NATIONS

UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.

gÉnÉrale

CAT/C/80/add.1

18 juillet 2005

français

Original : ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L'ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Quatrième rapport périodique que les États parties devaient présenter en 2004

Additif* **

estonie

[1er mars 2005]

* Le rapport initial de l'Estonie a été publié sous la cote CAT/C/16/Add.9; il est rendu compte de l'examen de ce rapport par le Comité dans les documents CAT/C/SR.534, 537 et 545, ainsi que dans le document CAT/C/CR/29/5.

Conformément à la décision du Comité (voir les conclusions du Comité, CAT/C/CR/29/5, par. 7), le présent rapport doit être examiné comme le quatrième rapport périodique de l'Estonie.

** Les services d’édition n’ont pas revu le présent document avant sa traduction par le Secrétariat.

GE.05-42881 (EXT)

Table des matiÈres

p aragraphes p age

Introduction5

Nouvelles mesures et faits nouveaux touchant l'application de la Convention1 - 696

Article 31 - 116

Loi portant modification de la loi sur les réfugiés1 - 86

Extradition9 - 117

Article 412 - 307

Code pénal12 - 307

Article 511

Compétence de la République d'Estonie pour les infractions visées à l'article 411

Article 631 - 3211

Coopération en matière de procédure pénale31 - 3212

Article 733 - 3712

Loi sur l'aide juridictionnelle de l'État33 - 3712

Article 838 - 4212

Conventions internationales38 - 4212

Article 1043 - 4513

L'interdiction de la torture et des traitements cruels et inhumains dans la législation estonienne43 - 4513

Formation des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire46 - 4814

Article 1149 - 6214

Loi portant modification de la loi sur la répression des mineurs et de la loi sur les établissements d'enseignement primaires et secondaires du second cycle4914

Loi sur la prévention des maladies contagieuses5014

La prison de Tartu51 - 5415

La prison de Viru55 - 5715

Regroupement de la prison ouverte de Rummu et de la prison de Murru58 - 5916

L'Hôpital central des prisons6016

Regroupement de la prison de Maardu et de la prison de Tallinn6116

Les agents de liaison6216

p aragraphes p age

Article 1363 - 6617

Code de procédure pénale63 - 6517

Code de procédure administrative6618

Article 1467 -6918

Loi sur l'aide aux victimes67 - 6818

Modification de la législation en ce qui concerne la base du réexamen des décisions judiciaires6919

Complément d'information demandé par le Comité 70 - 100 19

Applicabilité directe de la Convention70 - 7419

Assistance consulaire en cas de détention75 - 8320

Jurisprudence concernant la recevabilité des preuves84 - 8821

Définition du détenu89 - 9622

Les femmes en prison97 - 10024

Instruction et travail en prison101 - 10424

Services médicaux dans les prisons estoniennes105 - 11025

Autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants 111 - 147 26

La violence à l'école111 - 11926

La violence contre les femmes120 - 12728

La traite des êtres humains128 - 14130

La lutte contre le terrorisme142 - 14732

Mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations du Comité 148 - 250 32

La définition de la torture dans la législation estonienne148 - 15032

La formation du personnel151 - 15534

La surveillance des personnes placées en détention et de leurs proches dans les établissements pénitentiaires156 - 15935

Travaux de rénovation et de construction dans les établissements pénitentiaires160 - 16635

Protection contre les mauvais traitements et la torture167 - 18037

Code de conduite pour les fonctionnaires de police18140

Personnes en situation irrégulière et demandeurs d'asile182 - 19140

Répartition des détenus condamnés par nationalité192 - 19343

Ratification de la Convention de 1961 sur la réduction des cas d'apatridie19443

p aragraphes p age

Mécanisme pour la collecte de données sur les questions relevant de la Convention19544

Déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention19644

Le Chancelier de justice197 - 23444

L'Inspection sanitaire235 - 23848

Impartialité et objectivité des enquêtes sur les plaintes239 - 24049

Plaintes concernant le recours à la violence par des agents de l'État241 - 24950

Affaires contre l'Estonie examinées par la Cour européenne des droits de l'homme25055

Introduction

La République d'Estonie est partie à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui est entrée en vigueur dans le pays le 20 novembre 1991. Le présent rapport est soumis en application de l'article 19 de la Convention, selon lequel les États parties doivent présenter régulièrement des rapports sur les mesures prises pour mettre en œuvre la Convention et sur les progrès réalisés dans ce domaine. L'Estonie a présenté ses premier, deuxième et troisième rapports sous la forme d'un seul document en juin 2001. Le Comité contre la torture a examiné ce document en novembre 2002 et adopté à son sujet des conclusions et recommandations.

Le présent rapport rend compte des mesures d'ordre législatif, administratif et autre qui ont été prises au cours de la période 2001-2004 pour mettre en œuvre les droits énoncés dans la Convention. Il tient compte également des questions posées à l'Estonie par le Comité contre la torture sur la base du précédent rapport. Une attention particulière a été accordée aux conclusions et recommandations adoptées par le Comité à l'issue de l'examen de ce rapport.

Le présent rapport a été établi par le Ministère de la justice, en coopération avec le Ministère des affaires étrangères, le Ministère des affaires sociales et le Ministère de l'intérieur. Des consultations ont également été tenues avec le Chancelier de justice. Les questions soulevées par le Comité, accompagnées d'une traduction en estonien, ont en outre été adressées aux organisations non gouvernementales intéressées pour qu'elles puissent faire part de leurs observations et propositions.

Dans ses recommandations, le Comité a relevé parmi les points positifs que les rapports de l'Estonie et les observations finales correspondantes des organes des Nations Unies étaient publiés sur le site Web du Ministère des affaires étrangères. Afin de continuer d'informer le public sur les droits et les devoirs énoncés dans la Convention, les rapports de l'État et les recommandations correspondantes continueront d'être publiés sur ce site en estonien et en anglais.

Le rapport initial ayant été rédigé en anglais, on le trouve en anglais sur le site. Le présent rapport a été rédigé en estonien, puis traduit en anglais : il sera donc affiché en estonien et en anglais. On trouve aussi sur le site Web du Ministère des affaires étrangères les conclusions du Comité contre la torture, en estonien et en anglais.

Nouvelles mesures et faits nouveaux touchant l'application de la Convention

Article 3

Loi portant modification de la loi sur les réfugiés

1.L'Estonie est partie à la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés et au Protocole relatif au statut des réfugiés du 31 janvier 1967, ainsi qu'à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. La mise en œuvre de ces instruments internationaux est garantie en vertu des procédures établies par la loi sur les réfugiés et par la loi sur les étrangers.

2.La loi portant modification de la loi sur les réfugiés est entrée en vigueur le 1er mai 2003. Le premier chapitre de la loi a été modifié et un nouveau chapitre premier, intitulé "1. Procédures d'asile", a été inséré qui régit le séjour des demandeurs d'asile dans le centre d'accueil et définit des expressions telles que "pays sûr", "interdiction de refoulement", etc.

3.La loi a été modifiée parce qu'il était nécessaire d'en réviser et d'en préciser les dispositions, de réglementer de façon plus détaillée les questions relatives à l'accueil des demandeurs d'asile et d'assurer un traitement accéléré des demandes d'asile. Il s'agissait d'habiliter les autorités saisies des demandes d'asile à statuer sur l'octroi ou le rejet d'une demande et sur la révocation d'une autorisation d'asile. L'objectif était aussi de permettre une application plus étendue de la procédure de demande accélérée.

4.La précédente loi sur les réfugiés présentait des insuffisances sur plusieurs points importants et des discordances entre les dispositions. Elle ne prévoyait en outre pas de procédure uniforme pour la réalisation des entretiens initiaux et l'acceptation des demandes d'asile, s'agissant des modalités à suivre dans le cadre de la procédure accélérée et de la procédure normale. Elle ne précisait pas non plus clairement qui devait statuer sur l'annulation du statut de réfugié. Les conditions de séjour des demandeurs d'asile en Estonie ainsi que les conditions de séjour dans le centre d'accueil n'étaient pas réglementées. La nouvelle loi remédie à ces lacunes et prévoit les notions de pays sûr, pays de résidence permanente et pays tiers sûr qui sont utilisées dans la législation des États membres de l'Union européenne et qui établissent des critères précis pour l'application de la procédure accélérée.

5.Conformément à l'article 8 de la loi sur les réfugiés, il est possible de mettre fin à une procédure d'asile en rejetant la demande d'asile si le demandeur est arrivé en Estonie en provenance d'un pays pouvant être considéré comme un pays sûr ou s'il y a des raisons de penser que le pays dont le demandeur a la nationalité ou dans lequel il est résident permanent est un pays d'origine sûr.

6.Un pays sûr est un pays qui se conforme aux obligations énoncées aux articles 32 et 33 de la Convention relative au statut des réfugiés, à l'article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et à l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme. Les pays sûrs sont aussi les pays dans lesquels un demandeur d'asile pourra être protégé contre les persécutions et contre l'expulsion vers son pays d'origine ou vers un autre pays où une telle protection ne lui serait pas garantie. Un pays d'origine sûr est un pays où, en règle générale, il n'existe pas de risque sérieux de persécution. Pour déterminer si un pays d'origine est sûr, on considère également s'il a accédé aux principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et s'il en observe les dispositions.

7.Les pays sûrs et les pays d'origine sûrs sont déterminés par le Conseil de la citoyenneté et des migrations.

8.La nouvelle loi prévoit également que, pendant le déroulement de la procédure accélérée, un demandeur d'asile peut quitter le poste frontière s'il a besoin d'une assistance médicale d'urgence. La loi précédente n'envisageait pas une telle possibilité, contrairement aux principes humanitaires communément admis.

Extradition

9.L'Estonie n'a reçu aucune demande d'extradition qui aurait été susceptible d'être rejetée pour cause de violation des droits de l'homme dans l'État demandeur. Le 25 août 2004, le Ministre de la justice a décidé de refuser d'extrader vers la Turquie une personne possédant la double nationalité turque et suédoise, Heybet Acikgös (Hemo Amedsson), que la Turquie accusait d'actes terroristes. La demande d'extradition a été rejetée car, selon le Code pénal estonien, il y avait prescription. Le rejet était également motivé par le fait que l'intéressé était un ressortissant suédois et que les autorités suédoises avaient demandé son retour en Suède, où il avait vécu pendant plus de 20 ans. L'Estonie a considéré que, puisque Amedsson était un ressortissant suédois, la Suède était mieux informée de ses activités.

10.Aucune demande d'extradition soumise par l'Estonie n'a été rejetée pour cause de violation ou de soupçon de violation des droits de l'homme en Estonie. Le seul rejet opposé à l'Estonie, par les États-Unis en 2002, était dû à des nuances juridiques.

Le tableau ci-dessous récapitule la situation en ce qui concerne les demandes d'extradition soumises par l'Estonie entre le 1er juin 2001 et le 15 octobre 2004 :

Année

Nombre de demandes

Demandes acceptées

Demandes rejetées

2001 (2e semestre)

9

9

0

2002

35

34

1 (États-Unis)

2003

29

28

0

2004

6

4

0

Article 4

Code pénal

12.Le cadre de la réforme de la législation pénale a été élaboré en 1995. L'un des principaux résultats de la réforme a été la rédaction du Code pénal, qui a remanié les principes fondamentaux du droit pénal en général. Le nouveau Code pénal est entré en vigueur le 1er septembre 2002.

13.Le Code pénal contient une partie générale (éléments constitutifs des infractions, peines, régime d'application des peines) concernant les infractions pénales et les délits correctionnels. Les poursuites correctionnelles sont régies depuis le 1er septembre 2003 par le Code correctionnel.

14.L'âge de la responsabilité pénale était auparavant fixé à 15 ans et, pour certaines infractions, à 13 ans. Le nouveau Code pénal fixe un âge unique pour la responsabilité pénale, qui est de 14 ans. Il prévoit également la possibilité de sanctionner les personnes morales pour la perpétration d'une infraction pénale.

15.Le nouveau Code prévoit plusieurs peines de substitution à l'emprisonnement, comme le travail d'intérêt général. L'idée d'instituer des peines de substitution était d'abandonner la conception qui prévalait auparavant selon laquelle une peine ne pouvait être purgée que dans un établissement pénitentiaire.

16.Le Code prévoit également le sursis, total ou partiel, à l'exécution de la peine, assorti ou non d'autres obligations. La détention dite "de week-end" permet de purger sa peine par fragments.

17.Le chapitre du Code pénal concernant les atteintes aux personnes définit les éléments constitutifs des actes de violence. Selon la loi, les atteintes à la santé d'une personne, les coups et blessures ou toute autre forme de violence causant une souffrance physique sont punissables d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre jusqu'à trois ans (art. 121). Le fait d'infliger des sévices corporels prolongés ou des sévices entraînant de grandes souffrances est punissable d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre jusqu'à cinq ans (art. 122). Le fait de menacer de tuer quelqu'un, de porter atteinte à sa santé ou de détruire ou d'endommager gravement ses biens, s'il existe des raisons de craindre que cette menace sera mise à exécution, est punissable d'une amende ou d'une peine d'un an d'emprisonnement (art. 120).

18.Le fait de commettre un acte de violence contre un représentant de l'État ou des forces de l'ordre dans l'exercice de ses fonctions est passible d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre jusqu'à cinq ans (art. 274).

19.Le Code pénal consacre un chapitre spécial à la punition des infractions consistant à porter gravement atteinte à la santé d'un juge, d'un juge non professionnel, d'un responsable de l'enquête préliminaire, d'un procureur, d'un avocat de la défense, d'un représentant de la victime, ou de personnes proches des susnommés (art. 302 et 303). Le recours à la violence contre un suspect, un prévenu, un inculpé, un acquitté, un condamné, un témoin, un expert, un traducteur, un interprète ou une victime est également passible de sanctions (art. 323).

20.Conformément à l'article 324 du Code pénal, un fonctionnaire d'un établissement de type carcéral qui, abusant de sa fonction officielle, porte atteinte à la dignité d'un prisonnier, d'un détenu ou d'un prévenu, prend des mesures discriminatoires à l'égard d'une telle personne ou restreint illicitement ses droits, est passible d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre jusqu'à un an.

21.Outre les types d'infraction pénale qui sont prévus dans le Code pénal et qui ont été décrits dans le précédent rapport de l'Estonie, la nouvelle section spéciale du Code pénal prévoit plusieurs nouvelles infractions, comme l'esclavage (art. 133) et l'enlèvement et le fait d'emmener une personne dans un pays où la liberté de la personne est restreinte (art. 134).

Art. 133 – Esclavage

Le fait de placer, par la violence ou la duperie, un être humain dans une situation dans laquelle il est forcé de travailler ou d'accomplir d'autres services contre son gré au profit d'une autre personne, ou de maintenir une personne dans cette situation, est passible d'une peine d'un à cinq ans d'emprisonnement.

Le même acte, s'il est commis :

1)contre deux personnes ou plus, ou

2)contre une personne âgée de moins de 18 ans,

est passible d'une peine de trois à douze ans d'emprisonnement.

Art. 134 – Le fait d'emmener une personne dans un pays où la liberté de la personne est restreinte

Le fait d'emmener ou d'abandonner une personne, en usant de violence ou de duperie, dans un pays où elle est exposée à la persécution ou à l'humiliation pour des raisons de race ou de sexe ou pour d'autres raisons, et où elle ne dispose pas de moyens de protection juridique contre de tels traitements, alors qu'elle n'a pas la possibilité de quitter ce pays, est puni d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre jusqu'à cinq ans.

Le même acte, s'il est commis :

1)contre deux personnes ou plus, ou

2)contre une personne âgée de moins de 18 ans,

est passible d'une peine de deux à dix ans d'emprisonnement.

22.Le Code pénal punit également le génocide ainsi que les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre.

23.L'Estonie est partie aux conventions internationales dans ce domaine, notamment à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, à la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité et au Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

24.Nous voudrions faire observer à cet égard que le code pénal qui était en vigueur au moment de la soumission du précédent rapport ne contenait pas de disposition distincte sanctionnant le crime de génocide. Celui-ci était visé par l'article concernant les crimes contre l'humanité (art. 61). Or la formulation imprécise de cet article posait certains problèmes d'interprétation aux tribunaux estoniens. Les tribunaux de première instance, par exemple, avaient des opinions divergentes sur les déportations de 1949, c'est-à-dire sur la question de savoir si ces déportations constituaient un crime contre l'humanité ou un crime de génocide. En 2000, la chambre criminelle de la Cour suprême, dans sa décision 1-1-31-00, a appelé l'attention sur les différents éléments constitutifs d'une infraction pénale énoncés à l'article 61 et jugé que, du fait qu'il n'y avait pas de distinction entre le génocide et les autres crimes contre l'humanité, les tribunaux interprétaient différemment la disposition en question du Code pénal.

25.Le Code pénal adopté en 2001 en remplacement de l'ancien code inclut les modifications nécessaires et traite du génocide et des autres crimes contre l'humanité dans des articles distincts. L'article 89 vise les crimes contre l'humanité et l'article 90 le crime de génocide.

26.L'Estonie a ratifié le Statut de Rome le 30 janvier 2002. Le régime défini par le Statut de Rome est particulièrement pertinent en ce qui concerne la torture. Certaines caractéristiques de cette infraction pénale –notamment les relations des auteurs d'actes de torture avec les autorités- expliquent l'impunité des auteurs. La création de la Cour pénale internationale est un moyen de lutter contre l'impunité. Membre fondateur de la Cour pénale internationale, l'Estonie a adopté les dispositions d'application du Statut de Rome. Outre les règles régissant la coopération entre l'Estonie et la Cour incluses dans le Code de procédure pénale, le Code pénal prévoit les crimes de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre. Des principes de compétence législative détaillés sont d'autre part établis selon lesquels l'exercice de la juridiction est basé sur les principes de territorialité, de personnalité active et passive, d'universalité et de défense.

27.Un acte de torture pouvant, dans certaines conditions, constituer un crime contre l'humanité, un génocide ou un crime de guerre, l'État partie doit adopter les dispositions législatives nécessaires pour pouvoir être le premier à engager des poursuites judiciaires, étant donné la nature complémentaire du régime institué par le Statut de Rome.

