NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/BEN/CO/220 octobre 2006

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante-troisième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales: Bénin

1.Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Bénin (CRC/C/BEN/2) à ses 1181e et 1183e séances (voir CRC/C/SR.1181 et 1183), tenues le 20 septembre 2006. Il a adopté les observations finales ci-après à sa 1199e séance, le 29 septembre 2006.

A. Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du deuxième rapport périodique de l’État partie, ainsi que des réponses écrites à sa liste de points à traiter (CRC/C/BEN/Q/2 et Add.1), qui ont permis au Comité de se faire une idée plus précise de la situation des enfants au Bénin. Le Comité a également pris note avec satisfaction du dialogue franc et constructif qui a eu lieu avec la délégation de haut niveau de l’État partie, dans laquelle figurait des experts des institutions concernées.

B. Mesures de suivi prises et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité se félicite de l’adoption au cours de la période couverte par le rapport de plusieurs textes législatifs ou réglementaires ayant pour objet de protéger et promouvoir les droits de l’enfant, notamment les suivants:

a)Loi no 2006‑04 du 5 avril 2006 portant conditions de déplacement des mineurs et répression de la traite d’enfants en République du Bénin;

b)Loi no 2006‑31 du 5 avril 2006 portant prévention, prise en charge et contrôle du VIH/sida;

c)Loi no 2002‑07 du 24 août 2004 portant Code des personnes et de la famille;

d)Loi no 2003‑04 du 3 mars 2003 sur les mutilations génitales féminines;

e)Loi no 2003‑04 du 3 mars 2003 sur la santé reproductive et sexuelle;

f)Arrêté interministériel no 16/MEPS/METFP/CAB/DC/SGM/SA du 1er octobre 2003 portant sanctions à infliger aux auteurs de violence sexuelle dans les écoles et établissements d’enseignement secondaire général, technique et professionnel, publics et privés.

4.Le Comité accueille en outre avec satisfaction la création de nouvelles institutions destinées à protéger et promouvoir les droits de l’enfant, telles que le Comité national des droits de l’enfant et la Cellule nationale de suivi et de coordination des activités de protection de l’enfant.

5.Le Comité se félicite de la publication, le 5 septembre 2006, de la Convention relative aux droits de l’enfant dans le Journal officiel, qui en fait un élément à part entière du droit écrit du pays.

6.Le Comité note en s’en félicitant que l’État partie a ratifié un certain nombre d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ou y a adhéré, en particulier:

a)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, le 25 mai 2000;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, le 25 mai 2000;

c)La Convention no 138 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) de 1973 sur l’âge minimum d’admission à l’emploi, le 11 juin 2001;

d)La Convention no 182 de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, le 28 mai 2001;

e)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants; le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention, et le Protocole contre la fabrication et le trafic illicites d’armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions, additionnel à la Convention, le 6 novembre 2003;

f)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le 20 septembre 2006.

C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations du Comité

1. Mesures d’application générales

(art. 4, 42 et 44 6))

Recommandations antérieures du Comité

7.Le Comité note avec satisfaction les efforts entrepris par l’État partie pour donner suite, par des mesures législatives et des politiques, aux diverses préoccupations et aux recommandations (CRC/C/15/Add.106) qu’il avait exprimées après avoir examiné le rapport initial de l’État partie (CRC/C/3/Add.52). Il regrette toutefois que certaines d’entre elles n’aient pas suffisamment été prises en compte, notamment celles qui concernent la collecte de données, la non-discrimination, le droit à la vie, la violence, les abus et la négligence, la protection de remplacement, la santé, l’éducation, la traite et la justice pour mineurs.

8. Le Comité engage l’État partie à faire son possible pour donner suite à celles des recommandations contenues dans les observations finales adoptées à l’issue de l’examen du rapport initial qui n’ont pas été appliquées ou ne l’ont été que partiellement, et de prendre en compte la liste des sujets de préoccupation et des recommandations contenue dans les présentes observations finales sur le deuxième rapport périodique.

Législation

9.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises pour renforcer le cadre juridique relatif aux droits de l’enfant et harmoniser la législation nationale avec la Convention, en particulier le Code des personnes et de la famille et le projet de Code de l’enfant. Toutefois, il relève que, dans certains domaines, tels que les châtiments corporels, la législation nationale n’a pas encore été mise en totale conformité avec la Convention.

10. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à amplifier ses efforts tendant à garantir une meilleure protection juridique des enfants et de mettre les lois nationales pertinentes en pleine conformité avec les principes et les dispositions de la Convention. Il recommande en outre à l’État partie de hâter l’adoption du Code de l’enfant, ainsi que la révision du Code pénal et du Code de procédure pénale.

Plan d’action national

11.Le Comité prend acte d’un certain nombre de plans et programmes d’action adoptés par les organes de l’État concernés par la promotion et la protection des droits de l’enfant. Il note également que l’État partie élabore actuellement des documents de politiques et stratégies nationales pour la protection de l’enfant. Il constate toutefois avec préoccupation que l’État partie n’a toujours pas adopté de plan d’action national en faveur de l’enfance.

12. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’adopter les documents de politiques et stratégies nationales pour la protection de l’enfant;

b) D’élaborer et de mettre en œuvre un plan d’action national en faveur de l’enfance et de veiller à ce qu’il soit clairement axé sur les droits de l’enfant tels que consacrés par la Convention, qu’il porte sur l’ensemble des domaines couverts par la Convention et qu’il prenne en compte le document intitulé «Un monde digne des enfants» adopté à l’issue de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies de 2002 (annexe de la résolution S-27/2);

c) D’intégrer l’ensemble des plans et programmes d’action au plan d’action national en faveur de l’enfance afin d’éviter une approche fragmentaire de la mise en œuvre des droits de l’enfant;

d) De mettre en place les mécanismes, la réglementation et les ressources humaines et budgétaires nécessaires à la mise en œuvre effective de ce plan d’action national.

Coordination

13.Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour améliorer la coordination de la mise en œuvre de la Convention aux niveaux national et local, en particulier de la création du Comité national des droits de l’enfant et, récemment, de la Cellule nationale de suivi et de coordination des activités de protection de l’enfant. Il prend aussi note de la création de comités départementaux des droits de l’enfant et de l’intention d’instituer des comités municipaux. Il estime toutefois nécessaire d’améliorer la coordination intersectorielle des efforts entrepris en faveur des enfants et des adolescents à tous les niveaux, notamment régional et local.

14. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’intensifier ses efforts pour améliorer la cohésion et la coordination de l’ensemble des activités de mise en œuvre de la Convention, afin d’assurer une coordination efficace entre les autorités nationales et locales et d’instaurer une coopération avec les enfants, les adolescents, les parents et les organisations non gouvernementales (ONG). À ce propos, il recommande aussi à l’État partie d’affecter des ressources financières et humaines adéquates pour assurer le bon fonctionnement des comités départementaux et de mettre en place des comités municipaux des droits de l’enfant aux fins de l’exécution de programmes de prévention et de promotion des droits de l’homme.

Surveillance indépendante

15.Tout en prenant note des renseignements fournis durant le dialogue au sujet du Conseil national consultatif des droits de l’homme, le Comité regrette l’absence de structure indépendante, accessible et adaptée aux enfants, compétente, chargée de recueillir et d’examiner les plaintes individuelles concernant des violations présumées des droits de l’enfant.

