Nations Unies

CRC/C/PRT/CO/5-6

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

9 décembre 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport du Portugal valant cinquième et sixième rapports périodiques*

1.Le Comité a examiné le rapport du Portugal valant cinquième et sixième rapports périodiques (CRC/C/PRT/5-6) à ses 2418e et 2419e séances (CRC/C/SR.2418 et 2419), les 19 et 20 septembre 2019, et a adopté les observations finales ci-après à sa 2430e réunion (CRC/C/SR.2430), le 27 septembre 2019.

I.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport du Portugal valant cinquième et sixième rapports périodiques, ainsi que les réponses écrites à la liste de points (CRC/C/PRT/Q/5-6/Add.1), qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité prend note avec satisfaction des progrès que l’État partie a accomplis dans de nombreux domaines. Il salue les mesures législatives et institutionnelles et les politiques adoptées pour mettre en œuvre la Convention, en particulier la révision de la loi relative à la protection des enfants et des jeunes en situation de risque et la restructuration du mécanisme national chargé de la planification, de la coordination, du suivi et de l’évaluation des mesures prises pour promouvoir les droits et la protection des enfants et des jeunes.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

4.Le Comité rappelle à l’État partie le caractère indivisible et interdépendant de tous les droits consacrés par la Convention et souligne l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il appelle l’attention de l’État partie sur les recommandations concernant les domaines ci-après, dans lesquels il est urgent de prendre des mesures : politique et stratégie globales (par.8), intérêt supérieur de l’enfant (par.18), exploitation sexuelle et violences sexuelles (par.26), enfants privés de milieu familial (par.31), niveau de vie (par.39) et enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants (par.42).

5. Le Comité recommande à l’État partie de garantir la réalisation des droits de l’enfant conformément à la Convention, à son Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et à son Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il demande instamment à l’État partie de garantir la participation effective des enfants à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques et programmes visant à atteindre les 17 objectifs de développement durable pour autant que ceux-ci les concernent.

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))

Législation

6. Le Comité rappelle sa précédente recommandation (CRC/C/PRT/CO/3-4, par. 10) et engage l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre sa législation conformément à la Convention aux niveaux national, provincial et municipal, notamment à allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à cette fin.

Politique et stratégie globales

7.Le Comité note qu’une stratégie nationale pour les droits de l’enfant a été élaborée pour la période 2019-2022. Il relève néanmoins avec préoccupation que celle-ci tarde à être adoptée, et craint que cette situation empêche de suivre efficacement les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Convention et d’élaborer des orientations suffisamment détaillées en vue de l’élaboration de plans d’action locaux en faveur des enfants et des jeunes.

8. Le Comité rappelle sa précédente recommandation (CRC/C/PRT/CO/3-4, par. 12) et engage l’État partie à :

a) Adopter sans tarder la stratégie et les plans d’action y afférents ;

b) Allouer à la Commission nationale pour la promotion et la protection des droits des enfants et des jeunes les ressources humaines, techniques et financières nécessaires au suivi et à la coordination de la mise en œuvre de la stratégie ;

c) Adopter sans tarder des plans d’action locaux, et faire en sorte qu’ils soient conformes à la Convention et qu’ils protègent et promeuvent les droits de tous les enfants.

Coordination

9. Le Comité accueille avec satisfaction la création de la Commission nationale pour la promotion et la protection des droits des enfants et des jeunes, mais recommande à l’État partie de lui allouer davantage de ressources humaines, techniques et financières et de renforcer son mandat et ses pouvoirs au niveau interministériel afin qu’elle puisse coordonner l’ensemble des activités liées à la mise en œuvre de la Convention aux niveaux intersectoriel, national, régional et local.

Allocation de ressources

10. Se référant à son observation générale n o  19 (2016) sur l’élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l’enfant, le Comité rappelle ses précédentes recommandations (par. 16) et recommande à l’État partie :

a) D’évaluer l’incidence, sur les droits de l’enfant, des politiques d’austérité mises en œuvre dans le cadre de son programme d’ajustement économique (2011 ‑ 2014) ainsi que les ressources nécessaires pour remédier à la disparité des indicateurs relatifs aux droits de l’enfant, en tenant compte des principes directeurs applicables aux études de l’impact des réformes économiques sur les droits de l’homme (A/HRC/40/57) ;

b) D’élaborer le budget de l’État suivant une approche axée sur les droits de l’enfant et de mettre en œuvre un système de suivi de l’affectation et de l’emploi des ressources pour l’enfance qui couvre l’ensemble du budget ;

c) De prévoir des crédits budgétaires suffisants au profit de tous les enfants, et plus particulièrement des enfants défavorisés ou vulnérables pour lesquels des mesures sociales correctives pourraient se révéler nécessaires, et de faire en sorte que ces crédits soient protégés, même en cas de crise économique, de catastrophe naturelle ou d’autres situations d’urgence ;

d) De faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées sur la part du budget national qui est consacrée à la mise en œuvre des droits de l’enfant aux niveaux national et local.