28.Conformément à l'article 89 du Code pénal, la torture est un des actes pouvant constituer un aspect objectif du crime contre l'humanité, d'autres caractéristiques étant considérées comme des éléments contextuels –caractère massif ou systématique des actes commis, existence d'un élément politique ou d'une relation avec l'État, actes commis en organisation ou en groupe-, distinguant ce crime d'un acte de violence individuel. L'article 90, qui concerne le crime de génocide, stipule que la torture, outre de porter atteinte à la santé, est un acte pouvant constituer un aspect objectif du crime de génocide.

29.Les articles 97, 99, 101 et 102 du Code pénal, qui relèvent de la section sur les crimes de guerre, qualifient la torture d'infraction pénale et de grave violation des conventions de Genève de 1949 à l'égard des personnes protégées par ces conventions. Il importe également de noter que la législation estonienne ne fait pas de distinction entre les conflits armés internationaux et les conflits armés civils.

30.La notion de torture dans la législation estonienne est considérée dans la Partie III du présent rapport.

Article 5

Compétence de la République d'Estonie pour les infractions visées à l'article 4

Dispositions de la Convention

Dispositions correspondantes du Code pénal

L'infraction est commise sur un territoire sous juridiction estonienne ou à bord de navires ou d'aéronefs immatriculés en Estonie

Art. 6. Champ d'application territorial du droit pénal

1)territoire estonien

2)navire ou aéronef immatriculé en Estonie

L'auteur présumé de l'infraction est un ressortissant estonien

Art. 7. Champ d'application individuel du droit pénal

3)l'auteur de l'infraction est un citoyen estonien au moment des faits ou acquiert la nationalité estonienne après les faits

La victime est un ressortissant estonien et l'Estonie juge approprié de punir

Art. 7. Champ d'application individuel du droit pénal

2)l'acte est commis contre un citoyen estonien

L'auteur présumé de l'infraction se trouve sur tout territoire soumis à la juridiction estonienne et l'Estonie ne l'extrade pas conformément à l'article 8 vers l'un des États visés au paragraphe 1 du présent article

Art. 7. Champ d'application individuel du droit pénal

3)l'auteur de l'infraction est un ressortissant étranger qui a été placé en détention en Estonie et n'est pas extradé

Article 6

Coopération en matière de procédure pénale

31.Les dispositions régissant la coopération en matière de procédure pénale énoncées dans le Code de procédure pénale (art. 433 à 508) qui est entré en vigueur le 1er juillet 2004 garantissent le respect des dispositions de l'article 6 de la Convention. La coopération internationale en matière de procédure pénale concerne :

l'extradition de personnes vers des États étrangers;

l'entraide judiciaire des États en matière pénale;

l'exécution des décisions des tribunaux étrangers;

la prise en charge et la transmission de procédures pénales engagées;

la coopération avec la Cour pénale internationale;

l'extradition vers des États membres de l'Union européenne.

32.Par rapport au précédent Code pénal, les dispositions relatives à la coopération internationale sont beaucoup plus détaillées. Le principe de l'applicabilité directe des traités internationaux est également valide ici.

Article 7

Loi sur l'aide juridictionnelle de l'État

33.Le 1er mars 2005, la nouvelle loi sur l'aide juridictionnelle de l'État entrera en vigueur en Estonie. Cette loi regroupe les dispositions régissant l'aide juridictionnelle de l'État qui se trouvaient auparavant dans divers codes de procédure. Elle vise à assurer que tous les individus disposent en temps utile et en quantité suffisante de services juridiques compétents et fiables. Les ressortissants étrangers jouissent dans ce domaine des mêmes droits que les citoyens estoniens.

34.La loi permet de recevoir une aide juridictionnelle non seulement au titre de la procédure judiciaire mais également durant la phase précédant le procès, dans le cadre des procédures administratives et des procédures d'exécution, ainsi que pour la préparation des dossiers, au titre de conseils juridiques ou de toute autre forme de représentation en justice. La fourniture par oral de conseils préalables est particulièrement importante en tant que première mesure d'aide juridictionnelle puisque la définition du différend intervient à ce stade et que l'orientation de toutes les mesures ultérieures en dépend.

35.Un principe important est l'obligation faite aux services juridiques de fournir gratuitement aux personnes qui ont besoin d'une aide juridictionnelle des explications concernant les conditions à remplir et les modalités à suivre pour obtenir d'une telle aide.

36.L'octroi de l'aide juridictionnelle est financé par les allocations prévues à ce titre dans le budget de l'État.

37.L'article 37 de la loi permet d'obtenir une aide juridictionnelle pour former un recours auprès de la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg en cas de violation présumée par l'État estonien de la Convention européenne des droits de l'homme ou de ses protocoles additionnels liant l'Estonie.

Article 8

Conventions internationales

38.Au cours de la période 2001-2004, la République d'Estonie a adhéré aux conventions internationales relatives à la procédure pénale ci-après, ou les a ratifiées :

Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du Conseil de l'Europe, second protocole additionnel (2004);

Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale de l'Union européenne (2004);

Dispositions de la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne relative au mandat d'arrêt et aux procédures de remise entre États membres (appliquées depuis le 1er juillet 2004);

Convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs (ratification en 2001);

Convention relative à l'extradition entre les États membres de l'Union européenne et Convention relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les États membres de l'Union européenne (ratification en 2004).

39.L'Estonie a adhéré le 12 novembre 2003 au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort.

40.Le 3 mai 2002, la République d'Estonie a signé le Protocole N°13 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (entré en vigueur au plan international le 1er juillet 2003), qui prévoit l'abolition de la peine de mort en toutes circonstances et qui a donc un effet nettement plus important que le précédent Protocole N°6 à la Convention européenne et que le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte. L'Estonie a ratifié le Protocole N°13 susmentionné le 25 février 2004.

41.L'effet combiné des articles premier et 2 du Protocole N°13 exclut complètement l'application de la peine de mort pour tout motif et en toutes circonstances. Étant donné que la législation estonienne avait supprimé la possibilité de l'application de la peine de mort en toutes circonstances dès le 19 juin 1998, la ratification du Protocole n'a pas modifié la situation juridique prévalant dans ce domaine en Estonie. Toutefois, elle exclut la possibilité d'introduire à l'avenir dans la législation le principe de l'application de la peine de mort pour des actes commis en temps de guerre ou de danger imminent de guerre, comme prévu à l'article 2 du Protocole N°6 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, puisque, en vertu de l'article 123, paragraphe 2, de la Constitution estonienne, si des lois ou autres textes législatifs estoniens sont en contradiction avec des traités internationaux ratifiés par le Riigikogu, ce sont les dispositions des traités internationaux qui s'appliquent.

42.L'Estonie a également signé le Protocole additionnel se rapportant à la Convention contre la torture. Le Président de la République d'Estonie a souscrit à ce protocole à la session de l'Assemblée générale des Nations Unies tenue à New York du 21 au 24 septembre 2004. L'objet du protocole est de mieux assurer la prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Article 10

L'interdiction de la torture et des traitements cruels et inhumains dans la législation estonienne

43.L'interdiction et la répression de la torture et des traitements cruels et inhumains sont stipulées à l'article 18 de la Constitution estonienne. Cette interdiction est garantie par le Code pénal, qui fait de la torture une infraction pénale. L'article 9, paragraphe 3, du Code de procédure pénale prévoit que les parties à une procédure doivent être traitées sans qu'il soit fait atteinte à leur honneur ou à leur dignité. La seconde phrase de cette disposition interdit la torture et les traitements cruels et inhumains, interdiction qui est également garantie par les dispositions du Code pénal. La mise en œuvre d'une telle interdiction est garantie par les dispositions du Code pénal susmentionnées. L'interdiction de la torture est réaffirmée à l'article 64, paragraphe 1, du Code, qui régit le recueil des témoignages.

44.L'article 4, paragraphe 2, clause 1, de la loi sur l'état d'urgence interdit la torture pendant l'état d'urgence dans le cadre de la restriction des droits et des libertés des individus.

45.La loi relative aux réfugiés et la loi relative à l'obligation de quitter le pays et à l'interdiction d'y entrer font référence à la Convention des Nations Unies contre la torture.

Formation des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire

46.Le Ministère de la justice considère qu'il est important de développer en permanence la formation en cours d'emploi du personnel pénitentiaire. Une autre de ses priorités consiste à organiser une formation pour le développement des compétences sociales. Le personnel pénitentiaire acquiert des compétences de base au cours de sa formation. La formation en cours d'emploi porte principalement sur la psychologie de la communication, le droit, la protection sociale et les soins de santé.

47.Les fonctionnaires de l'administration pénitentiaire sont formés dans deux établissements : le Séminaire pédagogique de Tallinn forme en un an les futurs gardiens de prison, tandis que l'Académie de la fonction publique forme les inspecteurs en trois ans. Les deux établissements proposent soit une formation de jour soit une formation à distance. Ils assurent par ailleurs régulièrement une formation en cours d'emploi.

48.Conformément à la stratégie de développement du Ministère de la justice, les deux formations destinées au personnel pénitentiaire susmentionnées seront regroupées en 2005/2006. Le but est d'unifier la formation du personnel pénitentiaire et d'améliorer la qualité des études.

Article 11

Loi portant modification de la loi sur la répression des mineurs et de la loi sur les établissements d'enseignement primaires et secondaires du second cycle

49.Cette loi est entrée en vigueur le 1er juillet 2001. Elle établit des conditions particulières pour la scolarisation des mineurs nécessitant une éducation spéciale. Aucune loi ne prévoyait jusqu'alors de telles conditions, comme par exemple la possibilité d'isoler un élève d'une école spéciale, pendant une période n'excédant pas 24 heures, pour qu'il puisse se calmer. Ces conditions particulières sont nécessaires en tant que moyen éducatif permettant d'exercer une influence sur les mineurs tout en protégeant leurs droits et leurs libertés.

Loi sur la prévention des maladies contagieuses

50.Cette loi est entrée en vigueur le 1er mai 2004. Elle prévoit notamment une obligation de soins pour les personnes souffrant d'une maladie contagieuse. En principe, le fait d'obliger une personne souffrant d'une maladie contagieuse à se faire soigner et à être maintenue isolée n'est pas différent du fait d'isoler un délinquant dont l'activité illicite met également en danger la santé et la vie d'autrui, mesure que prévoit la législation estonienne. Auparavant, une possibilité similaire était prévue par la loi sur les soins psychiatriques. La loi sur les maladies contagieuses autorise l'hospitalisation d'office d'une personne atteinte d'une maladie contagieuse pour une durée de 48 heures. Les durées prévues pour une obligation de soins avalisée par une décision administrative (jusqu'à 182 jours et, en cas de tuberculose, jusqu'à 240 jours) sont basées sur les durées de traitement des différentes maladies contagieuses.

La prison de Tartu

51.Les premiers détenus ont été admis à la prison de Tartu le 16 octobre 2002, marquant le début de la transformation du système pénitentiaire estonien d'un régime de colonie pénitentiaire en un régime cellulaire. L'ouverture de la prison de Tartu a également présidé à la mise en place en Estonie d'un système pénitentiaire régional. Elle a permis de regrouper la prison centrale et la prison de Tallinn et de fermer la prison centrale le 31 décembre 2002.

52.La prison de Tartu occupe un terrain de 93 763 m2 au sud du pays. La surface utile totale de la nouvelle prison est de 23 000 m2, avec un bâtiment administratif, des locaux d'accueil, des installations sportives et de repos, des salles d'étude, des installations de production pour le travail du métal, du bois et du textile, des espaces pour les services religieux et des locaux d'entretien. On compte 479 cellules de 10 m2 chacune. La prison de Tartu est l'établissement carcéral le plus moderne d'Estonie et la sécurité de la communauté est assurée par plus de 170 caméras de surveillance, des systèmes d'attaque et d'alerte pour la protection du personnel et des systèmes spéciaux de sécurité pour surveiller le périmètre extérieur de la prison, qui est long de plus d'un kilomètre.

53.On compte au total 361 postes d'employés, dont 269 postes de fonctionnaire de l'administration pénitentiaire. Seul un employé de la prison sur douze avait déjà travaillé dans un établissement carcéral auparavant, ce qui facilite l'adaptation du personnel à ce nouveau type de prison.

54.En mai 2003, en coopération avec le Département des prisons du Ministère de la justice et la police, un projet pilote a été entrepris en vue de l'établissement d'un centre de convoyage dans le cadre de la prison de Tartu. Ce projet a permis de créer, au sein de la structure de l'établissement, un service indépendant d'accompagnement des détenus qui s'occupe d'organiser le convoyage des détenus entre les différents établissements pénitentiaires du pays.

La prison de Viru

55.La prison de Viru, qui pourra accueillir un millier de détenus, sera ouverte à Jõhvi, dans le comté d'Ida-Viru, en 2007. L'établissement comprendra également une prison ouverte de 75 places et une maison d'arrêt de 150 places. La maison d'arrêt et le quartier de haute sécurité seront entourés par une même enceinte. La prison ouverte se situera à proximité immédiate. Il y aura 305 employés. Le projet de formation du personnel appelé à travailler dans la prison de Viru prévoit les cours les plus complets sur les droits de l'homme jamais proposés au personnel pénitentiaire.

56.La construction de la prison de Viru a pour objet de développer le système des prisons régionales et d'accroître la capacité d'accueil des établissements pénitentiaires répondant à des normes modernes.

57.L'ouverture de la prison de Viru permettra d'accélérer le traitement des affaires pénales et de réduire ainsi la durée des détentions préventives. Les condamnés purgeront leur peine dans une prison située dans leur région, ce qui facilitera le maintien des relations avec la famille et les proches.

Regroupement de la prison ouverte de Rummu et de la prison de Murru

58.Fin 2003, le regroupement de la prison ouverte de Rummu et de la prison de Murru, situées à quelques centaines de mètres l'une de l'autre, a commencé. Il s'agit principalement :

de réaliser des économies;

d'assurer une gestion plus flexible des finances et du personnel;

d'améliorer la qualité des activités.

59.Conséquence de ce regroupement, une prison ouverte a été établie, le 1er avril 2004, dans le cadre de la prison de Murru. La fusion était d'ordre structurel, l'idée étant de maintenir au moins aux mêmes niveau et degré de qualité l'exercice de l'ensemble des fonctions de la prison ouverte; les détenus devaient avoir autant sinon plus de possibilités en matière d'activités sportives, de travail, de services de bibliothèque, etc.

L'Hôpital central des prisons

60.L'Hôpital central des prisons qui était jusque là situé dans les locaux de l'ancienne prison centrale se trouve aujourd'hui dans la prison de Tallinn en attendant l'achèvement de la construction du nouvel hôpital des prisons. Le 1er novembre 2004, l'Hôpital central des prisons a fusionné avec le département sanitaire de la prison de Tallinn. Avant la fin du premier semestre de 2005, le département sanitaire de la prison de Tallinn sera transféré dans les locaux de l'ancienne prison de Maardu.

Regroupement de la prison de Maardu et de la prison de Tallinn

61.Le 1er novembre 2004, la prison de Maardu a été regroupée avec celle de Tallinn. Les prévenus et détenus se trouvant dans la prison de Maardu seront transférés vers d'autres prisons. Les travaux de construction nécessaires seront réalisés pendant le premier semestre de 2005 pour que, à la fin du semestre, le département sanitaire de la prison de Tallinn qui se trouve actuellement dans les locaux de l'ancienne prison centrale puisse déménager dans les locaux de l'ancienne prison de Maardu.

Les agents de liaison

62.La principale nouveauté intervenue en 2003 en ce qui concerne le personnel pénitentiaire a été la mise en place, dans l'ensemble du système carcéral, d'agents de liaison. Le but d'un tel projet, entrepris en 2002, était de créer une fonction de coordination des relations entre les détenus à l'intérieur de la prison. Les personnes affectées à cette tâche sont chargées non seulement de surveiller les détenus pour empêcher qu'ils ne s'évadent mais aussi de jouer auprès d'eux un rôle d'interlocuteur privilégié en cas de problème. Les titulaires des nouveaux postes ainsi que leurs supérieurs directs ont bénéficié d'une formation en cours d'emploi. Outre une répartition du travail plus efficace, cette mesure s'est traduite par un accroissement du niveau de satisfaction. Elle a permis à de nombreux fonctionnaires d'obtenir une promotion et conduit au recrutement de nouveaux employés. La fonction d'agent de liaison est une occasion pour les intéressés de faire preuve de leur compétence professionnelle.

Article 13

Code de procédure pénale

63.Le nouveau Code de procédure pénale est entré en vigueur le 1er juillet 2004. Pour garantir une plus grande rapidité et une meilleure efficacité des procédures pénales, le nouveau code permet de classer une affaire pour raisons de circonstances. Du fait d'une telle mesure, les ressources peuvent être consacrées au traitement d'affaires plus graves. Le Code de procédure pénale prévoit également des formes de procédure judiciaire simplifiées, qui devraient contribuer à accélérer les procédures.

64.Les rôles respectifs des parties sont définis de façon plus détaillée. Le ministère public est chargé non seulement de garantir la légalité de la phase préalable au procès mais aussi d'en assurer l'efficacité. À cet effet, il peut classer une affaire au stade de l'enquête préliminaire (y compris pour raisons de circonstances); le procureur est en outre la seule personne habilitée à demander au magistrat chargé de l'enquête préliminaire l'application d'actes de procédure limitant les libertés fondamentales d'une personne. Le nouveau Code de procédure pénale introduit d'autre part un certain nombre de nouveaux éléments du principe du contradictoire dans la procédure judiciaire afin d'assurer l'impartialité et l'objectivité des jugements. Il prévoit l'audition contradictoire des témoins et de l'accusé. Le principe du contradictoire se manifeste aussi dans le fait que l'abandon des poursuites par le procureur entraîne la relaxe, c'est-à-dire que le tribunal n'a pas le droit de continuer les poursuites d'office.

