Nations Unies

CAT/C/ALB/3

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

5 avril 2022

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Troisième rapport périodique soumis par l’Albanie en application de l’article 19 de la Convention, attendu en 2016 * , **

[Date de réception : 19 juillet 2021]

I.Introduction

1.La République d’Albanie a adhéré à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradantspar la loi no 7727 du 30 juin 1993.

2.En application de l’article 19/1 de la Convention, l’Albanie a précédemment présenté au Comité contre la torture (institué par la Convention) deux rapports périodiques sur l’application des articles de la Convention, à l’issue de l’examen desquels le Comité a approuvé des observations finales et des recommandations à l’intention de l’Albanie.

3.Le présent rapport a été élaboré conformément aux directives générales concernant l’établissement des rapports périodiques. Dans sa première partie figurent des informations sur les mesures prises pour donner effet aux dispositions de la Convention, ainsi que sur les principaux faits nouveaux en relation avec les cadres juridique et institutionnel, en procédant thème par thème. La seconde partie contient des informations sur les mesures prises pour donner suite aux observations finales et recommandations du Comité contre la torture.La plus grande partie des informations fournies dans le présent rapport concernent la période 2015-2020, mais on y trouve aussi des informations antérieures sur le cadre juridique et les mesures prises dans les différents domaines traités, ainsi que sur le dispositif institué pour élaborer des rapports complets sur les sujets que couvre la Convention contre la torture. Des informations supplémentaires sur l’application de la Convention figurent dans les annexes au présent rapport, qui en font partie intégrante.

4.Le droit de ne pas être soumis à la torture ou à d’autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’un des droits fondamentaux de l’homme, est énoncé dans la Constitution, l’ordre juridique interne, la Convention des Nations Unies contre la torture et la Convention européenne des droits de l’homme (art. 3). En vertu des dispositions des instruments auxquels elle est partie, l’Albanie a l’obligation et la responsabilité d’instituer un système interne efficace pour prévenir de tels actes, de garantir l’exercice de poursuites pénales en cas de torture ou d’autres traitements inhumains ou dégradants et une procédure judiciaire impartiale et efficace. L’Albanie a à cœur de satisfaire aux obligations découlant de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

5.Durant la période considérée, au titre du suivi de l’application de la Convention européenne pour la prévention de la torture, le Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du Conseil de l’Europe a effectué trois visites en Albanie pour évaluer la suite donnée à ses recommandations, les conditions et la situation dans les lieux de privation de liberté (y compris les hôpitaux psychiatriques et les centres sociaux), le traitement des détenus condamnés et des détenus avant jugement et a établi des rapports de visite exposant ses constatations et recommandations. Les autorités albanaises ont soumis des commentaires et des informations en réponse.

6.La Constitution de la République d’Albanie, les instruments internationaux ratifiés qui ont été incorporés dans son ordre juridique interne et le cadre juridique interne garantissent l’exercice des droits de l’homme dans la pratique. La Convention contre la torture, qui conformément à la Constitution est devenue partie intégrante du droit albanais après sa ratification, sert de support à la définition des mesures tendant à éliminer toute forme de torture et d’autres traitements inhumains ou dégradants. Le cadre juridique régissant les droits de l’homme, le système pénitentiaire et d’autres domaines n’a cessé d’être amélioré dans l’esprit de la Convention contre la torture et des normes européennes.

7.L’article 25/3 de la loi no 42/2016 sur l’application des instruments internationaux en République d’Albanie dispose que les ministères et organismes compétents communiquent périodiquement des informations au Ministère de l’Europe et des affaires étrangères en vue de l’établissement des rapports nationaux sur l’application des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels l’Albanie est partie. Comme le prévoit le paragraphe 4 de l’article précité, le Ministère de l’Europe et des affaires étrangères dirige le processus d’élaboration des rapports nationaux sur l’application de ces instruments puis soumet ces rapports au Conseil des ministres pour approbation.

8.Le décret du Premier Ministre no 112 du 5 mars 2014 portant création du groupe de travail interinstitutions chargé de rédiger les rapports sur l’application des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et de participer à leur examen habilite le Ministère de l’Europe et des affaires étrangères à coordonner le processus d’élaboration de ces rapports. Le présent rapport a été établi en coordination avec les administrations centrales concernées et avec leurs contributions, en particulier le Ministère de la justice, le Ministère de l’intérieur, le Ministère de la santé et de la protection sociale, la Direction générale de la Police nationale et la Direction générale de l’Administration pénitentiaire. Le rapport a bénéficié des contributions d’institutions indépendantes, dont le Parquet général, le Bureau de l’Avocat du peuple et le Commissariat à la protection contre la discrimination.

9.Le troisième rapport périodique national sur l’application de la Convention contre la torture a été approuvé par le décret no 347 du 16 juin 2021 du Conseil des ministres.

10.Des informations supplémentaires figurent dans les annexes au présent rapport.

II.Informations sur la mise en œuvre de la Convention contre la torture

Articles 1 à 16

Article 1 : Définition de la torture

11.La Constitution (modifiée) de l’Albanie dispose en son article 25 que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

12.Le Code pénal (modifié) donne de la torture une définition pleinement conforme à l’article premier de la Convention contre la torture. L’article 86 du Code pénal (Torture) dispose que tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aigües physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne par un agent de la fonction publique ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite, a) pour obtenir des renseignements ou des aveux de cette personne ou d’une tierce personne, b) pour la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, c) pour intimider ou faire pression sur cette personne ou une tierce personne, d) pour tout autre motif fondé sur une quelconque forme de discrimination, ainsi que tout autre acte inhumain ou dégradant, est puni d’une peine de quatre à dix ans d’emprisonnement.

13.En outre, le Code de procédure pénale (modifié)de l’Albanie dispose, afin de prévenir toute forme de torture ou de mauvais traitement envers une personne accusée, que nul ne peut être soumis à la torture et à des peines ou traitements humiliants (art. 5/1).

14.La loi no 81/2020 relative aux droits et au traitement des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement et des détenus provisoiresdispose en son article 3 (Définitions) que le terme de « torture » s’entend de tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à un détenu par un agent de la fonction publique ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite, à une des fins visées par la Convention contre la torture.

Article 2 (par. 1) : Mesures législatives, administratives et judiciaires efficaces

15.La Constitution et la législation de l’Albanie énoncent une série de dispositions visant à garantir que nul ne soit soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et à prévenir la torture et les autres mauvais traitements. L’inscription du crime de torture dans le Code pénal (modifié) et les peines dont cette infraction pénale est passible est une mesure majeure de prévention des actes de torture. L’article 87 du Code pénal incrimine la torture et tout autre acte inhumain et fixe les peines encourues en fonction de la gravité de leurs conséquences.

16.Le Code de procédure pénale (modifié) dispose ce qui suit : 1. Une restriction à la liberté d’une personne ne peut être imposée par voie d’une mesure de contrainte que dans les cas et selon les modalités prévus par la loi. 2. Nul ne sera soumis à la torture ou à des peines ou traitements dégradants. 3. Un traitement humain et une rééducation morale sont garantis aux condamnés.

17.L’article 248 (Abus de pouvoir) du Code pénal dispose que le fait pour une personne investie de fonctions publiques d’accomplir ou de ne pas accomplir un acte ou de s’abstenir d’agir délibérément dans l’exercice de ces fonctions, en violation de la loi et au mépris de ses obligations, dans les cas où ce comportement lui permet ou permet à d’autres personnes d’obtenir des avantages matériels ou immatériels indus ou porte préjudice à des intérêts légitimes de l’État, des citoyens et d’autres entités juridiques, est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à sept ans, s’il ne constitue pas une autre infraction.

18.L’article 314 du Code pénal dispose que le recours à la violence par un enquêteur en vue de forcer un citoyen à parler, à témoigner, à s’avouer coupable ou à dénoncer la culpabilité d’autrui est passible d’une peine de trois à dix ans d’emprisonnement. L’analyse des éléments objectifs et subjectifs de ces infractions pénales donne à penser que les autorités d’enquête et de jugement peuvent être confrontées à certaines incertitudes concernant la qualification judiciaire de l’acte en cause, y compris la torture.

19.En analysant les éléments de ces infractions pénales précisés dans les lois pertinentes « l’intention de la part d’une personne investie de fonctions publiques … d’accomplir ou de ne pas accomplir un acte, en violation de loi, dans l’exercice de ces fonctions ... au détriment des intérêts légitimes des citoyens... », « le fait pour un agent de l’État ou de la fonction publique … de commettre des actes ou de donner des ordres arbitraires... », « le recours à la violence par un enquêteur ... pour forcer un citoyen à parler, à témoigner ou à avouer sa culpabilité ou à dénoncer la culpabilité d’autrui... » peuvent être des éléments objectifs et subjectifs de la qualification du crime de torture ou de traitement inhumain ou dégradant (art. 86 et 87 du Code pénal).

20.Le Code de procédure pénale (modifié) dispose que la législation fixant la procédure pénale doit assurer une procédure judiciaire juste, équitable et régulière et protéger les libertés personnelles et les droits et intérêts légitimes des citoyens. Les modifications introduites en 2017redéfinissent les règles de procédure concernant l’exercice des poursuites pénales, la conduite des enquêtes, la traduction en justice des auteurs d’infractions pénales et l’exécution des décisions de justice. Ces règles sont contraignantes pour les parties à la procédure pénale, les autorités de l’État, les fonctionnaires de justice et les citoyens, ainsi que pour les accusés mineurs (art. 1 et 2). L’article 11 du Code pénal prévoit que la justice est administrée par les tribunaux et qu’une personne ne peut que sur décision de justice être déclarée coupable et punie pour avoir commis une infraction pénale.

21.La loi no 108/2014 (modifiée) sur la Police nationale dispose que la Police nationale a pour mission de veiller au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, des droits des personnes privées de liberté (emmenées, retenues ou détenues) dans des locaux de la police, ainsi que de les respecter et les garantir elle-même. L’action de la Police nationale est régie par les principes de légalité, de non-discrimination, de respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de proportionnalité, d’indépendance opérationnelle, d’impartialité politique, d’intégrité, de mérite et de professionnalisme, de transparence, de contrôle et de responsabilité, entre autres.

22.La loi no 97/2016 sur l’organisation et le fonctionnement du Parquet de la République d’Albanie dispose, entre autres, ce qui suit :

•L’autorité de poursuite : déclenche les poursuites pénales et exerce l’action publique au nom de l’État devant les tribunaux ; prend des mesures et supervise l’application des peines ; dirige et contrôle les actes de la police judiciaire ; s’acquitte des autres tâches prévues par la loi (art. 3) ;

•Les magistrats du parquet exercent leurs fonctions en se conformant à la Constitution, aux instruments internationaux auxquels l’Albanie est partie et aux diverses lois en vigueur ; ils exercent leurs compétences en respectant pleinement les principes de procédure judiciaire juste, équitable et régulière et de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’intérêt public (art. 4) ;

•Les magistrats du parquet assurent à toute personne un traitement loyal, objectif et non discriminatoire, sans considération fondée sur le genre, la race, la religion, l’ethnie, la langue, les convictions politiques, religieuses ou philosophiques, l’identité de genre, l’orientation sexuelle, la situation économique, la fortune, l’éducation, le handicap, l’origine sociale, l’appartenance parentale ou tout autre motif (art. 8).

23.La loi no 8328 du 16 avril 1998 (modifiée) abrogée et remplacée par la loi no 81/2020 encadrait les droits et le traitement des détenus (condamnés et avant jugement) et énonçait les attributions et obligations des autorités publiques compétentes.

24.La loi no 81/2020 a pour objet de régir les droits et le traitement des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement et des détenus provisoires, l’organisation du système pénitentiaire, les attributions et obligations des autorités publiques compétentes. Son article 5 (Respect des droits de l’homme) dispose que les détenus sont traités avec dignité et dans le respect de leurs droits humains conformément à la législation nationale et aux instruments internationaux en vigueur. Infliger des actes de torture ou d’autres traitements inhumains, dégradants ou humiliants à un détenu est interdit en toutes circonstances. L’article 71 détermine quand l’usage de la force constitue un acte de torture ou un traitement inhumain ou dégradant.

25.Depuis 2008, le Bureau de l’Avocat du peuple fait office de Mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en application d’une modification apportée à la loi no 8328 du 16 avril 1998 (modifiée) relative aux droits et au traitement des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement.

26.La loi no 81/2020 relative aux droits et au traitement des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement et des détenus provisoires énonce les compétences du Mécanisme national pour la prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi que les garanties et les formes de supervision assurées (art. 81).

27.La loi no 97/2016 du 6 octobre 2016 sur l’organisation et le fonctionnement du Parquet de l’Albanie dispose à son article 4 que les magistrats du parquet exercent leurs fonctions dans le respect de la Constitution, des instruments internationaux auxquels l’Albanie est partie et de la législation nationale en vigueur, dans les limites des pouvoirs qui leur sont conférés, en se conformant pleinement aux principes de procédure judiciaire juste, équitable et régulière et de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales, des intérêts et des libertés de la personne que consacre la loi.

28.La loi no 44/2012 (modifiée) sur les soins de santé mentale a pour objet de protéger et de promouvoir la santé mentale, de prévenir les problèmes dans ce domaine, de garantir les droits et d’améliorer la qualité de vie des personnes présentant un trouble mental en fixant les procédures et les modalités de protection de la santé mentale, en encadrant la prestation des soins de santé, en garantissant un environnement social adapté aux personnes présentant un trouble mental et en menant une action de prévention pour protéger la santé mentale.

Article 2 (par. 2) : Mesures juridiques, administratives et judiciaires pour la prévention de la torture en toute circonstance

29.L’article 17 de la Constitution dispose qu’une quelconque limitation des droits et des libertés ne peut être imposée qu’en vertu de la loi et dans l’intérêt public ou aux fins de la protection des droits d’autrui. La limitation doit être proportionnée à la situation l’ayant causée. Cette limitation ne peut en aucun cas porter atteinte aux fondements de ces droits et libertés ni aller au-delà des limitations que prévoit la Convention européenne des droits de l’homme. L’article 26 de la Constitution interdit le travail forcé, sauf en application d’une décision de justice ou pour accomplir le service militaire ou fournir un service rendu nécessaire par une situation d’urgence, une guerre ou une catastrophe naturelle menaçant la vie ou la santé des personnes.

30.L’article 75 du Code pénal incrimine certains actes commis en temps de guerre, à savoir le meurtre, les sévices, la déportation aux fins de travail forcé, toute autre forme d’exploitation inhumaine des populations civiles, en territoire occupé en particulier, le meurtre ou la maltraitance de prisonniers de guerre, l’exécution d’otages, la destruction de biens privés ou publics, la destruction de villes, localités ou villages sans nécessité militaire ; ces actes sont passibles d’une peine de quinze ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité.

31.La loi sur la Police nationale dispose que dans l’exercice des responsabilités que leur confère cette loi les fonctionnaires de police doivent :

•Éviter en toute circonstance d’exposer les citoyens et eux-mêmes à des risques ;

•Informer promptement les autorités administratives compétentes et les conseiller sur les mesures possibles s’ils estiment nécessaire de prendre des mesures additionnelles ou de déployer des renforts.

32.L’article 7 de la loi no 81/2020 relative aux droits et au traitement des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement et des détenus provisoires dispose qu’un détenu peut faire l’objet d’un traitement différencié si ce traitement se justifie du fait que le détenu en cause présente un risque et qu’il s’impose dans un souci de réadaptation. Son article 8 dispose que les restrictions imposées aux droits des détenus doivent l’être dans les limites du strict nécessaire et seulement en vue d’atteindre un objectif légal dans les cas et selon les critères prévus par la loi.