16. Le Comité recommande à l’État partie de créer une institution nationale indépendante de surveillance des droits de l’homme ou un médiateur ou commissaire aux droits de l’enfant spécifiquement chargé de surveiller la mise en œuvre des droits de l’enfant et de la Convention aux niveaux national, régional et local, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme («Principes de Paris» annexés à la résolution 48/134 de l’Assemblée générale, du 20 décembre 1993). Compte tenu de son Observation générale n o  2 (2002) concernant le rôle des institutions nationales indépendantes de suivi des droits de l’homme dans la promotion et la protection des droits de l’enfant, le Comité recommande qu’une telle institution ait pour mandat de recueillir, d’instruire et de traiter les plaintes émanant du public, y compris des enfants, et soit dotée de moyens financiers, humains et matériels suffisants. Le Comité recommande en outre à l’État partie de solliciter une assistance technique, notamment de l’UNICEF et du Haut ‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

Ressources consacrées aux enfants

17.Tout en prenant note de l’augmentation générale des crédits consacrés aux enfants, notamment aux services sociaux essentiels, le Comité constate avec inquiétude que les dotations budgétaires ne suffisent pas à assurer la mise en œuvre de la Convention, en particulier le bon déroulement des programmes et réformes lancés par l’État partie. Le Comité s’inquiète aussi des disparités entre régions rurales et urbaines et du fait que de nombreux enfants vivant dans la pauvreté ne bénéficient pas d’un soutien suffisant. En outre, tout en se félicitant des efforts entrepris par l’État partie pour combattre la corruption, le Comité estime que des mesures énergiques et ciblées s’imposent pour remédier aux possibles répercussions de la corruption, notamment sur des domaines comme la santé, l’éducation et la justice.

18. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à augmenter ses dotations budgétaires dans des domaines essentiels pour les enfants, et d’instituer un système de surveillance propre à garantir que les fonds ainsi débloqués atteignent effectivement les groupes les plus vulnérables et à réduire les disparités régionales, notamment entre les villes et les campagnes. Le Comité recommande en outre à l’État partie:

a) D’attacher une attention particulière à la pleine application de l’article 4 de la Convention en fixant ses priorités budgétaires de façon à assurer la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels des enfants, en particulier des enfants issus de groupes économiquement faibles, et de prendre ces mesures «dans toutes les limites des ressources dont ils disposent et, s’il y a lieu, dans le cadre de la coopération internationale»;

b) De veiller à ce que l’engagement pris de combattre la pauvreté se traduise en termes d’affectations budgétaires et de dépenses sociales, et à réserver une place prépondérante à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement et à l’action sociale en faveur de l’enfance dans le prochain document de stratégie pour la réduction de la pauvreté;

c) De poursuivre et d’intensifier sa lutte contre la corruption, en mettant en particulier l’accent sur les domaines de la santé, de l’éducation et de la justice.

Collecte de données

19.Le Comité note avec satisfaction les efforts entrepris par l’État partie pour collecter, analyser et ventiler les statistiques concernant les enfants et les droits de l’enfant, en particulier la création de la base BenInfo que gère l’Institut national de la statistique et de l’analyse économique. Toutefois, le Comité s’inquiète de l’insuffisance des données sur la situation des enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables, notamment des enfants victimes de violences et d’abus sexuels, des enfants au bénéfice d’une protection de remplacement, des enfants des rues, des enfants infectés par le VIH/sida, des enfants handicapés et des enfants vivant dans la pauvreté.

20. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à renforcer ses mécanismes de collecte de données en créant une base de données centralisée consacrée aux enfants et en élaborant des indicateurs compatibles avec la Convention, en vue de rassembler des données sur tous les domaines couverts par la Convention et ventilées, par exemple, par âge pour toutes les personnes de moins de 18 ans, par sexe, entre les villes et les campagnes, et disponibles pour les groupes d’enfants requérant une protection spéciale, comme indiqué plus haut au paragraphe 18. Le Comité encourage de plus l’État partie à se servir de ces indicateurs et données pour formuler des politiques et programmes aux fins de la pleine application de la Convention et à évaluer les progrès réalisés. Il recommande également à l’État partie de continuer à solliciter l’assistance technique de l’UNICEF.

Diffusion, formation et sensibilisation

21.Le Comité est encouragé par les efforts que déploie l’État partie pour diffuser des informations concernant la Convention, notamment par la publication de la Convention au Journal officiel le 5 septembre 2006, sa traduction en langues fon et dendi et la préparation d’une version illustrée et simplifiée du texte de la Convention. Le Comité constate toutefois avec inquiétude que les principes et dispositions de la Convention ne sont pas diffusés systématiquement à tous les niveaux de la société, notamment dans les régions rurales et parmi les enfants, et que la formation à la Convention n’est pas permanente et demeure insuffisante.

22. Le Comité encourage l’État partie à intensifier la diffusion de la Convention, notamment en intégrant l’éducation aux droits de l’homme au programme de l’enseignement primaire et secondaire, et à poursuivre ses efforts tendant à mener une action de formation et de sensibilisation suffisante et systématique aux droits de l’enfant auprès des groupes de professionnels travaillant avec et pour les enfants tels que les juges, les avocats, les agents chargés de l’application des lois, les fonctionnaires territoriaux et nationaux, les enseignants, les travailleurs sociaux, les professionnels de la santé et, avant tout, les enfants eux ‑mêmes. Il préconise en outre une large diffusion de la législation relative aux droits de l’enfant.

Coopération avec la société civile

23.Le Comité prend par ailleurs note des relations et de la coopération mutuelle qui se sont instaurées entre le Gouvernement et la société civile. Il relève également le rôle actif joué par la société civile dans la prestation de services, notamment sociaux.

24. Le Comité souligne le rôle important que joue la société civile en tant que partenaire dans la mise en œuvre des dispositions de la Convention et encourage la poursuite de la coopération avec les ONG. À ce propos, sur la base des recommandations adoptées par le Comité lors de la journée de débat général sur «Le secteur privé en tant que prestataire de services et son rôle dans la mise en œuvre des droits de l’enfant», qui s’est déroulée le 20 septembre 2002 (voir CRC/C/121), le Comité recommande à l’État partie:

a) De poursuivre et renforcer sa coopération avec les ONG et de les associer systématiquement à tous les stades de la mise en œuvre de la Convention, ainsi qu’à la définition des politiques;

b) De veiller à ce que les ONG qui dispensent des services aux enfants, avec ou sans but lucratif, se conforment aux principes et dispositions de la Convention, par exemple en édictant des directives et des normes relatives à la prestation de services.

2. Principes généraux

(art. 2, 3, 6 et 12)

Non ‑discrimination

25.Tout en relevant que la Constitution et les autres lois nationales garantissent le principe de non‑discrimination, le Comité note avec préoccupation que ce principe n’est pas pleinement appliqué pour les filles, y compris les enfants «vidomègon» (pratique consistant à placer les enfants auprès d’un tiers dans le cadre d’un arrangement d’assistance mutuelle ou de solidarité familiale ou communautaire), les enfants nécessitant une protection de remplacement, les enfants handicapés, les enfants des rues, les enfants infectés par le VIH/sida, les enfants vivant dans les zones rurales et les enfants vivant dans la pauvreté, notamment s’agissant de leur accès à la santé et à l’éducation.

26. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour faire en sorte que tous les enfants relevant de sa juridiction jouissent de tous les droits inscrits dans la Convention sans discrimination, conformément à l’article 2 de la Convention, en faisant appliquer de façon effective les lois en vigueur qui consacrent le principe de non ‑discrimination. Le Comité recommande en outre à l’État partie d’adopter une stratégie proactive et globale tendant à éliminer la discrimination de fait dont sont victimes les enfants sous quelque motif que ce soit, en étant particulièrement attentif aux enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables, et d’accorder la priorité aux services sociaux et de santé ainsi qu’à l’égalité d’accès aux activités éducatives et récréatives en faveur de ces enfants. Le Comité encourage de plus l’État partie à créer un environnement favorable et respectueux des différences entre les sexes, qui contribue à promouvoir le droit égal des filles à participer à la vie de la famille, de l’école, des autres institutions, des communautés locales et de la société en général.

27. Le Comité prie de surcroît l’État partie de lui communiquer, dans son prochain rapport périodique, des informations concernant les mesures et les programmes se rapportant à la Convention menés par l’État partie pour donner suite à la Déclaration et au Programme d’action adopté en 2001 lors de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, compte tenu, également, de l’Observation générale n o  1 (2001) du Comité concernant les buts de l’éducation (art. 29.1).

Intérêt supérieur de l’enfant

28.Tout en prenant acte des efforts déployés par l’État partie, le Comité est préoccupé de lire, au paragraphe 218 du rapport périodique, que le droit interne béninois ne s’est pas encore approprié le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, qui n’est pas pleinement respecté et appliqué concrètement dans tous les domaines de l’action en faveur des enfants.

29. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour faire en sorte que le principe général de l’intérêt supérieur de l’enfant soit compris, pleinement intégré et appliqué dans toutes les dispositions juridiques, ainsi que dans toutes les décisions judiciaires et administratives, les projets, les programmes et les services qui concernent de près ou de loin les enfants. Le Comité recommande aussi que le futur Code de l’enfant dispose expressément que l’«intérêt supérieur de l’enfant» constitue un élément déterminant qui doit guider toutes les activités, conformément au paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention, et que toute nouvelle loi fasse clairement référence à ce Code. Il recommande de plus à l’État partie d’organiser des séminaires et ateliers de formation à l’intention des professionnels s’occupant des droits de l’enfant, ainsi que de mener des campagnes de sensibilisation en partenariat avec différents acteurs, dont les chefs traditionnels, afin de promouvoir le plein respect du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Droit à la vie, à la survie et au développement

30.Le Comité relève à nouveau avec inquiétude que l’infanticide d’enfants dits «sorciers» motivé par des croyances traditionnelles persiste dans certaines communautés ainsi qu’à l’encontre des nourrissons handicapés ou, par exemple, de bébés nés en présentant le siège ou des nourrissons qui font leur première dent sur la mâchoire supérieure.

31. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures, législatives notamment, pour prévenir et faire cesser les infanticides, ainsi que de protéger les nourrissons et de garantir leur droit à la vie, à la survie et au développement. À cet égard, le Comité préconise une éducation communautaire relative aux droits de l’enfant, notamment par le canal des cours d’alphabétisation et des écoles primaires, la promotion des accouchements médicalement assistés, dans des centres de santé, par des sages ‑femmes correctement formées, ainsi qu’un suivi des nouveau ‑nés dans les communautés et la fourniture d’un appui suffisant aux ONG et aux associations religieuses actives dans ce domaine. Il recommande aussi que les auteurs d’infanticide soient traduits en justice.

Respect des opinions de l’enfant

32.Le Comité se félicite des efforts visant à promouvoir le respect des opinions de l’enfant, en particulier de l’élaboration d’un projet de loi sur le Parlement des enfants, qui devrait en officialiser l’existence et définir les objectifs. Il reste toutefois préoccupé par le fait que les comportements traditionnels au sein de la société limitent la possibilité pour les enfants d’exprimer librement leurs opinions à l’école, devant les tribunaux ou dans leur famille et la communauté.

33. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De mener une action de promotion et de facilitation pour faire en sorte qu’au sein de la famille, à l’école et dans les instances judiciaires administratives, les enfants soient entendus et leurs opinions dûment prises en compte et puissent ainsi participer à la prise de toutes les décisions les concernant, en application de l’article 12 de la Convention;

b) De mener un travail d’éducation, notamment en direction des parents, des enseignants, des fonctionnaires gouvernementaux, du personnel judiciaire, des enfants eux ‑mêmes et de la société en général, concernant le droit de l’enfant à la participation et à la prise en considération de ses opinions;

c) De déterminer régulièrement à quel point les opinions des enfants sont prises en considération et quel en est l’impact sur les politiques et la mise en œuvre des programmes ainsi que sur les enfants eux ‑mêmes.

34. Le Comité appelle en outre l’attention de l’État partie sur les recommandations adoptées lors de sa journée de débat général sur le droit de l’enfant d’être entendu, tenue le 15 septembre 2006.

3. Droits et libertés civils (art. 7, 8, 13 ‑17, 19 et 37 a))

Enregistrement des naissances

35. Tout en prenant acte des mesures prises pour appliquer la recommandation précédente du Comité, notamment la création de bureaux d’enregistrement dans les arrondissements et l’organisation de campagnes de sensibilisation, le Comité relève avec inquiétude que de nombreux enfants ne sont toujours pas enregistrés à la naissance, en particulier les enfants qui vivent dans les communautés rurales reculées et les enfants de familles défavorisées.

36. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que tous les parents du pays puissent enregistrer leurs enfants à la naissance. Il lui recommande également d’apporter un soutien aux autorités locales en vue de faciliter l’accroissement du taux d’enregistrement à la naissance, en recourant au besoin à des auxiliaires d’état civil dans les villages, et de lancer une campagne nationale d’audiences foraines chargées de délivrer, gratuitement, des jugements supplétifs d’actes de naissance pour les enfants déclarés hors délais.

Accès à une information appropriée

37.Tout en prenant acte de l’existence de la Haute Autorité de l’audiovisuel et de la communication et du Comité de censure cinématographique, le Comité s’inquiète de l’insuffisance des moyens financiers alloués à ces mécanismes. Il s’inquiète également de l’insuffisance du contrôle de la qualité de l’information à l’usage des enfants et du fait que les enfants sont exposés, par le canal de clubs vidéos échappant à tout contrôle et de l’Internet, à des contenus nocifs, violents ou pornographiques.

38. À la lumière de l’article 17 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires, législatives ou autres, pour améliorer le contrôle de la qualité des contenus médiatiques destinés aux enfants, en particulier en consacrant des ressources suffisantes aux mécanismes mentionnés au paragraphe 37 ci ‑dessus. Le Comité lui recommande en outre de mener des campagnes de sensibilisation en direction des parents, des tuteurs et des enseignants, et de coopérer avec, entre autres, les fournisseurs d’accès Internet afin de protéger les enfants contre l’accès à des contenus nocifs, violents ou pornographiques par le canal des clubs vidéos et de l’Internet.

Châtiments corporels

39.Le Comité relève avec une vive inquiétude que les châtiments corporels sont légaux à la maison et dans les institutions. Malgré les mesures prises pour remédier à cette situation dans le contexte des sanctions disciplinaires à l’école, le Comité s’inquiète du fait que la loi n’interdit pas les châtiments corporels à l’école et qu’ils constituent, dans toute la société, une méthode de discipline très répandue, en raison de l’attitude générale de tolérance à l’égard de cette pratique.

40. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’interdire expressément par voie législative les châtiments corporels dans la famille, à l’école et dans les autres institutions et de faire respecter les mesures d’interdiction en vigueur;

b) De réaliser une étude exhaustive pour déterminer les causes, la nature et l’ampleur des châtiments corporels et une évaluation de l’impact des mesures que l’État partie à prises à ce jour en vue de réduire et d’éliminer les châtiments corporels;

c) De mener des campagnes d’éducation, de sensibilisation et de mobilisation du public sur les effets nuisibles des châtiments corporels en vue de faire évoluer les mentalités dans ce domaine et de promouvoir des formes positives, non violentes et participatives d’éducation;

d) De lancer un programme éducatif de lutte contre les châtiments corporels axé à la fois sur les droits de l’enfant et sur les aspects psychologiques du phénomène; et

e) D’assurer la réadaptation et la réinsertion sociale des victimes de châtiments corporels.

41. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son Observation générale n o  8 (2006) concernant le droit des enfants d’être protégés contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments.

4. Environnement familial et protection de remplacement (art. 5, 18 (1 ‑2), 9 ‑11, 19 ‑21, 25, 27 4) et 39)

Protection de remplacement

42.Le Comité exprime à nouveau sa préoccupation face au nombre élevé d’enfants ayant besoin d’une protection de remplacement, à l’insuffisance de la capacité des structures de protection de remplacement et au manque de soutien pour les structures existantes. Le Comité regrette également le caractère limité des informations et des données concernant les enfants qui bénéficient d’une protection de remplacement, en particulier sur l’évaluation de la qualité de la prise en charge et le réexamen des placements.

43. Compte tenu des recommandations qu’il a adoptées lors de la journée de débat général consacrée aux enfants sans protection parentale, le 16 septembre 2005 (CRC/C/153, par. 636 à 689), le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre des mesures pour éviter que des enfants ne soient séparés de leur famille;

b) D’affecter des ressources financières et humaines suffisantes pour garantir une prise en charge et une protection de qualité aux enfants privés de famille;

c) De dispenser une formation complémentaire aux travailleurs sociaux;

d) D’instituer des mécanismes indépendants de plaintes concernant les institutions de placement et d’évaluer périodiquement le placement des enfants;

e) De créer des mécanismes efficaces d’évaluation des institutions de placement et de veiller à ce que ces évaluations donnent lieu à des consultations directes avec les enfants;

f) De développer, normaliser et contrôler la qualité des structures de protection de remplacement et des programmes et services connexes.

Adoption

44.Tout en prenant acte des efforts déployés par l’État partie pour réviser ses procédures d’adoption, le Comité s’inquiète du manque d’information et de données concernant les adoptions internationales, nationales et «informelles».

45. Le pays recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale à tous les stades de la procédure d’adoption. Il lui recommande en outre:

a) De réglementer l’adoption nationale, par exemple dans le cadre de la famille élargie et de la communauté, en se conformant à la Convention, en vue de renforcer la protection des droits des enfants adoptés;

b) D’assurer la large diffusion des dispositions pertinentes du Code des personnes et de la famille;

c) De ratifier la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, de 1993;

d) De solliciter l’assistance technique de l’UNICEF, entre autres.

Violence, abus et négligence

46.Tout en se félicitant des efforts entrepris pour combattre toutes les formes d’abus et de violence contre les enfants, le Comité demeure préoccupé par la gravité du problème de la violence contre les enfants et des abus commis sur les enfants dans la famille. Il s’inquiète en outre de la portée limitée des mesures et mécanismes mis en place pour prévenir et combattre la maltraitance, la négligence et les abus, du manque de moyens financiers et humains, du nombre insuffisant de professionnels formés à la prévention et à la lutte contre les abus, et de l’absence d’efforts de sensibilisation et d’information, mais aussi de statistiques concernant ces pratiques.

47. Eu égard à l’article 19, le Comité prie instamment l’État partie:

a) De mener une étude approfondie pour déterminer la nature et l’ampleur du phénomène de la maltraitance et des abus sur les enfants, d’élaborer des indicateurs et de définir des politiques et des programmes pour y remédier;

b) D’améliorer le signalement des cas de violences et d’abus à enfant, par exemple en instituant des procédures de signalement obligatoires pour les professionnels de l’enfance et en formant les professionnels tels que les enseignants, les agents de la force publique, les agents de santé, les travailleurs sociaux et les juges au dépistage, au signalement et à la gestion des cas d’abus et de maltraitance à enfant;

c) De mettre en place des procédures et des mécanismes adaptés aux enfants permettant d’enregistrer, d’instruire et de suivre les plaintes, et d’intervenir au besoin, et de traduire les auteurs d’abus et de maltraitance en justice, en veillant à ce que les enfants ayant subi des abus ne soient pas victimisés durant la procédure judiciaire et que leur intimité soit protégée;

d) De renforcer les services de protection de l’enfance, en particulier la Brigade pour la protection des mineurs, en leur affectant davantage de ressources financières et humaines;

e) De mener des campagnes de sensibilisation et d’éducation, avec la participation active des enfants eux ‑mêmes, en vue de prévenir et combattre toutes les formes d’abus, y compris sexuels, et de faire évoluer les mentalités et les pratiques culturelles dominantes en la matière;

f) De collaborer plus étroitement avec le service d’écoute téléphonique gratuit, pour que celui ‑ci puisse atteindre davantage d’enfants, particulièrement dans les régions reculées, d’ouvrir la ligne 24 heures sur 24 et de la rendre accessible par un numéro gratuit à trois chiffres, de mener des efforts de sensibilisation auprès des enfants et de consacrer davantage de ressources, financières notamment, pour donner au service téléphonique les moyens de mieux venir en aide aux enfants en situation d’urgence;

g) De continuer à assurer une prise en charge, une réadaptation physique et psychologique et une réinsertion sociale adéquates aux enfants victimes de violence;

h) De solliciter une assistance technique de l’UNICEF, entre autres.

48. Dans le contexte de l’étude approfondie du Secrétaire général sur la question de la violence contre les enfants et du questionnaire adressé aux gouvernements au titre de cette étude, le Comité note avec satisfaction les réponses écrites de l’État partie, ainsi que sa participation à la Consultation régionale pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale tenue au Mali du 23 au 25 mai 2005. Il recommande à l’État partie de mettre à profit les résultats de cette consultation régionale pour prendre, en partenariat avec la société civile, des dispositions en vue de garantir la protection de chaque enfant contre toutes les formes de violence physique et psychologique, et de donner une impulsion au lancement d’actions concrètes, au besoin assorties d’un échéancier, destinées à prévenir et combattre ce phénomène. En outre, le Comité tient à appeler l’attention de l’État partie sur le rapport de l’expert indépendant chargé de l’étude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants (A/61/299) et l’encourage à prendre toutes les mesures appropriées pour mettre en œuvre les recommandations générales et les recommandations particulières formulées dans ce rapport.

5. Santé et bien ‑être (art. 6, 18 3), 23, 24, 26, 27 (1 ‑3))

Enfants handicapés

49.Tout en prenant note des mesures prises par l’État partie, en particulier la mise en œuvre du programme d’action pour 2001‑2006, le Comité exprime à nouveau sa préoccupation face à la persistance d’une discrimination de fait, au manque de données statistiques sur le nombre d’enfants handicapés et à l’insuffisance des possibilités éducatives offertes à ces enfants.

