Nations Unies

CRC/C/CHL/CO/6-7

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

22 juin 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport du Chili valant sixième et septième rapports périodiques *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport du Chili valant sixième et septième rapports périodiques à ses 2614e et 2615e séances, les 24 et 25 mai 2022, et a adopté les présentes observations finales à sa 2630e séance, le 3 juin 2022.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport du Chili valant sixième et septième rapports périodiques, soumis au titre de la procédure simplifiée d’établissement des rapports, qui lui a permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité se félicite des diverses mesures législatives et institutionnelles ainsi que des mesures de politique générale prises par l’État partie pour mettre en œuvre la Convention, en particulier l’établissement du bureau du Médiateur pour les enfants (en 2018) et du Sous‑secrétariat à l’enfance (en 2018) et la création du Système de garanties et de protection intégrale des droits des enfants et des adolescents (en 2022). Il se félicite également de l’inscription des droits de l’enfant dans la nouvelle Constitution.

4.Le Comité prend note avec satisfaction de l’adhésion aux instruments ci-après :

a)La Convention relative au statut des apatrides (1954), en avril 2018 ;

b)La Convention sur la réduction des cas d’apatridie (1961), en avril 2018 ;

c)Le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en mars 2020.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

5.Le Comité rappelle à l’État partie le caractère indivisible et interdépendant de tous les droits consacrés par la Convention et souligne l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il appelle son attention sur les recommandations concernant les domaines ci-après, dans lesquels il est urgent de prendre des mesures : la liberté d’association et la liberté de réunion pacifique (par. 17), la violence à l’égard des enfants (par. 19), les enfants privés de milieu familial (par. 25), les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants (par. 35), les enfants autochtones (par. 37) et l’administration de la justice pour enfants (par. 40).

6. Le Comité recommande à l’État partie de garantir la réalisation des droits de l’enfant conformément à la Convention, au Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et au Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il le prie instamment de faire en sorte que les enfants participent activement à la conception et à la mise en œuvre des politiques et des programmes les concernant adoptés aux fins de la réalisation des 17 objectifs de développement durable.

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))

Législation

7. Saluant l’adoption de la loi n o 21.302 et de la loi n o 21.430 (loi sur les garanties), le Comité recommande à l’État partie d’appliquer rapidement ces lois dans toutes leurs dimensions afin d’assurer une meilleure protection des droits de l’enfant. Il lui recommande également d’élaborer des procédures pour l’évaluation des effets qu’ont sur les droits de l’enfant les lois et les politiques nationales et infranationales qui concernent les enfants.

Allocation de ressources

8. Renvoyant à son observation générale n o 19 (2016) sur l’élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l’enfant et rappelant ses recommandations précédentes, le Comité recommande à l’État partie :

a) De revoir à la hausse les allocations budgétaires dans tous les domaines et secteurs relatifs aux droits de l’enfant et continuer d’en assurer le suivi ;

b) De mettre en place des mécanismes permettant la participation effective des enfants aux processus et programmes budgétaires nationaux et locaux ;

c) De définir des lignes budgétaires pour tous les enfants, en accordant une attention particulière à ceux qui sont en situation de vulnérabilité ;

d) De veiller à ce que les allocations budgétaires destinées aux secteurs soutenant la réalisation des droits de l’enfant ne soient pas réduites lorsque les conditions économiques sont défavorables ou lors des situations d’urgence ;

e) D’utiliser des nomenclatures budgétaires qui permettent de rendre compte des dépenses liées aux droits de l’enfant, de les suivre et de les analyser ;

f) De mettre en place un système national permanent de suivi des investissements publics en faveur des enfants afin d’améliorer la responsabilité institutionnelle et la transparence, et de surveiller et d’évaluer l’adéquation, l’efficacité et l’équitabilité de la répartition des ressources allouées à la mise en œuvre de la Convention.

Collecte de données

9. S’il note que des progrès ont été faits en ce qui concerne les informations statistiques disponibles au sujet des enfants, notamment dans la loi sur les garanties, le Comité note avec préoccupation qu’il n’existe pas de système coordonné et intégré de collecte de statistiques complètes et ventilées sur les enfants. Il réitère ses recommandations précédentes et recommande à l’État partie :

a) De faciliter la coordination intersectorielle entre les différentes institutions publiques qui collectent des informations et de mettre en place un système normalisé, reposant sur des données probantes et permettant de procéder à des comparaisons pour contrôler périodiquement la réalisation des objectifs de développement durable et l’application du Programme 2030, et de permettre le fonctionnement adéquat du système de protection de l’enfance à tous les niveaux ;

b) De collecter des données ventilées par âge, sexe, genre, handicap, situation socioéconomique, nationalité, origine ethnique, ascendance autochtone, milieu rural/urbain, statut migratoire et emplacement géographique, pour tous les domaines couverts par la Convention ;

c) D’améliorer la collecte et l’analyse de données sur la discrimination à l’égard des enfants, la santé mentale, les jeunes enfants, les enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement, la pauvreté des enfants, les enfants dans le système judiciaire, les enfants dont la nationalité est inconnue, le travail des enfants et la violence à l’égard des enfants, y compris l’exploitation sexuelle, les mauvais traitements et la traite.

Mécanisme de suivi indépendant

10. S’il se félicite de l’établissement du Bureau du Médiateur pour les enfants et du statut constitutionnel qui a été conféré à celui-ci par la Convention constitutionnelle, le Comité est préoccupé par le budget qui lui est alloué et par la procédure de révocation dont le Médiateur a fait l’objet, et il recommande à l’État partie :

a) D’augmenter d’urgence les ressources humaines, techniques et financières dont dispose le Médiateur pour permettre l’établissement de bureaux dans tout le pays ;

b) De garantir la pleine indépendance du Bureau du Médiateur et de veiller à ce qu’il soit à même de s’acquitter de son mandat de manière autonome (conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris)).