33.L’article 9 du Code pénal dispose que, sur ordre du Ministre de la justice, les droits des détenus peuvent être restreints en bloc à titre temporaire dans les limites du strict nécessaire en vue d’atteindre un objectif prévu par la loi et uniquement dans des circonstances spéciales, à savoir : a) état d’urgence légalement proclamé ; b) situation d’urgence ; c) état de guerre ; d) état d’urgence, en vertu de la législation sur les urgences civiles ; e) risques potentiels pour la vie et la santé des détenus ; f) attaque armée depuis l’extérieur de l’établissement ou transmission d’informations indiquant qu’une attaque pourrait être menée.

Article 2 (par. 3) : Prévention de la torture par l’interdiction d’invoquer un ordre d’un supérieur hiérarchique ou d’une autorité publique pour justifier la torture

34.Le Code pénal (modifié) prévoit les peines encourues par les agents des forces de l’ordre qui enfreignent la loi par commission ou omission. Le Code pénal incrimine le fait pour un agent de l’État ou un agent public dans l’exercice de ses fonctions officielles de commettre des actes ou de donner des ordres arbitraires attentatoires à la liberté des citoyens (art. 250) ou de ne pas agir pour mettre fin à une situation illégale (art. 251), et prévoit les peines applicables.

35.L’article 248 dispose que le fait pour une personne investie de fonctions publiques d’accomplir ou de ne pas accomplir un acte ou de s’abstenir d’agir délibérément dans l’exercice de ces fonctions, en violation de la loi et au mépris de ses obligations, dans les cas où ce comportement lui permet ou permet à d’autres personnes d’obtenir des avantages matériels ou immatériels indus ou porte préjudice à des intérêts légitimes de l’État, des citoyens et d’autres entités juridiques, est passible d’une peine pouvant aller jusqu’à sept ans d’emprisonnement, s’il n’est pas constitutif d’une autre infraction pénale.

36.L’article 253 dispose que toute personne investie de fonctions publiques ou fournissant un service public qui, en sa qualité ou dans l’exercice de ces fonctions, commet un acte de discrimination fondé sur l’origine, le sexe, l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, l’état de santé, les convictions religieuses ou politiques, l’activité syndicale, l’ethnie, la nationalité, la race ou la religion et consistant à créer des privilèges injustes ou à refuser un droit ou avantage découlant de la loi encourt une amende ou une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.

37.L’article 109/c du Code pénal incrimine la disparition forcée ; il dispose que le supérieur qui :

a)Sait que des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle commettent ou vont commettre le crime de disparition forcée, ou ne tient pas compte de données et d’informations qui l’indiquent clairement ;

b)Exerce sa responsabilité et son contrôle effectif sur les activités auxquelles le crime de disparition forcée est lié ;

c)Ne prend pas toutes les mesures nécessaires et raisonnables relevant de sa compétence pour empêcher d’agir la personne autorisant, soutenant et approuvant la disparition forcée, afin de sanctionner cette personne ou de saisir les autorités compétentes aux fins de poursuites pénales, encourt une peine de trois à sept ans d’emprisonnement.

38.L’article 86 de la loi no 108/2014 sur la Police nationale énonce comme suit l’obligation pour les fonctionnaires de police de n’exécuter que les ordres conformes à la loi :

a)Les fonctionnaires de police sont tenus d’exécuter tous les ordres qui leur sont donnés par une personne occupant une fonction ou un rang supérieur ;

b)Lorsqu’un fonctionnaire de police a des raisons de penser que l’ordre qui lui est donné est contraire à la légalité, il doit sans délai le faire savoir à son supérieur et, le cas échéant, lui demander par écrit de lui donner cet ordre par écrit. Le supérieur auquel il est demandé oralement ou par écrit de donner un ordre par écrit est en toutes circonstances tenu de s’exécuter ;

c)Si dans l’attente de la confirmation écrite requise en vertu du paragraphe 2 de l’article 86, l’inexécution de l’ordre donné est susceptible de mettre en danger la vie d’une tierce personne, le fonctionnaire de police doit exécuter cet ordre ;

d)Si le fonctionnaire de police ayant suivi la procédure définie dans l’article 86 persiste à croire que l’ordre qui lui a été donné est contraire à la légalité, il doit :

•Contester l’ordre donné, sauf dans le cas prévu au paragraphe 3 de l’article 86 ;

•Informer immédiatement le supérieur hiérarchique du supérieur qui lui a donné l’ordre en exposant les mesures qu’il a prises en vertu de l’article 86.

39.La loi no 97/2016 du 6 octobre 2016 sur l’organisation et le fonctionnement du Parquet de l’Albanie dispose qu’un procureur de rang supérieur adresse par écrit ses ordres et instructions aux procureurs de rang inférieur, lesquels sont tenus de s’y conformer. Cette disposition vise à empêcher que des fonctionnaires investis d’une fonction publique ou étatique donnent des ordres arbitraires oralement.

Article 3 : Interdiction de l’expulsion, du renvoi ou de l’extradition

40.La Constitution contient des dispositions sur la protection et le traitement des étrangers qui garantissent leurs droits et pose ainsi le principe qu’aucune personne ne peut être renvoyée dans un pays où elle risque d’être soumise à la torture. Les droits de l’homme et les libertés fondamentales ainsi que les obligations des citoyens albanais concernent aussi les étrangers et les apatrides, sauf si leur exercice entretient un rapport particulier avec la nationalité albanaise (art. 16).

41.La loi no 108/2013 sur les étrangers (modifiée par la loi no 74/2016 du 14 juillet 2016 et la loi no 13/2020) régit l’entrée, le séjour, la circulation et l’emploi des étrangers en Albanie, ainsi que leur sortie du territoire. Cette loi concerne les étrangers qui entrent ou souhaitent entrer en Albanie pour séjourner, transiter, travailler ou retourner. Elle garantit les droits et énonce les obligations des étrangers qui travaillent et résident en Albanie.

42.Cette loi définit comme étranger toute personne apatride ou ayant une nationalité autre qu’albanaise au sens du droit albanais. Elle dispose que par expulsion on entend l’exécution de l’obligation de retour pour un étranger visé par un ordre d’expulsion ou une personne déclarée non grata, ainsi que l’expulsion d’étrangers par les autorités désignées par cette loi ; cette loi comporte des dispositions précises sur les cas dans lesquels il est procédé à une expulsion, les critères d’expulsion d’un étranger, les ordres d’expulsion, les autorités responsables et le droit de contester un ordre d’expulsion. L’étranger qui a formé un recours est mis sous surveillance ou placé en centre fermé jusqu’à la fin de l’examen de son recours pour expulsion immédiate en cas de rejet.

43.La loi nº 121/2014 sur l’asile en Albanie (abrogée et remplacée en février 2021 par la nouvelle loi sur l’asile)consacrait l’obligation de ne pas refouler ou extrader les personnes ayant obtenu ou demandant le droit d’asile ou une protection temporaire, ainsi que les personnes pour lesquelles existent des raisons de croire qu’en cas de renvoi elles seront soumises à la torture ou à des traitements inhumains et dégradants ou à tout autre traitement interdit par les instruments internationaux auxquels l’Albanie est partie.

44.La loi no 10/2021 sur l’asile en Albanie, qui est alignée sur les normes internationales et le droit de l’Union européenne en la matière, garantit un traitement et une gestion idoines des réfugiés et migrants qui entrent sur le territoire albanais, ainsi que leur intégration. La loi garantit aux demandeurs d’asile l’accès à la procédure d’asile, fixe les conditions d’examen de leur demande et prévoit des garanties additionnelles pour les demandeurs d’asile vulnérables, en particulier les mineurs non accompagnés. Cette loi prévoit sous certaines conditions une procédure pour l’évaluation accélérée des demandes d’asile. Elle dispose que l’asile est la forme internationale de protection que l’Albanie accorde aux réfugiés et aux personnes ayant besoin d’une protection additionnelle.

45.Cette loi s’applique à tous les étrangers et aux apatrides exprimant l’intention de déposer une demande de protection internationale sur le territoire albanais, sous réserve qu’ils aient été autorisés à y rester en qualité de demandeurs de protection internationale, et aux membres de leur famille. Son article 3 précise que le principe de non-refoulement fait obligation d’interdire d’expulser ou de renvoyer autrement un étranger ou un apatride vers un État où sa vie ou sa liberté est menacée pour des motifs fondés sur sa race, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un certain groupe social ou ses opinions politiques.

Article 4 : Dispositions relatives à la torture (Code pénal)

46.L’article 87 (Torture entraînant des conséquences graves) du Code pénal dispose que si un acte de torture ou tout autre acte inhumain a causé une mutilation, une défiguration ou une atteinte permanente à la santé de la victime ou sa mort, l’auteur des faits encourt une peine pouvant aller jusqu’à vingt ans d’emprisonnement.

47.L’article 314 incrimine l’usage de la violence par un enquêteur aux fins de forcer une personne à parler, à témoigner, à s’avouer coupable ou à dénoncer la culpabilité d’autrui, la peine prévue étant de trois à dix ans d’emprisonnement.

48.L’article 50 (Circonstances aggravantes) du Code pénal modifié par l’ajout d’une nouvelle circonstance aggravante à prendre en compte pour déterminer la peine à prononcer, à savoir le fait que l’infraction commise était motivée par le genre, la race, la religion, la nationalité, la langue, les convictions politiques, religieuses ou sociales de la victime.

Article 5 : Compétence

49.Les articles 5, 6, 7, 7/a, 8 et 9 du Code pénal fixent le champ d’application du droit pénal albanais. Le Code pénal établit la compétence universelle de l’Albanie pour le crime de torture. Son article 7/a (Droit pénal de l’Albanie) s’applique aussi aux étrangers présents sur le territoire albanais qui ont commis des actes de torture à l’étranger mais n’ont pas été extradés. Le droit pénal albanais s’applique aussi à tous les étrangers qui ont commis hors du territoire albanais une infraction à laquelle le droit albanais s’applique en vertu d’une loi spéciale ou d’un instrument international auquel l’Albanie est partie.

50.La juridiction pénale est exercée par les tribunaux pénaux en suivant les règles énoncées dans le Code de procédure pénale (modifié).

Article 6 : Mesures juridiques jusqu’à la mise en accusation ou l’extradition

51.Le droit albanais prévoit une série de mesures juridiques encadrant le placement en détention d’une personne et les autres moyens de s’assurer de sa présence. Les personnes ayant commis des actes de torture, tenté d’en commettre ou coopéré ou participé à leur commission sont, dans l’attente de l’ouverture de la procédure pénale ou de la procédure d’extradition, soumises aux dispositions du Code pénal et des autres lois applicables à toutes les personnes privées de liberté.

52.Le Code de procédure pénale fixe les règles à suivre en qui concerne les poursuites, l’enquête et le procès ainsi que l’exécution des décisions de justice en matière pénale. Ces règles sont contraignantes pour les parties à la procédure, les organes de l’État, les magistrats et les citoyens (art. 2). Le Code de procédure pénale définit clairement dans quelles circonstances la liberté d’une personne peut être restreinte par une mesure de contrainte, à savoir : a) il existe des raisons sérieuses de craindre que la personne visée entrave le recueil de preuves ou altère des preuves ; b) la personne mise en cause risque de quitter le pays ou l’a quitté ; c) au vu des éléments factuels et de la personnalité du mis en cause, il est susceptible de commettre des infractions graves ou identiques à celles pour lesquelles il est poursuivi.

53.L’article 5 du Code de procédure pénale (modifié) dispose que la liberté de la personne ne peut être restreinte par une mesure de contrainte que dans les circonstances et selon les modalités prévues par la loi. Ces mesures sont prononcées à la demande du parquet, qui en expose les motifs au tribunal compétent. Le Code fixe les règles et la procédure à suivre par les organes compétents (police judiciaire, parquet, tribunal, Ministère de la justice) en matière d’extradition. Le parquet, la personne visée et son avocat peuvent faire appel de la décision du tribunal de prononcer une mesure de contrainte ou de confiscation.

54.L’article 89 de la loi no 108/2014 sur la Police nationale dispose que tout fonctionnaire de police est, en vertu de cette loi et du droit en vigueur, tenu de prendre toutes les mesures requises pour empêcher la fuite d’une personne retenue ou gardée à vue par la Police.

55.Son article 109 dispose qu’un fonctionnaire de police peut retenir une personne dans un poste de police dans divers cas, dont les suivants : des éléments raisonnables donnent à suspecter que cette personne a commis une infraction ; empêcher qu’une autre infraction ne soit commise ; fuite de cette personne après commission d’une infraction ; établissement de l’identité d’une personne visée par une enquête, dans les conditions fixées par le Code de procédure pénale. La personne retenue n’est pas traitée comme une personne gardée à vue, en toute circonstance, la rétention est prolongée jusqu’à ce que l’affaire ait été éclaircie mais au maximum dix heures. La loi fait obligation à la police de consigner et gérer manuellement et électroniquement les données relatives à une personne retenue, de rédiger à la fin de la rétention un procès-verbal des actes de procédure auxquels a été soumise la personne retenue et de lui remettre un exemplaire de ce procès-verbal à sa libération.

Article 6 (par. 3) : Garanties juridiques dont bénéficie l’étranger détenu

56.La loi no 108/2013 (modifiée) sur les étrangers définit dans quels cas et selon quelles modalités un étranger peut être expulsé du territoire albanais. Son article 126 dispose que, à la demande d’un étranger placé en détention ou si un accord bilatéral le prévoit, le Ministère des affaires étrangères informe de cette détention la mission diplomatique ou consulaire de l’État dont cet étranger est ressortissant ainsi que de sa prolongation. Si l’étranger a demandé l’asile ou bénéficie du statut de réfugié ou d’une autre protection de la part de l’Albanie, cette information n’est pas communiquée au représentant consulaire ou diplomatique de son pays.

57.Son article 127 dispose que tout étranger placé et maintenu dans un centre fermé doit, conformément aux dispositions du chapitre dans lequel figure cet article, être informé de ses droits dans une langue qu’il comprend ainsi que de tout acte accompli par les autorités compétentes en lien avec sa détention dans ce centre, et qu’il a droit d’être traité avec humanité. Le paragraphe 3 de cet article précise que l’étranger détenu a le droit d’informer un représentant consulaire de sa détention. En cas de violation de ses droits fondamentaux au centre, l’étranger a le droit de porter plainte auprès du tribunal de district. Dans l’éventualité d’une réadmission, l’étranger doit être informé dans une langue qu’il comprend des droits et obligations que lui confère le droit albanais (art. 127, par. 5).

Article 7 : Poursuites pénales contre une personne accusée d’avoir commis le crime de torture, autorités compétentes en cas de non-extradition

58.Conformément à la Constitution, l’extradition n’est autorisée que si un instrument international auquel l’Albanie est partie la prévoit expressément et uniquement sur décision de justice.

59.Le Code de procédure pénale (modifié) fixe les règles à suivre pour assurer une procédure juste, équitable et régulière et protéger ainsi les droits et les libertés individuels et les intérêts légitimes des citoyens. Il précise quels organes mènent les poursuites pénales et quelles en sont les attributions :

•Le tribunal administre la justice ;

•Le procureur exerce les poursuites pénales, représente l’accusation devant le tribunal au nom de l’État, dirige et contrôle les enquêtes préliminaires et les actes de la police judiciaire, procède en personne à tout acte d’investigation qu’il considère nécessaire, prend des mesures pour assurer l’exécution des peines prononcées, supervise leur application et exerce les fonctions d’entraide judiciaire avec les autorités étrangères, selon les règles fixées dans le Code ;

•La police judiciaire est informée des infractions pénales, elle prend des mesures pour éviter que ces infractions n’aient des conséquences ultérieures, elle en recherche les auteurs et mène des enquêtes aux fins de l’application du droit pénal.