65.Les nouveaux principes ci-après méritent d'être mentionnés en rapport avec les droits de l'homme :

Création de l'institution du magistrat chargé de l'enquête préliminaire – au cours de la phase préalable au procès, à la demande du parquet, le magistrat chargé de l'enquête préliminaire peut autoriser des actes de procédure limitant les libertés fondamentales (arrestation, perquisition, surveillance, par exemple écoute téléphonique de conversations privées et lecture de la correspondance, confiscation de biens). Une fois qu'un magistrat s'est acquitté de ses fonctions en sa qualité de magistrat chargé de l'enquête préliminaire, ayant par exemple autorisé une arrestation ou une demande de mise en liberté sous caution ou examiné d'autres demandes ou réclamations au sujet d'une personne arrêtée, et que l'instruction de l'affaire se poursuit suivant la procédure ordinaire, ce magistrat n'intervient plus dans la procédure.

Éviter tout préjugement. Outre le retrait du magistrat chargé de l'enquête préliminaire, le nouveau code prévoit une procédure selon laquelle, dans une procédure judiciaire ordinaire impliquant un examen contradictoire, le juge reçoit le dossier seulement lors de la phase initiale de l'audition et non pas au moment où l'affaire vient devant le tribunal. Cela contribue à éviter les situations où le juge a déjà "appris le dossier" avant l'ouverture des débats sur le fond.

Audition à distance et par téléphone pour protéger la victime ou un témoin (art. 67, 69, 287).

Contrôle plus efficace sur la détention provisoire : depuis le 1er janvier 2005, la durée maximale de la détention provisoire est de six mois (pendant la période de transition, entre le 1er juillet et le 31 décembre 2004, la durée maximale de la détention provisoire était d'un an). Une personne peut être maintenue en détention provisoire plus longtemps uniquement à la demande du procureur général si l'affaire exige une coopération internationale en matière pénale ou est particulièrement lourde ou compliquée.

Nouvelle procédure de recours contre un magistrat instructeur ou un procureur (art. 228 à 232). À la différence du précédent, le nouveau Code de procédure pénale régit de façon précise la procédure de recours contre les activités du magistrat instructeur et du procureur lors de l'enquête préliminaire et indique les tribunaux compétents à cet égard.

Recueil de preuves au moyen de mesures de surveillance. Le Code de procédure pénale prévoit des dispositions régissant le recueil des preuves au moyen d'activités de surveillance : selon ces dispositions, toute illégalité constatée lors de la réalisation d'une activité de surveillance rend irrecevables les preuves ainsi recueillies. Les amendements adoptés introduisent également une nouveauté, à savoir que les activités de surveillance limitant les libertés fondamentales et nécessitant l'autorisation d'un juge ne sont permises que dans le cadre de procédures pénales. Il existe, cependant, une réglementation spéciale concernant le recueil des preuves dans l'intérêt de la sécurité nationale.

Code de procédure administrative

66.La loi sur la procédure administrative est entrée en vigueur le 1er janvier 2002. Son principal objet est de garantir que les actes administratifs répondent à une procédure simple et moderne tenant compte des droits des individus. La loi sur la procédure administrative est une loi générale qui peut faire l'objet d'exceptions en vertu de textes spécifiques. Le Code de procédure administrative ne régit pas les activités du Parlement (Riigikogu) ni celles des tribunaux, non plus que la procédure pénale ou correctionnelle. La partie spéciale du code régit les procédures de contestation (plaintes administratives), c'est-à-dire notamment le contrôle par l'administration, à la demande d'un individu, de la légalité et de l'opportunité d'une mesure administrative ou d'un acte administratif. Les procédures de contestation offrent aux citoyens une possibilité de défendre leurs droits avant de saisir le tribunal administratif.

Article 14

Loi sur l'aide aux victimes

67.La loi sur l'aide aux victimes est entrée en vigueur le 1er février 2004. L'aide aux victimes est un service public destiné à permettre aux victimes de faire face à la situation. Les victimes reçoivent notamment des conseils et une assistance pour communiquer avec diverses institutions. Toute personne ayant été victime de négligence, de mauvais traitements ou de violences physiques, mentales ou sexuelles, c'est-à-dire toute personne ayant subi des sévices ou des préjudices, a le droit de bénéficier de l'aide aux victimes. Ce droit n'est pas subordonné à la perpétration effective d'une infraction pénale.

68.La gamme des personnes pouvant prétendre à une indemnisation de l'État a d'autre part été étendue. Les victimes de crimes violents commis par négligence sont désormais indemnisées. La nouvelle loi a en outre augmenté le montant des indemnisations versées par l'État et assure à présent le remboursement des frais de traitement médical afférents aux consultations de psychologie et de psychothérapie.

Modification de la législation en ce qui concerne la base du réexamen des décisions judiciaires

69.En décembre 2004, le Gouvernement a approuvé un projet de loi qui vise à modifier le Code de procédure civile, le Code de procédure administrative, le Code de procédure correctionnelle et le Code de procédure pénale prévoyant une nouvelle base pour le réexamen des décisions judiciaires de façon à assurer la pleine application des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme. Ce projet de loi prévoit aussi de modifier la loi sur la responsabilité de l'État afin d'établir la responsabilité de l'État lorsqu'une personne a subi un préjudice du fait d'un acte législatif, d'une activité d'un tribunal ou d'une décision judiciaire, que la Cour européenne des droits de l'homme a constaté en l'occurrence une violation de la Convention européenne des droits de l'homme et qu'il n'y a pas d'autre moyen de réparation possible (moyennant, par exemple, le réexamen de la décision judiciaire). La condition préalable est que la constatation d'une violation par la Cour européenne des droits de l'homme ne constituait pas en soi une réparation suffisante pour la personne lésée.

Complément d'information demandé par le Comité

Applicabilité directe de la Convention

70.En vertu de l'article 123, paragraphe 2, de la Constitution, les traités internationaux auxquels l'Estonie est partie et qui ont été ratifiés par le Riigikogu ont la primauté sur les réglementations nationales. La pratique montre que les instruments internationaux conclus par l'Estonie font partie intégrante du droit interne, ce qui signifie que les citoyens peuvent exiger l'application des dispositions de ces instruments (voir H. Vallikivi, "Euroopa inimoiguste konventsiooni asend Eesti oigussüsteemis" [Statut de la Convention européenne des droits de l'homme dans le système juridique estonien], Juridica 2001, No. VI, p. 399-407). Cela signifie aussi que les instruments internationaux sont utilisés pour interpréter le droit interne.

71.L'édition commentée de la Constitution estonienne publiée en 2002 consacre sept pages d'explication au principe de l'interdiction de la torture énoncé à l'article 18 de la Constitution. Une page est également consacrée à la Convention contre la torture et à la notion de torture selon l'article premier de la Convention. L'auteur du commentaire, le Juge Rait Maruste, qui représente l'Estonie à la Cour européenne des droits de l'homme, exprime un avis très clair en déclarant que, pour l'interprétation de la notion de torture, la Convention doit être directement appliquée s'il y a lieu.

72.L'analyse de la jurisprudence fait état d'une augmentation constante du nombre des affaires dans lesquelles, soit le jugement a été fondé sur des conventions internationales, soit les parties se sont référées à de telles conventions. Si l'on considère, par exemple, les décisions de la Cour suprême, le nombre de références aux conventions s'élève à 11 pour 2001, à 13 pour 2002, à 29 pour 2003 et à 12 pour la période allant du 1er janvier à fin octobre 2004.

73.Il convient de noter que le traité international auquel il est fait le plus souvent référence est la Convention européenne des droits de l'homme. Mais les tribunaux estoniens se sont également fondés, pour rendre leurs jugements, sur la Convention contre la torture, comme l'a fait, par exemple, le tribunal administratif de Tallinn en prenant sa décision du 12 avril 2004 dans l'affaire No. 3-560/2004 (contestant la décision du Conseil de la nationalité et des migrations de refuser un permis de résidence et l'adoption d'un arrêté d'expulsion). Le Ministère de la justice manque malheureusement de données en ce qui concerne l'utilisation de la Convention par les tribunaux compétents en matière pénale. Mais, dans la mesure où l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme donne une définition encore plus large de l'interdiction de la torture que la Convention contre la torture, nous considérons que l'indépendance des tribunaux et la protection des victimes d'actes de torture sont garanties par le système de justice estonien.

74.Pour les mêmes raisons, on s'est également attaché davantage à la Convention européenne des droits de l'homme pour la formation des juges et des procureurs. Fin octobre 2004, le Ministère de la justice a réalisé une brève enquête parmi les juges au sujet de la Convention contre la torture. Sur les 48 juges qui ont répondu, soit un cinquième des juges des tribunaux de première et de deuxième instances, trois seulement ne savaient pas que l'Estonie était partie à la Convention. Les autres avaient pris connaissance de la Convention soit durant leur formation, soit grâce à d'autres sources, comme le journal officiel.

Assistance consulaire en cas de détention

75.Les consuls de l'Estonie à l'étranger ont notamment pour fonction d'entrer en contact avec les ressortissants estoniens placés en détention et d'assurer la protection de leurs droits. La principale raison pour laquelle des ressortissants estoniens sont détenus à l'étranger est le séjour illégal, qui entraîne l'expulsion.

76.Les activités des services consulaires estoniens relatives à la protection des droits des ressortissants estoniens arrêtés ou purgeant une peine sont régies par la loi consulaire. Les fonctionnaires consulaires s'occupant de l'organisation de la protection consulaire des ressortissants estoniens se trouvant en détention doivent se conformer aux principes du droit international ainsi qu'aux dispositions de la législation de l'État accréditaire et de la République d'Estonie. Les fonctionnaires consulaires ne doivent pas mener d'activités pouvant être interprétées par l'État accréditaire comme empiétant sur la juridiction de celui-ci.

77.Lorsqu'un ressortissant estonien est détenu dans l'État accréditaire, les autorités compétentes de cet État doivent immédiatement, à la demande du détenu, en informer la représentation estonienne. Chaque cas doit être immédiatement rapporté au bureau consulaire du service consulaire qui coordonne la protection des ressortissants estoniens.

78.Les fonctionnaires consulaires sont tenus de veiller à ce que le détenu bénéficie de tous ses droits dans la procédure pénale, y compris le droit de contacter la représentation estonienne, le droit de bénéficier de services de traduction et d'interprétation, le droit de se faire assister par un avocat (dans un pays étranger, seul un avocat habilité à exercer dans ce pays peut représenter un détenu). Si ces droits ne sont pas garantis, une requête doit être adressée aux autorités de l'État accréditaire.

79.Les fonctionnaires consulaires sont tenus de rendre régulièrement visite aux ressortissants estoniens qui se trouvent en prison (à leur demande ou avec leur consentement).

80.Les renseignements obtenus au cours de la procédure pénale sont considérés comme des informations personnelles confidentielles qui ne peuvent être communiquées à des tiers, notamment aux médias, qu'avec le consentement du détenu et du Ministère des affaires étrangères.

81.Les personnes reconnues coupables par un tribunal peuvent demander à être transférées en Estonie pour purger leur peine. Des accords à cet effet ont été conclus avec la Fédération de Russie et le Royaume de Thaïlande, et cette question est également régie par la Convention européenne sur le transfèrement des personnes condamnées.

82.En 2003, les ressortissants estoniens qui purgeaient une peine en Thaïlande ont finalement été remis à l'Estonie. Le processus avait duré plusieurs années. Les quatre Estoniens arrêtés en Thaïlande en 1995 pour trafic de drogue et l'Estonien arrêté en 1998 pour homicide purgent à présent leurs peines d'emprisonnement en Estonie.

83.Les citoyens estoniens qui voyagent ou séjournent pour une période plus longue dans un pays étranger peuvent désormais se faire enregistrer ou signaler leur présence au cas où un événement nécessitant une intervention rapide de la représentation estonienne dans ce pays se produirait dans la région. Il est possible de se faire enregistrer auprès des représentations estoniennes ainsi qu'auprès du service consulaire du Ministère des affaires étrangères.

Jurisprudence concernant la recevabilité des preuves

84.La description ci-après de plusieurs affaires ayant abouti à des condamnations offre un bon aperçu des preuves sur lesquelles les tribunaux se fondent pour rendre un verdict de culpabilité.

85.Affaire No. 1 : une policière a recouru à la violence physique en recueillant dans son bureau les déclarations d'une femme qui s'était présentée comme victime, frappant celle-ci à plusieurs reprises sur le corps à l'aide d'un bâton. La victime a été légèrement blessée. La policière a été reconnue coupable d'abus de pouvoir pour recours illégal à la violence dans l'exercice de ses fonctions. Le jugement rendu par le tribunal de comté de Harju a été confirmé par une décision de la Cour d'appel de Tallinn en date du 5 juin 2002. Voici la transcription de cette décision : "Le tribunal de comté a apprécié les déclarations de la défenderesse en liaison avec d'autres éléments de preuve, notamment les déclarations de la victime, les dépositions des témoins et les résultats de l'expertise médicale. … La chambre criminelle partage l'opinion énoncée dans la décision du tribunal de comté et déclare que la culpabilité de la défenderesse a été prouvée par les déclarations de la victime selon lesquelles la défenderesse a frappé celle-ci à plusieurs reprises sur tout le corps à l'aide d'un bâton. De telles déclarations ont été faites par la victime depuis le 1er septembre 1998. Elles correspondent au certificat délivré par l'Hôpital central de Tallinn le 1er septembre ainsi qu'au rapport de l'expertise médicale en date du 23 septembre 1998, d'où il ressort que des contusions ont été constatées sur le corps de la victime dans la région de l'épaule gauche, du haut du bras, de l'avant-bras et de la hanche. De l'avis des experts, ces blessures ont pu être causées par quatre coups administrés au moyen d'un bâton ou d'un objet similaire le 31 août 1998."

86.Affaire No. 2 : sur ordre d'un officier de police judiciaire, une personne dotée d'une histoire fictive et d'un nom fictif a été placée dans un centre de détention parmi les détenus et les prévenus afin de recueillir des informations. Cet agent a usé de violence à l'égard de ses compagnons de détention, notamment au moyen d'un bâton et de menottes. L'officier de police judiciaire était au courant de ces actes illégaux mais n'a rien fait pour y mettre fin. Il a été condamné par le tribunal de comté de Rapla le 27 octobre 2004 pour détournement de pouvoir. La décision du tribunal se fondait principalement sur les déclarations des témoins. Comme élément de preuve supplémentaire, le tribunal a pris en considération les rapports d'expertise médicale, les rapports des déclarations d'identification et le registre des activités du centre de détention.

87.Affaire No. 3 : un membre des forces de défense a été reconnu coupable d'abus d'autorité au titre de deux chefs d'accusation. Premièrement, ayant remarqué qu'un soldat avait un bouton de son uniforme ouvert, il a attrapé le soldat par son bouton, l'a tiré vers lui, lui a ordonné de s'allonger par terre et, ayant posé le pied sur son dos, s'est adressé aux autres conscrits. Deuxièmement, il a usé de violence à l'égard d'un soldat qui avait été pris en train de fumer : il a tiré le soldat vers lui, le faisant tomber, et lui a demandé d'avaler le mégot de sa cigarette, ce que le soldat a refusé de faire. La décision du tribunal se fondait sur les déclarations des témoins et des victimes et sur les pièces du dossier.

88.Dans l'édition commentée de la Constitution estonienne, les explications concernant l'article 18 de la Constitution (torture) insistent sur le critère de la preuve utilisé par la Cour européenne des droits de l'homme : "au-delà de tout doute raisonnable". L'auteur du commentaire, le juge à la Cour des droits de l'homme Rait Maruste, exprime également l'opinion selon laquelle, bien que les tribunaux nationaux ne soient pas tenus de se servir de ce critère d'établissement de la preuve, il serait raisonnable d'utiliser une approche similaire. Il fait aussi valoir l'avis de la Cour, qui souligne que "lorsqu'un individu est placé sous le contrôle des autorités (par exemple, en garde à vue) alors qu'il se trouve en bonne santé et qu'il présente, lorsqu'il est libéré, des marques claires et évidentes de blessure et en a informé les autorités (par exemple, la police, le procureur ou le tribunal), la charge de la preuve est transférée aux autorités."

Définition du détenu

89.La loi sur l'emprisonnement fait une distinction entre les personnes détenues, les personnes arrêtées (placées en détention provisoire) et les personnes emprisonnées. Un détenu est un individu qui purge une peine de détention ou de détention administrative dans un centre de détention. Une personne arrêtée est une personne qui a été arrêtée à titre de mesure préventive et qui, en attendant de passer en jugement, a été placée en détention provisoire dans un local prévu à cet effet, dans un quartier de haute sécurité ou dans une maison d'arrêt. Une personne emprisonnée est une personne qui a été condamnée et purge sa peine d'emprisonnement en prison.

90.Les prisonniers sont placés en prison suivant un plan de traitement qui tient compte de la durée de la peine ainsi que de l'âge, du sexe, de l'état de santé et du caractère des intéressés.

Sont séparés :

les hommes et les femmes;

les mineurs et les adultes;

les condamnés et les personnes en détention provisoire;

les délinquants primaires et les récidivistes;

les personnes faisant l'objet d'une mesure de détention et celles qui purgent une peine d'emprisonnement;

les personnes qui purgent une peine de réclusion à perpétuité;

les personnes qui, en raison de leurs activités professionnelles antérieures, risquent d'être victimes d'actes de vengeance.

92.En vertu du chapitre 2, section 3-6, de la loi sur l'emprisonnement, les prisonniers jouissent de tous les droits fondamentaux : droit de voir ses proches, droit de recevoir une éducation conformément aux programmes nationaux, droit, dans la mesure du possible, de travailler et d'être rémunéré, droit à des conditions de vie adéquates. Les soins de santé en prison font partie du système de santé publique national.

93.Les prisonniers sont autorisés : à recevoir des visites de courte durée (art. 24); à recevoir des visites de longue durée (art. 25); à prendre un congé pénitentiaire de courte durée (art. 32) ou un congé pénitentiaire de courte durée sous surveillance (art. 33); à recevoir, sans limitation, les visites d'un avocat et d'un ministre du culte (art. 26); à correspondre et à se servir du téléphone (à l'exclusion du téléphone portable) si les conditions techniques le permettent (art. 27); à lire des quotidiens et magazines nationaux dans la prison, à s'abonner à leurs frais à un nombre raisonnable de journaux, de magazines et autres revues (art. 30); à écouter la radio et à regarder la télévision dans la prison; avec l'autorisation du directeur de la prison, un prisonnier peut posséder un poste de radio, un téléviseur, un magnétophone et un magnétoscope personnels ainsi que d'autres objets de loisir (art. 31). Les prisonniers peuvent acquérir une éducation élémentaire et secondaire générale conformément aux programmes d'enseignement nationaux (art. 35). Dans la mesure du possible, il leur est procuré du travail, les conditions de travail devant être conformes aux dispositions de la loi sur la protection du travail; ils ne font des heures supplémentaires et ne travaillent les jours de congé ou les jours fériés que de leur plein gré (art. 39). Les prisonniers qui travaillent sont rémunérés (art. 43).

94.Les quartiers de logement des prisonniers doivent répondre aux exigences définies en la matière; ils doivent être munis de fenêtres assurant un éclairage adéquat (art. 45). L'administration de la nourriture doit être organisée conformément aux habitudes alimentaires générales de la population et dans le but d'assurer l'alimentation nécessaire à la survie (art. 47). Par l'intermédiaire de la prison, les prisonniers peuvent, au moyen des ressources déposées sur leur compte personnel conformément à la procédure prévue par le règlement intérieur de l'établissement, acheter des produits alimentaires, des articles de toilette et d'autres objets dont la possession est autorisée en prison (art. 48). Les soins de santé en prison font partie du système de santé publique national (art. 49) et les prisonniers doivent pouvoir disposer en permanence d'un service de soins d'urgence (art.  53).

95.Conformément à l'article 26, paragraphe 1, de la loi sur l'emprisonnement, les prisonniers sont autorisés sans restriction à recevoir la visite de leur avocat et des ministres du culte. Les visites des avocats et des ministres du culte ne peuvent pas être interrompues. Conformément au paragraphe 2 du même article, il est interdit de contrôler la teneur des documents écrits apportés par un avocat.

96.Les visites de représentants au sens du droit administratif ou civil s'inscrivent dans le cadre des visites de courte durée. Les prisonniers sont autorisés à recevoir au moins une visite de courte durée par mois pendant un maximum de trois heures. Ils peuvent aussi recourir à d'autres moyens de communication, comme le téléphone ou la correspondance.

Les femmes en prison

97.Le tableau ci-après indique le nombre de femmes condamnées détenues dans la prison de Harku au cours de la période 2001-2004 :

Condamnées

1er janvier 2001

126

1er janvier 2002

136

1er janvier 2003

129

1er janvier 2004

129

98.Conformément à la loi sur l'emprisonnement, les hommes et les femmes sont détenus séparément. Actuellement, les femmes ayant fait l'objet d'une condamnation sont incarcérées dans la prison de Harku. Des travaux de construction de grande ampleur ont été réalisés dans cette prison, avec notamment la construction d'un nouveau service médical et d'une section pour les mères et les enfants, ainsi que la rénovation du local pour les visites de longue durée, de la cantine, du centre d'accueil et du local où sont déposées les affaires personnelles. Il est prévu de construire, dans l'enceinte de l'établissement, un centre de détention ouvert et une section séparée pour les mineures.

99.La prison de Harku dispose d'une section réservée pour les mères et les enfants, où les conditions de vie, moins préjudiciables, permettent aux enfants vivant en milieu carcéral de connaître un développement normal. Les mères et les enfants y jouissent d'avantages particuliers : quartiers de logement séparés, meilleures conditions de vie, possibilité de faire la cuisine, aires de jeu pour les enfants, etc. Les enfants peuvent fréquenter l'école maternelle locale hors de la prison. Dans la section réservée aux mères et aux enfants, les détenues peuvent vivre avec leurs enfants jusqu'à ce que ceux-ci atteignent l'âge de quatre ans. Début 2004, il y avait trois enfants dans la prison.

100.Dans les unités de production de la prison de Harku, les détenues font des travaux de couture, d'assemblage et d'emballage.

Instruction et travail en prison

101.Conformément à la loi sur l'emprisonnement, tous les condamnés et les mineurs placés en détention doivent pouvoir recevoir une instruction. Il est possible d'acquérir une instruction dans toutes les prisons. En moyenne, 26 % des détenus condamnés suivent un enseignement. Les cours ont lieu en estonien et en russe. Le Ministère de l'éducation et de la recherche est tenu de veiller à ce que les prisons proposent une instruction générale et une formation professionnelle. Les prisons doivent prévoir les locaux nécessaires à cet effet. Le Ministère de l'éducation et de la recherche a élaboré un plan de développement intitulé "L'instruction en prison, 2004-2005" qui a été approuvé par le Gouvernement en février 2004. Ce plan institue une réforme de l'instruction en milieu carcéral : les écoles professionnelles spéciales fermées vont disparaître et la formation générale et professionnelle en prison sera assurée par des établissements locaux d'enseignement secondaire de second cycle et des centres de formation professionnelle. Les établissements locaux d'enseignement ont déjà pris en charge l'organisation de l'instruction dans les prisons de Tartu, Maardu et Pärnu. À l'automne 2005, ce sera le tour des prisons de Tallinn, Harku et Viljandi.

102.Les prisons organisent des cours d'estonien pour les condamnés non estoniens, ainsi que, si nécessaire, des cours de préparation à l'examen d'acquisition de la nationalité estonienne. Certains détenus suivent un enseignement supérieur et sont autorisés à sortir de la prison pour passer des examens à l'extérieur. Pour l'organisation de la formation professionnelle, les établissements d'enseignement coopèrent avec la société "Industries des prisons estoniennes". L'apprentissage professionnel a lieu dans les ateliers de l'entreprise sous la direction de maîtres. Une fois achevée leur formation professionnelle, les détenus peuvent continuer de travailler dans l'entreprise.

103.En vertu de la loi sur l'emprisonnement, tous les prisonniers âgés de moins de 64 ans qui ne suivent pas d'études et pour lesquels il n'y a pas de contre-indication médicale sont tenus de travailler. Les prisonniers qui travaillent sont répartis en deux catégories : ceux qui effectuent des travaux d'entretien à l'intérieur de la prison et ceux qui sont employés à la production. En 2001, l'entreprise publique "Industries des prisons estoniennes" a été créée pour développer l'emploi parmi les prisonniers, accroître la compétitivité des produits et réduire les coûts pour les établissements pénitentiaires.

104.Les tableaux ci-après contiennent des statistiques sur le nombre de prisonniers employés, par année :

Nombre de prisonniers employés

Pourcentage de prisonniers employés

1er janvier 2002

771

2002

23,3 %

1er janvier 2003

821

2003

27,1 %

1er janvier 2004

883

Services médicaux dans les prisons estoniennes

105.Toutes les prisons estoniennes disposent d'un service médical. Les détenus dans toutes les prisons estoniennes ont en outre accès aux soins internes du service sanitaire de la prison de Tallinn.

106.Dans les prisons importantes, une assistance médicale est disponible en permanence. Dans toutes les prisons, les détenus bénéficient de consultations médicales générales et de soins dentaires. Les soins médicaux sont dispensés par des médecins généralistes qualifiés et tous les services médicaux disposent d'infirmières qualifiées. On fait parfois appel à des spécialistes extérieurs (psychiatres, gynécologues dans la prison pour femmes, dentistes dans la prison de Viljandi, etc.). Les médecins sont tenus de suivre chaque année 60 heures de formation permanente. Ils peuvent le faire à l'Université de Tartu ou dans le cadre de cours spéciaux choisis par eux. Une formation est également organisée par le Ministère de la justice.

107.Au cas où ni le service médical de la prison ni le service sanitaire de la prison de Tallinn ne sont en mesure de dispenser les soins nécessaires, le détenu est hospitalisé dans un établissement de soins civil pour être examiné et soigné. Tous les détenus qui arrivent en prison passent un examen médical destiné à évaluer leur état de santé et à détecter d'éventuelles pathologies, comme la tuberculose, l'hépatite ou le VIH. Le cas échéant, un traitement leur est prescrit. Les prisonniers font appel au médecin le plus souvent pour des affections respiratoires, des troubles digestif, des problèmes dermatologiques et divers maux (maux de tête, de dos, etc.), ainsi que pour des rhumes, des traumatismes et des blessures. Les prisonniers ne peuvent pas choisir leur médecin.

108.Les statistiques concernant les personnes infectées par le VIH dans les prisons estoniennes sont établies par la prison de Tallinn, qui communique tous les mois ses données au Ministère de la justice ainsi qu'à l'hôpital Merimetsa, qui relève de l'hôpital central de Tallinn-Ouest. Au 1er septembre 2004, il y avait 552 séropositifs dans les prisons estoniennes (dont 54 femmes et 20 mineurs). Six personnes recevaient un traitement anti-VIH. Les activités des groupes de soutien aux détenus séropositifs sont organisées par l'association à but non lucratif Convictus.

109.Les statistiques relatives aux détenus souffrant de tuberculose sont établies par la prison de Tallinn. Elles sont transmises au registre national sur la tuberculose. Les cas de tuberculose se sont multipliés ces dernières années : 33 nouveaux malades ont été décomptés, dont 14 avaient contracté la maladie en prison. Le 1er octobre 2004, 40 détenus souffrant de tuberculose nécessitaient des soins hospitaliers.

110.Des activités de formation sont organisées à l'intention des détenus et du personnel pénitentiaire aux fins de la prévention de la tuberculose, de l'hépatite et du VIH/sida. Chacun peut en outre se procurer des brochures d'information sur les diverses maladies transmissibles et leur prévention, les rapports sexuels protégés, etc.

Autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants

La violence à l'école

111.En 2002, une enquête a été réalisée sur les attitudes à l'égard des brimades à l'école et sur divers aspects de ce problème. L'enquête a été effectuée dans sept établissements scolaires répartis dans l'ensemble du pays, dont cinq écoles secondaires de deuxième cycle et deux écoles élémentaires. Elle s'est déroulée sous la forme d'un questionnaire qui a été adressé à 1764 élèves au total (moyenne d'âge : 13,54 ans). Il en est ressorti que les principales brimades subies à l'école étaient des brimades physiques (21, 96 % des élèves interrogés avaient reçu des coups ou des projectiles ou avaient été poussés). La deuxième forme la plus fréquente de brimades étaient les brimades mentales (15,05 % des élèves s'étaient plaints qu'on leur avait dérobé et caché des affaires personnelles). Les élèves avaient fait aussi souvent l'objet de taquineries, de menaces ou d'intimidation (14,55%). Un autre phénomène fréquent (9,35 % des élèves interrogés) était l'isolement social d'un élève (qui était exclu du groupe et empêché de participer aux activités collectives). Les brimades physiques graves entre élèves (élèves qui étaient frappés ou battus ou dont les affaires étaient dégradées) étaient les moins fréquentes (8,39 %).

112.Le tableau suivant indique le nombre d'enfants qui se trouvaient dans des centres d'accueil et des centres de réadaptation au cours de la période 1999-2003 :

1999

2000

2001

2002

2003

Nombre d'enfants qui avaient séjourné dans de tels établissements

1762

2441

2033

1783

1798

Pour cause de violence (nombre et pourcentage)

1247 %

1455,9 %

1346,6 %

1709,5 %

20411,3 %

Dont : - autres formes de violence

221,2 %

241,0 %

341,7 %

392,2 %

241,3 %

- violence dans la famille 1

955,4 %

1204,9 %

100

4,9 %

1216,8 %

18010 %

- violence à l'école 2

70,4 %

10,0 %

00,0 %

100,6 %

-

1 Les données relatives à la violence dans la famille en 2003 correspondent à des violences physiques (6,4 %), mentales (3,4 %) et sexuelles (0,2 %).

2 Les données pour 2003 ne rendent pas compte de façon distincte de la violence à l'école.

113.Le Ministère de l'éducation et de la recherche a mis au point un programme spécifique pour lutter contre la violence à l'école.

114.L'Union estonienne pour la protection de l'enfance a entrepris en 2001 des activités ciblées dans le cadre de la campagne de prévention et d'information sur la violence et les brimades à l'école, avec un projet intitulé "Non à la violence" qui visait à réduire les cas de brimades dans les écoles estoniennes, à développer dans la société des attitudes positives contre la violence et à créer un environnement scolaire sûr et stable répondant aux besoins des enfants. Une conférence des élèves a été organisée en 2001-2003 sur le thème "Non à la violence".

115.Pour lutter contre la violence à l'école, une association de jeunes à but non lucratif, Tugiõpilaste Oma Ring Eestis (T.O.R.E.) (Cercle d'élèves assistants d'Estonie), a été créée. Il s'agit d'un mouvement d'élèves assistants dans les écoles. Avant 2000, ses activités se déroulaient dans le cadre de projets, le premier ayant été entrepris en 1996. Aujourd'hui, l'association T.O.R.E. a publié un manuel qui a été distribué aux comtés et elle organise des activités de formation pour les instructeurs et les moniteurs ainsi que des séances d'encadrement. Douze nouveaux moniteurs T.O.R.E. ont été formés. Des élèves assistants ont été formés dans 89 établissements scolaires et le mouvement se développe régulièrement.

116.Des matériels relatifs à la violence à l'école ont été mis au point sous la direction de l'Institut de développement sanitaire. Des journées d'information sur la violence à l'école ont été organisées dans les comtés en coopération avec le Centre estonien d'activités pour la jeunesse et l'Union pour la protection de l'enfance. Un nombre accru de professeurs de pédagogie sociale, de travailleurs sociaux et de psychologues ont été recrutés dans les écoles et ont été formés pour pouvoir détecter les cas de violence scolaire et prendre les mesures nécessaires.

117.La responsabilité de fournir une assistance aux enfants dans le besoin incombe principalement aux autorités locales. Les administrations locales ont des agents de protection de l'enfance ainsi que des travailleurs ou des conseillers sociaux dont la tâche est d'aider les enfants et les familles dans le besoin. Lorsque la vie, la santé ou le développement d'un enfant sont menacés, les autorités locales séparent celui-ci de sa famille, soit sur décision judiciaire soit d'un commun accord avec les parents. Elles proposent en outre une assistance, contribuent à l'organisation de séminaires et appuient les services de logement. Il existe aussi des centres de consultation.

118.En 1995 a été créé le Centre d'aide à l'enfance de Tartu, qui s'occupe spécifiquement des enfants victimes de mauvais traitements ainsi que des membres de leur famille. Un centre du même type a été ouvert à Tallinn. Leurs fréquentes interventions dans les médias et les nombreuses activités de formation qu'ils organisent à l'intention des spécialistes de l'enfance ont largement contribué à sensibiliser la population à la question de la maltraitance d'enfants, notamment des brimades à l'école et de la violence au sein de la famille, et les personnes qui en ont besoin peuvent à présent recevoir une véritable assistance. Le Centre d'aide à l'enfance reste très actif.

119.En 1997, un projet de soutien aux enfants maltraités et aux enfants ayant besoin d'aide a été entrepris. Intitulé "Grand frère, grande sœur", il permet aux enfants qui ont besoin d'une assistance d'avoir auprès d'eux un adulte qualifié faisant office d'ami plus âgé. Ils peuvent entreprendre ensemble des activités intéressantes qui encouragent les enfants, les aident à mieux s'apprécier, à obtenir un soutien et à améliorer leurs résultats scolaires. Les activités menées dans le cadre du projet ont été étendues de Tartu à Tallinn, Pärnu et Viljandi. Ce projet reste un important moyen d'appui à l'enfance.

La violence contre les femmes

120.En Estonie, la violence à l'égard des femmes est un phénomène essentiellement caché. Les statistiques officielles font insuffisamment état des cas de violence. Les statistiques de la police ne rendent compte que d'une partie de la violence subie par les femmes. Le niveau des violences et le nombre des victimes qui ressortent des enquêtes sociologiques correspondent à une image un peu plus exacte de la prévalence de la violence à l'égard des femmes et de la gravité des cas de violence. D'après les femmes elles-mêmes (nombre de femmes déclarant avoir été victimes de violence au cours de l'année précédente), les chiffres sont les suivants : en un an, 41 000 femmes ont été blessées suite à des violences et 7 000 d'entre elles ont reçu des coups et blessures graves mettant leur vie en danger. Les victimes ont besoin en moyenne de 11 jours pour se rétablir. Un tiers seulement d'entre elles vont voir un médecin. Les deux tiers essaient de se soigner seules. Un tiers des victimes ayant subi des blessures s'efforcent de se rétablir sans interrompre leur travail ou leurs études.

121.Il ressort des enquêtes que si les victimes sont principalement des femmes jeunes de moins de 40 ans, leur état de santé est relativement plus mauvais que celui des non victimes. Les trois quarts souffrent de lésions permanentes. Le fait que la majorité des blessées n'aillent pas immédiatement voir un médecin mais cherchent à se soigner seules est extrêmement dangereux. Les principales raisons qui les empêchent de s'adresser à un médecin sont, d'une part, le sentiment de honte et de culpabilité qu'elles ressentent pour avoir été traitées si cruellement par leur conjoint ou leur partenaire. Elles craignent que le médecin les rende responsables de ce qui est arrivé et les accuse d'être de mauvaises épouses. Les victimes, d'autre part, ont peur que le médecin informe la police et que leur conjoint soit sanctionné, voire incarcéré.

122.En mars et en avril 2003, l'Institut estonien pour une société ouverte a effectué une enquête parmi les médecins du pays sur le thème "Violence et santé des femmes". Les résultats de cette enquête montrent que les médecins estoniens ne sous-estiment pas la violence subie par les femmes, jugeant même que c'est un problème grave. Il s'agit d'abord de violences physiques (pour 72 % des médecins) mais aussi d'autres formes de violence, comme les violences mentales et les violences sexuelles (pour 68 % et 59 %, respectivement, des médecins). D'après les médecins interrogés, les femmes et les enfants sont les premières victimes de la violence dans la famille. Les femmes souffriraient autant de la violence mentale que de la violence physique. Plus de la moitié des médecins avaient eu affaire, dans leur pratique quotidienne, à des femmes qui étaient régulièrement victimes de violences à la maison. C'étaient des femmes qui, en raison des traumatismes ainsi subis, avaient dû recourir à plusieurs reprises à une assistance médicale.

