs ou des appels de détresse, des travailleurs sociaux ou médicaux ou encore des instituteurs alertés par l’état physique des enfants.

569.Les contraintes sont au moins de deux ordres:

i)Sur le plan de l’application de l’article 63, la rédaction même de la loi est révélatrice des hésitations du législateur entre la prééminence du devoir civique de porter secours et la protection contre les interprétations abusives ou erronées pouvant atteindre injustement la personne qui s’est abstenue pour des raisons qu’elle estimait humainement valables: la loi oblige le juge à apprécier, dans chaque cas, les circonstances exactes de l’abstention coupable. Celui qui s’est abstenu devait avoir été en mesure d’empêcher la réalisation du danger par une «action immédiate»; le présumé coupable peut toujours démontrer qu’il était dans l’impossibilité matérielle d’intervenir immédiatement ou de provoquer un secours en raison de l’isolement ou de l’éloignement. La loi précise par ailleurs que celui qui s’est abstenu peut invoquer pour sa défense «un risque pour lui ou pour les tiers».

Quelle doit être la nature de ce risque, et comment l’évaluer par rapport à l’abstention de porter secours? Comment apprécier la prise de conscience par le présumé coupable de l’existence et de l’importance du péril? Des questions multiples peuvent être posées dans les circonstances actuelles: un voisin entendant clairement des appels de détresse d’un mineur peut‑il objecter que, les faits se passant la nuit, l’insécurité générale constitue un péril qu’il ne veut pas affronter? Un médecin se refusant de sortir la nuit peut invoquer non seulement l’insécurité générale mais également l’inutilité de son intervention, qu’il estime être seul à pouvoir apprécier.

Il faut cependant signaler que la jurisprudence est relativement sévère sur la valeur des arguments du présumé coupable. Dans cette perspective, l’intérêt supérieur de l’enfant devrait prévaloir lorsque, manifestement les prétextes d’impossibilité matérielle ou du péril encouru relèvent beaucoup plus de la peur, de la lâcheté ou de l’indifférence.

ii)Sur le plan de la solidarité sociale, il est certain que la dégradation des valeurs traditionnelles s’ajoutant au repli sur elles-mêmes des familles en stratégie de survie contribuent à alourdir le déficit de réaction sociale.

570.Il faut également ajouter les déficiences de l’éducation communautaire, la méconnaissance de la législation protégeant l’enfant et surtout le sentiment d’impuissance que les personnes animées de la meilleure volonté éprouvent en face de l’indifférence, de la passivité et de l’absence de moyens élémentaires d’intervention des services sociaux et administratifs auxquels devrait revenir la charge, sinon de porter immédiatement secours, du moins de répondre positivement à tout appel ou information émanant de la communauté ou des individus.

3. Les abus sexuels

571.La Convention accorde une importance particulière non seulement à la sauvegarde de l’éducation et de la moralité de l’enfant, et par conséquent sa protection contre la débauche et les dérèglements de la vie sexuelle, mais également à la préservation de l’enfant contre toutes les formes d’exploitation sexuelle ou de violence sexuelle (art. 34).

a) Causes et formes de l’abus sexuel

572.On peut considérer que les rapports sexuels précoces et les grossesses d’adolescentes sont deux formes de l’abus sexuel.

573.En général, l’abus sexuel résulte des lacunes de l’éducation sexuelle dispensée aux enfants malgaches. Certes, on en parle partout, à l’école, à l’hôpital et à l’église. Il apparaît que tout le monde accorde beaucoup d’importance à la place de l’éducation sexuelle dans la lutte contre la violence sexuelle. Cependant, les parents, quant à eux ne sont pas conscients de l’importance et de l’intérêt d’intégrer l’éducation sexuelle dans l’éducation de leurs enfants. C’est un sujet tabou. Il y a beaucoup d’efforts à faire pur qu’on en parle librement en famille.

574.D’après une enquête, sur 252 répondants, 106 considèrent que la sexualité est un tabou (42,1 %) contre 146 qui considèrent qu’elle ne l’est pas (57,9 %). Les raisons invoquées sont:

Mal

28

12,7 %

Interdit

10

4,5 %

Honte

45

20,5 %

Danger

3

1,4 %

575.Près de 62 % des enfants estiment être informés sur la sexualité. Conformément aux usages à Madagascar, les discussions sur la sexualité respectent les conduites d’évitement (on en parle entre personnes du même sexe).

b) Protection des mineurs contre l’exploitation sexuelle

576.Le Code pénal malgache punit le proxénétisme et définit proxénète celui ou celle qui:

D’une manière quelconque, aide, assiste ou protège sciemment la prostitution d’autrui ou le racolage en vue de la prostitution;

Sous une forme quelconque, partage les produits de la prostitution d’autrui ou reçoit des subsides d’une personne se livrant habituellement à la prostitution;

Sciemment, avec une personne se livrant habituellement à la prostitution, ne peut justifier de ressources suffisantes pour lui permettre de subvenir seul à sa propre existence;

Embauche, entraîne, ou entretient, même avec son consentement, une personne même majeure en vue de la prostitution, ou la livre à la prostitution ou à la débauche;

Fait office d’intermédiaire, à un titre quelconque, entre les personnes se livrant à la prostitution ou à la débauche et les individus qui exploitent ou rémunèrent la prostitution ou la débauche d’autrui.

577.L’article 334 du Code pénal punit le proxénète d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende de 300 000 FMG sans préjudice des peines plus fortes, s’il échet.

578.Le délit commis à l’égard d’un mineur constitue une circonstance aggravante. Ainsi, l’auteur est puni, selon l’article 334 bis d’un emprisonnement de deux ans à cinq ans et d’une amende de 750 000 à 7,5 millions de FMG (voir plus loin, Réformes législatives).

579.Le même article (334 bis) sanctionne également (al. 2) quiconque aura attenté aux mœurs soit en excitant, favorisant ou facilitant habituellement la débauche ou la corruption de la jeunesse de l’un ou l’autre sexe au‑dessous de l’âge de 21 ans ou, même occasionnellement, de mineurs de 16 ans.

580.L’infraction est constituée dès qu’il y a acte ayant pour but:

D’exciter des mineurs à la débauche (par exemple par l’organisation de réunions malsaines destinées à inciter à des actes immoraux);

De favoriser à la débauche (par exemple de fournir des locaux à cet effet ou de pourvoir à toute consommation de nature à faciliter la débauche: boissons alcooliques, drogues, relations douteuses mêlant adultes et mineurs).

581.Les peines encourues sont celles prévues pour le proxénétisme.

582.En somme, le législateur a pour but essentiel de protéger la jeunesse contre toute corruption et immoralité. Cependant, en réalité, on constate le nombre peu élevé des affaires relatives à l’incitation des mineurs à la débauche reçues par la police des mœurs et des mineurs (PMM) à Antananarivo. Durant l’année 1998, six affaires seulement ont été reçues par la PMM.

c) Protection des mineurs contre la violence sexuelle

583.L’article 34 de la Convention explicite le droit de l’enfant à être protégé contre toutes formes d’exploitation et de violences sexuelles.

584.Le droit positif malgache comporte des dispositions suffisamment sévères à cet égard.

Attentat à la pudeur

585.L’attentat à la pudeur implique un contact matériel, constitué par exemple par des attouchements, et des violences (physiques ou morales).

586.L’attentat à la pudeur sans violence a été prévu surtout pour protéger l’être vulnérable inapte à se défendre ou à comprendre la nature ou la gravité des actes qu’il subit.

587.L’attentat à la pudeur consommé ou tenté sans violence sur la personne d’un enfant de l’un ou de l’autre sexe âgé de moins de 14 ans sera puni de 5 à 10 ans d’emprisonnement. Il y a circonstances aggravantes augmentant la sévérité des peines encourues notamment lorsque le ou les auteurs des faits sont des ascendants et d’une manière générale des personnes exerçant des fonctions leur conférant une autorité morale sur l’enfant. Ainsi, la peine sera celle des travaux forcés à temps.

588.L’acte impudique ou contre nature (acte d’homosexualité) commis sur un mineur de 21 ans est puni d’une peine de six mois à trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 5 000 à 100 000 FMG.

589.L’attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violence contre un enfant au-dessous de l’âge de 15 ans sera puni des travaux forcés à temps.

Le viol

590.Le viol sur la personne d’un enfant au-dessous de l’âge de 15 ans est puni de la peine des travaux forcés à temps.

591.Par contre, le coupable de viol sur la personne d’un enfant au‑dessus de l’âge de 15 ans est puni de 5 à 10 d’emprisonnement.

592.Le nombre des affaires relatives aux attentats aux mœurs reçues par le procureur de la République près le tribunal de première instance d’Antananarivo était, en 1996, de 498 sur 16 304 affaires entrées au parquet et, en 1997, de 408 sur 14 973 affaires entrées au parquet.

4. Évolution des mœurs et réformes législatives

593.La dégradation des comportements à l’égard des mineurs a amené à constater l’augmentation de certains phénomènes: la pédophilie, l’emploi de mineurs des deux sexes dans la réalisation de films choquants ou de photos «indécentes» à usage privé, le tourisme sexuel ont fait leur apparition.

594.Des études sociologiques plus approfondies ont été menées, tandis que des analyses juridiques ont permis de mieux cerner les problèmes.

595.Le Code pénal sanctionne les faits répréhensibles ayant pour but et pour effet d’exciter, de favoriser ou de faciliter la débauche ou la corruption de la jeunesse de l’un et de l’autre sexe. L’article 334 bis (al. 2) prévoit expressément la répression des actes favorisant ou facilitant habituellement la débauche et la corruption: s’agissant de mineurs de moins de 16 ans, les actes peuvent même être occasionnels.

596.Le libellé imprécis des dispositions de l’article 334 bis (al. 2) amène à rechercher l’intention exacte du législateur: la débauche se distingue d’abord de la prostitution et ne comporte pas nécessairement la recherche d’un profit pécuniaire. Il ne s’agit pas non plus de proxénétisme proprement dit prévu par d’autres dispositions. L’infraction est constituée dès lors qu’il y a acte.

597.Par ailleurs, le législateur malgache a laissé subsister les dispositions de l’arrêté du 5 mai 1939 interdisant «en tout temps, dans les lieux ouverts au public le racolage sous toutes les formes: interpellation directe ou indirecte, déambulations prolongées, stationnement sur un même point, provocation par le geste, l’attitude, la tenue». Cet arrêté prohibe la tenue de maisons de tolérance et de maisons de rendez‑vous. Il est interdit aux propriétaires de cafés, de bars ou aux logeurs de recevoir des filles publiques et de favoriser la prostitution.

598.Les mesures de protection administrative ou pénale contre la débauche et le proxénétisme ne suffisent pas à protéger les enfants en situation difficile contre les violences sexuelles.

599.La Convention mentionne pourtant à plusieurs reprises et très clairement ces formes particulières d’atteinte à l’intégrité physique: l’article 19 recommande aux États de prendre toutes mesures appropriées pour préserver l’enfant des violences sexuelles perpétrées par les personnes ayant ou exerçant l’autorité parentale. L’article 34 explicite le droit de l’enfant à être protégé contre toutes les formes d’exploitation et de violences sexuelles.

600.Le droit positif malgache comporte pourtant des dispositions sévères à cet égard:

Quiconque aura commis le crime de viol sur la personne d’un enfant au‑dessous de l’âge de 15 ans accomplis subira la peine des travaux forcés à temps.

Dans les autres cas, le coupable de viol ou de tentative de viol sera puni de 5 à 10 ans d’emprisonnement.

Quiconque aura commis un attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violence contre un enfant au‑dessous de l’âge de 15 ans sera puni des travaux forcés à temps.

Dans les autres cas, la peine sera de deux à cinq ans d’emprisonnement. (art. 332 du Code pénal).

L’attentat à la pudeur consommé ou tenté sans violence sur la personne d’un enfant de l’un ou de l’autre sexe âgé de moins de 14 ans sera puni de 5 à 10 ans d’emprisonnement. Il y a circonstance aggravante augmentant la sévérité des peines encourues notamment lorsque le ou les auteurs des faits sont des ascendants et d’une manière générale des personnes exerçant des fonctions leur conférant une autorité morale sur l’enfant (ministre d’un culte, enseignant, fonctionnaire) [art. 333 du Code pénal].

601.On peut constater que la loi utilise des expressions différentes selon la nature des faits. Il est aussi nécessaire de rappeler que:

le viol implique des relations sexuelles consommées ou tentées par une personne de sexe masculin sur une mineure de sexe féminin, et perpétrées avec violence (morale ou physique).

L’attentat à la pudeur implique un contact matériel, constitué par exemple par des attouchements, et des violences.

L’attentat à la pudeur sans violence a été prévu surtout pour protéger l’être vulnérable.

Dans tout cas d’attentat à la pudeur, le sexe de l’auteur comme la violence importent peu.

L’«acte impudique ou contre nature» est l’acte d’homosexualité commis sur un mineur (de moins de 21 ans selon le Code pénal malgache), il est puni d’une peine de six mois à trois ans d’emprisonnement (art. 331, al. 3)

L’outrage public à la pudeur (art. 330 du Code pénal) est constitué par une exhibition corporelle, en public ou en milieu public, choquant ou susceptible de choquer des personnes de tous âges. La peine encourue est de trois mois à deux ans d’emprisonnement (art. 330 du Code pénal).

La protection des mineurs n’est concernée que dans la mesure où ils seraient témoins du fait incriminé. Cependant, dans les cas où la prévention d’attentat à la pudeur ou même de tentative de viol sur la personne d’un mineur ne pourrait pas être retenue, faute de preuves suffisantes, la qualification d’outrage public à la pudeur pourrait justifier plus solidement une poursuite.

602.Il est étonnant de constater le nombre peu élevé d’attentats aux mœurs constatés au niveau de la police des mœurs. Le tableau ci‑après concernant les faits dont le service compétent de la police des mœurs a eu à connaître fait ressortir des chiffres relativement faibles.

Délits de mœurs commis à Antananarivo en 1994 et 1995 (janvier-octobre)

Infraction constatée

Nombre de victimes

Sexe

Âge

1994

Viol

27

Féminin

3 à 17 ans

Attentat à la pudeur

19

Féminin

5 à 17 ans

Détournement de mineur a

89

Féminin

11 à 17 ans

1995 (janvier-octobre)

Viol

42

Féminin

4 à 17 ans

Attentat à la pudeur

13

Féminin

3 à 16 ans

Détournement de mineur

108

Féminin

11 à 17 ans

Source: Police des mœurs et des mineurs (Tsaralalana).

a La qualification de «détournement de mineur» doit être probablement aussi bien applicable à des enlèvements avec fraude ou violence qu’à des détournements liés à la fugue d’une fille mineure par ailleurs victime de mauvais traitement ou d’abandon matériel et moral dans le milieu où elle vit habituellement.

603.Des réponses − malheureusement peu nombreuses et parfois évasives − recueillies au cours d’enquêtes, il résulte que les principales victimes sont des filles mineures:

Filles en stratégie de survie pour lesquelles les attentats aux mœurs (sauf violences compromettant gravement l’état physique) sont des «accidents» et la prostitution occasionnelle un moyen de survie;

Filles mineures victimes de conflits familiaux et exposées au comportement d’un compagnon de la mère, du père ou d’une personne ayant autorité sur elles;

Filles moralement ou matériellement abandonnées et vivant, durant la journée, dans des milieux agressifs ou dégradants;

Filles placées comme domestiques, soumises à des travaux pénibles, à des sévices et aux violences sexuelles de l’employeur ou de membres de la famille;

Filles mentalement handicapées;

Filles objet d’une poursuite pénale et soumises dans les locaux de prévention à des violences sexuelles (les faits de violence pouvant être d’ordre moral) de la part de ceux qui ont charge de rechercher la vérité dans le respect de la présomption d’innocence et du droit à la sécurité physique de l’enfant;

Filles placées en centres mal gérés;

Filles au travail, exposées au harcèlement des cadres ou surveillants.

604.La prévention et la répression se heurtent à diverses sortes de difficultés:

L’excessive complexité des qualifications juridiques qui ont pour objet d’étendre la répression au maximum de faits répréhensibles, par des incriminations ayant le plus large champ d’action possible;

Les agents de la force publique chargés des premières poursuites, déjà submergés par des faits de violence croissante et portant des atteintes graves à l’ordre public dans les quartiers les plus démunis, sont tentés de considérer que les attentas aux mœurs sont dans l’ordre des choses, relèvent de la surveillance familiale et des règlements ou arrangements privés ou communautaires; ils ne maîtrisent d’ailleurs pas toujours les nuances des définitions et les actes de premières constatations à effectuer selon la nature des faits incriminés;

Les personnes de bonne volonté, issues des ONG, des communautés religieuses, des groupements traditionnels, prêtes à intervenir et à aider les familles et le mineur dans les démarches à accomplir, se heurtent à un mur de silence, une méfiance, voire une hostilité qui découragent les meilleures intentions: ce comportement constitue un véritable blocage;

Les lenteurs de l’enquête et de la procédure quand il y a poursuite;

L’attitude et les moyens de défense des coupables qui parviennent à échapper à une condamnation précisément grâce aux complexités de la loi et d’une jurisprudence directement importée du droit et de la pratique des tribunaux français.

Un ensemble complexe de faits sociologiques contribue à rendre difficiles l’approche, la compréhension, le comportement à adopter et les solutions à proposer: les problèmes relatifs aux attentats aux mœurs et aux violences sexuelles ne sont pas à évoquer sur la place publique, dans le voisinage et auprès des autorités: nous trouvons ici un aspect résiduel des interdits qui affectent le sexe, se mêlant aux traditions rigoureuses touchant à l’inceste, à l’abstention de relations sexuelles dans des cas précis (parenté proche, jours néfastes, survivance des interdits fondés sur les origines, ou la stratification des classes).

Dans certaines familles, l’influence d’une éducation chrétienne stricte.

Paradoxalement, la liberté des mœurs, remontant aux traditions les plus anciennes (libations lors de retournements de morts, veillées funèbres ou circoncisions).

Les phénomènes de pauvreté modifiant la nature des relations entre auteur d’attentats aux mœurs et famille de la victime. Traditionnellement, la famille considère qu’il y a eu atteinte à l’honneur familial et qu’il y a lieu à réparation privée, rétablissant l’équilibre social et occultant le scandale. Cette tradition persiste mais, en outre, la réparation devient source de revenu pour la famille en stratégie de survie; en ce cas, toute suggestion de plainte, toute assistance extérieure provoquant l’intervention judiciaire est perçue non seulement comme une ingérence dans l’exercice de prérogatives familiales ou communautaires, mais également comme un obstacle à une «négociation» prometteuse.

La venue d’un enfant, souvent décrite comme une bénédiction au sein de la famille quel que soit le père, est actuellement et, de plus en plus, autrement perçue: par la fille comme un objet de honte et une source de difficultés familiales, la conduisant à un avortement dangereux ou à l’abandon du nouveau-né; par la famille comme un objet de scandale et la perspective d’une charge supplémentaire.

Réformes législatives

605.L’apparition, à la faveur de l’essor du tourisme international, du phénomène déjà connu dans d’autres pays du tourisme sexuel a amené les autorités chargées de la police et de la justice à se montrer plus sévères dans les cas d’attentats à la pudeur.

606.Le Code du tourisme (loi no 95.017) prévoit que tout voyageur, qu’il soit excursionniste ou touriste, est tenu de respecter les lois et règlements en vigueur et en particulier ceux relatifs à l’ordre public, aux règlements concernant le séjour des touristes étrangers, au respect des us et coutumes locaux, aux bonnes mœurs et à la santé publique. En fait, la loi portant Code du tourisme vise également à protéger les mineurs contre le tourisme sexuel.

607.La loi no 98.024 du 25 janvier 1999 porte refonte du Code pénal dans ses dispositions visant à protéger les mineurs et à enrayer la dégradation des mœurs. Les principales dispositions figurent ci‑après:

Article 330: Toute personne qui aura commis un outrage public à la pudeur sera punie d’un emprisonnement de trois mois à deux ans et d’une amende de 100 000 à 1 million de FMG.

La peine sera d’un emprisonnement de un à trois ans et d’une amende de 5 millions à 20 millions de FMG lorsque le délit aura été commis en présence d’un mineur.

Article 331:

Alinéa 1: L’attentat à la pudeur consommé ou tenté sans violence sur la personne d’un enfant de l’un ou l’autre sexe de moins de 14 ans sera puni de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 10 millions à 50 millions de FMG.

Alinéa 2: Sera puni de la peine portée à l’alinéa 1 l’attentat à la pudeur commis par tout ascendant sur la personne d’un mineur de moins de 21 ans, même âgé de plus de 14 ans, mais non émancipé par le mariage.

Alinéa 3: Sans préjudices des peines plus graves prévues par les alinéas qui précèdent ou par les articles 332 et 333 du présent Code, sera puni d’un emprisonnement de deux ans à cinq ans et d’une amende de 10 millions à 100 millions de FMG quiconque aura commis un acte impudique ou contre nature contre un individu de son sexe, mineur de moins de 21 ans.

Article 332: Quiconque aura commis le crime de viol ou de tentative de viol sur la personne d’un enfant au‑dessous de l’âge de 15 ans accomplis subira la peine des travaux forcés à temps.

Dans les autres cas, le coupable de viol ou de tentative de viol sera puni de 5 à 10 ans d’emprisonnement. Quiconque aura commis un attentat à la pudeur, consommé ou tenté avec violence contre un enfant au‑dessous de l’âge de 15 ans sera puni des travaux forcés à temps.

Dans les autres cas, la peine sera de deux cinq ans d’emprisonnement.

Article 333:Si les coupables sont les ascendants de la personne sur laquelle a été commis l’attentat, s’ils sont de la classe de ceux qui ont autorité sur elle, s’ils sont ses instituteurs ou ses serviteurs à gages, ou serviteurs à gages des personnes ci‑dessus désignées, s’ils sont fonctionnaires ou ministres d’un culte, ou si le coupable, quel qu’il soit, a été aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes, la peine sera celle des travaux forcés à perpétuité dans les cas prévus à l’alinéa 1 de l’article 332, celle des travaux forcés à temps dans les cas prévus à l’alinéa 1 de l’article 331, à l’alinéa 3 de l’article 332, celle de 5 à 10 ans d’emprisonnement dans les cas prévus aux alinéas 3 et 4 de l’article 332.

608.À l’article 334 du Code pénal, les dispositions prévoyant et punissant le proxénétisme ont été modifiées dans le sens d’une aggravation des peines encourues et des incriminations. La peine encourue de six mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 à 3 millions de FMG a été portée de deux à cinq ans d’emprisonnement et une amende de 5 millions à 50 millions de FMG.

609.Dans le domaine des qualifications, sont désormais poursuivis le fait de faciliter pour un proxénète la justification de ressources fictives et les comportements qui tendent à empêcher les actions de prévention, de contrôle, d’assistance et de rééducation entreprises en faveur des personnes se livrant à la prostitution ou courant le risque d’être amenées à s’y livrer.

610.L’article 334 bis aggrave également les peines et les incriminations dans le cas où le proxénétisme a été commis à l’égard d’un mineur, ou lorsque la victime a une particulière vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une déficience physique ou psychique ou un état de grossesse.

IV. ENVIRONNEMENT FAMILIAL ET SOLUTIONS DE REMPLACEMENT

611.Depuis la publication du premier rapport et en particulier durant les cinq dernières années, les conditions économiques et sociales ont subi des mutations importantes à Madagascar. En revanche, la législation est restée d’une remarquable stabilité. Aussi les développements qui suivent vont-ils être consacrés bien davantage aux retombées d’une situation économique et sociale plus difficile qu’à des modifications législatives, pratiquement inexistantes.

612.Cependant, le droit applicable a subi quelques modifications suivant l’évolution de la jurisprudence et l’adaptation du groupe familial aux situations nouvelles.

A. Guidance parentale

613.Selon la Convention, il revient aux parents, aux membres de la famille ou de la communauté ou au tuteur ou aux autres personnes légalement responsables de donner à l’enfant «d’une manière qui correspond au développement de ses capacités, l’orientation et les conseils appropriés à l’exercice des droits que lui reconnaît la Convention» (art. 5).

614.L’enfant ne doit pas être séparé de ses parents contre son gré à moins que dans l’intérêt de l’enfant les autorités compétentes en décident autrement, sous réserve de révision judiciaire (art. 9).

615.Les États doivent favoriser les réunifications familiales et prendre toutes mesures utiles pour lutter contre les déplacements et les non-retours contraires à la loi nationale ou internationale des enfants déplacés à l’étranger (art. 11).

616.Il appartient au premier chef aux parents ou autres personnes qui ont la charge d’un enfant d’assurer, dans les limites de leurs possibilités et de leurs moyens financiers, les conditions de vie nécessaires au développement de l’enfant.

617.Dans la mesure de ses moyens, l’État doit aider les parents ou les personnes qui en ont charge à mettre en œuvre le droit d’un enfant à une assistance matérielle et à des programmes d’appui «notamment en ce qui concerne l’alimentation, le vêtement et le logement» (art. 27).

618.Les deux parents ont une responsabilité commune d’élever l’enfant et d’assurer son développement. Ils doivent être guidés par l’intérêt supérieur de l’enfant. L’État doit accorder une aide appropriée aux parents et assurer «la mise en place d’institutions, d’établissements et de services chargés de veiller au bien‑être des enfants» (art. 18).

619.Lorsqu’un enfant est privé temporairement ou définitivement de son milieu familial ou doit dans son intérêt en être retiré, il a droit à «une protection et une aide spéciales de l’État». Cette protection de remplacement doit être conforme à la législation nationale et peut prendre la forme d’une adoption ou d’un placement dans un établissement approprié (art. 20).

620.Ces différentes exigences de la Convention sont généralement respectées par la législation nationale malgache, qui a fait l’objet d’une analyse succincte dans le premier rapport.

621.Cette analyse prenait sa source dans les lois et les coutumes régissant la famille.

622.Dans la tradition malgache, la famille élargie joue un rôle prépondérant dans l’orientation et l’éducation d’un enfant.

623.L’aîné, chef de la famille, transmet les us et coutumes et son savoir à l’enfant afin que celui-ci puisse se développer en harmonie avec les règles traditionnelles.

624.La protection de l’enfant est assurée conjointement par les parents et les membres de la famille élargie.

625.Dans le droit positif moderne, cette tradition a été constamment maintenue par la législation en vigueur.

626.La Constitution de 1992 a défini clairement les rôles respectifs de l’État et des parents dans la protection de l’enfant:

La famille, élément naturel et fondamental de la société est protégée par l’État; tout individu a le droit de fonder une famille. L’État assure la protection de la famille pour son libre épanouissement ainsi que celle de la mère et de l’enfant par une législation et par des institutions appropriées (art. 20 et 21).

«Tout enfant a droit à l’instruction et à l’éducation sous la responsabilité des parents dans le respect de leur liberté de choix» (art. 23).

627.L’ordonnance no 62.038 du 19 septembre 1962 sur la protection de l’enfance, quant à elle, stipule:

«L’enfant occupe au sein de la famille une place privilégiée; il a droit à une sécurité matérielle et morale aussi complète que possible» (art. 1er).

«La responsabilité de son éducation appartient en premier lieu à la famille; celle‑ci doit assurer le développement harmonieux de sa personnalité» (art. 2).

628.Diverses dispositions légales telles que celles relatives au mariage et à la filiation ont recours à la coutume pour désigner la personne responsable de la protection de l’enfant lors du divorce des parents ou pour l’exercice de la tutelle.

629.Si l’on se réfère aux dispositions des articles susvisés, l’État ne doit intervenir qu’en dernier lieu en matière d’orientation et d’éducation de l’enfant.

1. La filiation

630.À Madagascar, la filiation est régie par la loi no 63.022 du 20 novembre 1963.

631.Selon les dispositions de cette loi, la filiation paternelle résulte soit des présomptions légales, soit d’une reconnaissance de paternité, soit d’une déclaration en justice.

632.La filiation peut être, en droit malgache, légitime, hors mariage ou adoptive.

a) La filiation légitime

633.Au sein du mariage, la filiation maternelle résulte du fait de l’accouchement tandis que la filiation paternelle est fondée sur une présomption («l’enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari de la mère»).

634.Certaines catégories d’enfants sont rattachées au mariage et réputées enfants légitimes après l’accomplissement des actes qui leur confère cette qualité.

635.Aux termes de l’article 7, est réputé légitime:

L’enfant né hors mariage dont le père et la mère se marient lorsque la filiation est établie à l’égard de l’un et de l’autre époux;

L’enfant reconnu par le mari et né avant le mariage d’une femme non mariée lorsque l’époux concourt personnellement à l’acte de reconnaissance ou le ratifie;

L’enfant né avant le mariage de sa mère d’un homme non marié lorsque le mari déclare expressément et par écrit le considérer comme sien;

L’enfant désavoué par le mari lorsque la mère se remarie avec le père;

L’enfant né du mari, pendant son mariage, d’une femme non mariée lorsque, l’enfant reconnu, il épouse la mère après.

b) La filiation hors mariage

636.Lorsque l’enfant est né en dehors des liens du mariage, la filiation maternelle résulte toujours du fait de l’accouchement, la filiation paternelle est établie selon les modalités suivantes:

Lorsque le père et la mère vivent en commun et par une union célébrée selon les coutumes mais non enregistrée, l’enfant conçu ou né durant l’union a pour père l’homme engagé dans cette union (art. 4);

Une reconnaissance de paternité peut être formulée par celui qui se prétend le père de l’enfant même simplement conçu, soit devant l’officier de l’état civil, soit dans un acte authentique, soit par testament (art. 16);

La paternité hors mariage peut être judicieusement déclarée (déclaration judiciaire de paternité) dans le cas:

où le père prétendu a séduit la mère;

où le père prétendu a pourvu ou participé à l’entretien et à l’éducation de l’enfant en qualité de père;

où la preuve est rapportée que le père prétendu a eu commerce habituel avec la mère pendant la période légale de la conception (art. 23).

c) La filiation adoptive

637.L’adoption judiciaire crée entre l’adoptant et l’adopté un lien de filiation conférant à ce dernier la qualité d’enfant légitime.

2. Responsabilité des parents liés par le mariage

638.Il est expressément prévu dans la Convention que «la responsabilité d’élever l’enfant incombe au premier chef et conjointement aux deux parents». La responsabilité parentale est appelée à s’exercer dans les domaines les plus variés. Les parents doivent non seulement garantir à leurs enfants la satisfaction des besoins fondamentaux tels que la santé, l’alimentation, la scolarisation, l’éducation mais également les protéger contre toute forme de violence.

639.Ces attributions sont réparties entre les deux conjoints. Or, c’est le père, détenteur de l’autorité parentale qui est chef de famille et, en tant que tel, il a le devoir de subvenir aux besoins du ménage.

640.La contribution de la mère ne constitue qu’un complément de ressources. Cependant, la pression économique contraint les parents à faibles revenus à contribuer ensemble aux charges du ménage.

3. Responsabilité des père et mère et des personnes ayant la charge de l’enfant selon les coutumes ou la loi

641.Selon l’ordonnance no 62.089 du 1er octobre 1962 relative au mariage, «les époux contractent ensemble, par le seul fait du mariage, l’obligation de nourrir, d’entretenir, d’élever et d’instruire leurs enfants» (art. 62).