60.Le Code de procédure pénale modifié par la loi no 35/2017 du 30 mars 2017 comporte les dispositions suivantes :

•Droits de la victime de l’infraction pénale : pendant la procédure pénale, la victime jouit des droits prévus par le présent Code. Les administrations publiques veillent à ce que les victimes d’infractions pénales soient traitées dans le respect de leur dignité humaine et ne subissent pas de victimisation secondaire dans l’exercice des droits prévus par le présent Code ;

•Dispositions de procédure régissant la conduite des poursuites, des enquêtes et des procès en matière pénale, ainsi que l’exécution des décisions de justice : ces règles sont contraignantes pour les parties à la procédure pénale, les autorités publiques, les personnes morales et les citoyens ;

•L’accusé est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie par une décision de justice définitive. Tout doute entourant les faits bénéficie à l’accusé ;

•Le tribunal rend un jugement de culpabilité lorsque l’accusé est reconnu coupable, au‑delà de tout doute raisonnable, de l’infraction pénale qui lui est reprochée ;

•La personne à laquelle une infraction pénale est reprochée acquiert le statut d’accusé. Elle reçoit une notification contenant des informations adéquates sur les motifs de sa mise en accusation, qui est aussi remise à l’avocat de l’accusé. Si après la mise en accusation d’une personne des éléments nouveaux modifient ou complètent les accusations portées contre cette personne, le procureur prend une décision en conséquence et en informe l’accusé. Le statut d’accusé est maintenu tout au long de la procédure jusqu’à ce que la décision de non-lieu, d’acquittement ou de reconnaissance de culpabilité soit définitive. En cas d’annulation de la décision de non-lieu ou du jugement définitif ayant l’autorité de la chose jugée et de nouvelle procédure, la personne recouvre le statut d’accusé (art. 34).

Article 7 (par. 3) : Mesures au titre de l’enquête sur les personnes soupçonnées d’actes de torture et durant la procédure pénale

61.L’article 27 de la Constitution dispose que nul ne peut être privé de liberté, sauf dans les cas et selon les procédures prévus par la loi ; elle dispose aussi, entre autres, qu’une personne peut voir sa liberté restreinte parce qu’il existe des raisons valables de penser qu’elle a commis une infraction pénale ou pour l’empêcher d’en commettre une ou de fuir après l’avoir commise. La personne doit être présentée dans les quarante-huit heures à un juge, qui décide de la placer en détention avant jugement ou de la libérer dans un délai maximum de quarante-huit heures à compter du moment où il est saisi de l’affaire. La personne détenue a le droit de faire appel de la décision du juge. Une personne qui est privée de sa liberté en vertu d’une décision non judiciaire peut en toutes circonstances saisir à tout moment un juge, lequel statue dans les quarante-huit heures sur la légalité de la détention (art. 28, par. 4). Toute personne privée de liberté a le droit d’être traitée avec humanité et dans le respect de sa dignité (art. 28, par. 5).

62.L’article 28 de la Constitution dispose que toute personne privée de sa liberté a le droit d’être informée immédiatement dans une langue qu’elle comprend des motifs de la mesure dont elle fait l’objet, ainsi que des accusations portées contre elle. Elle doit être informée de son droit de garder le silence et de contacter immédiatement un avocat et avoir la possibilité d’exercer ses droits.

63.L’article 109/3 de la loi no 108/2014 sur la Police nationale énonce les droits de toute personne retenue par la police : notification dans une langue qu’elle comprend du motif de la rétention ; notification de son droit de garder le silence ; droit d’être retenue dans un cadre approprié ; droit de prévenir un membre de sa famille ou une autre personne ; droit de communiquer immédiatement avec une personne de confiance et un avocat ; droit d’adresser à tout moment à un tribunal une plainte/requête relative à sa rétention.

Article 8 : Extradition

64.L’article 10 du Code de procédure pénale (modifié) dispose que les relations avec les autorités étrangères dans le domaine pénal sont régies par les instruments internationaux auxquels l’Albanie est partie, les principes et normes généralement acceptés de droit international et les dispositions du Code.

65.Son article 488 dispose que la remise d’un ressortissant étranger en vue de l’exécution d’une peine de prison ou de sa mise en accusation au motif d’une infraction pénale ne peut intervenir que dans le cadre d’une extradition. Son article 489 fixe les conditions à remplir concernant la demande d’extradition. L’article 490 (Conditions de l’extradition)dispose que l’extradition n’est autorisée que s’il est clairement établi que la personne dont l’extradition est demandée ne fera pas l’objet de poursuites ou d’une condamnation pénales, ni ne sera extradée vers un pays tiers en raison d’une infraction pénale distincte commise antérieurement à celle motivant la demande d’extradition.

66.L’article 491 (Recevabilité d’une demande d’extradition) dispose qu’une demande est rejetée s’il y a lieu de penser que la personne dont l’extradition est demandée sera soumise à des persécutions ou à une discrimination fondée sur sa race, sa religion, son sexe, sa citoyenneté, sa langue, ses opinions politiques, son statut personnel ou social, ou à des peines ou traitements cruels, inhumains ou humiliants ou à des actes attentatoires à ses droits fondamentaux. Les articles 492 à 497 portent respectivement sur : les actes du procureur ; les mesures de contrainte et la confiscation ; le recours à des mesures temporaires de contrainte ; l’arrestation par la police judiciaire ; l’examen de la demande d’extradition.

67.Si l’Albanie refuse l’extradition parce que la personne réclamée est de nationalité albanaise, la demande d’extradition est traitée comme la notification d’une infraction pénale commise à l’étranger par un citoyen albanais et, en vertu des articles 6 et 7/a du Code pénal, les autorités compétentes sont alors tenues d’engager des poursuites à l’encontre de cette personne et de prendre toutes les mesures nécessaires prévues en droit interne et par les instruments internationaux auxquels l’Albanie est partie pour garantir sa présence. L’exercice des poursuites pénales est obligatoire et le procureur est habilité à statuer sur l’opportunité d’engager ou non une procédure pénale au vu de la gravité de l’infraction.

Article 9 : Assistance judiciaire

68.Les procédures de communication entre l’Albanie et d’autres pays au titre de l’entraide judiciaire en matière pénale sont régies par les accords internationaux auxquels l’Albanie est partie et le Code de procédure pénale. Cette entraide est régie par :

•La Convention d’entraide judiciaire en matière pénale du Conseil de l’Europe et ses protocoles additionnels ;

•La Convention européenne sur la transmission des procédures répressives ;

•Le Protocole additionnel à l’Accord européen sur la transmission des demandes d’assistance judiciaire.

69.Le Code de procédure pénale dispose que les relations avec les autorités étrangères en matière pénale sont régies par les instruments internationaux auxquels l’Albanie est partie, les principes et normes généralement acceptés de droit international et les dispositions du Code. Ses articles 505 à 508 régissent le traitement des commissions rogatoires décernées par un pays étranger.

70.La loi no 10193 du 3 décembre 2009 sur l’entraide judiciaire avec les autorités étrangères en matière pénale, modifiée par la loi no 100/2013, énonce des règles de procédure complémentaires dans ce domaine.

Article 10 : Mesures prises pour sensibiliser le personnel chargé de l’application des lois à la prévention de la torture

71.Une formation continue est dispensée au personnel chargé de l’application des lois ; elle porte sur : le respect et la garantie des droits fondamentaux ; les règles normalisées et la procédure concernant la détention, la sécurité et le traitement des personnes retenues ou gardées à vue dans les cellules de sûreté de la Police nationale.

72.Les membres de la Police nationale, qui est en charge de la sécurité et du traitement des personnes retenues et gardées à vue jusqu’à ce qu’un juge ait rendu une ordonnance de placement en détention provisoire, sont recrutés en fonction de critères professionnels. Les policiers sont tenus de se familiariser avec les lois et textes réglementaires garantissant les droits et libertés fondamentales des personnes privées de liberté et de les appliquer, de suivre une formation continue et de se soumettre à contrôle. Des sessions de formations sont organisées régulièrement afin d’améliorer le respect de ces droits. Chaque année, la Direction générale de la Police nationale établit pour l’ensemble des fonctionnaires de police des programmes de formation adaptés à leur niveau et leur rang.

73.L’arrêté no 440/3 du 27 avril 2017 a porté approbation des procédures normalisées pour le traitement et la sécurité des personnes gardées à vue par la Police nationale et la réception et l’examen de leurs plaintes et requêtes. Adopté en application de la loi sur la Police nationale, le Règlement du personnel de la Police nationale fixe, entre autres, les règles et procédures concernant la formation de ce personnel.

74.En application de l’arrêté no 19 du 2 juin 2016 du Directeur général de l’administration pénitentiaire, depuis 2016 le système pénitentiaire dispose d’une plateforme pour sensibiliser les membres de son personnel, en particulier les agents de sécurité, à l’impératif d’exercer leurs fonctions dans le respect de la déontologie.

75.La Direction générale de l’administration pénitentiaire organise périodiquement pour son personnel de sécurité, civil et médical des sessions de formation sur le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture (Protocole d’Istanbul) et sur les modalités de documentation des cas. Le programme de formation approuvé pour les agents de sécurité de base comporte un module sur les concepts en lien avec la torture et la prévention de la torture par l’administration pénitentiaire. Des instructions administratives ont été adressées aux services psychosociaux et sanitaires et de sécurité des établissements pénitentiaires.

Article 11 : Interrogatoire, enquête, protection et traitement durant la garde à vue et la détention avant jugement

76.L’article 34/a du Code de procédure pénale (Droits de l’accusé) dispose ce qui suit :

•Toute personne visée par une enquête ou accusée a le droit : a) d’être informée dans les plus brefs délais, dans une langue qu’elle comprend, de l’infraction pénale qui lui est imputée et des éléments étayant les accusations ; b) de communiquer dans la langue qu’elle parle ou une langue qu’elle comprend ou de bénéficier des services d’un interprète ou d’un interprète en langue des signes dans le cas d’une personne qui présente un trouble de l’audition ou de la parole ; c) de garder le silence, de présenter librement sa défense et de ne pas répondre à certaines questions ; d) de se défendre elle-même ou d’être assistée par un défenseur de son choix ; e) de bénéficier d’une défense assurée par l’État, si la représentation par un défenseur est obligatoire ou si l’intéressé n’a pas les moyens d’engager un avocat, ce en vertu des dispositions du Code et de la législation sur l’aide juridictionnelle ; f) de rencontrer le défenseur qui la représente et de communiquer en privé avec lui ; g) de prendre connaissance des pièces du dossier, conformément aux dispositions du Code ; h) de présenter des preuves à décharge ; i) de poser des questions aux témoins, aux experts et aux coaccusés durant le procès ; j) d’exercer les autres droits prévus par le Code ;

•Les droits et les garanties accordés à l’accusé le sont aussi à toute personne visée par une enquête ou des poursuites pénales, sauf dispositions contraires du Code.

77.L’article 34/b du Code de procédure pénale (modifié) dispose qu’une personne gardée à vue a le droit : a) de s’entretenir avec son défenseur ; b) d’être informée des actes, éléments de preuve et motifs justifiant sa mise en garde à vue ; c) de demander qu’un membre de sa famille ou autre proche soit informé immédiatement de sa garde à vue. Toute personne de nationalité étrangère mise en garde à vue a le droit de demander la présence d’un membre de la mission consulaire ou diplomatique de son pays, et toute personne apatride ou réfugiée a le droit de demander qu’une organisation internationale soit informée ; d) de recevoir les soins médicaux nécessaires. L’organe qui mène la procédure notifie immédiatement ses droits à la personne gardée à vue et lui remet une notification écrite à signer par elle.

78.La loi no 81/2020 relative aux droits et au traitement des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement et des détenus provisoires dispose que les détenus doivent être traités dans le respect de leurs droits fondamentaux et de leur dignité conformément au droit interne et aux instruments internationaux auxquels l’Albanie est partie. La torture et les autres traitements inhumains et dégradants à l’encontre des détenus sont interdits en toute circonstance. Les détenus doivent bénéficier d’un traitement équitable, impartial et non discriminatoire au regard de tous les motifs visés dans le cadre juridique relatif à la protection contre la discrimination.

Article 12 : Enquête en cas de suspicion sérieuse de torture

79.Le Code de procédure pénale modifié énonce les règles de procédures à respecter, qui encadrent l’exercice des poursuites pénales, la conduite de l’enquête et le déroulement du procès ainsi que l’exécution des décisions de justice en matière pénale. Ces règles sont contraignantes pour les parties à la procédure pénale, les organes de l’État, les personnes morales et les citoyens. Le Code contient des dispositions portant sur : l’enquête préliminaire ; les conditions de la procédure ; les actes relevant de l’initiative de la police judiciaire ; les actes du procureur ; les preuves ; les délais d’achèvement de l’enquête.

Article 13 : Droit de porter plainte et de contester une décision

80.Le Code de procédure pénale définit pour quels motifs et selon quelles modalités une décision peut être contestée ou une plainte être déposée. Ce droit n’est reconnu qu’aux parties que la loi mentionne expressément. Si la loi n’établit pas de distinction entre les parties, ce droit appartient à chacune d’entre elles. Le Code dispose ce qui suit :

•Le procureur forme un recours auprès d’une juridiction supérieure dans les cas que prévoit le Code ;

•La partie victime forme un recours en personne ou par l’entremise de son avocat, pour l’action pénale comme pour l’action civile ;

•L’accusé forme un recours, en personne ou par l’entremise de son avocat. Son tuteur peut former un recours au nom de l’accusé dans les cas prévus.

81.L’article 6/4 de la loi no 81/2020 sur les droits et le traitement des détenus (condamnés et avant jugement) dispose qu’en cas d’actes de violence sur un détenu la direction de l’établissement pénitentiaire concerné doit diligenter une enquête indépendante à mener par les services et organes habilités par la loi dans le respect des principes de protection de la vie privée et de protection et de sûreté de la personne. Son article 10 énonce le droit de déposer une plainte ou une requête. Les détenus ont le droit de déposer, à titre individuel ou collectif, des recours ou plaintes concernant l’application du droit interne.

82.Les règles et procédures normalisées concernant le traitement des personnes gardées à vue dans des locaux de la police portent sur l’enregistrement et le traitement des requêtes ou plaintes émanant de personnes emmenées, retenues ou gardées à vue dans des locaux de la Police nationale.

Article 14 : Indemnisation de la victime d’un acte de torture

83.L’article 9/a du Code de procédure pénale (ajouté par la loi no 35/2017 du 30 mars 2017) énonce les droits reconnus à la victime de l’infraction pénale tout au long de la procédure. Les administrations publiques sont tenues de veiller à ce que la victime de l’infraction pénale soit traitée dans le respect de sa dignité humaine et protégée contre toute victimisation secondaire quand elle exerce les droits que lui confère le Code.

84.Les modifications apportées au Code de procédure pénale par la loi no 35/2017 du 30 mars 2017, dont celles applicables aux victimes de la traite des êtres humains, renforcent grandement les droits et la situation de la victime d’une infraction pénale. L’introduction de l’obligation pour la victime d’une infraction pénale de participer au procès en tant que partie lui garantit en particulier l’accès au processus pénal ; les nouveaux articles ajoutés portant spécifiquement sur les victimes de la traite et conférent un statut spécial aux victimes mineures et aux victimes de violence sexuelle et de traite (art. 58, 58/a, 58 b, 59, 60, 61).

