Nations Unies

CCPR/C/130/D/2526/2015

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

22 juillet 2021

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, concernant la communication no2526/2015 * , ** , ***

Communication présentée par :

Zhavlon Mirzakhodzhaev (non représenté par un conseil)

Victime(s) présumée(s) :

L’auteur

État partie :

Kirghizistan

Date de la communication :

10 septembre 2014 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application de l’article 92 du règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 9 janvier 2015 (non publiée sous forme de document)

Date des constatations :

6 novembre 2020

Objet :

Déni du droit à un procès équitable

Question ( s ) de procédure :

Néant

Question ( s ) de fond :

Procès équitable ; présomption d’innocence ; procès par défaut ; discrimination fondée sur l’origine ethnique

Article(s) du Pacte :

2 (par. 1), 14 (par. 1, 2 et 3 d) et e)), 17 (par.1) et 27

Article(s) du Protocole facultatif :

2 et 5 (par. 2 b))

1.L’auteur de la communication est Zhavlon Mirzakhodzhaev, de nationalité kirghize et d’origine ethnique ouzbèke, né en 1964, actuellement en exil avec sa famille. Il affirme être victime d’une violation par le Kirghizistan des droits qu’il tient des articles 2 (par. 1), 14 (par. 1, 2 et 3 d) et e)), 17 (par. 1) et 27 du Pacte. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour le Kirghizistan le 7 janvier 1995. L’auteur n’est pas représenté par un conseil.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1L’auteur, d’origine ethnique ouzbèke, vivait et travaillait dans la ville d’Och au Kirghizistan. En 2010, il dirigeait Mezon TV, une chaîne de télévision privée indépendante. Les émeutes d’avril 2010 ont conduit à l’éviction du Président Kurmanbek Bakiev et à la mise en place d’un gouvernement provisoire. Les tensions politiques et interethniques se sont aggravées. La chaîne de télévision que dirigeait l’auteur a continué d’émettre durant cette période. D’après l’auteur, Mezon TV, en coopération avec l’administration de la région d’Och, le maire de la ville d’Och et les représentants de la société civile, diffusait des appels à la réconciliation interethnique et politique. En mai et juin 2010, la communauté ouzbèke a été victime de nombreuses agressions dans les villes et régions d’Och et de Djalalabad.

2.2Par la suite, l’auteur a été accusé d’être l’un des responsables du conflit interethnique. Il indique que les accusations pénales portées contre lui avaient pour principale raison la retransmission par Mezon TV d’un rassemblement qui avait eu lieu le 15 mai 2010 dans la ville de Djalalabad. L’auteur affirme qu’il n’était pas présent physiquement à Djalalabad pendant les événements de mai et juin 2010 et qu’il n’a pas non plus participé à l’organisation de ce rassemblement, qui a réuni entre 6 000 et 7 000 personnes. Pendant cette période, il est resté à Och. D’après l’auteur, dans la vidéo qui a été diffusée, on pouvait voir à la fois des responsables ouzbeks et des responsables kirghizes s’exprimant pendant le rassemblement. Le document d’information durait entre quatre et sept minutes et ne contenait aucun commentaire. La chaîne avait pour mission d’informer le public des événements d’intérêt général. Du 5 au 10 juin 2010, l’auteur était à Bichkek où il assistait à une conférence. Il avait dû attendre deux jours pour pouvoir regagner son domicile en raison du chaos qui régnait dans la ville. La chaîne de télévision a diffusé son dernier programme le 10 juin 2010 à 4 heures ; on y voyait le maire d’Och et un représentant du Ministère des affaires intérieures qui appelaient la population à garder son calme. En juin 2010, l’auteur a reçu des avertissements et des menaces de mort par téléphone à plusieurs reprises. Craignant pour sa sécurité et sa vie ainsi que pour celles de sa famille, il a quitté le pays à une date non précisée fin juin.

2.3Le 16 juin 2011, le Parlement a adopté une résolution sur la base des informations fournies par la commission parlementaire provisoire chargée d’enquêter sur les événements de 2010. En violation du principe de présomption d’innocence, au paragraphe 7 de cette résolution l’auteur est désigné comme étant l’un des organisateurs des événements tragiques et comme participant à des activités nationalistes et séparatistes. Au paragraphe 21 de la résolution, il est demandé aux autorités judiciaires de conclure d’urgence la procédure judiciaire, ce qui constitue une immixtion directe dans la procédure judiciaire.

