Nations Unies

CCPR/C/100/D/1621/2007

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. restreinte*

30 novembre 2010

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’homme

Centième session

11-29 octobre 2010

Constatations

Communication no 1621/2007

Présentée par:

Leonid Raihman (également connu sous le nom de Leonīds Raihmans) (représenté par un conseil, M. Aleksejs Dimitrovs)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Lettonie

Date de la communication:

1er juin 2007 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application de l’article 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 27 novembre 2007 (non publiée sous forme de document)

Date de l’adoption des constatations:

28 octobre 2010

Objet:

Transcription du nom de l’auteur selon l’orthographe lettonne sur les pièces d’identité

Questions de procédure:

Non-épuisement des recours internes

Questions de fond:

Immixtion arbitraire et illégale dans la vie privée; interdiction de la discrimination; protection des minorités

Articles du Pacte:

17, seul et lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2, 26 et 27

Articles du Protocole facultatif:

1, 2, 5 (par. 2 b))

Le 28 octobre 2010, le Comité des droits de l’homme a adopté le texte ci-après en tant que constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif concernant la communication no 1621/2007.

[Annexe]

Annexe

Constatations du Comité des droits de l’homme au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (centième session)

concernant la

Communication no 1621/2007**

Présentée par:

Leonīd Raihman (également connu sous le nom de Leonīds Raihmans) (représenté par un conseil, M. Aleksejs Dimitrovs)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Lettonie

Date de la communication:

1er juin 2007 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l’homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réunile 28 octobre 2010,

Ayant achevé l’examen de la communication no 1621/2007 présentée au nom de Leonid Raihman (également connu sous le nom de Leonīds Raihmans), en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l’auteur et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif

1.1L’auteur de la communication, datée du 1er juin 2007, est Leonid Raihman (également connu sous le nom de Leonīds Raihmans), de nationalité lettonne, membre des minorités juive et russophone. Il est né «Leonid Raihman» en 1959. Les autorités soviétiques ont enregistré son prénom et son nom sous cette forme, qui est celle qu’il a utilisée jusqu’en janvier 1998, date à laquelle ces noms ont été modifiés par les autorités lettonnes et transcrits, sans qu’il y consente, selon l’orthographe suivante «Leonīds Raihmans», qui n’est ni russe ni juive. L’auteur affirme être victime d’une violation par la Lettonie de l’article 17, seul et lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de l’article 26 et de l’article 27. Il est représenté par un conseil, M. Aleksejs Dimitrovs. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques est entré en vigueur pour la Lettonie le 14 juillet 1992 et le Protocole facultatif le 22 septembre 1994.

1.2Le 30 janvier 2008, le Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires a décidé que la question de la recevabilité de la communication devait être examinée en même temps que celle du fond.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1L’auteur est un ressortissant letton, membre des minorités juive et russophone. Il est né «Leonid Raihman» en 1959, et les autorités de l’Union soviétique ont enregistré son prénom et son nom de famille sous cette forme, qui est celle qu’il a utilisée jusqu’en janvier 1998, et qui figurait notamment sur son passeport soviétique, jusque-là. À cette date, l’auteur s’est vu délivrer un passeport de «non-citoyen letton» sur lequel son prénom et son nom avaient été modifiés et transcrits sous la forme «Leonīds Raihmans» qui n’est ni russe ni juive, et sans qu’il y consente. En janvier 2001, après avoir acquis la nationalité lettonne par naturalisation, il s’est vu délivrer un passeport sous ce nom de «Leonīds Raihmans». L’auteur indique que Raihman est un patronyme juif porté avant lui au moins par son père, son grand-père et son arrière-grand-père. Son fils, né en 1989, a aussi été inscrit sous le nom de Raihman.

2.2L’auteur a tenté en vain d’obtenir que son nom soit officiellement transcrit conformément à ses origines russe et juive sous la forme «Leonid Raihman» et non selon l’orthographe lettonne. Le 10 février 2004, il a saisi le Centre pour la défense de la langue de l’État lui demandant de rendre une décision l’autorisant à supprimer de son nom la terminaison «s» qui est la marque des noms masculins selon la grammaire lettonne. Il demandait aussi que, dans sa décision, le Centre l’autorise à écrire son prénom (Leonid) sans tréma sur le «i». L’auteur faisait valoir que l’obligation de transcrire son nom selon l’orthographe lettonne imposée par les autorités de l’État partie était contraire à l’article 91 (relatif à la non-discrimination) et à l’article 114 (droit de préserver l’identité ethnique et culturelle) de la Constitution de la République de Lettonie, des articles 17, 26 et 27 du Pacte, ainsi que des articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Le 20 février 2004, le Centre pour la défense de la langue de l’État a rejeté la demande de l’auteur estimant que sa décision ne pouvait pas être considérée comme un acte administratif qui crée des obligations pour l’organe chargé de délivrer les passeports.

2.3Le 18 mars 2004, l’auteur a fait recours de la décision du Centre pour la défense de la langue de l’État devant le tribunal administratif de district, qui l’a débouté le 11 mai 2004. Le 16 juillet 2004, le tribunal administratif régional a confirmé ladite décision. Le 3 août 2004, la Cour suprême a renvoyé l’affaire au tribunal administratif de district, reconnaissant que la décision du Centre pour la défense de la langue de l’État était un acte administratif et que l’affaire devait être examinée au fond. Le 5 novembre 2004, le tribunal administratif de district a débouté l’auteur, considérant que le Centre linguistique national avait fondé sa décision sur la loi relative à la langue de l’État de 1999 et sur le Règlement no 295 relatif à l’orthographe et à l’identification des prénoms et des noms du 22 août 2000. Le tribunal a estimé que le Centre n’était pas habilité à décider de la graphie des noms puisque les noms personnels ne pouvaient être transcrits que suivant les règles de la langue lettonne, comme le prévoient les textes applicables. Le tribunal administratif renvoyait à un arrêt de la Cour constitutionnelle de Lettonie confirmant la constitutionalité de l’article 19 de la loi sur la langue de l’État de 1999. Dans son arrêt, la Cour constitutionnelle déclarait que l’imposition de la graphie lettonne pour tous les noms de personnes figurant sur des documents officiels était une restriction nécessaire pour satisfaire à l’objectif légitime qui est «de garantir aux autres personnes résidant en Lettonie le droit d’employer librement le letton sur tout le territoire de la République, et [de] préserver la démocratie, ainsi que [de] contribuer à la stabilité du système linguistique letton».

2.4Le 21 novembre 2005, suivant l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 21 décembre 2001, le tribunal administratif régional a confirmé la décision. La Cour constitutionnelle faisait observer par ailleurs qu’en vertu du paragraphe 2 de l’article 19 de la loi sur la langue officielle, un individu pouvait demander que son nom soit également reproduit sous sa forme d’origine dans les documents officiels. Elle faisait ressortir également que le nom personnel reflétait essentiellement l’appartenance à une certaine famille et à une certaine patrie, mais qu’il ne pouvait refléter l’appartenance à un groupe ethnique que dans des cas exceptionnels. La Cour estimait que la restriction imposée par la loi sur la langue de l’État partie soulevait des questions qui touchaient plus au droit au respect de la vie privée qu’au droit à l’identité ethnique. Elle a ajouté que cette restriction n’avait pas pour objet la «lettonisation» des noms mais simplement leur adaptation aux spécificités de la grammaire lettonne.

2.5Le 16 mai 2006, à propos de l’adjonction d’un «s» à la fin du patronyme de l’auteur, la Cour suprême (Département des affaires administratives) a confirmé la décision du tribunal administratif régional pour les mêmes motifs. Quant à son prénom, transcrit avec un «ï» au lieu de «i», la question a été renvoyée au tribunal administratif régional pour examen sur le fond. L’auteur affirme donc que les recours internes ont été épuisés en ce qui concerne la question de l’adjonction d’un «s» à la fin de son patronyme. La Cour suprême a confirmé que la restriction contestée inscrite dans la loi était proportionnée par rapport au but légitime poursuivi et qu’elle ne soulevait pas de questions quant au principe d’égalité puisque tous les noms, de quelque origine qu’ils soient, étaient traités de la même manière.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme que la disposition législative qui lui impose d’accepter la transcription de son nom dans les documents officiels selon les règles de la langue lettonne constitue une violation de ses droits au titre de l’article 17, seul et lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2 et des articles 26 et 27. Au sujet de l’article 17, il déclare que le droit de conserver le nom qui lui a été donné et son nom de famille, y compris leur représentation graphique, est un élément essentiel de son identité. Il soutient que son droit à ce que son nom soit transcrit selon sa graphie d’origine fait partie intégrante de son droit de ne pas faire l’objet d’immixtion arbitraire ou illégale dans sa vie privée. En l’espèce, l’auteur estime que son nom a été modifié de manière unilatérale et sans son consentement pour être adapté à l’orthographe lettonne. Selon lui, cette immixtion dans sa vie privée est arbitraire. Il ajoute que, transcrits selon la graphie lettonne, son prénom et son nom de famille «ont une apparence et une consonance bizarres», car ils ne correspondent ni à un nom juif, ni à un nom russe, ni à un nom letton. Cette situation est pour lui source de désagréments dans la vie courante − transactions bancaires manquées, retards au contrôle de l’immigration dans les aéroports, et autres aspects de la vie quotidienne. L’auteur affirme que l’interdiction d’utiliser son nom d’origine a aussi des incidences sur sa vie privée, notamment dans ses contacts avec la communauté juive russophone à laquelle il appartient.

