Nations Unies

CCPR/C/SLE/1

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

16 mai 2013

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ homme

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 40 du Pacte

Rapports initiaux des États parties attendusen novembre 1997

Sierra Leone *

[24 juillet 2012]

Table des matières

Paragraphes Page

I.Introduction1−203

II.Application des articles 1 à 26 du Pacte21−1306

III.Conclusion13122

Annexes 23

Rapport initial de la Sierra Leonesoumis en application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques

I.Introduction

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui fixe des normes internationales relatives aux droits de l’homme et couvre une large gamme de droits intéressant les bases mêmes de la société, est un des instruments les plus largement acceptés.

Il est composé de règles de fond (qui expriment la lettre et l’esprit du traité) et de règles de forme qui fixent les directives concernant son application et son respect. Il comporte 27 articles de fond relatifs, entre autres, au droit à la vie (art. 6), à l’interdiction de la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 7), au droit à un procès équitable (art. 14), et à la liberté d’expression (art. 19). Conformément au paragraphe 1 de l’article 2, tous les droits énoncés dans le Pacte sont garantis à tous les individus sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.

Le paragraphe 2 de l’article 2 exige des États qu’ils prennent les mesures nécessaires pour appliquer les dispositions du Pacte, et l’article 40 leur fait obligation de présenter un rapport sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre et le respect de ces dispositions.

Les obligations générales des États parties sont les suivantes:

a)Conformément à l’article 2, respecter et garantir les droits civils et politiques énumérés par le Pacte;

b)Veiller à ce que les individus qui se trouvent sur leur territoire soient protégés par des garanties de fond et des garanties procédurales;

c)Conformément à la garantie énoncée au paragraphe 3 de l’article 2, garantir un recours utile aux victimes de violations des droits reconnus par le Pacte.

Ce traité, comme tout autre traité, est un contrat entre États, dont l’exécution réussie dépend de l’engagement (exprimé le plus souvent par la ratification) de ses signataires. En Sierra Leone, la ratification des traités internationaux est régie par l’article 40 de la Constitution (1991), qui dispose que ceux-ci doivent être adoptés par le Parlement.

La Sierra Leone a soumis son instrument de ratification du Pacte au Parlement, mais celui-ci doit encore prendre les mesures nécessaires pour l’approuver ou adopter une résolution à cet effet. La Sierra Leone continue néanmoins de respecter les dispositions du Pacte.

Pour les raisons susmentionnées, la Sierra Leone n’avait pas encore présenté de rapport, initial ou périodique, au Comité des droits de l’homme. Cela étant, un bureau de liaison a récemment été créé pour recueillir des renseignements en vue de l’élaboration et de la présentation du présent rapport.

Bref historique de la Sierra Leone

La Sierra Leone, ancienne colonie et protectorat de la Couronne britannique, est devenue indépendante le 27 avril 1961 avec l’arrivée au pouvoir du Sierra Leone People’s Party (SLPP).

En mars 1967, les résultats électoraux en Sierra Leone, alors une monarchie/démocratie constitutionnelle, ont provoqué une crise de régime. Il en est résulté plusieurs coups et contrecoups d’État, qui se sont succédé jusqu’en mars 1968, date à laquelle le pays est repassé sous un régime civil dirigé par All People’s Congress (APC). La Sierra Leone a adopté une Constitution républicaine le 19 avril 1971; en 1978, elle a adopté une constitution instituant un système de parti unique et en 1991, une constitution multipartite.

La même année, le conflit civil a éclaté avec les premières offensives du Revolutionary United Front (RUF), dirigé par le caporal Foday Sankoh. Le Président Joseph Saidu Momoh a été renversé le 29 avril 1992 par des officiers subalternes constitués en «Conseil national provisoire de gouvernement». Ce Conseil a gouverné la Sierra Leone jusqu’en avril 1996, date à laquelle des élections législatives et présidentielles multipartites ont eu lieu. Le SLPP, dirigé par Ahmed Tejan Kabbah, a remporté l’élection présidentielle.

Le «Conseil révolutionnaire des forces armées», dirigé par le lieutenant-colonel Johnny Paul Koroma, a renversé en mai 1997 le nouveau gouvernement dirigé par le SLPP. Le lieutenant-colonel Koroma aurait invité le RUF à rejoindre la capitale, Freetown, pour participer au gouvernement. Le gouvernement légitime s’est exilé à Conakry, en Guinée. La coalition formée par le Conseil révolutionnaire des forces armées et le RUF est restée au pouvoir pendant dix mois avant d’en être écartée par les forces du Groupe de surveillance du cessez-le-feu (ECOMOG) de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), sous commandement nigérian. Le gouvernement légitime a été rétabli en mars 1998. Le 6 janvier 1999, les soldats de la coalition sont de nouveau entrés dans Freetown pour renverser le gouvernement nouvellement investi, ce qui a provoqué des troubles et des tensions parmi la population civile. Les forces conjointes ont pillé et détruit une grande partie de l’est de Freetown pendant trois semaines avant de se retirer. À la suite de l’Accord de paix de Lomé négocié avec l’aide de la CEDEAO en 1999, la Sierra Leone a retrouvé une paix incertaine..

Le conflit a officiellement pris fin en 2002. La même année, le Gouvernement a créé, en vertu d’un accord avec l’ONU, un Tribunal spécial chargé de «poursuivre les personnes qui portent la responsabilité la plus lourde des violations du droit international humanitaire et du droit sierra-léonais commis sur le territoire de la Sierra Leone depuis le 30 novembre 1996». À ce jour, 13 personnes ont été inculpées, parmi lesquelles 9 ont été poursuivies. Le Tribunal spécial continue de fonctionner et devrait cesser ses activités en 2013.

Des élections présidentielles et législatives organisées en mai 2002 se sont déroulées dans le calme. Le Président Kabbah a remporté l’élection présidentielle avec 70 % des voix, le SLPP obtenant quant à lui une large majorité au Parlement. Les élections présidentielles suivantes ont eu lieu en mai 2007. Le Président Ernst Bai Koroma les a remportées au deuxième tour avec 54,6 % des voix, tandis que l’APC obtenait une large majorité au Parlement avec 59 sièges.

La guerre civile, les troubles sociaux et l’instabilité gouvernementale ont provoqué des perturbations économiques et sociales dans le pays. Plus de 20 000 personnes ont perdu la vie et près de 2 millions d’autres ont été déplacées, en plus du demi-million de personnes qui ont fui vers les pays voisins pour y demander le statut de réfugié. Les effets conjugués de la pauvreté et de la guerre civile dévastatrice ont donc entravé l’action du Gouvernement et compromis sa capacité de s’acquitter de ses obligations internationales relatives à la soumission de rapports aux organes conventionnels.

Territoire

La Sierra Leone est un petit État côtier de 71 620 kilomètres carrés situé sur la côte ouest de l’Afrique. Il est délimité au nord et au nord-est par la République de Guinée, à l’ouest par l’océan Atlantique et à l’est par la République du Libéria. La Sierra Leone, la Guinée et le Libéria, récemment rejoints par la Côte d’Ivoire, forment l’Union du fleuve Mano.

En Sierra Leone, le climat est tropical, ce qui favorise la présence d’une dense forêt humide dans les provinces du sud et de l’est. Il y a deux saisons: la saison sèche, de novembre à avril, et la saison des pluies, de mai à octobre. Des vents très secs venant du Sahara soufflent pendant la période de l’harmattan, de décembre à février.

Le pays est subdivisé en quatre circonscriptions administratives correspondant aux provinces du Sud, de l’Est, du Nord et à la Région occidentale. Il compte 12 districts et 149 chefferies, lesquelles sont dirigées par des chefs traditionnels, dénommés chefs suprêmes, et par leurs sous-chefs. Ce découpage administratif vise à assurer un meilleur contrôle et une meilleure gouvernance. Il existe également des organes d’administration locale au sein des conseils de district et des conseils municipaux qui complètent l’action gouvernementale en assurant la prestation de services de base dans les localités.

Population

Selon la Banque mondiale, la Sierra Leone comptait environ 5 560 000 habitants en 2008. Le taux de croissance démographique est de 2,3 % par an. En 2007, 42 % de la population vivait dans les villes et 58 % dans les campagnes. De 1990 à 2007, le taux de croissance de la population urbaine était de 4,4 %.