85.L’article 58 du Code de procédure pénale dispose : 1. La partie victime a le droit : a) de demander l’ouverture de poursuites contre l’auteur de l’infraction ; b) de recevoir des soins médicaux, une aide psychologique, des conseils et d’autres services fournis par les autorités, les organisations ou les institutions chargées d’aider les victimes d’infractions pénales ; c) de communiquer dans sa langue maternelle et de bénéficier des services d’un interprète, d’un interprète en langue des signes ou d’une personne facilitant les communications dans le cas des personnes présentant un trouble de l’audition ou de la parole ; d) d’engager un avocat et, le cas échéant, de bénéficier d’une aide juridictionnelle gratuite, dans les conditions prévues par la loi ; e) de s’enquérir à tout moment de l’état d’avancement de la procédure pénale et d’être informée des actes de procédure et des éléments de preuve, sans préjudice du principe de confidentialité des enquêtes ; f) de demander que des preuves soient recueillies et d’adresser toute nouvelle demande à l’autorité de poursuite ; g) de demander à être dédommagée du préjudice et de se constituer partie civile dans la procédure pénale.

86.La loi no 97/2016 sur l’organisation et le fonctionnement du Parquet améliore l’accès des victimes à l’information avec la nomination dans chaque parquet de coordonnateurs pour les relations publiques chargés de renseigner les victimes. L’article 68 de cette loi dispose que le parquet est tenu de fournir les services requis aux parties auxquelles le Code de procédure pénale confère un statut spécial et que chaque parquet doit compter au moins un coordonnateur titulaire d’un diplôme en psychologie ou en sociologie.

87.L’article 6 de la loi no 81/2020 sur les droits et le traitement des détenus (condamnés et avant jugement) dispose ce qui suit concernant la prévention de la violence et le traitement des victimes : 1. Un détenu qui a subi des violences physiques, psychologiques ou sexuelles avant ou durant son séjour dans l’établissement, bénéficie immédiatement d’une protection, d’un soutien et de conseils juridiques en vue de son rétablissement. 2. Les membres du personnel pénitentiaire doivent être particulièrement attentifs à la protection de l’intérêt supérieur des mineurs, conformément aux conditions et règles énoncées dans le Code de justice pénale des mineurs. 3. Les membres du personnel pénitentiaire doivent être particulièrement attentifs à la protection de la dignité et à la satisfaction des besoins physiques, sociaux, professionnels, sanitaires et psychologiques des femmes détenues.

Article 15 : Interdiction d’utiliser une déclaration obtenue par la torture comme élément de preuve dans un procès

88.Le Code de procédure pénale modifiécontient des dispositions concernant : les règles générales de recueil des preuves ; la typologie des preuves ; les moyens de recherche des preuves. Son article 149 (Définition de la preuve) dispose : 1 Constitue une preuve toute information sur les faits et circonstances liés à l’infraction pénale, obtenue de sources prévues par le droit de la procédure pénale et conformément aux règles fixées par ce droit, qui sert à établir si une infraction pénale a été commise ou non, les conséquences qu’elle a entraînées, la culpabilité ou l’innocence du mis en cause et son degré de responsabilité. 2. Quand une preuve d’un type non prévu par la loi est invoquée, le tribunal peut la prendre en considération s’il considère qu’elle est de nature à établir les faits et ne porte pas atteinte au libre-arbitre de la personne. Le tribunal statue sur la recevabilité d’une telle preuve après avoir recueilli les vues des parties sur la manière dont elle a été obtenue. L’article 150 dispose que sont à prendre en considération les faits en lien avec l’accusation, la responsabilité pénale de l’accusé, la prise de mesures de contrainte, la peine et l’action civile, ainsi que les faits dont dépend l’application des règles de procédure.

89.L’article 151 (Recueil des preuves) dispose : 1. Durant l’enquête préliminaire, les preuves sont recueillies par l’autorité de poursuite dans le respect des règles fixées dans le Code. 2. Au procès les preuves sont administrées à la demande des parties. Le tribunal statue sur le champ en écartant les preuves que prohibe la loi et celles manifestement inutiles. 3. Les preuves recueillies en violation des prohibitions que prévoit la loi ne sont pas utilisées. Une preuve peut être déclarée irrecevable d’office à tout stade et degré de la procédure.

Article 16 : Prévention d’autres actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui ne sont pas des actes de torture

90.Comme exposé plus haut, le Code pénal (modifié) incrimine une série d’actes (qui couvrent certains éléments et le recours à des actes inhumains et humiliants portant atteinte à la santé et à la vie) et fixe les peines encourues.

91.La loi no 144/2013 du 2 mai 2013 portant modification du Code pénal incrimine la disparition forcée (art. 109/c) :

•La disparition forcée, à savoir l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté d’une personne par des agents de l’État ou des personnes agissant avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi, constitue une infraction pénale passible d’une peine allant jusqu’à quinze ans d’emprisonnement ;

•La soustraction d’enfants soumis à une disparition forcée ou dont le père, la mère ou le représentant légal sont soumis à une disparition forcée, ou d’enfants nés pendant la captivité de leur mère soumise à une disparition forcée constitue une infraction pénale passible d’une peine de cinq à dix ans d’emprisonnement ;

•Si l’infraction est commise sur un mineur, une femme enceinte ou une personne qui, pour une raison quelconque est dans l’incapacité de se protéger, ou occasionne des souffrances physiques graves, ou est commise avec des complices, sur plusieurs personnes ou à plusieurs reprises, elle est passible d’une peine pouvant aller jusqu’à vingt ans d’emprisonnement ;

•Si l’infraction entraîne la mort de la personne, elle est passible d’une peine allant de trente ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité.

92.Le Code pénal révisé par une série de modifications et ajoutsincrimine la violence intrafamiliale (art. 130/a)et la violence psychologique, fixe les peines encourues et prévoit des mesures pour protéger les personnes ayant ou ayant eu des relations intimes avec l’auteur de cette infraction à leur encontre. Le Code prévoit des peines aggravées pour certaines catégories de personnes se rendant coupables de cette infraction.

93.L’article 8 (Protection contre la discrimination, la torture et les peines ou traitements inhumains ou dégradants) de la loi no 44/2012 (modifiée) sur la santé mentale dispose qu’en application de cette loi et du droit en vigueur en la matière les personnes qui présentent un trouble mental bénéficient d’une protection effective contre la discrimination et tout élément encourageant la discrimination, ainsi que contre la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Tous les aspects liés à la privation de liberté imposée à une personne atteinte de troubles mentaux sont traités en détail dans cette loi (dispositions relatives au traitement, à l’hospitalisation sans consentement et à la contention physique) et ses textes d’application, dont l’arrêté no 586 du 30 octobre 2013 portant approbation des règles concernant le recours à la contention physique dans les services spécialisés de santé mentale dotés de lits et l’arrêté no 268 du 23 avril 2013 portant approbation des modalités de traitement sans consentement. Les dispositions du droit albanais relatives au traitement et à l’hospitalisation sans consentement des personnes présentant un trouble de la santé mentale garantissent à ces personnes une protection juridique supplémentaire en prévoyant une évaluation et une prise de décisions en la matière par le tribunal compétent.

94.La loi no 44/2012 (modifiée) sur la santé mentale dispose que le Bureau de l’Avocat du peuple agissant en tant que Mécanisme national de prévention de la torture exerce un contrôle externe sur le système de santé mentale, en procédant à des inspections périodiques pour s’assurer du respect des droits des personnes présentant un trouble mental placées dans un service spécialisé de soins de santé mentale doté de lits ainsi que du respect des normes applicables, à l’issue desquelles sont adressées aux services inspectés des recommandations tendant à améliorer le traitement et la situation des patients et à assurer le plein respect des droits de l’homme dans les établissements de soins de santé mentale.

95.Adoptée récemment suite aux conclusions et recommandations formulées par le CPT après examen du rapport que l’Albanie lui avait soumis en septembre 2019, la loi no 20/2021 complétant et modifiant la loi no 44/2012 modifiée sur la santé mentale apporte une protection juridique additionnelle aux personnes présentant un trouble mental en établissant une distinction entre les méthodes et procédures de traitement et d’hospitalisation selon qu’il y a ou non consentement du patient. Elle dispose que les procédures de droit civil régissant le traitement sans consentement s’appliquent aux personnes adultes présentant un trouble mental déclarées incapables, ce qui leur confère les mêmes droits que les personnes pleinement capables sans avoir à obtenir le consentement/l’accord de leur représentant légal.

III. Mesures prises en réponse aux observations et recommandations du Comité contre la torture

Réponse au paragraphe 8 des observations finales (CAT/C/ALB/CO/2)

96.Comme exposé plus haut dans la section I, dans le Code pénal et le cadre juridique figurent des dispositions contre la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants. Sur la période considérée aucune affaire n’a fait l’objet d’une enquête ou d’un procès du chef de l’infraction pénale de « torture » visée par les articles 86 et 87 du Code pénal. Selon les données statistiques, aucune procédure pénale n’a été enregistrée pour l’infraction pénale de « torture » visée à l’article 86 du Code pénal. Au sujet des cas de mauvais traitements imputés à des membres des forces de l’ordre, la Direction générale de l’administration pénitentiaire n’a constaté aucun cas de mauvais traitements ou de recours à la violence.

Réponse au paragraphe 9 des observations finales

97.L’article 122 de la Constitution dispose que tout accord international ratifié devient partie intégrante du système juridique interne après sa publication dans le journal officiel. L’article 116, qui définit la hiérarchie des actes normatifs en vigueur sur le territoire albanais, dispose que les instruments internationaux ratifiés conformément à la Constitution et aux lois du pays ont une autorité inférieure à la Constitution mais supérieure aux lois du pays. En cas de conflit entre une loi et un instrument international, c’est donc ce dernier qui prévaut.

Réponse au paragraphe 10 des observations finales

98.En application de la loi no 9094 du 3 juillet 2003 portant ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, le Bureau de l’Avocat du peuple exerce la fonction de Mécanisme national de prévention de la torture.

99.Conformément à la Constitution et à la loi no 8454 du 4 février 1999 modifiée sur l’Avocat du peuple, le titulaire du poste surveille la mise en œuvre de plusieurs instruments internationaux relatifs à la protection et au respect des droits de l’homme. Cette loi dispose que les membres du Mécanisme national, en tant que mandatés par l’Avocat du peuple, sont habilités à accéder à tout moment, sans autorisation préalable et sans restrictions mais après avoir informé l’Avocat du peuple, à toute institution publique, tout établissement pénitentiaire et tout lieu où la police ou le parquet emmènent, retiennent ou gardent à vue des personnes, ainsi qu’aux services et établissements publics, hôpitaux psychiatriques, asiles, orphelinats ou tout autre lieu dans lequel, selon des allégations crédibles, se produiraient des violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

100.La loi no 81/2020 relative aux droits et au traitement des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement et des détenus provisoires , ainsi que la loi no 8328 du 16 avril 1998 relative aux droits et au traitement des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement et des détenus provisoires, prévoient la création et le fonctionnement du Mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (le Mécanisme national), qui a été établi conformément à la législation relative à l’Avocat du peuple.

101.L’article 82 de la loi no 81/2020 dispose que le Mécanisme national de prévention de la torture est habilité, dans l’exercice de ses attributions, à : a) recevoir toute information sur le nombre de personnes privées de liberté dans chaque établissement pénitentiaire, ainsi que le nombre de ces établissements et leur emplacement ; b) recevoir toute information sur le traitement et les conditions de détention de ces personnes ; c) accéder à tous les dossiers que l’établissement tient et administre dans l’exercice des fonctions que lui attribue la loi ; d) accéder librement sans préavis à tous les centres et locaux dans lesquels des personnes sont privées de liberté ; e) avoir des entretiens en privé, sans témoin, avec les personnes privées de liberté, en personne et en faisant appel si besoin à un interprète, ainsi qu’avec toutes les personnes susceptibles de fournir des informations pertinentes ; f) choisir librement les centres à visiter et les personnes à interroger.

102.L’article 83 (Surveillance exercée par le Mécanisme national) dispose que le Mécanisme national s’acquitte de ses fonctions de surveillance : a) en recueillant les requêtes et les plaintes soumises par les détenus ou par leur représentant légal ou une organisation agréée après consentement préalable du détenu ; b) en recueillant des informations, des plaintes et des requêtes émanant de détenus ou de personnes ayant le statut de visiteur, d’institutions publiques ou d’organisations à but non lucratif, ayant inspecté ou visité les locaux conformément aux compétences que leur confère la loi, ou des avocats du détenu ; c) en demandant des renseignements à l’administration des lieux de détention ; d) en inspectant les documents, objets, équipements ou locaux en lien avec le détenu, dans l’établissement et en dehors. Le Mécanisme national peut aussi exercer sa surveillance en recourant aux compétences de spécialistes de domaines pertinents. Que des violations ou irrégularités aient été ou non constatées lors de l’inspection, les experts du Mécanisme national établissent dans tous les cas un procès-verbal d’inspection que le directeur de l’établissement inspecté ou son adjoint doit signer avec la possibilité d’y consigner ses commentaires.

103.L’article 31 de la loi no 44/2012 du 8 mai 2012 sur la santé mentale dispose que le Bureau de l’Avocat du peuple, en tant que Mécanisme national de prévention de la torture, effectue des inspections périodiques pour s’assurer du respect des droits des personnes présentant un trouble de la santé mentale et du respect des normes dans les établissements de soins de santé mentale et adresse aux autorités pertinentes des recommandations sur les moyens d’améliorer le traitement et la situation des patients et de renforcer le respect des droits de l’homme dans ces établissements.

104.En tant que Mécanisme national de prévention de la torture, le Bureau de l’Avocat du peuple, au fil des ans, a inspecté des lieux où des violences avaient été signalées, sans l’accord préalable des autorités concernées sauf dans deux cas exposés ci-après. Pendant la période considérée, une série de visites d’inspection, de contrôles et de suivi a été effectuée dans tous les lieux de privations de liberté (établissements pénitentiaires, commissariats de police, hôpitaux psychiatriques, bases militaires dotées de quartiers d’arrêts, centres d’accueil de citoyens étrangers, de demandeurs d’asile et de victimes de la traite) sur l’ensemble du territoire albanais.

Réponse aux paragraphes 12 et 12 d) des observations finales

105.La loi no 155/2014 complétant et modifiant la loi no 8454 modifiée du 4 février 1999 sur l’Avocat du peuple a, entre autres dispositions, investi de la fonction de Mécanisme national pour la prévention de la torture une section spécialisée du Bureau de l’Avocat du peuple. Le Parlement albanais a par la suite adopté la décision no49/2017 portant création d’un dispositif de suivi systématique de la suite donnée aux recommandations des institutions indépendantes établies par la Constitution ou la loi, dont le Bureau de l’Avocat du peuple.

106.Le Bureau de l’Avocat du peuple a un accès inconditionnel, sans notification ou confirmation préalable et à tout moment, au système pénitentiaire ainsi qu’à la documentation à des fins de contrôle. Une des priorités de la Direction générale de l’administration pénitentiaire est d’intensifier sa coopération avec le Bureau de l’Avocat du peuple en appliquant ses recommandations et actualisant le plan d’action pour le système pénitentiaire. Au titre de cette coopération, la Direction générale administre une base de données statistiques sur les visites de contrôle effectuées par le Bureau de l’Avocat du peuple, le nombre et la ventilation des recommandations émises et les mesures prises en réponse.

Réponse au paragraphe 13 a) des observations finales

107.En application des ajouts et modifications incorporés dans le Code de procédure pénale en 2017 (art. 34/a, 34/b, 38), toute personne placée en garde à vue doit se voir notifier les droits que le lui reconnaît le Code selon les modalités exposées ci-après.

108.Une notice imprimée établie par la Police nationale (notification des droits) donne la liste des droits des personnes gardées à vue ; cette notification est remise à la personne au tout début de sa garde à vue pour signature avec indication de la date et de l’heure de réception. La notification est signée par la personne gardée à vue en deux exemplaires, l’un lui étant remis et l’autre conservé par les agents des cellules de sûreté. La notification, disponible en plusieurs langues, a été distribuée aux services locaux de police qui peuvent ainsi la remettre dans une langue qu’elle comprend à toute personne gardée à vue. Une partie des procédures et règles concernant le traitement et la sécurité des personnes gardées à vue dans des locaux de la Police nationale (Instruction no 925 du 18 juillet 2019 du Directeur général de la Police nationale) est déjà mise en œuvre, dont l’obligation pour les fonctionnaires de police d’avoir connaissance des droits des personnes gardées à vue et de leur notifier ces droits.

Réponse au paragraphe 13 b) des observations finales

109.La Police nationale s’attache en permanence à respecter et garantir les droits des personnes en garde à vue en procédant comme suit :

•En respectant et en garantissant dans la pratique le droit de la personne gardée à vue d’avoir accès à un avocat pour la défendre dès le début de la privation de liberté, les services de police judiciaire faisant le nécessaire pour que la personne soit informée de son droit d’être assistée et ait accès à un avocat de son choix ou à un avocat commis d’office par le parquet, conformément au Code de procédure pénale, si la personne n’a pas les moyens d’engager un avocat ;

•En remettant à la personne gardée à vue un exemplaire du document énonçant les droits reconnus parla loi à la personne gardée à vue à ce stade;

•En garantissant à l’avocat assurant sa défense le droit de s’entretenir avec son client à tout moment en l’absence de toute autre personne ;

•En affichant dans les cellules de sûreté la liste des avocats spécialisés et leurs coordonnées ;

•En informant régulièrement, par le canal de la police judiciaire, les membres de la famille de la personne gardée à vue de la mesure prise et du lieu où elle se trouve ;

•En soumettant à l’examen médical obligatoire par un médecin de la police la personne visée dès le début de sa garde à vue ou au plus tard douze heures après, les constatations du médecin étant consignées dans un dossier médical ;

•En se conformant aux règles régissant cet examen médical, fixées dans l’Instruction no 925 du 18 juillet 2019 du Directeur général de la Police nationale concernant la procédure ordinaire régissant le traitement et la sécurité des personnes gardées à vue dans des locaux de la Police nationale et la réception et le traitement des requêtes ou plaintes déposées par les personnes mises en garde à vue.

Réponse au paragraphe 13 c) des observations finales

110.La police judiciaire transmet à l’autorité de poursuite les pièces relatives aux actes de procédure effectués dans les vingt-quatre heures après la mise en garde à vue d’une personne et le parquet adresse dans les quarante-huit heures au tribunal (pour examen, évaluation et approbation) une demande de mesure de contrainte contre la personne gardée à vue. Le tribunal siège dans les quarante-huit heures de la réception de la demande du parquet pour statuer sur son bien-fondé.

Réponse au paragraphe 14 des observations finales

111.La loi no 47/2018 complétant et modifiant la loi no 9669 du 18 décembre 2006 sur la violence intrafamiliale a renforcé les mesures de protection et alourdi les peines encourues dans le souci de combattre plus efficacement ce phénomène et de protéger les victimes. La loi a introduit à titre de mesure de précaution l’ordonnance de protection d’urgence, délivrée après évaluation des risques en l’espèce. La loi innove en étendant cette protection aux femmes et filles victimes de violence de la part d’une personne avec laquelle elles ont ou ont eu des relations intimes, même hors mariage ou concubinage notoire. Une nouvelle modification apportée à cette loi en octobre 2020 introduit notamment des dispositions relatives aux mesures à prendre en application d’une ordonnance de protection d’urgence ou de protection pour éloigner l’auteur de l’infraction du domicile de la victime ou encadrer son retour à l’échéance de l’ordonnance, à l’élaboration de programmes de réadaptation modulés en fonction du type de violation et au registre de ces deux catégories d’ordonnances.

112.Le Code pénal tel que révisé par une série de modifications et d’ajouts incrimine la violence intrafamiliale et fixe les peines encourues (art. 130/a) :

•Une personne qui a infligé des coups ou tout autre forme de violence à une personne qui est son conjoint ou ex-conjoint, concubin ou ex-concubin, parent ou beau- parent proche, ou avec laquelle il entretient ou a entretenu une relation intime encourt, si l’infraction a porté atteinte à l’intégrité physique, psychosociale et économique de la victime, une peine d’emprisonnement allant jusqu’à trois ans ;

•Une personne qui a adressé des menaces de mort sérieuses ou infligé des blessures graves à une personne qui est son conjoint ou ex-conjoint, concubin ou ex-concubin, parent proche ou beau parent proche, ou avec laquelle il entretient ou a entretenu une relation intime, encourt, si cette infraction a porté atteinte à l’intégrité physique, psychosociale et économique de la victime, une peine d’emprisonnement allant jusqu’à quatre ans ;

•Une personne qui a infligé des blessures intentionnellement à une personne qui est son conjoint ou ex-conjoint, concubin ou ex-concubin, parent ou beau-parent proche, ou avec laquelle il entretient ou a entretenu une relation intime encourt, si l’infraction a entraîné une incapacité temporaire de travail de plus de neuf jours, une peine d’emprisonnement allant jusqu’à cinq ans ;

•Les mêmes infractions commises en récidive ou en présence de mineurs sont passibles d’une peine d’un à cinq ans d’emprisonnement.

113.L’article 102 (Usage de la force pour agresser sexuellement une femme majeure/adulte) modifié en 2013 dispose qu’une personne qui use de la force pour imposer un acte sexuel non consenti à une femme adulte, même si c’est sa conjointe ou sa concubine, encourt de trois à dix ans d’emprisonnement. Si cet acte sexuel avec usage de la force est commis à plusieurs reprises et avec des complices ou si la victime a subi de graves conséquences pour sa santé, la peine encourue est de cinq à quinze ans d’emprisonnement. Si l’acte a causé la mort ou le suicide de la victime, il est passible d’une peine de dix à vingt ans d’emprisonnement.

114.L’autorité de poursuite s’est en permanence attachée à fournir un accès et un soutien aux victimes, en particulier de violences sexuelles, de traite ou de violence intrafamiliale. En janvier 2016, le Parquet général s’est doté d’un bureau d’aide aux victimes, en application de la loi no 97/2016 sur l’organisation et le fonctionnement du Parquet de la République d’Albanie, dont l’article 68 dispose que l’autorité de poursuite fournit les services nécessaires au traitement des personnes auxquelles le Code de procédure pénale confère un statut spécial. Chaque parquet doit donc être doté d’un coordonnateur diplômé en psychologie ou en sociologie ou une autre discipline pertinente.

115.En application de cette loi, tous les parquets des tribunaux de première instance de compétence générale et le Parquet général sont désormais pourvus de coordonnateurs pour les victimes ; ils suivent une formation à leur entrée en fonctions. En application de cette loi aussi, depuis octobre 2019 est mise en œuvre l’Instruction générale no 5/2018 du Procureur général tendant à uniformiser la compréhension et l’application des dispositions du Code de procédure pénale relatives aux victimes d’infractions pénales et à définir les modalités de formation des magistrats du parquet. En annexe à ce texte figurent des directives harmonisées pour l’application de l’Instruction et la conduite des travaux du parquet. Une brochure d’information à l’usage des victimes d’infractions pénales a été élaborée pour distribution aux parquets de première instance et affichage sur le site Web du Parquet général.

116.La loi no 47/2018 du 23 juillet 2018, complétant et modifiant la loino 9669 du 18 décembre 2006 modifiée sur les mesures de lutte contre la violence intrafamiliale vise à :

•Prévenir et combattre la violence intrafamiliale ;

•Renforcer les mesures de protection (ordonnance de protection d’urgence et ordonnance de protection) que prévoit la loi, en particulier des mineurs ;

•Généraliser la fourniture d’une aide juridictionnelle gratuite de qualité ;

•Fixer des délais précis pour le dépôt d’une demande d’ordonnance de protection d’urgence ou de protection et d’un recours contre une décision de justice ;

•Définir clairement les organes et agents chargés de fournir des services dans ces cas ;

•Faire expressément obligation aux institutions publiques de fournir gratuitement toute expertise requise dans les affaires de violence intrafamiliale ;

•Promouvoir la participation des auteurs de violences à des programmes spécifiques de réadaptation, en particulier les auteurs de violences qui sont alcooliques, toxicomanes ou présentent un trouble mental, comme le préconisent clairement les décisions de justice en matière d’ordonnances de protection.

117.Textes d’application :

•Instruction no 816 du 27 novembre 2018 du Ministre de la santé et de la protection sociale approuvant les normes de prestations de services et de fonctionnement des centres de gestion de crise dans les affaires de violence sexuelle ;

•Document fixant les normes de service des centres de gestion de crise dans les affaires de violences sexuelles, à savoir l’offre par ces centres de services d’urgence intégrés 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 et d’un hébergement de courte durée (de 24 à 72 heures) aux personnes victimes de violences sexuelles et aux membres de leur famille. Ce document vise à en assurer un fonctionnement aussi efficace que possible ;

•Instruction conjointe du Ministre de la santé et de la protection sociale et du Ministre de l’intérieur no 912 du 27 décembre 2018 relative aux procédures et au modèle d’ordonnance de protection d’urgence à titre de mesure de précaution ;

•Instruction conjointe no 866 du Ministre de la santé et de la protection sociale et du Ministre de l’intérieur du 20 décembre 2018 relative aux procédures et au modèle d’évaluation des risques en cas de violence intrafamiliale.

118.Le Mécanisme coordonné d’orientation et de traitement en matière de violence intrafamiliale donne accès à des services intégrés aux victimes d’actes de violence et leur apporte une protection et un soutien à l’échelon local en assurant la liaison avec ces victimes et en établissant de nouveaux services spécialisés. Sous la coordination du Ministère de la santé et de la protection sociale et avec le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement, 57 antennes du Mécanisme coordonné ont été implantées et couvrent 61 municipalités du pays. Le renforcement des capacités des coordonnateurs locaux contre la violence intrafamiliale et des équipes techniques multidisciplinaires se poursuit.

119.L’État appuie le Centre national d’accueil des victimes de la traite des êtres humains ainsi que trois centres gérés par des ONG. Ces refuges fournissent des services spécialisés aux victimes effectives ou potentielles de la traite, qu’elles soient albanaises ou étrangères, des enfants, des femmes ou des hommes, leur personnel ayant été formé pour assurer la sécurité des victimes. Le Centre national d’accueil propose aux victimes effectives ou potentielles de la traite des êtres humains un large éventail d’aides pour répondre à leurs besoins (nourriture, soins de santé, aide juridictionnelle, soutien psychologique, réadaptation, formation professionnelle, etc.). Le Centre national se trouve dans un bâtiment de haute sécurité ouvert 24 heures sur 24. Les services de protection sociale sont fournis par des institutions publiques et des structures non gouvernementales dont les capacités se complètent et s’équilibrent et permettent de répondre à un large éventail de besoins.

120.Le Centre LILIUM de gestion de crise dans les affaires de violence sexuelle (établi en décembre 2018) est la première structure reposant sur un modèle sociosanitaire, mis en œuvre par une équipe multidisciplinaire composée de médecins légistes, de gynécologues, de pédiatres, de psychiatres, de psychologues cliniciens, de travailleurs sociaux, de fonctionnaires de police, de procureurs, d’avocats et d’infirmiers ; il fournit des services spécialisés conformes aux normes fixées 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Depuis son ouverture, 58 victimes de violences sexuelles ont bénéficié de ses services. Des refuges d’urgence ont été implantés dans certaines municipalités. Des campagnes d’information contre la violence envers les femmes ont été organisées. Le service national d’accueil téléphonique à destination des femmes et des filles (le 116-117) est en service depuis 2017.

Aide juridictionnelle gratuite

121.Entrée en vigueur le 1er juin 2018, la loi no 111/2017 du 14 décembre 2017 sur l’aide juridictionnelle garantie par l’État institue un système intégré assurant à toutes les personnes parties à une procédure judicaire une aide juridictionnelle gratuite et garantit l’égalité d’accès et des services d’aide juridictionnelle professionnels de qualité, efficaces et efficients.

122.Son article 11 a renforcé l’accès à la justice en admettant sans condition de ressources au bénéfice de l’aide juridictionnelle les catégories spéciales de personnes ci-après :

•Les victimes de violence intrafamiliale ;

•Les victimes d’atteintes sexuelles et les victimes de la traite des êtres humains, à tous les stades de la procédure pénale ;

•Les mineurs victimes et les mineurs en conflit avec la loi, à tous les stades de la procédure pénale ;

•Les enfants placés en établissement d’aide sociale ;

•Les enfants sous tutelle qui demandent à engager une action en justice sans le consentement de leur tuteur légal ou contre leur tuteur légal ;

•Les personnes au bénéfice d’une allocation pour handicap en application de la loi sur l’aide sociale et les services sociaux, dont les personnes non voyantes ;

•Les personnes suivant un traitement sans leur consentement dans un établissement de soins de santé mentale en application du droit relatif à la santé mentale ;

•Les personnes suivant un traitement avec leur consentement dans un établissement de soins de santé mentale pour patients présentant un trouble grave de la santé mentale ;

•Les personnes dont il est demandé qu’elles soient déclarées totalement ou en partie incapables, à tous les stades de la procédure ;

•Les personnes qui ont été déclarées incapables totalement ou en partie et demandent l’ouverture d’une procédure contre leur tuteur légal en vue de recouvrer la capacité d’agir sans le consentement de leur tuteur légal ;

•Les personnes au bénéfice de programmes de protection sociale ;

Les personnes dont les droits ont été violés par suite d’une action ou d’une omission à caractère discriminatoire, sur décision de l’organe compétent, conformément au droit relatif à la protection contre la discrimination.

123.La loi no 121/2016 sur les services d’aide sociale prévoit la prestation de services spécialisés aux groupes de personnes en ayant besoin, en particulier les mineurs en conflit avec la loi, les personnes handicapées et les femmes et les filles victimes de viol ou de traite. Elle prévoit la prestation de ces services aux victimes de la traite officiellement reconnues comme telles aussi bien aux victimes effectives que potentielles (présumées). Both the potential victims/victims of trafficking have access to social care services. La loi dispose que sont admises au bénéfice de l’aide juridictionnelle gratuite les personnes couvertes par les programmes de protection sociale ou remplissant les conditions requises, ainsi que les victimes de violence intrafamiliale ou de traite des êtres humains.

124.La loi complétant et modifiant la loi no 10221 du 4 février 2010 sur la protection contre la discrimination vise des formes additionnelles de discrimination, dont la discrimination multiple ou croisée, le discours de haine, la ségrégation et le harcèlement sexuel.

Droits de l’enfant

125.La loi no 37/2017 portant Code de justice pénale des mineurs (adoptée le 30 mars 2017 et entrée en vigueur le 1er janvier 2018) instaure un cadre de justice pénale des mineurs qui favorise la réinsertion des mineurs en conflit avec la loi, protège les droits des mineurs victimes ou témoins d’infractions pénales et évite la revictimisation et la victimisation secondaire des enfants victimes d’une infraction pénale. Elle énonce des dispositions spéciales concernant la responsabilité pénale des mineurs, les règles de procédure pour l’enquête, les poursuites pénales, le procès, l’exécution de la peine, la réadaptation et toute autre mesure relative à un mineur en conflit avec la loi et à un mineur victime ou témoin d’infractions pénales, ainsi que les règles applicables aux jeunes âgés de 18 à 21 ans.