Droits de l’enfant et entreprises

11. Le Comité prend note du plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme. Compte tenu des informations selon lesquelles le secteur des entreprises a des effets négatifs sur les droits de l’enfant et l’environnement, et la responsabilité juridique des entreprises est insuffisante, et rappelant ses précédentes recommandations, il recommande à l’État partie :

a) De continuer à revoir et à adapter son cadre législatif (civil, pénal et administratif) afin de garantir la responsabilité juridique des entreprises en ce qui concerne les normes internationales et nationales en matière de droits de l’homme, de travail, d’environnement et autres ;

b) D’exiger des entreprises qu’elles fassent preuve d’une diligence raisonnable dans leurs opérations en ce qui concerne les effets néfastes de la dégradation de l’environnement sur les droits de l’enfant  ;

c) De mettre en place des mécanismes de surveillance et d’évaluation permettant la conduite d’enquêtes sur les violations des droits de l’enfant et l’octroi de réparations, afin d’améliorer l’application du principe de responsabilité et la transparence ;

d) De renforcer et de garantir la participation des enfants au plan d’action national ;

e) De renforcer sa coopération internationale en matière de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants et les abus sexuels sur enfants dans le secteur du voyage et du tourisme dans le cadre d’accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux visant à prévenir et éliminer ces atteintes.

B.Définition de l’enfant (art. 1)

12. Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa législation afin de supprimer toutes les exceptions à l’interdiction du mariage de personnes de moins de 18 ans.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

13. Rappelant la cible 10.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les municipalités soient dotées d’un service de lutte contre la discrimination adapté aux enfants auprès duquel les enfants puissent facilement signaler les cas de discrimination, et de mécanismes permettant d’intervenir d’une manière efficace et adaptée aux enfants ;

b) De veiller à ce que des enquêtes soient menées sur les cas de discrimination à l’égard des enfants, notamment par des unités ou des enquêteurs spécialisés ;

c) D’évaluer, avec la participation d’enfants et d’acteurs de la société civile, les mesures visant à combattre la discrimination à l’égard des enfants en situation de vulnérabilité, de mesurer leurs effets et de les revoir si nécessaire ;

d) De veiller à ce que les enfants, en particulier les enfants handicapés, autochtones, demandeurs d’asile, migrants ou LGBTI, puissent effectivement, dans la pratique, accéder aux services d’éducation et de santé ;

e) Dans le contexte de la promulgation de la loi sur l’identité de genre, d’allouer un budget suffisant aux programmes d’accompagnement psychologique destinés aux enfants qui envisagent de changer de genre ;

f) D’élaborer des politiques et des mesures de sensibilisation visant à lutter contre les causes profondes de la discrimination de fait, en vue d’éliminer les stéréotypes, les préjugés et la discrimination visant, notamment, les enfants appartenant à des groupes minoritaires ;

g) De mettre un terme aux « contrôles d’identité préventifs » pour tous les enfants.

Intérêt supérieur de l’enfant

14. Le Comité prend note des programmes et des lois visant à protéger l’intérêt supérieur de l’enfant et à faire en sorte qu’il soit systématiquement pris en considération, et recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant soit systématiquement appliqué dans le cadre de la mise en œuvre des programmes et dans les procédures législatives, administratives et judiciaires, notamment dans les cas de séparation des enfants de leur famille, dans les divorces très conflictuels, dans le cas des enfants vivant en prison avec leur mère et dans le cas des enfants placés ou relevant du système de justice pour enfants ;

b) De fournir des conseils ou des outils à tous les professionnels travaillant au service ou au contact d’enfants pour les guider dans l’évaluation et la détermination de l’intérêt supérieur de l’enfant ;

c) De développer les programmes de défense juridique spécialisée dans tout l’État partie afin de garantir l’intérêt supérieur de tous les enfants en contact avec le système judiciaire.

Respect de l’opinion de l’enfant

15. Prenant note du programme « Mi Abogado  » et du fait que la loi n o 21.430 reconnaît le droit à une participation effective, le Comité recommande à l’État partie :

a) De s’attaquer à l’insuffisance de la représentation des enfants en justice, notamment dans les domaines de la protection et de la violence domestique ;

b) De continuer à promouvoir la participation effective de tous les enfants dans la communauté et à l’école ainsi que dans le cadre de l’élaboration des politiques aux niveaux municipal et national, en élaborant des outils pour la consultation des enfants sur les questions de politique nationale et en veillant à ce qu’il soit systématiquement tenu compte, dans les décisions publiques, des conclusions adoptées par les conseils d’enfants ;

c) De veiller à ce que tous les professionnels concernés qui travaillent au contact ou au service des enfants, y compris les juges, les enseignants et les professionnels de la protection de la jeunesse, reçoivent systématiquement une formation appropriée sur le droit de l’enfant d’être entendu et de voir son opinion prise en considération, compte tenu de son âge et de son degré de maturité.

D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)

Liberté d’association et liberté de réunion pacifique

16.Le Comité est profondément préoccupé par :

a)L’usage excessif et disproportionné de la force fait par les carabiniers et les violences sexuelles, actes de torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants dont ils se sont rendus coupables lors des manifestations (soulèvement social) qui ont débuté en 2019, et qui ont fait plus d’un millier de victimes chez les enfants, et l’usage permanent de la force que font les carabiniers lors des manifestations, notamment dans les écoles et dans les communautés autochtones ;

b)Le fait que l’actualisation des procédures des carabiniers concernant les enfants ne s’est pas traduite par une amélioration sensible de leur application, ni par l’adoption des mesures de réparation nécessaires pour les enfants concernés ;

c)Le niveau et la fréquence de la violence institutionnelle, et le fait que les affaires judiciaires progressent peu et très lentement ;

d)La promotion de lois qui portent atteinte à la liberté d’opinion, de mouvement et d’association et incriminent la contestation sociale, y compris celle des enfants.

