Nations Unies

CERD/C/DNK/CO/22-24

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

1er février 2022

Français

Original : anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport du Danemark valant vingt-deuxième à vingt-quatrième rapports périodiques *

1.Le Comité a examiné le rapport du Danemark valant vingt-deuxième à vingt‑quatrième rapports périodiques, que l’État partie lui a présenté lorsqu’il l’a rencontré pour la seizième fois, à ses 2849e et 2850e séances, les 23 et 24 novembre 2021. À sa 2859e séance, le 30 novembre 2021, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie valant vingt-deuxième à vingt-quatrième rapports périodiques. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie et la remercie pour les informations qu’elle lui a fournies durant l’examen du rapport et pour les renseignements complémentaires qu’elle lui a transmis par écrit après le dialogue.

B.Aspects positifs

3.Le Comité salue l’adoption par l’État partie des mesures générales ci-après :

a)L’allocation de 26 millions de couronnes danoises (environ 3,5 millions d’euros) sur quatre ans à des initiatives visant les Groenlandais vulnérables au Danemark, et de 12,3 millions de couronnes danoises (environ 1,6 million d’euros) aux maisons du Groenland (2019), dans le but d’améliorer les services d’inclusion et de sensibilisation pour les Groenlandais qui arrivent au Danemark ;

b)La stratégie nationale de lutte contre le harcèlement, notamment pour des motifs liés à la nationalité, à l’appartenance ethnique et à la langue, au Groenland (2019) ;

c)La campagne de lutte contre les discours de haine menée dans les îles Féroé (2018) ;

d)L’accord conclu avec les partenaires sociaux sur plus de 50 initiatives visant à améliorer les perspectives d’emploi et d’intégration dans la société des réfugiés et des personnes ayant fait l’objet d’un regroupement familial (2016) ;

e)L’élaboration d’un plan national de lutte contre l’antisémitisme ;

C.Préoccupations et recommandations

Collecte des données

4.Le Comité note que selon l’État partie, la collecte d’informations sur l’appartenance ethnique ne présente aucun intérêt, mais il demeure préoccupé par le fait que l’absence de données sur l’appartenance ethnique des personnes résidant au Danemark empêche d’évaluer avec précision les progrès que l’État partie a accomplis pour que tous les groupes exercent, dans des conditions d’égalité et sans discrimination aucune, les droits protégés par la Convention, ainsi que les efforts déployés pour élaborer des politiques publiques efficaces et conformes à la Convention (art. 1er et 2).

5.Le Comité recommande une nouvelle fois à l’État partie de réviser son système de collecte de données de façon à y faire figurer l’appartenance ethnique, compte tenu des dispositions de l’article premier de la Convention et des paragraphes 10 à 12 des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention.

La Convention dans le droit interne

6.Le Comité relève que l’État partie affirme que, même si elle n’a pas été intégrée au droit interne, la Convention est une source de droit pertinente et valable au Danemark, mais il note avec préoccupation qu’il y a très peu d’exemples d’affaires dans lesquelles la Convention a été appliquée par les tribunaux nationaux. Le Comité n’est pas convaincu par le raisonnement de l’État partie selon lequel l’incorporation de la Convention dans le droit interne risque de se traduire par un transfert des pouvoirs du Parlement et du Gouvernement aux tribunaux (art. 2).

7.Le Comité recommande à l’État partie d’incorporer pleinement les dispositions de la Convention dans son ordre juridique interne . Il lui recommande également de prendre des mesures pour faire connaître les dispositions de la Convention aux juges, aux procureurs, aux avocats et aux membres des forces de l’ordre, et de former ceux-ci à ces dispositions, de manière que ces dispositions puissent être plus facilement invoquées devant les tribunaux nationaux et appliquées par ces tribunaux . Le Comité recommande en outre à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des informations actualisées sur le nombre d’affaires ou de décisions dans lesquelles les tribunaux nationaux ont invoqué ou appliqué la Convention, y compris à des fins d’interprétation .

Application des dispositions contre la discrimination raciale et évaluation des politiques

8.Le Comité relève avec préoccupation que bien qu’on ait signalé une augmentation des actes de discrimination raciale visant les personnes issues de minorités ethniques dans différentes sphères de la société danoise, l’État partie n’envisage pas d’élaborer un plan d’action global contre le racisme comme le lui avait recommandé le Comité dans ses précédentes observations finales. Le Comité s’inquiète également de la différence entre le nombre de cas de discrimination raciale enregistrés officiellement et le nombre, beaucoup plus élevé, de cas signalés par des personnes issues de minorités ethniques dans le cadre d’enquêtes. Le Comité constate en outre avec préoccupation que l’État partie n’a pas étudié l’ensemble des effets des politiques visant à éliminer la discrimination raciale (art. 2, 4 et 6).

9. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De redoubler d’efforts pour prévenir et combattre fermement les actes de discrimination raciale dans les différents domaines de la vie, en particulier en élaborant et en mettant en œuvre un plan d’action global visant à lutter contre toutes les formes de discrimination raciale, y compris toutes ses formes croisées, et à éliminer toute discrimination structurelle potentielle, en coopération avec les communautés concernées  ;

b) De mener des travaux de recherche sur les raisons qui expliquent l’écart important entre le nombre de cas de discrimination raciale officiellement signalés et le nombre de cas signalés par des personnes issues d’une minorité ethnique  ; de redoubler d’efforts pour faire connaître la législation nationale relative à la discrimination raciale et faciliter l’accès des victimes à des voies de recours  ; et de prendre des mesures pour mettre en place un mécanisme intégrant différents types d’informations collectées par les organismes et autorités compétents de l’État partie afin de pouvoir recenser facilement le nombre de violations des lois interdisant la discrimination raciale, et de veiller à ce que ces données soient contrôlées et analysées régulièrement .

Utilisation des termes « occidental » et « non occidental »

10.Le Comité note avec préoccupation que l’emploi dans la législation et les politiques de l’État partie des termes « occidental » et « non occidental » sans aucune raison valable peut conduire à la marginalisation et à la stigmatisation des personnes classées comme « non occidentales » et entraîner une distinction entre ceux qui sont considérés comme de « vrais Danois » et les « autres » (art. 2).

11. Le Comité recommande à l’État partie de cesser d’employer les termes «  occidental  » et «  non occidental  » dans sa politique et sa législation, et de leur préférer des termes qui ne risquent pas de faire naître une distinction susceptible d’entraîner la stigmatisation ou la marginalisation d’un groupe de personnes ou une discrimination indirecte à leur égard .

Plan relatif aux « sociétés parallèles »

12.Le Comité relève avec préoccupation que l’ensemble de lois précédemment connu sous le nom de « dispositions Ghetto » a des effets discriminatoires sur les minorités ethniques. Il note également avec préoccupation qu’en application de ces lois, les zones classées comme « vulnérables » qui satisfont à au moins deux des quatre critères socioéconomiques prévus mais pas au critère consistant à inclure au moins 50 % de résidents « non occidentaux » sont considérées comme des « sociétés parallèles » et se voient appliquer des règles plus strictes ; l’élément ethnique et racial discriminatoire ajouté à ces lois peut conduire à une stigmatisation dans divers domaines de la vie, tels que l’emploi, le logement et l’accès aux services (art. 3 et 5).

13. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De s’abstenir de se fonder sur le pourcentage d’immigrés et de leurs descendants originaires de pays «  non occidentaux  » dans une zone donnée pour appliquer des lois et des mesures plus strictes  ;

b) De réaliser un examen complet des effets des lois et des règlements adoptés dans le cadre de ses programmes de lutte contre les «  sociétés parallèles  » et de modifier ou d’abroger toutes les dispositions qui sont directement ou indirectement discriminatoires à l’égard de tout groupe visé par l’article 1 er (par . 1) de la Convention, notamment en ce qui concerne les droits au logement, à l’emploi, à l’éducation ou à l’égalité devant la loi .

Groenland

14.Le Comité note que le Parlement du Groenland a adopté en 2019 une stratégie contre le harcèlement, mais il constate avec préoccupation que le Groenland n’a fait aucun progrès pour ce qui est de voter une loi interdisant la discrimination raciale dans son ensemble. Il constate toujours avec préoccupation qu’il n’existe aucun organe compétent pour traiter les plaintes pour discrimination fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique (art. 2 et 5).

15. Le Comité recommande au Groenland d’adopter une loi d’ensemble interdisant la discrimination fondée sur tous les motifs énumérés à l’article 1 er (par . 1) de la Convention et concernant tous les domaines de la vie, et de mettre en place un mécanisme permettant de surveiller les discours de haine et de suivre les résultats de sa campagne contre le harcèlement .

