Nations Unies

CCPR/C/BLZ/CO/1/Add.1

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

11 décembre 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Observations finales concernant le rapport initial du Belize *

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le rapport initial du Belize (CCPR/C/BLZ/1) à ses 3540e et 3541e séances (CCPR/C/SR.3540 et 3541), les 15 et 16 octobre 2018. À sa 3559e séance, le 29 octobre 2018, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction la soumission, bien que tardive, du rapport initial du Belize ainsi que les renseignements qu’il contient. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte d’engager, à la suite de l’adoption en 2013 de ses précédentes observations finales en l’absence de rapport (CCPR/C/BLZ/CO/1), un dialogue constructif avec la délégation de l’État partie au sujet des mesures prises depuis l’entrée en vigueur du Pacte, en 1996, pour appliquer les dispositions de cet instrument. Il remercie l’État partie de ses réponses écrites (CCPR/C/BLZ/Q/1/Add.2) à la liste de points (CCPR/C/BLZ/Q/1/Add.1), qui ont été complétées oralement par la délégation.

B.Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption par l’État partie des mesures législatives, institutionnelles et gouvernementales ci-après :

a)La création de l’Unité de lutte contre la traite des êtres humains au sein des services de police béliziens, en 2018 ;

b)Le projet intitulé « Les femmes dans la vie politique », qui vise à améliorer la participation des femmes à la vie politique ;

c)La création du Comité national pour l’égalité des sexes et la lutte contre la violence fondée sur le genre et de comités de districts pour la lutte contre la violence fondée sur le genre, qui sont chargés de traiter les questions liées au genre de manière intégrée ;

d)L’introduction de délais dans les Règles de procédure pénale, promulguées en 2016, qui visent à réduire les retards dans le système judiciaire.

4.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments internationaux ci-après, ou y a adhéré :

a)Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le 9 mars 2015 ;

b)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le 14 août 2015 ;

c)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le 4 septembre 2015.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Application du Pacte au niveau national et cadre constitutionnel

5.Tout en notant que les dispositions du Pacte ont été incorporées dans la Constitution et dans un grand nombre de lois nationales, le Comité demeure préoccupé (CCPR/C/BLZ/CO/1, par. 10) par le nombre très limité d’exemples d’affaires dans lesquelles les dispositions du Pacte ont été invoquées devant les tribunaux ou appliquées par ceux-ci. Il constate également avec préoccupation que, en vertu de l’article 3 de la Constitution, les libertés et les droits fondamentaux peuvent être l’objet de restrictions pour des motifs d’intérêt général et que le critère appliqué par la Cour suprême du Belize pour mettre en balance tous les droits fondamentaux et l’intérêt général soulève des questions de compatibilité avec le Pacte, certains droits énoncés dans le Pacte ne pouvant jamais être l’objet de restrictions ou ne pouvant l’être que dans les conditions très particulières prévues par le Pacte (art. 2).

6. L’État partie devrait : a) prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les dispositions du Pacte ont plein effet dans son système juridique interne de sorte qu’elles puissent être appliquées par les tribunaux nationaux ou invoquées devant ceux-ci ; b) mettre en œuvre un programme exhaustif, accessible et régulièrement mis à jour de formation spécialisée aux dispositions du Pacte à l’intention des juges, des procureurs et des avocats, afin que ceux-ci appliquent et interprètent le droit interne à la lumière du Pacte ; et c) modifier son droit constitutionnel de sorte que les droits protégés par le Pacte ne soient pas l’objet de restrictions allant au-delà de ce qui est autorisé par le Pacte.

Réserves

7.Le Comité réaffirme ses préoccupations (CCPR/C/BLZ/CO/1, par. 6 à 8) concernant les réserves formulées par l’État partie à l’égard du paragraphe 2 de l’article 12 et des paragraphes 3 d) et 6 de l’article 14, qui sont incompatibles avec l’objet et le but du Pacte. Il est particulièrement préoccupé par ce qui suit : a) la réserve émise par l’État partie à l’égard du paragraphe 2 de l’article 12, au motif que les intérêts nationaux justifient la disposition législative exigeant que les personnes qui ont l’intention de se rendre à l’étranger fournissent un certificat fiscal, restreint la liberté de circulation de manière disproportionnée dans la pratique ; et b) les réserves émises par l’État partie à l’égard des paragraphes 3 d) et 6 de l’article 14 compromettent les intérêts de la justice (art. 2, 12 et 14).

