Nations Unies

CRC/C/OPSC/ALB/CO/1

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

6 décembre 2012

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ enfant

Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographiemettant en scène des enfants

Observations finales concernant le rapport initial de l’Albanie,adoptées par le Comité à sa soixante et unième session(17 septembre-5 octobre 2012)

1.Le Comité a examiné le rapport initial de l’Albanie au titre du Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/ALB/1) à sa 1740e séance, le 26 septembre 2012, et a adopté à sa 1754e séance (CRC/C/SR.1754), le 5 octobre 2012, les observations finales ci‑après.

I.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’État partie et ses réponses écrites à la liste des points à traiter (CRC/C/OPSC/ALB/Q/1/Add.1). Cependant, tout en prenant acte des informations supplémentaires fournies par l’État partie à l’issue du dialogue, le Comité regrette l’absence de représentants du Ministère de la justice au sein de la délégation de l’État partie, ce qui a eu pour conséquence d’entraver le dialogue sur certaines questions relatives au Protocole facultatif, et plus particulièrement celles touchant au domaine judiciaire.

3.Le Comité rappelle à l’État partie que les présentes observations finales doivent être lues conjointement avec les observations finales concernant les deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques de l’État partie au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant, présentés en un seul document (CRC/C/ALB/CO/2-4), ainsi qu’avec celles concernant le rapport initial de l’État partie au titre du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/ALB/CO/1), adoptées le 5 octobre 2012.

II.Observations générales

Aspects positifs

4.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a adhéré aux instruments internationaux ci-après ou les a ratifiés:

a)Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en décembre 2008;

b)Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, en avril 2009;

c)Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, en mai 2007;

d)Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, en février 2007;

e)Convention sur la cybercriminalité, en juin 2003, et son Protocole additionnel relatif à l’incrimination d’actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques, en novembre 2004;

f)Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en août 2002;

g)Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, en août 2002;

h)Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en août 2002;

i)Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, en septembre 2000.

5.Le Comité prend acte de l’adoption des mesures institutionnelles et politiques ci‑après concernant la mise en œuvre du Protocole facultatif:

a)Création de l’Unité antitraite, rattachée au Bureau national du Coordonnateur auprès du Ministère de l’intérieur, en décembre 2005;

b)Plan national d’action concernant lalutte contre la traite des êtres humains et son document additionnel − lePlan national d’action concernantlalutte contre la traite des enfants et la protection des enfants victimes de la traite pour la période 2011-2013, en février 2011;

c)Accord bilatéral avec la Grèce sur la protection et l’assistance aux enfants victimes de la traite, signé en février 2006.

III.Collecte des données

6.Tout en notant que, depuis 2008, l’État partie collecte les données relatives à la traite des êtres humains, le Comité déplore que ces données ne concernent que les cas de traite et qu’il n’existe pas de système intégré et centralisé de collecte des données sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ni sur les enfants en général.

7. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir un système global de collecte systématique de données , afin d ’ analyser, de surveiller et d ’ évaluer avec exactitude l ’ impact des lois, des politiques et des programmes dans tous les domaines visés par le Protocole facultatif. Ce s données porteraient aussi bien sur les auteurs que sur les victimes d ’ actes de vente d ’ enfants, de prostitution des enfants et de pornographie mettant en scène des enfants. Les données devraient être ventilées, notamment, par nature de l ’ infraction, âge, sexe, zone urbaine ou ru rale, origine ethnique et socio économique, et en prêtant une attention spéciale aux enfants particulièrement exposés aux infractions visées par le Protocole facultatif. Le Comité recommande également à l ’ État partie de mettre en place un système d ’ indicateurs communs p our la collecte de données dans l ’ ensemble de ses É tats et territoires.

IV.Mesures d’application générales

Législation

8.Tout en saluant les efforts déployés par l’État partie pour intégrer diverses dispositions du Protocole facultatif dans la législation nationale, le Comité est préoccupé par le fait que ces efforts ont été exclusivement axés sur la traite des êtres humains et la prostitution. Le Comité note en outre avec préoccupation que la législation en vigueur ne porte pas expressément sur toutes les infractions visées par le Protocole facultatif, et que la définition de la vente d’enfants figurant dans la législation de l’État partie n’est pas conforme à celle du Protocole facultatif.