123.Selon les médecins, les victimes de violences physiques et sexuelles sont avant tout des femmes jeunes de moins de 30 ans. Avec l'âge, le risque de subir de telles violences diminue progressivement. Les évaluations spécialisées des médecins concordent avec les résultats de l'enquête sur la violence à l'égard des femmes qui a été menée dans l'ensemble de la population et qui montre, elle aussi, que la plupart des femmes victimes de violence ont moins de 30 ans.

124.La violence peut causer de graves lésions. D'après les gynécologues, les lésions les plus fréquentes sont celles qui touchent les organes sexuels, ainsi que l'interruption de la grossesse. L'enquête a montré que même enceintes, les femmes ne sont pas à l'abri de la violence. Un gynécologue sur deux déclare voir environ deux fois pas an des femmes enceintes qui ont été battues. Un gynécologue sur trois a constaté des interruptions de grossesse dues à des coups. Au nombre des lésions corporelles graves causées aux femmes par la violence, les médecins ont cité les blessures et coupures dues à des coups de couteau et les fractures. Quarante-cinq femmes sont décédées en 2001 et 36 en 2002 des suites de violences.

125.A Tartu et Tallinn, il existe des centres d'accueil pour les femmes et les enfants victimes de violence domestique. Le premier centre de ce type a été ouvert à Tartu le 25 novembre 2002. Les femmes peuvent y trouver un logement temporaire et recevoir des conseils, une aide d'urgence et des renseignements sur les institutions auxquelles elles peuvent s'adresser pour faire part de leurs problèmes, etc.

126.Le tableau ci-après indique le nombre de personnes qui ont recouru aux services du centre d'accueil pour les femmes de Tartu :

Année

Femmes

Enfants

2002

1

0

2003

42

21

Janvier-septembre 2004

35

22

127.Le tableau suivant indique le nombre de personnes qui ont séjourné dans un centre d'accueil au cours de la période 2001-2003, par sexe et motif d'arrivée :

Nombre de personnes

2001

2002

2003

Total

2901

3715

3243

hommes

1879

2619

2037

femmes

1022

1096

1206

Dont :

Violence*

37

92

33

hommes

22

58

18

femmes

15

34

15

Violence domestique

146

162

326

hommes

41

52

95

femmes

105

110

231

* Lésions corporelles, viols, autres violences sexuelles, homicides, vols qualifiés, vols avec ou sans recel.

La traite des êtres humains

128.Il n'existe pas de législation distincte concernant la traite des êtres humains en Estonie, une telle activité étant visée par plusieurs dispositions du Code pénal, principalement par l'article 133 sur l'esclavage, ainsi que par les articles 134 et 136, notamment.

129.L'esclavage est le fait de placer, par la violence ou la duperie, un être humain dans une situation dans laquelle il est forcé de travailler ou d'accomplir d'autres services contre son gré au profit d'une autre personne, ou de maintenir une personne dans cette situation. L'esclavage est puni d'une peine d'un à cinq ans d'emprisonnement. Le même acte, s'il est commis contre deux personnes ou plus, ou contre une personne âgée de moins de 18 ans, est puni d'une peine de trois à douze ans d'emprisonnement (art. 133).

130.Le fait d'emmener ou d'abandonner une personne, en usant de violence ou de duperie, dans un pays où elle est exposée à la persécution ou à l'humiliation pour des raisons de race ou de sexe ou pour d'autres raisons, et où elle ne dispose pas de moyens de protection juridique contre de tels traitements, alors qu'elle n'a pas la possibilité de quitter ce pays, est puni d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre jusqu'à cinq ans. Le même acte, s'il est commis contre deux personnes ou plus, ou contre une personne âgée de moins de 18 ans, est puni d'une peine de deux à 10 ans d'emprisonnement (art. 134).

131.Le fait de priver illégalement autrui de liberté est puni d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre jusqu'à cinq ans. Le même acte, s'il est commis contre une personne âgée de moins de 18 ans, est puni d'une peine de un à cinq ans d'emprisonnement (art. 136).

132.Le proxénétisme, ou la mise à disposition de locaux aux fins de la consommation illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes, de l'organisation de jeux illicites ou de la prostitution, sont punis d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre jusqu'à cinq ans. Le tribunal peut en outre, à titre de sanction supplémentaire, infliger une amende à concurrence du montant des avoirs (art. 268).

133.L'Estonie a ratifié en 2004 le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Elle a également ratifié en 2004 le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

134.La principale forme de traite des femmes en Estonie est le proxénétisme.

135.Depuis le 1er novembre 2003, un groupe de travail spécial s'occupe de la lutte contre le proxénétisme au sein de la division des atteintes à la personne du service de police judiciaire de la préfecture de police de Tallinn-Nord. La police criminelle centrale s'occupe des affaires de proxénétisme impliquant la conduite de prostitués vers d'autres pays.

136.Au cours du premier semestre de 2004, la police criminelle centrale a entamé une procédure ou saisi la justice à propos de quatre affaires pénales pour lesquelles une enquête avait été ouverte au titre du délit de proxénétisme (art. 268 du Code pénal). Au cours des neuf premiers mois de l'année 2004, 43 procédures pénales ont été engagées en vertu de l'article 268 du Code pénal.

137.Un plan d'action national de lutte contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, est en cours d'élaboration. Sous la direction du Ministère de l'intérieur et de la représentation estonienne à l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), des discussions ont eu lieu sur la question de la traite des êtres humains.

138.Dans le cadre d'un projet pilote intitulé "Recherche, information et législation – la traite des femmes dans les pays baltes" mis en œuvre en 2000-2001 par l'OIM, une enquête a été réalisée sur le niveau de sensibilisation de la population et une analyse a été entreprise sur les aspects sociaux de la traite des femmes et de la prostitution et sur la législation existant dans ce domaine. Les conclusions ont été publiées dans un livre intitulé "La traite des femmes et la prostitution dans les pays baltes".

139.À partir résultats de l'enquête de l'OIM, une campagne d'information a été organisée avec la publication d'annonces (affichage, messages à la télévision et à la radio et dans la presse écrite) et la diffusion de matériels d'information (brochures, dépliants, affiches, etc. contenant des conseils et des renseignements). Dans le cadre de cette campagne, des consultations ont été proposées aux personnes désireuses de partir travailler à l'étranger, aux victimes de la traite et aux proches de personnes disparues, des activités de formation ont été organisées et la question a été traitée dans les médias.

140.L'OIM met en œuvre un projet intitulé "Recherche et information sur la traite des femmes et des enfants" qui est destiné à faire le point de la situation en ce qui concerne la traite des êtres humains en Estonie. Ce projet sera achevé à la mi-décembre 2004.

141.L'Estonie participe d'autre part activement à la lutte contre la traite des êtres humains dans la région nordique et balte. Une équipe spéciale contre la traite des êtres humains réunissant les pays nordiques et baltes a été constituée afin de coordonner les activités de lutte menées dans la région et de veiller à ce que la question demeure une priorité dans la politique des pays concernés.

La lutte contre le terrorisme

142.La lutte contre le terrorisme fait partie de la prévention de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Depuis qu'elle a recouvré son indépendance, l'Estonie n'a été le lieu d'aucun acte de terrorisme mais, à titre de prévention, elle s'attache, d'une part, à analyser les possibilités de menaces terroristes, et d'autre part, à détecter les délits qui facilitent le terrorisme.

143.L'Estonie condamne toutes les formes de terrorisme et considère que la violence politique et le terrorisme international constituent des menaces importantes pour la sécurité et la paix internationales.

144.Conformément aux principes fondamentaux de la politique de sécurité approuvée par le Riigikogu en 2004, la lutte contre le terrorisme est l'un des principaux aspects de la politique de sécurité estonienne. Dans la lutte contre le terrorisme, l'Estonie met en œuvre des mesures tant internes qu'internationales.

145.La coordination et les aspects techniques de la lutte contre le terrorisme relèvent du Ministère de l'intérieur. Celui-ci compte parmi ses services l'organe central de lutte antiterroriste, à savoir le Comité de sûreté nationale, ainsi que la plupart des comités qui s'occupent de prévenir et d'éliminer le terrorisme et ses conséquences, c'est-à-dire le Comité de la police, l'Administration des gardes frontière, le Comité de la citoyenneté et des migrations et le Comité des opérations de sauvetage.

146.L'Estonie participe activement à la coopération internationale contre le terrorisme dans le cadre de l'OTAN, de l'Union européenne et d'autres organisations internationales, ainsi qu'au plan bilatéral. Elle a ratifié et observe les 12 principaux instruments des Nations Unies existant dans ce domaine et appuie les activités de l'ONU en la matière, notamment les travaux d'élaboration d'une convention globale contre le terrorisme.

147.L'Estonie met en œuvre l'ensemble de mesures adopté au sommet de l'OTAN de Prague pour lutter contre les nouvelles menaces et a appuyé la série de mesures renforcées de lutte contre le terrorisme qui ont été approuvées au sommet d'Istanbul et qui permettent à l'OTAN d'être mieux à même de faire face aux menaces pesant sur la sécurité, notamment aux menaces de terrorisme. L'Estonie soutient également l'action antiterroriste des organisations régionales et participe à l'élaboration et à la mise en œuvre des activités de l'OSCE et du Conseil de l'Europe dans ce domaine.

Mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations du Comité

La définition de la torture dans la législation estonienne

148.On trouvera ci-après une analyse des dispositions du Code pénal estonien entré en vigueur le 1er septembre 2002 en regard de la définition de la torture énoncée à l'article premier de la Convention.

149.Les autorités estoniennes sont d'avis que le Code pénal dans son ensemble assure la répression de la torture. Nous voudrions cependant souligner que la définition énoncée à l'article premier de la Convention constitue une définition de la torture seulement dans le cadre de cette Convention. La République d'Estonie ne juge donc pas nécessaire de modifier la définition de la torture figurant à l'article 122 du Code pénal et d'établir une définition distincte de la torture qui serait identique à celle de l'article premier de la Convention.

Définition de la torture figurant dans la Convention

Dispositions correspondantes du Code pénal

Tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne;

Aux fins notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux,

De la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d'avoir commis;

De l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu'elle soit;

Lorsqu'une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou de toute autre personne agissant à titre officiel;

La violence au sens du Code pénal estonien inclut, outre les atteintes à la santé (art. 113 à 119, 121 et 122) et les sévices physiques causant une douleur (art. 121 et 122), le fait de menacer de tuer une personne, de porter atteinte à sa santé ou de détruire ou d'endommager gravement ses biens (art. 120).

(voir http ://www.legaltext.ee/text/en/X30068K5.htm)

Les autres formes de violence mentale qui ne sont pas prises en compte par la notion de menace sont visées par d'autres infractions particulières (voir ci-dessous) qui prévoient la responsabilité pénale en cas d'activités illégales menées par un agent de la fonction publique. Dans la définition de la torture, la Convention emploie les termes "une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales", ce qui veut dire que la responsabilité pénale n'est établie qu'en cas de violence mentale aiguë.

Art. 312. Interrogatoire illégal

Le recours à la violence par un magistrat chargé de l'enquête préliminaire ou par un procureur pour contraindre une personne à faire une déclaration est punissable.

Art. 322. Contraindre une personne à faire un faux témoignage, à rendre une fausse expertise ou à donner une fausse traduction ou interprétation

Le recours à la violence est punissable, quel qu'en soit l'auteur, c'est-à-dire y compris par un agent de la fonction publique.

Art. 324. Traitement illicite de prisonniers ou de personnes placées en détention ou en garde à vue

Inclut aussi le recours à la violence lorsque cet acte est commis par un fonctionnaire d'un établissement carcéral. La définition de l'infraction prévoit aussi des sanctions en cas d'atteinte à la dignité d'une personne, de discrimination et de restriction illicite des droits d'une personne de quelque manière que ce soit.

Art. 291. Abus d'autorité

Le recours illicite à la violence par un fonctionnaire est punissable en vertu de cette disposition si les conditions stipulées dans les dispositions précédentes ne sont pas réalisées.

Art. 289. Détournement de pouvoir

Fait pour un fonctionnaire d'abuser de sa position dans le but de porter atteinte à une autre personne ou à ses intérêts; à la différence de l'abus d'autorité, cette infraction peut aussi être commise en dehors de l'exercice des fonctions officielles.

Ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite.

Art. 22. Participation à un crime

2) Est responsable en tant qu'instigateur une personne qui pousse intentionnellement une autre personne à commettre un acte illicite prémédité.

3) Est responsable en tant que complice une personne qui contribue intentionnellement, par une aide physique, matérielle ou morale, à la réalisation d'un acte illicite prémédité d'une autre personne.

150.D'après le registre des affaires pénales (qui comprend des données à compter du 1er juillet 2001), il y avait en décembre 2004 191 affaires enregistrées au titre de l'article 291 du Code pénal (abus d'autorité), dont 79 sont actuellement en attente et cinq ont été déférées aux tribunaux. En 2004, 75 procédures pénales ont été engagées en vertu de cet article. Au titre de l'article 324 (traitement illicite de prisonniers ou de personnes placées en détention ou en garde à vue), le registre renferme des données concernant cinq affaires pénales, dont deux sont en attente et n'ont pas encore été déférées à la justice. Les autres affaires sont classées.

La formation du personnel

151.L'interdiction de la torture et des traitements ou peines cruels et dégradants est stipulée à l'article 18 de la Constitution estonienne. L'article 9, paragraphe 3, du Code de procédure pénale prévoit que les parties à un procès doivent être traitées sans qu'il soit fait atteinte à leur honneur ou à leur dignité. La seconde phrase de cette disposition interdit la torture et les traitements cruels et inhumains. La mise en œuvre d'une telle interdiction est garantie par les dispositions du Code pénal. L'interdiction de la torture est réaffirmée à l'article 64, paragraphe 1, du Code, qui régit le recueil des témoignages. Les informations pertinentes font donc partie de la formation de base des responsables de l'application des lois.

152.Dans le cadre du Ministère de l'intérieur, des activités de formation ont été organisées au sujet de la violence domestique, de l'aide aux victimes, de la traite des êtres humains et des violences sexuelles. Les fonctionnaires concernés ont notamment appris à reconnaître les victimes et à leur venir en aide. Cette formation est proposée à tous les fonctionnaires de police qui sont en contact direct avec la population. La manière de traiter les victimes est également enseignée dans le cadre de plusieurs disciplines faisant partie de la formation de base de la police.

153.Dans le cadre du Ministère des affaires sociales et de son administration, des activités de formation ont été menées sur la façon de reconnaître les victimes de violence. En 2005, il est prévu d'organiser une formation à l'intention des travailleurs sociaux, des enseignants et des autres membres du réseau afin de leur apprendre à reconnaître les enfants maltraités.

154.Dans la formation du personnel pénitentiaire, les dispositions de la législation en vigueur et les normes d'éthique communément admises servent de principes directeurs pour l'enseignement de la manière de traiter les détenus. L'apprentissage en la matière a lieu dans le cadre de plusieurs disciplines différentes, qui sont axées sur la pratique. Une bonne partie de cet apprentissage consiste dans l'expérience acquise durant les stages, et les instructeurs ont à cet égard une responsabilité particulière dans la mesure où leurs attitudes se transmettent facilement. Sont également inculqués au personnel pénitentiaire les principes de base de la psychologie, notamment en matière de communication professionnelle et dans les situations extrêmes, ainsi que les principes du droit constitutionnel (y compris les dispositions des conventions internationales et les normes nationales et internationales relatives à la protection des droits de la personne). Diverses matières donnent un aperçu de la manière de reconnaître les victimes de torture.

155.Tous ceux qui entrent pour la première fois dans la fonction publique prêtent un serment d'entrée en fonctions par écrit, confirmé par leur signature. Le texte du serment est le suivant : "Je jure de respecter l'ordre constitutionnel de l'Estonie et de m'acquitter consciencieusement et scrupuleusement des fonctions qu'exige la charge qui m'est confiée. Je suis conscient de la responsabilité qui m'incombe selon la loi en cas de manquement à mes devoirs ou au code d'éthique de la fonction publique." Étant donné que la Constitution estonienne interdit la torture et les traitements et peines cruels, inhumains ou dégradants, tout fonctionnaire jure, en prenant ses fonctions, de ne pas y recourir.

La surveillance des personnes placées en détention et de leurs proches dans les établissements pénitentiaires

156.Une personne placée en détention peut, sous surveillance, s'entretenir avec des membres de sa famille et d'autres personnes, en fonction des possibilités de l'établissement et conformément à la loi, une fois par semaine pendant une durée maximale de deux heures. Les entrevues avec les ministres du culte ne sont pas interrompues mais ont lieu dans le cadre des visites de courte durée normales. Les entrevues avec les avocats ne sont pas limitées ni interrompues. Les visites des ministres du culte et des avocats ne peuvent être ni interrompues ni écoutées. Durant l'entrevue, les parties communiquent dans la langue qui a été spécifiée dans la demande d'entrevue. Si le fonctionnaire ou l'employé de l'établissement ne comprend pas la langue de l'entretien, il est recouru aux services d'un interprète. L'emploi d'une autre langue pendant l'entrevue est un motif d'interruption suffisant.

157.Les fonctionnaires et les employés de l'établissement pénitentiaire, pendant toute la durée de l'exercice de leurs fonctions, sont tenus d'observer les détenus dans leur cellule. Les détenus ne peuvent pas faire obstacle à l'observation de leur cellule.

158.Un fonctionnaire de l'administration pénitentiaire est autorisé à fouiller les personnes qui viennent rendre visite aux détenus, ainsi que leurs affaires. La fouille est effectuée par un agent du même sexe que le visiteur. Les visites de courte durée des proches ont lieu en présence d'un agent de l'administration pénitentiaire. Les surveillants peuvent observer les visites avec les avocats et les ministres du culte mais n'ont pas le droit d'écouter les conversations. Un agent de l'administration pénitentiaire a le droit d'interrompre immédiatement une visite de courte durée si celle-ci risque de menacer la sécurité ou de contrevenir au règlement intérieur de la prison. Il est interdit d'interrompre les visites des avocats.

159.Dans les hôpitaux psychiatriques, il n'y a en principe pas de pièce séparée pour les visites, et les entrevues avec les proches ont donc lieu dans les pièces ou salles communes. On s'efforce de veiller à ce que les patients puissent bénéficier d'intimité pendant ces visites mais, en cas de nécessité, le personnel hospitalier peut accéder à l'entrevue.

