Nations Unies

CRC/C/FJI/CO/2-4

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

13 octobre 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant les deuxième à quatrième rapports périodiques des Fidji *

I.Introduction

Le Comité a examiné les deuxième à quatrième rapports périodiques des Fidji soumis en un seul document (CRC/C/FJI/2-4) à ses 1909e et 1910e séances (CRC/C/SR.1909 et CRC/C/SR.1910), les 4 et 5 septembre 2014, et a adopté à la 1929e séance, le 19 septembre 2014, les observations finales ci-après.

Le Comité accueille avec satisfaction les deuxième à quatrième rapports périodiques de l’État partie soumis en un seul document (CRC/C/FJI/2-4), ainsi que les réponses écrites à la liste de points (CRC/C/FJI/Q/2-4/Add.1), qui lui ont permis de mieux comprendre la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Le Comité regrette toutefois le retard avec lequel le rapport a été soumis. Il se félicite du dialogue franc et constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

Sur le plan législatif, le Comité salue l’adoption de divers textes, parmi lesquels:

a)La Constitution fidjienne (2013);

b)Le décret relatif à la protection de l’enfance (2010);

c)Le décret relatif aux infractions pénales (2009);

d)Le décret sur la violence familiale (2009);

e)Le décret portant modification de la loi sur le mariage (2009);

f)Le décret relatif aux relations de travail (2007);

g)La loi sur les établissements pénitentiaires (2006);

h)La loi sur la famille (2003);

i)La loi sur l’immigration (2003).

Le Comité se félicite en outre que l’État partie ait ratifié:

a)La Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale (1993), en avril 2012;

b)Les protocoles additionnels I, II et III aux Conventions de Genève, en juillet 2008;

c)La Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la Santé pour la lutte antitabac, en octobre 2003;

d)La Convention (no 138) de l’OIT concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi, 1973, en janvier 2003;

e)La Convention (no 182) de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, 1999, en avril 2002;

f)Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, en novembre 1999;

g)La Convention de la Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants (1980), en mars 1999.

Le Comité salue, entre autres, l’adoption des mesures institutionnelles et des mesures de politique générale suivantes:

a)La politique relative au suivi des normes scolaires et aux inspections (2014);

b)La politique et la stratégie nationales relatives à la santé de l’enfant (2012‑2015);

c)La politique relative à la protection de l’enfance dans le cadre scolaire (2012);

d)La politique relative à l’éducation de la petite enfance (2011);

e)La politique nationale relative aux personnes handicapées (2008-2018).

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6) de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

Le Comité salue les efforts faits par l’État partie pour donner suite aux observations finales adoptées en 1998 à l’issue de l’examen du rapport initial de l’État partie (CRC/C/28/Add.7) mais note avec regret que certaines des recommandations qui y figurent n’ont pas été pleinement prises en considération.

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de prendre toutes les mesures requises pour donner suite aux recommandations figurant dans les observations finales adoptées à l ’ issue de l ’ examen du rapport initial soumis par l ’ État partie en vertu de la Convention, qui n ’ ont pas suffisamment été mises en œuvre, notamment celles qui ont trait à l ’ allocation des ressources, à la collecte de données, à l ’ enregistrement des naissances, aux châtiments corporels, aux violences sexuelles et aux enfants handicapés.

Politique et stratégie globales

Le Comité salue l’élaboration, par l’État partie, d’une politique et d’une stratégie nationales d’ensemble en faveur de l’enfance. Il constate toutefois avec préoccupation que la stratégie en est toujours au stade de projet.

Le Comité encourage l ’ État partie à prendre toutes les mesures voulues pour adopter sans retard la stratégie , et à veiller à ce que des ressources humaines, techniques et financières suffisantes lui soient allouées de manière à faciliter sa mise en œuvre.

Coordination

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a indiqué que le Comité national de coordination pour l’enfance (CNCE) se composerait des secrétaires permanents des ministères concernés, mais relèveque le Cabinet n’a pas encore approuvé la structure. Il note avec préoccupation qu’à l’heure actuelle, l’efficacité du CNCE est entravée par l’inefficacité de sa structure et l’insuffisance de son financement.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour accroître les responsabilités d u CNCE en matière de coordination et accélérer l ’ approbation de la nouvelle structure. Il recommande que le CNCE soit doté de toutes les ressources humaines, techniques et financières propres à lui permettre de fonctionner efficacement.

Allocation de ressources

Le Comité salue l’allocation de ressources financières aux programmes de protection de l’enfance dans le budget 2014, mais note avec préoccupation qu’aucune autre ligne budgétaire n’est consacrée à la mise en œuvre de la Convention.

Se référant à la Journée de débat général de 2007 portant sur le thème « Ressources pour les droits de l ’ enfant − Responsabilité des États » , et mettant l ’ accent sur les articles 2, 3, 4 et 6 de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D’adopter un budget national exclusivement consacré à la mise en œuvre de la Convention et de veiller à ce que c e budget couvre les enfants de tous âges, des deux sex es et de tous les milieux socio culturels, et à ce que des postes budgétaires stratégiques soient définis pour les enfants vulnérables , en particulier les enfants des groupes minoritaires et les enfants handicapés ;

b) D e mettre en place des mécanismes d ’ évaluation et de suivi pour vérifier régulièrement que la répartition des ressources est adéquate, efficace et équitable.

Collecte de données

Le Comité regrette que, dans de nombreux domaines couverts par la Convention, il n’y ait pas de données statistiques fiables et ventilées, et que l’État partie ne dispose pas non plus d’un mécanisme permettant d’évaluer de manière systématique l’incidence des politiques et des programmes relatifs à la mise en œuvre de la Convention.

Se référant à son Observation générale n o  5 (2003) sur les mesures d ’ application générales de la Convention relative aux droits de l ’ enfant, le Comité demande instamment à l ’ État partie de redoubler d’ effort s pour mettre en place un système global de collecte de données. Celles-ci devraient couvrir tous les domaines de la Conven tion et être ventilées par âge, sexe, lieu géographique, origine ethnique et milieu socioéconomique , afin de faciliter l ’ analyse de la situation de tous les enfants, en particulier les enfants vulnérables . En outre, le Comité recommande que les données et les indicateurs soient utilisés par tous les ministères compétents.

Mécanisme de suivi indépendant

Le Comité accueille avec satisfaction les informations selon lesquelles une nouvelle commissionchargée des droits de l’homme et de la lutte contre la discrimination va être créée. Il note toutefois avec préoccupationque, faute de ressources, le poste de Responsable des droits de l’enfant, au sein de la Commission des droits de l’homme des Fidji, n’est pas pourvu depuis deux ans. En outre, il relève avec préoccupation que, d’après certaines sources, la Commission ne serait pas dotée de ressources suffisantes, ce qui nuit à son efficacité.