Collecte de données

11. Se référant à son observation générale n o  5 (2003) sur les mesures d’application générales de la Convention, le Comité rappelle sa précédente recommandation (CRC/C/PRT/CO/3-4, par. 18) et engage l’État partie à :

a) D’accélérer la réforme de son système de collecte de données afin de garantir la collecte coordonnée de données ventilées par âge, sexe, handicap, situation géographique, origine ethnique, situation au regard de la législation sur l’immigration et situation socioéconomique, pendant toute la vie de l’enfant jusqu’à l’âge de 18 ans et dans tous les domaines visés par la Convention ;

b) De faire en sorte que les données et les indicateurs soient transmis aux ministères compétents et utilisés aux fins de l’élaboration, du suivi et de l’évaluation des politiques, programmes et projets visant à assurer une mise en œuvre effective de la Convention ;

c) D’appliquer le cadre conceptuel et méthodologique défini dans le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme intitulé « Indicateurs des droits de l’homme : Guide pour mesurer et mettre en œuvre » aux fins de la définition, de la collecte et de la diffusion de données statistiques.

Mécanisme de suivi indépendant

12. Se référant à son observation générale n o  2 (2002) sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie :

a) De désigner au sein du Bureau du Médiateur un mécanisme spécialement chargé de surveiller la situation des droits de l’enfant ;

b) D’allouer au Bureau du Médiateur des ressources humaines, techniques et financières appropriées pour qu’il s’acquitte efficacement de son mandat ;

c) De sensibiliser le grand public, et les enfants en particulier, au droit de déposer plainte directement auprès du Médiateur, et de soutenir les efforts déployés en ce sens par le Bureau du Médiateur.

Diffusion, sensibilisation et formation

13. Le Comité prend note des changements bienvenus apportés au programme national d’éducation civique , et recommande à l’État partie :

a) De définir et de structurer le contenu obligatoire et les objectifs de la matière intitulée « Citoyenneté et développement », en y intégrant les droits de l’enfant protégés par la Convention, de faire en sorte que tous les enseignants suivent une formation obligatoire concernant le contenu et les objectifs de cette matière, et d’en étendre l’enseignement à toutes les écoles publiques et privées du pays ;

b) De renforcer les programmes de sensibilisation, notamment les campagnes visant à diffuser la Convention ainsi que les observations générales et les vues du Comité auprès des enfants, des familles et des professionnels qui travaillent avec et pour des enfants ;

c) De faire en sorte que tous les professionnels qui travaillent avec et pour des enfants, en particulier les travailleurs sociaux, les responsables de l’application des lois, le personnel de santé, les agents des services de l’immigration et de l’asile, le personnel des structures offrant une protection de remplacement et les professionnels des médias reçoivent une formation obligatoire consacrée aux droits de l’enfant tels qu’ils sont définis dans la Convention et la législation nationale ;

d) De dispenser une formation obligatoire aux juges appelés à exercer au sein de juridictions des affaires familiales ou de juridictions pour mineurs, et d’intégrer des modules consacrés aux droits de l’enfant, aux techniques de communication adaptées à l’enfant et aux stades de développement de l’enfant dans la formation professionnelle obligatoire des juges, des magistrats et des procureurs de toutes les juridictions du pays.

Droits de l’enfant et entreprises

14. Se référant à son observation générale n o  16 (2013) sur les obligations des États concernant les incidences du secteur des entreprises sur les droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’examiner et d’adapter son cadre législatif (civil, pénal et administratif) en vue de soumettre les entreprises et leurs filiales opérant sur son territoire ou gérées depuis son territoire, en particulier dans le secteur du tourisme, à l’obligation de rendre des comptes ;

b) De créer des mécanismes de surveillance afin que les violations des droits de l’enfant donnent lieu à des enquêtes et à des mesures de réparation, de façon à améliorer la responsabilisation et la transparence ;

c) D’entreprendre des campagnes de sensibilisation auprès de l’industrie du tourisme et du grand public pour prévenir l’exploitation sexuelle des enfants dans le secteur des voyages et du tourisme, et de diffuser largement le Code mondial d’éthique du tourisme de l’Organisation mondiale du tourisme auprès des agences de voyages et de l’industrie du tourisme ;

d) De renforcer sa coopération internationale contre l’exploitation sexuelle des enfants dans le secteur des voyages et du tourisme au moyen d’accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux visant à prévenir ce phénomène et à l’éliminer.

B.Définition de l’enfant (art. 1er)

15. Se référant à la recommandation générale/ l’ observation générale conjointe n o  31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et n o  18 du Comité des droits de l’enfant (2014) sur les pratiques préjudiciables, le Comité prie instamment l’État partie de modifier sa législation afin de supprimer toutes les exceptions à l’interdiction du mariage de personnes de moins de 18 ans.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

16. Le Comité se félicite de l’adoption de la loi n o  93/2017 visant à prévenir et à combattre la discrimination fondée sur l’origine raciale ou ethnique, la couleur de peau, la nationalité, l’ascendance ou le pays d’origine, et de la stratégie nationale en faveur de l’égalité et de la non-discrimination (2018 ‑ 2030). Il rappelle toutefois ses précédentes observations finales (par. 26), et recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour sensibiliser le grand public et les agents de la fonction publique, notamment les responsables de l’application des lois, à l’importance de la diversité culturelle et de la compréhension interethnique, afin de combattre les stéréotypes, les préjugés et la discrimination à l’égard des filles, des enfants handicapés, des enfants en situations de migration, des enfants issus de minorités ethniques, religieuses ou raciales tels que les enfants roms, les enfants d’ascendance africaine et les enfants musulmans, ainsi qu’à l’égard des adolescents homosexuels, bisexuels et transgenres et des enfants intersexués.