Travaux de rénovation et de construction dans les établissements pénitentiaires

160.Pour assurer la réinsertion sociale des prisonniers, l'Estonie a entrepris de passer du système de colonie pénitentiaire qui prévalait à l'époque soviétique à un régime de détention cellulaire. Dans le même but, elle applique le principe de la régionalisation, c'est-à-dire que les prisonniers purgent leur peine le plus près possible de chez eux afin de pouvoir, pendant la durée de leur incarcération, maintenir des contacts sociaux positifs et des relations avec leur famille. La première mesure prise à cet effet a été l'ouverture en 2002, à Tartu, d'une prison de type cellulaire qui dessert le sud de l'Estonie. Une prison similaire, la prison de Viru, sera achevée en 2007 à Jõhvi et desservira le nord-est du pays.

161.Le tableau ci-après indique les principaux investissements réalisés dans les prisons estoniennes entre le 1er janvier 2001 et le 1er octobre 2004 :

Lieu

Description

Année de mise en service

Prison de Tartu

Une prison moderne à base de cellules a été construite et mise en service. La prison peut accueillir 1000 prisonniers.

Elle comprend :

un bâtiment principal d'une surface utile de 5628,6 m2

des installations sportives d'une surface de 822 m2

un bâtiment réservé aux services religieux d'une surface de 208 m2

des locaux administratifs d'une surface de 466 m2

des quartiers de logement pour les condamnés (350 places) d'une surface de 4485 m2

des quartiers de logement pour les personnes faisant l'objet d'une enquête préliminaire (650 places) d'une surface de 8285 m2

7)des ateliers d'une surface de 1585 m2

2002

Prison de Murru

1)Division en deux sections des quartiers de logement N° 3. Permet de séparer les détenus en groupes plus petits dans les quartiers de type "colonie pénitentiaire". Surface du bâtiment : 718,5 m2

Reconstruction des conduites de chauffage de la prison, d'où une amélioration du chauffage et une réduction de la déperdition thermique.

2003

Prison de Maardu

Réparation du système de ventilation dans les quartiers de logement des prisonniers. Surface des pièces : ~700 m2

2004

Prison d'Ämari

Reconstruction de la toiture des quartiers de logement communs des prisonniers N°1. Surface du toit du bâtiment : 450 m2

Reconstruction de la cantine et installation de nouveaux équipements. La cantine peut préparer des repas pour 650 prisonniers.

2003

2001

Prison de Tallinn

Reconstruction du système de chauffage central dans le bâtiment administratif. Surface du bâtiment : 857 m2

2001

Prison de Viljandi

Construction d'un système d'alimentation électrique de secours qui permet, en cas de panne d'électricité, de se brancher sur un système autonome.

Construction de quartiers de logement pour les toxicomanes dans le bâtiment existant.

2001

2001

Prison de Pärnu

Construction, dans le cadre du bâtiment existant, d'une section réservée aux personnes faisant l'objet d'une enquête préliminaire. Surface du bâtiment : 306 m2

2003

162.Le Comité de la police a réalisé une enquête approfondie sur les conditions prévalant dans tous les centres de détention de la police, et un plan de mise en valeur destiné à remédier aux défauts constatés est en cours d'élaboration. L'enquête a pris en compte tous les éléments relevés par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) dans le rapport final sur sa visite de 2003, ainsi que le rapport établi par le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, M. Alvaro Gil-Robles, sur sa visite de 2003. Le plan de mise en valeur prévoit l'adoption de mesures propres à éliminer les problèmes mentionnés dans le rapport du CPT ainsi qu'à améliorer de façon générale les centres de détention. Il est prévu de rénover progressivement tous les bâtiments de la police et d'assurer que les centres de détention répondent aux conditions du CPT. Un plan d'action plus précis est en train d'être mis au point.

163.En 2001, les centres de détention suivants ont fait l'objet de mesures de rénovation :

à la préfecture de police de Hiiumaa, des pièces destinées aux entretiens avec les avocats ont été construites;

à la préfecture de police de Rakvere, les cellules ont été rénovées;

à la préfecture de police de Põlva, le système de ventilation a été rénové;

à la préfecture de police de Pärnu, le centre de détention et les cellules de dessoûlement ont été réaménagés;

à la préfecture de police de Viljandi, le système de ventilation a été rénové et les cellules ont été réaménagées.

164.En 2002, les centres de détention suivants ont fait l'objet de mesures de rénovation :

à la préfecture de police de Järva, le système électrique et de ventilation du centre de détention a été rénové et des travaux de construction généraux ont été réalisés;

à la préfecture de police de l'Ouest, le centre de détention de Haapsalu a été partiellement rénové et des travaux de rénovation et de construction ont été réalisés.

165.En 2003, à la préfecture de police de Harju, le système électrique du centre de détention de Saue a été rénové.

166.Afin d'améliorer les conditions de détention et d'obtenir des directives à ce sujet, la République d'Estonie a coopéré avec le CPT, qui s'est rendu à trois reprises dans des lieux de détention en Estonie (en 1997, 1999 et 2003). Les rapports de 1997 et de 1999 du CPT et les réponses correspondantes de l'Estonie ont déjà été publiés. Le rapport de 2003 et les réponses correspondantes le seront également. Les autorités estoniennes ont toujours considéré avec beaucoup de sérieux les propositions et les recommandations du CPT et se sont efforcées d'améliorer en conséquence les conditions de détention dans le pays.

Protection contre les mauvais traitements et la torture

167.La Constitution estonienne interdit la torture et les autres traitements cruels ou dégradants. Elle stipule, à l'article 130, que pendant l'état d'urgence ou l'état de guerre, les droits et libertés des personnes peuvent être limités et des obligations peuvent être imposées aux individus dans l'intérêt de la sécurité nationale et de l'ordre public, dans les conditions et conformément aux procédures prescrites par la loi. Toutefois, des droits et des libertés constitutionnels comme le droit à la vie, le droit de saisir les tribunaux pour défendre ses droits et libertés s'ils ont été violés, le droit à la protection de l'État et de la loi, ainsi que d'autres droits énoncés dans la Constitution, ne peuvent pas être restreints. Les restrictions prévues à l'article 130 de la Constitution ne s'appliquent pas non plus au droit énoncé à l'article 18, qui dispose que nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En conséquence, la torture n'est autorisée en aucune circonstance, et ceci s'applique à l'égard de toute personne se trouvant sur le territoire de la République d'Estonie.

168.Conformément à la Constitution, toute personne privée de liberté doit être informée rapidement, dans une langue et d'une manière qu'elle comprend, des raisons de cette mesure ainsi que de ses droits, et avoir la possibilité d'en aviser ses proches. Toute personne soupçonnée d'une infraction pénale doit également se voir donner rapidement la possibilité de choisir un avocat et de s'entretenir avec lui.

169.A la différence du précédent, le nouveau code de procédure pénale prévoit clairement que toute personne, avant d'être arrêtée, doit être conduite devant un magistrat responsable des enquêtes préliminaires et qu'il n'est plus possible de déroger au droit de comparaître (art. 131, par. 2). La décision du tribunal concernant l'arrestation doit être communiquée immédiatement à l'intéressé dans une langue et d'une manière qu'il comprend.

170.Le responsable de l'enquête préliminaire ou le tribunal doivent immédiatement aviser de l'arrestation un des proches de l'intéressé, ainsi que son lieu de travail ou d'étude. Cette notification peut toutefois être reportée en prévention d'une infraction pénale ou dans l'intérêt de la manifestation de la vérité lors d'une procédure pénale. En cas d'arrestation d'un ressortissant étranger, une copie du mandat d'arrêt ou de la décision du tribunal doit être adressée au Ministère des affaires étrangères. Une personne placée en détention comme suspect se voit accorder la possibilité d'aviser de cette mesure au moins un de ses proches, à son choix, par l'entremise de l'instance chargée de la procédure. Si une telle notification porte préjudice à la procédure pénale, cette possibilité peut être refusée avec l'accord du ministère public.

171.Dans une procédure pénale, les suspects et les accusés peuvent choisir leur avocat personnellement ou par l'entremise d'une autre personne. L'avocat doit être assuré du placement en détention de l'intéressé, à la demande de celui-ci, ou du fait qu'il fait l'objet d'un acte de procédure. Pour garantir la défense, tel ou tel acte de procédure est au besoin différé; afin d'éviter des délais, l'article 43 prévoit des échéances pour la désignation d'un avocat d'office au cas où l'avocat choisi par l'intéressé ne peut pas prendre part à la procédure.

172.S'agissant de la recommandation du Comité tendant à ce que les témoins qui ne font pas encore l'objet de poursuites pénales aient le droit de bénéficier des services d'un avocat, nous estimons qu'une telle réglementation n'est pas nécessaire. En effet, l'article 33 du Code de procédure pénale ne fait pas dépendre l'établissement du statut de suspect d'une décision particulière à cet effet. En outre, la Cour suprême, dans son jugement No.3-1-1-45-96 de 1997, a déjà expliqué qu'il n'était pas illégal d'interroger une personne en qualité de témoin avant de la placer en détention en qualité de suspect si l'interrogatoire ne porte pas sur les circonstances de la réalisation des infractions dont elle sera ultérieurement accusée. Ceci confirme l'opinion communément admise selon laquelle les dépositions faites par une personne en qualité de témoin avant que cette personne ne soit déclarée suspecte ne sont pas recevables ultérieurement comme preuves à charge.

173.Il n'y a pas en Estonie de disposition législative concernant la protection des témoins. Le Parlement (Riigikogu) examine actuellement un projet de loi à ce sujet qui établira les fondements juridiques de la protection, contre l'exercice d'influences illicites, des personnes susceptibles de connaître des faits touchant à la question de la preuve dans les procédures pénales, ou des membres de leur famille ou d'autres de leurs proches. Ce projet de loi prévoit aussi l'établissement, en ce qui concerne les droits constitutionnels des citoyens estoniens et des autres personnes, des restrictions nécessaires pour une protection effective des témoins. Aux fins de la mise en place du système de protection des témoins, un projet intitulé "Appui à la création d'un système de protection des témoins" a été mis en œuvre en 2003 dans le cadre du Programme national Phare pour l'Estonie (troisième partie). Le Code de procédure pénale prévoit la possibilité de protéger les témoins en maintenant leur anonymat ou en les interrogeant par téléphone ou à l'aide d'un système de vidéoconférence.

174.La protection des témoins est assurée par la police criminelle centrale, qui est également chargée de la coopération internationale dans ce domaine avec les unités compétentes d'autres pays conformément aux accords internationaux en vigueur. D'autres organismes étatiques et organes d'administration locale, ainsi que des personnes morales de droit public, sont tenus de contribuer à la protection des témoins. Le contrôle des activités relatives à la protection des témoins est assuré par le parquet. L'application de mesures de protection des témoins ne peut se faire qu'avec le consentement des intéressés.

175.En fonction de la gravité ou des circonstances particulières de l'infraction pénale, le magistrat chargé de l'enquête préliminaire peut décréter l'anonymat d'un témoin afin d'assurer sa sécurité. Le tribunal peut aussi déclarer le huis-clos, partiellement ou totalement, s'il y va de la sécurité du tribunal, des personnes qui participent à la procédure ou des témoins.

176.Conformément à la loi relative au Gouvernement de la République, le Ministère de la justice est responsable de l'organisation et de la supervision des activités des prisons.

177.La supervision des maisons d'arrêt est assurée par le service de contrôle de la police du Comité de la police, qui relève du Ministère de l'intérieur. La principale tâche de ce service consiste à contrôler la légalité des activités des fonctionnaires de police et des autres agents du Comité et de ses organes subsidiaires et à conduire les procédures disciplinaires.

178.La supervision des soins administrés dans les hôpitaux psychiatriques et, en cas de maladie contagieuse, des traitements d'office, est assurée par le Conseil sanitaire. En vertu de ses statuts, le Conseil sanitaire contrôle le respect des consignes par les agents des services de santé ainsi que les activités des médecins traitants, du personnel médical d'urgence, des unités médicales spécialisées et des services infirmiers indépendants. Il examine également les demandes et les requêtes déposées, entre autres, par les patients, et se prononce à leur sujet. Dans la pratique, la détention des personnes n'est pas contrôlée régulièrement, mais les plaintes et les requêtes sont examinées conformément aux règlements.

179.La supervision du Centre d'Illuka, qui accueille les demandeurs d'asile, est assurée par le Ministère des affaires sociales.

180.Les membres des forces de défense peuvent déposer des plaintes concernant les traitements ou sanctions disciplinaires qui leur sont infligés auprès du supérieur hiérarchique immédiat de l'officier ayant imposé ces mesures. S'ils ne reçoivent pas de réponse ou si la réponse qu'ils reçoivent ne les satisfait pas, ils peuvent déposer une nouvelle plainte auprès du supérieur hiérarchique immédiat de l'officier ayant été saisi de la plainte précédente ou auprès de l'Inspecteur général des forces de défense.

Code de conduite pour les fonctionnaires de police

181.Les droits et les devoirs des fonctionnaires de police et la manière dont ils doivent se comporter avec les détenus sont régis par les textes législatifs pertinents (loi sur la police, code de procédure pénale, loi sur l'emprisonnement, etc.). Le code d'éthique des fonctionnaires figurant en appendice à la loi sur la fonction publique s'applique aussi à la police. En tant que directives générales, l'"ABC de la police", qui comprend dix règles pour les fonctionnaires de police, est également applicable. Un code d'éthique de la police est en cours d'élaboration et l'Estonie participe au groupe de travail chargé de mettre au point le code européen d'éthique de la police.

Personnes en situation irrégulière et demandeurs d'asile

182.Les conditions et les modalités régissant l'expulsion des étrangers séjournant illégalement en Estonie sont énoncées dans la loi relative à l'obligation de quitter le pays et à l'interdiction d'y entrer. S'il n'est pas possible de mener l'expulsion à terme dans les 48 heures, la personne sous le coup d'un arrêté d'expulsion doit être placée en attendant, mais pour une période n'excédant pas deux mois, dans le centre d'expulsion sur décision du juge administratif. Le tribunal administratif peut proroger la détention, par tranches de deux mois au plus, jusqu'à ce que la mesure d'expulsion soit appliquée ou que l'étranger soit libéré.

183.Entre le 1er mars 2003 et le 15 octobre 2004, la durée moyenne de détention dans le centre d'expulsion était de 3,4 mois. Ce sont les personnes de nationalité russe qui y étaient restées le plus longtemps, la décision de les réadmettre ou non en Russie étant prise par l'Ambassade de la Fédération de Russie. L'adoption d'une telle décision peut malheureusement tarder.

184.Entre le 1er juin 2001 et le 15 octobre 2004, 62 personnes ont été expulsées d'Estonie après être passées par le centre d'expulsion.

185.Le tableau ci-dessous indique le nombre de personnes expulsées au cours de la période 2002-2004 (jusqu'à octobre 2004), par nationalité* :

2002

2003

2004

Algérie

1

Arménie

11

9

Azerbaïdjan

19

8

Australie

1

Géorgie

11

4

5

Haïti

1

Croatie

1

Israël

1

Inde

2

1

Indonésie

1

Italie

2

Japon

1

Canada

1

Kazakhstan

2

1

Chypre

1

Afrique du Sud

1

Lettonie

20

11

7

Moldavie

10

4

4

Niger

1

Norvège

1

France

2

1

Suède

1

1

Roumanie

8

Allemagne

1

Finlande

3

Grande-Bretagne

15

4

1

République tchèque

1

Turquie

1

Ukraine

35

21

9

États-Unis d'Amérique

1

2

Ouzbékistan

1

Bélarus

6

4

Russie

108

39

5

Total

221

125

52

* Personnes expulsées par la police, les gardes-frontière et le Conseil de la citoyenneté et des migrations.

186.S'il n'est pas possible d'exécuter la mesure d'expulsion dans un délai de 48 heures, l'étranger est placé dans le centre d'expulsion jusqu'à ce qu'il soit expulsé ou que la mesure soit révoquée.

187.Le centre d'expulsion est un territoire bien délimité dont le périmètre est surveillé. Les détenus sont logés dans des pièces meublées en bois pouvant accueillir deux personnes et répondant aux normes techniques, sanitaires et d'hygiène en vigueur. Les femmes et les hommes sont séparés. Des repas sont servis régulièrement dans la salle commune, où il est également possible de passer son temps libre. Les menus tiennent compte des besoins nutritionnels des détenus. Il y a des toilettes et une douche pour 16 personnes. Des articles de toilette sont fournis, si nécessaire, par le centre. Un service de coiffeur est assuré une fois par mois. Les détenus portent leurs vêtements personnels, mais le centre fournit des vêtements gratuitement à ceux qui en ont besoin. Un lave-linge et un sèche-linge sont à leur disposition. Le centre garantit les soins médicaux d'urgence et dispose d'une infirmerie. Chaque détenu a le droit de rencontrer un agent consulaire de son pays, un avocat et un ministre des cultes, ainsi que, avec la permission et sous la supervision du chef du centre, d'autres personnes. La correspondance est autorisée, de même que l'utilisation sans restriction, durant le temps libre, du publiphone à carte. Par l'intermédiaire du centre, il est possible d'acheter des denrées alimentaires, des articles de toilette et d'autres objets autorisés dans les limites d'une certaine somme. Il est également possible de recevoir des colis, mais sans produits alimentaires ni médicaments. Des mesures de sécurité peuvent être prises à l'égard des personnes qui ne respectent pas leurs obligations légales ou enfreignent le règlement intérieur du centre, qui négligent les règles élémentaires d'hygiène et risquent par là de mettre en danger leur santé ou celle d'autrui, qui portent atteinte à leur propre santé ou aux biens du centre, qui montrent des tendances suicidaires ou cherchent à s'enfuir, ou qui sont violentes.

188.Les mesures de sécurité prévues sont notamment les suivantes :

restriction de la liberté de circulation et de communication;

interdiction d'utiliser ses affaires personnelles;

placement dans une pièce fermée séparée;

recours à des moyens de contrainte; immobiliser une personne, lui passer des menottes ou une camisole de force sont des moyens de contraintes autorisés par la loi; le recours à des moyens de contrainte ne peut pas durer plus de 12 heures d'affilée.