642.En reprenant ainsi, dans la hâte de rédiger une législation la plus complète possible sur le mariage célébré devant l’officier de l’état civil, les termes mêmes de l’article 203 du Code civil français, la législation malgache a manqué l’occasion qui lui était offerte d’innover, en créant dans le droit positif une règle générale sur le droit de l’enfant à l’entretien, à l’instruction et à l’éducation et en dissociant des obligations qui naissent exclusivement du mariage l’obligation de nourrir et d’éduquer les enfants.

643.Le droit de l’enfant à l’entretien, qui comprend «l’alimentation, le vêtement et le logement» (art. 27 de la Convention), à l’instruction et à l’éducation, devrait en réalité prendre sa source, non pas dans les obligations nées du mariage, mais dans le fait de la procréation. C’est d’ailleurs ainsi qu’on a toujours conçu l’obligation d’élever et d’entretenir les enfants dans les plus anciennes coutumes malgaches et dans le droit traditionnel. Certes, indépendamment des dispositions de l’article 62 de l’ordonnance relative au mariage, le droit positif malgache contient des dispositions du droit civil octroyant des «aliments» aux enfants nés hors mariage. C’est ainsi que la loi no 63.022 du 20 novembre 1963 concernant notamment la filiation prévoit une obligation alimentaire en faveur de l’enfant et à la charge du père naturel. Il en est également ainsi des articles 29 et 31 de la même loi.

644.La loi no 67.030 du 18 décembre 1967 relative aux régimes matrimoniaux permet d’octroyer des aliments à des enfants naturels, qu’ils soient naturels simples, adultérins ou incestueux.

645.S’agissant des prestations familiales dues aux enfants à charge et placés sous la garde effective de l’allocataire de prestations familiales, il est précisé, aussi bien dans la réglementation administrative concernant les fonctionnaires que dans le Code des prestations familiales concernant les travailleurs du secteur privé, que les allocations familiales sont dues aussi bien aux enfants légitimes qu’aux enfants adoptés en justice et aux enfants nés hors mariage.

646.On pourrait donc être tenté d’interpréter ainsi les différents droits dont bénéficient les enfants:

Les parents légitimes, en vertu de l’article 62 déjà cité, auraient une obligation largement définie d’entretien, d’instruction et d’éducation;

Tous les autres enfants, et particulièrement les enfants nés en dehors du lien du mariage célébré devant l’officier de l’état civil, auraient droit à une obligation alimentaire beaucoup plus restreinte que celle dont bénéficient les enfants légitimes.

647.Cette discrimination est parfaitement étrangère à la tradition malgache, qu’elle émane des usages locaux, des coutumes ou même de l’ancien droit écrit. Le droit positif actuel, malgré les dispositions restrictives de l’article 62 déjà cité, n’est que la continuation de cette conception traditionnelle: l’enfant est l’égal de l’enfant. Lorsque le droit aménage les conditions propres à assurer le plein développement de l’enfant, il ne distingue pas entre les diverses catégories d’enfants classés selon leur filiation.

648.C’est également dans cet esprit que la Convention définit l’enfant, en rattachant par des liens de filiation régie par la loi nationale à ses deux parents mais en le situant par ailleurs dans le cadre familial. Elle n’opère aucune discrimination entre les catégories de familles (art. 5).

649.Le droit malgache de la famille procède du même esprit: l’enfant a une place privilégiée au sein de la famille qui est la cellule principale de protection.

4. La famille monoparentale

650.Dans le droit positif malgache, le mariage crée une famille composée du père et de la mère assurant l’entretien, l’instruction et l’éducation des enfants.

651.Si l’un des parents vient à disparaître ou si le lien matrimonial est rompu par une séparation de fait ou un divorce prononcé en justice, il se crée une famille monoparentale au sein de laquelle le parent qui a la garde des enfants assume seul les attributs de l’autorité parentale. Généralement, ce parent est aidé par la famille élargie, qui constitue une structure de réserve.

652.Si les deux parents viennent à disparaître, ou si celui qui a la garde des enfants s’acquitte mal de ses devoirs, les mécanismes généraux de la vie en société permettent d’assurer la sauvegarde de l’intérêt supérieur des enfants. Au sein de la famille élargie, un proche parent que, souvent, la coutume désigne prend en charge les enfants. La loi du 20 novembre 1963 réglemente par ailleurs la dévolution et l’exercice des pouvoirs de tutelle.

653.Dans les cas extrêmes où les enfants sont abandonnés ou leur sécurité physique et morale est en danger, le juge des enfants est compétent pour ordonner leur placement dans un centre d’accueil approprié. Cette situation exceptionnelle sera étudiée au chapitre VII (Mesures particulières de protection).

654.Par ailleurs, le droit positif malgache coexiste avec les us et coutumes. Lorsque les parents sont unis selon les traditions, le groupe familial ainsi constitué fonctionne comme la famille unie par le mariage; le sort des enfants est cependant plus précaire, car les liens d’une union traditionnelle sont plus fragiles. L’établissement des liens de filiation est plus complexe. Généralement, les responsabilités de l’autorité parentale pèsent sur la mère, plus attachée à ses enfants et aidée par la famille élargie.

655.C’est principalement dans les cas d’union libre ou de polygamie résiduelle que le sort des enfants mérite une attention particulière, lorsque le parent ou la personne désignée par la coutume pour exercer l’autorité parentale est incapable ou trop démuni pour exercer convenablement ses fonctions et que la famille élargie est défaillante.

656.Dans ces cas, les enfants sont en situation particulièrement difficile et devraient faire l’objet de mesures particulières de protection (prise en charge par une ONG caritative, placement dans un centre relevant des autorités municipales, par décision administrative ou judiciaire).

5. Un contexte social en évolution

657.Les paragraphes qui précèdent laissent penser que la guidance parentale et, à défaut, la protection des enfants privés de leur milieu familial ou en situation particulièrement difficile sont assurés selon les coutumes, ou grâce à une administration déjà rodée, ou par l’action des juges des enfants, ou encore par la mobilisation de la société civile (associations de sauvegarde, ONG caritatives).

658.À plusieurs reprises, le contexte social a été décrit. On sait que les groupes familiaux les plus démunis sont en stratégie de survie et que la protection coutumière est insuffisante pour faire face à la pauvreté et aux déficiences des infrastructures sociales.

659.L’État lui‑même et ses démembrements (autorités décentralisées, municipalités, services sociaux de base) n’ont pas des moyens suffisants pour atténuer la pauvreté, prendre en charge les enfants en stratégie de survie, assurer l’entretien des enfants placés en centres d’accueil.

660.On peut suggérer que, dans le contexte actuel, il appartient à l’État, conformément d’ailleurs aux termes de la Convention, de prendre les mesures concrètes nécessaires pour la prise en main des cas les plus complexes d’enfants en situation difficile.

661.Certes, des efforts sont déployés au niveau de certaines municipalités pourvues de moyens: les enfants placés par le juge des enfants reçoivent une indemnité journalière d’entretien et des organismes caritatifs des subventions.

662.Mais la notion de protection administrative devrait être élargie et avoir un contenu plus ambitieux, comme d’ailleurs le proclame la Constitution (art. 21 déjà cité, sur l’engagement pris par l’État d’assurer la protection de l’enfant par une législation et des «institutions sociales appropriées»).

663.Or, il semble qu’en présence des difficultés économiques et sociales auxquelles il doit faire face, l’État a tendance à:

Se dégager des tâches sociales et les confier à une société civile pourtant mal encadrée et mal préparée;

Porter surtout ses efforts sur un ajustement structurel renforcé dont les retombées sociales sont loin d’être évidentes;

Compter sur l’aide des institutions internationales et de l’assistance bilatérale.

664.Il n’est évidemment pas question de revenir à la notion dépassée d’État-providence. Mais il faudrait mieux cibler les zones de pauvreté absolue et les catégories sociales les plus démunies: la protection et la guidance des enfants privés de la protection familiale pourraient ainsi être mieux assurées par une véritable protection sociale et administrative ayant ses propres institutions.

B. Perturbations de l’environnement familial

665.Des événements exceptionnels peuvent troubler l’équilibre de l’environnement familial, garant de la sécurité physique et morale de l’enfant à un tel point et avec une telle intensité que des mesures à caractère exceptionnel doivent être prises par les États afin de restituer à l’enfant l’environnement familial dans lequel il doit retrouver sa sécurité.

666.Ces mesures ont une dimension différente selon que l’on se situe au niveau du groupe familial, d’un groupe social élargi à une région de la nation, de la nation elle-même et de deux ou plusieurs États.

667.Les événements exceptionnels prévus par la Convention sont les suivants:

La séparation des enfants de leurs parents (art. 9);

Droits de l’enfant et de ses parents d’être réunis lorsqu’ils se trouvent dans l’obligation de vivre dans des États différents, d’entretenir des relations et des contacts quand parents et enfants résident dans des États différents, le droit qu’ont l’enfant et ses parents de quitter tout pays, y compris le leur et de revenir dans leur propre pays (art. 9 et 10);

Déplacements d’enfants à l’étranger et leur non‑retour illicite: il s’agit de l’enfant disputé entre des parents en mésentente et qui est l’objet d’un rapt ou d’un enlèvement avec déplacement à l’étranger et non-retour (art. 11);

L’enfant temporairement ou définitivement privé de son milieu familial (art. 20);

L’enfant qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans son milieu familial (art. 20);

Enfants abandonnés par un parent sur lequel pèse une obligation alimentaire, se refusant à s’exécuter ou se trouvant à l’étranger (art. 27).

1. Événements mondiaux

668.Une remarque préalable s’impose: il est probable que la préparation de la Convention a été fortement influencée par les événements mondiaux qui se sont déroulés en Afrique ou en Europe, mais aussi, pour une moindre part, en Asie et au Moyen-Orient. Des conflits interethniques, empreints de violences et d’atteintes flagrantes aux droits de l’homme ont affecté particulièrement les cellules sociales les plus vulnérables et toutes les personnes qui auraient dû être naturellement protégées par ces cellules: le village, la collectivité territoriale traditionnelle, la famille élargie, le couple et les enfants.

669.La situation était différente à Madagascar et, si l’on s’en tient aux années couvertes par le premier et le deuxième rapport, il n’y a pas eu de graves troubles de l’ordre public, de violences interrégionales pouvant provoquer l’une des atteintes à l’intérêt supérieur de l’enfant citées ci-dessus.

670.Cependant, certains articles de la Convention trouvent leur application dans la réalité malgache: c’est ainsi que l’article 9 peut être appliqué au retrait de l’enfant d’un milieu familial déficient, source de maltraitance, ou dépourvu de moyens matériels et financiers.

671.Les articles 9 et 10 peuvent trouver leur application quand des parents de nationalité différente se séparent et que l’un d’eux quitte le territoire malgache, emmenant éventuellement un ou deux enfants, et rejoint son pays d’origine qui peut être la France et, d’une manière générale, un pays d’Europe, les îles voisines, l’Afrique ou les États-Unis pour ne citer que des cas réels: les difficultés résident dans la résolution des conflits sur la garde des enfants, sur le droit de visite des parents ou sur le retour des enfants dans le pays d’origine de leur choix.

672.L’hypothèse suivante peut être également celle prévue dans l’article 11: l’un des parents quitte le foyer conjugal, emmenant avec lui un ou deux enfants et se refusant par la suite à avoir des contacts avec son conjoint resté au pays.

673.L’enfant temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, selon les termes de l’article 20, peut être l’enfant retiré et placé par décision administrative ou judiciaire et confié à une autre famille ou à un centre d’accueil spécialisé pour enfants en situation difficile. Mais il peut s’agir également d’enfants qui, à la suite d’un cataclysme climatique (cyclone) ou d’un événement d’envergure sociale telle que les familles se trouvant disloquées (émigration de populations abandonnant une région en voie de désertification, chassées par la famine, ou encore terrorisées par des bandes de pillards, voleurs de bœufs), sont abandonnés à eux-mêmes, temporairement perdus ou trop affaiblis pour suivre leur famille dans de longs déplacements.

674.Certes, dans ces dernières hypothèses, la famille élargie reprend son rôle de structure de réserve et prend en main les enfants, le plus souvent sous la protection directe de la personne désignée par les coutumes (grand-père, oncle maternel, chef de la famille élargie). Mais la famille élargie elle-même peut se trouver en voie de déstructuration et, en ce cas, être incapable d’exercer ses attributions traditionnelles de protection des enfants.

675.L’État doit alors assumer les responsabilités prévues dans la Constitution, tandis que les ONG, représentant la société civile, doivent prendre en charge les enfants abandonnés et placés, par décision de justice ou sur l’initiative même des ONG, dans les centres d’accueil qui se consacrent à l’hébergement, l’instruction des enfants en stratégie de survie en raison de la défaillance du milieu familial.

2. Séparation d’avec les parents

676.Il a déjà été fait mention de l’application de l’article 9 de la Convention. S’agissant plus particulièrement des enfants séparés de leurs parents lorsque le couple lui‑même est en situation de crise et que l’enfant est privé de la protection parentale, on identifie plusieurs catégories d’enfants dont on peut dire qu’ils sont séparés de leurs parents ou privés de leur milieu familial:

Les mineurs en danger sont ceux dont la sécurité, la moralité, la santé ou l’éducation se trouvent compromises;

Des enfants matériellement abandonnés ou malheureux;

Des enfants en stratégie de survie.

677.La plupart de ces enfants échappent en fait à l’autorité parentale. La famille, elle-même en crise, est impuissante à assurer la garde, l’entretien même sommaire, et encore moins l’éducation de l’enfant. Certes, l’inexistence totale des parents est rare, sauf en cas de décès, mais on trouve un père malade, ou instable, ou une femme abandonnée par son mari ou son compagnon; ou un père ou simple compagnon de la mère, en situation de non‑emploi, de chômage, alcoolique, ou en mauvaise santé, au surplus violent et incapable d’éprouver le moindre sentiment d’amour ou d’affection. Dans la plupart des cas, la grande famille vit loin ou s’est écartée volontairement.

678.Aux termes de l’article 20 de la Convention, les «États doivent assurer aux enfants privés de leurs parents une protection de remplacement appropriée». Cette recommandation figure dans la législation malgache et la protection se réalise par le placement d’un enfant privé de son milieu familial dans une famille de substitution capable de satisfaire à ses besoins, par un placement en centre ou par l’adoption.

679.Les enfants concernés sont:

L’enfant séparé de sa famille par décision de justice ou en raison d’une situation familiale particulière (décès, abandon) et où aucun membre de la famille élargie ne peut le garder dans des conditions de vie acceptables;

L’enfant retiré de son milieu familial pour son propre intérêt (enfant exposé à des violences et sévices, par exemple).

680.L’intervention de l’État «pour aider et assister la famille dans son rôle d’éducateur naturel de l’enfant» se traduit à deux niveaux:

Par l’intermédiaire des ministères concernés (notamment le Ministère de la population) en renforçant l’accessibilité des enfants en situation difficile et des enfants des rues aux services essentiels à sa formation et sa survie (santé, état civil, éducation de base);

Dans ses attributions, l’État est secondé par les ONG, les juridictions spécialisées et une procédure spéciale.

681.Aux termes de l’article 3 de l’ordonnance no 62.038 du 19 septembre 1962, «l’État intervient […], lorsque les circonstances et la personnalité de l’enfant paraîtront l’exiger, pour déférer le mineur à des juridictions spécialisées de l’ordre judiciaire».

682.Puisqu’il s’agit d’une mesure d’assistance éducative, des questions d’éducation et de préservation morale, et des questions médicales se mêlent intimement aux questions de l’ordre juridique, et des assistantes sociales ou des personnes bénévoles ayant la confiance des magistrats assistent les juges dans cette attribution. Malgré la situation économique qui prévaut, les frais de garde alloués à un enfant placé dans un centre sont assurés. Cela témoigne de la volonté de l’État de ne pas négliger la protection et l’assistance de l’enfant.

683.D’autres catégories d’enfants sont également concernées:

Enfants dont la santé est menacée, compromise ou gravement atteinte. L’enfant n’est pas nécessairement privé d’affection et de soins; il s’agit souvent d’enfants en bas âge, mal nourris et atteints d’une maladie ou de troubles graves de santé. Le ou les parents sont dans l’incapacité matérielle d’avoir accès à un établissement hospitalier ou ne sont pas atteints par les réseaux de sauvegardes sanitaires. Sans une intervention rapide, l’enfant est condamné soit à une mort lente, soit à rester un être diminué;

Enfants privés de sécurité morale et matérielle en raison de catastrophes naturelles. Les cas ne sont pas nombreux car la solidarité familiale se manifeste dans les circonstances où l’enfant a perdu ses «repères»;

Enfants au travail, enfants des rues;

Mineurs délinquants ayant commis une infraction relevant du Code pénal.

684.Pour ces catégories d’enfants, le retrait du milieu familial peut être une nécessité; et lors même que ces enfants sont séparés de leurs parents, ils ont le droit d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ces derniers. Le rôle de l’État, selon la Convention, est alors de veiller à ce que la cohésion soit préservée au mieux des intérêts de l’enfant.

685.Par ailleurs, la Convention dispose que «dans toutes les décisions concernant les enfants, prises par les tribunaux, les institutions de protection sociale ou les autorités administratives, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale». Selon cette recommandation, l’enfant ne doit pas être tenu à l’écart du processus de décision qui le concerne.

686.Dans ce domaine, la législation malgache est en parfaite conformité avec la Convention. L’article 10 de l’ordonnance précitée confère à l’enfant la possibilité de saisir le juge des enfants lorsque sa sécurité est menacée.

687.Le tableau ci‑après, établi pour l’année 1997, indique le nombre d’enfants abandonnés et les décisions prises à leur égard par les juges des enfants du tribunal de première instance d’Antananarivo (ce tribunal a dans son ressort plusieurs circonscriptions administratives ou municipales et est de loin le tribunal le plus chargé de Madagascar).

Protection des mineurs moralement et matériellement abandonnés (1997)

Affaires antérieures au 1er janvier

Affaires entrées dans l’année

Décisions de placement prises envers ces mineurs

Affaire en instance au 31 décembre

Nombre

Nombre

Remise

Nombre

d’affaires

de mineurs

d’affaires

de mineurs

aux parents ou représentants légaux

à une personne digne de confiance

à une institution agréée

d’affaires

de mineurs

Moins de 13 ans

24

24

150

173

29

48

69

4

4

Entre 13 et 16 ans

2

2

24

24

19

3

2

0

0

Entre 16 et 18 ans

0

0

8

8

7

2

2

0

0

Total

26

26

182

205

55

53

73

4

4

3. Réunification familiale

688.À Madagascar, les problèmes concernant la réunification familiale sont surtout relatifs aux cas suivants:

Mariage mixte, dont l’instabilité est parfois plus grande qu’entre nationaux, en cas de séparation de fait ou d’abandon du foyer conjugal par l’un ou l’autre des époux;

Mariage ou union entre Malgaches mais dont l’un des parents acquiert une nationalité étrangère et s’installe à l’étranger après la séparation du couple.

689.Dans ces différents cas, des difficultés peuvent surgir lorsqu’il y a conflit entre les parents sur la garde de l’enfant, le droit de visite, la possibilité laissée à l’enfant d’avoir des contacts directs et réguliers avec ses parents. Le règlement de ces difficultés s’avère difficile à défaut d’accords bilatéraux entre les pays concernés en cas d’échec de l’arrangement à l’amiable par l’intermédiaire d’auxiliaires de la justice et en particulier des avocats ayant des homologues correspondants à l’étranger

4. Déplacements et non-retours illicites

690.Les dispositions de l’article 11 de la Convention reçoivent peu d’application à Madagascar. Cependant, pour des raisons déjà exposées (mariages avec des étrangers, phénomènes d’immigration, intensification des rapports inter-îles dans la région de l’océan Indien), on peut craindre que les cas d’enlèvement d’enfants retirés de leur milieu familial par un parent quittant le pays pour l’étranger et refusant ensuite de restituer l’enfant ou tout au moins de lui permettre de maintenir des contacts avec le parent resté au pays se multiplient.

691.Lorsque la République de Madagascar a une convention bilatérale permettant l’exécution d’une décision judiciaire malgache sur un territoire étranger, le parent auquel l’enfant a été retiré contre sa volonté peut intenter une procédure qui sera ensuite, en cas de succès, soumise à la formalité d’ordre international de l’exequatur. Mais aucune convention de ce genre n’existe en dehors de la Convention de coopération judiciaire franco-malgache.

692.Aussi est-ce dans le domaine de la prévention que l’autorité publique malgache a déployé ses efforts. La surveillance des frontières est sévère lorsqu’un enfant quitte le territoire. La preuve du caractère licite de son départ est administrée grâce à un examen minutieux de son titre de voyage (passeport) et des liens qui l’unissent à la personne l’accompagnant. Cependant, ce contrôle n’est efficace qu’au départ des aéroports internationaux. En revanche, le contrôle est plus complexe lorsqu’il y a départ illicite par voie maritime: on pense par exemple aux liaisons maritimes par des moyens de fortune tels que les boutres entre Madagascar et certaines îles voisines comme Anjouan et les Comores.

5. Recouvrement des pensions alimentaires

693.Il a été exposé précédemment que, dès lors que le lien de filiation est établi entre un enfant et le parent sur lequel pèse la charge d’entretien, l’obligation alimentaire qui correspond au droit de l’enfant à l’entretien, l’éducation et à l’instruction a un caractère impératif: son exécution peut être obtenue en justice.

694.Dans le cas où les parents sont de nationalité malgache et résident à Madagascar, il faut distinguer plusieurs hypothèses:

Bien qu’en situation de crise, les parents sont toujours unis par les liens du mariage. Les articles 60 et 62 de l’ordonnance du 1er octobre 1962 relative au mariage intègrent le devoir d’entretien, d’éducation et d’instruction des enfants dans les «charges du mariage» auxquelles les époux contribuent selon leurs facultés respectives. Si l’un des époux ne remplit pas ses obligations, l’autre époux peut demander au juge, par requête aboutissant en cas de succès à une ordonnance, l’autorisation de saisie-arrêt à toucher dans la proportion de ses besoins tout ou partie des revenus de son conjoint. Si le conjoint qui agit ainsi en justice a la garde de fait des enfants, le montant de la saisie-arrêt comporte les moyens financiers nécessaires à l’entretien des enfants;

Dans le cas où l’époux récalcitrant séjourne à l’étranger, l’autre époux demandeur devra obtenir par la voie de l’exequatur le droit à l’exécution de l’ordonnance de saisie en territoire étranger. Mais il rencontrera la difficulté déjà citée: il faut qu’il existe entre les deux pays une convention d’entraide judiciaire, à moins cependant que les relations diplomatiques et consulaires entre les pays sont telles qu’une exécution à l’amiable puisse être obtenue.

Les deux parents ne sont pas unis par les liens du mariage. L’obligation alimentaire existe et son exécution peut être obtenue en justice. Mais, dans ce cas, le parent qui agit doit apporter la preuve du lien de filiation qui unit l’enfant au parent qui doit remplir son obligation alimentaire. Pour faciliter cette preuve, le législateur malgache, dans la loi no 63.022 du 20 novembre 1962 relative notamment à la filiation, a prévu divers modes d’établissement du lien de filiation. En fait, il s’agit surtout du père sur lequel pèse une présomption de paternité. La mère peut également intenter une action aboutissant à une déclaration judiciaire de paternité à l’encontre du père. Le lien est également établi lorsque le père a reconnu son enfant selon la loi.

695.Dans le cas où la mère est de nationalité malgache et le père de nationalité étrangère, mais ne sont pas unis par les liens du mariage, on peut distinguer deux hypothèses:

Si l’un et l’autre résident sur le territoire malgache, la mère peut intenter une action pour obtenir une pension alimentaire en faveur de l’enfant mais, dans ce cas, elle devra se conformer aux règles de droit international privé;

Si le parent sur lequel pèse l’obligation alimentaire réside à l’étranger et est lui‑même étranger, la mère peut toujours agir en rapportant la preuve de la paternité et en réclamant le paiement d’une pension alimentaire, mais conformément aux règles du droit international privé. En outre, le problème de l’existence ou non d’une convention de coopération judiciaire subsiste.

C. L’adoption

696.L’adoption figure parmi les mesures de remplacement appropriées pour les enfants privés de leurs parents à Madagascar.

697.La Convention accorde beaucoup d’attention à cette matière. Elle s’oriente vers l’intérêt supérieur de l’enfant et, à cette fin, formule des exigences. Selon les dispositions de l’article 21, elle prescrit que «les États doivent veiller à ce que l’adoption d’un enfant ne soit autorisée que par les autorités compétentes et qu’elle peut avoir lieu eu égard à la situation de l’enfant par rapport à ses père et mère, parents et représentants légaux».

698.Le processus d’adoption doit être régi par une réglementation minutieuse. Celle établie par le droit malgache est prévue par la loi no 63.022 du 22 novembre 1963 et le décret no 94.272 du 19 avril 1994.

699.La loi no 63.022 du 20 novembre 1963 prévoit deux formes d’adoption, l’adoption simple et l’adoption judiciaire qui diffèrent par les procédures d’accès et les conséquences.

1. L’adoption simple

700.C’est une survivance de la tradition et aussi un acte juridique créant un lien de parenté fictive resserrant un lien de parenté ou d’alliance existant déjà.

701.L’adoption simple crée entre l’adoptant et l’adopté une obligation d’aliment, de secours et d’assistance.

702.Elle fait l’objet d’une déclaration par devant l’officier de l’état civil et requiert au moins le consentement d’un parent de sang.

2. L’adoption judiciaire

703.Cette institution a pour effet de conférer à l’adopté la qualité d’enfant légitime. Elle est prononcée par une juridiction compétente et soumise à des conditions strictes, relatives au nombre d’enfants de l’adoptant, l’âge de l’adopté ainsi que celui de l’adoptant.

704.Les conditions édictées par la loi no 63.022 sont:

L’adoptant doit avoir au moins 30 ans et moins de trois enfants;

Sont adoptables les enfants âgés de moins de 10 ans, déjà rattachés à l’un des époux adoptants par un lien de parenté et les enfants abandonnés ou dont les père et mère sont inconnus ou décédés.

705.L’adoption simple présente des avantages par sa simplicité et sa souplesse; du fait qu’elle n’a pas de conditions strictes, elle peut concerner différentes catégories d’enfants. Cependant, elle ne bénéficie pas d’une grande faveur. Les familles restent fidèles à un «parrainage» informel qui permet à un membre de la famille sans charge, «ray aman-dreny» ou «mpiantoka» (garant), d’élever un jeune parent, «un taiza», dont les liens avec la famille d’origine sont intacts mais qui change de milieu. Les non‑initiés ne parviennent pas toujours à distinguer le parent de sang, le tuteur légal le «ray aman‑dreny», «mpiantoka» et les liens informels qui les unissent entre eux et à l’enfant.

706.La complexité et la rigueur des conditions requises pour l’adoption judiciaire n’incitent pas les intéressés à recourir à ce procédé et cela contribue à la réduction de son champ d’application, alors qu’il ne faut pas négliger l’importance de cette institution; d’abord, elle peut servir l’intérêt de l’enfant en lui donnant une vraie famille, ensuite celui de la famille nécessiteuse, nombreuse ou démunie, en allégeant les charges qui pèsent sur elle.

707.Il faut rappeler que l’adoption judiciaire crée entre l’adoptant et l’adopté un lien de filiation conférant à ce dernier la qualité d’enfant légitime (art. 54 de la loi du 20 novembre 1963).

708.L’adoption est prononcée en justice et le juge doit faire ressortir dans son jugement que l’adoption a lieu «pour de justes motifs et dans l’intérêt de l’adopté» (art. 53 de la loi précitée).

709.L’opinion publique s’était émue de l’existence de cette procédure dans son application à des enfants de nationalité malgache adoptés par des étrangers. Il faut constater que les appréhensions manifestées parfois de manière excessive ne sont pas justifiées par les statistiques. Le tableau ci‑dessous montre que le nombre des adoptions internationales est limité et que d’une année sur l’autre il n’a pas augmenté.

L’adoption judiciaire internationale

1997

Nationalité

Nombre

Française

89

Franco-allemande

1

Suisse

9

Belge

17

Américano-hollandaise

1

Allemande

2

Néerlandaise

1

Italienne

6

Franco-malgache

1

Espagnole

2

Belgo-canadienne

1

Comorienne

1

Franco-suisse

1

Franco-belge

1

Total

133

1998

Française

91

Chinoise

2

Suisse

7

Espagnole

7

Britannique

1

Belge

22

Italienne

4

Total

134

710.Le législateur malgache a d’ailleurs multiplié les précautions afin que l’adoption internationale ne connaisse pas de dérives. On peut craindre en effet des trafics d’enfants ou des comportements inconsidérés de mères abandonnant leurs enfants.

711.Le décret no 94.272 du 19 avril 1994 a créé une commission administrative chargée de procéder à l’examen préliminaire des décisions de demande d’adoption judiciaire d’enfants malgaches par des ressortissants étrangers. Elle est composée de représentants des ministères de la justice, des affaires étrangères, de l’intérieur, de la population.

712.Ses principales attributions sont les suivantes:

Centraliser toutes les demandes d’adoption judiciaire d’enfants malgaches par des ressortissants étrangers;

Vérifier si les pièces requises versées dans le dossier d’adoption judiciaire sont complètes et régulières;

Émettre une synthèse des avis donnés par les membres de la commission lors de la consultation tournante du dossier;

Trouver, le cas échéant, les enfants susceptibles d’être adoptés;

Établir à l’attention du Premier Ministre et des ministres intéressés un rapport annuel d’activités.

713.Par sa composition et ses attributions, la commission apparaît mieux placée que quiconque pour apprécier l’opportunité de la mesure prise.

714.La législation malgache satisfait en partie aux prescriptions de la Convention. Cependant, elle n’offre pas de garantie pour que les droits de l’enfant soient inspectés dans le pays où il va résider, car le contrôle des relations entre l’enfant et ses nouveaux parents (les adoptants) est limité à la période précédant l’adoption.

715.À l’issue de cette procédure administrative s’ouvre la procédure judiciaire qui est soumise aux règles du droit commun en matière de procédure civile: introduction par voie de requête par l’adoptant ou les deux époux adoptants, communication au ministère public qui peut faire procéder à une enquête par le juge des enfants.

716.La seule voie de recours ouverte aux parties est l’appel. Il y a obligation à l’adoptant ou aux adoptants de ne quitter le territoire qu’après l’expiration du délai d’appel d’un mois.

717.Dans divers milieux, on continue à s’inquiéter de ce que certains considèrent comme une procédure d’exportation d’enfants malgaches. Dans ces mêmes milieux, on se préoccupe également de l’intérêt supérieur de l’enfant après le prononcé de l’adoption − les liens de filiation avec la mère naturelle étant définitivement rompus et l’adoption judiciaire ne pouvant pour aucun motif être révoquée.

718.Une association malgache qui se préoccupe spécialement de servir de lien entre la famille du futur adopté et les futurs adoptants s’est donné pour tâche de s’assurer des conditions dans lesquelles l’enfant adopté est élevé dans sa nouvelle famille. Jusqu’à présent, il n’y pas été constaté d’échec dans les adoptions internationales.

719.Le problème le plus délicat se situe au niveau de la mère naturelle; la commission administrative comme le juge de l’adoption doivent s’assurer que la mère agit en toute connaissance de cause en abandonnant son enfant. L’intérêt supérieur de l’enfant doit être apprécié avec la plus grande lucidité. Si aucun échec d’adoption internationale n’a été constaté, en revanche, à plus d’une reprise, la mère naturelle s’est rétractée au dernier moment avant l’engagement de la procédure administrative ou même au cours de la procédure de jugement.