17. Rappelant ses recommandations, le Comité prie instamment l’État partie :

a) De veiller à ce que les protocoles, les orientations et les procédures relatifs à la gestion des manifestations publiques, à la détention d’enfants, à l’usage excessif de la force, au harcèlement et aux violences sexuelles dans le contexte de manifestations pacifiques soient conformes à la Convention et à ce que le droit des enfants à la liberté de réunion pacifique soit constamment respecté dans la pratique ;

b) De veiller à ce que les violations des droits de l’homme commises lors du soulèvement social ou qui pourraient être commises lors de toute manifestation future fassent l’objet d’enquêtes indépendantes et approfondies et à ce que les auteurs de ces violations soient rapidement traduits en justice ;

c) De rendre publiques les conclusions des enquêtes menées sur les violences sexuelles infligées par des carabiniers à des filles pendant les manifestations ;

d) D’adopter des plans et des programmes de réparation complets pour les enfants victimes du soulèvement social ;

e) De veiller à ce que les enfants puissent exercer leur droit d’exprimer librement leur opinion et de s’associer avec leurs pairs sans subir de violence, d’abolir la loi n o 21.128 dite «  Aula Segura  » (pour des classes sûres) et de mettre un terme à son application dans les écoles.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39)

18.Le Comité note que le Bureau du Médiateur pour les enfants et l’institution nationale des droits de l’homme contribuent au suivi des cas de violence à l’égard d’enfants et promeuvent la tenue d’enquêtes et l’octroi de réparations. Cependant, il est vivement préoccupé par :

a)Les enfants décédés ou victimes de mauvais traitements alors qu’ils étaient confiés à des institutions publiques, qu’il s’agisse d’établissements offrant une protection de remplacement ou de centres de détention ;

b)Le niveau élevé et croissant de violence que subissent les enfants de la part des institutions, notamment à l’école, lors des manifestations publiques et dans les foyers d’accueil, et que subissent en particulier les enfants autochtones ;

c)Le fait que peu d’enquêtes sont menées et qu’aucune équipe juridique spécialisée n’est chargée des enquêtes visant des agents de l’État accusés d’usage disproportionné de la force et de violences sexuelles sur la personne d’enfants détenus ;

d)Le manque de progrès réalisés par l’État partie dans les domaines de l’établissement de la vérité, de la justice et des réparations pour les victimes de la violence institutionnelle.

19. Rappelant ses recommandations précédentes, et renvoyant à son observation générale n o 13 (2011) sur le droit de l’enfant d’être protégé contre toutes les formes de violence et à son rapport sur l’enquête concernant le Chili, menée en application de l’article 13 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications , et prenant note de la cible 16.2 des objectifs de développement durable concernant l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des enfants, le Comité prie instamment l’État partie :

a) De mettre en place des mécanismes de réparation pour les victimes, en donnant la priorité à leur droit d’être entendues et d’exprimer leur douleur, et de veiller à ce que tous les décès d’enfants survenus pendant que les intéressés étaient sous la responsabilité de l’État partie fassent l’objet d’une enquête rapide et impartiale menée par un organisme indépendant ;

b) De mener des enquêtes rapides et approfondies garantissant l’application du principe de responsabilité et l’absence d’impunité, notamment sur tous les actes de violence subis par des enfants lors des manifestations d’octobre 2019 et sur les violences commises sur la personne d’enfants par des carabiniers, et de veiller à ce que tous les carabiniers et tous les autres agents de l’État impliqués dans des actes de torture ou des traitements cruels ou dégradants visant des enfants soient poursuivis, sanctionnés et tenus de rendre des comptes ;

c) De mettre en place des mesures, y compris la création d’une équipe juridique indépendante spécialisée, pour assurer la protection des enfants victimes de violences physiques ou sexuelles de la part d’agents de l’État et leur assurer réparation ;

d) De veiller à ce que les enfants mapuches victimes de violences policières aient accès à un mécanisme de réparation bien établi ;

e) De veiller à ce que les stratégies de protection des enfants prévoient des activités permanentes de formation, de suivi et d’évaluation ;

f) De veiller à ce que le mécanisme national de prévention de la torture assure une surveillance permanente et en personne des droits de l’homme dans les centres hébergeant des jeunes, y compris les centres où des enfants sont détenus ;

g) De veiller à ce que des ressources soient allouées aux fins de l’application rapide de la loi portant création du système de garanties et de protection intégrale des droits des enfants et des adolescents, d’établir le droit des enfants à la protection contre la violence, y compris la violence psychologique, physique et sexuelle, et de prendre des mesures efficaces et rapides pour prévenir toutes les formes de violence à l’égard des enfants, enquêter sur les actes commis et punir leurs auteurs ;

h) De rendre publiques les informations figurant dans le système de base de données portant sur toutes les formes de violence à l’égard des enfants et de fournir des informations harmonisées pour tous les secteurs ;

i) De mettre en œuvre le plan visant à mettre fin à la violence institutionnelle dans les établissements offrant une protection de remplacement.

Exploitation sexuelle et abus sexuels

20.S’il prend note des mesures prises en matière d’application du principe de responsabilité pour les infractions sexuelles et des progrès réalisés dans l’application d’un nouveau modèle de prise en charge en institution, le Comité est préoccupé : par le risque d’une reproduction du modèle actuel à petite échelle ; par les enlèvements et le recrutement de filles placées en institution par des groupes criminels organisés à des fins d’exploitation sexuelle, et par l’apathie du système judiciaire, qui renvoie les enfants concernés dans les mêmes établissements ; par l’augmentation du nombre d’abus sexuels sur enfants, notamment sur des enfants de moins de 14 ans. Il prie instamment l’État partie :

a) De mettre en place une commission de la vérité qui soit indépendante, impartiale et dotée de fonds suffisants et soit chargée d’examiner tous les cas de maltraitance d’enfants en milieu institutionnel, y compris au sein de l’Église catholique et dans les centres de placement ;

b) D’allouer des ressources suffisantes, notamment au Bureau du procureur national, et de veiller à ce que les abus sexuels visant des enfants donnent rapidement lieu à des enquêtes et à des poursuites et à ce que les enfants concernés soient indemnisés et aient accès à des services de réadaptation ;

c) De permettre à tous les enfants victimes d’abus sexuels d’accéder à des voies de recours et de demander réparation, et de donner la priorité au droit des survivants d’être entendus ;

d) De renforcer les mesures prises pour lutter contre la violence commise par des groupes criminels, y compris l’utilisation d’enfants par des gangs et des réseaux de trafiquants, notamment à des fins d’exploitation sexuelle ;

e) De veiller à ce que les abus sexuels commis sur la personne d’enfants, y compris les abus sexuels commis dans le cercle de confiance, soient rapidement signalés, fassent l’objet d’une enquête et donnent lieu à des poursuites, selon une approche adaptée aux enfants et multisectorielle visant à éviter une réactivation du traumatisme chez l’enfant ;

f) De considérer comme procédure standard la pratique consistant à reconnaître comme preuve principale l’enregistrement audiovisuel du témoignage d’un enfant, suivi sans délai d’un contre-interrogatoire mené dans des locaux adaptés aux enfants.

