Nations Unies

CRC/C/OPSC/TGO/CO/1

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

8 mars 2012

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Cinquante-neuvième session

16 janvier-3 février 2012

Examen des rapports soumis par les États parties en application du paragraphe 1 de l’article 12 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

Observations finales: Togo

1.Le Comité a examiné le rapport initial du Togo (CRC/C/OPSC/TGO/1) à sa 1681e séance (CRC/C/SR.1681), tenue le 24 janvier 2012, et a adopté à sa 1697e séance, tenue le 3 février 2012, les observations finales ci-après.

I.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’État partie ainsi que ses réponses écrites à la liste de points à traiter (CRC/C/OPSC/TGO/Q/1/Add.1). Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

3.Le Comité rappelle à l’État partie que les présentes observations finales devraient être lues conjointement avec les précédentes observations finales adoptées au sujet des troisième et quatrième rapports soumis par l’État partie au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/C/TGO/CO/3-4).

II.Observations générales

Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption des lois ci-après:

a)Loi no 2007-017 du 6 juillet 2007 portant Code de l’enfant;

b)Loi no 2006-010/PR du 13 décembre 2006 portant Code du travail;

c)Loi no 2005-009 du 3 août 2005 relative au trafic d’enfants au Togo.

5.Le Comité prend également acte avec satisfaction des mesures institutionnelles et politiques suivantes:

a)La création de la permanence téléphonique pour les enfants «Allo 111», le 14 janvier 2009;

b)Le Plan national d’action contre la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, en 2007.

III.Données

6.Le Comité note qu’un système national de collecte de données sur la protection de l’enfance a été mis en place par le Ministère des affaires sociales, mais il est néanmoins préoccupé par le fait que la collecte de données sur les infractions visées par le Protocole facultatif reste ponctuelle, fragmentée et très limitée, ce qui entrave considérablement la capacité de l’État partie à surveiller, évaluer et prévenir les infractions visées par le Protocole facultatif. Le Comité est également préoccupé de constater que la collecte de données est très dépendante des financements externes, ce qui empêche le pays de se l’approprier et nuit à sa viabilité.

7. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts en vue d’ élaborer et de mettre en œuvre un système global et coordonné de collecte de données intégrant l’analyse, le suivi et l’évaluation d’impact et couvrant tous les domaines prévus dans le Protocole facultatif , et de veiller à ce que ce système s’articule avec la collecte de données dans tous les domaines visés par la Convention relative aux droits de l’enfant. Les données devraient être ventilées, notamment par sexe, âge, nationalité , origine ethnique, région et catégorie socioéconomique , une attention particulière étant accordée aux enfants risquant tout particulièrement de devenir victimes des infractions visées par le Protocole facultatif. Des données devraient également être collectées sur le nombre de poursuites et de condamnations et ventilées en fonction de la nature de l’infraction. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à solliciter une aide technique, notamment auprès du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) , pour la mise en œuvre de la présente recommandation.

IV.Mesures d’application générales

Coordination et évaluation

8.Le Comité note que la Direction générale de la protection de l’enfance, qui dépend du Ministère de l’action sociale et de la solidarité nationale, est responsable de la coordination de la mise en œuvre du Protocole facultatif. Il est toutefois préoccupé par le grand nombre d’organismes publics ayant des fonctions de coordination liées à la mise en œuvre du Protocole facultatif et par le fait que les responsabilités ne sont pas clairement réparties entre ces organismes.

9. Le Comité recommande à l’État partie de rationaliser le travail des différents organes intervenant dans la protection des droits des enfants et de faire en sorte que le mécanisme de coordination pour la mise en œuvre du Protocole facultatif ait un statut élevé et une autorité suffisante , et soit doté des ressources humaines, techniques et financières requises pour coordonner efficacement les mesures prises par les différents secteurs et les différentes provinces. Le Comité demande également instamment à l’État de mettre en place des mécanismes d’orientation clairs et de veiller à ce que tou s les acteurs de la protection de l’enfant puissent travailler en harmonie pour prévenir la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et apporter une aide complète aux enfants qui ont subi des mauvais traitements ou qui ont été exploités.

Législation

10.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a adopté la loi no 2005-009 relative au trafic d’enfants au Togo le 13 août 2005. Il est cependant préoccupé par le fait que toutes les infractions visées par le Protocole facultatif ne sont pas dûment définies dans la législation de l’État partie.

11. Le Comité demande instamment à l’État partie de donner une définition claire de la vente d’enfants −  pratique qui s’apparente, mais n’est pas identique à la traite des personnes  − telle que définie aux articles 2 et 3 du Protocole et d’ interdire tous les cas de vente d’enfants.

Plan national d’action

12.Le Comité note avec préoccupation que la stratégie globale de lutte contre la traite des enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ainsi que le plan stratégique quinquennal national y relatif élaboré et validé par tous les partenaires en 2008 n’ont toujours pas été adoptés et qu’en l’absence d’une telle stratégie, ce sont surtout les organisations de la société civile qui prennent des mesures pour prévenir et combattre les infractions visées par le Protocole facultatif.

13. Le Comité demande instamment à l’État partie d’accélérer le processus d’adoption de la stratégie globale de lutte contre la traite d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants , ainsi que du plan stratégique quinquennal national y relatif , et de veiller à ce qu’il s soi en t bien intégré s dans la politique nationale de protection de l’enfan ce . L’État partie devrait veiller à ce que la stratégie prévoie des objectifs à moyen et à long terme afin de prévenir et de sanctionner toutes les infractions énoncées dans le Protocole facultatif. Le Comité demande également instamment à l’État partie d’allouer les ressources humaines, financières et techniques nécessaires à une application pleine et effective de la stratégie, en coopération avec les partenaires concernés, y compris la société civile. Le Comité recommande également à l’État partie de solliciter, notamment auprès du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et de l’UNICEF, une aide internationale à cet égard.

Diffusion et sensibilisation

14.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures de sensibilisation au Protocole facultatif prises par l’État partie dans le cadre de la campagne nationale menée en 2009 au moyen de cinémas numériques ambulants dans les zones à haut risque de traite d’enfants. Le Comité note néanmoins avec préoccupation qu’il n’existe pas d’activités de diffusion et de sensibilisation au Protocole facultatif globales et systématiques dans l’État partie, ce qui fait que le grand public, les enfants et les professionnels qui travaillent avec les enfants et pour eux connaissent mal les infractions visées par le Protocole facultatif. Le Comité est également préoccupé par le fait que la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants restent largement invisibles et passées sous silence dans l’État partie du fait que tout ce qui touche à ces infractions est très sensible pour des raisons socioculturelles.

15. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’élaborer , en étroite collaboration avec la communauté, les enfants et les enfants victimes, des programmes d’information et d’éducation sur les mesures de prévention et les effets délétères de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants;

b) De diffuser le Protocole facultatif auprès de toutes les catégories professionnelles concernées, en particulier les policiers, les juges, les procureurs, les représentants des médias et les travailleurs sociaux, ainsi qu’aux membres des c omités de protection de l’enfance et du Conseil national des droits de l’homme;

c) De mener des études approfondies dans différentes régions et au sein de divers groupes socioculturels afin de définir précisément les obstacles auxquels se heurtent les activités de sensibilisation et de mobilisation relatives aux infractions visées par le Protocole facultatif et de déterminer les possibilités offertes en la matière.

Formation

16.Le Comité note que l’État partie a reconnu que la formation spécialisée dispensée aux juges, aux procureurs, aux policiers, aux travailleurs sociaux, aux prestataires de santé, au personnel des médias et autres professionnels était inadaptée, tant sur le plan qualitatif que sur le plan quantitatif. Le Comité note également avec préoccupation que l’État partie n’a pas donné d’informations précises sur les mesures qu’il entend adopter pour remédier à ces carences.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour que tous les professionnels travaillant pour et avec des enfants , et en particulier les juges, les membres des forces de l ’ ordre, les enseignants, le personnel de santé , et les travailleurs sociaux et le personnel de toutes les structures de protection de remplacement, reçoivent une formation systématique et adaptée aux dispositions du Protocole facultatif.