Intérêt supérieur de l’enfant

17.Le Comité note avec satisfaction que son observation générale no 14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale a été traduite en portugais et diffusée, et que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant est inscrit dans les lois relatives à l’adoption, à l’auto-détermination de l’identité de genre et à la garde en cas de divorce. Le Comité note cependant avec inquiétude qu’il n’existe toujours pas de lois ni de directives relatives à la détermination et au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant dans les domaines de la justice, des soins de santé, de la protection de l’enfance, de l’éducation et des procédures d’immigration, d’asile et de placement dans des structures de protection de remplacement. Le Comité craint en outre que cette absence de directives donne lieu à des interprétations contradictoires de la loi et des décisions rendues par les différentes juridictions.

18. Se référant à son observation générale n o  14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l’État partie :

a) De faire en sorte que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant soit inscrit dans la législation et dans l’ensemble des politiques, programmes et projets qui concernent les enfants ou qui ont une incidence directe ou indirecte sur eux ;

b) De définir des procédures et des critères afin d’aider l’ensemble des personnes en position d’autorité à déterminer, dans chaque domaine, en quoi consiste l’intérêt supérieur de l’enfant et à en faire une considération primordiale ;

c) De mettre en place, pour l’ensemble des lois et des politiques intéressant les enfants, des procédures obligatoires d’évaluation préalable et rétrospective de leur effet sur l’exercice du droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale.

Droit à la vie, à la survie et au développement

19. Le Comité rappelle ses précédentes observations finales (par. 30) et recommande à l’État partie :

a) D’accélérer l’adoption du plan d’action pour la sécurité des enfants et d’allouer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à sa mise en œuvre ;

b) De s’attaquer aux causes sous-jacentes de la mortalité infantile et post ‑ infantile, notamment aux mauvais traitements, à la détresse sociale et économique et aux inégalités ;

c) De renforcer les dispositions légales portant sur la sécurité des enfants dans les piscines, notamment en imposant l’obligation d’équiper les piscines privées des immeubles, des hôtels et des lieux de villégiature d’une barrière de protection, d’assurer la diffusion des normes correspondantes et de rendre leur application obligatoire ;

d) De faire appliquer les règles régissant l’utilisation de ceintures de sécurité pour protéger efficacement les enfants dans les transports publics et privés.

Respect de l’opinion de l’enfant

20.Le Comité accueille avec satisfaction l’inscription du droit de l’enfant d’être entendu dans les lois de l’État partie régissant les procédures civiles, notamment dans la loi n o  141/2015, ainsi que dans les normes applicables en matière de soins de santé, mais, se référant à son observation générale n o  12 (2009) sur le droit de l’enfant d’être entendu, il recommande à l’État partie :

a) D’étendre le champ d’application du droit de l’enfant d’être entendu à toutes les procédures administratives ou judiciaires, civiles ou pénales, qui le concernent ;

b) De garantir l’application effective et cohérente des lois reconnaissant le droit de l’enfant d’être entendu dans toute procédure judiciaire qui le concerne directement ou indirectement, notamment en mettant en place des mécanismes ou des procédures pour faire en sorte que les travailleurs sociaux, les professionnels de la santé et de l’éducation et les tribunaux respectent ce droit ;

c) De renforcer les mesures visant à faire en sorte que les professionnels de la justice, de l’éducation, des services sociaux et de la santé qui s’occupent d’enfants reçoivent systématiquement une formation appropriée sur les moyens de recueillir l’opinion de l’enfant dans toutes les décisions le concernant (CRC/C/PRT/CO/3-4, par. 32 c)) ;

d) De mettre au point des outils permettant de consulter les enfants au sujet des politiques nationales qui les concernent de manière à systématiser ces consultations et à faire en sorte qu’elles soient ouvertes à tous les enfants et garantissent leur pleine participation.

D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)

Nationalité

21. Le Comité se félicite de l’adoption de la loi n o  2/2018, qui attribue la nationalité portugaise d’origine aux enfants nés sur le territoire portugais, et de l’adoption de la loi n o  26/2018, qui prévoit qu’un permis de séjour doit être accordé aux enfants de nationalité étrangère qui sont accueillis dans des institutions publiques. Il recommande toutefois à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’application de ces dispositions légales.

Protection de la vie privée et accès à l’information

22. À la lumière des conclusions issues de la Journée de débat général consacrée aux médias numériques et aux droits de l’enfant qui a eu lieu en 2014, et conformément au droit de l’enfant d’avoir accès à une information appropriée, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’élaborer des règles pour protéger la vie privée des enfants dans l’environnement numérique et dans les médias ;

b) De renforcer la capacité des enfants, des parents, des représentants légaux et des enseignants à utiliser les technologies de l’information et des communications en toute sécurité, en particulier en apprenant aux enfants à se protéger contre les informations et les contenus préjudiciables à leur bien-être ;

c) De mettre en place des mécanismes en vue de surveiller les violations des droits de l’enfant dans l’environnement numérique et de poursuivre les responsables.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39)

Châtiments corporels

23. Le Comité se félicite du lancement du « projet Adelia » visant à promouvoir la parentalité positive et à prévenir les châtiments corporels et, se référant à son observation générale n o  8 (2006) sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments, il invite instamment l’État partie à :

a) Garantir, en droit et dans la pratique, l’interdiction totale des châtiments corporels, aussi légers soient-ils, dans tous les contextes, y compris au sein de la famille ;

b) Sensibiliser davantage les enfants, les parents, les représentants légaux et les enseignants à l’illégalité de toutes les formes de châtiment corporel, quel que soit le degré de violence employé, ainsi qu’aux procédures à suivre pour signaler de tels actes ;

c) Mieux former les professionnels qui travaillent avec et pour des enfants aux méthodes d’éducation positives, non violentes et participatives et intensifier les mesures visant à promouvoir ces méthodes d’éducation dans la société.