126.Les textes d’application ci-après ont été adoptés :

•Par son décret no 541 du 19 septembre 2018 le Conseil des ministres a approuvé la stratégie en matière de justice des mineurs 2018-2028 et son plan d’action ;

•Les règlements d’application du Code de justice pénale des mineurs ont été finalisés et approuvés et leur application a commencé ;

•Six décrets du Conseil des ministres, des arrêtés, des instructions et un projet de décret garantissant la protection des droits des mineurs.

127.La loi no 18/2017 sur les droits et la protection de l’enfant donne une définition claire de la protection de l’enfance et indique les mesures que les agents chargés de la protection de l’enfance peuvent prendre lorsqu’un enfant est en danger à cause de la violence, des abus, de la négligence ou de l’exploitation qu’il subit. Cette loi innove en étendant cette protection aux enfants en situation de rue, aux enfants qui travaillent ou sont exploités par le travail et, à ce titre, vise les différentes formes de violence dont les enfants sont victimes (harcèlement, violence à l’école, violence intrafamiliale, violence sexuelle, exploitation économique) ainsi que la sécurité des enfants sur Internet, des enfants non accompagnés ou victimes de la traite.

128.Son article 6 dispose que les services de protection de l’enfance prennent des mesures immédiates pour évaluer le cas de l’enfant délinquant n’ayant pas l’âge de la responsabilité pénale, par le canal de l’unité d’évaluation des besoins et d’orientation et de l’équipe multidisciplinaire, pour élaborer un plan de protection individuel prévoyant une des mesures de protection énoncées dans la loi ainsi que la fourniture de services et les interventions requises pour assurer la réinsertion de l’enfant. Le décret du Conseil des ministres no 635 du 26 octobre 2018 sur les activités des services de protection des enfants n’ayant pas l’âge de la responsabilité pénale suspectés d’une infraction pénale définit les mesures que ces services doivent prendre en faveur de ces enfants.

129.Cette loi régit l’action des institutions, structures et mécanismes intervenant jusqu’au niveau local dans la protection des droits de l’enfant, notamment les particuliers, les familles, les pouvoirs publics et le système de protection des enfants contre la violence, la maltraitance, l’exploitation et la négligence. Elle définit les mesures que les intervenants dans la protection de l’enfance doivent prendre pour protéger un enfant en danger parce que victime de violence, d’abus, de négligence ou d’exploitation. Elle prévoit le maintien de l’enfant dans son milieu familial sous supervision spéciale, mesure qui permet de traiter et protéger l’enfant selon le plan élaboré par les services de protection de l’enfance.

130.Cette loi prévoit en outre une protection spéciale pour les enfants victimes de maltraitance, de viol, de négligence et d’exploitation économique et les enfants accusés d’une infraction pénale qui n’ont pas atteint l’âge de la responsabilité pénale.

131.Le Programme national pour les droits de l’enfant 2017-2020 tend à améliorer la gouvernance pour promouvoir, respecter et garantir les droits des enfants en renforçant le cadre juridique et institutionnel, dont les mécanismes de contrôle indépendants, et en rendant plus efficaces la surveillance des droits de l’enfant et le système de protection de l’enfance.

Réponse au paragraphe 15 des observations finales

132.Le droit pénal albanais incrimine la traite des êtres humains. Le Code de procédure pénale a été modifié en 2017 pour l’aligner sur les normes optimales énoncées dans les instruments internationaux, ce qui a grandement amélioré les droits et la situation des victimes d’infractions pénales, dont les victimes de la traite des êtres humains, qui font l’objet de dispositions particulières.

133.Les modifications majeures apportées au Code de procédure pénale concernent la compétence en matière d’enquête sur ces infractions et leur poursuite ; elles confèrent un rôle plus actif et élargi à la victime. En vertu de ces modifications, les parquets de première instance de compétence générale sont chargés d’enquêter sur ces infractions, qui sont jugées par les tribunaux de district. Conformément au Code pénal et à l’article 75/a du Code de procédure pénale, le Parquet spécialisé dans la répression de la corruption et de la criminalité organisée est compétent pour enquêter sur les infractions pénales commises en bande organisée ou par une organisation criminelle, et c’est le Tribunal contre la corruption et la criminalité organisée qui juge ces affaires.

134.L’autorité de poursuite porte une attention particulière aux droits des victimes de la traite des êtres humains, notamment en s’employant à créer des conditions propices pour l’interrogatoire des victimes, en assurant la présence d’un travailleur social ou d’un psychologue, en veillant à l’hébergement de la victime dans un centre d’accueil où elle est logée et nourrie et peut bénéficier d’autres services gratuitement.

135.En Albanie les victimes de la traite ne sont, du fait de ce statut de victime, pas punies pour les infractions liées à la traite qu’elles ont commises (falsification de documents, prostitution, etc.). Si elles se sentent menacées elles ont le droit de demander au procureur à être admises au bénéfice du programme de protection des témoins.

136.Les mesures prises aux fins de la prévention et de la répression de la traite des êtres humains visent avant tout à : améliorer le cadre juridique ; revitaliser et renforcer les structures nationales ; détecter, orienter et protéger les victimes de la traite, aux niveaux national et local ; combattre la traite, en particulier des enfants et des femmes, dans le pays ; améliorer les modalités de détection et de protection des victimes ; développer et intensifier les activités de prévention et sensibiliser le public et les personnes travaillant dans les services d’aide.

137.La loi no 70/2017 complétant et modifiant la loi no 10192 du 3 décembre 2009 sur la prévention et la répression de la criminalité organisée, de la traite, de la corruption et d’autres infractions par la saisie d’avoirs s’applique aux biens détenus pour tout ou partie directement ou indirectement par des personnes suspectées d’infractions tombant sous le coup des articles du Code pénal incriminant la traite des adultes et la traite des mineurs. Elle prévoit la création d’un fonds spécial pour la prévention de la criminalité organisée auquel sont assignés certains objectifs sociaux, dont le financement de la réadaptation et de la réinsertion des victimes de la traite (art. 37/2-c) et de l’aide aux ONG, dont celles gérant des refuges (art. 37/3-b).

138.Les dispositions suivantes ont été adoptées pour combattre la traite des êtres humains :

•Stratégie et Plan d’action contre la traite des êtres humains 2014-2017 (Décret du Conseil des ministres no 814 du 26 novembre 2014) ;

•Plan d’action pour la réinsertion socioéconomique des femmes et des filles victimes effectives ou potentielles de la traite (Décret du Conseil des ministresno115 du 17février2016);

•Plan d’action national contre la traite des êtres humains 2018-2020 (Décret du Conseil des ministres no 770 du 26 décembre 2018).

139.Les activités prévues à ce titre visent à :

•Améliorer le fonctionnement d’un système complet en renforçant les mécanismes de détection, de protection et de réintégration des victimes de la traite des êtres humains ;

•Informer et sensibiliser le public sur la législation nationale et les instruments internationaux contre la traite des êtres humains sous toutes ses formes (traite interne, travail forcé des enfants et des adultes, mendicité des enfants, enfants de la rue, etc.).

140.Les Procédures opérationnelles normalisées pour la protection des victimes effectives ou potentielles de la traite (Arrêté no 499 du 29 août 2018) sont le document de base régissant la détection, l’orientation et la protection des victimes effectives ou potentielles de la traite et l’aide à leur fournir. Elles visent, en assurant notamment la détection efficace et rapide des victimes effectives ou potentielles de la traite, adultes ou mineures, albanaises, étrangères ou apatrides, à protéger ces personnes contre toutes les formes d’exploitation et la traite locale ou internationale liée ou non à la criminalité organisée. Elles portent sur les points suivants :

•Le bon fonctionnement du mécanisme national d’orientation et des mécanismes locaux d’orientation au niveau du district, de la municipalité et de l’unité administrative (par le canal des groupes de coordination locaux en prenant des mesures de prévention et en détectant les personnes victimes de la traite) conformément aux règles et aux procédures opérationnelles normalisées ;

•La tenue d’une base de données sur les victimes effectives ou potentielles de la traite pour enregistrer, suivre et contrôler les affaires ;

•Le renforcement des aptitudes et compétences professionnelles des fonctionnaires de police opérant dans les structures locales de lutte contre la traite des êtres humains, en leur dispensant une formation continue, notamment sur l’application des Procédures opérationnelles normalisées pour la protection des victimes effectives ou potentielles de la traite des êtres humains et sur les techniques proactives d’enquête;

•S’agissant des mineurs, deux centres nationaux accueillent en urgence les enfants victimes effectives ou potentielles de la traite exposés à un risque élevé et immédiat jusqu’à ce que l’équipe technique intersectorielle ait déterminé si l’enfant doit être placé dans une structure de protection de remplacement ou renvoyé dans sa famille.

Réponse au paragraphe 16 des observations finales

141.Le Code de procédure pénale (modifié) contient des dispositions détaillées concernant : les procédures ; les délais d’achèvement des enquêtes ; l’exercice de l’action pénale ; la procédure judiciaire ; la mise en accusation ; la condamnation ; la peine.

142.La loi no 8328 du 16 avril 1998 sur les droits et le traitement des détenus (condamnés et avant jugement) (modifiée par la loi no 40/2014) régissait le traitement de ces deux catégories de détenus dans le respect de leurs droits de l’homme et libertés fondamentales, son but étant de réadapter les détenus en vue de leur réinsertion familiale, sociale et économique en mettant à leur disposition des installations et outils appropriés eu égard à leur personnalité.

143.Cette loi a été abrogée et remplacée par la loi no 81/2020 sur les droits et le traitement des détenus (condamnés et avant jugement) qui vise notamment à garantir à ces détenus un traitement respectueux de leurs droits de l’homme et leurs libertés fondamentaux et à éviter tout acte ou comportement cruel, inhumain ou dégradant à leur encontre.

144.Son article 89 (Droits des détenus avant jugement) dispose : 1. Les personnes placées dans un quelconque lieu de détention jouissent des droits énoncés dans la présente loi. 2. Les détenus sont autorisés à informer immédiatement leur famille de leur arrestation et du lieu où ils se trouvent. Ils bénéficient de toutes les conditions nécessaires pour rencontrer les membres de leur famille. Les détenus étrangers sont autorisés à informer la mission consulaire ou diplomatique de leur pays.

145.Son article 90 (Aide juridictionnelle) dispose : 1. Le détenu est informé en toute circonstance de son droit à une aide juridictionnelle publique, si la représentation par un avocat est obligatoire et s’il n’a pas les moyens d’en engager un. 2. Les lieux de détention doivent donner au détenu la possibilité de rencontrer et de communiquer en privé avec son avocat et de disposer du temps et des installations nécessaires pour préparer sa défense à tous les stades de la procédure. 3. Le détenu mineur bénéficie d’une assistance juridique et psychologique et exerce tous les droits que lui confèrent le Code de procédure pénale et le Code de justice pénale des mineurs.

146.Afin de garantir aux personnes gardées à vue la notification de leurs droits, en particulier du droit de faire appel à un avocat, la Police nationale a pris diverses mesures, dont les suivantes :

•Apposition d’affiches sur les droits des personnes gardées à vue, dont le droit d’être défendu par un avocat, dans les directions, commissariats et postes de la police ;

•Remise aux personnes gardées à vue d’un exemplaire de la notice imprimée donnant la liste des droits que la loi leur confère à ce stade ;

•Affichage dans les locaux de la police, les salles de rétention et les cellules de sûreté de la liste et des coordonnées des avocats pénalistes opérant dans le ressort du service de police concerné ;

•Notification de leurs droits à ces personnes par les officiers de police judiciaire.

147.Le Directeur général de la Police nationale et les directeurs de division de la Direction générale de la Police nationale ont édicté à l’intention des services et fonctionnaires de police locaux une série de textes administratifs (instructions, circulaires, directives) relatifs aux mesures à prendre conformément aux prescriptions du Code de procédure pénale pour assurer la notification de leurs droits aux personnes gardées à vue et assurer le respect de ces droits.

148.L’administration pénitentiaire met à la disposition des détenus (condamnés et avant jugement) un dispositif de dépôt de requêtes ou de plaintes qui leur donne la possibilité de signaler en toute circonstance et en toute confidentialité leurs griefs concernant leur traitement et l’exercice de droits dans le système pénitentiaire. Le protocole relatif à ce mécanisme expose à titre indicatif au détenu comment rédiger une requête ou une plainte, à quel organe ou institution (dont le Bureau de l’Avocat du peuple) l’adresser et les délais officiels.

Réponse au paragraphe 17 des observations finales

149.La loi no 108/2014 sur la Police nationale définit la « rétention » (art. 6, par. 25) comme l’acte consistant à conduire une personne à un poste de police, à un établissement de santé, à un centre de réadaptation, au domicile de son tuteur ou de la personne ayant sa garde, à l’institution émettrice de la décision ou à une autre institution, conformément aux dispositions de ses articles 109 et 122/1. Cette loi précise dans quels cas et pendant combien de temps une personne peut être retenue, les droits conférés aux personnes retenues dans un poste de police (ou un autre lieu) et les obligations incombant aux fonctionnaires de police ; ainsi :

•Une personne retenue n’est pas traitée comme une personne gardée à vue ;

•La rétention aux fins de vérifications ne dure en aucun cas plus de dix heures ;

•La personne retenue a le droit d’être informée immédiatement dans une langue qu’elle comprend du motif de cette mesure ;

•La personne retenue a le droit de garder le silence ;

•La personne retenue a le droit de communiquer immédiatement avec une personne de confiance et un avocat ;

•La personne retenue a le droit de saisir un tribunal à tout moment ;

•Le fonctionnaire de police qui a procédé à la rétention établit un procès-verbal qui en décrit le déroulement et dont chaque feuille est signée par lui-même et la personne retenue, à laquelle est remis un exemplaire du procès-verbal.

150.Au cours de la période de rétention, d’une durée maximale de dix heures, des officiers de police judiciaire/experts en criminalistique de la police et leurs adjoints procèdent à des investigations et à des actes de procédure pour établir et éclaircir les circonstances de l’affaire/la raison pour laquelle la personne a été retenue ; à son terme il est décidé si la personne est placée en garde à vue ou libérée en faisant l’objet de poursuites. La durée de la rétention est prise en compte si la personne est ensuite placée en garde à vue, la période de sa privation de liberté consignée dans le procès-verbal débutant alors à l’instant où la personne a été placée en rétention et non à celui de l’établissement du procès-verbal de placement en garde à vue.

Réponse au paragraphe 18 des observations finales

151.L’article 113 de la loi no 108/2013 sur les étrangers (modifiée par la loi no 74/2016 du 14 juillet 2016 et la loi no 13/2020) dispose qu’un étranger ne peut être expulsé vers son pays d’origine ou un autre pays s’il existe des motifs sérieux de croire qu’il risque d’y être condamné à mort ou soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements inhumains ou dégradants sur la base d’une discrimination. Ce même article dispose qu’un mineur non accompagné est inexpulsable si le regroupement familial ou la prestation de soins de santé appropriés ne sont pas garantis dans son pays d’origine ou un autre pays de renvoi. Un étranger dont le séjour met en danger l’ordre et la sécurité publics ou la sécurité nationale peut, même s’il remplit les conditions fixées à l’article 113, être expulsé à titre exceptionnel selon les modalités prévues par la loi.