189.Le séjour des réfugiés en Estonie est régi par la loi sur les réfugiés. Un étranger qui a de bonnes raisons de craindre d'être persécuté dans le pays dont il a la nationalité ou le pays où il réside en permanence, du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, a le droit de demander l'asile en Estonie.

190.Un étranger peut aussi demander l'asile si son retour ou son expulsion risquent d'avoir les conséquences indiquées à l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme ou à l'article 3 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou d'entraîner l'application de la peine de mort dans le pays dont il a la nationalité ou le pays où il réside en permanence. En fonction de la demande du réfugié, l'asile peut aussi être accordé à son conjoint ou à ses enfants mineurs si ceux-ci se trouvent hors d'Estonie et répondent à la définition du terme "réfugié" figurant dans la Convention et le Protocole relatifs au statut des réfugiés.

191.Au cours de la période 1997-2004, l'Estonie a reçu 94 demandes d'asile et accordé l'asile à quatre personnes. Une protection subsidiaire a été fournie à neuf étrangers qui n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention mais dans le cas desquels il y avait de bonnes raisons de croire que leur retour ou leur expulsion pouvaient avoir les conséquences prévues à l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme ou à l'article 3 de la Convention des Nations Unies contre la torture, ou entraîner l'application de la peine de mort dans le pays dont ils avaient la nationalité ou le pays où ils résidaient en permanence. En outre, 12 permis de séjour ont été accordés en raison des liens familiaux que les demandeurs d'asile avaient établis pendant que leur demande d'asile était traitée en Estonie.

Répartition des détenus condamnés, par nationalité

Nombre total des détenus

Apatrides

Ressortissants étrangers

1er janvier 2002

3270

1505

155

1er janvier 2003

3059

1322

170

1er janvier 2004

3221

1232

196

21 octobre 2004

3415

1224

177

192.D'après les informations dont disposent les autorités estoniennes, aucune étude approfondie n'a été réalisée sur les raisons pour lesquelles les apatrides et les personnes de nationalité russe sont surreprésentés dans la population des détenus condamnés. Les statistiques générales relatives à la criminalité montrent toutefois ceci :

en 2001, les Estoniens représentaient approximativement 41 % des personnes purgeant une peine privative de liberté, les Russes environ 52 % et les ressortissants d'autres pays 7 %;

en 2001-2003, les Estoniens représentaient 68 à 69 % de l'ensemble des détenus condamnés, les Russes 4 à 5 % et les apatrides 25 à 26 %;

début 2004, 55,7 % des détenus étaient estoniens, 38,2 % apatrides et 6,1 % ressortissants d'autres pays.

193.Ces statistiques montrent qu'il est inexact de dire que les personnes de nationalité russe et les apatrides constituent la majorité des condamnés et des détenus. On ne saurait nier cependant que la proportion des non-Estoniens et des apatrides est élevée, et il serait effectivement intéressant d'étudier la question, ainsi que le recommande le Comité. En ce qui concerne la criminologie, il convient de noter que ce domaine de recherche a été longtemps négligé en Estonie. Mais la nécessité de telles études a été reconnue, ce dont témoigne notamment l'accord de coopération conclu entre le Ministère de la justice et l'Institut de droit de l'Université de Tartu, suivant lequel le Gouvernement, par l'entremise du Ministère de la justice, financera les activités de recherche en criminologie de l'Institut pendant trois ans moyennant un crédit de 1,35 million de couronnes. Le principal objectif de l'accord de financement à long terme est de promouvoir la recherche criminologique et de créer les conditions nécessaires à l'élaboration d'une politique criminelle informée.

Ratification de la Convention de 1961 sur la réduction des cas d'apatridie

194.Le Comité a recommandé à l'Estonie d'envisager de ratifier la Convention de 1961 sur la réduction des cas d'apatridie. Les organes gouvernementaux compétents ont étudié à titre préliminaire la possibilité d'accéder à cette Convention. Dans la mesure où une telle accession exigerait l'introduction d'un certain nombre d'amendements dans la législation en vigueur, l'Estonie n'a pas l'intention pour le moment d'accéder à la Convention.

Mécanisme pour la collecte de données sur les questions relevant de la Convention

195.Les différents ministères collectent régulièrement des données touchant à leur domaine d'activité, notamment des données sur les questions relevant de la Convention. En cas de besoin, les données et statistiques voulues peuvent être obtenues auprès des ministères.

Déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention

196.En réponse aux recommandations du Comité tendant à ce que l'Estonie envisage de faire les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention, les autorités estoniennes souhaitent déclarer que l'Estonie n'a pas l'intention actuellement de faire ces déclarations. Il n'est cependant pas exclu qu'elle envisage, à l'avenir, de les faire.

Le Chancelier de justice

197.Il n'y a pas en Estonie de personne portant le titre, reconnu au plan international, d'"ombudsman". Les tâches afférant à ce titre incombent au Chancelier de justice, qui assume également les fonctions de médiateur que lui confère la loi sur le Chancelier de justice. Le Chancelier de justice vient en aide à la population lorsque ses droits ou libertés sont violés et engage une procédure lorsqu'un individu, en personne ou par l'intermédiaire d'un représentant, lui signale qu'un organisme de l'État a porté atteinte à ses droits fondamentaux. Une attention particulière est accordée aux personnes qui ne sont pas en mesure de défendre elles-mêmes leurs droits ou dont la liberté est restreinte. Ce sont notamment les enfants, les personnes séjournant dans une maison de retraite ou un hôpital psychiatrique, les détenus et les conscrits. Le Chancelier de justice et ses conseillers ont donc un programme spécial de visite dans les foyers pour enfants, les maisons de retraite, les hôpitaux psychiatriques, les prisons et les casernes afin de vérifier sur place la situation en ce qui concerne la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de s'entretenir avec les personnes se trouvant dans ces établissements et, le cas échéant, d'engager une procédure de vérification.

198.Le tableau ci-après indique le nombre des requêtes déposées auprès du Chancelier de justice concernant diverses institutions, par année :

Prisons

Police

Parquet

2002

76

74

15

2003

243

70

10

199.En ce qui concerne la protection des droits des enfants, le Chancelier de justice intervient principalement de sa propre initiative. Le Ministère des affaires sociales est en train d'élaborer une stratégie pour la protection de l'enfance, qui contiendra une proposition visant à modifier la loi sur le Chancelier de justice afin de donner à celui-ci des pouvoirs plus explicites pour agir dans l'intérêt de la protection des droits de l'enfant. Outre l'examen des requêtes dont il est saisi, le Chancelier de justice a entrepris en 2003 de procéder à l'inspection des établissements qui accueillent les enfants ayant des besoins spéciaux afin de voir comment les droits des enfants étaient protégés dans ces établissements.

200.Pour avoir une idée précise de la situation prévalant dans les établissements d'enseignement spécial et obtenir des renseignements sur la protection des droits de l'enfant dans ces institutions, le Chancelier de justice s'est rendu dans les trois établissements d'enseignement spécial d'Estonie, situés respectivement à Tapa, Puiatu et Kaagvere. Le placement dans un établissement d'enseignement spécial est la plus sévère des sanctions applicables en vertu de la loi sur les sanctions devant être appliquées aux mineurs. Un établissement d'enseignement spécial est un établissement fermé où l'éducation des enfants fait l'objet d'une surveillance constante. Il est d'autant plus important de contrôler de près la garantie des droits et libertés fondamentales des enfants dans ces établissements que la possibilité qu'ils ont d'assurer eux-mêmes la protection de leurs droits se trouve limitée.

201.Dans l'un des trois établissements (à Tapa), la pièce d'isolement n'est pas du tout utilisée, tandis que dans les deux autres (à Kaagvere et à Puiatu), des enfants ont été placés en isolement de façon plus ou moins contraire à la loi sur les sanctions applicables aux mineurs.

202.Le Chancelier de justice a recommandé aux établissements d'accorder davantage d'attention au caractère confidentiel des messages adressés par les élèves, des problèmes ayant été constatés à cet égard. Conformément à la loi sur les sanctions applicables aux mineurs, il est possible d'examiner, en présence de l'élève, les colis qui lui sont envoyés mais non pas ceux qu'il envoie, et il est interdit de contrôler le contenu de la correspondance ou des messages adressés par d'autres moyens de communication.

203.Le placement d'enfants dans des établissements d'enseignement spécial pour des durées excessives, ignorant le rythme de l'année scolaire, est sans doute l'une des raisons pour lesquelles de nombreux enfants placés dans de tels établissements interrompent leurs études. Cela rend aussi difficile l'inscription dans un autre établissement.

204.Aucune mesure effective de suivi n'est prévue pour les jeunes qui sortent d'un établissement d'enseignement spécial et il n'y a pas de personnel d'appui. Souvent, la seule possibilité qui s'offre aux jeunes est de retourner dans l'établissement scolaire où les problèmes avaient commencé; c'est souvent le personnel de l'établissement d'enseignement spécial lui-même (et non pas des représentants des comités pour la jeunesse ou des assistants sociaux locaux) qui aide à trouver un établissement d'éducation approprié pour les enfants.

205.Le fait que l'on trouve dans les établissements d'enseignement spécial des jeunes qui ont fait l'objet d'une enquête préliminaire ou d'une mesure d'emprisonnement et qui présentent également des différences d'âge trop importantes (entre 10 et 17 ans) est une source de difficulté. Une telle situation, non seulement n'est guère pédagogique, mais va en outre à l'encontre de l'objectif de prévention de la criminalité et de réinsertion sociale. Le problème est apparu après la fermeture de l'établissement d'enseignement spécial de Sindi, qui accueillait des jeunes garçons âgés de 14 à 18 ans. Un tiers d'entre eux ont été placés dans des établissements spéciaux à plusieurs reprises.

206.En 2003, des procédures pénales ont été engagées contre six élèves placés dans des établissements d'enseignement spécial, pour actes de terreur et de violence à l'égard de camarades.

207.Dans la mesure où la sanction institutionnelle n'est pas différenciée, il est impossible dans les établissements d'assurer la sécurité des élèves qui ont été victimes ou témoins de délits.

208.Le Chancelier de justice est en train de contrôler la mise en œuvre de ses recommandations dans les établissements d'enseignement spécial.

Visites de contrôle dans les centres de détention de Narva et de Kohtla-Järve

209.Le 8 janvier 2003, le conseiller du Chancelier de justice à Ida-Virumaa s'est rendu dans le centre de détention de la préfecture de police de Narva.

210.Lors de sa visite, il n'a pas constaté de surpeuplement. Selon les fonctionnaires de police, les cellules sont normalement ventilées. Il est possible, dans chaque cellule, de se laver et d'utiliser les toilettes.

211.Il est apparu que le centre de détention se conformait au principe selon lequel les prévenus doivent être détenus séparément. D'après le registre des détenus, les hommes et les femmes étaient détenus dans des cellules séparées, de même que les adultes et les mineurs.

212.Une cellule était dépourvue de fenêtre et d'autres ne recevaient pratiquement pas de lumière naturelle. Toutes les cellules étaient éclairées en permanence par la lumière artificielle. Il a également été constaté qu'il était impossible de jouir du droit de disposer d'air frais. D'après le directeur, cela n'était techniquement ou matériellement pas possible (manque de personnel).

213.Le 19 février 2003, un conseiller du Chancelier de justice s'est rendu dans le centre de détention de Kohtla-Järve (préfecture de police du comté d'Ida-Viru).

214.Le centre est sérieusement surpeuplé, d'où la difficulté pour les détenus d'assurer leur hygiène personnelle. Le principe de la séparation des prévenus et des condamnés n'est pas respecté. D'après le registre des détenus, on trouve ces deux catégories de personnes dans une même cellule. Les hommes sont séparés des femmes, de même que les adultes des mineurs. Les fumeurs et les non-fumeurs partagent les mêmes cellules.

215.Toutes les cellules sont mal ventilées et dépourvues de fenêtre et de lumière du jour. Elles sont éclairées en permanence par la lumière artificielle. De telles conditions ne sont pas conformes aux règles prévues en matière de détention préventive, d'arrestation ou d'arrestation administrative.

216.De l'avis du Chancelier de justice, la situation qui prévaut dans les centres de détention d'Ida-Virumaa se traduit par un traitement dégradant des détenus, en contravention avec les dispositions de l'article 18 de la Constitution.

217.Le Chancelier de justice et les représentants d'organisations internationales qui se sont rendus en Estonie ont appelé l'attention du Ministère de l'intérieur sur la nécessité d'assurer rapidement la protection des droits fondamentaux des personnes se trouvant dans les centres de détention de la police et le respect des exigences relatives aux conditions de détention. Le Ministère de l'intérieur, tout en admettant qu'il y avait des problèmes, a invoqué le manque de ressources (les demandes d'allocation budgétaire incessantes n'ont rien donné) et argué que la construction prévue de la prison de Jõhvi (qui comprendra un département pour les enquêtes préliminaires) ne justifiait pas qu'on se lance dans d'importants travaux de rénovation des centres de détention.

Visite de contrôle à la prison de Tartu

218.Le 6 février, dans le cadre de leur visite en Estonie, des représentants de l'administration du Médiateur finlandais se sont rendus, conjointement avec des fonctionnaires du bureau du Chancelier de justice, à la prison de Tartu. Le Secrétaire général adjoint aux prisons du Ministère de la justice était également présent.

219.La prison de Tartu est un établissement pénal qui relève du Ministère de la justice. Elle accueille à la fois des personnes ayant fait l'objet d'une condamnation judiciaire et des personnes placées en détention préventive dans le cadre d'une procédure pénale.

220.Lors de la visite de contrôle, la direction de la prison de Tartu n'a signalé aucune infraction notable de la part du personnel pénitentiaire. Ceci s'explique probablement par le fait qu'il s'agit d'une prison qui fonctionne depuis peu en régime ouvert et dont le personnel se compose de personnes n'ayant jamais travaillé auparavant dans le système pénitentiaire. Quelques cas ont été signalés de détenus ayant agressé un employé de l'administration pénitentiaire ou s'étant fait remarquer pour une affaire de substances psychotropes.

221.Les représentants du Chancelier de justice ont également organisé une rencontre avec les détenus dans la prison. Quelques détenus sont intervenus au nom de tout un groupe, en l'occurrence leur section, ce qui montre que la hiérarchie entre criminels qui caractérisait le régime de détention de type pénitentiaire a en partie été brisée dans la prison de Tartu. Une requête écrite d'un détenu a été reçue. Au total, 11 prisonniers et une personne en détention préventive ont participé à la rencontre. Les détenus ne se sont pas plaints de violence de la part du personnel pénitentiaire.

Visite de contrôle à la prison de Maardu

222.Le 28 avril 2003, les services du Chancelier de justice ont effectué leur visite de contrôle à la prison de Maardu. La prison de Maardu accueille des mineurs et des jeunes placés en détention préventive; il s'agissait donc de vérifier comment les libertés et les droits fondamentaux y étaient respectés, eu égard surtout à l'âge des détenus.

223.La prison de Maardu est un établissement relevant du Ministère de la justice destiné à l'exécution des mesures de détention préventive et des peines, qui accueille principalement des mineurs et des jeunes placés en détention préventive dans le cadre d'une procédure pénale.

224.En raison des moyens limités, seule une instruction générale est dispensée à la prison de Maardu : il serait actuellement impossible d'y assurer une formation professionnelle conforme aux normes.

225.Lors de la visite de contrôle, les fonctionnaires du bureau du Chancelier de justice ont organisé une rencontre avec les détenus. Au total, 24 détenus et un fonctionnaire de l'administration pénitentiaire étaient présents. Aucune plainte pour violence de la part du personnel pénitentiaire n'a été formulée.

Visite de contrôle à la prison de Murru

226.Le 27 octobre 2003, les représentants du Chancelier de justice se sont rendus, comme prévu, à la prison de Murru. Il s'agissait de voir comment les libertés et droits fondamentaux des détenus étaient garantis dans la plus grande prison de type "colonie pénitentiaire" du pays.

227.La prison de Murru est un établissement relevant du Ministère de la justice qui accueille des hommes adultes purgeant une peine d'emprisonnement.

228.Le Chancelier de justice a été saisi d'un nombre nettement moins élevé de plaintes en provenance de la prison de Murru qu'en provenance de prisons importantes destinées aux personnes faisant l'objet d'une enquête préliminaire, comme celles de Tallinn ou de Tartu. En 2003, ce nombre n'était que d'une vingtaine.

229.Les représentants du Chancelier de justice ont constaté que les locaux de la prison n'étaient pas conformes aux normes modernes. Certains locaux –les cellules disciplinaires et les cellules fermées- étaient en mauvais état et surpeuplés. La cantine ne satisfaisait pas non plus aux exigences modernes.

230.En tout, les représentants ont rencontré 31 personnes : 23, le 27 octobre, et les autres, lors de la visite de suivi qu'ils ont effectuée le 3 décembre 2003. Aucune plainte concernant des violences de la part du personnel pénitentiaire n'a été formulée.

231.Le 9 juillet 2004, les représentants du Chancelier de justice se sont rendus à la prison de Viljandi, qui est réservée aux jeunes prisonniers de sexe masculin. Ils n'y ont constaté aucune infraction.

232.Les 20 et 21 septembre, le Chancelier de justice s'est rendu, avec ses collaborateurs, dans des centres de détention de la préfecture de police de l'Est, à Narva, Kohtla-Järve et Rakvere. Il a ensuite adressé des propositions au Ministre de l'intérieur et au Ministre de la justice au sujet des infractions constatées.

233.Le 28 octobre et le 3 novembre 2004, des représentants du Chancelier de justice ont effectué une visite de contrôle à la prison d'Ämari.