8. L’État partie devrait envisager de retirer sa réserve au paragraphe 2 de l’article 12 et de supprimer tous les obstacles d’ordre pratique à la liberté de circulation. Compte tenu de l’observation générale n o  32 (2007) du Comité relative au droit à l’égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable, l’État partie devrait envisager de retirer sa réserve aux paragraphes 3 d) et 6 de l’article 14, dans le but de servir les intérêts de la justice.

Institution nationale des droits de l’homme

9.Tout en prenant note de l’existence d’organismes publics chargés de la protection des droits de l’homme, tels que le Comité national pour la famille et l’enfance et la Commission nationale de la femme, ainsi que des informations relatives à une étude de faisabilité concernant la création d’une institution nationale des droits de l’homme, le Comité constate une nouvelle fois avec préoccupation (CCPR/C/BLZ/CO/1, par. 9) que l’État partie n’a pas encore mis en place une institution conforme aux principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Le Comité se félicite de l’augmentation des crédits budgétaires alloués au Bureau du Médiateur du Belize, mais reste préoccupé par le fait que celui-ci ne dispose pas de ressources humaines et financières suffisantes pour s’acquitter de son mandat (art. 2).

10. L’État partie devrait intensifier ses efforts pour : a) mettre en place une institution nationale des droits de l’homme chargée de protéger l’ensemble des droits de l’homme, qui soit pleinement conforme aux Principes de Paris et s’emploie de manière indépendante, transparente et efficace à promouvoir et à protéger les droits de l’homme ; et b) doter le Bureau du Médiateur de ressources financières et humaines pérennes et suffisantes qui lui permettent de s’acquitter efficacement de son mandat.

Cadre relatif à la non-discrimination

11.Le Comité note que le principe de non-discrimination est inscrit dans la Constitution et qu’un processus visant à lutter contre la non‑discrimination de façon globale au moyen d’un projet de loi contre la discrimination a été lancé. Il regrette toutefois que les cadres actuels : a) ne couvrent pas tous les motifs interdits énoncés aux articles 2 et 26 du Pacte, en particulier la langue, la religion, l’opinion, l’origine sociale, la fortune, la naissance, l’orientation sexuelle et l’identité de genre, et toute autre situation ; et b) n’assurent pas aux victimes des recours civils et administratifs efficaces (art. 2 et 26).

12.Le Comité est également préoccupé par le paragraphe 1 de l’article 5 de la loi sur l’immigration (2000), qui interdit l’entrée dans l’État partie à certaines catégories d’étrangers pour des motifs liés à l’état de santé, au handicap, à l’orientation sexuelle ou à d’autres situations, y compris aux personnes présentant un handicap physique ou psychosocial, aux personnes identifiées par les autorités de l’immigration comme étant « homosexuelles » ou aux prostitués (art. 2 et 26).

13. L’État partie devrait : a) adopter une législation civile et administrative complète visant à lutter contre la discrimination, qui contienne une définition de la discrimination, tant directe qu’indirecte, y compris dans la sphère privée, et prévoie une liste non exhaustive des motifs de discrimination, à savoir, notamment, la langue, les convictions religieuses, l’orientation sexuelle et l’identité de genre ; b) garantir à toutes les victimes d’actes de discrimination l’accès à des voies de recours efficaces et appropriées ; et c) réviser le paragraphe 1 de l’article 5 de la loi sur l’immigration (2000) et veiller à ce que toutes les personnes qui se sont vu refuser l’entrée pour des motifs discriminatoires aient accès à des voies de recours efficaces.

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

14.Le Comité se félicite de la décision de la Cour suprême en l’affaire Caleb Orozco v. The Attorney General of Belize et al. (2016), dans laquelle la Cour suprême a reconnu l’inconstitutionnalité et le caractère discriminatoire de l’article 53 du Code pénal, qui réprime les relations homosexuelles entre adultes consentants. Il demeure toutefois préoccupé par les allégations crédibles selon lesquelles les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexes sont stigmatisés et se heurtent à une discrimination de facto dans l’exercice de différents droits en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Le Comité est particulièrement préoccupé par les informations faisant état : a) de discours haineux dans les médias à l’égard des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des intersexes, dans une totale impunité ; b) d’actes de violence, de harcèlement et d’abus de pouvoir commis par la police sur des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des intersexes, situation qui est aggravée par l’absence de véritables enquêtes sur les actes en question et par le fait que ces allégations ne sont pas enregistrées dans les bases de données pertinentes (art. 2, 7, 9, 20 et 26).