V. SANTÉ DE BASE ET BIEN-ÊTRE(art. 6, 23, 24, 26 et 27 de la Convention)

A. Généralités

720.Une importance particulière est donnée à ce chapitre consacré à la santé de l’enfant en général, et à son bien‑être. Cette importance est justifiée par l’ampleur des questions traitées, qui dépasse le cadre étroit de la situation sanitaire, et par la multiplicité des problèmes rencontrés durant la période de 1992 à 1998.

721.On analysera d’emblée les principales difficultés et les solutions qui y sont données ou qui sont en voie d’élaboration. On constate que, globalement, il faut distinguer une période difficile de 1992 à 1996 et une période d’espoir à partir de 1997.

1. Sources d’information

722.À l’occasion de la présentation du premier rapport, et des réponses que la République de Madagascar a présentées aux questions complémentaires posées par le Comité, il avait été fait état de la trop grande richesse des sources d’information, des confusions que cette abondance engendrait, du manque de cohérence des chiffres qui en résultait. La situation n’a pas fondamentalement changé, mais des documents nouveaux ont permis de produire des données fiables, facilité l’approche synthétique et contribué à donner plus de cohérence à l’étude de questions quelque peu hétéroclites et actualiser dans toute la mesure possible les données essentielles. Parmi les sources, il convient de citer:

L’enquête démographique et sanitaire (EDS 1997 du Ministère de la santé);

La brochure UNICEF intitulée: «La situation des enfants dans le monde 1998»;

Le Plan-cadre d’opération pour le programme de coopération 1996-2000 (accord entre la République de Madagascar et l’UNICEF);

Le rapport à mi‑parcours du programme UNICEF (1998);

Les rapports élaborés dans le cadre du projet MADIO (Institut national de la statistique);

État de la population mondiale 1998 (brochure concernant les activités du FNUAP à Madagascar).

723.On a également eu recours aux médias: on a pu constater en effet, durant les dernières années, un remarquable effort d’information dans les médias, qui ne se contentent pas de relater les événements ayant trait à la santé de la mère et de l’enfant, mais se préoccupent de plus en plus de livrer au grand public des éléments fondés sur une documentation fiable. Il faut, à cet égard, rendre hommage aux actions IEC (information, éducation, communication) des organismes spécialisés du système des Nations Unies et aux informations locales fournies par certaines ONG telles que Médecins sans frontières ou ENDA-océan Indien.

2. Évolution générale de la santé de la mère et de l’enfant

724.De 1992 à 1996, la République de Madagascar a traversé une période de mutations politiques et de difficultés économiques et financières qui n’ont pas toujours permis d’accorder l’attention requise aux problèmes sociaux.

725.Il importe ici de rappeler les données essentielles recueillies à diverses sources sur la situation de la santé de la mère et de l’enfant en 1991:

Taux de mortalité infantile: 94 pour 1 000 (données nationales sans doute sous‑évaluées);

Taux de mortalité maternelle: 570 pour 100 000 naissances vivantes (évaluation);

Cinquante-cinq pour cent des naissances sont assistées (8 % par un médecin);

Taux de couverture vaccinale: 4,5 %.

Au premier rang des motifs de consultations: infections respiratoires aiguës;

Au deuxième rang des motifs de consultations: diarrhée;

Au troisième rang des motifs de consultations: paludisme.

Prévalence de la tuberculose des enfants: 2,8 %;

Prévalence de la tuberculose des mères: 55 pour 100 000;

Prévalence du tétanos néo-natal: 1,5 % en milieu urbain, 9,3 % en milieu rural;

Prévalence contraceptive: 3,7 %;

Prévalence des MST: entre 10 et 30 % de la population (35 % des prostituées et 30 % des chauffeurs, dont 320 syphilis pour 200 000 habitants et 400 gonococcies pour 100 000 habitants;

Prévalence du sida, taux de séropositivité: 4 pour 10 000;

Prévalence de l’anémie: entre 38 et 50 % des femmes enceintes.

Taux d’utilisation de la TRO (traitement par réhydratation orale);

Taux d’accessibilité des centres de santé: 65 % (c’est-à-dire que seulement 65 % de la population vit à moins d’une heure de marche d’un centre de santé);

Une parturiente sur trois (35 %) a accouché dans un centre de soins de santé primaire (1998, milieu rural).

Part du budget consacrée à la santé: 4,5 %

726.Globalement, on constate peu d’améliorations durant cette période: les contraintes ont été importantes. Par exemple, les contraintes dans la mise en œuvre des programmes de population sont de plusieurs ordres:

D’ordre institutionnel: l’instabilité des structures et la forte mobilité des hommes ne permet pas de mener des actions approfondies et pérennes sur une longue durée car il faut reprendre la sensibilisation et la formation des ressources humaines;

La recherche ou l’affirmation d’un leadership a toujours constitué un obstacle dans la coordination et la mise en œuvre des programmes;

L’insuffisance des ressources accordées au secteur social rend fragile la mise en œuvre des programmes;

Les facteurs culturels et religieux ne sont pas toujours favorables au progrès social. D’autre part, le préjugé selonlequel la politique de population équivaut à la limitation des naissances reste vivace.

La politique de population vise à lever ces obstacles par des actions accrues de sensibilisation et plaidoyer auprès des différentes couches actrices ou bénéficiaires des programmes.

727.Dans les établissements de santé, la couverture sanitaire s’est constamment révélée insuffisante malgré les efforts déployés par le Ministère de la santé. L’approvisionnement en médicaments a été très irrégulier pour des raisons qui ont déjà été exposées précédemment: insuffisance des ressources financières, dégradation du réseau routier qui a multiplié le nombre de zones enclavées ou inaccessibles durant une grande partie de l’année, déficiences dans les ressources humaines tant en raison du gel du recrutement que de la démotivation au sein des établissements ou centres éloignés, mal équipés et isolés plusieurs mois par an.

728.Enfin, d’une manière générale, la pauvreté et la diminution du pouvoir d’achat dans les familles les plus démunies (zones suburbaines et zones rurales défavorisées) constituent des obstacles croissants à l’accès aux services sociaux et médicaux.

729.En 1996/1997, les effets du programme du Ministère de la santé ne se faisaient pas encore sentir: la décentralisation de la prise de décision n’était pas encore effective.

730.Néanmoins, grâce à des aides bilatérales ou des interventions d’ONG internationales, la réhabilitation de formateurs sanitaires a connu une nouvelle impulsion, quoique encore timide (centres hospitaliers régionaux de Toamasina et Toliara avec l’aide des coopérations française et japonaise, (hôpital pédiatrique d’Ambohimiandra à Antananarivo avec l’aide de l’ONG Appel, divers dispensaires professionnels ou privés).

731.La mise en place des comités de gestion des Unités de soins de santé primaires (USSP) a permis un début de participation communautaire.

732.Le recouvrement des frais médicaux a été mis en application à Toamasina et à Toliara. Ce problème sera abordé plus longuement mais, d’ores et déjà, on peut dire que les premières applications n’ont pas encore donné les résultats tangibles escomptés. En revanche, l’accès des malades indigents aux établissements sanitaires a connu une nette diminution.

733.La création de la centrale d’achats pharmaceutiques Sambatra a été un premier pas important pour assurer un meilleur approvisionnement en médications essentielles, mais l’impact réel doit encore être évalué.

3. Facteurs de stagnation ou de dégradation

734.Dans l’introduction du présent rapport, il a été déjà fait mention de difficultés telles que la dégradation des infrastructures routières, la diminution en qualité comme en quantité du personnel des établissements sanitaires, la dégradation des installations, l’insécurité dans les campagnes.

735.En revanche, il convient de revenir sur les données démographiques. Malgré la divergence des sources d’information, on peut estimer qu’ayant atteint 14 millions d’habitants dans la première moitié de l’année 1998, la République de Madagascar en comptera 19,4 millions en 1010 et 28,4 millions en 2025. La population aura donc doublé dans 23 ans si les chiffres suivants restent constants: un taux de natalité de 44 pour 1 000, un taux de mortalité infantile de 96 nourrissons pour 1 000 naissances vivantes. La population est jeune, avec 47 % de moins de 15 ans, et 3 % de plus de 65 ans. L’espérance de vie est en moyenne de 51 ans pour les hommes et de 53 ans pour les femmes. Les chiffres les plus communément avancés concernant la population urbaine et la population rurale sont, respectivement de 22 % et 78 %. Cependant, ces derniers chiffres doivent être recoupés et rectifiés concernant la population urbaine, qui est certainement supérieure à 35 % lorsqu’on y intègre la population suburbaine difficilement recensée. En revanche, on sait qu’en raison de l’insécurité et de la diminution des ressources naturelles due notamment à la destruction des forêts par le feu, la population rurale est très certainement inférieure à 65 %.

736.Il en résulte une permanence des besoins en soins dans les campagnes et une augmentation de la demande dans les agglomérations urbaines.

737.Il faut ensuite attirer l’attention sur l’augmentation des prix des médicaments et l’aggravation de la pauvreté dans les milieux les plus démunis. Pour ne prendre que l’exemple d’Antananarivo-ville, de loin la plus grosse agglomération attirant les populations rurales avoisinantes, les soins coûtent en moyenne 28 000 FMG dans les hôpitaux, 25 500 FMG dans les centres médicaux privés, 12 000 FMG chez les praticiens traditionnels et 2 800  FMG dans les centres de santé de base. Près de 20 % du revenu mensuel des ménages les plus pauvres est consacré à financer leurs dépenses de santé, alors que ce ratio n’est que de 4 % pour les ménages les plus riches. L’accès gratuit aux soins pour tous n’est donc que théorique.

738.Faisant suite aux trois projets impliquant le partage des coûts avec la population (pharmacies communautaires du projet d’appui aux districts de santé de Mahajanga, du projet FIB/Initiative de Bamako et pharmacies communautaires appuyées par la coopération suisse), la participation financière des usagers des pharmacies à gestion communautaire est actuellement en cours de généralisation au sein des centres de santé de base du secteur public des six provinces.

739.Par ailleurs, diverses ONG confessionnelles ou non ont, depuis longtemps, mis en place des systèmes de recouvrement des coûts. C’est également le cas de certains hôpitaux publics ayant un statut autonome (centres hospitaliers régionaux de Toamasina et de Toliara).

740.De fait, sous la pression des contraintes socioéconomiques, une mutation effective du financement du secteur est en cours, le principal élément nouveau étant la participation directe des ménages au financement des services et la participation de la communauté à la gestion des centres de santé de base. Quant à l’aide internationale au secteur de la santé, elle est passée de 1,5 dollar des États‑Unis par habitant en 1990 à 0,95 dollar (étude CRESI, 1995), alors que pour l’Afrique subsaharienne la moyenne se situe autour de 2,5 dollars par habitant BM, «Pour une meilleure santé en Afrique: la leçon de l’expérience», 1994).

741.Durant la période 1992-1997 on mit en route la politique des médicaments essentiels: adoption définitive de listes de médicaments essentiels sous générique par niveau et par catégorie de structures sanitaires et d’ordinogrammes standardisés et adaptés au profil épidémiologique de Madagascar. Parallèlement on mit en route une politique pharmaceutique nationale visant à mettre les médicaments essentiels à la disposition de tous les établissements sanitaires, améliorer leur accessibilité à l’ensemble de la population, permettre leur utilisation de manière rationnelle et instaurer un système adéquat de financement de la santé, notamment par le système de pharmacies communautaires (ou villageoises) et par le système de recouvrement des coûts.

742.La couverture sanitaire est insuffisante pour diverses raisons: quantitativement, alors que la population péri-urbaine des quartiers cibles les plus démunis augmente sous l’effet de deux facteurs − essor démographique non maîtrisé et arrivée de «mpiavy» (émigrants) venant des régions avoisinantes fuyant la pauvreté et l’insécurité − la couverture s’amenuise et peut être estimée à un médecin pour 16 000 habitants et un paramédical pour 6 000 habitants.

743.Certes, les cabinets privés se multiplient ainsi que les cliniques regroupant à temps plein ou à mi‑temps des médecins généralistes et des spécialistes. Mais ce phénomène ne concerne qu’une clientèle située dans les quartiers centraux ou résidentiels, les entreprises liées à ces établissements par une convention, ou les personnes pouvant se déplacer hors de la ville et faire face à des frais correspondant aux investissements en matériel et en équipement ainsi qu’à la qualification du personnel de ces établissements privés.

744.Qualitativement, l’aggravation de la situation budgétaire, tant au niveau de l’État que de la communauté a d’inévitables conséquences sur la dégradation des bâtiments, de l’équipement, des infrastructures, des installations sanitaires les plus sommaires. L’approvisionnement en médicaments est irrégulier, notoirement insuffisant, souvent nul (en dehors du paracétamol). La destination des dons en médicaments et en petites fournitures (coton, pansements, désinfectants) est imprécise.

745.Les autorités publiques s’efforcent d’orienter la politique sanitaire vers des soins au moins partiellement payants: une telle orientation n’est pas déraisonnable et elle est le fruit d’une réflexion suivie d’une action cohérente. Pourtant, il aurait fallu, pour rompre progressivement avec une politique des soins gratuits, héritée de ce qu’on a appelé l’«assistance médicale indigène», préparer et mettre en œuvre des mesures d’accompagnement aménageant des transitions, opérant un tri entre les établissements, sans discrimination, mais en tenant compte du niveau de vie de la population environnante: une surveillance énergique et une gestion rationnelle de l’utilisation des médicaments et de l’équipement (maintenance) doivent ou auraient dû être mises en place; la participation aux dépenses devrait procurer en contrepartie des structures d’accueil, même sommaires, mais propres, comportant le minimum compatible avec la dignité et l’état des malades. «Andriana ny marary» se plaît-on à dire dans la tradition des anciens médecins voués à un sacerdoce (mot à mot «le malade est un noble»), c’est-à-dire qu’il a droit au respect et à la sollicitude que son état nécessite. Le malade, surtout s’il est un enfant en situation difficile, a droit à un accueil humain, dans un milieu de remplacement répondant à la préoccupation de la Convention.

746.Une mesure d’accompagnement a été récemment prise; l’arrêté no 83/7/95 du 12 octobre 1995 prévoit la cession d’aliments non cuits aux patients hospitalisés dans les centres hospitaliers de district et en consultation dans les centres de base, et fixe les modalités de distribution de ces «intrants alimentaires». Cette alimentation quotidienne est composée de riz blanc, de féculents et de légumes. Les personnes qui en bénéficient sont les femmes accouchées et les enfants hospitalisés âgés de moins de 5 ans. Les aliments sont donnés crus et la préparation est assurée par la famille.

747.L’occasion ne nous a pas été donnée d’évaluer les effets réels de cette mesure, au demeurant opportune, associant la famille ou à défaut la collectivité. Il serait cependant utile de connaître les mesures administratives prises pour veiller à l’achat et à la distribution des aliments, à l’assistance donnée pour faciliter la préparation, compte tenu de ce que les familles sont déjà habituées à apporter les repas des malades.

748.Dans l’immédiat, on assiste à un recours croissant aux praticiens traditionnels: chiropracteur plus dangereux qu’efficaces, «renin-jaza» (matrones), «mpimasy», «mpitaiza», et fournisseurs de «fanafody gasy» (médications traditionnelles ou de «tambavy» (infusions).

749.Les soins ainsi administrés ne sont pas nécessairement nocifs et la médecine traditionnelle ne connaît pas que des échecs. Mais la recherche du gain, la pauvreté généralisée dans ces milieux et l’absence de scrupules des charlatans ont trop souvent été à l’origine d’atteintes irrémédiables (infections de plaies se transformant en gangrène, paralysie des membres inférieurs due à des manipulations maladroites, effets secondaires non connus, maladies infectieuses, traitement long et coûteux occultant la véritable affection, etc.).

750.Les plantes médicinales peuvent faire des miracles. Encore faut-il en maîtriser l’usage; celles qui sont en vente sous contrôle (Institut malgache de recherches appliquées, Centre national de recherche pharmaceutique) ne sont pas à la portée des plus démunis.

751.Aucune forme de répression pénale ne peut être envisagée, même si des infractions peuvent être caractérisées. Le remède réside dans une politique à deux volets:

Une maîtrise des ressources des plantes médicinales sous contrôle scientifique; à cet égard, l’arrêté interministériel no 4249 du 23 novembre 1976 réglementant l’exploitation, la commercialisation, la protection des plantes médicinales pourrait être remplacé par un texte tenant compte des structures administratives actuelles, des progrès scientifiques en la matière et de la double nécessité, d’une part de gérer l’exploitation et la transformation en y intégrant la dimension environnementale, d’autre part de sélectionner les produits susceptibles de contribuer réellement et à un coût raisonnable à l’approvisionnement de dépôts pharmaceutiques populaires;

Un programme d’appui à des structures mutualistes de santé en milieu urbain vulnérable; un programme de pharmacies communautaires villageoises pourrait, dans une mesure encore à évaluer, servir de référence.

752.On doit également mentionner les faiblesses du Programme santé, objet d’une coopération entre la République de Madagascar et l’UNICEF. Il faut préciser qu’il ne s’agit pas de dégradation, mais seulement de faiblesses relevées lors de l’examen à mi-parcours (1998) et qui ont fait l’objet de redressements requis.

753.À cet égard, on peut citer trois projets:

Projet FIB/IB

Faiblesse de la capacité des agents de santé et des agents communautaires d’animation;

Participation communautaire encore limitée au financement et à la gestion des services de santé;

L’approvisionnement en médicaments essentiels pose des problèmes en raison de l’incapacité de la centrale d’achats Salama à satisfaire les commandes;

Insuffisance de contrôle de qualité.

Projet SMI

Programme élargi de vaccination (PEV)

Relâchement des activités de supervision;

Absence de plan de mobilisation sociale pour les activités de routine du PEV;

Couverture vaccinale faible;

Absence de suivi des réunions périodiques des districts;

Maîtrise de la gestion du PEV encore insuffisante;

Contribution de l’État dans l’achat des vaccins encore insuffisante (6 %).

Initiative des hôpitaux amis des bébés (IHAB)

Manque de collaboration entre les directeurs des grands centres hospitaliers et les chefs des services maternité-pédiatrie;

Relâchement au niveau des «hôpitaux amis des bébés»;

Groupes de soutien difficile à mettre en place au niveau communautaire;

Difficulté à interdire des distributions ou vente à prix modéré des substituts de lait maternel;

Coût élevé de suivi des «hôpitaux amis des bébés».

Lutte contre les maladies diarrhéiques (LMD)

Insuffisance de suivi et de supervision;

Beaucoup d’agents de santé sont encore sceptiques sur l’efficacité de la thérapie de réhydratation orale;

Les activités de promotion de santé communautaire sont à leur début.

Programme Nutrition

Faible responsabilisation des responsables régionaux pour la mise en œuvre et le suivi du programme.

4. Facteurs d’espoir

754.Si la période de 1992 à 1996 a été marquée par une relative stagnation et, dans certaines régions affectées par des cataclysmes naturels, une diminution des ressources et la dégradation des infrastructures sanitaires, on peut formuler de solides espoirs pour la période actuelle. À cet égard, il convient de rappeler la permanence du cadre juridique et institutionnel du droit à la santé à Madagascar.

B. Le droit à la santé

1. Législation existante

Les déclarations de principe

755.La Convention énonce le droit à la vie et à la survie (art. 6), le droit à une vie pleine et décente des enfants handicapés (art. 23), le droit au meilleur état de santé possible, le droit d’avoir accès aux services médicaux et de rééducation (art. 24), le droit de bénéficier de la sécurité sociale, y compris les assurances sociales (art. 26), le droit à un niveau de vie suffisant pour permettre le développement physique, mental, spirituel, moral et social de l’enfant.

756.Dans l’article 24, on peut relever que le droit à la santé se traduit notamment par «la fourniture d’aliments nutritifs et d’eau potable compte tenu des dangers et des risques de pollution du milieu naturel» ainsi que par une information sur la salubrité de l’environnement. S’ajoutant à d’autres déclarations (Déclaration de Rio, Charte malgache de l’environnement), ces éléments sont des composantes d’un droit de l’enfant à un environnement sain, à une amélioration constante du cadre de la vie urbaine et à l’assainissement de la ville.

b) La Constitution

757.L’article 19 de la Constitution reconnaît à tous le droit à la protection de la santé. La mention «dès la conception» peut susciter des interrogations quant aux interruptions de grossesse et aux avortements.

758.L’article 21 donne à l’État un rôle actif de protection de la mère et de l’enfant par une législation et par des institutions sociales appropriées.

759.L’article 39 rappelle le devoir de respect et de protection de l’environnement par le citoyen et par l’État.

c) Le Code de la santé publique

760.La réglementation est relativement abondante et concerne notamment les attributions du Ministère de la santé, la création de services et d’institutions spécialisées, de comités divers, l’organisation des professions et le fonctionnement des ordres professionnels.

761.Le texte de base demeure, malgré son ancienneté, le Code de la santé publique (ordonnance no 62.072 du 29 septembre 1962), mis à jour en décembre 1997.

2. Mise en œuvre du droit à la santé

762.Les dispositions de l’article 24 de la Convention sont suffisamment explicites sur les actions à mener. Elles constituent la base des programmes du Gouvernement malgache:

Réduction de la mortalité parmi les nourrissons et les enfants;

Assistance médicale et soins de santé nécessaires à tous les enfants;

Priorité aux soins primaires;

Lutte contre la maladie et la malnutrition;

Politique de l’eau et protection contre les risques de pollution du milieu naturel;

Soins prénatals et postnatals aux mères;

Information à l’intention de tous les groupes sociaux sur la santé, la nutrition de l’enfant, les avantages de l’allaitement au sein, l’hygiène et la salubrité de l’environnement;

Prévention des accidents;

Développement des soins préventifs;

Planification familiale;

Lutte contre les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants;

Recours à la coopération internationale.

763.Si on se réfère notamment à l’étude démographique et sanitaire de 1997, on doit noter les progrès accomplis, mais également les contraintes concernant certaines maladies et affections et certains secteurs des programmes de santé.

Paludisme

764.La mise au point d’une politique nationale de lutte contre le paludisme constitue un point fort, mais les contraintes demeurent: développement de la résistance de Plasmodium falciparum à la chloroquine; coût élevé des médicaments qui restent hors de portée de la masse; difficulté de supervision et de gestion des dispensaires communautaires; insuffisance du budget.

Tuberculose et lèpre

765.Les points forts sont la mise au point d’une politique nationale de lutte contre la tuberculose, la dotation en médicaments antituberculeux par des aides extérieures (coopération française), la formation du personnel des CHU, CHR et dispensaires.

766.Les contraintes sont l’insuffisance des ressources pour la formation du personnel à tous les niveaux et les difficultés d’acheminement des médicaments vers les zones enclavées.

MST et sida

767.Le point fort est l’augmentation du nombre de personnes au courant.

768.Les contraintes sont la prévalence élevée des MST et le coût élevé, hors de portée de la masse, des médicaments.

Maladies diarrhéiques et infections respiratoires aiguës

769.Malgré la disponibilité relative en sachets de sels de réhydratation orale, leur utilisation est considérablement freinée par les restrictions budgétaires des hôpitaux et des dispensaires et par la difficulté d’acheminement vers les zones enclavées.

Planning familial

770.Les points forts sont la nette augmentation de la couverture des services de prestation; l’amélioration de la prise en charge des jeunes en matière d’IEC (information, éducation, communication); l’augmentation sensible du nombre des femmes au courant du planning familial et des méthodes modernes de contraception.

771.Il n’en reste pas moins que plus du quart des femmes en union (26 %) ont des besoins non satisfaits en matière de planning familial, soit pour la limitation des naissances (12 %), soit pour leur espacement (14 %). Au moment de l’enquête (1997), un peu moins d’une femme en union sur 10 utilisait une méthode moderne de contraception, ce qui traduit une réticence encore importante à l’égard de la contraception.

Suivi prénatal et assistance à l’accouchement

772.Le point fort est la nette augmentation du nombre des mères suivant les consultations prénatales.

773.Les contraintes sont l’existence de disparités encore trop grandes entre les villes et le milieu rural, d’une part, et le niveau d’instruction, d’autre part. Cela semble lié à des problèmes d’accessibilité aux centres de santé et à l’insuffisance de personnel qualifié suite au gel du recrutement.

Nutrition

774.Les points forts sont les efforts entrepris pour prôner l’allaitement maternel, dans les «hôpitaux amis des bébés», notamment; le décret no 96.322 portant réglementation de la commercialisation des substituts du lait maternel; l’aide et la collaboration des organismes internationaux et des ONG au projet SECALINE (Sécurité alimentaire et nutrition élargie).

775.La contrainte est la pauvreté grandissante de la population alors que le coût des denrées alimentaires ne cesse d’augmenter.

Information, éducation, communication

776.Le point fort est que tous les moyens actuellement disponibles (médias écrits, parlés, campagnes de masse, etc.) ont été effectivement utilisés, que ce soit pour la lutte contre les principales causes de mortalité et de morbidité, la nutrition ou le planning familial.

3. Mesures récentes

777.Le décret no 13.697 du 23 mars 1997 réorganise le système de santé et fait ressortir les objectifs de santé pour 2000.

778.Les paragraphes qui suivent donnent les éléments essentiels des objectifs, stratégies et résultats attendus en matière de soins de santé primaires et de santé reproductive. Ils permettent de mesurer les efforts déployés, alors que par ailleurs le contexte socioéconomique n’est pas favorable.

a) Objectifs

779.·Réduire les niveaux de morbidité et de mortalité, en particulier ceux des mères et des enfants, de 2 % d’ici 2000;

Planifier la fécondité afin de parvenir à un taux d’accroissement de la population compatible avec la réalisation des objectifs socioéconomiques de la nation.

b) Stratégies

Soins de santé primaires et morbidité

780.·Extension et renforcement des structures et programmes sanitaires de base spécialisés;

Développement de programmes spéciaux d’éducation sanitaire;

Renforcement des mesures de contrôle et de lutte contre les maladies transmissibles.

Santé reproductive

781.·Élargissement de la portée des services de santé reproductive (y compris la santé reproductive des adolescents);

Renforcement de la coordination du Programme national de santé reproductive;

Renforcement de la lutte contre les MST/sida.

c) Résultats attendus

En matière de soins de santé primaires

782.·Réduction du taux de mortalité infantile (TMI), du taux de mortalité maternelle (TMM) et du taux de mortalité infanto‑juvénile (TMIJ);

Réhabilitation de 100 centres de formation sanitaire (CFS);

Augmentation de la couverture vaccinale à 80 % (20 000 enfants âgés de moins de 12 mois seront ciblés par an);

Renforcement des capacités de 100 CFS en prévention et traitement des infections respiratoires aiguës et de la maladie diarrhéique;

Renforcement de la participation des ONG dans les programmes de soins de santé primaires;

Participation communautaire dans les programmes de soins de santé primaires et prise en charge des enfants en danger;

Réduction de l’incidence de morbidité et de mortalité des élèves et étudiants par la prise en charge de leur propre santé;

Prise en charge des personnes handicapées motrices et soutien des ONG opérant dans ce domaine;

Renforcement du système de diagnostic rapide et chimiothérapie précoce du paludisme;

Lutte contre les vecteurs de transmission du paludisme;

Renforcement de la participation communautaire pour le traitement du paludisme;

Renforcement de la recherche et de la surveillance épidémiologique de la tuberculose;

Prévention et traitement de la tuberculose;

Couverture de 75 % des zones exposées à la peste;

Participation communautaire à la lutte antivectorielle;

Mise en place de réseaux de surveillance épidémiologique de la peste;

Implication progressive du PCT dans tous les secteurs médicaux;

Prévention de nouveaux cas de lèpre;

Examen de la population en contact avec les cas enregistrés de lèpre.

En matière de santé reproductive

783.·Révision et adaptation des textes de santé reproductive;

Réhabilitation des 400 CFS pour la prestation de services de planning familial;

Intégration du planning familial dans les 400 CFS;

Promotion de la santé reproductive des adolescentes;

Accroissement du taux de prévalence de la contraception à 14 % en 2000;

Sensibilisation des leaders en faveur de la santé reproductive;

Prévention et traitement de l’infécondité;

Plaidoyer sur la santé reproductive, en particulier la PEN;

Implication des communautés religieuses dans le programme de santé reproductive;

Amélioration du système de planification sanitaire;

Renforcement du système d’information en matière de santé reproductive;

Renforcement des capacités en matière de gestion et suivi sanitaires;

Développement des actions de prévention de la transmission des MST/sida et renforcement de la capacité de dépistage et de surveillance transfusionnelle;

Développement de la recherche fondamentale sur les MST/sida;

Réduction des incidences des MST/sida;

Prise en charge du sida.

d) Initiative de Bamako

784.On a jugé utile de reproduire ci‑après le texte intégral d’un communiqué de presse émanant du Ministère de la santé et concernant l’Initiative de Bamako, dont l’objectif est la santé pour tous à l’horizon 2000 et l’un des principes le partage des coûts de santé.

785.«En 1987 s’est tenu à Bamako, capitale du Mali, le trente‑septième Comité régional de l’OMS. Les participants à cette réunion (c’est‑à‑dire les ministres de la santé de la région subsaharienne, y compris malgache) ont reconnu la détérioration de la qualité de service à tous les niveaux du système de santé, caractérisée par la pénurie des médicaments dans les établissements sanitaires, l’état de délabrement avancé des infrastructures et le manque de motivation des agents de santé qui sont déjà en nombre insuffisant.

Cela est dû au manque de moyens, conjugué à une gestion inefficace des ressources.

Face à cet état, les participants ont lancé l’Initiative de Bamako, dont l’objectif est «Santé pour tous en l’an 2000».

Pour atteindre cet objectif, il est primordial de revitaliser les systèmes de santé de district pour assurer la relance des soins de santé primaires et contribuer à la réduction de la mortalité maternelle et infantile.

L’Initiative de Bamako a comme principes:

L’accès et la disponibilité d’un paquet minimum de services de santé comprenant des médicaments essentiels;

Le partage des coûts;

L’implication des communautés dans la gestion des services de santé.

Madagascar a été l’un des premiers pays à se lancer dans cette voie du changement. L’Initiative de Bamako a été appliquée sous différentes formes. De 1992 à 1997, des centres de santé de base, sous l’inspiration des responsables communautaires sanitaires, ont institué le système mutuel, c’est‑à‑dire de cotisation annuelle au cours des périodes de récolte. La communauté décide du taux de cotisation annuelle: c’est le système de pharmacie communautaire ou Phacom. Au début, on a enregistré 365 Phacom, dont 240 fonctionnent actuellement dans les provinces d’Antananarivo et de Fianarantsoa.

Ce système de cotisation annuelle n’a pas eu les effets escomptés car, dans certains centres de santé, il peut y avoir rupture de stock de médicaments. De plus, les adhérents peuvent ne pas tomber malades en une année, si bien qu’ils ne sont pas motivés l’année suivante.

En parallèle à ce système de cotisation annuelle, les responsables sanitaires ont institué le FIB IB 1993. Le traitement se paie par épisode de maladie. Un ordinogramme est mis à la disposition des agents de santé. Les patients paient tout le traitement avec ce nouveau système; 181 centres de santé l’appliquent jusqu’à présent.

Malgré ces changements, les hauts responsables sanitaires malgaches ont constaté que beaucoup reste à faire au niveau de la procédure de la mise en place de ces systèmes; ce sont aussi des facteurs d’exclusion; d’autre part, le taux de couverture est faible dans le pays.