50. Le Comité recommande à l’État partie, eu égard aux Règles des Nations Unies pour l’égalisation des chances des handicapés (résolution 48/96 de l’Assemblée générale) et aux recommandations adoptées par le Comité au cours de la journée de débat général consacrée aux droits des enfants handicapés (voir CRC/C/69) le 6 octobre 1997:

a) De mener à son terme l’enquête sur les personnes handicapées;

b) D’envisager, de formuler et d’adopter une politique ou stratégie nationale relative aux personnes handicapées, en portant une attention particulière aux enfants handicapés;

c) D’envisager l’élaboration d’un plan interinstitutions avec le soutien des collectivités locales et de la société civile dans le but de renforcer la coopération entre les enseignants, la direction des établissements, les parents, les enfants et la société dans son ensemble;

d) D’assurer à tous les enfants handicapés l’accès tant à des services sociaux et des services de santé adéquats, notamment des moyens de soutien et des services à assise communautaire, qu’à l’environnement physique, à l’information et aux moyens de communications, et de poursuivre ses efforts tendant à normaliser la prestation de ces services;

e) Affecter les ressources nécessaires pour garantir à tous les enfants handicapés, notamment ceux des zones rurales, l’accès aux médicaments, à un personnel qualifié, aux installations et aux services;

f) De mettre à disposition les ressources financières nécessaires pour développer l’éducation des enfants ayant des besoins spéciaux et encourager davantage leur insertion dans le système éducatif ordinaire et la société;

g) De recueillir des données statistiques adéquates sur les enfants handicapés et d’utiliser des données désagrégées aux fins de la formulation de politiques et programmes destinés à promouvoir l’égalité des chances pour ces enfants dans la société, en étant particulièrement attentif aux enfants handicapés vivant en milieu rural;

h) De sensibiliser à la situation des enfants handicapés, de promouvoir la tolérance à leur égard dans l’ensemble des communautés et de diffuser des informations propres à concourir à éliminer la pratique traditionnelle de l’infanticide.

Santé et services médicaux

51.Le Comité prend note avec satisfaction des divers programmes et projets entrepris par l’État partie dans le domaine de la santé, notamment l’Initiative de Bamako, des résultats et de la réussite du programme de vaccination et de l’approche intégrée en matière de survie de l’enfant, ainsi que de la forte proportion de femmes bénéficiant de soins prénatals et de la proportion assez élevée de naissances se déroulant en présence d’une accoucheuse. Le Comité constate toutefois avec préoccupation que les taux de mortalité infantile, néonatale et maternelle demeurent très élevés. Il est également préoccupé par la forte incidence de la malnutrition dans l’État partie.

52. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à accorder la priorité à l’affectation de ressources financières et humaines au secteur de la santé, afin d’assurer l’accès égal des services sanitaires de qualité à tous les enfants, dont les enfants vivant dans les zones les plus reculées du pays. En outre, le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses efforts visant à améliorer la situation sanitaire des enfants, en particulier en menant les actions suivantes:

a) Continuer à assurer la fourniture de l’assistance médicale et l’accès aux soins de santé nécessaires à tous les enfants en privilégiant le développement des soins de santé primaires;

b) Renforcer ses efforts tendant à faire baisser encore la mortalité infantile et postinfantile, en privilégiant les mesures de prévention et de traitement, y compris la prise de doses de vaccins, en améliorant la nutrition et les conditions sanitaires, en accroissant l’accès à l’eau potable et en luttant contre les maladies transmissibles et le paludisme;

c) Amplifier ses efforts visant à faire baisser encore la mortalité maternelle dans l’ensemble du pays, en particulier en généralisant des actions spécifiques propres à prévenir les hémorragies du post ‑partum et les autres grandes causes de mortalité maternelle;

d) D’affecter des ressources suffisantes à la mise en œuvre du Programme de prise en charge intégré des maladies des enfants (PCIME);

e) Poursuivre les efforts de vaccination, notamment en renforçant les activités de proximité et en ciblant les enfants sortis du programme de vaccination, ainsi qu’en mettant en œuvre efficacement l’ensemble d’interventions intégrées dans toutes les zones sanitaires;

f) Améliorer l’efficacité des soins obstétriques essentiels de base et des soins obstétriques d’urgence dans les hôpitaux, en particulier en mettant à disposition un nombre suffisant d’agents qualifiés, ainsi que des équipements, des approvisionnements et des médicaments d’urgence en quantités voulues, en augmentant le nombre d’hôpitaux départementaux, en réévaluant les hôpitaux certifiés «amis des bébés» et en augmentant leur nombre − actuellement assez peu élevé;

g) Veiller à ce que toutes les couches de la société aient accès à des informations et à une éducation ainsi qu’à un soutien concernant l’utilisation des connaissances de base relatives à la santé et à la nutrition des enfants, s’agissant en particulier des avantages de l’allaitement maternel exclusif pour les enfants jusqu’à l’âge de 6 mois;

h) Mettre en place des sociétés mutualistes de couverture médicale à assise communautaire;

i) Solliciter la coopération technique de l’UNICEF et de l’OMS.

Pratiques traditionnelles préjudiciables

53.Le Comité se félicite des efforts déployés par l’État partie aux fins de prévenir la pratique des mutilations génitales féminines, en particulier de la loi de 2003 sur les mutilations génitales féminines, et constate avec satisfaction que certains praticiens ont abandonné cette pratique. Toutefois, le Comité se dit à nouveau préoccupé par la persistance de fait de pratiques nocives aux fillettes, notamment les mutilations génitales féminines. Le Comité souligne que ces mutilations sont incompatibles avec les principes et les dispositions de la Convention.

54. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer et d’accélérer ses efforts de prévention en cours contre les mutilations génitales féminines et de mener des campagnes de sensibilisation visant à combattre et à éradiquer cette pratique traditionnelle et d’autres pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé, à la survie et au développement des enfants, en particulier des fillettes. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place des programmes de sensibilisation des praticiens et de la population afin de faire évoluer les comportements traditionnels et d’interdire les pratiques nocives, en s’appuyant sur la famille élargie et les chefs traditionnels et religieux. Le Comité recommande aussi à l’État partie de mettre en place des procédures de suivi des personnes qui ont renoncé à pratiquer des mutilations génitales féminines et, à cet égard, de renforcer les relations avec les autorités locales des pays voisins, comme préconisé durant le dialogue avec l’État partie.

Santé des adolescents

55.Le Comité constate avec inquiétude que trop peu d’attention a été accordée aux questions liées à la santé des adolescents, notamment aux préoccupations touchant à leur santé développementale, mentale et procréative. Le Comité est tout particulièrement préoccupé par la situation des filles face à la forte proportion de grossesses non désirées et de complications découlant d’avortements effectués dans des conditions d’hygiène insuffisantes, car ces phénomènes ont des répercussions néfastes sur la santé et le développement des filles, et il note le peu de programmes et de services existant dans le domaine de la santé des adolescents en milieu scolaire. Tout en prenant note des informations que la délégation a fournies au sujet de l’existence d’un centre pour toxicomanes, le Comité s’inquiète du manque de renseignements et de données sur la prévalence de la toxicomanie et l’abus d’alcool dans l’État partie et constate avec inquiétude que ces pratiques ne sont pas interdites.

56. À la lumière de son Observation générale n o  4 (2003) concernant la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie:

a) D’entreprendre une étude exhaustive en vue de déterminer la nature et l’ampleur des problèmes de santé des adolescents et, avec la participation des adolescents, de se servir de ces résultats pour formuler des politiques et programmes relatifs à la santé des adolescents en mettant un accent particulier sur la prévention des grossesses précoces et des infections sexuellement transmissibles (IST), en prévoyant en particulier des activités concernant la santé procréative;

b) D’adapter les services de conseil concernant la santé mentale et la santé reproductive aux besoins des adolescents et de les faire connaître et de les rendre accessible à ces derniers;

c) De renforcer les mesures destinées à remédier au problème de la consommation d’alcool et de drogues chez les enfants et de veiller à ce que le centre de traitement des toxicomanes bénéficie des ressources humaines et financières nécessaires pour en assurer le bon fonctionnement;

d) De solliciter l’assistance technique de l’UNICEF, l’OMS et du FNUAP.