15. L’État partie devrait : a) abroger l’article 53 du Code pénal et dépénaliser les relations homosexuelles entre adultes consentants ; b) réprouver explicitement toute forme de stigmatisation sociale, de discrimination et de violence à l’égard de personnes fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre et s’engager à lutter contre les discours haineux émanant de personnalités publiques ou de particuliers et visant les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexes  ; c) supprimer tout obstacle empêchant les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexes d’exercer leurs droits ; d) faciliter l’accès à la justice pour les victimes de harcèlement, de violences et d’abus de pouvoir de la part de la police, notamment en renforçant la confiance entre les autorités de l’État et les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexes , et doter les organes de réception des plaintes, notamment l’unité des normes professionnelles, de ressources humaines et financières plus importantes ; et e) veiller à ce que tout acte de violence motivé par l’orientation sexuelle ou l’identité de genre de la victime donne lieu à une enquête, à des poursuites et à des sanctions, et faire en sorte que les données concernant de tels actes soient systématiquement collectées.

Égalité des sexes

16.Tout en prenant note du projet de modification de la loi sur la représentation du peuple, qui prévoit un système de quotas destiné à augmenter la représentation des femmes à l’Assemblée nationale, le Comité demeure préoccupé par la sous-représentation persistante des femmes dans la vie publique et dans la vie politique, en particulier aux postes de responsabilité. Il se déclare en outre préoccupé par le taux de chômage des femmes, qui semble être trois fois supérieur à celui des hommes, et par l’écart de rémunération persistant entre les hommes et les femmes (art. 2, 3, 25 et 26).

17. L’État partie devrait intensifier ses efforts pour : a) parvenir à une représentation égale des femmes et des hommes dans la vie politique et dans la vie publique, notamment par l’adoption de mesures temporaires spéciales telles que les quotas, ainsi que dans le monde du travail ; et b) adopter des mesures efficaces pour mettre fin aux écarts de rémunération entre les hommes et les femmes.

Violence fondée sur le genre

18.Tout en se félicitant des efforts déployés par l’État partie pour lutter contre la violence fondée sur le genre, le Comité demeure préoccupé par les informations faisant état de la persistance de ce phénomène, y compris la violence familiale, le viol et l’augmentation des cas de féminicide. Il regrette en particulier : a) le faible taux de signalement de ces actes et le faible taux de poursuites menées à leur terme, ainsi que les facteurs qui causent et aggravent ces phénomènes, notamment la persistance de la stigmatisation sociale et la crainte de représailles, qui favorisent l’impunité des auteurs et font obstacle à l’accès des victimes à une assistance, à une protection et à des réparations ; et b) le manque de structures d’accueil et de ressources pour l’assistance aux victimes (art. 2, 3, 6, 7 et 26).

19. L’État partie devrait poursuivre et intensifier ses efforts pour prévenir et combattre les actes de violence à l’égard des femmes, notamment en renforçant les institutions chargées de l’application du cadre législatif en vigueur. À ces fins, il devrait : a) enquêter de manière efficace sur tous les cas de violence à l’égard des femmes et des filles, traduire les auteurs de tels faits en justice et, s’ils sont reconnus coupables, leur imposer des peines proportionnées à la gravité de l’infraction ; b) renforcer les mesures visant à encourager et à faciliter l’accès des victimes à la justice, et les moyens de protection ; c)  continuer à améliorer ses méthodes et systèmes de recherche et de collecte de données, comme le système de surveillance de la violence sexiste, afin de déterminer l’ampleur du problème, ses causes et ses conséquences pour les femmes ; d) hâter la mise en œuvre du Plan d’action national contre la violence sexiste (2017-2020) ; et e) garantir l’accessibilité à des structures d’accueil en nombre suffisant, qui disposent de ressources appropriées et suffisantes pour fournir des services d’assistance efficaces aux victimes.

