NATIONS UNIES

CAT

Convention contre

la torture et autres peines

ou traitements cruels,

inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/37/Add.62 avril 2005

Original: FRANÇAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Rapports initiaux des États parties devant être soumis en 1997

Additif

RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

[5 janvier 2005]

TABLE DES MATIÈRES

ParagraphesPage

Introduction1 − 44

PREMIÈRE PARTIE – RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUXRELATIFS AU PAYS1 – 295

I.TERRITOIRE ET POPULATION5 − 145

A.Territoire5 − 95

B.Population10 − 145

II.LES INDICATEURS SOCIOÉCONOMIQUES15 − 267

A.Production218

B.Le tissu social228

C.Situation politique 23 − 268

III.CADRE JURIDIQUE GÉNÉRAL DE LA PROTECTIONDES DROITS DE L’HOMME27 − 299

DEUXIÈME PARTIE – APPLICATION DE LA CONVENTIONDANS LA PRATIQUE30 – 18711

Introduction30 − 3211

Article 133 − 3811

Article 239 − 6012

Article 361 − 6916

Article 470 − 9717

Article 598 − 10325

Article 6104 − 11726

Article 7118 − 12928

Article 8130 − 13830

Article 9139 − 14231

Article 10143 − 14533

TABLE DES MATIÈRES (suite)

ParagraphesPage

Article 11146 − 15433

Article 12155 − 15835

Article 13159 − 16636

Article 14167 − 17037

Article 15171 − 17338

Article 16174 − 18738

Introduction

1.La République démocratique du Congo a ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants le 18 mars 1996. Conformément à l’article 19, le rapport initial devait être soumis au Comité contre la torture le 17 avril 1997 au plus tard.

2.En 1987, la République démocratique du Congo avait créé un comité interministériel chargé de la rédaction des rapports initiaux et périodiques relatifs aux conventions et traités internationaux ratifiés par elle. Malheureusement, suite à l’instabilité politique et aux difficultés financières, ce comité n’a pas pu poursuivre sa mission. Quelques rapports ont néanmoins été déposés.

3.Soucieux d’honorer ses engagements internationaux, la République démocratique du Congo a relancé les travaux d’élaboration des rapports initiaux et périodiques par la mise sur pied d’un nouveau comité interministériel permanent; créé le 13 décembre 2001, ce comité est constitué de 35 membres issus des différents services de l’État. Tenant compte de ce qui précède, le présent rapport constitue le rapport initial et le deuxième rapport périodique du Congo.

4.La République démocratique du Congo n’a pas encore fait de déclaration reconnaissant la compétence du Comité de surveillance pour recevoir et examiner des communications présentées par des États ou des particuliers, en vertu des articles 21 et 22 de la Convention.

PREMIÈRE PARTIE

RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX RELATIFS AU PAYS

I.  TERRITOIRE ET POPULATION

A.  Territoire

5.La République démocratique du Congo, pays de l’Afrique centrale, est à cheval sur l’Équateur. Elle est entourée au nord par la République centrafricaine et le Soudan, à l’est par l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi et la République‑Unie de Tanzanie, au sud par la Zambie et l’Angola, et à l’ouest par l’océan Atlantique, l’enclave de Cabinda et la République du Congo.

6.Vaste pays aux dimensions continentales (2 345 409 km2), la République démocratique du Congo a un relief à majorité plat. Au centre se trouve une cuvette à l’altitude moyenne de 230 m couverte par la forêt équatoriale traversée par de nombreuses étendues marécageuses. La cuvette centrale est bordée par des plateaux étagés, à l’exception de la partie est où dominent les montagnes au sol volcanique dont l’altitude moyenne dépasse 1 000 m.

7.Traversée par l’Équateur, la République démocratique du Congo connaît un climat chaud et humide (25° C en moyenne) et des pluies abondantes et régulières. La pluviométrie et la température s’abaissent au fur et à mesure qu’on s’approche de l’est. Deux saisons se partagent l’année: une saison sèche de près de quatre mois et une longue saison de pluies.

8.La République démocratique du Congo possède un réseau hydrographique très important. Le fleuve Congo, long de 4 700 km, deuxième du monde en débit après l’Amazone, traverse le pays du sud-est au nord-ouest avant de se jeter dans l’océan Atlantique. Le fleuve est alimenté par plusieurs rivières et est navigable sur sa majeure partie.

9.Le sol et le sous-sol regorgent de ressources agricoles et minières importantes et variées.

B.  Population

1.  Démographie

10.Estimée à 12 768 705 habitants en 1956, la population congolaise est passée de 14 106 666 habitants en 1960, à 20 700 500 au recensement administratif de 1970, et à 30 731 000 habitants au recensement scientifique du 1er juillet 1984. Suivant les projections des organismes spécialisés en la matière, notamment le FNUAP, la population a été estimée à 43 000 000 habitants en 1995, à 47 500 000 habitants en 1999, à 52 099 000 habitants en 2000, et projetée à 57 589 779 en 2003.

11.La République démocratique du Congo est l’un des pays africains les plus peuplés. La structure par âge et par sexe révèle une pyramide à base large, flancs concaves et sommet étriqué, conséquence d’une population jeune. En 1997, 25 900 000 d’habitants avaient moins de 18 ans. Le taux d’accroissement naturel est de 3,4 % (1990-1998) avec un indice de fécondité de 6,4. L’espérance de vie à la naissance est passée de 45 ans en 1970 à 51 ans en 1998. La structure par milieu indique que la situation démographique est marquée par:

a)Une population à 60 % rurale depuis 1993 contre 40 % vivant dans les centres urbains de 5 000 habitants au moins et d’importantes différences interprovinciales sur le plan de l’urbanisation;

b)Une faible proportion de la population urbaine au Maniema contre une forte proportion à Kinshasa, soit 1/10 de l’ensemble de la population;

c)La rapidité de la croissance urbaine (7 à 8 %), la concentration de 28 % de la population urbaine à Kinshasa et le rythme accéléré de l’exode rural;

d)L’inégale répartition de la population sur le plan géographique, les provinces les plus peuplées étant la ville de Kinshasa ainsi que le Bas-Congo, le Nord‑Kivu, le Sud‑Kivu et le Maniema.

2.  Les ethnies

12.La population se répartit en plus de 450 tribus que l’on peut regrouper en grands ensembles ayant une implantation territoriale bien marquée. Les Lubas ou Balubas, 18 % du centre‑sud, précèdent les Kongos du Bas-Congo avec 16,6 %. Le nord-est est peuplé par les Mongos (13,5 %), les locuteurs des langues rwandaise et burundaise 3,8 %, les Zandes (6,1 %), les Mangbetus et biens d’autres ethnies. On trouve les Chokwes et les Lundas le long de la frontière angolaise; les Pygmées, moins de 0,5 %, se trouvent dans les provinces de l’Équateur et orientale.

3.  Langues

13.En République démocratique du Congo, la langue officielle est le français. Par ailleurs, environ 250 langues et dialectes sont parlés. Parmi ceux-ci, 90 % sont d’origine bantoue et quatre langues sont dites «langues nationales»; ces langues sont les suivantes:

a)Swahili à l’est (40 %) au Nord-Kivu, au Sud-Kivu, au Katanga, au Maniema et dans la province orientale;

b)Lingala (27,5 %) à Kinshasa, la capitale, et dans les environs, à l’Équateur et dans la province orientale;

c)Kikongo (17,8 %) dans le Bas-Congo et dans le Bandundu;

d)Tshiluba (15 %) dans les provinces du Kasaï-Oriental et du Kasaï-Occidental.

Il est à signaler que dans le nord du pays de nombreuses langues parlées appartiennent aux familles négro‑congolaises (sous-groupe oubanguien) et nilo‑sahariennes (groupe soudanais central et sous-groupe nilotique).

4.  Religion

14.La République démocratique du Congo est un État laïc. Cependant, il existe cinq confessions religieuses traditionnelles: catholique, kimbanguiste, protestante, orthodoxe et musulmane. Par ailleurs, plusieurs sectes se répartissent l’espace religieux congolais. Toutefois, on note encore la présence de quelques animistes.

II.  LES INDICATEURS SOCIOÉCONOMIQUES

15.L’économie congolaise qui se caractérise par un déséquilibre structurel de production de biens et de services connaît une évolution contrastée. De 1983 à 1989, on a noté une relative stabilité. De 1990 à 1996, le pays est entré dans une phase de crise caractérisée par la rupture des principaux équilibres économiques, se traduisant par une inflation et une dépréciation monétaire accélérées, une contraction de la production, un chômage généralisé et une grande pauvreté.

16.Cette situation, caractéristique des dernières années de la deuxième République, était essentiellement due à une gestion financière et budgétaire laxiste, liée à des dépenses non planifiées et alimentées par la planche à billets.

17.De mai 1997 à juillet 1998, avec l’avènement du régime de l’Alliance des forces de libération du Congo (AFDL), les principaux indicateurs économiques avaient enregistré une nette amélioration, plus particulièrement dans le domaine des prix, de la monnaie et des finances publiques. Cela avait déterminé le Gouvernement à lancer une nouvelle monnaie, le franc congolais, dont la parité et le taux de change en principales devises étrangères étaient encourageants.

18.Malheureusement, depuis le 2 août 1998 du fait de l’agression du pays par la coalition rwando‑burundo‑ougandaise, à laquelle s’étaient joints des mouvements rebelles, les principaux équilibres économiques avaient été de nouveau rompus. En effet, cette guerre avait provoqué une hyperinflation aux conséquences graves sur le pouvoir d’achat de la population, entraînant la paupérisation de cette dernière et occasionnant en même temps une baisse sensible du produit intérieur brut (3,15 %). Le taux d’inflation était respectivement de 658 % en 1996, 13,7 % en 1997 et 2 % en juillet 1998.

19.Mais, en l’absence de la relance de la production et compte tenu du climat de guerre, les résultats enregistrés en 1998 étaient remis en cause. L’inflation était alors passée de 196,3 % en septembre 1999 à 489 % en décembre 1999. Cela a perduré jusqu’en février 2001, avec l’avènement au pouvoir du Président Joseph Kabila, qui avait pris des mesures économiques et monétaires conséquentes et libéralisé la vie politique, en relançant les négociations politiques appelées «Dialogue intercongolais» initié depuis le cessez‑le‑feu du 10 juillet 1999, à Lusaka. Parmi ces mesures, il y a lieu de noter l’assainissement des finances publiques et la libéralisation du taux de change, lesquels ont favorisé la reprise de la coopération avec les institutions de Bretton Woods.

20.Le Dialogue intercongolais a abouti à la signature de l’Accord global et inclusif, le 17 décembre 2002, à Pretoria (Afrique du Sud). Sur la base de cet accord politique, une Constitution a été adoptée et promulguée le 4 avril 2003, permettant ainsi la mise sur pied d’un gouvernement de transition incluant toutes les parties belligérantes, l’opposition politique ainsi que la société civile. La situation économique s’est améliorée et se présentait, à la fin 2003, de la manière suivante.

A.  Production

21.Les principaux chiffres sont les suivants:

Masse monétaire: 491,5 millions de francs congolais au 23 septembre 1998 contre 228,34 millions de francs congolais au 31 décembre 1997;

Balance de paiement en décembre 2001: exportations (1 006 millions de dollars É.‑U.); importations (957 millions de dollars), soit un solde excédentaire de 49 millions de dollars;

Investissements: grâce à la maîtrise des paramètres macroéconomiques amorcée depuis 2001 et consolidée par le retour progressif de la paix, le secteur des investissements connaît une reprise progressive;

Dette extérieure: stock de la dette au 31 décembre 2003: 9 935,13 millions de dollars É.‑U.;

Finances publiques au 31 décembre 2003:

Recettes: 361 231 805 742 francs congolais;

Dépenses: 361 231 805 742 francs congolais;

PIB: 8 % au 30 juin 2004;

Taux de croissance: 5,6 % au 30 juin 2004;

Taux d’inflation: 4,2 % au 30 juin 2004;

Taux de change: 1 dollar É.‑U. = 380 francs congolais au 30 juin 2004;

Revenu par habitant: en général très faible; il oscille entre 82 et 90 dollars par an.

B.  Le tissu social

22.Le début de la détérioration du tissu social date de la fin des années 70. Elle a été aggravée par une succession d’événements malheureux à savoir: la zaïrianisation de 1973 et les deux pillages de septembre 1991 et février 1993, auxquels se sont ajoutées les deux guerres de 1996-1997 et de 1998-2002. Les secteurs sociaux les plus touchés par cette crise sont la santé, l’éducation et l’agriculture ainsi que les infrastructures routières.

C.  Situation politique

23.Au lendemain de l’accession du pays à l’indépendance, le 30 juin 1960, la République démocratique du Congo a connu une instabilité politique caractérisée par des sécessions et des rébellions sur une grande partie du territoire, ce qui poussa l’armée congolaise à prendre le pouvoir, le 24 novembre 1965, sous l’égide du Président Mobutu.

24.Celui-ci instaura un régime monopartiste qui dura jusqu’au 24 avril 1990, date à partir de laquelle avait été proclamé le retour au multipartisme politique. Les forces vives de la nation se réunirent en Conférence nationale souveraine, pour discuter de l’avenir du pays et mettre en place des institutions démocratiques susceptibles de garantir la jouissance des droits fondamentaux des citoyens et le développement national. Mais ce processus de démocratisation se prolongea, contre toute prévision, jusqu’au 17 mai 1997, date à laquelle l’Alliance des forces pour la démocratie et la libération (AFDL) prit le pouvoir et neutralisa les institutions issues de la Conférence nationale souveraine.

25.Une nouvelle transition fut annoncée, pour deux ans, jusqu’à l’organisation des élections. Mais la guerre du 2 août 1998 bouleversa tout le programme politique et l’attention fut focalisée sur celle-ci, et ce jusqu’à la conclusion de l’Accord global et inclusif et une nouvelle Constitution de la transition cités ci-dessus.

26.La nouvelle Constitution du 4 avril 2003 a instauré un régime sui generis ayant les institutions politiques ci-après:

Un président de la République, dont le pouvoir exécutif est partagé avec quatre vice‑présidents;

Un gouvernement de transition composé des belligérants, de l’opposition politique et de la société civile;

Un parlement à deux chambres: l’Assemblée nationale et le Sénat;

Des cours et tribunaux.

Ces institutions doivent conduire le pays aux élections générales prévues entre mars et septembre 2005.

III.  CADRE JURIDIQUE GÉNÉRAL DE LA PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

27.La République démocratique du Congo est partie à plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et à certains de leurs protocoles facultatifs:

Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (adhésion le 1er novembre 1976);

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le premier Protocole facultatif relatif au Pacte (adhésion le 1er novembre 1976);

La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (adhésion le 21 avril 1976);

La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (ratification le 17 octobre 1986);

La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ratification le 18 mars 1996);

La Convention relative aux droits de l’enfant (ratification le 28 septembre 1990);

Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (ratification le 12 novembre 2001);

Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (adhésion le 12 novembre 2001).

28.En outre, la République démocratique du Congo a ratifié:

Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (le 30 mars 2002);

Les quatre Conventions de Genève de 1949 sur le droit international humanitaire et les Protocoles facultatifs I et II de 1977 (adhésion respectivement le 20 février 1961 et le 30 mars 2001), etc.

29.La République démocratique du Congo a un régime juridique moniste. Les accords et traités internationaux auxquels elle a adhéré ou qu’elle a ratifiés ont une force supérieure aux lois internes. En effet, l’article 193 de la Constitution de transition du 4 avril 2003 dispose:

«Tous les traités et accords internationaux régulièrement conclus ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque traité ou accord de son application par l’autre partie.».

DEUXIÈME PARTIE

APPLICATION DE LA CONVENTION DANS LA PRATIQUE

Introduction

30.En ce qui concerne la Convention contre la torture, après le dépôt des instruments de ratification, le 18 mars 1996, le texte de la Convention contre la torture a été publié dans le numéro spécial du Journal officiel du 9 avril 1999 (p. 64 à 74).

31.En outre, la Constitution de la transition du 4 avril 2003, à son article 15 du titre consacré aux libertés publiques, aux droits fondamentaux et aux devoirs du citoyen, énonce ce qui suit:

«La personne humaine est sacrée. L’État a l’obligation de la respecter et de la protéger. Toute personne a droit à la vie et à l’intégrité physique. Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Nul ne peut être privé de la vie ou de la liberté si ce n’est dans les cas prévus par la loi et dans les formes qu’elle prescrit.».

32.La Charte congolaise des droits de l’homme, adoptée à l’issue de la Conférence nationale sur les droits de l’homme tenue du 25 au 30 juin 2001, qui constitue un engagement politique sans équivoque de la République démocratique du Congo, énonce à son article 19:

«Toute personne a droit au respect de sa dignité et à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes d’exploitation et d’avilissement de l’homme notamment l’esclavage, la traite des personnes, la torture physique ou morale et les traitements cruels inhumains ou dégradants ou analogues sont interdits.».

Article 1

Éléments à prendre en compte

33.Aucun texte constitutionnel, législatif ou réglementaire parlant de la torture ne définit ce terme. Néanmoins, la jurisprudence congolaise, rapportée par le professeur Likulia Bolongo considère comme cas de tortures corporelles:

a)Des sévices très graves et des actes de cruauté ou de barbarie, exercés principalement dans le but de causer une souffrance (Boma, 4 décembre 1900, Jur. État, I, p. 102; Boma, 22 juillet 1902, Jur. État, I, p. 205);

b)Le fait de serrer les liens des victimes de façon douloureuse (Léopoldville 18 septembre 1928, RJCB 1931, p. 163);

c)Le fait de ligoter très fortement une personne aux poignets, aux bras et aux pieds au moyen des cordes, de la déposer ainsi liée en plein soleil et de l’y laisser pendant plusieurs heures sans lui donner ni boisson, ni nourriture (Élisabethville, 23 mai 1911, Jur. Congo, 1912, p. 174).

d)Le fait de crever intentionnellement un œil à la personne arrêtée.

Il y a lieu de rappeler que les tortures corporelles ne constituent pas une infraction spécifique; elles constituent une circonstance aggravante des infractions prévues par l’alinéa 1 de l’article 67 du Code pénal ordinaire et par les articles 191, 192 et 194 du Code pénal militaire.

34.Pendant 80 ans, la colonisation belge avait institutionnalisé les punitions corporelles non seulement à l’égard des détenus, mais aussi à l’égard des travailleurs, qu’ils soient sur les chantiers ou employés de bureaux. Les châtiments corporels n’ont été abolis formellement qu’au lendemain de l’indépendance de la République démocratique du Congo, le 30 juin 1960.

35.L’absence d’un véritable régime démocratique depuis l’accession du pays à l’indépendance, suivie d’une longue période d’instabilité politique ont favorisé la pratique systématique de la torture, notamment à l’égard des opposants politiques vrais ou supposés.

36.Le nombre très réduit des officiers de police judiciaire formés aux techniques d’interrogatoire et la recherche à tout prix, et dans tous les cas, des aveux de la part des détenus, ainsi que les difficultés financières du pays ne permettent pas d’avoir recours aux techniques modernes d’administration de la preuve. Il faut mentionner aussi le manque d’inspections régulières des «amigos», maisons d’arrêt et prisons, par les Procureurs de la République.

37.Par manque d’information en matière de droits de l’homme, les victimes des actes de torture pensent qu’il est normal de subir des mauvais traitements dans les maisons de détention, d’où la rareté des plaintes. Ou bien, si les victimes sont des opposants politiques, ces derniers pensent que de toutes les façons, les institutions judiciaires resteront impassibles.

38.La situation de guerre qu’a connue la République démocratique du Congo depuis 1996 n’a pas été propice au respect des droits de l’homme, la moitié du pays ayant échappé au contrôle du Gouvernement central parce qu’occupée par les armées du Rwanda, de l’Ouganda et du Burundi, ainsi que par les groupes rebelles du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) et le Mouvement de libération du Congo (MLC). Dès lors, les actes de torture ou les traitements cruels, inhumains ou dégradants perpétrés dans ces territoires, pendant la période de guerre, sont imputables à ces États.

Article 2

1.  Mesures législatives

39.L’article 15 de la Constitution de la transition énonce:

«La personne humaine est sacrée, l’État a l’obligation de la respecter et de la protéger. Toute personne a droit à la vie et à l’intégrité physique. Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains, cruels ou dégradants. Nul ne peut être privé de la vie ou de la liberté, si ce n’est dans les cas prévus par la loi et dans les formes qu’elle prescrit.».

40.L’article 20 du même texte dispose que toute personne arrêtée doit être informée immédiatement ou au plus tard dans les 24 heures des motifs de son arrestation et de toute accusation portée contre elle, et ce dans une langue qu’elle comprend. Elle doit être immédiatement informée de ses droits. Elle a le droit d’entrer immédiatement en contact avec sa famille et son conseil. Pour sa part, l’article 21, alinéa 1, précise que toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal qui statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.

41.L’article 61 de la Constitution de la transition dispose:

«Le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales consacrés dans la présente Constitution s’impose à tous les citoyens et aux pouvoirs publics.».

42.L’article 134 de la Constitution de la transition dispose que, conformément aux dispositions de l’article 73 de la présente Constitution, le Président de la République déclare la guerre sur décision du Conseil des ministres après avis conforme du Conseil supérieur de la défense et autorisation de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il en informe la nation par un message. Les droits et devoirs des citoyens, pendant la guerre ou en cas d’invasion ou d’attaque du territoire national par des forces de l’extérieur font l’objet d’une loi organique.

43.L’article 136 de la Constitution dispose qu’en cas d’état d’urgence ou d’état de siège, le Gouvernement prend, en Conseil des ministres, les mesures urgentes nécessaires pour faire face à la situation. Les mesures d’urgence sont, dès leur signature, soumises à la Cour suprême de justice qui, toutes affaires cessantes, déclare si elles dérogent ou non à la présente Constitution. Les modalités d’application de l’état de siège et de l’état d’urgence sont déterminées par la loi.

44.L’article 25 de la Constitution de la transition dispose que nul n’est tenu d’exécuter un ordre manifestement illégal, en particulier lorsque celui-ci porte atteinte aux libertés et aux droits fondamentaux de la personne humaine. La preuve de l’illégalité manifeste de l’ordre incombe à la personne qui refuse de l’exécuter.

45.L’article 19 du décret‑loi no017/2002 portant code de conduite de l’agent public de l’État dispose que celui-ci doit s’abstenir des menaces, injures, intimidations, harcèlement sexuel ou moral et d’autres formes de violence.

46.Les articles 43 à 50 du Code pénal, lorsque l’arrestation et la détention sont régulières, permettent néanmoins la répression des assassinats et meurtres, des coups et blessures volontaires simples et aggravés, de l’homicide préterintentionnel, des empoisonnements et administration des substances nuisibles à la santé.

47.L’article 67, alinéa 2, du Code pénal réprime, sans la définir, la torture, en tant que circonstance aggravante de l’infraction d’arrestation arbitraire et détention illégale.

48.L’article 180 du Code pénal congolais dispose:

«Tout acte arbitraire et attentatoire aux libertés et aux droits garantis aux particuliers par les lois, décrets, ordonnances et arrêtés, ordonné ou exécuté par un fonctionnaire ou officier public, par un dépositaire ou agent de l’autorité ou de la force publique, sera puni d’une servitude pénale de 15 jours à un an et d’une amende de 200 à 1 000 francs ou d’une de ces peines seulement.

S’il est constitutif d’une infraction punie de peines plus fortes, son auteur sera condamné à ces peines.».

Cette disposition se rapproche de la définition donnée par l’article 1 de la Convention contre la torture en ce qu’elle réprime la torture commise seulement par les fonctionnaires, alors que les articles 43 à 50 répriment les actes de torture commis par tout le monde.

49.L’article 191 du Code pénal militaire dispose:

«Quiconque, en temps de guerre ou pendant des circonstances exceptionnelles se rend coupable d’imposition d’amendes collectives, de réquisitions abusives ou illégales, de confiscations ou spoliations, d’importation ou d’exportation hors du territoire de la République démocratique du Congo, par tout moyen, des biens de toute nature, y compris les valeurs mobilières et la monnaie, sera puni de 10 à 20 ans de servitude pénale.

Si ces faits ont été accompagnés de sévices, tortures ou suivis d’une autre infraction, le coupable sera puni de mort.».

50.L’article 192 du Code pénal militaire dispose:

«En temps de guerre ou dans des circonstances exceptionnelles, le travail obligatoire des civils ou la déportation, sous quelque motif que ce soit, d’un individu détenu ou interné sans qu’une condamnation régulière, au regard des lois et coutumes de guerre, ait été définitivement prononcée, sera puni de 15 à 20 ans de servitude pénale.

Si ces faits ont été accompagnés de sévices, tortures ou suivis d’une autre infraction, le coupable sera puni de mort.».

51.L’article 194 du même Code dispose:

«Quiconque durant les hostilités aura procédé, avec un faux costume, sous un faux nom ou sur un faux ordre de l’autorité publique, à l’arrestation, séquestration ou détention d’un individu ou lorsque l’individu arrêté, détenu ou séquestré a été menacé de mort, sera puni de la peine de servitude pénale à perpétuité.

La peine de mort sera applicable lorsque les victimes d’arrestation, de détention ou de séquestration ont été soumises à des tortures corporelles.».

2.  Mesures administratives et judiciaires

52.L’ordonnance no78‑289 du 3 juillet 1978 relative à l’exercice des attributions d’officier et agent de police judiciaire près les juridictions de droit commun prescrit que les enquêtes doivent être menées légalement et que les arrestations et gardes à vue doivent s’effectuer en toute régularité. L’article 7 spécifie que les personnes gardées à vue ont le droit de se faire examiner par un médecin dès qu’elles en expriment le désir et que si le médecin constate qu’il a été exercé contre la personne gardée à vue des sévices ou mauvais traitements, il a l’obligation d’en faire rapport au Procureur de la République.

53.L’article 80 de la même ordonnance dispose:

«Les officiers du ministère public procèdent régulièrement et à tout moment à la visite des locaux de garde à vue. Ils s’assurent de leur salubrité et des conditions matérielles et morales des personnes qui y sont maintenues. Ils se font communiquer les procès‑verbaux établis à l’encontre de ces personnes et recueillent leurs doléances éventuelles...».

54.L’article 76 de cette ordonnance dispose que les personnes gardées à vue ont le droit de se faire examiner par un médecin dès qu’elles en expriment le désir. Si le médecin constate qu’il a été exercé contre la personne gardée à vue des sévices ou mauvais traitements, il en fait rapport au Procureur de la République. Si le médecin constate que la personne gardée à vue ne peut, en raison de son état de santé, être retenue plus longtemps, celle-ci est acheminée aussitôt devant le Procureur de la République.

55.Par ailleurs, l’article 79 de la même ordonnance précise que toute arrestation ou garde à vue des membres de la famille du suspect au titre de garantie de représentation de ce dernier est prohibée. L’officier de police judiciaire qui y procède est passible des sanctions prévues à l’article 67 du Code pénal.

56.Une plainte a été déposée devant le parquet militaire le 3 avril 2003 par une dame contre un colonel des services spéciaux de la police (Kin‑Mazière) pour son arrestation et détention du 4 au 18 mars 2003 à la place de son mari.

57.L’ordonnance no344 du 17 septembre 1965 portant régime pénitentiaire et libération conditionnelle réglemente l’inspection des maisons d’arrêt et des prisons par les officiers du ministère public, les médecins et les autorités territoriales. Aux termes de l’article 29, si les détenus ont des doléances à leur présenter, ceux-ci les entendent isolément. Les visiteurs dressent un rapport qu’ils envoient à leur supérieur hiérarchique et à l’inspecteur des établissements pénitentiaires qui le transmet avec ses avis au Ministre de la justice.

58.La décision présidentielle ordonnant la fermeture de tous les lieux de détention ne dépend pas du parquet civil.

59.Les personnes arrêtées sont, avant leur mise en garde à vue, enregistrées dans le registre d’écrou qui peut être consulté à tout moment par l’officier du ministère public inspecteur. La garde à vue est, selon l’article 73 de l’ordonnance no78-289, de 48 heures. À l’expiration de ce délai, la personne gardée à vue doit obligatoirement être laissée libre de se retirer ou mise en route pour être conduite devant l’officier du ministère public.

60.Aux termes des articles 30 et suivants de l’ordonnance no 344, l’admission des détenus dans les maisons d’arrêt et les prisons ne peut être autorisée par le gardien de prison que sur présentation des titres réguliers que sont notamment les procès‑verbaux de saisie de prévenu, les mandats d’arrêt provisoire, les ordonnances de mise en détention préventive ou les réquisitions en exécution des jugements, les procès‑verbaux d’arrestation des condamnés, les contraintes délivrées par l’autorité compétente et les décisions de transfert.

Article 3

1.  Mesures législatives

61.La République démocratique du Congo a adhéré à la Convention relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, en vertu du décret-loi du 7 juillet 1965. Elle a aussi adhéré au Protocole relatif au statut des réfugiés, sur la base de l’ordonnance‑loi no68-001 du 2 janvier 1968. Le Congo ayant opté pour le système moniste, les articles 31, 32 et 33 de la Convention relative au statut des réfugiés sont susceptibles d’être mis en œuvre au cas où un étranger entrant ou séjournant irrégulièrement au pays a de réelles raisons de craindre pour sa vie ou son intégrité physique, s’il est refoulé ou expulsé dans son pays d’origine.

62.L’extradition, prévue par le décret du 12 avril 1886 tel que modifié par l’ordonnance législative du 11 décembre 1959, est de la compétence du Gouvernement.

63.L’article 35 de la Constitution de la transition énonce que le droit d’asile est reconnu. La République démocratique du Congo accorde, sous réserve de sécurité nationale, l’asile sur son territoire aux ressortissants étrangers poursuivis ou persécutés en raison notamment de leurs opinions, leurs croyances, leurs appartenances raciales, tribales, ethniques, linguistiques ou de leur action en faveur de la démocratie et de la défense des droits de l’homme et des peuples, conformément aux lois et règlements en vigueur. Il est interdit à toute personne jouissant régulièrement du droit d’asile d’entreprendre une activité subversive contre son pays d’origine ou contre tout autre pays à partir du territoire de la République démocratique du Congo. La loi fixe les modalités d’exercice de ce droit.

64.L’ordonnance-loi no83-033 du 12 septembre 1983 relative à la police des étrangers organise les procédures de refoulement et d’expulsion. Elle ne comporte aucune disposition interdisant expressément les mesures de refoulement ou d’expulsion au cas où l’intéressé allègue avoir été l’objet d’actes de torture. Néanmoins, dans la mesure où celui-ci dispose, aux termes de l’article 13, alinéa 3, d’un recours dans les 24 heures auprès de l’administrateur provincial de l’Agence nationale des renseignements (ANR), il pourra faire état de sa situation qui devra être prise en compte par cette autorité.

65.D’après l’article 13 de l’ordonnance-loi précitée, le refoulement à la frontière des personnes étrangères ne détenant pas les documents réguliers d’entrée est du ressort de l’agent préposé au contrôle de l’immigration. Cette mesure est sans recours. L’étranger qui en est frappé est immédiatement reconduit de l’autre côté de la frontière aux fins de rapatriement.

66.L’expulsion d’un étranger est de la compétence du Président de la République. À ce sujet, l’article 16 de l’ordonnance-loi no83-033 dispose que:

«L’ordonnance d’expulsion n’est prise à charge d’un étranger titulaire d’une carte de résident ou à charge d’un réfugié qu’après avis de la Commission nationale d’immigration…».

Cette Commission est présidée par le Ministre de l’intérieur ou son délégué. Elle est composée de sept membres représentant les ministères et services ci-après:

Ministère de l’intérieur;

Ministère des affaires étrangères;

Ministère de la justice;

Ministère de l’économie;

Ministère de l’industrie et du commerce;

Ministère du travail et de la prévoyance sociale;

Agence nationale des renseignements.

2.  Mesures administratives

67.Le renvoi d’un étranger qui aura pénétré au Congo sans être muni des documents légaux ou qui, sans excuse valable, n’aura pas quitté le territoire à l’expiration de la durée de son titre de séjour, est constaté dans un procès‑verbal d’indésirabilité dressé par un officier d’immigration et notifié à l’intéressé. Contrairement à la mesure de refoulement, l’article 15 prévoit la possibilité pour l’étranger concerné par cette mesure, d’introduire, endéans les 24 heures, un recours auprès du représentant du service d’immigration du lieu du siège ordinaire du tribunal de grande instance. Dans les plus brefs délais, la décision du représentant du service d’immigration sera transmise à l’officier d’immigration qui la notifiera à l’intéressé. L’autorité de décision a dès lors la possibilité d’examiner les raisons pour lesquelles les étrangers ne veulent pas retourner dans leurs pays. Celles-ci peuvent être liées à la crainte d’être l’objet d’actes de torture. Il est à noter que la mesure de renvoi ne concerne pas les étrangers jouissant du statut des réfugiés.

68.Pour avoir la qualité de réfugié, l’étranger doit être muni d’une reconnaissance délivrée, après avis de la Commission consultative des étrangers, par le Ministre de l’intérieur, saisi par voie de requête, ou des documents délivrés en application des Conventions internationales auxquelles le Congo a adhéré, notamment la Convention relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951.

69.Le 5 décembre 2002, MM. Hussein Mohamed Issaoui, Ali Dakroub et Samer Nassara furent expulsés du territoire du Congo pour leur participation dans les transactions louches à la Fransa Bank, à savoir le bradage de la monnaie.

Article 4

1.  Mesures législatives

70.Contrairement aux dispositions de l’article 4 de la Convention, la République démocratique du Congo n’a pas encore érigé les actes de torture, au sens de l’article 1 de la Convention, en infraction spécifique.

71.La rédaction de ce rapport a permis aux autorités de faire le point sur les dispositions législatives, administratives et judiciaires relatives à la torture et sur les difficultés qu’il y a à réunir les statistiques fiables en cette matière. Les autorités ont ainsi pris conscience que si la torture, au sens de l’article 1 de la Convention, est érigée en infraction pénale spécifique, il serait beaucoup plus facile de mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

72.Les dispositions générales ci-après permettent la répression des actes rentrant dans la définition de la torture au sens de l’article 1 de la Convention.

73.L’article 43 du Code pénal congolais énonce:

«Sont qualifiés de volontaires, l’homicide commis et les lésions causées avec le dessein d’attenter à la personne d’un individu déterminé ou de celui qui sera trouvé ou rencontré, quand même ce dessein serait dépendant de quelque circonstance ou de quelque condition et lors même que l’auteur se serait trompé dans la personne de celui qui a été victime de l’attentat.».

74.Les articles 44 et 45 disposent que l’homicide commis avec l’intention de donner la mort est qualifié de meurtre. Le meurtre commis avec préméditation est qualifié d’assassinat. Ils sont punis de mort.

75.L’article 46 du Code pénal reprend ce qui suit:

«Quiconque a volontairement fait des blessures ou porté des coups est puni d’une servitude pénale de huit jours à six mois et d’une amende de 25 à 200 zaïres ou d’une de ces peines seulement.

En cas de préméditation, le coupable sera condamné à une servitude pénale de un mois à deux ans et à une amende de 50 à 500 zaïres.».

76.L’article 47 du Code pénal énonce ce qui suit:

«Si les coups et blessures ont causé une maladie ou une incapacité de travail personnel ou s’il en est résulté la perte de l’usage absolu d’un organe ou une mutilation grave, les peines seront une servitude pénale de deux à cinq ans et une amende qui ne pourra excéder 1 000 zaïres.».

77.L’article 48 du Code pénal dispose:

«Lorsque les coups portés ou les blessures faites volontairement mais sans intention de donner la mort l’ont pourtant causée, le coupable sera puni d’une servitude pénale de cinq à 20 ans et d’une amende qui ne pourra excéder 2 000 zaïres.».

78.L’article 49 du Code pénal dispose:

«Est qualifié d’empoisonnement, le meurtre commis par le moyen de substances qui peuvent donner la mort plus ou moins promptement, de quelque manière que ces substances aient été employées ou administrées. Il sera puni de mort.».

79.Le Code pénal énonce ce qui suit à l’article 50:

«Sera puni d’une servitude pénale de un à 20 ans et d’une amende de 100 à 2 000 zaïres, quiconque aura administré volontairement des substances qui peuvent donner la mort ou des substances qui, sans être de nature à donner la mort, peuvent gravement altérer la santé.».

80.L’article 67, alinéa 2, du Code pénal retient la torture comme circonstance aggravante des infractions d’arrestation arbitraire et de détention illégale.

81.L’article 171 bis, alinéa 4, du Code pénal congolais réprime le viol ou attentat commis par des fonctionnaires publics ou des ministres d’un culte qui ont abusé de leur position pour le commettre, soit par des médecins, chirurgiens, accoucheurs envers les personnes confiées à leurs soins.

82.L’article 180 du Code pénal congolais réprime tout acte arbitraire et attentatoire aux libertés et aux droits garantis aux particuliers par les lois, décrets, ordonnances et arrêtés, ordonné ou exécuté par un fonctionnaire ou officier public, par un dépositaire ou agent de l’autorité ou de la force publique. Si tel acte est constitutif d’une infraction punie des peines plus fortes, son auteur sera condamné à ces peines.

83.Il est à noter que les articles 46, 47 et 48 du Code pénal congolais répriment les actes de torture commis par toute personne alors que les articles 171 bis, alinéa 4, et 180 répriment les actes de torture commis par les fonctionnaires seulement, c’est-à-dire que la qualité de fonctionnaire entre en ligne de compte, d’où le rapprochement de l’article 180 avec la définition de la torture donnée par l’article 1 de la Convention contre la torture.

84.L’article 191 du Code pénal militaire dispose:

«Quiconque, en temps de guerre ou de circonstance exceptionnelle se rend coupable d’imposition d’amende collective, de réquisition abusive ou illégale, de confiscation ou spoliation, d’importation ou d’exportation hors du territoire de la République démocratique du Congo, par tout moyen, des biens de toute nature, y compris les valeurs mobilières et la monnaie, sera puni de 10 à 20 ans de servitude pénale.

Si ces faits ont été accompagnés de sévices, tortures ou suivis d’une autre infraction, le coupable sera puni de mort.».

85.L’article 192 du Code pénal militaire dispose:

«En temps de guerre ou dans les circonstances exceptionnelles, le travail obligatoire des civils ou la déportation sous quelque motif que ce soit, d’un individu détenu ou interné sans qu’une condamnation régulière au regard des lois et coutumes de guerre ait été prononcée, sera puni de 15 à 20 ans de servitude pénale.

Si ces faits ont été accompagnés de sévices, tortures ou suivis d’une autre infraction, le coupable sera puni de mort.».

86.L’article 194 du même Code dispose:

«Quiconque durant les hostilités aura procédé, avec un faux costume, sous un faux nom ou sur un faux ordre de l’autorité publique, à l’arrestation, séquestration ou détention d’un individu ou lorsque l’individu arrêté, détenu ou séquestré a été menacé de mort, sera puni de la peine de servitude pénale à perpétuité.

La peine de mort sera applicable lorsque les victimes d’arrestation, de détention ou de séquestration ont été soumises à des tortures corporelles.».

87.L’article 76 de l’ordonnance no78/289 du 3 juillet 1978 relative à l’exercice des attributions d’officier et agent de police judiciaire près les juridictions de droit dispose:

«Les personnes gardées à vue ont le droit de se faire examiner par un médecin dès qu’elles en expriment le désir. Si le médecin constate qu’il a été exercé contre la personne gardée à vue des sévices ou mauvais traitements, il en fait rapport au Procureur de la République, si le médecin constate que la personne gardée à vue ne peut, en raison de son état de santé, être retenue plus longtemps, celle‑ci est acheminée aussitôt devant le Procureur de la République.».

88.L’article 79 de la même ordonnance dispose:

«Toute arrestation ou garde à vue des membres de la famille du suspect au titre de garantie de représentation de ce dernier est prohibée. L’officier de police judiciaire qui y procède est passible des sanctions prévues à l’article 67 du Code pénal.».

89.C’est sur la base des dispositions du droit pénal ordinaire et du droit pénal militaire évoquées plus haut que les différents actes de torture, tels que définis par l’article 1 de la Convention sont poursuivis et punis par les juridictions congolaises car l’organe judiciaire est saisi non pas de la qualification juridique des infractions, mais des faits portés devant lui.

90.La jurisprudence ci‑dessous illustre bien ce qui précède:

a)Le 23 avril 2001, à Kinshasa, le commandant Kifua Mukuna Albert, de la Police nationale congolaise, avait pris l’arme GP 9 mm du commandant Bosongo sans son consentement. Le 30 avril 2001, le commandant Bosongo, qui tenait à tout prix à récupérer son arme, a été arrêté et détenu dans le cachot de la police du district de Lukunga par le commandant Israel Kantu, adjoint chargé des opérations, sur ordre du commandant de district, Kifua Mukuna. La même nuit, le commandant de district revient avec ses gardes du corps et ordonne qu’on administre des coups de fouet au commandant Bosongo, ainsi qu’à tous ceux qui étaient au cachot cette nuit‑là. Le commandant Bosongo, tel que l’atteste la réponse du médecin traitant à la réquisition de l’officier du ministère public, a eu des lésions corporelles considérables ayant nécessité un traitement approprié au service d’urologie. La Cour d’ordre militaire, à son audience publique du 29 janvier 2003, a condamné le commandant Kifua Mukuna à 12 mois de servitude pénale, les policiers Betukumesu Joël et John à six mois de servitude pénale chacun, et à 250 000 francs congolais de dommages et intérêts alloués à la victime (RP no1142/02 et RMP no7094/TP/02).

b)La Cour d’ordre militaire, à son audience publique du 29 avril 2003, avait condamné les policiers Atutona, Mawa, Kokubi et Tshimanga à 23 mois de servitude pénale chacun pour avoir arrêté et violé la dame Sota au cours d’une patrouille pédestre. La dame SOTA, pour son honneur, n’a pas pu se présenter à l’audience publique. Mais les prévenus ont reconnu les faits mis à leur charge (RP no1149/02 et RMP no5976/MA/2001).

c)La Cour d’ordre militaire, à son audience publique du 9 avril 2003, avait condamné le militaire Tambwe Kabuita à 30 mois de servitude pénale pour avoir pris en otage la dame Mafinga pendant cinq jours au motif que la dame Mafinga devrait lui indiquer l’endroit où se cachait son époux qui avait fui le toit conjugal. La victime, par honte, n’a pas postulé aux dommages et intérêts et ne s’était pas présentée à l’audience publique (RP 1186/02 et RMP 6025/ODR/2001).

d)La Cour d’ordre militaire, à son audience publique du 29 janvier 2003, avait condamné le policier Mutuza à cinq ans de servitude pénale, l’inspecteur de police judiciaire Ndity Jean‑Pierre à 24 mois de servitude pénale et le policier Tshibamba à 10 ans de servitude pénale par défaut pour avoir arrêté et détenu arbitrairement le nommé Kasongo Zoway; elle a aussi condamné les prévenus au remboursement de 1 000 dollars É.‑U. extorqués et à 300 000 francs (750 dollars) de dommages et intérêts (RP no 1150/02 et RMP no 7190/ODR/MKT/01).

e)En 1985, à Gemena, dans la province de l’Équateur, un officier de la Force navale avait mutilé les organes génitaux d’un monsieur parce que ce dernier avait demandé à l’officier de cesser les relations amoureuses avec son épouse. Le Conseil de guerre de garnison (tribunal militaire) de Gemena avait condamné l’officier à 20 ans de servitude pénale et l’avait renvoyé de l’armée.

f)À l’occasion de deux tournées faites en vue de la collecte des impôts dans le territoire de Budjala, province de l’Équateur, entre le 30 juillet et le 30 novembre 1925, l’agent territorial Derwa (un blanc), se rendit coupable d’une série d’abus infractionnels commis sur les populations indigènes, d’arrestations arbitraires et de sévices graves. L’instruction du Procureur du Roi aboutit au renvoi de Derwa devant les tribunaux de première instance de Coquilhatville (actuellement la ville de Mbandaka) par exploit de citation du 10 octobre 1927 sous l’inculpation:

i)D’arrestations et détentions illégales et arbitraires commises au cours de ses deux tournées entreprises en vue de la collecte des impôts entre le 30 juillet et le 30 novembre 1925, des indigènes Zawa, Dabili, Gokow alias Kongodja, Barigo, Epila, Imbokwa et Gundale avec tortures corporelles ayant causé la mort des victimes;

ii)D’infractions commises dans les mêmes circonstances de lieu et de temps, d’arrestations arbitraires avec tortures corporelles des nommés Akembi, Goba, Dawe, Gotsha, Guaniki, Pomada, Solow, Gamatria et Mossolo et d’homicide par coups volontaires mais portés sans intention de donner la mort, d’indigène Ciami.

Il est demeuré pleinement établi par les nombreux témoignages accueillis au cours des instructions préparatoires et publiques de première instance, que ces trois indigènes (Zawa, Dabili et Gokow) ont été frappés à plusieurs reprises de nombreux coups de fouet sur l’ordre du prévenu au point que le bas du dos présenta plus d’une plaie, que Zawa et Gokow furent en outre liés à un tronc d’arbre par des lianes fortement serrées autour du cou, des reins et des genoux, avec un bâillon de feuilles introduit dans la bouche; ils demeurèrent ainsi exposés aux ardeurs du soleil depuis 7 heures du matin jusque vers midi, que Gokow succomba pendant ce supplice et que Zawa et Dabili moururent peu de jours après l’infection de leurs plaies.

Derwa prétend en vain que ces actes de violence auraient été commis à son insu par les soldats de son escorte; tous les témoins, tous des indigènes de la région, soldats exécuteurs de ses instructions criminelles, attestent son intervention directe et ses ordres impérieux, commandant de fouetter sans merci les victimes, de les attacher à un tronc d’arbre en serrant fortement les liens et de les bâillonner pour étouffer leurs cris de douleur.

Il est demeuré pleinement établi par les témoignages entendus au cours des instructions que ces indigènes ont été arrêtés et détenus illégalement et arbitrairement au moyen de violences:

Le capita, Gaba, afin de servir d’otage pour les gens de son village qui étaient en fuite;

Le second, Gotscha, parce qu’il n’était pas parti immédiatement sur l’ordre donné par Derwa (le blanc) d’aller chercher une poule pour parfaire la somme remise pour son impôt et à laquelle il manquait un franc;

Le troisième, Solow, parce qu’il était arrivé avec un léger retard pour régler ses impositions et que Gbaiki fut arrêté dans une rafle collective exécutée suite aux ordres du prévenu sur les indigènes Banza.

Il est resté établi avec la même certitude que Gaba fut cruellement fouetté à plusieurs reprises, qu’il fut lié pendant une demi‑journée à un tronc d’arbre dans la position douloureuse déjà décrite dans les considérants qui précèdent au sujet du supplice identique infligé aux indigènes Zawa et Gokow alias Kongodja, et que la pression des liens ont eu pour effet de lui estropier la main gauche au point que l’usage de ce membre est entièrement perdu.

Gotscha et Solow subirent les mêmes coups et les mêmes traitements barbares, ainsi qu’il a été constaté au cours des diverses instructions, le premier a perdu l’usage des deux mains complètement mutilées et le second l’avant-bras atrophié et paralysé par la pression des liens.

La nature même des supplices infligés aux victimes et dont l’extrême gravité se révèle pleinement par la gravité des conséquences démontre nettement que ces indigènes ont subi de véritables tortures corporelles d’une barbarie révoltante.

Attendu que devant l’horreur des cruautés commises sur l’ordre de ce mauvais serviteur de l’œuvre coloniale, il échet, pour la fixation de la sanction méritée et tout en tenant un compte adéquat de l’atténuation de sa responsabilité, de le condamner par application de l’article 6 du Code pénal du chef des différentes infractions concurrentes retenues à sa charge, à une peine de servitude pénale suffisamment sévère pour assurer la juste répression de cette série de crimes épouvantables perpétrés sur des indigènes sans défense avec un inqualifiable mépris du respect dû à la vie humaine, la cour d’appel condamne Derwa à 10 ans de servitude pénale et 1 000 francs d’amende, dit qu’à défaut de paiement de l’amende cette peine sera remplacée par un mois de servitude pénale. Statuant sur les réparations civiles allouées d’office par le premier juge, annule le jugement dont appel en tant qu’il a condamné Derwa à payer des dommages et intérêts aux indigènes Epala, Imbekwa, Gundabo, Akombi, Camatia, Mossolo, Dawe et Pomeda ou à leurs familles, confirme pour le surplus les condamnations civiles prononcées à charge de Derwa fait une masse de frais de première instance et d’appel, ces derniers taxés à 4 170 francs y compris les honoraires des experts taxés au total de 3 000 francs, condamne Derwa aux deux tiers de la masse ainsi formée, dit que ces frais seront récupérables par la voie de contrainte par corps, fixé à défaut de paiement la durée de celle-ci à trois mois, met le restant des frais à la charge de la colonie.

Jugé par la cour d’appel de Léopoldville (actuellement Kinshasa) le 18 septembre 1928.

91.En ce qui concerne le magistrat militaire, il est tenu de procéder à l’interrogatoire de l’inculpé dans les 48 heures de l’incarcération de celui-ci. Faute de quoi, les dispositions de l’article 180 du Code pénal ordinaire sont applicables.

92.S’agissant de la tentative des actes de torture, l’article 4 du Code pénal dispose:

«Il y a tentative punissable lorsque la résolution de commettre l’infraction a été manifestée par des actes extérieurs, qui forment un commencement d’exécution de cette infraction et qui n’ont été suspendus ou qui n’ont manqué leur effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur. La tentative est punie de la même peine que l’infraction consommée.».

93.S’agissant de coauteurs et complices des actes de torture, l’article 21 du Code pénal dispose:

«Sont considérés comme auteurs d’une infraction:

Ceux qui l’auront exécutée ou qui auront coopéré directement à son exécution;

Ceux qui, par un fait quelconque, auront prêté pour l’exécution une aide telle que, sans leur assistance, l’infraction n’eût pu être commise;

Ceux qui, par offres, dons, promesses, menaces, abus d’autorité ou de pouvoir, machinations ou artifices coupables, auront directement provoqué cette infraction;

Ceux qui, soit par des discours tenus dans des réunions ou dans des lieux publics, soit par des placards affichés, soit par des dessins ou des emblèmes, auront provoqué directement à la commettre, sans préjudice des peines qui pourraient être portées par décrets ou arrêtés contre les auteurs de provocation à des infractions, même dans le cas où ces provocations ne seraient pas suivies d’effet.».

94.L’article 22 du Code pénal dispose:

«Sont considérés comme complices:

Ceux qui auront donné des instructions pour la commettre;

Ceux qui auront procuré des armes, des instruments ou tout autre moyen qui a servi à l’infraction sachant qu’ils devaient y servir;

Ceux qui, hors le cas prévu par l’alinéa 3 de l’article 22, auront avec connaissance aidé ou assisté l’auteur ou les auteurs de l’infraction dans les faits, qui l’ont préparée ou facilitée, ou dans ceux qui l’ont consommée;

Ceux qui, connaissant la conduite criminelle des malfaiteurs exerçant des brigandages ou des violences contre la sûreté de l’État, la paix publique, les personnes ou les propriétés, leur auront fourni habituellement logement, lieu de retraite ou de réunion.».

95.L’article 23 du Code pénal dispose:

«Sauf disposition particulière établissant d’autres peines, les coauteurs et complices seront punis comme suit:

Les coauteurs de la peine établie par la loi à l’égard des auteurs;

Les complices, d’une peine qui ne dépassera pas la moitié de la peine qu’ils auraient encourue s’ils avaient été eux-mêmes auteurs;

Lorsque la peine prévue par la loi est la mort ou la servitude pénale à perpétuité, la peine applicable au complice sera la servitude pénale de 10 à 20 ans.».

96.Quant à la procédure disciplinaire à l’endroit des agents publics auteurs des actes de torture, le décret-loi no 017/2002 du 23 novembre 2002 portant code de conduite de l’agent public de l’État dispose:

«Article 30 − Sous peine des sanctions disciplinaires et/ou pénales prévues par la loi, tout agent public de l’État investi, à un degré quelconque du pouvoir disciplinaire, a qualité pour ouvrir d’office ou sur réquisition de ses supérieurs hiérarchiques ou de l’observatoire du code d’éthique professionnelle, l’action disciplinaire à charge d’un agent public de l’État placé sous son autorité ou ses ordres.

Article 32 − L’action disciplinaire demeure distincte et indépendante de l’action répressive à laquelle peuvent donner lieu les mêmes faits commis par l’agent public de l’État. L’action judiciaire n’est pas suspensive de l’action disciplinaire. Tout agent de l’État qui est condamné définitivement à une peine de servitude pénale égale ou supérieure à trois mois doit être révoqué d’office sur simple constatation de la condamnation.».

2.  Mesures administratives

97.L’ordonnance n° 81/067 du 17 juillet 1981 portant règlement d’administration relatif à la discipline dispose:

«Article 34 − L’agent reconnu coupable, comme auteur, coauteur, instigateur, organisateur ou complice des actes immoraux perpétrés aux lieux de travail, notamment le strip‑tease, le nudisme, les ébats amoureux, la séquestration des mineurs, le viol, l’ivresse publique, etc. sera passible de révocation.»

«Article 35 − Est également passible de révocation:

L’agent ayant fait l’objet d’une condamnation définitive à une servitude pénale égale ou supérieure à trois mois;

L’agent ayant fait l’objet, pour une quelconque durée, d’une condamnation judiciaire qui met à néant sa dignité et son intégrité.».

Article 5

Mesures législatives

98.L’article 2 du Code pénal dispose: «L’infraction commise sur le territoire de la République est punie conformément à la loi.». Par territoire congolais, il faut entendre le sol congolais, la mer territoriale qui, selon la loi n° 74/009 du 10 juillet 1974 portant délimitation de la mer territoriale de la République démocratique du Congo, s’étend jusqu’à 12 miles du rivage, l’espace aérien, les navires de commerce ou de plaisance en eaux internationales, les navires de guerre stationnant en pays étranger non ennemi. L’article 2 du Code pénal est renforcé par l’article 14 du Code civil, livre 1er, qui dispose: «Les lois pénales ainsi que les lois de police et de sûreté publique obligent tous ceux qui se trouvent sur le territoire de l’État.».

99.Le principe de la territorialité des lois pénales connaît quelques exceptions, admises par les coutumes et conventions internationales, en ce qui concerne les souverains étrangers, les membres des missions diplomatiques et des postes consulaires. Les fonctionnaires des organisations internationales bénéficient généralement de l’immunité diplomatique conformément à la Convention de Vienne.

100.Les juridictions pénales congolaises ne sont pas compétentes à l’égard des Congolais qui ont commis des infractions à l’étranger, à moins qu’ils se trouvent sur le territoire national.

101.Les juridictions pénales congolaises ne sont pas compétentes pour connaître des infractions commises à l’égard des Congolais à l’étranger, par le seul fait qu’ils sont congolais alors même qu’il n’y a aucun lien de territorialité.

102.En effet, l’article 3 du Code pénal énonce:

«Toute personne qui, hors du territoire de la République démocratique du Congo, s’est rendue coupable d’une infraction pour laquelle la loi congolaise prévoit une peine de servitude pénale de plus de deux mois, peut être poursuivie et jugée au Congo, sauf application des dispositions légales sur l’extradition.

La poursuite ne peut être intentée qu’à la requête du ministère public.

Quand l’infraction est commise contre un particulier et que la peine maximum prévue par la loi congolaise est de cinq ans de servitude pénale au moins, cette requête doit être précédée d’une plainte de la partie offensée ou d’une dénonciation officielle de l’autorité du pays où l’infraction a été commise…».

103.Toutefois, aucune poursuite n’a lieu, en principe, si l’inculpé justifie qu’il a été jugé définitivement à l’étranger et, en cas de condamnation, qu’il a subi ou prescrit sa peine ou obtenu sa grâce. En outre, les poursuites n’ont lieu, en principe, que si l’inculpé est trouvé en République démocratique du Congo.

Article 6

1. Mesures législatives

104.L’article 19, alinéa 2, de la Constitution de la transition dispose que nul ne peut être poursuivi, arrêté ni détenu qu’en vertu de la loi et dans la forme qu’elle prescrit.

105.Les dispositions relatives à la détention préventive sont contenues dans le décret du 6 août 1959 portant Code de procédure pénale, tel que modifié par l’ordonnance‑loi n° 79‑014 du 6 juillet 1979. L’article 28 pose le principe que la détention préventive est une mesure exceptionnelle. Les conditions de mise en détention préventive sont posées à l’article 27, lequel dispose que l’inculpé ne peut être mis en détention préventive que s’il existe contre lui des indices sérieux de culpabilité et qu’en outre, le fait paraisse constituer une infraction que la loi réprime d’une peine de six mois de servitude pénale au moins. Au cas où l’infraction est punie de moins de six mois de servitude pénale, la mise en détention préventive n’est autorisée que s’il y a lieu de craindre la fuite de l’inculpé ou si son identité est inconnue ou douteuse, ou encore si la détention préventive est impérieusement réclamée par l’intérêt de la sécurité publique.

106.La détention préventive accordée pour la première fois par le juge n’est valable que pour une durée de 15 jours. Au terme de cette durée, l’inculpé doit être présenté impérieusement devant le juge pour une prorogation de la détention de 30 jours. La détention préventive ne peut être prorogée qu’une fois si le fait ne paraît constituer qu’une infraction à l’égard de laquelle la peine prévue par la loi n’est pas supérieure à deux mois de travaux forcés ou de servitude pénale. Le juge peut accorder ou proroger la détention préventive avec ou sans mise en liberté provisoire. La liberté provisoire n’est accordée que sous caution.

107.L’article 6 du décret du 6 août 1959 portant Code de procédure pénale dispose qu’en cas d’infraction flagrante ou réputée flagrante passible d’une peine de servitude pénale de trois ans au moins, toute personne peut, en l’absence de l’autorité judiciaire chargée de poursuivre et de tout officier de police judiciaire, saisir l’auteur présumé et le conduire immédiatement devant celle de ces autorités qui est la plus proche.

108.L’article 145 de la loi n° 23/2002 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire militaire dispose: «Dans les cas d’infractions flagrantes punies d’une servitude pénale de six mois au moins et sans préjudice des pouvoirs disciplinaires dont disposent les supérieurs hiérarchiques, tout officier de police judiciaire militaire a qualité pour procéder d’office à l’arrestation des militaires qui sont auteurs ou complices de ces infractions.».

109.L’article 146 souligne que la durée de cette garde à vue ne peut dépasser 48 heures.

110.L’article 147 dispose:

«Sous peine des sanctions prévues par les dispositions des articles 189 du présent Code et 108 du Code pénal militaire, les supérieurs hiérarchiques doivent satisfaire à la demande des officiers de police judiciaire de droit commun, tendant à mettre à leur disposition un militaire en activité de service, lorsque les nécessités d’une enquête préliminaire ou de flagrant délit, ou l’exécution d’une commission rogatoire l’exigent.».

111.Aux termes de l’article 148 du Code judiciaire militaire, les officiers de police judiciaire ne peuvent retenir pendant plus de 48 heures les militaires mis à leur disposition.

112.Le Code poursuit à son article 149:

«À l’expiration du délai de la garde à vue, les militaires arrêtés en flagrant délit ou contre lesquels existent des indices graves et concordants de culpabilité doivent être mis à la disposition de l’autorité judiciaire compétente.».

113.L’article 150 souligne que «les supérieurs hiérarchiques doivent être avisés du transfèrement».

114.Enfin, l’article 156 du Code judiciaire militaire précise que les officiers de police judiciaire militaire ne peuvent retenir à leur disposition des personnes étrangères à l’armée que dans les formes et conditions fixées par le Code de procédure pénale ordinaire.

2. Mesures administratives

115.L’article 72 de l’ordonnance n° 78‑289 du 3 juillet 1978 relative à l’exercice des attributions d’officier et agent de police judiciaire près les juridictions de droit commun dispose:

«Les officiers de police judiciaire ne peuvent procéder à l’arrestation de toute personne soupçonnée d’avoir commis une infraction punissable de six mois au moins de servitude pénale, à la condition qu’il existe contre elle des indices sérieux de culpabilité. Ils peuvent aussi, lorsque l’infraction est punissable de moins de six mois et de plus de sept jours de servitude pénale, se saisir de la personne du suspect contre lequel existent des indices sérieux de culpabilité à la condition qu’il y ait danger de fuite ou encore que son identité soit inconnue ou douteuse. Le suspect est préalablement entendu dans ses explications.».

116.L’article 73 prescrit que les officiers de police judiciaire sont tenus d’acheminer immédiatement devant l’officier du ministère public le plus proche les personnes arrêtées par application de l’article 72. Toutefois, lorsque les nécessités de l’enquête l’exigent et que l’arrestation n’a pas été opérée à la suite d’une infraction flagrante ou réputée telle, l’officier de police judiciaire peut retenir par devers lui la personne arrêtée pour une durée ne dépassant pas 48 heures. À l’expiration de ce délai la personne gardée à vue doit obligatoirement être laissée libre de se retirer ou mise en route pour être conduite devant l’officier du ministère public, à moins que l’officier de police judiciaire se trouve, en raison des distances à parcourir, dans l’impossibilité de ce faire.

117.Aux termes de l’article 74 de l’ordonnance n° 78‑289 du 3 juillet 1978, «l’arrestation ainsi que la garde à vue sont constatées sur procès verbal. L’officier de la police judiciaire y mentionne l’heure du début et de la fin de la mesure ainsi que les circonstances qui l’ont justifiée. Le procès‑verbal d’arrestation est lu et signé par la personne arrêtée et gardée à vue ainsi que par l’officier de police judiciaire dans les formes ordinaires des procès‑verbaux».

Article 7

Mesures législatives

118.En vertu de l’article 3 du Code pénal, les juridictions congolaises ne sont compétentes pour connaître des infractions commises à l’étranger que si l’auteur se trouve au Congo, et qu’il y a requête du ministère public et que l’infraction est punissable de plus de deux mois de servitude pénale.

119.Si l’infraction a lésé un particulier et qu’elle est punissable de cinq ans de servitude pénale au maximum, la requête du ministère public doit être précédée d’une plainte de la victime ou d’une dénonciation des autorités du pays où l’infraction a été commise aux autorités de la République démocratique du Congo.

120.Le projet de loi de mise en œuvre du Statut de Rome de la Cour pénale internationale améliore le Code pénal en ce sens que le juge congolais sera compétent pour connaître des crimes prévus par ce statut, à savoir les crimes de guerre, le crime de génocide et les crimes contre l’humanité, en dehors de toute plainte ou de toute saisine par l’autorité étrangère. Il suffit qu’au moment de l’ouverture de l’enquête, l’auteur des actes susvisés se trouve sur le territoire de la République démocratique du Congo. Il y a lieu de rappeler que la République démocratique du Congo a ratifié le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, en vertu du décret‑loi n° 003/2002 du 30 mars 2002 et publié celui‑ci au Journal officiel (numéro spécial, 5 décembre 2002, p. 169‑243).

121.Les règles de procédure pénale congolaise, édictées par le décret du 6 août 1959 et modifiées par l’ordonnance‑loi n° 82‑016 du 31 mars 1982, ne prévoient aucune discrimination liée à la nationalité du délinquant ou au lieu de la commission de l’infraction, dès lors que la compétence du juge congolais est reconnue.

122.Selon l’article 21 de la Constitution de la transition du 4 avril 2003, toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal qui statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. La personne victime d’une arrestation ou d’une détention illégale a droit à une juste et équitable réparation du préjudice qui lui a été causé. Toute personne a le droit de se défendre seule ou de se faire assister par un avocat ou un défenseur judiciaire de son choix. Toute personne poursuivie a le droit d’exiger d’être entendue en présence d’un avocat ou d’un défenseur judiciaire de son choix, et ce, à tous les niveaux de la procédure pénale, y compris l’enquête policière et l’instruction préjuridictionnelle.

123.Cependant, les règles de procédure pénale congolaise n’ont pas sensiblement évolué depuis l’accession du pays à l’indépendance en 1960. De ce fait, elles sont en retard quant aux garanties accordées à l’auteur présumé de l’infraction, à différents stades de la procédure. Néanmoins, au stade de l’instruction préparatoire, l’ordonnance‑loi n° 82‑016 du 31 mars 1982 a modifié l’article 30 du Code de procédure pénale, en prévoyant que le conseil du prévenu assiste l’inculpé en matière de détention préventive.

124.En vertu de l’article 31 du Code de procédure pénale, il appert que l’ordonnance autorisant la mise en état de détention préventive est valable pour 15 jours, y compris le jour où elle est rendue. À l’expiration de ce délai, la détention préventive peut être prorogée pour un mois et ainsi de suite de mois en mois, aussi longtemps que l’intérêt public l’exige. Toutefois, la détention préventive ne peut être prolongée qu’une fois si le fait ne paraît constituer qu’une infraction à l’égard de laquelle la peine prévue par la loi n’est pas supérieure à deux mois de travaux forcés ou de servitude pénale principale. Si la peine prévue est égale ou supérieure à six mois, la détention préventive ne peut être prolongée plus de trois fois consécutives. Dépassé ce délai, la prolongation de la détention est autorisée par le juge compétent statuant en audience publique. Les ordonnances de prorogation sont rendues en observant les formes et les délais prévus à l’article 30. L’assistance d’un avocat ou d’un défenseur ne peut cependant être refusée à l’inculpé pendant toute l’instruction préparatoire. Dans les cas prévus à l’article 27, alinéa 2, l’ordonnance qui autorise ou qui proroge la détention préventive doit spécifier les circonstances qui la justifient.

125.En ce qui concerne l’instruction à l’audience, les garanties classiques sont prévues, à savoir la présomption d’innocence, le principe du contradictoire, l’assistance par un avocat de son choix ou commis d’office et le double degré de juridiction.

126.L’article 83 du Code judiciaire militaire dispose:

«La Haute Cour militaire connaît également de l’appel des arrêts rendus en premier degré par les cours militaires. Les arrêts de la Haute Cour militaire ne sont susceptibles que d’opposition, conformément à la procédure du droit commun. Toutefois, les recours pour violation des dispositions constitutionnelles par la Haute Cour militaire sont portés devant la Cour suprême de justice siégeant comme Cour constitutionnelle. La Haute Cour militaire peut, à la requête de l’Auditeur général des forces armées ou des parties, rectifier les erreurs matérielles de ces arrêts ou en donner interprétation, les parties entendues.».

127.L’article 84, alinéa 2, du Code judiciaire militaire énonce que les cours militaires connaissent également de l’appel des jugements rendus en premier ressort par les tribunaux militaires de garnison.

128.Aux termes de l’article 88, alinéa 2, «les tribunaux militaires de garnison connaissent en outre de l’appel des jugements rendus en premier ressort par les tribunaux militaires de police».

129.L’article 91 dispose quant à lui que les jugements rendus par les tribunaux militaires de police sont susceptibles d’opposition et d’appel.

Article 8

Mesures législatives

130.Les dispositions organiques sur l’extradition, contenues dans le décret du 12 avril 1886 tel que modifié par l’ordonnance législative du 11 décembre 1959, énoncent à l’article premier les principes ci‑après:

a)La République démocratique du Congo ne peut extrader ses propres nationaux;

b)L’extradition ne s’opère que sous réserve de réciprocité;

c)En cas de convention d’extradition, l’étranger ne peut être extradé que si les faits infractionnels ont été pris en compte par la convention d’extradition;

d)Les faits doivent avoir été commis sur le territoire de l’État requérant.

En l’absence de convention d’extradition ou si les faits n’ont pas été énumérés dans la convention d’extradition, l’auteur ne pourra être extradé qu’à la suite d’un accord conclu de gouvernement à gouvernement.

131.Si les actes de torture n’ont pas été commis sur le territoire de l’État requérant, l’article 2 du décret du 12 avril 1889 prévoit que l’auteur étranger ne pourra être livré que si la loi congolaise autorise la poursuite de ces actes lorsqu’ils sont commis hors de la République démocratique du Congo. À cet égard, l’article 3, alinéa 3, du Code pénal dispose que toute personne qui, hors du territoire de la République démocratique du Congo, s’est rendue coupable d’une infraction pour laquelle la loi congolaise prévoit une peine de servitude pénale de plus de deux mois, peut être poursuivie et jugée en République démocratique du Congo, sauf application des dispositions sur l’extradition.

132.Depuis la création de l’État congolais, des traités et conventions d’extradition ont été signés avec les États étrangers, il en est ainsi:

a)De la Convention d’extradition entre l’État indépendant du Congo et le Portugal du 27 avril 1888 (Bulletin officiel, n° 1, janvier 1889, p. 24);

b)De la Convention d’extradition belgo‑bolivienne du 24 juillet 1908 rendue applicable au Congo belge (RDC) et au Rwanda (Bulletin officiel, 5 juillet et 15 août 1933);

c)Du Traité d’extradition entre la Belgique et la Grèce du 26 juin et 9 juillet 1901 applicable au Congo en vertu de la Convention additionnelle;

d)De la Convention du 8 août 1923 étendant au Congo belge et à certains protectorats britanniques le Traité d’extradition entre la Belgique et la Grande‑Bretagne du 29 octobre 1901 et les Conventions additionnelles à ces traités du 5 mars 1907 et du 3 mars 1911 (Bulletin officiel, 5 février 1924, p. 100 et suiv.).

133.Parmi les infractions prévues par ces conventions et qui sont susceptibles de donner lieu à l’extradition figurent notamment l’homicide volontaire, les coups et blessures volontaires, l’enlèvement, les arrestations et détentions arbitraires.

134.Ces conventions d’extradition n’ayant jamais été dénoncées par la République démocratique du Congo et en vertu du principe de la succession d’États, elles sont encore en vigueur.

135.De nos jours, la République démocratique du Congo a signé un accord en matière judiciaire avec la République du Cameroun, le 11 mars 1977.

136.Il existe aussi un accord de coopération judiciaire avec la République du Congo. Il concerne le cas de 19 agents de l’Agence nationale des renseignements (ANR) qui ont été extradés par la République du Congo dans le cadre de l’assassinat du Président M’Zée Laurent Désiré Kabila le 16 janvier 2001.

137.Une Convention d’extradition existe également dans le cadre de la coopération judiciaire entre les pays de la Communauté économique des pays des Grands Lacs (CEPGL: Congo, Rwanda et Burundi) et celle assurée par l’Interpol.

138.Étant donné que la torture n’est pas érigée en infraction spécifique, il est juridiquement impossible qu’elle figure dans les conventions d’extradition ou qu’elle fasse l’objet d’un accord particulier. Elle échappe ainsi au principe de la double incrimination qui veut que les faits infractionnels contenus dans les accords d’extradition soient prévus et sanctionnés dans tous les pays signataires. Cependant, s’ils sont constitutifs d’infractions figurant dans les traités d’extradition, ces faits peuvent donner lieu à la mesure d’extradition.

Article 9

1. Mesures législatives

139.Les actes de procédure étant soumis absolument au principe de la territorialité, le concours des autorités judiciaires étrangères est indispensable lorsque ces actes débordent le territoire national. Ainsi, lorsqu’il s’agit d’interroger un témoin se trouvant à l’étranger ou d’obtenir des éléments de preuve dans une procédure pénale en cours devant une juridiction étrangère, la législation congolaise recourt aux commissions rogatoires. De même, les parquets du Congo sont tenus d’exécuter les commissions rogatoires émanant de l’étranger.

140.La Convention du 20 septembre 1976 portant création de la Communauté économique des pays des Grands Lacs, comprenant le Rwanda, le Burundi et la République démocratique du Congo, a prévu en son article premier, point 4, une coopération judiciaire entre les pays membres.

2. Mesures administratives

141.La circulaire n° 3/008/I.M./P.G.R./1970 du 16 mai 1970 relative à l’organisation intérieure des parquets précise que les frais auxquels donne lieu l’exécution des commissions rogatoires en matière répressive sont supportés, à titre de réciprocité, par la puissance sur le territoire de laquelle ils sont faits, à moins qu’il ne s’agisse d’expertises longues et coûteuses. Cette règle s’applique même dans le silence des traités internationaux sur l’assistance judiciaire.

142.L’Accord d’assistance judiciaire avec la République du Cameroun stipule en ses articles 1 à 8 ce qui suit:

«Article 1 − Aux termes du présent Accord, la commission rogatoire est adressée par l’une des parties aux autorités judiciaires de l’autre partie en vue d’accomplir certaines diligences sur son territoire.

Article 2 − Les commissions rogatoires en matière pénale à exécuter sur le territoire de l’une des deux parties contradictoires sont transmises par la voie diplomatique et exécutées par les autorités judiciaires. Si l’autorité requise est incompétente, elle transmet d’office la commission rogatoire à l’autorité compétente.

Article 3 − L’autorité peut refuser d’exécuter une commission rogatoire si, d’après la loi de son pays, celle‑ci est de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l’ordre public.

Article 4 − Les personnes dont le témoignage est demandé sont invitées à comparaître par simple avis administratif; si elles refusent de déférer à cet avis, l’autorité requise doit user des moyens de contrainte prévus par la loi de son pays, sous réserve des immunités diplomatiques.

Article 5 − L’autorité requise accomplit dans les limites de sa législation tous les actes visés par la commission rogatoire y compris la notification d’une inculpation.

Sur demande de l’autorité requérante, l’autorité requise fait toute diligence pour informer en temps utile l’autorité requérante de la date et du lieu où il sera procédé à l’exécution de la commission rogatoire.

Article 6 − L’exécution des commissions rogatoires ne donne lieu au remboursement d’aucun frais, sauf en ce qui concerne les honoraires d’experts.

Article 7

1.Si dans une cause pénale, la comparution d’un témoin est nécessaire, le gouvernement de l’État où réside le témoin l’invite à répondre à la convocation qui lui est adressée. Dans ce cas, les indemnités de voyage et de séjour, calculées depuis la résidence du témoin, sont au moins égales à celles accordées d’après les tarifs et règlement en vigueur dans l’État où l’audition doit avoir lieu; il est fait, sur sa demande par les soins des autorités consulaires de l’État requérant, l’avance de tout ou partie des frais de voyage.

2.Aucun témoin qui, cité dans l’un des deux États, comparaît volontairement devant les juges de l’autre État, ne peut y être poursuivi ou détenu pour des faits ou condamnation antérieurs à son départ du territoire de l’État requis. Cette immunité cesse 45 jours après la date à laquelle la déposition a pris fin et où le retour du témoin a été possible.

3.En cas de faux témoignage, le témoin peut faire l’objet de poursuites judiciaires dans son pays de provenance.

Article 8 − Les demandes d’envoi de témoins détenus sont adressées par voie diplomatique. Il est, en principe, donné suite à la demande à moins que des considérations particulières ne s’y opposent et sous la condition de renvoyer le ou lesdits détenus dans un délai bref.».

Article 10

1. Mesures législatives

143.La Constitution de la transition dispose à l’article 47, alinéa 3, ce qui suit:

«L’État a le devoir d’assurer la diffusion et l’enseignement de la Constitution, de la Déclaration universelle des droits de l’homme, de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, ainsi que de tous les instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme et au droit international humanitaire dûment ratifiés. L’État a l’obligation d’intégrer les droits de la personne humaine dans tous les programmes de formation des forces armées, de la police et des services de sécurité. La loi détermine les conditions d’application du présent article.».

2. Mesures administratives

144.Le programme de formation des officiers de police judiciaire tant civils que militaires ou de la police nationale comporte, pour l’essentiel, des enseignements du droit pénal et de la procédure pénale qui sont une occasion d’insister sur la non‑validité des preuves obtenues par la torture. La formation du personnel médical et des agents ordinaires de la fonction publique ne comporte pas de tels enseignements.

145.Le Ministère des droits humains organise des séminaires à l’intention des agents des services de sécurité, de la police et des forces armées congolaises sur la prohibition des actes de torture, et de façon générale, sur l’éthique professionnelle des membres desdits services, mais il n’a concerné jusque‑là qu’un nombre très limité de personnes. Ces séminaires sont organisés en vue d’un véritable changement de comportement. C’est une véritable formation spécifique dont le personnel chargé de l’application des lois a besoin. Cependant, les ressources financières du pays sont actuellement très limitées à cause de l’impact de la guerre.

Article 11

1. Mesures législatives

146.C’est au Procureur de la République près le tribunal de grande instance que la législation congolaise confie la responsabilité de la surveillance systématique sur les règles, instructions, méthodes et pratiques d’interrogatoire. Aux termes de l’article 6 de l’ordonnance‑loi n° 82‑020 du 31 mars 1982 portant Code de l’organisation et de la compétence judiciaires, l’une des grandes attributions du Procureur de la République près le tribunal de grande instance est, en effet, non seulement de diriger l’action de tous les officiers du ministère public de son ressort, mais aussi celle des officiers de police judiciaire civils et de la police nationale. Il a la responsabilité de la surveillance des maisons de garde à vue et des maisons de détention.

147.L’article 148 du Code judiciaire militaire dispose: «Les officiers de police judiciaire ne peuvent retenir pendant plus de 48 heures les militaires mis à leur disposition.».

148.L’article 156 du Code judiciaire militaire dispose: «Les officiers de police judiciaire militaire ne peuvent retenir à leur disposition des personnes étrangères à l’armée que dans les formes et conditions fixées par le Code de procédure pénale ordinaire.».

149.L’article 157 du même Code dispose: «Le contrôle de la régularité de ces mesures est assuré par l’Auditeur militaire près la juridiction militaire territorialement compétente, qui peut déléguer ce pouvoir à l’un de ses substituts.».

2. Mesures administratives et judiciaires

150.La circulaire n° 3/008/I.M./P.G.R./1970 du 16 mai 1970 relative à l’organisation intérieure des parquets précise que le contrôle et la surveillance qui caractérisent l’action du Procureur de la République doivent être effectifs et non passifs.

151.Dans la pratique, outre les visites ponctuelles des maisons de détention qu’il effectue, le Procureur de la République, sur base de la circulaire n° 6/008/I.M./P.G.R./1970 du 16 mai 1970 relative au régime pénitentiaire, désigne à tour de rôle, une équipe d’officiers du ministère public pour effectuer un contrôle hebdomadaire des cachots de son ressort. Le contrôle fait l’objet d’un bref rapport qui est transmis au Procureur de la République.

152.La même circulaire n° 6 attire «l’attention toute spéciale des magistrats des parquets de grande instance sur les prescrits de l’article 28 de l’ordonnance n° 344 du 17 septembre 1965 concernant le régime pénitentiaire et la libération conditionnelle, relative à l’obligation imposée aux magistrats des parquets de visiter au début de chaque mois la prison centrale, les prisons de districts, les maisons d’arrêt y annexées et les camps de détention de leur ressort». Le magistrat inspecteur dresse un rapport, notant particulièrement les doléances des détenus qu’il aura entendus isolément. Le rapport mensuel est envoyé à l’inspecteur provincial des services pénitentiaires, au Procureur général, au Procureur général de la République et au Ministre de la justice.

153.C’est à la suite de ces visites et inspections des officiers du ministère public, tant civils que militaires, que des observations sont faites et des instructions données aux officiers de police judiciaire, aux gardiens des prisons et des maisons d’arrêt sur le traitement correct des détenus. Il est rappelé en particulier l’interdiction formelle d’administrer des coups de fouet. Si les faits relevés lors de l’inspection sont constitutifs d’infractions, ils sont instruits selon la procédure ordinaire.

154.Par ailleurs, il convient de souligner que le Ministre des droits humains effectue des visites régulières des lieux de détention de l’ensemble du territoire national. À ces occasions, il relève toutes les situations irrégulières et propose des mesures adéquates au Gouvernement, pour y remédier.

Article 12

1. Mesures législatives

155.Le décret du 6 août 1959 portant Code de procédure pénale reconnaît aux officiers du ministère public et aux officiers de police judiciaire à compétence générale le pouvoir d’enquêter sur toute infraction commise dans leur ressort. Dans la pratique, les plaintes et dénonciations sont adressées directement au Procureur de la République, qui charge l’officier du ministère public de son choix pour mener les enquêtes, tandis que les officiers de police judiciaire se saisissent d’office des affaires répressives. Les procureurs des parquets militaires et leurs officiers de police judiciaire jouissent des mêmes prérogatives.

156.L’article 7 de l’ordonnance‑loi n° 82‑020 du 31 mars 1982 portant Code de l’organisation et de la compétence judiciaires dispose qu’en matière répressive, le ministère public recherche les infractions aux actes législatifs et réglementaires, qui sont commises sur le territoire de la République. Quant à l’article 2 du décret du 6 août 1959 portant Code de procédure pénale, il précise que les officiers de police judiciaire constatent les infractions qu’ils ont mission de rechercher; ils reçoivent les dénonciations, plaintes et rapports relatifs à ces infractions.

157.Les dossiers relatifs aux enquêtes diligentées par les parquets civils ou miliaires sont transmis aux cours et tribunaux civils et militaires. Et, selon l’article 147 de la Constitution de la transition, le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Il est le garant des libertés individuelles et des droits fondamentaux des citoyens. Les juges ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions qu’à l’autorité de la loi.

2. Mesures administratives

158.L’ordonnance n° 78 – 289 du 3 juillet 1978 relative à l’exercice des attributions d’officier et agent de police judiciaire près les juridictions de droit commun dispose à l’article 37 notamment ce qui suit:

«Les officiers de police judiciaire sont tenus de rechercher personnellement et activement les infractions qu’ils ont pour mission de constater. (…) Toute plainte, toute dénonciation et tout rapport doivent faire l’objet d’une enquête de l’officier de police judiciaire (…).».

Tout procès‑verbal dressé à cette occasion est transmis sans exception à l’officier du ministère public territorialement compétent.

Article 13

1. Mesures législatives

159.L’article 21, alinéa 1er, de la Constitution de la transition dispose que: «Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal qui statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.».

160.L’article 22, alinéa 1er, dispose: «Nul ne peut être soustrait contre son gré au juge que la loi lui assigne. Toute personne a le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et dans le délai légal par une juridiction compétente légalement établie.».

161.En vertu des articles 2 et 11 du Code de procédure pénale, les victimes d’actes de torture qui constituent des infractions à la législation pénale congolaise ont l’entière liberté de porter plainte auprès des officiers du ministère public et des officiers de police judiciaire compétents. L’article 38, alinéa 2, précise: «Toute plainte, toute dénonciation et tout rapport doivent faire l’objet d’une enquête de l’officier de police judiciaire.».

162.L’article 35 de l’ordonnance précitée quant à lui dispose que l’enquête de l’officier de police judiciaire doit être menée sans désemparer de manière à fournir à l’officier du ministère public les principaux éléments d’appréciation.

163.Les articles 159 et 160 du Code pénal interdisent formellement toute forme d’intimidation ou de menaces:

a)«Article 159 − Sera condamné à une servitude pénale de trois mois à deux ans et à une amende de 50 à 500 zaïres, ou à l’une de ces peines seulement, celui qui, par écrit anonyme ou signé, aura menacé, avec ordre ou sous condition, d’un attentat contre les personnes ou les propriétés punissable d’au moins cinq années de servitude pénale;

b)Article 160 − La menace verbale faite avec ordre ou sous condition ou la menace par gestes ou emblèmes d’un attentat contre les propriétés punissable d’au moins cinq années de servitude pénale, sera punie d’une servitude pénale de huit jours à un an et d’une amende de 25 à 200 zaïres ou d’une de ces peines seulement.».

164.L’article 180 du Code pénal dispose:

«Tout acte arbitraire et attentatoire aux libertés et aux droits garantis aux particuliers par les lois, décrets, ordonnances et arrêtés ordonné ou exécuté par un fonctionnaire ou officier de public, par un dépositaire ou agent de l’autorité ou de la force publique, sera puni d’une servitude pénale de 15 jours à un an et d’une amende de 200 à 1 000 zaïres ou d’une de ces peines seulement. S’il est constitutif d’une infraction punie de peines plus fortes, son auteur sera condamné à ces peines.».

2. Mesures administratives

165.L’article 38 de l’ordonnance n° 78‑289 du 3 juillet 1978 relative à l’exercice des attributions des officiers et agents de police judiciaire près les juridictions de droit commun dit que les officiers de police judiciaire «sont tenus de recevoir toute plainte, dénonciation ou rapport relatif à une infraction qu’ils ont pour mission de constater. Ils en dressent aussitôt procès‑verbal. Ils sont tenus au secret professionnel sur l’identité de tout dénonciateur qui, après s’être fait connaître, réclame le bénéfice de l’anonymat pourvu que lui‑même n’ait commis, par sa dénonciation, aucune faute.».

166.Cependant, la protection effective des victimes est fonction de la perspicacité de chaque officier du ministère public, officier de police judiciaire ou juge.

Article 14

Mesures législatives

167.En République démocratique du Congo, les personnes victimes d’actes de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants commis par des agents publics peuvent introduire une demande en réparation devant la juridiction répressive de droit commun, matériellement compétente pour connaître des faits pénaux constitutifs de torture, à savoir le tribunal de paix ou le tribunal de grande instance, en se constituant parties civiles. À défaut de se constituer partie civile, la juridiction saisie doit allouer des dommages et intérêts d’office. En tout état de cause, l’indemnité allouée doit répondre au principe de la réparation intégrale du préjudice.

168.L’article 69 du Code de procédure pénale dispose que lorsque la juridiction de jugement est saisie de l’action publique, la partie lésée peut la saisir de l’action en réparation du dommage en se constituant partie civile. La partie civile peut se constituer à tout moment depuis la saisine du tribunal jusqu’à la clôture des débats, par une déclaration reçue au greffe ou faite à l’audience, et dont il lui est donné acte. En cas de déclaration au greffe, celui‑ci en avise les parties intéressées. L’article 70 du Code de procédure pénale énonce:

«La partie lésée qui a agi par la voie de la citation directe ou qui s’est constituée partie civile après la saisine de la juridiction de jugement, peut se désister à tout moment jusqu’à la clôture des débats par déclaration à l’audience ou au greffe. Dans ce dernier cas, le greffier en avise les parties intéressées.».

169.Si l’auteur des faits est un militaire ou justiciable des juridictions militaires, l’article 77 de la loi n° 023/02 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire militaire dispose:

«L’action pour la réparation du dommage causé par une infraction relevant de la compétence de la juridiction militaire peut être poursuivie par la partie lésée en se constituant partie civile en même temps et devant le même juge que l’action publique. Il en est de même des dommages et intérêts formés par le prévenu contre la partie civile ou contre les coprévenus.».

Les restitutions des objets s’opèrent suivant le droit commun.

170.Compte tenu des ressources financières limitées, la République démocratique du Congo n’a pas organisé, dans son système judiciaire, les moyens de réadaptation physique ou mentale des victimes des actes de torture. Toutefois, elle peut être tenue civilement responsable des actes de torture commis par ses agents, et ce en vertu de l’article 260 du Code civil, livre 3, qui dispose qu’on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre ou des choses que l’on a sous sa garde.

Article 15

1. Mesures législatives

171.L’article 75 du Code de procédure pénale édicte que sauf pour les procès‑verbaux auxquels la loi attache une force probante particulière, le juge apprécie celle qu’il convient de leur attribuer.

172.Bien que le Code de procédure pénale ne contienne pas de dispositions expresses prescrivant le rejet des preuves obtenues par contrainte physique ou morale, la jurisprudence et la doctrine congolaises sont constantes en ce qu’elles décident et enseignent que les moyens de preuve doivent être respectueux de la dignité humaine. Elles précisent que doivent être combattus les passages à tabac, les tortures, utilisés en vue d’arracher les aveux.

2. Mesures administratives

173.La circulaire n° 04/008/In/PGR/70 du 16 mai 1970 du Procureur général de la République relative à l’action des officiers de police judiciaire prescrit que «Toute violence à l’égard des personnes est strictement interdite aux officiers de police judiciaire.». Elle précise en outre qu’il est arrivé que les officiers de police judiciaire des parquets ou les fonctionnaires ou agents chargés accessoirement des fonctions judiciaires se livraient à des brutalités ou les toléraient, et que cette façon d’agir est absolument à proscrire. Elle conclut que de plus, l’aveu obtenu par la contrainte est sans valeur probante.

Article 16

1. Mesures législatives

174.L’article 15 de la Constitution dispose:

«La personne humaine est sacrée. L’État a l’obligation de la respecter et de la protéger. Toute personne a droit à la vie et à l’intégrité physique. Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains, cruels ou dégradants. Nul ne peut être privé de la vie ou de la liberté si ce n’est dans les cas prévus par la loi nationale et les formes qu’elle prescrit.»

175.Notons qu’il existe encore en République démocratique du Congo des dispositions législatives qui prescrivent la peine de mort comme sanction contre les infractions graves de meurtre, assassinat, haute trahison et autres infractions militaires punies par le Code de justice militaire.

176.L’exécution de la peine de mort se fait par la pendaison pour les civils et par les armes pour les militaires (arrêté du 9 avril 1898 relatif aux exécutions capitales).

177.D’autres dispositions permettent d’éviter que la peine de mort soit exécutée contre le condamné. En effet, la loi fait obligation à l’officier du ministère public d’exercer son recours à toutes fins utiles, toutes les fois que le prévenu aura été condamné à la peine de mort. Il s’agira du recours en appel devant une juridiction supérieure, lorsque la peine de mort a été prononcée au premier degré, ou du recours en grâce exercé devant le Président de la République, pour la décision en appel ou celle qui est prononcée en premier et dernier ressort.

178.L’exercice de ce recours par le ministère public est prévu par l’article 175 de l’arrêté d’organisation judiciaire n° 299‑79 du 20 août 1973 portant règlement intérieur des cours, tribunaux et parquets. L’acceptation du recours en grâce par le Président de la République a pour effet de commuer la peine de mort en peine de servitude pénale à perpétuité ou à temps.

179.Plusieurs résolutions et recommandations ont été faites dans le sens de la suppression de la peine de mort, à l’occasion des séminaires organisés à divers moments (en février 2003 par la Fédération internationale des droits de l’homme et en mars 2003 par l’Observatoire congolais des droits de l’homme).

180.La Commission permanente de réforme du droit congolais, dont les travaux viennent d’être relancés, tiendra certainement compte de cette exigence pour proposer la réforme du Code pénal dans ce sens.

2. Mesures administratives

181.Pour éviter que les autres traitements inhumains ou dégradants soient commis sur les détenus, prévenus ou condamnés par les gardiens des prisons, maisons d’arrêt et centres de détention, l’ordonnance n° 344 du 17 septembre 1965 portant régime pénitentiaire et libération conditionnelle prévoit en ses articles 24 à 29 les visites des prisons, maisons d’arrêt et centres de détention. Les visiteurs vérifient si les détenus reçoivent une nourriture saine et suffisante, et si les conditions d’hygiène dans lesquelles ils vivent sont satisfaisantes. Ils dressent un rapport à envoyer aux supérieurs hiérarchiques avec les doléances présentées par les détenus qu’ils auront entendus.

182.La même ordonnance prescrit en son article 32 que les prisonniers sont fouillés au moment de leur entrée par une personne de leur sexe désignée par le gardien. La ratio legis de cette disposition est d’éviter qu’un traitement dégradant soit commis à l’égard de détenus fouillés par une personne de sexe opposé et c’est aussi dans le même ordre d’idées que l’article 39 de l’ordonnance précitée exige que les femmes soient séparées des hommes, en ayant leurs propres cellules. Aussi, l’article 52 de la même ordonnance proscrit‑il la remise aux détenus d’une tenue dégradante ou humiliante; celle‑ci doit être appropriée.

183.Dans le but de protéger les détenus et de leur éviter un traitement inhumain, l’article 7 de la même ordonnance permet au Ministère de la justice de créer des camps de détention dans les localités en vue d’éviter un encombrement des prisons et un nombre excessif de détenus, ce qui entraînerait étouffement et transmission de maladies.

184.Dans la même optique, l’ordonnance n° 344 précitée prévoit que les détenus, dès leur entrée en prison, font l’objet d’une visite médicale ayant principalement pour but le dépistage des maladies transmissibles, les détenus malades sont soignés au dispensaire ou à l’infirmerie de la prison ou à la formation médicale hospitalière la plus proche.

185.Le médecin visite la prison, maison d’arrêt ou centre de détention, soit quotidiennement, soit une ou plusieurs fois par semaine, et fait des prescriptions relatives au traitement des détenus, au régime alimentaire, à l’exemption ou à la capacité de travail des détenus malades. Celles‑ci sont inscrites par le médecin dans un registre spécial et sur la fiche médicale de chaque détenu. Cela a une incidence sur les travaux auxquels les condamnés des prisons et du camp de détention sont astreints, lesquels sont répartis en tenant notamment compte des capacités et des aptitudes physiques de chacun. Il s’agit là des précautions importantes qui sont prises, afin d’éviter que les personnes détenues ou emprisonnées soient l’objet d’un traitement inhumain, par l’affectation des détenus inaptes à l’exécution des travaux lourds. (art. 27 à 33 de l’ordonnance n° 344, art. 16 portant régime pénitentiaire).

186.Les traitements cruels, inhumains ou dégradants sont également prohibés, en vertu de la circulaire n° 04/008/JM/PHR/70 précitée qui stigmatise le comportement des officiers de police judiciaire en ces termes:

«En présumant de la culpabilité d’un prévenu, on le frappe pour obtenir des aveux, on pense contribuer à la découverte de la vérité et à la répression. Or, l’hostilité et le parti pris de celui qui l’interroge ont ordinairement pour résultat de rendre l’inculpé méfiant, de lui enlever l’espoir d’indulgence et d’empêcher ainsi les aveux qu’une procédure plus humaine aurait obtenus (…)».

«Il en est de même pour les injures aux prévenus ou témoins, certains individus sont extrêmement sensibles aux marques de mépris, ils en ressentent profondément l’injustice ou l’impolitesse. Au point de vue judiciaire, traiter à priori de menteur le prévenu ou le témoin qu’on interroge le fait réagir d’une façon défavorable à la découverte de la vérité (…).».

187.Les séminaires de formation qu’organise le Ministère des droits humains à l’intention des agents des services de sécurité tendent à leur faire adopter un comportement conforme au respect des droits de l’homme.

-----