152.La loi no 10/2021 sur l’asile en Albanie dispose en son article 11 (Non-refoulement) : 1. Le demandeur, le réfugié, la personne au bénéfice de la protection subsidiaire ou temporaire ne sera ni expulsé, ni renvoyé, ni extradé du territoire albanais :

a)Vers un pays où sa vie serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ;

b)Vers un pays s’il existe des motifs sérieux de croire que le demandeur risque d’y être soumis à la torture, à des peines inhumaines ou dégradantes ou à tout autre traitement visé par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, telle qu’interprétée par la Cour européenne des droits de l’homme, ou par des accords/instruments internationaux auxquels la République d’Albanie est partie ;

c)Vers un pays s’il existe des raisons de croire que le demandeur risque d’y être soumis à une disparition forcée ;

d)Vers son pays d’origine si l’étranger s’est vu accorder une des formes de protection prévues dans la présente loi ;

e)Vers un pays tiers susceptible de le renvoyer ou de l’envoyer dans un pays des catégories visées aux paragraphes a), b) et c) du présent article.

Réponse au paragraphe 19 des observations finales

153.L’article 126 (Notification de la mission diplomatique) de la loi no 108/2013 sur les étrangers (modifiée par la loi no 74/2016) énonce les garanties diplomatiques dont jouit un étranger détenu, à savoir qu’à sa demande, et si un accord bilatéral le prévoit, la mission diplomatique ou consulaire de son pays est informée par le Ministère des affaires étrangères de sa détention et de son déroulement.

Réponse au paragraphe 20 des observations finales

154.L’article 115 de la loi no 108/2014 (modifiée) sur la Police nationale confère aux personnes emmenées, retenues ou gardées à vue par la police, ainsi qu’à tout citoyen, le droit d’adresser, oralement ou par écrit, à la direction de la police ou à une autre institution publique une requête ou une plainte relative au comportement et aux actes de fonctionnaires de police ; cette loi fait obligation à la police d’enregistrer et de traiter la requête ou la plainte, d’y apporter une réponse et de notifier cette réponse à la personne qui l’a soumise. Les dispositions de cette loi portent notamment sur les points suivants :

•Le droit de toute personne emmenée, retenue ou gardée à vue dans un poste de police, ainsi que de tout citoyen, de soumettre une requête ou une plainte visant le comportement et les actions de fonctionnaires de police ;

•Les modalités de soumission d’une requête ou d’une plainte, oralement ou par écrit ;

•L’institution à laquelle adresser la requête ou la plainte (Direction de la police ou autre institution publique) ;

•Le droit des personnes retenues de saisir un tribunal à tout moment ;

•L’obligation pour la police de recueillir et traiter les requêtes et plaintes ;

•Les délais de traitement des requêtes et plaintes et de réponse à son auteur : si la plainte a été soumise à un fonctionnaire du poste de police où la personne est retenue ou gardée à vue la réponse doit être donnée immédiatement ou au plus tard dans les cinq jours.

155.L’arrêté no 440/3 du 27 avril 2017 a porté approbation de la procédure opérationnelle normalisée à suivre pour assurer le traitement et la sécurité des personnes emmenées, retenues ou gardées à vue dans des locaux de police et recueillir et répondre à leurs requêtes ou plaintes.

156.Chaque unité de la Police nationale tient un registre dans lequel sont consignés le dépôt, le traitement et le règlement des requêtes ou plaintes soumises par des personnes privées de liberté dans ses locaux. Si la requête ou la plainte a été soumise au responsable de l’unité dans les locaux de laquelle la personne est détenue une réponse doit lui être fournie immédiatement ou au plus tard dans les cinq jours ouvrables à compter du jour de son dépôt.

157.Dans les bureaux des directions, commissariats et postes de la Police nationale ainsi que dans les salles de rétention et les cellules de sûreté et les couloirs y conduisant sont apposées visiblement des affiches donnant diverses informations, à savoir :

•La liste des droits reconnus aux personnes privées de liberté ;

•Les numéros de téléphone de la Direction générale des affaires intérieures et du Service des plaintes, ainsi que l’organisation Institut européen de Tirana, que les personnes privées de liberté peuvent appeler gratuitement pour déposer une plainte ou une requête visant l’attitude et le comportement de fonctionnaires de police de l’unité en cause et signaler des mauvais traitements ;

•Les noms et coordonnées des avocats pénalistes opérant dans le ressort de l’unité.

158.La Direction de la déontologie de la Direction générale de la Police nationale est chargée d’enquêter sur les plaintes pour violences et mauvais traitements infligés par des policiers à de personnes privées de liberté (emmenées, retenues ou gardées à vue) ou d’autres personnes au siège de la Police nationale. La Direction de la déontologie, relevant directement du Directeur général de la Police nationale, a pour mission : d’inspecter et de contrôler les activités de tous les services centraux et locaux de la Police nationale ; d’instruire et de traiter les plaintes contre des abus, mauvais traitements et violations des droits imputés à la police déposées par des personnes privées de liberté dans des locaux de la Police nationale et par d’autres citoyens ; d’ouvrir une enquête administrative ou disciplinaire contre les policiers mis en cause pour manquement aux obligations qui leur incombent en vertu des lois et règlements et pour inobservation des procédures opérationnelles normalisées de la police et atteintes aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales. La Direction de la déontologie a procédé à des contrôles concernant le traitement des personnes emmenées, retenues ou gardées à vue dans des locaux de la Police nationale et les mesures prises pour respecter et garantir les droits de ces personnes. Au terme d’une enquête disciplinaire, elle prononce des sanctions en vertu des dispositions du Décret du Conseil des ministres no 750 du 16 septembre 2015 portant approbation du Règlement de la Police nationale.

159.La loi organique no 70/2014 habilite le Service des affaires internes et des plaintes à ouvrir une enquête administrative, en vertu du Code de procédure administrative, ou une enquête pénale, en vertu du Code pénal et du Code de procédure pénale. Quand un fonctionnaire de police est suspecté d’une violation constituant une infraction pénale, l’affaire est transmise au parquet qui ouvre une procédure contre le fonctionnaire mis en cause. Si l’infraction présumée est d’ordre administratif, les conclusions de l’enquête sont dressées au service concerné de la Police nationale qui ouvre une enquête disciplinaire et prononce, le cas échéant, une sanction disciplinaire.

160.Le Service des affaires internes et des plaintes ouvre une enquête administrative ou pénale en vertu des textes susmentionnés sur réception de plaintes ou dénonciations de citoyens visant des comportements contraires à la déontologie reprochés à des policiers.

Réponse au paragraphe 21 des observations finales

161.La Police nationale s’emploie en permanence à éviter que des personnes emmenées, retenues ou gardées à vue dans des locaux de police n’y subissent des actes de torture ou des mauvais traitements de la part de fonctionnaires de police et pour veiller à ce que ces fonctionnaires exercent les attributions et responsabilité dont la loi les investit dans le strict respect de la légalité et des droits de l’homme. Divers arrêtés, circulaires, directives, instructions internes et autres documents ont été édictés à cet effet par le Directeur général de la Police nationale et diffusés aux services centraux et locaux de la Police nationale, notamment les suivants :

•Directive no 972 du 5 février 2014 sur la stricte application des lois, règlements et procédures opérationnelles normalisées régissant la garde à vue, le contrôle physique et le traitement des personnes gardées à vue ;

•Directive no 1947 du 12 mars 2014 sur l’exercice des attributions et responsabilités en stricte conformité avec les lois, règlements et procédures opérationnelles normalisées en respectant et garantissant les droits des personnes privées de liberté ;

•Directive no 4577/1 du 10 septembre 2014 sur les personnes placées en rétention et le respect des droits de ces personnes dans des locaux de la Police nationale ;

•Instruction interne sur la loi no 108/2014 et application des articles 109, 112 de la loi sur les personnes placées en rétention, leur traitement et leur enregistrement ;

•Directive no 4963 du 5 août 2015 sur l’exercice des attributions et responsabilités de la police en stricte conformité avec la loi et dans le respect des droits de l’homme ;

•Directive no 2687 du 10 juin 2016 sur l’exercice des fonctions et responsabilités légales de la police concernant la réception et le traitement des signalements émanant de citoyens et des plaintes concernant le traitement de personnes placées en rétention ;

•Directive no 4678/1 du 8 août 2016 sur une meilleure compréhension et application des règles et mesures de contrainte applicables aux détenus placés pour traitement dans un établissement de soins de santé et sur l’usage de la force dans ce cas ;

•Circulaire no 784 du 18 août 2016 sur la prévention des incidents graves pouvant impliquer des personnes présentant un trouble de la santé mentale ;

•Directive no 3931 du 19 mai 2017 sur la prévention et l’élimination des mauvais traitements/violences corporelles à l’encontre de personnes privées de liberté et la traduction en justice des fonctionnaires de police mis en cause ;

•Directive de mai 2018 sur l’application des règles et procédures normalisées régissant l’enregistrement et la gestion électroniques des données relatives aux personnes emmenées, retenues ou gardées à vue ;

•Directive no 4353 du 30 mai 2018 sur le traitement des personnes retenues dans des locaux de police et le respect de leurs droits durant leur interrogatoire ;

•Directive no 7213/1 du 26 septembre 2018 sur l’application des règles et procédures normalisées régissant le placement en rétention et le traitement des personnes retenues dans des locaux de la police ;

•Directive no 3582 du 2 mai 2019 sur l’application des règles et procédures normalisées régissant le traitement et la sécurité des personnes retenues ou gardées à vue dans des locaux de la police ;

•Directive no 5669/2 du 15 août 2019 sur le respect des droits de l’homme en cas d’usage de la force dans l’exercice des attributions et responsabilités légales de la Police nationale ;

•Circulaire no 5126 du 15 août 2019 sur le respect des droits des minorités et communautés nationales et sur la prévention et l’élimination des comportements discriminatoires qui portent atteinte à leur dignité ;

•Circulaire no 6104/3 du 2 septembre 2019 sur l’examen du rapport du CPT et la mise en œuvre des recommandations y figurant relatives au respect et à la garantie des droits des personnes privées de liberté dans des locaux de la Police nationale ;

•Circulaire no 278/1 du 15 janvier 2020 sur la bonne application de la loi et le respect des droits de la personne, en particulier de l’enfant, durant les actes de procédure effectués par des fonctionnaires de la Police nationale ;

•Directive no 1449/2 du 2 mars 2020 sur l’application des règles et procédures normalisées concernant le traitement et la sécurité des personnes placées en rétention, ou en garde à vue dans des locaux de la Police nationale.

162.Le Parquet général, organe indépendant, traite et suit à titre prioritaire les allégations dénonçant des actes de torture ou des mauvais traitements de la part de policiers ou des actes arbitraires imputés à des agents d’autres organes chargés de l’application des lois.

163.Au sujet de la prévention des mauvais traitements en milieu pénitentiaire, par un arrêté en date de mai 2019 le Directeur général de l’Administration pénitentiaire a approuvé le programme d’inspection générale au titre duquel les établissements pénitentiaires et les inspecteurs sont tenus de procéder à des inspections approfondies pour évaluer le respect des normes régissant le traitement et le respect des droits des détenus, en particulier, ainsi que de définir des objectifs à atteindre concernant la sécurité et la réadaptation, la gestion des ressources humaines, la formation et la motivation du personnel.

164.Les enquêtes sur des mauvais traitements de la part de membres du personnel pénitentiaire sont menées par le Service de contrôle interne des établissements pénitentiaires, qui relève du Ministre de la justice. Outre ce mécanisme interne, les allégations de mauvais traitements reprochés à des agents pénitentiaires peuvent être communiquées pour examen au Bureau de l’Avocat du peuple, agissant en tant que Mécanisme national pour la prévention de la torture, ainsi qu’à des organisations de la société civile. Les cas de mauvais traitements présumés par des agents pénitentiaires sont signalés au parquet, qui détermine s’il y a lieu de procéder à des investigations supplémentaires pour éclaircir l’affaire. Sur la période 2014‑juillet 2020, les agents du Service des affaires internes ont reçu et traité 8 091 plaintes ou signalements, dont 127 (1,6 % du total) concernaient des violences ou mauvais traitements durant la rétention ou la garde à vue dans des locaux de la Police nationale.

165.Le système pénitentiaire est soumis à une surveillance continue par les plus hautes autorités ainsi que par des entités indépendantes, dont :

•Le Comité pour la prévention de la torture (CPT) ;

•Le Bureau de l’Avocat du peuple (Médiateur) ;

•Le Comité Helsinki albanais.

166.Dans chacun des rapports publiés par ces entités est évaluée l’évolution de la situation dans le système pénitentiaire en ce qui concerne l’application des normes juridiques relatives au respect des droits et au traitement des détenus, en particulier :

•Accès rapide du CPT à tous les établissements pour des visites avec ou sans préavis ;

•Accès assuré pour la conduite d’entretiens en privé avec des détenus ;

•Accès à toutes les informations requises.

167.Le Bureau de l’Avocat du peuple procède à des inspections périodiques dans les établissements pénitentiaires et établit un rapport contenant ses constatations à l’issue de chacune. Il peut aussi mener des inspections à distance en sollicitant et recueillant des données et effectuer une visite sur place au titre d’un cas particulier (en réponse à une plainte qui lui a été adressée) ou d’une question d’intérêt général (analyse des cas de décès en prison, par exemple). Le Commissaire à la protection contre la discrimination procède lui aussi à des inspections et vérifications.

168.Aucun cas de mauvais traitements en milieu pénitentiaire n’a été signalé. Lors de sa visite de 2018 en Albanie, le CPT a constaté qu’aucun agent pénitentiaire n’avait été accusé de torture ou de violence et que l’Administration pénitentiaire avait déployé de gros efforts pour réduire le plus possible les violences entre détenus.

Réponse au paragraphe 22 des observations finales

169.Toutes les personnes retenues ou gardées à vue en vertu des dispositions du Code de procédure pénale sont placées dans les cellules de sûreté des services de police locaux, et l’existence de ces cellules est connue de la communauté, des avocats, des organisations de la société civile qui défendent les droits de l’homme, du Parquet général et des parquets des tribunaux de tous les degrés ainsi que du Ministère de la justice. La personne gardée à vue dans des locaux de la Police nationale y reste jusqu’à ce que le juge ait statué sur l’opportunité de prendre une mesure de sûreté à son égard. Une fois la décision rendue, la personne est soit libérée, soit transférée dans un établissement pénitentiaire relevant du Ministère de la justice.

170.La loi no 81/2020 sur les droits et le traitement des détenus (condamnés et avant jugement) distingue expressément les catégories suivantes d’établissements :

•Les établissements : a) pour adultes condamnés ; b) pour mineurs et jeunes condamnés ; c) pour femmes ; d) pour détenus avant jugement ; e) pour l’hospitalisation de détenus ;

•Les établissements de soins de santé dans lesquels des personnes sont placées sur décision d’un tribunal pour y recevoir des soins médicaux obligatoires ;

•Les établissements pénitentiaires sont classés comme suit selon le degré de sécurité : a) haute sécurité ; b) sécurité moyenne ; c) sécurité minimale ; d) ouverts. Le Ministre de la justice est seul habilité à décider de créer, classer ou fermer un établissement où des personnes sont placées pour purger une peine d’emprisonnement ou autre.

171.Le Règlement intérieur des établissements pénitentiaires appliquant le régime spécial de haute sécurité a été approuvé par l’arrêté no 380 du 19 juillet 2019 du Ministre de la justice.