Plaintes adressées par les prisonniers au Chancelier de justice

234.Les prisonniers usent souvent de leur droit de porter plainte auprès du Chancelier de justice au sujet des conditions prévalant dans les établissements carcéraux. Au cours de la période 2000-2003, entre 10 et 14 % des plaintes concernaient les conditions régnant dans les établissements et les activités du personnel de l'administration pénitentiaire. Les prisonniers mettaient notamment en cause l'administration des soins médicaux; certains se plaignaient de ne pas pouvoir conserver avec eux des objets personnels, comme un poste de radio ou un téléviseur. Il y avait aussi des plaintes concernant la procédure de réponse aux réclamations adressées à l'administration pénitentiaire. Dans plusieurs cas, le Chancelier de justice a constaté des infractions à la loi. Au sujet des questions soulevées dans les plaintes des prisonniers, il a adressé des propositions au Ministère de la justice sur la manière d'améliorer la situation et, dans la plupart des cas, le Ministère a approuvé ces propositions. Dans certains cas, le Ministère a approuvé les propositions en principe mais précisé que les ressources disponibles ne permettaient pas de les mettre en œuvre. En novembre 2004, le Chancelier de justice avait été saisi de 243 plaintes émanant de prisonniers et de personnes placées en détention préventive.

L'Inspection sanitaire

235.L'Inspection sanitaire contrôle régulièrement les conditions prévalant dans les cantines des établissements pénitentiaires et la nourriture qui y est préparée. Fin 2003, avec ses antennes locales, elle avait contrôlé les conditions d'hygiène dans 10 422 entreprises de manutention des aliments (4 577 établissements de restauration et 5 845 établissements de vente au détail).

236.Les prisons sont classées, parmi les entreprises de manutention des aliments, dans la deuxième catégorie en matière de risque. Les établissements relevant de cette catégorie préparent des produits qui sont destinés à des consommateurs ordinaires, qui sont prêts à consommer et qui ne comportent pas de risque élevé, même si la gamme des aliments proposés ou le nombre des consommateurs servis sont importants.

237.En 2001-2004, l'Inspection sanitaire a procédé à des visites régulières dans les cantines des prisons et constaté que celles-ci se conformaient de façon générale aux normes. Elle a donné son agrément à la plupart d'entre elles.

Tallinn

Tartu

Murru

Ämari

Harku

Viljandi

Pärnu

2001

1

X

1

1

Rénovation de la cantine

1

2002

1

X

1

1

1

2

2003

3

1

2

1

2

2

0

2004

0

1

2

0

0

2

0

Agrément

jusqu'au 20.12.04

illimité

Refusé

illimité

illimité

illimité

illimité

238.La seule cantine qui ne satisfait pas aux normes est celle de la prison de Murru. D'après l'Inspection sanitaire, l'état de la cuisine et des salles auxiliaires laisse à désirer, les pièces sont humides et froides, le matériel de manutention des aliments et les matières premières sont obsolètes et demanderaient à être remplacés, et la température dans les garde-manger, les réfrigérateurs et les congélateurs n'est pas entièrement conforme aux normes. Pour améliorer la situation, un nouveau bloc cuisine (avec les conduites pour l'alimentation en électricité et en eau et les canalisations d'évacuation nécessaires) sera conçu en 2005 et construit en 2006 dans la prison de Murru.

Impartialité et objectivité des enquêtes sur les plaintes

239.Une personne arrêtée peut porter plainte pour mauvais traitement. L'agent de liaison informe le détenu de la procédure à suivre à cet égard. Dans les cas faisant intervenir des violences, le détenu introduit d'abord une requête auprès de l'établissement pénitentiaire. L'administration de l'établissement vérifie si les éléments constitutifs d'une infraction pénale pourraient être établis au cours de l'enquête. Si une telle possibilité existe, des poursuites pénales sont engagées, des mesures préliminaires et urgentes sont prises et l'affaire est déférée à la police pour enquête car, conformément au Code de procédure pénale entré en vigueur le 1er juillet 2004, les établissements pénitentiaires ne peuvent prendre que des mesures d'enquête initiales. L'organe d'enquête compétent prévu à l'article 31, paragraphe 1, du Code de procédure pénale (c'est-à-dire la police) procèdera à une enquête préliminaire sur toutes les infractions commises en prison.

240.Les tribunaux de comté et municipaux ayant compétence pour se prononcer sur le fond en matière pénale doivent être particulièrement vigilants en cas de plainte dénonçant une violation commise dans le cadre d'un acte de procédure pénale. Conformément à l'article 213, paragraphe 3, du Code de procédure pénale, le procureur qui constate (notamment lors de l'examen d'une plainte) l'existence d'éléments constitutifs d'une faute disciplinaire dans la conduite d'un fonctionnaire d'un organe d'enquête lors de l'enquête préliminaire a le droit et le devoir de proposer au supérieur de ce fonctionnaire d'engager une procédure disciplinaire. Le supérieur a quant à lui le devoir d'informer dans un délai d'un mois le ministère public, en tant que responsable de l'enquête préliminaire, de la décision prise. Ceci découle du principe selon lequel le ministère public est également tenu d'assurer la légalité de la procédure précédant le procès. L'article 229, paragraphe 3, du Code de procédure pénale stipule que le requérant doit être informé des modalités et conditions nécessaires pour former un recours auprès du tribunal de comté ou du tribunal municipal. La révocation du fonctionnaire ayant contrevenu à la loi a lieu dans le cadre d'une procédure disciplinaire, sur ordre du parquet, ou dans le cadre une procédure de révocation conformément à l'article 59, paragraphe 1, du Code de procédure pénale.

Plaintes concernant le recours à la violence par des agents de l'État

241.Un détenu a le droit de porter plainte si le personnel du centre de détention use de violence à son égard.

242.Le Ministère de la justice est en train de mettre au point un décret sur les statistiques dans les affaires pénales qui permettra de disposer de données plus détaillées (par sexe, âge, nationalité).

243.Le tableau ci-après donne un aperçu des plaintes concernant des actes de violence policière déposées par les centres de détention entre le 1er juin 2001 et le 15 octobre 2004 :

Année

Nombre d'affaires disciplinaires

Nombre d'affaires dans lesquelles des accusations pour manquements à la discipline ont été portées

Nombre d'affaires pénales

2001

8

2

3

2002

13

0

0

2003

18

2

0

2004

14

1

0

244.Lorsqu'il n'a pas été porté d'accusations pour manquements à la discipline, c'est que les faits dénoncés n'ont pas été prouvés.

245.Depuis le 1er janvier 2003, 33 enquêtes disciplinaires ont été instituées suite à des plaintes faisant état de recours à la violence pendant la détention. Aucune procédure pénale n'a été engagée pour fait de violences policières dans des centres de détention.

Préfecture de police d'Ida-Viru – enquête instituée le 14.07.2003 décision N° 479p; blessures légères causées à une personne en garde à vue; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Lääne-Viru – instit. 01.12.2003 déc. N° 228p; suicide dans le centre de détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Narva – instit. 26.09.2003 déc. N° 473p; suicide dans le centre de détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Pärnu – instit. 18.11.2003 décision N° 682p; homicide involontaire dans le centre de détention – un détenu a été tué par des codétenus, une enquête a été ouverte par le Conseil de la police. Trois policiers ont reçu un blâme pour exercice inapproprié de leurs fonctions; un policier n'a pas été sanctionné.

Préfecture de police de Pärnu – instit. 18.11.2003 déc. N° 692p; allégations de brutalités; la culpabilité du policier n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn (15) – instit. 07.01.2003 déc. N° 38p; une personne amenée au centre de détention pour dessoûler est décédée; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 24.01.2003 déc. N° 197p; un détenu aurait été poussé contre un mur; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 20.02.2003 déc. N° 464p; un détenu aurait eu la tête frappée contre un mur; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 25.03.2003 déc. N° 978p; un détenu aurait été battu; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 28.04.2003 déc. N°1289p; une personne amenée au centre de détention pour dessoûler est décédée; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 05.05.2003 déc. N°1397p; allégation de recours illégal à la force; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 03.06.2003 déc. N°1740p; bagarre en dehors des heures de service; un policier a reçu un blâme pour outrage aux moeurs, trois policiers ont vu leur salaire réduit de 30 % pendant trois mois et un policier n'a pas été sanctionné.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 10.06.2003 déc. N° 1814p; le fils du requérant aurait été battu; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 04.07.2003 déc. N°2069p; suicide dans le centre de détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 22.07.2003 déc. N°2213p; le requérant a prétendu avoir été battu et s'être fait prendre 1000 couronnes; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 31.07.2003 déc. N°2324p; un détenu s'est blessé dans le centre de détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 19.08.2003 déc. N°2497p; le requérant a affirmé avoir été battu et subi des lésions corporelles; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 15.10.2003 déc. N°3042p; un détenu est décédé dans le centre de détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 14.11.2003 déc. N°3300p; une personne aurait été battue par la police; la culpabilité n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tallinn – instit. 21.11.2003 déc. N°3345p; le requérant a affirmé avoir été battu par la police; la culpabilité n'a pas été établie.

Préfecture de police de Tartu – instit. 06.03.2003 déc. N°112p; allégations de brutalités; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Viljandi (2) – instit. 29.04.2003 déc. N°43; allégations de brutalités; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de Viljandi – instit. 15.12.2003 déc. N°40p; allégations de brutalités; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

En 2004 – Préfecture de police de l'Est (4) – instit. 16.01.2004 déc. N°40p; six personnes en garde à vue se sont blessées; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de l'Est – instit. 28.01.2004 déc. N°79p; suicide dans la cellule de détention; deux policiers ont été reconnus coupables d'avoir exercé leurs fonctions de façon inappropriée et ont reçu un blâme.

Préfecture de police de l'Est – instit. 06.04.2004 déc. N°522p; deux détenus se sont blessés; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de l'Est – instit. 26.04.2004 déc. N°551p; suicide dans la cellule de détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police du Sud – instit. 30.04.2004 déc. N°571p; allégations de recours à la violence contre une personne pendant son transport au centre de détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police de l'Ouest – instit. 28.01.2004 déc. N°98; allégations de traitement inhumain dans le centre de détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police du Nord – instit. 02.01.2004 déc. N°430p; une personne aurait été battue dans le poste de police; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police du Nord – instit. 23.01.2004 déc. N°576p; une personne a été retrouvée morte dans la cellule de détention; pas de décision définitive pour le moment.

Préfecture de police du Nord – instit. 29.03.2004 déc. N°818p; allégations de brutalités pendant la détention; la culpabilité des policiers n'a pas été établie.

Préfecture de police du Nord – instit. 07.07.2004 déc. N°1260p; aucune assistance médicale n'aurait été assurée dans le centre de détention; pas de décision définitive pour le moment.

246.Plaintes concernant des actes de violence du personnel pénitentiaire dans les prisons estoniennes entre le 1er janvier 2003 et le 15 octobre 2004 :

Année

Nombre d'affaires pénales

Sanctions pénales

2001

3

0

2002

7

0

2003

9

0

2004 (1er semestre)

1

0

Date d'institution de l'enquête

Violation présumée

Décision

1

04.09.2001

06.01.01 Des fonctionnaires de la prison de Maardu ont battu un détenu.

Demande classée le 2.11.01 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

2

26.10.2001

Un détenu a prétendu que, le 17.10.01, un employé de la prison de Tallinn l'avait frappé à la jambe et lui avait fait mal alors qu'il revenait du sauna.

Demande classée le 8.11.01 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

3

23.11.2001

18.11.2001 Le personnel de la prison d'Ämari a battu un détenu.

Demande classée le 15.01.02 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

4

01.01.2002

25.10.01 Des employés de la prison d'Ämari ont frappé un détenu sur le dos avec une torche électrique.

Demande classée le 4.03.02 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

5

10.01.2002

01.12.01 Un employé de la prison de Pärnu a usé de violence physique à l'égard d'un détenu, le tirant par le bras et coinçant sa jambe dans la porte.

Demande classée le 3.02.03 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

6

22.03.2002

07.03.02 Des membres du groupe armé de la prison ont donné des coups de pied et de crosse à deux détenus.

Demande classée le 23.09.02 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

7

20.06.2002

17.06.02 Un employé de la prison de Tallinn a frappé à la tête un détenu avec une assiette dans la cellule disciplinaire.

Demande classée le 20.12.02 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

8

24.10.2002

09.10.02 Un employé de la prison d'Ämari a frappé un détenu et lui a cassé le doigt.

Demande classée le 12.12.02 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

9

29.11.2002

En octobre-novembre 2002, un employé de la prison de Pärnu a forcé un détenu à commettre des actes dégradants et a limité ses droits de façon illicite.

Demande classée le 29.01.03 (pas d'infraction pénale)

10

17.12.2002

05.12.02 Un employé de la prison de Murru a conduit deux détenus dans la cellule d'une troisième personne, qu'ils ont battue en la présence de l'employé et dont ils ont exigé 50 000 couronnes.

11

31.03.2003

19.01.03 Un employé de la prison de Murru aurait commis des actes de violence contre un détenu.

Demande classée le 30.07.03 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

12

08.05.2003

Deux employés de l'administration pénitentiaire auraient battu un détenu.

Demande classée le 30.05.03 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

13

19.06.2003

En octobre-novembre 2002, un employé de la prison de Tallinn aurait agi de façon discriminatoire envers un détenu.

Demande classée le 18.12.03 (pas d'infraction pénale)

14

21.08.2003

Des employés de la prison de Tallinn ont recouru à des violences physiques à l'égard d'une personne en état d'arrestation, lui causant des lésions corporelles.

Demande classée le 22.02.04 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

15

02.10.2003

01.10.2003 Un employé de la prison de Tartu a recouru à la force physique contre une personne en état d'arrestation.

Demande classée le 2.12.03 (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

16

30.10.2003

27.10.03 Au cours d'un service de garde exceptionnel, des employés ont causé des lésions corporelles à une personne en état d'arrestation.

Demande classée le 28.04.04 (la culpabilité des accusés n'a pas été établie et il n'est pas possible de recueillir des éléments de preuve supplémentaires)

17

17.12.2003

11.09.03 Au cours d'un transfert, un détenu a opposé une résistance physique et, en s'efforçant de le maîtriser, des employés de la prison de Tallinn lui ont causé des lésions corporelles (fracture de l'avant-bras gauche)

Demande classée (absence d'éléments constitutifs d'une infraction pénale)

18

16.04.2004

Un employé de la prison de Tartu a battu un détenu.

247.Environ 60 % de l'ensemble des requêtes (plaintes administratives) portent sur les sanctions disciplinaires imposées par la prison et 40 % concernent les congés pénitentiaires surveillés de courte durée, l'application des mesures de sécurité ou le refus de demandes de libération conditionnelle.

248.Un détenu qui estime que ses droits ont été violés par un acte administratif ou dans le cadre d'une procédure administrative peut introduire une requête. Les règles à cet égard sont énoncées dans la loi sur la procédure administrative (chap. 5). La requête du détenu est enregistrée dans un dossier spécial, le détenu confirmant, par sa signature, qu'elle a été transmise à un fonctionnaire de l'administration pénitentiaire. Ceci garantit qu'elle n'est pas perdue, qu'elle sera examinée suivant la procédure prévue par la loi relative à la procédure administrative et qu'une décision sera prise à son sujet. Dans la mesure où, conformément à la loi susmentionnée, la requête est soumise par l'intermédiaire de la prison et non adressée directement au Ministère de la justice, le premier à l'examiner est l'établissement pénitentiaire dont la mesure ou l'acte administratif ont été contestés. Si, en examinant la requête, l'établissement pénitentiaire constate que les droits du détenu ont effectivement été violés, il remédiera lui-même au problème et invalidera l'acte administratif en question. Mais s'il considère qu'il a agi légalement, il joindra à la requête tous les documents pertinents et adressera le tout au Ministère de la justice. Celui-ci devra examiner la requête et prendre une décision dans un délai de 30 jours à compter de sa réception. Pour l'examen de la requête, tous les documents pertinents seront considérés et, le cas échéant, des déclarations additionnelles seront recueillies, des enregistrements vidéo visionnés, etc.

249.Si sa requête est rejetée, le détenu peut faire valoir ses droits auprès du tribunal administratif. S'il ne souhaite pas soumettre une requête par l'intermédiaire de la prison, il peut adresser un mémorandum ou une demande, sous pli cacheté, au Ministère de la justice, au Chancelier de justice, au cabinet présidentiel ou à un procureur, un magistrat instructeur ou un tribunal. Les courriers adressés à ces institutions sont envoyés aux frais de la prison.

Affaires contre l'Estonie examinées par la Cour européenne des droits de l'homme

250.En 2003, 179 requêtes ont été adressées à la Cour européenne des droits de l'homme concernant des allégations de violation de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la République d'Estonie. En 2001 et 2002, le nombre des requêtes était respectivement de 128 et de 116. Au cours des années, la Cour européenne des droits de l'homme a déclaré recevables dix requêtes individuelles contre l'Estonie. Elle a examiné à ce jour sept affaires.

Slavgorodski c. Estonie (arrêt du 12.09.2000, requête n° 37043/97, ResDH (2001)101) : la Cour a rayé cette affaire de la liste par une décision formelle en considération de la conclusion d'un accord amiable entre V. Slavgorodski et la République d'Estonie.

Tammer c. Estonie (arrêt du 06.02.2001, rapports 2001-I) : la Cour a jugé que la République d'Estonie n'avait pas violé l'article 10 de la Convention (liberté d'expression).

Veeber c. Estonie (N°1) (arrêt du 07.11.2002, publié http ://www.echr.coe.int) : la Cour a jugé que la République d'Estonie avait violé l'article 6, paragraphe 1, de la Convention (droit d'accès au tribunal non effectif).

Veeber c. Estonie (N°2) (arrêt du 21.01.2003, rapports 2003-I) : la Cour a jugé que la République d'Estonie avait violé l'article 7, paragraphe 1, de la Convention (pas de peine sans loi – application rétroactive de la législation pénale).

Mõstnik c. Estonie (arrêt du 29.04.2003, publié http ://www.echr.coe.int) : la Cour était d'avis que la République d'Estonie n'avait pas violé l'article 6, paragraphe 1, de la Convention (droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et dans un délai raisonnable).

Treial c. Estonie (arrêt du 02.12.2003, publié http ://www.echr.coe.int) : la Cour était d'avis que la République d'Estonie avait violé l'article 6, paragraphe 1, de la Convention (droit à ce que sa cause soit entendue équitablement dans un délai raisonnable).

Puhk c. Estonie (arrêt du 10.02.2004, publié http ://www.echr.coe.int) : la Cour a jugé que la République d'Estonie avait violé l'article 7, paragraphe 1, de la Convention (pas de peine sans loi – application rétroactive de la législation pénale).

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