Se référant à son Observation générale n o  2 (2002) sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie d’accélérer l a création de la nouvelle commission chargée des droits de l’homme et de la lutte contre la discrimination et de lui allouer les ressources humaines, techniques et financières voulues pour lui permettre d’être pleinement fonctionnelle et, dans l’intervalle, de veiller à ce que la Commission des droits de l’homme des Fidji puisse s’acquitter de son mandat, à savoir enquêter sur les violations présumées des droits de l’homme. Plus précisément, il invite fermement l’État partie à prendre rapidement des mesures pour nommer un nouveau responsable des droits de l’enfant, que ce soit au sein de la Commission des droits de l’homme des Fidji ou de la nouvelle commission, et de lui allouer toutes les ressources humaines, techniques et financières voulues . Ledit responsable devrait être en mesure de recevoir les plaintes des enfants, d’enquêter sur celles-ci et d’y donner suite d’une manière adaptée aux enfants, de garantir la vie privée et la protection des victimes et de prendre des mesures de contrôle et de suivi.

Diffusion et sensibilisation

18.Le Comité salue les efforts mis en œuvre par l’État partie pour faire connaître les dispositions de la Convention. Il note toutefois avec préoccupation que celle-ci n’a pas encore été officiellement traduite dans toutes les langues locales, et que les programmes et campagnes de sensibilisation ne ciblent pas les îles périphériques et les communautés isolées.

19. Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour diffuser systématiquement et promouvoir la Convention et les observations finales dans l ’ ensemble du pays. Ce faisant, l ’ État partie devrait en particulier:

a) Veiller à ce que la Convention, les observations finales et les Observations générales soient traduites dans toutes les langues locales de l ’ État partie;

b) D istribuer des matériels d ’ information spécialement adaptés aux enfants des différentes communautés, aux parents et aux professionnels travaillant avec et pour les enfants ;

c) C oopérer étroitement avec les instances locales dans le but d ’ organiser et de mettre en œuvre des programmes de sensibilisation, au niveau des commun autés , y  compris dans les îles périphériques et les communautés isolées;

d) R ecourir davantage aux médias pour sensibiliser la population , par le truchement d ’ Internet et des radios émettant dans les langues vernaculaires.

B.Définition de l’enfant (art. 1 de la Convention)

20.Le Comité se félicite de ce que, en adoptant en 2009 le décret portant modification de la loi sur le mariage, l’État partie a fait passer de 16 ans à 18 ans l’âge du mariage des filles, qui est désormais le même que pour les garçons. Il note toutefois avec préoccupation que, bien que la Constitution définisse l’enfant comme toute personne de moins de 18 ans, certaines lois adoptées par l’État partie ne sont pas pleinement conformes à la Convention.

21. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ harmoniser la définition de l ’ enfant figurant dans sa législation nationale avec sa propre Constitution et, partant, avec la Convention.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non-discrimination

22.Le Comité prend note de l’existence de plusieurs lois interdisant la discrimination, mais relève avec une vive préoccupation que les enfants des minorités ethniques, les enfants vivant avec le VIH/sida et les enfants handicapés sont souvent victimes de stigmatisation et de discrimination. En outre, il salue l’adoption, le 1er avril 2014, de la première politique nationale pour l’égalité des sexes, mais est profondément préoccupé par la persistance d’attitudes patriarcales, par la perception profondément ancrée des rôles incombant à chacun des sexes et par les lois et les réglementations en vigueur qui sont discriminatoires à l’égard des filles au sein de la famille et de la communauté.

23. Se référant à l ’ article 2 de la Convention, le Comité prie instamment l ’ État partie de veiller à ce que tous les enfants jouissent des droits consacrés par la Convention dans des conditions d ’ égalité, sans discrimination pour quelque motif que ce soit et, à cette fin:

a) D’ adopter et de mettre en œuvre une stratégie complète visant à éliminer la discrimination en droit et dans la pratique et d ’ adopter une l oi interdisant expressément toutes les formes de discrimination fondée sur la race, le sexe, le handicap et la séropositivité au VIH réelle ou présumée ;

b) D’ organiser des campagnes d ’ information cibl a nt tous les groupes d ’ âge sur la situation des enfants handicapés et des enfants vivant avec le VIH/sida;

c) E n se fondant sur la nouvelle politique, d’ élaborer une stratégie complète et de définir des cibles précises pour éliminer les attitudes et les pratiques néfastes ainsi que les préjugés profondément ancrés qui sont discriminatoires à l ’ égard des filles et risquent de les empêcher de développer au mieux leur personnalité, leurs talents et leurs capacités mentales et physiques ;

d) D e consulter les enfants de tous les milieux socioéconomiques et de toutes les origines ethniques et géographiques qui sont exposés à la discrimination, et d’associer ces enfants et tous les secteurs de la société à l ’ élaboration des mesures décrites ci-dessus, afin de faciliter les changements sociaux et culturels et la création d ’ un environnement propice à la promotion de l ’ égalité .

D.Libertés et droitscivils (art. 7, 8, et 13 à 17)

Enregistrement des naissances, nom et nationalité

24.Le Comité salue les efforts mis en œuvre par l’État partie pour s’attaquer au problème de l’enregistrement des naissances et note avec satisfaction que la nouvelle Constitution garantit le droit d’être enregistré à la naissance et le droit à la nationalité. Il regrette toutefois que l’enregistrement des naissances ne soit toujours pas gratuit et que des pénalités soient imposées en cas d’enregistrement tardif. De plus, le Comité est préoccupé par les informations faisant état d’une baisse du taux d’enregistrement des naissances au cours des deux dernières années, en particulier dans les îles isolées.

25. Le Comité réitère sa précédente recommandation (CRC/C/15/Add.89, par. 35) , dans laquelle il appelait l ’ État partie à lancer des campagnes de sensibilisation portant sur l ’ obligation des parents de déclarer leurs enfants nouveau-nés. L e Comité reco mmande ainsi à l’État partie :

a) De prendre toutes les mesures qui s ’ imposent pour que les frais d ’ enregistrement, y compris les péna lités imposées en cas de retard, soient définitivement supprimés ;

b) De cibler tout particulièrement les groupes d ’ enfants dont le taux d ’ enregistrement des naissances reste très préoccupant, notamment en continuant à prendre des mesures pour améliorer l ’ enregistrement des naissances dans les régions reculées , et l’enregistrement des enfants des groupes minoritaires .