VIH/sida

57.Le Comité accueille avec satisfaction les différentes mesures prises par l’État partie, notamment la campagne «Unissons‑nous pour les enfants contre le sida», le Cadre national de lutte contre le VIH/sida 2006‑2010, la loi sur la prévention, le traitement et la prise en charge du VIH/sida et la création du Comité national de lutte contre le sida. Toutefois, le Comité demeure profondément préoccupé par la forte prévalence du VIH/sida et par la grande vulnérabilité des enfants et des femmes en âge de procréer au risque de contracter le VIH/sida. Il est en outre préoccupé par le petit nombre d’enfants infectés par le VIH/sida ayant accès à des antirétroviraux.

58. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures suivantes, en tenant compte de son Observation générale n o 3 (2003) sur le VIH/sida et les droits de l’enfant, ainsi que des Directives internationales concernant le VIH/sida et les droits de l’homme (E/CN.4/1997/37):

a) Renforcer le Comité national de lutte contre le sida et les dispositifs fournissant des services de prévention, des soins et des traitements aux enfants et aux femmes;

b) Renforcer sa lutte contre la propagation et les effets du VIH/sida, notamment en fournissant gratuitement à toutes les femmes enceintes des services de santé et des services sociaux et en assurant la mise à disposition de médicaments antirétroviraux et de soins pédiatriques;

c) S’attacher à améliorer la coordination entre les différentes composantes et à passer à l’échelle supérieure afin d’étendre à l’ensemble du pays les activités de prévention de la transmission mère ‑enfant du VIH/sida;

d) Amplifier son assistance en matière de protection et de prévention en faveur des orphelins et des autres enfants vulnérables, en particulier des adolescents;

e) Faciliter la conjonction de ces efforts aux fins de l’amélioration des soins en faveur de tous les orphelins et de l’assistance au réseau national d’associations de personnes vivant avec le VIH/sida;

f) Mettre en place un système de dépistage volontaire du VIH/sida pleinement respectueux du droit à l’intimité de la vie privée et à la confidentialité;

g) Combattre la stigmatisation et la discrimination dont sont victimes les personnes infectés par le VIH/sida, en particulier les enfants;

h) Mener des campagnes d’information globales sur le VIH/sida, ses modes de transmission, son traitement et sa prévention, ainsi que d’éducation sexuelle, notamment avec la promotion des préservatifs, et dispenser une formation dans ce domaine aux enseignants et aux autres pédagogues;

i) Associer les enfants à l’élaboration et à l’application de politiques et stratégies contre le VIH/sida.

Niveau de vie

59.Le Comité s’inquiète de l’omniprésence de la pauvreté et déplore le manque d’information sur l’ampleur effective du phénomène des enfants vivant dans la pauvreté. Le Comité s’inquiète aussi des disparités régionales en termes de niveau de vie et de la corrélation directe existant entre pauvreté, état de santé/soins de santé et accès à l’éducation. Tout en prenant acte des progrès accomplis en matière d’approvisionnement en eau, le Comité est préoccupé par l’accès limité à l’eau potable et aux ouvrages d’assainissement dans le pays.

60. Le Comité recommande que, conformément à l’article 27 de la Convention, l’État partie apporte un soutien et une aide matérielle accrus en privilégiant les familles les plus marginalisées et les plus défavorisées, et garantisse le droit des enfants à un niveau de vie suffisant. À cet égard, le Comité recommande à l’ État partie:

a) D’être particulièrement attentif aux droits et aux besoins des enfants lors de la mise en œuvre des plans et programmes nationaux de développement et de l’élaboration du deuxième document de stratégie pour la réduction de la pauvreté;

b) De mettre en place dans les services de santé des mesures spécifiques pour éviter que les enfants et les mères vivant dans la pauvreté soient exclus du bénéfice des soins curatifs et, plus particulièrement, des soins de santé préventifs et promotionnels;

c) D’amplifier les efforts qu’il déploie pour assurer un assainissement adéquat et un accès satisfaisant à l’eau potable dans l’ensemble du pays, notamment en améliorant la capacité des services techniques à employer tous les crédits mis à leur disposition et la capacité du dispositif de gestion communautaire des points d’eau afin de pérenniser un approvisionnement en eau à moindre coût pour les usagers;

d) D’entreprendre une action à long terme à grande échelle, en coopération avec les parties prenantes concernées, en vue d’améliorer l’assainissement et l’hygiène des ménages, en particulier en milieu rural.

6. Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29 et 31 de la Convention)

Éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles

61.Le Comité prend note avec satisfaction des divers efforts déployés par l’État partie, notamment l’adoption du plan d’action national «L’éducation pour tous» et le plan de développement décennal pour le secteur de l’éducation qui, comme la délégation l’a indiqué, fera l’objet d’une révision. Le Comité se félicite du plan prévoyant d’attribuer des subventions destinées à couvrir le coût de l’éducation pour tous les enfants du pays, ainsi que des réformes récentes axées sur l’amélioration de la gestion financière des ressources éducatives. Néanmoins, le Comité est préoccupé par le taux élevé d’analphabétisme, le grand nombre d’abandons scolaires, le surpeuplement des salles de classe, la faiblesse du taux de passage dans le secondaire, l’existence d’enseignants vacataires non qualifiés, l’insuffisance du nombre d’enseignants formés et d’établissements scolaires en activité, l’insuffisance des crédits budgétaires affectés aux établissements d’enseignement préprimaire, primaire et secondaire, la piètre qualité de l’éducation, et le problème des violences et du harcèlement sexuel dans les écoles. Le Comité constate également avec préoccupation que les programmes d’enseignement des écoles coraniques ne sont pas conformes à l’article 29 de la Convention.

62. À la lumière des articles 28 et 29 de la Convention et compte tenu de son Observation générale n o  1 (2001) sur les buts de l’éducation, le Comité recommande à l’État partie de continuer à affecter des ressources financières, humaines et techniques suffisantes aux fins suivantes:

a) Réviser le plan de développement décennal pour le secteur de l’éducation et veiller à ce que les ressources voulues soient affectées à sa bonne mise en œuvre;

b) Prendre toutes les mesures requises pour assurer la gratuité de l’enseignement primaire, tant en termes de coûts directs qu’indirects, et prendre des mesures pour éviter que les enfants n’abandonnent leurs études primaires;

c) Prendre des mesures de prévention contre les châtiments corporels, les violences et le harcèlement sexuel dans les écoles;

d) Porter une attention spéciale aux disparités entre hommes et femmes et aux disparités socioéconomiques et régionales concernant l’accès à l’éducation et le plein exercice du droit à l’éducation, notamment en adoptant des mesures spécifiques propres à éviter que les enfants des ménages économiquement faibles ne soient exclus et à leur assurer l’égalité des chances;

e) Renforcer la mise en œuvre du programme d’enseignent élémentaire afin d’accélérer l’éducation des filles et prendre des mesures efficaces pour réduire les disparités grandissantes entre garçons et filles en termes de taux d’alphabétisation, en particulier des mesures destinées à en finir avec le préjugé culturel selon lequel l’alphabétisation concernerait principalement les garçons;

f) Continuer à prendre des mesures visant à accroître le taux de scolarisation dans le secondaire et dans l’enseignement technique;

g) Accroître le nombre d’enseignants qualifiés, en particulier d’enseignantes, construire de nouveaux établissements scolaires, en particulier dans les zones rurales, et amplifier les efforts tendant à améliorer la qualité de l’enseignement en dispensant une formation appropriée et continue aux enseignants, y compris aux enseignants vacataires;

h) Concevoir et exécuter un programme d’activité ayant pour objet d’offrir des possibilités éducatives de remplacement aux enfants non scolarisés et aux enfants ayant abandonné leurs études, faire une place aux questions de disparités homme ‑femme, à l’acquisition de connaissances pratiques et à la sensibilisation au VIH/sida dans la formation des enseignants, en conjonction avec une supervision renforcée et une orientation en cours d’emploi des enseignants par les inspecteurs scolaires;

i) Continuer à dispenser, dans le cadre du programme scolaire, un enseignement relatif aux droits de l’homme, en particulier aux droits de l’enfant;

j) Prendre des mesures en vue de mettre le programme d’enseignement des écoles coraniques en conformité avec l’article 29 de la Convention et intégrer ces écoles dans le système d’enseignement général;

k) Améliorer la collecte et l’analyse des données statistiques.