À ce rythme, la revitalisation à 100 % de tous les centres de santé ne sera réalisée qu’au bout de 20 ans. L’objectif «Santé pour tous en l’an 2000» ne sera donc pas atteint.

Dans un souci d’équité, de bonne gouvernance et pour un meilleur accès de la majorité de la population aux soins de santé primaires, le Ministère de la santé a mis en place un nouveau système dénommé «Pharmacie à gestion communautaire» basé sur la participation financière des usagers. À la suite d’une enquête effectuée à Marovoay Majunga en février 1998, il apparaît que la pharmacie à gestion communautaire a été généralisée à 100 % dans toutes les formations sanitaires. Le résultat est plus que satisfaisant: le taux de fréquentation des formations sanitaires publiques a augmenté, les médicaments sont disponibles, les collectivités territoriales décentralisées et la communauté s’impliquent dans la gestion sanitaire, la population est satisfaite.

Néanmoins, il faut encore responsabiliser tout le monde car la pharmacie à gestion communautaire suppose cogestion, cofinancement, c’est‑à‑dire un travail d’équipe entre le personnel de santé, la communauté et l’État. La sensibilisation est donc de mise pour que tous travaillent main dans la main pour l’amélioration de la gestion des formations sanitaires et celle de la santé en général.

Au vu des expériences antérieures, la disponibilité constante des médicaments dans les formations sanitaires à Madagascar tout au long de l’année est difficile. En effet, l’État ne peut pas subvenir à toutes les dépenses de santé, si bien que le partage des coûts entre l’État et la communauté (usagers) est inévitable pour revitaliser le système de santé à Madagascar.

e) Programme de coopération avec l’UNICEF

786.Cette coopération a déjà été évoquée à plusieurs reprises, mais il a semblé utile de rappeler les objectifs atteints en 1998 par le programme de santé:

132 centres de santé de base (CSB) revitalisés;

Augmentation de la couverture en soins: le taux d’utilisation des soins curatifs est de 35 % en moyenne, et il atteint 80 à 100 % dans certains CSB; le taux de couverture effective du programme élargi de vaccination est de 50 % en moyenne;

La vitalité financière du mécanisme de financement communautaire est établie: la marge bénéficiaire moyenne des CSB est de 1,61; le niveau de recouvrement des dépenses incompressibles des CSB est de 1,38; une tentative d’harmonisation des approches des participations/financements communautaires avec GTZ (coopération allemande) est en cours;

Amélioration de la couverture en chaîne du froid (54 % en 1996, 65 % en 1997);

Couverture avoisinant 100 % pour les journées de vaccination de 1997;

50 hôpitaux devenus «amis des bébés»;

Amélioration du taux d’allaitement maternel exclusif (0‑3 mois): 47,7 % (EDS 1992) à 61 % (EDS 1997).

4. Orientations générales de la politique de santé

787.Le décret no 98.145 du 12 février 1998 fixe les orientations générales de la politique de santé. Celles‑ci seront étudiées selon le plan suivant: 1) les enfants handicapés; 2) santé et services médicaux; 3) morbidité et mortalité; 4) immunisation, vaccination; 5) malnutrition.

1. Les enfants handicapés (art. 23)

a) Considérations générales

788.Définition du «handicap»: «Est considérée comme handicapée toute personne qui présente une déficience congénitale ou acquise dans ses capacités physiques ou mentales et qui l’empêche d’effectuer personnellement tout ou partie des nécessités de la vie individuelle ou sociale.» (Les enfants handicapés et l’école − Des enquêtes pour approcher la réalité à Madagascar, Handicap International, 1998).

789.On distingue trois types de handicap:

Handicaps physiques ou moteurs: séquelles de poliomyélite, pied‑bot, malformations congénitales et acquises, ainsi qu’infirmités motrices cérébrales;

Handicaps mentaux: réductions des capacités intellectuelles suite à une anomalie génétique, à un accident ou à une maladie grave. On classe dans ce groupe les autistes, les trisomiques et les «retardés mentaux»;

Handicaps sensoriels: aveugles, malvoyants, sourds et malentendants.

790.Les handicaps physiques sont le plus fréquemment rencontrés et répertoriés, car ils sont facilement visibles. Par contre, les handicaps mentaux et sensoriels sont moins fréquents car les familles cachent leurs malades.

791.D’autre part, il y a lieu de noter qu’aucune différence n’est faite dans la prise en charge d’un adulte ou d’un enfant handicapé, ce qui explique que nous ne disposions pas du chiffre exact des enfants handicapés à Madagascar.

792.Différents organismes interviennent en faveur des handicapés, le plus souvent leurs associations, des structures de soutien, des maisons de charité et des établissements publics. L’assistance concerne les activités culturelles et économiques, les activités sportives, l’éducation et la formation professionnelle, la prise en charge des soins, des frais d’hospitalisation, la kinésithérapie et les appareillages.

b)Participation à la vie sociale

Intégration dans le système éducatif

793.Quatre‑vingt‑dix pour cent des enfants handicapés ne sont pas scolarisés. La majorité des enfants handicapés scolarisés sont dans le cycle primaire. La durée de leur scolarisation est faible par rapport à celle des autres enfants.

794.D’une façon générale, les handicapés physiques suivent le circuit scolaire normal du système éducatif et n’ont aucune difficulté à s’intégrer socialement aux autres enfants. Leur handicap n’entrave pas ou peu leur scolarité en dehors des problèmes d’accessibilité et de déplacement. En outre, ils sont bien acceptés par la communauté scolaire (élèves, parents, instituteurs). Par contre, les enfants handicapés mentaux ne sont intégrés dans le système éducatif que s’ils ne sont pas agressifs. Sinon, ils sont admis dans des établissements spécialisés. Les handicapés sensoriels sont également très peu scolarisés.

795.Les établissements spécialisés sont peu nombreux et accueillent un nombre limité d’enfants. Les enfants qui y sont inscrits attendent parfois deux à trois ans avant de pouvoir y entrer faute de places disponibles. Dans ces centres spécialisés, l’intégration se fait à travers un suivi scolaire et des soins rapprochés, une éducation spécialisée et une formation professionnelle des enfants, ou à travers un soutien socioprofessionnel des enfants et de leur famille. Les éducateurs suivent une formation en pédagogie spéciale.

Réinsertion sociale

796.La réinsertion sociale des enfants handicapés se fait par le biais de la vie associative où ils bénéficient d’un soutien psychopédagogique et psychologique à travers des activités culturelles, spirituelles et économiques (agriculture, couture, tricot, vannerie, élevage, scoutisme, danse, chorale en langage des signes, musique, etc.), des activités sportives (ping‑pong, volley‑ball, football, handball, pétanque, natation, etc.) et des formations professionnalisantes et la création d’activités génératrices de revenus.

797.En outre, les familles de ces enfants sont orientées vers des centres sociaux ou des ONG qui peuvent les aider à comprendre le handicap de leur enfant et leur apporter un soutien pour la prise en charge financière et psychologique.

c) Droit aux soins spécifiques et promotion des activités

798.Les soins offerts aux enfants handicapés ne sont pas gratuits. Un système de recouvrement des coûts a été mis en vigueur. Une participation financière de la famille est exigée, chaque cas faisant l’objet d’une étude. Dans le cas où la famille ne peut pas participer au coût, elle est orientée vers une ONG ou une structure de soutien qui aide les familles dans l’achat d’appareils orthopédiques, pour la prise en charge des soins ou des hospitalisations, de la kinésithérapie ou de la rééducation fonctionnelle.

799.Afin que les handicapés puissent bénéficier d’une prise en charge adéquate à tous les niveaux, différentes formations sont offertes:

Au personnel médical, aux kinésithérapeutes et aux appareilleurs: formation sur les soins médicaux à apporter, les appareillages et la rééducation, mais aussi les techniques de sensibilisation, le but étant que le personnel soignant puisse prendre en charge médicalement les handicapés tout en sensibilisant la famille et l’entourage de l’enfant sur son handicap;

Aux éducateurs sportifs afin qu’ils puissent encadrer les enfants au cours des activités sportives spécialisées pour personnes handicapées;

Aux enseignants des écoles primaires dans le cadre d’une collaboration entre Handicap International Madagascar, le Ministère de l’éducation de base et l’UNICEF.

800.La sensibilisation des enfants, des parents et des responsables pédagogiques (professeurs et éducateurs) ainsi que de tout un chacun est indispensable pour une intégration et une réinsertion sociales des handicapés, des enfants en particulier.

801.Plusieurs projets ont été mis en place. On peut citer les spectacles de marionnettes initiés par l’ONG Handicap International Madagascar et dont l’animation a été confiée à AED/ACTION (anciens étudiants en didactique et communication en sciences/action). Ces spectacles ont été offerts à Antananarivo dans différentes écoles primaires publiques, au centre Akamasoa‑Ambohimahitsy, dans les régions de Mahajanga, de Toamasina, de Toliana et de Tolagnaro. Depuis 1995, la Journée mondiale des handicapés a permis de faire la promotion d’un groupe de chanteurs handicapés, qui fait la tournée des six provinces de Madagascar. Ce groupe interprète des chansons d’auteurs mais présente également des œuvres et des compositions personnelles.

802.D’autre part, il y a lieu de noter l’existence d’un journal (Handi Journal) créé par l’Association culturelle des handicapés de Madagascar (ACHaM).

803.Il faut également rappeler qu’un arrêté (no 6363/93 du 10 décembre 1993) a réglementé le déplacement des aveugles qui se servent de cannes blanches. Les porteurs, fussent‑ils des mineurs accompagnés, bénéficient d’une priorité à la circulation au même titre que les conducteurs de véhicules prioritaires en action.

d) Action législative

804.La loi no 97.044 sur les personnes handicapées a été promulguée en 1998. Les dispositions essentielles de cette loi sont reproduites ci‑dessous. En raison de son caractère récent et d’une mise en œuvre encore à ses débuts, il n’existe qu’un centre national de rééducation motrice pour les enfants handicapés physiques, à Antsirabe. La décentralisation de cette structure est en cours d’étude.

Titre premier

Définition et champs d’application

Art. 1er.La présente loi a pour objet d’assurer à toutes les personnes handicapées la reconnaissance, la jouissance et l’exercice par elles‑mêmes ou par d’autres personnes de tous les droits reconnus à tous les citoyens sans distinction.

Art. 2.L’expression «personnes handicapées» désigne toute personne qui présente une déficience congénitale ou acquise dans ses capacités physiques ou mentales et qui l’empêche d’assurer personnellement tout ou partie des nécessités d’une vie individuelle ou sociale normale.

Art. 3.La personne handicapée jouit et exerce, soit personnellement, soit par l’intermédiaire d’un tiers, les droits reconnus à tous les citoyens par la Constitution, la Déclaration des droits des personnes handicapées proclamée par l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies, les conventions internationales ratifiées par la République de Madagascar.

Titre II

Des droits des personnes handicapées

Chapitre premier

Du droit à la santé

Art. 4.Toute personne handicapée a le droit de jouir et de bénéficier des services médicaux et de la rééducation spécialisée.

Toute personne handicapée a droit à des soins de santé physique et mentale de qualité.

Art. 5.L’État doit prendre des mesures de prévention nécessaires contre les maladies et des mesures destinées à assurer l’échange et la circulation des informations sur les soins de santé préventifs.

Art. 6.L’État doit favoriser:

L’accès des personnes handicapées aux soins de santé nécessaires, à un traitement médical, psychologique et fonctionnel adéquats, et aux appareils de prothèse et d’orthèse;

La rééducation fonctionnelle et motrice des personnes handicapées.

Art. 7.Toute personne handicapée doit disposer d’un dossier médical détaillé, mis à jour régulièrement.

Art. 8.L’État doit favoriser la création et l’extension des hôpitaux et des hospices et services d’accueil spécial pour les personnes lourdement handicapées et les personnes handicapées n’ayant plus de membre de famille vivant.

Chapitre II

Du droit à l’éducation

Art. 9.L’enfant handicapé a le droit d’apprendre tout autant qu’un enfant normal.

En concertation avec les organismes non gouvernementaux, l’État assure à tout enfant handicapé l’accès à une éducation adéquate, à des activités récréatives pouvant garantir son épanouissement personnel, y compris dans le domaine culturel et spirituel.

2. Santé et services médicaux

805.Dans l’introduction du présent rapport, des informations ont été données sur la politique de la santé, l’accès aux services médicaux et les disparités régionales. Aussi les paragraphes qui suivent n’apporteront‑ils qu’un complément d’information.

a) Accès aux services médicaux

806.Dans le cadre de la décentralisation du système de santé, une organisation fondée sur les districts sanitaires, résultant de l’éclatement des anciennes circonscriptions médicales, a été mise en place. Les établissements de soins sont répartis en trois catégories: les centres de santé de base, les centres de référence de premier recours et les centres de référence de deuxième recours.

Centres de santé de base

807.En fait, l’appellation «CSB» regroupe une série d’établissements sanitaires qui évoluent vers une harmonisation de leur organisation et des prestations qu’ils assurent à la population.

808.Environ 1 900 CSB fonctionnent sous l’autorité du Ministère de la santé, auxquels il faut ajouter une centaine d’infirmeries et de postes de santé de l’armée, 12 centres de santé des organisations sanitaires interentreprises, huit dispensaires d’entreprise et une centaine de centres de santé à but non lucratif, soit environ 2 100 centres de santé de base ou assimilés.

809.Les CSB se caractérisent par la faiblesse du taux de fréquentation, l’état de délabrement avancé des bâtiments, l’insuffisance, l’inadéquation et la vétusté des équipements, la quasi permanente rupture des stocks de médicaments essentiels, l’insuffisance du budget de fonctionnement alloué par l’État et la faible performance du personnel.

Centres de référence de premier recours

810.Ces centres comptent 20 ex‑hôpitaux médico‑chirurgicaux; 50 ex‑hôpitaux secondaires simples des anciennes circonscriptions médicales; 8 hôpitaux du secteur privé non lucratif et 4 cliniques privées. Ils assurent, selon le plateau technique dont ils disposent, la prise en charge des cas médicaux référés des interventions chirurgicales courantes.

Centres de référence de deuxième recours

811.Ces centres comprennent les centres hospitaliers régionaux (CHR) et les centres hospitaliers universitaires (CHU).

812.Dans le domaine des ressources humaines, on peut noter les chiffres suivants:

Le nombre total des médecins (toutes catégories confondues) est estimé à 4 500, celui des pharmaciens à 220 et celui des chirurgiens‑dentistes à 320;

24 % des médecins servent dans le secteur public, contre 34 % dans le secteur privé;

42 % sont au chômage ou en situation de sous‑emploi;

Le nombre de sages‑femmes est de 1 635, celui des infirmiers de 3 124 et celui des aides‑sanitaires de 1 282.

813.Ces chiffres ont été fournis par une étude CREDES de 1995, qui précisait également qu’environ 65 % de la population vivaient à moins de 5 km d’un centre de soins.

814.Une étude réalisée en 1995 donnait les pourcentages suivants d’utilisation comparée des services de santé:

Services sanitaires publics: 44 %;

Automédication: 26 %;

Médecin privé: 17 %;

Formation sanitaire parapublique: 9 %;

Guérisseur: 2 %;

Formation sanitaire privée: 2 %.

b) Évacuations sanitaires

815.Le décret no 95.611, entré en application en novembre 1995, a précisé une réglementation antérieure et porte réglementation des évacuations sanitaires à l’extérieur. L’évacuation sanitaire n’est prévue que dans les cas graves nécessitant des soins et un équipement que les établissements sanitaires de Madagascar ne peuvent administrer ou ne possèdent pas.

816.Une commission interministérielle donne son avis en s’appuyant sur les certificats médicaux et les avis des spécialistes et juge de la nécessité ou non d’un médecin accompagnateur ou d’une personne accompagnatrice dans le cas d’un enfant de 7 ans ou moins.

c) Disparités régionales

817.Les causes générales des disparités régionales ont été étudiées précédemment, mais il a paru utile de fournir des renseignements plus détaillés, émanant de sources diverses et qui n’ont pas été recueillis à la même époque.

Antananarivo

818.La région d’Antananarivo, avec la capitale, est celle où les conditions et le niveau des indicateurs de santé sont les meilleurs du pays, même si des efforts méritent d’être poursuivis.

819.Ainsi, en matière de soins de santé primaires, le taux de mortalité infantile est de 80 pour 1 000, et de mortalité infanto‑juvénile de 152 pour 1 000 (respectivement, 73,3 pour 1 000 et 152 pour 1 000 pour la ville d’Antananarivo). On observe une forte concentration du personnel médical au niveau de la capitale, où les formations sanitaires sont en meilleur état et bénéficient du maximum de moyens matériels. La couverture vaccinale des enfants est plus élevée, avec 62 % pour toutes les vaccinations en 1992 selon l’EDS, confirmé par l’enquête par grappes multiples INSTAT/UNICEF de 1995 [62,6 % à 63 % en 1997 (EDS 1997)].

820.En matière de santé reproductive, selon l’EDS, en 1992, l’ISF était de 5,7 pour la région, avec 3,2 pour la capitale et, respectivement, un taux de prévalence contraceptif global pour les femmes en union de 28,7 % et 51 %, contre un taux de prévalence pour la contraception moderne de 9,4 % et 21 %. L’âge médian à la première union et au premier rapport sexuel est supérieur aux moyennes nationales (19,5 ans et 18,3 ans).

821.Pour les soins prénatals, 75,8 % des naissances bénéficient de l’assistance d’une sage‑femme pendant la grossesse, 15,1 % de celle d’un médecin, alors que les moyennes nationales sont, respectivement, de 68,5 % et 9,7 %.

822.Pour le lieu d’accouchement, 50 % des naissances ont lieu dans un établissement sanitaire contre une moyenne nationale de 45 %. Quant à l’assistance lors de l’accouchement, 74,5 % des naissances ont lieu en présence d’un personnel de santé et 18 % en présence d’une accoucheuse traditionnelle contre des moyennes nationales respectives de 57 % et 31 % avec, pour la capacité, des taux respectifs de 92 % et 7 %, ce qui indique des écarts de couverture sanitaire entre la capitale et le reste de la région.

823.Pour les soins postnatals, si l’on se réfère à la fièvre, 67 % des enfants fiévreux de la région d’Antananarivo bénéficient de visites sanitaires (70 % pour la capitale) contre une moyenne nationale de 46,7 %.

824.En matière d’accès (distance) aux services de santé materno‑infantile/planification familiale, les distances sont moindres au niveau de la région d’Antananarivo (60 % des femmes parcourent moins de 5 km pour des services de PF, contre 25 % pour Mahajanga), ce qui montre bien la meilleure couverture en soins de santé de la région, mais avec des disparités intrarégionales.

825.Néanmoins, dans la région, on observe une flambée des MST pour des raisons de libertinage sexuel, de prolifération incontrôlée des vidéothèques de quartier, d’insuffisance des moyens de dépistage et de contrôle, sans oublier l’augmentation de la prostitution sous toutes ses formes.

Fianarantsoa

826.Les problèmes sanitaires sont graves. Les indicateurs régionaux de mortalité, selon l’EDS, sont les plus élevés du pays: le taux de mortalité est de 117 pour 1 000 contre une moyenne nationale de 93 pour 1 000 et le taux de mortalité infanto‑juvénile de 196 pour 1 000, contre 165 pour 1 000.

827.La couverture vaccinale est en dessous de la moyenne nationale, à 36 % (toutes vaccinations confondues) pour les enfants de 12 à 13 mois, également confirmée par l’enquête INSTAT/UNICEF (35 %).

828.En matière de santé reproductive, l’ISF de la région est le plus élevé du pays avec 6,75, selon l’EDS de 1992. L’utilisation de la contraception est de 10,3 % pour les femmes en union (toutes méthodes confondues) et de 1,5 % pour les méthodes modernes, soit le taux le plus faible du pays. L’âge médian des femmes au premier rapport sexuel est de 16,3 ans, inférieur à la moyenne nationale, ce qui accentue le risque de grossesse des adolescentes et la prévalence des MST.

829.Fianarantsoa est la région du pays où les accoucheuses traditionnelles sont les plus utilisées pour les soins prénatals (16 %), avec, naturellement, l’assistance médicale pour les mêmes soins les plus faibles (68 % contre 78 %), ce qui peut accroître le risque de mortalité maternelle si ces accoucheuses n’exercent pas dans un environnement d’hygiène.

830.C’est également la région où l’accouchement à domicile est le plus élevé (68,4 %); en contrepartie, on note une faible fréquentation des établissements sanitaires pour les accouchements (31,3 % contre 45 % au niveau national); 52 % des naissances sont assistées par les accoucheuses traditionnelles.

831.Pour les soins postnatals, le taux de prévalence de la fièvre chez les enfants de moins de 5 ans est de 31 %. Le taux des visites en milieu hospitalier est de 48 %. La prévalence des maladies respiratoires, diarrhéiques et du paludisme est élevée.

Toamasina

832.Le taux de mortalité infantile est, après la région d’Antananarivo, le moins élevé (104 pour 1 000), mais le taux de mortalité infanto‑juvénile est relativement élevé (195 pour 1 000).

833.En termes de soins de santé primaires, on observe, à l’image du pays, une forte prévalence du paludisme, des maladies diarrhéiques, respiratoires, cutanées et intestinales et une recrudescence de la tuberculose.

834.Le faritany compte 40 % des établissements sanitaires du pays (1 CHR, 4 CHDII, 13 CHDI, 7 CSMI, 373 CSB, dont 20 non fonctionnels).

835.En matière de santé reproductive, l’âge médian au premier rapport sexuel et à la première union est, respectivement, de 17 ans et de 19,4 ans.

836.L’ISF est de 5,69, comme celui de la région d’Antananarivo, où les niveaux sont les plus faibles du pays.

837.Dans le faritany de Toamasina, l’utilisation des accoucheuses traditionnelles est la plus faible après Antananarivo, soit 5,3 % pour les soins prénatals et 22,1 % pour l’assistance à l’accouchement. Pour le lieu d’accouchement, l’établissement sanitaire et le domicile sont au coude à coude.

838.Pour la couverture vaccinale, le niveau est de 46 % selon l’EDS de 1992 et l’INSTAT/UNICEF (1995), de 42 % en 1997 (EDS/1997).

Mahajanga

839.Les indicateurs de mortalité et de santé indiquent que la région de Mahajanga avec celle d’Antananarivo a un taux de mortalité infantile de 106,8 pour 1 000. On observe un état de délabrement des postes de santé et une faible fréquentation de ces services. La raison essentielle en est la qualité souvent déplorable (accueil notamment, accessibilité difficile et manque de suivi et de moyens des établissements sanitaires).

840.La médecine traditionnelle y est très développée, notamment sur l’axe Antsohihy/Port‑Bergé/Mandritsara.

841.En matière de santé reproductive, l’ISF, en 1992, se situait à 6,36 (tout comme à Antsiranana, c’est‑à‑dire le plus élevé après Fianarantsoa. On observe une forte prévalence des MST. En 1993, 12 % des femmes enceintes en consultation prénatale étaient atteintes de syphilis.

842.On observe un accroissement de l’utilisation des préservatifs, voire une distribution gratuite de condoms au dispensaire urbain à cause du sida.

843.L’âge médian au premier rapport sexuel est précoce (16 ans), tout comme l’âge à la première union. Il s’agit des niveaux les plus bas du pays, notamment avec ceux d’Antsiranana.

844.La couverture vaccinale est au plus faible niveau (avec Antsiranana), soit 23 % en 1992, 33 % en 1995 et 16 % en 1997.

Toliary

845.La mortalité infantile (11 pour 1 000) est la plus élevée de tout le pays, tout comme dans la région de Fianarantsoa, et la mortalité infanto‑juvénile se situe à 176,2 pour 1 000.

846.La difficulté d’accès à l’eau potable et son insuffisance pour une région aride favorisent la prévalence des maladies diarrhéiques et toutes celles liées à l’eau (bilharziose, ascaridiose, etc.). Il y a également une prévalence non négligeable de la lèpre, de la tuberculose, du goitre et des intoxications alimentaires, de même que des maladies cutanées comme la gale.

847.En matière de santé reproductive, la prévalence contraceptive est faible et l’ISF se situe à 6,1. Les femmes fréquentent peu les centres de santé ou les SMI, compte tenu des distances à parcourir au point où l’abandon du PF est fréquent.

848.On a une forte prévalence des MST (syphilis, gonococcie), des grossesses extra‑utérines et de la stérilité.

849.L’âge médian au premier rapport sexuel et à la première union est très bas (15,5 ans et 17,2 ans), d’où la précocité de la fécondité.

850.Naturellement, l’accouchement à la maison domine et le recours aux accoucheuses traditionnelles est fréquent (59,4 %).

851.Le taux de couverture vaccinale se situe à 39,6 % en 1995 (INSTAT/UNICEF et 15 % en 1997 (ESD 1997).

Antsiranana

852.Après Antananarivo et Toamasina, la région d’Antsiranana a le meilleur taux de mortalité infantile (107 pour 1 000), quoique supérieur à la moyenne nationale de 93 pour 1 000 en 1992 (EDS). Le taux de mortalité infanto‑juvénile se situe à 181 pour 1 000, soit un niveau relativement élevé.

853.En matière de soins de santé primaires, on observe la recrudescence de maladies telles que le paludisme, la diarrhée, les infections respiratoires et la tuberculose, et les infections bucco‑dentaires.

854.Les établissements sanitaires manquent de personnel médical. L’existence de tabous contribue au non‑respect des mesures d’hygiène et accroît la malnutrition.

855.En matière de santé reproductive, l’ISF est de 6,36 en 1992, comme à Mahajanga, région affichant des indicateurs de santé de même niveau. Ainsi, on observe une forte précocité des rapports sexuels, favorisée notamment par le libertinage sexuel et la situation stratégique de la région. De surcroît, le phénomène des partenaires multiples est très présent. Tout cela constitue autant de facteurs accroissant les risques de MST.

856.Avec Mahajanga, la région enregistre le plus faible taux de couverture vaccinale: 16 % en 1997.

857.Les ONG éprouvent des difficultés dans l’exercice de leurs activités et dans leurs interventions.

3. Morbidité et mortalité (art. 24)

858.On rappellera que la morbidité est le nombre des malades par rapport à une population donnée, tandis que la mortalité est le rapport entre le nombre des décès et l’effectif de la population durant une période donnée.

a) Indicateurs de base comparés à ceux d’autres pays

859.Pour prendre la mesure de la situation des enfants à Madagascar, il est nécessaire d’avoir recours à des indicateurs de base de sources fiables, en particulier «La situation des enfants dans le monde, 1998» de l’UNICEF. Afin de mieux caractériser la situation de Madagascar, elle a été comparée à la situation de pays africains, l’Éthiopie, le Burundi, la Côte d’Ivoire et le Cameroun.

860.Si l’on prend comme référence le classement des pays selon le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans en 1996, on a le tableau suivant:

Pays

TMM 5

TMM 5

Taux

Classement

Éthiopie

177

16

Burundi

176

17

Madagascar

164

21

Côte d’Ivoire

150

25

Cameroun

102

51

861.Les principaux indicateurs de base sont donnés dans le tableau ci‑après.

Pays

Classement selon le pays

Taux de mortalité des moins de 5 ans

Taux de mortalité des moins de 1 an

Population (milliers d’habitants)

Nombre annuel de naissances (milliers)

Nombre annuel de décès des moins de 5 ans (milliers)

TMM 5

1960

1996

1960

1996

1996

1996

1996

Cameroun

51

264

102

156

63

13 360

539

55

Côte d’Ivoire

25

300

150

195

90

14 015

523

78

Éthiopie

16

280

177

175

113

58 243

2 856

506

Madagascar

21

364

164

219

100

15 353

643

105

b) Morbidité chez l’enfant

862.Il a été possible d’établir les principales causes de morbidité chez les enfants de 0 à 5 ans en se fondant sur des données fournies par 11 stations sentinelles de surveillance épidémiologique (1996/97).

863.Les causes de morbidité (en ordre croissant) ont été établies en milieu hospitalier:

Consultations externes

0-14 ans

1.Infections respiratoires aiguës (35 %)2.Diarrhées (24 %)3.Paludisme présumé (21 %)4.Infections cutanées (6 %)5.Affections bucco‑dentaires (3 %)6.Malnutrition (2 %)7.Conjonctivites (2 %)8.Bilharzioses urinaires (1 %)9.Bilharzioses intestinales (1 %)10.Épilepsie/convulsions (1,6 %)

Hospitalisations

0-4 ans

1.Paludisme grave présumé (37 %)2.Diarrhées (36 %)3.Malnutrition (14 %)4.Broncho‑pneumopathies aiguës (10 %)5.Autres infections respiratoires aiguës (5 %)6.Fièvre typhoïde suspecte (2 %)

5 ans et plus

1.Paludisme grave présumé (30 %)2.Tuberculose pulmonaire BK+ (13 %)3.Diarrhées (11 %)4.Broncho‑pneumopathies aiguës (10 %)5.Malnutrition (8 %)6.Autres infections supérieures aiguës (7 %)7.Accidents vasculaires cérébraux (6 %)

Enfants de moins de 5 ans (hôpital des enfants de Tsaralalana, 1993)

1.Diarrhées (38 %)2.Infections respiratoires aiguës (35 %)3.Affections neurologiques (8 %)4.Malnutrition (7 %)5.Rougeole, coqueluche, tétanos (4 %)6.Paludisme (3 %)

Consultations externes

1.Infections respiratoires aiguës2.Diarrhées3.Paludisme4.Helminthiases intestinales

Hôpital de Toamasina (1996) pathologies médicales des enfants hospitalisés (0 ‑5 ans)

Maladies infectieuses parasitaires (32 %)

Diarrhées (30 %)

Paludisme (30 %)

Fièvre typhoïde (13 %)

Méningites bactériennes (13 %)

Helminthiases (7 %)

Infections respiratoires aiguës (16 %)

Voies aériennes supérieures (86 %)

Pneumopathies aiguës (14 %)

Maladies neurologiques (9 %)

Convulsions fébriles (92 %)

Épilepsie (8 %)

Anémies

Dermatologie (47 %)

Gale (80 %)

Intoxication (3 %)

Par pétrole (60 %)

Cardiologie (2 %)

Rhumatisme articulaire aigu (60 %)

864.On peut s’étonner de l’absence de la rubrique «malnutrition». En réalité, la malnutrition occupe une place d’une importance telle qu’elle fait l’objet d’un développement ultérieur. D’ores et déjà, on peut préciser que la sous‑nutrition protéino‑énergétique affecte la moitié des jeunes enfants.

c) Mortalité infantile

865.La recherche de données fiables dans le domaine de la mortalité infantile et infanto‑juvénile se heurte à une difficulté déjà rencontrée, à savoir la diversité des sources et des techniques d’enquête. Cependant, la mortalité infantile est très élevée et en hausse: 93 pour 1 000 en 1992 et 96 pour 1 000 en 1997.

866.Pour les enfants de moins de 5 ans, les chiffres les plus significatifs sont ceux de 153 pour 1 000 en 1992 et 159 pour 1 000 en 1997.

867.Pour l’ensemble du pays et en étendant les investigations au taux de mortalité maternelle et au taux de naissances assistées, on peut dresser le tableau suivant:

Taux de mortalité infantile

102,9 pour 1 000 en 1992 (UNICEF)

100 pour 1 000 en 1996 (UNICEF)

96,3 pour 1 000 en 1997 (EDS 1997)

Taux de mortalité infanto ‑juvénile

166 pour 1 000 en 1994

164 pour 1 000 en 1996 (UNICEF)

159 pour 1 000 en 1997 (EDS 1997)

Taux de mortalité maternelle

570 à 600 pour 100 000 naissances vivantes en 1994

488 à 507 pour 100 000 naissances vivantes en 1997 (EDS 1997)

Taux de naissances assistées

57 % en 1992

47 % en 1997

dont:·8 % par un médecin en 1992 et 12 % en 1997 (EDS)

d) Causes de la mortalité infantile

868.En généralisant, on peut attribuer la mortalité infantile aux causes suivantes: diarrhées, malnutrition, paludisme et infections respiratoires. En analysant les statistiques sanitaires et les données basées sur la mortalité hospitalière, on peut établir de la manière suivante les principales causes de mortalité en 1997:

Mortalité chez les enfants de moins de 1 an

0-1 an

1.Malnutrition diarrhéique2.Infection des voies respiratoires (+RA)3.Paludisme4.Malnutrition

Nouveau‑nés

1.Infections (57,7 %)2.Hémorragie (28,5 %)3.Grande prématurité (12,9 %)4.Malformation congénitale (2,9 %)

(Source: Académie malgache, séance du 21 juillet 1994)

Mortalité infanto ‑juvénile

1.Diarrhée

2.Malnutrition

3.Paludisme

4.Infections respiratoires aiguës

5.Broncho‑pneumopathie chronique

6.Tuberculose pulmonaire

7.Cardiopathie

869.S’agissant de la malnutrition, cause de mortalité, il y sera fait mention ultérieurement.

4. Immunisation, vaccination (art. 24)

870.Il a été déjà exposé que le programme élargi de vaccination a pour objectif d’atteindre 80 % de couverture vaccinale contre six maladies cibles: rougeole, diphtérie, tétanos, poliomyélite, coqueluche, tuberculose chez les enfants.

a) Évolution

871.De 1994 à 1997, le taux de couverture vaccinale pour certaines affections cibles était le suivant:

BCG:

77 % en 1994 (UNICEF)

87 % en 1995‑1996 (UNICEF)

66 % en 1997 (EDS 1997)

DTC3:

49 % en 1994 (UNICEF)

73 % en 1995‑1996 (UNICEF)

48,4 % en 1997 (UNICEF)

POLIO 3:

49 % en 1994 (UNICEF)

73 % en 1995‑1996 (UNICEF)

48,3 % en 1997 (EDS 1997)

Antirougeoleux:

51 % en 1994 (UNICEF)

68 % en 1995‑1996 (UNICEF)

46 % en 1997 (EDS 1997)

Enfants complètement vaccinés: 36,2 % en 1997

Femmes enceintes vaccinées antitétanos (2 doses):

33 % en 1995‑1996

35 % en 1997 (EDS 1997)

872.On constate que, malgré les progrès enregistrés depuis le démarrage du programme élargi de vaccination, la couverture effective est passée de 35 % en 1995 à 55 % en 1997 et que l’objectif de 80 % de couverture vaccinale nécessitera d’importants efforts.

873.On observe, par rapport à 1991, une légère amélioration: le BCG est passé de 58,4 % à 66 %; le DTC3 de 43 % à 48 %; la rougeole de 34,4 % à 46 %. Néanmoins, 20 % des enfants n’ont reçu aucun vaccin (soit 1 enfant sur 5), et seulement 31 % des enfants de 12 à 35 mois ont reçu tous les vaccins avant l’âge de 1 an.

874.On note une disparité importante selon la résidence, la province et le niveau d’instruction de la mère:

Le taux de couverture vaccinale est beaucoup plus élevé en milieu urbain (66 % à Antananarivo, 42 % dans les autres villes) qu’en milieu rural (34 %);

Si dans la province d’Antananarivo le taux de couverture atteint 63 %, il tombe à 42 % à Toamasina et chute à 19 % à Fianarantsoa et Mahajanga, à 16 % à Antsiranana et 15 % à Toliary;

Le taux de couverture est de 55 % si la mère a un niveau secondaire et supérieur, mais n’atteint que 38 % si la mère a un niveau primaire et à peine 13 % si elle est sans instruction.

875.Dès lors, il ne faut pas s’étonner si les maladies cibles du programme de vaccination continuent à sévir; en particulier, on constate une augmentation des cas déclarés de tuberculose, de coqueluche et surtout de rougeole par rapport à 1992 (de rougeole de quelque 2 000 à 5 765, de coqueluche de 274 à 717, de tuberculose de 196 à 221).

876.Des efforts considérables restent à faire. On ne peut que constater les faibles résultats obtenus au cours de ces cinq années (1993 à 1998) dans les zones suivantes:

Insuffisance de couverture vaccinale persistant en zone rurale et dans les autres villes que la capitale;

Insuffisance manifeste au niveau des provinces autres qu’Antananarivo;

Insuffisance manifeste chez les mères sans instruction (et même à niveau d’instruction primaire) réclamant une adaptation des méthodes d’information et de façon générale d’IEC.

b)Journées nationales de vaccination

877.Compte tenu des résultats mitigés, du moins dans certaines régions d’accès difficile, le gouvernement a mis sur pied des journées nationales de vaccination. Un décret no 97.657 du 7 mai 1997 a créé un comité national de pilotage des journées nationales de vaccination qui a pour attributions de planifier, organiser et étendre au plan national ces journées. Le comité est également chargé de surveiller la mise en œuvre des stratégies de lutte contre la poliomyélite en particulier, mais également contre les affections cibles du programme élargi de vaccination.

878.La première campagne AVA (abréviation malgache de «journées de vaccination» a eu lieu en 1997. En 1998, elle s’est déroulée du 2 au 5 septembre et du 7 au 10 octobre, et elle était accompagnée d’une distribution de vitamine A.

879.Lors du lancement de l’opération, il a été précisé que l’ensemble de la nation était concerné et qu’à cet effet, afin de suppléer à l’insuffisance numérique des sites de vaccination, il serait fait appel aux formations sanitaires des forces armées.

880.Un effort particulier a porté sur la province d’Antananarivo, qui compte 722 859 enfants de 0 à 5 ans. Les pouvoirs publics se sont félicités des résultats obtenus et le taux de couverture vaccinale a dépassé les prévisions. Mais, comme on l’a vu, il existe une grande disparité entre la province d’Antananarivo et les autres provinces en ce qui concerne le programme de vaccination. Tout en maintenant le niveau d’efforts déjà déployés, les services compétents, en collaboration avec la société civile, doivent développer les actions d’immunisation dans les provinces, et particulièrement dans les zones rurales éloignées des grands centres.

5. Malnutrition (art. 24)

881.L’importance accordée à tout ce qui constitue l’environnement de la malnutrition se justifie: il convient en effet de préciser les indicateurs de base, d’analyser la situation des enfants à Madagascar, de donner des informations sur les programmes de lutte contre la malnutrition et de revenir sur la malnutrition en tant que cause de mortalité.

a) Orientations générales

882.Les autorités malgaches ont accordé la plus grande attention à l’aggravation de la malnutrition à Madagascar, compte tenu des facteurs déjà amplement développés, et ont pris notamment connaissance des orientations générales actuelles de la lutte contre la malnutrition dans le monde.

883.À cet égard, l’avant‑propos du Secrétaire général de l’ONU dans la brochure «La situation des enfants dans le monde, 1998» de l’UNICEF mérite d’être rappelé:

La malnutrition est rarement considérée comme une urgence. Elle est invisible et pourtant contribue à plus de la moitié des décès d’enfants dans le monde. Elle affecte la productivité et les capacités de sociétés entières;

La malnutrition est le fruit de l’association d’un apport alimentaire inadéquat et d’une infection. Les enfants mal nourris sont plus petits et plus maigres que ne le voudrait leur âge. Leur développement physique et mental est compromis;

La malnutrition n’est pas seulement due à la carence en protéines et aliments énergétiques, mais également à un apport insuffisant de minéraux tels que fer, zinc, iode, de vitamine A et d’acides gras essentiels;

Les enfants malnutris souffrent d’incapacités permanentes et d’un affaiblissement de leur système immunitaire. La capacité d’apprentissage, la motivation et la curiosité sont notablement émoussées chez eux;

Cet ensemble de facteurs négatifs contribue à réduire la communication et les interactions des enfants mal nourris avec leur environnement et avec les personnes ou les institutions qui les ont en charge;

Faisant suite à la Déclaration mondiale et au Plan d’action en faveur de la survie, de la protection et du développement de l’enfant (adoptés lors du Sommet mondial pour les enfants), l’objectif principal est, «d’ici la fin du siècle», c’est‑à‑dire en 2000, de réduire de moitié par rapport à 1990 le nombre de cas de malnutrition grave à modérée chez les enfants de moins de 5 ans et de ramener à moins de 10 % la proportion d’enfants ayant un poids insuffisant à la naissance;

Les méthodes de lutte doivent être constamment perfectionnées grâce en particulier à la mobilisation de la science;

La santé des femmes doit faire l’objet de préoccupations particulières afin de leur permettre de nourrir leur enfant exclusivement au sein jusqu’à 6 ans;

Il faut garantir la sécurité alimentaire des ménages;

Le lait maternel contient tous les nutriments, les anticorps, les hormones et les antioxydants dont le nourrisson a besoin pour bien se porter. Le lait ainsi consommé garantit les muqueuses du système gastro‑intestinal et respiratoire contre la diarrhée et les infections de l’appareil respiratoire supérieur.

b) Situation à Madagascar

884.La malnutrition occupe le troisième rang des affections en milieu hospitalier (14 %) et seulement le sixième rang en consultation externe (2 %), ce qui semble montrer qu’en dehors de l’hôpital, on ne se préoccupe pas assez du dépistage et du traitement de la malnutrition. Ce d’autant plus que les enquêtes (EDS 1997) trouvent chez les enfants de moins de 3 ans 48 % de retard de croissance, 40 % d’insuffisance pondérale et 7 % d’émaciation. Près d’un enfant sur cinq présente un retard de croissance de forme sévère. Le retard de croissance approche les deux tiers chez les enfants âgés de 12 à 23 mois. Il est beaucoup plus fréquent dans la province d’Antananarivo (57 %) que dans celle d’Antsiranana (37 %).

885.L’émaciation touche 7 % des enfants de moins de 3 ans. Le groupe d’âge le plus touché est celui des 10‑13 mois (12 %). La proportion d’enfants émaciés est plus faible en ville (5 %) qu’en milieu rural (8 %). On observe une disparité selon les provinces, la proportion allant de 4 % à Antsiranana à 9 % à Toamasina. De même, selon le niveau d’instruction de la mère (5 % chez le niveau secondaire et plus de 8 % chez le niveau primaire).

886.Le tableau ci‑dessous compare la situation de Madagascar à celle d’autres pays en 1997.

Pays

Classement selon le TMM5

Pourcentage de nouveau ‑nés présentant une insuffisance pondérale (1990 ‑1994)

Nombre d’enfants nourris au sein (1990 ‑1996)

Pourcentage d’enfants de moins de 5 ans (1990 ‑1997) souffrant

Pourcentage d’enfants présentant un goitre (6 ‑11 ans) 1985 ‑1994

Exclusivement (0-3 ans)

Plus aliments de sevrage (6 ‑9 mois)

Encore allaités (20 ‑23 mois)

d’insuffisance pondérale

d’émaciation modérée et grave

de retard de croissance modéré et grave

modérée et grave

grave

Cameroun

51

13

7

77

35

14

3

3

24

26

Côte d’Ivoire

25

14

62

64

-

24

6

8

24

6

Éthiopie

16

16

74

-

35

48

16

8

64

31

Madagascar

21

17

47

80

45

34

10

7

50

24

887.Le tableau suivant concerne l’anémie des enfants de 6 à 35 mois (pourcentage et degré). Il a été tenu compte de certaines données sociales et culturelles concernant notamment la mère (1997).

Caractéristique

Niveau d’anémie

Sévère a

Modérée b

Légère c

Effectif

Âge de la mère

15-24 ans

8,0

44,5

16,3

1 037

25-34 ans

6,7

42,0

18,4

1 140

35 ans ou plus

7,0

37,3

18,0

502

Milieu de résidence

Capitale

4,1

42,8

20,1

96

Autres villes

5,2

38,2

23,3

431

Ensemble urbain

5,0

39,0

22,7

527

Rural

7,8

42,9

16,2

2 153

Province (faritany)

Antananarivo

2,3

34,9

17,9

826

Fianarantsoa

8,7

43,7

15,8

604

Toamasina

12,3

49,3

15,1

378

Mahajanga

11,0

44,5

15,5

354

Toliary

4,9

47,9

22,4

340

Antsiranana

11,7

48,3

21,6

178

Niveau d’instruction de la mère

Aucun

9,4

44,5

14,3

593

Primaire

7,5

42,1

17,7

1 499

Secondaire ou plus

4,4

39,6

20,1

587

Sexe de l’enfant

Masculin

8,2

44,5

16,8

1 351

Féminin

6,2

39,7

18,3

1 329

Âge de l’enfant

6-11 mois

12,5

46,9

13,9

595

12-23 mois

7,5

46,1

18,3

1 155

24-35 mois

3,5

34,0

18,8

930

a Niveau d’hémoglobine de moins de 7 g/dl.

b Niveau d’hémoglobine de 7 à 9,9 g/dl.

c Niveau d’hémoglobine de 10 à 11,9 g/dl.

c) Avitaminose et déficit en sels minéraux

888.Les enquêtes effectuées en 1997 par le Département d’anthropologie nutritionnelle de la faculté des sciences d’Antananarivo ont montré dans l’alimentation des ménages en zone rurale (Ambodigoavy, Tsaratanana, parc national d’Ifanadiana) et en zone suburbaine de la capitale (Ambohimiandra) des déficits importants en calcium (-28 à -63 %), en fer (-52 % à Ambohimiandra), en vitamine A (-50 à -68 %), en vitamine B1 (-21 à -69 %) et en vitamine B2 (‑65 à -82 %).

889.Concernant les goitres, leur prévalence a été de 15 % en 1997 (EDS 1997), mais, depuis l’introduction de l’iodation du sel, 73 % des ménages à Madagascar utilisent du sel iodé. Sur ce plan, il semble qu’il y ait une amélioration, mais il faudrait refaire une enquête pour voir à quel point la carte de 1990 a été modifiée.

890.On constate également un important déficit en calcium dans l’alimentation en zone rurale suburbaine (le calcium est un élément primordial pour l’ossification (croissance) et pour le fonctionnement du système nerveux).

d) Programme nutritionnel du plan ‑cadre du gouvernement et de l’UNICEF

891.Ce programme, qui doit durer en principe cinq ans à partir de 1996, comporte deux volets:

La nutrition à assise communautaire (NAC);

L’élimination des troubles dus aux carences en iode (TDCI).

892.Les ministères chargés de la santé, de l’agriculture et de la recherche sont associés à l’exécution de ce programme. Lors de la revue à mi‑parcours de ce programme de l’UNICEF, on notait les réalisations suivantes:

Participation communautaire, volontariat, appui des agents de santé, agricoles et des ONG;

Amélioration du comportement en matière de santé/nutrition;

Activités de santé en stratégie avancée;

Amélioration de la production alimentaire;

Réduction de 10 à 15 % du taux de malnutrition;

Supports d’IEC utilisés dans les sites NAC pour l’éducation nutritionnelle;

Population sensibilisée sur divers thèmes nutritionnels;

Faible taux de distribution des capsules de vitamine A malgré leur disponibilité;

Amélioration de la capacité des agents et volontaires de 13 districts à gérer les activités NAC;

Évaluation des sites NAC.

TDCI:

75 % du sel iodé;

94 districts sur 111 couverts;

80 % de la population consomment du sel iodé;

Arrêté d’application adopté, mais application encore faible;

TGT: 48 % en 1992, 22 % en 1995, 15 % en 1998.

Formation et suivi:

Capacité des agents de santé à soutenir les campagnes de prévention;

Capacité des sauniers à réaliser l’iodation du sel;

Suivi épidémiologique régulier.

e) Projet SECALINE

893.Le décret no 92.612 modifié par le décret no 93.043 du 27 janvier 1993 porte création et organisation d’une association d’utilité publique responsable du projet de sécurité alimentaire et de nutrition élargie (SECALINE). Ce projet coordonne les actions suivantes:

Programme communautaire de nutrition (PCN);

Lutte contre les troubles dus aux carences en iode (TDCI);

Vivres contre travail (VCT);

Stratégie nationale de sécurité alimentaire (SNSA);

Information, éducation, communication (IEC);

Fonds d’intervention pour le développement (FID).

894.Le décret no 95.587 du 5 septembre 1995 porte adoption de la politique nationale de lutte contre les troubles dus à la carence en iode. Il est prévu qu’à compter du 1er janvier 1996 le sel importé ou produit sur le territoire malgache devra être iodé conformément à des directives techniques émises par les ministères concernés. Un arrêté interministériel du 2 juin 1994 a fixé la norme sur le sel alimentaire et le sel iodé.

895.Le décret no 97.1363 du 4 décembre 1997 porte adoption, comme politique de sécurité alimentaire gouvernementale, de la Stratégie nationale de sécurité alimentaire élaborée dans le cadre du projet SECALINE.

896.Le Programme communautaire de nutrition est un programme visant à combattre la malnutrition et l’insécurité alimentaire. Il est basé sur l’engagement et la participation communautaires dans toutes les étapes destinées à résoudre les problèmes alimentaires et nutritionnels, à savoir:

L’analyse des causes réelles et profondes des problèmes en matière d’alimentation;

La recherche et la mise en œuvre de solutions pour résoudre ces problèmes;

La mise sur pied d’actions susceptibles d’améliorer le statut nutritionnel individuel, familial, communautaire.

897.Le PCN s’adresse en priorité aux enfants de 0 à 36 mois, puis aux enfants de 37 à 60 mois.

898.Les objectifs généraux du PCN sont de diminuer les effets de l’insécurité alimentaire au niveau des ménages vulnérables et d’augmenter leur accessibilité aux aliments; et d’améliorer le statut nutritionnel des enfants de ces ménages.

899.Les objectifs spécifiques du PCN sont:

Amener les communautés concernées à prendre conscience des causes de leurs problèmes en matière d’alimentation et rechercher des solutions durables;

Assurer le suivi de croissance des enfants de 0 à 5 ans vivant dans les zones identifiées, par l’intermédiaire de la SNC (surveillance nutritionnelle communautaire) une fois par mois;

Apporter une supplémentation alimentaire pour 30 enfants malnutris cinq jours par semaine par cycle de quatre mois, par l’intermédiaire du PAA (programme d’alimentation d’appoint);

Référer les enfants gravement malnutris aux CRT (centres de réhabilitation thérapeutique);

Dispenser une éducation (sanitaire, nutritionnelle, agricole) susceptible d’améliorer l’état nutritionnel de la communauté, par l’intermédiaire de l’IEC (information, éducation, communication);

Orienter les ménages vulnérables et les communautés cibles vers des activités génératrices de revenus (AGR).

900.Les zones d’intervention du PCN sont Fivondronana d’Antananarivo‑Atsimondrano, d’Antananarivo‑Avaradrano, d’Ambatolampy, d’Ambohidratin, d’Andramasina, d’Anjozorobe, d’Ankazobe, d’Antanifotsy, d’Antsirabe I, d’Antsirabe II, d’Arivonimamo, de Betafo, de Faratsiho, de Fenoarivobe, de Manjakandriana, de Miarinarivo, de Soavinandriana, de Tsiroamandida.

901.En novembre 1998, les objectifs du projet SECALINE ont été précisés, notamment en ce qui concerne l’extension à l’échelle nationale des activités: 4 040 sites ont été ciblés, devant atteindre 1 730 000 personnes, parmi lesquelles des enfants de moins de 3 ans. Il est prévu que 5 000 écoles comptant 1 078 913 élèves et 1 535 015 enfants non scolarisés seront atteintes dans les six provinces en cinq ans.

902.Une remarque s’impose. La multiplicité apparente et le chevauchement des programmes nationaux d’aides multilatérales ou bilatérales n’empêchent pas, à haut niveau, une coordination et une coopération dans la mise en œuvre, notamment concernant la répartition des zones à cibler. L’essentiel est que l’intérêt supérieur de l’enfant soit préservé par‑delà toute discrimination et toute disparité régionale.

f) Allaitement maternel

903.Il a été fait à plusieurs reprises mention de l’importance de l’allaitement maternel exclusif ou avec complément. On peut noter que le taux d’allaitement maternel exclusif en 1997 est passé de 47 % en 1992 à 64 en 1997. L’allaitement avec complément est passé de 86 % en 1992 à 95 % en 1997.

g) Malnutrition et mortalité

904.La malnutrition est une cause importante de décès de jeunes enfants à Madagascar. Pour 1 000 naissances, 88 décès qui surviennent avant l’âge de 5 ans sont liés à la malnutrition (soit 54 % de tous les décès qui surviennent avant l’âge de 5 ans). À cause du niveau important de sa prévalence, la malnutrition marginale à modérée cause plus de décès (69 pour 1 000) que la malnutrition sévère (20 décès pour 1 000). Par conséquent, la malnutrition marginale à modérée est responsable de 78 % des décès d’enfants de moins de 5 ans liés à la malnutrition.

VI. ÉDUCATION, LOISIRS ET ACTIVITÉS CULTURELLES(art. 28, 29 et 31 de la Convention)

A. Généralités

905.Le premier rapport avait fait un bref historique de la politique de l’enseignement et de l’éducation et abordé la situation de l’enseignement primaire et de base, ainsi que les loisirs traditionnels.

906.Dans les réponses aux questions complémentaires, des précisions avaient été données sur l’éducation préscolaire et sur l’éducation des adultes pouvant également répondre aux besoins éducatifs des adolescents. En outre, des données générales avaient été présentées sur le niveau de formation des enseignants et le Programme national pour l’amélioration de l’éducation.

907.Dans le présent rapport, on a jugé bon de faire part du nouvel élan de la politique de l’enseignement, des nouvelles orientations de l’éducation et de la plus grande considération accordée à la politique de la jeunesse à Madagascar; et ce, compte tenu des difficultés croissantes rencontrées par les pouvoirs publics, confortés dans leurs efforts par l’aide internationale et par l’enseignement privé, pour faire face à une situation en voie de dégradation et surmonter les contraintes de l’ajustement structurel.

1. Une école en crise

908.Quelques chiffres permettent de mesurer à quel point Madagascar avait accumulé du retard dans les premières années qui ont suivi la soumission du premier rapport. Le tableau ci‑après, qui reprend des éléments de comparaison déjà connus, donne une idée sinon du retard, du moins de la stagnation de la situation en matière d’alphabétisation et d’enseignement primaire et de base.

Pays

Classement selon le TMM5

Taux d’alphabétisation des adultes

Taux d’inscription dans l’enseignement primaire

Pourcentage d’enfants en 1 re  année atteignant la 5 e 1990-1995

Taux d’inscription dans l’enseignement secondaire 1990 ‑1995 (brut)

1990

1995

1960 (brut)

1990-1995 (brut)

1993-1997 (brut)

Hommes

Femmes

Hommes

Femmes

Garçons

Filles

Garçons

Filles

Garçons

Filles

Garçons

Filles

Cameroun

51

59

30

75

52

81

40

93

64

69

60

66

32

22

Côte d’Ivoire

25

34

14

50

30

64

23

78

59

59

46

73

33

17

Éthiopie

16

32

14

46

25

9

3

33

21

28

19

51

11

10

Madagascar

21

56

43

60

32

74

57

75

72

62

61

28

14

14

909.Des enquêtes réalisées en 1995 révélaient un taux net d’inscription au primaire en stagnation et une faible performance du système éducatif (61 % d’inscription au primaire en 1993 et 65 % en 1995).

910.Une enquête par sondage effectuée avec l’aide d’institutions internationales au dernier trimestre de 1997 révélait que la proportion d’écoles non fonctionnelles variait de 3 % à 12 % en milieu urbain et de 3 % à 9 % en milieu rural.

911.À titre d’exemple, à Bekily, une sous‑préfecture située dans une région enclavée de l’extrême sud, on estimait à 77 % le nombre des écoles publiques fermées, une insuffisance flagrante d’enseignants, des infrastructures quasi inexistantes ou dégradées. 70 % de la population de cette sous‑préfecture était analphabète et illettrée, et la région avait enregistré un taux de 0 % de réussite au baccalauréat pour l’année scolaire 1997/1998.

912.La situation décrite dans le premier rapport n’a pas connu d’améliorations tangibles, malgré les efforts accomplis, dans des conditions chaque année plus difficiles, pour maintenir la fréquentation scolaire, combattre l’absentéisme et lutter contre la déperdition en cours de scolarité.

2. Fréquentation scolaire

913.La non‑scolarisation est due à la pauvreté, aux difficultés financières qu’éprouvent les ménages pour l’achat des fournitures et le paiement des frais de scolarité, à l’éloignement de l’enfant par rapport aux structures scolaires et à l’ignorance des parents sur la nécessité de scolariser leurs enfants.

914.Dans certains cas, le fait de mettre à la charge de collectivités déjà pauvres l’entretien du maître et une participation à la construction des locaux scolaires en a découragé plus d’une, et ce, malgré des aides ponctuelles des autorités publiques. La modestie des moyens financiers dont disposent certaines catégories d’enseignants a contribué à des fermetures d’écoles, des défaillances dans le corps enseignant et une baisse quasi générale du niveau d’enseignement.

915.Les obstacles qui limitent l’accès à l’éducation sont les suivants: bas niveau du développement économique, situation précaire de nombreuses familles, insuffisance des moyens financiers, dispersion de la population, désaffection à l’égard de l’enseignement technique et professionnel.

916.La progression de l’enseignement est encore mal équilibrée: les enfants des campagnes sont défavorisés par rapport à ceux des villes, les filles par rapport aux garçons dans l’enseignement secondaire, le technique et le professionnel n’ont pas encore trouvé leur vraie dimension. L’enseignement souffre d’une grave pénurie de locaux, de matériel et surtout de maîtres.

3. Lutte contre l’absentéisme et l’abandon

917.L’absentéisme est l’absence d’une manière fréquente du lieu de travail. Appliqué au système éducatif, c’est l’absence fréquente de l’école sans toutefois la quitter définitivement.

918.Cette absence est due à des raisons de santé ou d’ordre familial (garder les enfants en bas âge, aider les parents dans les travaux agricoles pendant les périodes culturales, s’absenter pendant les périodes de soudure dans les zones rurales). Quant aux enseignants, ils s’absentent pour toucher leur salaire à la fin du mois, devant pour cela accomplir de longs trajets.

919.L’abandon, quant à lui, est le fait de quitter un lieu de travail en cessant d’occuper une activité. À l’école, c’est le fait de quitter l’année d’étude ou le cycle d’étude dans lequel l’élève est inscrit sans l’avoir terminé.

920.Les causes de l’abandon sont les suivantes:

Faible instruction des chefs de ménage, surtout ceux qui travaillent dans le secteur informel. Les jeunes enfants issus des milieux socioéconomiques et culturels les plus modestes sont le plus susceptibles de ne jamais avoir fréquenté l’école; les enfants plus âgés issus de ces mêmes milieux présentent, quant à eux, une plus grande vulnérabilité face au risque d’abandon des études;

La pauvreté. Beaucoup de parents ont tendance à ne pas inscrire, ou à retirer, leurs enfants de l’école faute de moyens financiers.

Les filles sont plus susceptibles d’abandonner l’école par rapport à leurs camarades masculins, même si elles jouissent d’un traitement relativement équitable en matière de scolarisation;

Absentéisme des instituteurs.

921.La lutte contre l’abandon ne peut être dissociée de celle en faveur de la scolarisation en général et de la qualité de l’enseignement en particulier. Toute mesure et action menée pour augmenter le taux de scolarisation et améliorer la qualité de l’enseignement, aussi bien à l’admission qu’au cours du cycle, ont un impact sur l’abandon.

922.La déperdition scolaire est due:

À l’enfant lui‑même: absence de motivation, incapacité physique ou intellectuelle, inaptitude à poursuivre des études, redoublements multiples. Cette inaptitude se rencontre surtout en milieu rural et dans les zones suburbaines. Les parents ont tendance à retirer de façon prématurée leurs enfants du système scolaire pour les faire travailler et ainsi subvenir aux besoins de la famille ou à ses propres besoins;

Au système: coût de la scolarisation ou contraintes de l’enseignement pour les enfants défavorisés issus de familles monoparentales ou de couples désunis, absence d’appui financier aux déshérités, démotivation des enseignants, inadaptation de l’enseignement aux besoins de la communauté, incertitude de l’emploi, fermeture d’écoles, dénuement en matériel didactique, absence des enseignants.

923.La plupart du temps, les enfants orphelins, les enfants issus de milieux défavorisés, les enfants handicapés (insuffisants moteurs cérébraux, handicapés physiques, malformés), les enfants marginalisés et les enfants privés de liberté n’ont pas accès à l’enseignement, soit par inaptitude, soit par manque de soutien financier.

4. Effectifs

924.Les chiffres suivants sont extraits de l’annuaire statistique général 1995/1996: 13 325 écoles primaires étaient fonctionnelles, dont 2 508 écoles privées. 97 % des écoles primaires publiques sont situées en zones rurales.

925.Les élèves étaient au nombre de 1 638 187, en hausse de 8,4 % par rapport à 1994/1995, dont 801 691 filles, soit 49 %.

926.En ce qui concerne l’enseignement secondaire, en 1995/1996, 112 établissements d’enseignement du premier cycle étaient fonctionnels, dont 18 dans le secteur privé.

927.L’effectif des élèves était de 56 316, en baisse de 5,19 % par rapport à 1994/1995 (les filles étaient 28 114, soit 49,92 % de l’effectif total).

928.En ce qui concerne les enseignants, que ce soit dans l’enseignement primaire ou secondaire, on constate une insuffisance numérique et une répartition inégale.

929.Le document‑cadre de la politique économique déjà cité propose de généraliser l’enseignement primaire (en renforçant les mesures de motivation des enseignants, en relevant le niveau du corps professoral et en améliorant la gestion des écoles).

930.Le tableau ci‑après donne quelques indications de l’évolution générale de la population scolarisée de 1993 à 1998.

Groupes d’âge

Garçons

Filles

Ensemble

1993

Primaire 6-10 ans

437 436

437 772

875 208

Secondaire 11-14 ans

430 383

426 349

856 732

TOTAL

867 819

864 121

1 731 940

1994

6-10 ans

447 575

449 639

897 214

11-14 ans

434 340

430 237

864 577

TOTAL

881 915

879 876

1 761 791

1995

6-10 ans

457 966

461 843

919 809

11-14 ans

438 334

434 166

872 500

TOTAL

896 300

896 009

1 792 309

1996

6-10 ans

468 614

474 394

943 008

11-14 ans

442 368

438 132

880 500

TOTAL

910 982

912 526

1 823 508

1997

6-10 ans

479 527

487 302

966 829

11-14 ans

446 440

442 136

888 576

TOTAL

925 967

929 438

1 855 405

1998

6-10 ans

490 712

500 579

991 291

11-14 ans

450 551

446 181

896 736

TOTAL

941 263

946 760

1 888 023

Ces chiffres doivent être rapprochés de ceux de la population par âge et par sexe en 1998.

Âge

Total

Hommes

Femmes

0-4 ans

2 650 897

1 343 891

1 307 006

5-9 ans

1 976 823

991 712

985 111

10-14 ans

1 606 314

811 487

794 827

15-19 ans

1 489 572

752 955

736 617

931.À la rentrée de septembre 1998, le Ministère de l’éducation de base et de l’enseignement secondaire estimait que l’on devait atteindre la norme d’un enseignant pour 40 élèves.

