Quarante-deuxième session

20 octobre-7 novembre 2008

Projet d’observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Portugal

Le Comité a examiné les sixième et septième rapports périodiques du Portugal (CEDAW/C/PRT/6 et CEDAW/C/PRT/7), à ses 864e et 865e séances, le 3 novembre 2008 (voir CEDAW/C/SR.864 et CEDAW/C/SR.865). La liste des questions soulevées par le Comité figure dans le document CEDAW/C/PRT/Q/7 et les réponses du Portugal sont consignées dans le document CEDAW/C/PRT/Q/7/Add.1.

Introduction

Le Comité félicite l’État partie d’avoir présenté ses sixième et septième rapports périodiques, mais regrette que ceux-ci l’aient été avec un certain retard. Il reconnaît que, d’une manière générale, ils sont conformes à ses directives sur l’élaboration des rapports périodiques, mais regrette que les renseignements fournis soient de nature descriptive. Il aurait souhaité recevoir des informations plus complètes sur la situation des filles et des femmes dans les régions autonomes des Açores et de Madère. Il regrette également qu’il ne soit fait mention de ses observations finales de 2002 que de manière sporadique.

Le Comité remercie l’État partie d’avoir répondu par écrit à la liste de questions soulevées par le groupe de travail d’avant-session, mais constate qu’il n’a pas répondu de manière exhaustive à toutes les questions et que certaines sont demeurées sans réponse. Il le remercie également de l’exposé liminaire et des précisions apportées en réponse à ses questions orales, tout en déplorant que certaines questions soient restées sans réponse et que les réponses n’aient pas toujours été claires et précises.

Le Comité remercie l’État partie d’avoir dépêché une importante délégation dirigée par le Président de la Commission pour la citoyenneté et l’égalité des sexes et composée de représentants de ladite commission, du Président de la Commission pour l’égalité en matière de travail et d’emploi et de représentants de divers ministères et administrations publiques. Le Comité constate avec plaisir que la délégation comprenait un représentant de la région autonome des Açores. Il se félicite du dialogue franc, ouvert et constructif qui s’est établi entre la délégation et ses membres.

Aspects positifs

Le Comité se réjouit que l’État partie ait ratifié en avril 2002 le Protocole facultatif à la Convention.

Le Comité se félicite de l’adoption par l’État partie d’un certain nombre de mesures législatives, programmes, politiques et plans visant à promouvoir le rôle de la femme et l’égalité des sexes, notamment des modifications de la loi électorale, de la législation fiscale, du droit pénal, des droits en matière de procréation et du système de protection sociale, ainsi que de l’adoption du troisième Plan pour l’égalité : citoyenneté et femmes, du troisième Plan contre la violence familiale et du premier Plan contre la traite des êtres humains.

Le Comité se félicite de l’application aux femmes, à compter de 2008, des procédures relatives à la détermination du statut de réfugié et de l’enregistrement systématique de leurs demandes d’asile, indépendamment de la demande principale soumise par le chef de famille. Il se félicite également de la nouvelle loi sur l’asile qui protège les mineurs demandeurs d’asile, ainsi que leur famille, contre la détention aux postes frontière au stade de la recevabilité, qui bénéficie surtout aux familles monoparentales.

Le Comité se félicite de la mise en place d’un certain nombre de mesures spécifiques visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes, telles que la prise en compte des spécificités féminines dans les critères d’évaluation, de certification et d’acceptation des manuels scolaires, ainsi que de la modification des critères de sélection et d’admissibilité appliqués dans les différents secteurs des forces de sécurité, qui avaient précédemment une orientation masculine, et de l’accroissement des effectifs féminins dans ces forces qui en a résulté, même s’il demeure faible.

Le Comité se réjouit que l’État partie ait ratifié en mai 2004 le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Tout en rappelant à l’État partie qu’il est tenu d’appliquer toutes les dispositions de la Convention systématiquement et régulièrement, le Comité considère qu’il devra accorder une attention prioritaire aux préoccupations et aux recommandations m entionnées dans les présentes observations finales. Le Comité demande donc à l’État partie de se concentrer sur les domaines en question dans ses activités de mise en œuvre et de rendre compte des mesures prises et des résultats obtenus dans son prochain rapport périodique. Il lui demande aussi de communiquer les présentes observations finales à tous les ministères concernés et à tous les autres échelons du Gouvernement, ainsi qu’au Parlement et aux instances judiciaires, de façon à en assurer la pleine application.

