Nations Unies

CCPR/C/LBR/CO/1

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

27 août 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits de l ’ homme

Observations finales concernant le rapport initial du Libéria *

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le rapport initial du Libéria (CCPR/C/LBR/1) à ses 3500e et 3501e séances (voir CCPR/C/SR.3500 et 3501), les 9 et 10 juillet 2018. À sa 3519e séance, le 23 juillet 2018, il a adopté les observations finales ci‑après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial du Libéria, attendu depuis onze ans, et les renseignements qu’il contient. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte d’engager un dialogue constructif avec la délégation de haut niveau de l’État partie au sujet des mesures prises depuis l’entrée en vigueur du Pacte pour appliquer les dispositions de cet instrument. Malgré leur soumission tardive, il remercie l’État partie des réponses écrites (CCPR/C/LBR/Q/1/Add.1) apportées à la liste de points (CCPR/C/LBR/Q/1), qui ont été complétées oralement par la délégation, ainsi que des renseignements supplémentaires donnés par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité constate avec satisfaction que l’élection présidentielle de décembre 2017 s’est bien déroulée et que la passation de pouvoir entre les dirigeants démocratiquement élus s’est faite de manière pacifique.

4.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption par l’État partie des lois ci-après :

a)La loi de 2005 relative à la Commission nationale indépendante des droits de l’homme ;

b)La loi de 2011 relative à la Commission de la réforme législative ;

c)La loi de 2016 relative à l’Autorité foncière libérienne.

5.Le Comité note aussi avec satisfaction que l’État partie a adhéré aux instruments internationaux ci-après :

a) La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2004 ;

b)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2004 ;

c)Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, en 2004 ;

d)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, en 2004 ;

e)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en 2004 ;

f)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2004 ;

g)Le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, en 2005 ;

h)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2012.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Cadre constitutionnel et juridique

6.Le Comité note que le système juridique de l’État partie est dualiste, mais constate avec préoccupation que les droits consacrés par le Pacte ne sont pas tous dûment incorporés dans le système juridique interne et ne peuvent donc pas être invoqués devant les tribunaux nationaux. Il relève également avec préoccupation qu’un certain nombre de dispositions de la Constitution, du droit législatif et du droit coutumier, notamment celles qui concernent les droits de propriété et l’acquisition de la nationalité, sont toujours incompatibles avec les dispositions du Pacte, et que des divergences persistent entre différentes sources du droit, notamment en ce qui concerne l’âge minimum du mariage, la polygamie et la transmission de la nationalité aux enfants (art. 2).

7. L ’ État partie devrait :

a) P rendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les dispositions du Pacte ont plein effet dans son système juridique interne de sorte qu ’ elles puissent être appliquées par les tribunaux nationaux ou invoquées devant ceux-ci ;

b) V eiller à ce que la Commission de la réforme législative procède sans délai à l ’ examen des dispositions de la Constitution, du droit législatif et du droit coutumier qui sont incompatibles avec le Pacte et harmonise la législation de l ’ État partie en vue de la rendre pleinement conforme au Pacte. Il devrait également envisager d ’ adhérer au premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte, qui établit un mécanisme d ’ examen des plaintes émanant de particuliers.

Commission nationale indépendante des droits de l’homme

8.Le Comité note que la Commission nationale indépendante des droits de l’homme a été accréditée en 2017 avec le statut A par l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme, mais reste préoccupé par : a) le sous-financement dont souffrirait la Commission et qui entraverait son fonctionnement ; b) les retards dans la nomination des commissaires ; c) l’expertise limitée de la Commission en matière d’enquêtes sur les violations des droits de l’homme (art. 2).

9. L ’ État partie devrait renforcer les ressources humaines et financières allouées à la Commission nationale indépendante des droits de l ’ homme pour lui permettre de s ’ acquitter efficacement de ses fonctions. Il devrait également veiller à ce que le processus de nomination des commissaires et du président soit rapide, inclusif et transparent. En outre, l ’ État partie est invité à solliciter l ’ assistance technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme pour renforcer la capacité de la Commission à enquêter sur les violations des droits de l ’ homme.

Impunité et violations passées des droits de l’homme

10.Le Comité se félicite du lancement, en 2013, du programme national « Palava Hut » (« Case à palabres »), qui vise à promouvoir et à consolider durablement la paix et l’harmonie dans tout le pays, mais regrette que l’État partie ait adopté très peu de mesures pour mettre en œuvre l’essentiel des recommandations formulées en 2009 par la Commission vérité et réconciliation. Il note avec préoccupation qu’aucun des auteurs présumés des violations flagrantes des droits de l’homme et des crimes de guerre mentionnés dans le rapport de la Commission n’a été traduit en justice et que certains de ces individus occupent ou ont occupé des postes officiels au sein de l’exécutif, y compris au Gouvernement. Il note également avec préoccupation qu’aucun programme complet de réparations n’a été mis en place pour les victimes. Il craint qu’une telle situation ne favorise un climat d’impunité et ne fasse obstacle à la justice transitionnelle. Il note que la délégation a indiqué que le nouveau Gouvernement avait l’intention de faire prochainement une déclaration sur les mesures qu’il envisage de prendre pour donner suite au rapport de la Commission vérité et réconciliation (art. 2, 6, 7 et 14).