Châtiments corporels

21. Tout en prenant note avec s atisfaction de l’article 36 de la loi sur les garanties et la protection intégrale, qui protège les enfants contre la violence, le Comité recommande à l’État partie d’appliquer rapidement des politiques et des protocoles et de prendre sans tarder des mesures efficaces pour sensibiliser la population aux effets néfastes des châtiments corporels et promouvoir des formes positives, non violentes et participatives d’éducation et de discipline.

Pratiques préjudiciables

22. Prenant note des mesures adoptées pour mettre un terme au traitement préjudiciable des enfants intersexes, le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les enfants intersexes ne soient pas soumis à des traitements médicaux ou chirurgicaux non nécessaires, conformément au droit de l’enfant à l’intégrité corporelle, à l’autonomie et à l’ autodétermination ;

b) D’enquêter sur les cas dans lesquels des enfants intersexes ont fait l’objet d’interventions chirurgicales et de traitements médicaux sans y avoir consenti en connaissance de cause et d’offrir une réparation aux victimes de telles pratiques, y compris une indemnisation adéquate.

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))

Milieu familial

23. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De garantir un ensemble minimal de services de protection sociale et l’accès à des services intégrés de qualité tels que la nutrition, la santé, l’éducation, la sécurité sociale et le logement, à toutes les familles avec enfants qui sont vulnérables sur le plan socioéconomique, en mettant l’accent sur celles qui vivent dans la pauvreté ou l’extrême pauvreté ;

b) De renforcer les programmes de soutien à la parentalité destinés à développer les aptitudes et les compétences parentales afin de garantir une éducation de l’enfant fondée sur les droits ;

c) De renforcer les mesures législatives et politiques visant à encourager les pères à assumer leur rôle parental.

Enfants privés de milieu familial

24.S’il prend note de la fermeture de grands centres de placement, de l’augmentation du nombre d’enfants confiés à une famille et des mesures prises par l’État partie pour remédier aux violations systématiques des droits des enfants dont il a la charge, le Comité reste profondément préoccupé par :

a)Les retards dans la mise en place de la nouvelle administration de la protection de l’enfance ;

b)L’absence de garanties adéquates et de critères clairs concernant le placement des enfants en dehors du milieu familial ;

c)Les progrès limités enregistrés dans l’application du plan national de désinstitutionnalisation, sachant que l’examen et l’adoption des projets de loi ont pris du retard ;

d)Les difficultés d’accès à la prise en charge familiale et aux services visant à prévenir les séparations ;

e)Les problèmes relatifs à la mise en place des résidences familiales, à leur fonctionnement et à l’établissement de leurs responsabilités, notamment l’augmentation du nombre de cas de violence psychologique, physique et sexuelle, et d’exploitation sexuelle à des fins commerciales ;

f)Le décès d’enfants bénéficiant d’une protection de remplacement ;

g)La qualité de la prise en charge assurée dans les centres de placement, notamment en ce qui concerne les soins de santé et les soins de santé mentale destinés aux enfants handicapés ;

h)L’application limitée des recommandations formulées par le Comité dans son rapport sur l’enquête concernant le Chili, menée en application de l’article 13 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications.

25. Le Comité rappelle ses recommandations précédentes et prie instamment l’État partie :

a) D’accélérer la mise en place de la nouvelle administration de la protection de l’enfance, qui repose sur un nouveau modèle de recrutement, de sélection et de formation continue de l’ensemble du personnel et des cadres qui travaillent dans les résidences et les centres de détention ;

b) D’allouer en priorité des ressources à la fermeture des grands centres de placement et d’allouer des fonds suffisants aux familles pour promouvoir et soutenir la prise en charge des enfants dans un environnement familial et leur retour dans leur famille ;

c) D’appliquer un mode de gestion clair des cas individuels des enfants nécessitant une prise en charge, en donnant la priorité à l’intérêt supérieur de chaque enfant, y compris pendant les procédures judiciaires ;

d) De renforcer encore son système de placement en famille d’accueil, en vue de mettre fin au placement de jeunes enfants en institution ;

e) De veiller à ce que les enfants placés dans des établissements d’accueil ou des établissements de santé mentale aient accès à la justice, notamment à l’assistance d’un conseil qualifié qui les considère comme des sujets dans les procédures judiciaires, et à ce que les décisions prises à leur sujet puissent être réexaminées ;

f) De renforcer le mécanisme de plaintes afin de garantir la confidentialité de la procédure et l’anonymat des plaignants, et de publier le nombre de plaintes reçues, l’issue des enquêtes et les sanctions appliquées ;

g) D’enquêter sur les violations systématiques commises à l’égard d’enfants par des agents de l’État et par des salariés d’organisations privées subventionnées par l’État, et de remédier à ces violations ;

h) D’éviter les transferts fréquents d’enfants dans le système de protection de remplacement, de fournir des soins de santé mentale en temps opportun, et de contrôler et d’évaluer régulièrement la qualité de la prise en charge assurée par les centres de protection de remplacement ;

i) D’adopter un plan d’action (contenant un diagnostic, des informations sur les lacunes en matière de couverture, les processus de gestion des cas particuliers, les mesures correctrices et les délais) pour réduire les listes d’attente des programmes ambulatoires pour les enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement ;

j) D’appliquer rapidement les recommandations formulées par le Comité dans son rapport d’enquête concernant le Chili et de l’informer des mesures prises à ce jour ;

k) De renforcer, notamment en revoyant à la hausse les fonds alloués à cet effet, les mesures visant à faire en sorte que les enfants qui quittent le système de protection de remplacement aient accès à des services d’enseignement, puissent acquérir des compétences et aient des possibilités de vie autonome.

Adoption

26. Le Comité note que des projets de loi sur l’adoption sont à l’examen depuis huit ans et prie instamment l’État partie :

a) D’élaborer des procédures d’adoption transparentes et efficaces pour garantir que l’intérêt supérieur des enfants est une considération primordiale et que, le cas échéant, le processus d’adoption est mené à bien sans retard excessif ;

b) De veiller à ce que les frais des services d’adoption ne constituent pas un obstacle à l’adoption ;

c) De veiller à ce que l’adoption d’enfants ne soit jamais synonyme de vente d’enfants.

Enfants dont les parents sont incarcérés

27. Compte tenu de la réponse de l’État partie, le Comité recommande l’adoption de mesures visant à remédier rapidement à l’insuffisance de la prise en charge psychosociale résultant de la récente réforme juridique.

G.Enfants handicapés (art. 23)

28. S ’ il prend note de la loi de 2015 sur l ’ éducation inclusive, le Comité constate avec préoccupation qu ’ elle est peu appliquée et qu ’ un nombre élevé d ’ enfants handicapés ne sont toujours pas scolarisés. Il recommande à l ’ État partie :

a) De prendre des mesures immédiates pour garantir l’accès des enfants handicapés aux soins de santé, notamment aux soins de santé mentale et aux programmes de dépistage et d’intervention précoces, ainsi qu’à des matériels orthopédiques et à d’autres équipements d’assistance ;

b) D’adopter une réglementation stricte pour interdire la stérilisation forcée des filles handicapées et de mettre en place des systèmes garantissant qu’aucune intervention de ce type ne sera plus jamais réalisée ;

c) De veiller à ce que tous les enfants handicapés, y compris ceux qui ont un handicap intellectuel ou psychosocial, aient accès à une éducation inclusive à tous les degrés d’enseignement et en tirent bénéfice ;

d) De mettre en place un plan et d’élaborer des mesures visant à garantir une éducation inclusive à tous les degrés d’enseignement, notamment d’adapter les programmes scolaires et de former des enseignants et des professionnels spécialisés qui seront affectés aux classes intégrées afin que les enfants qui ont des difficultés d’apprentissage bénéficient d’un soutien individuel et de l’attention nécessaire ;

e) De recueillir et de publier des données ventilées sur la situation des enfants handicapés ;

f) De mettre un terme au placement des enfants handicapés en institution.

H.Santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Santé, santé mentale et services de santé

29. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De redoubler d’efforts pour assurer rapidement l’accès à des services de santé de qualité, y compris des services de santé mentale, à tous les enfants quel que soit leur âge, y compris à ceux qui font l’objet d’un placement, et de fournir des données sur les résultats découlant de l’amélioration de la santé mentale ;

b) De continuer de lutter contre le surpoids et l’obésité chez les enfants et de promouvoir un mode de vie sain, notamment en réglementant le marketing des aliments mauvais pour la santé qui cible les enfants, en sensibilisant le public aux questions de nutrition et en élaborant des politiques intersectorielles relatives à la santé nutritionnelle ;

c) De publier les résultats du guide pour la prévention des comportements suicidaires, de garantir l’accès à des services de santé complets et la détection précoce, notamment à l’école, et de continuer à soutenir la ligne d’assistance téléphonique pour la prévention du suicide, accessible 24 heures sur 24 ;

d) De fournir des soins et des réparations adéquats aux enfants exposés à des substances nocives, notamment le dioxyde de soufre ;

e) De renforcer les efforts visant à prévenir et à combattre la consommation élevée et croissante de drogues, d’alcool et de tabac chez les enfants ; d’assurer le repérage précoce et l’orientation vers les services adéquats ; de mettre en place des services de traitement de la toxicomanie et de réduction des risques qui soient accessibles et adaptés aux jeunes ;

f) De veiller à ce que les enfants autochtones aient accès à des services de santé de qualité qui soient adaptés à leur culture et fournis dans leur langue.

Santé des adolescents

30. Prenant note de la loi qui dépénalise l’avortement dans trois cas, et rappelant son observation générale n o 20 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l’enfant pendant l’adolescence et ses recommandations précédentes, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’adopter une politique de santé sexuelle et procréative ciblant les adolescents qui soit complète et efficace et qui tienne compte des questions de genre ;

b) D’élaborer une stratégie visant à promouvoir les interruptions volontaires de grossesse dans les hôpitaux qui ne les pratiquent pas au titre de l’objection de conscience ;

c) D’adopter la loi sur l’éducation sexuelle intégrée, de mettre en place des cours d’éducation à la santé sexuelle et procréative pour tous les degrés d’enseignement et de veiller à ce qu’y soient traitées, d’une manière adaptée à l’âge des élèves, les questions de l’égalité des sexes, de la diversité sexuelle, des droits en matière de santé sexuelle et procréative, de la procréation responsable, des comportements sexuels responsables et de la prévention de la violence ;

d) De renforcer, pour tous les adolescents qui pourraient en avoir besoin, l’accès aux services de santé sexuelle et procréative, y compris l’avortement sécurisé et les services après avortement ;

e) De dépénaliser l’avortement en toutes circonstances, de supprimer l’objection de conscience et de garantir l’accès des adolescentes à un avortement sécurisé et à des soins après avortement, en veillant à ce que leur opinion soit toujours entendue et dûment prise en compte dans le cadre de la prise de décisions ;

f) De veiller à ce que les contraceptifs modernes soient abordables et accessibles pour tous les adolescents, en particulier dans les zones rurales ou reculées.

Niveau de vie

31. Le Comité salue les mesures prises pour lutter contre la pauvreté touchant les enfants mais constate avec préoccupation que le nombre total d’enfants vivant dans la pauvreté reste élevé. Rappelant la cible 1.2 des objectifs de développement durable, il recommande à l’État partie :

a) De renforcer encore ses politiques visant à garantir à tous les enfants un niveau de vie suffisant, y compris en augmentant les prestations sociales pour les familles à faible revenu avec enfants, en simplifiant les procédures de demande d’aide financière, en renforçant le système de prestations familiales dans tous les départements, en élaborant des mesures visant à prévenir le sans-abrisme et en augmentant les allocations budgétaires destinées au système de prestations ;

b) De renforcer les mesures visant à offrir aux familles dans le besoin un logement social adéquat à long terme ainsi que d’autres mesures de soutien, en vue de faire reculer le sans-abrisme et de garantir l’accès des enfants à un logement adéquat ;

c) D’adopter une approche intégrée de la lutte contre la pauvreté touchant les enfants qui soit orientée sur le développement et accorde une attention particulière aux enfants issus de familles défavorisées, notamment les enfants de familles monoparentales, les enfants des familles qui dépendent de l’aide sociale, les enfants migrants, les enfants sans titre de séjour et les enfants qui vivent dans des foyers d’accueil ;

d) De mesurer les effets des mesures visant à lutter contre la pauvreté, y compris tout effet négatif sur la jouissance d’autres droits, afin de faire en sorte que ces mesures soient complètes et reposent sur une approche fondée sur les droits de l’enfant ;

e) D’accroître l’accès aux services d’assainissement, en particulier dans les zones rurales, parallèlement à l’amélioration des subventions ;

f) De donner la priorité à la fourniture d’une eau potable adéquate, correctement traitée et sûre, ainsi qu’à l’accès aux denrées alimentaires et à la disponibilité de ces denrées à un prix abordable ;

g) De veiller à ce que les enfants qui vivent dans la pauvreté ainsi que leur famille reçoivent un soutien financier suffisant et bénéficient de services gratuits et accessibles, sans discrimination.

Salubrité de l’environnement

32. Le Comité prend note de l’inaction de l’État partie face aux dommages causés à l’environnement et de la lenteur des progrès accomplis par rapport à ses objectifs déclarés dans le domaine des énergies renouvelables et à l’engagement qu’il a pris d’opérer une transition vers un modèle énergétique à faible émission de carbone, et recommande à l’État partie :

a) De renforcer et mettre en œuvre le plan actuel de restauration et de réparation de l’environnement pour la population de Quintero et de Puchuncaví , d’améliorer l’efficacité des stations de surveillance des polluants et d’offrir réparation pour les épisodes de pollution ;

b) D’accélérer la mise en œuvre des plans annoncés en matière d’énergies renouvelables et de réduction des émissions de carbone, conformément à ses engagements internationaux ;

c) De prendre des mesures immédiates concernant les conséquences de la dégradation de l’environnement dans les « zones sacrifiées » pour la santé des enfants ;

d) D’améliorer la qualité de l’air dans les grandes zones urbaines, notamment dans des villes telles que Santiago.

I.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation, buts de l’éducation et éducation aux droits de l’homme

33. S’il salue l’augmentation des dépenses publiques consacrées à l’éducation ainsi que l’adoption de la première Stratégie nationale pour l’enseignement public (2020 ‑ 2028), le Comité note avec préoccupation qu’une forte proportion d’élèves n’ont pas eu accès à un enseignement en ligne pendant la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19) et, rappelant ses recommandations précédentes, recommande à l’État partie :

a) De prendre des mesures pour remédier aux carences d’apprentissage subies par les enfants pendant la pandémie de COVID-19 et d’adopter des plans d’urgence pour assurer la continuité de l’enseignement dans les situations d’urgence, y compris pendant les pandémies et dans le contexte des mouvements de contestation sociale ;

b) D’assurer la gratuité de l’enseignement et d’améliorer encore l’accessibilité et la qualité de l’enseignement, et d’assurer une formation de qualité aux enseignants, en mettant particulièrement l’accent sur les élèves handicapés et les élèves des zones rurales ;

c) D’associer les élèves à l’évaluation des effets de la Stratégie nationale pour l’enseignement public et d’accorder le poids voulu à leur opinion ;

d) De renforcer l’enseignement des droits de l’enfant et de la Convention dans les programmes scolaires de tous les établissements d’enseignement obligatoire, y compris les institutions d’accueil, et dans la formation des enseignants et des professionnels de l’éducation ;

e) D’actualiser les programmes scolaires afin qu’ils soient adaptés à un contexte en évolution rapide, et d’encourager la participation directe des enfants en ce qui concerne les questions qui les intéressent et la protection de l’environnement dans le cadre de leur processus d’apprentissage ;

f) De veiller à ce que tous les établissements scolaires soient dotés de règles internes concernant le maintien dans l’établissement des adolescentes enceintes et des mères adolescentes et l’appui dont elles doivent bénéficier ;

g) De renforcer les efforts visant à faire reculer la violence à l’école, d’organiser des ateliers d’information sur les pratiques de règlement pacifique des différends à l’intention des enfants afin de développer leurs compétences, et d’élaborer un registre permanent et intégré des cas de violence à l’égard des enfants ;

h) De mettre en place des infrastructures de qualité qui facilitent l’accès des enfants à des activités récréatives gratuites et adaptées.

J.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 b) à d) et 38 à 40)

Enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants

34.Le Comité prend note de l’amélioration de l’accès des enfants migrants aux services sociaux et de la nouvelle loi sur les migrations, qui fait de l’intérêt supérieur de l’enfant un principe directeur, assure l’accès des enfants, quel que soit leur statut au regard de la législation sur l’immigration, aux soins de santé, à l’éducation et aux prestations sociales, et prévoit des garanties visant à prévenir l’apatridie. Cependant, il note avec une vive préoccupation :

a)Que la loi sur les migrations ne prévoit pas de garanties particulières propres à protéger les droits des enfants ayant besoin d’une protection internationale ;

b)Que, dans la pratique, les enfants migrants n’ont pas accès à certaines prestations, notamment celles qui sont liées à l’inscription au registre social des ménages, qui suppose que le chef de famille soit en situation régulière ;

c)Que les enfants entrés de manière irrégulière dans le pays ou dont les parents ne sont pas en situation régulière ont un accès limité aux services tels que l’éducation, les soins de santé et le logement ;

d)Que des visas ne sont accordés au titre du regroupement familial qu’aux enfants dont les parents ou les autres personnes qui en ont la charge ont un visa permanent ;

e)Que le nombre d’enfants vénézuéliens refoulés est en augmentation et que les demandes d’asiles soumises à la frontière sont systématiquement rejetées ;

f)Qu’un grand nombre d’enfants et de familles vénézuéliens sont bloqués à la frontière à Tacna-Chacalluta (Pérou-Chili) et Pisiga-Colchane (État plurinational de Bolivie‑Chili) en application du décret no 42.386 et de la suspension du visa de responsabilité démocratique en ce qui concerne les Vénézuéliens ;

g)Que les enfants en situation irrégulière sont traités comme des délinquants et sont victimes, comme leur famille, de discrimination et de xénophobie ;

h)Que des camps de migrants sont gérés par des entreprises privées sans compétences en matière de droits de l’enfant ;

i)Que certains enfants qui n’ont pas, dans la pratique, accès à une nationalité.

35. Compte tenu des observations générales conjointes n o 3 et n o 4 (2017) du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille/n o 22 et n o 23 (2017) du Comité des droits de l’enfant concernant les droits de l’homme des enfants dans le contexte des migrations internationales, le Comité prie instamment l’État partie :

a) De modifier la loi sur les migrations afin d’y inscrire des garanties relatives aux conditions d’entrée, des procédures qui tiennent compte des besoins particuliers des enfants et le plein respect du principe de non-refoulement ;

b) D’améliorer les conditions d’accueil des enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, y compris les enfants sans papiers et les enfants séparés ; de garantir la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant en tant que considération primordiale dans le cadre de la procédure de détermination de l’âge ; de fournir une aide juridictionnelle gratuite, des services d’interprétation et d’autres formes d’assistance appropriées ;

c) De considérer que les enfants migrants font partie d’une famille et que les décisions prises par l’État partie à l’égard des membres de leur famille ont un impact direct sur eux, en particulier lorsqu’une expulsion est envisagée, et donc d’évaluer chaque situation individuellement au moment de la prise de décision ou pendant les procédures d’expulsion, et de veiller à la régularité de la procédure, y compris en procédant à l’évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant et en tenant compte du droit de l’enfant à une vie de famille ;

d) De faciliter l’accès des enfants ayant besoin d’une protection internationale au système d’asile, conformément aux articles 6, 22 et 37 de la Convention et à son observation générale n o 6 (2005) sur le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine ;

e) D’adopter des mesures permettant à tous les enfants, quel que soit leur statut migratoire, de bénéficier sans discrimination des prestations liées à l’inscription au registre social des ménages ;

f) De faciliter la réunification des enfants avec leurs parents et d’accorder des visas au titre du regroupement familial aux enfants, indépendamment du statut migratoire ou du titre de séjour de leurs parents ;

g) D’établir des statistiques ventilées par sexe et par âge sur le nombre actuel d’enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou apatrides, d’enfants non accompagnés ou séparés, et d’enfants qui n’ont pas été autorisés à soumettre une demande d’asile, et de tenir expressément compte de ces groupes dans les activités de planification et dans les indicateurs économiques et sociaux et les données statistiques ;

h) De mettre fin aux retours forcés des familles et des enfants en situation de migration et de veiller à ce qu’ils soient individuellement identifiés, enregistrés et protégés contre le refoulement, notamment en leur offrant un accès effectif aux procédures d’asile ;

i) D’envisager d’enregistrer tous les enfants migrants et de les aider à régulariser leur situation dans le pays, notamment en leur fournissant les documents requis ; d’élaborer des politiques publiques d’intégration, de diffusion et de promotion des droits des migrants et de coordonner l’application de mesures avec les communautés, la société civile et les organisations autonomes de défense des droits de l’homme pour mettre fin à la discrimination et à la xénophobie à l’égard des migrants, y compris les enfants en situation irrégulière ;

j) De confier la gestion des camps de migrants à des organisations dotées de compétences en matière de droits de l’homme et de protection des migrants ;

k) D’inscrire le droit à une nationalité, des garanties juridiques propres à prévenir l’apatridie et des procédures de détermination de l’apatridie dans la loi sur les garanties de protection des enfants.

Enfants autochtones

36.Le Comité est profondément préoccupé par :

a)Le fait que, depuis toujours, les enfants des peuples autochtones sont abandonnés et négligés, ce qui fait qu’ils sont parmi les personnes les plus pauvres de la société chilienne, et la violence institutionnelle exercée par l’État partie à leur égard ;

b)Le grand nombre d’actions judiciaires engagées pour des crimes graves visant des enfants mapuches ;

c)Le fait que les enfants autochtones n’ont pas accès dans des conditions d’égalité avec les autres aux soins de santé, à l’éducation et à la protection sociale.

37. Rappelant ses recommandations précédentes, le Comité prie instamment l’État partie :

a) De mettre un terme à toutes les violences commises par les forces de sécurité contre des enfants autochtones et leur famille, notamment dans la région du Biobío et dans la région de l’Araucanie, et de protéger les enfants mapuches qui ont été témoins ou victimes directes de violences, de discriminations et d’abus de pouvoir ;

b) D’accompagner et surveiller périodiquement les institutions publiques qui travaillent auprès des enfants mapuches ;

c) De veiller à ce que tous les enfants autochtones soient considérés comme un groupe prioritaire dans les politiques et programmes publics et aient de facto accès aux services de santé, d’éducation et de protection sociale, sans discrimination, et à ce que le principe d’interculturalité soit mis en pratique dans ces domaines.

Enfants en situation de rue

38. Renvoyant à son observation générale n o 21 (2017) sur les enfants en situation de rue et réitérant ses précédentes recommandations, le Comité recommande à l’État partie d’améliorer les politiques globales de protection des enfants en situation de rue.