Maltraitance et négligence

24. Se référant à son observation générale n o  13 (2011) sur le droit de l’enfant d’être protégé contre toutes les formes de violence et prenant note de la cible 16.2 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De collecter des données, ventilées par âge, sexe, handicap, situation géographique, origine ethnique, situation au regard de la législation sur l’immigration et situation socioéconomique , sur les enfants victimes de violence intrafamiliale, de maltraitance et de négligence sur son territoire, ainsi que sur les mesures prises par le système de protection de l’enfance, afin d’assurer le suivi de ces mesures et d’en évaluer l’efficacité ;

b) D’adopter un plan d’action pour repérer le plus tôt possible les enfants en situation de risque, notamment les enfants qui vivent dans un environnement familial violent, et les protéger contre la négligence, la maltraitance, la violence et la discrimination, et d’allouer des ressources humaines, techniques et financières adéquates aux fins de sa mise en œuvre ;

c) D’intégrer une formation consacrée aux directives de la Commission nationale de promotion et de protection des droits des enfants et des jeunes dans la formation initiale et continue de l’ensemble des personnels qui travaillent avec la Commission nationale et les commissions locales, et de renforcer les capacités de la Commission nationale afin qu’elle puisse assurer un suivi efficace de l’action des commissions locales ;

d) D’accroître le nombre de foyers d’accueil pour enfants victimes de violence intrafamiliale, de maltraitance et de négligence.

Exploitation sexuelle et violences sexuelles

25.Le Comité relève avec préoccupation :

a)Le manque d’information concernant les violences sexuelles commises contre des enfants et l’absence de procédures établies aux fins de l’intervention de professionnels pour faire face à ces situations ;

b)Le faible taux de signalement des cas de sollicitation d’enfants sur Internet à des fins sexuelles ;

c)L’insuffisance des ressources allouées aux activités visant à repérer à temps les enfants exposés à des violences sexuelles et à enquêter efficacement sur ce type de violences, notamment dans les institutions religieuses et sur Internet ;

d)Le manque de données sur les violences sexuelles commises contre des enfants et sur l’exploitation d’enfants par la prostitution.

26. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’adopter une stratégie pour lutter contre les violences sexuelles à l’égard des enfants, consistant notamment à mettre en place un mécanisme d’enquête indépendant et un système d’intervention pluridisciplinaire adapté à l’enfant afin d’éviter toute victimisation secondaire, et de prendre des mesures pour assurer aux victimes un soutien approprié ;

b) De sensibiliser les parents, les enfants, les enseignants et les autres professionnels qui travaillent avec et pour des enfants aux procédures de signalement et aux moyens de limiter autant que possible les risques auxquels sont exposés les enfants lorsqu’ils utilisent Internet ;

c) D’accroître les ressources humaines, techniques et financières allouées aux activités visant à prévenir les violences sexuelles contre des enfants, à repérer les victimes de tels actes, à mener des enquêtes et à poursuivre les responsables, notamment lorsque ces actes sont commis dans des institutions religieuses et sur Internet ;

d) De collecter et de publier des données, ventilées par âge, sexe, handicap, situation géographique, origine ethnique, situation au regard de la législation sur l’immigration et situation socioéconomique , sur la traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle et l’exploitation d’enfants par la prostitution sur son territoire.

Tauromachie

27. Le Comité recommande à l’État partie de fixer à 18 ans, sans aucune exception, l’âge minimum légal pour participer ou assister à des corridas et à des courses de taureaux, y compris dans les écoles de tauromachie, et de sensibiliser les responsables gouvernementaux, les médias et le grand public aux effets préjudiciables que la violence associée à la corrida et aux courses de taureaux ont sur les enfants, y compris lorsqu’ils sont spectateurs.

Pratiques préjudiciables

28. Se référant à son observation générale conjointe n o  18/recommandation générale n o  31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (2014) sur les pratiques préjudiciables, et prenant note de la cible 5.3 des objectifs de développement durable, le Comité invite instamment l’État partie à :

a) Poursuivre l’application de mesures de prévention et de protection pour lutter contre les mutilations génitales féminines, ces mesures consistant notamment à fournir des services d’assistance sociale, psychosociale et médicale et de réadaptation, à former les professionnels concernés et à mettre en œuvre des programmes de sensibilisation ;

b) Poursuivre la mise en œuvre de mesures, notamment législatives et administratives, pour faire en sorte qu’aucun nourrisson ni aucun enfant, notamment s’il est intersexué, ne fasse l’objet de traitements médicaux ou d’interventions chirurgicales qui ne sont pas nécessaires, conformément aux droits de l’enfant à l’intégrité physique, à l’autonomie et à la libre disposition de soi, et assurer aux familles d’enfants intersexués les services d’assistance sociale, médicale et psychologique dont elles ont besoin, ainsi que des conseils, un soutien et des mesures de réparation appropriés.