11. L ’ État partie devrait, à titre prioritaire, mettre en place un processus d ’ établissement des responsabilités pour les violations graves des droits de l ’ homme et les crimes de guerre commis par le passé, en veillant à ce qu ’ il soit conforme aux normes internationales, notamment en ce qui concerne l ’ indépendance et l ’ expertise des magistrats, l ’ accès des victimes à la justice, les garanties d ’ une procédure régulière et d ’ un procès équitable et la protection des témoins. L ’ État partie devrait en particulier :

a) V eiller à ce que tous les auteurs présumés de violations graves des droits de l ’ homme et de crimes de guerre soient poursuivis de manière impartiale et, s ’ ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines proportionnées à la gravité de leurs actes, indépendamment de leur statut ou de toute législation nationale sur les immunités, et relever de ses fonctions officielles toute personne dont il est prouvé qu ’ elle a été impliquée dans des violations graves des droits de l ’ homme et des crimes de guerre ;

b) P rendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission vérité et réconciliation et envisager la création d ’ un organe doté de ressources suffisantes et composé de représentants du Gouvernement, de la Commission nationale indépendante des droits de l ’ homme et d ’ organisations de la société civile pour surveiller la mise en œuvre de ces recommandations ;

c) É laborer et mettre en œuvre un programme complet de réparations pour toutes les victimes de violations graves des droits de l ’ homme et de crimes de guerre ;

d) R edoubler d ’ efforts pour favoriser la réconciliation et préserver la paix, avec la participation des victimes et de leur famille ainsi que des organisations de la société civile qui cherchent à obtenir justice pour les crimes du passé.

État d’urgence

12.Le Comité a conscience de la gravité de la crise provoquée par le virus Ebola en août 2014, mais regrette que l’État partie n’ait pas informé les autres États parties au Pacte, par l’intermédiaire du Secrétaire général, des dispositions auxquelles il a dérogé pendant l’état d’urgence. Il est également préoccupé par les allégations selon lesquelles les mesures prises pendant cette période, en particulier en ce qui concerne les articles 12 et 19 du Pacte, n’étaient pas pleinement conformes à l’objet et à la portée du paragraphe 1 de l’article 4 du Pacte et à l’observation générale no 29 sur l’article 4 (Dérogations en période d’état d’urgence) (2011) du Comité, et les enquêtes menées sur les violations des droits de l’homme qui auraient été commises pendant l’état d’urgence n’étaient pas conformes aux normes internationales (art. 4, 6, 12 et 19).

13. L ’ État partie devrait prendre des mesures pour :

a) V eiller à ce que toute dérogation au Pacte soit conforme à l ’ article 4 et, à cette fin, élaborer des directives nationales relatives à l ’ application de l ’ état d ’ urgence ;

b) E nquêter effectivement sur toutes les allégations de violations des droits de l ’ homme commises pendant l ’ état d ’ urgence de 2014, en vue de traduire les auteurs de ces violations en justice et d ’ offrir aux victimes des recours utiles.

Définition du terrorisme

14.Le Comité est préoccupé par le caractère imprécis et trop large de la définition que donne du terrorisme le Code pénal de l’État partie, qui le définit comme un crime emportant la peine capitale et consistant à tenter de manière délibérée ou intentionnelle de blesser ou de tuer une autre personne ou un groupe de personnes. Il est préoccupé en particulier par le caractère vague de la terminologie utilisée pour définir l’élément intentionnel. Même s’il note qu’il n’y a eu aucune mise en accusation en application de la loi de 2008, il reste préoccupé par le risque d’abus que présente cette loi (art. 6, 9 et 14).

15. L ’ État partie devrait revoir les dispositions juridiques relatives au terrorisme pour faire en sorte que les actes de terrorisme soient définis de manière précise et stricte conformément aux normes internationales, afin que les dispositions législatives adoptées dans ce contexte visent uniquement les infractions qui constituent à l ’ évidence des actes de terrorisme. En outre, il devrait veiller à ce les personnes soupçonnées ou accusées de terrorisme ou d ’ une infraction connexe bénéficient de toutes les garanties légales et à ce que toute restriction de leurs droits ne soit pas arbitraire mais soit légale, nécessaire et proportionnée et fasse l ’ objet d ’ un contrôle juridictionnel effectif.

