Nations Unies

CAT/C/PER/6

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

15 septembre 2011

Français

Original: espagnol

Comité contre la torture

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19 de la Convention

Sixième rapport périodique de l’État partie attendu en 2009; le présent rapport est soumisen réponse à la liste des points à traiter (CAT/C/PER/Q/6) transmise à l’État partie conformément à la procédure facultative d’établissement des rapports (A/62/44, par. 23 et 24)

Pérou * , ** , ***

[28 juillet 2011]

Table des matières

Paragraphes Page

Institutions qui ont participé à l’établissement du présent rapport3

Sigles et abréviations3

I.Présentation1−75

II.Renseignements relatifs aux articles de la Convention8−2626

A.Article 29−726

B.Article 373−9616

C.Article 497−9920

D.Article 10100−11721

E.Article 11118−15425

F.Article 13155−16631

G.Article 14167−22233

H.Article 15223−22643

I.Article 16227−23844

J.Divers239−25146

K.Renseignements d’ordre général sur la situationdes droits de l’homme dans le pays, y compris surles nouvelles mesures relatives à la mise en œuvrede la Convention252−26248

Institutions qui ont participé à l’établissementdu présent rapport

Institutions de l’État

Ministère de l’environnement

Ministère de l’énergie et des mines

Ministère de la défense

Ministère de l’intérieur

Ministère de la justice

Ministère de la condition féminine et du développement social

Ministère des relations extérieures

Ministère de la santé

Ministère public

Pouvoir judiciaire

Présidence du Conseil des ministres

Institut de médecine légale

Institut national pénitentiaire

Sigles et abréviations

Instruments nationaux

PNDHPlan national relatif aux droits de l’homme

Organismes internationaux

CIDHCommission interaméricaine des droits de l’homme

CoIDHCour interaméricaine des droits de l’homme

Institutions de l’État

AMAGÉcole de la magistrature

CENECPCentre national d’études criminologiques et pénitentiaires

CNDHConseil national des droits de l’homme

CMANCommission multisectorielle de haut niveau

CRConseil des réparations

DPBureau du Défenseur du peuple

EPArmée de terre

FAPForces aériennes

IMLInstitut de médecine légale

INPEInstitut national pénitentiaire

MEFMinistère de l’économie et des finances

MINDEFMinistère de la défense

MININTERMinistère de l’intérieur

MINJUSMinistère de la justice

MIMDESMinistère de la condition féminine et du développement social

MGPMarine de guerre du Pérou

MPMinistère public

MREMinistère des relations extérieures

RUVRegistre unique des victimes

PCMPrésidence du Conseil des ministres

PJPouvoir judiciaire

PNPPolice nationale

TCTribunal constitutionnel

Organisations non gouvernementales internationales et nationales

CICRComité international de la Croix-Rouge

CNDDHHCoordination nationale des droits de l’homme

COMISEDHCommission des droits de l’homme

Autres

CVRCommission Vérité et Réconciliation

Législation et réglementation

CdPPCode de procédure pénale

CEPCode d’exécution des peines

CPCCode de procédure constitutionnelle

CPCode pénal

D. Leg.Décret législatif

D. S.Décret suprême

NCPPNouveau code de procédure pénale

R.M.Arrêté ministériel

I.Présentation

1.En ratifiant la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après la «Convention contre la torture»), l’État péruvien a pris l’engagement international de soumettre périodiquement des rapports au Comité contre la torture, conformément aux dispositions de l’article 19 de la Convention. Conscient de sa responsabilité et soucieux de respecter ses obligations internationales dans le domaine des droits de l’homme, l’État péruvien présente ci-après son sixième rapport périodique.

2.Le présent document illustre le souci permanent de l’État de respecter, de protéger et de réaliser les droits et devoirs énoncés dans la Convention contre la torture. Cette volonté se reflète dans les mesures législatives, administratives et autres mises en œuvre depuis la présentation du rapport périodique précédent, mesures qui visent à harmoniser progressivement les lois et les politiques publiques avec les dispositions énoncées dans la Convention contre la torture.

3.Le Conseil national des droits de l’homme (CNDH), organisme chargé d’élaborer les politiques publiques relatives aux droits de l’homme, a aussi pour tâche d’élaborer les rapports périodiques, en concertation avec les institutions concernées. À cet égard, après avoir dûment analysé la question de la présentation des rapports périodiques en attente, le CNDH a conclu qu’il fallait donner la priorité à l’élaboration et à la soumission du sixième rapport périodique relatif à la Convention contre la torture. C’est ainsi qu’il a organisé, le 19 avril 2011, conjointement avec le bureau régional pour l’Amérique du Sud du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, un séminaire intitulé «Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants; observations générales et orientations pour l’élaboration du rapport périodique du Pérou», durant lequel 33 fonctionnaires issus de diverses institutions ont suivi une formation destinée à les aider à travailler en collaboration à l’établissement du présent rapport.

4.Une équipe de travail composée de fonctionnaires du Conseil national des droits de l’homme, placée sous la direction du Secrétariat exécutif de cet organe, a ensuite établi le présent rapport, à l’aide de la documentation et des informations reçues des fonctionnaires formés lors du séminaire; ces derniers ont en outre aidé à vérifier l’exactitude des informations figurant dans le présent document. Le contenu de chaque réponse correspond donc aux informations transmises à l’équipe de travail.

5.Lorsque le travail a été achevé, le rapport a été distribué aux membres du Conseil national des droits de l’homme et aux organismes ayant la qualité d’observateur auprès de cette entité, dont le Bureau du Défenseur du peuple et des représentants de la société civile (la Conférence épiscopale péruvienne, le Conseil évangélique du Pérou et la Coordination nationale des droits de l’homme), appelés à présenter des observations. Enfin, le rapport a été adopté à la séance extraordinaire no01/2011 du CNDH, en date du 6 juillet 2011.

6.L’État péruvien soumet donc ici son sixième rapport périodique, qui expose de manière précise et concrète les progrès réalisés et les difficultés rencontrées dans l’application des articles de la Convention contre la torture. Les données statistiques et les renseignements sur l’évolution de la législation qui y figurent permettent de recenser les principaux progrès accomplis ainsi que les difficultés que l’État péruvien doit encore surmonter. On trouvera également une liste d’annexes au présent rapport.

7.Il y a lieu de relever que le Pérou, respectueux des droits de l’homme, ne permet ni ne tolère la pratique de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sur son territoire. De même, dans la mesure du possible, il mène toute action visant à prévenir et à réprimer la torture dans le pays, en application des dispositions de la Convention contre la torture.

II.Renseignements relatifs aux articles de la Convention

8.Les réponses ci-après à la liste de points à traiter constituent le sixième rapport périodique du Pérou.

A.Article 2

1.Réponse aux questions posées au paragraphe 1 de la liste de points à traiter (CAT/C/PER/Q/6)

9.Les renseignements concernant les alinéas a, b, c,d, g et h du paragraphe 1 ont été fournies par les autorités qui traitent des cas de torture, qu’il s’agisse des plaintes soumises par des citoyens au Bureau du Défenseur du peuple et à l’Institut de médecine légale, des cas de torture présumés dont sont saisis le ministère public et le pouvoir judiciaire ou des affaires de torture ayant abouti à une condamnation.

10.Il convient de préciser que toutes les allégations soumises au Bureau du Défenseur du peuple et à l’Institut de médecine légale ne sont pas toutes traitées par le ministère public ou le pouvoir judiciaire comme des plaintes de torture, parce qu’elles émanent des victimes ou des plaignants et qu’elles ne sont pas nécessairement considérées comme telles par le ministère public. En effet, dans certains cas, l’objet de la plainte introduite auprès du Bureau du Défenseur du peuple peut être qualifié par les autorités de torture mais il arrive aussi qu’il soit qualifié différemment, par exemple comme coups et blessures ou abus de pouvoir, ou que l’affaire soit classée. C’est pourquoi il existe une différence considérable entre le nombre de plaintes de torture enregistrées par le Bureau du Défenseur du peuple et l’Institut de médecine légale, et celui dont le ministère public est saisi.

11.Les renseignements contenus dans le présent rapport concernent des cas de torture, à l’exclusion de tout autre type d’infraction.

Réponse à la question posée à l’alinéa a du paragraphe 1

12.Dans le cadre de l’application des recommandations de la Commission Vérité et Réconciliation (CVR), et conformément au but suprême de l’État péruvien, qui réside dans la défense de la personne et le respect de sa dignité, comme l’énonce l’article 1er de la Constitution politique du Pérou, un sous-système spécialisé dans les droits de l’homme a été créé, par l’intermédiaire d’institutions telles que le ministère public et le pouvoir judiciaire.

13.C’est ainsi que conformément à la mission d’instruire l’enquête et d’exercer l’action pénale que lui confère l’article 139 de la Constitution, qui consacre le principe d’une procédure régulière, le ministère public a assumé son rôle de titulaire de l’action pénale en matière de violation des droits de l’homme (dont l’infraction de torture) et, en application des dispositions de l’article 25 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme (Pacte de San José de Costa Rica), a mis en place le Bureau du procureur supérieur national ainsi que les bureaux du procureur supraprovinciaux, chargés d’instruire les crimes contre l’humanité définis aux chapitres I et II du Titre XIV-A du Code pénal (CP) et les infractions de droit commun constituant des atteintes aux droits de l’homme, ainsi que les infractions connexes. C’est donc à ces organes qu’il incombe d’enquêter et de saisir la Chambre pénale nationale et les tribunaux pénaux supraprovinciaux, lesquels ont compétence pour connaître de ces infractions. Pour plus d’information au sujet du sous-système, voir les paragraphes 160 à 162 et 164.

14.En ce qui concerne les plaintes pour torture, d’après les données fournies par le sous-système spécialisé dans les droits de l’homme, de 2003 à mai 2011, 343 plaintes ont été enregistrées; dans 105 cas, les responsables présumés appartenaient à l’armée de terre; dans 106, à la Police nationale; dans 4, à la Marine de guerre; dans 3, aux Forces aériennes du Pérou, dans 14 cas, il s’agirait d’agents de l’Institut national pénitentiaire et enfin, dans 4 cas, d’agents de police communaux chargés de la sécurité des citoyens (SERENAZGO); dans 107 cas, les responsables présumés n’ont pas pu être identifiés (voir annexe 1).

15.On trouvera à l’annexe 1 une description de la suite donnée aux plaintes pour torture, d’où il ressort que, sur 343 plaintes, 142 ont été classées définitivement et 35 provisoirement, dans 30 cas, une action a été engagée; 78 autres cas font actuellement l’objet d’une enquête et 58 ont été renvoyés aux services généraux du ministère public.

Réponse à la question posée à l’alinéa b du paragraphe 1

16.Actuellement, l’Institut de médecine légale possède un registre des allégations de torture présentées par des victimes présumées ou des plaignants qui n’ont pas fait l’objet d’une décision de l’autorité compétente. Sur la totalité des cas enregistrés de 2006 à 2010, au nombre de 805, 669 correspondent à des lésions consécutives à des tortures présumées; pour les 136 autres il s’agit d’un constat de décès consécutif à des tortures présumées. En 2006, on a dénombré 89 cas de tortures présumées; en 2007, 121; en 2008, 112; en 2009, 339 et en 2010, 144. On notera que c’est en 2009 qu’on a enregistré le plus grand nombre de cas (voir annexe 2).

Réponse à la question posée à l’alinéa c du paragraphe 1

17.Comme on l’a vu au paragraphe 5, c’est la Chambre pénale nationale qui est chargée, dans le système judiciaire, de connaître des crimes contre l’humanité et des infractions de droit commun constituant une atteinte aux droits de l’homme et des infractions connexes. De septembre 2004, date de sa création, à février 2011, la Chambre pénale nationale a instruit et jugé 37 cas de torture, dont 17 se sont conclus par une condamnation, 18 par un acquittement, un par un non-lieu et le dernier par l’abandon des poursuites (voir annexe 3).

18.Sur ces 37 cas (non compris le dernier), 14 ont abouti à un jugement réputé accepté, 20 sont des jugements exécutoires et 3 sont en instance devant la Cour suprême (voir annexe 4).

19.Il y a actuellement 16 affaires à l’instruction auprès des tribunaux pénaux supraprovinciaux et 3 en procédure de jugement devant la Chambre pénale nationale (voir annexe 5).

20.Les informations relatives à la teneur des condamnations dans les affaires de torture figurent à l’annexe 6.

Réponse à la question posée à l’alinéa d du paragraphe 1

21.Il ressort des renseignements fournis par l’Institut de médecine légale que, de 2006 à 2010, sur un total de 669 cas de torture présumés, 378 cas concernaient des hommes et 291 des femmes. Sur les 136 cas de décès consécutifs à des tortures présumées, 92 concernaient des hommes et 44 des femmes (voir annexe 7).

22.En ce qui concerne l’âge des victimes, c’est dans la tranche d’âge de 30 à 40 ans que l’on constate le plus grand nombre de lésions causées par des actes présumés de torture, soit au total 131 cas sur 669. En ce qui concerne les lésions mortelles causées par des actes présumés de torture, c’est également dans la tranche d’âge de 30 à 40 ans que l’on observe le plus grand nombre de cas, soit 25 au total, ainsi que dans la tranche d’âge de 50 à 65 ans, soit 25 sur 136 (voir annexe 8).

23.Des informations communiquées par la Chambre pénale nationale, il ressort que, dans la plupart des condamnations prononcées par la Chambre dans des affaires de torture, l’institution le plus souvent incriminée est la Police nationale du Pérou (PNP). Dans la totalité des cas, ce sont des hommes qui sont responsables des actes de torture commis. On ne dispose pas d’informations sur l’appartenance ethnique des victimes (voir annexe 9).

Réponse à la question posée à l’alinéa e du paragraphe 1

24.Le régime disciplinaire de la Police nationale qualifie d’infraction très grave l’acte de torture. C’est l’Inspection générale de la Police nationale qui est chargée de l’enquête disciplinaire et c’est aussi elle qui ordonne des mesures préventives, proportionnelles à la gravité de l’infraction commise, comme la mise à pied.

25.La loi no 29356 relative au régime disciplinaire de la Police nationale, de mai 2010, dispose que «la participation directe et intentionnelle à des atteintes graves à la vie, à l’intégrité, à la santé ou à la liberté des personnes, ou au patrimoine public ou privé, lorsqu’elle nuit gravement à l’image de l’institution» (infraction MG 67) et «la commission d’actes qualifiés par la loi de délit intentionnel, dans l’exercice de la fonction, à l’occasion de celle-ci ou comme conséquence de celle-ci» (infraction MG 70) constituent des infractions très graves sanctionnées par la mise à la retraite.

26.À ce sujet, le Ministère de l’intérieur a indiqué que 24 membres de la Police nationale avaient été mis à la retraite pour avoir enfreint la loi no 28338; ces agents avaient commis les infractions suivantes: l’infraction MG 20, «Infliger des actes de torture, ou un traitement inhumain ou dégradant, inciter à la commission de tels actes ou les tolérer», et l’infraction MG 21, «Exercer la fonction policière en faisant un usage inutile ou disproportionné de la force, par tout moyen, entraînant comme conséquences des lésions graves ou la mort». Il en va de même en cas d’infraction à la loi no29356, lorsque sont commises les infractions MG 58 «Se livrer à des abus de pouvoir et infliger des actes de torture ou des traitements inhumains, dégradants, discriminatoires ou vexatoires à des personnes se trouvant sous sa garde» ainsi que les infractions MG 67. On trouvera la liste des sanctions imposées au cours de la période 2009-2010 à l’annexe 10.

27.Le personnel des Forces armées (l’Armée, les Forces aériennes et la Marine de guerre) est passible de sanctions prononcées par des juridictions civiles ou militaires. Dans le système militaire, le personnel fait l’objet d’une enquête administrative menée par le Bureau d’inspection de chacune des institutions; ensuite, selon le cas, l’affaire est confiée à l’Inspection générale du Ministère de la défense, qui prononce différents types de sanctions, dont la mise à la retraite, la mutation ou la sanction disciplinaire. Néanmoins, pour pouvoir procéder à la mise à la retraite (licenciement), il faut qu’une condamnation judiciaire ait été prononcée au sujet d’un délit intentionnel.

28.En ce qui concerne la prévention et la répression des actes de torture, en vertu de l’article 29 de la loi no 28359 relative au statut militaire, tout membre des Forces armées qui fait l’objet d’une ordonnance de placement en détention de plus de six mois émanant d’une autorité judiciaire compétente, quelle que soit l’infraction en cause, est considéré comme mis à pied jusqu’à la conclusion des poursuites pénales engagées contre lui; si elles aboutissent à une condamnation, celles-ci entraînent soit sa mise en disponibilité soit sa mise à la retraite, selon la décision judiciaire (en application des articles 31 et 34 de la loi considérée).

29.En ce qui concerne l’Institut national pénitentiaire, en 2009, quatre agents pénitentiaires ont été démis de leurs fonctions pour actes de torture. Il faut encore systématiser l’information concernant les autres années couvertes par le rapport (voir annexe 11).

Réponse à la question posée à l’alinéa f du paragraphe 1

30.La juridiction militaire est, comme le prévoit expressément l’article 139 de la Constitution, une institution indépendante du pouvoir judiciaire, dont le cadre normatif est défini à l’article 173 de la Constitution, qui dispose que la seule et unique finalité de cette juridiction est d’administrer la justice pénale militaire lorsque des infractions sont commises dans l’exercice de leurs fonctions par des membres des Forces armées et de la Police nationale. En conséquence, en vertu de la Constitution, de la loi no 29182 relative à l’organisation et aux fonctions de la juridiction militaire policière et du décret-loi no 1096 portant modification de ladite loi, les militaires poursuivis pour des crimes contre l’humanité, comme la torture ne peuvent pas être jugés par les tribunaux militaires et policiers.