932.Cependant, d’importantes mesures institutionnelles et d’ordre juridique ont été prises, tandis que le Programme national pour l’amélioration de l’éducation (PNAE II) a été mis en œuvre. Aussi les sections qui suivent seront‑elles consacrées au renforcement du cadre institutionnel et juridique, aux objectifs actuels, à l’évaluation et aux loisirs et activités récréatives et culturelles. On pourra constater qu’un optimisme raisonnable, pour les années à venir, devrait pouvoir succéder à une période d’hésitation, de stagnation et, pour certaines régions défavorisées, de dégradation.

B. Renforcement du cadre institutionnel et juridique

933.La période couverte par le présent rapport a été marquée par une intense activité législative dans les domaines de l’éducation, des loisirs et des activités culturelles. Particulièrement entre 1995 et 1998, sur l’initiative du gouvernement, conscient des mesures à prendre pour renforcer le cadre institutionnel et juridique de la politique de l’éducation en général, a élaboré un programme de rénovation et un système juridique susceptibles de donner un souffle nouveau à la politique d’éducation et de loisirs, répondant ainsi aux préoccupations exprimées dans la Convention.

934.Parmi ces préoccupations, il convient de noter les dispositions qui ont particulièrement retenu l’attention des pouvoirs publics malgaches:

L’encouragement à l’organisation de différentes formes d’enseignement accessibles à tout enfant;

L’information et l’orientation scolaire et professionnelle;

L’encouragement à la coopération internationale en vue notamment de faciliter l’accès aux connaissances scientifiques et techniques et aux méthodes d’enseignement moderne (art. 28);

Le respect du milieu naturel;

L’éducation doit viser à inculquer à l’enfant le respect des droits de l’homme, de sa langue et de ses valeurs culturelles et préparer l’enfant à assurer les responsabilités de la vie dans une société libre;

La liberté de l’enseignement privé conforme aux normes minimales prescrites par l’État (art. 29);

Le droit de l’enfant à participer librement à la vie culturelle et artistique;

L’encouragement aux activités récréatives (art. 31).

1. La Constitution

935.Telle que révisée par le référendum du 15 mars 1998, la Constitution de la République de Madagascar contient d’importantes dispositions, déjà citées, mais qui méritent un rappel:

Le Préambule rappelle que le peuple souverain «est résolu à promouvoir et à développer son héritage de société pluraliste et respectueuse de la diversité, de la richesse et du dynamisme de ses valeurs éthico‑spirituelles et socioculturelles»; qu’«il est conscient de la nécessité de la réconciliation de l’homme avec la nature et son environnement»; et que «l’épanouissement de la personnalité et de l’identité de tout un chacun s’avère le facteur opérant d’un développement intégré, harmonieux et durable».

936.L’article 22 précise que l’État assure le développement intellectuel de tout individu sans autre limitation que les aptitudes de chacun, tandis que l’article 23 rappelle que «tout enfant a droit à l’instruction et l’éducation sous la responsabilité des parents dans le respect de leur liberté de choix. Tout adolescent a droit à la formation professionnelle».

937.Selon les articles 24 et 25, l’État organise un enseignement public, gratuit, accessible à tous et reconnaît le droit à l’enseignement privé. L’enseignement primaire est obligatoire pour tous.

938.L’article 26 donne à tout individu (y compris l’enfant citoyen) le droit de participer à la vie culturelle de la communauté, au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent.

939.Il est évident que certaines dispositions comportent en réalité des objectifs à terme que l’État s’efforce d’atteindre: l’enseignement primaire obligatoire pour tous, le droit de participer au progrès scientifique, le droit à la formation professionnelle.

2. Loi du 13 mars 1995

940.Durant les périodes précédentes, caractérisées par des changements de régime, le système d’éducation et de formation avait été fortement marqué par trois textes que l’on doit considérer aujourd’hui comme abrogés: l’ordonnance no 60.049 du 22 juin 1960; une ordonnance du 2 juillet 1976 organisant l’éducation de base et la loi no 78.040 du 17 juillet 1978.

941.La loi no 94.033 du 13 mars 1995 porte orientation générale du système d’éducation et de formation à Madagascar. Le préambule de cette loi invoque notamment la caducité du système d’éducation et de formation précédent, l’obligation pour la République de Madagascar d’honorer ses engagements internationaux dans le domaine de l’éducation pour tous, ainsi que le caractère impératif d’un renforcement du secteur éducatif.

942.En raison des innovations qu’elle introduit, cette loi doit faire l’objet d’un commentaire qui contribuera à renforcer la conviction que le législateur malgache a déployé un nouvel effort pour se conformer à la Convention, tant dans sa lettre que dans son esprit.

943.Une remarque préalable s’impose: instaurant un nouveau système, la loi est rédigée dans un style abstrait qui n’en facilite pas toujours l’exacte compréhension et qui laisse penser qu’elle sera nécessairement complétée par des textes réglementaires d’application, des circulaires et instructions, et explicitée dans des manuels présentés d’une manière plus transparente et plus simple, particulièrement à l’usage des enseignants de base ainsi que des cadres pédagogiques.

a) Principes fondamentaux du système d’éducation et de formation

944.La loi regroupe d’abord les cinq principes fondamentaux du système que l’on peut résumer ainsi.

Premier principe

945.L’État reconnaît à toute personne, enfant, adolescent ou adulte le droit à l’éducation et à la formation qui vise à favoriser le plein épanouissement de l’individu et à lui inculquer le respect de l’environnement, du patrimoine national, les droits de la personne et les valeurs humanistes communément admises.

946.Éducation et formation doivent concourir à préparer l’individu à une vie active intégrée dans le développement social et économique.

Deuxième principe

947.Les pouvoirs et compétences de l’État s’exercent à travers l’action des ministres chargés de l’éducation et de la formation, qui définissent dans un contrat programme la politique nationale: dans sa formation actuelle, le gouvernement comporte un ministre de l’enseignement supérieur, un ministre de l’enseignement secondaire et de l’éducation de base, un ministre de l’enseignement technique et professionnel, un ministre de la jeunesse et des sports, un ministre de la culture et de l’information.

948.Les formations conduisant aux professions et aux métiers sont définies par les ministres précédemment cités, qui contrôlent les qualifications, délivrent les diplômes et assurent les équivalences. Des concertations sont prévues entre les ministres, mais également avec les partenaires et les usagers.

Troisième principe

949.Les provinces autonomes, organisées en collectivités territoriales décentralisées, administrent librement les affaires éducatives à elles dévolues par la loi. Les organes exécutifs élaborent et mettent en œuvre à travers un contrat‑programme une stratégie de développement en parfaite conformité avec la politique nationale élaborée en réponse à la demande sociale en matière d’éducation et de formation. Les services décentralisés des ministères concernés appuient, soutiennent et contrôlent les actions d’éducation et de formation dans les provinces autonomes.

950.Il convient de noter que les dispositions qui précèdent ont été rédigées en 1994 alors que la mise en place des provinces autonomes a été prévue en 1998. Il faudra donc attendre la mise en œuvre effective de l’organisation provinciale pour déterminer le degré d’autonomie des politiques provinciales d’éducation et de formation par rapport à la politique nationale. La Constitution apporte déjà deux éléments de réponse:

La garantie des droits et libertés fondamentaux (parmi lesquels figure le droit à l’éducation et à la formation professionnelle) relève de la compétence exclusive de l’État;

L’État intervient pour assurer la protection de l’unité juridique.

Quatrième principe

951.La constitution de partenariats est une composante fondamentale de la stratégie d’éducation et de formation. Sont notamment reconnus comme partenaires à part entière les organismes publics, privés ou associatifs, les ONG, les institutions de recherche et les opérateurs économiques, les organismes religieux.

952.S’agissant du statut de l’enseignement privé, la loi prévoit que, dans le cadre d’une convention assortie d’un contrat‑programme, les établissements d’enseignement privé participent à l’exécution d’une mission de service public.

Cinquième principe

953.Les problèmes linguistiques: la Constitution révisée, comme les précédentes, dispose clairement que le malagasy est la langue nationale. Mais la loi de 1995 donne des orientations qui devraient permettre de faire évoluer la langue malagasy et d’aménager sa coexistence avec d’autres langues.

954.À cet effet, elle comporte des directives générales appelées à guider les linguistes, les enseignants, les chercheurs, les centres de langues, les services techniques des ministères en charge de l’éducation et de la formation, les décideurs à haut niveau dans le domaine de l’enseignement, les auteurs et éditeurs d’ouvrages scolaires de tous niveaux, les universités et les institutions de formation professionnelle publiques ou privées.

955.Ces directives peuvent être schématisées ainsi:

La langue malgache, dans son usage courant comme dans son utilisation comme langue d’enseignement, doit être porteuse «d’actions d’éducation et de formation» sur l’ensemble du territoire national;

La mise en œuvre de la politique linguistique doit tenir compte des conventions internationales que la République de Madagascar a intégrées dans son droit positif: par exemple, la Convention fait obligation aux États parties d’inculquer à l’enfant le respect de sa langue (art. 29) et de faciliter l’accès aux connaissances scientifiques et techniques et aux méthodes d’enseignement modernes (art. 29), ce qui implique le recours aux langues étrangères;

Le droit au développement de la langue maternelle en langue de modernité est un droit inaliénable de la personne humaine;

L’apprentissage et la coexistence harmonieuse de plusieurs langues sont à la base de l’apprentissage des langues. La place de chaque langue étrangère sera déterminée par rapport et à partir de la langue maternelle de façon à instaurer une complémentarité fonctionnelle;

La politique linguistique doit avoir pour fonctions: d’être un instrument d’épanouissement et un outil d’accès aux divers ordres de connaissances; de favoriser l’ouverture sur le monde extérieur par l’acquisition de langues d’envergure internationale et/ou régionale (aire de l’océan Indien).

956.Ces directives apparemment complexes et exprimées en des termes parfois difficilement accessibles ont en réalité une importance fondamentale car elles devraient permettre de faire face aux contraintes actuelles:

L’isolement insulaire de Madagascar;

Les perpétuelles hésitations entre l’usage, dans l’enseignement, de la langue malgache et d’une langue étrangère, qui ont engendré des générations d’enfants, d’adolescents et même d’étudiants d’université parlant mal leur langue nationale et ne maîtrisant pas suffisamment le français, encore moins l’anglais;

L’exclusion ou la marginalisation de groupes d’enfants des régions rurales ou éloignées des grands centres qui n’ont pas accès à une connaissance suffisante d’une langue étrangère − en l’occurrence le français − en raison du niveau médiocre des enseignants et de l’insuffisance des supports pédagogiques;

Le retard accumulé dans les recherches concernant la langue malgache, la littérature nationale et l’effort de modernité.

957.Certes, il ne faut pas occulter les progrès accomplis durant ces cinq dernières années: les centres culturels étrangers déploient des efforts parfois considérables pour l’étude des langues, l’accès à la culture universelle, le développement des connaissances à l’échelle mondiale grâce notamment à l’extraordinaire essor pris en quelques années par les communications à l’échelle de la planète.

958.On peut également constater la facilité avec laquelle le jeune malgache suffisamment scolarisé assimile les langues étrangères: le français pour des raisons culturelles et historiques, mais également l’anglais et l’allemand.

959.De nouvelles générations d’enseignants prennent la relève tandis que les instruments de recherche (équipements de laboratoire, informatique, Internet, etc.) se multiplient et sont de plus en plus accessibles aux jeunes.

960.Trois questions restent cependant en suspens:

Parmi les différentes catégories de jeunes visées par la Convention, quelles sont celles qui profitent des progrès?

Accorde‑t‑on une réelle importance à l’identité culturelle malgache?

Quel avenir réserve‑t‑on aux dialectes, proches en fait de la langue utilisée communément mais qui ont leur richesse, leurs particularités et leur rôle de véhicule de valeurs?

b) Organisation du système

961.Après avoir énuméré les principes fondamentaux, la loi du 13 mars 1995 donne les grandes lignes de l’organisation du système de l’éducation et de la formation:

Élaboration de stratégies et plans d’action multisectoriels aboutissant à un schéma directeur opérationnel;

Participation de partenaires;

Définition de buts et objectifs terminaux, ainsi que d’objectifs intermédiaires;

Nécessité de prévoir des modes d’observation et de mesure des progrès accomplis.

962.La loi décrit ensuite les objectifs de chaque domaine de l’éducation et de la formation; on retiendra essentiellement ce qui concerne les enfants et les adolescents protégés par la Convention.

963.L’école maternelle ou préélémentaire a pour objectif général de développer toutes les possibilités de l’enfant afin de lui permettre de former sa personnalité, grâce à des activités physiques, de communication, d’expression orale et écrite, artistiques, scientifiques et techniques.

964.L’école primaire ou élémentaire destinée aux enfants de 6 ans au moins a pour but de favoriser l’autonomie de l’enfant et de lui donner les moyens d’agir sur son existence et sur la société, pour participer pleinement au développement, prendre des décisions éclairées et continuer à apprendre dans une perspective de formation permanente. Les élèves issus de l’école primaire ou élémentaire ont le choix entre le collège d’enseignement général et le centre de formation professionnelle.

c) Éducation formelle et non formelle

965.La loi opère une distinction entre l’éducation formelle dispensée dans le cadre du système organisé selon les règles légales et l’éducation non formelle destinée à offrir des possibilités d’apprentissage à tous ceux qui n’ont pu tirer profit du système éducatif formel pour se préparer à la vie active. Elle comporte des actions d’alphabétisation fonctionnelle, la mise en œuvre de programmes de préalphabétisation, une formation à la vie familiale et sociale tendant notamment à compléter la formation civique.

966.La loi fait appel aux partenaires (organisations confessionnelles, toutes autres organisations privées, ONG) pour collaborer à la mise en œuvre des actions d’éducation non formelle.

d) Collèges et lycées

967.L’enseignement secondaire général (collèges et lycées) a pour objet la promotion culturelle et humaine, l’épanouissement de la personnalité et la préparation à l’entrée dans la vie active, l’apprentissage progressif de la notion de responsabilité en tant que citoyen et membre d’une société démographique dans un État de droit, la préparation aux études supérieures.

e) Formation technique et professionnelle

968.La formation technique et professionnelle a pour objet de permettre à toute personne, adolescent ou adulte, d’acquérir du savoir, du savoir‑faire, du savoir‑être et du savoir en devenir, éléments essentiels de l’intégration positive dans la vie active. La loi distingue plusieurs types de formation: technologique générale, technique, professionnelle initiale, professionnelle qualifiante, d’insertion professionnelle.

f) Personnel enseignant

969.La loi comporte d’importantes dispositions concernant le personnel enseignant et les instances d’évaluation, de conseil et de programmation qui devraient, à terme, assurer une meilleure formation et un encadrement plus efficace des enseignants, une amélioration de leurs conditions de travail et une restructuration du système d’éducation et de formation. D’ores et déjà, il est prévu que des mesures d’accompagnement multisectorielles seront prises pour corriger certains déséquilibres régionaux actuels.

970.Compte tenu des difficultés sociales et économiques maintes fois évoquées dans le présent rapport, auxquelles la République de Madagascar doit faire face, il est raisonnable de penser que la loi du 13 mars 1995 comporte surtout des intentions, de grands objectifs à intégrer dans un plan de réalisation à court, moyen et long terme.

3. Autres textes

971.Des mesures diverses figurant dans des textes épars ont été prises à partir de 1995. Elles sont citées d’une manière non exhaustive.

972.Depuis 1995, le Ministère de l’éducation, par le biais de l’unité d’étude et de recherche pédagogiques, a procédé à la vulgarisation de la Convention en milieu scolaire. C’est dans ce sens que des programmes de l’enseignement primaire ont été rectifiés, des guides pédagogiques élaborés. L’objectif est de rendre l’élève plus responsable compte tenu des droits qui lui sont reconnus.

973.Par arrêté no 2667.96 du 17 mai 1996, les programmes des classes de 9e, 8e et 7e ont été rectifiés, intégrant les notions de droit jugées pertinentes à Madagascar. Les notions de droit retenues sont le droit à la santé, le droit à un environnement sain, le droit à la famille, le droit à la protection (contre toute forme de discrimination), le droit à l’expression, le droit aux loisirs, le droit à l’information, le droit à la vie, le droit à la protection contre les drogues.

974.Un dépliant permet à l’enseignant de maîtriser davantage les notions de droits de l’enfant face à son rôle d’éducateur tant au niveau de l’école qu’en dehors de l’école.

975.L’occasion est saisie pour signaler un effort d’information sur la santé: le Guide de l’enseignant sur les concepts TRO/IRA est à la disposition des écoles depuis 1997; le Guide de l’enseignant sur l’approche «enfant à enfant» pour la santé est destiné aux enseignants des classes de 9e, 8e et 7e.

976.Il en est également ainsi des bandes dessinées «Mba fantatrao moa ny zonao?» («Connais‑tu tes droits?») et le guide de l’enseignant. Cet illustré a pour objectif de faire connaître aux élèves des classes de 8e et de 7e les principaux droits reconnus à l’enfant.

977.Depuis novembre 1997, 52 écoles relevant de six CISCO (circonscriptions scolaires) ont pu bénéficier de cette diffusion.

978.En matière d’enseignement privé, il faut citer le décret no 98.433 portant statut de l’enseignement privé (général). Ce décret donne la définition et la qualification de l’établissement de l’enseignement général privé (art. 2). Il dispose également que tout enseignement général privé fait partie intégrante du système d’éducation et de formation et de ce fait peut être affilié à un groupement. Il participe au service de l’éducation. Aucun établissement d’enseignement général privé n’a le droit de fonctionner sur le territoire sans autorisation des ministères de tutelle (art. 6) et tout établissement est tenu de se conformer à la loi d’orientation du système d’éducation et de formation du 13 mars 1995 (art. 7), et selon l’article 17, les établissements privés agréés ou non ayant passé un contrat‑programme peuvent bénéficier de la part de l’État d’une aide pédagogique, matérielle et financière.

979.L’arrêté no 5217/1996 concerne les fonctions et attributions des personnels des lycées et collèges d’enseignement relevant du Ministère de l’enseignement secondaire et de l’éducation de base. On y relève les dispositions suivantes:

Art. 27.Le surveillant général et les surveillants sont chargés de l’éducation, ce qui implique le dialogue avec les parents ou toute personne qui assure la responsabilité à l’égard des élèves.

Art. 36.Les enseignants sont responsables de l’encadrement et de l’éducation des enfants.

4. Plan d’action national pour l’éducation des filles

980.Une équipe transdisciplinaire de chercheurs, d’experts, de responsables administratifs et de travailleurs sociaux issus d’ONG nationales ou internationales, œuvrant au sein de l’Unité d’étude et de recherche pédagogiques du Ministère de l’éducation nationale, a mis au point un plan d’action national pour l’éducation des filles (PANEF), qui a été adopté dans une déclaration solennelle du gouvernement en octobre 1995. Cette déclaration se référait à diverses déclarations ou résolutions adoptées notamment au niveau international − au Sommet mondial pour les enfants de 1990, à la Conférence mondiale sur l’éducation pour tous de 1990, à la Conférence panafricaine sur l’éducation des filles de 1993, à la Conférence internationale sur la population et le développement de 1994.

981.L’adoption du Plan a été consacrée par un décret qui précisait que le PANEF avait pour objet de préparer les filles aux différents rôles d’épouse, mère, citoyenne et actrice du développement et à favoriser leur épanouissement intégral, ainsi que par la création d’une cellule de pilotage au sein de l’Unité d’étude et de recherche pédagogiques.

982.Le Plan comportait les composantes suivantes: l’éducation formelle des filles; l’éducation non formelle des études et des recherches, un dispositif de mise en place approprié pour l’accès des filles aux études.

983.L’originalité du Plan résidait notamment dans la description détaillée, pour chaque composante, des objectifs opérationnels, des activités à mener et des secteurs, eux‑mêmes rattachés à des ancrages institutionnels impliquant les institutions nationales, les ONG et les ministères directement concernés.

984.Le Plan était prévu pour la période 1996‑2000. Il paraît prématuré d’en évaluer actuellement les résultats, en raison de l’ampleur de ses ambitions. Il comportait d’ailleurs des objectifs à long terme qui nécessitent une action continue. Il a le très grand mérite de constituer une véritable charte de mobilisation sociale, très complète, pouvant servir de support à une campagne permanente de sensibilisation à tous les niveaux.

5. Loi du 8 août 1997

985.Si la Convention ne mentionne pas directement les activités sportives comme élément constitutif d’un droit de l’enfant, il est évident que de telles activités permettent le développement physique de l’enfant (art. 27) et qu’elles favorisent l’épanouissement de sa personnalité.

986.C’est dans cet esprit que sont citées quelques dispositions de la loi no 97.914 du 8 août 1997 relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives:

Art. 1.L’État organise l’exercice des droits garantissant pour l’individu l’intégrité et la dignité de sa personne et son plein épanouissement physique, intellectuel et moral.

Art. 2.Conformément aux droits et devoirs économiques, sociaux et culturels énoncés dans la Constitution, fidèle aux engagements internationaux du peuple malgache, la République de Madagascar reconnaît à toute personne le droit à la pratique des activités physiques et sportives.

Art. 8.L’État est responsable de l’enseignement de l’éducation physique et du sport scolaire placé sous l’autorité [des Ministres en charge de l’enseignement] conformément aux dispositions de la loi no 94.033 portant orientation générale du système d’éducation et de formation à Madagascar.

6. Décret du 10 décembre 1997

987.Selon le décret no 97.1400 du 10 décembre 1997 portant adoption du Programme national pour l’amélioration de l’éducation (PNAE phase II), la politique sectorielle globale comporte les missions du secteur de l’éducation et de la formation: elles doivent être conformes aux besoins du développement du pays et de ses ressources humaines. À ce titre, le secteur de l’éducation et de la formation assure: l’instruction de la population; la formation des ressources humaines du pays; l’éducation de ses citoyens. Ce qui signifie d’une façon spécifique que l’enseignement primaire assure à tous les enfants malgaches les besoins éducatifs fondamentaux, et qu’il donne à tous les enfants malgaches d’âge scolaire l’instruction et l’éducation de base indispensables à leur développement et au développement du pays.

988.La phase II du PNAE constituant la base actuelle des objectifs de la politique de l’éducation et de la formation, elle fera l’objet des développements qui suivent.

C. Objectifs actuels

1. Enseignement primaire

989.Les grandes orientations et objectifs sont l’universalisation de l’enseignement primaire par l’amélioration quantitative et qualitative en maîtrisant le flux d’élèves et la gestion.

a) Amélioration quantitative

990.·Amener le taux de scolarisation des enfants d’âge scolaire de 62,83 % en 1993 à 70 % en 2000, 80 % en 2005, 97 % en 2015, ce qui signifie:

Augmenter le taux net d’admission en classe de 11e de 62 % en 1994 à 95 % en 2000;

Maintenir le taux net d’admission aux environs de 97 % jusqu’en 2017;

Amener 60 % en classe de 9e en:

réduisant de moitié le taux d’abandon actuel par année d’étude à partir de 1997/1998;

diminuant le taux de redoublement des classes de 10e, 9e, 8e et 7e de 10 % par an à partir de 2000 et en augmentant progressivement le taux de promotion.

b) Régulation des flux

991.Augmenter de 4 % en moyenne annuelle l’effectif total jusqu’en 2005.

c) Amélioration qualitative

992.·Implanter auprès de chaque école primaire publique une section préscolaire ou maternelle;

Mettre en place la carte scolaire qui vise à:

La décentralisation effective de la gestion du système éducatif et de la prise de décision au niveau de la direction provinciale de l’éducation nationale, de la circonscription scolaire, du directeur d’école et du chef de la zone administrative et pédagogique;

La scolarisation primaire universelle du groupe d’âge de 6 à 10 ans;

L’amélioration de la qualité de l’enseignement avec la collaboration effective des différents projets éducatifs financés par l’UNICEF, le PRESEM (Programme de renforcement de l’éducation malgache), le CRESED, le WWF, le FNUAP, l’UNESCO et diverses ONG dont les actions aboutissent à la formation, au stage, au recyclage des maîtres et à la réhabilitation des établissements scolaires, aux dotations diverses;

L’application de nouveaux programmes;

L’utilisation des manuels et matériels didactiques en nombre suffisant;

L’amélioration de la planification de l’éducation nationale en matière d’études et de programmes.

2. Enseignement secondaire

a) Amélioration quantitative

993.·Amener 80 % de chaque cohorte d’élèves admis en 6e à achever le cycle de l’enseignement secondaire en 2005;

Amener 80 % de chaque cohorte d’élèves admis en seconde à achever le 2e cycle de l’enseignement secondaire en 2005.

b) Régulation des flux

994.·Augmenter de 2 % le taux de croissance de l’effectif annuel existant de l’enseignement secondaire du 1er cycle (de la 6e à la 3e);

Augmenter de 1 % le taux de croissance de l’effectif annuel existant de l’enseignement secondaire du 2e cycle (de la seconde à la terminale).

c) Amélioration qualitative

995.·Mise en place de la carte scolaire (voir Enseignement primaire);

Des écoles fonctionnelles: collèges d’enseignement général, lycées, à la gestion desquels les collectivités territoriales décentralisées seront associées;

Des enseignants bien répartis, formés, encadrés et motivés;

Collaboration avec les projets éducatifs financés par l’UNICEF, le PRESEM, le CRESED, le WWF et les différentes ONG (formation, stages, recyclage pédagogique et académique, dotation en fournitures scolaires et matériels didactiques et manuels scolaires);

Réhabilitation des établissements scolaires financés par les ONG et associations privées.

3. Enseignement technique

996.·Consolidation des bénéfices acquis de la réforme du système national de formation professionnelle, valorisation de l’enseignement technique et de la formation professionnelle en vue de fournir une main‑d’œuvre qualifiée indispensable à la croissance économique du pays;

Promotion de l’emploi pour le redressement social, et ce, en favorisant l’initiative privée et l’insertion professionnelle des formés;

Réforme de la formation initiale des jeunes à la lumière des résultats positifs de la formation professionnelle qualifiante et modulaire.

4. Enseignement supérieur

997.Poursuite du redressement de l’enseignement supérieur de façon à obtenir un système de formation, de recherche, d’expertise et de service moderne et de qualité, obéissant aux normes internationales et contribuant au développement des formations professionnalisantes.

5. Éducation de la population

998.·Revalorisation du capital humain par la mise en place d’une nouvelle stratégie d’éducation non formelle et la création d’un environnement lettré pour le maintien, voire l’amélioration, des acquis de l’alphabétisation;

Promotion de la femme pour l’amélioration de son environnement économique, social et sa participation effective au développement.

6. Stratégie

a) Au niveau de l’enseignement primaire

999.·Affectation des nouveaux maîtres sortant des ENNI (Écoles normales du niveau I), réouverture de 10 % des écoles fermées;

Dédoublement des chargés d’école qui enseignent dans les classes de la 11e à la 7e dans les écoles primaires publiques;

Redéploiement des enseignants à travers les écoles primaires publiques du territoire;

Visites d’écoles et encadrement;

Visites et/ou formation des instituteurs et institutrices des écoles primaires publiques.

b) Au niveau de l’enseignement secondaire du 1 er  et du 2 e cycle

1000.·Rationalisation de la répartition des enseignants des établissements secondaires (collèges et lycées);

Visites et formation continue des enseignants des collèges en collaboration avec les partenaires des projets éducatifs.

c) À tous les niveaux

1001.Au niveau de l’enseignement primaire: Vulgarisation de la radio scolaire, de la bibliothèque scolaire communautaire; répartition équitable du filet de sécurité, surtout vers les écoles les plus défavorisées et les familles dans le besoin matériel et financier; promouvoir l’éducation des filles par un programme national; mise en place du PANEF (1996‑2000).

1002.Au niveau national: À tous les niveaux d’enseignement: adopter une stratégie centrée sur l’élève et basée sur l’école. Avec l’élève comme point focal, le redressement et le développement du sous‑secteur seront basés sur l’établissement scolaire, la participation communautaire, des collectivités territoriales décentralisées, le partenariat, des contrats d’établissement qui lieront l’État, la communauté et les responsables administratifs et pédagogiques locaux. L’élaboration et l’exécution du budget de l’éducation nationale seront conformes aux objectifs et stratégies définis.

D. Évaluation

1003.Les éléments d’information manquent malheureusement pour une évaluation exhaustive de la période couverte par le présent rapport. La loi du 13 mars 1995 a mis en place des instances d’évaluation, de conseil et de programmation dont il faut attendre des résultats tangibles:

Une inspection générale chargée du suivi et du contrôle de l’application des décisions ministérielles;

Les Conseils de l’éducation et de la formation, au niveau de chaque faritany (province autonome selon la Constitution révisée en 1998); ces conseils donnent leur avis sur les projets de textes législatifs et réglementaires, proposent des orientations du système d’éducation et de formation, veillent à ce que le bon déroulement de l’éducation et de la formation ne soit pas perturbé par des révisions trop fréquentes;

Les Conseils scientifiques de l’éducation et de la formation évaluent l’efficacité du système éducatif, se prononcent sur les grands projets concernant l’éducation et la formation;

L’Office national des programmes d’éducation et de formation, attentif aux recommandations des conseils scientifiques, est chargé de l’élaboration des programmes.

1004.Un comité de coordination réunissant les représentants du gouvernement et des bailleurs de fonds et responsables de projets s’est tenu récemment pour une présentation du PNAE phase II et pour mettre au point la généralisation de la méthode du contrat‑programme (5 520 établissements cibles des projets CRESED et UNICEF).

1005.Le domaine de l’éducation de base et préscolaire a fait l’objet de préoccupations particulières. On peut noter que 95 % des élèves n’ont pas passé par le préscolaire et que 27 % des enfants entrant en primaire achèvent le cycle.

1006.L’examen à mi-parcours du programme Éducation de l’UNICEF a mis en évidence les réalisations suivantes:

Évolution de l’accroissement des effectifs dans les écoles primaires publiques cibles:

1995-1996: 37 %;

1996-1997: 16 %;

1997-1998: 2 %;

Activités IEC pour la scolarisation: affiches et dépliants, émissions radiophoniques, séances d’animation de marionnettes, concours inter‑écoles;

Suivi‑évaluation:

Système de suivi mis en place;

310 cadres nationaux formés en gestion et monitoring;

Comité de monitoring créé;

Comité des directeurs mis en place;

Programmes de 11e et 10e terminés et distribués;

Programmes de 9e en cours d’impression;

Programmes de 8e et 7e en cours d’expérimentation;

Production de guides d’éducation civique (11e à 8e);

Recherche‑action: évaluation des niveaux de performances scolaires, approches pédagogiques, guides pour les classes multigrades;

Soutien à l’élaboration du PANEF;

Appui matériel à l’UERP (Unité d’étude et de recherche pédagogiques);

Appui matériel à des ONG s’occupant d’enfants sortis du système scolaire et de jeunes enfants en milieu urbain défavorisé;

Campagnes de lutte contre la déscolarisation;

Élaboration et distribution d’un manuel pour l’éducation préscolaire;

Formation de 300 enseignants en éducation préscolaire;

Appui matériel à des centres préscolaires au niveau des écoles primaires publiques cibles.

E. Loisirs, activités récréatives et culturelles

1007.L’article 31 de la Convention rappelle que l’enfant a droit au repos et aux loisirs. La République de Madagascar, conformément aux droits et devoirs économiques, sociaux et culturels énoncés dans la Constitution, et fidèle aux engagements internationaux du peuple malgache, reconnaît à toute personne, notamment aux enfants, le droit aux pratiques sportives et activités physiques.