Non-discrimination

16.Le Comité note que le principe de non-discrimination est inscrit dans la Constitution, mais regrette qu’il n’existe pas de texte législatif complet garantissant son application effective. Il est en particulier préoccupé par les informations selon lesquelles les personnes appartenant à certains groupes, notamment les personnes vivant avec le VIH/sida, les personnes présentant des handicaps psychosociaux, les personnes ayant survécu à la maladie à virus Ebola et les personnes vivant avec l’albinisme se heurtent à la stigmatisation et à la discrimination de fait (art. 2 et 26).

17. L ’ État partie devrait :

a) A dopter une législation complète contre la discrimination qui comprenne une définition de toutes les formes de discrimination et une liste élargie des motifs de discrimination prohibés qui comprenne l ’ origine nationale ou ethnique, la religion, le handicap, l ’ orientation sexuelle et l ’ identité de genre et toute autre considération, et prévoir des recours utiles en cas de violation ;

b) M ener de vastes campagnes d ’ éducation et de sensibilisation qui promeuvent l ’ égalité, la tolérance et le respect de la diversité.

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

18.Le Comité est préoccupé par : a) l’incrimination des rapports sexuels consentis entre adultes de même sexe et les tentatives faites pour alourdir les peines encourues et interdire le mariage entre personnes de même sexe ; b) les informations selon lesquelles les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexes sont stigmatisés et se heurtent à une discrimination de facto dans la jouissance de différents droits en raison de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre. Il note également avec préoccupation que les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexes font l’objet de violences, de détentions arbitraires et d’abus d’autorité de la part de la police. Cette situation est exacerbée par le fait que ces violations des droits de l’homme, qu’elles soient infligées par des acteurs étatiques ou des acteurs non étatiques, ne sont pas toutes signalées et ne font pas l’objet d’enquêtes effectives. En outre, le Comité est préoccupé par les informations indiquant que les personnes et les associations qui militent en faveur des droits des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des intersexes font l’objet de harcèlement et de représailles (art. 2, 6, 7, 9, 20, 22 et 26).

19. Le Comité a conscience de la diversité des valeurs morales et des cultures dans le monde, mais rappelle que les lois et les pratiques des États doivent toujours être subordonnées aux principes d ’ universalité des droits de l ’ homme et de non ‑discrimination. L ’ État partie devrait, à titre prioritaire, dépénaliser les rapports sexuels consentis entre adultes de même sexe et refuser expressément toute forme de stigmatisation sociale, de discrimination ou de violence fondée sur l ’ orientation sexuelle ou l ’ identité de genre. Il devrait aussi :

a) S upprimer tout obstacle empêchant les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexes de jouir de leurs droits ;

b) F aciliter l ’ accès des victimes à la justice, notamment en renforçant la confiance entre les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexes et les autorités de l ’ État ;

c) V eiller à ce que tout acte de violence motivé par l ’ orientation sexuelle ou l ’ identité de genre de la victime fasse l ’ objet d ’ une enquête, de poursuites et de sanctions, et faire en sorte que les données concernant ces actes soien t systématiquement collectées ;

d) G arantir dans la pratique la sécurité et le droit à la liberté d ’ expression, de réunion et d ’ association des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des intersexes, ainsi que des militants et des organisations défendant leurs droits ;

e) M ener, en consultation avec les représentants des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des intersexes et les organisations de la société civile, des campagnes de sensibilisation portant sur la non-discrimination, l ’ inclusion et la diversité.

Égalité entre les sexes

20.Le Comité se félicite de l’élection, à deux reprises, d’une femme à la présidence du Libéria et de la nomination de deux femmes à la Cour suprême, et prend note des efforts que fait l’État partie pour promouvoir la participation des femmes à la vie politique, mais regrette que le projet de loi sur les mesures d’action positive, qui visait à créer 21 sièges à la Chambre des représentants pour les femmes, les jeunes et les personnes handicapées, n’ait pas été adopté. Il est également préoccupé par la sous-représentation des femmes dans les affaires publiques et aux postes de décision, y compris dans les juridictions de degré inférieur, et par le faible nombre de candidates aux élections passées, en particulier aux élections locales (art. 2, 3 et 26).

21. L ’ État partie devrait :

a) R edoubler d ’ efforts pour accroître la participation et la représentation des femmes dans les affaires publiques et aux postes de décision, en prenant également toutes les mesures nécessaires pour assurer l ’ adoption du projet de loi sur les mesures d ’ action positive ;

b) S upprimer tous les obstacles directs et indirects à la participation des femmes aux affaires publiques et à la prise de décision s , notamment en envisageant de supprimer les droits d ’ inscription pour les candidates et en introduisant des mesures temporaires spéciales ;

c) P rendre des mesures concrètes pour éradiquer les préjugés et les stéréotypes sexistes concernant les rôles et les responsabilités des hommes et des femmes dans la famille et dans la société.