9. Le Comité demande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour incorporer pleinement le Protocole facultatif dans son droit interne. Le Comité lui recommande de modifier la définition de la vente d ’ enfants consacré e par la législation nationale, qui s ’ apparente mais n ’ est pas identique à la traite des personnes, pour que les dispositions du Protocole facultatif relatives à la vente d ’ enfants puissent être correctement appliquées.

Plan national d’action

10.Tout en prenant note du Plan national d’action concernant lalutte contre la traite des êtres humains et de son document additionnel− lePlan national d’action concernant lalutte contre la traite des enfants et la protection des enfants victimes de la traite pour la période 2011‑2013 −, ainsi que d’autres stratégies nationales relatives à la traite, le Comité constate avec préoccupation que ni le Plan national d’action ni les stratégies nationales ne couvrent l’ensemble des dispositions du Protocole facultatif. Le Comité est en outre préoccupé par le manque de ressources nécessaires à leur mise en œuvre, l’imprécision dans la répartition des responsabilités entre les organes gouvernementaux et les mécanismes pour ce qui est de la mise en œuvre efficace du Plan d’action et des stratégies nationales, ainsi que par l’insuffisance des mesures prises pour en évaluer les effets.

11. Renvoyant à ses observations finales au titre de la Convention (CRC/ C/ ALB/2 ‑ 4, par. 11 et 12), le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intégrer dans son Plan d ’ action en faveur de l ’ enfance 2012-2015 un programme d ’ action global axé spécifiquement sur tous les domaines visés par le Protocole facultatif, et de mobiliser toutes les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à sa mise en œuvre. Au cours de ce processus, le Comité recommande à l ’ État partie de prendre en considération l ’ évaluation et l ’ examen des projets inclus dans le Plan d ’ action et les stratégies nationales existants concernant la traite. En outre, le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à l ’ application effective de toutes les dispositions du Protocole facultatif en tenant compte de la Déclaration et du Programme d ’ action ainsi que de l ’ Engagement mondial, adoptés lors des premier, deuxième et troisième Congrès mondiaux contre l ’ exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales , tenu s à Stockholm, Yokohama et Rio de Janeiro en 1996, 2001 et 2008 , respectivement .

Coordination et évaluation

12. Renvoyant aux paragraphes 13 et 14 de ses observations finales au titre de la Convention (CRC/C/ALB/2-4, par. 13 et 14), le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place un mécanisme institutionnel ayant la responsabilité générale de la coordination et de la mise en œuvre du Protocole facultatif, qui pourrait faire office d ’ Agence nationale de protection des droits de l ’ enfant, en vue d ’ assurer une coordination efficace entre les ministères et les autres organes et partenaires gouvernementaux en ce qui concerne l ’ application de toutes les dispositions du Protocole facultatif.

Diffusion et sensibilisation

13.S’il juge positive l’importance que l’État partie accorde à la diffusion de l’information concernant la traite des êtres humains et à la sensibilisation à ce phénomène, le Comité constate avec préoccupation que le Protocole facultatif n’a pas fait l’objet d’une promotion et d’une diffusion suffisantes. Le Comité est préoccupé par le fait que les enfants qui sont particulièrement exposés à la vente, à la prostitution et à la pornographie, notamment les enfants appartenant à des groupes minoritaires et les enfants des rues, ainsi que leurs parents, n’ont pas la connaissance voulue des stratégies permettant de protéger les enfants en question contre ces violations.

14. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De d iffuser largement les dispositions du Protocole facultatif auprès d u grand public , en particulier auprès des enfants et de leur famille , notamment en élaborant et en mettant en œuvre des programmes de sensibilisation à long terme, et en incorporant les dispositions du Protocole facultatif dans les programmes scolaires à tous les niveaux d ’ enseignement grâce à des supports pédagogiques adaptés, spécialement conçus pour les enfants;

b) D ’ i ntensifier et de favoriser, en coopération avec la société civile et les médias, et conformément au paragraphe  2 de l ’ article  9 du Protocole facultatif, la sensibilisation du grand public, notamment des enfants, en diffusant, par tous les moyens appropriés, des informations sur les effets néfastes de toutes les pratiques proscrites par le Protocole, et d ’ encourager la participation de la collectivité, notamment des enfants et des enfants victimes, filles et garçons, à ces programmes de sensibilisation, d ’ information et d ’ éducation.