26.Le Comité prend note de l’article 7 du décret portant sur la nationalité, qui dispose que tout nourrisson retrouvé abandonné aux Fidji est réputé être né aux Fidji, sauf preuve contraire. Il craint toutefois que l’application de ce principe crée un risque d’apatridie pour les enfants dont il peut être prouvé qu’ils ne sont pas nés aux Fidji, mais dont la nationalité ne peut être établie.

27. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour éviter qu ’ un enfant re trouvé abandonné aux Fidji ne soit apatride. Il lui recommande en outre d ’ envisager de ratifier la Convention sur la réduction des cas d ’ apatridie de 1961.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39)

Droit des enfants à une protection contre toute s les formes de violence

28.Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption du décret sur la violence familiale, mais prend acte avec un profond regret du taux élevé de violence intrafamiliale visant les filles ainsi que les femmes, ce qui se répercute sur leurs enfants. À cet égard, il note aussi avec une vive préoccupation que l’État partie a indiqué que, dans le cadre des poursuites engagées contre les auteurs de violences à l’égard de femmes ou de filles, le fait de présenter des excuses traditionnelles, appelées bulubulu, peut en pratique constituer une circonstance atténuante et influer sur le verdict.

29. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de renforcer et de pleinement mettre en œuvre la législation réprimant la violence intra familiale, et de veiller à ce qu ’ en aucun cas les excuses traditionnelles puissent constituer une circonstance atténuante. En outre, il l ’ exhorte à prendre toutes les mesures voulues, comme l ’ organisation de campagnes de sensibilisation, pour faire évoluer le s comportement s et pour encourager les filles et les femmes à dénoncer la violence intrafamiliale et :

a) À créer, à l ’ intention des femmes et des enfants, suffisamment de foyers d ’ accueil offrant des services de conseil intégrés, y compris dans les régions reculées, et à les doter de ressources humaines, techniques et financières suffisantes;

b) À continuer à coopérer étroitement avec les organisations de la société civile qui offrent un refuge aux femmes et aux enfants;

c) À veiller à ce que les femmes qui ont fui un compagnon violent qui était le soutien de famille puissent bénéficier d ’ une aide financière pour elles et leurs enfants.

Châtiments corporels

30.Le Comité relève avec satisfaction que la Constitution garantit la protection contre les châtiments corporels et note que la loi sur les mineurs− dont l’article 57 donne un fondement juridique aurecours aux châtiments corporels, au titre du droit des enseignants «d’administrer une correction raisonnable» −est en cours de révision. En outre, il note avec une vive préoccupation que les châtiments corporels ne sont pas expressément interdits au sein de la famille, dans les établissements offrant une protection de remplacement et dans les crèches.

31. Se référant à son Observation générale n o 8 (2006) sur l e droit de l ’ enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruell es ou dégradantes de châtiments, le Comité demande instamment à l’État partie de promouvoir des méthodes d’éducation et de discipline positives, non violentes et participatives, à appliquer à la place des châtiments corporels. Il renouvelle en outre ses recommandations précédentes (CRC/C/15/Add.89, par. 36) dans lesquelles il engageait l ’ État partie à adopter une loi interdisant les châtiments corporels dans leur ensemble et à prendre des mesures pour sensibiliser l ’ opinion aux effets négatifs des châtiments corporels et pour veiller à ce que, à l ’ école, à la maison et dans les institutions, les méthodes disciplinaires respectent la dignité de l ’ enfant. L ’ État partie devra en outre mettre en place une formation régulière et obligatoire sur les droits de l ’ enfant à l ’ intention de tous les éducateurs et de tous les enseignants .

Exploitation sexuelle et violences sexuelles

32.Le Comité salue la création, en 2009, de l’unité de protection de l’enfance, approuvée par le Bureau du Procureur général en 2010, ainsi que la mise en place du système de signalement et de suivi «Briser le mur du silence». Il note toutefois avec la plus vive préoccupation que l’exploitation sexuelle des enfants et la violence sexuelle à l’égard des enfants sont courantes dans l’État partie, notamment dans le cadre des réseaux organisés de prostitution infantile et des maisons closes. Il relève en outre avec une grande préoccupation:

a)Que les excuses traditionnelles, comme le bulubulu, font office de réparation et peuvent, dans la pratique, constituer une circonstance atténuante dans les affaires d’infractions à caractère sexuel;

b)Qu’il n’existe pas réellement de services spécialisés aptes à répondre aux besoins des enfants, les services de prise en charge des garçons étant quasi inexistants, et que l’aide judiciaire est limitée et n’est pas accessible à tous ceux qui en auraient besoin;

c)Qu’il n’y a pas assez de policiers disponibles et dûment formés, notamment de policières en contact direct avec le public, et en particulier dans les zones rurales, pour traiter les affaires concernant des infractions à caractère sexuel visant des filles, et que la confidentialité des dossiers n’est pas toujours préservée;

d)Que, souvent, la société ne considère pas les violences sexuelles et l’exploitation sexuelle comme des infractions pénales, en particulier lorsque la fille est considérée être de moralité «douteuse» ou manquer de pudeur, et que, dans ce type d’affaires, la responsabilité est souvent rejetée sur la fille plutôt que sur l’auteur, au motif que c’est elle qui a attiré son attention;

e)Que les cas de violences sexuelles et d’exploitation sexuelle continuent d’être très peu signalés, étant donné que dénoncer publiquement des violences sexuelles est généralement mal vu, jette l’opprobre sur la victime, sa famille et l’auteur des faits et, lorsque la victime est une fille, lui fait «perdre de la valeur» d’un point de vue économique;

f)Que l’exploitation sexuelle des enfants est étroitement liée à la pauvreté, les enfants se sentant tenus de gagner de l’argent.

33. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De modifier sa législation et d’organiser des campagnes de sensibilisation pour que les excuses traditionnelles comme le bulubulu ne puissent constituer des circonstances atténuantes , ni faire office de réparation, en cas de violences sexuelles sur enfant ou d’ exploitation sexuelle d’enfants, et de renforcer encore la mise en œuvre de la politique de non-renonciation aux poursuites ;

b) De mettre en place des services d ’ assistance adapté s et de veiller à l ’ élaboration et à la mise en œuvre de programmes et politiques de prévention , de réadaptation et de réin sertion sociale à l’intention des enfants victimes , garçons et filles , conformément aux documents finals adoptés lors des congrès mondiaux contre l ’ exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales ;

c) De mener des campagnes de sensibilisation pour que les victimes d’exploitation sexuelle ne soient pas considérée s responsables de leur sort , et de dispenser aux agents de la force publique , aux travailleurs sociaux, aux juges et aux procureurs des formations sur la marche à suivre pour recevoir, suivre et examiner les plaintes dans le respect de l’enfant et de la confidentialité , et de veiller à la formation d ’ un nombre suffisant de policières destinées à être en contact direct avec le public ;

d) De mener des campagnes de sensibilisation à la question de l’exploitation sexuelle des enfants et aux graves dangers que courent les enfants impliqués dans le commerce du sexe , et de mettre en œuvre des programmes de lutte contre la pauvreté, afin notamment de s’attaquer aux causes profondes de l’exploitation sexuelle .

Ligne téléphonique d’assistance

34. Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer la mise en place de la ligne téléphonique d ’ assistance aux enfants qu’il a prévu de créer , et de veiller à ce qu’elle fonctionne vingt-quatre heures sur vingt-quatre , soit gratuite et soit dotée de suffisamment de personnels dûment formés . Il recommande en outre à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour faciliter la coopération entre la ligne téléphonique et les partenaires publics , comme la police et les systèmes de santé et de protection sociale , et la société civile , afin de faciliter les interventions et le suivi , et de faire connaître cette ligne téléphonique aux enfants de l ’ ensemble du territoire .

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20 et 21, 25 et 27 (par. 4))

Enfants privés de milieu familial

35.Le Comité regrette que l’application des normes minimales relatives à la prise en charge des enfants dans les institutions fasse l’objet d’une surveillance limitée et il est préoccupé par les informations indiquant que le Ministère de la protection sociale, des femmes et de la réduction de la pauvreté ades difficultés à gérer ces établissements, ce qui l’oblige à externaliser ces services.

36. Appelant l’attention de l’État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants ( r ésolution 64/142 de l’Assemblée générale , annex e ), le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les placements en famille d’accueil ou en institution fassent l’objet d’examens périodiques et de contrôler la qualité de la prise en charge des enfants placés, notamment en instaurant des mécanismes accessibles permettant de signaler et de surveiller les cas de maltraitance et de prendre des mesures correctives , tout en veillant à ce que suffisamment de ressources humaines, techniques et financières soient allouées aux établissements résidentiels ;

b) De prendre toutes les mesures appropriées pour doter le Ministère de la protection sociale, des femmes et de la réduction de la pauvreté des ressources nécessaires pour qu ’ il puisse gérer de manière efficace les établissements d ’ accueil et en assurer la surveillance .

Adoption

37.Le Comité prend note du projet de décret sur l’adoption, qui aligne la législation nationale sur la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale du 29 mai 1993. Il regrette toutefois que le projet soit en attente d’adoption devant le Cabinet depuis juin 2012. En outre, le Comité est préoccupé par:

a)Le fait qu’il n’existe pas d’autorité nationale officiellement chargée de contrôler les adoptions;

b)La pratique persistante de l’adoption informelle au sein de la famille, qui prive les enfants adoptés de la protection dont bénéficient les enfants adoptés en application des dispositions officielles;

c)Les informations faisant état de l’augmentation du nombre d’adoptions d’enfants venant de Chine, d’Inde ou du Pakistan au cours des cinq dernières années, adoptions qui ne font pas l’objet d’un contrôle ni d’un suivi approprié.

38. Le Comité recommande à l’État partie de revoir les règles et les procédures régissant l’adoption et de veiller à ce qu’elles soient pleinement conformes à la Convention, et notamment:

a) D ’ accélérer l’adoption du projet de décret sur l’adoption et de renforcer les accords bilatéraux conclus avec d’autres pays concernant l’adoption internationale ;

b) D ’ adopter et de mettre effectivement en œuvre des mesures visant à surveiller les adoptions informelles et à faire en sorte que toutes les adoptions soient subordonnées à une autorisation judiciaire émanant d’une autorité centrale expressément habilitée , et qu’elles fassent l’objet d’un suivi adéquat ;

c) D ’ instaurer un système centralisé de collecte de données ventilées par âge, sexe et origine sur les enfants adoptés ;

d) De dispenser à tous les professionnels intervenant dans les dossiers d ’adoption la formation dont ils ont besoin pour évaluer, examiner et traiter les dossiers.

G.Handicap, santé primaire et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Enfants handicapés

39.Le Comité prend note avec satisfaction des dispositions relatives à la protection des droits des personnes handicapées qui figurent dans la Constitution de 2013 etdans la Politique d’éducation inclusive de2010, ainsi que du projet de décret relatif au handicap de 2013. Il note toutefois avec une vive préoccupation que les enfants handicapés se heurtent souvent à la discrimination et à l’exclusion, et regrette en outre:

a)Que les enfants handicapés vivent souvent dans l’extrême pauvreté, et que l’État partie ne prenne pas suffisamment de mesures pour réellement garantir aux enfants handicapés l’accès aux services de santé et d’éducation et aux services sociaux, ni pour faciliter leur pleine inclusion sociale;

b)Que les enfants handicapés, en particulier les filles, soient plus exposés que les autres à l’exploitation sexuelle et aux violences sexuelles, y compris à la prostitution;

c)Que l’État partie privilégie les écoles spéciales pour enfants handicapés au détriment de l’éducation inclusive, et qu’il n’existe aucune structure éducative de niveau secondaire pour ces enfants;

d)Que le nombre de professionnels qualifiés travaillant pour et avec des enfants handicapés soit insuffisant, et qu’il n’y ait pas d’orthophonistes dans le pays, alors que les défauts d’élocution constituent le trouble le plus fréquemment rencontré au Centre d’intervention précoce des Fidji.

40. Se référant à son Observation générale n o  9 (2006) sur le droit des enfants handicapés , le Comité demande instamment à l’État partie d’adopter une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme , et lui recommande expressément :

a) De veiller à ce que tous les enfants handicapés, y compris ceux atteints de déficiences intellectuelles, auditives ou visuelles ou de troubles de la parole , bénéficient d’une aide financière appropriée , et d’accroître les crédits budgétaires pour garantir que les enfants handicapés o nt accès dans des conditions d’égalité aux services sociaux et sanitaires, en particulier dans les régions reculées;

b) De sensibiliser l’opinion publique aux risques de violence et d’exploitation sexuelle auxquels sont exposés les enfants handicapés , et de prendre toutes les mesures requises pour mieux protéger les enfants handicapés au sein des communautés, de la famille et des institutions ;

c) De développer en priorité l’éducation inclusive plutôt que l’enseignement spécialisé et de former les enseignants en conséquence , ainsi que de veiller à ce que les enfants handicapés aient pleinement accès à l’enseignement secondaire ;

d) De redoubler d’efforts pour mettre à disposition tous les spécialistes nécessaires , en particulier dans les région s reculées, et d’affecter davantage de ressources huma ines, techniques et financières .