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))

Milieu familial

29. Pre nant note de l’adoption de la loi n o  24/2017, qui abroge l’exercice conjoint de l’autorité parentale dans les cas où celui-ci est jugé contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’assurer la protection de l’enfant en toutes circonstances dans le cadre de la mise en œuvre de la loi n o  24/2017, de garantir la rapidité des procédures et de faciliter les relations entre l’enfant et ses deux parents, notamment pendant les procédures civiles ou pénales et après un divorce, à moins que cela soit contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant ;

b) De surveiller et de garantir le respect des décisions en matière de garde et des modalités convenues concernant l’exercice partagé de l’autorité parentale ;

c) De redoubler d’efforts pour apporter aux parents et aux tuteurs qui travaillent une aide appropriée dans l’exercice de la responsabilité qui leur incombe d’élever l’enfant, notamment en encourageant des modalités de travail souples, en offrant des services de garde d’enfants adaptés et d’un coût abordable, en rallongeant la durée du congé parental, en punissant la discrimination qui entrave l’accès à l’emploi et la progression de carrière des personnes ayant des enfants, et en faisant en sorte que le congé parental obligatoire soit payé et qu’il ne soit pas subordonné à la durée de cotisation du parent concerné à la sécurité sociale.

Enfants privés de milieu familial

30.Le Comité prend note de l’adoption de la loi no 142/2015, qui définit le placement en famille d’accueil comme la mesure à privilégier pour les enfants de 0 à 6 ans. Il relève toutefois avec préoccupation :

a)Que le placement en institution, y compris d’enfants de moins de 3 ans et d’enfants pauvres ou handicapés, reste répandu ;

b)Que les familles d’accueil restent peu nombreuses et concentrées en certains endroits du pays ;

c)Qu’il n’existe toujours pas de politiques ni de plans d’action qui permettent d’assurer une protection de remplacement de qualité et coordonnée, soit dans des institutions, soit dans des familles.

31. Appelant l’attention de l’État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants, le Comité recommande à l’État partie :

a) De faire en sorte que ses politiques et ses pratiques soient guidées par le principe selon lequel la pauvreté, financière ou matérielle, ou des conditions directement et exclusivement imputables à cet état de pauvreté, ne devraient jamais servir d’unique justification pour retirer un enfant à la garde de ses parents, pour placer un enfant dans une structure de protection de remplacement ou pour empêcher la réinsertion sociale d’un enfant ;

b) De prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que des enfants, notamment des enfants handicapés, ne soient retirés à leur famille, par exemple en accordant aux parents et aux familles vulnérables un soutien approprié et en mettant pleinement en œuvre la loi n o  142/2015 de manière à garantir le placement des enfants de 0 à 6  ans en famille d’accueil plutôt que dans une institution ;

c) D’adopter une stratégie globale de désinstitution n alisation assortie d’objectifs précis, et de faire en sorte qu’il y ait suffisamment de familles d’accueil sur l’ensemble du territoire ;

d) D’élaborer et de mettre en œuvre des politiques et des plans d’action garantissant une protection de remplacement de qualité et coordonnée, soit en institution, soit dans une famille, et de contrôler la qualité de la prise en charge, notamment en prévoyant des mécanismes de surveillance et des dispositifs permettant de signaler les cas de maltraitance d’enfants et d’y remédier.

Adoption

32. Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la loi n o  143/2015 portant révision de la procédure d’adoption, mais recommande à l’État partie :

a) De promouvoir l’adoption comme mesure de substitution au placement d’enfants privés de milieu familial dans des institutions publiques ;

b) De renforcer l’appui et les services de conseil fournis aux parents adoptifs pour les aider à préparer l’adoption et pour faciliter l’intégration de l’enfant adopté dans sa nouvelle famille ;

c) De dispenser aux professionnels qui interviennent dans les procédures d’adoption une formation consacrée au manuel sur les procédures d’adoption afin de garantir que les décisions en la matière soient prises sans retard et que les demandes d’adoption soient évaluées et examinées en toute transparence.

G.Handicap, santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Enfants handicapés

33. Le Comité se félicite des mesures législatives prises pour améliorer la situation des personnes handicapées dans l’État partie, notamment l’adoption du décret ‑ loi n o 54/2018, qui marque un progrès vers l’éducation inclusive. Toutefois, se référant à son observation générale n o  9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, il recommande à l’État partie :

a) De collecter des données sur les enfants handicapés, notamment sur la discrimination dont ceux-ci font l’objet, et de mettre en place un système efficace de diagnostic du handicap, condition indispensable à l’élaboration de politiques et de programmes adaptés aux enfants handicapés ;

b) D’adopter, en consultation avec les enfants handicapés et leur famille, une nouvelle stratégie globale en faveur de l’intégration des enfants handicapés dans tous les domaines de la vie, et d’allouer les ressources humaines, financières et techniques nécessaires à son suivi et à sa mise en œuvre ;

c) De renforcer la formation des enseignants et des professionnels qui travaillent dans des classes intégrées, notamment aux premiers niveaux de l’enseignement primaire, et d’affecter du personnel spécialisé pour accompagner individuellement les enfants qui en ont besoin afin de garantir la mise en œuvre efficace des plans d’apprentissage individualisés ;

d) De renforcer la coordination des autorités de la sécurité sociale, de l’éducation et de la santé afin que l’allocation d’intégration sociale soit efficacement appliquée.