Tableau 1 Données démographiques

2005

2007

2008

Population total e (en millions)

5,11

5,42

5,56

Croissance de la population (en pourcentage annuel)

3,6

2,8

2,5

Superficie (en milliers de m 2 )

71,7

71,7

71,7

Source : Banque mondiale: Base de données des indicateurs du dév eloppement dans le monde, avril  2009 .

Tableau 2 Structure par âge

Groupe d’âge

En pourcentage

Moins de 15 ans

34,7

15-59 ans

59,3

60 ans et plus

6 ,0

Source : Banque mondiale: Base de données des indicateurs du dév eloppement dans le monde, avril  2009 .

La population autochtone est composée de 18 groupes ethniques: 30 % de Temné, 30 % de Mendé, 1 % environ de Krio, le reste étant formé des 15 autres groupes tribaux suivants: Kono, Limba, Soussou, Mandingue, Fullah, Kuranko, Yalunka, Kissi, Galinas, Kru, Sherbro, Vai, Loko, Gola, Bullum et Krim. En outre, il y a aussi des minorités libanaise et indienne importantes et de petits groupes d’origine européenne et pakistanaise.

Langue et religion

La langue officielle de la Sierra Leone est l’anglais, mais le krio est beaucoup parlé. La population compte 60 % de musulmans et 30 % de chrétiens, les 10 % restants étant des adeptes de religions traditionnelles africaines. La tolérance religieuse est sans doute le principal atout du pays, où musulmans et chrétiens vivent ensemble dans la paix, les mariages mixtes n’étant d’ailleurs pas rares. La Constitution protège la liberté de religion.

II.Application des articles 1 à 26 du Pacte

Article 1

Le Pacte consacre le droit inaliénable de toute personne de déterminer librement son statut politique et d’assurer librement son développement économique, social et culturel.

Les chapitres II (Principes fondamentaux de la politique publique) et III (Déclaration des droits) de la Constitution de la Sierra Leone, adoptée par la loi no 6 de 1991, couvrent tous les droits consacrés par la Déclaration universelle des droits de l’homme, par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, notamment. Il s’ensuit que le droit à l’autodétermination est également reconnu.

Nonobstant les dispositions de la Constitution, et bien qu’elles soient non‑opposables, plusieurs institutions ont été créées pour protéger les droits énoncés dans ce texte ou reconnus en vertu d’autres mesures ou lois adoptées par le Parlement. Certaines, par exemple la Commission électorale nationale − qui est conforme aux dispositions de la Constitution − ont été mises en place à la suite de recommandations de la Commission Vérité et réconciliation exprimant l’opinion publique, tandis que d’autres l’ont été au titre de politiques ou de lois adoptées par le Parlement telles que la loi sur la Commission d’enregistrement des partis politiques ou la loi sur la Commission du service public. Une révision de la loi sur la Commission d’enregistrement des partis politiques est en cours, en vue de renforcer l’efficacité de cet organe.

Le paragraphe 2 de l’article premier du Pacte met en relief un aspect particulier du contenu économique du droit à l’autodétermination, faisant obligation aux États de faire connaître les facteurs ou difficultés qui entravent la libre disposition des richesses et ressources naturelles nationales, en violation de cette disposition.

Avec l’article 6 de sa Constitution, la Sierra Leone a fait totalement sien le but du paragraphe 2 de l’article premier du Pacte, mais elle est allée plus loin en adoptant la loi no 12 de 2009 sur les mines et les minerais, qui s’écarte d’un modèle d’exploitation et privilégie la libre disposition laquelle, à son tour, favorise la jouissance d’autres droits − fondamentaux ou nouveaux et émergents. En outre, la loi de 2011 sur les ressources minérales nationales a été adoptée afin d’améliorer encore la gestion de ces ressources. Ces nouvelles lois, en complément du système cadastral établi avec l’aide du Programme des Nations Unies pour le développement, ont permis de crédibiliser à la fois le processus de délivrance des licences elles-mêmes. L’objet de la politique mise en œuvre par le Gouvernement dans ce secteur est de faire en sorte que la population tire le plus grand bénéfice des richesses minières du pays et de favoriser le développement économique et social.

La gestion améliorée des ressources naturelles et de l’environnement est un élément clef de la stabilité et de la légitimité du Gouvernement. Celui-ci est conscient des effets d’une exploitation et d’une gestion non durables des ressources naturelles du pays. Ses objectifs sont les suivants:

Renforcer les institutions nationales de gestion de l’environnement;

Veiller à créer des mécanismes intégrés de gestion de l’environnement;

Prendre en compte les questions relatives à l’environnement et aux catastrophes;

Renforcer le cadre des études d’impact sur l’environnement;

Renforcer l’application et le respect des règles en matière d’environnement.

L’Agence sierra-léonaise de protection de l’environnement s’occupe des questions relatives à l’environnement. Le Gouvernement harmonise actuellement la loi sur les ressources naturelles et la gestion de l’environnement. Des mécanismes sont mis en place pour veiller à ce que tous les projets de développement comportent un volet environnemental.

Article 2

De manière générale, le Pacte laisse aux États parties le choix des modalités de son application, dans le cadre établi par l’article 2.

La Sierra Leone a adopté la loi no 6 de 1991, contenant sa Constitution, pour faire en sorte que les droits de toutes les personnes relevant de sa juridiction soient respectés. L’article 15 de cette loi reconnaît les droits et libertés fondamentaux consacrés par le Pacte sans aucune discrimination ni distinction fondée sur la race, la tribu, le lieu d’origine, l’opinion politique, la couleur, la conviction ou le sexe, sous réserve du respect des droits et libertés d’autrui et de l’intérêt public.

Outre la protection accordée par la Constitution, la loi no 9 de 2004 a prévu la création de la Commission des droits de l’homme de la Sierra Leone, chargée de promouvoir et de protéger ces droits en veillant à leur respect, en menant des enquêtes sur les allégations de violations et en s’assurant, lorsque de telles violations sont établies, qu’une réparation est accordée. Il est encourageant de constater que la Commission s’est vu accorder le statut d’accréditation «A» par le Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme pour son action exemplaire dans ce domaine.

Article 3

Cet article souligne la nécessité de protéger les femmes au sein de la société et de leur permettre d’exercer leurs droits civils et politiques sur un pied d’égalité avec les hommes.

L’article 15 de la Constitution garantit la protection des droits fondamentaux de l’homme sans distinction de sexe; cependant, tel n’est pas le cas de toutes les autres dispositions de la Constitution, notamment de l’article 27 (par. 4 d)). Trois lois, communément appelées «lois de parité», ont été adoptées pour remédier à cette discrimination flagrante à l’égard des femmes:

La loi de 2007 sur l’enregistrement du mariage et du divorce coutumiers;

La loi de 2007 sur la succession patrimoniale; et

La loi de 2007 sur la violence intrafamiliale.

Outre ces lois, un projet de loi sur les infractions à caractère sexuel a été examiné par le Conseil des ministres et sera inscrit à l’ordre du jour du Parlement le plus rapidement possible; et un projet de loi sur les régimes matrimoniaux a été élaboré et doit être soumis au Conseil des ministres. Ces lois et projets de loi ont tous été adoptés ou élaborés dans le cadre de l’incorporation dans le droit interne de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, conformément à l’article 40 de la Constitution de 1991.

Il existe également plusieurs stratégies visant à promouvoir l’autonomie des femmes. Un plan national stratégique en faveur de l’égalité des sexes a été élaboré et lancé le 3 juin 2010 par le Président de la République; on a entrepris de la réexaminer en vue d’en renforcer les dispositions et d’en faciliter l’application. Ce document distingue six domaines prioritaires: le renforcement des capacités, la gestion et la supervision, la participation des femmes à la vie politique, les droits de la santé sexuelle et procréative, l’autonomisation des femmes, la recherche, la documentation et les technologies de l’information et de la communication, et la budgétisation de la parité et la responsabilisation dans ce domaine.

De plus, un Plan national d’action concernant les résolutions 1325 (2000) et 1520 (2003) du Conseil de sécurité de l’ONU a été lancé par le Président le 8 juin 2010. Ce plan repose sur cinq piliers: la participation, la prévention, la protection, la répression des infractions et la coordination.