Santé et services de santé

41.Le Comité se félicite de la baisse du taux de mortalité des moins de 5 ans, du taux de mortalité infantile et du taux de mortalité maternelle. Il note toutefois avec préoccupation que l’État partie n’a pas atteint les objectifs du Millénaire pour le développement qu’il s’était fixé pour 2015 dans ces domaines. Il regrette en outre l’existence d’inégalités géographiques pour ce qui est de la mortalité infantile et de la mortalité des moins de 5 ans, cette dernière étant bien plus élevée dans les divisions est et nord du pays, en raison notamment de l’éloignement des villages et des difficultés d’accès aux services de santé.

42. Se référant à son Observation générale n o 15 (2013) sur le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible , le Comité recommande à l’État partie:

a) D’intensifier ses efforts pour réduire encore le taux de mortalité des moins de 5  ans et le taux de mortalité infantile , en particulier en privilégiant les mesures de prévention et de prophylaxie , comme la vaccination et l’amélioration de la nutrition et des conditions d’hygiène , en particulier dans les régions reculées ;

b) De prendre des mesures pour améliorer les soins de santé prénatals et faire baisser encore la mortalité maternelle , y compris en formant mieux les sages ‑ femmes et en généralisant les mesures visant spécifiquement à prévenir les hémorragies post-partum et les autres grandes causes de mortalité maternelle;

c) D’accorder une attention particulière aux disparités entre les zones urbaines et les zones rurales , de faire en sorte que tous les enfants puissent accéder dans des conditions d’égalité à des services de qualité égale , y compris dans les zones reculées et rurales, et de prendre des mesures spécifiques afin de réduire les disparités dans l ’ accès aux services ;

d) De solliciter, à cet égard, une aide financière et technique, notamment auprès du Fonds des Nations Unies pour l’enfance ( UNICEF ) et de l ’ Organisation mondiale de la Santé (OMS ).

Santé mentale

43.Le Comité prend note avec satisfaction des mesures de politique générale ainsi que des mesures institutionnelles et législatives que l’État partie a prises, comme la création du Comité national de prévention du suicide, la politique nationale de prévention du suicide de 2008 et le décret relatif à la santé mentale de 2010 qui, entre autres, porte création de services de gestion du stress dans les trois principaux hôpitaux du pays. Le Comité regrette toutefois la hausse des comportements suicidaires chez les enfants de l’État partie, et note en outre avec préoccupation:

a)Que les services de gestion du stress ne sont pas dotés d’équipements spéciaux permettant de répondre aussi aux besoins des enfants;

b)Qu’il n’existe pas actuellement de services professionnels et spécialisés de suivi psychologique destinés aux enfants, qui soient largement accessibles, alors que le suicide est considéré comme un problème de santé majeur pour les enfants;

c)Que les Indo-Fidjiens sont considérés comme présentant un risque suicidaire plus élevé que les autres groupes de population.

44. Le Comité prie instamment l’État partie de mener des travaux de recherche sur les facteurs de risque suicidaire chez les enfants , y compris sur les causes profondes de la dépression , et d’utiliser les conclusions de ces travaux pour mettre au point tout un ensemble de services spécifiquement destinés aux enfants , parmi lesquels des services de gestion du stress et des activités de promotion et de prévention de la santé mentale , en vue de prévenir efficacement les comportements suicidaires . En  outre, le Comité demande instamment à l’État partie :

a) De veiller à ce que tous les enfants, en particulier les enfants des zones reculées, les enfants vivant dans la pauvreté, les enfants des rues, les enfants non scolarisés et les enfants pris en charge en dehors de chez eux , aient accès dans des conditions d’égalité aux travailleurs sociaux et à des services de soutien psychologique ;

b) D’accorder une attention particulière, lors de l’adoption de ces mesures, aux enfants des communautés i ndo- f id jiennes .

Pratiques préjudiciables

45.Le Comité est très préoccupé par la prévalence des mariages arrangés de filles de 15 ans, en particulier dans les communautés indo-fidjiennes.

46. Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa législation afin de garantir que les mariages précoces et les mariages arrangés soient incriminés et donnent lieu à des poursuites , et de mettre en place des campagnes de sensibilisation et d’éducation sur les effets néfastes de ces mariages .

Santé des adolescents

47.Le Comité prend note des mesures prises à la fois par le dispensaire chargé de la santé des adolescents et via la formation des enseignants à l’éducation à la vie de famille, pour informer les enfants sur la santé sexuelle et procréative mais il est très préoccupé par le taux élevé de grossesses précoces.

48. Se référant à son Observation générale n o 4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l’enfant , le Comité recommande à l’État partie :

a) D’ adopter une politique globale en matière de santé sexuelle et procréative à l ’ intention des adolescents et de veiller à ce que l ’ éducation à la santé sexuelle et procréative soit inscrite dans les programmes scolaires obligatoires et s ’ adresse aux adolescents et aux adolescentes, une attention particulière étant prêtée à la prévention des grossesses précoces et des infections sexuellement transmissibles ;

b) D’élaborer et de mettre en œuvre un e politique visant à protéger les droits des adolescentes enceintes, des mères adolescentes et de leurs enfants et à lutter contre la discrimination à leur égard ;

c) De prendre des mesures pour sensibiliser la population aux pratiques sexuelles et à la parentalité responsables et pour encourager l ’ adoption de comportements responsables dans ces domaines, en prêtant une attention particulière aux garçons et aux hommes .

VIH/sida

49.Le Comité salue les mesures et les initiatives prises par l’État partie pour limiter la propagation du VIH/sida, comme la fourniture gratuite de médicaments antirétroviraux ou l’adoption du Plan national stratégique multisectoriel 2007-2011 de lutte contre le VIH/sida, mais s’inquiète de ce que le taux de jeunes séropositifs au VIH ne cesse de croître.

50. Se référant à son Observation générale n o  3 (2003) sur le VIH/sida et les droits de l’enfant , le Comité recommande à l’État partie :

a) De diffuser des informations et de la documentation auprès du public, en particulier au près des adolescents, sur les méthodes de prévention et de protection , y compris les p ratiques sexuelles à moindre risque;

b) D ’ améliorer le suivi médical des mères séropositives et de leurs nourrissons afin d e permettre un diagnostic précoce de la maladie et une mise sous traitement rapide ;

c) D ’ améliorer l ’ accès à des services de qualité, adaptés à l ’ âge des patients, dans les domaines de la santé procréative, de la santé sexuelle et du VIH/sida;

d) D e solliciter l ’ assistance technique du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et de l ’ UNICEF, notamment.

Consommation de drogues et autres substances psychoactives

51.Le Comité accueille avec satisfaction la création, par la police fidjienne, d’un service des stupéfiants, en coopération avec le Conseil consultatif national sur la toxicomanie qui relève du Ministère de l’éducation, et l’organisation, par ledit Conseil, de campagnes dans les écoles. Il regrette toutefois que la consommation de différents types de drogues, comme la marijuana, l’ecstasy, le speed et la cocaïne, et l’inhalation de colle soient en augmentation chez les enfants.

52. Le Comité recommande à l’État partie de faire reculer la consommation de drogues chez les enfants et les adolescents, notamment en leur communiquant des informations précises et objectives et en leur inculquant des compétences pratiques en ce qui concerne la prévention de la conso mmation de substances toxiques, y compris le tabac et l ’ alcool, et de mettre en place des services de traitement de la toxicomanie et de réduction des risques qui soient accessibles et adaptés aux jeunes.

Allaitement maternel

53.Le Comité salue les mesures prises pour promouvoir l’allaitement maternel et appliquer le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel, mais note avec préoccupation que l’État partie n’a pas instauré de mécanisme chargé de surveiller le respect de ce Code. En outre, il est préoccupé par:

a)Le nombre élevé d’enfants de moins de 6 mois qui ne sont pas allaités exclusivement au sein;

b)La méconnaissance des pratiques d’allaitement maternel appropriées;

c)L’absence de politique globale relative à l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant.

54. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que tous les hôpitaux dotés d’une pouponnière fassent l’objet de contrôles réguliers destinés à vérifier la bonne application du Code international de commercialisation des substituts du lait maternel et :

a) De mener des actions de sensibilisation à l’importance de l’allaitement maternel et aux risques que présente le lait maternisé ;

b) De promouvoir des pratiques d’allaitement appropriées et d’élaborer une politique relative à l ’ alimentation du nourrisson et du jeune enfant , dont un volet serait consacré à la question de l’alimentation du nourrisson et du VIH .

Incidence des changements climatiques sur les droits de l’enfant

55.Le Comité salue l’introduction de la politique nationale relative aux changements climatiques et l’instauration du Comité national de coordination pour les changements climatiques, et se félicite en outre des efforts accrus mis en œuvre par l’État partie pour organiser des réunions au cours desquelles les enfants sont informés des changements climatiques et des mesures à prendre pour les combattre. Il note toutefois avec préoccupation que les mesures prises pour permettre aux enfants de faire entendre leur voix et de prendre part aux décisions relatives aux changements climatiques sont insuffisantes. Il est extrêmement préoccupé par les effets des changements climatiques sur les enfants et les familles, en particulier ceux des communautés fidjiennes établies dans les régions côtières et dans les basses terres, où les changements climatiques se traduisent par une perte des ressources foncières et des ressources en eau douce ou par leur salinisation, et limitent les possibilités de mener des activités agricoles et de générer un revenu de subsistance. Le Comité appelle également l’attention de l’État partie sur les informations indiquant que les enfants courent plus de risques que les adultes en cas de catastrophe naturelle et sont plus vulnérables qu’eux aux changements climatiques.

56. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D ’ élaborer des politiques et des programmes visant à relever les défis liés aux changements climatiques et à la gestion des risques de catastrophe, de veiller à ce que les vulnérabilités et les besoins particuliers des enfants, tant sur le plan physique que psychologique ainsi que leurs opinions, soient pris en considération , et à ce que les enfants prennent pleinement part à la concertation sur les politiques à mener dans le do maine des changements climatiques;

b) D ’ achever l ’ élaboration de la législation et des politiques nationales visant à garantir des ressources en eau potable et des services d ’ assainissement durables, et de les mettre en œuvre en vue d ’ améliorer l ’ accès à un approvisionnement en eau potable suffisant et à un assainissement adéquat, en particulier dans les îles périphériques ;

c) De renforcer les systèmes de protection sociale pour garantir que les enfants et les familles touchés par les changements climatiques bénéficient d’un soutien suffisant et approprié ;

d) De mieux sensibiliser et préparer les enfants aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles en inscrivant ces questions dans le s programme s scolaire s et dans les programmes de formation des enseignants ;

e) De solliciter la coopération bilatérale, multilatérale, régionale et internationale aux fins de la mise en œuvre de ces recommandations , et de renforcer les accords existants .

Niveau de vie

57.Le Comité prend note avec satisfaction des projets de construction de logements du Fonds de réduction de la pauvreté, mais note avec préoccupation que les conseils communaux et l’Office national du logement ne sont toujours pas en mesure de satisfaire la demande de logements à prix modéré, et que les familles pauvres n’ont parfois pas d’autre solution que de vivre dans des campements informels sans aucune sécurité d’occupation et dans des conditions de vie médiocres. Le Comité constate en outre avec préoccupation:

a)Que le taux élevé de pauvreté des enfants est la cause première du travail des enfants dans l’État partie et la raison principale de l’abandon scolaire, et qu’il accroît le risque pour les enfants, y compris les enfants handicapés, d’être contraints à la prostitution;

b)Que les programmes publics de protection sociale et de réduction de la pauvreté ne ciblent pas suffisamment les Indo-Fidjiens, dont le taux de pauvreté est souvent le plus élevé du pays;

c)Que les personnes handicapées, notamment les enfants, courent un risque très élevé de vivre dans la pauvreté.

58. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour offrir un soutien et une assistance matérielle aux familles économiquement défavorisées et de procéder à des changements structurels pour en finir avec la pauvreté des enfants . L’État partie devra tout particulièrement :

a) Prendre sans délai des mesures pour veiller à ce que toutes les familles vivant dans des campements informels aient accès à un logement convenable et abordable ainsi qu’à l’eau potable et à l’assainissement ;

b) Garantir à toutes les familles et à tous les enfants à risque un accès prioritaire aux services , en accordant une attention particulière aux enfants des communautés indo-f i d j iennes et aux enfants handicapés ;

c) F aire en sorte que les travailleurs sociaux soient suffisamment formés pour repérer les familles et les enfants à risque , et administrer les programmes sociaux de manière efficace, suivre leur mise en œuvre et évaluer leurs effets .