1008.Dans un pays où l’enfant est roi, le problème est d’acuité vu que les enfants participent accessoirement au bien‑être de la famille. L’enfant, surtout en zone rurale, est soustrait de l’école pour pouvoir subvenir aux besoins de la famille ou à ses propres besoins. Aussi est‑il nécessaire de rappeler les droits de l’enfant, en l’occurrence en ce qui concerne les loisirs, les activités récréatives et culturelles.

1009.Le repos, qui est une nécessité pour le maintien de la santé, doit donc être particulièrement étudié, surtout pour les enfants défavorisés. Il faut envisager d’alléger les charges familiales.

1010.Les loisirs constituent l’ensemble des distractions auxquelles tout enfant a droit, par sa nature même, et aussi parce que les loisirs ont une valeur éducative. Effectivement, la tradition malgache comporte un ensemble socioculturel de jeux traditionnels, structurés suivant l’âge et le sexe de l’enfant. Ces jeux vont des chansons enfantines aux parodies de la vie familiale jusqu’aux préparations à la vie sociale et culturelle à travers les devinettes, les proverbes et la connaissance de la littérature populaire. Des jeux requérant des capacités physiques importantes existent, notamment la lutte, le dressage de bœufs, les courses de pirogue, etc.

1011.La culture traditionnelle malgache reflète l’importance des loisirs pour les enfants: séances de contes, jeux collectifs (mouvements d’ensemble et chorégraphie), chansons traditionnelles et spectacles traditionnels. Actuellement, les loisirs modernes rivalisent avec les loisirs traditionnels qu’il ne faut pas abandonner. Une symbiose des deux types de loisirs est souhaitable. Les parents ainsi que la communauté doivent rechercher des activités récréatives appropriées pour l’enfant, qui doivent avoir vocation au développement intellectuel et physique et d’éducation (apprentissage de la vie sociale, par exemple). Il importe que ces activités récréatives puissent aussi forger l’éducation des parents, et ce, afin de maintenir la pertinence et de renforcer l’impact des loisirs sur la société.

1012.La loi no 97.014 du 8 août 1997 (déjà citée) relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives démontre la volonté des gouvernants à satisfaire les termes de la Convention. Cette loi renforce le droit à la pratique du sport, détermine les pouvoirs et compétences de l’État, des collectivités territoriales décentralisées, des groupements sportifs, définit le système d’organisation du sport ainsi que les normes de qualité et d’exécution des activités sportives.

1013.Une relation avec l’éducation est mise en œuvre actuellement (projet «Rugby, école de la vie»); l’école du sport vise le développement physique, moral et intellectuel des enfants et de l’adolescence ainsi que la préparation de la relève sur plan international.

1014.Le Ministère de l’enseignement secondaire et de l’éducation de base, par le biais du service des œuvres péri et parascolaires, met en pratique la notion de droit aux loisirs. C’est ainsi que des activités sportives dans les écoles du niveau I (primaire) ont été organisées dans le cadre de championnats. Il en est de même pour les jeux et visites de sites organisés à l’attention des écoles les plus méritantes dans le cadre des activités péri et parascolaires.

1015.Concernant les loisirs, les problèmes résident en ce qu’il y a peu d’endroits où les jeunes peuvent se divertir. De plus, les jeunes n’ont pas l’opportunité de créer leurs propres loisirs, d’où la recrudescence des «faux loisirs» tels que les drogues et l’alcool.

1016.Des solutions peuvent être apportées telles que:

Favoriser les formes de loisirs simples et peu coûteuses;

Créer des structures d’appui à la jeunesse à partir des provinces autonomes jusque dans les fokontany;

Appuyer les associations de jeunes et les maisons de jeunes par le biais de formations et/ou d’aides matérielles;

Stimuler l’esprit créatif des jeunes à partir d’activités attrayantes et progressives;

Responsabiliser les jeunes afin qu’ils puissent se prendre en main.

VII. MESURES PARTICULIÈRES DE PROTECTION

1017.Ce chapitre est consacré à des catégories d’enfants menacés dans leur sécurité, leur moralité, leur santé, leur éducation et qui, en raison de l’urgence et des circonstances particulières dans lesquelles ils se trouvent, ont droit à des mesures spéciales de protection.

1018.Ces enfants peuvent avoir été concernés par les chapitres précédents; il en est ainsi notamment des enfants victimes d’abus ou de maltraitance, d’enfants séparés de leur milieu familial: les chapitres consacrés à l’environnement familial (chap. IV), à la définition de l’enfant (chap. I) et à la santé de base et bien‑être (chap. V) font état de catégories d’enfants en situation difficile ou en stratégie de survie.

1019.Mais d’autres enfants sont directement menacés dans leur intégrité physique et dans la préservation nécessaire de leur personnalité: la situation dans laquelle ils se trouvent impose aux autorités publiques, aux familles et à la société civile de prendre des mesures exceptionnelles, législatives, administratives ou sociales adéquates, constituant des réponses efficaces à des besoins urgents ou à des conditions nouvelles engendrant une aggravation de la situation de l’enfant.

1020.Sans pouvoir être exhaustifs, en raison de nouveaux aspects de dégradation encore mal maîtrisés, en raison d’une évolution sociale rapide, on donnera des précisions sur:

Les enfants en conflit avec la loi;

La lutte contre les drogues;

Le travail des enfants;

Les enfants issus de minorités.

A. Les enfants en conflit avec la loi

1021.À la différence des domaines étudiés précédemment, la protection des mineurs en conflit avec la loi n’a pas fait l’objet d’innovations législatives notables; la loi de base est toujours celle qui a été analysée dans le premier rapport. Il s’agit de l’ordonnance n o  62.038 du 19 septembre 1962 sur la protection de l’enfance. Il y est affirmé que l’enfant a droit à une sécurité matérielle et morale aussi complète que possible, que la responsabilité de son éducation et du développement harmonieux de sa personnalité appartient en premier lieu à la famille, au sein de laquelle il occupe une place privilégiée.

1022.En cas de défaillance de la famille et lorsque la sécurité, la mortalité, la santé ou l’éducation d’un mineur de 18 ans sont menacées ou compromises, l’État intervient soit pour prendre des mesures d’assistance éducative, soit pour déférer le mineur à des juridictions spécialisées de l’ordre judiciaire.

1023.La loi no 97.036 du 30 octobre 1997 a introduit dans le Code de procédure pénale d’importantes dispositions relatives à la défense des parties, à l’enquête préliminaire et à la détention préventive au cours de la poursuite et de l’instruction. Ces nouvelles dispositions sont inspirées par un plus grand libéralisme et le souci de garantir les droits de la défense. C’est ainsi que, dès la première audition de toute personne soupçonnée d’avoir commis un crime ou un délit, l’officier de police judiciaire doit l’avertir de son droit de choisir un défenseur qui peut être un avocat. La rétention de la personne pour les nécessités de l’enquête préliminaire ne peut excéder 48 heures, avec possibilité restreinte de prolonger, sur autorisation du magistrat compétent, la garde à vue pour une durée supplémentaire n’excédant pas 48 heures. Dès le début de la garde à vue, la personne arrêtée peut faire l’objet d’un examen médical.

1024.L’application pratique de la loi de 1997 suscite diverses difficultés; mais la question fondamentale qu’on doit se poser est de savoir si le mineur objet d’une autorité de police peut bénéficier de ses dispositions innovatrices, qui ne pourraient que contribuer à une plus grande protection contre les dérives d’une procédure sur laquelle l’enfant n’a aucune prise.

1025.L’ordonnance de 1962 concerne exclusivement les mineurs de 18 ans. C’est une loi particulière, dérogatoire au Code de procédure pénale et dont certaines dispositions ne sont pas compatibles avec la loi de 1997. Elle prévoit cependant, en son article 70, que «dans toutes les matières qui ne sont pas régies par la présente ordonnance, il sera procédé conformément au Code de procédure pénale».

1026.Dans l’intérêt supérieur de l’enfant, et en tenant compte des violences verbales ou physiques dont certains mineurs des deux sexes font l’objet à l’occasion d’enquêtes officieuses, d’enquêtes préliminaires et durant une garde à vue, il serait souhaitable que ces dispositions leur soient applicables; telle est d’ailleurs la position prise par les magistrats de l’enfance, comme il est exposé plus loin.

1027.Il est d’ailleurs envisagé de rajeunir l’ordonnance no 62.038 du 19 septembre 1962. L’occasion pourrait être saisie d’éliminer les dispositions désuètes, d’assurer la conformité de la loi avec la Convention, de renforcer la protection de l’enfant qui est l’objet de mesures d’assistance éducative et de mieux garantir les droits de la défense.

1. Administration de la justice pour mineurs

1028.Un enfant peut être l’auteur d’infractions à la loi pénale causant des dommages corporels ou matériels à autrui et nécessitant ainsi une intervention de la société, sous forme de poursuites judiciaires. Le droit positif malgache s’est efforcé de maintenir un équilibre entre la protection de la société et l’intérêt supérieur de l’enfant qui, en application de l’article 40 de la Convention, a droit à un traitement de nature à favoriser sons sens de la dignité et de la valeur personnelle.

1029.Deux textes − le Code de procédure pénale et l’ordonnance no 62.038 du 19 septembre 1962 sur la protection de l’enfance − sont applicables dans ce domaine.

1030.De prime abord, le Code de procédure pénale consacre la mise en œuvre des principes généraux de droits tels que la non‑rétroactivité de la loi pénale, la présomption d’innocence, les garanties des droits de la défense, le droit à un double degré de juridiction, le respect de la vie privée. Ces règles sont applicables aussi bien aux adultes qu’aux enfants.

1031.Concernant particulièrement le respect des droits de la défense, une innovation a été apportée par la loi no 97.036 du 30 octobre 1997 modifiant et complétant les dispositions du Code de procédure pénale relatives à la défense des parties. En effet, au cours de l’enquête préliminaire effectuée par l’officier de police judiciaire lors de la première audition de toute personne soupçonnée d’avoir commis une infraction, ce dernier doit l’avertir de son droit de choisir un défenseur parmi les avocats inscrits au barreau de Madagascar ou un agent d’affaires ou toute personne de son choix sous réserve des dispositions légales en vigueur.

1032.De même, au cours de l’information, lors de la première comparution, le juge d’instruction ou le magistrat du ministère public donne avis à l’inculpé qui n’a pas constitué une défense lors de l’enquête préliminaire de son droit de choisir un conseil parmi les avocats stagiaires du barreau de Madagascar ou un agent d’affaires ou toute personne de son choix sous réserve des dispositions légales.

1033.Les mineurs bénéficient également de ces dispositions. Certes, ils sont déjà assistés par leur défenseur, mais ils peuvent également se faire assister par un avocat lors de l’enquête préliminaire. En outre, la nouvelle loi limite la durée de la garde à vue à 48 heures. À l’expiration de ce délai, l’affaire doit être transmise au magistrat du ministère public.

1034.L’ordonnance no 62.038 sur la protection de l’enfance prévoit des procédures particulières concernant les poursuites contre les enfants et les mesures à prendre à l’égard des enfants en danger.

a) En cas d’infraction

1035.Le juge des enfants est saisi par le Procureur de la République.

Le juge des enfants instruit l’affaire selon les règles de droit commun en accomplissant les actes d’instruction prévus par le Code de procédure pénale.

À ce stade, il peut ordonner le placement de l’enfant, soit dans des établissements pénitentiaires − c’est la détention provisoire −, soit dans des établissements privés − c’est le placement provisoire.

Dès que l’instruction est terminée, le juge d’instruction, qui est en même temps juge des enfants, rend une ordonnance de renvoi devant le tribunal pour enfants qui est compétent pour connaître les délits commis par des mineurs de 18 ans.

En cas de crime, le juge d’instruction rend une ordonnance de renvoi devant la cour criminelle des mineurs.

b) L’assistance éducative (cas sociaux)

1036.S’agissant d’un mineur en danger et en l’absence de toute infraction, la procédure est simple.

Le juge des enfants est saisi soit par les proches parents du mineur, soit par les assistants sociaux ou les ONG, mais il peut se saisir d’office également.

Le juge doit entendre toutes les personnes dont il estime l’audition nécessaire.

Le juge doit s’informer de façon très complète sur les conditions de vie de l’enfant, antécédents, fréquentations scolaires, conditions matérielles et morales et moyens appropriés à sa rééducation.

Il s’agit d’une enquête sociale prévue par les articles 10 et 11 de l’ordonnance no 62.038.

Le placement après enquête a lieu dans l’intérêt de l’enfant. Il s’effectue dans des centres privés.

Le placement dure jusqu’à ce qu’une solution puisse être trouvée répondant aux besoins de l’enfant: vivre dans son cadre familial et recevoir une éducation et un entretien qui lui permettent de se développer de façon harmonieuse sur le plan physique, affectif et intellectuel.

Le placement se fait ainsi sous le contrôle du juge des enfants.

1037.Il semble utile d’apporter des précisions techniques sur les mesures d’assistance éducative, dont l’application rencontre de plus en plus de difficultés dans les conditions actuelles. Les décisions rendues par le juge des enfants ou par les juridictions répressives spécialisées édictent les mesures de protection que requiert la situation de l’enfant en danger.

c) Conditions d’application des mesures

1038.Les mesures d’assistance éducative que les juridictions spécialisées peuvent prescrire sont énumérées dans diverses dispositions de l’ordonnance du 19 septembre 1962. Selon l’article 10 (al. 2), le juge des enfants peut ordonner la remise du mineur: à ses parents ou à son représentant légal; à une personne digne de confiance; à une institution agréée par l’État. Mais le législateur a donné une énumération différente dans d’autres dispositions.

1039.L’article 12 de l’ordonnance, tout en reproduisant les prescriptions de l’article 10, ajoute que le juge des enfants peut faire retenir l’enfant «dans un hôpital ou dans un établissement susceptible de lui donner les soins que réclamera sa santé». Mais cette disposition importante a une portée restreinte puisqu’elle ne peut recevoir application que «pendant l’enquête».

1040.Saisi à la suite d’un délit et estimant la prévention fondée, le juge des enfants peut remettre le mineur à ses parents, à son tuteur, à la personne qui en avait la garde ou à une personne digne de confiance, ou le placer sous le régime de la liberté surveillée.

1041.Quant aux autres juridictions répressives spécialisées − tribunal pour enfants et cour criminelle des mineurs −, elles peuvent éventuellement prendre à l’égard d’un mineur de 13 ans une mesure d’assistance éducative à l’exclusion d’un placement dans un centre de rééducation; cette mesure ne peut être que la remise aux parents, au tuteur, à la personne qui en avait la garde ou à une personne digne de confiance.

1042.À l’égard du mineur âgé de 13 à 16 ans, le choix est plus large puisque la juridiction peut en outre placer le mineur dans un centre de rééducation.

1043.Deux préoccupations paraissent avoir guidé le législateur: d’une part, il a voulu faire un sort à part au placement dans un centre de rééducation. Sans doute pour tenir compte de son caractère à la fois éducatif et, également, à un moindre titre, intimidant, il a réservé cette mesure à certaines catégories de mineurs; d’autre part, il a accordé sa préférence au placement de l’enfant hors de sa famille.

1044.On verra, dans les paragraphes qui suivent, les conditions d’application de ces diverses mesures d’assistance éducative.

Remise du mineur à ses parents, à son tuteur ou à la personne qui en avait la garde

1045.Hors le cas où elle est assortie d’une remise en liberté surveillée, la remise du mineur à ses parents ou au représentant légal non assortie d’un contrôle ou d’une surveillance appropriée ne peut pas être considérée comme une mesure de protection. En fait, le juge des enfants considère, à l’issue de l’enquête, qu’il n’y a pas lieu de prescrire une mesure de protection quelconque. Son ordonnance peut être comparée à une ordonnance de non‑lieu rendue par un juge d’instruction.

1046.Cependant, si, au cours de l’enquête, les parents de l’enfant acceptent sur la suggestion du juge ou de la personne chargée de l’enquête de placer l’enfant dans une institution appropriée, ou s’engagent à procurer à l’enfant les soins médicaux que requiert son état, le juge des enfants peut donner acte aux parents de leur acceptation ou de leur engagement tout en leur remettant l’enfant. Une telle décision lui permet de motiver une ordonnance modificative de placement si les parents ne donnent pas suite à leur acceptation ou à leur engagement.

1047.Le juge des enfants peut également s’assurer que l’enfant a été réellement placé ou soigné par ses parents et le constater dans les motifs et le dispositif de l’ordonnance remettant l’enfant à sa famille.

Remise du mineur à une personne digne de confiance

1048.En revanche, la remise à une personne de confiance ou à une institution constitue une véritable mesure d’assistance éducative, enlevant l’enfant du milieu dans lequel il vit pour le placer auprès d’une personne ou d’une institution apte à lui procurer l’assistance morale et les soins dont il a besoin.

1049.Pour faciliter la tâche du juge et lui laisser toute liberté pour le choix du milieu dans lequel l’enfant doit trouver de nouvelles conditions de vie, le législateur s’est abstenu d’apporter des précisions susceptibles de limiter les possibilités de placement.

1050.L’expression «personne digne de confiance» est très largement interprétée par les juges: il peut s’agir aussi bien d’un membre de la famille que d’une personne charitable, d’un directeur d’établissement scolaire pourvu d’un internat, d’un directeur de foyer pour jeunes, etc.

1051.Bien que la loi n’ait pas expressément mentionné la remise à une institution, les juges des enfants ont, dans la pratique, toujours considéré que la personne pouvait être physique ou morale et par conséquent être une association ou une institution privée qui peut d’ailleurs être un établissement médical ou médico‑pédagogique habilité.

1052.Il est évident que, lors de l’enquête, le juge des enfants doit au préalable s’entourer de renseignements sur la personne intéressée, obtenir son accord et lui rappeler les sujétions auxquelles elle s’expose et les obligations qu’elle s’engage à assumer: trop de personnes, en effet, pensent que le placement est une mesure leur offrant une domesticité à bon marché.

Remise du mineur à une institution agréée par l’État

1053.Le juge des enfants peut également placer l’enfant dans une institution agréée par l’État: un orphelinat, une institution relevant de l’État, un centre d’accueil privé recevant ou non des subventions de collectivités publiques, un foyer de jeunes créé et entretenu par des missions religieuses ou des Églises.

1054.L’agrément de l’État est donné sous la forme d’une décision du juge des enfants «qui statue après s’être entouré des renseignements nécessaires et après avis du ministère public».

1055.Le décret no 61.436 du 31 juillet 1961 précise d’ailleurs que «toute personne ou toute institution qui accepte de recevoir un mineur devra faire connaître au juge des enfants à quelles conditions elle accepte de prendre ce mineur en charge».

1056.L’arrêté no 2041, PRM‑SCCS du 24 juin 1966 précise les conditions d’âge imposées aux enfants placés dans les orphelinats mixtes de Madagascar. Ses dispositions étant générales, elles s’imposent au juge des enfants. L’âge limite des enfants dans les orphelinats mixtes de Madagascar est fixé à 15 ans. Cet âge limite peut être prorogé d’un an au maximum, à la demande expresse et motivée du responsable de l’établissement revêtue de l’avis circonstancié du conseil d’administration et après accord donné par les autorités compétentes.

1057.Les collectivités publiques (État, provinces, communes) peuvent octroyer des subventions à des institutions privées ayant vocation à accueillir des enfants placés par le juge des enfants. Les institutions ainsi subventionnées sont soumises aux dispositions de l’ordonnance no 60.133 du 3 octobre 1960 portant régime général des associations et du décret no 63.436 du 11 juillet 1963 soumettant au contrôle de l’administration les associations, entreprises, sociétés, collectivités privées qui reçoivent une subvention des divers budgets de l’État. Il faut signaler en outre les dispositions du décret no 50.17 du 4 février 1959 relatif au contrôle par l’État des établissements privés concernant la jeunesse (JORM, 1959, p. 458).

Placement dans un centre de rééducation

1058.Le vœu du législateur a été de réserver le placement dans un centre de rééducation aux mineurs de plus de 13 ans ayant commis un délit ou un crime et à l’égard desquels une sanction pénale ne doit pas être prononcée. C’est du moins l’interprétation littérale qui résulte de la lecture des articles 14, 35, 36 (al. 3) de l’ordonnance du 19 septembre 1962.

1059.Dans la pratique, l’application stricte de ces dispositions se heurte à une difficulté: il n’existe en réalité sur le territoire de la République qu’un seul centre de rééducation relevant du Ministère de la justice, le centre de rééducation d’Anjanamasina situé à 18 km d’Antananarivo. Ce centre peut contenir jusqu’à 80 mineurs. Les moyens dont il dispose, aussi modestes et insuffisants soient‑ils, lui permettent de recevoir des mineurs autres que ceux prévus par la loi. Aussi les juges des enfants n’hésitent‑ils pas à lui confier des mineurs n’ayant commis aucun acte antisocial.

1060.Cette situation montre à quel point le nombre des centres susceptibles d’accueillir des mineurs en danger est insuffisant. Il faut souhaiter que se multiplient dans chaque province des centres de rééducation pourvus d’un personnel d’encadrement spécialisé, relevant ou non de l’État.

1061.Les mesures d’assistance éducative qui viennent d’être brièvement étudiées impliquent des charges financières. La loi permet à la personne qui les supporte d’en réclamer le remboursement. Le décret no 61.436 du 31 juillet 1961 modifié à maintes reprises règle le mode de remboursement des frais de garde: la personne ou l’institution qui reçoit la garde de l’enfant peut demander une indemnité qui s’élève à 5 000 FMG par jour.

1062.Cette indemnité est versée mensuellement à terme échu. Elle fait l’objet d’un mémoire mensuel qui, après vérification, est requis, taxé et payé selon les dispositions du décret no 62.314 de 1962 relatif aux frais de justice en matière pénale. Le remboursement de la somme ainsi versée par l’État peut être poursuivi contre les parents ou le tuteur de l’enfant. Mais le juge des enfants peut rechercher tout autre moyen qui lui apparaît le plus favorable pour assurer l’entretien de l’enfant placé. Il peut fixer la contribution due par les parents ou, plus généralement, adopter toute modalité utile.

1063.Si la personne ou l’institution à laquelle l’enfant a été confié se trouve, pour des raisons matérielles ou morales, dans l’impossibilité de continuer à garder l’enfant, elle peut solliciter du juge, par voie de requête, d’être déchargée de sa mission. En ce cas, le juge peut modifier la mesure de placement et prendre s’il y a lieu toutes dispositions provisoires qu’il juge utiles.

1064.Les mesures financières ainsi prévues ont le mérite d’exister. Mais elles ne sont pas à l’abri des critiques: d’une part, le budget du Ministère de la justice, en son chapitre des frais de justice criminelle, prend en charge des frais qui relèvent normalement de l’action exclusivement sociale; d’autre part, aucune disposition ne prévoit la possibilité de contraindre les parents à participer aux frais de garde.

1065.On ne peut s’empêcher de regretter que le législateur ait limité à des mesures de placement hors de la famille les possibilités offertes au juge des enfants et aux juridictions spécialisées. Les juges des enfants, persuadés de l’excellence de la décision de placement qu’ils prennent en toute conscience, sont parfois surpris de constater que les conditions matérielles nouvelles offertes au mineur placé ne compensent pas l’absence d’affection dont il souffre, loin de sa famille et de ses frères et sœurs. Aussi des recommandations prudentes ont‑elles été prodiguées aux juges des enfants. La circulaire no 5 PG du 17 mars 1965 des chefs de la cour d’appel d’Antananarivo reflète les préoccupations qui doivent animer les magistrats de l’enfance:

«Le mineur dont la moralité, la santé ou l’éducation sont gravement compromises et dont le cas est porté à la connaissance du parquet ou du juge des enfants doit faire l’objet d’une mesure de protection.»

«Cette mesure doit tendre à enlever l’enfant du milieu où il a été maltraité ou se sentait abandonné. Ce milieu étant un milieu naturel, il s’agit d’une mesure grave qui ne doit être ordonnée qu’après une enquête approfondie et mûre réflexion.»

«Arracher brutalement un enfant du milieu auquel inconsciemment l’attachent des liens affectifs peut avoir des conséquences plus préjudiciables encore que les faits qui motivent la mesure.»

«Si donc celle‑ci doit être absolument ordonnée, la garde du mineur sera de préférence confiée à un parent ou à une personne susceptible de lui procurer de l’affection qu’à une institution spécialisée où la vie en commun risque de provoquer de profondes perturbations dans son psychisme.»

1066.On aurait souhaité que le législateur ait permis d’assortir la remise aux parents de mesures de surveillance et de contrôle exercées sous l’autorité du juge des enfants. Or, par inadvertance semble‑t‑il, de telles mesures, expressément prévues à l’occasion du placement provisoire lors de l’enquête, ne sont pas autorisées par les dispositions de l’article 10 de l’ordonnance du 19 septembre 1962.

1067.Certes, en invoquant les dispositions générales de l’article 3 de cette ordonnance, certains juges des enfants n’hésitent pas à prévoir dans le dispositif remettant l’enfant à ses parents des modalités de contrôle dont l’exécution est confiée au service social du tribunal ou à une assistante sociale. Mais cette pratique, pour utile qu’elle soit, ne se justifie pas, aucun texte ne permettant au juge d’aller au‑delà d’une surveillance périodique, éventuellement sanctionnée par une modification de la garde, alors que le magistrat devrait pouvoir suggérer et même imposer des mesures d’assistance éducative destinées à compléter l’action des parents.

1068.Quant aux décisions de placement auprès d’une personne digne de confiance ou d’une institution, elles peuvent être assorties de mesures de surveillance.

1069.Par ailleurs, toute personne ou institution chargée de l’entretien et de l’éducation du mineur doit adresser périodiquement des rapports sur la santé et la conduite du mineur placé. Dans la pratique, il semble que de tels rapports sont rarement établis mais que les assistantes sociales visitent régulièrement les centres dans lesquels sont placés des mineurs et rendent compte de leurs observations aux juges des enfants.

2. Traitement réservé aux enfants placés en centre ou privés de liberté, y compris

les enfants soumis à toutes sortes de détention ou d’emprisonnement

a) Les mineurs délinquants

1070.Les mineurs délinquants sont placés soit dans des centres de rééducation privés, soit dans des établissements pénitentiaires tels que la maison centrale d’Antanimora et le centre de rééducation d’Anjanamasina pour Antananarivo‑ville. Les établissements pénitentiaires, où sont placés provisoirement ou à la suite d’une condamnation des mineurs, bénéficient de l’assistance d’ONG, tels que Médecins sans frontières (MSF), qui en particulier assurent le suivi de la santé des mineurs détenus.

1071.D’après Médecins sans frontières, le bilan suivant peut être dressé.

1072.Sur le plan médical, même en l’absence de visites de l’équipe MSF, on peut constater le bon fonctionnement des infirmeries; les enfants ont accès facilement aux soins de base. L’équipe MSF assure toujours l’encadrement, la supervision et le suivi des activités médicales curatives et préventives, l’approvisionnement en médicaments essentiels et petit matériel médical.

1073.Sur le plan nutritionnel, l’amélioration de la ration calorique des mineurs détenus préoccupe toujours les responsables. Des cas de malnutrition sont toujours constatés, en général chez les nouveaux admis, et persistent pendant les deux à trois mois de l’arrivée. Cette période d’adaptation explique la tendance à la maigreur de ces enfants.

1074.Pour ce qui est des conditions de vie, on observe que l’encadrement des détenus a beaucoup évolué. Les conditions d’hébergement se sont améliorées. Les mauvais traitements ont diminué.

1075.Dans le quartier des filles et femmes, jusqu’à maintenant les filles mineures ne sont pas séparées des adultes. Dans la journée, elles sont scolarisées; le soir, elles dorment avec les mères et leurs bébés. Le nombre de mineurs filles est toujours inférieur à 15 (9 en décembre 1997); 34 bébés accompagnent leurs mères à la prison, cela pour des raisons familiales diverses. Les filles mineures fréquentent les ateliers d’éducation et d’enseignement.

1076.Dans le quartier des mineurs garçons, tout au long de l’année 1997, l’effectif (entre 70 à 90) est resté en dessous de la capacité d’accueil, à savoir 100 places. On a constaté des mauvais traitements, surtout par des agents pénitenciers quotidiennement ivres, avec des menaces et intimidations de tous genres. Le personnel éducatif détaché du Ministère de l’éducation nationale assure les cours aux garçons allant de l’alphabétisation jusqu’à la classe de 7e; mais les garçons n’ont pas la possibilité de se présenter à des examens officiels. Les activités d’éducation physique sont possibles, mais non organisées. Aussi les garçons se bornent‑ils à faire du rugby ou du football, non sans violence, faute d’encadrement.

1077.Le centre de rééducation d’Anjanamasina se trouve à 18 km d’Antananarivo, sur la route de Majunga. C’est un centre pour mineurs garçons qui dépend directement du Ministère de la justice. Le centre ne perçoit pas d’allocation de frais de garde; le budget de fonctionnement vient de l’administration pénitentiaire au même titre que la maison centrale d’Antanimora, d’où un financement défectueux.

1078.La capacité d’accueil du centre est de 80 places, mais le nombre d’enfants a diminué, et en décembre 1997 il n’y avait que 26 garçons.

1079.Le fonctionnement du programme d’assistance aux mineurs en détention est maintenant bien en place. Les structures sanitaires sont correctes dans le centre d’Anjanamasina.

b) Les enfants placés en centre

1080.Sur ordonnance du juge des enfants, ou par mesure administrative de placement, ou encore par une décision familiale, la protection sociale des enfants que la déficience du milieu familial et l’insuffisance, sinon l’inexistence, de structures d’accueil exposent à de situations d’abandon peut être assurée par des centres privés dont la nature, la vocation et l’organisation varient selon leur destination réelle et les moyens dont ils disposent.

1081.Il peut s’agir d’associations caritatives, de centres d’accueil ouverts par une ou des personnes de bonne volonté, des institutions religieuses. Ils peuvent être destinés exclusivement à des mineurs du même sexe ou être mixtes.

1082.Au moins dans les grands centres, on constate que leur nombre augmente, et l’on est en droit de s’inquiéter sur la sauvegarde de l’intérêt supérieur de l’enfant lorsque l’on constate que certains centres sont convenablement gérés et comportent un personnel éducatif compétent et dévoué, tandis que d’autres sont très mal équipés, gérés dans le désordre et dirigés par des personnes dont l’incompétence est notoire.

1083.Cette situation a attiré l’attention des autorités compétentes, en particulier le Ministère de la population, de la condition féminine et de l’enfance, et de l’UNICEF.

1084.Un comité a été mis en place, qui devrait procéder à l’inventaire des centres, définir des normes, respectant les dispositions de la Convention, préparer une véritable charte des centres comportant une réglementation type, des modalités de contrôle portant notamment sur les conditions sanitaires, le confort minimum, l’éducation et l’instruction, l’alimentation et la qualité des éducateurs.

1085.La mise en place d’une nouvelle organisation assistant et contrôlant les centres devrait être une œuvre en partenariat entre l’État et les ONG motivées.

1086.Un centre d’accueil doit être un milieu de remplacement au sein duquel l’enfant retrouve ses repères et les liens d’affection qu’il a perdus; il doit être également un lieu d’épanouissement et de réinsertion sociale; il ne doit en aucun cas être une entreprise lucrative sacrifiant l’intérêt supérieur de l’enfant.

c) Peines prononcées à l’égard des mineurs

1087.En application de la Convention, le mineur bénéficie de l’excuse de minorité, qu’il soit accusé de crime ou de délit.