Parlement

Tout en réaffirmant que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef de s’acquitter des obligations qui découlent de la Convention, le Comité souligne que la Convention a force obligatoire pour toutes les instances gouvernementales et prie l’État partie d’encourager son parlement national à faire le nécessaire, conformément à ses procédures, pour prendre en compte l es présentes observations finales et élabor er le prochain rapport périodique en application de la Convention.

Application de la Convention dans les régions autonomes des Açores et de Madère

Le Comité note que les Açores et Madère ont le statut de région autonome en vertu de la législation portugaise. Constatant que les sixième et septième rapports périodiques de l’État partie ne contiennent que des informations fragmentaires sur la situation des femmes et des filles dans ces régions, qu’aucune réponse écrite n’a été apportée à la question spécifique soulevée à ce sujet par le groupe de travail d’avant-session, et que les trois plans nationaux ne sont pas automatiquement appliqués aux Açores et à Madère, le Comité craint que l’État partie n’ait pas mis en place des mesures et des mécanismes de surveillance suffisants pour assurer l’application intégrale de la Convention dans toutes les régions de son territoire.

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à mettre en plac e des structures et mécanismes adéquats pour assurer une coordination efficace et l’application systématique de la Convention dans toutes les régions de son territoire. Il lui recommande de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que la stratégie et la politique nationales de promotion de la femme et de l’égalité des sexes soient intégralement mises en œuvre, y compris dans les régions autonomes des Açores et de Madère. Il demande à l’État partie de fournir dans son prochain rapport des informations détaillées sur l’application de la Convention aux Açores et à Madère, y compris des statistiques ventilées par sexe . Il lui demande également de veiller à ce que sa délégation comprenne des représentants des Açores et de Madère lors du prochain dialogue constructif qu’ils auront ensemble.

Visibilité de la Convention et du Protocole facultatif, élaboration du rapport

Tout en constatant que l’État partie a publié le texte de la Convention et de son Protocole facultatif en portugais et en a diffusé des exemplaires aux acteurs intéressés, le Comité craint que l’administration dans son ensemble ne soit pas suffisamment informée de la teneur de ces deux instruments, ni des recommandations générales qu’il a faites et de ses constatations concernant les procédures de communication et d’enquête. Il craint également que les femmes ne connaissent pas suffisamment bien les procédures de communication et d’enquête prévues dans le Protocole facultatif, ni ses propres recommandations à ce sujet, et ne s’y réfèrent pas assez. En outre, le Comité juge préoccupant que les instances judiciaires ne semblent pas invoquer la Convention et constate que l’État partie n’a pas pu citer de cas dans lesquels les tribunaux ont directement invoqué les dispositions de la Convention, les demandes d’indemnisation n’étant pas ventilées en fonction de leur fondement juridique dans les statistiques des tribunaux.

Le Comité demande à l’État partie de redoubler d’efforts pour mieux faire connaître aux femmes leurs droits en vertu de la Convention et les procédures de communication et d’enquête prévues dans le Protocole facultatif. Il le prie également de faire en sorte que la Convention et son Protocole facultatif, ainsi que les recommandations générales qu’il a faites et ses constatations concernant les communications individuelles et les enquêtes, soient incorporés dans les programmes d’études et de formation des juges, avocats et procureurs.

Le Comité est préoccupé par le fait que les organisations non gouvernementales n’ont pas été consultées pour l’élaboration du sixième rapport et que toutes les organisations non gouvernementales de défense des droits des femmes ne semblent pas avoir été consultées pour l’élaboration du septième rapport. Il regrette le manque général d’informations axées sur les résultats dans les deux rapports périodiques, et plus particulièrement dans le septième rapport, qui fournit des informations très limitées sur les résultats des initiatives décrites dans le sixième rapport.

Le Comité invite également l’État partie à élaborer son prochain rapport périodique en étroite consultation avec toutes les organisations non gouvernementales de défense des droits des femmes. Il le prie de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur la mise en œuvre de ses politiques, plans, programmes et autres mesures prises pour appliquer la Convention, qui soient plus analytiques, davantage axées sur les résultats et assorties de statistiques ventilées par sexe.

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité prend note de la restructuration des institutions nationales, la Commission pour l’égalité et les droits de la femme et la Commission contre la violence familiale ayant été remplacées par la Commission pour la citoyenneté et l’égalité des sexes, qui est chargée non seulement de promouvoir l’égalité des sexes et le rôle de la femme, mais aussi de combattre les autres formes de discrimination, quel que soit leur fondement. Tout en étant conscient de l’importance des fonctions et des activités de cette nouvelle institution, le Comité craint que l’on ne perde de vue les questions de discrimination à l’égard des femmes et d’égalité des sexes, et qu’on ne leur accorde pas suffisamment d’attention. Il juge également préoccupant le fait que ce mécanisme national semble fortement tributaire des sources de financement de l’Union européenne pour mettre en œuvre ses programmes, ce qui risque de compromettre la continuité de ses travaux et de ne pas montrer l’importance que l’État partie accorde à l’égalité des femmes. Le Comité regrette également que l’État partie n’ait pas fourni d’informations sur le mécanisme national de promotion de la femme aux Açores et à Madère.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour que la Commission pour la citoyenneté et l’égalité des sexes accorde la priorité aux problèmes de discrimination à l’égard des femmes et d’égalité des sexes qui touchent toutes les autres formes de discrimination. Il lui recommande aussi de veiller à ce que les pouvoirs, la structure et les ressources humaines et financières de la Commission, ainsi que l’ensemble de ses programmes, tiennent compte du caractère plurisectoriel de ces problèmes. Il le prie en outre de prévoir des ressources suffisantes et durables au budget national pour tous les aspects des travaux de la Commission, ainsi que pour l ’activité des ministères chargés de promouvoir l’égalité des sexes.

Tout en se félicitant que l’État partie ait récemment approuvé le « Statut de conseiller pour l’égalité », qui assigne un mandat précis aux coordonnateurs pour les questions de parité chargés au sein de chaque ministère de promouvoir l’égalité des sexes, décrit leurs fonctions et prévoit la création d’équipes de travail intraministérielles, le Comité ne comprend pas très bien si ces conseillers auront un niveau de responsabilité uniforme et suffisant, et si la relation entre la Commission pour la citoyenneté et l’égalité des sexes et ces conseillers dépasse l’action purement consultative auprès des ministères. Le Comité craint également que l’action consultative de la Commission en relation avec la mise en place de conseillers en matière d’égalité par les autorités locales ne soit pas suffisamment forte pour garantir que chaque municipalité nommera un conseiller.

Le Comité recommande que l’État partie veille, par l’intermédiaire des structures en place au niveau national pour promouvoir l’égalité, à ce que les procédures d e prise en compte des spécificités féminine s soient appliquées dans tous les ministères en tenant compte de tous les règlements, lois et programmes. Tout en respectant l’autonomie des autorités locales, il recommande que l’État partie prenne toutes les mesures appropriées pour assurer le recrutement systématique de conseillers pour l’égalité dans toutes les municipalités locales.

Le Comité craint qu’à la suite des modifications apportées à la composition de la section ONG du Conseil consultatif de la Commission pour la citoyenneté et l’égalité des sexes, toutes les organisations non gouvernementales de défense des droits des femmes qui faisaient précédemment partie du mécanisme national ne soient pas incluses dans la nouvelle structure et que celle-ci compte à présent moins d’organisations ayant reçu une formation spéciale en matière de droits des femmes. En outre, le Comité juge préoccupant le manque d’information sur les critères de sélection des organisations non gouvernementales membres du Conseil et le manque de transparence de ce processus. Il craint aussi que les règles actuelles de financement des organisations non gouvernementales, qui sont concurrentielles, ne désavantagent celles qui s’occupent spécifiquement des droits des femmes.

Le Comité recommande que l’État partie veille à ce que la réforme structurelle du mécanisme national n’entame pas la capacité des organisations féminines de poursuivre leurs travaux et de contribuer à l’application de la Convention. Il lui recommande également de fournir un financement adéquat et soutenu aux organisations non gouvernementales de défense des droits des femmes.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité craint que l’interprétation de l’idée à la base des mesures temporaires spéciales qui se dégage des deux rapports de l’État partie ne corresponde pas à celle qu’il a donnée dans sa recommandation générale no 25, et que ces mesures ne soient pas systématiquement appliquées en tant que stratégie nécessaire pour accélérer l’égalité de fait entre hommes et femmes dans tous les domaines visés par la Convention.

Le Comité encourage l’État partie à familiariser tous les responsables concernés avec l’idée à la base des mesures temporaires spéciales, telles qu’elles sont décrites au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et interprétées dans la recommandation générale n o 25 du Comité. Il recommande que l’État partie applique des mesures temporaires spéciales sous des formes diverses dans les domaines où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées et qu’il fournisse les ressources supplémentaires nécessaires pour accélérer l’amélioration de la condition de la femme. Le Comité recommande également que l’État partie incorpore dans sa législation des dispositions spécifiques encourageant le recours aux mesures temporaires spéciales dans les secteurs public comme privé.

Plans d’action nationaux

Tout en se félicitant de l’adoption d’indicateurs de délais, de progrès et de résultats, ainsi que de l’identification des entités et organes responsables dans les plans nationaux sur l’égalité, la violence familiale et la traite des êtres humains, le Comité s’inquiète de n’avoir pas reçu de précisions sur la teneur de ces indicateurs et les calendriers lors du dialogue interactif. Il craint aussi que les efforts engagés dans le cadre de ces plans nationaux ne puissent être soutenus, un pourcentage élevé des projets n’étant pas financé par le budget national.

Le Comité recommande que l’État partie lui rende compte en détail, dans son prochain rapport périodique, des résultats obtenus dans le cadre de ses plans d’action nationaux, et des obstacles susceptibles d’avoir entravé leur bonne mise en œuvre. Le Comité invite également l’État partie à examiner sa politique de financement pour ces plans et à étudier les moyens de faire en sorte que les projets concernant l’égalité entre hommes et femmes soient durablement inscrits au budget national.

Stéréotypes et pratiques culturelles

Tout en saluant les efforts faits par l’État partie pour éliminer les clichés sexistes concernant les caractéristiques et les rôles des hommes et des femmes, en particulier grâce à la publication d’outils didactiques et de documents de fond sur l’égalité des sexes, qui ont été distribués aux enseignants à tous les niveaux et à de nombreuses écoles normales, le Comité s’inquiète de la persistance des stéréotypes traditionnels dans le système d’enseignement de l’État partie et du fait que les questions liées à l’égalité des sexes et ces nouveaux outils didactiques ne sont pas obligatoirement intégrés à la formation des enseignants. En outre, le Comité n’a pas une idée précise de la persistance des stéréotypes concernant les rôles de chaque sexe dans les médias et les messages publicitaires et n’est pas certain qu’il existe des dispositions juridiques les interdisant et des institutions chargées de contrôler leur élimination ou d’examiner les plaintes concernant leur caractère sexiste.

Le Comité recommande d’intégrer des politiques de promotion de l’égalité des sexes dans le secteur de l’éducation. Rappelant que la Convention s’applique directement à la législation national e et que son article 5 a) implique l’adoption de mesures législatives, entre autres, visant à éliminer les stéréotypes féminins, le Comité recommande d’inclure dans la formation des enseignants à tous les niveaux, à titre obligatoire, une importante composante axée sur la p rise en compte des spécificités féminines et le souci de l’égalité des sexes. Le Comité recommande en outre que l’État partie fournisse des informations sur les stéréotypes sexuels qu e pourraient véhiculer les médias et les messages publicitaires, ainsi que sur les mesures juridiques et institutionnelles prises pour suivre l’élimination de ces stéréotypes.

Tout en se félicitant de la modification du Code pénal qui érige en infraction la mutilation génitale féminine, le Comité s’inquiète du manque d’information sur la prévalence de cette pratique, ainsi que sur l’impact de la nouvelle loi et son interprétation.

Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que la législation interdisant la pratique des mutilations génitales féminines soit pleinement appliquée et que les coupables soient poursuivis en justice afin d’éliminer cette pratique traditionnelle nocive. Le Comité invite l’État partie à élaborer et mettre en œuvre des stratégies de prévention ciblées, ainsi que des programmes d’éducation et de sensibilisation faisant appel à la participation des prestataires de services de santé, des notables, des dignitaires religieux et des organisations de femmes, et de lancer des campagnes d’information tenant spécifiquement compte des réalités culturelles. Le Comité demande à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées sur la prévalence de la pratique des mutilations génitales féminines sur son territoire et sur l’impact des mesures prises pour éliminer cette pratique.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité s’inquiète de la persistance de la violence à l’égard des femmes et des filles, y compris dans la famille. Tout en notant avec satisfaction que le réseau de foyers d’accueil pour les femmes victimes de violence sera étendu à tous les districts administratifs de l’État partie d’ici à 2010, il craint que ces foyers ne servent à héberger non seulement les femmes victimes de violence, mais aussi des personnes se trouvant dans d’autres situations d’urgence sociale. Tout en notant l’existence de mesures de protection, telles que la surveillance électronique des auteurs d’actes de violence assujettis à certaines restrictions et l’interdiction pour ces derniers de détenir des armes à feu, le Comité s’inquiète de constater que les juges n’y ont pas très souvent recours et que la collecte d’informations sur l’application de ces mesures de protection n’est pas systématique.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’adopter en priorité toutes les mesures nécessaires pour réprimer la violence à l’égard des femmes, conformément à sa recommandation générale n o 19. Il engage l’État partie à assurer la pleine application de la législation sur la violence contre les femmes et à poursuivre et condamner ceux qui s’en rendent coupables. Il recommande également à l’État partie de diffuser des informations sur les voies de recours interne contre les actes de violence à l’égard des femmes et d’organiser davantage d’activités et programmes de formation à l’intention des magistrats et des fonctionnaires pour les sensibiliser à toutes les formes de violence infligée aux femmes et les informer de toutes les mesures qui peuvent être prises pour protéger les victimes. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à fournir des services d’aide et d’écoute et des services d’hébergement en nombre suffisant aux femmes victimes de violence dans toutes les régions du pays, dotés de personnels spécialisés et de ressources financières leur permettant de fonctionner correctement.

Traite des femmes

Tout en prenant note des mesures adoptées par l’État partie pour lutter contre la traite des femmes et des enfants, y compris l’adoption du premier Plan national de lutte contre la traite des êtres humains, le Comité demeure préoccupé par la prévalence de ce problème, le manque d’information sur les poursuites judiciaires et sanctions contre les auteurs présumés, et le faible nombre de places disponibles dans le seul foyer d’accueil réservé aux femmes victimes de la traite.

Le Comité exhorte l’État partie à continuer d’intensifier sa lutte contre toutes les formes de traite des femmes et des enfants, conformément à l’article 6 de la Convention. À cet égard, il lui demande non seulement de veiller à ce que les trafiquants fassent l’objet de poursuites et de sanctions pénales, mais aussi de prendre des mesures pour assurer la protection et la réinsertion des femmes victimes de la traite, en créant notamment des foyers supplémentaires à leur intention.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité se félicite de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi relative à la parité, adoptée en 2006, qui stipule que les listes d’inscrits aux élections européennes, nationales et locales doivent comprendre au minimum 33 % de candidats de chaque sexe, et qui sera appliquée à toutes ces élections en 2009. Tout en prenant note des efforts faits pour accroître le nombre de femmes dans les instances élues, le Comité craint que la nouvelle loi ne soit pas appliquée aux Açores et à Madère : d’après le septième rapport périodique, la proportion de femmes à l’assemblée législative régionale est de 12 % aux Açores (depuis 2004) et de 17 % à Madère (depuis 2007).

Le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que la nouvelle loi relative à la parité soit pleinement appliquée aux prochaines élections en 2009. Il lui recommande également de prendre des mesures énergiques, y compris des mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à sa propre recommandation générale n o  25, afin d’accroître rapidement la représentation des femmes dans les organes des Açores et de Madère dont les membres sont élus ou nommés.

Autonomisation économique et emploi

Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour promouvoir l’entreprenariat féminin mais regrette l’absence d’informations sur le type d’entreprises créées par les femmes et leur viabilité, ni sur les différences entre les entreprises dirigées par des hommes et celles qui sont dirigées par des femmes, pour ce qui est notamment du niveau de revenu des dirigeants. Le Comité juge également préoccupant le nombre élevé de femmes classées « travailleurs indépendants » par les entreprises qui les emploient, et les conséquences que cela pourrait avoir sur le droit des femmes aux indemnités de chômage, à pension et aux allocations familiales.

Le Comité demande à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées et précises en réponse aux questions soulevées concernant l’entreprenariat féminin, et de redoubler d’efforts pour mettre un terme à la pratique des employeurs consistant à recruter des femmes comme travailleuses indépendantes et non comme salariées bénéficiant d’avantages sociaux.

Le Comité prend note des diverses mesures prises par l’État partie pour promouvoir la participation des femmes à la vie active et les aider à mieux concilier vie familiale et vie professionnelle, et se réjouit de l’adoption de la résolution 49/2007 du Conseil des ministres demandant aux entreprises publiques d’adopter des plans en faveur de l’égalité visant notamment à assurer une égalité de traitement et les mêmes chances aux hommes et aux femmes, et à permettre de concilier le travail rémunéré et le travail dans le cadre de la famille. Le Comité demeure cependant préoccupé par la ségrégation professionnelle qui persiste entre hommes et femmes sur le marché du travail, en particulier par le fait que les emplois et les salaires offerts aux femmes ne sont pas à la hauteur de leur niveau d’instruction, que les femmes représentent 59,7 % des chômeurs inscrits et que des écarts de rémunération subsistent entre les deux sexes, le salaire mensuel moyen des femmes représentant environ 77,2 % de celui des hommes – et seulement 70,4 % aux postes de direction – d’après les statistiques actuelles. Le Comité note que le Gouvernement a présenté son rapport annuel sur les progrès en matière d’égalité entre les hommes et les femmes dans le travail, l’emploi et la formation professionnelle au Parlement en mai 2007. Il regrette que ce soit le premier rapport présenté, alors qu’il est obligatoire depuis 2001.

Le Comité recommande à l’État partie de continuer à prendre des mesures concrètes pour éliminer la ségrégation professionnelle, tant horizontale que verticale, notamment dans le cadre de programmes d’éducation, de formation et de recyclage et grâce à des mécanismes efficaces d’application des lois. Il recommande également que l’État partie élabore et applique des systèmes d’évaluation des emplois basés sur des critères tenant compte des spécificités féminines, et qu’il recueille des données ventilées par sexe sur la nature et l’ampleur des écarts salariaux, en vue d’éliminer la pratique consistant à verser aux femmes un salaire inférieur pour un travail de valeur égale. Le Comité recommande en outre à l’État partie de suivre l’impact du recours à des contrats à durée déterminée et d’accroître au besoin les incitations offertes aux employeurs pour contrebalancer les conséquences négatives que l’embauche pour une durée déterminée pourrait avoir pour les femmes, notamment en ce qui concerne la sécurité de l’emploi, le salaire, la pension et les prestations de retraite. Le Comité encourage l’État partie à suivre l’adoption et la mise en œuvre effective des plans de promotion de l’égalité par les entreprises publiques, et à envisager de rendre ces plans obligatoires également pour les entreprises privées. Il recommande en outre que le Gouvernement présente dans les meilleurs délais son rapport annuel sur les progrès en matière d’égalité entre les hommes et les femmes dans le travail, l’emploi et la formation professionnelle au Parlement.

Santé

Tout en se félicitant de la nouvelle loi relative à l’interruption volontaire de grossesse au cours des 10 premières semaines, le Comité juge préoccupant le manque d’information des jeunes femmes sur cette loi. Il craint également que certaines femmes n’aient des difficultés à se prévaloir de la nouvelle loi, compte tenu du fait que le personnel de santé peut décider de ne pas procéder à une interruption de grossesse pour des raisons morales. Le Comité regrette en outre que les abondantes données sur l’état de santé de la population et les services de santé fournies par l’État partie dans ses rapports périodiques ne soient pas ventilées par sexe. Il est préoccupé par la forte prévalence du VIH/sida chez les femmes au Portugal et par le fait qu’un très faible pourcentage de la population – 13 % seulement en 2005 – utilise des préservatifs comme moyen de contraception.

Le Comité recommande à l’État partie de promouvoir l’éducation pour la santé sexuelle ciblée sur les adolescents, filles et garçons, et de veiller à ce que les femmes de tous âges aient accès à l’information et à tous les services de santé en matière de sexualité, y compris ceux axés sur l’interruption de grossesse. Le Comité demande également à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport, des données ventilées par sexe sur la santé et la prestation de soins de santé, ainsi que de plus amples renseignements sur la prévalence, parmi les femmes, des maladies sexuellement transmissibles, y compris le VIH/sida, et sur les mesures prises pour y faire face.

Groupes de femmes vulnérables

Le Comité s’inquiète de la féminisation de la pauvreté dans l’État partie, notant que 57 % des femmes bénéficient du régime de sécurité sociale non subordonné au versement de cotisations et que 36 % des familles touchant le revenu minimum garanti sont, soit des femmes vivant seules, soit des femmes ayant des enfants à charge. Tout en reconnaissant que la loi de 2005 portant création du complément de solidarité pour personnes âgées bénéficie aux femmes, le Comité juge particulièrement préoccupante la vulnérabilité des femmes âgées à la pauvreté en milieu rural.

Le Comité recommande que l’État partie suive de près l’incidence de la pauvreté chez les femmes, prévoie des mesures spécialement axées sur les femmes dans ses programmes de lutte contre la pauvreté et suive leur impact de manière à combattre la pauvreté parmi les femmes en général et les groupes de femmes vulnérables en particulier, notamment les femmes âgées vivant en milieu rural.

Le Comité constate que les rapports périodiques ne fournissent aucun renseignement sur la situation des femmes roms, ni sur celle des réfugiées, des demandeuses d’asile et des immigrantes.

Le Comité demande à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements détaillés, y compris des statistiques, sur la situation économique et sociale des femmes roms, des réfugiées, des demandeuses d’asile et des immigrantes, en ce qui concerne notamment leur accès à l’emploi et aux services sociaux.

Le Comité s’inquiète du taux élevé d’analphabétisme parmi les femmes rurales et de leur faible niveau d’instruction. Il juge particulièrement préoccupant que seulement 0,2 % des agricultrices aient fait des études secondaires agricoles et 0,3 % soient diplômées d’un institut universitaire de technologie ou d’une université.

Le Comité prie l’État partie de continuer à faciliter l’accès des femmes et des filles rurales à l’éducation et à la formation professionnelle et à les encourager à poursuivre leurs études au-delà de l’enseignement primaire. Il recommande à l’État partie de prendre des mesures ciblées pour que les femmes qui travaillent sur des exploitations familiales aient de véritables possibilités de faire des études agricoles pour accroître leur autonomie économique. Il lui demande aussi de fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements précis sur les possibilités offertes aux jeunes femmes rurales dans les domaines de l’éducation, de la formation professionnelle, du travail salarié et du travail indépendant.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité exhorte l’État partie à tenir le plus grand compte, dans l’exécution de ses obligations au titre de la Convention, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et le prie d’inclure des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne que la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement passe par l’application intégrale et effective de la Convention. Il demande que le principe de l’égalité des sexes et les dispositions de la Convention soient expressément pris en considération dans toute action visant la réalisation des objectifs et prie l’État partie de fournir des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Ratification de traités

Le Comité note qu’en adhérant aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme , les États permettent aux femmes d’exercer pleinement leurs libertés et droits fondamentaux dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc le Gouvernement portugais à ratifier les traités auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention relative aux droits des personnes handicapées, signée par le Portugal en mars 2007, et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, signée par le Portugal en février 2007.

Diffusion des observations finales

Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées dans l’État partie pour que sa population, en particulier les membres de l’administration, les responsables politiques, les parlementaires et les organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, soient au courant des mesures prises pour assurer l’égalité de droit et de fait entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Il demande également à l’État partie de continuer à renforcer la diffusion, surtout auprès des organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, de la Convention et de son Protocole facultatif, de ses propres recommandations générales, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, ainsi que du document final de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, intitulée « Les femmes en l’an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e  siècle ».

Suivi des observations finales

Le Comité demande à l’État partie de lui communiquer dans un délai de deux ans des renseignements écrits sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer les recommandations figurant aux paragraphes 21 et 41 ci-dessus. Il le prie également d’envisager de solliciter des services de coopération et d’assistance techniques, y compris des services consultatifs, si nécessaire et selon qu’il conviendra, aux fins de la mise en œuvre des recommandations susmentionnées.

Date du prochain rapport

Le Comité prie l’État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il présentera en application de l’article 18 de la Convention. Il le prie de présenter ses huitième et neuvième rapports périodiques sous forme d’un rapport unique en juillet 2013.