Nations Unies

CRPD/C/26/D/53/2018

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

20 mai 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Décision adoptée par le Comité au titre du Protocole facultatif, concernant la communication no 53/2018 * , **

Communication présentée par :

J. M. (représenté par des conseils, Anna-Lena Norberg et Anna-Pia Beier, du Centre suédois d’assistance juridique aux réfugiés)

Victime(s) présumée(s) :

J. M.

État partie :

Suède

Date de la communication :

25 avril 2018 (date de la lettre initiale)

Date de la présente décision :

24 mars 2022

Questions de fond :

Expulsion vers l’Afghanistan

1.L’auteur de la communication est J. M., de nationalité afghane, qui dit être né en 1999. Il affirme que l’État partie a violé les droits qu’il tient des articles 10, 15, 16, 25, 26 et 27 de la Convention. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 14 janvier 2009. L’auteur est représenté par des conseils.

2.L’auteur est issu d’une famille hazara. Il affirme que, de ses 11 ans à ses 15 ans, en tant qu’aîné de la fratrie, il a été battu presque quotidiennement et violé en réunion à de multiples reprises dans son village par des membres d’une famille influente, qui voulait s’emparer des terres de sa famille. Il est arrivé en Suède et a demandé l’asile le 3 septembre 2015. Le 25 novembre 2016, l’Office suédois des migrations a rejeté sa demande d’asile, estimant que ses déclarations n’étaient pas crédibles et qu’il lui était possible de trouver refuge dans une autre partie de son pays. Il a estimé que l’auteur était né en 1998. La décision de l’Office a été confirmée par le Tribunal administratif de l’immigration le 19 mai 2017. Le 7 juillet 2017, la Cour administrative d’appel de l’immigration a refusé la demande d’autorisation de recours de l’auteur.

3.Dès qu’il a été en mesure, pour la première fois, de relater les violences sexuelles dont il avait été victime et après avoir été hospitalisé pour une transfusion sanguine et le traitement d’un prolapsus anal, l’auteur a déposé une demande de permis de séjour, invoquant des obstacles à l’exécution de la décision d’expulsion. Le 10 août 2017, l’Office suédois des migrations a rejeté sa demande au motif qu’il n’était pas impossible, en pratique, de l’expulser. Le 2 novembre 2017, le Tribunal administratif de l’immigration a rejeté le recours de l’auteur. Le 7 décembre 2017, la Cour administrative d’appel de l’immigration a refusé la demande d’autorisation de recours de l’auteur. Le 18 janvier 2018, l’Office des migrations a rejeté la deuxième demande de permis de séjour de l’auteur, qui avait à nouveau invoqué des obstacles à l’exécution de la décision d’expulsion. Le 15 février 2018, le Tribunal administratif de l’immigration a rejeté le recours de l’auteur. Le 16 mars 2018, la Cour administrative d’appel de l’immigration a refusé la demande d’autorisation de recours de l’auteur. Le 30 janvier 2018 et le 17 avril 2018, l’Office des migrations a rejeté respectivement les troisième et quatrième demandes de permis de séjour de l’auteur, et les décisions qu’il a rendues étaient insusceptibles d’appel.

4.L’auteur affirme que son expulsion constituerait une violation des droits qu’il tient des articles 10, 15, 16, 25, 26 et 27 de la Convention dans la mesure où il présente de fortes tendances suicidaires ; sa colite est potentiellement mortelle s’il ne reçoit pas les soins nécessaires ; il devrait retourner dans son village et se confronter à ses agresseurs pour obtenir une carte d’identité (« Tazkira ») ; son instabilité mentale l’a amené à remettre en question sa religion, de sorte qu’il serait exposé à des violences dans son pays ; le traitement médical à vie dont il a besoin n’est pas disponible dans son pays ; son état de santé limite son aptitude au travail.

5.Le 5 juin 2018, le Comité, agissant par l’intermédiaire de son rapporteur spécial chargé des communications au titre du Protocole facultatif, a décidé d’enregistrer la communication et d’accorder des mesures provisoires, priant l’État partie de surseoir à l’expulsion de l’auteur vers l’Afghanistan tant que sa communication serait à l’examen.

6.Dans ses observations datées du 3 avril 2019, l’État partie a affirmé que certaines parties de la communication étaient irrecevables ratione materiae et ratione loci, ainsi que pour non‑épuisement des recours internes. Il a aussi affirmé que la communication était insuffisamment étayée et dénuée de fondement. Il a fait remarquer, entre autres choses, que la décision d’expulsion de l’auteur serait frappée de prescription le 7 juillet 2021.

7.Dans ses observations datées du 5 septembre 2021, l’auteur a informé le Comité qu’il avait déposé une nouvelle demande d’asile et n’était plus visé par aucune décision d’expulsion. Il l’a toutefois prié de se contenter de suspendre l’examen de sa communication, car il pensait n’avoir guère de chances de bénéficier d’un réexamen complet de sa situation, tenant compte de tous les faits pertinents, dans le cadre de la nouvelle procédure de demande d’asile.

8.Dans ses observations complémentaires datées du 14 février 2022, l’État partie a demandé au Comité de mettre fin à l’examen de la communication, car la décision d’expulsion était prescrite et la demande d’asile de l’auteur demeurait pendante. L’État partie a indiqué qu’une nouvelle demande donnait lieu à un examen complet de tous les motifs d’asile. Il renvoyait au document d’orientation juridique établi par l’Office suédois des migrations en date du 30 novembre 2021, selon lequel la situation en Afghanistan avait évolué au point qu’aucune protection efficace ne pouvait être obtenue des autorités du pays, et une autre forme de protection interne n’était possible que dans des cas exceptionnels, ce qui rendait nécessaire un nouvel examen. Dans ses commentaires datés du 25 février 2022, l’auteur s’est déclaré favorable à la demande de l’État partie.

9.À une réunion tenue le 24 mars 2022, le Comité, ayant été informé que l’auteur ne risquait plus d’être expulsé vers l’Afghanistan, a conclu que la communication no 53/2018 était devenue sans objet et a décidé de mettre fin à son examen.