2.4Le 28 octobre 2011, à l’insu de l’auteur, le tribunal municipal de Djalalabad a déclaré celui-ci coupable d’avoir, entre autres, participé à des actes séparatistes et organisé des troubles de masse et des meurtres, et l’a condamné par défaut à une peine de quatorze années d’emprisonnement. L’auteur affirme qu’il n’a pas été informé de la date du procès et qu’il n’a pas pu faire en sorte d’être représenté à l’audience. Il a appris par les médias, après coup, qu’il avait été condamné.

2.5L’auteur a fait appel de sa condamnation auprès du tribunal régional de Djalalabad. Il a été débouté le 31 janvier 2012.

2.6Le 24 mars 2014, l’auteur a saisi la Cour suprême au titre de la procédure de contrôle. Il a été débouté le 13 mai 2014.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur allègue une violation des droits qu’il tient de l’article 14 (par. 1 et 2) du Pacte. Selon lui, la résolution parlementaire du 16 juin 2011 a influencé négativement les tribunaux, préjugé de l’issue du procès et donc entraîné une violation de son droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal impartial. La résolution ayant été adoptée avant la fin de son procès, l’auteur affirme que son droit d’être présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie a également été violé.

3.2L’auteur allègue une violation des droits qu’il tient de l’article 14 (par. 3 d)) du Pacte résultant du fait que le tribunal de première instance ne lui a pas notifié la date du procès et l’a jugé en son absence. Il prétend également qu’il y a eu violation de l’article 14 (par. 3 e)) du Pacte car il n’a pas pu interroger les témoins à charge ni obtenir que les témoins à décharge soient interrogés.

3.3L’auteur allègue une violation des droits qu’il tient de l’article 2 (par. 1) et de l’article 27 du Pacte, affirmant qu’il a fait l’objet d’un jugement discriminatoire en raison de son origine ethnique ouzbèke.

3.4Enfin, l’auteur allègue une violation des droits qu’il tient de l’article 17 du Pacte tenant au fait qu’en conséquence du procès inéquitable dont il a fait l’objet, son honneur a été sali, il a été qualifié de criminel et sa vie familiale a été bouleversée. Sa famille et lui ont dû fuir à l’étranger et sont privés de la possibilité de regagner leur pays d’origine.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1Dans une note verbale datée du 15 juillet 2015, l’État partie a fait part de ses observations sur la recevabilité et le fond, confirmant que l’auteur avait épuisé tous les recours internes qui lui étaient ouverts pour faire valoir ses allégations. L’État partie conteste plusieurs affirmations de l’auteur qu’il considère comme mensongères.

4.2L’État partie souligne que l’auteur lui-même indique que les tensions politiques et interethniques se sont aggravées au moment où les événements en question se sont produits. L’auteur avait donc pleinement conscience de la gravité de la situation, qui pouvait facilement faire encore dégénérer le conflit.

4.3L’État partie affirme qu’à la suite du coup d’État du 7 avril 2010, de nombreuses menaces larvées, notamment de régionalisme, de nationalisme et de séparatisme, se sont considérablement exacerbées. Selon lui, la chaîne Mezon TV a retransmis de façon répétée les images du rassemblement de Djalalabad et cette retransmission en continu a incontestablement joué un rôle de catalyseur dans le conflit. À cet égard, l’État partie soutient que l’auteur a déformé la réalité des événements de cet épisode clef dans le but de se soustraire à sa responsabilité.

4.4L’État partie réfute l’affirmation de l’auteur selon laquelle le rassemblement a réuni des personnes d’origine ethnique ouzbèke et des Kirghizes et affirme que les participants étaient tous d’origine ethnique ouzbèke. Il conteste également l’affirmation selon laquelle la vidéo du rassemblement a été diffusée une seule fois et durait entre quatre et sept minutes seulement. Cette fausse affirmation est, selon lui, aisément réfutée par de nombreux éléments de preuve. L’État partie affirme en outre que la version de la vidéo qui a été télédiffusée était plus complète que celle qui était visible sur Internet et contenait des scènes d’incitation à la haine interethnique, qui ont apparemment été retirées de la version mise en ligne.

4.5L’État partie conclut que l’auteur, alors qu’il avait pleinement conscience des conséquences que pouvaient avoir ses actes, a contribué à la mobilisation de la jeunesse ouzbèke autour de leaders séparatistes, même s’il continue de nier le lien de causalité évident existant entre les événements de Djalalabad et le conflit d’Och en juin 2010.

4.6L’État partie affirme également que l’armée et les forces de sécurité ont pris part au conflit sans se ranger du côté de l’une ou l’autre des parties rivales. Il conteste l’affirmation de l’auteur selon laquelle, le 10 juin 2010 à 4 heures, un programme de télévision montrait le maire d’Och et un représentant du Ministère des affaires intérieures appeler la population au calme. Il ajoute que les événements en question n’ont commencé que tard dans la soirée le même jour, et qu’il est donc impossible que ledit programme télévisé ait été diffusé tôt le matin. Pour la même raison, l’État partie conteste l’affirmation de l’auteur selon laquelle il n’a pas pu regagner son domicile durant deux jours.

4.7L’État partie réfute également l’affirmation de l’auteur selon laquelle le Parlement n’avait pas autorité pour rendre des conclusions avant que les tribunaux aient statué. Il précise que l’assemblée législative est pleinement habilitée à débattre des conclusions des commissions d’établissement des faits qu’elle a elle-même établies. De tels débats ne compromettent pas l’indépendance de la justice, et le verdict final est prononcé exclusivement par un tribunal.

4.8L’État partie fait valoir que les Kirghizes d’origine ethnique ouzbèke jouissent d’une gamme complète de droits politiques, sociaux et culturels sur son territoire. Toute accusation de nationalisme portée contre les autorités est donc sans fondement.

4.9L’État partie souligne par ailleurs que les appels au séparatisme lancés par certains responsables de la communauté ouzbèke sont passibles de sanctions pénales. L’auteur, en tant que directeur de Mezon TV, faisait partie des personnes qui ont formé une association de malfaiteurs avec M. Kadyrjan Batyrov (le fondateur de l’Université de l’amitié des peuples). En violation de l’article 23 de la loi sur les médias, l’auteur a activement soutenu M. Batyrov dans la concrétisation de ses intentions criminelles (notamment l’incitation aux tensions ethniques et interrégionales, les troubles de masse, et la saisie et la destruction de biens). Des résidents ont tenté de faire cesser ces activités criminelles en mai 2010 et les partisans de M. Batyrov s’en sont gravement pris à eux. Ces attaques ont entraîné une intensification des conflits ethniques dans la ville d’Och et dans les régions d’Och et de Djalalabad, qui ont fait de nombreux morts et blessés.

4.10L’auteur faisait partie des personnes contre lesquelles des poursuites pénales ont été engagées par la suite et qui, comme elles se cachaient, ont été jugées par défaut et reconnues coupables. Pendant le procès, l’auteur était représenté par un conseil, et la défense n’a déposé aucune motion ni aucune plainte pour une quelconque violation des garanties d’une procédure régulière ou des droits procéduraux de l’auteur. La culpabilité de l’auteur a été pleinement établie. L’État partie fait observer qu’étant donné l’importante couverture médiatique dont le procès a fait l’objet, l’auteur a dû apprendre sa condamnation par les informations, ce que corrobore le fait que ses avocats ont fait appel de la décision devant les juridictions supérieures. L’État partie conclut que, bien que la juridiction supérieure ait confirmé la décision du tribunal de première instance, les droits procéduraux de l’auteur ont été intégralement garantis à tous les stades de la procédure. Il ajoute que l’auteur a la possibilité d’introduire un nouveau recours si des faits nouveaux apparaissent.

4.11L’État partie conteste l’allégation de l’auteur selon laquelle il a fait l’objet d’une condamnation discriminatoire en raison de son appartenance ethnique. Il indique à cet égard que 51 % seulement des personnes qui ont été tenues pénalement responsables à la suite des événements de juin 2010 sont d’origine ethnique ouzbèke.

4.12Enfin, l’État partie répète qu’examiner la communication de l’auteur quant au fond serait inapproprié étant donné que toutes les accusations portées contre l’auteur ont été pleinement établies par les tribunaux et que la présente communication est sans fondement.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité et le fond

5.1Le 2 décembre 2015, l’auteur a contesté les observations de l’État partie. Il nie avoir fait un récit déformé des circonstances des événements en question.

5.2En ce qui concerne l’affirmation de l’État partie selon laquelle la retransmission télévisée répétée du rassemblement a été un facteur déclenchant du conflit qui a suivi, l’auteur affirme à nouveau que le programme a été diffusé une seule fois, qu’il durait entre quatre et sept minutes et qu’il ne contenait aucun commentaire.

5.3L’auteur dit que l’allégation selon laquelle les participants au rassemblement du 15 mai 2010 étaient tous d’origine ouzbèke est fausse et que les images filmées du rassemblement et les déclarations des témoins en attestent. L’auteur signale en particulier que, pendant le rassemblement, le gouverneur de la région de Djalalabad, M. Asanov, Kirghize de souche, a prononcé un discours de treize minutes en langue kirghize.

5.4L’auteur affirme également qu’il aurait été impossible de retirer des séquences du programme après sa diffusion à la télévision et avant qu’il soit mis en ligne, car l’original avait été saisi par des agents du bureau du procureur de Djalalabad au cours d’une perquisition. Il explique en outre que plusieurs scènes sensibles avaient en fait été coupées au montage avant la diffusion télévisée de la vidéo. De plus, selon l’auteur, il n’existe aucun lien entre un discours donné par M. Batyrov devant la communauté ouzbèke du village de Kyzyl Kyshtak et les activités de Mezon TV, car la chaîne n’a pas couvert l’événement en question et ne l’a pas retransmis. L’auteur nie également que ses collègues ou lui-même aient jamais volontairement contribué à mobiliser la jeunesse ouzbèke autour de leaders séparatistes. Ils n’ont fait que s’acquitter de leur mission d’information du public. L’auteur estime que les programmes de Mezon TV visaient plutôt à calmer la population locale et à avertir des possibles dangers de tels incidents.

5.5L’auteur répète ses affirmations concernant la diffusion d’une intervention du maire d’Och et d’un représentant du Ministère des affaires intérieures et réaffirme également qu’il n’a pas pu regagner son domicile pendant deux jours. D’après l’auteur, en raison d’une erreur de frappe involontaire, il a été indiqué que les événements s’étaient déroulés le 10 juin, alors que la diffusion a eu lieu en réalité le 11 juin à 4 heures, et qu’il n’a pu rentrer chez lui qu’après cette date.

5.6L’auteur répète que le Parlement a enfreint les dispositions de la Constitution et du droit national en affirmant qu’il était coupable avant qu’une décision ait été rendue par un tribunal. Il précise également qu’il n’a jamais traité la population kirghize ou les autorités kirghizes de nationalistes ou de chauvins, mais qu’il avait seulement fait référence à certains responsables et à certains groupes.

5.7Il renvoie en outre aux observations finales adoptées par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale et le Comité des droits de l’homme, qui selon lui donnent une description de l’état des relations interethniques dans l’État partie (notamment de la position de la population ouzbèke) qui diffère du récit qu’en fait l’État partie dans les rapports qu’il soumet au Comité. L’auteur renvoie aussi au rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante sur les événements dans le sud du Kirghizistan, qui selon lui confirme qu’il n’y a pas eu d’appels au séparatisme pendant les événements de juin 2010.

5.8L’auteur conteste les allégations de l’État partie concernant l’existence d’une association de malfaiteurs entre lui-même et M. Batyrov, lequel aurait financé Mezon TV. Il affirme que de telles allégations sont fausses, car M. Batyrov n’a jamais fourni de ressources financières ou logistiques à la chaîne de télévision que dirigeait l’auteur et il n’a jamais existé entre eux d’entente criminelle.

5.9L’auteur parle également des irrégularités procédurales dont le procès aurait été entaché. Selon lui, la procédure pénale à son encontre a été ouverte le 19 mai 2010, c’est‑à‑dire vingt-cinq jours avant qu’il ne quitte le pays. Cependant, l’enquêteur n’a pas formulé les accusations contre lui en présence de son avocat et ne l’a pas informé de la nature de ces accusations. Selon le Code de procédure pénale, la participation du mis en cause à un procès en première instance est en général obligatoire. L’auteur rappelle l’argument de l’État partie selon lequel la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême a estimé qu’un accusé pouvait être jugé et condamné en son absence s’il résidait à l’extérieur de l’État partie et refusait de se présenter devant le tribunal. Toutefois, la Cour a rendu cette conclusion le 21 février 2014 (c’est-à-dire après que le jugement concernant l’auteur a été rendu). L’auteur affirme en outre qu’il n’a jamais refusé de se présenter devant le tribunal et ne s’est jamais caché des autorités. Il n’a su qu’il avait été condamné que par le biais d’Internet et des informations diffusées dans les médias, et son avocat n’a donc pas eu la possibilité de se préparer à saisir les juridictions supérieures. De plus, l’auteur a appris plus tard que son avocat avait subi d’intenses pressions durant la procédure judiciaire et qu’il avait même été battu le 21 janvier 2012.

5.10Enfin, l’auteur renvoie aux observations finales concernant les cinquième à septième rapports périodiques du Kirghizistan, adoptées par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, dans lesquelles le Comité a noté que les Ouzbeks avaient été les principales victimes des événements de juin 2010 et avaient aussi été les plus nombreux à faire l’objet de poursuites et de condamnations.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

6.1Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 97 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif.