Loisirs, activités récréatives et culturelles

63.Le Comité note avec inquiétude que, selon l’État partie, trop peu d’attention est accordée au droit des enfants au repos et aux loisirs, à leur droit de participer à des jeux et à des activités récréatives adaptés à leur âge et à leur droit de participer librement à la vie culturelle et artistique. Le Comité note aussi avec inquiétude que le droit au repos n’est pas systématiquement reconnu aux enfants qui suivent une éducation informelle et aux enfants qui travaillent.

64. Le Comité recommande à l’État partie de porter l’attention voulue à la planification de loisirs et d’activités culturelles à l’intention des enfants, en particulier des enfants des groupes vulnérables, en tenant compte du développement physique et psychologique de l’enfant. Le Comité recommande en outre à l’État partie de développer plus avant les activités extrascolaires pour tous les enfants et d’affecter des crédits budgétaires suffisants à leur bon déroulement. Le Comité recommande de plus que des dispositions soient prises avec les autorités locales et le Ministère des transports, des travaux publics et de l’urbanisme en vue de réserver des terrains aux loisirs et aux activités sportives dans toutes les subdivisions et de veiller à ce que le Ministère de la culture, des sports et des loisirs apporte un soutien accru aux organisations de jeunes.

7. Mesures spéciales de protection (art. 22, 30, 38, 39, 40, 37 b) à d) et 32 à 36)

Enfants demandeurs d’asile et réfugiés

65.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie respecte les droits des demandeurs d’asile et facilite l’accès des enfants de réfugiés aux services de base, en particulier aux soins de santé, à l’éducation et aux loisirs. Le Comité est toutefois préoccupé par les informations faisant état d’abus et de violence à l’encontre de ces enfants.

66. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De poursuivre ses efforts en faveur des enfants réfugiés, en particulier la prestation de services sociaux de base;

b) D’envisager d’adopter une politique nationale d’aide aux enfants en situation d’urgence et de prise en charge de ces enfants;

c) De poursuivre les auteurs de crimes contre des enfants réfugiés et de prendre toutes dispositions s’imposant à leur encontre conformément au Code pénal du Bénin.

Exploitation économique, y compris le travail des enfants

67.Le Comité est profondément préoccupé par la prévalence du travail des enfants chez les moins de 14 ans, par la pratique traditionnelle des employés domestiques ou «vidomégon», et par l’accroissement du nombre d’enfants travaillant dans le secteur informel.

68. Le Comité demande instamment à l’État partie:

a) De réaliser des enquêtes sur l’ensemble du territoire en vue de déterminer, entre autres, le nombre d’enfants travaillant, leur âge, les emplois qu’ils occupent, le nombre d’heures de travail qu’ils effectuent et la rémunération qu’ils perçoivent;

b) D’appliquer rigoureusement les dispositions du Code du travail concernant les enfants, ainsi que de diffuser des informations sur la législation relative au travail des enfants et de mettre en place des possibilités d’éducation adaptées pour les enfants;

c) De renforcer les mécanismes à assise communautaire de prévention et de lutte contre la traite intérieure d’enfants et l’exploitation économique des enfants, en particulier dans le secteur informel, et, dans le même temps, de mener des actions préventives visant à améliorer les conditions de vie et les possibilités économiques des familles, dans les zones rurales ainsi que dans les zones à risque élevé en portant une attention particulière aux familles les plus défavorisées;

d) De poursuivre sa coopération avec le Programme international pour l’élimination du travail des enfants de l’Organisation internationale du Travail (OIT/IPEC).

Exploitation sexuelle et abus sexuels

69.Le Comité se félicite de l’adoption de l’arrêté interministériel portant sanctions à infliger aux auteurs de violence sexuelle dans les écoles, mais exprime son inquiétude face aux informations faisant état d’abus et d’exploitation sexuelle sur la personne d’enfants et déplore le manque d’informations, dans le rapport de l’État partie, sur l’ampleur du problème et les mesures prises pour combattre ces pratiques. Tout en saluant l’adoption du Code des personnes et de la famille, qui fixe à 18 ans l’âge légal du mariage pour les garçons et les filles, le Comité regrette l’incertitude entourant l’âge légal minimum du consentement sexuel étant donné que la législation interne de l’État partie ne contient aucune disposition à cet effet.

70. Le Comité demande instamment à l’État partie:

a) De réaliser une étude globale en vue de déterminer les causes, la nature et l’ampleur de l’exploitation sexuelle et des abus sexuels à l’encontre des enfants;

b) D’adopter un plan d’action pour prévenir et combattre l’exploitation sexuelle et les abus sexuels;

c) De veiller à ce que les témoignages des enfants soient recueillis d’une manière appropriée et à ce que les personnes procédant à leur audition possèdent les qualifications requises;

d) De faire de la prévention des abus sexuels et de l’exploitation sexuelle un sujet d’étude obligatoire dans tous les programmes de formation pertinents;

e) De prendre des mesures propres à faire prendre pleinement conscience aux enseignants et aux enfants de la gravité des abus et des violences sexuelles et à faire appliquer rigoureusement l’arrêté interministériel portant sanctions à infliger aux auteurs de violence sexuelle de même que le principe du droit à une procédure régulière;

f) De veiller à ce que les auteurs d’abus sexuels et d’exploitation sexuelle soient traduits en justice;

g) De diffuser des informations et de dispenser une éducation à titre continu concernant le Code des personnes et de la famille tout en menant des actions visant à améliorer les connaissances et les capacités opérationnelles des intervenants dans le système judiciaire, et de procéder à la révision, et le cas échéant à la modification, de la législation existante en vue de fixer un âge minimum pour le consentement à des relations sexuelles;

h) De renforcer ses efforts, notamment en affectant des ressources humaines et financières suffisantes, visant à fournir des soins et à assurer la pleine réadaptation physique et psychologique ainsi que la réinsertion sociale des enfants victimes d’exploitation sexuelle et d’abus sexuels et d’envisager de mettre en place un centre pour la réadaptation et la réinsertion sociale des enfants victimes.

Vente, traite et enlèvement

71.Tout en accueillant avec satisfaction les efforts que l’État partie déploie pour combattre la traite d’enfants, notamment avec l’adoption d’une nouvelle loi réprimant la traite d’enfants, l’adoption d’une politique et d’une stratégie nationales pour la protection de l’enfance, et la réalisation de l’étude nationale sur la traite d’enfants, le Comité s’inquiète des informations selon lesquelles un grand nombre de mineurs de 18 ans, en particulier d’adolescentes, continuent à être victimes de traite aux fins d’exploitation sexuelle et de travail domestique dans d’autres pays.

72. Le Comité recommande à l’ État partie d’amplifier encore ses efforts visant à dépister, prévenir et combattre la traite d’enfants à des fins d’exploitation sexuelle et d’autres formes d’exploitation, en particulier en y affectant des ressources suffisantes. En outre, le Comité recommande à l’État partie:

a) D’améliorer les connaissances, les mécanismes de collecte de données et l’analyse des causes des problèmes touchant à la protection de l’enfance, y compris la traite, au niveau des autorités centrales, départementales et locales;

b) D’élaborer et appliquer un programme de prévention et de protection contre la traite dans le cadre de la politique et de la stratégie nationales de protection des enfants;

c) D’appliquer rigoureusement toutes les dispositions législatives réprimant la traite et de publier des informations sur ce phénomène, en particulier des statistiques;

d) De renforcer les mécanismes à assise communautaire de prévention et de lutte contre la traite et l’exploitation des enfants, y compris les comités locaux, et, dans le même temps, de mener des actions de prévention en vue d’améliorer les conditions de vie et les possibilités économiques dans les régions d’origine ainsi que dans les régions à risque élevé, en étant particulièrement attentif aux familles économiquement faibles;

e) De poursuivre ses efforts de collaboration transnationale aux fins de la lutte contre la traite d’enfants et de la conclusion et de l’application d’accords entre pays limitrophes;

f) De dispenser une formation adaptée et systématique à tous les groupes professionnels concernés, en particulier aux agents chargés de l’application des lois et aux gardes frontière;

g) De lancer des campagnes de sensibilisation s’adressant aux enfants, aux parents et aux autres personnes qui s’occupent des enfants en vue de prévenir la traite et l’exploitation sexuelle des enfants et la pornographie à caractère pédophile, et de sensibiliser les agents de l’État qui travaillent auprès des victimes de la traite et sont chargés de les protéger;

h) D’instituer un système adapté de suivi des enfants restitués à leur famille;

i) D’instaurer, en partenariat avec les parties prenantes, des programmes adéquats d’assistance, de réadaptation psychosociale et de réinsertion sociale pour enfants victimes d’exploitation sexuelle et/ou de traite, conformément à la Déclaration et au Programme d’action et à l’Engagement mondial adoptés respectivement lors des congrès mondiaux contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales de 1996 et 2001.

Enfants des rues

73.Le Comité exprime son inquiétude face à l’accroissement du nombre d’enfants vivant, travaillant et mendiant dans les rues (les talibés), en particulier dans les zones urbaines, et qui sont en outre victimes d’exploitation économique et sexuelle et exposés au risque d’infection par le VIH/sida. Le Comité s’inquiète aussi de l’absence de programmes visant à répondre aux besoins de ces enfants et à les protéger.

74. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De procéder à une évaluation systématique de la situation des enfants des rues afin de se faire une idée précise des causes fondamentales et de l’ampleur de ce phénomène;

b) D’élaborer et de mettre en œuvre, avec la participation active des enfants des rues eux ‑mêmes, une politique globale qui devrait s’attaquer aux causes profondes de cette situation, afin de prévenir ce phénomène et d’en réduire l’ampleur;

c) De fournir aux enfants des rues, en coordination avec les ONG, la protection nécessaire, ainsi qu’un hébergement, des services médicaux adéquats, une éducation et d’autres services sociaux, en fonction de leurs besoins;

d) De soutenir la réunification familiale si tel est l’intérêt supérieur de l’enfant.

Administration de la justice pour mineurs

75.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie, en particulier avec l’élaboration d’une stratégie visant à instituer un système de justice pour mineurs conforme à la Convention, qui prévoit des mesures de substitution pour les mineurs en conflit avec la loi dans le souci de réadapter les enfants, de favoriser la réinsertion dans la communauté et d’éviter la récidive. Le Comité s’inquiète toutefois des informations selon lesquelles: des conditions inhumaines régneraient dans les quartiers pour mineurs; les enfants peuvent être détenus pour une longue durée dans les postes de police et les centres de détention avant jugement; les enfants placés en centres de détention ne sont pas toujours séparés des adultes. Le Comité est également préoccupé par le nombre insuffisant de juges pour mineurs dans le pays, ainsi que par l’absence de mesures de substitution à la privation de liberté. Le Comité regrette de plus l’absence d’âge minimal pour la responsabilité pénale.

76. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour mettre son système d’administration de la justice pour mineurs en conformité avec la Convention, notamment ses articles 37, 40 et 39, ainsi qu’avec d’autres normes des Nations Unies dans le domaine de la justice pour mineurs, notamment l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (Règles de La Havane) et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale, ainsi que les recommandations formulées par le Comité lors de sa journée de débat général consacré à la justice pour mineurs (CRC/C/46, par. 203 à 238). À cet égard, le Comité recommande en particulier à l’État:

a) De faire appliquer rigoureusement la législation et les procédures judiciaires en vigueur grâce à une formation plus intensive et plus systématique des juges, des avocats des personnes de moins de 18 ans, des agents de l’administration pénitentiaire et des travailleurs sociaux concernant les droits et besoins spéciaux des enfants;

b) De fixer d’urgence un âge de la responsabilité pénale, à un niveau acceptable au regard des normes internationales;

c) De veiller à ce que les enfants privés de la liberté demeurent en contact régulier avec les membres de leur famille aussi longtemps qu’ils se trouvent dans le système de justice pour mineurs, le cas échéant;

d) De mettre en œuvre des mesures de substitution à la privation de liberté, telles que la mise à l’épreuve, les services d’intérêt général ou les peines avec sursis, afin que les personnes de moins de 18 ans ne soient privées de liberté qu’en dernier recours, pour une durée aussi courte que possible;

e) D’envisager l’institution de tribunaux des affaires familiales dotés de juges spécialisés dans les affaires de mineurs;

f) De faciliter la réinsertion des enfants dans leur famille et leur communauté, ainsi que leur suivi par les services sociaux.

8. Protocoles facultatifs

77. Le Comité invite l’État partie à soumettre ses rapports initiaux en application des Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant en temps voulu et lui recommande de publier les textes des deux Protocoles facultatifs dans son Journal officiel afin de les incorporer dans son droit écrit.

9. Suivi et diffusion

Suivi

78. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour garantir la pleine application des présentes recommandations, notamment en les transmettant au Conseil des ministres et aux autorités départementales et communales pour examen et suite à donner.

Diffusion

79. Le Comité recommande en outre que le deuxième rapport périodique et les réponses écrites fournies par l’État partie, ainsi que les recommandations (observations finales) qu’il a adoptées à l’issue de son examen, fassent l’objet d’une large diffusion dans les langues du pays, en particulier (mais pas exclusivement) via l’Internet, auprès du grand public, des organisations de la société civile, des mouvements de jeunesse, des groupes professionnels concernés et des enfants, afin de susciter un débat et de faire connaître la Convention, sa mise en œuvre et son suivi.

10. Prochain rapport

80. Le Comité invite l’État à présenter un document regroupant ses troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques d’ici au 1 er  mars 2011 (soit 18 mois avant la date à laquelle est attendu le cinquième rapport périodique). Il s’agit là d’une mesure exceptionnelle tenant au grand nombre de rapports que le Comité reçoit chaque année. Ce rapport ne devrait pas comporter plus de 120 pages (voir CRC/C/118). Le Comité attend de l’État partie qu’il présente par la suite un rapport tous les cinq ans, comme le prévoit la Convention.

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