H.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation, y compris formation et orientation professionnelles

59.Le Comité prend note avec satisfaction de l’aide au paiement des frais de scolarité du Ministère de l’éducation, du programme «Un ordinateur portable par enfant»destinés aux élèves du primaire et de la gratuité de l’enseignement annoncée par le Premier Ministre dans le discours qu’il a prononcé à l’occasion de l’adoption du budget de 2014, mais relève que les coûts indirects, comme le coût des uniformes, des manuels scolaires et des transports, n’ont pas été totalement supprimés et que, en conséquence, les enfants dont les parents ne peuvent assumer ces coûts abandonnent leurs études. En outre, le Comité constate avec préoccupation:

a)Que les adolescentes enceintes et les mères adolescentes sont souvent contraintes d’abandonner leurs études;

b)Que les écoles rurales sont souvent dépourvues d’accès à l’eau, à l’électricité et aux moyens de communication;

c)Que le système éducatif, pourtant considéré comme l’un des meilleurs de la région du Pacifique, ne répond pas exactement aux besoins de la communauté ni du marché de l’emploi, un nombre important d’élèves ne trouvant pas de travail à la fin de leurs études.

60. Se référant à son Observation générale n o 1 (2001) sur les buts de l’éducation , le Comité recommande à l’État partie :

a) D’accroître le montant des crédits budgétaires alloués à l’enseignement primaire et secondaire et de veiller à supprimer tous les coûts indirects et cachés ;

b) De faire en sorte que les adolescentes enceintes et les mères adolescentes bénéficient d u soutien et de l ’ assistance nécessaires pour pouvoir poursuivre leur scolarité dans les établissements ordinaires ;

c) D’octroyer aux écoles suffisamment de fonds pour qu’elles puissent toutes se doter des infrastructures nécessaires à l’instauration d’un cadre propice à l’apprentissage ;

d) De procéder à des évaluations d ’ impact des programmes et des stratégies relatifs à l ’ éducation et de prendre les mes ures correctives qui s’impos ent pour garantir qu’à la fin de leurs études les jeunes auron t les compétences recherchées sur le marché de l ’ emploi national.

61.Le Comité note avec satisfaction que l’accès à l’éducation a été élargi, ce qui a eu pour effet de réduire le nombre d’enfants envoyés dans les grands centres urbains pour y être scolarisés, mais note que la pratique perdure.

62. Le Comité recommande à l’État partie d’améliorer encore les possibilités de scolarisation dans les régions reculées ainsi que les services de transport .

I.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32 et 33, 35 et 36, 37 b) à d) et 38, 39 et 40)

Enfants demandeurs d’asile et enfants réfugiés

63.Le Comité note avec préoccupation que la loi sur l’immigration ne comprend pas de dispositions spéciales portant sur les besoins et la vulnérabilité propres aux enfants réfugiés et demandeurs d’asile, ni de dispositions sur le regroupement familial.

64. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De modifier la partie 6 de la loi sur l’immigration et d’y inscrire des dispositions spéciales portant protection des enfants réfugiés et demandeurs d’asile, accompagnés ou non ;

b) D’introduire des dispositions sur le regroupement familial dans la loi sur l’immigration.

Exploitation économique, notamment travail des enfants

65.Le Comité prend note avec satisfaction du décret de 2007 relatif aux relations de travail,qui fixe à 15 ans l’âge minimum d’admission à l’emploi et interdit aux enfants de moins de 18 ans d’effectuer des travaux dangereux. Il regrette toutefois qu’il n’existe pas de liste exhaustive des travaux dangereux. En outre, il est gravement préoccupé par:

a)Le nombre élevé d’enfants qui travaillent dans l’État partie, et qui pour la plupart travaillent de manière informelle pour des familles en tant que domestiques, ouvriers ou travailleurs agricoles;

b)L’augmentation de l’incidence du travail des enfants, aggravée encore par des facteurs tels que l’exode rural, la pauvreté et le fait que ces enfants soient sans abri ou vivent loin de leurs parents.

66. Le Comité prie l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour s’attaquer aux causes profondes du travail des enfants tout en mettant en œuvre et en renforçant encore le cadre juridique destiné à érad iquer le travail des enfants, y  compris dans les secteurs informel et privé. En outre, il prie instamment l’État partie:

a) De compléter le décret relatif aux conditions de travail en y inscrivant une définition et une liste des travaux dangereux qui soient conformes aux normes internationales;

b) De veiller à ce que les enfants de plus de 15 ans qui travaillent aient véritablement et librement choisi de le faire et bénéficient des garanties appropriées, conformément à la Convention et aux normes internationales ;

c) D’employer et de former suffisamment d’inspecteurs du travail, et de veiller à ce que des enquêtes approfondies soient menées, à ce que les personnes ayant enfreint la législation du travail soient poursuivies efficacement et à ce que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives soient imposées dans la pratique;

d) De recueillir des données sur le travail des enfants, sur le nombre d’enfants qui effectuent des travaux dangereux et sur les conditions de travail auxquelles ils sont soumis, ventilées par âge, par sexe, par lieu géographique et par milieu socioéconomique , et d’utiliser ces données pour élaborer des politiques et des stratégies efficaces destinées à prévenir et à éliminer toutes les formes de travail des enfants ;

e) De ratifier la Convention (n o  189) de l ’ OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques de 2011;

f) De solliciter l ’ assistance technique du Programme pour l ’ élimination du travail des enfants de l ’ Organisation internationale du Travail à cet égard .

Enfants vivant ou travaillant dans la rue

67.Le Comité note avec une grave préoccupation que, dès l’âge de 5 ans, un certain nombre d’enfants vivent et travaillent dans la rue, vivent dans leur famille et travaillent régulièrement dans la rue, ou encore travaillent dans la rue pendant certaines périodes de l’année, comme après la récolte de canne à sucre ou pendant les vacances scolaires. Il est en outre profondément préoccupé par:

a)Le nombre élevé d’enfants des rues qui travaillent comme porteurs dans les marchés ou comme cireurs de chaussures, ainsi que par le nombre considérable d’enfants victimes de prostitution, de pornographie et de traite à des fins sexuelles;

b)Le fait qu’il arrive que les tuteurs des enfants les réduisent à la mendicité.

68. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De procéder à une évaluation systématique du phénomène des enfants des rues afin de se faire une idée précise de ses causes profondes et de son ampleur, et d’élaborer et de mettre en œuvre une politique globale pour s’attaquer aux causes profondes de ce phénomène ;

b) De prendre toutes les mesures voulues pour veiller à ce que les lois relatives à la protection de l’enfance, en particulier celles qui ont trait à la responsabilité des parents et des tuteurs, soient toujours mises en œuvre ;

c) En coordination avec la société civile, de garantir aux enfants des rues la protection qui s’impose, à savoir le gîte et le couvert , l ’ accès à un cadre familial et à des services de santé adéquats , et la possibilité d’aller à l’école et de bénéficier d’autres services sociaux .

Vente, traite et enlèvement d’enfants

69.Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption du Plan d’action national de lutte contre la traite des êtres humains et la traite des enfants aux Fidji, lancé par le Département de l’immigration en février 2011. Il regrette toutefois l’absence de données ventilées et d’informations sur la prévalence et les causes profondes de la traite, ainsi que sur la formation des personnels chargés de l’application de la loi à cet égard. Il est en outre gravement préoccupé par:

a)La pratique qui consiste, pour les parents, à vendre leur fille en mariage;

b)Le fait que l’État partie est un pays d’origine de la traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé, les enfants victimes étant exploités dans des maisons closes illégales, des hôtels locaux, chez des particuliers et dans d’autres lieux, tant en ville qu’à la campagne;

c)La pratique traditionnelle qui veut que les enfants soient placés chez des proches ou des membres de la famille dans les grandes villes, où ils risquent d’être contraints de vivre dans des conditions de servitude domestique ou encore forcés de se livrer à des activités sexuelles en échange de nourriture, de vêtements, d’un logement ou du paiement des frais de scolarité, ce qui les expose au risque de traite;

d)Le manque de ressources pour enquêter efficacement sur la traite des enfants et poursuivre les auteurs de la traite, s’agissant notamment de la traite internationale.

70. Le Comité demande instamment à l’État partie :

a) De mener des travaux de recherche sur les causes profondes et l’ampleur de la traite des enfants , en particulier de la traite à des fins d’exploitation sexuelle , dans l’État partie , afin de repérer les enfants à risque et de mettre au point des politiques et des programmes ciblés ;

b) D’appeler l’attention des populations à risque sur les dangers de la traite, notamment sur le lien entre la pratique qui consiste à envoyer les enfants vivre dans les villes et la traite des enfants , et d’organiser des campagnes d’information à l’intention des familles et des enfants, en particulier les enfants vulnérables , sur la manière de se protéger ;

c) D’accroître les ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour enquêter sur les affaires relatives à la traite des enfan ts, pour poursuivre les auteurs et assurer le suivi desdites affaires , et dispenser une formation spécialisée aux personnels chargés de l’application de la loi à cet égard ;

d) D ’ envisager de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

Administration de la justice pour mineurs

71.Le Comité est gravement préoccupé par la situation des enfants en conflit avec la loi. Il regrette en particulier:

a)Que l’âge minimum de la responsabilité pénale soit fixé à 10 ans seulement;

b)Que Suva soit la seule ville dotée d’un tribunal spécial pour mineurs;

c)Que les mineurs délinquants puissent être condamnés à la réclusion à perpétuité;

d)Que les conditions de détention soient particulièrement médiocres et ne soient pas conformes aux normes internationales, prenant note en particulier de la surpopulation carcérale, de la dégradation des infrastructures et du manque d’accès aux services de base.

72. Le Comité exhorte l ’ État partie à rendre son système d ’ administration de la justice pour mineurs pleinement conforme aux dispositions de la Convention, en particulier à ses articles 37, 39 et 40, aux autres normes en la matière ainsi qu’aux dispositions de l’Observation générale n o 10 du Comité (2007) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs . Il l’exhorte notamment:

a) À relever l’âge minimum de la responsabilité pénale à un niveau acceptable selon les normes internationales ;

b) À i nstituer davantage de juridictions spécialisées pour mineurs, à nommer des juges spécialisés dans la justice pour mineurs et à veiller à ce que c eux-ci bénéficient d’un enseignement et d’une formation appropriés ;

c) Conformément à l’ article 37  a) de la Convention, à veiller à ce qu’aucune peine de réclusion à perpétuité ne soit imposée à un enfant ;

d) À privilégier , chaque fois que possible, les mesures de substitution à la détention , comme la déjudiciarisation, la liberté conditionnelle, la médiation, les services de conseil ou les travaux d ’ intérêt général , et à veiller à ce que la détention ne soit qu ’ une mesure de dernier ressort et d ’ une durée aussi brève que possible et à ce qu ’ elle fasse l ’ objet d ’ un réexamen régulier en vue d’être levée ;

e) À veiller à ce que les conditions de détention soient conformes aux normes internationales, s’agissant notamment de l’accès à l’éducation et aux services de santé .

J.Ratification des instruments internationaux relatifs aux droitsde l’homme

73. En vue de renforcer encore l’exercice des droits de l’enfant, l e Comité recomman de à l’État partie de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants , le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés , le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant établissant une procédure de présentation de communications , ainsi que les principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme auxquels il n ’ est pas encore partie .

IV.Mise en œuvre et établissement de rapports

A.Suivi et diffusion

74. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre pleinement en œuvre les présentes recommandations. Le Comité recommande également que les deuxième à quatrième rapports périodiques , soumis en un seul document, les réponses écrites de l ’ État partie, et les présentes observations finales soient largement di ffusés dans les langues du pays.

B.Prochain rapport

75. Le Comité invite l ’ État partie à soumettre ses cinquième et sixième rapports périodiques le 11 septembre 2020 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales . Ces rapports devront être conformes aux directives spécifiques à l ’ instrument (CRC/C/58/Rev.2 et Corr.l), que le Comité a adoptées le 1 er octobre 2010, et ne pas dépasser 21 200 mots ( voir la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale , par. 16 ). Si l ’ État partie soumet un rapport dont le nombre de pages excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur et à le soumettre à nouveau, conformément aux directives susmentionnées. S ’ il n ’ est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d ’ examen par le Comité ne pourra être garantie.

76.Le Comité invite en outre l ’ État partie à soumettre un document d e base actualisé conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées concernant l ’ établissement des rapports, qui ont été approuvées en juin 2006 à la cinquième Réunion intercomités des organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I). Le nombre maximum de mots pour le document de base commun a été fi xé à  42 400 par l ’ Assemblée générale, au paragraphe 16 de sa résolution 68/268.