3.2L’auteur soutient par ailleurs qu’il a fait l’objet d’un traitement moins favorable que d’autres résidents lettons à cause de sa langue et de ses origines ethniques. Les personnes qui appartiennent à la communauté de langue lettonne (lettons de souche pour la plupart) peuvent, contrairement à lui, utiliser leur nom sans aucun changement. L’auteur fait valoir que l’immixtion de l’État partie dans sa vie privée est donc discriminatoire pour des raisons liées à la langue et, indirectement, à l’origine ethnique, en violation de l’article 17, lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2. Il ajoute que cette immixtion est disproportionnée et déraisonnable car elle n’a rien à voir avec l’objectif officiel déclaré qui est de veiller à ce que les Lettons puissent utiliser leur propre langue. À ce titre, l’auteur soutient que la mesure est arbitraire.

3.3S’agissant de l’article 26, l’auteur fait valoir que cette disposition prévoit un droit autonome et qu’elle interdit la discrimination directe et indirecte. Il fait observer que la législation adoptée par l’État partie, qui peut paraître neutre alors qu’elle n’est pas fondée sur des critères objectifs et raisonnables, peut donner lieu à une discrimination relevant de l’article 26 si elle a des incidences défavorables pour une certaine catégorie de personnes. Le letton est la langue d’origine d’environ 58 % de la population. En conséquence, les restrictions législatives visant à modifier les noms étrangers pour les rendre conformes à la grammaire lettonne ont des incidences négatives pour une proportion importante d’individus qui ne sont pas des Lettons de souche, qui se voient de facto refuser les mêmes avantages que la plupart des Lettons de souche, à savoir l’emploi de leurs propres prénom et nom. Selon l’auteur, ces incidences sont disproportionnées par rapport au but visé par l’État partie, qui est en lui-même équivoque.

3.4À propos de l’article 27, l’auteur affirme que la minorité russophone est présente en Lettonie depuis des siècles et représente quelque 37,5 % de la population. Il ajoute que le russe est la langue maternelle de 79 % des Juifs lettons. Il souligne que le nom personnel, y compris sa graphie, est un élément culturel essentiel pour les communautés ethniques, religieuses et linguistiques, et qu’il est étroitement lié à leur identité. Il ajoute que le droit, pour les membres d’une minorité, d’employer leur propre langue est un droit fondamental visé à l’article 27 du Pacte. Selon l’auteur, le refus des autorités de l’État partie d’accepter la graphie originale de son prénom et de son nom est un déni de son droit d’employer sa propre langue au sein de sa communauté, russe et juive. Il ajoute qu’il fait l’objet d’une sorte d’assimilation forcée qui n’est pas compatible avec le but et l’objet de l’article 27.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4.1Dans une lettre du 28 janvier 2008, l’État partie a contesté la recevabilité de la communication. Il fait valoir tout d’abord que l’auteur n’a pas épuisé les recours internes, comme le veulent l’article 2 du Protocole facultatif et l’article 90 f) du Règlement intérieur du Comité. L’auteur disposait d’un recours utile auprès de la Cour constitutionnelle. L’État partie fait valoir que dans son arrêt du 21 décembre 2001, la Cour constitutionnelle devait statuer sur la constitutionnalité de l’article 19 de la loi sur la langue officielle ainsi que sur trois règlements pertinents relatifs à la loi. La Cour a confirmé la constitutionnalité de l’article 19 de la loi précitée. Elle a en revanche prononcé l’inconstitutionnalité des trois règlements contestés, lesquels ont été abrogés et remplacés par de nouvelles dispositions juridiques, dont la constitutionnalité n’a pas été contestée à ce jour. L’auteur n’a donc pas épuisé tous les recours internes disponibles.

4.2L’État partie ajoute que la plainte de l’auteur au titre de l’article 17 doit être considérée irrecevable en vertu de l’article premier et de l’article 2 du Protocole facultatif en tant qu’incompatible ratione personae, puisque l’auteur n’a pas démontré qu’il était «victime» d’une violation de l’article 17 du Pacte. L’État partie souligne que, suite à l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 21 décembre 2001, il a pris un certain nombre de mesures d’atténuation, dont celle qui prévoit que le nom du porteur du document d’identité est inscrit sous sa forme d’origine ou sa forme historique à la page 4 du passeport. Selon l’article 10 du Règlement no 295 relatif à l’orthographe et à l’identification des prénoms et des noms (applicable au moment où un nouveau passeport a été délivré à l’auteur), la forme en langue lettonne d’un nom personnel avait la même valeur juridique que sa forme d’origine, sa forme historique ou sa forme translittérée. Ce principe est repris aux articles 145 et 146 du Règlement no 114 relatif à l’orthographe et à l’usage des noms personnels en langue lettonne, ainsi qu’à l’identification. L’État partie affirme que l’auteur n’a subi aucun préjudice au motif que son nom était porté sous sa forme lettonne sur son passeport. L’auteur n’a pas démontré que les autorités lettonnes avaient ignoré ou contesté la forme d’origine de son nom ni donné la preuve des désagréments que cela lui avait causés. Il est possible que les désagréments rencontrés par l’auteur au cours de ses voyages soient imputables aux autres États, et on ne peut pas en faire porter la responsabilité à l’État partie. En conséquence, on ne peut pas considérer que les autorités lettonnes ont porté atteinte au droit au respect de la vie privée de l’auteur visé à l’article 17 du Pacte.

4.3Pareillement, l’État partie estime que l’auteur n’a pas démontré, aux fins de la recevabilité, qu’il était victime ratione personae d’une violation de ses droits découlant de l’article 27 du Pacte. Il n’a pas démontré que l’État partie s’était rendu coupable d’omissions l’empêchant de jouir des droits garantis en vertu de cet article. La règle relative à la reproduction des noms personnels suivant la grammaire lettonne ne s’applique qu’aux documents officiels. L’auteur est libre d’utiliser son nom d’origine dans sa vie privée, dans ses activités professionnelles, et avec les membres de sa famille et de sa communauté. L’État partie considère donc sa plainte irrecevable en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif. À titre subsidiaire, l’État partie fait valoir que le grief de l’auteur est infondé.

4.4En ce qui concerne le paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte, l’État partie estime que cette disposition ne peut être invoquée directement et séparément. L’auteur n’ayant pas démontré qu’il était victime d’une violation de l’article 17, il ne peut pas invoquer une violation du paragraphe 1 de l’article 2 séparément.

4.5Quant aux griefs tirés de l’article 26, l’État partie estime que l’auteur n’a pas démontré, aux fins de la recevabilité, qu’il était victime d’une discrimination fondée sur la langue et l’origine ethnique. Les dispositions légales relatives à la reproduction des noms personnels en Lettonie s’appliquent indistinctement à tous les noms personnels inscrits sur les passeports.

Observations de l’État partie sur le fond

5.1Dans une note du 27 mai 2008, l’État partie a affirmé qu’il n’y avait pas violation de l’article 17, seul et lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2. Le nom de l’auteur n’a pas été changé mais simplement reproduit en appliquant les dispositions réglementaires pertinentes applicables aux noms d’origine étrangère. L’article 17, qui ne fait pas directement référence au nom, ne protège pas le droit à un nom, et ni l’Observation générale no 16 ni la jurisprudence ne définissent clairement la portée du droit au respect de la vie privée. On ne peut donc pas dire que ce droit s’étend à la représentation graphique d’un nom qui a été modifié dans le seul but de suivre les particularités de la langue lettonne. Cette mesure ne viole donc pas les droits que tient l’auteur de l’article 17. À titre subsidiaire, si le Comité devait arriver à une conclusion différente, l’État partie estime que le droit au respect de la vie privée n’est pas un droit absolu et que l’immixtion dans sa vie privée invoquée par l’auteur avait un but légitime, à savoir garantir le bon fonctionnement de la langue lettonne en tant que système intégral, ce qui est une nécessité sociale. L’État partie souligne en outre que la mesure prise est raisonnable, eu égard à l’objectif visé. Il ajoute que cette mesure était prévue par la loi et qu’elle était en tant que telle légale et dépourvue d’arbitraire.