6.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’article 5 (par. 2 a)) du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

6.3Le Comité prend note du grief de l’auteur selon lequel l’État partie a violé les droits qu’il tient de l’article 17 (par. 1) du Pacte en portant atteinte à sa réputation, puisqu’il a été qualifié de criminel et que cela a perturbé sa vie de famille. Il observe toutefois que, selon les renseignements dont il dispose, ce grief ne semble pas avoir été soulevé dans le cadre de la procédure interne. Cette partie de la communication, qui soulève des questions au titre de l’article 17 (par. 1) du Pacte, est donc déclarée irrecevable pour non-épuisement des recours internes au regard de l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif.

6.4Le Comité note que l’auteur affirme avoir épuisé les recours internes utiles disponibles et que l’État partie l’a confirmé. Par conséquent, il considère que les conditions énoncées à l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif ont été satisfaites pour ce qui est des autres griefs.

6.5Le Comité note que l’auteur allègue une violation des droits qu’il tient de l’article 2 (par. 1) du Pacte. Il rappelle sa jurisprudence, dont il ressort que les dispositions de l’article 2 du Pacte, qui énoncent des obligations générales à la charge des États parties, ne peuvent pas en soi et à elles seules être invoquées dans une communication soumise en vertu du Protocole facultatif. Il considère donc que cette partie de la communication est irrecevable au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

6.6Le Comité prend note des griefs de l’auteur selon lesquels il n’a pas été informé de son procès et a été condamné par défaut, ce qui constitue une violation de ses droits d’être présent à son procès et d’interroger les témoins à charge, garantis par l’article 14 (par. 3 d) et e)) du Pacte. Il rappelle que l’article 14 (par. 3) dispose que toute personne a le droit d’être présente à son procès et de se défendre elle-même ou de bénéficier de l’assistance d’un défenseur de son choix. Cette disposition et d’autres garanties d’une procédure régulière prévues à l’article 14 ne sauraient être interprétées comme interdisant systématiquement les procès par défaut, quelles que soient les raisons de l’absence de l’accusé. Les procès par défaut peuvent en effet, dans certaines circonstances, être autorisés dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice : par exemple, lorsque l’accusé, bien qu’il ait été informé du procès suffisamment à l’avance, renonce à exercer son droit d’être présent. Le Comité a considéré par le passé qu’un procès par défaut était compatible avec l’article 14 à condition que l’accusé ait été assigné à comparaître dans les délais et informé des chefs retenus contre lui. Pour se conformer aux conditions d’un procès équitable lorsqu’une personne est jugée par défaut, l’État partie doit montrer que ces principes ont été respectés.

6.7Le Comité reconnaît toutefois que l’on ne peut s’attendre raisonnablement à ce que les efforts faits par les autorités compétentes pour entrer en relation avec l’accusé excèdent certaines limites. L’État partie n’a pas nié que l’auteur ait été jugé par défaut, en application de la loi qui autorise le jugement par défaut lorsque l’accusé ne se trouve pas au Kirghizistan et se soustrait à la justice. Le Comité prend note des explications de l’auteur, qui affirme avoir quitté le Kirghizistan avec sa famille à la mi-juin 2010 (soit, selon lui, vingt-cinq jours après l’ouverture de l’enquête judiciaire, le 19 mai 2010), ne pas avoir été informé de la tenue du procès et avoir appris par les médias qu’il avait été condamné. Le Comité observe toutefois que l’auteur était représenté par un conseil et que rien dans le dossier ne porte à croire que son conseil n’avait aucun contact avec lui pendant la durée de la procédure pénale. Dans ces circonstances, puisqu’au début de la procédure pénale, l’auteur, qui n’était encore qu’un témoin dans l’affaire et n’avait pas encore été mis en cause, est parti s’installer avec sa famille proche dans un autre pays, le Comité estime qu’il était irréaliste d’exiger de l’État partie qu’il cherche à entrer en relation avec l’auteur lui-même, qui était représenté par un conseil, alors que celui-ci était passé dans la clandestinité et avait ensuite quitté le pays avec sa famille. Compte tenu de ces facteurs, envisagés dans leur ensemble, le Comité conclut que, dans les circonstances de l’espèce, l’auteur n’a pas suffisamment étayé les griefs qu’il tire de la violation de l’article 14 (par. 3 d) et e)) du Pacte et que ces griefs sont donc irrecevables au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

6.8S’agissant des griefs de violation de l’article 27 du Pacte, le Comité observe que l’auteur n’a pas donné suffisamment de renseignements pour lui permettre de considérer que les faits présentés dans la communication soulèvent des questions au regard de cet article. En conséquence, il considère que les griefs de l’auteur concernant cette partie de la communication ne sont pas étayés et sont donc irrecevables au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

6.9Le Comité considère en revanche que l’auteur a suffisamment étayé, aux fins de la recevabilité, ses autres griefs, tirés de la violation de l’article 14 (par. 1 et 2) du Pacte. Il déclare donc la communication recevable à cet égard et procède à son examen au fond.