Pratiques préjudiciables

22.Le Comité prend note du décret présidentiel de 2018 interdisant la pratique des mutilations génitales sur les filles de moins de 18 ans et sur les femmes adultes non consentantes, qui est mis en application pour un an. Il demeure toutefois vivement préoccupé par le fait que cette pratique, qui touche plus de la moitié des Libériennes, n’est toujours pas interdite par la loi. Il note également avec préoccupation que des sociétés secrètes contribuent à perpétuer la pratique des mutilations génitales féminines par leurs rites d’initiation, que des pratiques comme les ordalies et les meurtres rituels restent très répandues, et que les membres de sociétés secrètes qui commettent de tels actes restent impunis. Il note en outre avec préoccupation que les personnes qui tentent de se soustraire aux mutilations génitales féminines, les victimes de ces pratiques qui racontent ce qu’elles ont subi de la part des sociétés secrètes ou les personnes qui militent contre les mutilations génitales féminines sont victimes d’exclusion sociale, de menaces et de représailles et que la police ne prend pas les mesures nécessaires pour les protéger (art. 2, 3, 6, 7, 24 et 26).

23. L ’ État partie devrait :

a) A dopter sans plus tarder une législation incriminant toutes les formes de mutilations génitales féminines sans exception, et l ’ appliquer effectivement ;

b) P rendre toutes les mesures nécessaires pour éradiquer les pratiques préjudiciables, notamment les mutilations génitales féminines, les ordalies et les meurtres rituels, et veiller à ce que toutes les allégations faisant état de telles pratiques et tous les éléments portant à croire que de telles pratiques ont eu cours, y compris dans le cadre de sociétés secrètes, donnent lieu à des enquêtes effectives et que les auteurs présumés soient poursuivis et, s ’ ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines appropriées ;

c) R enforcer les programmes de sensibilisation et d ’ éducation aux effets discriminatoires et aux effets néfastes à long terme des mutilations génitales féminines, entre autres pratiques préjudiciables, en consultation avec les groupes de femmes et les organisations de la société civile concernées, et veiller à ce que les communautés où de telles pratiques sont répandues soient ciblées, afin de faire évoluer les mentalités ;

d) P rendre des mesures efficaces pour faciliter l ’ accès des victimes à la justice et protéger les victimes et leurs défenseurs contre les répercussions ou les représailles.

Violence sexiste

24.Le Comité note avec préoccupation qu’il n’existe pas de cadre juridique incriminant la violence familiale sous toutes ses formes, qui est répandue dans l’État partie, dont les premières victimes sont les femmes et les filles, et qui est perpétuée par de fortes traditions socioculturelles. Il constate également avec préoccupation que, malgré l’adoption de mesures contre la violence sexuelle fondée sur le genre, comme l’adoption de la loi sur le viol en 2005 et la création d’un tribunal spécial, le tribunal E, pour juger les affaires relatives à des infractions à caractère sexuel dans les comtés de Montserrado et de Nimba : a) la loi sur le viol n’incrimine pas le viol conjugal ; b) bien que le viol soit le deuxième crime grave le plus signalé au Libéria, le taux de poursuites et de condamnations reste faible ; c) différents facteurs, comme la stigmatisation sociale, la crainte de représailles et le manque de confiance dans les institutions de l’État, dissuadent les victimes de porter plainte ou de poursuivre les agresseurs présumés (art. 2, 3, 7 et 26).

25. L ’ État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir et combattre toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes et des filles. À cette fin, il devrait :

a) P romulguer et appliquer effectivement une législation qui incrimine toutes les formes de violence familiale, y compris le viol conjugal ;

b) E nquêter de manière effective sur tous les cas de violence à l ’ égard des femmes et des filles, traduire les auteurs de tels faits en justice et, s ’ ils sont reconnus coupables, leur imposer des peines proportionnées à la gravité de l ’ infraction ;

c) V eiller à ce que le tribunal spécial dispose des ressources financières et humaines nécessaires et à ce que des divisions chargées des crimes sexuels soient créées au sein des tribunaux de circuit de tous les comtés ;

d) C ontinuer de mener des actions de sensibilisation et des activités de formation à l ’ échelle nationale à l ’ intention des agents de l ’ État, en particulier les juges, les procureurs, les policiers et le personnel médical, pour qu ’ ils soient à même d ’ intervenir avec efficacité dans toutes les affaires de violence sexiste ;

e) C ibler le grand public, et en particulier les dirigeants communautaires, en collaboration avec les groupes de femmes et les organisations de la société civile concernées, afin de lutter contre les attitudes patriarcales et les stéréotypes profondément enracinés qui perpétuent la violence à l ’ égard des femmes et des filles ;

f) R enforcer les mesures visant à faciliter l ’ accès des victimes à la justice et à des moyens de protection, y compris à des foyers et des refuges dans tout le pays.

Interruption volontaire de grossesse

26.Le Comité note que le paragraphe 3 de l’article 16 du Code pénal érige en infraction l’interruption volontaire de grossesse sauf dans certaines circonstances, et que celle‑ci doit être autorisée par deux médecins. Il est préoccupé par la stigmatisation à laquelle donne lieu une demande d’information sur les services d’avortement médicalisé et par la fréquence des avortements clandestins non sécurisés, qui entraînent souvent le décès de la mère. Il est également préoccupé par le taux élevé de grossesses chez les adolescentes de l’État partie, qui est notamment dû à l’accès limité aux services de santé sexuelle et procréative, et plus particulièrement aux méthodes contraceptives, et à des informations et une éducation adaptées à l’âge (art. 2, 3, 6, 7, 17, 24 et 26).

27. L ’ État partie devrait revoir ses lois pour garantir un accès sécurisé, légal et effectif à l ’ avortement et supprimer tout obstacle à cet accès, afin d ’ empêcher que les femmes qui doivent interrompre leur grossesse ne recourent à l ’ avortement clandestin, qui risque de mettre en danger leur vie et leur santé. L ’ État partie devrait aussi :

a) E mpêcher la stigmatisation des femmes et des filles qui veulent interrompre leur grossesse et veiller à ce qu ’ on n ’ applique de sanction pénale ni contre elles ni contre ceux qui fournissent des services médicaux pour les aider ;

b) G arantir l ’ accès aux femmes et aux hommes, et, en particulier, aux filles et aux garçons, à des informations factuelles et une éducation de qualité sur la santé sexuelle et procréative, et à une large gamme de méthodes de contraception abordables.

Peine de mort

28.Le Comité relève avec satisfaction que l’État partie a confirmé, pendant le dialogue, son engagement de respecter les obligations internationales que lui impose le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, et qu’aucune exécution n’a eu lieu depuis 2008. Il constate néanmoins avec préoccupation que, contrairement aux obligations qu’il a contractées en adhérant au deuxième Protocole facultatif en 2005, l’État partie a réintroduit la peine de mort dans son Code pénal en 2008 et que les juges continuent de prononcer des condamnations à la peine capitale. Il note aussi avec inquiétude que l’application de la peine de mort est obligatoire pour certains crimes et réaffirme que l’application obligatoire de la peine capitale est contraire au Pacte (art. 6).

29. Le Comité rappelle que l ’ adhésion au deuxième Protocole facultatif signifie que l ’ État partie prend toutes les mesures voulues pour abolir la peine de mort dans le ressort de sa juridiction et devenir, en fait et en droit, un pays abolitionniste de cette peine. L ’ État partie doit donc supprimer de sa législation toute disposition prévoyant la peine de mort, commuer toute sentence capitale prononcée et ne procéder à aucune exécution.

Comportement des policiers et usage excessif de la force

30.Le Comité est préoccupé par les allégations faisant état : a) d’arrestations arbitraires et de gardes à vue de plus de quarante-huit heures sans motif valable, notamment pour dette ou pour des infractions mineures, pratiques contraires à la législation de l’État partie ; b) d’usage excessif de la force par la police, notamment dans le contexte de la dispersion de manifestants. Il est aussi préoccupé par les informations selon lesquelles les policiers sont rarement poursuivis pour de tels comportements (art. 2, 6, 7, 9 et 11).

31. L ’ État partie devrait :

a) V eiller à ce que les policiers respectent strictement la règle limitant la durée de la garde à vue à quarante-huit heures ;

b) V eiller à ce qu ’ il ne soit pas fait usage de la détention dans les affaires de dette, pour les infractions mineures ou à titre préventif, et veiller à ce que les personnes privées de liberté aient accès à un recours immédiat pour contester la légalité de leur détention ;

c) F aire en sorte que les principes de nécessité et de proportionnalité dans l ’ usage de la force soient correctement traduits dans la législation et dans les politiques de l ’ État partie, conformément aux Principes de base sur le recours à la force et l ’ utilisation des armes à feu par les responsables de l ’ application des lois ;

d) R enforcer la formation des forces de l ’ ordre sur l ’ usage de la force, et sensibiliser les juges, les procureurs et les avocats à cette question ;

e) F aire en sorte que tous les cas de détention et d ’ arrestation arbitraires et tous les cas d ’ usage excessif de la force par la police fassent rapidement l ’ objet d ’ enquêtes impartiales et efficaces, que les responsables de tels actes soient poursuivis et que leurs victimes aient accès à des recours utiles.

Traite des personnes et travail forcé

32.Le Comité salue les mesures prises par l’État partie contre la traite des personnes ; néanmoins, il demeure préoccupé par : a) la fréquence de la traite des personnes, et plus particulièrement, au niveau national, de la traite des femmes et des enfants à des fins d’exploitation économique et sexuelle ; b) le fait que la loi relative à l’interdiction de la traite des personnes (2005) est peu appliquée, ce qui s’ajoute à la rareté des poursuites et des condamnations et à la clémence des peines prononcées contre les auteurs de traite ; c) l’inadéquation de l’appui fourni aux victimes de la traite, notamment le manque de refuges gérés par l’État. Le Comité note aussi avec préoccupation que, selon certaines informations, des enfants seraient soumis au travail forcé, en particulier comme vendeurs de rue, mendiants ou domestiques, et aux pires formes du travail des enfants, notamment dans le secteur du caoutchouc et dans le secteur de l’extraction minière (art. 7, 8 et 24).

33. L ’ État partie devrait :

a) A ppliquer de manière stricte le cadre juridique national relatif à la traite des personnes, en particulier la loi relative à l ’ interdiction de la traite des personnes, envisager d ’ adapter les peines définies dans cette loi pour qu ’ elles soient proportionnées à la gravité des actes commis, et augmenter le niveau des ressources nécessaires à une application efficace du Plan national de lutte contre la traite des personnes (2014-2019) ;

b) V eiller à ce que les cas présumés de traite des personnes donnent lieu à des enquêtes en bonne et due forme et qu ’ à cette fin, des ressources financières, humaines et techniques suffisantes soient allouées à l ’ unité de protection des femmes et des enfants, chargée, au sein de la police, d ’ enquêter sur les cas de traite ;

c) T raduire rapidement les auteurs présumés de tels actes en justice et, s ’ ils sont reconnus coupables, les condamner à des peines appropriées ;

d) R edoubler d ’ efforts pour repérer les victimes et leur garantir une pleine réparation, ainsi qu ’ une protection et une assistance adéquates, notamment en créant un mécanisme national d ’ orientation et en améliorant l ’ accès à des refuges et logements sécurisés pour les victimes ;

e) P rendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer le travail forcé des enfants et toutes les formes d ’ exploitation des enfants par le travail, en particulier dans le secteur de la fabrication du caoutchouc et dans le secteur de l ’ extraction minière, mettre effectivement en œuvre le plan d ’ action national de lutte contre les pires formes de travail des enfants, et appliquer si nécessaire les dispositions du Code pénal sur le travail forcé ainsi que les dispositions de la loi relative à l ’ enfance sur le caractère obligatoire de la scolarité primaire pour empêcher que les enfants ne soient victimes des pires formes de travail des enfants.

Situation dans les prisons

34.Le Comité est préoccupé par le fait que, malgré les efforts accomplis par l’État partie pour lutter contre la surpopulation carcérale, notamment le programme d’audiences foraines appliqué dans le comté de Montserrado et l’élargissement de la compétence des tribunaux de première instance, les conditions de détention demeurent extrêmement dures et la surpopulation très élevée dans la plupart des lieux de détention, situation encore aggravée par le nombre élevé de détenus en attente de jugement, dont certains restent en détention pendant de longues périodes. Il note aussi avec préoccupation la médiocrité des conditions de détention en ce qui concerne l’accès des détenus aux soins de santé, à l’assainissement et à la nourriture (art. 7 et 10).

35. L ’ État partie devrait intensifier ses efforts pour améliorer considérablement la situation dans les prisons :

a) E n étendant l ’ action menée dans le cadre du programme d ’ audiences foraines à tous les lieux de détention ;

b) E n appliquant efficacement des mesures pour réduire la surpopulation carcérale, en particulier des mesures de substitution à la détention telles que la mise en liberté sous caution ou l ’ assignation à résidence ;

c) E n veillant à ce que la détention avant jugement ne soit utilisée qu ’ à titre exceptionnel, conformément à l ’ article 9 du Pacte ;

d) E n reprenant la construction de la nouvelle prison à Cheesemanburg et en construisant ou rénovant d ’ autres établissements carcéraux, selon les besoins. L ’ État partie devrait aussi protéger le droit de toute personne privée de liberté d ’ être traitée avec humanité et dignité, et faire en sorte que les conditions de détention de tous les lieux de privation de liberté respectent l ’ Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela), notamment en ce qui concerne la séparation des détenus et l ’ accès aux soins de santé, à l ’ assainissement et à la nourriture.

Administration de la justice et procès équitable

36.Le Comité est préoccupé par le retard considérable pris dans l’examen des affaires, qui a pour conséquences de longues durées de détention avant jugement pour un grand nombre de personnes et la surpopulation carcérale. Cette situation s’explique principalement par le manque de juges, de procureurs et d’avocats commis d’office, ainsi que par la corruption qui régnerait dans le système judiciaire. Le Comité relève aussi les problèmes d’indépendance du système judiciaire découlant notamment des dispositions des articles 71 et 97 de la Constitution et, tout en notant les renseignements donnés par la délégation, demeure préoccupé par les informations faisant état de tentatives d’ingérence de l’exécutif dans la nomination ou la révocation de juges. Le Comité relève en outre avec inquiétude l’absence de système d’aide juridictionnelle dans l’État partie et constate que toutes les garanties d’une procédure équitable ne sont pas réunies, en particulier en ce qui concerne le droit d’être jugé dans un délai raisonnable et le droit à des services gratuits d’interprétation (art. 2, 9 et 14).