Formation

15.Tout en notant que la formation à la lutte contre la traite des êtres humains est dispensée à l’intention de certains professionnels, le Comité regrette qu’elle ne soit pas systématique et n’englobe pas tous les domaines prévus par le Protocole facultatif, notamment la vente d’enfants.

16. Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer les activités de formation axées sur les droits des enfants dans tous les domaines prévus par le Protocole facultatif, à l ’ intention de tous les professionnels qui travaillent avec et pour les enfants, notamment les juges, les procureurs, les policiers, le personnel médical, les travailleurs sociaux, les médias et tous les autres professionnels concernés.

Affectation de ressources

17.Tout en notant que des ressources ont été allouées à la lutte contre la traite des êtres humains, le Comité est préoccupé par l’absence de ressources humaines, techniques et financières, qui soient plus particulièrement destinées à la mise en œuvre du Protocole facultatif.

18. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de faire en sorte que des ressources suffisantes soient affectées à la mise en œuvre de tous les domaines visés par le Protocole facultatif, en prévoyant en particulier les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à l ’ élaboration et à l ’ exécution de programmes visant la prévention, la protection, la réadaptation physique et psychologique et la réinsertion sociale des victimes, ainsi que les enquêtes sur les infractions visées par le Protocole et les poursuites contre les responsables.

V.Prévention de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scènedes enfants (art. 9, par. 1 et 2)

Mesures adoptées pour prévenir les infractions viséespar le Protocole facultatif

19.Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des mesures prises par l’État partie pour prévenir les infractions visées par le Protocole facultatif. Le Comité est particulièrement préoccupé par le manque d’attention portée à l’identification des causes et des risques à l’origine des infractions visées par le Protocole, notamment:

a)L’absence de définition juridique de l’expression «enfant à risque», et de base légale permettant d’intervenir dans les situations requérant d’urgence la protection des enfants, et de répondre aux besoins des enfants maltraités; l’absence de programmes ciblant spécifiquement les enfants à risque, tels que les enfants roms, les enfants des rues, les enfants placés en institution et, tout particulièrement les filles; et le manque de responsabilisation juridique des professionnels pour ce qui est de repérer et d’orienter les enfants ayant besoin de protection;

b)La violence à l’égard des enfants, notamment la violence sexuelle, qui est largement répandue et acceptée dans l’État partie;

c)L’insuffisance des dispositifs de protection sociale en place et le fait que de nombreuses familles démunies ne bénéficient d’aucune aide économique;

d)Le nombre élevé d’enfants réduits à la mendicité du fait de l’extrême pauvreté, et leur vulnérabilité accrue face aux infractions visées par le Protocole facultatif;

e)La situation des enfants de plus de 15 ans qui sont contraints de quitter les établissements d’accueil, sans bénéficier d’aucune aide de l’État partie et se trouvent ainsi exposés à l’exploitation sexuelle.

20. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les organes chargés du maintien de l ’ ordre et les centres de protection sociale planifient et mettent en œuvre de façon coordonnée des activités propres à prévenir les infractions visées par le Protocole facultatif. Plus particulièrement, l ’ État partie devrait:

a) Mener des travaux de recherche complets et pluridisciplinaires dans les différents groupes socioéconomiques et culturels sur la nature et l ’ ampleur de la vente d ’ enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants dans l ’ État partie et, à partir des résultats de ces travaux, adopter une stratégie globale et ciblée de prévention et de répression des infractions visées par le Protocole facultatif, axée sur l a détection des enfants à risque, notamment en fournissant une définition juridique de l ’ expression «enfant à risque» et en responsabilisant les professionnels pour ce qui est de repérer et d ’ orienter les enfants ayant besoin d ’ une protection;

b) Prendre des mesures dynamiques pour protéger les enfants de la violence, en particul ier à la maison;

c) Renforcer les mesures de réduction de la pauvreté et de protection sociale, notamment les plans de protection familiale, en faveur des familles défavorisées;

d) Prendre toutes les mesures requises pour remédier aux causes profondes de la mendicité forcée, notamment la pauvreté et la discrimination, et mener des activités de prévention systématiques pour lutter contre cette forme d ’ exploitation;

e) Repousser à 18 ans l ’ âge limite auquel les enfants peuvent rester en établissement d ’ accueil et veiller à ce que, par la suite, ces enfants reçoivent la formation, l ’ orientation et l ’ aide appropriées.

Tourisme pédophile

21.Le Comité note avec satisfaction que le Ministère de l’intérieur, le Ministère du tourisme, de la culture, de la jeunesse et des sports et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ont signé, en 2007, un mémorandum d’accord concernant la promotion du Code de conduite pour la protection des enfants contre l’exploitation sexuelle dans le tourisme et l’industrie des voyages, que de nombreuses entreprises ont signé ledit code et qu’une campagne de sensibilisation nationale aux points de passage des frontières et une campagne à l’intention des agences de voyage ont été menées. Toutefois, le Comité est préoccupé par l’absence de mesures au niveau local pour éviter que les enfants ne se retrouvent livrés au tourisme pédophile, et par l’absence de dispositions pertinentes dans les politiques nationales telles que la Stratégie de lutte contre la traite des êtres humains ou la Stratégie nationale en faveur des enfants.

22. Le Comité exhorte l ’ État partie à élaborer et à appliquer un cadre réglementaire efficace et à prendre toutes les mesures nécessaires, notamment des mesures législatives, administratives et sociales, afin de prévenir et d ’ éliminer le tourisme pédophile. À cet égard, le Comité encourage l ’ État partie à renforcer sa coopération internationale au moyen d ’ arrangements multilatéraux, régionaux et bilatéraux pour la prévention et l ’ élimination du tourisme pédophile. Le Comité exhorte également l ’ État partie à renforcer ses actions de sensibilisation aux effets préjudiciables du tourisme pédophile auprès des professionnels du tourisme, à diffuser largement le Code mondial d ’ éthique du tourisme de l ’ Organisation mondiale du tourisme (OMT) auprès des voyagistes et des agences de tourisme et à encourager ceux-ci à signer le Code de conduite pour la protection des enfants contre l ’ exploitation sexuelle dans le tourisme et l ’ industrie des voyages.

Pornographie mettant en scène des enfants

23.Le Comité accueille avec satisfaction les récentes initiatives de sensibilisation menées par l’État partie pour diffuser des informations sur la protection des enfants sur Internet. Cependant, le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a adopté aucune loi ou texte législatif prévoyant l’obligation d’empêcher la publication et la diffusion du matériel pédopornographique en bloquant automatiquement les fournisseurs d’accès.

24. Le Comité exhorte l ’ État partie à promulguer rapidement des lois afin d ’ ériger en infraction pénale le téléchargement ou la possession de matériel pédopornographique, et à empêcher efficacement la publication et la diffusion de ce matériel grâce à un mécanisme de surveillance bloquant automatiquement les fournisseurs d ’ accès en cause . Le Comité recommande en outre de prendre rapidement des mesures pour mettre en place une autorité centrale chargée de la sécurité sur Internet, de l ’ octro i des licences aux fournisseurs d ’ accès et des vérifications permettant de détecter l es contenus préjudiciables pour les enfants.

VI.Interdiction de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants (art. 3; 4, par. 2 et 3; 5; 6; 7)

Lois et réglementations pénales en vigueur

25.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’érige pas en infraction pénale la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ainsi qu’il est prévu aux articles 2 et 3 du Protocole facultatif. Le Comité est notamment préoccupé par le fait que la soumission d’un enfant au travail forcé n’est pas une infraction pénale de vente d’enfants, et que la possession de matériel pédopornographique n’est pas inscrite dans le Code pénal albanais.

26. Le Comité recommande à l ’ État partie de réviser son Code pénal pour le mettre en pleine conformité avec les articles 2 et 3 du Protocole facultatif. L ’ État partie devrait, en particulier, ériger en infraction pénale les actes suivants:

a) La vente d ’ enfants consistant à offrir, remettre ou accepter un enfant, quel que soit le moyen utilisé, aux fins d e l ’ exploitation sexuelle de l ’ enfant, d u transfert d ’ organes de l ’ enfant à titre onéreux ou de la soum ission de l ’ enfant au travail forcé, ou à obtenir indûment, en tant qu ’ intermédiaire, le consentement à l ’ adoption d ’ un enfant, en violation de l ’ instrument juridique relatif à l ’ adoption applicable ;

b) Le fait d ’ offrir, d ’ obtenir, de procurer ou de fournir un enfant à des fins de prostitution;

c) Le fait de produire, de distribuer, de diffuser, d ’ importer, d ’ exporter, d ’ offrir, de vendre ou de détenir des matériels pornographiques mettant en scène des enfants;

d) La tentative de commission de l ’ un quelconque de ces actes et la complicité dans sa commission ou la participation à celle-ci;

e) La production et la diffusion de matériels faisant la publicité de l ’ un quelconque de ces actes.

27.Tout en prenant note des informations selon lesquelles, conformément aux instruments internationaux ratifiés par l’État partie, les enfants exploités à des fins de prostitution ne peuvent pas faire l’objet de sanctions pénales, le Comité reste préoccupé par le fait que ce principe n’est pas expressément consigné dans les lois en vigueur.

28. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire rapidement le nécessaire pour que le Code pénal dispose expressément que les enfants exploités à des fins de prostitution ne peuvent pas faire l ’ objet de sanctions pénales.

Répression

29.Tout en prenant note des efforts engagés par l’État partie pour poursuivre les individus auteurs d’infractions de traite d’êtres humains impliquant des enfants, le Comité est préoccupé par le faible nombre de condamnations auxquelles ces poursuites ont donné lieu. Le Comité est également préoccupé par l’insuffisance des informations communiquées au sujet des cas signalés d’infractions visées par le Protocole facultatif, notamment d’informations sur les enquêtes, les poursuites et les sanctions infligées aux auteurs.

30. Le Comité exhorte l ’ État partie à faire le nécessaire pour que toutes les infractions visées par le Protocole facultatif fassent l ’ objet d ’ enquêtes et que leurs auteurs soient rigoureusement poursuivis et dûment sanctionnés s ’ ils sont reconnus coupables. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations précises sur les enquêtes menées , les poursuites engagées et les peines prononcées pour des infractions visées par le Protocole facultatif .

Responsabilité pénale des personnes morales

31.Le Comité constate avec préoccupation que la législation de l’État partie n’établit pas la responsabilité pénale des personnes morales, comme il est prévu au paragraphe 4 de l’article 3 du Protocole facultatif.

32. À la lumière du paragraphe 4 de l ’ article 3 du Protocole facultatif, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir la responsabilité des personnes morales pour toutes les infractions visées par le Protocole facultatif.

Juridiction extraterritoriale

33.Le Comité prend note avec satisfaction de l’application extraterritoriale de la législation pénale de l’État partie aux ressortissants étrangers en dehors du territoire de l’État, lorsqu’ils ont commis des infractions au préjudice de l’État partie ou de ses ressortissants, en rapport avec l’organisation de la prostitution, la traite des êtres humains, des enfants et des femmes, et la production de matériel pornographique. Cependant, le Comité est préoccupé par le fait que l’exercice de la compétence extraterritoriale pour les crimes commis par un ressortissant albanais sur le territoire d’un autre État est soumis à l’exigence de la double incrimination.

34. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour faire en sorte que sa législation interne lui permette d ’ établir et d ’ exercer sa compétence extraterritoriale sur l ’ ensemble des infractions visées par le Protocole facultatif , sans condition de double incrimination.

Extradition

35.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie ne peut demander l’extradition de l’auteur présumé d’une infraction que s’il existe un accord bilatéral ou multilatéral qui l’y autorise expressément.

36. Le Comité recommande à l ’ État partie de considérer le Protocole facultatif comme un fondement juridique de l ’ extradition lorsque aucun traité bilatéral n ’ est en vigueur à cet effet .

VII.Protection des droits des enfants victimes(art. 8; 9, par. 3 et 4)

Mesures adoptées pour protéger les droits et les intérêts des enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif

37.Le Comité relève avec satisfaction que, dans l’État partie, les enfants se livrant à la prostitution ne font pas l’objet de poursuites et de sanctions, mais sont placés en centre d’accueil. Cependant, le Comité est préoccupé par le fait que ces structures sont à vocation générale et ne répondent pas aux besoins spécifiques des enfants victimes d’exploitation sexuelle. En outre, bien que la loi no 10039 du 22 décembre 2008 sur l’aide juridique prévoie une aide juridique de première ligne et de deuxième ligne, le Comité s’inquiète de ce que seules les victimes participant à un programme de protection sociale puissent en bénéficier. Le Comité s’inquiète également de ce que les droits et les intérêts des enfants témoins ne soient pas garantis à toutes les étapes des procédures pénales.

38. Le Comité engage vivement l ’ État partie à établir des procédures et des normes claires en matière de prise en charge et de protection des enfants victimes et/ou témoins d ’ actes criminels. Il recommande en particuli er de fournir un soutien psychosocial, d ’ évaluer les cas en vue de déterminer quel est l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant concerné, de rechercher des solutions temporaires ou durables et de suivre l ’ enfant jusqu ’ à sa majorité . Le Comité recommande également à l ’ État partie de veiller à ce que tous les professionnels concernés bénéficient d ’ une formation sur la manière de respecter la sensibilité des enfants victimes et témoins à tous les stades des procédures judiciaires et pénales, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 8 du Protocole facultatif et aux Lignes directrices des Nations Unies en matière de justice dans les affaires impliquant des enfants victimes et témoins d ’ actes criminels (résolution 2005/20 du Conseil économique et social, annexe). En outre, le Comité invite instamment l ’ État partie à faire en sorte que toutes les victimes des infractions visées par le Protocole facultatif puissent bénéficier de l ’ aide juridique.

Réadaptation et réinsertion des victimes

39.Le Comité accueille avec satisfaction la loi no 10192 du 3 décembre 2009 sur la prévention et la répression de la criminalité organisée et de la traite par des mesures conservatoires sur les biens, qui a porté création d’un fonds spécial à vocation sociale destiné notamment à la réadaptation et à la réinsertion des victimes de la traite. Cependant, le Comité est profondément préoccupé par ce qui suit:

a)Les enfants ayant été victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales ne parviennent pas à briser le cercle vicieux de la maltraitance et, souvent, se mettent eux-mêmes à recruter des enfants à des fins de prostitution ou à exploiter la prostitution infantile;

b)Les mesures de l’État partie en faveur de la réadaptation et de la réinsertion se limitent aux victimes de la traite dans le cadre des affaires de criminalité organisée et ne prennent pas en compte comme il convient des besoins des victimes d’infractions de vente d’enfants, de prostitution des enfants et de pornographie mettant en scène des enfants, visées par le Protocole facultatif.

40. Le Comité exhorte l ’ État partie à prendre toutes les mesures appropriées pour assurer la réadaptation physique et psychologique et la réinsertion sociale des enfants victimes de toutes les infractions visées par le Protocole facultatif, et à veiller à ce que ces mesures soient mises en œuvre dans des conditions qui favorisent le respect de soi et la dignité de l ’ enfant. En outre, il recommande d ’ offrir aux enfants victimes un soutien approprié, notamment une aide à l ’ éducation et une assistance à la formation professionnelle, afin qu ’ ils puissent briser le cercle vicieux de la maltraitance.

VIII.Assistance et coopération internationales

41. À la lumière du paragraphe 1 de l ’ article 10 du Protocole facultatif , le Comité encourage l ’ État partie à continuer de renforcer la coopération internationale dans le cadre d ’ accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux, en particulier avec les pays voisins, notamment en renforçant les procédures et mécanismes visant à coordonner la mise en œuvre de ces accords, en vue de mieux prévenir tout acte visé dans le Protocole facultatif , d ’ en identifier les auteurs, d ’ enquête r sur eux , de les poursuivre et de les punir .

IX.Suivi et diffusion

42. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures de nature à assurer la mise en œuvre intégrale des présentes recommandations, notamment en les transmettant au Parlement, aux ministères concernés, en particulier au Ministère de la justice, à la Cour suprême et aux autorités locales concernées, pour examen et suite à donne r.

43. Le Comité recommande que le rapport initial et les réponses écrites de l ’ État partie et les recommandations adoptées à cet égard (observations finales) soient largement diffusés, notamment −  mais pas exclusivement − par Internet , auprès du grand public, des organisations de la société civile, des associations de jeunes, des organisations professionnel le s et des enfants, afin de susciter le débat et une prise de conscience au sujet du Protocole facultatif, de sa mise en œuvre et de son suivi.

X.Prochain rapport

44. Conformément au paragraphe 2 de l ’ article 12, le Comité prie l ’ État partie de faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre du Protocole facultatif et la suite donnée aux présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu ’ il soumettra au titre de la Convention relative aux droits de l ’ enfant, conformément à l ’ article 44 de la Convention.