Un projet de loi relatif à l’égalité des sexes, prévoyant notamment la création d’une commission nationale pour la parité, a été mis au point et sera inscrit à l’ordre du jour du Parlement en tant que proposition de loi de type Private Members Bill. Auparavant, le Ministère avait conçu et lancé une politique nationale de prise en compte des questions de genre et une politique nationale de promotion de la condition de la femme, en 2000.

Conformément à ses obligations conventionnelles, le Ministère de la protection sociale, de la parité et de l’enfance a soumis en mai 2007 son rapport initial et ses deuxième à cinquième rapports périodique présentés en un seul document au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes. Le Ministère a récemment élaboré un projet de sixième rapport périodique qui doit être approuvé et officiellement soumis avant d’être présenté à l’ONU.

Article 4

Le Pacte autorise les États parties à prendre des mesures dérogeant à ses dispositions et aux obligations que celles-ci prévoient, sous réserve qu’ils respectent en toute circonstance les directives établies.

L’article 29 de la Constitution fixe avec la précision voulue les directives à suivre lorsque l’état d’urgence est déclaré. Il satisfait aux normes internationales applicables, en veillant à ce que les dérogations aux droits fondamentaux ne soient pas arbitraires.

Toutefois, malgré cette protection prévue par la Constitution, des violations graves des droits de l’homme ont été commises sous l’état d’urgence. Des droits élémentaires de l’homme ont été bafoués: exécutions extrajudiciaires (lorsque le Conseil national provisoire de gouvernement puis le Conseil révolutionnaire des forces armées étaient au pouvoir), disparitions forcées, mépris total pour la libre disposition des ressources naturelles consacrée par le Pacte, notamment. Il y a lieu de rappeler à cet égard que le Conseil national provisoire de gouvernement et le Conseil révolutionnaire des forces armées étaient tous deux des organes militaires illégaux qui ont immédiatement suspendu la Constitution. La plupart des auteurs de violations graves des droits de l’homme ont ignoré les dispositions de l’article 29 de la Constitution.

L’état d’urgence a été déclaré plusieurs fois ces vingt dernières années. Le contenu des déclarations d’état d’urgence n’était pas toujours conformes aux règles fixées par le Pacte ou la Constitution en la matière et quand il l’était, il s’agissait davantage d’un attachement de pure forme qu’un véritable respect des obligations volontairement souscrites.

La Commission des droits de l’homme est d’un grand secours pour corriger cette défaillance dans la mise en œuvre du Pacte puisqu’elle est chargée de protéger les droits de l’homme en toute circonstance et de surveiller le respect par le Gouvernement des obligations qui lui incombent au titre des traités relatifs aux droits de l’homme et dans le cadre des relations internationales qui intéressent de près ces droits. La Commission dispose des moyens nécessaires pour exercer son pouvoir de surveillance et faire en sorte que les directives soient respectées en toute occasion.

Article 5

Le Pacte reconnaît la généralité de l’acte ici visé tant du point de vue de sa nature que de sa portée.

La Constitution elle-même interdit les comportements arbitraires qui engendrent ou sont susceptibles de constituer des atteintes aux droits qu’elle protège. Il s’ensuit que ces droits, en particulier ceux qui sont opposables, ne souffrent aucune restriction, mais vont de pair avec des obligations.

Article 6

Le Pacte dispose qu’aucune dérogation n’est autorisée au droit à la vie, qu’il considère comme le droit suprême, devant être protégé y compris en période d’état d’urgence.

En vertu de l’article 16 de la Constitution, le droit à la vie est inhérent à la personne humaine et il ne peut y être dérogé que par l’exécution d’une décision de justice; cette disposition consacre en outre le caractère inaliénable du droit à la vie, qui est protégé par la loi. Ce droit, considéré comme le droit suprême, ne souffre aucune dérogation et doit être interprété largement. Il a pour corollaire l’obligation de prendre des mesures concrètes pour réduire la mortalité infantile, augmenter l’espérance de vie et interdire les exécutions arbitraires par les forces de sécurité.

La Sierra Leone est une nation qui a subi beaucoup de coups d’État et de guerres civiles; dans de telles situations, l’état d’urgence est proclamé et des violations des droits fondamentaux, en particulier du droit à la vie, sont souvent commises.

Étant donné que le droit à la vie est inhérent à la personne humaine et qu’il ne peut y être dérogé que dans les conditions prévues par la Constitution, un moratoire sur l’exécution de toutes les condamnations à la peine capitale est en vigueur depuis 2008.

Pour en finir avec l’impunité, le Gouvernement a créé avec le concours de l’ONU un tribunal mixte, le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, chargé de juger les infractions primaires de droit pénal international ou de droit interne commises pendant la guerre civile et de poursuivre les principaux responsables de la chaîne de commandement.

Pendant les onze années de guerre civile, tant les forces de sécurité que les factions belligérantes ont fait preuve d’un mépris total pour la vie et la dignité humaine, ce qui s’est traduit par la mort de milliers de civils. Cela a été considéré comme un manquement de l’État sierra-léonais à son obligation de prévenir les exécutions arbitraires, étant donné que le droit à la vie n’est pas uniquement envisagé dans son sens le plus strict. La disparition de personnes pendant cette période, et même en temps de paix, a été considérée comme un manquement à l’obligation de protéger le droit à la vie. La police n’est saisie que de quelques cas de disparition, mais elle les prend très au sérieux car les victimes risquent de trouver la mort, ce qu’elle est tenue d’empêcher.

Pour augmenter l’espérance de vie, le Gouvernement a mis en place en 2010 une politique de soins de santé gratuits pour les femmes enceintes, les femmes qui allaitent et les enfants de moins de 5 ans. À l’appui de cette politique, les salaires du personnel soignant ont été augmentés, des médicaments ont été distribués gratuitement et un développement massif et généralisé de l’infrastructure sanitaire a été engagé.

Même s’il existe un moratoire sur la peine de mort, le Gouvernement s’est engagé à donner suite à la recommandation qui lui a été faite lors de l’Examen périodique universel, tendant à ce qu’il abolisse la peine capitale en commençant par ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et en organisant ultérieurement un référendum sur la question. Le règlement de la Cour martiale est également en train d’être modifié pour donner aux défendeurs la possibilité de faire appel.

Article 7

L’objet de cet article du Pacte est de protéger la dignité et l’intégrité physique et mentale de l’individu. Aucune dérogation n’est autorisée, même en période d’état d’urgence.

L’article 20 de la Constitution énonce ce droit sans prévoir de dérogation, mais ne définit pas l’acte même de torture. Seule la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants peut être invoquée. Le droit pénal ne contient aucune disposition incriminant la torture.

Dans le contexte familial, les actes de torture sont assez souvent pris à tort pour des agressions, voies de fait ou atteintes graves à l’intégrité physique.

Des mesures ont été prises pour sensibiliser les personnes susceptibles de commettre des actes de torture répondant à la définition énoncée dans la Convention, avec notamment l’organisation d’ateliers et de séminaires ou conférences par des organismes publics, des acteurs de la société civile et des organisations non gouvernementales (ONG). Ceci ne suffit pas compte tenu du mouvement qui s’est produit en faveur de la mise en œuvre de la Convention, aux fins de la prévention de la torture.

Pendant la guerre, la torture et les traitements inhumains et dégradants étaient généralisés et systématiques. Des efforts sont faits pour combattre de tels actes et empêcher qu’ils ne se reproduisent. La création du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, qui a compétence pour juger les principaux responsables des crimes commis durant le conflit, y compris des actes de torture, participe de ces efforts. À ce jour, tous les individus jugés par le Tribunal ont été condamnés et purgent différentes peines d’emprisonnement, sauf l’ex‑Président du Libéria, Charles Taylor, dont la condamnation vient tout juste d’être prononcée.

Aucune plainte pour torture n’a été officiellement déposée à ce jour. Des cas de traitements inhumains ou dégradants se produisent néanmoins. D’après divers rapports émanant du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Sierra Leone (BINUCSIL), de la Commission des droits de l’homme et de l’organisation Prison Watch, des personnes enfermées dans des institutions psychiatriques ou des établissements pénitentiaires connaissent des conditions inhumaines et très dures. Des châtiments corporels continuent d’être infligés aux détenus qui enfreignent le règlement, conformément aux réglementations et ordonnances de 1960 et 1961 régissant les prisons.

Pour remédier à cette situation et protéger les individus contre toutes les formes de torture et de traitement inhumain ou dégradant, des procédures et institutions ont été mises en place pour le traitement des plaintes et la réalisation des enquêtes. Il faut espérer que des voies de recours pourront être proposées par les organes disciplinaires des institutions employant des personnes susceptibles de commettre de tels actes, comme la Commission de la magistrature et des services juridiques, le Conseil de la police et d’autres structures disciplinaires internes. Le Conseil de la police a récemment approuvé la mise en place d’un comité indépendant chargé de l’examen des plaintes visant des policiers, qui renforcera la confiance dans la police puisque les allégations de cette sorte seront désormais examinées par un organisme indépendant. Le système judiciaire prévoit une réparation pour les victimes, mais celles-ci sont très rarement indemnisées, et toujours insuffisamment. Des programmes complets de réforme sont en train d’être mis en œuvre dans les secteurs de la justice et de la sécurité avec l’aide de divers partenaires du développement et du Gouvernement lui-même. Aucun cas d’expérience médicale ou scientifique sur des êtres humains n’est actuellement à signaler.

Article 8

Soucieux de combattre toute recrudescence de l’esclavage, le Pacte interdit en particulier toutes les formes de servitude modernes, notamment les situations telles que la prostitution, le trafic de drogues ou certaines formes de violence psychologique comme l’imposition, par une personne à une autre, de relations de dépendance aux conséquences désastreuses.

La Constitution, au paragraphe 1 de l’article 19, protège les personnes de l’esclavage et du travail forcé. Elle énonce essentiellement ce qui n’est pas considéré comme un travail forcé et vise à protéger l’intégrité de l’individu dans le travail. Membre de l’Organisation internationale du Travail (OIT), la Sierra Leone a ratifié quelques-unes des conventions de cette instance qui établissent des normes minimales en matière de conditions de travail et d’éthique.

Tous les individus sont libres et égaux devant la loi. La loi no 7 de 2005 contre la traite des êtres humains réprime cette pratique, que les victimes soient ou non consentantes. Le principe volenti non fit injuria ne s’applique pas ici puisque le consentement ne peut être invoqué comme moyen de défense.

La loi no 7 de 2007 relative aux droits de l’enfant va plus loin en énumérant les conditions ou critères et normes applicables au travail des enfants conformément à la Convention no 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants (1999) et à la Convention relative aux droits de l’enfant.

Il existe un Tribunal du travail que tout travailleur peut saisir s’il estime que ses droits sont bafoués par son employeur, et le Parlement est tenu, en vertu de l’article 146 de la Constitution, de mettre en place un bureau du médiateur, ce qu’il a fait en promulguant la loi no 2 de 1997. Le Bureau du Médiateur est un organe d’enquête indépendant chargé d’examiner tout acte administratif officiel contesté par toute personne s’estimant victime d’une injustice du fait de la mauvaise administration des services et organes ministériels.

Article 9

Le Pacte protège toutes les personnes privées de liberté, notamment celles qui le sont dans le cadre d’une procédure pénale ou en vertu de toute autre mesure (internement pour raisons mentales, vagabondage, toxicomanie, éducation, immigration, etc.).

Le droit à la liberté est garanti à l’article 17 de la Constitution et ne peut faire l’objet de restrictions que dans certains cas, notamment pour assurer l’exécution d’un arrêt ou d’une condamnation prononcé par la Cour suprême, traduire une personne en justice ou placer dans un établissement d’éducation un mineur de 21 ans, ou encore lorsque la personne concernée n’a pas la capacité d’ester en justice comme défendeur.

Il arrive que des individus soient soumis à une arrestation arbitraire, en particulier par la police pour la commission d’infractions très mineures. La législation prévoit une réparation dans ce genre de cas, mais les victimes sont très rarement indemnisées et, même lorsqu’elles le sont, la réparation n’est pas suffisante.

La question de la privation de liberté est difficile à traiter car les cas de détention arbitraire sont rarement consignés. Plusieurs personnes sont détenues, contrairement aux dispositions de l’article 18, mais les recherches effectuées ont montré qu’il existait souvent des circonstances atténuantes et non une violation délibérée. La principale cause de cette situation est la lenteur de la justice. Souvent, ces cas ne sont (malheureusement) pas enregistrés.

La police a rendu obligatoire l’enregistrement de toutes les détentions à des fins d’analyse, soulignant que cela permettrait d’éviter le surpeuplement de ses cellules.

Article 10

Le Pacte confère aux détenus le droit d’être traités avec humanité. Des normes s’appliquent au traitement des détenus et le protocole national et administratif prévoyant une norme de protection minimale de ce droit doit être observé.

L’article 15 de la Constitution accorde aux personnes relevant de sa juridiction les principaux droits et libertés fondamentaux, à savoir le droit à la vie et le droit d’être protégé contre l’esclavage et le travail forcé (même les détenus peuvent invoquer le paragraphe 2 b) de l’article 19) et contre la privation des biens. En outre, les détenus peuvent invoquer la protection de la loi (notamment en ce qui concerne leur droit à un procès équitable, la rétroactivité des lois et la double incrimination), jouissent de la liberté de conscience et d’expression et du droit d’être protégés contre la discrimination et ont droit à la même protection que les autres personnes au titre de l’article 28, sauf si leurs droits vont à l’encontre des conditions imposées en cas d’état d’urgence.

Les détenus bénéficient en outre de la protection assurée par l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus.

Un accusé peut invoquer les articles 17 et 23 de la Constitution pour défendre ses droits. La loi de procédure pénale de 1965 définit en détail la procédure d’arrestation, en reprenant les garanties prévues par la Constitution; elle ne dit cependant rien de la validité de l’arrestation lorsque la procédure n’a pas été respectée. Les avocats ont toujours invoqué dans ces cas-là la jurisprudence de la common law.

Article 11

Le Pacte envisage la possibilité que la privation de liberté résulte d’obligations contractuelles ou de la responsabilité civile.

L’article 17 de la Constitution précise les cas dans lesquels une personne peut être privée de sa liberté. Il va plus loin en prévoyant une indemnisation en cas d’arrestation ou de détention illégale.

Article 12

Application

Le Pacte reconnaît le droit de libre circulation sur le territoire sous réserve uniquement des restrictions prévues par la loi qui sont nécessaires pour protéger la sécurité nationale, l’ordre public, la santé publique ou les droits et libertés d’autrui.

L’article 18 de la Constitution interdit toute privation du droit de libre circulation sous réserve des restrictions prévues par la loi. Une personne peut être privée de son droit de circuler librement en Sierra Leone si une restriction de ce droit est raisonnablement nécessaire dans l’intérêt de la défense publique ou pour protéger la santé, la sécurité ou la moralité publiques, ou pour préserver les ressources naturelles minérales, marines, forestières et autres ressources de la Sierra Leone. Ce droit peut également être restreint lorsqu’il est nécessaire d’assigner à résidence un ressortissant étranger ou de limiter sa circulation en Sierra Leone et pour d’autres raisons justifiables.

Afin de garantir l’exercice du droit de libre circulation conformément à la loi, des cartes nationales d’identité sont délivrées à tous les citoyens sierra-léonais qui en font la demande et des permis de résidence sont accordés par le département de l’immigration aux étrangers autorisés à circuler et résider librement dans le pays. Des passeports nationaux, qui sont désormais des passeports CEDEAO, sont également délivrés à tous les ressortissants de la Sierra Leone qui en font la demande. La délivrance de tous les documents de voyage est assurée par le département de l’immigration après un examen rigoureux permettant de s’assurer que les postulants remplissent les conditions requises pour pouvoir posséder un passeport national ou un document de voyage. Une fois délivré, le passeport national ne peut être retiré que dans certaines circonstances, notamment aux fins de restreindre la liberté de circulation d’une personne poursuivie pour infraction pénale ou en cas de révocation, conformément à la loi, de la nationalité octroyée, par exemple, à un citoyen naturalisé.

La Constitution protège par ailleurs les citoyens contre le bannissement. L’article 18, paragraphe 4, dispose qu’une personne empêchée d’entrer ou de résider dans un lieu dont elle est originaire peut saisir un tribunal indépendant et impartial, qui doit se prononcer sur la question. Lorsque la Sierra Leone était un État à parti unique, de nombreux cas de bannissement se sont produits. Il n’y en a plus aujourd’hui au niveau de l’État, mais dans les provinces, il arrive, quoique très rarement et de façon illégale, que des personnes soient chassées de lieux sacrés appartenant à des sociétés secrètes.

La Sierra Leone accorde l’asile politique aux étrangers qui le méritent.

Article 14

Le Pacte prévoit des recours judiciaires qui jouent un rôle central dans la protection des droits de l’homme. Un ensemble de droits relatifs à une bonne administration de la justice en matière pénale comme civile sont garantis au minimum dans toutes les juridictions.

L’article 23 (par. 1, 2 et 3) de la Constitution donne effet à l’article 14 du Pacte en prévoyant la tenue publique d’un procès équitable dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi. En matière pénale, les dispositions applicables sont celles de la loi de la procédure pénale de 1965, qui définit la hiérarchie et la compétence des différents tribunaux et précise les modalités des procès et enquêtes préliminaires. Le Règlement de la Haute Cour régit quant à lui le traitement des affaires civiles, notamment en ce qui concerne la citation, la comparution et les moyens de défense, prévoyant dans tous les cas un traitement équitable, indépendant et impartial en matière civile.

Le paragraphe 4 de l’article 23 de la Constitution donne rigoureusement effet aux dispositions du paragraphe 2 de l’article 14 du Pacte. La loi est stricte à cet égard, imposant la charge de la preuve à l’accusation puisqu’il n’est que justice que celui qui fait une allégation la prouve. La charge de la preuve peut toutefois être inversée, mais la pratique en matière pénale en Sierra Leone est celle envisagée par le Pacte.

Le paragraphe 5 de l’article 23 de la Constitution donne aussi rigoureusement effet aux dispositions du paragraphe 3 de l’article 14 du Pacte. La garantie qui y est prévue assure la même protection que le Pacte et invalide toutes les dispositions contraires.

Le paragraphe 4 de l’article 14 du Pacte, qui porte sur la justice pour mineurs, rejoint la loi de 1945 sur les enfants et les jeunes (chap. 44) qui régit le traitement des mineurs en conflit avec la loi. Cette loi s’applique à tout mineur de 17 ans, les personnes plus âgées étant considérées, en droit pénal, comme des adultes. Les personnes âgées de 16 ans et moins relèvent de deux catégories différentes: les «enfants», jusqu’à l’âge de 14 ans non révolus, et les «jeunes» de 14 ans à 17 ans non révolus. Cependant, conformément à l’article 216 de la loi de procédure pénale, la peine capitale, qui existe toujours en Sierra Leone, ne peut pas être imposée à des personnes de moins de 18 ans. Cette disposition est conforme à la Convention relative aux droits de l’enfant. Le même article n’empêche toutefois pas la condamnation d’un mineur à une peine de réclusion à perpétuité, contrairement à ce que prévoit la Convention. Il précise que les mineurs concernés doivent être maintenus dans un lieu désigné par le Président pour une période déterminée jusqu’à ce que leur amendement et leur transformation soient garantis. Il est cependant très peu probable qu’une telle période équivaille à la perpétuité.

La Sierra Leone a fixé l’âge de la responsabilité pénale à 10 ans, considérant qu’à cet âge un enfant est capable de comprendre la différence entre le mensonge et la vérité. Bien que la Convention relative aux droits de l’enfant se borne à disposer que les États doivent établir «un âge minimum au-dessous duquel les enfants seront présumés n’avoir pas la capacité d’enfreindre la loi pénale», le Comité des droits de l’enfant s’est dit préoccupé, dans ses observations finales, de voir la responsabilité pénale engagée à un âge si précoce. Il a recommandé à l’État partie de revoir la législation pertinente et de relever l’âge minimum de la responsabilité pénale. La délégation sierra-léonaise a convenu que l’âge fixé était trop bas et a déclaré que la question serait certainement considérée lors de l’élaboration d’une prochaine loi.

Le fonctionnement et la composition du tribunal pour mineurs sont régis par la partie II (art. 3, par. 1) de la loi chap. 44. Le tribunal est présidé par un magistrat assisté de deux juges de paix. Les juges de paix ne sont pas des juges qualifiés: ils sont nommés par le Président parmi des personnes extérieures à l’appareil judiciaire sur recommandation du Procureur général. Ils doivent posséder une certaine expérience en matière de psychologie des enfants ou de sociologie. Lorsque nous nous sommes rendus au tribunal pour mineurs, l’un des juges de paix était un ex-ministre de la protection sociale. La loi chap. 44 dispose en son article 3 que le tribunal siège dans un bâtiment ou une salle distincts du lieu où se tiennent les procès ordinaires (par. 1). Les séances ont lieu à huis clos et la vie privée des mineurs doit être respectée (par. 5). Les journalistes sont cependant autorisés à assister à l’audience, mais ils n’ont pas le droit de publier des informations susceptibles de permettre l’identification du mineur (par. 5).

La Constitution établit les tribunaux, qui sont des organes indépendants et impartiaux investis de la responsabilité d’administrer la justice. Elle reconnaît en outre l’existence d’autres tribunaux établis par la loi, tels que les tribunaux locaux et la Cour martiale. Grâce à l’existence de toutes ces juridictions, les individus non seulement peuvent faire entendre leur cause, mais ont affaire à des tribunaux indépendants et impartiaux. La Sierra Leone est cependant confrontée au grave problème que pose la prolifération des «tribunaux» relevant des chefs suprêmes et autres chefs traditionnels, dont on sait qu’ils règlent les affaires relevant de leur juridiction sans toujours tenir compte des normes relatives aux droits de l’homme. Les tribunaux locaux ont aussi été accusés de prononcer des jugements injustes. La loi de 2011 sur les tribunaux locaux traite d’un certain nombre d’aspects déjà évoqués du fonctionnement de ces juridictions, et des réformes sont en cours en ce qui concerne le rôle de médiateur des chefs suprêmes et autres chefs traditionnels et leur manière de régler les différends.

Une personne qui n’est pas satisfaite du jugement rendu par un tribunal a le droit de former un recours devant l’instance immédiatement supérieure. La Constitution établit une hiérarchie des tribunaux, chaque juridiction examinant en appel les décisions des instances qui lui sont immédiatement inférieures. Il existe depuis toujours un mécanisme d’appel qui permet aux personnes s’estimant lésées par le jugement rendu par un tribunal local de déposer des recours auprès des structures officielles, jusqu’à la Cour suprême. L’adoption de la loi de 2011 sur les tribunaux locaux, qui place notamment ces juridictions dans le cadre du système judiciaire, facilitera la procédure de recours et la rendra encore plus accessible.

La Constitution protège les juges de la révocation, sauf en cas d’incompétence ou de faute professionnelle grave. Les juges bénéficient donc d’une garantie d’inamovibilité. Pour garantir l’indépendance de la magistrature, plusieurs partenaires du développement, dont le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix (UNPBF) et le Programme de développement du secteur de la justice (JSDP), ont soutenu l’introduction de réformes au sein du système judiciaire, concernant notamment la révision des rémunérations des magistrats et des juges et la fourniture d’un appui logistique (véhicules, ordinateurs, etc.). Une proposition visant à améliorer le statut et les conditions de travail des magistrats et des juges a été adressée au Gouvernement, qui l’a acceptée et mise en œuvre, pour les juges, fin 2011. Mais les tribunaux manquent encore de personnel car, malgré l’augmentation des émoluments, la pratique privée en tant qu’avocat reste beaucoup plus attractive. Compte tenu du nombre d’affaires qui leur sont soumises, les tribunaux ont donc besoin de magistrats et de juges supplémentaires pour éviter les retards dans l’administration de la justice.

Il existe une Cour martiale, qui traite des délits commis par les membres des Forces armées de la République de Sierra Leone. La Cour martiale a son propre règlement. Auparavant, toutes ses décisions étaient définitives et non susceptibles d’appel, ce qui a conduit à des erreurs judiciaires et à l’exécution de nombreux membres des forces armées. En 1998, la Cour martiale a condamné à mort 24 officiers accusés de trahison, qui ont été exécutés. Ce procès et les exécutions qui ont suivi ont suscité de très nombreuses critiques dans le pays et à l’étranger au motif que les condamnés n’avaient pas pu faire appel du jugement et que la justice n’avait donc pas été correctement rendue. Les règlements et procédures ont dû être revus et modifiés et, aujourd’hui, la Sierra Leone peut affirmer fièrement que le problème a été réglé et que les décisions de la Cour martiale peuvent désormais être contestées en appel.

Il existe des garanties de procédure écrites concernant les audiences devant les Magistrates Courts (tribunaux de première instance), la Haute Cour, la Cour d’appel, la Cour suprême et la Cour martiale. Les tribunaux locaux ont leurs propres procédures conformément à leurs coutumes et traditions. Malgré l’existence de toutes ces garanties, le fait est que les procédures ne sont pas toujours strictement observées, d’où de fréquents renvois qui nuisent grandement à l’administration de la justice.

Outre le droit à ce que leur cause soit entendue, la Constitution garantit aussi aux individus le droit de bénéficier des services d’un avocat. Un programme national expérimental d’aide juridictionnelle, piloté par le JSDP avec le concours du Ministère du développement international et mis en œuvre à Freetown jusqu’en mai 2012, a favorisé l’adoption cette même année d’une loi sur l’aide juridictionnelle. Il a en outre permis, au cours de ses deux ans et demi d’existence, de régler quelque 5 000 affaires. D’autres organisations, telles que LAWYERS (Legal Assistance through Women Yearning for Equality, Rights and Social Justice), Timap for Justice et l’Open Society Justice Initiative, fournissent une aide judiciaire et des services parajuridiques jusque dans les provinces, mais cela ne suffit pas à répondre aux besoins du grand nombre de justiciables pauvres. La loi de 2012 sur l’aide juridictionnelle dispose toutefois que chaque chefferie doit disposer d’un auxiliaire juridique.

Article 15

Mise en œuvre

L’article 15 du Pacte a pour objet de protéger contre l’application rétroactive des lois pénales.

L’article 23 7) de la Constitution protège contre les lois rétroactives. Il s’agit là d’un principe très controversé comme en témoigne une affaire de trafic de drogues jugée en 2008, dans laquelle les avocats de la défense ont fait valoir que les faits n’étaient pas incriminés au moment où ils avaient été commis. Or, la Sierra Leone étant membre de la communauté internationale et partie à la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes (1988), il n’a pas pu être démontré que les lois concernées étaient en réalité rétroactives, car l’État avait ratifié la Convention avant de les adopter.

Article 17

Le Pacte prévoit des garanties que l’on retrouve transposées dans l’article 22 de la Constitution. L’article 25 offre la même protection, mais en limite la portée car il prévoit qu’il est possible d’y déroger volontairement ou en application de l’article 25 2).

Article 18

L’article 24 de la Constitution garantit la liberté de conscience et la libre pratique de la religion, sauf lorsque celle-ci met en péril la sécurité publique, la moralité publique, l’ordre public ou la santé publique, ou lorsqu’il faut protéger les adeptes d’une religion de l’intervention abusive des adeptes d’une quelconque autre religion.

La Sierra Leone est un des rares pays où règnent la tolérance interreligieuse et la stabilité. Il s’agit d’un État laïc où cohabitent donc des adeptes de plusieurs religions, dont la chrétienté, l’islam et la religion africaine traditionnelle. Toutes les fêtes chrétiennes et musulmanes y sont célébrées.

Des lieux de culte de toute religion peuvent être édifiés. Toutefois, avant de pouvoir accueillir des fidèles, ces lieux, qu’il s’agisse d’églises, de mosquées ou de temples, doivent être enregistrés auprès du Ministère de la protection sociale. Aucun groupe religieux n’a jamais été radié des registres.

Bien que la Sierra Leone soit connue pour son esprit de tolérance religieuse, certaines régions du pays ont été le théâtre, tout récemment, d’affrontements extrêmement violents entre chrétiens et musulmans. Ces incidents ont eu lieu au village de Mambolo, dans le nord du pays, et à Calaba, une ville de la région occidentale. Le problème a été rapidement résolu grâce à l’intervention des pouvoirs publics et du Conseil interreligieux, organe composé de représentants de toutes les religions reconnues et pratiquées en Sierra Leone, qui a notamment pour devoir de veiller au respect d’un esprit de tolérance interreligieuse dans le pays.

Article 19

La Constitution, en son article 25, garantit la liberté d’association et l’État respecte généralement cette disposition dans la pratique. L’exercice de ce droit repose essentiellement sur le consentement et le respect de la responsabilité qui en découle.

Le Gouvernement a créé la Commission indépendante des médias, conformément à la loi, afin d’assurer l’objectivité des médias et de garantir leur protection dans l’exercice de leurs fonctions.

Le Gouvernement a créé le premier organisme public indépendant de radiodiffusion et de télévision d’Afrique, avec le concours des Nations Unies, en application de la loi no 1 de 2010 (loi relative à l’organisation de radiodiffusion et de télévision de Sierra Leone − 2009). Il a également présenté au Parlement un projet de loi relative à la liberté d’information, qui devrait être adopté avant la fin du mandat parlementaire.

Article 21

Le droit visé ici est garanti par l’article 26 de la Constitution, en vertu duquel il peut néanmoins faire l’objet de restrictions, d’une part, dans les cas où l’on peut raisonnablement penser qu’il met en péril la sécurité et l’ordre publics, la moralité publique ou la fourniture continue des biens et services essentiels à la vie de la collectivité et, d’autre part, pour protéger les droits et les libertés d’autrui.

La loi de 1965 relative à l’ordre public autorise également des restrictions au droit à la liberté de réunion pour certains motifs prévus par la Constitution.

La liberté de réunion est garantie, et notamment le droit de constituer des partis politiques et d’organiser des rassemblements. Cette liberté est également garantie par la loi relative à l’enregistrement des partis politiques. Ceux-ci, comme toute autre organisation ou association, doivent demander l’autorisation d’organiser des rassemblements publics. Le droit d’organiser ces rassemblements ne peut faire l’objet de restrictions que pour des raisons de sécurité publique et des consignes sont données à cet effet par la police. En Sierra Leone, pour organiser une manifestation ou une procession, par exemple, une demande doit être déposée auprès des services de police, qui doivent donner leur autorisation, ainsi que les consignes nécessaires, et se chargent d’assurer la sécurité.

Une manifestation violente a également eu lieu tout récemment dans la division administrative de Tonkolili. Les manifestants étaient des autochtones, qui protestaient contre les conditions dans lesquelles African Minerals, une société minière, opérait dans la région. Une enquête est en cours pour faire toute la lumière sur cette affaire.

Article 22

La liberté d’association est essentiellement garantie par l’article 26 (par. 1) de la Constitution. Elle englobe le droit de s’associer et de se réunir librement avec d’autres personnes, ainsi que le droit d’adhérer à un parti politique, à un syndicat ou à une association économique, sociale ou professionnelle, nationale ou internationale, quels qu’ils soient, afin de défendre ses intérêts. En plus des restrictions à ce droit prévues par la loi pour des raisons de sécurité publique ou pour protéger la santé et la moralité publiques, la Constitution dispose également que lorsqu’une loi, quelle qu’elle soit, impose des restrictions au droit de constituer des partis politiques ou réglemente l’organisation, l’enregistrement et le fonctionnement de ces partis et la conduite de leurs membres, ces dispositions ne sont pas considérées comme incompatibles avec l’article 26.

En Sierra Leone, pour qu’une association ou organisation soit reconnue par l’État, elle doit être enregistrée auprès du Ministère des finances et du développement économique s’il s’agit d’une organisation non gouvernementale, et du Ministère de la protection sociale, de la parité et de l’enfance s’il s’agit d’une association ou organisation de tout autre type. Selon la nature des activités qu’elle envisage d’exercer, une organisation peut également être appelée à s’enregistrer auprès du ministère compétent (par exemple, auprès du Ministère de l’éducation s’il s’agit d’un organisme éducatif). La procédure d’enregistrement est juste et ouverte à tous du moment que les activités de l’organisation ou association ne sont pas contraires à la loi. La Commission indépendante des médias réglemente la création et l’enregistrement des médias. Quant aux partis politiques, ils doivent être enregistrés auprès de la Commission d’enregistrement des partis politiques, conformément à la partie III de la loi de 2002 relative à l’enregistrement des partis politiques.