Îles Féroé

16.Le Comité note qu’une campagne contre les discours de haine a été menée au niveau national, mais il s’inquiète de ce que les autorités des îles Féroé ont cessé de chercher à adopter une loi interdisant la discrimination raciale et prévoyant l’égalité de traitement sur le marché du travail. Il reste préoccupé par le fait qu’aucun progrès n’a été fait pour ce qui est de mettre en place une institution nationale des droits de l’homme dans les îles Féroé, en dépit des recommandations formulées en 2017 par un groupe de travail nommé par le Ministre des affaires étrangères et du commerce (art. 2 et 5).

17. Le Comité recommande aux autorités des îles Féroé de continuer à s’employer d’adopter une loi interdisant la discrimination et d’accélérer la création d’une institution nationale des droits de l’homme, en veillant à ce que le mandat de celle-ci englobe la discrimination raciale et soit conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) .

Crime et discours de haine

18.Le Comité note avec préoccupation qu’au Danemark, nombre de crimes et de discours de haine ne sont pas signalés et qu’il n’existe pas de mécanisme global chargé de collecter des données sur ces faits. Il est également préoccupé par l’écart entre le nombre de crimes de haine enregistrés par la police, le nombre de poursuites engagées et le nombre de déclarations de culpabilité prononcées dans les affaires où les tribunaux ont expressément appliqué l’article 81 (par. 6) du Code pénal. Le Comité relève également avec préoccupation que le Code pénal n’interdit pas expressément les organisations qui encouragent la discrimination raciale et la participation à de telles organisations. Il est en outre préoccupé par les informations persistantes selon lesquels des discours politiques alimentant les préjugés et la xénophobie seraient tenus dans l’État partie (art. 4).

19. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre des mesures pour lever les obstacles qui empêchent les victimes de signaler les crimes et les discours de haine, notamment en sensibilisant les personnes qui pourraient en être victimes à ce qui constitue un crime de haine et aux formes de discours haineux punissables par le droit pénal, ainsi qu’en les informant des recours qui leur sont ouverts, et en faisant en sorte que la population ait confiance en la justice et sache que les autorités compétentes ont la volonté d’enquêter sur les crimes et les discours de haine et de poursuivre et de punir les auteurs de tels faits  ;

b) De faire en sorte que toutes les infractions à motivation raciale, y compris celles dont les motivations sont multiples, fassent l’objet d’enquêtes efficaces et que les auteurs soient poursuivis, notamment en adoptant des mesures pratiques et concrètes et en examinant les lacunes qui peuvent exister en ce qui concerne les enquêtes, les poursuites et l’application de la législation contre les crimes de haine  ;

c) De mettre en place un système complet de collecte de données dans lequel les crimes et les discours de haine sont enregistrés séparément au moyen de données entièrement ventilées, notamment par catégorie d’infraction, type de motivation, groupe cible, suivi et issue des procédures judiciaires, compte tenu de la recommandation générale n o 35 (2013) du Comité sur la lutte contre les discours de haine raciale  ;

d) De veiller à ce que se poursuive le dialogue entre la police nationale danoise et les communautés les plus touchées par les crimes et les discours de haine et de prendre des mesures de suivi concrètes et régulières pour instaurer la confiance  ;

e) D’appliquer pleinement les dispositions de l’article 4 de la Convention, notamment en interdisant expressément les organisations et les activités de propagande qui incitent à la violence et à la discrimination raciale ou l’encouragent et en redoublant d’efforts pour fournir des données factuelles claires afin de contrer la propagande et de remédier aux fausses informations sur les questions liées aux politiques publiques .

Profilage racial

20.Le Comité note que les personnes issues de minorités ethniques ont plus de chances que leur arrestation n’aboutisse pas à une déclaration de culpabilité et que les chefs d’accusation portés contre eux soient abandonnées que les personnes d’origine danoise, ce qui peut s’expliquer par le fait que la police soupçonne plus facilement les personnes issues de minorités ethniques d’avoir commis une infraction. Il note avec préoccupation que le profilage racial n’est pas clairement interdit, qu’il n’existe pas de directives tendant à prévenir et à combattre le profilage racial à l’intention de la police et des autres agents des forces de l’ordre, que les autorités n’ont pas pris de mesures pour lutter contre le profilage racial, et que les policiers qui ne sont pas d’origine danoise sont peu nombreux, puisqu’ils ne représentent que 2,3 % des effectifs (art. 4).

21. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’inclure dans sa législation la définition et l’interdiction du profilage racial et de veiller à ce que soient mises à disposition de la police et des autres agents des forces de l’ordre des directives claires tendant à prévenir le profilage racial lors des contrôles de police, des contrôles d’identité et d’autres activités de la police  ;

b) De mettre en place un mécanisme d’enregistrement systématique de l’origine ethnique des personnes arrêtées afin d’obtenir des données statistiques sur le profilage ethnique, tout en veillant à ce qu’aucune règle relative à la protection des données ne soit violée  ;

c) De surveiller l’évolution du nombre de plaintes pour profilage ethnique déposées contre la police et d’autres organes chargés de faire respecter les lois et d’assurer un suivi efficace de ces plaintes  ;

d) De veiller à ce que des agents de police d’origine non danoise puissent travailler en première ligne afin de gagner en visibilité et de contribuer à réduire les pratiques potentielles de profilage racial inconscient .

Discrimination sur le marché du travail

22.Le Comité prend note des mesures que l’État partie a prises pour insérer les personnes issues de l’immigration et de minorités ethniques sur le marché du travail, mais il regrette de ne pas avoir reçu d’informations sur les mesures visant à améliorer l’insertion d’autres minorités, notamment des Roms. Le Comité regrette également l’absence de données statistiques officielles concernant les procédures judiciaires relatives à la discrimination dans l’emploi, qui pourraient fournir des indications sur une éventuelle discrimination sur le marché du travail (art. 5).

23.Le Comité formule à nouveau la recommandation qu’il avait faite à l’État partie dans ses précédentes observations finales d’étendre et de renforcer ses initiatives afin d’améliorer l’insertion des étrangers et des personnes issues de minorités, y compris des Roms, sur le marché du travail, et de combattre la discrimination structurelle dont ils peuvent être victimes dans ce domaine . Il recommande également à l’État partie de collecter des données sur les procédures judiciaires relatives à la discrimination sur le marché du travail afin d’être en mesure de bien comprendre la situation .

Services d’interprétation dans le système de soins de santé

24.Le Comité constate que l’État partie a mis en place un dispositif de certification des interprètes afin de garantir et d’améliorer la qualité des services d’interprétation fournis dans le système de soins de santé, et que des entreprises peuvent demander à faire office d’institutions de certification dans le cadre de ce dispositif. Toutefois, il s’inquiète des informations selon lesquelles l’accès à une interprétation de qualité dans les langues parlées par les réfugiés et les migrants reste limité dans le système de soins de santé, ce qui fait obstacle à l’exercice par les personnes concernées de leur droit à la santé (art. 5).

25.Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour que le nouveau dispositif de certification des interprètes soit mis en œuvre de manière à améliorer et à garantir la qualité des services d’interprétation dans le système de soins de santé pour les personnes qui en ont besoin . Il recommande en particulier à l’État partie de permettre aux réfugiés et aux migrants d’avoir accès à des interprètes qualifiés et correctement formés dans les langues qu’ils utilisent le plus fréquemment, et d’évaluer l’efficacité du dispositif .

Pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19)

26.Le Comité relève avec préoccupation que les personnes issues de communautés ethniques minoritaires dans l’État partie ont été plus vulnérables face à la maladie à coronavirus 2019 et plus touchées que les autres par la pandémie de COVID-19, tant du point de vue du nombre d’infections que de la gravité des effets de la maladie sur leur état de santé. Il note également avec inquiétude que, malgré les efforts de l’État partie, les taux de vaccination et de dépistage sont plus faibles chez ces personnes (art. 5).

27. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts ciblés pour protéger les minorités ethniques de la pandémie de COVID-19 et de ses effets, en particulier en augmentant le taux de vaccination et le nombre de tests de dépistage chez les personnes appartenant à des minorités ethniques, et en prenant des mesures pour renforcer la confiance qu’accordent ces personnes aux mesures sanitaires qui ont été mises en place pour faire face à la pandémie, notamment en faisant participer un large éventail de représentants de minorités à l’élaboration de ces mesures .

Situation des Roms

28.Le Comité note que l’État partie considère que les Roms bénéficient de son système de protection sociale dans des conditions d’égalité avec le reste de la population, mais il relève avec préoccupation que l’absence de statistiques ventilées par appartenance ethnique l’empêche de savoir dans quelle mesure les Roms exercent leurs droits économiques, sociaux et culturels, notamment dans le cadre du système de protection sociale de l’État partie. Il comprend bien que la disposition qui érige en infraction l’établissement de camps qualifiés de troubles à l’ordre public et le fait d’y vivre n’est pas liée à l’appartenance nationale ou ethnique, mais il prend note des informations selon lesquelles 453 des 459 personnes mises en examen en application de cette disposition au 1er juillet 2019 n’étaient pas des ressortissants danois (art. 2 et 5).

29.Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour déterminer dans quelle mesure les Roms exercent leurs droits économiques, sociaux et culturels dans des conditions d’égalité avec le reste de la population . Il lui recommande également de se fonder sur les résultats de cet examen pour concevoir, en étroite collaboration avec les membres de la communauté rom, une stratégie les concernant directement . Le Comité recommande en outre à l’État partie de faire en sorte que la disposition qui érige en infraction l’établissement de camps et le fait d’y vivre ne soit pas appliquée de manière discriminatoire .

Discrimination à l’égard des personnes d’ascendance africaine

30.Le Comité salue les activités que l’État partie mène et celles qu’il prévoit de mener pour sensibiliser la population à la traite des esclaves et faire connaître l’histoire coloniale du Danemark, notamment la rédaction, prévue pour 2022, d’un rapport sur les mesures propres à mieux faire connaître l’histoire coloniale du pays. Toutefois, il note avec préoccupation qu’en 2019, la majorité des personnes d’ascendance africaine qui ont répondu à une enquête menée par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne ont estimé avoir été victimes de discrimination dans l’État partie au cours des cinq années précédant l’enquête. Le Comité relève également avec préoccupation que l’État partie n’a pas communiqué d’informations sur l’ampleur de la discrimination et de l’exclusion sociale dont sont victimes les personnes d’ascendance africaine (art. 2 et 5).

31.Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce qu’une étude indépendante soit menée sur la situation des personnes d’ascendance africaine au Danemark et sur la discrimination dont elles font l’objet, dans le cadre d’un dialogue et d’une collaboration avec la communauté concernée, et de concevoir une stratégie et des mesures pour lutter contre la discrimination à l’égard des personnes d’ascendance africaine . Il lui recommande également de redoubler d’efforts afin de faire connaître l’histoire coloniale du Danemark . Le Comité recommande en outre à l’État partie de lui fournir des informations actualisées sur l’action menée pour faire connaître l’histoire coloniale du Danemark et sur les mesures concrètes prises .

Réfugiés et demandeurs d’asile

32.Le Comité note avec préoccupation que la loi autorisant la police à confisquer les objets de valeur des demandeurs d’asile peut avoir des effets préjudiciables sur la relation de ces personnes avec l’État danois et sur leurs perspectives d’intégration à long terme dans le pays. Il relève également avec inquiétude que l’État partie peut révoquer les permis de séjour des personnes originaires de Damas et du Rif-Damas qui ne bénéficient plus du statut de protection temporaire ou refuser de les prolonger, alors même que ces personnes pourraient courir des risques si elles retournent dans ces zones, ce qui pourrait constituer une violation du principe de non-refoulement. Le Comité est en outre préoccupé par les modifications récemment apportées à la loi danoise sur les étrangers (L 226), qui permet d’externaliser le traitement des demandes d’asile et la protection qui en découle à un pays tiers situé en dehors de l’Union européenne, et par les effets préjudiciables que ces modifications pourraient avoir sur la protection effective des réfugiés (art. 2 et 5).

33. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De réexaminer la loi qui autorise la police à confisquer les biens de valeur des demandeurs d’asile, étant donné qu’elle peut conduire à des violations du droit à la propriété des intéressés  ;

b) De revoir sa position consistant à considérer Damas et le Rif-Damas comme des zones sûres où peuvent être renvoyées les personnes dont le statut de protection temporaire a été révoqué ou dont la demande de prolongation du statut de protection temporaire a été refusée  ;

c) D’être conscient de ses obligations de protection des demandeurs d’asile au regard du droit international  ; et d’inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur les modifications apportées à la loi danoise sur les étrangers (L 226) concernant l’externalisation du traitement des demandes d’asile et de la protection qui en découle à un pays tiers situé en dehors de l’Union européenne .