37. L ’ État partie devrait maintenir ses efforts pour réformer le système judiciaire et veiller à ce que toutes les procédures judiciaires soient menées dans le plein respect des garanties d ’ un procès équitable énoncées à l ’ article 14 du Pacte. En particulier, il devrait :

a) S ’ attaquer résolument à l ’ arriéré judiciaire, notamment en renforçant les ressources financières allouées à la justice, en augmentant le nombre de juges, de procureurs et d ’ avocats commis d ’ office formés et en réduisant les droits d ’ enregistrement des avocats ;

b) P rendre des mesures pour réduire les faits de corruption dans le système judiciaire et faire en sorte que des procédures disciplinaires soient dûment engagées contre les juges et les magistrats au comportement non déontologique ;

c) A ccélérer la révision des dispositions de la Constitution qui font obstacle à l ’ indépendance de la justice et faire en sorte que la nomination, la promotion et la révocation des juges soient compatibles avec l ’ indépendance du système judiciaire et ne fassent pas l ’ objet d ’ ingérences de la part de l ’ exécutif ;

d ) C réer un système d ’ aide juridictionnelle correctement financé et veiller à ce que l ’ aide juridictionnelle soit fournie dans des délais raisonnables dans tous les cas où l ’ intérêt de la justice l ’ exige ;

e) G arantir le droit à un procès équitable dans un délai raisonnable ;

f) F ournir des services gratuits d ’ interprétation à toute personne traduite en justice qui ne comprend pas la langue utilisée par le tribunal ou ne la parle pas.

Demandeurs d’asile et réfugiés

38.Le Comité est préoccupé par l’absence d’un cadre juridique applicable aux apatrides, malgré les tentatives faites pour inclure de telles dispositions dans la loi de 1993 relative aux réfugiés. Il note aussi avec préoccupation que selon certaines allégations, le principe de non-refoulement, pourtant inscrit dans la législation de l’État partie, ne serait pas toujours respecté (art. 2, 6, 7, 10 et 13).

39. L ’ État partie devrait poursuivre la réforme de la loi relative aux réfugiés, principalement en y incorporant des dispositions sur les apatrides visant à mettre en place une véritable procédure de détermination du statut d ’ apatride. Il devrait aussi faire appliquer strictement l ’ interdiction absolue du refoulement en faisant en sorte que les réfugiés et les demandeurs d ’ asile ne soient pas renvoyés dans un pays où il y a des motifs sérieux de croire qu ’ il y a un risque réel de préjudice irréparable, comme l ’ exigent les articles 6 et 7 du Pacte.

Liberté d’expression

40.Tout en notant l’ouverture de l’État partie et l’engagement du Président en faveur de la liberté d’expression, le Comité note avec préoccupation l’existence dans le Code pénal de l’État partie de dispositions relatives à la diffamation et à la calomnie qui sont utilisées pour réduire au silence les opposants et sanctionner les déclarations faites par des professionnels des médias. Le Comité est aussi préoccupé par les cas de fermeture arbitraire d’organes d’information et par le fait que certains journalistes ont été agressés et que d’autres ont subi des ingérences dans leur travail (art. 2, 6, 7 et 19).

41. Compte tenu de l ’ observation générale n o  34 (2011) du Comité sur la liberté d ’ opinion et la liberté d ’ expression, l ’ État partie devrait faire en sorte que toute restriction imposée aux activités des médias respecte strictement les dispositions du paragraphe 3 de l ’ article  19 du Pacte. L ’ État partie devrait accélérer l ’ adoption de la loi dépénalisant la diffamation et la calomnie, non seulement contre le Président mais aussi contre tout représentant du Gouvernement, et faire en sorte que les lois relatives à la diffamation ne permettent pas d ’ étouffer la liberté d ’ expression. Il devrait aussi protéger les journalistes et les médias contre toute forme d ’ ingérence déplacée, de harcèlement ou d ’ agression, mener des enquêtes diligentes sur tous les cas d ’ agression et traduire les responsables de tels actes en justice. Enfin, l ’ État partie devrait accélérer la mise en place d ’ un mécanisme indépendant de régulation de l ’ audiovisuel et décrire ce qu ’ il aura fait à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Droits de l’enfant

42.Le Comité note l’augmentation du nombre d’enregistrements de naissances en 2013 mais demeure préoccupé par le fait que le taux d’enregistrement reste peu élevé dans l’État partie, en particulier dans les zones rurales. Il note aussi avec préoccupation que les châtiments corporels ne sont toujours pas interdits dans tous les contextes (art. 2, 7, 16 et24).