31.Dans l’arrêt qu’il a rendu en l’affaire no 0017-2003-AI/TC, en date du 16 mars 2004, le Tribunal constitutionnel a indiqué que, pour qu’un fait illicite puisse être qualifié d’infraction commise par un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions, trois conditions devaient être remplies: a) l’acte doit avoir été commis par un agent en activité; b) l’acte incriminé doit avoir été commis dans l’exercice de la fonction policière ou militaire, c’est-à-dire durant le service; c) l’acte visé doit porter atteinte à un bien juridique propre, particulier et pertinent pour l’existence, l’organisation et le fonctionnement des Forces armées, et pour les missions correspondant aux finalités de ces institutions. Ainsi, le Tribunal constitutionnel a précisé qu’en application de l’article 173 de la Constitution, le domaine de compétence matérielle de la juridiction spécialisée dans les affaires militaires recouvrait uniquement les infractions commises dans l’exercice de la fonction «militaire» par les membres des Forces armées ou de la Police nationale.

32.Le champ de compétence de la juridiction militaire est donc limité aux infractions commises par des fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions, les trois conditions mentionnées ci-dessus devant être remplies. C’est ainsi que les actes délictueux commis par des agents de l’État contre des civils qui constituent une infraction de torture sont de la compétence des tribunaux civils. Il convient d’ajouter que la Constitution dispose, au paragraphe 3 de son article 139, que «nul ne peut être soustrait à la juridiction prévue par la loi (…)». En conséquence, la juridiction chargée d’instruire les affaires de torture est la juridiction civile.

Réponse à la question posée à l’alinéa g du paragraphe 1

33.L’infraction de torture a été incorporée dans le Code pénal au moyen de la loi no 26926 portant adjonction du titre XIV-A, Crimes contre l’humanité. L’infraction de torture est ainsi incorporée pour la première fois dans le Code pénal (art. 321). Les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ne sont pas érigés en infraction en droit péruvien. Il existe néanmoins un projet de loi visant à incorporer dans le Code pénal l’infraction des traitements cruels, inhumains ou dégradants; ce texte est devant la Commission de la justice et des droits de l’homme du Congrès pour évaluation (projet de loi no 04672/2010-CP).

34.L’infraction de torture, définie à l’article 321 du Code pénal, est passible de peines différentes selon la nature de l’infraction. L’infraction à l’état simple est sanctionnée par une peine privative de liberté qui ne peut pas être inférieure à cinq ans ni supérieure à dix ans. La forme aggravée recouvre deux situations: la torture entraîne des lésions graves et l’agent aurait pu prévoir ce résultat, et la torture entraîne la mort. Dans le premier cas, la peine privative de liberté ne peut pas être inférieure à six ans ni supérieure à douze ans, dans le second, elle ne peut pas être inférieure à huit ans ni supérieure à vingt ans.

35.En ce qui concerne les cas de torture ayant entraîné une condamnation mentionnés au paragraphe 17, à ce jour, 17 condamnations pour infraction de torture ont été prononcées par la Chambre pénale nationale, qui a compétence pour connaître des cas de violation des droits de l’homme. Les peines imposées dans chacune de ces affaires figurent à l’annexe 9.

36.Dans le cadre de ses fonctions, le Bureau du Défenseur du peuple a examiné, dans ses rapports no 112 («La voie difficile de la réconciliation. Justice et réparation pour les victimes de la violence»), no 128 («L’État face aux victimes de la violence. Jusqu’où aller dans la politique de réparation et de justice?») et no 139 («Cinq ans de processus de réparation et de justice au Pérou. Bilan et perspectives d’une mission en cours»), un certain nombre de difficultés liées aux enquêtes et aux poursuites relatives aux affaires de torture, ainsi qu’aux condamnations prononcées et a formulé des recommandations à l’intention des autorités compétentes.

Réponse à la question posée à l’alinéa h du paragraphe 1

37.Par acquittement, on entend l’absence de responsabilité pénale décidée par l’autorité judiciaire. À ce jour, un jugement d’acquittement a été prononcé dans 18 affaires de torture (voir annexe 12).

2.Réponse aux questions posées au paragraphe 2 de la liste de points à traiter

38.En 2002, le Bureau du Défenseur du peuple a publié son rapport no 42 sur le droit à la vie et au respect de l’intégrité de la personne dans le cadre du service militaire au Pérou. Il est indiqué dans ce rapport que d’avril 1998 à août 2002, le Bureau a enregistré 174 plaintes pour torture ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans le cadre du service militaire, et que la plupart d’entre elles ont été déposées en 1999. Sur ces 174 plaintes, 155 concernaient l’armée péruvienne, 12, les forces aériennes et 7, la marine de guerre.

39.En 2006, le Bureau du Défenseur du peuple a publié son rapport no 112 intitulé «Les difficultés de la voie de la réconciliation. Justice et réparation pour les victimes de la violence». Il y recense 72 plaintes pour actes de torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants commis de septembre 2002 à juillet 2006, attribués à des membres des forces armées. Le rapport ne précise pas la force militaire qui aurait été responsable des actes de torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants. De même, le rapport no 128 sur «L’État face aux victimes de la violence. Jusqu’où aller dans la politique de réparation et de justice?», fait état d’un total de 139 plaintes pour torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants enregistrées du mois d’août 2006 au mois de septembre 2007, dont 33 sont imputées aux forces armées; ici non plus, l’information n’est pas ventilée par force militaire.

40.En 2009, le Bureau du Défenseur du peuple a enregistré 57 plaintes pour torture présumée, dont six visent des membres des Forces armées. En 2010, il en a enregistré 53, dont quatre cas concernent des membres des Forces armées; il n’y a d’information ventilée sur la force militaire concernée pour aucune des deux années.

41.Les plaintes pour torture présumée reçues par le ministère public de 2003 à mai 2011 (voir par. 14 ci-dessus) sont au nombre de 343; 105 d’entre elles sont imputées à des membres de l’armée péruvienne.

42.Pour ce qui est des mesures adoptées pour prévenir et réprimer de tels actes, comme il a été indiqué aux paragraphes 30 à 32, lorsqu’il y a présomption de torture, c’est la justice civile qui est chargée de mener l’enquête, par l’intermédiaire du ministère public, conformément aux dispositions de l’article 159 de la Constitution. À cet égard, en vertu des fonctions définies par la Constitution, le ministère public s’occupe de tout fait constituant une atteinte aux droits des citoyens quels qu’ils soient, parmi lesquels les droits des victimes présumées d’actes de torture. Dans ces derniers cas, c’est aux bureaux du procureur supraprovinciaux qu’il appartient de mener l’enquête. Lorsque de tels bureaux n’existent pas, ces affaires sont traitées par les services généraux ou ordinaires du ministère public.

43.En application de la loi no 29248 relative au service militaire, il a été créé, en janvier 2009, un bureau d’assistance aux personnes qui effectuent leur service militaire, qui a pour fonction première de veiller au respect des droits fondamentaux de ce personnel. Cet organe est également chargé de recevoir et de traiter les plaintes, doléances, requêtes, suggestions ou demandes, formulées par les intéressés et les membres de leur famille, de faire des recommandations à propos de ces démarches et de donner des informations à ce sujet. Lorsque les plaintes déposées ont un caractère administratif et sortent du cadre pénal, les Forces armées les transmettent aux juridictions civiles. Le bureau de l’Inspection générale de l’armée engage à son tour l’enquête administrative voulue et, le cas échéant, le dossier est transmis à l’Inspection générale du Ministère de la défense.

44.Les divers bureaux d’assistance au personnel militaire sont rattachés aux bureaux de l’Inspection des unités, des bases et des dépendances des différents niveaux de commandement. Ils dépendent des Inspections générales des Forces armées, lesquelles portent tous les cas qui leur sont soumis à la connaissance de l’Inspection générale du Ministère de la défense, par la voie régulière. À ce jour, 132 bureaux de ce type ont été mis en place dans différentes unités des Forces armées. Il existe également une directive qui établit les procédures et les normes à respecter pour assurer le bon fonctionnement des bureaux d’assistance au personnel militaire et définit les responsabilités en matière d’application et de respect de la loi sur le service militaire et veiller ainsi au respect des droits fondamentaux du personnel militaire (directive no 04-MINDEF-K). Le Ministère de la défense s’est aussi doté d’une page Web (www.mindef.gob.pe), où il est possible d’exprimer ses plaintes (voir annexe 13).

45.Dans les bases militaires où elles effectuent leur service militaire, les recrues, hommes ou femmes, jouissent de toutes les garanties de pouvoir porter plainte contre des actes de torture; en effet, dans chacune d’entre elles, il existe un personnel responsable de l’ensemble des effectifs, qui doit communiquer à sa hiérarchie immédiate tout acte présumé de torture afin que soient prises les mesures voulues. Il convient également de signaler qu’il existe des directives visant à prévenir les actes de torture à l’encontre des recrues.

46.La directive FAP 35-4 des forces aériennes définit les procédures dont dispose le personnel pour présenter des plaintes en première instance, auprès de l’inspection de chacune de ses unités et dépendances, qui est chargée d’y donner suite et de garantir la protection des personnes qui effectuent leur service militaire volontaire, qui dénoncent des actes de torture.

47.Le Ministère de la défense a prévu de créer un bureau du défenseur du personnel militaire, ayant pour mission de protéger les droits du personnel militaire face à toute menace ou à toute atteinte directe à son bien-être, et de défendre, au niveau institutionnel, les Forces armées. Ce service est chargé, entre autres fonctions principales, de veiller à ce que les activités du personnel militaire, quel que soit son rang et son grade, soient exécutées comme il convient et ne portent pas atteinte aux droits fondamentaux des intéressés; mais sa mise en place reste à faire.

3.Réponse aux questions posées au paragraphe 3 de la liste de points à traiter

48.Le Bureau du défenseur du peuple présente ses recommandations dans ses rapports («Informes defensoriales»). Pendant la période considérée dans le présent document, il a adressé une série de recommandations en rapport avec la question de la torture aux autorités compétentes dans les rapports no 91 − «Violations du droit à la vie et actes de torture ou traitements cruels, inhumains ou dégradants imputés à des membres de la Police nationale», no 112− «La voie difficile de la réconciliation. Justice et réparation pour les victimes de la violence», no 128 − «L’État face aux victimes de la violence. Jusqu’où aller dans la politique de réparation et de justice?», et no 139 − «Cinq ans de réparation et de justice au Pérou. Bilan et défis d’une mission en cours».

49.L’État a progressé dans l’application de certaines des recommandations formulées par le Bureau du défenseur du peuple. Le 23 juillet 2006, il a adopté le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture. Il a aussi organisé des séances de formation, à l’intention de diverses autorités concernées par la problématique de la torture, qui seront évoquées plus en détail dans les réponses aux questions posées aux paragraphes 9 et 10 de la liste de points à traiter. De même, l’Institut de médecine légale a pris des mesures pour garantir l’application du Protocole médico-légal d’examen médical pour la détection de lésions ou de décès consécutifs à des tortures.

50.La présidence du Conseil des ministres a soumis au Congrès le projet de loi no 4862/2010-PE, qui comporte une modification de l’article 8 de la loi no 29360 relative à l’aide juridictionnelle, qui vise à faire bénéficier les victimes de violations graves des droits de l’homme de l’aide juridique. De son côté, le Conseil national des droits de l’homme (CNDH) a élaboré un projet de loi relatif à la mise en place du mécanisme national de prévention, dans lequel il propose de désigner le Défenseur du peuple pour remplir cette fonction. Il convient également de noter que les membres de la Police nationale et les agents des services pénitentiaires reçoivent des manuels sur le respect des droits de l’homme dans l’exercice de la fonction policière et de la surveillance pénitentiaire, qui définissent le cadre normatif à respecter dans ce domaine.

51.Les recommandations citées ci-dessus ont été mises en œuvre en application des obligations qui incombent à l’État en matière de droits de l’homme et grâce au dynamisme du Bureau du défenseur du peuple, qui a élaboré à cet effet diverses méthodes et stratégies comprenant notamment des réunions de travail avec les autorités, des séances d’information, des séminaires et des activités de formation.

52.Il importe de relever que l’État continue d’encourager, comme il s’y est engagé, la concertation entre les différentes institutions en vue de favoriser la mise en œuvre des recommandations du Bureau du défenseur du peuple, tout en soutenant ce dernier dans l’exécution de son mandat constitutionnel, ainsi qu’une meilleure diffusion des informations sur ce mandat. Pour se faire connaître, le Bureau du Défenseur du peuple a, quant à lui, utilisé la radio et la télévision de l’État; il a également organisé des formations au sujet de son action et du respect des droits de l’homme et déploie des efforts considérables pour renforcer son image auprès de la population, en utilisant des moyens électroniques (page Web, courrier électronique, blogs, etc.) ou en organisant des événements tels que des foires d’information, des séminaires, des défilés ou encore des visites dans les écoles.

53.Le Conseil national des droits de l’homme constitue lui aussi un espace de dialogue entre diverses entités de l’État, parmi lesquelles le Bureau du Défenseur du peuple, dont chaque membre et observateur peut exprimer son point de vue et formuler des recommandations que le Conseil met à profit dans le cadre de sa double mission, qui est de conseiller le pouvoir exécutif s’agissant d’adopter des politiques publiques, ainsi que de promouvoir et de protéger les droits de l’homme.

4.Réponse à la question posée au paragraphe 4 de la liste de points à traiter

54.À ce jour, il n’existe pas de registre spécifique des cas de torture. Néanmoins, il existe un registre général de toutes les plaintes, quel que soit le type d’infraction, appelé système d’appui au ministère public, dans lequel sont enregistrées toutes les plaintes reçues par le ministère public. Ces renseignements sont publics et peuvent être consultés par rubrique (numéro de la plainte, numéro de l’affaire, nom des personnes mises en cause, nom des personnes lésées, infractions). De même, tout citoyen peut s’informer de l’état d’avancement d’une enquête en cours, en saisissant le numéro de l’affaire sur la page Web du ministère public.

55.Il convient d’indiquer que s’il n’existe pas de registre spécifique, comme on l’a vu au paragraphe précédent, il est en revanche possible d’obtenir des renseignements sur les plaintes pour torture déposées auprès du ministère public à partir des données du système d’appui au ministère public, ce qui permet d’établir des statistiques des cas de torture, selon les informations du Bureau central de la planification et du budget. De même, on retiendra que l’Observatoire de la criminalité, rattaché au ministère public, est chargé d’organiser, de systématiser et de diffuser les informations, statistiques et indicateurs liés à la problématique de la criminalité au Pérou fournis par le ministère public et les organes d’appui.

56.Le ministère public quant à lui est chargé du registre national des personnes détenues et des personnes condamnées à une peine privative de liberté effective (RENADESPPLE), qui joue un rôle dans la protection et la garantie des droits de l’homme. Il dispose actuellement d’un registre des personnes condamnées à une peine privative de liberté effective et aux prévenus placés en détention, qui peut être consulté sur la page Web suivante: www.mpfn.gob.pe/renadespple.

57.Il convient de préciser à ce sujet que le Bureau du défenseur du peuple ne tient pas un registre national particulier des cas de torture. En revanche, il possède un registre où sont recensées toutes les plaintes relatives aux droits de l’homme, dénommé «Système d’information du Bureau du défenseur du peuple». On peut y trouver des informations sur les plaintes pour torture ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

58.On retiendra aussi que, dans ses rapports no 42 («Le droit à la vie et à l’intégrité de la personne dans le cadre du service militaire au Pérou»), no 91 («Atteinte à la vie et tortures présumées ou traitements cruels, inhumains ou dégradants imputés à des effectifs de la police nationale»), no 112 («La voie difficile de la réconciliation. Justice et réparation pour les victimes de la violence»), no 128 («L’État face aux victimes de la violence. Jusqu’où aller dans la politique de réparation et de justice?») et no 139 («Cinq ans de réparation et de justice au Pérou. Bilan et défis d’une mission en cours»), le Bureau du défenseur du peuple a étudié et analysé les plaintes qui lui avaient été soumises durant des périodes déterminées au sujet d’actes de torture dont se seraient rendus coupables des membres des forces de l’ordre (Police nationale ou Forces armées − armée de terre, forces aériennes et marine de guerre) − et des agents du système pénitentiaire.

5.Réponse à la question posée au paragraphe 5 de la liste de points à traiter

59.Lorsque cela s’avère nécessaire et dans des circonstances exceptionnelles, la Constitution prévoit la possibilité de restreindre les droits relatifs à la liberté et à la sécurité de la personne, à l’inviolabilité du domicile et à la liberté de réunion et de mouvement (art. 137 de la Constitution), fixe la durée de ces mesures (pas plus de soixante jours, renouvelable) et en décrit la procédure d’adoption (accord du Conseil des ministres et notification au Congrès).

60.La suspension de ces droits ne signifie nullement que les citoyens ne peuvent pas se prévaloir des garanties prévues à l’avant-dernier paragraphe de l’article 200 de la Constitution, s’ils s’estiment lésés dans leurs droits. La Constitution reste en effet en vigueur y compris en cas d’état d’urgence, et le respect des droits fondamentaux, des normes et principes du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire reste une obligation.

61.Ainsi, les droits fondamentaux reconnus par la Constitution et les instruments internationaux − à l’exception de ceux qui sont mentionnés au paragraphe 59 − ne peuvent être suspendus en aucune circonstance. Il convient ici de rappeler que, selon le Tribunal constitutionnel:

«(...) l’emploi d’armes aux fins de l’usage de la force doit s’inscrire dans le cadre des principes constitutionnels de proportionnalité, de nécessité, de légitimité et d’humanité appliqués à la lumière des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et au droit international humanitaire ratifiés par le Pérou (…)».

62.L’usage de la force dans d’autres situations de violence, dans des zones déclarées en état d’urgence et où le contrôle de l’ordre intérieur est assuré par la Police nationale, est conforme au Principe 11 des Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, et aux articles 2 et 3 du Code de conduite pour les responsables de l’application des lois.

63.En ce qui concerne les mesures adoptées par l’État péruvien pour respecter les obligations qu’il a souscrites dans le domaine des droits de l’homme, il convient d’indiquer qu’en période d’état d’urgence, ce sont les Forces armées qui, étant chargées d’assurer le contrôle de l’ordre intérieur, veillent à ce qu’il ne soit commis aucun acte contraire aux obligations définies dans la Convention contre la torture. Par ailleurs, l’État péruvien a dûment informé le Secrétariat de l’ONU chaque fois qu’il a dû déclarer l’état d’urgence dans certaines zones et suspendre certains droits.

64.On trouvera des renseignements plus détaillés à ce sujet à l’annexe 14, qui contient la liste des cas où l’état d’urgence a été proclamé entre 2005 et le 19 mai 2011.

65.Par ailleurs, le décret législatif no 1095 promulgué en 2010 définit les règles du recours à la force par les Forces armées sur le territoire national. Ce texte a pour objet d’établir les principes, formes, conditions et limites de l’usage de la force par les Forces armées dans l’exercice des fonctions que leur confère la Constitution. Il règlemente également l’usage de la force lorsque les Forces armées appuient les opérations de la police nationale, que ce soit en période d’état d’urgence ou dans d’autres situations.

6.Réponse à la question posée au paragraphe 6 de la liste de points à traiter

66.L’Institut de médecine légale est rattaché au ministère public, organisme autonome en vertu de la Constitution, qui dispose d’un budget propre. Les crédits alloués au ministère public pour lui permettre de s’acquitter des fonctions que lui impartissent la Constitution et la loi organique proviennent en majeure partie des allocations financières fixées par le Ministère de l’économie et des finances au titre des ressources ordinaires. Dans une moindre mesure, le ministère public dispose aussi de ressources propres: droits perçus au titre des services de l’Institut de médecine légale au niveau national, dépôts versés par les inculpés en application du principe d’opportunité ou encore recettes du guichet unique provenant des copies certifiées, des procès-verbaux et autres documents.

67.Le Bureau central de la planification et du budget établit le projet de budget annuel du ministère public, en application de la directive relative à la programmation et l’élaboration de la Direction nationale du budget du Ministère de l’économie et des finances. Le projet de budget établit le montant des ressources nécessaires pour l’accomplissement des buts et objectifs de l’institution. Une fois approuvé par le Conseil des procureurs suprêmes il est présenté au pouvoir exécutif, puis soumis au Congrès, conformément à l’article 160 de la Constitution. Les ressources sont ensuite allouées en fonction des besoins définis préalablement.

68.L’Institut de médecine légale a élaboré et mis en œuvre diverses normes visant à proscrire efficacement la torture, conformément aux normes internationales de protection des droits de l’homme. C’est ainsi qu’en 1998, il a élaboré le Protocole d’examen médical pour la détection de lésions ou de décès consécutifs à des tortures, auquel tous ses services doivent se conformer. En 2005, l’Institut a présenté un projet relatif à l’application et l’adaptation du Protocole d’Istanbul, aux fins de l’évaluation des cas de torture, intitulé «Protocole d’enquête sur les tortures ou traitements cruels, inhumains ou dégradants», afin de se doter d’un instrument exhaustif permettant d’évaluer les cas de torture. Depuis cette date, c’est ce Protocole, plus complet que le précédent, qui est utilisé. Néanmoins, l’Institut prépare actuellement un nouveau protocole encore plus complet, qui s’inspirera également du Protocole d’Istanbul.

69.L’Institut de médecine légale comporte depuis 2010 une équipe spécialisée dans la détection des lésions et des décès dus à des tortures (voir annexe 15). Cette équipe est composée de trois psychiatres, de deux médecins légistes et de trois psychologues. Elle est appelée à intervenir sur tout le territoire, mais, faute de personnel, les évaluations sont réalisées par les spécialistes des différents sièges répartis sur le territoire, qui peuvent au besoin faire appel à elle.

70.L’Institut de médecine légale élabore actuellement un guide pratique des soins à dispenser aux victimes d’actes de torture destiné aux fonctionnaires de ses services.

71.S’agissant de la formation du personnel du ministère public, composé non seulement des procureurs mais des spécialistes de l’Institut de médecine légale, c’est à l’école du ministère public que cette fonction appartient. Depuis 2007, divers cours relatifs aux droits de l’homme et à des questions connexes destinés aux procureurs et à leurs assistants figurent au programme (voir annexe 16). On retiendra notamment qu’en 2008 deux modules de formation relatifs à la torture ont été organisés à l’intention des spécialistes de l’Institut de médecine légale.

72.L’École de la magistrature organise, elle aussi, des cours de formation à l’intention des procureurs au sujet de divers thèmes relatifs aux droits de l’homme, mais il reste à programmer un cours spécialisé sur l’enquête et la répression de la torture à l’intention des juges et des procureurs (voir annexe 17).

B.Article 3

1.Réponse aux questions posées au paragraphe 7 de la liste de points à traiter

73.L’article premier de la Constitution dispose que la défense de la personne et le respect de sa dignité sont le but suprême de la société et de l’État; le paragraphe 1 de l’article 2 précise que toute personne a droit à la vie, et le paragraphe 24 h) du même article que chacun a droit au respect de l’intégrité de sa personne et à ne pas être soumis à des violences morales, psychiques ou physiques ni à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants.

74.L’État péruvien garantit le respect des dispositions du paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention contre la torture, des paragraphes 7 et 8 de l’article 22 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme, du paragraphe 4 de l’article 13 de la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture, du paragraphe 1 de l’article 33 de la Convention relative au statut des réfugiés, et des obligations qui en découlent en adaptant sa législation. Dans de nombreux cas, l’application de ces dispositions s’est accompagnée de la mise en place de mécanismes permettant de veiller au respect des obligations correspondantes.

75.L’extradition est régie par la Constitution, qui est la norme fondamentale, et par la législation interne. Conformément aux dispositions de l’article 37 de la Constitution, l’extradition est accordée par le pouvoir exécutif (Conseil des ministres) sur avis de la Cour suprême de la République, en application de la loi et des traités, et sur la base du principe de réciprocité.

76.L’article 516 du nouveau Code de procédure pénale subordonne l’extradition à l’évaluation et à l’analyse des garanties relatives à l’intégrité de l’administration de la justice dans l’État émetteur de la requête. Ce même article dispose que le Bureau du Procureur général et le Ministère des relations extérieures sont habilités à vérifier si l’État émetteur de la requête réunit les garanties nécessaires en matière d’administration de la justice. L’alinéa d de l’article 517 dispose en outre qu’il n’est pas procédé à extradition si la procédure à laquelle la personne extradée va être soumise ne respecte pas les garanties de la légalité prévues en droit international.

77.Mais l’aspect le plus important de ces dispositions relatives à l’extradition est que si l’auteur de l’acte pour lequel l’extradition est demandée est passible de la peine capitale dans l’État requérant, et que ce dernier ne donne pas de garantie que cette peine ne sera pas appliquée, l’extradition sera refusée (art. 517, al. 3 d)).

78.À cet égard, selon les indications de la Direction nationale de la justice, le Pérou pourrait demander à l’État requérant de garantir que la personne ne sera pas soumise à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, étant entendu que si l’État considéré ne donne pas les assurances voulues et n’apporte pas d’éléments de preuve indiquant au Pérou que la personne requise ne sera pas exposée au danger ou au risque certain d’être soumise à la torture ou à d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’extradition ne sera pas accordée. L’État ne garantit donc l’extradition que s’il est assuré que les droits de l’homme de la personne dont l’extradition est demandée seront respectés.

79.Afin d’évaluer le risque que court l’intéressé d’être soumis à la torture dans le pays de renvoi, avant de procéder à son extradition, il faut étudier la législation interne du pays requérant et vérifier qu’elle offre les garanties d’une administration correcte de la justice. L’État péruvien devrait également consulter des documents publics d’institutions faisant partie des systèmes de protection des droits de l’homme afin d’évaluer les irrégularités qui pourraient y être dénoncées.

80.Comme on l’a dit au paragraphe 75, dans la procédure d’extradition, interviennent le pouvoir judiciaire par l’intermédiaire de la Cour suprême et le pouvoir exécutif qui, in fine , prend la décision d’extrader l’intéressé vers l’État requérant ou décide de rejeter la requête. Selon l’article 515 du nouveau Code de procédure pénale, ce n’est que lorsque l’avis consultatif du pouvoir judiciaire est défavorable (par exemple lorsque la personne risque d’être soumise à la torture) que le Gouvernement est contraint de s’y conformer; si l’avis est favorable, le Gouvernement est libre de sa décision. La procédure d’extradition s’achève par la décision souveraine du pouvoir exécutif concernant le transfert vers le pays requérant.

81.Le Code de procédure pénale ne prévoit pas de recours contre l’avis de la Cour suprême sur l’opportunité d’extrader, qui précède la décision de l’Exécutif. En cas d’atteinte ou de risque d’atteinte aux droits fondamentaux lors de la procédure d’extradition passive, des procédures constitutionnelles d’habeas corpus ou d’amparo peuvent être engagées, dans le cadre prévu par le Code de procédure constitutionnelle.

82.L’expulsion est régie par la législation péruvienne dans le respect de la Constitution et des instruments ratifiés par le Pérou dans le domaine des droits de l’homme. La loi relative aux étrangers (D. Leg. no 703) contient les règles applicables à l’entrée des étrangers sur le territoire péruvien, à leur séjour, à leurs conditions de résidence, à leur sortie et à leur retour; elle régit aussi le contrôle des étrangers et définit leur situation juridique dans le pays. Elle prévoit les sanctions auxquelles ils s’exposent s’ils violent ses dispositions et celles de son règlement d’application, parmi lesquelles l’expulsion (art. 60 d)), laquelle est prononcée: a) en cas d’entrée clandestine ou frauduleuse sur le territoire national; b) sur mandat de l’autorité judiciaire compétente; c) pour toute personne qui, ayant reçu l’ordre de quitter le territoire ou ayant vu son permis de séjour ou de résidence annulé, n’a pas quitté le territoire national.

83.Conformément à l’article 30 du Code pénal, pour un étranger la peine restrictive de liberté est l’expulsion et s’applique après l’exécution de la peine d’emprisonnement. L’étranger condamné à l’expulsion est mis par le directeur de l’établissement pénitentiaire à la disposition de l’autorité compétente aux fins de l’exécution de la peine.

84.L’article 39 du Code pénal prévoit que la Commission spéciale pour les réfugiés est la seule entité compétente en matière d’expulsion de réfugiés.

85.En général, l’expulsion a lieu par décision du Ministère de l’intérieur, sur avis de la Commission des étrangers fondé sur le rapport de la Division des étrangers du Département de la sécurité de l’État de la Police nationale, conformément à l’article 66 de la loi sur les étrangers. L’article 67 de cette même loi prévoit la possibilité, pour l’étranger frappé par la mesure d’expulsion, d’en demander le réexamen ou de former un appel. La procédure d’appel est prévue par les articles 207.2, 209 et 211 de la loi générale de procédure administrative (loi no 27444); elle doit être engagée auprès du Ministre de l’intérieur qui a émis l’ordre d’expulsion contesté et qui est l’autorité qui tranche en dernier ressort.

86.Il convient de souligner que la procédure d’expulsion débute par un procès-verbal de la police, établi par la Division des étrangers du Département de la sécurité de l’État de la Police nationale, qui le transmet à la Direction des migrations et des naturalisations du Ministère de l’intérieur. Le procès-verbal est ensuite notifié à l’étranger en infraction qui peut y faire consigner qu’il a de bonnes raisons de croire que son expulsion le mettrait en danger. Il convient par ailleurs de préciser que les étrangers expulsés le sont vers des pays voisins dans lesquels, à la connaissance de l’État, la torture n’est pas pratiquée.

87.Par ailleurs, s’il y a des raisons fondées de croire que l’étranger ayant fait l’objet d’un ordre d’expulsion du territoire péruvien court le risque d’être soumis à la torture, une procédure constitutionnelle d’habeas corpus, applicable en cas d’action ou d’omission qui menacerait ou violerait le droit de ne pas être soumis à la torture ou à des traitements inhumains ou humiliants, peut être engagée conformément à l’article 25, alinéa 1, du Code de procédure constitutionnelle; la finalité d’une telle procédure est de protéger le droit en question et de rétablir la situation antérieure à la violation ou à la menace de violation. Le contenu et la portée de cette procédure sont interprétés conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme, aux instruments relatifs aux droits de l’homme et aux décisions adoptées par les tribunaux internationaux compétents dans le domaine des droits de l’homme, constitués en vertu de traités auxquels le Pérou est partie (art. V du Code de procédure constitutionnelle).

88.Toute personne faisant l’objet d’un ordre d’expulsion a le droit d’être assistée par un défenseur de son choix ou par un défenseur public à tout moment de la procédure. Il n’existe pas de mécanisme spécifique créé expressément pour évaluer le risque d’être soumis à la torture dans le pays de renvoi encouru par l’intéressé, mais ce dernier peut recourir aux mécanismes juridiques mentionnés plus haut. De même, il n’existe pas de données statistiques sur les personnes, visées par des mesures d’expulsion, qui ont invoqué le risque d’être soumises à la torture dans le pays de renvoi.

89.Par ailleurs, en sa qualité de partie à la Convention relative au statut des réfugiés et au Protocole relatif au statut des réfugiés, l’État péruvien accorde, conformément au principe de non-refoulement, la protection internationale aux étrangers qui en font la demande lorsque leur vie, leur liberté ou leur intégrité personnelle sont en danger dans leur pays d’origine.

90.Dans cet esprit, l’article 5 de la loi relative aux réfugiés (loi no 27891) consacre et développe le principe du non-refoulement et prévoit que toute personne qui invoque la condition de réfugié peut entrer sur le territoire national et qu’elle ne peut être refoulée, renvoyée, expulsée, extradée, ni soumise à quelque mesure que ce soit qui pourrait entraîner son renvoi dans un pays où sa vie, son intégrité ou sa liberté seraient menacées pour les raisons décrites à l’article 3 de la même loi. L’article 3 b) du règlement d’application de la loi prévoit de plus que le demandeur d’asile peut rester dans le pays en attendant que son affaire soit tranchée et qu’une décision définitive soit prise.

91.Il n’existe pas de mécanisme expressément conçu pour évaluer le danger que court le réfugié d’être soumis à la torture dans le pays d’origine. Toutefois, en application du paragraphe 1 de l’article 7 de la loi relative aux réfugiés, la Commission permanente ad hoc pour les réfugiés du Ministère des relations extérieures reçoit, étudie et traite les demandes de reconnaissance du statut de réfugié, examine périodiquement les dossiers, décide de la suite à donner et veille à ce que toutes les institutions respectent les dispositions des instruments internationaux signés par le Pérou, parmi lesquels figure la Convention contre la torture.

92.En cas de rejet de la demande d’asile, l’article 17 de la loi prévoit la possibilité de présenter un recours en réexamen auprès de la Commission spéciale des réfugiés, et l’article 18 prévoit la possibilité de faire appel en cas de rejet du recours en réexamen. L’instance compétente en dernier recours est la Commission de révision des dossiers de demande d’asile.

93.L’article 28 du règlement d’application de la loi prévoit en outre que le rejet de la demande du statut de réfugié, prise à l’issue de tous les recours, signifie que le requérant est soumis aux règles applicables aux étrangers, sans préjudice des dispositions du même article (deuxième paragraphe). Le Ministère de l’intérieur ne refoule pas le demandeur d’asile dans un pays où sa vie, sa liberté ou son intégrité personnelle seraient menacées et tient compte de la procédure établie à l’article 26 du règlement d’application.

94.La loi relative à l’asile (loi no 27840) a pour objet de définir la protection offerte par l’État, sur son territoire à l’étranger dont il estime qu’il est poursuivi pour des motifs ou des infractions politiques et dont la liberté ou la vie sont en danger. Elle prévoit donc que nul demandeur d’asile ne sera soumis à une quelconque mesure l’obligeant à retourner dans le pays où sa vie, son intégrité physique ou sa liberté seraient en danger (art. 3).

95.La personne qui se voit refuser l’asile diplomatique (art. 12 du règlement d’application de la loi) ne peut pas être refoulée sans garantie expresse de l’État territorial que son intégrité ne sera pas en danger. Les dossiers de demande d’asile diplomatique sont examinés par un groupe d’évaluation (art. 13), dont la proposition est transmise pour décision au Vice-Ministre des relations extérieures. La procédure est la même pour les demandes d’asile territorial (art. 22). Néanmoins, en cas de rejet de la demande ou de perte du statut, le requérant ne peut pas être refoulé par les autorités nationales dans un pays où sa vie, sa liberté ou son intégrité sont menacées.

96.Le risque d’être soumis à la torture dans le pays de renvoi n’a été invoqué dans aucun cas de demande concernant l’asile ou le statut de réfugié.

C.Article 4

Réponse à la question posée au paragraphe 8 de la liste de points à traiter

97.L’article 321 du Code pénal définit l’infraction de torture de la manière suivante:

«Tout fonctionnaire ou agent de l’État ou toute personne qui, avec le consentement ou l’acquiescement d’un fonctionnaire ou agent de l’État, inflige à autrui des douleurs ou des souffrances graves, physiques ou mentales, ou le soumet à des situations ou à des méthodes qui annihilent son discernement ou diminuent ses capacités physiques ou mentales, même si elles ne provoquent pas de douleur physique ou de souffrance morale, en vue d’obtenir de lui ou d’un tiers un aveu ou une information, ou de le punir pour tout fait qu’il a commis ou qu’il est soupçonné d’avoir commis, ou de l’intimider ou de faire pression sur lui, sera condamné à une peine privative de liberté qui ne peut pas être inférieure à cinq ni supérieure à dix ans.

Si la torture entraîne la mort ou produit des lésions graves et que l’agent pouvait prévoir un tel résultat, la peine privative de liberté sera d’une durée qui ne peut pas être inférieure à huit ans ni supérieure à vingt ans, ni inférieure à six mois ni supérieure à douze ans, respectivement.».

98.Il ressort du paragraphe précédent que la législation péruvienne qui définit l’infraction de torture n’inclut pas la dimension du genre. Toutefois, l’article 321 du Code pénal est applicable de la même manière aux hommes et aux femmes. Quant à l’infraction du viol, elle est définie à l’article 170 du Code pénal, indépendamment de l’infraction de torture.

99.En 2007, le Congrès de la République a été saisi d’une initiative législative (projet de loi no 1707/2007/CR) qui a pour but l’incorporation dans la législation nationale du Statut de Rome qui fait du viol un crime contre l’humanité lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique. Le pouvoir exécutif a aussi présenté à l’Assemblée législative un avant-projet de réforme du Code pénal à cet égard.

D.Article 10

1.Réponse aux questions posées au paragraphe 9 de la liste de points à traiter

Police nationale

100.Le Manuel des droits de l’homme à l’usage des forces de police, adopté en vertu de l’arrêté ministériel no 1452-2006-IN, a pour but d’encourager et de renforcer le respect et la protection des droits de l’homme de la part des fonctionnaires de la Police nationale dans l’exercice de leurs fonctions. Le Manuel est d’application obligatoire dans la pratique, mais aussi dans les programmes de formation et de spécialisation de la police. Il a donc été décidé d’en diffuser les grands principes et de les intégrer aux programmes d’études à tous les niveaux. Le Manuel définit les techniques et procédures auxquelles doit répondre l’intervention de la police mais contient aussi une partie consacrée aux questions théoriques et aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Il y a lieu de relever qu’il reprend notamment les principes de la Convention contre la torture.

101.Suite à l’adoption du Manuel et à la signature de l’accord de coopération entre le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le Ministère de l’intérieur et en application de la politique des pouvoirs publics soucieux de promouvoir une meilleure connaissance et un plus grand respect des règles relatives aux droits de l’homme chez les membres de la Police nationale, il a été décidé d’instituer un cours annuel de formation de formateurs spécialisés dans les procédures et techniques d’intervention respectueuses des droits de l’homme. Les participants sont soumis à un système de contrôle permanent des connaissances théoriques et pratiques. Des cours de cette nature ont été organisés depuis 2005 sous l’égide de la Commission des droits de l’homme du Ministère de l’intérieur. C’est le Secrétariat permanent de la Commission qui s’occupe de la formation des officiers et sous-officiers de police en la matière (voir annexe 18).

102.En outre, dans le cadre de l’accord conclu avec le CICR, près de 300 formateurs spécialisés dans les droits de l’homme ont été formés, plus de 20 ateliers de formation ont été organisés sur tout le territoire et les Directives à l’intention des forces de police qui participent à des opérations de maintien et de rétablissement de l’ordre ont été adoptées en vertu de l’arrêté vice-ministériel no 033-2009-IN/0103.1 du 17 juillet 2009.

103.Il convient de noter que le Ministère de l’intérieur, en vertu de l’arrêté ministériel no 0394-2007-IN/0103, a créé un registre d’observateurs policiers appelés à participer à des missions de maintien de la paix de l’ONU et de policiers instructeurs spécialisés dans le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme à l’usage des membres des forces de police. Ce registre est tenu par le Secrétariat permanent de la Commission nationale des droits de l’homme du Ministère de l’intérieur et permet de disposer de données à jour sur les policiers instructeurs en droit international humanitaire et en droit international des droits de l’homme. L’arrêt se fonde sur la Constitution et sur la loi no 27741 qui rend obligatoire l’enseignement des droits de l’homme et du droit international humanitaire à tous les niveaux de la formation, ainsi que sur les règles internes du Ministère de l’intérieur en matière d’enseignement et de formation professionnelle du personnel.

Forces armées

104.Les droits de l’homme et le droit international humanitaire ont été inscrits au programme des divers cours dispensés dans les établissements d’enseignement et de formation professionnelle de la marine de guerre, au programme de formation des élèves des écoles d’officiers et de sous-officiers de l’armée de l’air, des écoles de formation et de perfectionnement d’officiers, de techniciens, de sous-officiers et d’élèves officiers de l’armée de terre. Les droits de l’homme et le droit international humanitaire font partie du tronc commun de la formation de base des lieutenants et des cours de perfectionnement des capitaines. L’accent est mis tout particulièrement sur l’enseignement de ces matières dans la formation du personnel appelé à être déployé dans les zones peu développées comme la vallée de l’Apurímac et de l’Ene.

105.Il faut ajouter à cela la création du Centre du droit international humanitaire et des droits de l’homme, établissement universitaire qui forme le personnel civil et militaire à des questions qui touchent au droit international humanitaire et aux droits de l’homme, qui relève du Ministère de la défense. Le Centre est chargé notamment de concevoir et d’organiser des programmes de formation aux droits de l’homme destinés aux membres des Forces armées et fonctionnaires de l’administration. C’est ainsi que des programmes de formation et de sensibilisation ont été mis en place afin de permettre au personnel militaire des Forces armées et aux professionnels civils du secteur public et privé de se spécialiser dans des questions qui touchent au droit international humanitaire et au droit international des droits de l’homme, dans le cadre de cours, de séminaires et d’ateliers organisés au niveau national, soit par le Centre lui-même, soit en concertation avec d’autres institutions avec lesquelles des accords de coopération ont été conclus (voir annexe 19).

106.Entre 2006 et avril 2011, 3 320 personnes − formateurs, spécialistes et promoteurs du droit international humanitaire et des droits de l’homme − ont reçu une formation. Pendant la même période, 32 militaires étrangers et 348 professionnels civils du pouvoir judiciaire, du ministère public, des universités de Lima et des provinces, des municipalités provinciales et des hôpitaux ont également été formés (voir annexe 20).

107.Par ailleurs, la Direction de la promotion et de la diffusion des droits de l’homme du Centre national des droits de l’homme a organisé une conférence-atelier sur le thème «Droits de l’homme, traitement et sécurité pénitentiaires», regroupant 97 professionnels de la prison Modelo Ancón II, afin de promouvoir une culture des droits de l’homme chez les participants.

108.Le Centre de hautes études nationales, institution universitaire de haut niveau rattachée à la défense, est chargé de la formation et du perfectionnement en matière de sécurité, de développement et de défense, et propose des cours postuniversitaires en la matière à l’intention d’officiers de l’armée et de la police et de professionnels civils, qui préparent à une maîtrise dans le domaine des droits de l’homme, du droit international humanitaire et du règlement des conflits.

Institut national pénitentiaire

109.L’Institut national pénitentiaire, organe responsable de l’ensemble du système pénitentiaire, coiffe le Centre national d’études criminologiques et pénitentiaires (CENECP). Le programme du Centre met l’accent sur le respect absolu des droits de l’homme et l’interdiction de tout acte de torture, dans le domaine tant du traitement que de la sécurité pénitentiaires, traitement et sécurité étaient traités de manière transversale dans tous les cours de formation du personnel pénitentiaire. Ces mêmes principes sont mis en relief dans les cours de remise à niveau et de recyclage.

110.Par ailleurs, le Manuel des droits de l’homme à l’usage des agents pénitentiaires a été adopté en vertu du décret présidentiel no 411-2008-INPE/P. Il s’agit d’un instrument normatif élaboré par une commission composée de représentants de l’INPE et de la Commission des droits de l’homme (COMISEDH), avec le concours du Bureau du Défenseur du peuple et du CICR.

111.Le Manuel proscrit «expressément» les actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des personnes privées de liberté et fait interdiction aux agents pénitentiaires de commettre ou d’autoriser des actes de torture dans l’exercice de leurs fonctions. Il contient également une description des éléments constitutifs du délit de torture tel que qualifié dans le Code pénal, rédigée en termes clairs et compréhensibles, et établit une distinction entre la torture et d’autres délits comme le délit de coups et blessures graves ou d’abus d’autorité.

112.L’INPE a conclu un accord avec la Commission des droits de l’homme qui prévoit que les deux institutions unissent leurs efforts pour garantir la mise en œuvre de programmes de formation aux droits de l’homme destinés au personnel de l’INPE et agissent en concertation pour recenser les facteurs qui accroissent le risque d’atteinte aux droits de l’homme.

113.Le personnel pénitentiaire reçoit également une formation sur des questions qui touchent à l’usage de la force à l’égard des détenus, en application de l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, de l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement, et d’autres instruments internationaux, grâce à l’initiative de diverses institutions qui s’occupent de la défense des droits de l’homme comme le Bureau du Défenseur du peuple et la Commission épiscopale d’action sociale.

Ministère public

114.Le ministère public encourage la participation des procureurs et des agents administratifs de ses services à des manifestations de niveau universitaire − séminaires, ateliers de formation, congrès et autres − portant sur la question des violations des droits de l’homme, et a autorisé à y participer le Procureur principal en charge de la coordination, les procureurs principaux, les procureurs provinciaux, les procureurs provinciaux adjoints et les agents administratifs du Système spécialisé, afin de leur permettre de se former et de se perfectionner. Des manifestations de cet ordre ont été organisés par la Coordinadora Nacional de Derechos Humanos; l’Institut pour la démocratie et les droits de l’homme de l’Université catholique pontificale du Pérou; la Commission des droits de l’homme; l’Équipe péruvienne d’anthropologie légale; le Bureau du Défenseur du peuple et d’autres institutions analogues. L’École du ministère public a elle aussi organisé des activités de niveau universitaire sur des questions touchant aux droits de l’homme, au crime de lèse-humanité et à la torture (voir annexe 21).

2.Réponse aux questions posées au paragraphe 10 de la liste de points à traiter

115.L’Institut de médecine légale, qui dépend du ministère public, est chargé de la formation du personnel spécialisé dans la détection et le diagnostic des cas de torture et organise à ce titre des cours, ateliers et/ou séminaires de formation à des fins de perfectionnement du personnel professionnel, technique et administratif.

116.L’Institut présente chaque année à l’École du ministère public une liste des cours de formation qu’il y aurait lieu d’organiser pour son personnel, liste qui est ensuite soumise à l’approbation du Procureur de la nation. Un séminaire et un atelier sur le thème de la torture se sont déroulés en 2008. Le premier, organisé avec la participation d’intervenants internationaux et d’experts nationaux, était consacré aux instruments internationaux relatifs à la documentation des cas de torture et à leur application au Pérou, et regroupait 65 fonctionnaires de l’Institut; le second, organisé avec la participation d’intervenants péruviens et colombiens, était consacré au Manuel pour enquêter efficacement sur la torture, au Protocole d’Istanbul, et regroupait 65 fonctionnaires de l’Institut.

117.Dans le cadre de la formation du personnel de l’Institut, un groupe de travail a été créé en mars 2010 pour élaborer un protocole pour la détection des lésions consécutives à des actes de torture chez des individus sains. Ce groupe est formé de plusieurs professionnels de diverses disciplines, à savoir trois psychiatres, trois psychologues et deux médecins légistes. En outre un projet de guide pour la détection des cas de torture est en cours d’examen par les organes compétents et devrait être approuvé prochainement.

E.Article 11

1.Réponse aux questions posées au paragraphe 11 de la liste de points à traiter

118.Il importe de préciser que la Constitution stipule que la personne humaine et le respect de sa dignité sont le but suprême de la société et de l’État. À cet égard, le nouveau Code de procédure pénale institue un système de garanties conforme à la Constitution et au droit international, et remédie ainsi aux lacunes de l’ancien Code qui reposait sur un système inquisitoire. Le nouveau contient un ensemble de règles concernant les droits du prévenu. C’est ainsi que l’article 71 prévoit que le prévenu peut faire valoir, soit personnellement soit par l’intermédiaire de son défenseur, les droits que lui confèrent la Constitution et les lois, dès le début de l’instruction et jusqu’à la fin du procès. Il est dit expressément que les juges, les procureurs ou les membres de la Police nationale sont tenus d’informer immédiatement le prévenu de ses droits dans des termes compréhensibles.

119.Le nouveau Code de procédure pénale prévoit en outre que pour garantir le respect effectif des droits de la personne mise en cause à tous les stades de la procédure, ce point devra être consigné dans un procès-verbal signé de l’intéressé et de l’autorité compétente (art. 71, al. 3).

120.D’autres droits de la personne mise en examen sont inhérents aux garanties de procédure reconnues par la Constitution et les instruments relatifs aux droits de l’homme, parmi lesquels le droit de ne pas faire l’objet de violence morale, psychologique ou physique ni d’être soumis à des actes de torture ou des traitements inhumains ou humiliants. Toutes les formes de vexation sont proscrites. Il importe de noter que la personne placée en détention préventive n’est privée que du droit à la liberté physique et des droits mentionnés dans la décision judiciaire.

121.Les normes qui régissent le régime pénitentiaire reposent sur le principe du respect de la dignité de la personne humaine et sont contenues dans le Manuel des droits de l ’ homme à l ’ usage du personnel pénitentiaire, document établi à l’intention des agents qui travaillent dans des prisons fermées. Le Manuel énonce en particulier l’interdiction pour ces agents de commettre ou d’autoriser des actes de torture dans l’exercice de leurs fonctions, d’employer la force contre les personnes privées de liberté, sauf s’il y va du maintient de la sécurité et de l’ordre dans les établissements pénitentiaires, d’employer des armes à feu contre les personnes privées de liberté si ce n’est en cas de légitime défense ou pour défendre des tiers, en cas de danger de mort ou de blessures graves, etc.

122.Les méthodes et pratiques relatives au traitement des personnes privées de liberté sont également décrites dans le Manuel, qui contient divers chapitres sur la sécurité dans les établissements pénitentiaires, l’usage de la force, les fouilles corporelles, la gestion des crises, etc. À cet égard, le Centre national d’études criminologiques et pénitentiaires met l’accent sur le respect des droits de l’homme dans l’exercice de la fonction pénitentiaire.

123.Un premier cours sur le respect des droits de l’homme dans les prisons destiné à des fonctionnaires de l’INPE, confié à des fonctionnaires du Comité international de la Croix-Rouge et de la Commission des droits de l’homme, a eu lieu du 1er au 31 mars 2010. Un diplôme de formateur aux droits de l’homme a été décerné aux participants à l’issue du cours.

124.En ce qui concerne la police, outre le texte indiqué au paragraphe 99, le Ministère de l’intérieur a adopté la Directive DPNP no 17-02-2005-B, du 3 janvier 2005, qui a pour objet de définir les normes et procédures que doivent respecter les fonctionnaires de la Police nationale et de faire en sorte que les prisons soient maintenues dans des conditions décentes et que les personnes privées de liberté soient traitées avec humanité dans les locaux de la police, conformément à l’accord conclu entre la République du Pérou et le CICR concernant les visites des détenus.

125.La Directive DPNP no 03-09-2005-B, du 10 février 2005, avait pour objet de définir les normes et procédures régissant l’intervention de la police en cas d’infraction. Elle contient des dispositions relatives au traitement des personnes faisant l’objet d’un contrôle, en état d’arrestation ou appréhendées. La Directive no 001-2006-PNP/CANRPPA, adoptée en vertu de l’arrêté ministériel no 1560-2006-IN, du 28 juin 2006, dans le cadre de l’application graduelle du nouveau Code de procédure pénale, a pour but de définir les procédures applicables aux enquêtes policières dans la circonscription policière de Huacho, qui correspond à la circonscription judiciaire de Huaura. La Directive no 03.03.2007-PNP/CANRPP adoptée en vertu de l’arrêté ministériel no 0649-2007-IN/PNP, du 3 septembre 2007, a pour but de définir les procédures qui doivent régir les enquêtes policières dans la circonscription de la troisième DIRTEPOL-T, district judiciaire La Liberté, toujours dans le cadre de l’application progressive du nouveau Code de procédure pénale. Il y a lieu de noter que le nouveau Code n’est pas encore en vigueur dans toutes les circonscriptions judiciaires.

2.Réponse aux questions posées au paragraphe 12 de la liste de points à traiter

126.Le Plan national de traitement pénitentiaire a été élaboré pour faire face aux problèmes considérables que représentait la situation dans les prisons au Pérou. Il avait pour but, à partir d’une analyse de la situation dans le système pénitentiaire, de concevoir des politiques à court, moyen et long terme concernant le traitement, l’insécurité et l’administration pénitentiaires. Il avait pour objectif stratégique d’offrir aux détenus, comme aux condamnés en passe de réinsertion dans la société, un traitement global respectueux des droits de l’homme. Si son exécution a été progressive, il a eu des effets bénéfiques sur l’amélioration des conditions pénitentiaires. Toutefois, sa mise en œuvre complète constitue pour l’État une entreprise ardue, qui requiert le concours d’autres institutions, comme le Ministère de la justice, le Ministère de l’économie et des finances, le pouvoir judiciaire, le ministère public, le Congrès, etc., qui sont appelées à intervenir dans le domaine par exemple de la dépénalisation, de l’affectation de ressources financières et humaines, ou de l’accélération des procédures judiciaires.

127.L’Institut national pénitentiaire a publié diverses décisions du Comité national pénitentiaire qui touchent au traitement pénitentiaire, dont celle qui s’intitule «Politique pénitentiaire pour 2010 et 2011», qui vise la rééducation, la réadaptation et la réinsertion sociale des condamnés par le biais d’une réduction de la surpopulation et d’une amélioration de l’infrastructure des prisons qui permettront de garantir la sécurité, le traitement des détenus et une bonne gestion des établissements pénitentiaires, de mettre en place un dispositif destiné à assurer la stabilité de la fonction pénitentiaire, de coordonner les activités des diverses institutions, d’offrir aux détenus un traitement axé sur la réinsertion professionnelle, d’assurer la sécurité pénitentiaire et de réduire la violence.

128.La loi no 29709 sur la carrière spéciale des personnels de l’administration pénitentiaire, première loi régissant la carrière du personnel pénitentiaire, a été publiée le 17 juin 2011. Elle réglemente les conditions de carrière et d’avancement, encourage la formation professionnelle et énonce les droits, devoirs et interdictions qui s’appliquent à ces personnels dans l’exercice de leurs fonctions, ainsi que le régime disciplinaire. Le règlement d’application de la loi est en cours d’élaboration.

129.La loi sur la carrière spéciale des personnels de l’administration pénitentiaire a pour but de venir à bout des problèmes liés à l’instabilité d’emploi des agents pénitentiaires, qui avait pour effet d’empêcher les intéressés d’exercer leurs fonctions à titre permanent, et donc entravait l’exécution du Plan.

130.Un certain nombre de normes spécifiques ont été promulguées pour réglementer certains types de procédures. On retiendra notamment les normes qui régissent les procédures d’accompagnement et de transfert des détenus en divers points du pays; la directive sur le travail pénitentiaire applicable au niveau national; le guide des bonnes pratiques pour la manipulation des aliments dans les établissements pénitentiaires rattachés à l’Institut national pénitentiaire; le manuel de procédure relatif à la délivrance d’autorisations de visite aux proches des détenus; l’évaluation des détenus placés en établissement fermé ordinaire à l’échelon national; et le manuel de procédure pour la réception et l’enregistrement du mandat d’arrêt.

131.Des mesures concrètes ont également été prises dans un certain nombre de domaines. Une action a été entreprise pour réduire peu à peu la surpopulation dans les établissements pénitentiaires, au travers de la construction de nouveaux établissements, comme la prison d’Ancón, qui peut accueillir 1 000 détenus en régime fermé spécial (décembre 2004) et le réaménagement d’établissements existants comme la prison Virgen de Fátima (décembre 2008).

132.En outre, de nouveaux pavillons permettant d’accueillir un plus grand nombre de détenus ont été construits dans divers établissements pénitentiaires situés à Ica, Huacho, Huaraz, Chiclayo, Trujillo, Cañete, parmi d’autres. Par ailleurs, la construction de la prison Ancón II, d’une capacité de (2 000) détenus, a été achevée en 2010. D’autres prisons sont en cours de construction à Chincha, Huaraz II et Tarapoto. Il est également prévu de réaménager et d’agrandir la prison d’Yurimaguas; de construire de nouveaux établissements pénitentiaires à Río Negro, province de Satipo, Huanta, province d’Ayacucho; et Zumba, province de Jaén; d’augmenter la capacité d’accueil de la prison de Chimbote; d’agrandir et de réaménager la prison de Tacna (première étape); de construire une cuisine et des ateliers dans la prison de Trujillo; de rénover entièrement la prison de Pucallpa et de l’agrandir; enfin, de réaménager les services de base de la prison de Cajamarca.

133.La grâce présidentielle est une autre manière de venir à bout du problème de la surpopulation. C’est ainsi qu’entre 2006 et le 31 mai 2011 (5 263) détenus ont bénéficié de mesures de grâce (commutation de peine en faveur de ressortissants péruviens et d’étrangers, grâce ordinaire, grâce accordée pour des raisons humanitaires et droit de grâce pour des raisons humanitaires). Il y a lieu d’ajouter qu’un système de surveillance est en cours de mise en place pour les détenus et les condamnés auteurs de délits mineurs.

134.La réforme de la procédure pénale a été mise en marche en juillet 2006, date à laquelle le nouveau Code de procédure pénale dont la mise en œuvre se fait de manière graduelle est entré en vigueur, dans la circonscription judiciaire d’Huaura. Ce nouveau modèle de procédure pénale obéit à une logique distincte de celle qui prévalait selon l’ancien texte, et prévoit notamment une utilisation plus rationnelle de la mise en détention préventive en tant que mesure provisoire de privation de liberté. L’un des principes sur lesquels repose le nouveau texte touche au caractère exceptionnel de la mise en détention préventive, qui est limité aux cas d’absolue nécessité. Cette formule devrait permettre d’en finir avec la situation critique que connaissent les établissements pénitentiaires péruviens qui hébergent des détenus dont la majeure partie n’a pas fait l’objet d’une condamnation. Ce principe permet à tout prévenu d’être assuré que son droit à la liberté de la personne − la liberté de mouvement − ne sera limité qu’à titre exceptionnel, conformément aux dispositions de l’article 268 du nouveau Code, et met fin aux détentions préventives excessives qui étaient de mise dans le pays jusqu’alors.

135.Par ailleurs, le Ministère de l’environnement a conclu avec le Ministère de la justice et l’association Dignidad Humana y Solidaridad un accord de coopération en vue de la réalisation d’un projet associant boisement, écologie et développement humain, le projet «Bosque Hubert Lanssiers», qui a pour but la réinsertion sociale d’anciens détenus en quête d’emploi et de mineurs délinquants auteurs de délits mineurs condamnés à des travaux d’intérêt général auxquels on confie des travaux de reboisement, d’agriculture, d’apiculture et autres activités compatibles avec le statut du Parc.

3.Réponse aux questions posées au paragraphe 13 de la liste de points à traiter

136.Les chiffres dont on dispose concernant le nombre de prisons, la capacité d’accueil des établissements et le nombre de détenus sont les suivants: en avril 2011, on dénombrait 66 établissements pénitentiaires en service relevant des bureaux régionaux, répartis sur tout le territoire, soit une capacité d’accueil totale de 27 521 détenus. Or, en mai 2011, la population carcérale totale est de 48 003 personnes.

137.En ce qui concerne la formation et le travail, les mesures prises par l’Institut national pénitentiaire ainsi que par les organisations de la société civile et les églises, afin de contribuer au traitement pénitentiaire des détenus et de leur permettre d’améliorer leur qualité de vie grâce au travail et aux études ont été en augmentation. À l’heure actuelle, 19 808 détenus travaillent dans les établissements pénitentiaires et 10 509 poursuivent des études.

138.Les gardiens sont au nombre de 3 007 au total. Les gardiens qui sont chargés de la sécurité reçoivent une formation humaniste, fondée sur le respect de la dignité de la personne humaine et des droits de l’être humain, qui met l’accent sur l’interdiction de tout acte de torture ou autre traitement cruel, inhumain ou dégradant.

139.À l’heure actuelle, la formation des agents pénitentiaires comprend des cours sur les droits de l’homme qui ne sont pas enseignés comme une matière à part mais qui imprègnent tout le programme. C’est le Centre national d’études criminologues et pénitentiaires qui dispense cette formation.

4.Réponse aux questions posées au paragraphe 14 de la liste de points à traiter

140.L’une des mesures adoptées pour réduire la surpopulation est, comme on l’a indiqué aux paragraphes 131 et 132, la construction de nouveaux établissements, qui se fait de manière progressive. Autre mesure qui contribue au désengorgement des prisons, plus la commutation de peine, accordée aussi bien aux ressortissants nationaux qu’aux étrangers, la grâce présidentielle et les mesures de grâce ordinaires et les mesures de grâce accordées pour des raisons humanitaires, comme on l’a vu au paragraphe 133. De plus, un système de surveillance électronique des prévenus et des personnes condamnées à des délits mineurs est en train d’être mis en place.

141.Pour ce qui est de l’accès aux professionnels de santé, la situation s’est améliorée sur tout le territoire au cours des dernières années et leur nombre a été augmenté, sans pour autant permettre de répondre aux besoins. On compte aujourd’hui 54 médecins répartis sur tout le territoire.

142.Les avocats commis d’office sont désignés parmi les défenseurs publics (anciens «défenseurs d’office») de la Direction générale de la défense publique du Ministère de la justice. Les défenseurs publics ont notamment pour fonction de rencontrer une fois par semaine les détenus dans la prison. Afin de protéger les droits des personnes privées de liberté, la Direction générale de la défense publique a créé, dans toutes les prisons du pays, un bureau de la défense publique auquel est affecté un défenseur public chargé de venir en aide aux prévenus et aux condamnés qui ne disposent pas d’un avocat ou qui n’ont pas les moyens d’en engager un. On trouvera à l’annexe 22 des données concernant le nombre de détenus bénéficiant de l’assistance de défenseurs publics.

5.Réponse aux questions posées au paragraphe 15 de la liste de points à traiter

143.En application de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus et du Plan national de traitement pénitentiaire, qui recommandent de confier la gestion des établissements pénitentiaires aux autorités civiles, la Police nationale transfère ses pouvoirs en la matière à l’Institut national des prisons, mais de manière progressive, car le nombre de personnes nécessaires pour répondre à la totalité des besoins des établissements pénitentiaires nationaux n’est pas suffisant. Cependant tout a été mis en œuvre pour atteindre cet objectif. C’est ainsi que ces dernières années l’Institut national pénitentiaire a pris en main la gestion de plusieurs établissements pénitentiaires comme la prison Miguel Castro Castro à Lima, le quartier des femmes de la prison de Chorrillos, et les prisons de Puno, Tarapoto et Iquitos.

6.Réponse aux questions posées au paragraphe 16 de la liste de points à traiter

144.La prison d’Yanamayo n’a pas été fermée car les améliorations nécessaires pour préserver la dignité des détenus et offrir à la population carcérale les services nécessaires ont été apportées.

145.L’établissement héberge aujourd’hui 329 détenus et bénéficie des services de psychologues, de travailleurs sociaux, de juristes et de médecins. Il offre aussi des possibilités de travail et d’études aux détenus, est équipé des services essentiels comme l’eau, l’électricité, etc., et dispose d’une unité mobile d’urgence permettant de parer à toute éventualité.

7.Réponse aux questions posées au paragraphe 17 de la liste de points à traiter

146.Comme on l’a déjà dit, le Ministère de l’intérieur a adopté la Directive DNP no 17‑02‑2005‑B, en date du 3 janvier 2005, qui a pour but de définir les normes et procédures que doivent respecter les fonctionnaires de la Police nationale afin que les détenus soient logés dans des conditions décentes et traités avec humanité dans les locaux de la police, conformément à l’accord conclu par le Pérou avec le CICR concernant les visites des détenus. De plus, le Manuel des droits de l’homme à l’usage des forces de police précise également les règles en matière de protection des droits de l’homme que les membres de la Police nationale doivent respecter dans l’exercice de leurs fonctions.

147.Les institutions autonomes que sont le Bureau du Défenseur du peuple et le parquet ont une mission de contrôle, qui prend la forme de visites périodiques qui permettent de s’assurer que les normes sont respectées et de contrôler les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires et les locaux de la police.

148.Le mandat du ministère public relatif aux visites périodiques est défini à l’alinéa 8 de l’article 95 de la loi organique du ministère public, décret législatif no 052, qui prévoit qu’il incombe au procureur provincial en matière pénale de se rendre dans les établissements pénitentiaires et les locaux de détention provisoire afin de recueillir les plaintes et réclamations des détenus et des condamnés au sujet de leur situation judiciaire et de leurs droits constitutionnels.

149.Le mandat du bureau du Défenseur du peuple relatif aux visites périodiques est défini dans la Constitution et la loi organique du bureau du Défenseur du peuple. L’article 16 de la loi prévoit que, pour favoriser l’exercice de cette fonction, les autorités, fonctionnaires et agents des institutions publiques ont le devoir de coopérer. Coopérer avec le bureau du Défenseur du peuple signifie lui fournir les informations qu’il demande et lui faciliter l’inspection des établissements pénitentiaires et des locaux de la Police nationale qu’il est appelé à effectuer, y compris l’autoriser à se présenter sans préavis pour obtenir les données ou informations dont il a besoin, à rencontrer personnellement des pensionnaires ou à examiner des dossiers, rapports, documents, fichiers et tout autre élément utile à l’exercice de ses fonctions. Ce principe s’applique également dans le cadre du Programme des affaires criminelles et pénitentiaires et du Programme de protection des droits des personnes détenues dans des locaux de la police, ainsi qu’aux bureaux locaux du bureau du Défenseur du peuple répartis sur tout le territoire.

8.Réponse aux questions posées au paragraphe 18 de la liste de points à traiter

150.Le Code de l’exécution des peines fixe le régime disciplinaire applicable aux détenus permettant de faire régner le calme et de maintenir l’ordre dans les établissements pénitentiaires. Selon le Code, l’isolement est une sanction disciplinaire, qui n’est imposée que si le détenu se montre agressif ou violent et perturbe la paix de l’établissement d’une manière grave et répétée. La durée du placement à l’isolement ne doit pas dépasser trente jours, sauf si la faute disciplinaire est commise alors que le détenu se trouve déjà placé à l’isolement, auquel cas la durée de la peine peut être prolongée mais ne doit pas dépasser quarante-cinq jours.

151.Le détenu est placé à l’isolement dans le quartier qu’il occupe habituellement ou dans celui que décide l’administration pénitentiaire. Pendant la durée de la peine, il est autorisé à sortir dans la cour une heure par jour, a droit à la visite d’une personne pendant quatre heures tous les quinze jours, ainsi qu’à la visite d’un prêtre ou d’un agent pastoral ou d’un représentant d’institutions humanitaires. Le droit à la défense ne souffre aucune limite.

152.La mesure d’isolement est soumise au principe de la légalité et ne peut être appliquée qu’en cas de faute grave (art. 66 du Règlement d’application du Code de l’exécution des peines) et est imposée à l’issue d’une procédure disciplinaire dans laquelle il jouit de toutes les garanties et il peut exercer un recours en réexamen ou faire appel.

153.Le placement à l’isolement n’est pas appliqué aux femmes enceintes, aux femmes ayant accouché depuis moins de six mois, à celles qui sont accompagnées de leurs enfants et aux personnes de plus de 60 ans. Dans ces cas-là, le Conseil technique pénitentiaire doit opter pour une autre forme de sanction.

154.Les civils extrêmement dangereux, détenus ou condamnés pour terrorisme, trahison, atteinte à l’administration publique, trafic illicite de drogues ou crimes de lèse-humanité sont placés dans le centre de réclusion de haute sécurité du Callao. Le régime qui leur est applicable est prévu dans le décret suprême no 024‑2001‑JUS qui contient le règlement du centre de réclusion de haute sécurité de la base navale du Callao.

F.Article 13

Réponse aux questions posées au paragraphe 19 de la liste de points à traiter

155.La directive FAP 35-4 de l’armée de l’air précise les procédures à suivre pour garantir la protection des personnes qui effectuent leur service militaire à titre volontaire qui dénoncent des actes de torture.

156.La loi no 27378 prévoit des atténuations de peine pour les personnes impliquées dans diverses infractions dans le domaine du crime organisé qui collaborent efficacement. Parmi ces infractions figure les crime contre l’humanité visés aux chapitres I à III du titre XIV-A du Livre II du Code pénal, parmi lesquels la torture. L’article 21 définit les mesures de protection qui participent aux procédures pénales visées par la loi en tant que collaborateurs, témoins, experts ou victimes.

157.Par ailleurs, pour donner effet aux dispositions de l’alinéa c de l’article 95 et de l’alinéa 4 de l’article 170 du nouveau Code de procédure pénale qui reconnaissent les droits des victimes, le ministère public a mis en place le Programme d’aide aux victimes et aux témoins. Ce programme est régi par la décision no 1558-2008-MP-FN du bureau du Procureur général qui contient des améliorations par rapport au premier règlement, contenu dans la décision no 053-2008-MP-FN.

158.Le Programme fixe les normes et procédures relatives aux mesures que les procureurs doivent prévoir en faveur des victimes et des témoins qui se trouvent en danger en raison de leur participation à une enquête ou a une procédure pénale. Il contient une série de mesures visant à assurer la protection et le bien-être des intéressés afin de leur permettre de faire leur déposition et de participer à l’enquête sans risque de représailles.

159.Afin de faciliter la mise en œuvre du Programme, le ministère public a créé une unité centrale d’assistance aux victimes et aux témoins chargée de diriger, de superviser et de coordonner l’exécution du Programme; des unités de district, dans les circonscriptions judiciaires dans lesquelles le nouveau Code de procédure pénale a été mis en œuvre, qui sont chargées de l’exécution des mesures d’assistance aux victimes décidées par le procureur; et des unités d’assistance immédiate, qui interviennent dans les zones éloignées du siège des tribunaux où se trouvent des parquets ordinaires ou mixtes.

160.Les unités de district disposent des services d’un avocat, d’un psychologue et d’un travailleur social et les unités d’assistance immédiate d’un avocat, auxquels un psychologue et un travailleur social viendront peu à peu s’ajouter.

161.L’assistance légale consiste à informer les victimes et les témoins de leurs droits dans le cadre de l’enquête et du procès, ainsi que des mesures de protection que les autorités compétentes peuvent leur offrir. Le soutien psychologique a pour but de les aider à surmonter le traumatisme que l’infraction a pu occasionner, et le rôle du travailleur social consiste à faire le bilan de la situation familiale et socioéconomique de la victime ou du témoin afin d’adapter les mesures à ses besoins.

162.En 2010, 79 bureaux d’assistance aux victimes et aux témoins avaient été mis en place dans tout le pays dans le cadre du Programme. En 2009 et 2010, 26 501 personnes leur ont été adressées par les procureurs et 55 859 entretiens avec des psychologues, des avocats et des travailleurs sociaux ont été enregistrés. Enfin, il existe plus de 50 réseaux d’aide répartis sur tout le territoire, composés d’institutions publiques et d’organisations privées qui s’occupent gratuitement des cas complexes appelant un traitement spécialisé qui leur sont adressés par les unités d’assistance.

163.Le Ministère de la justice a adopté un règlement pour la protection des témoins, des experts, des victimes et des collaborateurs conformément aux dispositions du titre V du nouveau Code de procédure pénale. Le règlement définit les normes, procédures et directives concernant les mesures de protection accordées aux témoins, experts, victimes ou collaborateurs qui se trouvent en danger à cause de leur participation à une procédure pénale, ainsi qu’aux conjoints, compagnons, parents, enfants ou frères et sœurs de ces personnes.

164.Ce même règlement (décret suprême no 003-2010-JUS) charge le ministère public de mettre en place le Programme intégral de protection des témoins, des victimes ou des collaborateurs qui participent à des enquêtes et des procédures pénales. Il est d’application immédiate dans les circonscriptions judiciaires dans lesquelles le nouveau Code de procédure pénale est en vigueur.

165.Quand, pour protéger le droit à la défense de l’accusé, il est nécessaire de révéler l’identité de la personne, les mesures de protection qui peuvent être prises, soit d’office soit à la demande d’une partie, sont notamment les suivantes: protection de la police, préservation de l’anonymat et recours à des méthodes empêchant de reconnaître visuellement la personne et à des moyens mécaniques ou technologiques (vidéoconférence par exemple). De nouveaux documents d’identité ne sont établis que dans des cas exceptionnels. Selon le règlement, l’Unité spéciale d’enquête, de vérification et de protection de la Police nationale agit sous la supervision du procureur.

166.Cet ensemble de règles s’applique aussi aux personnes qui dénoncent des cas de torture, qui constituent une infraction pénale, et les dispositifs de protection sont enclenchés lorsque l’intéressé risque de faire l’objet de mesures d’intimidation ou de représailles, car il n’existe pas de dispositif spécial pour les victimes d’actes de torture − mesures de sécurité ou personne chargée de les appliquer.

G.Article 14

1.Réponse aux questions posées au paragraphe 20 de la liste de points à traiter

167.Le Plan national des droits de l’homme, instrument de politique nationale qui définit les mesures à prendre pour mieux coordonner les efforts de promotion et de protection des droits de l’homme des entités publiques et tente de mettre la législation et la pratique nationales en conformité avec les obligations internationales du Pérou en matière de droits de l’homme, a pour objectif stratégique la mise en œuvre des recommandations du rapport final de la Commission Vérité et Réconciliation et suit à cet effet les directives concernant les résultats escomptés quant à la réalisation de cet objectif.

Renforcement du sous-système de justice chargé d’enquêter sur les crimes contre l’humanité et les violations des droits de l’homme, de juger les responsables de ces actes et d’imposer des sanctions

168.Dans le sous-système spécialisé dans les droits de l’homme, la Chambre pénale nationale a compétence pour connaître des crimes contre l’humanité et des infractions de droit commun qui constituent des violations des droits de l’homme et des infractions connexes. Des améliorations y ont été apportées progressivement afin de faire en sorte que ce genre d’infraction soit pris en compte comme il se doit par la justice. La Chambre pénale nationale se compose de cinq tribunaux collégiaux (formés de trois juges), dont deux sont chargés exclusivement de cette catégorie d’infraction et ont compétence au niveau national (tribunaux A et B).

169.Au deuxième échelon de la hiérarchie, on trouve quatre tribunaux supraprovinciaux qui ont leur siège à Lima, et qui ont aussi compétence au niveau national pour connaître des infractions ci-dessus. Par ailleurs, en raison de la complexité des affaires qui relèvent du sous-système, du temps qui s’est écoulé depuis la survenance des faits, du fait que la majeure partie des cas de violation des droits de l’homme se sont produits dans les départements de Junín, Ayacucho et Huánuco, des tribunaux supraprovinciaux ont aussi été mis en place dans les circonscriptions judiciaires de Huánuco et Junín et d’Ayacucho, avec compétence exclusive pour connaître des crimes contre l’humanité et des infractions de droit commun qui constituent des violations des droits de l’homme et des infractions connexes dans les limites de leur circonscription. Tout en haut du sous-système se trouvent les deux Chambres pénales de la Cour suprême.

170.Il y a lieu de relever que les pouvoirs et compétences de la Chambre pénale nationale, qui connaît des crimes contre l’humanité et des infractions de droit commun qui constituent des violations des droits de l’homme et des infractions connexes, sont ceux du sous-système spécialisé dans les droits de l’homme, qui est composé de juges et de tribunaux collégiaux spécialisés exclusivement dans ce domaine.

171.Entre 2006 et février 2011, 48 personnes accusées de violations des droits de l’homme ont été condamnées et 150 acquittées. Pendant la même période, 62 affaires de violation des droits de l’homme portées devant la Chambre pénale nationale ont été jugées. À l’heure actuelle, 28 affaires du même ordre sont en cours devant cette même instance et 24 devant les quatre tribunaux supraprovinciaux.

172.Pour ce qui est du ministère public, des bureaux du procureur spécialisés ont été créés, de même qu’un bureau du Procureur supérieur national, ayant compétence pour de telles affaires. Au niveau inférieur, on trouve 13 bureaux du procureur provinciaux compétents en matière de droits de l’homme, 4 bureaux du procureur supraprovinciaux à Lima; le premier et le second bureaux du procureur supraprovinciaux d’Ayacucho et les deux bureaux du procureur supraprovinciaux à Pichari − Ayacucho, auxquels il faut ajouter le bureau du procureur supraprovincial de Huancavelica et enfin le bureau du procureur provincial spécialisé dans les affaires de terrorisme et de crimes contre l’humanité de Huánuco. Au-dessus se trouvent 3 bureaux du procureur supérieurs nationaux qui constituent le bureau du Procureur supérieur national, et tout en haut de l’échelle les 2 bureaux du Procureur suprême.

173.En ce qui concerne la recherche des personnes disparues et l’exhumation des fosses clandestines, la capacité de l’Institut de médecine légale a été renforcée. Le bureau du procureur en charge de la coordination du bureau du Procureur supérieur national et les bureaux du procureur supraprovinciaux ont donné instruction aux procureurs d’établir des rapports trimestriels sur les progrès réalisés et les plans relatifs aux enquêtes fondées sur une approche anthropologique et médico-légale afin de coordonner leurs travaux avec ceux de l’Institut de médecine légale.

Mise en place d’un système de protection des victimes, témoins, juges et procureurs, et autres personnes impliquées dans des affaires de violation des droits de l’homme

174.Le titre V du nouveau Code de procédure pénale prévoit des mesures de protection en faveur des témoins, des experts, des victimes ou des collaborateurs qui participent à des procédures pénales. Le Programme d’assistance aux victimes et aux témoins a été créé dans le cadre de la mise en œuvre du Code et confié au ministère public, qui a été chargé également du lancement du Programme intégral de protection des témoins, des experts, des victimes et des collaborateurs qui participent à des enquêtes et des procédures pénales.

175.Comme on l’a déjà dit, la loi no 27378 précise les mesures de protection applicables aux personnes qui participent à titre de collaborateurs, de témoins, d’experts ou de victimes, à des procédures pénales, notamment celles engagées pour des crimes contre l’humanité visés aux chapitres I, II et III du titre XIV-A du Livre II du Code pénal.

176.Il y a lieu de citer le projet de loi no 175/2006-CR, qui a pour objet de remédier à un certain nombre de problèmes apparus dans l’application de la loi ci-dessus et qui ont été mis en relief dans le rapport du Défenseur du peuple no 139 consacré au bilan de ce qui a été fait en matière de réparation et de ce qui reste à faire «A cinco años de los procesos de reparación y justicia en el Perú. Balance y Desafíos de una tarea pendiente».

Élaboration et exécution d’un plan national pour les enquêtes fondéessur une approche anthropologique et médico-légale qui doit servir de basepour l’identification des victimes et dont les résultats devraient servird’éléments de preuve dans les affaires de violation des droits de l’hommesurvenue dans le pays

177.L’Équipe spécialisée de médecine légale de l’Institut de médecine légale a établi le projet de plan national concernant les enquêtes fondées sur une approche anthropologique médico-légale, qui a reçu l’approbation du Service de la coordination du bureau du Procureur général et des bureaux du Procureur supraprovinciaux et a été transmis au bureau du Procureur général pour approbation.

178.Entre 2002 et 2010, l’Équipe spécialisée en médecine légale a retrouvé 1 579 cadavres dont 804 ont été identifiés. Les restes de 660 d’entre eux ont été remis aux familles.

179.Un certain nombre de problèmes demeurent néanmoins qui empêchent d’identifier les restes des victimes, comme la difficulté de disposer d’échantillons génétiques des proches des intéressés pour des raisons multiples (éloignement, ignorance de la méthode, conviction que l’intéressé se trouve ailleurs, etc.). Pour tenter de résoudre le problème, l’Institut de médecine légale a présenté en 2010 à la Division de la coopération internationale du ministère public un projet relatif à l’acquisition des entrées d’ordinateur et des programmes informatiques nécessaires pour pouvoir gérer et traiter les données génétiques. Mais les moyens financiers restent à trouver.

Achèvement de la réforme des tribunaux militaires, dont la compétence et les prérogatives ont été redéfinies sur la base de la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme et du Tribunal constitutionnel

180.La juridiction militaire et policière est régie par la loi no 29182 sur l’organisation et les fonctions de la juridiction militaire et policière, modifiée par le décret législatif no 1096; par le règlement d’application de la loi, contenu dans l’arrêté no 066-2009-TSMP/SG et par le règlement du système de progression de carrière et de l’accès à la charge de magistrat pour les militaires et les policiers, contenu dans l’arrêté no 130-2010-TSMP/SG. Conformément à la Constitution, à la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme et du Tribunal constitutionnel, ainsi qu’aux normes en vigueur, elle n’est habilitée à juger ni des civils ni des militaires pour des infractions de droit commun et des crimes contre l’humanité (voir par. 30 à 32).

181.Le décret législatif no 961, qui contient le Code de la justice militaire, a été promulgué en 2006. À la suite d’une requête en inconstitutionnalité, le Tribunal constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution une trentaine d’articles. Le décret législatif no 1094 qui contient le Code pénal militaire et policier a été promulgué en août 2010. Il trace les grandes lignes des procédures pénales engagées contre des militaires et indique les infractions qui peuvent donner lieu à l’ouverture d’une enquête et à des sanctions.

Mise en œuvre du Plan intégral de réparation − PIR (RE 1) et renforcementde la Commission multisectorielle de haut niveau − CMAN (RE 4)

182.La loi no 28592, promulguée en juillet 2005 porte création du Plan intégral de réparation. Le cadre normatif et les règles de procédures ont été contenus dans le décret suprême no 015-2006-JUS, modifié par le décret suprême no 003-2008-JUS, no 0047-2010-PCM no 051-2011-PCM.

183.La Commission multisectorielle de haut niveau a été créée en 2004. Elle est chargée de la coordination et du suivi des mesures et politiques adoptées par l’État en faveur de la paix, des réparations collectives et de la réconciliation nationale. Le Registre unique des victimes a été créé en 2006. Il a été confié au Conseil des réparations, organe collégial chargé de recenser les victimes de la violence qui a secoué le pays de 1980 à 2000, et de leur attribuer le statut de bénéficiaire. La loi no 28592 avait pour but de renforcer la Commission multisectorielle de haut niveau, qui a été chargée de concevoir les programmes de réparation individuelle et collective et d’assurer, par l’intermédiaire de son secrétariat exécutif, la coordination et le suivi de l’exécution du Programme intégral de réparation aux niveaux sectoriel, régional et local. À cet égard, le rattachement de la Commission multisectorielle de haut niveau à la présidence du Conseil des ministres, la création du Conseil des réparations et l’établissement du Registre unique des victimes, ont contribué à dynamiser la mise en œuvre du Plan intégral de réparation.

184.Pour ce qui est du financement, un montant de 10 millions de soles a été affecté à la mise en œuvre du Programme intégral de réparation, pour la période 2004-2005. Pour l’exercice 2006, 45 millions de nouveaux soles ont été inscrits au budget, dont 1 million était destiné à financer le recensement pour la paix qui devait être organisé par le Ministère de la condition féminine et du développement social. Pour la période allant de 2007 à 2011, des crédits d’un montant de 189 951 269,57 nouveaux soles ont été prévus pour financer des mesures de réparation dans le cadre de la mise en œuvre des programmes rattachés au Plan.

185.Les programmes de réparations prévus dans le Plan portent sur le rétablissement des citoyens dans leurs droits, l’éducation, la santé, l’amélioration de l’accès au logement, et des réparations symboliques, économiques et collectives. Ils s’adressent, selon le cas, aux victimes (directes et indirectes) individuelles et/ou collectives (communautés de paysans et communautés autochtones et autres lieux habités) de la violence.

186.Des mesures ont pu être prises afin d’assurer la coordination et le suivi de l’exécution des divers programmes de réparations au niveau intersectoriel ou intergouvernemental pendant la période couverte par le présent rapport, comme en témoigne le tableau ci-après:

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Total

Affectation de crédits

10 00 000,00

45 000 000,00

40 000 000,00

40 000 000,00

40 000 000,00

40 000 000,00

40 000 000,00

255 000 000,00

Programme de réparations collectives

40 000 000,00

40 000 000,00

40 000 000,00

40 000 000,00

20 000 000,00

180 000 000,00

Programme de réparations économiques

20 000 000,00

20 000 000,00

Divers

10 000 000,00

45 000 000,00

55 000 000,00

Exécution

10 000 000,00

45 000 000,00

28 775 729,36

37 136 345,13

52 416 037,90

27 959 753,95

19 993 805,87

221 281 672,21

Programme de réparation en matière de santé

187.La Commission multisectorielle de haut niveau a adopté les directives relatives à la mise en œuvre du Programme de réparations en matière de santé, qui définissent la politique du Ministère de la santé en la matière et les services impliqués aux divers échelons de l’administration. C’est ainsi que le décret suprême no 006-2006-SA, qui précise l'aide à accorder aux bénéficiaires du programme a été promulgué, suivi du décret suprême no 015-2006-SA, qui prévoit d'élargir la couverture de l’assurance-santé intégrale pour les populations dispersées et marginalisées des hauts plateaux andins et de la région amazonienne, les victimes de la violence sociale (femmes victimes de stérilisation forcée), les victimes de la violence politique que le pays a connue entre 1980 et 2000, et les agents de santé communautaires. La couverture a été étendue notamment aux services de santé mentale, au traitement du cancer et à d’autres services de santé. Les bénéficiaires du Plan intégral de réparation peuvent ainsi être soignés en tant que groupe cible dans les établissements sanitaires qui relèvent du Ministère de la santé.

188.En mars 2011, 29 012 personnes au total bénéficient du système d’assurance-santé en tant que groupe cible victime de la violence. Ces personnes se répartissent comme suit: 16 964 victimes de la violence qui a sévi entre 1980 et 2000; 151 femmes victimes de stérilisation forcée; 1 149 personnes dont l’affaire avait été classée et 10 748 intégrées au programme suite aux recommandations de la Commission interaméricaine des droits de l’homme.

189.Dans le cadre du Programme intégral de réparation et de la Stratégie nationale de santé mentale et de culture de la paix, le Ministère de la santé a mis en place dans quatre zones particulières (Ayacucho, Huancavelica, Apurímac et Cusco) des équipes itinérantes qui sont devenues permanentes en 2006. La présence de ces équipes, composées de professionnels (psychiatres, psychologues et infirmiers) a été étendue aux départements d’Ucayali, San Marín, Puno, Pasco, Huánuco et Junín, puis, en 2009, à Ancash, Cajamarca et La Libertad.

190.Par ailleurs, le Plan national de santé mentale et le Plan national concerté de santé pour la période allant de 2007 à 2020 accordent la priorité aux victimes de la violence politique. De plus, la Stratégie nationale pour la santé mentale et une culture de la paix dispose de 11 équipes permanentes dans le cadre du Programme intégral de réparation, qui sont à l’œuvre dans 351 communautés cibles et déploient des activités dans divers domaines de formation, récupération intégrale des victimes grâce à une action communautaire et à une action clinique, promotion de la santé et prévention des maladies. On trouvera de plus amples précisions sur les mesures de réparation dans le domaine de la santé à l’annexe 23.

Programme de réparations dans l’éducation

191.Le Règlement d’application de la loi portant création du Programme intégral de réparation, approuvé en vertu du décret suprême no 015-2006-JUS, prévoyait des restrictions quant aux modalités du Programme de réparations dans l’éducation et aux bénéficiaires. De plus, parmi les critères requis pour avoir accès au programme au niveau universitaire figurait l’existence d’accords entre la Commission multisectorielle de haut niveau et des institutions publiques universitaires ou techniques. Du fait de ces restrictions les choses n’avaient guère progressé entre 2006 et 2010.

192.Le Règlement d’application de la loi no 28592 a été modifié récemment en vertu du décret suprême no 047-2011-PCM. Peuvent désormais accéder au système non seulement les personnes qui ont interrompu leurs études mais les proches de certaines victimes qui n’ont pas nécessairement interrompu leurs études, comme les enfants des victimes décédées ou disparues et les enfants né du viol de la victime. Autres nouveautés: les universités doivent réserver des places aux victimes et les exonérer des frais de diplôme universitaire.

193.À ce jour, sept universités accueillent des victimes de violence. Deux leur accordent l’entrée directe, cinq leur réservent des places, et six ont décidé en outre de les exonérer des frais de scolarité. L’École d’officiers de la Police nationale accorde aux candidats l’exonération des frais d’inscription et des frais d’examen médical. À partir de l’année universitaire 2012, les universités publiques de tout le pays doivent prévoir dans leur règlement et leurs plans d’inscriptions de réserver des places pour les bénéficiaires du programme.

Programme de rétablissement des victimes dans leurs droits

194.Le Registre national de l’état civil (RENIEC) a délivré un document national d’identité aux personnes qui habitent dans les zones considérées comme ayant été fortement et très fortement touchées par la violence. Ces mesures ont été prises au demeurant par les autorités compétentes dans le cadre de leurs fonctions, et non à titre de mesure de faveur à l’intention des victimes.

Programme de promotion et d’amélioration de l’accès au logement

195.Le programme Mi Lote a été créé en vertu du décret suprême no 003-2009-VIVIENDA. Il s’agit d’un projet de construction de logements sur des terrains appartenant à l’État, situés en zone urbaine, viabilisés et répondant aux prescriptions légales, qui a pour but de répondre aux besoins des personnes défavorisées. L’annexe au règlement de ce programme, approuvé en vertu de l’arrêté ministériel no 180-2009-VIVIENDA, établit un système de points, selon lequel des points supplémentaires sont attribués aux victimes de violations des droits de l’homme (c’est-à-dire soit le chef de famille ou les personnes à charge qui ont le statut de victimes du terrorisme, ou le chef de famille qui a perdu son conjoint et/ou des personnes à charge à la suite d’actes de terrorisme; soit le chef de famille qui a perdu ses deux parents ou l’un des deux dans des actes de terrorisme et qui, au moment des faits, se trouvait à leur charge, sous réserve que le statut de l’intéressé ait été authentifié par l’autorité compétente).

Programme de réparations symboliques

196.Le «Libro de los Pueblos Heroicos de la Patria» a été créé en vertu de l’arrêté ministériel no 187-2007-PCM. Il a pour objet de reconnaître les communautés qui ont joué un rôle actif dans la pacification du pays et la défense de la démocratie et de l’état de droit et de leur rendre hommage. Les directives définissant les modalités de l’élaboration de cet ouvrage sont contenues dans l’arrêté ministériel no 363-2010-PCM.

Programme de réparations collectives

197.Le programme de réparations collectives a pour objet de «contribuer à la reconstruction du capital social et institutionnel, matériel et économique des familles et des communautés rurales et urbaines secouées par la violence». Il permet de financer à hauteur de 100 000 nouveaux soles des projets sélectionnés par les localités touchées par la violence. Ce sont les autorités localesdu secteur en question qui sont chargées de leur exécution.

198.En mai 2011, 1 605 communautés avaient bénéficié d’un financement au titre du programme; 1 628 projets avaient été mis en œuvre, pour un montant total de 189 963 390,29 nouveaux soles, et avaient touché 749 038 personnes. Le montant affecté correspond à un transfert de ressources de 159 643 936,35 nouveaux soles par le canal de 463 autorités locales (voir annexe 24).

199.L’accord conclu entre l’État et les sociétés minières, intitulé «Programme minier de solidarité avec la population», est contenu dans le décret suprême no 071-2006-EM. Les sociétés minières s’engagent à verser, à partir de 2007 et pour quatre années consécutivement, un pourcentage de leurs actifs à titre de contribution volontaire, extraordinaire et temporaire, afin d’améliorer les conditions de vie des populations qui habitent les zones où elles se livrent à des activités minières. Les contributions servent à alimenter un fonds régional et un fonds local. Entre 2007 et 2011, 39 sociétés minières signataires de l’accord considéré ont versé sur le compte des réparations collectives de la présidence du Conseil des ministres un montant de 15 293 006,39 nouveaux soles et contribué ainsi au financement du plan intégral de réparation.

200.Les communautés bénéficiaires ont participé activement au programme de réparations collectives grâce à la création de Comités de surveillance communautaire qui exercent un contrôle social, et 8 360 citoyens (dont 20 % de femmes) ont reçu à cet effet une formation en matière de gestion et de contrôle social.

Réparations économiques

201.La Commission technique multisectorielle a été créée en octobre 2010. Elle était chargée de mettre au point les directives et la méthodologie relatives à la détermination des montants, procédures et modalités de paiement du Programme de réparation économique. La Commission a présenté son rapport final en janvier 2011 et arrêté les directives qui doivent régir le Programme, en se fondant sur trois études qui sont annexées au rapport, portant la première sur une analyse du Registre unique des victimes qui a servi à déterminer le nombre de victimes admises à bénéficier de réparations; et la seconde sur les attentes des bénéficiaires en matière de réparations économiques; la troisième contient une évaluation des effets de la violence et une estimation du montant des réparations économiques.

202.Au 31 mai 2011, 26 416 victimes et 57 522 proches de victimes bénéficiaires du Programme de réparation économique étaient enregistrés sur le Livre I du Registre. Les victimes se répartissaient comme suit: 18 403 personnes décédées, 5 972 disparus, 1 536 victimes de viol et 505 personnes handicapées.

203.Des crédits d’un montant de 20 millions de nouveaux soles ont été affectés pour l’exercice budgétaire de 2011 pour le lancement du Programme de réparation économique.

204.Le décret suprême no 051-2011-PCM, en date du 16 juin 2011, fixe à 10 000 nouveaux soles par personne disparue ou décédée, victime de viol ou victime d’un handicap, le montant de la réparation financière, conformément aux dispositions du règlement d’application de la loi no 28592. Le décret, qui marque le début de la première étape de la mise en œuvre du Programme de réparation économique, prévoit que la priorité est accordée aux personnes âgées. Il prévoit également que le processus de détermination et d’identification des bénéficiaires du Programme de réparation économique visé à l’article 41 du règlement d’application de la loi no 28592 sera clos le 31 décembre 2011.

205.Les procédures et modalités de paiement du Programme sont contenues dans l’arrêté ministériel no 184-2011-PCM.

Approbation et application du règlement du Conseil des réparations, danslequel se trouvent définis l’autonomie de cet organe, ses pouvoirs et le montantdes ressources nécessaires à l’exécution de son mandat, à savoir la créationdu Registre unique des victimes

206.Les sept membres du Conseil des réparations chargé de créer le Registre unique des victimes ont été désignés en vertu de l’arrêté ministériel no 373-2006-PCM. La composition du Conseil a été modifiée par la suite en vertu de l’arrêté ministériel no 068‑2009-PCM. Les membres du Conseil exercent leur charge ad honorem et sont assistés par un secrétariat technique qui se compose actuellement d’un secrétaire technique et d’une équipe de 28 professionnels. Les règles concernant le budget du Conseil des réparations sont celles qui s’appliquent au secteur public.

207.Pendant les dix-huit premiers mois qui ont suivi sa création, en octobre 2006, les travaux du Conseil ont été axés sur les modalités d’organisation et sur la création du Registre. Entre 2008 et 2010, le Conseil s’est attaché à étendre ses activités à tout le territoire. L’année 2011, qui marque la fin de sa mission, a été consacrée au traitement et à l’inscription massive de victimes individuelles et de bénéficiaires collectifs sur le Registre unique.

Établissement du Registre unique des victimes

208.Le Registre unique des victimes se compose du Livre I et du Livre II, consacrés le premier aux bénéficiaires individuels, le second aux communautés, groupes ou bénéficiaires collectifs (soit des communautés et groupes organisés composés de personnes déplacées qui ne retournent pas dans leurs foyers). Le budget alloué pour l’établissement du Registre unique a été de 2 370 000 nouveaux soles en 2007; 5 511 367 nouveaux soles en 2008; 3 974 388 nouveaux soles en 2009; et 3 455 194 nouveaux soles en 2010. Pour 2011, le budget du Conseil des réparations s’élevait à 1 242 477 nouveaux soles, montant qui ne permettra pas de financer les opérations au-delà d’octobre 2011.

209.En avril 2011, le nombre de victimes individuelles inscrites sur le Livre I est de 116 396 personnes, sur le Livre II sont inscrites 5 671 communautés et localités touchées par la violence et 20 groupes organisés de personnes déplacées qui ne retournent pas dans leurs foyers. Par ailleurs, 51 633 certificats ont été délivrés (à raison de 48 513 pour le Livre I et 3 120 pour le Livre II).

2.Réponses aux questions posées au paragraphe 21 de la liste de points à traiter

210.L’article 92 du Code pénal prévoit que la réparation civile est fixée en même temps que la peine. En outre, le nouveau Code de procédure pénale reconnaît au plaignant la qualité de partie civile et les droits qu’il détient à ce titre dans une procédure pénale. Le plaignant détient donc certains droits pendant le procès et pendant l’exécution de la peine. C’est ainsi que le chapitre II du titre IV lui accorde la faculté de se constituer partie civile pour défendre ses droits et que l’alinéa 1 de l’article 493 prévoit que la réparation civile est versée pendant l’exécution de la peine, conformément aux dispositions du Code de procédure civile, sur l’intervention du procureur provincial et de la partie civile.

211.Le pouvoir judiciaire indique que la protection du droit des victimes d’actes de torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants s’est améliorée du fait que les plaintes déposées devant la Commission Vérité et réconciliation peuvent être portées en justice. Les montants alloués aux victimes à titre de réparation civile ont été fixés conformément aux dispositions du Code de procédure civile et du critère de proportionnalité à respecter dans chaque affaire en fonction de la gravité des faits (voir annexe 25).

212.Il convient de souligner que dans les deux derniers arrêts qu’elle a rendus dans des affaires concernant des actes de torture la Chambre pénale nationale a ordonné, en réparation du préjudice causé, l’octroi de soins gratuits aux victimes jusqu’à leur rétablissement complet, physique et mental. Ces arrêts montrent que l’État est résolu à offrir une réparation intégrale aux victimes d’actes de torture.

213.Par ailleurs, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a rendu 25 arrêts condamnant l’État péruvien pour violation des droits de l’homme. Certains arrêts concernaient des violations du droit à l’intégrité de la personne, consacré à l’article 5.1 de la Convention américaine des droits de l’homme, d’autres des violations de l’article 5.2, qui a trait à l’interdiction du recours à la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants par des agents de l’État.

214.Parmi les réparations intégrales ordonnées en faveur des victimes et de leurs proches figurent des mesures réparatrices visant à faire cesser les effets négatifs résultant de la violation des droits; le versement d’une indemnisation en contrepartie du préjudice matériel et immatériel; des bourses d’études; des soins de santé pour les proches des victimes (mesures de réadaptation et de réparation); des dispositions prévoyant des réparations morales et visant à éviter que des faits portant atteinte aux droits de l’homme ne se reproduisent.

215.À ce jour, l’État péruvien a donné suite à un certain nombre de recommandations de la Cour interaméricaine des droits de l’homme en ce qui concerne les réparations ordonnées en exécution de ses obligations, mais certains points restent encore à mettre en œuvre. Par ailleurs, un tribunal spécialisé dans le contrôle de l’exécution des décisions d’institutions supranationales a été créé en vertu de l’arrêté no 089-2010-CE-PJ.

216.En 2010, trois affaires portant sur des violations de l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques par l’État péruvien avaient été portées devant le Comité des droits de l’homme des Nations Unies. Il s’agit de l’affaire K. N. L. H., de l’affaire Antonino Vargas Mas et de l’affaire Marlem Carranza Alegre.

3.Réponse à la question posée au paragraphe 22 de la liste de points à traiter

217.Il n’existe pas de programme spécifique de soins médicaux et psychologiques, ni de mesures de réadaptation, destinés aux victimes d’actes de torture. On ne dispose donc pas de données sur le nombre de personnes victimes d’actes de torture qui ont été prises en charge dans le cadre des programmes de santé.

218.Le Ministère de la santé assure des soins de santé aux victimes du conflit armé interne dans le cadre du Programme intégral de réparation par le biais du régime intégral d’assurance-santé. Les victimes d’actes de torture ont accès à ces services à ce titre et ne bénéficient pas d’un régime spécial.

219.Les organisations non gouvernementales s’efforcent de combler cette lacune en venant en aide aux victimes d’actes de torture perpétrés aussi bien pendant le conflit armé interne que depuis 2000. Il y a lieu de saluer l’action du Centro de Atención Psicosocial (CAPS), de la Red para la Infancia y la Familia (REDINFA), la Comisión Episcopal de Acción Social (CEAS), Paz y Esperanza, Estudio para la Defensa de los Derechos de la Mujer (DEMUS), WIÑASTIN et la Comisión de Salud Mental d’Ayacucho (COSMA), qui a son siège à Ayacucho, et qui est spécialisée dans les soins de santé aux victimes de la violence politique, parmi lesquelles les victimes d’actes de torture et leurs proches.

220.Le Centro de Atención Psicosocial a lancé en 1994 le Programme intégral en faveur des personnes victimes d’actes de torture qui s’adresse aux victimes et à leurs proches, et qui bénéficie notamment d’un soutien financier du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture. Cette organisation centre son action sur l’aspect psychosocial du traitement et de la réadaptation des victimes de torture. Soins médicaux, suivi psychologique, action sociale et séances de physiothérapie font partie des services qu’elle propose.

221.Le Centre a accueilli 281 personnes, qui se sont présentées comme étant des victimes d’actes de torture, dont 55 % étaient des hommes et 45 % des femmes. Il a aussi accueilli des ascendants ou des descendants de personnes qui avaient été torturées ou avaient disparu du fait d’agents de la fonction publique (1 227 personnes au total).

222.La Commission des droits de l’homme offre elle aussi des services complets aux victimes d’actes de torture et autres traitements cruels − traitement médical, psychologique, aide sociale, assistance juridique − et bénéficie du soutien de diverses institutions comme le Défenseur du peuple ou des experts en diverses matières; elle peut aussi offrir un soutien financier, qu’elle réserve le plus souvent à des personnes qui souffrent de séquelles physiques permanentes. Elle aide aussi les victimes à concevoir un petit projet de production qui leur permettra de subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs proches.

H.Article 15

Réponse à la question posée au paragraphe 23 de la liste de points à traiter

223.L’alinéa h du paragraphe 24 de l’article 2 de la Constitution, outre qu’il interdit la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, dispose que les déclarations obtenues par la violence sont sans valeur et que quiconque a recours à la violence engage sa responsabilité.

224.L’article VIII du titre préliminaire du nouveau Code de procédure pénale dispose que les preuves obtenues en violation des éléments essentiels des droits fondamentaux de la personne, que ce soit directement ou indirectement, n’ont pas de valeur juridique. Il souligne en outre qu’un élément de preuve n’est recevable que s’il a été obtenu de façon régulière et produit suivant une procédure conforme à la Constitution. Ce même code interdit au juge de s’appuyer directement ou indirectement sur une source ou sur un élément de preuve obtenu en violation des éléments essentiels des droits fondamentaux de la personne. Il s’ensuit que les renseignements obtenus sous la torture n’ont aucune valeur probante et sont donc nuls et non avenus.

225.Toute condamnation prononcée par un tribunal fondée sur des aveux obtenus sous la torture est susceptible de pourvoi en cassation, procédure prévue à la section V du livre IV du nouveau Code de procédure pénale et applicable lorsqu’un jugement sentence ou une décision ont été rendus au mépris des garanties constitutionnelles de procédure ou de fond (par. 1 de l’article 429), dans les conditions et les limites prévues par ledit code. En l’espèce, cette procédure est engagée pour non-respect du droit de toute personne de voir les déclarations obtenues par la violence considérées comme sans valeur.

226.Par ailleurs, la section VII du livre IV du nouveau Code de procédure pénale prévoit la possibilité de former un recours en révision contre un jugement définitif de condamnation, sans limite de temps et uniquement en faveur du condamné, s’il a été démontré qu’un élément de preuve qui a pesé de manière décisive dans la décision n’avait pas la valeur probante qui lui a été accordée car il était faux, nul, altéré ou falsifié (par. 3 de l’article 439). La Constitution du Pérou dispose expressément que les déclarations obtenues par la violence sont nulles et non avenues.

I.Article 16

Réponse à la question posée au paragraphe 24 de la liste de points à traiter

227.Le Code pénal définit les actes constitutifs d’atteinte à la liberté et à l’intégrité sexuelles, sous leur forme ordinaire et aggravée. Le Ministère de l’éducation a publié une directive applicable lorsqu’un élève d’un établissement scolaire est victime de violence physique ou psychologique, de harcèlement sexuel ou d’atteinte à sa liberté sexuelle (arrêté ministériel no 0405‑2007‑ED en date du 10 septembre 2007). Ce texte a pour objet d’établir les procédures concernant le dépôt et l’examen de plaintes mettant en cause des responsables et des membres du personnel administratif et enseignant de ces établissements et de fournir des orientations complémentaires à ce sujet. Une autre directive, intitulée «Procédures relatives à la prévention et la répression du harcèlement sexuel dans le secteur de l’éducation» (décision ministérielle no 0201‑2009‑ED) a également été publiée.

228.Le ministère public a pour politique d’enquêter sur toutes les infractions, parmi lesquelles les atteintes à la liberté ou à l’intégrité sexuelles. C’est ainsi que des journées de rencontre avec le public sont organisées afin de se faire une idée des principaux problèmes en la matière: type d’infraction, degré d’insécurité et victimisation. Sur la base des informations ainsi recueillies, il est établi un programme de travail par zone qui prévoit l’organisation de débats axés sur la manière de prévenir ces infractions à l’intention des hommes, des femmes et des enfants.

229.Le Ministère de la condition féminine et du développement social est chargé de veiller à l’exécution du Programme national de lutte contre la violence familiale et sexuelle dans le cadre du Plan national de lutte contre la violence à l’égard des femmes pour 2009-2015. Le Programme est axé sur la conception et la mise en œuvre au niveau national des mesures et politiques de prévention, de prise en charge et d’accompagnement des victimes de la violence familiale et sexuelle. Les services de prise en charge sont assurés dans les centres d’aide d’urgence aux femmes, dont le nombre total, en décembre 2010, s’élevait à 114.

230.Dans le cadre de ce programme, des activités de prévention sont menées au titre du Plan intégré de prévention de la violence familiale et sexuelle, sous forme d’actions de formation, de mobilisation et de participation sociale, qui visent à sensibiliser la population aux diverses formes de violence familiale et sexuelle selon le contexte propre à chaque centre d’aide d’urgence aux femmes et en mettant l’accent sur les femmes et mettent l’accent sur les femmes, les filles et les adolescentes, sans négliger pour autant le public masculin.

231.Les grands axes de l’action ainsi menée sont les suivants: mobilisation politique des autorités régionales et locales et des organes de l’État, activités pédagogiques de promotion de l’égalité en vue de sensibiliser le public, renforcement de l’action de l’État en la matière, en particulier dans les écoles, mobilisation de la communauté et participation citoyenne aux efforts visant à faire prendre conscience de ces phénomènes, et sanctions sociales; mise en place de bureaux et coordination de leurs activités; communication pour le développement avec la participation des médias.

232.Dans le cadre de cette action, entre 2005 et 2009, 52 030 manifestations de prévention accompagnées de messages sur la violence familiale et sexuelle ont été organisées, réunissant un public de 2 539 573 personnes.

233.Dans le domaine de l’éducation, le Programme de formation d’enseignants-agents de sensibilisation a permis d’accomplir un travail de prévention sur la violence familiale et sexuelle, de repérage des cas et d’aiguillage des élèves qui en sont victimes. Entre 2004 et 2009, 1 500 enseignants-agents de sensibilisation ont été formés. Par ailleurs, entre 2006 et 2009, les unités locales de gestion de l’éducation et les directions régionales de l’éducation des provinces ont émis 62 directives ordonnant la réalisation d’activités préventives dans les écoles.

234.En ce qui concerne l’aide aux victimes de violence sexuelle, l’Unité technique de prise en charge intégrée du Programme national de lutte contre la violence familiale et sexuelle assume gratuitement la prise en charge des victimes et assure gratuitement leur défense devant les tribunaux afin que les auteurs de tels faits soient impunis. Ces services sont fournis par les centres d’aide d’urgence aux femmes, qui remettent aux auxiliaires de justice des éléments de preuves tels que résultats d’analyses et rapports d’experts afin de faire avancer l’enquête.

235.Le nombre de cas de violence sexuelle, psychologique et physique traités par les centres d’aide d’urgence aux femmes dans l’ensemble du pays entre 2006 et 2010 s’élève à 19 241. Des services spécialisés ont été fournis à 2 247 134 reprises; 62 017 actions de prévention ont été menées; les actions de sensibilisation menées ont touché 3 093 097 personnes; il a été répondu à 63 860 demandes d’assistance téléphoniques (service Línea 100); des mesures ont été prises à l’égard de 423 auteurs d’agressions; le nombre d’interventions dans des cas de féminicide ou tentative de féminicide s’est élevé à 423.

236.L’un des domaines dans lesquels il n’a pas encore été mené d’action dans le cadre du Programme national de lutte contre la violence familiale et sexuelle concerne les femmes privées de liberté et les adolescentes en conflit avec la loi.

237.Au nombre des mesures mises en œuvre pour prévenir la violence sexuelle dans les établissements pénitentiaires figurent les visites périodiques des représentants du ministère public et des autorités judiciaires. Des représentants du Bureau du Défenseur du peuple se rendent eux aussi périodiquement dans les établissements pénitentiaires et les locaux de la police. Ces visites périodiques ont pour objet de transmettre les plaintes pour torture ou mauvais traitements aux autorités compétentes.

238.Le Centre pour mineures Santa Margarita, seul établissement pour mineures du pays, accueille les adolescentes qui ont été jugées et condamnées à l’issue de poursuites. Il ressort des rapports sur les inspections inopinées du ministère public que les adolescentes sont protégées contre toute forme de violence physique, psychologique, morale ou sexuelle et qu’aucune allégation de violence sexuelle à l’encontre d’une adolescente n’a été enregistrée.

J.Divers

I.Réponse à la question posée au paragraphe 25 de la liste de points à traiter

239.Le Pérou a adhéré au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole facultatif) par la décision législative no 28833 en date du 23 juillet 2006, et il l’a ratifié par le décret suprême n° 044-2006-RE du 25 juillet 2006. Il a déposé son instrument de ratification le 14 septembre 2006 et le Protocole facultatif, est entré en vigueur pour le Pérou le 14 octobre 2006 soit le trentième jour suivant cette date conformément à l’article 28 dudit Protocole facultatif.

240.Le Pérou a pris diverses mesures pour exécuter les obligations qui lui incombent au titre de cet instrument. L’une de ses premières initiatives à cet égard a été de prendre l’engagement volontaire de s’acquitter des obligations contractées en vertu du Protocole facultatif, comme l’a dit la Ministre de la justice, Mme Rosario Fernández Figueroa, à l’occasion de la deuxième session du Groupe de travail de l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, qui a eu lieu en mai 2008.

241.Depuis lors, le Conseil national des droits de l’homme s’est attaché à rechercher la manière la plus judicieuse de mettre en œuvre le mécanisme prévu par cet instrument. Lors de sa session extraordinaire no 03-2010, qui s’est tenue le 1er juin 2010, il a décidé de recommander à l’exécutif, par l’intermédiaire du bureau du Président du Conseil, de désigner le Défenseur du peuple en tant que mécanisme national de prévention. Cette décision a été prise à l’issue d’un débat. Dans cette optique, le Conseil national des droits de l’homme, dans le cadre d’un groupe de travail composé de représentants de l’exécutif, du ministère public, du Bureau du Défenseur du peuple et de la société civile, a élaboré un projet de loi portant création et désignation du mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui prévoit de désigner le Défenseur du peuple en tant qu’entité chargée de mettre en œuvre ce mécanisme, le texte a été adopté par le Conseil national des droits de l’homme en décembre 2010. Il fait actuellement l’objet de consultations interministérielles en vue de son adoption par le Conseil des ministres, avant d’être déposé devant le Congrès.

242.Il convient de relever les efforts déployés par le ministère public, les autorités judiciaires et le Défenseur du peuple pour recueillir les plaintes pour torture et autres mauvais traitements lors des visites périodiques qu’ils effectuent dans divers établissements.

2.Réponse aux questions posées au paragraphe 26 de la liste de points à traiter

243.L’arrêt rendu par le Tribunal constitutionnel dans l’affaire no 010-2002-AI/TC a donné lieu à des modifications de la législation antiterroriste. À la suite de cette décision, une série de dispositions introduisant des changements importants dans la prise en charge des personnes condamnées pour terrorisme et dans leurs conditions de détention ont été adoptées.

244.Ces textes sont les suivants: le décret-loi no 921 portant fixation du régime de l’emprisonnement à vie et de la peine maximale prévue pour les infractions visées par les articles qui ont été déclarés inconstitutionnels dans l’arrêt en question; le décret-loi no 922 relatif à la nullité des procédures engagées pour le crime de trahison envers la patrie; le décret-loi no 923, qui renforce l’organisation et le fonctionnement des services de défense de l’État dans les affaires de terrorisme; le décret-loi no 924, qui porte adjonction d’un paragraphe relatif à l’apologie de l’infraction de terrorisme à l’article 316 du Code pénal; le décret-loi no 925 relatif à l’efficacité de la collaboration dans la répression des infractions de terrorisme; le décret-loi no 926 relatif à l’annulation des procédures engagées pour terrorisme devant des juges et des procureurs dont l’identité a été gardée secrète et dans le cadre desquelles a été imposée une interdiction de récusation; le décret-loi no 927 relatif à l’exécution des peines pour les auteurs d’actes de terrorisme. Cet ensemble de textes a constitué un pas en avant important dans la mise en conformité de la législation antiterroriste nationale avec les normes internationales relatives aux droits de l’homme.

245.Par ailleurs, conformément à la recommandation du Conseil de sécurité concernant la nécessité de lutter contre le terrorisme en en réprimant le financement, l’Autorité de contrôle des banques et des assurances a publié la décision no 486-2008, dans laquelle elle adopte les règles relatives à la prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme applicables aux entités qui ont l’obligation de rendre compte de leurs activités qui ne relèvent pas d’une autorité de tutelle.

3.Réponse à la question posée au paragraphe 27 de la liste de points à traiter

246.Il n’existe pas de loi empêchant ou interdisant la production, le commerce, l’importation, l’exportation et l’emploi de matériel destiné expressément à infliger des tortures ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Certes, en vertu du décret-loi no 1017, de la loi relative aux marchés et aux achats publics et des règles budgétaires en vigueur, l’État est tenu d’acquérir ou de produire ce dont il a besoin pour s’acquitter de ses fonctions. Mais aucun texte ne prévoit qu’infliger des actes de torture ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants fait partie de ces fonctions.

247.Les autorisations de production et de commercialisation de biens accordées aux agents du secteur privé le sont conformément aux règlements des municipalités et du Ministère de la production, lesquels sont conformes à la Constitution, qui interdit expressément la torture.

4.Réponse à la question posée au paragraphe 28 de la liste de points à traiter

248.Le présent rapport a fait l’objet de consultations avec les diverses institutions membres du Conseil national des droits de l’homme qui représentent la société civile, à savoir la Conférence épiscopale péruvienne, le Conseil évangélique national et la Coordination nationale des droits de l’homme.

5.Réponse à la question posée au paragraphe 29 de la liste de points à traiter

249.Le Conseil national des droits de l’homme a publié sur son site Web (www.minjus.gob.pe/cndh/informes_periodicos_nu.html) le dernier rapport périodique soumis par le Pérou au Comité (CAT/C/61/Add.2), de même que les observations finales du Comité (CAT/C/PER/CO/4), qui peuvent donc être consultées en ligne.

250.Les observations finales du Comité ont été transmises à l’ensemble des institutions membres du Conseil national des droits de l’homme ainsi qu’aux institutions dont les activités sont étroitement liées aux questions visées par la Convention, afin qu’elles en prennent connaissance et que les institutions compétentes s’emploient à mettre en œuvre les recommandations du Comité.

251.Par ailleurs, dans le cadre du séminaire organisé en vue de l’établissement du présent rapport, les documents mentionnés au paragraphe précédent ont été remis à 33 fonctionnaires de diverses institutions, ainsi qu’aux membres des forces armées et de la police nationale qui ont pris part à ce séminaire.

K.Renseignements d’ordre général sur la situation des droits de l’homme dans le pays, y compris sur les nouvelles mesures relatives à la miseen œuvre de la Convention

1.Réponse à la question posée au paragraphe 30 de la liste de points à traiter

252.Outre la jurisprudence établie au niveau national par la Chambre pénale nationale, il convient de signaler la jurisprudence du Tribunal constitutionnel et de la Cour suprême. Dans l’arrêt qu’il a rendu dans l’affaire no 2333-2004-HC/TC, le Tribunal constitutionnel analyse les questions de la protection du droit à l’intégrité de la personne et de l’interdiction de toute forme de violence physique, psychologique ou morale (par. 1 de l’article 2 de la Constitution), eu égard à l’importance particulière que ces principes revêtent au Pérou. C’est ainsi qu’il précise que le droit à l’intégrité recouvre trois éléments: l’intégrité physique, l’intégrité psychique et l’intégrité morale.

253.Le Tribunal constitutionnel a estimé que la torture se distinguait des traitements inhumains ou humiliants essentiellement par l’intensité du préjudice causé à la victime; ainsi, la torture se caractérise par le fait d’infliger des souffrances particulièrement aiguës, intenses ou cruelles et par l’importance de ses séquelles. Il convient donc, lorsqu’il s’agit d’examiner l’opportunité de qualifier des faits donnés d’acte de torture, de prendre en considération l’ensemble des circonstances de l’espèce (durée de la souffrance, sexe, âge, état de santé, etc.).

254.Dans le cas des traitements inhumains, dégradants ou humiliants, le Tribunal constitutionnel a estimé que l’acte préjudiciable «[…] porte atteinte à la dignité de la personne; il bafoue la condition d’être humain de la victime, suscitant chez elle un sentiment de peur, d’angoisse et d’infériorité et vise à l’avilir et à ébranler sa capacité naturelle de résistance physique, psychique ou morale».

255.Par ailleurs, la Première chambre pénale transitoire de la Cour suprême de justice, dans l’arrêt qu’elle a rendu dans l’affaire Alberto Fujimori Fujimori, a défini le traitement cruel comme étant un acte visant à infliger délibérément une douleur et des souffrances mais qui, eu égard à l’intensité de celles-ci, ne revêt pas une gravité suffisante pour être qualifié de torture ou de coups et blessures. La gravité de l’acte et l’ampleur du préjudice causé doivent, conformément à la jurisprudence internationale, être appréciées en tenant compte dans chaque cas de facteurs internes et externes.

256.Enfin, il importe de relever que dans deux des derniers arrêts qu’elle a rendus dans des affaires de torture, la Chambre pénale nationale a déclaré que, eu égard aux préjudices subis, des soins de santé physique et mentale devaient être fournis gratuitement aux victimes, jusqu’à ce qu’elles soient complètement remises. Ces décisions montrent que l’État assure une réparation intégrale aux victimes d’actes de torture.

2.Réponse à la question posée au paragraphe 31 de la liste de questions à traiter

257.Un premier Plan national relatif aux droits de l’homme a été mis en place, lequel, comme on l’a déjà dit, constitue l’instrument de politique nationale qui fixe les mesures nécessaires pour mieux coordonner l’action menée par les divers organismes publics pour promouvoir et protéger les droits de l’homme. Les résultats de la mise en œuvre et du suivi du Plan sont actuellement évalués et un rapport est en cours d’élaboration.

258.Le décret suprême no 027-2007-PCM, définit et établit les politiques nationales que les organes du Gouvernement central sont tenus de mettre en œuvre, en vue notamment, de promouvoir l’égalité des droits des hommes, des femmes, des jeunes, des personnes appartenant aux peuples andins et amazoniens, des Afro-Péruviens, des Péruviens d’ascendance asiatique et des personnes handicapées.

259.La Police nationale et l’Institut national pénitentiaire sont dotés de manuels sur les droits de l’homme. Le Ministère de la défense, pour sa part, est doté d’un manuel des forces de l’ordre, lequel constitue un recueil des règles fondamentales qui doivent être prises en compte et appliquées dans toute situation et en toutes circonstances afin d’assurer le respect des droits de l’homme dans le cadre des activités des forces de l’ordre et de les garantir en tout temps, ainsi que d’un manuel de droit international humanitaire et de droits de l’homme.

260.Le ministère public, par la décision du Bureau du Procureur général no 1485-2005-MP-FN en date du 8 juillet 2005, a créé l’Observatoire de la criminalité du ministère public, qui a pour tâche de fournir des informations objectives et comparables sur tous les facteurs intervenant dans la problématique de la criminalité et qui permet l’exercice d’une surveillance et d’un contrôle portant sur tous les actes délictueux, de l’acte initial au prononcé du jugement, en vue de mettre en place des politiques et des mesures plus adaptées en matière de lutte contre la criminalité. Dans cette optique, l’Observatoire a établi des statistiques ventilées pour chaque circonscription judiciaire et chaque province, ce qui permet d’élaborer des politiques de prévention des infractions les plus fréquentes dans une zone géographique donnée.

3.Réponse à la question posée au paragraphe 32 de la liste de points à traiter

261.Comme indiqué dans les paragraphes 239 à 241, le Pérou a adhéré au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et l’a ratifié, et il s’emploie actuellement à mettre en place le Mécanisme national de prévention.

262.L’élection de M. Felipe Villavicencio Terreros au Sous-Comité de la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants mérite d’être relevée, car sa candidature a fait l’objet d’un consensus entre les membres du Conseil national des droits de l’homme et la société civile, elle aussi représentée au sein du Conseil. Elle témoigne de la volonté de l’État péruvien de coopérer avec les organes conventionnels des Nations Unies dans l’exécution de leurs mandats et obligations et de contribuer activement au bon fonctionnement des mécanismes institués pour prévenir la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans les États parties.