5.2Au sujet du paragraphe 1 de l’article 2, l’État partie affirme que l’auteur n’a pas démontré avoir été victime d’une discrimination fondée sur la langue ou l’origine ethnique. Il précise que l’auteur a été traité de la même manière que tous les autres Lettons de souche, dont le nom est lui aussi assujetti aux déclinaisons grammaticales de genre.

5.3De même, en ce qui concerne l’article 26, l’État partie réaffirme que les dispositions qui régissent la reproduction des noms sur les documents officiels s’appliquent sans distinction à tous les noms personnels, indépendamment de leur origine linguistique ou ethnique. L’État partie estime donc infondé le grief que l’auteur tire de l’article 26.

5.4À propos de l’article 27, l’État partie réaffirme que l’article 19 de la loi sur la langue officielle régit uniquement la reproduction des noms personnels sur les documents officiels. Il ne s’applique pas à l’emploi de la forme d’origine ou de la forme historique du nom d’un individu dans la sphère privée, y compris dans les communautés ethniques. L’auteur n’a pas démontré que le droit d’utiliser son nom sous sa forme d’origine dans la communauté juive ou russophone lui avait été refusé ni désigné une quelconque institution ou une quelconque personne qui l’aurait empêché d’utiliser son patronyme dans ces circonstances. Bien au contraire, l’État partie fait observer que l’auteur utilise son nom sous sa forme d’origine sur des sites Web ainsi que dans des publications et des travaux de recherche. L’État partie conclut que la plainte de l’auteur au titre de l’article 27 est manifestement mal fondée ou, accessoirement, qu’il n’y a pas eu violation de l’article 27.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité et le fond

6.1En date du 18 février 2009, l’auteur a adressé ses commentaires sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité et le fond. Au sujet de l’épuisement des recours internes, il fait valoir que, suite à l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 21 décembre 2001, il n’existait pas de recours ayant une chance raisonnable d’aboutir. Il souligne que dans son arrêt, la Cour constitutionnelle a confirmé la constitutionnalité de la politique de «lettonisation» des noms, et que même si le texte juridique précisant l’endroit où pouvait être inscrit le nom d’origine du détenteur d’un passeport a été déclaré illégal, cet arrêt signifie simplement que, dans la pratique, la forme historique/originale du nom peut désormais être inscrite à la quatrième page du passeport. L’auteur souligne que les arrêts de la Cour constitutionnelle sont juridiquement contraignants et que s’il avait contesté devant cette instance la légalité de l’article 19 de la loi sur la langue officielle, déjà examinée devant ladite Cour, son recours aurait été déclaré irrecevable. Le fait que tout au long des procédures qu’il a engagées cet arrêt de la Cour constitutionnelle a été abondamment invoqué ne fait que confirmer son point de vue.

6.2L’auteur réaffirme que la restriction qui lui a été imposée quant à la graphie de son nom est une mesure arbitraire incompatible avec l’article 17 et que le nom d’une personne, y compris son orthographe, est un élément essentiel de son identité. Les terminaisons déclinables rattachées à son prénom et à son nom modifient, non seulement la représentation graphique de son nom, mais sa prononciation. La dérogation autorisée par l’article 19 2) de la loi sur la langue officielle, qui permet d’inscrire le nom de l’intéressé dans sa forme originale sur les passeports et les actes de naissance, s’applique uniquement à ces documents-là. Par ailleurs, il n’est pas dit que la forme historique du nom a la même valeur juridique que la version officielle au regard de cette loi. L’auteur conteste qu’il soit libre d’utiliser son nom d’origine dans des actes de la vie privée, comme les opérations bancaires, et cite des cas où il a été obligé, malgré sa demande, d’utiliser la forme officielle de son nom, par exemple pour pouvoir renouveler sa carte de crédit et son permis de conduire. Il invoque la décision du Comité dans l’affaire Coeriel et soutient que si l’article 17 s’applique au droit de changer de nom, il s’applique a fortiori au droit de rétablir dans leur forme d’origine des noms changés de force. En conclusion, il invite le Comité à considérer que l’État partie a violé l’article 17 à cet égard. Dans la mesure où la politique linguistique s’applique uniquement à la minorité non lettophone, qui constitue une forte proportion de la population de l’État partie, l’auteur réaffirme aussi que l’État partie a violé l’article 17, lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte.

6.3S’agissant de l’article 26, l’auteur réaffirme que la loi sur la langue officielle donne lieu à une discrimination de facto fondée sur la langue et l’origine ethnique envers les minorités, qui se voient refuser le droit d’utiliser leurs prénom et nom selon les règles applicables dans leur propre langue, contrairement aux Lettons de souche auxquels la garantie et la jouissance de ce droit sont assurées. L’auteur réaffirme que cette restriction est disproportionnée par rapport au but visé. En conclusion, il réaffirme que l’État partie a violé l’article 26 à cet égard.

6.4Concernant l’article 27, l’auteur réaffirme que ses droits en découlant ont été violés puisque le droit d’utiliser son nom dans les actes de la vie quotidienne et professionnelle et dans ses échanges avec les membres de sa communauté lui est refusé.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

7.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

7.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément aux dispositions du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même affaire n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

7.3Concernant la prescription énoncée au paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif et l’argument de l’État partie selon lequel l’auteur n’a pas épuisé tous les recours internes, le Comité note que l’auteur a tenté en vain d’obtenir que son nom soit officiellement transcrit sur ses documents d’identité sous sa forme d’origine, russe et juive, et orthographié «Leonid Raihman» et non selon la graphie lettonne en vigueur sur ces documents. L’auteur a saisi le Centre de la langue de l’État, le tribunal administratif de district, le tribunal administratif régional, et enfin la Cour suprême, qui a confirmé la décision du tribunal administratif régional relative à l’adjonction d’un s à la fin de son patronyme. Le Comité a également pris note de l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 21 décembre 2001, confirmant la constitutionnalité de l’article 19 de la loi sur les langues qui stipule que «les noms de personnes sont reproduits conformément aux traditions linguistiques lettonnes et orthographiés suivant les règles de la langue écrite» (par. 1). Le Comité constate que cet arrêt a été appliqué en tant que précédent obligatoire dans toutes les décisions rendues à l’encontre de l’auteur. Il rappelle que seuls les recours internes qui sont à la fois disponibles et utiles doivent être épuisés. En l’espèce, les griefs de l’auteur sont directement liés à la question déjà examinée par la Cour constitutionnelle en 2001. On est donc en droit de considérer que, si l’auteur avait introduit un recours devant cette instance, il aurait été selon toute vraisemblance débouté. Dans ces circonstances, le Comité conclut que le paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif ne l’empêche pas d’examiner la communication.

7.4Pour ce qui est de l’argument de l’État partie selon lequel l’auteur n’a pas établi qu’il était une «victime» au sens de l’article premier du Protocole facultatif, eu égard à ses allégations au titre des articles 17 et 27 du Pacte, le Comité rappelle qu’une personne ne peut se prétendre victime au sens de l’article premier du Protocole facultatif que s’il est effectivement porté atteinte à ses droits, et que nul ne peut dans l’abstrait et par voie d’actio popularis contester une loi ou une pratique, d’après lui contraire au Pacte. En l’espèce, le Comité estime que l’auteur a démontré qu’il avait suffisamment qualité pour agir, en ce sens qu’il a suffisamment démontré que la législation et la politique concernant la langue de l’État ont porté directement à ses droits au titre de l’article 17, lu séparément et conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2, de l’article 26 et de l’article 27. En conséquence, le Comité entreprend l’examen de ces allégations quant au fond.

Examen au fond

8.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées.

8.2En ce qui concerne l’allégation de violation de l’article 17, le Comité a pris note de l’argument de l’auteur selon lequel la règle imposant la transcription de son nom, qu’il porte depuis quarante ans, selon l’orthographe lettonne dans les documents officiels, donne lieu à un certain nombre de tracasseries quotidiennes et suscite un sentiment de frustration et d’arbitraire, car son prénom et son nom ont, selon lui, «une apparence et une consonance bizarres» lorsqu’ils sont transcrits selon l’orthographe lettonne. Le Comité rappelle que la notion de vie privée renvoie au domaine de la vie de l’individu où celui-ci peut exprimer son identité, que ce soit dans ses relations avec les autres ou seul. Le Comité a également exprimé l’avis que le nom d’une personne constitue un élément important de son identité et que la protection contre les immixtions arbitraires ou illégales dans la vie privée comprend la protection contre les immixtions arbitraires ou illégales dans l’exercice du droit de choisir son nom et d’en changer. En l’espèce, le nom de l’auteur a été modifié pour suivre les règles grammaticales lettonnes, en application de l’article 19 de la loi sur la langue et d’autres règlements pertinents. L’immixtion en question ne saurait donc être considérée comme illégale. Il reste à examiner si elle est arbitraire.

8.3Le Comité rappelle son Observation générale concernant le droit au respect de la vie privée dans laquelle il est dit que l’expression «immixtions arbitraires» peut s’étendre aux immixtions prévues par la loi. Le Comité observe que l’article 19 de la loi sur la langue de l’État partie établit le principe général selon lequel tous les noms doivent être reproduits conformément aux traditions linguistiques lettonnes et orthographiés suivant les règles de la langue écrite. Il rappelle que la référence à la notion d’arbitraire vise à garantir que même une immixtion prévue par la loi soit conforme aux dispositions, aux buts et aux objectifs du Pacte et soit, dans tous les cas, raisonnable eu égard aux circonstances particulières. Le Comité a pris note des difficultés auxquelles la langue lettonne avait été exposée sous le régime soviétique et il accepte l’argument de l’État partie qui fait valoir que la politique et la législation linguistiques adoptées sont nécessaires pour préserver la langue lettonne, y compris l’intégrité de son système grammatical. Le Comité estime toutefois que l’immixtion qui en résulte pour l’auteur présente des inconvénients majeurs qui ne sont pas raisonnables car ils ne sont pas proportionnés au but recherché. Tout en soulignant que la question de la politique législative et les modalités qui permettent de préserver et de promouvoir les langues officielles doivent être laissées à l’appréciation des États, le Comité considère que le fait d’ajouter de force à un patronyme, employé sous sa forme originale pendant des décennies, un suffixe déclinable qui en modifie la prononciation phonique est une mesure intrusive qui n’est pas proportionnée au but que constitue la protection de la langue officielle de l’État. Se fondant sur sa jurisprudence, par laquelle il a établi que la protection offerte par l’article 17 englobait le droit de choisir et de changer son propre nom, le Comité considère que cette protection protège a fortiori les personnes contre le fait de se voir imposer passivement un changement de nom par l’État partie. Le Comité considère donc que la modification unilatérale du nom de l’auteur par l’État partie sur les documents officiels n’est pas raisonnable, et a donc constitué une immixtion arbitraire dans sa vie privée, en violation de l’article 17 du Pacte.

8.4Ayant constaté une violation de l’article 17, découlant de la modification unilatérale du nom de l’auteur par l’État partie, le Comité n’estime pas nécessaire d’examiner si les mêmes faits constituent une violation de l’article 26, de l’article 27, ou du paragraphe 1 de l’article 2, lu conjointement avec l’article 17.

9.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation des dispositions de l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

10.En vertu de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer à M. Raihman un recours utile et de prendre les mesures nécessaires, y compris en amendant la législation pertinente, en vue d’éviter que des violations analogues ne se reproduisent à l’avenir.

11.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y avait eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire ou relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations. L’État partie est invité en outre à rendre publiques les présentes constatations.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]

Appendice

Opinion individuelle (dissidente) de M. Rafael Rivas Posada et de M. Krister Thelin

La majorité a constaté une violation en l’espèce. Nous nous permettons respectueusement d’exprimer notre désaccord. À notre avis le raisonnement et les conclusions concernant le fond devraient en fait se lire comme suit:

8.2En ce qui concerne l’allégation de violation de l’article 17, le Comité a pris note de l’argument de l’auteur selon lequel la règle imposant la transcription de son nom, qu’il porte depuis quarante ans, selon l’orthographe lettonne dans les documents officiels, donne lieu à un certain nombre de tracasseries quotidiennes et suscite un sentiment de frustration et d’arbitraire, car son prénom et son nom ont, selon lui, «une apparence et une consonance bizarres» lorsqu’ils sont transcrits selon l’orthographe lettonne. Le Comité rappelle que la notion de vie privée renvoie au domaine de la vie de l’individu où celui-ci peut exprimer son identité, que ce soit dans ses relations avec les autres ou seul. Le Comité a également exprimé l’avis que le nom d’une personne constitue un élément important de son identité et que la protection contre les immixtions arbitraires ou illégales dans la vie privée comprend la protection contre les immixtions arbitraires ou illégales dans l’exercice du droit de choisir son nom et d’en changer. En l’espèce, le nom de l’auteur a été modifié pour suivre les règles grammaticales lettonnes, en application de l’article 19 de la loi sur la langue et d’autres règlements pertinents. L’immixtion en question ne saurait donc être considérée comme illégale. Il reste à examiner si elle est arbitraire.