Interruption volontaire de grossesse et mortalité maternelle

20.Le Comité est préoccupé par le fait que l’article 112 du Code pénal incrimine l’interruption volontaire de grossesse, sauf lorsque deux médecins certifient que la poursuite de la grossesse présenterait un risque pour la vie de la femme enceinte ou risquerait de porter atteinte à sa santé physique ou mentale ou lorsqu’il existe des risques que l’enfant présente des « anomalies ». Il constate avec préoccupation que les restrictions prévues par cette législation, telle qu’appliquée dans l’État partie, obligent les femmes et les filles à recourir à des avortements non sécurisés qui mettent leur vie et leur santé en danger. Il regrette le manque d’informations de l’État partie concernant le taux de mortalité maternelle liée aux avortements non sécurisés et les mesures prises pour réduire ce taux de mortalité (art. 3, 6, 7, 17, 24 et 26).

21. L’État partie devrait : a) modifier sa législation afin de garantir l’accès effectif à un avortement légal et sécurisé lorsque la vie ou la santé de la femme ou de la fille enceinte est en danger et lorsque le fait de mener la grossesse à terme causerait pour la femme ou la fille une douleur ou des souffrances considérables, tout particulièrement lorsque la grossesse résulte d’un viol ou d’un inceste ou n’est pas viable ; b) supprimer les barrières qui privent les femmes et les filles d’un accès effectif à un avortement légal et sécurisé, telles que la nécessité d’obtenir l’approbation de deux médecins ; c) veiller à ce que les femmes et les filles qui ont recours à l’avortement, ainsi que les médecins qui les aident, ne fassent pas l’objet de sanctions pénales, étant donné que de telles sanctions contraignent les femmes et les filles à recourir à des avortements non sécurisés ; et d) garantir aux hommes, aux femmes et aux adolescents, dans tout le pays, un accès sans entraves aux services de santé sexuelle et procréative et à l’éducation dans ce domaine, ainsi qu’à la contraception.

Peine de mort

22.Tout en notant que l’État partie observe un moratoire de fait depuis 1985 et que, selon l’explication donnée par la délégation, le maintien de la peine de mort est notamment dû au fait que l’opinion publique y est favorable, le Comité se déclare préoccupé par le fait que cette peine reste en vigueur (art. 6).

23. L’État partie devrait : a) déclarer un moratoire officiel sur la peine de mort en vue de l’abolition de cette peine ; b) envisager d’adhérer au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, visant à abolir la peine de mort ; c) dans l’attente de l’abolition de la peine de mort, procéder à une refonte de la législation pertinente, de sorte que la peine capitale ne puisse pas être appliquée en violation du Pacte ; et d) réfléchir à des mesures de sensibilisation propres à mobiliser l’opinion publique en faveur de l’abolition de la peine de mort.

Obligation de protéger le droit à la vie

24.Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour engager des poursuites dans les affaires de meurtre et de tentative de meurtre, en particulier de la modification de la loi sur le jury et de la loi sur la preuve. Il reste toutefois préoccupé par l’augmentation du taux d’homicide et le faible nombre de poursuites engagées pour des faits de cette nature dans l’État partie. Rappelant son observation générale no 31 (2004) sur la nature de l’obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, il réaffirme que les États parties ne peuvent s’acquitter pleinement de leur obligation positive de garantir les droits consacrés par le Pacte que si les individus sont aussi protégés contre tout acte, commis par des personnes privées, physiques ou morales, qui entraverait l’exercice de ces droits (art. 2et6).

25. L’État partie devrait redoubler d’efforts pour protéger efficacement le droit de ses citoyens à la vie, notamment : a) en dotant la police et les autorités judiciaires de ressources financières et humaines plus importantes ; b) en donnant effet aux modifications apportées à la loi sur le jury et à la loi sur la preuve ; et c) en menant dans les meilleurs délais des enquêtes efficaces et approfondies en vue de condamner tous les individus responsables de meurtre ou de tentative de meurtre.

Usage excessif de la force par les agents de la force publique

26.Le Comité prend note des renseignements selon lesquels les garde-côtes, et les membres de la police et des forces de défense du Belize sont régulièrement formés, le but étant de décourager l’usage excessif de la force et des armes à feu. Il rappelle toutefois avec préoccupation qu’il continue de recevoir des informations faisant état d’un usage excessif de la force et des armes à feu par les agents de la force publique, en particulier par des policiers, y compris à l’égard de mineurs. Il est satisfait d’apprendre que la Commission indépendante des plaintes sera pleinement opérationnelle au début de l’année 2019 et que les bureaux de l’unité des normes professionnelles se trouvent actuellement dans des locaux distincts de ceux de la police. Il s’inquiète toutefois de la méfiance qu’inspirerait l’unité des normes professionnelles, dont on estime qu’elle n’est pas impartiale, et note avec préoccupation que cette entité ne dispose pas des ressources nécessaires pour pouvoir exercer efficacement son mandat (art. 6).

27. L’État partie devrait : a) redoubler d’efforts pour lutter contre l’usage excessif de la force par les agents de la force publique ; b) veiller à ce que le règlement relatif à l’usage de la force et sa mise en œuvre soient pleinement conformes aux normes internationales, notamment au Pacte et aux Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, et faire en sorte que les agents des forces de l’ordre et des forces de sécurité reçoivent une formation au sujet de ces normes et les appliquent dans la pratique ; c) veiller à ce que les cas présumés de brutalités ou d’usage excessif de la force, notamment de la force meurtrière, de la part d’agents des forces de l’ordre et des forces de sécurité fassent immédiatement et automatiquement l’objet d’une enqu ê te et à ce que les victimes aient acc è s à des recours utiles ; et d) redoubler d’efforts pour rendre la Commission ind é pendante des plaintes pleinement op é rationnelle, garantir l’ind é pendance et l’impartialit é de l’unit é des normes professionnelles et doter celle-ci de financements suffisants, le but é tant de tisser un lien de confiance entre cette unit é et les plaignants potentiels.

Torture et mauvais traitements

28.Le Comité prend note de la création d’une commission interministérielle chargée de mettre en œuvre les recommandations du Sous‑Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et de définir la torture dans les meilleurs délais. Il n’en reste pas moins préoccupé de constater que les actes de torture visés dans la section consacrée aux « atteintes pénales à la personne » (art. 79 à 95 du Code pénal) ne sont toujours pas définis. Il s’inquiète, en outre, des allégations de recours à la torture et aux mauvais traitements dans les lieux de détention, y compris les centres de détention pour mineurs, et regrette de ne pas disposer d’informations concernant le nombre de plaintes déposées pour torture ou mauvais traitements imputables à des membres des forces de l’ordre (art. 7).

29. L’État partie devrait : a) mettre à jour son cadre législatif de lutte contre la torture pour rendre la définition du crime de torture pleinement conforme aux dispositions du Pacte et aux normes internationales acceptées, interdire les aveux forcés et s’assurer que les éléments de preuve obtenus par la torture soient irrecevables devant toutes les juridictions ; b) redoubler d’efforts pour prévenir la torture et les mauvais traitements et faire en sorte que tous les faits de cette nature fassent sans délai l’objet d’une enquête approfondie et indépendante, que leurs auteurs soient traduits en justice et que les victimes obtiennent pleinement réparation, notamment sous la forme de services de réadaptation ; c) faciliter l’accès des victimes de torture à des mécanismes de dépôt de plaintes indépendants et efficaces ; d) recueillir des données précises sur les cas de torture et de mauvais traitements, les poursuites engagées, les condamnations prononcées et les peines appliquées, et rendre ces informations publiques ; et d) s’assurer que les cas présumés de torture et de mauvais traitements imputables à des membres des forces de l’ordre fassent l’objet d’une enquête approfondie, et veiller à ce que les responsables soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, dûment condamnés, et à ce que les victimes obtiennent réparation et notamment se voient proposer des mesures de réadaptation.

Conditions de détention

30.Le Comité note que, selon ce qu’a déclaré la délégation, la prison centrale du Belize n’est pas surpeuplée et le règlement pénitentiaire est conforme à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela). Il se dit toutefois préoccupé par les informations crédibles qui lui ont été communiquées, notamment par le Médiateur, concernant : a) les conditions de vie difficiles des détenus, notamment la surpopulation carcérale, la malnutrition, l’accès insuffisant à l’eau, les mauvaises conditions d’hygiène et le manque de soins médicaux ; b) la violence entre détenus ; c) la mise à l’isolement de détenus à des fins disciplinaires, jusque vingt-huit jours durant, dans de petites pièces ni éclairées ni ventilées, prévues à cet effet. Il prend note des informations selon lesquelles des juges de la Cour suprême se rendent chaque année dans les prisons, mais il n’en reste pas moins préoccupé d’apprendre que les juges inspecteurs chargés de recevoir les plaintes des détenus, d’enquêter sur ces plaintes et de les signaler ne seraient pas assez disponibles pour s’acquitter de ces tâches (art. 7 et 10).