Allocation de ressources

18.Le Comité note que des subventions annuelles sont affectées à la prise en charge des enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif mais regrette de ne pas disposer d’informations permettant de savoir exactement quels crédits budgétaires sont consacrés aux activités entreprises expressément aux fins de la mise en œuvre du Protocole facultatif par les ministères concernés, notamment par le Ministère de l’action sociale et de la solidarité nationale. Le Comité note également avec préoccupation que la forte baisse du budget consacré aux secteurs de la santé et de l’éducation et le niveau de corruption élevé que connaît l’État partie continuent de détourner les ressources déjà limitées consacrées à la mise en œuvre du Protocole facultatif.

19. Le Comité rappelle sa recommandation visant à accorder la priorité aux crédits budgétaires permettant la mise en œuvre des droits économiques, sociaux, culturels et autres des enfants (CRC/C/Add. 255, par. 18 a)) et recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures possibles pour que le Ministère de l ’ action sociale et de la solidarité nationale , et particulièrement sa D irection générale de la protection de l ’ enfance, les forces de l ’ ordre et les travailleurs sociaux disposent des ressources suffisantes pour mener à bien leurs activités relatives à l’application du Protocole facultatif. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de prendre des mesures dynamiques et concrètes pour lutter contre la corruption.

V.Prévention de la vente d’enfants, de la prostitutiondes enfants et de la pornographie mettant en scènedes enfants (art. 9, par. 1 et 2)

Mesures adoptées pour prévenir les infractions visées par le Protocole facultatif

20.Le Comité prend note des programmes de réduction de la pauvreté visant spécifiquement les femmes et les enfants, ainsi que des activités de sensibilisation destinées aux chefs traditionnels. Il est cependant préoccupé de constater que les mesures administratives et les politiques et programmes sociaux ne suffisent pas à empêcher les enfants de devenir victimes de telles infractions. Le Comité est particulièrement préoccupé de constater que:

a)La moitié des enfants de l’État partie ne sont pas enregistrés à la naissance, ce qui leur fait courir un grand risque de devenir victimes de la vente, de la prostitution et de la pornographie;

b)Peu de mesures ont été prises pour lutter contre la discrimination et la violence sexistes, qui jouent un rôle déterminant dans la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. À cet égard, le Comité est très préoccupé par l’ampleur des violences sexuelles commises par des enseignants de sexe masculin sur des écoliers dans l’État partie;

c)Très peu d’activités spécifiques ont été menées à l’intention d’enfants vulnérables, comme les enfants des rues, qui sont particulièrement exposés à l’exploitation sexuelle et la plupart de ces activités ont été menées par des organisations non gouvernementales.

21. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour que tous les enfants soient enregistrés à la naissance afin de contribuer à éviter qu’ils soient victimes de vente, de prostitution ou de pornographie;

b) De mener des recherches sur la nature et l ’ ampleur de la vente d ’ enfants, de la prostitution d es enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants, afin d’en définir les causes profondes , notamment la pauvreté, les pratiques préjudiciables et l ’ absence de protection parentale;

c) De prendre des mesures efficaces pour identifier les groupes d ’ enfants, notamment les filles, les enfants vivant dans une pauvreté extrême et les enfants des rues, qui risquent d’être victimes d’infractions visées dans le Protocole facultatif et pour leur fournir l ’ aide et le soutien nécessaires;

d) De mettre un terme à la discrimination et à la violence sexistes et notamment d’abroger les lois discriminatoires à l’égard des femmes qui sont toujours en vigueur et d’incriminer sans plus attendre la violence intrafamiliale, y compris le viol conjugal.

Tourisme pédophile

22.Le Comité note avec préoccupation que le tourisme pédophile se développe et que l’État partie n’a toujours pas adopté les mesures nécessaires pour prévenir et combattre ce phénomène.

23. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de prendre des mesures plus concrètes pour prévenir le tourisme pédophile dans le pays et de traiter les affaires de tourisme pédophile. Le Comité exhorte notamment l ’ État partie à mettre sur pied des programmes de sensibilisation de grande ampleur, notamment sous la forme de campagnes, à l’intention des touristes . Il engage également l ’ État partie à travailler en étroite collaboration avec les voyagistes , les médias, les organisations non gouvernementales et les organisations de la société civile , à diffuser largement le Code mondial d ’ éthique du tourisme de l ’ OM T auprès des agences de voyage et de tourisme et à encourager celles-ci à signer le Code de conduite pour la protection des enfants contre l ’ exploitation sexuelle dans le tourisme et l ’ industrie des voyages.

VI.Interdiction de la vente d’enfants, de la pornographie mettant en scène des enfants et de la prostitution des enfants et questions connexes (art. 3, 4, par. 2 et 3, 5, 6 et 7)

Lois et réglementations pénales en vigueur

24.Le Comité note avec préoccupation que:

a)L’infraction de vente d’enfants n’est pas clairement définie dans le Code des enfants;

b)La prostitution d’enfants de plus de 15 ans n’est pas considérée comme une infraction;

c)Il n’existe pas de circonstance aggravante pour la pornographie mettant en scène des enfants;

d)C’est à la victime qu’incombe la charge de la preuve.

25. Le Comité demande instamment à l ’ État partie d e revoir les dispositions de sa législation interne afin de s’assurer de leur pleine conformité avec les d ispositions du Protocole facultatif. L ’ État partie devrait notamment:

a) Définir et incriminer la vente d ’ enfants, conformément au Protocole facultatif, notamment la vente d ’ enfants aux fins d ’ adoption illégale, de soumission de l ’ enfant au travail forcé et de transfert d ’ organes de l ’ enfant à titre onéreux, en application des paragraphes 1 a) i) b) et c), 1 a) ii) de l ’ article 3 et de l ’ article 5 du Protocole facultatif;

b) F aire en sorte que la prostitution d ’ enfants soit toujours considérée comme une infraction et sanctionnée par des peines proportionnelles à la gravité de l ’ infraction;

c) Revoir les dispositions pénales concernant la pornographie mettant en scène des enfants pour les rendre pleinement conformes aux articles 2 et 3 du Protocole facultatif; et

d) Veiller à ce que la charge de la preuve incombe aux auteurs d’actes visés par le Protocole facultatif.

26.Le Comité relève avec une vive préoccupation que des enfants sont exploités sexuellement sur tout le territoire de l’État partie, dans différents lieux, comme des hôtels ou des maisons closes, et que ce phénomène est en pleine croissance. Le Comité note également avec une profonde préoccupation qu’il n’existe pas de système pour détecter et fermer les maisons closes et autres lieux de prostitution et d’arrêter les souteneurs et leurs complices, ni de mécanisme permettant de lutter efficacement contre la production et la diffusion de documents qui font la publicité de pratiques prohibées par le Protocole facultatif, comme la pornographie mettant en scène des enfants. Le Comité est également préoccupé par la pratique très répandue des mariages précoces et de mariages forcés, notamment des mariages d’enfants en l’échange du versement d’une dot ou en remboursement d’une dette et de la pratique du «confiage», qui s’assimile dans de nombreux cas à la vente d’enfants.

27. Le Comité exhorte l ’ État partie à prendre des mesures plus volontaristes pour que la législation interdisant la prostitution des enfants soit effectivement appliquée. Il demande notamment à l ’ État partie de mettre rapidement en place un système efficace pour déceler et fermer les maisons closes et autres lieux de prostitution des enfants et de lutter contre la production et la diffusion de documents faisant la publicité de pratiques prohibées par le Protocole facultatif , telles que la pornographie mettant en scène des enfants. À cette fin, l ’ État partie devrait allouer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à ses forces de police. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour mettre un terme à tou tes les pratiques qui s’assimilent à la vente d ’ enfants.

Impunité

28.Le Comité est très préoccupé d’apprendre qu’à ce jour personne n’a été poursuivi en application des dispositions du Code des enfants qui interdisent la prostitution des enfants et que les poursuites engagées contre les auteurs d’autres infractions visées par le Protocole facultatif sont souvent abandonnées en raison de la corruption des fonctionnaires de l’application des lois, y compris des juges. Le Comité note avec une profonde préoccupation que les personnes qui exploitent sexuellement des enfants ont un tel sentiment d’impunité que des centaines d’enfants âgés de 9 à 15 ans continuent d’être ouvertement livrés à la prostitution dans la capitale, Lomé, notamment dans un lieu tellement connu qu’il est surnommé le «marché aux enfants».

29. Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour lutter contre l’impunité dont jouissent les auteurs d’infractions visées par le Protocole facultatif et de publier à cette fin, des instructions claires à l’intention de tous les procureurs afin qu’ils les poursuivent activement. L’État partie devrait également attirer l’attention des forces de l’ordre sur les sanctions encourues en cas d’inaction ou de corruption.

Compétence et extradition

30.Le Comité est préoccupé par le fait que les infractions visées par le Protocole facultatif ne sont pas expressément mentionnées dans la législation relative aux infractions commises à l’étranger et que la compétence extraterritoriale est subordonnée à la double incrimination. Le Comité est également préoccupé par le fait que l’État partie n’utilise pas le Protocole facultatif comme base juridique pour l’extradition.

31. Le Comité engage l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour que toutes les infractions visées au paragraphe 1 de l’article 3 du Protocole facultatif soient passibles d’extradition et que l’exigence de la double incrimination en vue de l’extradition et/ou de l’engagement de poursuites pour des infractions commises à l’étranger soit supprimée. Le Comité engage également l’État partie à utiliser, si nécessaire, le Protocole facultatif comme base juridique pour l’extradition, conformément à l’article 5 du Protocole.

VII.Protection des droits et intérêts des enfants victimes (art. 8et 9, par. 3 et 4)

Mesures adoptées

32.Le Comite relève avec satisfaction que l’État partie donne la priorité au placement des enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif dans des familles d’accueil, mais note avec préoccupation qu’aucune disposition juridique ne garantit la sécurité des enfants victimes ni des particuliers ou des membres des organisations de la société civile qui leur fournissent aide et protection, alors qu’ils font souvent l’objet de menaces. Le Comité est également particulièrement préoccupé par le fait que:

a)Le prix de l’examen des enfants victimes par un médecin est trop élevé et les victimes ou les organisations non gouvernementales qui les aident doivent verser une forte somme pour obtenir un certificat médical pouvant servir de preuve devant un tribunal. Les enfants qui sont concernés par une procédure pénale ne sont pas correctement informés et ne bénéficient pas de l’assistance d’un avocat;

b)Dans certains cas, les juges ont dévoilé des informations pouvant permettre à l’identification de l’enfant victime;

c)Bien qu’un fonds d’indemnisation ait été mis en place dans l’État partie, les enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif sont rarement indemnisés.

33. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter le cadre juridique et les mesures nécessaires pour assurer la protection des enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif ainsi que la sécurité des personnes ou des organisations qui leur fournissent protection et assistance. L’État partie devrait notamment:

a) Veiller à ce que les enfants victimes d’exploitation sexuelle aient gratuitement accès aux services médicaux et puissent se voir délivrer gratuitement un certificat médical;

b) Veiller à ce que toutes les victimes de vente d’enfants, de prostitution des enfants et de pornographie mettant en scène des enfants concernées par une procédure pénale disposent des informations nécessaires et soient assistées par un avocat à tous les stades de la procédure;

c) Prendre toutes les mesures nécessaires, notamment élaborer des programmes et des campagnes de sensibilisation ciblant les professionnels, y compris les juges, les procureurs, les policiers, les travailleurs sociaux, le personnel des services de santé et les autres professionnels travaillant avec des enfants victimes ainsi que la société dans son ensemble, pour faire en sorte que les informations personnelles pouvant permettre à l’identification des enfants victimes ne soient pas dévoilées publiquement et que les enfants victimes ne soient pas exposés à la stigmatisation et à la marginalisation sociale;

d) Renflouer le Fonds national d’indemnisation et veiller à ce que les enfants victimes qui n’ont pas obtenu d’indemnisation de la part des auteurs d’infractions puissent être pleinement indemnisés par ce Fonds;

e) Veiller à ce que tous les professionnels reçoivent une formation sur la manière de respecter la sensibilité des enfants victimes et témoins à tous les stades des procédures judiciaires et pénales, conformément au paragraphe 1 de l’article 8 du Protocole facultatif et aux Lignes directrices des Nations Unies en matière de justice dans les affaires impliquant des enfants victimes et témoins d’actes criminels (résolution 2005/20 du Conseil économique et social, annexe).

Rétablissement et réinsertion

34.Le Comité est préoccupé par l’absence de procédure claire et de service d’orientation pour la protection et la prise en charge des enfants victimes d’exploitation ou de violence sexuelle et par l’improvisation qui en résulte dans la prise en charge de ces enfants. Le Comité est également préoccupé de constater que les mesures de rétablissement physique et psychologique sont presque exclusivement le fait d’organisations non gouvernementales.

35. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que des ressources humaines, financières et techniques suffisantes, ainsi que des services de qualité soient mis à disposition pour venir en aide à tous les enfants victimes d’exploitation ou de violence sexuelle, notamment en vue de leur pleine réinsertion sociale et de leur rétablissement physique et psychologique, conformément au paragraphe  3 de l’article 9 du Protocole facultatif.

VIII.Assistance et coopération internationales

36. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer la coopération internationale au moyen d’accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux visant à prévenir toutes les infractions visées par le Protocole facultatif, à diligenter des enquêtes sur ces infractions et à poursuivre et punir les auteurs d’actes relatifs à la vente d’enfants, à la prostitution d’enfants, à la pornographie mettant en scène des enfants et au tourisme pédophile. À cet égard, le Comité encourage l’État partie à mettre en œuvre le Plan d’action régional (2008-2011) de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) visant à lutter contre le trafic de drogues, la criminalité organisée et la toxicomanie en Afrique de l’Ouest.

37. Le Comité encourage l’État partie à poursuivre sa collaboration avec les organismes et programmes des Nations Unies , ainsi qu’avec des organisations non gouvernementales , en vue de l’élaboration et de la mise en œuvre de mesures visant à une application effective du Protocole facultatif.

IX.Suivi et diffusion

Suivi

38. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures appropriées pour assurer l’application intégrale des présentes recommandations, notamment en les communiquant au chef de l’État, à la Cour suprême, au Parlement, aux ministères concernés et aux autorités locales, pour examen et suite à donner.

Diffusion des observations finales

39. Le Comité recommande que le rapport et les réponses écrites de l’État partie ainsi que les présentes recommandations finales soient largement diffusés, notamment (mais pas exclusivement) par Internet auprès du grand public, des organisations de la société civile, des associations de jeunes, des associations professionnelles et des enfants, afin de susciter un débat et de faire connaître le Protocole facultatif, son application et son suivi.

X.Prochain rapport

40. Conformément au paragraphe  2 de l’article 12, le Comité invite l’État partie à faire figurer des informations complémentaires sur la mise en œuvre du Protocole facultatif et des présentes observations finales dans son prochain rapport périodique au titre de la Convention, attendu le 1 er  septembre 2017, conformément à l’article 44 de la Convention.