43. L ’ État partie devrait faire davantage d ’ efforts pour parvenir à l ’ enregistrement universel des naissances afin que tous les enfants puissent jouir des droits consacrés par le Pacte et pour éviter le risque d ’ apatridie. En particulier, il devrait garantir l ’ accès à l ’ enregistrement gratuit dans l ’ ensemble du pays et le renforcer en zone rurale, notamment au moyen de services mobiles d ’ enregistrement. Il devrait prendre des mesures pratiques, notamment d ’ ordre législatif, le cas échéant, afin de mettre fin aux châtiments corporels dans tous les contextes.

Participation aux affaires publiques

44.Le Comité est préoccupé par les restrictions injustifiées, concernant par exemple la valeur du patrimoine des candidats, imposées au droit de se présenter à une fonction officielle ainsi que par les restrictions au droit de vote de certains groupes, notamment les détenus en attente de jugement, les résidents de longue date qui ne peuvent prétendre à la naturalisation et les personnes qui atteignent l’âge de 18 ans entre le dernier jour de l’inscription sur les listes électorales et la date de l’élection. Il est également préoccupé par les difficultés que rencontreraient les personnes handicapées dans l’accès aux bureaux de vote et par le fait que la Commission électorale nationale n’est pas en mesure de régler efficacement les différends électoraux car elle manque de ressources et n’est pas suffisamment indépendante (art. 2 et 25).

45. L ’ État partie devrait :

a) Éliminer les restrictions injustifiées au droit de se présenter à une fonction officielle ;

b) Modifier son cadre législatif et mettre en place des procédures pour garantir que le droit de vote puisse être exercé sans discrimination, en application de l ’ article 25 du Pacte ;

c) Lever les obstacles physiques qui entravent l ’ accès aux bureaux de vote  ;

d) Mettre en œuvre la recommandation de la Commission de la réforme constitutionnelle visant la création d ’ un tribunal du contentieux électoral constitué de magistrats formés et disposant des ressources nécessaires pour traiter dans les meilleurs délais des différends électoraux.

Terres coutumières

46.Le Comité prend note des informations communiquées sur le projet de loi relatif aux droits fonciers, qui a notamment pour objectif de régir le statut des terres coutumières. Il constate toutefois avec préoccupation que l’examen du projet de loi ne progresse que lentement et que, dans l’intervalle, les communautés locales ne sont pas en mesure d’obtenir des titres concernant ces terres. Il constate aussi avec préoccupation que des contrats de concession concernant les terres coutumières sont conclus sans consultation préalable des communautés locales, qui ne reçoivent pas de compensation et ne se voient notamment pas fournir de nouvelles terres, et que les femmes sont touchées de manière disproportionnée par ces situations, notamment en ce qui concerne l’accès à la propriété et au contrôle des terres (art. 3, 26 et 27).

47. L ’ État partie devrait accélérer l ’ adoption de la loi sur les droits fonciers, veiller à ce que cette loi garantisse aux femmes et aux hommes des droits égaux en ce qui concerne le régime foncier et la propriété et lever les obstacles qui entravent l ’ accès des femmes à l ’ utilisation, à la propriété et au contrôle des terres, notamment dans les zones faisant l ’ objet d ’ un contrat de concession. Il devrait en particulier garantir, en droit et en fait, la tenue de véritables consultations avec les membres des communautés locales vivant sur les terres coutumières, notamment les femmes, avant la conclusion de contrats de concession afin que soit recueilli le consentement libre, préalable et éclairé des communautés locales, et veiller à ce que ces communautés bénéficient des projets de développement menés sur leurs terres et reçoivent une indemnisation adéquate. L ’ État partie devrait en outre veiller à ce que les entreprises privées qui gèrent des projets de développement mettent en place des politiques de responsabilité sociale fondées sur des mécanismes de suivi et de responsabilisation efficaces.

D.Diffusion et suivi

48.L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, de son rapport initial, des réponses écrites à la liste des points établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public afin de les sensibiliser aux droits consacrés par le Pacte.

49.Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du règlement intérieur du Comité, l’État partie est invité à faire parvenir, avant le 27 juillet 2020, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 11 (impunité et violations passées des droits de l’homme), 37 (administration de la justice et droit à procès équitable) et 47 (terres coutumières).

50.Le Comité demande à l’État partie de lui soumettre son prochain rapport périodique le 27 juillet 2022 au plus tard et d’y faire figurer des renseignements précis et à jour sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées dans les présentes observations finales et sur l’application du Pacte dans son ensemble. Il demande également à l’État partie, lorsqu’il élaborera ce rapport, de tenir de vastes consultations avec la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays. Conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, ce document ne devra pas compter plus de 21 200 mots. L’État partie peut aussi indiquer au Comité, avant le 27 juillet 2019, qu’il accepte d’établir son rapport en suivant la procédure simplifiée. En pareil cas, le Comité transmet une liste de points à l’État partie avant que celui-ci ne soumette son rapport. Les réponses de l’État partie à cette liste constitueront son rapport périodique suivant à soumettre en application de l’article 40 du Pacte.