8.3Le Comité rappelle son Observation générale concernant le droit au respect de la vie privée, dans laquelle il est dit que l’expression «immixtions arbitraires» peut s’étendre aux immixtions prévues par la loi. Le Comité observe que l’article 19 de la loi sur la langue de l’État partie établit le principe général selon lequel tous les noms doivent être reproduits conformément aux traditions linguistiques lettonnes et orthographiés suivant les règles de la langue écrite. Le Comité rappelle que l’introduction de la notion d’arbitraire a pour objet de garantir que même une immixtion prévue par la loi soit conforme aux dispositions, aux buts et aux objectifs du Pacte et soit, dans tous les cas, raisonnable eu égard aux circonstances particulières. Le Comité a pris note des difficultés auxquelles la langue lettonne avait été exposée sous le régime soviétique et il accepte l’argument de l’État partie qui fait valoir que la politique et la législation linguistiques qui ont été adoptées sont nécessaires pour préserver la langue lettonne, y compris l’intégrité de son système grammatical. Le Comité souligne que la question de la politique législative et les modalités qui permettent de préserver et de promouvoir les langues officielles doit être laissée à l’appréciation des États et considère que l’objectif de l’État partie est légitime eu égard aux circonstances. Le Comité estime en outre que l’immixtion qui en résulte pour l’auteur est proportionnée compte tenu de l’objectif et conclut qu’elle est raisonnable. En conséquence, la modification par l’État partie du nom de l’auteur sur les documents officiels ne constitue pas une immixtion arbitraire dans sa vie privée au sens de l’article 17 du Pacte.

8.4En ce qui concerne l’article 26, le Comité a pris note de l’argument de l’auteur selon lequel la loi sur la langue de l’État, même si elle semble neutre, aboutit à une discrimination à son encontre fondée sur la langue et l’origine ethnique, au sens de l’article 26, puisqu’elle a des effets négatifs sur la minorité qui n’est pas de souche lettonne ni de langue lettonne. L’auteur affirme qu’à la différence de la minorité lettonne, il ne peut pas utiliser son nom sous sa forme d’origine. Le Comité rappelle qu’une violation de l’article 26 peut résulter de l’effet discriminatoire d’une règle ou d’une mesure apparemment neutre ou dénuée de toute intention discriminatoire. Toutefois, on ne peut dire qu’une telle discrimination est fondée sur les motifs énumérés à l’article 26 du Pacte que si les effets préjudiciables d’une règle ou décision affectent exclusivement ou de manière disproportionnée des personnes particulières en raison de leur race, couleur, sexe, langue, religion, leurs opinions politiques ou toutes autres opinions, leur origine nationale ou sociale, leur fortune, leur naissance, ou de toute autre situation. En outre, des règles ou décisions ayant une telle incidence ne constituent pas une discrimination si elles sont fondées sur des motifs objectifs et raisonnables. Dans la présente affaire le Comité note que la règle, contenue à l’article 19 de la loi sur la langue de l’État relative à la transcription des noms suivant la grammaire lettonne, s’applique indistinctement à tous les individus, qu’ils soient lettons de souche ou membres de minorités comme la minorité juive et russophone. En conséquence, le Comité estime que la restriction imposée est fondée sur des motifs objectifs et raisonnables. Il s’ensuit que cette immixtion ne constitue pas une différence de traitement contraire à l’article 26.

8.5Pour ce qui est du grief tiré du paragraphe 1 de l’article 2, lu conjointement avec l’article 17, le Comité estime également que la loi contestée, qui s’applique indistinctement à toutes les personnes qui relèvent de la juridiction de l’État partie, est fondée sur des motifs objectifs et raisonnables et ne soulève pas à ce titre de questions au regard du paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte, invoqué en relation avec l’article 17 du Pacte.

8.6Enfin, concernant l’article 27, le Comité note tout d’abord que l’appartenance de l’auteur aux minorités juive et russophone de Lettonie n’est pas contestée. Le Comité, renvoyant à sa jurisprudence, rappelle que les États parties au Pacte peuvent réglementer les activités qui constituent un élément essentiel de la culture d’une minorité, pour autant que ces règlements ne reviennent pas, de fait, à refuser ce droit. Dans les circonstances de l’espèce, le Comité considère que l’adjonction imposée d’une terminaison déclinable aux prénom et nom de l’auteur n’a pas porté atteinte au droit qui est le sien, en commun avec les autres membres des minorités juive et russophone de Lettonie, d’avoir sa propre vie culturelle, de professer et de pratiquer la religion juive ou d’employer la langue russe. Dans ces circonstances, le Comité conclut que la restriction en question ne constitue pas une violation de l’article 27 du Pacte.

9.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constate que les faits dont il est saisi ne font pas apparaître de violations des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

(Signé) Rafael Rivas Posada

Krister Thelin

[Fait en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]