Nationalité

34.Le Comité note avec préoccupation que, du fait du durcissement croissant des conditions d’obtention de la nationalité danoise, les jeunes qui sont nés et ont grandi dans l’État partie sont de moins en moins nombreux à obtenir la nationalité. Il s’inquiète qu’une telle situation puisse empêcher ces jeunes d’appartenir pleinement à la société danoise et de s’y identifier. Le Comité relève également avec préoccupation que les personnes ayant une dette impayée d’un montant supérieur à 400 euros du fait de sanctions prononcées contre elles ne peuvent acquérir la nationalité danoise, ce qui semble excessivement restrictif et disproportionné et peut désavantager les personnes qui font des études. Il est en outre préoccupé par les modifications apportées à la législation de l’État partie sur la nationalité, en application desquelles un enfant né d’un parent danois qui est entré ou séjourne illégalement dans une « zone de conflit » peut se voir refuser la nationalité danoise à sa naissance (art. 5).

35.Le Comité recommande à l’État partie de réexaminer les conditions d’obtention de la nationalité qui empêchent les personnes nées et ayant grandi dans l’État partie d’obtenir la nationalité, et d’en évaluer le caractère proportionné et les effets, en particulier sur les jeunes . Il recommande également à l’État partie de veiller à ce que les sanctions relatives aux dettes en matière de frais de scolarité ne fassent pas excessivement obstacle à l’obtention de la nationalité . Le Comité recommande en outre à l’État partie de réexaminer toute loi pouvant conduire à ce que les enfants dont les parents entrent ou séjournent illégalement dans une «  zone de conflit  » soient privés de nationalité, de telles dispositions pouvant créer des obstacles supplémentaires à l’intégration de ces enfants dans la société danoise .

Voies de recours

36.Le Comité note que le Conseil pour l’égalité de traitement a enquêté sur un total de 116 cas en 2019 et 2020, dont seulement 18 ont été retenus, et constate avec préoccupation que les victimes de discrimination raciale ne sont pas suffisamment informées de la possibilité de saisir le Conseil ou n’en ont pas la volonté. Il relève que l’État partie étudie les moyens d’améliorer l’accès à des interprètes qualifiés et dûment formés dans les langues les plus fréquemment utilisées par les réfugiés et les migrants dans le système judiciaire danois, mais il s’inquiète de ce que l’accès à ces services d’interprétation de qualité n’est actuellement pas garanti (art. 6).

37. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour informer la population de la possibilité de déposer plainte auprès du Conseil pour l’égalité de traitement, notamment en s’adressant aux victimes potentielles de discrimination raciale . Il lui recommande également d’accélérer ses efforts pour garantir l’accès à des interprètes qualifiés et correctement formés dans les langues les plus fréquemment utilisées par les réfugiés et les migrants dans son système judiciaire .

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

38. Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions intéressent directement les communautés qui peuvent faire l’objet de discrimination raciale, comme la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille .

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

39. À la lumière de sa recommandation générale n o 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, quand il applique la Convention . Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national .

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

40.À la lumière de la résolution 68/237 de l’Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour 2015-2024 et de la résolution 69/16 sur le programme d’activités de la Décennie, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et de mettre en œuvre un programme adapté de mesures et de politiques en collaboration avec des organisations et des personnes d’ascendance africaine . Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des renseignements précis sur les mesures concrètes qu’il aura adoptées dans ce cadre, compte tenu de sa recommandation générale n o 34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine .

Consultations avec la société civile

41. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’élargir le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales .

Diffusion d’information

42. Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également les observations finales du Comité qui s’y rapportent auprès de tous les organes de l’État chargés de la mise en œuvre de la Convention, y compris les municipalités, ainsi que de les publier sur le site Web du Ministère des affaires étrangères dans les langues officielles et les autres langues couramment utilisées, selon qu’il conviendra .

Suite donnée aux présentes observations finales

43. Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 19 b) (crimes et discours de haine), 27 (pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19)) et 31 (discrimination à l’égard des personnes d’ascendance africaine) .

Paragraphes d’importance particulière

44. Le Comité souhaite appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant dans les paragraphes 11 (utilisation des termes «  occidental  » et «  non occidental  » ), 13 b) (plan relatif aux «  sociétés parallèles  » ), 19 c) (crimes et discours de haine) et 21 a) (profilage racial), et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite .

Élaboration du prochain rapport périodique

45. Le Comité recommande à l’État partie de soumettre son rapport valant vingt ‑ cinquième à vingt-huitième rapports périodiques, d’ici au 8 janvier 2027, en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales . À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques .