Nations Unies

CCPR/C/130/D/2396/2014

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

26 avril 2021

Original : français

Comité des droits de l’homme

Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, concernant la communication no 2396/2014*,**

Communication présentée par :

Floribert Ndjabu Ngabu, Pierre Célestin Mbodina Iribi et Bède Djokaba Lambi Longa (représentés par des conseils, A. W. Eikelboom, P. J. Schüller et G. Sluiter)

Victime(s) présumée(s)  :

Les auteurs

État partie :

République démocratique du Congo

Date de la communication :

28 novembre 2011 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application de l’article 92 du règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 27 mai 2014 (non publiée sous forme de document)

Date des constatations :

29 octobre 2020

Objet :

Arrestation arbitraire ; détention arbitraire ; droit d’être traduit dans le plus court délai devant un juge ; réparation de la détention arbitraire

Question (s) de procédure :

Non-coopération de l’État partie

Question (s) de fond :

Droit à la liberté et à la sécurité de la personne

Article (s) du Pacte :

9

Article (s) du Protocole facultatif :

4 (par. 2)

1.Les auteurs de la communication sont Floribert Ndjabu Ngabu, Pierre Célestin Mbodina Iribi et Bède Djokaba Lambi Longa, citoyens de la République démocratique du Congo, nés respectivement en 1971, en 1974 et en 1966. Ils allèguent une violation par l’État partie de l’article 9 du Pacte. La République démocratique du Congo a adhéré au Protocole facultatif se rapportant au Pacte le 1er novembre 1976. Les auteurs sont représentés par des conseils, A. W. Eikelboom, P. J. Schüller et G. Sluiter.

Rappel des faits présentés par les auteurs

2.1Les auteurs étaient actifs pour des organisations opposées au parti au pouvoir dans l’État partie. M. Ngabu était le dirigeant du Front des nationalistes et intégrationnistes. Il a été arrêté le 27 février 2005 à Kinshasa. M. Iribi est arrivé à Kinshasa de la province de l’Ituri en janvier 2005, en tant que représentant du Front des nationalistes et intégrationnistes. Il a été arrêté le 9 mars 2005, en même temps que plusieurs autres membres de ce groupe, dont Germain Katanga. M. Longa était arrivé à Kinshasa en qualité de porte-parole de l’Union des patriotes congolais. Il a été arrêté le 19 mars 2005, avec un certain nombre de membres de l’Union, notamment Thomas Lubanga.

2.2Depuis lors, les auteurs ont été détenus dans plusieurs centres de détention en République démocratique du Congo, jusqu’au 27 mars 2011, date où ils ont été transférés à La Haye, pour témoigner devant la Cour pénale internationale. Au moment de la soumission de la présente communication, ils étaient toujours détenus à La Haye.

2.3Lors de leurs arrestations, les auteurs ont été informés qu’ils étaient soupçonnés d’être impliqués dans l’assassinat, le 25 février 2005, de neuf soldats bangladais des forces de maintien de la paix des Nations Unies en Ituri. Aucune preuve n’a jamais été présentée à cet égard. Ils se trouvaient à Kinshasa au moment des meurtres. Ce n’est que le 18 avril 2006, alors qu’ils se trouvaient en détention sans justification depuis plus d’un an, que l’Auditeur général des forces armées a déposé une requête auprès de la Haute Cour militaire pour proroger la détention provisoire des auteurs ainsi que de cinq autres personnes. Dans sa requête, l’Auditeur général rappelle que les inculpés ont été placés en détention provisoire le 19 mars 2005, et que l’article 209 du Code judiciaire militaire stipule que la prolongation de la détention provisoire ne peut dépasser douze mois consécutifs, à moins que la juridiction compétente n’autorise une prorogation. La requête indique qu’il est reproché aux auteurs d’avoir commis des meurtres constituant des crimes contre l’humanité en Ituri entre mai 2003 et décembre 2005. Les auteurs font observer que cette période couvre presque une année de leur détention. Dans leurs demandes de mise en liberté provisoire, ils soulignent que leurs arrestations ont eu lieu de façon irrégulière et que leur détention est irrégulière et illégale, du fait de sa longueur et de l’absence des pièces la justifiant.