31. L’État partie devrait : a) prendre toutes les mesures qui s’imposent pour améliorer les conditions de vie et le traitement des détenus ; b) veiller à ce que le règlement pénitentiaire soit interprété et mis en œuvre d’une manière qui permette d’améliorer les normes minimales applicables aux détenus, y compris dans la prison centrale du Belize ; c) veiller à ce qu’un nombre suffisant de juges inspecteurs soient disponibles pour effectuer des visites régulières dans les prisons et pouvoir ainsi recevoir les plaintes des détenus ; d)  enquêter promptement et de façon approfondie sur les violations des droits des détenus, traduire en justice les responsables et les condamner à des peines appropriées, et assurer des recours utiles aux victimes et leur accorder pleine réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation suffisante .

Détention arbitraire et détention provisoire

32.Le Comité salue l’adoption, en janvier 2016, des Règles de procédure pénale, qui fixent les délais applicables au traitement des nouvelles affaires pénales afin de réduire les retards. Il demeure préoccupé par les allégations d’arrestation arbitraire et de détention arbitraire pendant plus de quarante-huit heures sans inculpation, ainsi que par l’usage de la détention comme méthode d’intimidation. Il note aussi avec inquiétude qu’un grand nombre de personnes se trouvent en détention provisoire, en particulier des personnes accusées de meurtre, parfois depuis sept ans, et regrette que l’on n’ait pas modifié l’article 162 de la loi sur la procédure de mise en accusation de façon à garantir que le temps passé en détention provisoire soit pris en compte dans le calcul de la durée de la peine (art. 9, 10 et 14).

33. Eu égard à l’observation générale n o  35 (2014) du Comité sur la liberté et la sécurité de la personne, l’État partie devrait prendre toutes les mesures qui s’imposent pour : a) assurer, dans la pratique, le respect des Règles de procédure pénale de 2016 et veiller à ce que tout individu arrêté ou détenu pour une infraction pénale soit traduit devant un juge ou un autre responsable habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires dans un délai de quarante-huit heures, afin que sa détention fasse l’objet d’un contrôle par les autorités judiciaires ; b) veiller à ce que tous les cas d’arrestation arbitraire donnent lieu à une enquête, à des sanctions disciplinaires et/ou à des poursuites judiciaires ; et c) faire en sorte que la détention ne soit pas utilisée comme une méthode d’intimidation. L’État partie devrait aussi prendre des mesures pour régler la situation des personnes maintenues en détention provisoire depuis de nombreuses années et modifier sa législation en vue de garantir que le temps passé en détention provisoire soit pris en compte dans le calcul de la durée de la peine .

Administration de la justice et procès équitable

34.Le Comité prend note des informations communiquées dans la déclaration sur le renforcement des capacités du Bureau du Directeur du parquet, mais il rappelle ses préoccupations (CCPR/C/BLZ/CO/1, par. 20) concernant le manque de ressources allouées à l’appareil judiciaire et les retards excessifs observés dans l’administration de la justice, en particulier à l’égard des personnes accusées de meurtre. Il regrette en outre que la législation de l’État partie limite l’aide juridictionnelle aux affaires portant sur des crimes passibles de la peine de mort et qu’elle ne garantisse pas systématiquement la représentation en justice des mis en cause, en particulier des mineurs qui risquent l’incarcération (art. 9 et 14).

35. Compte tenu de l’observation générale n o  32 du Comité, l’État partie devrait, dans toute la mesure possible, allouer des ressources budgétaires supplémentaires à l’administration de la justice, afin de réduire les retards excessifs, notamment dans les procédures pénales. Nonobstant sa réserve au paragraphe 3 d) de l’article 14, il devrait également garantir, dans la mesure du possible, le droit d’accorder le bénéfice de l’aide juridictionnelle aux mis en cause lorsque l’intérêt de la justice l’exige. Il devrait, en particulier, apporter aux mineurs une aide suffisante aux fins de la préparation et de la présentation de leur défense.

36.Le Comité note avec préoccupation que des enfants âgés de 12 à 14 ans peuvent voir leur responsabilité pénale engagée dès lors qu’ils ont été considérés comme ayant la maturité nécessaire pour comprendre la nature et les conséquences de leur comportement délictueux (art. 9 et 14).

37. L’État partie devrait relever l’âge de la responsabilité pénale de sorte qu’il soit conforme aux normes internationales.

Traite des êtres humains

38.Le Comité rappelle ses préoccupations (CCPR/C/BLZ/CO/1, par. 17) concernant : a) l’ampleur de la traite, notamment des femmes et des enfants à des fins d’exploitation économique et sexuelle ; b) l’application insuffisante de la loi de 2013 sur l’interdiction de la traite, à laquelle s’ajoutent le taux très faible de poursuites engagées et de condamnations prononcées dans des affaires de traite, et les sanctions clémentes prises à l’égard des trafiquants, qui sont notamment passibles d’amende ; et c) le peu de victimes repérées. Il est particulièrement préoccupé par les informations crédibles selon lesquelles il y aurait une tolérance de la part des agents de l’État à l’égard des infractions liées à la traite, certains d’entre eux s’en rendraient complices, et les responsables agiraient en toute impunité (art. 3, 7, 8 et 24).

39. L’État partie devrait : a) appliquer strictement son cadre juridique interne en matière de traite, en particulier la loi de 2013 sur l’interdiction de la traite ; b)  allouer des ressources financières, humaines et techniques suffisantes à l’Unité de lutte contre la traite des êtres humains ; c)  veiller à ce que les cas présumés de traite donnent lieu à une enquête, et à ce que les auteurs des faits soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, dûment punis, en particulier lorsqu’il s’agit de membres des forces de l’ordre ; et d) redoubler d’efforts pour repérer les victimes, leur accorder pleine réparation , et leur apporter la protection et l’aide dont elles ont besoin, notamment en se dotant de résidences protégées et de foyers d’accueil.

Refugiés, demandeurs d’asile et migrants

40.Le Comité se félicite de la remise en activité, en 2015, du Comité d’admission des réfugiés et, en 2016, du Département des réfugiés. Il est toutefois préoccupé : a) par le fait que très peu de personnes se sont vu accorder le statut de réfugié depuis 2015 ; b) par la situation d’un grand nombre de personnes qui, depuis 2015, ont fait l’objet d’une recommandation de la part du Comité d’admission des réfugiés aux fins de l’octroi du statut de réfugié et restent dans l’attente de l’approbation définitive du Secrétaire d’État à l’immigration. Il est aussi particulièrement préoccupé par l’application stricte du paragraphe 1 de l’article 8 de la loi sur les réfugiés (révisée en 2000), qui impose un délai très bref pour le dépôt d’une demande d’asile, à savoir quatorze jours à compter de l’entrée sur le territoire, sans exception, même pour les victimes de torture et de traite, les personnes gravement traumatisées et les mineurs non accompagnés. Le Comité note avec inquiétude que l’application actuelle du délai de quatorze jours expose les demandeurs d’asile à un risque de détention et de refoulement (art. 7, 9 et 13).

41.Le Comité est également préoccupé par l’incrimination des migrants en situation irrégulière prévue par la loi de 2000 sur l’immigration et s’inquiète d’apprendre que des migrants en situation irrégulière sont détenus pour une durée indéterminée, et que les mineurs non accompagnés sont détenus avec des condamnés et dans de mauvaises conditions. Il note aussi avec préoccupation que, selon la loi sur l’immigration, les migrants en situation irrégulière doivent quitter immédiatement le pays, reçoivent un ordre de quitter le territoire dans un délai de soixante jours et font l’objet de décisions de renvoi non susceptibles de recours (art. 7, 9, 10 et 13).

42. L’État partie devrait : a) doter le Comité d’admission des réfugiés et le Département des réfugiés de ressources suffisantes pour leur permettre d’exercer correctement leurs mandats et de réduire l’accumulation importante de demandes d’asile en attente de traitement ; b) prendre toutes les mesures voulues pour garantir l’équité de la procédure de détermination du statut de réfugié et le traitement rapide des demandes d’asile, notamment en faisant droit sans délai à toutes les demandes qui ont été approuvées par le Comité d’admission des réfugiés ; c) abroger le paragraphe 1 de l’article 8 de la loi sur les réfugiés et, entre-temps, s’abstenir de placer en détention et d’expulser les personnes qui disent craindre de retourner dans leur pays d’origine, sans leur avoir permis au préalable de bénéficier d’un examen au fond et en bonne et due forme de leur demande d’asile ; d) mettre sa législation et sa pratique en matière de détention de migrants en conformité avec les articles 9 et 10 du Pacte, compte tenu de l’observation générale n o  35 du Comité, notamment en veillant à ce que, lorsque la détention est justifiée (raisonnable, nécessaire et proportionnée), les migrants soient détenus séparément des condamnés.

Droits de l’enfant

43.Le Comité salue les efforts faits par l’État partie pour garantir l’enregistrement de toutes les naissances, mais il reste préoccupé par les informations selon lesquelles il serait difficile d’accéder aux services d’enregistrement dans les zones reculées. Il prend note de l’application des textes législatifs interdisant les châtiments corporels en milieu scolaire, mais il rappelle une nouvelle fois avec regret (CCPR/C/BLZ/CO/1, par. 18) que la législation autorise encore ces châtiments dans les familles, dans les structures de protection de remplacement et les garderies, et dans les établissements de détention pour mineurs (art. 7, 16 et 24).

44. L’État partie devrait : a) poursuivre ses efforts en vue de l’enregistrement de toutes les naissances, en particulier dans les zones rurales et reculées, notamment en mettant en place des services d’enregistrement mobiles ; b) prendre toutes les mesures voulues pour mettre fin aux châtiments corporels dans tous les contextes, notamment en abrogeant les dispositions du Code pénal qui autorisent le recours à ces châtiments ; et c) engager des campagnes de sensibilisation aux effets préjudiciables des châtiments corporels.

Droits des peuples autochtones

45.Le Comité note avec préoccupation qu’en dépit de l’ordonnance sur consentement rendue par la Cour de justice des Caraïbes le 22 avril 2015 dans l’affaire Maya Leaders Alliance et al. v. the Attorney General of Belize, le différend relatif à la reconnaissance des droits fonciers coutumiers du peuple autochtone maya n’a toujours pas été résolu. Il rappelle également ses préoccupations (CCPR/C/BLZ/CO/1, par. 25) au sujet des informations selon lesquelles des contrats et accords d’exploitation de ressources naturelles sur les terres coutumières ont été conclus sans consultation préalable du peuple autochtone maya (art. 27).

46. L’État partie devrait se conformer à l’ordonnance sur consentement rendue par la Cour de justice des Caraïbes et reconnaître et protéger les droits fonciers coutumiers des Mayas. Il devrait aussi garantir, en droit et dans la pratique, la tenue de c onsultations authentiques et de bonne foi avec le peuple autochtone m aya qui occupe les terres coutumières avant la conclusion d’accords de concession, aux fins de l’obtention du consentement préalable, libre et éclairé de ce peuple.

D.Diffusion et suivi

47.L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, de son rapport initial, des réponses écrites à la liste de points établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public afin de les sensibiliser aux droits consacrés par le Pacte.

48.Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie est invité à faire parvenir, d’ici au 2 novembre 2020, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 15 (discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre), 25 (obligation de protéger le droit à la vie) et 42 (refugiés, demandeurs d’asile et migrants).

49.Le Comité demande à l’État partie de lui soumettre son prochain rapport périodique le 2 novembre 2022 au plus tard et d’y faire figurer des renseignements précis et à jour sur la suite qu’il aura donnée aux autres recommandations formulées dans les présentes observations finales et sur l’application du Pacte dans son ensemble. Il demande également à l’État partie, lorsqu’il élaborera ce rapport, de tenir de vastes consultations avec la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays. Conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, ce document ne devra pas compter plus de 21 200 mots. L’État partie peut aussi indiquer au Comité, avant le 2 novembre 2019, qu’il accepte d’établir son rapport en suivant la procédure simplifiée. En pareil cas, le Comité transmet une liste de points à l’État partie avant que celui-ci ne soumette son rapport. Les réponses de l’État partie à cette liste constitueront son rapport périodique suivant à soumettre en application de l’article 40 du Pacte.