Réponse au paragraphe 23 des observations finales

172.Des sessions de formation sur les règles et les procédures normalisées de traitement des personnes gardées à vue dans des locaux de la police ont été organisées à l’intention des fonctionnaires de la Police nationale. Elles ont porté en particulier sur : l’accès à un avocat ; la fourniture de soins médicaux ; la notification de leurs droits aux personnes gardées à vue ; la notification aux membres de la famille de la garde à vue et du lieu de la garde à vue ; l’alimentation ; les conditions et les normes du cadre dans lequel ces catégories de personnes sont gardées à vue et traitées ; le droit de déposer une requête ou une plainte concernant la manière dont les policiers les traitent et se comportent à leur égard. Des formations spécialisées sont organisées à l’Académie de la sécurité pour les agents et les cadres des services locaux de police au titre du programme annuel de formation de la Police nationale.

173.L’arrêté no 763 du 27 septembre 2011 du Directeur général de la police a édicté le Manuel pour le traitement des personnes gardées à vue dans des locaux de la police, lequel a été révisé et refondu par l’arrêté no 440/3 du 27 avril 2017 portant approbation de la procédure normalisée concernant le traitement et la sécurité des personnes gardées à vue dans des locaux de la police ainsi que le recueil et le suivi de leurs requêtes ou plaintes. L’arrêté no 308 du 31 mars 2016 a approuvé les règles techniques relatives au placement en rétention par la police.

174.La Police nationale organise annuellement des sessions de formation pour les fonctionnaires de police des services locaux et des sessions de formation spécialisée pour les agents de base et les cadres, les agents de la patrouille générale et de la police routière, les auxiliaires spécialisés de la police de proximité, les agents des services de répression de la criminalité ; ces activités portent sur les droits de l’homme et les libertés fondamentales, en particulier le respect des personnes durant leur rétention ou leur garde à vue et leur traitement dans des locaux de la Police nationale. Des formations spécialisées ont été consacrées aux droits des personnes privées de liberté dans des locaux de la Police nationale et à l’application du Manuel précité.

175.Les sessions de formation portent sur les instruments internationaux, la Constitution, le Code de procédure pénale, la loi no 108/2014 sur la Police nationale, d’autres lois, le Manuel sur le traitement et la sécurité des personnes détenues dans les cellules de sûreté de la police, sur les Règles et procédures normalisées pour la saisie et la gestion dans le système ADAM des données relatives aux personnes retenues ou gardées à vue, sur les définitions juridiques liées à la rétention, les conditions du placement en rétention et le traitement des personnes emmenées, retenues, ou gardées à vue par la police, sur la procédure opérationnelle normalisée. Une formation concernant le Règlement de la Police nationale et le Code de déontologie de la police est dispensée à tous les fonctionnaires de police des services centraux et locaux de police.

176.La police coopère avec le Bureau de l’Avocat du peuple, qui effectue des inspections chaque année, ses rapports d’inspection étant remis aux services centraux et locaux de police inspectés qui les analysent pour action. Les services inspectés adressent à l’Avocat du peuple leur réponse à ses recommandations. Des réunions entre le Bureau de l’Avocat du peuple et de hauts responsables de la Police nationale sont organisées pour renforcer la coopération et promouvoir ainsi le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales par la Police nationale dans l’exercice de ses fonctions, l’application des recommandations de l’Avocat du peuple et le traitement des plaintes contre des violations des droits de l’homme par la police, entre autres. Le Bureau de l’Avocat du peuple organise des ateliers et des tables rondes sur les normes relatives aux services de santé pour les personnes privées de liberté dans des locaux de police et il effectue des visites de contrôle dans les services de la Police nationale.

Réponse au paragraphe 23 des observations finales

177.Les réformes majeures intervenues dans le système pénitentiaire sur la période 2014‑2020 ont abouti à l’adoption de la nouvelle loi sur le traitement des détenus (condamnés et avant jugement), en 2020, et du Plan d’action 2019-2022. La formation du personnel des établissements pour peine et de détention avant jugement demeure une priorité majeure de la Direction générale de l’Administration pénitentiaire. Les programmes, manuels et procédures normalisées permettent de diffuser des informations et connaissances sur le comportement professionnel, la prévention des mauvais traitements et de la violence, le respect des droits des personnes en conflit avec la loi et de leur dignité humaine.

178.Sur cette période les projets ci-après ont été menés dans le système pénitentiaire :

•Projets de jumelage ;

•Mise en œuvre de l’instrument de facilité horizontale (Phase 2) ;

•Prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent ;

•Renforcement des capacités du personnel qui travaille avec les mineurs.

179.Ces projets et les formations organisées par le Centre de formation de l’Administration pénitentiaire ainsi que celles coorganisées avec l’Académie de sécurité ont permis d’améliorer les aptitudes du personnel et les services aux personnes traitées.

180.Des formations continues sont organisées chaque année. En 2019, 2 042personnes ont été formées (45% de l’effectif total), dont 361agents de rang intermédiaire des équipes multidisciplinaires, 1 516agents de base, 27cadres supérieurs et 138agents des équipes multidisciplinaires. Les agents qui travaillent avec les mineurs ont suivi une formation sur le Code de justice pénale de mineurs.

181.Les programmes de formation des membres du personnel de l’Administration pénitentiaire, en particulier la formation initiale au recrutement, ont été améliorés avec le soutien du Conseil de l’Europe au titre de ses projets d’aide aux Balkans occidentaux et à la Turquie (phases I et II).

182.L’Académie de sécurité héberge les nouvelles recrues qui y reçoivent leur formation initiale portant, entre autres thèmes, sur les droits des détenus, la prévention de la violence, la gestion des incidents et le traitement des groupes vulnérables. S’y ajoute une formation en cours d’emploi que les agents suivent pour répondre aux besoins mis en évidence par l’évaluation de leur comportement professionnel.

183.Le Plan d’action pour le système pénitentiaire 2020-2022 prévoit de renforcer comme suit la formation:

•Révision des modules de formation initiale et de formation en cours d’emploi portant en particulier sur le Code de déontologie, la santé et les premiers secours, l’usage de la force et des moyens de contrainte physique, certains aspects de la gestion, la gestion de crise, l’abus de substances et la toxicomanie ;

•Formation sur les besoins spécifiques des femmes détenues et la gestion des prisons pour femmes ;

•Formation pour le personnel des prisons à haut risque de violence.

184.Les agents des établissements de détention pour peine et de détention avant jugement suivent une formation sur le signalement des actes de violence et de torture et la conduite des investigations y relatives. Les membres des services de santé et les agents pénitentiaires des établissements de détention avant jugement procèdent à un examen complet de tout nouveau détenu admis dans leur établissement et s’ils constatent des marques de violence ils adressent immédiatement un signalement au directeur de l’établissement et au procureur. La Direction générale de l’Administration pénitentiaire a organisé des sessions de formation sur le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture (Protocole d’Istanbul) en coopération avec des partenaires et organisations non gouvernementales œuvrant en faveur des droits de l’homme.

185.La Direction générale de l’Administration pénitentiaire dispense périodiquement aux membres de son personnel de sécurité, de ses services civils et de ses services de santé une formation sur le Protocole d’Istanbul, en particulier sur la manière de documenter les cas. Le programme officiel de formation des membres du personnel de sécurité de rang inférieur comporte un module sur les concepts liés à la torture et la prévention de ce phénomène, élaboré par l’Administration pénitentiaire. En coopération avec le Centre albanais pour la réadaptation des victimes de torture et de traumatismes, la Direction générale met en œuvre un programme de prévention de la torture et de la violence en milieu pénitentiaire.

186.Cette coopération avec le Centre albanais pour la réadaptation des victimes de torture et de traumatismes a pour objet d’aider à traiter avec plus d’humanité dans la pratique les personnes en conflit avec la loi, de renforcer l’aptitude des cadres de rang intermédiaire des équipes multidisciplinaires du système pénitentiaire à appliquer le Protocole d’Istanbul, d’organiser des ateliers de formation sur les procédures de documentation efficace des cas de mauvais traitements, conformément au Protocole d’Istanbul et aux normes du Comité pour la prévention de la torture, et d’échanger des données d’expériences avec les pays de la région dans le cadre de visites d’étude.

Réponse au paragraphe 23 b) des observations finales

187.La législation portant réforme de la justice a rendu obligatoire la formation continue des procureurs et des membres de la police judiciaire. La loi no 96/2016 sur le statut des juges et des procureurs en Albanie dispose qu’un magistrat a le droit et l’obligation de participer à des programmes de formation continue, de proposer des sujets de formation et de coopérer avec le Conseil des procureurs en vue d’améliorer les programmes de formation. La formation continue est organisée par l’École de la magistrature ou par toute institution de formation nationale ou internationale agréée par le Conseil des procureurs.

188.Les officiers de police judiciaire sont tenus de suivre une formation continue, comme le dispose l’article 28 de la loi no 25/2019 sur l’organisation et le fonctionnement de la police judiciaire. Des projets ou missions d’assistance internationale, dont EURALIUS, PAMECA et OPDAT, ont grandement aidé le Parquet général à renforcer les capacités.

189.L’École de la magistrature organise à l’intention des juges, des procureurs et des candidats à la magistrature des sessions périodiques de formation continue sur : le processus pénal ; le Code de procédure pénale ; la victime dans le processus pénal ; la traite des êtres humains ; la violence intrafamiliale ; la violence fondée sur le genre.

Réponse au paragraphe 25 des observations finales

190.La loi no 144 du 2 mai 2013 portant modifications du Code pénal a introduit une distinction entre le meurtre commis par vengeance et le meurtre lié à une reprise de sang (vendetta) :

•Son article 78 dispose : Le meurtre avec préméditation est passible de quinze à vingt‑cinq ans d’emprisonnement. Le meurtre commis par intérêt ou vengeance est passible d’une peine allant de vingt ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité ;

•Son article 78/a : Le meurtre commis au motif d’une reprise de sang est passible d’une peine allant de trente ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité.

191.Adopté en 2012, le Plan d’action sur la prévention, la dénonciation, la documentation et la répression des crimes motivés par la vengeance ou la reprise de sang a pour objet de gérer, contrôler et coordonner l’activité des services chargés de prévenir et réprimer ces crimes.

192.Les buts suivants sont assignés au Plan d’action :

•Assurer une étroite coopération entre les autorités locales et les organisations à but non lucratif en vue de favoriser la réconciliation entre les parties à une querelle ancestrale pour en finir avec les crimes motivés par la vengeance ou la reprise de sang ;

•Renforcer la coopération avec les parquets en vue d’accélérer le déroulement des enquêtes sur ces crimes et la traduction en justice de leurs auteurs ;

•Prendre un ensemble de mesures, en particulier pour la prévention des meurtres motivés par une reprise de sang en vue de mettre fin au cycle des représailles ;

•Coopérer davantage avec les directions de l’éducation et les écoles pour inculquer un esprit de tolérance à la nouvelle génération aux fins de la prévention de ce crime ;

•La Police nationale tient une base de données sur l’infraction pénale de meurtre motivé par une reprise de sang (art. 78/a du Code pénal).

Année

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Nombre de cas

7

3

4

0

1

1

1

0

1

193.Sur la période 2013-2020 les services de la Police nationale ont régulièrement organisé des sessions de sensibilisation au phénomène de la reprise de sang, auxquelles ont participé des représentants des autorités locales et d’organisations sans but lucratif.

194.La Direction générale de la Police nationale a mis en place une base de données dans laquelle sont enregistrées toutes les familles parties à une querelle ancestrale et a défini des procédures de travail normalisées concernant l’identification et l’enregistrement dans cette base de données des personnes impliquées dans des infractions pénales motivées par une vendetta. Il en ressort que l’Albanie compte 75 familles (159 personnes au total, dont 25 enfants) qui en étaient réduites à vivre dans le confinement, dont 15 (soit 56 personnes au total) ont fini par quitter le pays.

Réponse au paragraphe 26 des observations finales

195.Des mesures ont été prises pour que tous les agents de la police pénitentiaire, y compris les membres des groupes d’intervention, portent sur leur lieu de travail l’uniforme pénitentiaire pourvu des insignes indiquant leur nom, grade et fonction conformément au Décret du Conseil des ministres no 463 du 6 mai 2009 relatif à l’uniforme des membres du personnel pénitentiaire (couleur et insignes).

196.Tous les agents employés dans un établissement pénitentiaire sont tenus de porter leur uniforme réglementaire pourvu des insignes indiquant leur nom, grade et fonction dans les quartiers où résident les détenus et en dehors ainsi que hors de l’enceinte de l’établissement quand ils escortent un détenu. La Direction générale de l’Administration pénitentiaire a adopté une procédure selon laquelle chaque cas d’usage de la force doit être consigné dans un procès-verbal normalisé à transmettre au directeur de l’établissement.

197.La loi sur le traitement et les droits des détenus (condamnés et avant jugement) modifiée en 2020, dispose que l’usage de la force est une mesure de dernier ressort appliquée en cas d’absolue nécessité et avec autant de retenue que possible ; cette loi fixe en outre les règles concernant la mise à l’isolement.

198.Dans son rapport sur la visite qu’il a effectuée en Albanie en 2018, le Comité pour la prévention de la torture a indiqué qu’il n’avait été saisi d’aucune allégation récente de mauvais traitements physiques infligés à des détenus par des membres du personnel pénitentiaire dans les établissements visités et que le personnel s’employait activement à réduire autant que possible les violences entre détenus.

Réponse au paragraphe 27 des observations finales

199.Comme exposé plus haut dans la réponse au paragraphe 14 des observations finales, la loi no 35/2017 de 2017 portant modifications du Code de procédure pénale a renforcé les droits et le statut des victimes d’infractions pénales. Son article 61 dispose qu’une personne qui a subi un préjudice du fait d’une infraction pénale, ou ses héritiers, peut se constituer partie civile dans la procédure pénale engagée contre l’accusé ou la personne susceptible d’être tenue de payer des dommages et intérêts pour réclamer la restitution d’un bien et la réparation du préjudice.

Réponse au paragraphe 28 des observations finales

200.Conformément à l’arrêté no 251 du Ministre de l’intérieur du 15 février 2008 sur la compilation des statistiques de la criminalité, qui prévoit la collecte de données spécifiques sur la violence intrafamiliale selon un format normalisé, le Ministère de l’intérieur compile de telles statistiques. L’arrêté no 1531 du 24 octobre 2014 du Directeur général de la Police nationale sur la compilation des statistiques de la criminalité introduit une nouvelle rubrique couvrant l’infraction pénale de violence intrafamiliale visée à l’article 130/a du Code pénal, le formulaire no 16 étant modifié pour couvrir les faits relevant dudit article.

201.Un système d’enregistrement en ligne des cas de violence intrafamiliale est en place depuis 2014 au niveau de la municipalité au titre d’une coopération entre le Ministère de la santé et de la protection sociale et le Programme des Nations Unies pour le développement. Chaque municipalité est dotée d’un coordonnateur local de la lutte contre cette violence qui est chargé de collecter des données, y compris sur l’auteur des violences, dans les cas avérés que traite le mécanisme local d’orientation, et d’en assurer le suivi. Le Ministère a formé les coordonnateurs locaux à cette fin et continue à renforcer leurs aptitudes.

202.Ce système permet d’enregistrer chaque cas de violence et d’assurer le suivi du processus. La collecte des données sur la violence intrafamiliale et la violence fondée sur le genre relève du souci de transparence au niveau national. Ces données sont utilisées pour la formation des professionnels et l’action de sensibilisation à ces phénomènes, ainsi que pour la définition de moyens adaptés de les combattre. Elles sont diffusées au niveau national, notamment dans des publications de l’Institut albanais de la statistique (INSTAT), par Open Data Albania et dans l’annuaire statistique du Ministère de la justice. Ces données sont accessibles dans le respect des règles de confidentialité régissant la protection des données personnelles des victimes, que garantit la loi no 119/2014 sur le droit à l’information.