Nations Unies

CCPR/C/135/D/3645/2019

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

5 octobre 2022

Original : Français

Comité des droits de l’homme

Décision adoptée par le Comité en vertu du Protocole facultatif, concernant la communication no 3645/2019 * , **

Communication présentée par :

M. M. (représenté par un conseil, Stewart Istvanffy)

Victime(s) présumée(s):

L’auteur

État partie :

Canada

Date de la communication :

12 août 2019 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application des articles 92 et 94 du Règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 14 août 2019 (non publiée sous forme de document)

Date de la décision :

27 juillet 2022

Objet :

Expulsion du Canada vers l’Angola

Question(s) de procédure :

Non-épuisement des recours internes ; griefs insuffisamment étayés ; incompatibilité avec le Pacte

Question(s) de fond :

Droit à la réparation ; droit à la vie ; risque d’être soumis à la torture ou à un traitement cruel, inhumain ou dégradant

Article(s) du Pacte :

2 (par. 3), 6 (par. 1) et 7

Article(s) du Protocole facultatif :

2, 3 et 5 (par. 2 b))

1.1L’auteur de la communication est M. M., de nationalité angolaise, né le 19 juin 1975. Faisant face à une mesure de renvoi du Canada fixée au 14 août 2019, il allègue que l’État partie violerait les obligations qui lui sont imposées par les articles 2, 6 et 7 du Pacte, s’il le renvoyait en Angola. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 19 août 1976. L’auteur est représenté par un conseil.

1.2Le 14 août 2019, en application de l’article 94 de son règlement intérieur, le Comité, agissant par l’intermédiaire de ses rapporteurs spéciaux chargés des nouvelles communications et des mesures provisoires, a prié l’État partie de surseoir au renvoi de l’auteur vers l’Angola tant que sa requête serait à l’examen, tout en demandant à l’auteur de soumettre des informations additionnelles dans un délai de soixante jours, en vue de déterminer si les mesures provisoires devaient être maintenues ou non. Le 14 octobre 2019, l’auteur a envoyé les informations demandées, précisant qu’il s’était engagé dans un suivi psychologique et qu’un rapport serait soumis au Comité. Le 29 octobre 2019, l’État partie a soumis au Comité une requête afin de lever les mesures provisoires. Le 4 février 2020, le Comité a décidé de ne pas accéder à la demande de l’État partie et de maintenir les mesures provisoires.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1L’auteur a quitté l’Angola parce qu’il craignait pour sa vie par suite de deux arrestations durant lesquelles il a été victime de torture et de mauvais traitements. Avant ces arrestations, l’auteur était pasteur évangélique dans une église de Luanda, en charge d’un groupe de jeunes. Des représentants du Ministère de l’intérieur lui ont donné l’ordre de convaincre les jeunes de son église d’adhérer au parti politique au pouvoir, le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola. Par suite de son refus de collaborer, il a été arrêté par la police le 1er juin 2014 et a été détenu jusqu’au 30 juin 2014. Durant son arrestation, il a été victime de torture et de mauvais traitements. En septembre 2014, afin de ne pas risquer une nouvelle détention, l’auteur a obtenu des visas pour les États-Unis pour lui et sa famille. Par manque de moyens, il y est parti seul, sans sa famille. Fin septembre 2014, sa femme a été agressée et questionnée agressivement par des hommes qui le cherchaient et a fait une fausse couche. L’auteur est alors retourné à Luanda pour prendre soin de sa femme et de ses trois enfants. Dans l’attente d’un visa pour quitter l’Angola vers les États-Unis, il s’est d’abord caché avec sa famille pendant plus d’une année dans une autre province, avant de se réinstaller à Luanda dans un quartier différent, croyant qu’il ne serait plus persécuté. Le 20 février 2016, il s’est fait arrêter une seconde fois par des policiers armés, sans mandat d’arrêt ni véhicule officiel. Il a été interrogé et torturé pendant plusieurs heures, avant d’être relâché grâce à un policier qui connaissait sa famille. Par suite de la mort de ses deux fils, sa femme a ensuite fui en France avec sa fille. L’auteur a fui vers le Canada.

2.2Le 19 avril 2016, l’auteur, arrivé au Canada depuis les États-Unis, a présenté une demande d’asile auprès de la Section de la protection des réfugiés. Cette demande a été refusée le 13 février 2017 pour manque de crédibilité des faits présentés par l’auteur.

2.3Le 18 juillet 2017, la Cour fédérale a refusé de réviser la décision de la Section de la protection des réfugiés du 13 février 2017. Le 13 février 2018, l’auteur a déposé une demande d’examen des risques avant renvoi en présentant de nouvelles preuves, dont un mandat d’arrêt établi à son nom, daté du 22 mai 2017, ainsi que des lettres de témoignages attestant des risques qu’il courait et de sa fonction de pasteur en Angola. Le 23 mai 2018, il a soumis une demande de résidence permanente pour considérations d’ordre humanitaire.

2.4Le 25 juillet 2019, l’auteur a reçu par la poste, de la part d’un ami, deux nouvelles preuves qu’il a présentées à l’Agence des services frontaliers du Canada : a) un mandat d’arrêt du Procureur de la République d’Angola au nom de l’auteur, l’accusant d’« être actif dans les affaires politiques et participant actif à des manifestations de révolte et principal meneur, achat de matériel de propagande et réunions clandestines contre le parti au pouvoir » ; et b) un affidavit d’un ancien policier angolais vivant aujourd’hui au Canada et témoignant des pratiques de torture de la part des autorités contre les personnes suspectées de faire partie de l’opposition en Angola.

2.5Le 30 juillet 2019, la demande d’examen des risques avant renvoi ainsi que la demande de résidence permanente pour considérations d’ordre humanitaire ont toutes deux été refusées. Le même jour, le renvoi de l’auteur a été fixé au 14 août 2019, malgré la présentation de nouvelles preuves durant le rendez-vous.

2.6Le 7 août 2019, l’Agence des services frontaliers du Canada a refusé de suspendre le renvoi de l’auteur par suite de l’apport des nouvelles preuves, alléguant notamment que la traduction du mandat d’arrêt n’était pas véritable. Le même jour, l’auteur a déposé une requête en sursis de l’exécution du renvoi devant la Cour fédérale, dont l’audience a été fixée au 13 août 2019 à 14 heures.

2.7Pour présenter le contexte, l’auteur rapporte que l’Angola commet de nombreux abus et violations des droits humains envers des personnes suspectées d’être contre le parti au pouvoir ou d’être membres des partis d’opposition, et qu’il a été ciblé en raison de sa fonction de dirigeant dans une église. Il renvoie au rapport rendu sur l’Angola par Human Rights Watch, qui exprime ses préoccupations concernant les pratiques illégales, y compris des arrestations arbitraires, des exécutions extrajudiciaires par les forces de sécurité, la suppression de l’opposition et l’absence d’enquêtes .

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme qu’en le renvoyant en Angola, l’État partie l’exposerait à un risque important de violation de ses droits au titre des articles 2, 6 et 7 du Pacte.

3.2L’auteur soutient qu’un poids insuffisant a été accordé aux preuves apportées et aux allégations de risques quant aux préjudices irréparables en cas de renvoi par les autorités canadiennes. Il affirme que le fait que, lors de l’examen des risques avant renvoi, les nouvelles preuves qu’il a fournies ont été rejetées sous prétexte qu’elles reposent sur des faits qui ont déjà été jugés non crédibles par la Section de la protection des réfugiés équivaut à une absence évidente de recours afin de corriger toute erreur et que les preuves fortes et nouvelles ne reçoivent ainsi aucun poids. Il considère également que l’agent d’exécution de la loi ayant refusé de déférer le renvoi malgré les nouvelles preuves apportées en juillet 2019 n’est pas impartial et n’a pas la formation requise pour juger de tels enjeux.

3.3L’auteur fait valoir qu’il doit avoir accès à un recours efficace lui permettant de présenter la nouvelle preuve du risque jusqu’à son départ du Canada. Une grande quantité de nouvelles preuves ont été obtenues après le refus de la demande d’asile, les plus récentes ayant été reçues le 25 juillet 2019, et rejetées par les autorités canadiennes sans aucun motif valide en droit et sans égard pour les risques allégués par la victime.

3.4L’auteur ajoute qu’il courrait un risque sérieux d’abus et de violations des droits humains et de représailles, s’il devait être refoulé en Angola. Il précise que l’Angola est un pays où il y a des violations massives et systématiques des droits humains, particulièrement de la part des autorités, qui exercent des arrestations arbitraires et pratiquent des exécutions extrajudiciaires. Il avance faire face à des préjudices irréparables, puisqu’il est ciblé par les autorités et suspecté d’être impliqué dans des activités contre le parti au pouvoir. Ces accusations sont très lourdes de conséquences en Angola et peuvent entraîner la peine de mort ou une exécution extrajudiciaire.

Informations additionnelles de l’auteur

4.1Dans le contexte de l’octroi des mesures provisoires, le Comité avait demandé à l’auteur de fournir : a) de plus amples informations sur les mauvais traitements qu’il a subis lors des arrestations de juin 2014 et de février 2016, ainsi que tous les documents médicaux dont il dispose à ce sujet ; b) des explications concernant le fait qu’il n’a pas voyagé au Brésil lorsqu’il a obtenu un visa, et qu’il est retourné en Angola en septembre 2014 alors qu’il y était recherché ; et c) la copie certifiée d’une traduction vérifiée du mandat d’arrêt daté du 10 septembre 2018.

4.2Le 14 octobre 2019, l’auteur a soumis une traduction certifiée du mandat d’arrêt ainsi qu’un affidavit étayant les faits suivants : le 1er juin 2014, l’auteur a été arrêté par des policiers alors qu’il était en réunion avec des jeunes de son église, et identifié comme le responsable du groupe en question. Trois policiers au moins l’ont frappé sur plusieurs parties du corps à coups de poing, de bottes et de matraque. Il a été menotté et tiré de force sur le plancher jusqu’à l’extérieur de l’église, « balancé » dans une voiture et piétiné par les policiers.

4.3Arrivé au poste de police, l’auteur a à nouveau été battu par les policiers qui l’escortaient, ainsi que par des policiers qui étaient sur place, jusqu’à perdre connaissance. Il s’est réveillé dans une cellule où il a été battu par ses codétenus, et a été « abandonné » dans la cellule pendant deux jours avec des plaies ouvertes, sans soins ni eau ni nourriture, et sans informations sur les accusations portées contre lui.

4.4L’auteur a ensuite été interrogé par le commandant du poste, qui lui a demandé quelles actions concrètes il avait menées pour faire en sorte que les jeunes de l’église adhèrent au parti au pouvoir. L’auteur a répondu qu’il ne faisait pas de politique, et il a été renvoyé en cellule. L’après-midi même, il a été transféré à la prison de Viana, où il est resté jusqu’au 30 juin 2014, sans procès et sans être informé des accusations portées contre lui. Il n’a pas eu accès à des soins et n’a pas pu entrer en contact avec sa famille ou un avocat. Il a finalement été relâché, sans explications.

4.5Le 20 février 2016, des policiers armés sont entrés sans mandat d’arrêt au domicile de l’auteur, et lui ont demandé s’il avait adhéré au parti au pouvoir. Il a répondu par la négative. Les policiers l’ont frappé, piétiné, giflé, traîné de force et embarqué dans un véhicule civil, devant sa femme et ses enfants. Durant le trajet, il a également été battu. Les policiers l’ont emmené dans une maison à quelques kilomètres de son domicile et ont continué à l’interroger sur son adhésion ainsi que celle des jeunes de l’église au parti au pouvoir. Il a été enfermé plusieurs heures dans la maison, sans information, et a cru qu’il allait être exécuté. Un officier qui connaissait sa famille est venu débloquer la fenêtre depuis l’extérieur, lui permettant de fuir en le prévenant de ne plus retourner chez lui, car il était recherché.

4.6Concernant ses demandes de visa, l’auteur explique qu’en juillet 2014, il a obtenu des visas pour le Brésil pour toute sa famille, valables pour une durée de trente jours. L’auteur n’a pas été en mesure de payer le voyage dans les temps impartis, ayant perdu son travail à sa sortie de prison. Deux mois plus tard, un ami vivant aux États-Unis et de visite en Angola l’a aidé pour obtenir un visa pour les États-Unis (visa qu’il a obtenu en septembre 2014). Son ami lui a payé le billet d’avion. L’auteur a dû finalement retourner en Angola à la suite de la fausse couche de sa femme, après qu’elle eut été sauvagement battue par des individus qui le cherchaient.

4.7L’auteur précise qu’à ce moment, et malgré ses deux arrestations, il n’y avait ni mandat d’arrêt ni convocation officielle à son nom. Il ajoute qu’il était harcelé au téléphone par des policiers, mais qu’aucune mesure légale n’a été prise contre lui, ce qui explique pourquoi il n’a pas été contrôlé lors de ses passages à l’aéroport. Maintenant qu’un mandat d’arrêt et un avis de convocation ont été émis, il ne pourra plus passer les contrôles de l’aéroport sans se faire arrêter.

Observations de l’État partie

5.1Le 29 octobre 2019, l’État partie a soumis une demande de levée des mesures provisoires, affirmant que l’auteur n’avait pas établi prima facie un préjudice irréparable justifiant la demande du Comité, puisqu’il n’avait pas établi de motifs sérieux de croire que son renvoi en Angola l’exposerait à un risque.

5.2L’État partie fait valoir que les autorités nationales ont conclu que l’auteur n’était pas crédible concernant les risques allégués auxquels il pourrait être confronté en Angola, et qu’il n’a pas établi de manière sérieuse la possibilité qu’il fasse face à un risque de torture ou de traitement ou peine cruel ou inhumain, que sa vie soit menacée ou qu’il subisse un autre préjudice irréparable advenant son renvoi en Angola.

5.3L’État partie résume les faits présentés par l’auteur et rappelle au Comité que les mesures provisoires doivent être utilisées avec prudence et réservées uniquement aux communications méritoires, ce qui n’est nullement le cas de l’auteur.

5.4L’État partie admet que des rapports impartiaux attestent qu’il existe en Angola, ces dernières années, des violations graves des droits humains envers des activistes et des groupes qui s’opposent au Gouvernement. Il souligne toutefois que l’auteur n’appartient à aucune des catégories visées par ces persécutions, et que la preuve documentaire ne fait mention d’aucune arrestation arbitraire ou exécution extrajudiciaire envers de simples membres de son église.

5.5L’État partie ajoute que les allégations de l’auteur ont été examinées en profondeur par des autorités compétentes et impartiales. L’auteur a été représenté par des conseillers juridiques à toutes les étapes et a bénéficié de toutes les occasions possibles pour établir le bien-fondé de ses allégations. Cependant, l’État partie a conclu que les allégations de l’auteur manquaient de crédibilité et que les preuves fournies étaient insuffisantes.

5.6L’État partie rappelle les procédures auxquelles l’auteur a été soumis et souligne que la Section de la protection des réfugiés a conclu à un manque de crédibilité de l’auteur, au vu de diverses contradictions dans ses témoignages. Par exemple, l’État partie indique que l’auteur a mis une seule adresse de résidence en Angola entre 2005 et 2016, alors qu’il est resté caché durant une année, ce qu’il n’a pas indiqué dans le formulaire. De plus, l’État partie souligne que l’auteur n’a pas fui vers le Brésil en juillet 2014, lorsqu’il en a eu l’occasion, et n’a ensuite fait aucune démarche pour obtenir une protection aux États-Unis lorsqu’il y était. Au contraire, il est retourné en Angola afin de porter assistance à sa famille. La Cour fédérale en a donc conclu ce qui suit : « Le comportement général du demandeur ne correspond pas du tout à celui d’une personne qui craint réellement pour sa vie. Ceci mine grandement sa crédibilité à un point où la Cour ne croit pas ses allégations de persécutions aux mains des membres du [Mouvement populaire pour la libération de l’Angola] ».

5.7Concernant la demande de résidence permanente pour considérations d’ordre humanitaire, l’État partie expose que celle-ci a été refusée car l’auteur n’a pas démontré les difficultés auxquelles il ferait face s’il était renvoyé en Angola.

5.8Concernant les deux demandes d’examen des risques avant renvoi, l’agent a conclu que « le demandeur n’a pas démontré, selon la balance des probabilités, qu’il risque d’être exposé personnellement à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inhumains […] ni de motifs sérieux de croire que le demandeur sera soumis à la torture en Angola ». Il conclut également que les preuves présentées par l’auteur sont faibles. L’agent a notamment conclu que le deuxième mandat d’arrêt présenté par l’auteur présentait des incohérences : il n’indiquait pas qu’il y avait eu un premier mandat d’arrêt à l’encontre de l’auteur, l’auteur y était désigné comme célibataire, et le papier était « d’une blancheur remarquable » pour un document qui était resté « coincé sous la porte de l’auteur » pendant neuf mois.

5.9Concernant la demande de report administratif de l’exécution de la mesure de renvoi, la Cour d’appel fédérale a statué que les circonstances ne justifiaient pas un report de renvoi, que la nouvelle preuve (le second mandat d’arrêt) n’était pas authentique, et que l’affidavit de l’ancien policier angolais ne pouvait être pris en compte, celui-ci ne pouvant être qualifié d’expert.

5.10En conclusion, l’État partie rappelle que le Comité ne doit pas réévaluer les faits à moins que l’évaluation des faits et de la preuve par les tribunaux internes ait été clairement arbitraire ou constitué un déni de justice. L’État partie ajoute qu’il a satisfait à toutes les obligations qui lui incombaient relativement au cas de l’auteur, et que les procédures dont celui-ci a bénéficié se sont déroulées en conformité avec le droit canadien et les obligations internationales du Canada au titre du Pacte.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie

6.1Le 4 décembre 2019, l’auteur a soumis ses commentaires en réponse à la demande de l’État partie de lever les mesures provisoires. L’auteur soutient qu’une seule instance – la Section de la protection des réfugiés – a rendu une décision quant à sa crédibilité et que les instances suivantes se sont rangées derrière ses conclusions, rejetant les preuves additionnelles. Il affirme que ces dernières ont été jugées insuffisantes en raison des conclusions initiales de non-crédibilité.

6.2Par ailleurs, l’auteur explique que sa crédibilité a été évaluée une seule fois par la Section de la protection des réfugiés. Elle n’a pas été évaluée par le tribunal de la Section d’appel des réfugiés ni devant la Cour fédérale. De même, devant les instances administratives, si les preuves ont été jugées recevables, peu de poids leur a été accordé en raison du manque de crédibilité invoqué par la Section de la protection des réfugiés. L’auteur précise que, ayant changé d’avocat, il n’avait pas présenté toutes les preuves à la Section de la protection des réfugiés, ce qui aurait pu influencer l’évaluation de sa crédibilité.

6.3L’auteur réitère que les droits fondamentaux, particulièrement le droit à la liberté d’expression et d’association, sont continuellement violés en Angola par les autorités, qui multiplient les stratégies pour décourager les opposants au parti au pouvoir. L’auteur, responsable et pasteur de son église, ayant refusé de se soumettre aux exigences du parti au pouvoir, est considéré comme un opposant politique. Il rappelle qu’il ne s’est jamais présenté comme un « simple membre d’une église », comme l’affirme l’État partie. Il allègue également que les deux mandats d’arrêt devraient être considérés comme authentiques, faute de vice apparent.

6.4L’auteur se réfère également aux rapports mentionnés par l’État partie sur la situation des droits humains en Angola, insistant sur le fait qu’ils démontrent précisément que la répression politique y est toujours bien présente. L’auteur insiste également sur le fait que l’Angola est l’un des pays les moins démocratiques d’Afrique, et que la répression politique et la détention arbitraire y sont des phénomènes très répandus.

6.5L’auteur fait finalement référence à son suivi psychologique au Canada. L’évaluation a consisté en des entrevues qualitatives incluant des tests psychologiques. La psychologue décrit notamment que l’attitude de l’auteur n’évoque « aucune feinte ni tentative d’évitement et/ou de dissimulation », que « les souvenirs des séquences et événements traumatiques ont été rapportés sans efforts particuliers, avec précision et logique d’enchaînements », et que l’auteur a « une conscience claire des contradictions que certains de ses comportements ont pu susciter mais a été capable d’en fournir une explication/justification significative acceptable ». La psychologue a conclu à un diagnostic de stress post-traumatique chronique de l’auteur pouvant « être attesté par l’accumulation inattendue et de plus en plus inquiétante à chaque fois, de séquences traumatiques en Angola à compter de 2014 : arrestation policière, brutalité et emprisonnement, traitements cruels, inhumains et dégradants et tortures, harcèlement téléphonique, pauvreté endémique… ». La psychologue fait également référence aux sévices physiques, sexuels et mentaux subis par la victime lors de ses arrestations et incarcérations. Elle fait état du sentiment de honte sévère comme réaction fréquente chez les victimes abusées sexuellement. Elle décrit la détresse de l’auteur comme étant palpable et cliniquement significative.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond

7.1Le 17 février 2020, l’État partie a soumis ses observations portant sur la recevabilité et le fond de la communication.

7.2Selon l’État partie, les allégations de l’auteur selon lesquelles il ferait face en Angola à un risque de torture ou d’atteinte à sa vie par les autorités devraient être déclarées irrecevables conformément aux articles 2 et 5 du Protocole facultatif.

7.3En premier lieu, l’auteur n’a pas épuisé toutes les voies de recours internes disponibles. Il a présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire devant la Cour fédérale quant à la décision sur la réouverture de l’examen des risques avant renvoi. Cette demande est encore pendante devant la Cour fédérale. Étant donné qu’aucune décision n’est encore rendue quant à sa demande, l’État partie soutient que la communication de l’auteur est irrecevable pour non-épuisement des recours internes, conformément à l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif.

7.4En deuxième lieu, l’auteur n’a pas suffisamment étayé ses allégations de violations du Pacte. Notamment, il n’a pas établi de violation prima facie des articles 6 et 7 du Pacte. Il n’a pas pu étayer ses allégations selon lesquelles sa vie serait menacée et il risquerait de subir de la torture ou des mauvais traitements s’il était renvoyé en Angola. À l’exception du nouveau rapport psychologique, les allégations et éléments de preuve soumis par l’auteur et sur lesquels sa communication repose ont été examinés et rejetés par les autorités canadiennes, qui ont conclu qu’ils n’étaient pas crédibles. En particulier, le tribunal qui a eu la possibilité d’entendre et d’interroger l’auteur directement a rejeté l’entièreté de son témoignage au motif qu’il présentait de sérieux problèmes de crédibilité. La demande d’examen des risques avant renvoi ainsi que la demande de résidence permanente pour considérations d’ordre humanitaire ont toutes deux été rejetées pour des motifs de manque de crédibilité et d’insuffisance de preuve. Enfin, la Cour fédérale qui a été saisie de l’examen des diverses allégations de l’auteur a conclu que celles-ci n’étaient pas crédibles et que la preuve fournie n’était pas suffisante pour étayer ses allégations de risque de torture, de mauvais traitement et de menace pour sa vie. Par ailleurs, les sources documentaires indépendantes n’établissent pas un risque prévisible, réel et personnel pour l’auteur. Ce dernier ne ferait pas partie de la catégorie de personnes visées par des persécutions, des arrestations illégales ou des exécutions extrajudiciaires en Angola.

7.5L’État partie rappelle aussi que les allégations de l’auteur relatives à l’article 2 du Pacte sont incompatibles ratione materiae avec les dispositions du Pacte. L’article 2 ne confère pas un droit indépendant à réparation, et donc des allégations relatives à cet article ne peuvent d’elles-mêmes fonder un grief dans une communication présentée en vertu du Protocole facultatif.

7.6En général, les allégations de l’auteur ont fait l’objet d’examens approfondis et ont été rejetées par les autorités canadiennes pour manque de crédibilité. Les autorités ont également constaté qu’il n’y avait aucune preuve objective permettant de corroborer ses allégations selon lesquelles il serait soumis à un risque d’être tué ou torturé ou de subir des traitements cruels ou inhumains s’il était renvoyé en Angola. La communication ne contient aucun nouvel argument ou élément de preuve susceptible de modifier les conclusions auxquelles sont parvenues les autorités canadiennes.

7.7L’État partie maintient qu’il a satisfait à toutes les obligations qui lui incombaient dans l’évaluation du cas de l’auteur. Les procédures dont il a bénéficié se sont déroulées en conformité avec le droit canadien et les obligations internationales du Canada selon le Pacte.

7.8Chacun des motifs susmentionnés est suffisant en soi pour établir l’irrecevabilité de la communication. Si le Comité devait cependant conclure que cette communication est recevable, l’État partie fait valoir, à titre subsidiaire, qu’elle devrait être rejetée sur le fond puisqu’elle est dénuée de fondement.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie sur la recevabilitéet le fond

8.1Le 21 juillet 2021, l’auteur a répondu aux observations de l’État partie, rappelant le risque substantiel de torture et même de disparition forcée ou d’exécution extrajudiciaire pour lui s’il était renvoyé vers l’Angola.

8.2L’auteur se sent profondément traumatisé par ce qui lui est arrivé, et il n’a pas eu accès à des soins psychiatriques ou médicaux appropriés au Canada avant 2019. Il précise qu’au Canada, il y a un problème majeur d’absence de recours effectif à la fin du processus de demande d’asile ou de protection des droits fondamentaux. L’auteur est victime du système canadien, qui n’accepte pas la possibilité de corriger des erreurs manifestes comme dans le cas de l’auteur, et qui ne tient pas compte de la situation de non-respect des droits humains en Angola.

8.3L’auteur rappelle les faits énoncés devant les instances nationales, y compris la Cour fédérale. Devant cette dernière, l’auteur visait la dernière décision de l’agent chargé de l’examen des risques avant renvoi d’août 2019, qui rejetait toutes les nouvelles preuves présentées. La demande de révision judiciaire de ce dossier a été refusée le 27 février 2020. L’auteur soutient que la décision indiquant qu’il n’y a pas de danger pour lui en Angola est arbitraire et manifestement déraisonnable, étant donné la quantité de preuves à l’appui de son dossier.

8.4L’auteur rappelle qu’il y a deux convocations par la police et de nombreuses preuves qui corroborent son témoignage, et qui n’ont pas été examinées et considérées à leur juste valeur – ce qui équivaut à un déni de justice. L’auteur est d’avis qu’il y a une grande quantité de preuves qui démontrent qu’il a été victime de répression. Malheureusement, toutes les décisions administratives se sont basées sur la première décision du tribunal administratif, qui remettait en cause sa crédibilité et la plausibilité de son récit sans prendre en considération les éléments de preuve apportés au cours de la procédure. Il est également clair, à la lumière des rapports établis sur les droits humains en Angola, que l’auteur est une personne qui court un grand risque car les dissidents, y compris les dirigeants des églises évangéliques, sont encore en danger aujourd’hui.

8.5L’auteur invoque l’absence d’un recours efficace pour corriger les erreurs dans l’évaluation des preuves, après la première décision négative de la Section de la protection des réfugiés. Il y a eu seulement une audience relative à la crédibilité, au début de la procédure. Le droit d’être vraiment entendu après un premier refus n’est pas vraiment accepté ; les différentes instances se basent sur le premier refus pour réfuter toute crédibilité ou apporter un poids quelconque aux preuves qui suivent. L’auteur ajoute qu’il n’y a pas eu de contradictions importantes dans ses récits, qu’il a expliqué pourquoi il n’avait pas quitté l’Angola plus tôt, et qu’il a précisé plusieurs éléments montrant qu’il a été soumis à la torture en toute impunité dans son pays. Il souligne qu’il a fait une demande de réouverture de la décision consécutive à l’examen des risques avant renvoi en juillet 2019, après avoir reçu l’original d’un mandat d’arrêt daté du 10 septembre 2018 et une lettre de son ancien propriétaire expliquant comment il avait trouvé le mandat, sans douter de son origine. L’affidavit d’un ancien policier angolais a aussi confirmé l’authenticité du mandat. De plus, l’auteur soulève l’absence d’indépendance des autorités dans le processus, alléguant que son renvoi mettrait en danger sa vie et son intégrité physique. L’auteur a également fourni le rapport d’évaluation psychologique confirmant les séquelles psychotraumatiques sévères, lequel aurait pu influencer la perception de sa crédibilité par les autorités. Le médecin a conclu que l’auteur était parvenu à rendre crédibles sa trajectoire de vie et les graves atteintes physiques et psychotraumatiques subies dans son pays d’origine, qu’il pouvait parvenir à une réunification familiale avec sa conjointe et sa fille qui, à ce jour, étaient demandeuses d’asile en France, et qu’il pouvait bénéficier d’un soutien psychothérapeutique afin de diminuer les séquelles dépressives associées aux sentiments de vulnérabilité, d’incompréhension et d’injustice qui étaient les siens.

8.6L’auteur demande au Comité de rappeler à l’État partie la prohibition internationale qui est faite à tout État partie au Pacte de renvoyer un individu vers un État où il y a un risque substantiel de torture.

Observations complémentaires de l’État partie

9.1Le 24 novembre 2021, l’État partie a soumis ses observations complémentaires. En effet, il conteste les critiques faites par l’auteur à l’encontre de ses systèmes d’immigration et de justice.

9.2L’État partie réaffirme que les preuves ont été étudiées de façon approfondie par les diverses instances canadiennes, et réitère que l’auteur n’a pas épuisé les recours internes. Il admet que, le 27 février 2020, la Cour fédérale a rejeté la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision relative à la réouverture de l’examen des risques avant renvoi. Malgré cette décision, l’État partie réitère que l’auteur n’a pas épuisé les recours internes. Depuis le 27 février 2021, il est devenu loisible à l’auteur de présenter une autre demande d’examen des risques avant renvoi, puisque douze mois se sont écoulés depuis que la Cour fédérale a rendu sa décision sur la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de l’auteur. L’État partie soutient que le nouvel élément de preuve de l’auteur, à savoir le rapport psychologique, pourrait être présenté dans le cadre d’une deuxième demande d’examen des risques avant renvoi, qui est un recours efficace et utile que l’auteur aurait dû épuiser avant de soumettre cette nouvelle preuve au Comité. La loi sur l’immigration et la protection des réfugiés permet des demandes d’examen des risques avant renvoi supplémentaires pour les personnes dont la demande d’asile a été rejetée, mais qui sont demeurées au Canada depuis la délivrance de l’avis de décision défavorable concernant la demande précédente.

9.3L’État partie soutient que les commentaires de l’auteur n’apportent aucun nouvel élément sur la façon dont le Canada violerait les articles 2, 6 et 7 du Pacte en renvoyant l’auteur dans son pays d’origine. En effet, il s’agit essentiellement des mêmes arguments déjà présentés dans sa communication et auxquels l’État partie a déjà répondu dans ses observations sur la recevabilité et le fond. Les commentaires supplémentaires de l’auteur ne démontrent pas que ce dernier serait personnellement exposé à un risque personnel de traitements inhumains ou dégradants, advenant son renvoi en Angola.

9.4En conséquence, l’État partie réitère sa demande de déclarer la communication de l’auteur irrecevable, conformément aux articles 2, 3 et 5 du Protocole facultatif et à l’article 99 du Règlement intérieur du Comité, pour les motifs déjà exposés dans ses observations sur la recevabilité et le fond : l’auteur n’a pas épuisé les recours internes ; il n’a pas suffisamment étayé ses allégations de violation des articles 6 et 7 du Pacte ; et ses allégations relatives à l’article 2 du Pacte sont incompatibles ratione materiae avec les dispositions du Pacte.

9.5De plus, l’État partie réitère que le Comité a soutenu à maintes reprises que, d’une manière générale, il appartient aux organes des États parties au Pacte d’apprécier les faits et les éléments de preuve dans une affaire donnée aux fins de déterminer l’existence d’un risque de torture ou de peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant, à moins qu’il soit établi que cette appréciation a été arbitraire ou manifestement entachée d’erreur, ou a représenté un déni de justice. En l’espèce, l’auteur n’a pas établi que les décisions adoptées dans son cas par les autorités canadiennes avaient été manifestement déraisonnables, entachées d’irrégularité ou arbitraires, ou étaient entachées d’un vice justifiant l’intervention du Comité. Dans de telles circonstances, le Comité devrait donc se fonder sur les décisions prises par les autorités nationales en ce qui concerne la preuve.

9.6Le fait que le conseil de l’auteur l’aurait mal représenté devant la Section de la protection des réfugiés, évoqué par l’auteur dans ses commentaires, ne peut pas équivaloir à un déni de justice ou à une décision déraisonnable ou arbitraire de la part de la Section. D’ailleurs, le Comité a toujours été d’avis que l’État partie ne peut pas être tenu responsable des prétendues erreurs qui auraient été commises par un avocat engagé à titre privé, sauf si le décideur interne a constaté que le comportement de l’avocat était manifestement incompatible avec les intérêts de la justice. L’auteur n’a produit aucune preuve pour étayer une telle allégation.

9.7De plus, les nouvelles preuves présentées par l’auteur dans les procédures subséquentes devant les diverses instances canadiennes ainsi que sa représentation par différents avocats ne lui ont pas permis de rétablir sa crédibilité ni de démontrer la valeur probante des nouvelles informations collectées quant au risque de préjudice irréparable en cas de son renvoi vers l’Angola. Au contraire, les autorités canadiennes ont trouvé que les nouvelles preuves confirmaient les contradictions et invraisemblances de son récit et de ses allégations. À cet égard, les invraisemblances concernent les informations importantes manquantes dans le premier mandat d’arrêt, mais corrigées dans le deuxième mandat, les circonstances invraisemblables dans lesquelles le deuxième mandat a été retrouvé, la non‑reconnaissance par le pasteur principal du rôle de dirigeant de l’auteur dans son église, et la capacité invraisemblable de l’ancien policier à confirmer l’authenticité des mandats d’arrêt angolais plus de trente ans après avoir quitté l’Angola.

9.8Si le Comité conclut que la communication de l’auteur est recevable, l’État partie demande au Comité de la rejeter sur le fond, conformément à l’article 102 de son règlement intérieur, pour les raisons déjà établies dans ses observations sur la recevabilité et le fond ainsi que dans les présentes observations complémentaires.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

10.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 97 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

10.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’article 5 (par. 2 a)) du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

10.3Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle les auteurs doivent se prévaloir de tous les recours judiciaires internes pour satisfaire à la condition énoncée à l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif, pour autant que de tels recours semblent être utiles en l’espèce et soient de facto ouverts aux auteurs.

10.4Le Comité prend note des allégations de l’État partie selon lesquelles l’auteur n’a pas épuisé les voies de recours internes disponibles. Il note que la demande d’asile que l’auteur a présentée le 19 avril 2016, dès son arrivée au Canada depuis les États-Unis, auprès de la Section de la protection des réfugiés, a été rejetée le 13 février 2017 pour manque de crédibilité des faits exposés. Le 18 juillet 2017, la Cour fédérale a refusé de réviser la décision de la Section. Le 13 février 2018, l’auteur a déposé une demande d’examen des risques avant renvoi en présentant de nouvelles preuves. Le 23 mai 2018, il a soumis une demande de résidence permanente pour considérations d’ordre humanitaire. Le 25 juillet 2019, l’auteur a reçu par la poste, de la part d’un ami, deux nouvelles preuves qu’il a présentées à l’Agence des services frontaliers du Canada. Le 30 juillet 2019, la demande d’examen des risques avant renvoi ainsi que la demande de résidence permanente pour considérations d’ordre humanitaire ont été toutes deux refusées. Le renvoi de l’auteur a été fixé au 14 août 2019, malgré la présentation des nouvelles preuves. Le 7 août 2019, l’Agence des services frontaliers du Canada a refusé de suspendre son renvoi par suite de la soumission des nouvelles preuves, alléguant notamment que la traduction du mandat d’arrêt n’était pas authentique. Le jour même, l’auteur a déposé une requête en sursis de l’exécution du renvoi devant la Cour fédérale, qui l’a rejetée le 13 août 2019. Le 27 février 2020, la Cour fédérale a rejeté la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de réouverture de l’examen des risques avant renvoi. Dans ce contexte, le Comité note que l’État partie considère que l’auteur n’a pas épuisé tous les recours internes qui étaient à sa disposition, car depuis le 27 février 2021, l’auteur aurait pu présenter une nouvelle demande d’examen des risques avant renvoi puisque douze mois s’étaient écoulés depuis que la Cour fédérale avait rendu sa décision sur la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de l’auteur. L’État partie indique que le nouvel élément de preuve de l’auteur, à savoir le rapport psychologique, aurait pu être présenté dans le cadre d’une deuxième demande d’examen des risques avant renvoi. Selon l’État partie, même si cette nouvelle formalité concerne une demande renouvelée, il s’agit d’une voie de recours utile qui devrait être considérée comme un recours effectif dans les circonstances de l’espèce. Le Comité note que l’auteur n’a pas soumis de commentaire sur ce point soulevé par l’État partie. En conséquence, le Comité considère que les dispositions de l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif font obstacle à l’examen de la présente communication.

10.5Compte tenu de ce qui précède, le Comité n’examinera pas séparément les arguments de l’État partie selon lesquels les allégations de l’auteur sont également irrecevables ratione materiae ou en raison d’un manque de justification suffisante.

11.En conséquence, le Comité décide :

a)Que la communication est irrecevable au titre de l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif ;

b)Que la présente décision sera communiquée à l’État partie et à l’auteur.