2.4Par décision du 1er décembre 2006, la Haute Cour militaire a autorisé la prorogation de la détention pour une durée de soixante jours ouvrables, qu’elle estimait nécessaire pour compléter l’instruction. Elle a de nouveau autorisé une prorogation de soixante jours ouvrables le 10 avril 2007. Aucune autre prorogation n’a été accordée. Ainsi, au moment de la soumission de la présente communication, les auteurs avaient été détenus sans justification depuis presque quatre ans et demi.

2.5M. Longa a envoyé des lettres demandant sa libération à l’Auditeur général en mai 2006 et au Premier Président de la Haute Cour militaire en juin 2007, affirmant dans cette deuxième lettre le caractère irrégulier de son maintien en détention après la fin de la validité de la dernière prorogation. Il n’a reçu aucune réponse. Le 4 décembre 2009, le conseil des auteurs et de quatre autres détenus a soulevé la même question dans une lettre adressée à l’Auditeur général, dont il a envoyé des copies au Ministre de la défense nationale, au Ministre de la justice, au Ministre des droits humains et au Premier Président de la Haute Cour militaire. Il y relevait que la dernière prorogation avait cours jusqu’au 10 juin 2007 et avait donc été largement dépassée, sans que l’Auditeur général se préoccupât de ses clients.

2.6Le 18 mai 2010, en l’absence de réponse, le nouveau conseil des détenus a envoyé une lettre ouverte au Président de la République de l’État partie, dans laquelle il faisait observer que ses clients étaient détenus à la prison centrale de Kinshasa depuis plus de cinq ans, qu’ils étaient initialement poursuivis pour atteinte à la sûreté de l’État, puis pour l’assassinat de neuf soldats de maintien de la paix et ensuite pour crimes contre l’humanité, et que leur détention n’avait plus été prorogée depuis le 10 juin 2007. Il y affirmait que leur maintien en détention constituait une violation de la présomption d’innocence, du droit à un bon traitement en cas de détention, de la garantie d’un procès équitable, du droit d’être jugé dans un délai raisonnable et du droit à la défense. La réception de cette lettre a été confirmée par le Président du Sénat, mais aucune autre démarche n’a été entreprise.

2.7En mars 2011, les auteurs ont été transférés à La Haye, à la demande de la Cour pénale internationale. Le 19 octobre 2011, celle-ci a confirmé que la détention des auteurs était sous l’autorité exclusive de la République démocratique du Congo, à la suite de la demande de la Cour de faciliter leur témoignage à son siège.

Teneur de la plainte

3.1Les auteurs allèguent la violation de leurs droits au titre de l’article 9 du Pacte. En ce qui concerne le paragraphe 1 dudit article, aucune preuve des charges portées contre les auteurs n’a jamais été présentée. En outre, la charge de leur implication dans l’assassinat de neuf soldats de maintien de la paix en février 2005 a apparemment été abandonnée plus d’un an plus tard, quand il a été demandé à la Haute Cour militaire de formaliser la détention provisoire, car les auteurs ont dès lors été accusés d’avoir commis des crimes contre l’humanité. Bien que les autorités de l’État partie aient déclaré devant la Haute Cour militaire que cette dernière recevrait des informations − vraisemblablement incriminantes − de la part de la Cour pénale internationale, celle-ci n’a, à la connaissance des auteurs, jamais fourni de tels renseignements. En l’absence d’autres informations, il doit être supposé que de tels renseignements n’existent pas. Faute de preuve, les arrestations doivent être considérées comme arbitraires. Les auteurs évoquent l’affaire Ilombe et Shandwe c. République démocratique du Congo, dans laquelle le Comité a estimé que la détention de civils sur ordre d’un tribunal militaire pendant plusieurs mois d’affilée sans possibilité de contestation pouvait être considérée comme une détention arbitraire au sens de l’article9 (par. 1) du Pacte.