Santé et services de santé

34. Se référant à son observation générale n o  15 (2013) sur le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible, et prenant note de la cible 3.8 des objectifs de développement durable sur la couverture sanitaire universelle, le Comité rappelle sa précédente recommandation (CRC/C/PRT/CO/3-4, par. 48) et recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour appliquer efficacement les lois qui garantissent l’accès gratuit aux soins de santé pour tous les enfants, notamment en prenant les mesures suivantes :

a) Augmenter les ressources financières allouées au secteur de la santé et garantir la présence d’établissements de santé de qualité et de personnel de santé spécialisé et qualifié sur l’ensemble de son territoire, en particulier dans les zones rurales ;

b) Prendre des mesures pour faire en sorte que chaque enfant soit suivi par un médecin de famille désigné à cet effet, y compris les enfants nés avant 2016 ;

c) Renforcer les mesures visant à lutter contre l’obésité chez les enfants et à promouvoir un mode de vie sain, y compris l’exercice d’une activité physique ;

d) Contrôler et évaluer régulièrement l’efficacité des politiques et des programmes relatifs à la sécurité alimentaire et à la santé nutritionnelle des enfants, notamment les programmes portant sur les repas scolaires et ceux destinés aux nourrissons et aux enfants en bas âge ;

e) Renforcer les mesures prises pour prévenir les maladies évitables, notamment le VIH/sida.

Santé mentale

35. Prenant note de la cible 3.4 des objectifs de développement durable, le Comité accueille avec satisfaction les plans visant à accroître le nombre de spécialistes de la santé mentale dans les écoles ainsi que la création, à Soure, de l’observatoire de la santé mentale. Il recommande à l’État partie :

a) D’allouer des ressources approprié e s aux services de santé mentale afin de faire en sorte qu’il y ait suffisamment de personnel et de services spécialisés dans la santé mentale des enfants et des adolescents, notamment de services ambulatoires de réadaptation psychosociale , et que ces services interviennent en temps utile et d’une manière adaptée à l’enfant, en vue d’éliminer le suicide et la dépression chez les enfants et les adolescents ;

b) De collecter des données, ventilées par âge, sexe, handicap, situation géographique, origine ethnique, situation au regard de la législation sur l’immigration et situation socioéconomique , sur les enfants et les adolescents qui présentent des troubles ou des problèmes mentaux ou qui en ont les symptômes, ainsi que sur les structures de soins existantes ;

c) De prendre des mesures pour faire face à l’augmentation du nombre d’enfants présentant des troubles du comportement auxquels on a diagnostiqué un trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité et prescrit des psychostimulants, de faire en sorte que les parents soient informés des effets négatifs de ces médicaments et que des solutions thérapeutiques psychosociales et comportementales leur soient proposées, et d’envisager d’organiser des débats publics approfondis avec les différentes parties prenantes, notamment des professionnels de la médecine, des sociologues, des décideurs, des enseignants, des parents et des enfants.

Santé des adolescents

36. Se référant à son observation générale n o  4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention et prenant note de la cible 3.5 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De conduire des études sur les causes des grossesses précoces et d’élaborer un plan d’action global sur la base de leurs résultats en vue de réduire le nombre de ces grossesses ;

b) De garantir l’accès des adolescentes à des services d’avortement médicalisé et de soins post-avortement, en faisant en sorte que leur opinion soit toujours entendue et dûment prise en considération dans le cadre du processus de décision ;

c) De lutter contre la consommation de drogues chez les enfants et les adolescents , notamment en mettant à leur disposition des informations objectives et précises sur la prévention de la consommation de substances psychoactives, y compris le tabac et l’alcool, ainsi qu’en mettant en place des services de désintoxication et de réduction des risques qui soient accessibles et adaptés aux jeunes.

Allaitement maternel

37. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier les mesures visant à promouvoir des pratiques optimales en matière d’allaitement pendant les six premiers mois de la vie et de promouvoir, protéger et faciliter l’allaitement dans tous les secteurs d’activité, notamment l’enseignement.

Niveau de vie

38.Le Comité se félicite de la revalorisation des allocations destinées aux familles nombreuses et aux familles monoparentales. Il est néanmoins préoccupé par :

a)La persistance des inégalités de revenu et la proportion élevée d’enfants exposés au risque de pauvreté ou vivant dans la pauvreté ;

b)La chute récente du niveau de vie des enfants qui vivaient déjà dans la pauvreté, notamment depuis la crise financière de 2010‑2014, et l’aide insuffisante que représentent pour ces enfants les mesures de protection sociale en vigueur ;

c)Les mauvaises conditions de vie des enfants qui habitent dans des « logements non conventionnels », des campements sauvages ou des ilhas, en particulier les enfants roms, les enfants d’ascendance africaine, les enfants issus de familles monoparentales et les enfants handicapés.

39. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur la cible 1.3 des objectifs de développement durable et lui recommande :

a) D’envisager de tenir avec des familles, des enfants et des organisations de la société civile qui défendent les droits de l’enfant des consultations ciblées sur la pauvreté touchant les enfants, en vue de définir des domaines d’action prioritaires et d’élaborer une stratégie axée sur les droits pour éradiquer la pauvreté touchant les enfants ;

b) D’accélérer la mise en œuvre des mesures visant à protéger les groupes particulièrement vulnérables (décret-loi n o  90/2017 et ordonnance n o  253/2017), en accordant une attention particulière aux enfants roms, aux enfants d’ascendance africaine, aux enfants issus de familles monoparentales ou de familles nombreuses et aux enfants handicapés ;

c) De renforcer les mesures visant à faire en sorte que les familles avec enfants, notamment les familles roms et les familles d’ascendance africaine, aient accès à un logement adéquat et abordable, pouvant être un logement social, qui garantisse leur sécurité physique, leur offre suffisamment d’espace, les protège contre les risques sanitaires et structurels −  notamment le froid, l’humidité, la chaleur et la pollution  − , soit accessible aux enfants handicapés et soit raccordé au réseau de distribution d’eau potable, au réseau d’assainissement et à l’électricité.

H.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Droit à l’éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles

40. Se félicitant de la décentralisation du système éducatif entreprise en vertu de la loi n o  55/2018, et prenant note de la cible 4.c des objectifs de développement durable relative à la formation d’enseignants qualifiés, le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour limiter l’incidence des mesures d’austérité sur le secteur de l’éducation, et de prendre les mesures suivantes :

a) Améliorer l’accès à l’éducation, en particulier à l’enseignement secondaire et supérieur, des enfants appartenant à des groupes vulnérables, notamment les enfants roms, les enfants d’ascendance africaine, les enfants handicapés, les enfants vivant dans la pauvreté et les enfants des zones rurales, et promouvoir le recrutement d’enseignants issus de ces groupes ;

b) Faire en sorte que les droits de l’enfant soient enseignés à tous les niveaux d’éducation ;

c) Inscrire l’éducation dans le domaine de la santé sexuelle et procréative au programme d’enseignement obligatoire des adolescents et des adolescentes et faire en sorte que cet enseignement soit fondé sur les droits de l’homme et mette l’accent sur les droits en matière de sexualité et de procréation, sur une sexualité sans danger pour la santé, sur la prévention des comportements sexuels à haut risque et des maladies sexuellement transmissibles, ainsi que sur l’interdiction de la discrimination, la prévention de la violence dans les relations intimes et les effets nocifs de la pornographie ;

d) Continuer d’augmenter les ressources humaines, techniques et financières allouées au développement et à l’expansion d’une éducation préscolaire de qualité et d’un coût abordable qui soit fondée sur une politique globale de prise en charge et de développement de la petite enfance.

I.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 b) à d) et 38 à 40)

Enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants

41.Le Comité salue l’adoption d’accords bilatéraux en vue de l’accueil de cinq enfants non accompagnés en provenance d’Afghanistan et se félicite que l’État partie soit disposé à accueillir d’autres groupes d’enfants non accompagnés à l’avenir. Cependant, en dépit de la décision prise officiellement par le Ministre de l’intérieur le 24 juillet 2018, qui prévoit que nul mineur de moins de 16 ans ne peut être retenu dans un centre d’hébergement temporaire pendant plus de sept jours, le Comité relève avec préoccupation que :

a)Des enfants non accompagnés et des familles avec enfants qui demandent l’asile, franchissent illégalement les frontières de l’État partie ou vivent en situation irrégulière sur son territoire sont placés en détention provisoire ;

b)L’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas évalué de manière cohérente dans le cadre des procédures de détermination du statut de réfugié et des procédures de renvoi des familles de migrants avec enfants ;

c)Les politiques et les pratiques à l’égard des enfants non accompagnés ou séparés n’offrent pas toutes les garanties voulues, en particulier pour ce qui est d’assurer leur représentation légale et de leur assigner un tuteur pendant la procédure de détermination du statut de réfugié ;

d)Les conditions de vie dans les centres de détention provisoire, les centres d’accueil ou les centres d’aide dans lesquels sont placés les demandeurs d’asile ne sont pas adaptées aux enfants non accompagnés et aux familles ;

e)Les procédures de détermination de l’âge ne sont pas toujours adéquates.

42. Se référant aux observations générales conjointes n os  3 et 4 (2017) du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et n os  22 et 23 (2017) du Comité des droits de l’enfant relatives aux droits de l’homme des enfants dans le contexte des migrations internationales, le Comité recommande à l’État partie :

a) De réviser la loi n o  23/2007 de sorte que les migrants et les demandeurs d’asile de moins de 18 ans ou les enfants non accompagnés et les familles avec enfants ne soient pas placés en détention et de garantir l’application de mesures non privatives de liberté ;

b) D’évaluer et de déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant aux différentes étapes des procédures d’immigration et d’asile qui peuvent aboutir à des mesures de détention ou d’expulsion en application de la législation sur l’immigration ;

c) D’améliorer les politiques et les pratiques appliquées pour repérer et enregistrer les enfants séparés et non accompagnés, notamment en assurant à ces derniers une représentation légale efficace et l’assistance d’un tuteur indépendant immédiatement après leur identification ;