Mineur âgé de moins de 13 ans

1088.Même si les faits sont établis, il ne peut faire l’objet que d’une simple mesure éducative. La remise à la famille ou au tuteur ou à la personne qui en avait la garde ou à une personne digne de confiance sera ordonnée par le président du tribunal pour enfants.

Entre 13 à 16 ans

1089.Le tribunal pour enfants délibère d’abord sur la question de sa responsabilité pénale. Si la responsabilité pénale est reconnue, la peine ne peut s’élever au‑dessus de la moitié de celle à laquelle un mineur aurait été condamné s’il avait été majeur au moment de l’infraction.

Entre 16 à 18 ans

1090.Si la prévention est établie, le tribunal statue comme pour les mineurs de 13 à 16 ans.

En cas de crime

Mineur âgé de moins de 13 ans

1091.Seules les mesures éducatives peuvent être prononcées.

Entre 13 et 16 ans

1092.Si la responsabilité du mineur est reconnue, la cour prononce les peines suivantes:

S’il encourt la peine de mort, des travaux forcés à perpétuité ou la déportation, il est condamné à une peine de 10 à 20 ans de prison;

S’il encourt la peine des travaux forcés à temps ou la réclusion, il est condamné à l’emprisonnement pour une durée de temps égale à la moitié au plus de celui pour lequel il aurait été condamné s’il avait été majeur au moment des faits.

Entre 16 à 18 ans

1093.Le mineur bénéficie des mêmes dispositions que les mineurs de 13 à 16 ans, mais, par décision spéciale et motivée, la cour peut écarter l’excuse de minorité.

1094.Cependant, en vertu de la Convention, la peine de mort ne peut jamais être prononcée contre un mineur de 18 ans.

1095.On peut signaler également que, dans la pratique, les mineurs bénéficient toujours de sursis.

1096.Pour conclure cette analyse de la protection de l’enfant en conflit avec la loi, on peut regretter qu’en raison du désengagement de l’État dans le domaine purement social et de la relative inaction des ONG constituant une partie dynamique de la société civile, la protection d’un grand nombre d’enfants en situation particulièrement difficile ou en stratégie de survie relève en fait des seuls magistrats de l’enfance, dont les tâches sont déjà considérables.

1097.Entre l’enfant menacé dans sa sécurité physique et morale et la protection offerte par le biais du juge des enfants devrait se situer une structure organisée, cohérente, de protection sociale dont les collectivités publiques devraient assurer la responsabilité, en synergie avec la société civile.

B. Lutte contre la drogue

1098.Le Gouvernement malgache met actuellement sur pied une organisation importante de lutte contre les stupéfiants. Certes, il existait une législation constituée, d’une part, par les conventions internationales auxquelles la République est partie et, d’autre part, une législation locale.

1099.La République de Madagascar a adhéré à la Convention du 26 juin 1936 pour la répression du trafic illicite des drogues nuisibles; à la Convention unique sur les stupéfiants de 1961; à la Convention sur les substances psychotropes de 1971.

1100.En ce qui concerne la législation locale, il faut citer, entre autres, le décret du 12 novembre 1916 réglementant l’importation, le commerce, la détention et l’usage des substances vénéneuses, notamment l’opium, la morphine et la cocaïne, et l’ordonnance no 60.073 du 28 juillet 1960 interdisant la culture, la préparation, le transport, la vente, la détention et la consommation du chanvre indien dit «rongony».

1101.Mais la situation a évolué. La consommation des drogues s’est accrue, principalement celle du rongony (cannabis), qui est à classer dans la catégorie des psychotropes sédatifs. C’est un produit qui est très accessible, autant pratiquement que financièrement, car il est cultivé localement. La consommation de cocaïne et d’héroïne est moins répandue à cause du prix élevé de ces produits, ce qui sous‑entend que seule une frange aisée de la population peut se les procurer. Mais une tendance vers le trafic se dessine.

1102.Quant à la consommation de drogues dans l’entourage de l’enfant, d’après un sondage effectué sur 300 enfants, 101 ont répondu oui (30,8 %) et 227 non (69,2 %). Pour plus de la moitié (52,7 %), la fréquence de consommation est quotidienne, pour 30,8 % occasionnelle et pour 16,5 % hebdomadaire.

1103.La consommation et la circulation du rongony sont courantes dans les milieux des adultes et s’étendent aux enfants en stratégie de survie, aux enfants abandonnés, aux enfants au travail et aux enfants des rues. Le rongony présente d’ailleurs cette particularité que, pris à des doses modérées, il calme la faim et a des vertus curatives pour certaines maladies.

1. Mesures de protection

1104.Le gouvernement a engagé la lutte contre la drogue. À cet effet, le Conseil du gouvernement a adopté un décret portant la création d’une commission interministérielle de coordination de la lutte contre la drogue. Auparavant, le rôle de conception de la politique nationale de la lutte était attribué à un simple organe interministériel placé auprès du gouvernement, puis auprès de la présidence.

1105.La commission nouvellement créée est présidée par le Premier Ministre et en cas d’empêchement par le Garde des sceaux, Ministre de la justice. C’est un organe de décision et/ou de délibération chargé d’orienter la politique élaborée par l’État dans le domaine de la lutte contre la drogue. La commission s’est dotée d’un secrétaire général qui, choisi en raison de ses compétences particulières dans le domaine de la drogue et des activités connexes, est chargé de préparer et d’assurer l’exécution des décisions prises par celle‑ci.

2. Législation

1106.Le législateur accorde également de l’importance à la lutte contre la drogue. La loi no 97.039 sur le contrôle des substances psychotropes et des précurseurs à Madagascar a été adoptée le 4 octobre 1997.

1107.Cette loi comporte trois parties. La première partie est consacrée à la classification et à la réglementation de la culture, de la production, de la fabrication et du commerce licites des stupéfiants, substances psychotropes et précurseurs.

1108.Toutes les plantes et substances classées comme stupéfiants ou substances psychotropes par les conventions internationales ou en application de celles‑ci, leur préparation et toutes autres plantes et substances dangereuses pour la santé publique en raison des effets nocifs que leur abus est susceptible de produire sont classées comme suit:

Tableau I:plantes et substances à haut risque dépourvues d’intérêt en médecine;Tableau II:plantes et substances à haut risque présentant un intérêt en médecine;Tableau III:plantes et substances à risque présentant un intérêt en médecine.

1109.L’article 9 de la loi interdit la production, la fabrication, le commerce et la distribution, le transport, la détention, l’offre, la cession à titre gratuit ou à titre onéreux, l’acquisition, l’emploi, l’importation, l’exportation, le transit sur le territoire national des plantes, substances et préparations inscrites au tableau I.

1110.Par contre, l’article 11 dispose que la culture, la production, la fabrication, le commerce et la distribution, l’emploi des plantes, substances et préparations des tableaux II et III nécessitent une licence expresse de l’autorité administrative compétente.

1111.La deuxième partie est consacrée à la répression de la production et du trafic illicites des substances sous contrôle et aux mesures contre l’abus des stupéfiants et des substances psychotropes.

1112.Pour l’application des dispositions de la loi de 1997, une distinction est faite entre les «drogues à haut risque» représentées par l’ensemble des plantes et substances figurant aux tableaux I et II, les «drogues à risque» représentées par l’ensemble des plantes et substances figurant au tableau III, et les «précurseurs» représentés par les substances classées au tableau IV.

1113.La contravention aux dispositions légales concernant la production, l’exploitation, le transport des drogues à haut risque est un crime puni des travaux forcés à temps et d’une amende.

1114.De même, la fabrication, l’importation, l’exportation, le transport, la vente, la détention des précurseurs, équipements et matériels dans le but de les utiliser dans ou pour la culture, la production ou la fabrication illicites de drogues à risque constituent un crime puni des travaux forcés à temps et d’une amende de 500 000 FMG à 5 millions de FMG.

1115.Quant à la contravention aux dispositions légales concernant la culture, la production, la fabrication, la transformation, l’importation, l’exportation, la vente, la détention des drogues à risque constituent un délit puni d’un emprisonnement de 5 à 10 ans et d’une amende de 10 000 FMG à 1 million de FMG.

1116.La loi prévoit des circonstances aggravantes et des circonstances atténuantes. En effet, selon l’article 108, le maximum des peines correctionnelles sera porté au double et la peine des travaux forcés à temps sera remplacée par des travaux forcés à perpétuité:

Lorsque l’auteur de l’infraction appartenait à une bande organisée ou à une association de malfaiteurs;

Lorsque l’auteur de l’infraction aura participé à d’autres activités illégales facilitées par le délit;

Lorsque l’auteur de l’infraction exerçait des fonctions publiques et que le délit aura été commis dans l’exercice de ces fonctions;

Lorsque la drogue aura été livrée ou proposée ou que son usage aura été facilité à un mineur, à un handicapé mental ou à une personne en cure de désintoxication;

Lorsqu’un mineur ou un handicapé mental aura participé à l’infraction;

Lorsque les drogues livrées auront provoqué la mort ou gravement compromis la santé d’une ou plusieurs personnes;

Lorsque l’infraction aura été commise dans un établissement pénitentiaire, un établissement militaire, un établissement d’enseignement ou d’éducation, un établissement hospitalier ou de soins, un centre de services sociaux ou dans d’autres lieux où des écoliers et des étudiants se livrent à des activités éducatives, sportives ou sociales ou dans le voisinage immédiat de ces établissements et de ces lieux;

Lorsque l’auteur de l’infraction aura ajouté aux drogues des substances qui en auront aggravé les dangers;

Lorsque l’auteur de l’infraction sera en état de récidive.

1117.S’il est certain que la livraison ou l’usage d’une drogue facilité à un mineur ou à un handicapé mental est une cause d’aggravation des peines, on peut se demander si la participation d’un mineur ou d’un handicapé mental à l’infraction est une cause d’aggravation également pour le mineur.

1118.Quant aux circonstances atténuantes, l’article 109 prévoit le cas d’exemption consistant en une dénonciation à l’autorité administrative ou judiciaire de l’association des malfaiteurs en infraction en vue d’éviter la réalisation de l’infraction et d’identifier les autres auteurs.

1119.L’article 110 prévoit le cas d’atténuation pour toute personne qui aura, avant la poursuite, permis ou facilité l’identification des autres coupables ou, après l’engagement des poursuites, permis ou facilité l’arrestation de ceux‑ci. De ce fait, la peine sera réduite de moitié.

1120.Par ailleurs, la loi de 1997 prévoit la répression du blanchiment de l’argent, puni des travaux forcés à temps et d’une amende de 500 000 FMG à 5 millions de FMG.

1121.Enfin, la troisième partie de la loi no 97.039 est consacrée à la coordination de la lutte contre l’abus des stupéfiants et des substances psychotropes. Le but en est de faciliter les enquêtes en permettant les saisies, les perquisitions des objets de l’infraction, le contrôle dans les services postaux. Dans cette partie, la loi prévoit également des mesures destinées à faciliter le dépistage du blanchiment.

1122.Pour garantir le paiement des amendes et la confiscation des biens du condamné, l’article 130 (2e partie de la loi) stipule que l’autorité judiciaire compétente, sur requête du ministère public, pourra ordonner, aux frais avancés par le Trésor et selon les modalités applicables en la matière, des mesures conservatoires sur les biens de la personne poursuivie. À cet effet, la condamnation vaudra validation des saisies conservatoires et permettra l’inscription définitive de sûreté.

3. Politique nationale de lutte contre les stupéfiants

1123.La Commission interministérielle de coordination de la lutte contre la drogue est chargée de définir, d’élaborer, d’animer et de coordonner la politique nationale de lutte contre l’abus, la production, la vente, la demande, le trafic et la distribution des stupéfiants, des substances psychotropes et des précurseurs.

1124.Un plan directeur est en préparation et devra tenir compte de la situation géographique du pays, des conditions économiques et sociales actuelles et de l’intégration de la République de Madagascar dans la lutte internationale contre le trafic des stupéfiants. Il est difficile d’apprécier la portée de ce plan encore en gestation.

1125.S’agissant particulièrement des jeunes, la politique nationale doit tenir compte de deux problèmes importants: l’usage des drogues à haut risque dans certains milieux aisés et la consommation, quasi courante dans les milieux très modestes, même à des doses modérées, du rongony, qui, comme l’alcool frelaté bon marché, fait oublier les vicissitudes de la vie, donne pour quelques instants une impression de bien‑être mais conduit des organismes déjà fragilisés au délabrement physique, à des troubles du caractère et à l’agressivité.

C. Le travail des enfants

1126.Engendré par les crises socioéconomiques qui sévissent partout dans le monde, le travail des enfants ne cesse de s’accroître, surtout dans les pays en développement. Madagascar n’a pas été épargnée par ce phénomène. On assiste à l’accroissement du nombre des enfants, de plus en plus jeunes, travaillant dans divers secteurs, au mépris de la législation et réglementation du travail.

1. Législation existante

1127.Madagascar dispose d’une législation et d’une réglementation du travail relativement complètes en matière de protection des enfants. Ces textes s’inspirent largement des normes internationales du travail, notamment celles qui ont été adoptées par l’État malgache.

a) La Convention

1128.Les dispositions de l’article 32 de la Convention reconnaissent à l’enfant le droit d’être protégé contre l’exploitation économique et tout travail mettant en danger sa santé, son éducation ou son développement.

b) Les normes internationales du travail

1129.En application du principe de la continuité du droit et de la succession aux conventions internationales, la République de Madagascar est liée par les conventions relatives au travail de l’enfant ou contenant certaines dispositions qui y sont applicables. Malgré le caractère désuet et l’ancienneté de certaines de ces conventions, leur rappel paraît utile:

Convention sur l’âge minimum (industrie), 1919;

Convention sur le travail de nuit des enfants (industrie), 1919;

Convention sur la réparation des accidents du travail (agriculture), 1921;

Convention sur le repos hebdomadaire (industrie), 1921;

Convention sur l’égalité de traitement (accidents du travail), 1925;

Convention sur les méthodes de fixation de salaires minima, 1928;

Convention sur le travail forcé, 1930;

Convention sur l’âge minimum (travaux non industriels), 1932;

Convention sur l’inspection du travail, 1947;

Convention sur le travail de nuit des enfants (industrie) [révisée], 1948;

Convention sur la protection du salaire, 1949;

Convention sur l’égalité de rémunération, 1951;

Convention sur la discrimination (emploi et profession), 1951;

Convention sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962;

Convention sur l’égalité de traitement (sécurité sociale), 1962;

Convention sur la politique de l’emploi, 1964;

Convention sur l’âge minimum (travaux souterrains), 1965;

Convention sur l’examen médical des adolescents (travaux souterrains), 1965;

Convention sur le poids maximum, 1967;

Convention sur l’inspection du travail (agriculture), 1969;

Convention sur l’âge minimum, 1973.

c) La Charte africaine des droits et du bien ‑être de l’enfant

d) Le Code du travail

1130.Madagascar a connu depuis son indépendance trois codes du travail: celui de 1960, celui de 1975, et le dernier en date, la loi no 94.029 du 25 août 1995, rendue applicable par le décret no 95.715 du 23 novembre 1995.

1131.Le Code du travail régit les travailleurs dont le contrat de travail, quelle que soit sa forme, est exécutoire à Madagascar. À ce titre est assujetti aux dispositions de ce code tout employé, quel que soit son statut ou son secteur d’activité (art. 1er). N’acquièrent pas la qualité de travailleur au sens du Code du travail les enfants mineurs qui aident leur père travailleur (art. 1er, al. 4). L’âge minimum d’embauche est de 14 ans. Avant cet âge, les enfants ne peuvent être employés dans aucune entreprise, même comme apprentis, sans l’autorisation de l’inspecteur du travail, qui décidera en fonction des circonstances locales: les travaux ne doivent pas être nuisibles à la santé des enfants et à leur développement normal (art. 100).

1132.Un examen médical préalable est obligatoire avant toute admission d’enfant ou d’adolescent à l’emploi.

1133.Le travail effectif des mineurs et apprentis de moins de 18 ans ne doit pas excéder 8 heures par jour et 40 heures par semaine (art. 95).

1134.Le repos quotidien des enfants doit avoir une durée de 12 heures consécutives (art. 92).

1135.Il est interdit d’employer les femmes, et a fortiori les enfants, à un travail de nuit, notamment dans les usines, manufactures, mines et carrières, chantiers, ateliers et dépendances. Cependant, une dérogation peut être obtenue par autorisation du Ministre chargé du travail, après enquête de l’inspecteur du travail du ressort sur les conditions d’emploi.

1136.Le droit à l’égalité de chances et à la non‑discrimination en matière de travail a été reconnu aux personnes handicapées (art. 102 à 106).

1137.Le contrat d’apprentissage est prévu à l’article 126.

e) Loi n o  94.026 du 17 novembre 1994 portant création du Code de protection sociale

1138.Cette loi institue un système national de protection sociale et décentralisé. Le système vise à assurer en faveur de chaque citoyen «le minimum de prestations sociales en rapport avec la dignité humaine». Cette loi n’a pas encore fait l’objet d’un décret d’application.

f) Loi n o  94.027 du 17 novembre 1994 portant création du Code d’hygiène, de sécurité et de l’environnement du travail

1139.La loi présente des mesures d’hygiène et de sécurité protégeant collectivement et individuellement la vie et la santé des travailleurs. Mais elle ne concerne que le travail formel, alors que la plus grande partie des enfants au travail, aussi bien dans les zones urbaines et suburbaines que les zones rurales, travaillent dans le secteur informel. Dans les grandes agglomérations, on distingue artificiellement l’enfant vivant de la rue et l’enfant vivant dans la rue.

1140.L’enfant vivant de la rue reste intégré à une famille fragile, vivant dans la pauvreté absolue mais où il peut trouver une structure d’accueil. Fille ou garçon, il est âgé de 5 à 12 ans et n’est pas scolarisé. Il puise dans la rue à la fois un travail pour lui ou sa famille (mendicité, portage, vente de petits objets) et sa nourriture. Très souvent, la famille confie aux filles des enfants en bas âge, qu’elles sont contraintes de porter tout en mendiant.

1141.L’enfant vivant dans la rue vit dans des conditions d’hygiène et de santé plus que précaires. Il est moralement et matériellement abandonné par sa famille et a perdu tout contact permanent avec son groupe social d’origine. Il est plus âgé que l’enfant vivant de la rue. Les filles pratiquent la prostitution occasionnelle. La rue procure à la fois un travail occasionnel, une nourriture acquise au hasard des rapines ou de la charité des passants.

1142.L’environnement (ruelles, cabanes, jardins de squares) fournit l’habitation en saison chaude mais expose les mineurs aux rigueurs du climat, aux violences des adultes, à des accidents ou des maladies qui les laissent sans recours. Leurs loisirs sont constitués par la fréquentation des salles de vidéo mal contrôlées et leur offrant des films violents ou pour adultes. Ils cherchent en bandes le rêve et l’évasion dans la consommation de l’alcool frelaté et du chanvre indien. Au hasard des occasions, ils trouvent des emplois de gardiens de parking, de porteurs dans les marchés populaires, d’aides‑mécaniciens, des colportages au profit de magasins ou grandes surfaces, des tâches domestiques dans les bars, petits hôtels ou gargotes, surtout dans les zones suburbaines.

1143.Un caractère commun aux enfants des rues est leur esprit d’indépendance et leur répugnance à être encadrés dans des structures d’animation ou d’accueil. La rue est pour eux un symbole de liberté et un lieu d’expression d’une certaine joie de vivre. Il en résulte une réelle difficulté à les atteindre et à les mettre en confiance. Des réussites sont cependant enregistrées, notamment les initiatives d’animation des quartiers grâce à des ONG très motivées. En revanche, les opérations de «ramassage» collectif et d’hébergement dans des conditions inconfortables et précaires se sont toujours heurtées à des échecs et ont créé chez certains de véritables traumatismes.

2. Programme d’amélioration de la situation des enfants travailleurs à Madagascar

1144.En 1996/97, le Gouvernement malgache a pris conscience de l’ampleur du phénomène du travail des enfants, et s’est engagé dans une action d’envergure dans le cadre du programme IPEC (Programme international pour l’abolition du travail des enfants). Créé en 1991, l’IPEC bénéficie de fonds provenant d’une douzaine de pays donateurs, dont la France, qui a accepté de financer et d’appuyer des programmes d’action relatifs au travail des enfants à Madagascar. Ce programme vise à abolir le travail des enfants dans le monde. Dans l’attente de cet objectif à très long terme, il vise à l’amélioration de leurs conditions de travail.

1145.En mars 1997, le Ministre de la fonction publique, du travail et des lois sociales et le représentant de l’Organisation internationale du Travail à Madagascar ont signé le document du projet MAG/97/MO1/FRA financé par la France pour une durée de trois ans et d’un montant de 210 000 dollars. L’agence d’exécution est le BIT/IPEC. Les enfants concernés par le projet sont les enfants travailleurs âgés de 7 à 14 ans.

1146.L’objectif principal du projet est d’assister le Gouvernement de la République de Madagascar dans la conception d’un plan national d’action sur le travail des enfants.

a) Études et enquêtes

1147.Avant d’élaborer ce plan, il a fallu entreprendre des études et des enquêtes. Une première étude, visant à fournir des éclairages sur les principaux déterminants du travail des enfants et son impact sur leur scolarisation, a été réalisée en juin 1997 par des chercheurs du projet MADIO. Cette étude, intitulée «Le travail des enfants à Madagascar: un état des lieux», a été effectuée à la demande de l’IPEC/BIT par l’UNICEF pour servir de base à des enquêtes approfondies auprès d’un large échantillon d’enfants travailleurs. Ces enquêtes approfondies ont été effectuées par des équipes multidisciplinaires. En 1997, une équipe multidisciplinaire composée de trois personnes (un inspecteur du travail, un médecin et un animateur d’une ONG s’occupant d’enfants en situation difficile) a été constituée dans chacune des six provinces de Madagascar.

1148.Ces enquêtes, menées par les équipes multidisciplinaires, ont donné lieu à 2 649 entretiens et observations recueillis auprès des enfants travailleurs dans les secteurs suivants:

33,3 %: agriculture, élevage, forêt, pêche;

11,6 %: mines, pierres précieuses, carrières;

17,5 %: industries alimentaires, bois, textiles, briqueterie;

13 %: domestique;

24 %: commerces et services.

1149. Répartition des enfants travailleurs par tranches d’âge

13-14 ans:48,2 %10-12 ans:38 %7-9 ans:13 %;Moins de 7 ans:1,5 %.

1150. Répartition des enfants travailleurs par sexe

Garçons:62 %Filles:38 %.

1151. Statut social des enfants travailleurs

61 % de ces enfants vivent normalement avec leurs père et mère mais doivent travailler pour diverses raisons: famille nombreuse (80 % d’entre eux ont une fratrie de 3 à 9), état de santé précaire des parents;

22 % vivent dans une famille monoparentale, le plus souvent la mère;

17 % vivent avec d’autres parents ou sans aucune proche famille.

Les revenus familiaux de 85 % d’entre eux sont irréguliers ou précaires et 6 % sont issus de familles vivant dans un état de dénuement extrême.

1152. Branches d’activité dans lesquelles travaillent les enfants (par ordre d’importance croissante)

Agriculture;Domestique;Industries extractives (carrières, salines);Industries manufacturières diverses;Élevage;Transports et manutention;Commerces (vendeurs fixes);Petits métiers des rues (colportage, cireurs, nettoyeurs, gardiennage);Pêche (traditionnelle, artisanale);Travaux des métaux (garages);Sylviculture (exploitations forestières);

Activités marginales;

Restauration.

1153. Principaux problèmes et risques encourus

Inexistence de mesures de prévention médicale (97 %);

Aucune mesure de protection individuelle en cours de travail (94 %);

Aucun apprentissage d’un métier (éternel manœuvre sans espoir de promotion sociale) (83 %);

État de dépendance totale vis‑à‑vis de l’employeur (exploitation abusive, surcharge de travail) (71,5 %);

Port de charges excessives (5 kg et plus de 10 kg) (60 %);

Durée de travail très longue (63,5 %);

Postures de travail incommodes, très fatigantes (62 %);

Conditions climatiques pénibles (insolation, refroidissement brusque) (51 %);

Atmosphère de travail enfumée, empoussiérée (26 %);

Risque de subir des violences (blessures, douleurs physiques et morales) (23 %).

1154. Situations estimées intolérables

Environnement naturel et milieu de travail dangereux:

Conditions climatiques pénibles;

Utilisation de matières premières toxiques;

Manipulation de produits dangereux.

Temps de travail excessif, salaire insuffisant:

Durée de travail de plus de 10 heures par jour;

Rémunération inexistante ou insuffisante: 1/10e, voire 1/20e, du salaire minimum garanti officiel.

1155. Impact sanitaire du travail des enfants

Des affections ont pu être constatées chez les enfants travailleurs, en particulier ceux qui travaillent dans les situations que l’on a estimées intolérables:

Maladies digestives;

Traumatismes, contusions, brûlures;

Dermatoses;

Paludisme,

Lombalgies, dorsalgies;

Insuffisances du statut pondéral;

Affections oculaires;

MST;

Toxicomanie.

b) Séminaires

1156.Outre les enquêtes, il a fallu organiser des séminaires. Trois séminaires se sont déroulés de juillet 1997 à avril 1998 pour rassembler les informations recueillies, évaluer et comprendre le bilan sectoriel des conditions de travail des enfants, mettre en évidence les situations préoccupantes justifiant des actions prioritaires et élaborer le plan national d’action et six plans sectoriels.

Plan national d’action

1157.·Lutte contre la pauvreté et le sous‑développement rural;

Amélioration du système d’éducation et d’apprentissage;

Protection sociale;

Sensibilisation et formation.

Plans sectoriels

1158.·Les enfants travailleurs ruraux (agriculture, élevage, sylviculture, pêche);

Les industries extractives;

Les industries manufacturières (métaux, garages, bois, briqueteries, bâtiment);

Les enfants domestiques;

Les enfants travaillant dans la restauration et le commerce;

Les enfants exerçant des activités diverses.

1159.Pour coordonner les divers programmes, un comité directeur national (CDN) a été établi. Il est composé de départements ministériels et d’ONG et a pour rôle de coordonner et d’approuver les différents programmes nationaux d’action sur le travail des enfants pour une durée de trois ans au moins. Le CDN se réunit régulièrement. Il est opérationnel et un coordonnateur national a été désigné.

D. Enfants issus des minorités

1160.La civilisation malgache est fondamentalement hostile à tout esprit de discrimination sous toutes ses formes. Selon la Constitution, «Les nationaux sont égaux en droits et jouissent des mêmes libertés fondamentales protégées par la loi sans discrimination fondée sur le sexe, le degré d’instruction, la forme, l’origine, la race, la croyance religieuse ou l’opinion» (art. 8).

1161.Par ailleurs, le Code de la nationalité est essentiellement fondé sur la nationalité d’origine. Il est aussi largement ouvert grâce aux possibilités de naturalisation.

1162.Bien que marquée par des troubles sociaux, l’histoire de Madagascar n’a pas connu de guerres civiles susceptibles d’engendrer l’émergence de minorités pouvant être l’objet d’exclusion ou d’hostilité.

1163.Enfin, le caractère insulaire du pays contribue à rapprocher les populations, à absorber ou assimiler les petites minorités, de telle sorte qu’il existe peu de problèmes concernant des enfants issus de minorités.

1164.Cependant, il faut signaler, en premier lieu, le cas des minorités provenant de l’extérieur. Malgré l’insularité, il peut exister des minorités provenant de l’extérieur qui s’efforcent de s’intégrer dans une vie autochtone mais peuvent faire l’objet de méfiance ou d’exclusion eu égard à leurs origines. Il peut s’agir notamment:

De minorités africaines, réfugiés, ou personnes s’introduisant dans le pays pour fuir les difficultés dans leur région d’origine;

De minorités d’origine indienne ou pakistanaise vivant dans le pays depuis parfois plusieurs générations, mais mal intégrées, qui se heurtent souvent à la population locale;

De communautés asiatiques, notamment des Chinois, qui sont installées souvent depuis plusieurs générations et s’intègrent facilement à la population malgache;

De minorités d’origine arabe installées depuis des temps historiques et en réalité complètement assimilées à la nation malgache (les Comoriens, par exemple).

1165.La population malgache est constituée de 99,8 % de personnes de nationalité malgache et 0,2 % de personnes étrangères; 33 % des étrangers sont européens, 29 % sont asiatiques et 27 % africains.

1166.En second lieu, il convient de signaler le cas particulier des anciens esclaves. L’histoire de Madagascar révèle que l’esclavage a existé même entre populations locales. Il s’agissait d’un régime dans lequel les esclaves étaient dépourvus des prérogatives personnelles reconnues à un individu. L’esclavage a été aboli en 1896. Il fut un des moyens d’expansion pour les grands royaumes malgaches et constitue un élément essentiel de la structure sociale de la société précoloniale. L’abolition elle‑même, dans son application, pose des énigmes: Comment a‑t‑elle été appliquée? Comment ont été réglés le réemploi des esclaves, le sort des biens dont ils étaient propriétaires? Dans quelle mesure l’esclavage a‑t‑il subsisté (dans les rapports des maîtres et de l’esclave ou comme ligne de clivage social)?

1167.Les anciens esclaves, puis leurs descendants souvent isolés et ayant perdu leurs racines villageoises, se sont répandus dans les grands centres dans des régions particulières. Mais ils se sont peu à peu insérés dans la société et sont des citoyens malgaches à part entière.

1168.Certaines catégories d’enfants souffrent cependant encore d’une survivance de très anciennes habitudes d’exclusion. Mais en aucun cas cette survivance n’affecte leurs droits fondamentaux et leur intégration dans la société.

Conclusion

1169.Si l’on se reporte au rapport établi en 1993, on constate que des progrès incontestables ont été accomplis dans les domaines suivants:

Mise en place des structures de protection annoncées ou présentées sous forme de projets;

Diffusion et meilleure connaissance de la Convention;

Affinement de l’analyse de diverses notions contenues dans la Convention, mais dont il fallait encore explorer le domaine d’application et les implications dans le contexte malgache; il en est ainsi, notamment, de la définition de l’enfant à protéger, de la maltraitance, du travail de l’enfant, des responsabilités incombant aux parents de sang et au groupe familial, de l’ampleur des problèmes concernant le droit de l’enfant à la santé et à un environnement sain, des disparités régionales, du nécessaire rajeunissement de l’appareil législatif;

Mobilisation de la société civile.

1170.Il faut néanmoins reconnaître que des efforts considérables doivent être encore accomplis dans des domaines fondamentaux, tels la santé et le bien‑être de l’enfant, la scolarisation effective, la sauvegarde des enfants en situation particulièrement difficile.

1171.Le présent rapport s’est efforcé de faire ressortir les nouveaux efforts amorcés, les programmes mis en place, les projets à terme officiellement annoncés.

1172.Cependant, la mise en œuvre de la Convention, en termes de réalisations concrètes, doit être intégrée dans une action d’envergure nationale plus vaste qui doit comporter:

Une réelle atténuation de la pauvreté;

L’arrêt de la dégradation de l’environnement;

Des progrès tangibles de l’économie nationale et régionale;

Un renforcement des capacités de gestion et d’organisation de l’État et de ses démembrements, l’instauration d’un État de droit et une bonne gouvernance.

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