3.2Se référant à leur grief au titre de l’article 9 (par. 2) du Pacte, les auteurs font valoir qu’ils n’ont pas été informés immédiatement des raisons de leurs arrestations. En outre, les charges se sont révélées fausses.

3.3Les auteurs soutiennent également que l’État partie a violé l’article9 (par. 3) du Pacte. La première autorisation de la détention provisoire des auteurs n’a été accordée que huit mois après la requête de l’Auditeur général. Les auteurs n’ont donc pas été traduits devant un juge dans le plus court délai. Selon eux, le Comité a déjà indiqué que ces délais ne devaient pas dépasser quelques jours, et que la détention provisoire devait être exceptionnelle et aussi brève que possible. En outre, les autorisations de prorogation ne couvrent que la période du 1er décembre 2006 au 2 juillet 2007.

3.4En outre, le Comité a déjà estimé que les décisions de la Cour d’ordre militaire n’étaient pas susceptibles de recours, ce qui implique une violation de l’article9 (par. 4) du Pacte.

3.5Conformément à l’article9 (par. 5) du Pacte, de même qu’à l’article2 (par. 3 a)) du Pacte et au paragraphe 15 de l’observation générale nº 31 (2004) du Comité, l’État partie doit accorder aux auteurs des recours utiles et exécutoiresqui devraient comprendre des réparations pécuniaires pour les préjudices moraux et matériels subis.En outre, les auteurs exigent leur libération immédiate et demandent au Comité d’inviter l’État partie à prendre des mesures pour donner effet à ses obligations au titre du Pacte et du Protocole facultatif, et pour éviter que des violations analogues se reproduisent à l’avenir. De plus, les auteurs sollicitent les vues du Comité sur la question de la responsabilité des tiers, dont les Pays‑Bas et la Cour pénale internationale, dans la continuation de leur détention.

3.6Il découle également du dossier que les auteurs ont fait valoir auprès de l’Auditeur général, en décembre 2009, et du Président de la République démocratique du Congo, en mai 2010, que leur droit au titre du deuxième paragraphe de l’article 19 de la Constitution de l’État partie à ce que leur cause soit entendue dans un délai raisonnable avait été violé, étant donné qu’au moment de la rédaction de ces lettres, leur procès n’avait pas encore été fixé devant un juge.

Défaut de coopération de l’État partie

4.Les 27 mai 2014, 11 février 2015, 25 novembre 2015 et 19 octobre 2018, le Comité a demandé à l’État partie de lui communiquer ses observations concernant la recevabilité et le fond de la communication. Le Comité regrette que l’État partie n’ait donné aucune information quant à la recevabilité ou au fond des allégations des auteurs. Il rappelle que l’article 4 (par. 2) du Protocole facultatif oblige les États parties à examiner de bonne foi toutes les allégations portées contre eux et à communiquer au Comité toutes les informations dont ils disposent. En l’absence de réponse de la part de l’État partie, il convient d’accorder le crédit voulu aux allégations des auteurs, dans la mesure où celles-ci ont été étayées.

Commentaires complémentaires des auteurs

5.1Dans leurs commentaires complémentaires du 15 novembre 2019 ainsi que des 27 et 28 février 2020, les auteurs font observer qu’ils ont été renvoyés en République démocratique du Congo à l’issue du rejet de leurs demandes d’asile par les autorités néerlandaises. M. Longa a été détenu à La Haye jusqu’au 18 octobre 2012. Il a ensuite été transféré à la prison militaire de Ndolo, en République démocratique du Congo, d’où il a été libéré provisoirement le 27 septembre 2013. M. Ngabu et M. Iribi ont été renvoyés en République démocratique du Congo le 6 juillet 2014. Ils ont également été placés à la prison militaire de Ndolo, où ils se trouvaient encore au moment de la soumission de ces commentaires complémentaires. Selon eux, leurs conditions de détention étaient loin d’être conformes aux normes internationales, malgré les mesures de protection formulées par la Cour pénale internationale.

5.2Les auteurs indiquent que leur procès devant la Haute Cour militaire a commencé mais qu’il se poursuit très lentement. La Cour est actuellement en train d’entendre les témoins. Les conditions de détention sont loin d’être conformes aux normes internationales. Les auteurs se plaignent d’un nombre d’incidents relatifs à leur procès, notamment des changements dans la composition de la Cour, des procédures de récusation concernant plusieurs juges, dont un ancien membre d’un groupe rebelle opposé aux auteurs, des retards injustifiés, un manque de moyens mis à la disposition de la défense par la Cour, un refus des témoins de comparaître, des menaces de l’officier du ministère public à l’encontre des auteurs, la classification de certains documents impliquant le régime de l’État partie comme secrets militaires, le refus du juge président de citer des hauts fonctionnaires, et un manque d’inspections des scènes de crime présumées. Les auteurs joignent des copies des lettres adressées par M. Ngabu au Premier Président de la Haute Cour Militaire et au Président de la République de l’État partie, datées respectivement du 5 novembre 2018 et du 22 mars 2019, dans lesquelles il demande sa mise en liberté provisoire.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

6.1Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 97 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

6.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’article5 (par. 2 a)) du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

6.3Le Comité rappelle que, conformément à l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif, il ne peut examiner aucune communication émanant d’un particulier sans s’être assuré que celui-ci a épuisé tous les recours internes disponibles. Le Comité note que les auteurs ont invoqué le caractère irrégulier et illégal de leur détention et ont demandé leur mise en liberté dans des lettres adressées à la Haute Cour militaire, à l’Auditeur général et au Président de la République, dont des copies ont été envoyées au Ministre de la défense nationale, au Ministre de la Justice et au Ministre des droits humains. Il note que l’État partie, en l’espèce, n’a pas contesté le fait que les auteurs ont épuisé tous les recours internes disponibles, ni la recevabilité de la requête. En conséquence, le Comité estime que les dispositions de l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif ne l’empêchent pas d’examiner la présente communication.

6.4Le Comité considère que la requête soulève des questions substantielles au titre de l’article9 du Pacte qui doivent être examinées quant au fond. Ne voyant aucun obstacle à la recevabilité de la communication, le Comité la déclare recevable et procède à son examen quant au fond.

Examen au fond

7.1Conformément à l’article 5 (par. 1) du Protocole facultatif, le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées.

7.2Le Comité note le grief des auteurs selon lequel ils sont victimes d’une violation de leurs droits au titre de l’article 9 (par. 1) du Pacte, du fait de leurs arrestations respectives et de leur détention, pour lesquelles aucune justification n’a été présentée jusqu’au début de leur procès devant la Haute Cour militaire. Le Comité note qu’il découle du dossier qu’après la fin de la validité de la dernière prorogation émise par l’Auditeur général le 9 mars 2006, le maintien en détention des auteurs n’a eu aucun motif de droit sauf pendant deux périodes non contiguës de soixante jours ouvrables, dont la dernière a pris fin le 2 juillet 2007. Le Comité rappelle qu’une privation de liberté sans fondement juridique constitue une détention arbitraire et illégale. En l’absence de réponse de l’État partie contredisant les allégations des auteurs, le Comité estime que l’absence d’autorisation de la détention des auteurs, notamment depuis le 2juillet 2007, fait apparaître une violation de l’article 9 (par. 1) du Pacte.

7.3En ce qui concerne l’allégation de violation de l’article 9 (par. 2) du Pacte, le Comité note que les auteurs se plaignent de ne pas avoir été informés immédiatement des raisons de leurs arrestations respectives. Il relève toutefois que les auteurs font également valoir qu’ils ont été informés de l’accusation relative à l’assassinat, le 25 février 2005, de neuf soldats bangladais des forces de maintien de la paix des Nations Unies en Ituri lors de leurs arrestations respectives, bien que ces accusations aient apparemment été abandonnées par la suite. Les auteurs reconnaissent également que l’Auditeur général des forces armées a ensuite déposé une requête auprès de la Haute Cour militaire pour proroger la détention provisoire des auteurs ainsi que de cinq autres personnes, qui étaient accusés d’avoir commis des meurtres constituant un crime contre l’humanité. En l’absence de toute autre information pertinente au dossier, le Comité, notant que les auteurs ont été informés des accusations portées contre eux lors de leurs arrestations, estime que les faits dont il est saisi ne font pas apparaître une violation des droits des auteurs au titre de l’article9 (par.2) du Pacte.

7.4Pour ce qui est du grief de violation au titre de l’article 9 (par. 3) du Pacte, le Comité constate que les auteurs allèguent que, bien que l’Auditeur général ait prorogé leur détention du 9 mars 2005 au 9 mars 2006, la première autorisation judiciaire n’a été accordée que le 1erdécembre 2006, soit plus d’un an et demi après leur mise en détention. Le Comité rappelle sa jurisprudence constante, qui établit que l’article 9 (par. 3) du Pacte confère à toute personne inculpée du chef d’une infraction pénale le droit de bénéficier du contrôle juridictionnel du placement en détention. Un élément inhérent au bon exercice du pouvoir judiciaire est qu’il doit être assuré par une autorité indépendante, objective et impartiale à l’égard des questions traitées. Le Comité note que l’État partie n’a pas apporté d’informations pour montrer que, sur le plan institutionnel, l’Auditeur général avait l’objectivité et l’impartialité nécessaires pour être considéré comme une «autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires» au sens de l’article9 (par. 3) du Pacte et, pour cette raison, l’allégation des auteurs selon laquelle l’Auditeur général n’est pas impartial doit être dûment prise en compte.En l’espèce, le Comité conclut que les faits qui lui ont été présentés font apparaître une violation des droits que les auteurs tiennent de l’article9 (par. 3) du Pacte.

7.5Le Comité note également le grief de violation de l’article9 (par. 4) du Pacte, selon lequel les auteurs n’ont pas eu accès à un recours pour contester la légalité de leur détention. Il constate que les auteurs ont souligné le caractère irrégulier et illégal de leur détention auprès de la Haute Cour militaire, mais que celle-ci,dans sa décision du 1erdécembre 2006, s’est déclarée incompétente à statuer sur la légalité des douze premiers mois de leur détention en raison de la législation interne de l’État partie sur ce point. Le Comité constate en outre que d’autres requêtes de mise en liberté adressées au Premier Président de la Haute Cour militaire et au Président de la République, dont des copies ont été envoyées au Ministre de la défense nationale, au Ministre de la justice et au Ministre des droits humains, sont restées sans réponse. En l’absence de toute information de l’État partie réfutant ces allégations ou de tout autre renseignement pertinent au dossier, le Comité conclut en l’espèce à une violation de l’article9 (par. 4) du Pacte.

8.Le Comité, agissant en vertu de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation par l’État partie de l’article9 (par 1, 3 et 4) du Pacte.

9.Conformément à l’article 2 (par. 3 a)) du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer aux auteurs un recours utile. Il a l’obligation d’accorder une réparation intégrale aux individus dont les droits garantis par le Pacte ont été violés. En conséquence, l’État partie est tenu, entre autres, de prendre des mesures appropriées pour : a) contrôler la légalité de la détention de M. Ngabu et de M. Iribi au regard des garanties au titre du Pacte, et procéder à leur libération immédiate ou à l’application d’autres mesures moins attentatoires à leur droit à la liberté le cas échéant ; et b) accorder aux auteurs une indemnisation adéquate. L’État partie est également tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas.

10.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité a compétence pour déterminer s’il y a ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations. L’État partie est invité en outre à rendre celles-ci publiques et à les diffuser largement dans ses langues officielles.