Bien que la liberté d’association soit effectivement garantie, elle peut faire l’objet de restrictions dans certains cas et des mesures sont donc prises par les autorités publiques pour surveiller les activités des associations, dans l’intérêt de la sécurité et de la moralité publiques. Par exemple, l’enregistrement d’associations ou d’organisations telles que les sectes n’est pas autorisé par le Ministère de la protection sociale. La police prend en outre des mesures restrictives pour réglementer les réunions, les célébrations, les rassemblements, etc., afin d’éviter les troubles et préserver ainsi la sécurité et l’ordre publics.

Les dispositions relatives à la constitution, à l’enregistrement et à la réglementation des partis politiques, ainsi qu’à la conduite de leurs membres, conformément aux articles 33 et 34 de la Constitution, sont contenues dans la loi no 3 de 2003 relative à l’enregistrement des partis politiques.

En outre, la Constitution garantit le droit d’appartenir à un parti politique. Avant l’adoption de la loi no6 de 1991, la Sierra Leone était un État monopartite. Dans le cadre de ce système de gouvernance, il n’existait qu’un seul parti, l’APC. L’adoption de la Constitution de 1991 a permis d’instaurer la démocratie. À la suite de cela, des élections multipartites devaient être organisées, qui n’ont pas eu lieu en raison d’un coup d’État militaire, fomenté par le NPRC. Pendant la période de préparation des élections, plusieurs partis politiques (23 au total) s’étaient constitués. Les élections ont toutefois été interrompues par le coup d’État. En 1996, des élections multipartites ont finalement eu lieu, qui ont marqué le retour de la démocratie en Sierra Leone. À l’heure actuelle, il existe 26 partis politiques, dont les principaux sont le SLPP, l’APC, le People’s Movement for Democratic Change (PMDC) et la National Democratic Alliance (NDA). Aucun parti politique n’est interdit à moins qu’il ne se conforme pas aux dispositions de la loi portant création de la Commission d’enregistrement des partis politiques. En plus d’être réglementées par la Commission d’enregistrement des partis politiques, les activités des partis sont également contrôlées par la présidence de la République et régies par un code de conduite (2003) relatif au fonctionnement des partis politiques, ainsi que par les lois électorales de 2002. Par ailleurs, face aux préoccupations suscitées par le manque de pouvoir de la Commission, on a entrepris de revoir la loi de 2003 portant création de cet organe de façon à en renforcer les dispositions, et les modifications apportées ont été approuvées par le Conseil des ministres. Le projet de modification devrait être présenté au Parlement dans les meilleurs délais.

La guerre civile qui a déchiré la Sierra Leone pendant dix ans a motivé la création de plusieurs organismes de défense des droits de l’homme, dont la plupart sont des ONG. Il existe une Association des organisations non gouvernementales (SLANGO) chargée de réglementer les activités de ces ONG. De son côté, le Gouvernement a créé en 1994 la Commission nationale pour la démocratie et les droits de l’homme, chargée de préparer le peuple sierra-léonais au processus de démocratisation et de se pencher sur diverses questions relatives aux droits de l’homme.

En 1991, l’Accord de paix de Lomé entre le Gouvernement sierra-léonais et le Front uni révolutionnaire prévoyait la création d’une commission des droits de l’homme. La Commission Vérité et réconciliation l’a rappelé dans ses recommandations. Aujourd’hui, la Sierra Leone a une Commission des droits de l’homme, créée par la loi y relative de 2004. En outre, le Ministère des affaires étrangères a signé en 2009 un Mémorandum d’accord avec le BINUCSIL en vue de la création d’un secrétariat aux droits de l’homme chargé de satisfaire à toutes les obligations juridiques et autres, internationales ou régionales, qui incombent à la Sierra Leone dans le domaine des droits de l’homme.

En outre, toute personne a le droit de former avec d’autres des syndicats pour protéger ses droits et ses intérêts. Il existe plusieurs syndicats qui défendent activement les droits des travailleurs, notamment les syndicats des enseignants, des mineurs ou encore des chauffeurs. Le Congrès des syndicats de Sierra Leone chapeaute l’ensemble des syndicats.

Pour protéger ce droit, il existe des lois réglementant la création des syndicats: il s’agit de la loi de 1962 relative aux syndicats, de la loi de 1991 portant réglementation des salaires et des relations du travail et de la loi de 1964 relative aux conflits syndicaux. Les syndicats sont relativement importants, de par leur structure et le nombre de membres, et ils se composent tous d’un président, d’un exécutif et d’un ensemble d’adhérents.

Un Tribunal du travail a été créé pour garantir le libre exercice des droits syndicaux et veiller à l’application des lois relatives aux syndicats. En sa qualité d’État membre de l’Organisation internationale du Travail, la Sierra Leone a également adopté des mesures concrètes destinées à protéger les droits et l’existence des syndicats.

Article 23

La Constitution, en son article 13 h), reconnaît l’existence de la famille. De plus, l’article 8 (par. 3, al. f) garantit la protection, la prise en charge et le bien-être des personnes âgées, des jeunes et des personnes handicapées, et protège contre la discrimination fondée sur le sexe dans le domaine de l’emploi.

La loi de 2007 relative aux droits de l’enfant protège la famille en général et l’enfant en particulier. La loi relative aux enfants et aux jeunes protège cette catégorie de personnes d’infractions telles que le viol, l’attentat à la pudeur et le travail forcé.

En outre, le Plan stratégique national de protection de la maternité protège la santé des femmes enceintes et des enfants âgés de 5 ans ou moins. Le Programme de soins médicaux gratuits permet également d’assurer la protection de la maternité. Aucune discrimination ne peut être exercée à l’égard des femmes pour des raisons liées à la maternité. Par ailleurs, la loi de 2007 relative aux mariages et divorces coutumiers protège les personnes contre les mariages forcés qui seraient fondés sur les coutumes et les pratiques traditionnelles. En général, le mariage, qu’il ait été contracté conformément à la loi relative au mariage chrétien, au droit musulman ou au droit civil, est l’union de deux adultes (âgés de 18 ans ou plus).

La Sierra Leone a également pris des mesures pour protéger les femmes dans de nombreux domaines, notamment pour qu’elles bénéficient de congés payés ou de congés accompagnés de prestations sociales et pour qu’elles ne puissent pas être licenciées, quelle que soit leur situation matrimoniale, pendant une période de temps raisonnable avant et après la naissance d’un enfant. Un projet de loi relative aux affaires matrimoniales, qui vise à protéger les femmes de toutes les formes de discrimination, a été élaboré. Une politique de discrimination positive a également été mise au point pour protéger et promouvoir les droits des femmes. De même, un grand nombre d’associations de femmes ont participé à l’élaboration de la stratégie de lutte contre le VIH et ce sont elles qui ont dirigé la campagne organisée en faveur de l’instauration d’un quota de 30 % de femmes au sein des organes décisionnels, conformément aux recommandations de la Commission Vérité et réconciliation. Par ailleurs, une révision de la loi relative au VIH/sida est en cours, l’objectif étant de protéger les femmes atteintes du virus, en particulier de toutes les formes de discrimination.

Toutefois, en dépit des progrès considérables qui ont été accomplis, notamment la signature et la ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, les dispositions de cet instrument n’ont pas été pleinement transposées dans le droit interne et certaines dispositions fondamentales destinées à protéger les femmes ne sont donc pas encore appliquées en Sierra Leone.

Article 24

En 2007, la Sierra Leone a transposé dans son droit interne la Convention relative aux droits de l’enfant, en adoptant la loi no7 de 2007 relative aux droits de l’enfant. Cette loi consacre les garanties énoncées dans le Pacte et la Convention. Elle permet de mieux garantir le respect des droits de l’enfant et renforcer les garanties prévues par d’autres lois devenues incomplètes à certains égards, par exemple la loi relative aux enfants et aux jeunes (chap. 44).

Article 25 

Le chapitre IV de la Constitution reconnaît le principe de la représentation du peuple. Il garantit l’enregistrement des électeurs, la création d’une commission électorale et d’une commission d’enregistrement des partis politiques, le scrutin secret, les référendums, la division du pays en circonscriptions et la tenue d’élections. Ces dispositions sont appliquées depuis l’instauration du régime démocratique.

La Constitution, en son article 23, garantit l’égalité devant la loi et l’égale protection de celle-ci. Elle dispose que toute personne accusée d’une infraction pénale doit être jugée par un tribunal impartial et compétent et avoir la possibilité de se défendre elle-même ou avec l’assistance d’un défenseur de son choix. En outre, tout accusé doit disposer des facilités nécessaires pour interroger devant un tribunal compétent les témoins à décharge, avoir la possibilité de faire appel aux services d’un interprète s’il ne comprend pas la langue employée au procès et bénéficier du temps et des facilités nécessaires pour préparer sa défense. En outre, tout accusé est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie.

Des textes de loi complémentaires garantissent aussi l’égalité devant la loi et l’égale protection de la loi consacrées dans la Constitution. Il s’agit des lois dites «lois de parité» (la loi sur la succession patrimoniale, la loi sur l’enregistrement du mariage et du divorce coutumiers et la loi sur la violence intrafamiliale), de la loi de 2009 sur les chefferies et de la loi relative au handicap.

Si la Constitution reconnaît théoriquement le droit à une égale protection de la loi, dans la pratique, celui-ci n’est pas toujours garanti. Il ne s’agit pas là d’une erreur de la part du législateur, mais un effet des coutumes et de la tradition, qui peuvent donner lieu à une discrimination et à une inégale protection de la loi dont les femmes sont les premières victimes.

Dans la pratique, par exemple, un grand nombre d’affaires sensibles traitées en milieu traditionnel sont jugées sur le territoire de la société Poro. Or, la société Poro est une société secrète exclusivement composée d’hommes; les femmes et les personnes qui n’en sont pas membres n’ont donc aucun accès à ce territoire. Ces affaires sont par conséquent jugées en l’absence des intéressés et, le plus souvent, en leur défaveur.

La loi sur la succession patrimoniale, adoptée en 2007, comprend quant à elle des dispositions discriminatoires à l’égard des enfants illégitimes. Au sens de l’article 2 de cette loi, le terme «enfant» désigne les enfants nés du défunt et de son épouse légitime ou nés hors mariage alors que le défunt était marié mais reconnus à la fois par celui-ci et par son épouse, ou encore nés du défunt alors que celui‑ci n’était pas marié et reconnus par celui‑ci. Un enfant illégitime, s’il est né alors que le défunt et son épouse étaient mariés, mais n’est pas reconnu par les deux époux en tant qu’enfant du défunt, ne peut pas faire valoir de droits au titre de cette loi. De même, la coutume veut que les enfants illégitimes n’aient pas le droit de se présenter aux élections des chefferies. En vertu de l’article 8 a) de la loi sur les chefferies, seuls peuvent prétendre au titre de chef les enfants légitimes d’un ayant droit ou, dans les cas où la tradition l’autorise, ceux ayant un lien de filiation maternelle ou paternelle direct avec un ayant droit.

Autre sujet de préoccupation, la Constitution prévoit le recours aux témoins, mais ne garantit pas la protection de ceux‑ci. Dans la pratique, cela porte atteinte au droit à une égale protection de la loi.

III.Conclusion

Dans le cadre des recherches et des consultations qui ont été effectuées en vue de l’établissement du présent rapport, la Sierra Leone a accompli des progrès, mais aussi fait face à des difficultés et à des contraintes. Le rapport présente très précisément les structures sur lesquelles repose la mise en œuvre du Pacte. À cet égard, il convient avant tout de citer la Constitution, qui protège les droits énoncés dans le Pacte. En tant qu’État partie, la Sierra Leone s’efforcera de remplir toutes les obligations qui lui incombent au titre du Pacte et de répondre aux demandes du Comité.

Annexes

I.État de la ratification, par la Sierra Leone, des conventions de l’Organisation internationale du Travail

Convention

Ratification

État

C5Convention sur l’âge minimum (industrie), 1919

15 juin 1961

Dénoncéele 10 juin 2011

C7Convention sur l’âge minimum (travail maritime), 1920

15 juin 1961

Dénoncéele 10 juin 2011

C8Convention sur les indemnités de chômage (naufrage), 1920

15 juin 1961

Ratifiée

C15Convention sur l’âge minimum (soutiers et chauffeurs), 1921

13 juin 1961

Dénoncéele 10 juin 2011

C16Convention sur l’examen médical des jeunes gens (travail maritime), 1921

13 juin 1961

Ratifiée

C17Convention sur la réparation des accidents du travail, 1925

13 juin 1961

Ratifiée

C19Convention sur l’égalité de traitement (accidents du travail), 1925

13 juin 1961

Ratifiée

C22Convention sur le contrat d’engagement des marins, 1926

15 juin 1961

Ratifiée

C29Convention sur le travail forcé, 1930

13 juin 1961

Ratifiée

C32Convention sur la protection des dockers contre les accidents (révisée), 1932

15 juin 1961

Ratifiée

C50Convention sur le recrutement des travailleurs indigènes, 1936

13 juin 1961

Ratifiée

C58Convention (révisée) sur l’âge minimum (travail maritime), 1936

13 juin 1961

Dénoncéele 10 juin 2011

C65Convention sur les sanctions pénales (travailleurs indigènes), 1939

13 juin 1961

Ratifiée

C81Convention sur l’inspection du travail, 1947

13 juin 1961

Ratifiée

C86Convention sur les contrats de travail (travailleurs indigènes), 1947

13 juin 1961

Ratifiée

C87Convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948

15 juin 1961

Ratifiée

C88Convention sur le service de l’emploi, 1948

15 juin 1961

Ratifiée

C94Convention sur les clauses de travail (contrats publics), 1949

15 juin 1961

Ratifiée

C95Convention sur la protection du salaire, 1949

15 juin 1961

Ratifiée

C98Convention sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949

13 juin 1961

Ratifiée

C99Convention sur les méthodes de fixation des salaires minima (agriculture), 1951

13 juin 1961

Ratifiée

C100 Convention sur l’égalité de rémunération, 1951

15 nov. 1968

Ratifiée

C101 Convention sur les congés payés (agriculture), 1952

15 juin 1961

Ratifiée

C105 Convention sur l’abolition du travail forcé, 1957

13 juin 1961

Ratifiée

C111Convention concernant la discrimination (emploi et profession), 1958

14 oct. 1966

Ratifiée

C119 Convention sur la protection des machines, 1963

21 avril 1964

Ratifiée

C125Convention sur les brevets de capacité des pêcheurs, 1966

06 nov. 1967

Ratifiée

C126Convention sur le logement à bord des bateaux de pêche, 1966

06 nov. 1967

Ratifiée

C138Convention sur l’âge minimum, 1973

10 juin 2011

Ratifiée

C144Convention sur les consultations tripartites relatives aux normes internationalesdu travail, 1976

21 janv. 1985

Ratifiée

C182Convention sur les pires formes de travail des enfants, 1999

10 juin 2011

Ratifiée

II. http://www.sierra-leone.org/Laws/1965-32.pdf : Loi de procédure pénale

III. http://www.sierra-leone.org/Laws/ constitution1991 .pdf : Constitution sierra ‑léonaise

IV. http://www.sierra-leone.org/Laws/High%20Court%20Rules.pdf: Règlement de la Haute Cour

V. http://www.sierra-leone.org/Laws/2007-21p.pdf : Loi sur la succession patrimoniale

VI. http://www.sierra-leone.org/Laws/2007-20p.pdf : Loi sur la violence intrafamiliale

VII. http://www.sierra-leone.org/Laws/2007-19p.pdf : Loi portant création de la Commission indépendante des médias

VIII. http://www.sierra-leone.org/Laws/2007-7p.pdf : Loi relative aux droits de l’enfant

IX. http://www.sierra-leone.org/Laws/2009-12.pdf : Loi sur les mines et les minerais

X. http://www.sierra-leone.org/Laws/2009-10.pdf : Loi sur les chefferies

XI. Loi de 2012 portant création de l’Agence nationale des minerais