Examen au fond

7.1Conformément à l’article 5 (par. 1) du Protocole facultatif, le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations que lui ont communiquées les parties.

7.2Le Comité prend note des allégations de l’auteur selon lesquelles la résolution adoptée par le Parlement kirghize le 16 juin 2011, qui a influé sur l’issue de son procès, l’a privé de la possibilité de bénéficier d’un procès équitable et de la présomption d’innocence, en violation des droits qui lui sont reconnus par l’article 14 (par. 2) du Pacte, et a par conséquent violé son droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal indépendant, garanti par l’article 14 (par. 1). Le Comité prend également note de l’argument de l’État partie selon lequel le pouvoir législatif peut discuter des conclusions des travaux de ses commissions d’enquête, mais les débats parlementaires ne devraient pas être interprétés comme une ingérence dans l’indépendance du pouvoir judiciaire, les décisions définitives étant toujours prises par les tribunaux. Il rappelle sa jurisprudence, telle qu’elle ressort de son observation générale no 32 (2007) sur le droit à l’égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable, selon laquelle, du fait de la présomption d’innocence, qui est indispensable à la protection des droits de l’homme, la charge de la preuve incombe à l’accusation, nul ne peut être présumé coupable tant que l’accusation n’a pas été établie au‑delà de tout doute raisonnable, l’accusé a le bénéfice du doute et les personnes accusées d’avoir commis une infraction pénale doivent être traitées selon ce principe. Il observe que si, dans sa résolution, le Parlement fait référence à l’auteur et à ses coaccusés comme étant les fomentateurs et auteurs des événements dramatiques survenus à Och et à Djalalabad en mai et juin 2010, il recommande également que la Cour suprême du Kirghizistan veille à assurer pleinement la transparence des procédures pénales intentées contre les personnes accusées d’avoir commis des infractions en rapport avec les événements en question et que les familles des accusés et les représentants d’organisations internationales se voient autoriser l’accès à la salle d’audience au cours du procès. Le Comité note, à cet égard, que l’auteur n’a pas expliqué en quoi la résolution en question, qui est un document politique, avait pu influencer le déroulement de la procédure pénale le concernant. Il estime que les faits, tels qu’ils sont exposés par l’auteur, ne lui permettent pas de conclure à une violation des droits qui sont reconnus à celui-ci par l’article 14 (par. 2). Par conséquent, il estime également que le droit que l’auteur tient de l’article 14 (par. 1) du Pacte n’a pas été violé.

8.Le Comité, agissant en vertu de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, constate que les éléments dont il est saisi ne font pas apparaître de violation par l’État partie de l’article 14 (par. 1 et 2) du Pacte.

Annexe I

Opinion individuelle (dissidente) de Furuya Shuichi, partiellement partagée par David Moore et Hélène Tigroudja

1.M. Furuya et M. Moore regrettent de ne pouvoir souscrire à la constatation du Comité selon laquelle le grief de violation de l’article 14 (par. 3 d) et e)) soulevé par l’auteur concernant son procès par défaut est irrecevable (par. 6.6), et M. Furuya et Mme Tigroudja ne partagent pas la conclusion du Comité selon laquelle la résolution du Parlement dans laquelle il est fait référence à l’auteur et à ses coaccusés comme étant les fomentateurs et auteurs des événements dramatiques survenus à Och et à Djalalabad en mai et juin 2010 ne constitue pas une violation de l’article 14 (par. 2) (par. 7.2).

Procès par défaut

2.Selon l’article 14 (par. 3 d)) du Pacte, toute personne accusée d’une infraction pénale a droit à être présente à son procès et à se défendre elle-même ou à avoir l’assistance d’un défenseur. Toutefois, comme il est indiqué dans les présentes constatations, les procès au pénal en l’absence de l’accusé sont autorisés dans certaines circonstances dans l’intérêt de la bonne administration de la justice (lorsque l’accusé, bien qu’ayant été informé du procès suffisamment à l’avance, décide de ne pas exercer son droit d’être présent). Cependant, il est important de souligner que la présence de l’accusé à son procès est la règle, et le procès en l’absence de l’accusé, l’exception.

3.C’est pourquoi le Comité a insisté sur le fait qu’un procès en l’absence de l’accusé est compatible avec l’article 14 uniquement lorsque l’accusé est assigné en justice en temps voulu et informé des poursuites engagées contre lui. Il en est ainsi parce que l’exercice effectif des droits énoncés à l’article 14 présuppose que les mesures voulues soient prises pour signifier à l’accusé les poursuites dont il est l’objet (art. 14 (par. 3 a)). En cas de procès par défaut, il faut que, nonobstant l’absence de l’accusé, toutes les démarches nécessaires aient été entreprises pour informer celui-ci de la date et du lieu du procès et pour lui demander d’y assister. Si le nécessaire n’est pas fait, l’accusé ne dispose pas du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense (art. 14 (par. 3 b)) et ne peut pas se défendre lui‑même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix (art. 14 (par. 3 d)). L’accusé n’a pas non plus la possibilité d’interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d’obtenir la comparution et l’interrogatoire des témoins à décharge (art. 14 (par. 3 e)).

4.Le procès par défaut étant une exception à l’article 14 (par. 3 d)), il incombe à l’État partie de démontrer qu’il a pris les mesures nécessaires pour notifier à l’accusé les informations concernant le procès. Le Comité a reconnu que les efforts que l’on peut raisonnablement s’attendre à ce que les autorités compétentes fassent pour se mettre en rapport avec l’accusé doivent avoir des limites. Cependant, même lorsqu’il s’avère difficile d’entrer en contact avec l’accusé, l’État partie n’en demeure pas moins obligé de démontrer qu’il a effectivement déployé des efforts suffisants, à son initiative, pour informer l’accusé des accusations pénales portées contre lui et pour lui notifier la date et le lieu de son procès.

5.En l’espèce, cependant, l’auteur a affirmé que l’État partie n’avait pris aucune mesure pour entrer en relation avec lui avant le début du procès, et l’État partie n’a pas contesté cette allégation. En fait, l’État partie n’a fourni au Comité aucun renseignement sur les mesures prises pour informer l’auteur des chefs retenus contre lui ou lui notifier les poursuites.

6.Dans ces conditions, M. Furuya et M. Moore concluent que le grief de l’auteur est recevable et que le procès ouvert sans la présence de l’auteur constitue une violation des droits que celui-ci tient de l’article 14 (par. 3 d)).

Résolution du Parlement

7.Selon l’observation générale no 32 (2007) du Comité, du fait de la présomption d’innocence énoncée à l’article 14 (par. 2), les personnes accusées d’avoir commis une infraction pénale doivent être traitées selon ce principe. À cet égard, l’obligation découlant de la présomption d’innocence ne s’arrête pas au seul comportement du juge et du procureur durant la procédure. Dans un cadre social plus large, le suspect ou l’accusé doit être présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été reconnu coupable par un tribunal compétent. À cette fin, ainsi qu’il est noté dans l’observation générale, toutes les autorités publiques ont le devoir de s’abstenir de faire des déclarations publiques affirmant la culpabilité de l’accusé et les médias devraient éviter de rendre compte des procès d’une façon qui porte atteinte à la présomption d’innocence.

8.Il nous semble, par conséquent, que pour conclure à une violation de la présomption d’innocence, il n’importe pas de savoir si, par exemple, les déclarations faites par les autorités publiques ou les informations données par les médias pouvaient réellement influer sur l’issue du procès. Le traitement qui suggère qu’un suspect ou un accusé est coupable peut en soi constituer une violation de la présomption d’innocence.

9.Dans les présentes constatations, il est dit que « l’auteur n’a pas expliqué en quoi la résolution en question, qui est un document politique, avait pu influencer le déroulement de la procédure pénale le concernant », et il est donc conclu à une absence de violation du droit de l’auteur au titre de l’article 14 (par. 2). Cependant, en l’espèce, la question essentielle n’est pas de savoir si la résolution a influé sur l’issue du procès, mais si elle a laissé entendre que l’auteur était coupable. À cet égard, il est à noter que dans la résolution, le nom de l’auteur est cité et celui-ci est présenté comme étant l’un des auteurs des événements pour lesquels il a fait l’objet de poursuites pénales. Même si le Parlement peut discuter des conclusions des travaux de ses commissions d’enquête, il n’en a pas moins l’obligation, en tant qu’organe de l’État partie, de traiter les individus conformément au principe de la présomption d’innocence.

10.En conséquence, M. Furuya et Mme Tigroudja doivent conclure que l’adoption par le Parlement de cette résolution laissant clairement entendre que l’auteur était coupable avant qu’un tribunal compétent n’en ait décidé constitue une violation du droit garanti à l’auteur par l’article 14 (par. 2).

Annexe II

Opinion individuelle (dissidente) de Gentian Zyberi

1.Je regrette de ne pas être en mesure de souscrire à la conclusion du Comité selon laquelle le grief de violation de l’article 14 (par. 3 d)) que l’auteur tire du procès par défaut est irrecevable (par. 6.6). En outre, contrairement au Comité (par. 7.2), je suis d’avis que la résolution du Parlement dans laquelle il est fait référence à l’auteur et à ses coaccusés comme étant les fomentateurs et les auteurs des événements dramatiques survenus à Och et à Djalalabad en mai et juin 2010 constitue une violation du principe de la présomption d’innocence énoncé à l’article 14 (par. 2).

Procès par défaut

2.Selon l’article 14 (par. 3 d)) du Pacte, toute personne accusée d’une infraction pénale a droit à être présente à son procès. Dans son observation générale no 32 (2007), le Comité explique que les procès en l’absence de l’accusé « sont compatibles avec l’article 14 (par. 3 d)) uniquement si les mesures nécessaires ont été prises pour demander dans le délai voulu à l’accusé de comparaître et pour l’informer à l’avance de la date et du lieu de son procès et lui demander d’y être présent ». En l’espèce, l’État partie se contente de dire que l’auteur se cachait (par. 4.10), alors que celui-ci affirme qu’il ne s’est pas caché et qu’entre l’ouverture de la procédure judiciaire le 19 mai 2010 et le moment où il a quitté le pays, c’est‑à-dire vingt-cinq jours plus tard, il a continué à travailler comme d’habitude à son bureau d’Och et a assisté à une conférence à Bichkek (par. 5.9).

3.S’il y a des exceptions au droit d’un accusé d’être présent à son procès, et des limites aux efforts que l’on peut s’attendre à ce que les autorités compétentes fassent pour entrer en relation avec l’accusé, le Comité a déclaré que, « en cas de procès par défaut, il faut que, nonobstant l’absence de l’accusé, le nécessaire ait été fait pour notifier à celui-ci la date et le lieu du procès et pour lui demander d’y assister ». Malheureusement, l’État partie n’a communiqué au Comité aucun renseignement sur les mesures prises pour informer l’auteur des chefs retenus contre lui ou lui notifier les poursuites. En l’absence de tels renseignements de la part de l’État partie, le procès par défaut constitue une violation des droits garantis à l’auteur par l’article 14 (par. 3 d)).

Résolution parlementaire du 16 juin 2011

4.Selon l’article 14 (par. 2) du Pacte, toute personne accusée d’une infraction pénale est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. Dans son observation générale no 32 (2007), le Comité explique que « du fait de la présomption d’innocence, qui est indispensable à la protection des droits de l’homme, la charge de la preuve incombe à l’accusation, nul ne peut être présumé coupable tant que l’accusation n’a pas été établie au-delà de tout doute raisonnable, l’accusé a le bénéfice du doute et les personnes accusées d’avoir commis une infraction pénale ont le droit d’être traitées selon ce principe ». En conséquence, « toutes les autorités publiques ont le devoir de s’abstenir de préjuger de l’issue d’un procès, par exemple de s’abstenir de faire des déclarations publiques affirmant la culpabilité de l’accusé ». Cette obligation générale faite aux autorités publiques est importante pour garantir le plus grand respect du principe fondamental de la présomption d’innocence.

5.En l’espèce, dans la résolution adoptée par le Parlement, le nom de l’auteur est cité et celui-ci est présenté comme étant l’un des auteurs des événements pour lesquels il a fait l’objet de poursuites pénales (par. 7.2). Ce seul fait devrait suffire à conclure à une violation de la présomption d’innocence énoncée à l’article 14 (par. 2). Hélas, le Comité renverse la charge de la preuve, en attendant de l’auteur qu’il donne des renseignements indiquant en quoi la résolution, qui est un document politique, pourrait avoir influé sur le déroulement de la procédure le concernant (par. 7.2). Cette approche va à l’encontre de l’article 14 (par. 2) du Pacte et de l’observation générale no 32 (2007). Contrairement à ce qui est prescrit dans l’observation générale, il a été fait une déclaration publique préjugeant prima facie de la présomption d’innocence d’un accusé, et il incombe donc à l’État partie de démontrer que cette conduite de ses autorités ou de ses fonctionnaires n’a pas nui à la présomption d’innocence et influé sur la procédure pénale.

6.Par conséquent, l’adoption par le Parlement de ladite résolution laissant clairement entendre que l’auteur était coupable avant qu’un tribunal compétent ait eu la possibilité d’examiner les preuves et d’en décider constitue une violation du droit d’être présumé innocent garanti à l’auteur par l’article 14 (par. 2).