d) De transférer immédiatement et à titre prioritaire les enfants demandeurs d’asile et leur famille actuellement retenus dans des centres de détention provisoire, des centres d’accueil ou des centres d’aide, et d’offrir aux réfugiés, en particulier aux enfants et à leur famille, des solutions de relogement fixes et durables afin qu’ils puissent séjourner légalement sur le territoire et qu’ils aient raisonnablement accès à l’emploi et à d’autres ressources ;

e) De continuer à faire appliquer des procédures de détermination de l’âge pluridisciplinaires, transparentes et conformes aux normes internationales, et de faire en sorte que le personnel concerné soit adéquatement formé afin que la psychologie et les circonstances personnelles de l’individu objet de l’évaluation soient prises en considération.

Vente, traite et enlèvement

43. Eu égard à la cible 8.7 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie d’améliorer le mécanisme et les procédures permettant de repérer et de prendre en charge les enfants victimes de la vente, de la traite à des fins d’exploitation sexuelle et du travail forcé, et de faire en sorte que les professionnels concernés soient dûment formés à ces procédures afin que les victimes reçoivent le soutien auquel elles ont droit en vertu de la loi.

Administration de la justice pour enfants

44. Se référant à son observation générale n o  24 (2019) relative aux droits de l’enfant dans le système de justice pour enfants, le Comité prie instamment l’État partie d’assurer la pleine conformité de son système de justice pour enfants avec la Convention et les autres normes pertinentes. Il l’engage en particulier à :

a) Réviser les dispositions en vigueur régissant les mesures de sûreté afin que la détention d’enfants ne puisse être utilisée que dans des circonstances exceptionnelles ;

b) D’instaurer une formation obligatoire consacrée aux normes internationales pertinentes à l’intention de tous les professionnels du système de justice pour enfants tels que les juges, les policiers, les avocats et les procureurs ;

c) D’interdire et d’abolir l’isolement cellulaire des enfants comme mesure disciplinaire, et de lever immédiatement toute mesure de ce type qui serait actuellement appliquée à des enfants (CRC/C/PRT/CO/3-4, par. 66  c));

d) De renforcer la coordination entre tous les acteurs du système de justice pour enfants, notamment les tribunaux, les commissions locales, les services sociaux, d’éducation et de santé, et les services de réinsertion.

Enfants victimes ou témoins d’infractions

45. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que ses lois et ses pratiques tiennent pleinement compte des Lignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels.

Suite donnée aux précédentes observations finales du Comité portant sur l’application du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

46. Rappelant ses précédentes recommandations (CRC/C/OPSC/PRT/CO/1, par. 8 et 32), le Comité recommande à l’État partie :

a) De mettre en place un mécanisme pour systématiser la collecte et l’analyse de données complètes et détaillées sur tous les domaines visés par le Protocole facultatif, de manière à suivre et à évaluer l’efficacité des mesures mises en œuvre ;

b) De réviser sa législation afin d’établir sa compétence extraterritoriale sur toutes les infractions visées par le Protocole facultatif, d’abroger les conditions auxquelles est actuellement subordonné l’exercice de cette compétence et de faire expressément référence aux articles 5-1 c) (compétence extraterritoriale) et 160 (traite des êtres humains) du Code pénal.

Suite donnée aux précédentes observations finales du Comité portant sur l’application du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

47. Rappelant ses précédentes recommandations (CRC/C/OPAC/PRT/CO/1, par. 6 et 21), le Comité engage l’État partie à :

a) Prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir une coordination efficace de la mise en œuvre du Protocole facultatif au x niveau x national, provincial et local, et allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes au mécanisme de coordination ;

b) Réviser les dispositions de sa législation nationale de manière à garantir que le recrutement d’enfants par les forces armées ou par des groupes armés constitue une infraction pénale en temps de paix comme en temps de guerre et à criminaliser le recrutement et l’utilisation d’enfants par des sociétés de sécurité privées.

J.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

48. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, à laquelle il n’est pas encore partie, afin de renforcer encore le respect des droits de l’enfant.

K.Coopération avec les organismes régionaux

49. Le Comité recommande à l’État partie de coopérer avec le Conseil de l’Europe à la mise en œuvre de la Convention et d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme, sur son territoire comme dans d’autres États membres du Conseil de l’Europe.

IV.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

50. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement mises en œuvre. Il recommande également que le rapport valant cinquième et sixième rapports périodiques, les réponses écrites de l’État partie et les présentes observations finales soient largement diffusées dans les langues du pays.

B.Prochain rapport

51. Le Comité invite l’État partie à soumettre son rapport valant septième et huitième rapports périodiques le 20 mars 2025 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devra être conforme aux directives spécifiques à l’instrument adoptées le 31 janvier 2014 (CRC/C/58/Rev.3) et ne pas dépasser 21 200 mots (résolution 68/268 de l’Assemblée générale, par. 16). Si l’État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur de manière à se conformer à la rés olution susmentionnée. S’il n’est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d’examen par le Comité ne pourra pas être garantie.

52. Le Comité invite en outre l’État partie à soumettre un document de base actualisé qui ne dépasse pas 42 400 mots et soit conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports à présenter en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I) et au paragraphe 16 de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale.