Nations Unies

CCPR/C/GTM/CO/3

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

19 avril 2012

Français

Original: espagnol

Comité des droits de l ’ homme

104 e session

New York, 12-30 mars 2012

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte

Observations finales du Comité des droits de l’homme

Guatemala

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le troisième rapport périodique du Guatemala (CCPR/C/GTM/3) à ses 2874e et 2875e séances, les 19 et 20 mars 2012 (CCPR/C/SR.2874 et 2875). À ses 2887e et 2888e séances, le 28 mars 2012 (CCPR/C/SR.2887 et SR.2888), il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique présenté par le Guatemala et les renseignements qu’il contient. Il apprécie l’occasion qui lui est donnée de renouer son dialogue constructif avec la délégation de l’État partie sur les mesures que celui-ci a prises durant la période considérée pour appliquer les dispositions du Pacte. Il remercie l’État partie de ses réponses écrites (CCPR/C/GTM/Q/3/Add.1) à la liste des points à traiter (CCPR/C/GTM/Q/3), qui ont été complétées par les réponses apportées oralement par la délégation et les renseignements supplémentaires communiqués par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié le Statut de Rome, en janvier 2012.

4.Le Comité accueille aussi avec satisfaction:

a)L’adoption de la loi sur le régime pénitentiaire et de son règlement d’application;

b)L’adoption de la loi contre le féminicide et autres formes de violence à l’égard des femmes (décret no 22-2008) et de la loi contre la violence sexuelle, l’exploitation et la traite d’êtres humains (décret no 9-2009);

c)La signature de l’Accord de coopération bilatérale entre l’État guatémaltèque et la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala, visant à renforcer leur collaboration et à faciliter les enquêtes sur les violations des droits de l’homme et la criminalité organisée.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

5.Le Comité constate avec préoccupation que les dispositions du Pacte sont apparemment mal connues de la population, des autorités judiciaires et des avocats et sont en conséquence rarement invoquées ou appliquées par ceux qui administrent la justice (art. 2).

L ’ État partie doit garantir le plein respect, dans l ’ ordre juridique interne, des obligations imposées par le Pacte. À cette fin, l ’ État devrait sensibiliser les juges, les fonctionnaires de la justice et la population aux droits énoncés dans le Pacte et à leur applicabilité en droit interne. L ’ État partie devra it faire figurer d ans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur l ’ application du Pacte par les juridictions nationales .

6.Le Comité salue les progrès réalisés en ce qui concerne les enquêtes, le jugement et la répression des actes de génocide et autres violations graves des droits de l’homme commises pendant le conflit armé interne. Il est préoccupé néanmoins par les messages exprimés à titre personnel par de hauts représentants du pouvoir exécutif, qui remettent en cause ces initiatives et contestent leur légitimité, et par l’absence d’une politique officielle appuyant dans son ensemble les enquêtes et les sanctions en cours. Il regrette en outre les insuffisances dans la capacité institutionnelle des autorités judiciaires, qui les empêchent de s’acquitter dûment de leurs fonctions dans toutes les affaires (art. 2 et 14).

L ’ État partie d evrai t adopter une position claire à l’appui d es procédures engagées par le ministère public et les tribunaux dans les affaires de génocide et d ’ autres violations graves des droits de l ’ homme commises pend ant le conflit armé interne. Il d evra it aussi doter les institut ions judiciaires et les organ es chargés de mener des enquêtes de toute s les ressources humaines et matérielles nécessaires pour qu ’ ils puissent s ’ acquitter de leurs obligations internationales en matière de droits de l ’ homme.

7.Le Comité note avec préoccupation que les mesures de réparation concrètes adoptées au titre du programme national de réparation ont été principalement financières, et que l’accompagnement psychosocial, le rétablissement de la dignité et le respect de la mémoire n’ont pas été suffisamment développés (art. 2).

L ’ État partie d evra it veiller à ce que les mesures appliqu ées au titre du programme national de réparation prévoient systématiquement une prise en charge intégré e , tenant compte des particularités culturelles et linguistiques et mettant l ’ accent sur l ’ accompagnement psychosocial, le rétablissement de la dignité et l e respect de la mémoire. À cette fin, il d evra it établir des mécanismes de coordination et des alliances avec les secteurs spécialisés dans ce domaine et doter les institutions chargées de mettre en œuvre le s mesures de réparation de personnel spécialisé ainsi que de re ssources nécessaires pour qu ’ elles puissent s ’ acquitter de leurs fonctions dans l ’ ensemble du pays.

8.Le Comité demeure préoccupé par le faible niveau de représentation des femmes au Congrès et aux postes de décision, dans le secteur public et le secteur privé. Il renouvelle sa préoccupation face à la situation de vulnérabilité particulière dans laquelle se trouvent les femmes autochtones et d’ascendance africaine, victimes de grande discrimination raciale, sociale et sexiste, malgré la reconnaissance officielle de leurs droits et la multiplicité des institutions et programmes destinés à les promouvoir (art. 3, 25 et 26).

L ’ État partie d evra it adopter et appliquer une législation relative à l ’ égalité hommes - femmes, reconnaissant ainsi officiellement le caractère particulier de la discrimination à l ’ égard des femmes de façon à traiter le problème comme il convient. Il devrait élaborer de nouvelles politiques pour favoriser une réelle égalité des sexes, qui tienne compte en particulier des femmes autochtones et d ’ascendance africaine, et renforcer les institutions et programmes publics qui ont notamment pour objectif de promouvoir les droits des femmes autochtones et d’ascendance africaine et de prévenir la discrimination à leur égard.

9.Le Comité demeure préoccupé par les conditions de travail dans le secteur domestique, agricole et dans les usines d’assemblage (maquilas), et par les violations des droits des travailleurs. Il est préoccupé en particulier par les pratiques discriminatoires à l’égard des femmes dans les entreprises, qui exigent par exemple les résultats d’un test de grossesse lors de l’embauche ou qui licencient les femmes enceintes sans respecter les droits du travail (art. 3 et 26).

L ’ État partie d evra it mettre en place des mécanismes de contrôle efficaces pour faire respect er les lois et règlements du travail , notamment pour les travailleurs du secteur domestique et agricole et des usines d ’assemblage ( maquilas ) .

10.Le Comité s’inquiète de l’exclusion de fait que continuent de subir les autochtones et les personnes d’ascendance africaine dans tous les domaines, y compris en ce qui concerne la propriété foncière, l’accès aux services de base, les conditions de travail, l’accès à l’économie formelle et à la justice, la participation aux organes de prise de décisions et aux institutions publiques et leur représentation dans les principaux médias et dans le débat public. Il regrette que les actes de discrimination et de xénophobie dont sont victimes ces personnes ne soient pas érigés en infraction, la qualification de discrimination n’étant applicable qu’à des faits qui empêchent ou entravent l’exercice d’un droit établi par la loi (art. 3, 26 et 27).

L ’État partie devra it poursuivre ses efforts tendant à éliminer les stéréotypes et la discrimination dont sont l’objet les autochtones et les personnes d ’ ascendance africaine, notamment en menant davantage de campagnes d’édu cation visant à promouvoir la tolérance et le respect de la diversité. Il devrait prendre des mesures pour promouvoir l ’ égalité des chances et d ’ accès aux services tout en s ’ employant à éliminer les inégalités qui existent actuellement. Enfin, il devrait modifier l’article 202  bis du Code pénal de façon à permettre que les faits de discrimination raciale fassent l’objet d’une enquête, que leurs auteurs soient traduits en justice et condamnés et que les victimes puissent être dûment indemnisées, sans qu’il soit nécessaire d’établir que les actes visés empêchent ou entravent l ’ exercice d ’ un ou plusieurs droits.

11.Le Comité est préoccupé par la discrimination et la violence que subissent les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués et condamne toute violation des droits fondamentaux dont ils sont victimes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre (art. 3, 6, 7 et 26).

L ’ État partie devrait faire savoir clairement et officiellement qu ’ il ne tolère aucune forme de stigmatisation sociale de l ’ homosexualité, de la bisexualité et de la transsexualité , et ne tolère pas non plus le moindre acte de harcèlement, d e discrimination et d e violence contre des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre . L’État partie devrait veiller à ce que tout acte de discrimination ou de violence ayant pour motif l ’ orientation sexuelle ou l’identité de genre de la victime donne lieu à une enquête et que l es auteurs so ie nt traduits en justice et sanctionnés.

12.Le Comité s’inquiète de l’augmentation des niveaux de violence dans l’État partie, qui tient principalement au trafic de drogues, à la prolifération d’armes à feu et à l’accroissement des inégalités sociales. Il regrette la multiplication de mesures de répression qui entraînent une augmentation de la stigmatisation et la limitation de l’exercice des droits civils. À ce sujet, il est préoccupé par la fréquence avec laquelle l’État partie a déclaré l’état d’urgence en application de la loi sur l’ordre public, alors que l’état d’urgence doit être conçu comme une mesure exceptionnelle (art. 4 et 6).

L ’ État partie d evra it adopter une stratégie globale qui intègre la prévention, le contrôle et la répression de la violence , garantissant à tous les citoyens l ’ exercice des droits établis dans le Pacte. Dans cet esprit, il d evra it promouvoir des mesures de prévention en axant ses politiques de sécurité sur les droits fondamentaux des victimes et des auteurs d ’ infraction s . Il d evra it aussi modifier la loi de 1965 sur l’ordre public de façon à limiter strictement l ’ application de mesures exceptionnelles comme l ’é tat d ’ urgence, à garantir le respect systématique d e toutes le s conditions définies à l ’ article 4 du Pacte et donn er la priorité à des mesures qui soient plus efficaces pour prévenir la violence.

13.Le Comité note avec satisfaction l’application depuis l’an 2000 d’un moratoire de fait sur les exécutions, ainsi que les commutations ordonnées par la Cour suprême dans toutes les affaires de condamnation à mort. Il est néanmoins préoccupé par les propositions de loi présentées ces deux dernières années pour obtenir la reprise des exécutions et par l’appui grandissant apporté à ces propositions (art. 6).

L ’ État partie d evrait envisager d’abolir officiellement la peine de mort et d’ adhérer au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

14.Le Comité s’inquiète de la prolifération des armes et regrette la législation actuelle sur les armes et les munitions et l’interprétation qu’en donne la Cour constitutionnelle, dont l’application est telle qu’elle a permis l’augmentation du nombre d’armes par personne et entravé le contrôle du port d’armes et des munitions. Un pourcentage très élevé des homicides commis dans le pays est causé par des armes à feu (art. 6).

L ’ État partie d evrait modifier sa législation et mettre en œuvre d ’ urgence une politique publique qui impose des limites plus strictes à l’acquisition et au port d’armes et de munitions par les particuliers.

15.Le Comité note avec préoccupation que la Police nationale civile est limitée dans son fonctionnement par l’insuffisance de ressources humaines et matérielles. Il est aussi préoccupé par la lenteur de l’application de la réforme de la Police nationale civile et l’insuffisance du budget alloué à cette réforme. Le Comité est également préoccupé par l’augmentation de la présence militaire et par la multiplication de patrouilles menées conjointement par la Police nationale civile et l’armée (art. 6, 7, 9 et 14).

L ’ État partie devrait donner la priorité à l’adoption, au financement et à la mise en œuvre effective de la réforme de la Police nationale civile, et veiller à ce que celle-ci dispose des ressources humaines et matérielles nécessaires à l ’ exercice de ses fonctions. Dans c e contexte, il devrait mettre en place des mécanismes pour la sélection, la formation et la surveillance interne des services de police, assurant aussi que leurs membres soient responsables de leurs actes, offrir des possibilités de développement professionnel et mettre sur pied des dispositifs de contrôle permanents qui encouragent le respect absolu des droits de l ’ homme. Il devrait veiller à ce que toute intervention de l ’ armée dans les missions de la Police nationale civile ait lieu sans détourne ment d es ressources de la Police, dans le cadre de protocoles clairs et établis au préalable, et pour une durée et d es objectifs strictement définis. L ’ État partie devrait aussi prendre des mesures pour empêcher que les personnes impliquées dans des violations des droits de l ’ homme n’exercent des fonctions dans les forces de sécurité publiques.

16.Le Comité regrette que des fonctions de sécurité soient de plus en plus fréquemment déléguées à des entreprises privées sans enregistrement ni contrôle adéquats. Il note l’adoption de la loi sur les services privés de sécurité et la création de la Direction générale des services privés de sécurité. Il regrette néanmoins que cette loi comporte des imprécisions et que la Direction générale ne soit toujours pas dotée des ressources ni de l’appui institutionnel nécessaires à l’exercice de ses fonctions (art. 6, 7 et 9).

L’État partie assure l’enregistrement et le contrôle des services privés de sécurité en appliquant le décret-loi n o  52-2010 qui régit ces services. Il devrait doter la Direction générale des services privés de sécurité des ressources nécessaires à son fonctionnement. Il devrait aussi veiller à ce que les services privés de sécurité soient subordonnés aux services publics et garantir l’accès à la justice et à des mécanismes de réparation efficaces pour les victimes d’actes commis par les entreprises privées de sécurité. L' État partie devrait prendre d es mesures pour empêcher que les personnes impliquées dans des violations des droits de l'homme n'exercent des fonctions dans les services de sécurité privés.

17.Le Comité note avec préoccupation que les comités locaux de sécurité créés à l’origine pour prévenir la délinquance exercent des fonctions qui reviennent à l’État en ce qui concerne le contrôle du territoire et l’usage de la force et que, d’après les renseignements reçus par le Comité, ils commettent des abus de pouvoir et des actes illicites (art. 6, 7 et 9).

L’État partie devrait modifier l’arrêté n o  11-99 relatif à la Police nationale civile qui porte création des comités locaux de sécurité et définir clairement le rôle de ces comités dans la prévention de la délinquance, de façon à exclure de leur compétence toute fonction de sécurité appartenant à l’État.

18.Le Comité est préoccupé par la persistance de lynchages dans les zones rurales comme dans les zones urbaines et par le fait que les mesures que l’État partie a prises pour prévenir ces actes n’aient pas donné de résultats (art. 6, 7 et 14).

L’État partie devrait mener dans les établissemen ts scolaires et dans les médias des campagnes d’information et d’éducation sur la nécessité d’éliminer la pratique du lynchage quels qu ’ e n soient les circonstances et les motifs . Il devrait aussi poursuivre s es acti ons visant à prévenir les lynchages, conduire des enquête s et juger et condamner les auteur s .

19.Le Comité salue les efforts de l’État partie pour faire connaître, prévenir et réprimer les actes de violence sexuelle et de violence sexiste, en particulier les meurtres de femmes, la violence au foyer et la traite des êtres humains. Cependant, il reste préoccupé par la persistance de niveaux très élevés de violence contre les femmes. Il note avec préoccupation également l’insuffisance courante des moyens d’enquête mis en œuvre par les services de police et les médecins légistes et le petit nombre de centres de prise en charge, qui constituent le seul appui dont disposent les femmes qui survivent à la violence (art. 6, 7, 8, 14 et 26).

L’État partie devrait poursuivre ses efforts pour prévenir la violence sexuelle et la violence sexiste et encourager les victimes à dénoncer ces violences. Il devrait veiller à inclure la question de la protection des femmes contre la violence dans les programmes scolaires. Il devrait également renforcer et institutionnaliser une formation avec une perspective du genre, qui devrait être obligatoire pour tous les personnels judiciaires, les membres des services de police et des services de santé, afin qu’ils so ie nt prêts à réagir efficacement face à toutes les formes de violence faite aux femmes. Une attention particulière devrait être accordée à la collecte de preuve s médico-légale s , au traitement des victimes, à la coordination entre les autorités chargées de s enquête s et de la répression et celles qui s’occupent de la protection des victimes. En outre, l’État partie devrait veiller à ce que toutes les victimes de violence sexuelle ou de violence sexiste aient accès à des centres de prise en charge ou à des foyers.

20.Le Comité se déclare préoccupé par la pénalisation de l’avortement, quand la grossesse est le résultat d’un viol ou d’un inceste, qui oblige les femmes enceintes à faire appel à des services d’avortement clandestins qui mettent en péril leur vie et leur santé. Le Comité est également préoccupé par le nombre de grossesses chez les adolescentes et le taux de mortalité maternelle qui sont toujours élevés malgré les efforts de prévention déployés par l’État partie (art. 3 et 6).

L’État partie devrait , eu égard à l’article 3 de la Constitution, prévoir d’autres exceptions à l’interdiction de l’avortement afin d’éviter aux femmes d’avorter clandestinement dans des conditions qui mettent leur vie ou leur santé en danger, dans les cas par exemple où la grossesse résulte d’un viol ou d’un inceste. L’État partie devrait garantir que les femmes et les adolescentes aient accès à des services de santé de la procréation dans toutes les régions du pays. Il devrait également accroître les programmes d’éducation et de sensibilisation au niveau formel (écoles et collèges) et informel ( médias) sur l’importance de l’utilisation d’une contraception et les droits à la santé de la procréation .

21.Le Comité note avec préoccupation que, malgré les années qui se sont écoulées depuis la fin du conflit armé, des milliers de familles de personnes disparues ne savent toujours pas ce qu’il est advenu de leurs êtres chers. Il regrette qu’une commission nationale de recherche n’ait toujours pas été établie, comme le prévoit le projet de loi no 3590, et qu’il n’existe pas de registre unique et centralisé des personnes disparues. Néanmoins, le Comité prend note que l’État partie s’est engagé, lors de la séance publique consacrée à l’examen du rapport, à inscrire l’adoption de la loi en question au calendrier législatif du Congrès (art. 6 et 14).

Afin de promouvoir et de faciliter la mise en place de mécanismes de justice, vérité et réparation pour les victimes de disparitions forcées commises pendant le conflit armé, l’État partie devrait adopter la loi n o  3590 portant création de la commission nationale de recherche, la doter des ressources humaines et matérielles suffisantes et établir un registre unique et cen tralisé des personnes disparues .

22.Le Comité est préoccupé par les niveaux très élevés de violence et d’agression contre les défenseurs des droits de l’homme. S’il accueille avec satisfaction le rétablissement de l’unité d’analyse des attaques contre les défenseurs des droits de l’homme, en janvier 2012, le Comité regrette qu’elle n’ait pas encore pu commencer ses activités. Le Comité regrette également l’absence de mécanismes de protection des défenseurs des droits de l’homme suffisants, ainsi que des récentes campagnes visant à délégitimer les interventions des organisations de la société civile (art. 6 et 7).

L’État partie devrait reconnaître publiquement la contribution des défenseurs des droits de l’homme à la justice et à la démocratie. Il devrait également prendre des mesures immédiates pour assurer une protection efficace d es défenseurs dont la vie et la sécurité sont menacées en raison de l’exercice de leur s activité s professionnelle s , faciliter l’ouverture d’enquêtes immédiates, effectives et impartiales dans les cas de menaces, d’agressions et d’ assassinats dont sont victimes les défenseurs des droits de l’homme et faire en sorte que les auteurs de ces actes soient poursuivis et punis . L’État partie devrait doter l’ unité d’analyse des attaques contre les défenseurs des droits de l’homme des ressources humaines et matérielles nécessaires à l’accomplissement de ses tâches, et assurer la participation des institutions publiques au plus haut niveau , ayant des pouvoirs de décision.

23.Le Comité souligne de nouveau avec préoccupation que l’État partie n’a toujours pas modifié la définition de la torture figurant dans son Code pénal de façon à la rendre conforme aux normes internationales. Il est préoccupé également par le fait que la police et l’appareil judiciaire ne tiennent pas de registres fiables des cas de torture (art. 7).

L’État partie devrait revoir sa législation, en particulier les articles 201  bis et 425 du Code pénal, de façon à introduire l’incrimination de torture, conformément aux normes internationales. Il devrait veiller à ce que tout fait présumé de torture ou tout traitement cruel, inhumain ou dégradant soit immédiatement consigné dans un registre, et soit jugé et puni selon sa gravité.

24.Le Comité est préoccupé par le taux élevé de surpopulation carcérale et les mauvaises conditions qui règnent dans les lieux de détention, reconnus par l’État partie, ainsi que par le taux élevé d’incarcération. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles des mineurs sont détenus avec des adultes et les femmes sont fréquemment victimes de violence sexuelle et sexiste, au moment de l’arrestation, pendant le transfert et pendant toute la durée de leur incarcération (art. 3 et 10).

L’État partie devrait intensifier ses efforts pour améliorer les conditions carcérales , conformément à l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus. Il devrait s’occuper en priorité de la question de la surpopulation et de la séparation des mineurs, des femmes et des hommes en détention. L’État partie devrait également prendre des mesures visant spécifiquement à protéger l es droits des femmes détenues, en particulier pendant les transfert s .

25.Le Comité est préoccupé par le fait que les réformes du système de justice nécessaires pour que les progrès notables qui avaient été amorcés dans les enquêtes criminelles et les poursuites d’affaires emblématiques aboutissent à la mise en place d’un mécanisme institutionnel, permanent et viable n’ont pas été réalisées. Les intimidations, les menaces et les agressions subies par des victimes, témoins et membres des services judiciaires pendant les procès portant sur des affaires du passé ou sur des faits de criminalité organisée continuent à entraver l’exercice des droits à la vérité et à la justice (art. 14).

L ’ État partie devrait procéder en priorité à l’étude et à l’adoption des réformes juridiques de la profession judiciaire, applicables à l’appareil judiciaire et au ministère public, afin de supprimer tout obstacle structurel qui peut entraver l ’ indépendance et l ’ impartialité de la justice. L ’ État partie devrait également continuer d ’ appuyer la Commission internationale contre l ’ impunité au Guatemala dans son action visant à améliorer les enquêtes criminelles, les poursuites judiciaires et l ’ application de la l égislation relative à la sécurité publique.

26.Le Comité est préoccupé par le fait que l’accès à la justice est limité en raison de la couverture géographique insuffisante des organes judiciaires et de la vision monoculturelle qui prévaut dans le système de justice. Il regrette aussi qu’il n’y ait pas d’interprètes pour répondre aux besoins des autochtones (art. 14 et 27).

L ’ État partie devrait faire le nécessaire pour permettre à tous d’accéder à la justice dans sa propre langue, en adoptant des politiques efficaces de recrutement de fonctionnaires bilingues, créant le nombre de postes d ’ interprètes requis, assurant une formation adéquate des professionnels de façon qu ’ ils puissent exercer le ur s fonctions et évaluant constamment la qualité des services dans toutes les régions du pays. De plus , l ’ État partie devrait mettre en œuvre des programmes de formation spécifique ment conçus pour les personnels judiciaires chargés de représenter la justice d ans les zones autochtones.

27.Le Comité donne acte à l’État partie des mesures qu’il a prises, comme le Programme de développement des peuples autochtones 2009-2012 et les réformes constitutionnelles de 2001 visant à garantir les droits autochtones, mais il regrette que les peuples autochtones ne soient pas effectivement consultés pendant les procédures d’adoption des décisions qui touchent à leurs droits (art. 2, 25 et 27).

L ’ État partie devrait s’acquitter de l ’ engagement international qu ’ il a pris de mener avec les peuples autochtones des consultations préalables et éclairées pour toutes les décisions relatives à des projets qui ont des incidences sur leurs droits, conformément à l ’ article 27 du Pacte. Il devrait également reconnaître toutes les décisions prises par les peuples autochtones pendant les consultations et en tenir dûment compte.

28.L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, du troisième rapport périodique, des réponses écrites à la liste des points à traiter établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public. Le Comité suggère également que le rapport et les observations finales soient traduits dans les langues officielles de l’État partie. Il demande également à l’État partie, lorsqu’il élaborera son quatrième rapport périodique, d’engager de larges consultations avec la société civile et les organisations non gouvernementales.

29.Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 7, 21 et 22.

30.Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique, qui devra lui parvenir d’ici au 30 mars 2016, des renseignements précis et à jour sur la suite qu’il aura donnée aux autres recommandations et sur l’application du Pacte dans son ensemble.