Administration de la justice pour enfants

39.S’il prend note des débats portant sur la réforme de la loi no 20.084, le Comité relève avec une vive préoccupation :

a)Que l’adoption des projets de loi relatifs à la justice pour enfants a pris du retard ;

b)Que la réforme ne prévoit pas de critères clairs pour l’application des mesures privatives de liberté, et qu’aucun délai maximum n’a été établi pour les admissions provisoires ;

c)Qu’il n’existe pas de mécanisme de plainte anonyme et sûr auquel les enfants en conflit avec la loi pourraient avoir accès ;

d)Que les conditions de vie des enfants sont précaires dans les centres de détention, qui se caractérisent notamment par l’insalubrité des locaux et l’absence d’espaces de loisirs et d’espaces destinés aux adolescentes enceintes et aux mères, et que les enfants placés en détention préventive côtoient les enfants qui purgent une peine ;

e)Qu’une utilisation disproportionnée est faite de la mesure préventive qu’est le placement d’enfants en détention provisoire en centre de détention.

40. Compte tenu de son observation générale n o 24 (2019) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour enfants et de la loi n o 20.084, le Comité prie instamment l’État partie :

a) D’adopter rapidement des lois sur la justice pour enfants et de veiller à ce que tous les principes et dispositions de la Convention y soient pleinement pris en compte ;

b) D’améliorer les procédures judiciaires spécialisées pour les enfants, notamment en créant un mécanisme de plainte sûr et transparent pour les enfants, et d’affecter à ces procédures des ressources humaines, techniques et financières adéquates ;

c) De désigner des juges pour enfants spécialisés et veiller à ce qu’ils reçoivent une formation appropriée sur les droits de l’enfant ;

d) D’encourager le recours à des mesures non judiciaires telles que la déjudiciarisation, la médiation et l’accompagnement pour les enfants accusés d’infractions pénales et, lorsque cela est possible, l’application de peines non privatives de liberté telles que la probation ou les travaux d’intérêt général ;

e) De veiller à ce que la détention soit une mesure de dernier recours imposée pour la période la plus courte possible et réexaminée à intervalles réguliers en vue d’être levée ;

f) De garantir que, lorsqu’un enfant est placé en détention, la loi est effectivement respectée et l’enfant peut avoir immédiatement accès à l’assistance d’un conseil ;

g) De garantir aux enfants soupçonnés, accusés ou reconnus coupables d’une infraction pénale l’assistance d’un conseil qualifié dès le début de la procédure judiciaire et tout au long de celle-ci ;

h) D’améliorer les conditions de vie dans les centres de détention pour les enfants qui doivent être privés de liberté, en garantissant l’accès à l’éducation, aux soins de santé et à la formation professionnelle, et de garantir la sécurité physique et le bien ‑ être des enfants dans ces centres ;

i) De veiller à ce que les enfants placés en détention provisoire soient séparés des enfants qui purgent une peine.

Enfants victimes ou témoins d’infractions

41. Rappelant ses recommandations précédentes, le Comité prie instamment l’État partie :

a) De renforcer les mesures visant à assurer aux enfants victimes ou témoins d’infractions une protection adéquate et l’accès à des services de réadaptation et à prévenir la revictimisation des enfants pendant la procédure judiciaire ;

b) De réduire la durée des enquêtes dans les affaires d’exploitation sexuelle d’enfants et d’abus sexuels sur enfants, et de réglementer le déroulement des enquêtes et de la procédure pénale pour assurer l’exercice effectif du droit d’accès à la justice ;

c) D’améliorer le programme de protection des victimes et des témoins, notamment en prévoyant des mesures de protection particulières pour les enfants, en particulier pour les enfants victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales, et de veiller à ce que les enfants victimes aient un accès immédiat aux programmes.

K.Suite donnée aux précédentes observations finales et recommandations du Comité portant sur l’application des Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention

Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

42. Rappelant ses observations précédentes, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’incriminer tous les actes visés à l’article 3 du Protocole facultatif qui sont commis ou dont la commission est facilitée par les technologies de l’information et de la communication, ainsi que le fait d’utiliser, de procurer ou d’offrir une personne de moins de 18 ans aux fins d’activités illicites ;

b) De veiller à ce que les fournisseurs d’accès à Internet contrôlent, bloquent et suppriment rapidement les contenus présentant des abus sexuels et de proposer, dans le cadre de la formation obligatoire des agents de la force publique, des avocats, des magistrats et des autres professionnels concernés, des outils visant à faciliter le repérage des victimes et les opérations de sauvetage.

Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

43. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place un mécanisme permettant de repérer rapidement, avant leur entrée sur le territoire de l’État partie, les enfants susceptibles d’avoir participé à des conflits armés à l’étranger et de veiller à ce que ces enfants bénéficient de mesures de réadaptation sociale et psychologique et de réinsertion sociale.

L.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

44. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, instrument relatif aux droits de l’homme fondamental auquel il n’est pas encore partie, afin de renforcer encore le respect des droits de l’enfant.

M.Coopération avec les organismes régionaux

45. Le Comité recommande à l’État partie de continuer de coopérer avec l’Organisation des États américains (OEA) à la mise en œuvre de la Convention et d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme, à la fois sur son territoire et dans d’autres États membres de l’OEA.

IV.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

46. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement mises en œuvre. Il recommande également que le rapport valant sixième et septième rapports périodiques, les réponses écrites de l’État partie et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.

B.Mécanisme national d’établissement des rapports et de suivi

47. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place un mécanisme national d’établissement des rapports et de suivi, en tant qu’organisme permanent de l’État, qui soit chargé de coordonner et d’élaborer les rapports devant être présentés aux mécanismes internationaux et régionaux des droits de l’homme et de nouer un dialogue avec ces mécanismes, et de coordonner et suivre l’exécution des obligations conventionnelles et la mise en œuvre des recommandations et des décisions émanant desdits mécanismes. Il souligne que cette structure devrait être appuyée de manière appropriée et en permanence par un personnel qui lui soit spécialement affecté et devrait être à même de consulter systématiquement les institutions nationales des droits de l’homme et la société civile.

C.Prochain rapport

48.Le Comité invite l’État partie à soumettre son huitième rapport périodique le 11 septembre 2027 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devra être conforme aux directives spécifiques à l’instrument et ne pas dépasser 21 200 mots . Si l’État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur. S’il n’est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d’examen par le Comité ne pourra pas être garantie.

49. Le Comité invite en outre l’État partie à soumettre un document de base actualisé qui ne dépasse pas 42 400 mots et soit conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports à présenter en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument , et au paragraphe 16 de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale.